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Livres choisis du XIXe au XXIe siècle

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LARDANCHET

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Librairie Lardanchet

100, rue du Faubourg-Saint-Honoré

75008 Paris

Tél. : 01 42 66 68 32 - Fax : 01 42 66 25 60

E-mail : [email protected]

www.lardanchet.fr

Références bancaires

Monte Paschi Banque

Compte n° 00001 05342497001 47

Crédit Coopératif

Compte n° 2100792760689

Photographies : © Studio Baraja

Impression : Drapeau-Graphic

© 2008 - Librairie Lardanchet

Le n° 34 est reproduit en couverture

Catalogue rédigé par Marie Meyer et Bertrand Meaudre

Correcteur : Guillaume Daban

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Livres Choisis

du XIXe au XXIe siècle

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Livres Choisis

du XIXe au XXIe siècle

Paris 2008

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1. FLAUBERT (G.). Madame Bovary. Mœurs de province. Paris, Michel Lévy Frères, 1857, fort vol. in-12, maroquin rouge janséniste, dos à nerfs, roulette dorée intérieure, tranches dorées sur témoins, chemise et étui gainés de maroquin rouge (Cuzin, Maillard dor.)

Édition originale.

En 1854, Flaubert s’attela à la rédaction de Madame Bovary sur les conseils de deux amis, Louis Bouilhet et Maxime du Camp, qui, consternés par le lyrisme de son précédent texte, La Tentation de Saint-Antoine, voulurent l’en guérir par un sujet plus prosaïque. Le canevas de son récit s’inspire très fidèlement de l’histoire véridique de Delphine Couturier, jeune fille mariée au brave officier de santé de Rey, qui, pour tromper son ennui, prit deux amants, et finit par s’empoisonner. Publié en deux volumes par Michel Lévy en 1857, l’ouvrage connut un retentissant succès, dû en partie à son procès. Fleuron du réalisme par l’exacte description du milieu normand, c’est pourtant par son style qu’il fit école. Tenant de l’Art pour l’art, devise de Théophile Gautier qu’il fit sienne, Flaubert polit ses phrases jusqu’à la perfection, évitant régulièrement les répétitions, clichés et hiatus, et élevant sa prose à la dimension poétique, par le phrasé, le rythme et les images. Il se dispensa de juger la conduite de ses personnages, dont le traitement l’accapara davantage, et décrivit, avec une rare impassibilité pour l’époque, les avatars de son héroïne. Personnage réaliste, voire antipathique, Emma se distingue néanmoins du commun par une qualité ordinairement associée dans la littérature sentimentale aux héroïnes du grand monde : l’aspiration sincère à un idéal. Flaubert sut, de ce personnage sensuel et neurasthénique, révéler le tragique insoupçonné des vies plus ordinaires.

Exemplaire sur vélin fort, seul et unique tirage sur grand papier. Le volume fut relié entre 1876 et 1881, période pendant laquelle Francisque Cuzin (1836-1890) autorisa Maillard à porter sa griffe sur les ouvrages dont il était chargé de la dorure. À la demande du Barbier de Tinan, Cuzin ajouta à l’exemplaire la suite des sept eaux-fortes gravées par le peintre Émile Boilvin, ici en épreuve sur hollande avant la lettre, pour l’édition de Lemerre de 1874. Non répertorié dans la liste Lambiotte, il est à grandes marges.

Provenance : Le Barbier de Tinan (Cat., 1885, n° 335) avec son ex-libris et sa devise « faire sans dire ». La famille de Tinan remonte au XVIIe siècle et compte de nombreuses personnalités qui firent carrière dans les armes et la marine. En 1765, Jean Jacques François Théodose Louis Barbier se fit appeler Le Barbier de Tinan, nom qui passa à la postérité. L’avant-dernier descendant de cette famille, le baron Maurice de Tinan (1842-1918), est le propriétaire tout indiqué de notre volume. Sa vie fut consacrée à la bibliophilie et à ses collections. Il fit appel au relieur Léon Lemardeley pour habiller la plupart de ses beaux livres. Ami de longue date de Félicien Rops, il possédait également toutes ses gravures. La mort prématurée de son fils, le célèbre écrivain Jean de Tinan (1874-1898), affidé de Pierre Louÿs et André Lebey, fit de lui le dernier survivant de l’illustre lignée.

René Dumesnil, La publication de Madame Bovary, pp. 31-43 ; J.-P. Goujon, Jean de Tinan, pp. 31-38.

2. FLAUBERT (G.). Madame Bovary. Mœurs de province. Paris, Michel Lévy Frères, 1857, 2 tomes en 2 vol. in-12, demi-chagrin vert à coins, dos à nerfs ornés, tranches mouchetées (reliure de l’époque).

Édition originale.

Exemplaire de qualité, à belles marges, relié en deux volumes à l’époque.

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2 - FLAUBERT

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3 - BAUDELAIRE

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3. BAUDELAIRE (Ch.). Lettre autographe signée à madame Aupick, datée [Paris] 22 août 1858, 2 pp. in-8°, enveloppe incluse timbrée et cachetée.

Elle est adressée à sa mère, laquelle porte le nom de son deuxième mariage avec le lieutenant-colonel Aupick, co-tuteur abhorré de Charles dès l’âge de 7 ans. À sa mort, elle s’est durablement installée à Honfleur dans leur petite maison de vacances, acquise en 1853 – la maison joujou, au dire du poète. L’adresse n’est pas précisée sur l’enveloppe, qui mentionne simplement Madame Aupick / Honfleur/ Calvados, car, comme l’explique Baudelaire à son éditeur dans une lettre du 14 mai 1858 : Honfleur est une adresse suffisante. La maison n’est pas dans une rue ; elle est dans une situation isolée. Ajoutez cependant, si vous voulez : chez Madame Aupick au-dessus de la dernière ligne ; mais est-ce nécessaire ?

Lettre caractéristique de la relation filiale de Baudelaire à sa mère, faite d’inquiétude, de tendresse et d’exaspération mêlées. De mauvais rêves l’ont alarmé à son sujet. La suppliant de passer outre la bizarrerie de sa démarche, il la presse de le rassurer au plus tôt ... Chère mère je te prie de ne pas prendre ma lettre pour une chose ridicule ou exagérée… Depuis quelques jours je rêve de toi, et… ces rêves sont d’une nature désagréable… la dernière fois, je t’ai vue malade, et je me suis vu moi-même te soignant. Il en est finalement résulté pour moi une véritable inquiétude. Écris-moi donc demain lundi (pour que j’aie la lettre mardi si tu te portes bien)... Plus prosaïque, il poursuit sur sa déception d’avoir manqué une décoration littéraire, dont la remise avait été ajournée suite au procès des Fleurs du mal. Il feint l’indifférence mais son dépit est manifeste : ... Pour parler avec franchise, les nominations récentes sont pour moi d’une nature si déplaisante que je suis enchanté de ne pas avoir été dans une fournée et surtout dans celle-là…

Provenance : Coll. Armand Godoy (n° 103 noté au crayon) ; Vente anonyme (Cat., Lettres autographes de Charles Baudelaire à sa mère, 1982, n° 101).

Baudelaire, Correspondance, La Pléiade, vol.1., pp. 512 et 987.

4. BAUDELAIRE (Ch.). Œuvres complètes. Paris, Michel Lévy Frères, 1868-1870, 7 vol. in-12, demi-maroquin havane à coins, dos à nerfs, couverture et dos, non rogné (Stroobants).

Première édition collective.Elle comporte en édition originale : Petits Poèmes en prose, Curiosités esthétiques (sauf « Les Deux Salons »), et L’Art romantique (sauf « Gautier et Wagner »).

L’exemplaire présente les particularité suivantes :

1 - Est relié à la fin du tome I : Compléments aux Fleurs du mal. Bruxelles, Chez tous les libraires, 1869, in-12 de 2 ff. et 36 pp.Contient les 6 pièces condamnées retirées de la première édition et qui n’avaient pas été réimprimées depuis.2 - Les couvertures des trois premiers tomes sont datées 1869.3 - La couverture du tome VIII est de couleur crème.

Exemplaire à toutes marges, relié par Stroobants, praticien qui exerça jusque dans les années 1920. Né à Paris en 1856, il fit son apprentissage chez Vignaux et Pasquier, puis travailla chez Camus, Lenegre et Bertrand. Après s’être établi à son compte, il succéda en 1904 à Champs, dont il reprit l’atelier rue Gît-le-Cœur.

Provenance : Fougerolles.

Carteret, I, p. 129 (« Il a été tiré quelques exemplaires sur hollande ») ; Clouzot, p. 28 (« Première édition collective, très importante, de plus en plus recherchée »).

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5. CORBIÈRE (T.). Les Amours jaunes. Paris, Glady Frères, 1873, in-12, maroquin citron à la bradel, sur le premier plat, initiales entrelacées et mosaïquées du nom et prénom de l’auteur, dos lisse, tête dorée, couverture, tranches jaunes (reliure de l’époque).

Édition originale.

En 1884, dans Les Poètes maudits, Verlaine révéla cette œuvre, passée totalement inaperçue lors de sa parution.Son amour de la mer, la souffrance que lui infligèrent son physique et sa surdité éclatent dans ces poèmes qui semblent guidés par des associations visuelles, où les surréalistes ont cru reconnaître les premiers essais d’écriture automatique.Le recueil a été publié aux frais du père de l’auteur, à qui il est dédié.

Un autoportrait gravé à l’eau-forte, en frontispice.

Exemplaire sur papier jonquille, seul et unique tirage sur grand papier ; celui-ci, justifié exemplaire d’auteur, porte la signature de Glady Frères, les éditeurs. À notre connaissance, des 9 recensés, il est le seul à présenter ces deux particularités. Il est non numéroté. Façonnée vers 1890, la reliure rappelle les productions de Meunier, notamment celles qu’il réalisa pour le collectionneur Massicot.

Provenance : Hayoit (ex-libris).

6. WILDE (O.). The Sphinx. London, E. Mathews & J. Lane at the sign of the bodley head, 1894, in-4°, vélin d’éditeur décoré.

Édition originale. Dédié à son ami Marcel Schwob, ce poème entrepris dès 1874 est l’un des plus élaborés de Wilde.

Un livre entièrement conçu par Charles Ricketts, qui avait précédemment collaboré à une édition de Picture of Dorian Gray en 1891 et de Poems l’année suivante.Illustrations au nombre de 10, initiales, mise en pages et dessin de la reliure sont de sa main. La couvrure a été exécutée par Leighton, Son and Hodge, dont le monogramme a été frappé sur le second plat.

Exemplaire du tirage à 200 réservés à l’Angleterre.Petites traces d’usure aux ors de la reliure.

Édition limitée à 250 exemplaires, imprimés par Ballantyne Press.

Mason, A Bibliography of Oscar Wilde, 361 ; […], The Turn of a Century, 1895-1900, Harvard University, n° 10.

7. GIDE (A.). Les Nourritures terrestres. Paris, Société du Mercure de France, 1897, in-8°, maroquin bleu janséniste, dos à nerfs, doublure de maroquin tabac sertie de filets dorés, couverture et dos, tranches dorées sur témoins, chemise et étui bordés de même maroquin (G. Mercier Sr de son Père. 1921).

Édition originale, dédiée à Maurice Quillot.

Texte de référence pour toute une génération de lecteurs, son influence, plutôt morale qu’esthétique, se retrouve chez de nombreux écrivains français, de Montherlant à Camus.Écrit sur un ton poétique, Gide présente son livre comme une apologie du dénuement, insistant sur le don de soi et la nécessité de l’effort personnel.

L’un des 5 premiers exemplaires sur papier du Japon, trois sont justifiés.

Parfaite condition.

Provenance : Raoul Simonson ; Robert Moureau.

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5 - CORBIÈRE

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8 - FREUD

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8. FREUD (S.). Die Träumdeutung. Leipzig and Vienna, Franz Deuticke, 1900, in-8°, demi-toile bleue à la bradel, dos lisse, doublure et gardes de papier à décor à répétitions, tranches marbrées (reliure de l’époque).

Édition originale.

« C’est par le rêve que la psychanalyse se révèle art d’interprétation. »Die Träudemeutung fut en effet le livre fondateur de la science psychanalytique à laquelle Sigmund Freud, neurologue réputé, travaillait depuis des années. Achevé, pour l’essentiel, en 1896, il parut le 4 novembre 1899, bien que l’éditeur l’ait postdaté 1900. Les ventes furent sans grand rapport avec l’immense retentissement qu’il connut par la suite : sur les 600 exemplaires, 123 partirent dans les deux mois qui suivirent la publication et 228 les deux années suivantes. L’ouvrage fut réédité une première fois en 1909 et une seconde en 1911. Il fut ensuite traduit en plusieurs langues. Récusant la conception du rêve comme un simple désordre cérébral ou une activité quelque peu surnaturelle, Freud le traduit de manière rationnelle, comme la réalisation déguisée d’un désir refoulé. Tout son travail d’analyse repose sur le postulat de l’inconscient, notion révolutionnaire dont il se fait le brillant interprète. Des concepts aussi célèbres que celui du complexe d’Œdipe sont ici exposés.Cette étude rigoureusement scientifique rend, paradoxalement, le rêve plus fascinant encore. Conscient d’être un pionnier, Freud compare son aventure à la descente aux Enfers de L’Enéide.

Exemplaire charmant dans une reliure viennoise de l’époque, très bien conservé.

J. Carter-P. H. Muir, Printed and the mind of man, 389 ; M. D. Haskell-F. Norman, One hundred books famous in medecine, 87 (« The first edition of the work consisted of six hundred copies »).

9. KOKOSCHKA (O.). Die Traümenden Knaben (Les Garçons rêveurs). Leipzig, Kurt Wolff, 1917, in-4° oblong broché à la chinoise, cartonnage de toile écrue, sur le premier plat vignette tirée en noir, cordons noirs de brochage (reliure d’éditeur).

Édition originale, dédiée à Gustave Klimt.

L’enfant terrible de l’intelligentsia viennoise. Oscar Kokoschka (1886-1980), formé à la Kunstgewerbeschule comme G. Klimt, son père spirituel, ne cessa de déranger, non seulement par ses peintures et ses écrits, mais aussi par son refus de respecter les convenances. Avec sa pièce, Mörder Hoffnung der Frauen (Assassin, espoir des femmes), qui fit scandale, il marqua de son empreinte l’histoire du théâtre expressionniste, tout comme il marqua avec son album Die Traümenden Knaben, l’histoire du livre.

Die Traümenden Knaben, un livre précurseur. Publié par la Wiener Werkstätte en 1908, premier livre de Kokoschka, l’ouvrage est le récit, d’une crudité inhabituelle, de son amour pour une jeune Suédoise. Suscitant de violentes réactions à Vienne, ce livre d’enfant se vendit fort mal. Les invendus, soit la majorité du tirage (500 ex.), furent rachetés par Kurt Wolff. En 1917, il les fit relier différemment (toile écrue, cordon noir de brochage, vignette tirée en noir), avec une étiquette de justification au troisième plat de couverture.Les exemplaires dans leur première reliure sont rares. 8 lithographies en couleurs d’Oscar Kokoschka et 3 lithographies en noir (dédicace, titre et vignette).Cette suite d’images annonce l’expressionnisme, notamment « La fille Li et moi », ultime planche de l’album.

Exemplaire en belle condition. Quelques petites maculatures en marge de trois feuillets.

Édition limitée à 275 exemplaires numérotés, tous sur le même papier.

Jentsch, Illustrierte Bücher des deutschen Expressionismus, 1.

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10. LOUŸS (P.) - LAURENS (P. A.). Lêda ou la louange des bienheureuses ténèbres. Paris, Mercure de France, 1898, in-4°, broché, couverture imprimée.

Première édition illustrée.

L’une des cinq nouvelles antiques de Pierre Louÿs. Dédiée à André Gide, Lêda ou la louange..., publiée en édition originale en décembre 1893 dans L’Art indépendant, est une nouvelle mythologique placée sous le signe de la nature et de l’eau. Son héroïne est « une jeune fille extraordinaire, qui était bleuâtre comme la nuit, mystérieuse comme la lune mince, et douce comme la voie lactée ». À travers cette nymphe qui n’est pas sans rappeler La Jeune Parque de Valéry, Louÿs décrit, parmi bien des symboles, l’éveil de la sensualité féminine. De l’union de Lêda avec Zeus, changé en cygne, naît un œuf bleu, duquel naîtra Hélène, incarnation de la beauté. Lêda cédera ensuite à un satyre, elle connaîtra ainsi l’amour humain puis l’amour divin. Il ne se dégage de ce texte aucune morale, il s’agit d’une rêverie poétique, la prose de Louÿs révélant son pouvoir de suggestion.

Une illustration symboliste. Paul-Albert Laurens (1870-1934), compagnon de route de Gide en Tunisie, suivit les cours de son père, le peintre d’histoire Jean-Paul Laurens, et ceux de Cormon et de Benjamin Constant. Dès 1891, il exposa au Salon des scènes de genre, mais ce sont surtout ses portraits de famille ou isolés (Gide, Copeau) que l’histoire retiendra. Il a brossé aussi des panneaux décoratifs pour la ville de Toulouse, et laissa un important travail d’illustrateur, au regard des relations qu’il noua avec les milieux littéraires. Pour Lêda, il conçut une illustration symboliste dans des tons bleus, formée d’initiales et de bandeaux. Par sa mise en pages et malgré son format, l’ouvrage n’est pas sans rappeler Le Voyage d’Urien.

Exemplaire sur vélin offert par Louÿs à Henri de Régnier :

à Henri de Régnierson ami

P[ierre]. L[ouÿs].

L’auteur, avec un certain sens de la provocation, ne manqua pas d’audace en offrant à son ami Henri de Régnier un exemplaire de sa Lêda, alors qu’il entretenait depuis 1897, à l’initiative de Marie de Régnier, une liaison avec cette dernière. En 1899, Louÿs épousa Louise de Hérédia, l’une des deux sœurs de Marie.

Édition limitée à 609 exemplaires.

Provenance : Henri de Régnier (1864-1936).

11. MARX (R.) & ROCHE (P.). La Loïe Fuller. Évreux, C. Hérissey, 1904, in-4°, cartonnage à la bradel de soie brochée à décor floral, dos lisse, couverture, non rogné (reliure ancienne).

Premier livre décoré de gypsotypie.

Édition originale de cet hommage à Loïe Fuller, artiste d’origine américaine qui s’est faite en France, comme elle aimait à le souligner. Soucieuse d’un certain esthétisme, elle apporta aux arts du spectacle plus par ses jeux de couleurs et de lumière que par sa danse. Artistes, poètes et écrivains tels que Mallarmé, Rodenbach, Jean Lorrain ou Auguste Rodin, assistaient régulièrement aux représentations qu’elle donnait.

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12 - KIPLING & JOUVE

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Pour accompagner son texte, l’auteur confia à l’élève de Rodin, Pierre Roche (1855-1922), de son vrai nom Fernand Massignon, le soin de l’illustrer. Ce dernier réalisa, avec un certain raffinement,une série de gypsotypies, estampes légèrement colorées sur fond nacré, obtenues grâce à un procédé d’impression utilisant des matrices en métal, technique qu’il avait mise au point à partir de ses gaufrages japonisants. Ainsi créa-t-il 19 gypsotypies, procédé qui ne fut réemployé que pour un seul autre ouvrage.

Le texte est imprimé avec les caractères italiques dessinés par G. Auriol, dont c’est ici leur première utilisation.

Exemplaire soigneusement monté sur onglets, dans un charmant cartonnage ancien de soie brochée.

Édition limitée à 130 exemplaires numérotés, tous sur vélin.

A. Coron, Des livres rares depuis l’invention de l’imprimerie, n° 234.

12. KIPLING (R.) & JOUVE (P.). Le Livre de la jungle. Le Second Livre de la jungle. Paris, Le Livre Contemporain, 1919, in-4°, maroquin vert bouteille, dos et plats ornés d’un décor à répétition de filets dorés mêlés à des serpents mosaïqués de maroquin vert soulignés de pastilles à froid, dos lisse avec titre en long, doublure et gardes de soie moirée verte, couverture et dos, tranches dorées, chemise et étui gainés de même peau (G. Cretté succ. de Marius Michel).

Traduction de Louis Fabulet et Robert d’Humières.

Célèbre édition qui marque à la fois l’apogée des sociétés de bibliophiles et la collaboration naissante Jouve-Schmied. Ce dernier su tirer parti de l’exceptionnelle liberté que lui laissa le peintre animalier dans la coloration des planches, qu’il réalisa pour la plupart, à l’exception d’une quinzaine. À cette occasion, il mit au point une nouvelle technique de gravure sur bois en couleurs où celles-ci étaient posées en tons plats.

130 bois, dont 17 hors-texte, de Paul Jouve, interprétés par F.-L. Schmied.

Exemplaire enrichi de 2 faux-titres justifiés 8/40 et signés par Schmied.

Reliure aux serpents, décor apprécié de G. Cretté (1893-1969).

Édition limitée à 125 exemplaires, tous sur vélin d’Arches.

Nasti, Schmied, pp. 91-92 ; M. Garrigou, Georges Cretté, pp. 167-168 (non cité).

13. VALÉRY (P.). Le Cimetière marin. Paris, Émile Paul Frères, 1920, in-8°, broché, couverture, étui.

Édition originale.

Paul Valéry, méditerranéen d’origine, voua, sa vie durant, un culte à la mer, qu’il immortalisa dans Le Cimetière marin.« La mer toujours recommencée et la mort toujours victorieuse furent les deux thèmes qui lui inspirèrent ses pages et ses vers les plus beaux. »Un passage imprimé en grec des Pythiques de Pindare, figure ici en épigraphe.

L’un des 49 exemplaires sur papier vélin à la forme d’Arches, second papier après 7 chine, justifiés à la main en chiffres romains.

Exemplaire en belle condition.

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14. CENDRARS (B.) & LÉGER (F.). La Fin du monde filmée par l’Ange N.-D. Paris, La Sirène, 1919, in-4°, maroquin orange, sur les plats, grand décor par la lettre (nom de l’auteur et titre de l’ouvrage) mosaïqué de box de diverses couleurs, doublure de papier argenté, couverture et dos, tête dorée (J. Anthoine-Legrain).

Édition originale.

« La Fin du monde filmée par l’Ange N[otre]-D[ame] avait été le scénario prévu par Cendrars pour paraître dans Le Livre du cinéma en 1918. Il paraît séparément cette année, illustré par Fernand Léger dans un mélange de typographie foisonnante et d’illustrations très colorées. Le volume est reconnu comme un modèle de la production de La Sirène mais aussi de la production éditoriale de cet immédiat après-guerre, en particulier pour sa modernité. Rachilde en rendra compte de façon amusante dans Le Mercure de France du 15 avril 1920 : « Un ange se mord férocement le doigt sur la couverture, comme s’il regrettait de s’y compromettre [...] Ça coûte 20 fr., et c’est pour rien, étant donné la somme de couleurs très rares dépensée. » (Pascal Fouché, La Sirène, p. 71).

Illustrations de Fernand Léger.Son amitié pour Cendrars avec lequel il partageait l’amour du cinéma, l’amena à collaborer avec le poète en illustrant ses textes, en 1918, avec J’ai tué, en 1919, avec La Fin du monde filmée par l’Ange N.-D.« Pour ce dernier, il conçut têtes de chapitres sur double page et illustrations de façon à faire date dans l’édition moderne. Les illustrations étaient des reproductions de dessins dont les couleurs furent ajoutées au pochoir d’après les indications précises du peintre… » (L. Saphire, Fernand Léger, L’Œuvre gravé, p. 11).

23 pochoirs en couleurs, 7 dessins reproduits au trait et un dessin, selon la même technique, sur la couverture.

Intéressante reliure décorée de Jacques Anthoine-Legrain, qui exerça des années 1930 à 1950. Les exemplaires de ce livre en reliure ancienne décorée et signée sont rares.

Exemplaire sur papier Registre Vélin Lafuma.

P. Fouché, La Sirène, n° 38 ; L. Saphire, Fernand Léger, L’Œuvre gravé, p. 299 ; Johnson-Stein, Artists’ Books in the Modern Era 1870-2000, The Riva and David Logan Collection, n° 26 (« A message of modernity is evident on every page of this bibliophilic masterpiece ») ; Y. Peyré, Peinture et Poésie, p. 116 (« Ce livre hors norme (son tirage excessif, ses moyens d’exécution) retentit très haut… Leur livre, si incompris, si merveilleux, est bien une production de magicien »).

15. RADIGUET (R.) & LAURENS (H.). Les Pélican. Paris, Galerie Simon, [1921], in-4°, broché, couverture.

Édition originale de cette comédie en deux actes, que Radiguet écrivit à 17 ans. Elle fut représentée pour la première fois le 24 mai 1921 au Théâtre Michel à Paris, lors d’un spectacle de théâtre bouffe composé d’un acte de Max Jacob, La Femme fatale, d’une courte pièce lyrique d’Erik Satie, Le Piège de méduse, d’un ballet-shimmy de Darius Milhaud, Caramel mou, et d’une seconde comédie. Enchanté par la légèreté d’une pièce qu’il jugeait semblable à une « rose » et une « bulle de savon », Cocteau demanda à Auric d’en composer la musique et à Jean Hugo d’en croquer les décors. Le public, en revanche, fut déçu par cette œuvre fantasque qui se moquait de la famille, par le dialogue fait de « quiproquos », de « réponses ne correspondant pas aux questions », de « plaisanteries faciles », là où il attendait « beaucoup plus de folie » et « des personnages éblouissants ».Elle fut reprise en 1951 au cabaret d’Agnès Capri.

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Premier livre illustré par le sculpteur Henri Laurens. Il réalisa pour l’occasion 7 eaux-fortes originales cubistes, dont une pour la couverture et deux à pleine page. Ces illustrations de dimensions très diverses courent à travers le texte, se mêlant à ce dernier avec harmonie.

L’un des 90 exemplaires sur papier de Hollande Van Gelder.

Édition limitée à 112 exemplaires, tous signés par l’auteur et l’illustrateur.

G. Latour, Les Extravagants du théâtre, pp. 87-91 ; Anisabelle Berès et Michel Arveiller, Henri Laurens, 1885-1954, n° 146-147 (« Laurens a merveilleusement utilisé l’espace dont il disposait, et il a su s’adapter à la légèreté du texte »).

16. RADIGUET (R.). Le Bal du comte d’Orgel. Paris, Bernard Grasset, [1924], in-12°, maroquin janséniste rouge, dos à nerfs, doublure de même peau sertie d’un large filet or, gardes de papier doré, couverture et dos, tranches dorées sur témoins (G. Huser).

Édition originale.

Préface de Jean Cocteau.

Renouant avec la tradition française des romans rapides et cruels, Radiguet légua à la postérité Le Diable au corps et Le Bal du comte d’Orgel, auquel il se mit à songer alors que le premier était toujours en chantier. En effet, dès 1921, les personnages du comte d’Orgel, de son épouse Mahaut et de François de Seyreux avaient pris corps dans son esprit, inspirés de proches comme le comte Étienne de Beaumont, dont les bals enchantaient alors Paris, Thora Dordel, la mère de Cocteau et lui-même !Des quatre versions qui se succédèrent, la première, de quatre cents pages, fut rédigée d’une traite aux côtés de Cocteau au Lavandou durant l’été 1922, lors de vacances qu’ils prolongèrent à Pramousquier. Par la suite, Radiguet ne cessa, sur les conseils de son mentor, de recopier, remanier et alléger l’épais manuscrit, qu’il retouchait encore l’été suivant à Piquey. Mort le 12 décembre 1923, il ne put l’achever, charge dont s’acquitta Cocteau. Le roman parut sept mois plus tard, publié par Bernard Grasset. Pour beaucoup d’écrivains, le Bal est le dernier classique de notre littérature. Il n’y a pas d’adultère à proprement parler entre la comtesse et François, mais le relâchement moral décrit par Radiguet avec goût et mesure choqua davantage. Jeux de miroir et attractions magnétiques doivent beaucoup à ce Paris des Années folles qu’il a personnellement sondé, et peut-être aussi, à Verlaine et Alain-Fournier.

L’un des 25 exemplaires sur papier japon.

Parfaite reliure doublée de G. Huser, le Brummel de la reliure, exécutée à la demande de J. Guérin.

Provenance : J. Guérin (Cat., 1986, n° 119) ; J. Lanssade (Cat. II, 1994, n° 138) ; Goldet (Cat., 2000, n° 130, « impeccable exemplaire parfaitement relié à l’époque par Huser »).

17. GIDE (A.). Les Faux-Monnayeurs. Paris, NRF, 1925, in-4°, maroquin fauve janséniste, dos à nerfs, doublure et gardes de soie moirée de même couleur, couverture et dos, tranches dorées sur témoins, étui gainé de même peau (P.L. Martin).

Édition originale.

Roman de la maturité de Gide, Les Faux-Monnayeurs est un des livres les plus révélateurs de l’après-guerre. Il est au carrefour des différentes tendances de l’art narratif d’alors.

L’un des 121 exemplaires de tête de format in-4° tellière sur papier vergé Lafuma-Navarre.

Reliure d’une parfaite exécution de P. L. Martin.

Provenance : Marcel de Merre (ex-libris).

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18. SCHMIED (F.-L.) & THARAUD (J. et J.). Marrakech et les Seigneurs de l’Atlas. Maquette originale. [Circa 1924], in-4° de 117 ff., chemise, étui.

Intéressant témoignage de la fascination exercée par le Maroc sur les Européens. Lorsque les frères Tharaud s’y rendent en 1917, ils ont déjà écrit leur Fête arabe. Baptisés Jérôme et Jean par leur condisciple Charles Péguy, secrétaire durant quinze ans de Maurice Barrès, les deux frères entameront ensuite un périple dans les ghettos juifs de Galicie avant de se rendre au Maroc, à l’invitation du général Hubert Lyautey. Ce dernier aimait à s’entourer d’artistes pour mettre le pays en valeur et d’écrivains venus rendre compte de son œuvre de pacification dans le cadre du protectorat français. Sous le parrainage de cet homme profondément épris de culture arabe et respectueux des coutumes du royaume chérifien, les Tharaud eurent le privilège de découvrir la région du Haut-Atlas et ses chefs naturels. La route historique ouverte entre le Sud algérien et les plateaux du Maghreb annonçait le déclin des quelques seigneurs féodaux qui régnaient en maîtres incontestés sur ces massifs depuis des générations. Les Tharaud, qui assistèrent à ces changements, en furent marqués : « J’ai voulu peindre, confia plus tard Jérôme, un spectacle qu’on a vu de tout temps au Maroc, où les gestes se répètent et s’éternisent et que j’ai été peut-être le dernier à contempler ». Témoins d’une époque, tous deux s’attachèrent tout particulièrement à la figure du grand vizir Si Madani El Glaoui, dont le château de Telouët était sur la route de Marrakech au Tafileltet à l’oued Drâa. Il est aussi question des beautés de Marrakech, où tous deux rédigèrent le texte, dans le palais Bahia. Publié une première fois en 1920, l’ouvrage fut réédité en 1924 avec les dessins du peintre orientaliste Suréda.

Autre amoureux du Maroc, André Suréda (1872-1930) souhaitait dès 1918 lui consacrer un livre. On ne sait si le peintre, réputé à l’époque pour ses compositions algéroises, fit la connaissance des deux frères au hasard d’une exposition officielle ou à Versailles. Suréda passa en effet la majeure partie de sa vie au 10, rue d’Anjou, non loin du 93 de la rue Royale où les Tharaud étaient domiciliés. Ce qui est sûr, c’est que leur collaboration lui permit de faire, de 1924 à 1927, ses plus beaux livres illustrés. À Marrakech ou les Seigneurs de l’Atlas succédèrent deux autres ouvrages, La Fête arabe et L’An prochain à Jérusalem. Peu après l’arrivée des frères Tharaud au Maroc, le peintre commença à y multiplier ses séjours. Durant cette période, sa palette changea. Ses peintures marocaines correspondent à un véritable tournant dans son évolution artistique : renonçant à ses scènes chatoyantes et colorées, il simplifie les formes, choisit des couleurs plus assourdies qu’il dispose en de larges aplats. Pour l’illustration du livre, il exécuta de nombreux croquis in situ, et réemploya parfois quelques-uns de ses tableaux, dont certains sont conservés au musée Rolin à Autun. L’interprétation sur bois de ses dessins fut confiée à François-Louis Schmied.

Un peintre-graveur reconnu, François-Louis Schmied (1873-1944).Ce fut naturellement vers lui, dont le talent était apprécié depuis Le livre de la jungle et Salonique-La Macédoine-Athos, que se tournèrent les membres du Cercle lyonnais du livre. Il en assuma l’entière réalisation ; interprétation sur bois des illustrations, ornementation (lettrines, culs-de-lampes, bandeaux…), typographie, mise en pages et impression. Il rappelle d’ailleurs rapidement son rôle dans une courte note manuscrite, portée sur le faux-titre de la maquette : « Cet exemplaire a été établi par Schmied au titre de graveur-imprimeur comme type de mise en pages. » La maquette, travail intermédiaire, présente un caractère animé que la version gravée d’aspect plus soignée ne sait conserver. Elle est au livre ce que le croquis est au dessin.Schmied séjourna également au Maroc de 1934 à 1935.

Joint : THARAUD (J. et J.) - SCHMIED (F.-L.). Marrakech ou les Seigneurs de l’Atlas. Lyon, Cercle lyonnais du livre, 1924, in-4°, en ff., couverture, chemise. 53 compositions en couleurs d’André Suréda gravées sur bois par Schmied et 17 grandes initiales dorées ou argentées par Schmied. L’un des 120 exemplaires imprimés au nom des membres de la Société, celui-ci pour Charles Van de Putte. Tirage limité à 152 exemplaires, tous sur papier japon.

Marion Vidal-Bué, André Suréda, pp. 181-214.

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19 - ÉLUARD

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19. ÉLUARD (P.). Capitale de la douleur. Paris, NRF, 1926, in-8°, maroquin prune janséniste, dos à nerfs orné, doublures de veau vieux rose et gardes de soie tilleul, couverture et dos, tranches dorées sur témoins, étui gainé de maroquin (Huser).

Édition originale.

Le poète rassembla plusieurs pièces de sa première période surréaliste. Le recueil se divise en quatre parties, Répétitions, Mourir de ne pas mourir, Les Petits Justes et Nouveaux poèmes, dont les deux premières avaient déjà paru : Répétitions en collaboration avec Max Ernst, en 1922, et Mourir de ne pas mourir, en 1924. Peu satisfait du titre initalement prévu, L’Art d’être malheureux, Éluard, pris d’une inspiration subite alors qu’il corrigeait les épreuves de son manuscrit, le changea pour le titre que nous connaissons.

L’un des 12 exemplaires hors-commerce sur papier de couleur réservés à l’auteur, le plus petit tirage sur grand papier.

Exemplaire sur papier géranium enrichi d’un envoi autographe à Théodore Fraenkel :

Premier ami de Breton, dont il fut le condisciple au lycée Chaptal vers 1911 et à la faculté de médecine, ce dernier lui présenta Aragon et Philippe Soupault, auxquels Éluard se joignit en 1918 par l’entremise de Jean Paulhan. Compagnon de route du dadaïsme, il poursuivit ses études de médecine contrairement à Breton, avec lequel il rompit en 1930. Pendant la guerre, il fut affecté à l’hôpital de Nantes, ville où il rencontra Vaché, qui s’inspira de lui pour son personnage de Théodore Letzinski dans sa nouvelle, Le Sanglant symbole.

Éluard a biffé à l’encre la vignette à la cocotte de la justification, emblème de Léautaud : « Ce n’est pas de moi, non Paul Éluard. »

Pièce jointe : manuscrit autographe signé, le seul connu, du poème Dans la brume (p. 129 du recueil). Il contient une séquence supplémentaire au texte imprimé : « Les ombres de poussière de mes belles désolées ne sont plus désormais qu’à la merci du vent, des oiseaux solitaires prisonniers de l’air des forêts les chercheront en vain sur les feuilles d’été, sur les troncs de l’hiver » (non publié dans Éluard, Œuvres complètes, La Pléiade, T.1, pp. 92-93).

Exemplaire bien complet du papillon d’errata.

Provenance : Théodore Fraenkel (1896-1964) ; Robert Moureau (ex-libris).

20. CENDRARS (B.). Le Plan de l’aiguille. Les Confessions de Dan Yack. Paris, Au Sans Pareil, 1927-1929, [Achevé d’imprimer : 28 février 1929 - 15 septembre 1929], 2 vol. in-12, demi-maroquin havane à coins, dos à nerfs ornés et mosaïqués, couverture et dos, tête dorée, non rogné (Huser).

Édition originale.

Annoncé pour 1927, ce roman en deux parties ne vit le jour qu’en 1929 alors que son contrat avait été signé dès 1922. Ce retard irrita d’autant René Hilsum qu’entre-temps Cendrars publia en 1925 et 1926, chez Grasset, sous la direction de Louis Brun, deux ouvrages : L’Or et Moravagine. Ils furent de beaux succès de librairie.

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Dan Yack, roman dont la trame se déroule en Russie puis en Europe, fut en cette année 1929, pressenti pour le prix Goncourt ; il n’obtint en réalité qu’une seule voix, celle de Roland Dorgelès.

Exemplaire sur papier du Japon, tirage de tête. Non numéroté, il fut offert par l’auteur à son ami Louis Brun, alors directeur des éditions Grasset. Il porte un envoi autographe sur chaque volume :

Provenance : Louis Brun ; Robert Moureau (ex-libris).

P. Fouché, Au Sans Pareil, 108 et 122.

21. ROCH GREY & SURVAGE (L.). Le Château de l’étang rouge. Paris, Librairie Stock, 1926, in-8°, broché, couverture.

Édition originale, dédiée à Survage.

Une Russe d’avant-garde, Hélène d’Œttingen (circa 1880-1948). Arrivée d’Ukraine en 1902, cette aristocrate devient très vite la mécène de la bohème parisienne. On croise dans son salon toute l’avant-garde russe et française de l’époque : d’Archipenko à Zadkine, de Survage ou Braque à Léger, le Douanier Rousseau, Max Jacob, Apollinaire, Cendrars, son cousin Serge Férat...Derrière cette vie de salon se cache une intellectuelle aux multiples hétéronymes : Roch Grey l’écrivain, Pieux le poète et François Angiboult, l’artiste peintre, autant de visages qui ne font qu’une seule et même personne, la baronne.

Pierre Albert Birot, son mécène.Après Apollinaire, Pierre Albert Birot rencontré en 1917, croit très vite à son talent d’écrivain : « Voici donc un écrivain très à l’aise dans la langue qu’il emploie, il ne traduit pas, il pense dans cette langue, la plume court et il a le génie littéraire. » Encouragée dans sa volonté d’écrire, Roch Grey produisit en 1919 son premier roman, Le Château de l’étang rouge où elle raconte son enfance en Russie, laissant apparaître sa vérité et la source de ses difficultés. Audacieuse, elle tente une nouvelle manière d’écrire, mélangeant réalité et fiction, utilisant parfois l’écriture automatique des surréalistes. Le 16 mai 1925, Roch Grey signe un contrat avec la maison Stock, l’ouvrage sera publié en 1926. Le livre a du succès, il est salué par le poète Jean Follain, l’écrivain Jacques Chardonne et l’historien d’art britannique, Charles Parker.

Deuxième collaboration entre Roch Grey et son amant, le peintre finnois, Léopold Survage. Ce dernier grava, probablement en 1919, 4 bois en couleurs. Snegaroff, l’imprimeur des Soirées de Paris, en assuma la charge financière.

L’un des 13 premiers exemplaires sur japon impérial.

Édition limitée à 210 exemplaires.

J. Warnod, Chez la Baronne d’Œttingen, Paris russe et avant-gardes, 2008.

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19 - ROCH GREY & SURVAGE

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22 - BRETON

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22. BRETON (A). Nadja. Paris, Éditions de la Nouvelle Revue Française, 1928, in-4°, broché, couverture.

Édition originale du plus célèbre écrit de Breton.

Il lui fut inspiré par sa rencontre, au hasard d’une de ses fréquentes promenades parisiennes, avec une jeune femme à l’aspect enchanteur et mystique. Entraperçue le lundi 4 octobre 1926 près d’Opéra, Nadja, de son vrai nom Léona Camille Ghislaine D., va être, pendant quelques semaines, l’objet de sa curiosité passionnée. Le comportement erratique de la jeune femme met fin à leurs rencontres, mais l’idéal qu’elle a brièvement incarné, ce rejet des conventions de l’existence et cette réceptivité à l’extraordinaire et à l’intuition, ne cessent plus tard d’obséder Breton qui écrit les deux tiers du livre huit mois plus tard, au manoir normand d’Ango, en août 1927. La première partie sert de préambule et retrace les épisodes les plus marquants de la vie de l’auteur, ses rencontres et les curiosités observées ; la seconde, centrale, est le « récit minutieux des dix jours passés » avec Nadja et de « la fin de leurs relations » ; la troisième, rédigée les derniers jours de l’année, constitue la partie théorique du livre, perçu comme le premier manifeste surréaliste. Dans une formule restée célèbre, « la beauté sera convulsive ou ne sera pas », Breton expose une conception de la beauté qui inspira tous ses compagnons de route, peintres ou poètes.

44 photographies.L’usage révolutionnaire que fit l’auteur de ces clichés contribua au rayonnement de Nadja. Pour la première fois dans l’histoire littéraire, un auteur fait l’économie de la description narrative, en substituant au texte lui-même une reproduction des lieux, personnes, lettres, documents, dessins ou tableaux cités. Les vues de Paris furent confiées à Jacques Boiffard, capable « d’accompagner la prose sans ornement de Breton de paysages étrangement déserts », les portraits d’amis et rencontres échurent à Man Ray, photographe officiel des dadaïstes, et Lise prit la photo du gant de bronze (p. 67). Le portrait de Nadja, érigée en symbole, est significativement absent du corpus.

L’un des 109 premiers exemplaires sur papier vergé Lafuma-Navarre, réimposés dans le format in-quarto tellière, imprimé pour Albert Tetin.

Exemplaire broché, parfaitement conservé.

Provenance : Albert Tetin.

M. Polizzotti, André Breton, Biographie NRF Gallimard, pp. 300-309, 319-324.

23. SAINT-EXUPÉRY (A. de). Courrier sud. Paris, NRF, 1929, in-12, broché, couverture.

Édition originale du premier roman de l’auteur.

Il fut écrit au cap Juby, dans le désert du Maroc espagnol, en 1928. Pionnier de la poste aérienne sur l’une des première lignes du monde, Saint-Exupéry entra chez Latécoère, dirigé par Didier Daurat. Courrier sud se nourrit de cette expérience de l’Aéropostale, riche en aventures et exploits. Ayant d’abord assuré le tronçon Toulouse-Casablanca, puis Casablanca-Dakar, Saint-Exupéry fut rapidement nommé chef d’aéroplace pour ses qualités de meneur d’hommes et de diplomate. Tout en assurant le vol des premiers long-courriers, tâche délicate dont il s’acquitta avec beaucoup de zèle, il sauva de nombreux camarades perdus dans le désert ou prisonniers des Maures. Plus tard, le livre fut porté au cinéma par Pierre Billon, avec Pierre Richard Wilm dans le rôle de Bernis et Janis Holt dans celui de Geneviève.

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Exemplaire offert par l’auteur à Jean Paulhan :

L’envoi est rempli de cette déférence touchante d’un jeune auteur à un directeur reconnu. À la tête d’une revue dont dépendit longtemps le succès des éditions de la Librairie Gallimard, Paulhan est aussi parmi les lecteurs les plus écoutés de l’éditeur, ce que Saint-Exupéry ne peut guère ignorer. C’est en premier lieu auprès de Gaston Gallimard qu’il fut introduit, par l’entremise de Jacques Prévost, collaborateur à la NRF et auteur maison. Ayant lu deux nouvelles, ce dernier l’encouragea à être plus ambitieux, stimulant ainsi la rédaction de Courrier sud.L’aventure de l’Aéropostale n’était pas inconnue de Paulhan, très tôt informé des prouesses d’aviateur par l’un de ses cousins éloignés, Louis Paulhan, auteur de la première liaison aérienne Londres-Manchester, et préfacier de Badigeon-aviateur (Patis, L’Édition, 1917). Outre ce premier roman, paru en mai 1929 à la NRF, le directeur publia également Terre des hommes en avril 1939. La fidélité que lui garderont Consuelo, Marie et Simone, après la mort de Saint-Exupéry, reflète la grande amitié de ce dernier pour la NRF et son directeur.

L’un des 17 hors-commerce sur papier vélin pur fil Lafuma-Navarre.

P. Assouline, Gaston Gallimard, un demi-siècle d’édition française, pp. 172 et 270 ; L’Album de Saint-Exupéry, La Pléiade, pp. 98-102 et 168.

24. BRETON (A.) & ÉLUARD (P.) & DALI (S.). L’Immaculée conception. Paris, Les Éditions Surréalistes, 1930, in-4°, broché, couverture.

Édition originale.

Succédant au divertissant Ralentir travaux, Breton et Éluard, dans ce texte à deux écritures, explorent un univers où seul Lautréamont les avait précédés ; ils se substituent en quelque sorte à des aliénés.À travers d’admirables poèmes en prose, ils tentent ainsi la reconstruction de l’existence humaine dans sa totalité, depuis la conception, en passant par la vie intra-utérine et la naissance, jusqu’à la mort, puis en deux cycles d’essais groupés sous les titres Les Possessions et Les Méditations, ils opposent les délires mentaux (débilité mentale, délire d’interprétation, démence précoce, manie aiguë, paralysie générale) à la conscience de veille, état perturbé par les poussées de l’inconscient.

Une gravure de Dali illustre ce poème. Elle figure uniquement dans les exemplaires sur grand papier.

L’un des 100 exemplaires sur hollande Van Gelder, signé par les deux auteurs, avec la gravure.

Exemplaire en parfaite condition, condition rare pour ce livre.

G. Sebbag, Les Éditions surréalistes, 1926-1968, n° 16.

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24 - BRETON, ÉLUARD & DALI

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25. JOUVE (P. J.). La Symphonie à Dieu. Paris, NRF, 1930, in-8°, broché, couverture.

Édition originale.

Élégante plaquette ornée d’une gravure du peintre tchèque Joseph Sima, La Symphonie à Dieu parut la première fois en 1930 à la NRF. Peu après, Jouve l’incorpora aux Noces, recueil publié une première fois en 1928, mais dont le « texte définitif » date de 1931. Elle forme la deuxième partie. Capital, ce recueil marque un tournant dans l’itinéraire du poète, qui, ayant publiquement rejeté toute sa production antérieure à 1925, le considère comme sa première œuvre.Seul Dante, dans l’histoire littéraire, opéra une pareille scission, annonçant, dans la Vita nova, qu’il renonçait définitivement au style qui avait été le sien jusqu’ici.

Une gravure à l’eau-forte en couleurs de Joseph Sima.

Exemplaire offert par Jouve à Jean Paulhan :

On voit les relations amicales qu’entretenaient les deux hommes.Jouve fut, en effet, « l’un des rares écrivains à emporter l’adhésion complète de Paulhan », dont l’exigence était bien connue.Il l’introduisit chez Gallimard dès 1925, soit à la lecture de Paulina 1880. Alors en pleine brouille avec Isabelle Rivière, veuve de son ami et premier directeur de la NRF Jacques Rivière, à laquelle il reprochait de vouloir annexer la mémoire du défunt au catholicisme militant, Paulhan se retrouva d’emblée dans la sensibilité religieuse du poète, à la fois mystique et singulière. Tous deux entretinrent, de 1925 à 1962, une correspondance dans laquelle Jouve fait volontiers état de l’avancée de ses travaux et de son cheminement intellectuel et spirituel. Paulhan, de son côté, partage son admiration et ses impressions, jouant un rôle de critique et confident auprès du poète qui ne se confiait pas facilement. Il lui offrit souvent de publier dans la NRF, qui devint pour Jouve une sorte de tribune. Il y fit paraître des poèmes, romans ou nouvelles jusqu’en 1945, sans compter les textes occasionnels sur la psychanalyse (Moment d’une psychanalyse, avec Blanche Réverchon, n° 234, mars 1933), la musique (n° 280, janvier 1937), ou d’inspiration patriotique.

L’un des 60 exemplaires de presse sur papier d’Alfa.

L. Brissot, La NRF de Paulhan, pp. 138, 163, 415 ; L’Herne, Pierre Jean Jouve, pp. 113-115 ; M. Pic, Le Désir monstre. Poétique de Pierre Jean Jouve, p. 36.

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26. MICHAUX (H.). Un certain Plume. Paris, Éditions du Carrefour, 1930, in-8°, demi-maroquin citron à coins, dos lisse, couverture et dos, tête dorée, non rogné (P.L. Martin).

Édition originale.

Recueil de nouvelles, Un certain Plume est la transcription narrative du périple de Michaux en Turquie en 1930. Frappé par la mort successive de son père puis de sa mère, l’auteur éprouve tout le long de son « voyage d’expatriation » une « sensation de la mort » qui émaille les mésaventures de son personnage, Plume, en butte à la violence ou à l’absurdité du monde, que ce soit dans un train, un restaurant ou les appartements de la reine. L’humour, la cruauté drolatique proche de Swift qui s’y déploient en toute liberté, font du livre une œuvre majeure, d’autant que pour la première fois, Michaux s’identifie à l’une de ses figures au point de signer certaines lettres « votre Plume ». Pressé de le voir publié, l’auteur le confia à un jeune éditeur, Pierre Lévy, aux éditions du Carrefour, malgré les sollicitations, toujours plus pressantes, de Gaston Gallimard. Il sera repris, avec des variantes, dans d’autres éditions ultérieures.

Exemplaire offert par l’auteur au philosophe Henri Bergson (1859-1941) :

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Célèbre pour ses travaux sur le langage et le rire, dont la première étude date de l’année de la naissance du poète (1899), le philosophe, déjà âgé de 71 ans et très renommé, était sans doute le lecteur idéal de Michaux, qui mélange à un rare degré linguistique et poésie. On ne leur connaît pas de relation, mais une évidente affinité intellectuelle et spirituelle. Chacune des déconvenues de Plume illustre d’ailleurs parfaitement ce qu’a pu dire Bergson du rire : « Le rire est, avant tout, une correction. Fait pour humilier, il doit donner à la personne qui en est l’objet une impression pénible. La société se venge par lui des libertés qu’on a prises avec elle. Il n’atteindrait pas son but s’il portait la marque de la sympathie et de la bonté. »

L’un des 200 exemplaires sur vélin du service de presse.

Provenance : Henri Bergson (1859-1941).

J.-P. Martin, H. Michaux, Biographie NRF Gallimard, pp. 195-200.

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27 - JOUVE

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27. JOUVE (P.). Album. Paris, Apollo Éditions artistiques, Galerie Colette Weil, [1931], in-folio, portefeuille de peau de porc à cloutage d’angle et fermoir en bronze plaqué or, marteau de porte repris à l’eau-forte sur le premier plat (Paris, Hermès).

Un frontispice et 10 eaux-fortes justifiés et signés au crayon par l’artiste.

L’un des 100 sur vélin de Hollande Van Gelder Zonen. Le portefeuille, ici conservé, n’a été réalisé qu’à un très petit nombre d’exemplaires.

Édition limitée à 165 exemplaires, tous sur hollande Van Gelder.

Marcilhac, Paul Jouve, pp. 369-370 ; Eludut, Le monde animal dans l’art décoratif des années 30, Paul Jouve - Gaston Suisse, p. 107.

28. MALLARMÉ (S.) & MATISSE (H.). Poésies. Lausanne, Albert Skira, 1932, in-4°, en ff., couverture, chemise et étui.

Première véritable œuvre de Matisse en tant qu’illustrateur.

Matisse fut sollicité par Albert Skira, qui venait de se lancer dans le livre illustré et avait obtenu une première collaboration de Picasso sur les Métamorphoses d’Ovide. Le peintre signa un contrat d’un trentaine d’estampes, destinées à l’origine aux Amours de Psyché de La Fontaine, que l’éditeur suisse remplaça par Poésies de Stéphane Mallarmé (1842-1898) sans que la teneur du contrat en soit modifiée. S’engageant à 61 ans dans un domaine qu’il n’avait jamais pratiqué, Matisse (1869-1954) déploya librement son talent, remplissant les pages de ses compositions au gré de son inspiration et sans être asservi au texte. C’est ainsi que l’entendait Mallarmé, pour qui l’illustration ne devait pas être un simple ornement, et qui refusa, au nom de ce principe, les culs-de-lampe, fleurons et bandeaux de Théo Van Rysselberghe prévus pour la seconde édition de Poésies chez Edmond Deman en 1899. Le livre fut exposé à New York du 3 au 10 décembre 1932 à la galerie Marie Harriman, cette dernière détenant l’exclusivité de la vente de l’ouvrage aux États-Unis et aux Américains vivant hors d’Europe, et début février de l’année suivante à la galerie Pierre Colle à Paris.

29 eaux-fortes de Matisse, dont 23 à pleine page.Pour la première fois, l’artiste s’impliqua réellement dans l’élaboration d’un livre, allant jusqu’à exécuter, durant l’été et l’automne 1931, une soixantaine d’eaux-fortes pour un projet qui n’en nécessitait que la moitié. Fort de son expérience de la lithographie et de la gravure, il poursuivit, sur ce mode, ses recherches formelles et artistiques, privilégiant toujours au sujet représenté, faune, nymphe ou bateaux, l’harmonie de la composition et la pureté de l’ensemble. Sa gageure fut de créer « un trait régulier, très mince, sans hachures » qui laissait « la feuille imprimée presque aussi blanche qu’avant l’impression ».

L’un des 95 exemplaires sur vélin à la forme fabriqué spécialement par les papeteries d’Arches.

Édition limitée à 145 exemplaires numérotés, signés par l’artiste.

Claude Duthuit, Henri Matisse, n° 5 ; Chapon, Le Peintre et le Livre, pp. 150-152 ; Victoria & Albert Museum, From Manet to Hockney, n° 95 ; R.-F. Johnson-D. Stein, Artist’s books in the Modern Era, 1870-2000, n° 101 ; Marie-Anne Sarda-Vincent Lecour, Matisse et Mallarmé, pp. 28-39 (Pour une genèse très détaillée de l’ouvrage) ; Y. Peyré, Mallarmé. 1842-1898, pp. 109-116.

Voir reproduction en frontispice

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29. COLETTE (S.G.) & DUNOYER DE SEGONZAC (A.). La Treille muscate. Paris, Chez l’auteur, 1932, in-4°, box lilas, plats ornés d’un jeu de volutes de filets dorés, violets, argentés et bandes contournées de box violet, doublure de daim parme, gardes de daim violet, tranches au palladium sur témoins, couverture, chemise et étui bordés de même box (INV. R. Adler 1952 - And. Jeanne DOR.)

Édition originale.En 1924, Colette découvrit le charme de Saint-Tropez et y acquit une propriété, où elle séjourna fréquemment jusqu’en 1938. Petite maison sur la baie des Caroubiers dont le terrain était à l’abandon, Tamaris-les-Pins fut rebaptisée La Treille Muscate, à cause de ce raisin muscat qui proliférait au milieu des arbres fruitiers, des fleurs et des fruits. Romancière et journaliste célèbre, Colette retrouva, dans ce lieu charmant, une douceur de vivre. Elle accueillait, pour des repas rustiques autour de sa table, de nombreux estivants et peintres, dont Dunoyer de Segonzac qui avait, à la même époque, racheté au peintre Camoin une maison à l’écart des touristes. Émerveillée par ce cadre qui la consolait des vicissitudes de sa vie parisienne, Colette commença par le décrire dans son récit en partie autobiographique, La Naissance du jour, rédigé en 1928, avant de lui consacrer ce livre, véritable hymne à la nature, aux fleurs et à la vigne.

35 eaux-fortes originales de Dunoyer de Segonzac.Colette, qui l’appréciait beaucoup, vit d’emblée en cet hôte assidu l’illustrateur idéal de ses séjours méditerranéens. Leur collaboration ne se fit pas sur La Naissance du jour, comme la romancière l’aurait souhaité (mais à quoi s’opposèrent ses éditeurs), mais sur ce projet, auquel ils travaillèrent main dans la main, Colette à sa table, écrivant trois heures par jour, Dunoyer de Segonzac gravant sans arrêt à ses côtés. Les gravures disent expressément tout l’attachement de l’artiste à cette vie simple et heureuse et c’est à ses frais que parut l’édition originale de La Treille muscate.

Reliure de Rose Adler (1949-1959). Elle s’est clairement inspirée de la personnalité de l’auteur, privilégiant des couleurs féminines et sensuelles, dont le lilas qui rappelle aussi le raisin muscat de la Treille, et des volutes qui s’accordent bien avec l’esprit à la fois bouillonnant, souple et délicat de la romancière.

L’un des 100 exemplaires numérotés de 51 à 150.

Édition limitée à 165 exemplaires, tous sur hollande Van Gelder.

Exposition : Bibliothèque nationale (Cat., La reliure originale, 1953, n° 113) ; Bibliothèque Albert Ier (Cat., Les Richesses de la bibliophilie belge, II, 1966, n° 155 avec reproduction).

Provenance : M. Marcel De Merre (ex-libris).

C. Francis-F. Gontier, Colette, p. 309 ; Vichy, A. Dunoyer de Segonzac et l’illustration du livre, p. 33.

30. COLETTE (S.G.) & DUNOYER DE SEGONZAC (A.). La Treille muscate. Paris, Chez l’auteur, 1932, in-4°, broché, couverture, chemise, étui.

Édition décrite au numéro précédent.

35 eaux-fortes originales de Dunoyer de Segonzac.

L’un des 100 exemplaires numérotés de 51 à 150.

Édition limitée à 165 exemplaires, tous sur hollande Van Gelder.

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29 - COLETTE & DUNOYER DE SEGONZAC

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31 - HUGNET

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31. HUGNET (G.) & DALI (S.). Onan. Paris, Les Éditions surréalistes, 1934, in-4°, monotype rose parme sur veau blanc, pièce d’ébène noir poli en angle, doublure de nubuck havane, couverture, chemise-étui à dos de box (J. de Gonet, 1996)

Édition originale.

Déjà remarqué par Breton pour ses articles sur Dada, Hugnet (1906-1974) entra dans le groupe en 1932 et contribua à son renouveau, avec Maurice Henry et Marcel Jean.Très dévoué à la cause, il offrit, avec Onan paru aux éditions du groupe en 1934, un livre typiquement surréaliste, tant dans la facture, le choix du papier, le frontispice que le sujet, lié au désir et à la transgression. Du nom d’un personnage biblique, le titre fait allusion à un épisode de la Genèse : fils de Jacob et frère d’Er, Onan aurait été frappé par la justice divine pour avoir refusé d’épouser la femme de son défunt frère, toujours sans enfant, comme l’y obligeait la coutume du lévirat, et avoir « laissé sa semence se perdre dans la terre ». Les traditions juive et chrétienne condamnèrent par la suite cette sexualité « égoïste » et ce refus de la conception, rattachant durablement la figure d’Onan aux thèmes de la sexualité et de la révolte, prépondérants chez les surréalistes. Passant outre l’anathème que Breton avait jeté sur Salvador Dali quelques mois plus tôt, lors d’un mémorable « procès » rue Fontaine le 5 février 1934, Georges Hugnet lui confia l’illustration de son poème. Dali grava pour l’occasion un frontispice que seuls les 77 premiers exemplaires contiennent.

Une eau-forte originale, signée, de Dali.Il s’agit d’une héliogravure entièrement reprise au burin et, pour certains traits, à la pointe sèche. Dali la baptisa « Espasmo-grafisme », eu égard à la tache de sperme qu’il avait délibérément posée au centre, et introduisait à sa manière, ouvertement provocatrice, le sujet des vers suivants, l’onanisme. Elle a été tirée sur les presses de Roger Lacourière, et n’a été réservée qu’aux exemplaires sur grand papier.

L’un des 25 exemplaires hors-commerce sur papier Turner géranium, bien complet de la gravure.

Exemplaire offert par l’auteur à Nush, la jeune compagne d’Éluard :

La sortie d’Onan précéda de deux mois le mariage de Nush et d’Éluard, dont le poète souligne la félicité et l’univers onirique. Proche d’Éluard, Georges Hugnet refusa de rompre avec lui après son éviction du groupe surréaliste, et s’avéra d’une aide précieuse lorsque, durant la guerre, à partir de 1942, le couple fut tracassé par des soucis matériels et de santé.

Édition limitée à 277 exemplaires.

G. Sebbag, Les Éditions surréalistes, 1926-1968, 31.

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32. ÉLUARD (P.) & MAN RAY. Les Mains libres. Paris, Aux Éditions Jeanne Bucher, 1937, in-4°, broché, couverture illustrée.

Édition originale.

Après Facile, recueil de 1935 célébrant Nush, Les Mains libres perpétuent l’alliance Éluard-Man Ray. Leur refus tacite et complice de la tradition est annoncé dès la page de titre (Dessins illustrés par les poèmes de Paul Éluard), puisqu’ici, c’est le poète qui illustre l’artiste et non l’inverse. Outre les 54 poèmes correspondant aux paysages, personnages et portraits de son ami, Éluard écrivit une belle préface : « Le dessin de Man Ray : toujours le désir, non le besoin » pour le catalogue d’exposition « Les Dessins de Man Ray » à la galerie Jeanne Bucher, du 5 au 20 novembre 1937.

66 dessins de Man Ray. Tous datés de 1936, ces dessins « extravagants mais réalistes » furent mis en chantier durant l’été. Man Ray passait alors de stimulantes vacances à Mougins, au-dessus d’Antibes, avec sa maîtresse Adrienne, Paul et Nush Éluard, Picasso, Dora Maar, Roland Penrose et Lee Miller. Picasso et la photographie furent sans conteste les principales sources de son travail. Nombreux furent les dessins exécutés d’après des clichés datant d’une dizaine d’années ou de la photographie de mode, activité poursuivie en parallèle et dont il gardait en tête les poses de certains modèles. Le subconscient et les rêves fournirent, eux aussi, matière à création : « Le soir, avant de m’endormir, si j’ai une idée, je fais le dessin tout de suite. Et le matin, quand je me réveille, si j’ai fait un rêve, je le dessine tout de suite. Beaucoup de dessins des Mains libres sont des dessins de rêve. »

Exemplaire sur Chester Vergé. Conservé dans son état d’origine, l’exemplaire est en parfaite condition.

Édition limitée à 675 exemplaires.

Éluard, Œuvres complètes, I, La Pléiade, 555, 1505 ; M. Foresta, F. Naumann..., Man Ray, Gallimard, 225-226, 261, 264-265, 284 ; N. Lehni & C. Derouet, Jeanne Bucher, Une galerie d’avant-garde, p. 112, n° XIX.

33. ÉLUARD (P.). Chanson complète. Paris, NRF, 1939, in-4°, broché, couverture.

Édition originale.

Éluard accéda par ce recueil à une reconnaissance publique sans réserves. Paru à la veille de la guerre, en mai 1939, il n’est pas anodin que celui-ci soit le premier écrit affranchi du mouvement surréaliste. Sa complète rupture avec Breton, qui lui reproche d’avoir participé à une revue marxiste, Commune, amorce une nouvelle période poétique, où Éluard marie l’héritage surréaliste et son militantisme antifasciste, que l’horreur de l’Anschluss et de la guerre d’Espagne n’a fait qu’exaspérer. Dans la solitude de la « Maison Grise », sa retraite du Pecq, près de Saint-Germain-en-Laye, il rassemble pour Gallimard les poèmes écrits au cours de l’année 1938. La « chanson » est désormais « complète » puisque jusqu’ici « le poète se censurait par solidarité avec le mouvement ». La NRF lui réserva un accueil enthousiaste ; sous la plume de Petitjean on put lire : « Maintenant, nous avons quelqu’un pour nous apprendre à nouveau la beauté du monde. »

Exemplaire sur papier d’édition offert par Éluard à Hans Bellmer :

à mon ami Hans Bellmerqui donne à ce qu’il touchela force douce de son cœur

Paul Éluard

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Paul Éluard fut le premier, avec Henri Parisot et Robert Valençay, à s’intéresser au travail de Bellmer. Non content de l’introduire dans le milieu parisien des surréalistes au cours de l’année 1935, il fit publier La Poupée l’année suivante chez Guy Lévis Mano. À la date de la lettre, les deux hommes œuvraient, à l’initiative du poète, à un projet de livre illustré par des photographies coloriées de « la Poupée », accompagnées de 14 proses poétiques. Destiné à être publié chez Zervos à l’automne 1939, sa parution fut ajournée à cause de la guerre, et il ne vit le jour que dix ans plus tard, grâce à la galerie Berggruen.

Pièce jointe : une L.A.S. d’Éluard à [Hans Bellmer], aux crayons de couleur, datée du 2 juin 1939, 1 p. in-8° recto-verso.Éluard rassure Hans Bellmer suite à un malentendu. Il estimait que ce dernier lui avait fait du tort, mais sa lettre, reçue en matinée, et l’intervention d’Hugnet, l’ont convaincu de son innocence. Il faut en incriminer Zervos, professionnel du bavardage, de la déformation, sur lequel Éluard dit ne pas s’illusionner. Le ton se veut apaisant.

L’exemplaire est conservé dans une chemise, annotée par Bellmer, Éluard, “Chanson complète”, avec une lettre autographe de Paul Éluard.

Provenance : Hans Bellmer (1902-1975).

Éluard, La Pléiade, II, p. 1330 ; Album Éluard, La Pléiade, 219 ; J.C. Gateau, Paul Éluard ou le frère voyant, p. 261.

34. MARAN (R.) & JOUVE (P.). Le Livre de la brousse. Paris, Les Bibliophiles de l’Automobile-Club de France, 1937, gr. in-4°, maroquin havane, au centre, décor mosaïqué formé d’une tête d’éléphant sur chaque plat brochant sur des frises géométriques se prolongeant au dos, dos lisse, bordure intérieure de même peau ornée d’un double filet à froid, doublure et gardes de soie moirée noire, couverture et dos conservés, tête dorée, non rogné (René Kieffer).

Premier romancier qui ait « exprimé l’âme noire avec le style nègre en français ».Antillo-guyanais de naissance, René Maran (1887-1960) vint faire ses études au lycée de Talence à Bordeaux où il rencontra Félix Eboué (l’un des deux dédicataires du Livre de la brousse), puis à Paris. Malgré une vocation poétique certaine, marquée dès 1909 par La Maison du bonheur et, en 1912, La Vie intérieure, il embrasse comme son père une carrière dans l’administration coloniale. De 1909 à 1924, il se déplace en Afrique équatoriale française, au Congo, à Bangui, sur la Kémo, à Grimari, à Fort Sibut, au Tchad et au Nigéria. Sa situation ambiguë de fonctionnaire noir dans les colonies françaises crée un conflit de conscience qui explose avec Batouala. Premier roman nègre d’expression française à dénoncer les abus des fonctionnaires coloniaux, le roman fut couronné par le prix Goncourt en 1921. Le scandale le poussa à démissionner en 1925. Il se consacre alors à l’écriture. Recueils de poème, œuvres d’érudition historique, témoignage, son œuvre est foisonnante, mais c’est surtout dans les histoires animalières qu’il exprima le mieux sa vision du monde.

« Le Livre de la brousse » : son « chef-d’œuvre ». Qualifié ainsi par l’auteur, ce roman restera, de tous ses écrits, son préféré.Le 4 novembre 1931, Maran écrit : « Le Livre de la brousse est fini. Il ne paraîtra que dans deux ans, dans une édition qui sera illustrée par Jouve, le grand peintre animalier. L’ouvrage ne sera tiré qu’à 120 exemplaires. Chaque exemplaire sera vendu 2 000 francs. » Des années plus tard, alors que sa production littéraire s’est encore accrue, Maran répète son attachement pour ce « véritable roman nègre », proche de « [s]on côté réaliste et naturaliste ». Il reste évident, dès la première scène, que l’ancien fonctionnaire était plus apte qu’un Européen à sentir, comprendre et traduire poétiquement la vie de la brousse.

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Dans le décor de la région de Krébédgé, que traverse la rivière Tomi, il nous conte l’histoire de Kossi, son héros, fils de Yamanga, l’une des trois femmes du forgeron et chef Doutomikoh. Ses jeux, ses amitiés, ses rites d’initiation, son amour pour Yassi et ses luttes nous disent les coutumes et croyances de la vie africaine. La saveur du récit tient pour beaucoup à la place accordée aux animaux, au charognard Doppélé et à la panthère Mourou qui rôde, la nuit, autour des villages, sans oublier le rusé caïman Moumeu, le mangeur d’hommes, le rhinocéros Bassaragba, « toujours en colère » et l’éléphant Mbala. Tous les habitants de la brousse entretiennent une lutte aussi naturelle qu’implacable, qui donne lieu à de très belles scènes, dont celle de la chasse au feu ; après avoir refoulé le gibier jusqu’à l’endroit fixé, relevé les pistes des antilopes ainsi que des bœufs sauvages, du sanglier Voungba et du phacochère Bengué, tendu des pièges, fait des prières et offrandes à Poupou le vent, Kossi et ses compagnons embrasent les terres et traquent leurs proies, qu’encerclent progressivement les flammes. La comparaison avec Le Livre de la jungle de Rudyard Kipling coule de source, comme le titre (Le Livre de la brousse) le donnerait à penser. Homme et animaux y sont égaux. Jungle ou brousse, les « mœurs de leur population bariolée » sont dépeintes « en des tableaux merveilleux et précis », proches de la poésie.

Dessins originaux de Paul Jouve gravés sur bois par Pierre Bouchet.Dès janvier 1930, l’artiste animalier fut mandaté par le vicomte de Rohant, président de la Société des Bibliophiles de l’Automobile-Club de France pour illustrer le livre en cours de René Maran. Ainsi financé, d’une part par l’éditeur, d’autre part par le gouvernement général de l’AEF, il partit pour l’Afrique noire, projet de voyage qu’il caressait depuis longtemps. Traversant le Soudan, la Haute-Volta, le Niger et le Dahomey, il circula du Sénégal jusque dans le Hoggar, en pays Targui, où la beauté naturelle des Touaregs et leur mode de vie ancestral le fascinèrent. Il remplit ses carnets de voyage de leurs attitudes et costumes, outre les animaux entrevus, dont il s’inspira pour Le Livre de la brousse, mais aussi pour l’illustration d’un autre texte de Maran, Le livre des bêtes qu’on appelle sauvages. « Toutes ces illustrations étaient marquées de la plus parfaite originalité, son style se singularisant par une manière absolument nouvelle d’interpréter ce qu’il voyait. »

Exceptionnel exemplaire enrichi de 12 dessins originaux (pierre noire et gouache ou crayon et pierre noire) de Paul Jouve : 1 - « Guerrier », signé. Projet de couverture, non retenu. Mention manuscrite, 1. 32 x 25,9 cm. 2 - « Les Éléphants ». Variante du frontispice. 32 x 25,9 cm. 3 - « L’Arbre », signé. Projet de frontispice non retenu. 32 x 25,9 cm. 4 - « Tigre blessé », signé. Illustration à pleine page avec variante de la page 97. Mentions

manuscrites, ch. II (?), 131, 21. 32 x 25,9 cm. 5 - « Aigle », signé. Vignette avec variante de la page 161. Mention manuscrite, 12. 32 x

25,9 cm. 6 - « Tigré prostré », signé. Vignette avec variante signé de la page 173. 7 - « Lion terrassé », signé. Projet d’illustration à pleine page, non retenu. Mentions manuscrites,

?,?,?, 28. 32 x 25,9 cm. 8 - « Chasseur de dos », signé. Projet d’illustration non retenu. Mention manuscrite, 131. 32 x

25,9 cm. 9 - « Aigle », signé. Projet d’illustration non retenu (?). 10 - « Lever de soleil », signé. Projet d’en-tête avec initiale, non retenu. Mentions manuscrites,

2, ch.III, 127, 23. 11 - « Chasseur et éléphant », signé. Projet d’illustration non retenu de la page 188 (?). 12 - « Deux hommes et une femme », signé. Mentions manuscrites, 2e partie, C.1, ?, 18. 32 x

25,9 cm.

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34 - MARAN & JOUVE

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Est joint dans une reliure identique signée Kieffer :

- Manuscrit autographe signé du Livre de la brousse, de 195 ff. : Il semblerait que deux copies soient connues de ce manuscrit, celle-ci a été offerte par l’auteur à Pierre Bellanger (1877-1951), congénère de l’Oubangui. Il fut celui qui poussa René Maran à mener à bien son ouvrage. Présentant des ajouts et corrections, ce manuscrit est très proche de l’état définitif du texte. - 2 tapuscrits (environ 220 et 240 pp.) avec corrections et ajouts autographes, proches du texte manuscrit. Dans les deux cas, le travail de l’auteur est plutôt de l’ordre de la relecture que du remaniement ou de l’élaboration du texte. Le premier tapuscrit comporte de nombreuses biffures et additions, l’auteur corrigeant les fautes de frappe, la ponctuation, changeant un mot pour un autre, raturant une phrase... Ce travail s’est peut-être fait en deux temps, comme le laisserait supposer l’usage des deux encres, noire et violette. Le second tapuscrit, plus avancé encore, porte quelques rares corrections à l’encre noire.

En-tête du volume comprenant le manuscrit et les deux tapuscrits, a été relié un f. de titre dactylographié avec, au verso, le texte autographe signé de la dédicace originelle de Maran à Pierre Bellanger et Félix Éboué qui figure imprimé dans l’édition originale (Albin Michel, 1934).

Édition limitée à 122 exemplaires, tous sur vélin d’Arches.

L. Thornton, Les Africanistes, peintres voyageurs, pp. 148-154-318 ; F. Marcilhac, Paul Jouve, pp. 187 et 206 ; C. Onana, René Maran; le premier Goncourt noir, 1887-1960, pp. 153-154 ; M. Béti-O. Tobner, Dictionnaire de la négritude, p. 163 ; J. Chevrier, La littérature nègre, pp. 31-32 .

35. SAINT-EXUPÉRY (A. de). Terre des hommes. Paris, NRF, 1939, in-12, broché, couverture.

Édition originale.

Récit épique des vols de Saint-Exupéry dans tous les ciels et sur toutes les mers du monde, Terre des hommes parut au début de la guerre, le 16 février 1939, et valut à son auteur le grand prix du roman de l’Académie française. Initié, en réalité, par les éditeurs américains Eugène Reynal et Curtier Hitchcok, le livre fut traduit par Lewis Galantière sitôt le texte achevé, et publié aux États-Unis sous le titre de Wind, Sand and Stars. Couronné « livre du mois », il reçut le Nation Book Award.Tissé à partir d’une série d’articles, Terre des hommes devait s’intituler Étoile par grand vent, mais l’auteur opta finalement pour le titre suggéré par son cousin André de Fonscolombe. Dédié à Henri Guillaumet, avec lequel il venait tout juste de traverser l’Atlantique Nord sur le Laté 521, ce nouveau témoignage de l’écrivain-aviateur dépasse, là encore, l’anecdote et le sensationnel, par l’héroïsme quotidien, empreint d’humanité et de respect, que Saint-Exupéry oppose aux vertus militaires exaltées par le fascisme.

L’un des 30 exemplaires hors-commerce sur vélin pur fil des papeteries Lafuma-Navarre.

Exemplaire offert par l’auteur à Jean Paulhan (1884-1968) :

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L’écrivain n’en est plus à son premier roman chez Gallimard, et l’envoi en témoigne. Très différents, les deux hommes n’ont peut-être jamais été aussi proches dans leurs préoccupations et ce texte, publié à la NRF en février 1939, est probablement celui de Saint-Exupéry le plus en adéquation avec la nouvelle orientation de la revue. Depuis l’année précédente, en effet, Paulhan s’est départi de son habituelle neutralité, tant la démission de l’État français face à la dictature de Franco et aux exigences d’Hitler, l’inquiète. Tout en restant littéraire, tout en continuant de publier des auteurs de situations et d’opinions politiques très diverses, le directeur ne coupe plus complètement la NRF de l’actualité politique. La nouvelle rubrique Bulletin et quelques textes (L’Air du mois, Petit traité du pacifisme) reflètent bien cet appel à la prise de conscience que lance aussi le romancier.

L. Brisset, La NRF de Paulhan, pp. 78-89 ; Album Saint-Exupéry, La Pléiade, pp. 192-193.

36. GANZO (R.) & FAUTRIER (J.). Lespugue. [Paris, Les Auteurs], 1942, in-4° oblong, en

ff., couverture, cristal d’origine.

Premier livre illustré par Fautrier, précédé par un projet qui ne vit jamais le jour.Dans les années trente, Malraux, qui travaillait pour Gallimard, proposa au peintre d’illustrer un ouvrage de son choix. Fautrier choisit Les Illuminations de Rimbaud, puis y renonça pour se consacrer à l’Enfer de Dante. L’ouvrage ne fut finalement jamais édité, seules les lithographies firent l’objet d’une exposition à la galerie de la NRF.

L’année 1940 marqua le retour du peintre à Paris. Il se lia alors avec Paulhan, Char, Ganzo, Ponge et Éluard dont il illustra les œuvres.Dans ce premier livre, Ganzo et Fautrier établissent un dialogue sur le thème de la femme, inspiré de la « Vénus de Lespugue » ou « Dame de Lespugue », statuette féminine en ivoire de mammouth, découverte en Haute-Garonne et aujourd’hui conservée au musée de l’Homme.

Pour accompagner ces poèmes, le peintre dessina 11 lithographies en couleurs, la plupart représentant des nus allongés. Il en confia l’impression à Mourlot.

L’un des 90 exemplaires sur papier de Chine.

Édition limitée à 133 exemplaires, tous signés par Ganzo et Fautrier.

Yves Peyré, Peinture et Poésie, pp. 134 et 174 ; Mason, Cabinet des Estampes, Genève, 1986, pp. 74-84 ; Musée d’art moderne de la Ville de Paris, Fautrier, 1898-1964, p. 184, n° 213 ; Musée de la vie romantique, André Malraux et la Modernité, pp. 73-77.

37. BATAILLE (G.) & FAUTRIER (J.). Madame Edwarda. Paris, Chez le Solitaire [Librairie Auguste Blaizot], 1945, in-8, en feuilles, couverture.

Récit érotique, Madame Edwarda fut rapidement rédigé en septembre-novembre 1941. Il compte parmi les premiers ouvrages clandestins parus sous l’Occupation. Sans doute par jeu, Georges Bataille n’en revendiqua jamais clairement la paternité, le signant toujours Pierre l’Angélique, du nom d’un mystique, Angèle de Foligno, qu’il lisait depuis novembre 1939. La première parution eut lieu en décembre 1941, sous des renseignements (éditeur, adresse, achevé d’imprimer, date de publication...) entièrement fallacieux. La réédition de Blaizot, avec les illustrations de Jean Fautrier, se fit en 1945 (sur une date de publication (1942) erronée). L’artiste signa « Jean Perdu », pour faire pendant à l’auteur et à son « angélisme ». Le monogramme sur la couverture mêle d’ailleurs leurs initiales réelles, G[eorges] B[ataille] et J[ean] F[autrier]. En 1956, Jean-Jacques Pauvert lança la troisième édition, avec une préface de Bataille, mais toujours sous l’hétéronyme de Pierre l’Angélique.

31 héliogravures de Jean Fautrier.

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L’artiste parsema le texte de petites vignettes érotiques, reproduites en brique rouge par l’héliogravure. La grande latitude que devait lui laisser, pendant de longues années, l’éditeur Georges Blaizot, son collaborateur, se manifeste déjà : Fautrier choisit le papier ancien, la couleur des gravures et du titre courant, les enrichissements (trois dessins originaux et suite des gravures sur papier chine pour les premiers exemplaires). La simplicité raffinée de ce petit volume est entièrement de son fait. Quant aux vignettes, « petites interventions en forme de rehauts (culs-de-lampe, bandeaux, etc.), au gré desquels les corps s’exhibent dans la solitude, ou, en duo, sinon en trio, s’affrontent et s’enlacent », elles scandent parfaitement la prose rude et outrancière de Bataille.

L’un des 20 premiers exemplaires sur papier ancien, avec une suite à laquelle on a ajouté trois dessins originaux.

Édition limitée à 88 exemplaires.

Yves Peyré, Peinture et Poésie, pp. 134-136 ; Georges Bataille, Romans et récits, La Pléiade, pp. 1115-1132 ; R. M. Mason, Jean Fautrier. Les estampes, pp. 85-115 et pp. 179-180 ; Jean Fautrier, Musée d’art moderne de la Ville de Paris, p. 186.

38. [ALCAFORADO (M.)] & MATISSE (H.) . Lettres portugaises. Paris, Tériade, 1946, in-4°, en ff. couverture rempliée, chemise, étui.

Publié pour la première fois en 1699, ce texte célèbre, anciennement attribué à Mariana Alcaforado, a été récemment restitué à l’écrivain français Guilleragues.

Un livre entièrement conçu par son illustrateur, le peintre Henri Matisse, la mise en pages et les images sont de sa main. Le cycle iconographique est formé de 20 lithographies originales à pleine page, dont 19 sur le thème du visage, ici inspiré par celui d’un jeune modèle russe de 14 ans, Doucia, de cinq titres décorés, cinq départs de chapitres, deux compositions de couverture, 75 lettres ornées et décorations.

L’un des 80 premiers exemplaires, comportant une suite de 12 planches d’étude, soit 12 lithographies originales.

Édition limitée à 270 exemplaires, tous sur vélin d’Arches et signés par l’artiste.

Duthuit, Henri Matisse, Catalogue raisonné des ouvrages illustrés, n° 15.

39. SAINT-JOHN PERSE. Vents. Paris, Gallimard, 1946, in-4°, box janséniste chocolat, dos lisse orné, doublure et gardes de daim havane, couverture et dos, tranches dorées sur témoins, chemise et étui gainés de box (J.-P. Miguet).

Édition originale.

Écrit en 1944, Vents constitue le second grand recueil du cycle américain de Saint-John Perse. Important poème consacré à un élément naturel, il fut publié à la NRF. Qu’il s’agisse des Andes, des hauts plateaux de l’Amérique du Sud ou des grands espaces du Nord..., on retrouve une palette de paysages, américains pour la plupart, ce qui traduit, après Exil, un certain « ancrage » du poète à ce continent. Depuis 1946, sa situation s’est d’ailleurs stabilisée par l’obtention d’une bourse allouée par une fondation privée de mécénat littéraire, la Bollingen Foundation de New York.

L’un des 15 premiers exemplaires sur papier de Chine ; celui-ci est l’un des 5 hors-commerce.

Sobre reliure janséniste des Miguet qui, après avoir dirigé conjointement un atelier à Genève, s’établirent à Paris en 1951.

Provenance : Bibliothèque Fred Feinsilber (ex-libris).

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40. DUBUFFET (J.). Ler dla canpane. Paris, L’Art Brut, 1948, in-12, agrafes, couverture.

Une réalisation célèbre.Paru en 1948, Ler dla canpane est le premier texte en jargon de Dubuffet, calligraphié et illustré par ses soins. La transcription phonétique est, pour le peintre, un moyen de retrouver cette « langue vive », cette « langue de fête », occultée par des siècles de grammaire et d’orthographe, et que l’on aperçoit parfois au détour d’un calembour, d’une injure ou d’une affiche. Plus sérieuse qu’il n’y paraît, cette entreprise pour revivifier la langue généra deux autres textes en 1950 : Avouaiaje par in ninbesil avec de zimage et Labonfam abeber par inbo nom.Typique de l’Art brut, dont il illustre les préceptes, ce menu livre a été réalisé avec les moyens les plus rudimentaires qui soient. Sa genèse est bien connue, grâce à une note explicative de Dubuffet, réalisée des années plus tard, en 1962. Le texte fut calligraphié à l’aide d’un rudimentaire stencil et Dubuffet préféra à la pierre lithographique le linoléum et des supports aussi dérisoires que les fonds de boîtes de camembert et de cirage. Ler dla canpane est connu par deux éditions, l’ordinaire, limitée à 150 exemplaires sur papier journal, et une autre, rarissime, imprimée à 15 exemplaires sur le même support, mais maculés au rouleau encreur et comprenant 2 pages et 4 gravures supplémentaires.

Une version embryonnaire de l’œuvre.Dubuffet y exprime sa sensibilité de manière plus instinctive et radicale. À tous niveaux, ce fascicule au plus près de l’Art brut, fait office de laboratoire.Le texte calligraphié, piqué à plat et couvert de maculatures d’encre, est illisible. Son effacement transforme complètement la nature de l’ouvrage. Réduit à un rôle ornemental, il n’est plus qu’un élément de cette esthétique sauvage véhiculée par les gravures et les effets de matière. Davantage qu’un texte illustré, le livre apparaît alors comme un authentique livre-objet, à la valeur exclusivement artistique et visuelle.C’est bien, ici, l’iconographie qui est le plus sûr vecteur de l’état d’esprit de l’artiste. Jubilatoire et fruste, remplie de griffures et grattages, elle comprend 4 gravures supplémentaires : Danseuse, Tireur de langue, Trois personnages, Personnage et chien. Aux supports déjà employés, linoléum, fonds de boîtes de camembert, Dubuffet a ajouté le feuillard de placage. Figures réjouies ou expressives et paysages graffités forment un bel ensemble. Enfin, poussant jusqu’au bout l’irrévérence, Dubuffet a également ajouté deux pages, page de titre et page de justification, qui dénaturent plus sûrement encore, par leur simple présence, ces rites bibliophiliques dont il se moque, d’autant que la justification destine malicieusement cette édition aux « samatere detrase etdanprinte » [aux amateurs de traces et d’empreintes].

Édition (tirage) limitée à 15 exemplaires chiffrés.

Noël Arnaud, Jean Dubuffet : gravures et lithographies, n° 96-105 ; Jean Dubuffet, Prospectus et tous écrits suivants, I, pp. 475-478 ; Antoine Coron, 50 livres illustrés depuis 1947, n° 6 ; Castleman, A Century of artists books, p. 46.

41. DUBUFFET (J.). Ler dla canpane. Paris, L’Art Brut, 1948, in-12, agrafes, couverture.

Ler dla canpane apparaît comme le premier véritable livre de Dubuffet, si l’on excepte les livres de Pierre Seghers, Paul Éluard et André Frénaud, lesquels sont seulement accompagnés d’une ou deux lithographies extraites de l’album Matière et Mémoire.

Le texte, dont l’orthographe phonétique est propre au peintre, est reproduit au stencil sur papier journal. Six gravures sur fond de boîte de camembert ou sur linoléum tirées en noir, l’accompagnent.La publication d’un tel livre marque une rupture dans l’édition, quelque peu traditionnelle, des livres illustrés de cette époque. C’est l’un des premiers livres de l’Art brut.

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Exemplaire offert par l’artiste à Breton :

C’est au précieux acolyte du Foyer de l’Art brut, mis en chantier dès 1947, que s’adresse Dubuffet. Hormis lui, Breton fut sans doute le plus actif des membres fondateurs de l’institut, qui comptait aussi Paulhan, le marchand d’art Charles Ratton, le romancier et marchand d’art Henri-Pierre Roché, Florence Gould et le peintre Michel Tapié. La volonté du peintre-sculpteur de rassembler, conserver et présenter les œuvres des malades mentaux et marginaux rejoignait l’intérêt que Breton leur portait depuis longtemps, sans qu’il ait songé à les exposer. Séduit par le projet, Breton collecte des fonds auprès de Lise Deharme et autres personnes (lui-même ayant investi 50 000 francs), et signale à Dubuffet d’intéressants objets « bruts » aux puces de Saint-Ouen, tels les masques d’un certain Maisonneuve. Très différents de personnalité, les deux hommes partageaient d’évidentes affinités de pensée, et le paradoxe défendu par Breton que « l’art de ceux qu’on range dans la catégorie des malades mentaux constitue un réservoir de santé mentale » (« L’art des fous, la clé des champs ») aurait tout aussi bien pu être avancé par Dubuffet. Toujours est-il que leur brève mais marquante correspondance porte la trace de stimulants échanges. Dans une lettre de remerciement, Dubuffet s’excuse gaiement d’être « devenu le convive qui demeure à la table jusqu’à 7 heures du soir — et qui de surcroît après cela vous suit encore au café ». « Mille fois pardon à madame André Breton, poursuit-il, je me trouvais si heureux auprès de vous deux et si rempli d’amitié que toute autre notion avait quitté ma conscience » (Lettre du mercredi 7 [juillet 1948], Jean Dubuffet, Prospectus et tous écrits suivants, 2, p. 273).

Bien que le tirage soit non annoncé, il serait de 165 exemplaires, tous sur papier journal.

Noël Arnaud, Jean Dubuffet : gravures et lithographies, n° 96-105 ; Jean Dubuffet, Prospectus et tous écrits suivants, I, pp. 475-478 ; II, Antoine Coron, 50 livres illustrés depuis 1947, n° 6 ; Castleman, A Century of artists books, p. 46 ; M. Polizzotti, André Breton, 188, 290, 634.

42. DUBUFFET (J.). Ler dla canpane. Paris, L’Art Brut, 1948, in-12, agrafes, couverture.Édition décrite au numéro précédent.

Bien que le tirage soit non annoncé, il serait de 165 exemplaires, tous sur papier journal.

La fragile couverture est ici bien conservée.

Noël Arnaud, Jean Dubuffet : gravures et lithographies, n° 96-105.

43. [..]. Poésie de mots inconnus. Paris, Le Degré 41, [1949], in-4° (328 x 257 mm.) de 29 ff. répartis en cinq chemises portant imprimés les noms des collaborateurs représentés à l’intérieur de chacune, le tout contenu dans cinq feuillets doubles formant chemise, eux-mêmes placés dans une couverture de parchemin illustrée [par Ribemont-Dessaignes] avec la mise en garde Ne coupez pas mes pages, couverture de parchemin, enveloppe de même matière.

Poésie de mots inconnus, l’un des plus célèbres recueils d’Iliazd, auquel ont participé plus de quarante poètes et artistes, rassemble, auprès de quelques inédits, une majorité de textes parus de 1910 à 1948. Ils sont l’œuvre de l’avant-garde russe, des principales figures du mouvement Dada, français ou allemand, et d’autres amitiés du Montparnasse des années 1920.Se présentant sous forme de feuillets libres, répartis en cinq chemises, le livre témoigne d’une grande invention typographique.Iliazd publia cette anthologie de la poésie phonétique authentique en réponse à l’ouvrage d’Isidore Isou, Introduction à une nouvelle poésie et à une nouvelle musique, manifeste pour une nouvelle forme de poésie.

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Textes d’Akinsemoyin, Albert-Birot, Arp, Artaud, Audiberti, Ball, Beaudin, Bryen, Dermée, Hausmann, Huidobro, Iliazd, Jolas, Khlebnikov, Krutchonykh, Picasso, Poplavsky, Schwitters, Seuphor, Terentiev, Tzara, ornés par Arp, Braque, Bryen, Chagall, Dominguez, Férat, Giacometti, Gleizes, Hausmann, Laurens, Léger, Magnelli, Masson, Matisse, Metzinger, Miro, Picasso, Ribemont-Dessaignes, Survage, Taeuber-Arp, Tytgat, Villon, Wols.

25 gravures originales in-texte dont 6 bois en noir et en couleurs, 6 eaux-fortes, 2 burins, 3 pointes-sèches, 5 lithographies dont 3 en couleurs, 2 aquatintes et une linogravure en une couleur, et une affiche typographique de Raoul Hausmann.

L’un des très rares exemplaires non pliés ; celui-ci est du tirage à 157 sur papier Isle-de-France à la cuve.

Édition limitée à 171 exemplaires numérotés et signés par l’éditeur.

The Artist and the Book, n° 305 ; Iliazd, Centre Georges Pompidou, 1978, p. 113 ; Cramer, Picasso, Livres illustrés, n° 54 ; Chapon, Le Peintre et le Livre, 209-211 et 293-294 ; 50 livres illustrés depuis 1947, Bibliothèque nationale, n° 7.

44. [..]. Poésie de mots inconnus. Paris, Le Degré 41, [1949], in-8° (171 x 136 mm.) de 29 ff. pliés en quatre répartis en cinq chemises portant imprimés les noms des collaborateurs représentés à l’intérieur de chacune, le tout contenu dans deux feuillets doubles formant chemise, eux-mêmes placés dans une couverture de parchemin illustrée [par Ribemont-Dessaignes] avec la mise en garde Ne coupez pas mes pages, enveloppe de parchemin.

Édition décrite au numéro précédent.

L’un des 157 sur papier Isle-de-France à la cuve.

Édition limitée à 171 exemplaires numérotés et signés par l’éditeur.

The Artist and the Book, n°305 ; Iliazd, Centre Georges Pompidou, 1978, p. 113 ; Cramer, Picasso, Livres illustrés, n° 54 ; Chapon, Le Peintre et le Livre, 209-211 et 293-294 ; 50 livres illustrés depuis 1947, Bibliothèque nationale, n° 7.

45. CENDRARS (B.) & DOISNEAU (R.). La Banlieue de Paris. Paris, Pierre Seghers, 1949, in-4°, cartonnage, jaquette illustrée d’éditeur.

Édition originale, publiée simultanément à Lausanne et à Paris.

Texte de Blaise Cendrars. Contrairement au Paris de nuit de Brassaï, où le patronage littéraire de Paul Morand fut imposé par l’éditeur, celui de Blaise Cendrars fut volontaire et enthousiaste. Véritable initiateur du projet, ce fut lui qui le fit publier et choisit une partie des photographies représentées. Cette collaboration heureuse éclaire la concordance parfaite entre les textes et les images. Familier du reportage pittoresque, Blaise Cendrars apprécie les nouvelles perspectives qu’offre la photographie : Seule la photo peut donner aux gens cet air de famille qu’il est quasi impossible de rendre par l’écriture. Il y a là un art nouveau, gros d’avenir — mais qui me rappelle les enluminures des livres d’heures, qui seules donnent, dans ces atours de fêtes, de travaux de saison, la vie des petites gens de métier, de la naissance à la mort. Cette représentation du quotidien est comme accentuée par le découpage thématique de Doisneau, Gosses, Amour, Décors, Dimanches et fêtes, Loisirs, Travail, Terminus, Habitations. Pour cet artiste qui grandit à Gentilly et vécut à Montrouge, le reportage prend parfois des allures autobiographiques.

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43 - [..]. Poésie de mots inconnus

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Premier livre de Robert Doisneau. 130 photographies de Doisneau, dont plusieurs proviennent de ses reportages pour le magazine Regards : les usines de Renault et de gaz d’Aubervilliers, le mariage sur les bords de la Marne. D’autres furent réalisées pour le livre.

Exemplaire bien conservé.

M. Parr-G. Badger, The photobook : A History, T.I, pp. 187 et 201-204 (« Doisneau’s best book », édition Pierre Seghers) ; A. Roth, The Books of 101 Books, pp. 132-133 (Édition Pierre Seghers) ; Sinibaldi-Couturier, Regards sur un siècle de photographie à travers le livre, n° 94 (jaquette repliée illustrée uniquement pour l’édition parisienne).

46. MICHAUX (H.). Poésie pour pouvoir. Paris, René Drouin, 1949, in-folio, couverture, chemise à charnières en bois rouge de Padouk, premier plat clouté (60 clous).

Édition originale.

Publié en février 1949 par son ami, le marchand-éditeur d’art René Drouin (1905-1979), le livre Poésie pour pouvoir fit l’objet d’une petite exposition. Régulièrement, de 1948 à 1956, le galeriste mettra en avant le caractère plastique de l’œuvre de Michaux, qui accompagne ici son texte d’un frontispice en noir et bleu pâle tiré en offset. Constitué de deux poèmes, « Je rame » et « À travers mers et désert » (auxquels Michaux ajoutera quelques mois plus tard, « Agir, je viens »), la genèse de Poésie pour pouvoir n’est pas complètement élucidée à ce jour. Selon Michel Tapié, ils auraient fait partie d’un important recueil de textes potentiellement efficaces, anéanti par l’auteur à l’exception de quelques pièces, et probablement écrit lors de son voyage en Égypte, entre janvier et avril 1947, avec sa femme convalescente. Deux textes ultérieurs, « Notes sur les malédictions » (1950) et « Pouvoirs » (1959), précisent le sujet de ces deux « poèmes attaques », créés à un moment où, impuissant face à la grave rechute de Marie-Louise, Michaux ressent le besoin d’écrire une poésie qui agisse, qui fasse effet. Conçus comme une sorte d’exorcisme, « Je rame » et « À travers mers et désert » relèvent d’une magie particulière, celle « de la malédiction » : « Grâce au rythme, écrira plus tard Michaux, le mouvement enlève le plus grave de la matière ; son poids, sa résistance. Vitesse, soulagement du mal, du bas, du lourd. Sorte d’anti-matière, idéal au premier degré. » Enthousiaste, Tapié prit l’initiative du livre, qui traduit, notamment par l’idée des soixante têtes de clous enfoncées dans la reliure en bois, toute la pugnacité et l’énergie agressive de ces textes incantatoires. Ils furent également mis en musique par Pierre Boulez le 19 octobre 1958, à Donaueschingen, en Allemagne, de manière à la fois orchestrale et électroacoustique.

Illustration en linogravure et mise en pages de Michel Tapié (1909-1987). Jazzman et critique d’art, il est à l’origine de l’appellation « art informel », à laquelle il commença à réfléchir dès l’après-guerre, en fréquentant notamment la galerie Drouin et ses artistes. La lecture des poèmes de Michaux lui donna la « furieuse envie d’en faire une édition ». Tout l’enjeu fut d’imaginer un livre-objet capable de redoubler la force qui émanait des vers du poète. Les difficultés prodigieuses auxquelles lui et le galeriste René Drouin se heurtèrent alimentèrent le mythe d’un livre magique, que Tapié entretint soigneusement. L’ouvrage fut monté dans l’atelier-garage des Drouin, la fabrication de la reliure cloutée mobilisa toute la famille, son fils, Jean-Claude, coupant les clous à l’aide d’une pince, tandis que René et sa femme agençaient les différentes parties du livre.

Exemplaire de Michel Tapié, enrichi d’un envoi de l’auteur :

Exemplaire de Michel Tapié,en secret

mon compliceHenri Michaux

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Pudique et profond hommage à un collaborateur sans lequel cette œuvre n’aurait jamais vu le jour. Très proche de l’avant-garde artistique parisienne, Tapié se rapprocha de Michaux lorsque celui-ci, après la mort de Marie-Louise le 19 février 1948, se jeta à corps perdu dans l’aquarelle. De cette pratique convulsive, à laquelle le critique d’art assista environ deux mois quasiment jour pour jour, naquit un ensemble de trois cents dessins, exposés à la galerie Drouin en avril de la même année et préfacé par Tapié qui intitula le catalogue Au pays de Michaux. L’un des rares exemplaires avec la chemise en bois rouge de Padouk, ou, comme le dit Tapié, en « bois de corail », clouté, sur fond linogravé reprenant les motifs de la couverture, avec, en plus, le nom de l’auteur. Il est de la première émission et complèterait la liste de Pascal de Saddeler, portant le nombre de ces exemplaires à 7. Non numéroté, il est signé par Michaux et Tapié.

Édition limitée à 46 exemplaires.

Henri Michaux, Peindre, composer, écrire, p. 93 ; Dubuffet-Paulhan, Correspondance, 197.

47. PICASSO (P.) & KOVATCHITCH (I.G.). La Fosse commune. Paris, La Bibliothèque Française, [1948], in-4°, broché, couverture.

Traduction du serbo-croate par K. Stoyanovitch et S. Béraud.

La Fosse commune, le plus violent réquisitoire contre les atrocités oustachies commises sur des Serbes. Élève du poète Vladimir Nazar, Ivan Goran Kavatchitch (1913-1943) s’enfuit de Zagreb en janvier 1943 pour rejoindre l’armée des partisans de Tito. Devenu combattant, il n’en resta pas moins poète, et composa, après avoir noté dans les moindres détails le récit d’un jeune homme jeté dans une fosse commune où les Oustachi précipitaient leurs victimes, un poème en dix chants publié sous le titre La Fosse commune, pour lequel Paul Éluard écrivit Le Tombeau de Goran Kovatchitch.

La Fosse commune est précédé du texte de la conférence prononcée le 12 février 1945 au Théâtre National de Belgrade lors de la commémoration des écrivains yougoslaves tombés au cours de la lutte libératrice, et de l’article de Marko Ristitch paru en serbe dans la quotidien Politika, dans les numéros des 6, 7 et 8 janvier 1945, sous le titre « L’œuvre et la mort d’Ivan Goran Kovatchitch ».Ami de Breton, Ristitch ou Ristic fut le principal théoricien des surréalistes serbes. En 1945, il a été le premier ambassadeur de la nouvelle Yougoslavie en France.

Une gravure au burin de Picasso signée par l’artiste.Figurant deux personnages dans une scène de combat, elle est atypique dans la production graphique du Catalan.

Édition limitée à 110 exemplaires, tous sur vélin d’Arches.

48. CAMUS (A.). La Chute. Paris, Gallimard, 1956, in-12, broché, couverture.

Édition originale.

« L’homme qui parle dans La Chute se livre à une confession calculée. Réfugié à Amsterdam dans une ville de canaux et de lumière froide, où il joue à l’ermite et au prophète, cet ancien avocat attend dans un bar douteux des auditeurs complaisants.Il a le cœur moderne, c’est-à-dire qu’il ne peut supporter d’être jugé. Il se dépêche donc de faire son propre procès mais c’est pour mieux juger les autres…Où commence la confession, où l’accusation ? Celui qui parle dans ce livre fait-il son procès ou celui de son temps ? … Une seule vérité en tout cas, dans ce jeu de glace étudié : la douleur, et ce qu’elle promet. » (Prière d’insérer, NRF, mai 1956).

L’un des 35 premiers exemplaires sur vélin de Hollande.

Exemplaire broché, parfaitement conservé.Condition rare.

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47 - PICASSO & KOVATCHITCH

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49. LUCIEN DE SAMOSATE & LAURENS (H.). Dialogues. Paris, Tériade, 1951, in-folio, box noir, mosaïque de box noir glacé, dessin de Laurens peint à la laque blanche, symétrique sur les deux plats, dos orné du titre en lettres blanches, doublures et gardes de daim noir, tranches dorées sur témoins, couverture illustrée, chemise et étui gainés de maroquin noir (Creuzevault).

Troisième fruit de la collaboration entre Laurens et Tériade.Dialogues, recueil de quatre textes, est illustré de 24 gravures originales sur bois en couleurs, au dessin rigoureux et vivant.

L’un des 25 exemplaires hors-commerce ; celui-ci, comme les 40 premiers, comporte une suite sur chine des gravures.

Reliure de Creuzevault réalisée d’après une maquette de Laurens.Cette reliure fut conçue en 1952 et exécutée à 6 exemplaires en collaboration avec le sculpteur, le dessin au trait de Laurens étant reproduit à la laque et Creuzevault interprétant les motifs décoratifs des fonds (Henri Creuzevault, tome VI, n° 220, reproduit p. 522).

Édition limitée à 275 exemplaires sur vergé d’Arches, tous signés par l’artiste.

Rauch, Les Peintres et le Livre, n° 127 ; Chapon, Le Peintre et le Livre, pp. 220-222 ; Hommage à Tériade, p. 115 ; Victoria & Albert Museum, From Manet to Hockney, n° 125 ; A. Brès et M. Arveiller, Henri Laurens, 1885-1945, n° 155 (« La verticalité des planches est accusée par la conjugaison d’une seule couleur sombre avec le noir, couleur qui varie avec chaque série de dialogues : noir et marron pour les Dialogues des dieux, bleu et vert comme la mer pour les Dialogues des marins... »).

50. FRANK (R.). Les Américains. Paris, Robert Delpire Éditeur, 1958, in-12 carré, cartonnage illustré d’éditeur.

Édition originale.L’année suivante, une édition américaine avec une préface de Jack Kerouac fut publiée par Press Grove à New York.

Textes réunis par Alain Bosquet. D’Alexis de Tocqueville à Simone de Beauvoir, ce livre de photographie consacré à la culture populaire américaine des années cinquante, donne la parole à une douzaine d’écrivains célèbres.Cette approche, française et littéraire, fut ajoutée à la demande de l’éditeur, Robert Delpire, qui fut le premier à introduire le travail de Robert Frank en France, en publiant en 1956 son reportage pour le magazine Life, « Indiens pas morts ». Elle confère au livre un aspect sociologique, absent de l’édition américaine.

83 photographies de Robert Frank imprimées en héliogravures à pleine page. Elles forment une sorte de manifeste esthétique de l’artiste, qui fréquenta dans le quartier new-yorkais de la 10e rue les principaux tenants de l’expressionnisme abstrait, et obtint pour ce projet qu’il voulut mener en toute liberté, une bourse de la Fondation Guggenheim. Robert Frank parcourut les États-Unis d’avril 1955 à juin 1956 et collecta une grande diversité de portraits : jeunes Noirs, camionneurs, étudiants, starlettes hollywoodiennes, politiciens... Entre ces personnes si différentes, certaines concordances s’établissent : un geste repris, une attitude similaire...La couverture est plastifiée et illustrée d’après un dessin de Saül Steinberg.

Exemplaire en belle condition. Cartonnage bien conservé.

M. Parr-G. Badger, The Photobook I, p. 247 ; A. Roth, 101 Books, p. 150 (version américaine); Open Book, pp. 176-177 (version américaine) ; A. Sinibaldi – J.-L. Couturier, Regards sur un siècle de photographie à travers le livre, 120 (version française).

Voir reproduction en page de titre

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51. SAINT-JOHN PERSE. Amers. Paris, NRF, 1957, in-4°, maroquin citron pâle, plats partagés verticalement par un listel de box bleu, traversé, sur le premier plat, par une double bande formée de listel blanc, dos lisse avec titre en long, couverture et dos, tranches dorées, chemise et étui gainés de même peau (Renaud Vernier, 2006).

Édition originale.

Dédié à la gloire de la mer, le poème fut rédigé à Seven Hundred Island dans le Maine, dans les années 1953-1954 et se compose de trois parties, Invocation, Strophe et Chœur. C’est le plus long jamais écrit par Saint-John Perse, qui a délibérément attendu d’être en mesure d’offrir « un chant de mer comme il n’en fut jamais chanté ». Pour lui, cette marche vers l’océan illustre la quête errante de l’esprit moderne. Elle est représentée par toutes sortes de personnages mythiques (tragédiennes, patriciennes, poétesse...) dont l’auteur orchestre les récitations. Il en résulte un puissant souffle lyrique, qui fait de ces strophes l’aboutissement de ses recherches poétiques. Après sa publication en 1957, la renommée de Saint-John Perse croît rapidement. L’année suivante, Amers paraît chez Bollingen, dans une édition bilingue. En 1962, il est publié avec des lithographies originales d’André Marchand par les Bibliophiles de Provence, et exposé à la galerie La Hune.

L’un des 35 premiers exemplaires sur vélin de Hollande van Gelder.

Reliure à décor minimaliste de Renaud Vernier.

[...], Saint-John Perse et ses illustrateurs : « un compagnonnage », 1887-1975, pp. 111-129.

52. KLEIN (W.). Life is good & and good for you in New-York. Paris, Éditions du Seuil. Album petite planète, I., 1956, in-4°, broché, jaquette illustrée à rabats.

Édition originale de ce livre mythique.

Livre illustré d’environ 200 photographies en noir et blanc.Après six années passées à Paris, William Klein revint à New York sur la proposition du directeur artistique de Vogue, Alexandre Liberman, pour intégrer le célèbre magazine. En réalité, à peine arrivé, l’artiste enchaîna directement sur ce projet, toujours encouragé par Liberman qui avait convaincu Conde Nast de le subventionner. Trop en rupture avec les principes éditoriaux de l’époque, cette œuvre ne trouva pas d’éditeur américain, et fut publiée à Paris en 1956 aux Éditions du Seuil, grâce à Chris Marker. La révolution esthétique initiée par l’auteur découle naturellement de ce regard d’expatrié posé sur la culture américaine. Artiste plutôt que photographe professionnel, le spectacle new-yorkais émerveille Klein : « Toutes les lumières et les sons que j’avais manqués, ou oubliés, ou que je n’avais jamais connus m’apparurent avec une extraordinaire netteté. » Rejetant la « belle image », il garda les imprévus de la prise photographique, parfois hasardeuse, des différents quartiers de la ville, accumulant des images décadrées, brouillées, bougées. La maquette et les choix typographiques étant aussi de son fait, le livre est son œuvre à part entière, comme le seront Rome (1958), Moscou et Tokyo (1964).Tous les reporters ayant initié leurs œuvres dans les années 70 se réclameront de ce monument.

Exemplaire bien complet du petit carnet de 16 pages rédigé en français, comprenant la table des photographies commentées par l’artiste et illustré de découpages publicitaires. Malgré quelques défauts, la jaquette est ici restée en bonne condition.

A. Roth, The Book of 101 Books, pp. 140-141 ; M. Parr-G. Badger, The photobook, A history, volume I, p. 243 ; William Klein, Rétrospective, Centre Pompidou, pp. 32-78 ; B. Govignon, La petite encyclopédie de la photographie, pp. 132-135.

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53. DUCHAMP (M.). Marchand de sel. Paris, Le Terrain Vague, 1959, in-8°, maroquin vert, fenêtre centrale de box noir orné de ressorts et pièces d’horlogerie figurant, de trois quarts, le visage de Duchamp, dos lisse, couverture rempliée, tête dorée, non rogné (G. Leroux, 1969).

Édition originale collective.

Publié en 1959, Marchand de sel regroupe les divers écrits de Marcel Duchamp (1887-1968). Inaugurant la collection « 391 » de Michel Sanouillet, du nom de la revue créée et animée par Francis Picabia de 1917 à 1924, le recueil éclaire une œuvre cérébrale et fondamentale pour l’art du XXe siècle, d’autant plus difficile à appréhender que son auteur a toujours répugné à la commenter. C’est ici avec son concours que Michel Sanouillet sélectionna et ordonna les textes, commençant par les notes et croquis relatifs au Grand Verre, La Mariée mise à nu par ses célibataires mêmes, auquel Duchamp travailla de 1913 à 1924. Jamais achevé, son impact sur le monde de l’art fut immense ; Duchamp était sans doute le premier peintre à prendre la science pour sujet de ses œuvres, rejoignant une autre grande figure de l’art, Léonard de Vinci, dans cette fascination des innovations scientifiques. Succèdent ensuite les écrits de Rose Sélavy, identité d’emprunt inventée en 1920 (après que l’artiste se fut maquillé et déguisé en femme, plaisanterie immortalisée par Man Ray) et qui devint une sorte d’alter ego, de double féminin de Duchamp, bien connu des dadaïstes. On trouve aussi les Jugements et critiques de ses contemporains et des textes divers signés par l’auteur sous son nom ou celui de Rose Sélavy.Ayant officiellement arrêté de peindre en 1923, Marcel Duchamp a exercé sur l’art une influence décisive, détruisant, par chacune de ses créations et concepts, dont le ready-made est peut-être le plus connu, les règles séculaires de la peinture sur chevalet.

L’illustration comporte une couverture illustrée du portrait de Duchamp, une reproduction photographique de la Mariée imprimée sur rhodoïd transparent dépliant, en frontispice, et 23 planches de reproductions photographiques hors-texte en noir.

L’un des 50 premiers exemplaires sur auvergne à la forme, dont 10 hors-commerce, signés par Duchamp, Sanouillet et Poupard-Lieussou.

Reliure originale de Georges Leroux, datée 1969, en hommage à Duchamp disparu. D’inspiration dadaïste, elle rappelle la curiosité passionnée de ce dernier pour les machines, étendue aux innovations techniques, aux rayons X, à la quatrième dimension et à la vitesse, toujours interprétées sur le mode de l’humour, et comportant volontiers une dimension érotique. Picabia, qui le premier détecta toute la modernité de ses premières toiles mécanomorphiques, réduisant l’anatomie humaine à une mécanique, exploita à son tour le champ d’investigation ouvert par son cadet et ami.

Exposition : Bibliothèque nationale, Reliures, 1978, n° 69.

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54. FRÉNAUD (A.) & ESTÈVE (M.). Tombeau de mon père. Paris, Éditions Galanis, 1961, in-4°, en ff., sous couverture imprimée, étui-chemise cartonnée recouvert de toile grise.

Édition originale.

Parmi les principaux poètes français de la seconde moitié du XXe siècle, André Frénaud fut également un amoureux du livre illustré. Il en connut rapidement les artisans et amateurs et réalisa dès l’après-guerre, à côté de la publication régulière de ses recueils chez Gallimard, un certain nombre d’éditions illustrées par Dubuffet, Miro, Raoul Ubac, Jean Bazaine, Jacques Villon, Jean Fautrier...

Le Tombeau de mon père vit le jour grâce à Sylvie Galanis. Poursuivant le dialogue entamé avec Maurice Estève en 1955 (C’est à valoir), Yves Frénaud médite ici sur la relation filiale et la figure du père, amplifiée par l’absence. « Long poème d’adieu qui n’en est pas un », Tombeau du père serait plutôt, selon Yves Peyré, « la persistance d’un regret balbutié jusqu’au retour ».

7 eaux-fortes originales de Maurice Estève. « Lithographe surdoué », l’artiste a délibérément choisi la sobriété, s’en remettant au noir et à l’eau-forte. Les surfaces, harmonieusement disposées, sont entre abstraction et figuration. Leur coloration subtile oscille entre le gris, le bistre, le marron sourd, et une touche de bleu.

L’un des 79 exemplaires sur papier d’Auvergne à la main de Richard-de-Bas ; celui-ci est l’un des 10 exemplaires numérotés de 22 à 31, auxquels on a joint une suite complète des gravures sur auvergne vert céladon. Chaque planche est ici signée.

Édition limitée à 100 exemplaires, tous signés par l’auteur et l’artiste.

Y. Peyré, Peinture et poésie, Le dialogue par le livre, p. 169 et cat. 79.

55. BOUVIER (N.). L’Usage du monde. Récit. Genève, Droz, 1963, in-8°, broché, couverture illustrée.

Édition originale.

L’Usage du monde de Nicolas Bouvier, illustré par Thierry Vernet, est le récit du voyage mené par les deux amis de Genève à Kaboul entre juin 1953 et décembre 1954. La route, effectuée au volant d’une vieille Fiat Topolino, les conduit de la Yougoslavie à la Turquie, l’Iran, le Pakistan et l’Afghanistan, où s’achève leur périple. Il s’agit du récit ébloui et douloureux à la fois, d’un parcours initiatique « qui tient plus d’Une saison en enfer et de Kerouac que d’un reportage comme en publiait, pour nos arrière-grands-pères, la revue Le Tour du monde ». Pour Nicolas Bouvier en effet, le voyage n’est pas une parenthèse dans la vie, c’est la vie même. « On croit qu’on va faire un voyage, mais bientôt c’est le voyage qui vous fait ou vous défait », écrit-il. Cette philosophie du voyage est servie par une prose magnifique et fluide, où le sens du détail donne du relief à chaque scène...

L’Usage du monde, publié dans l’indifférence générale et à compte d’auteur chez Droz en 1963 à deux mille exemplaires, et dont la réédition en 1985 établira enfin la renommée littéraire de Bouvier, est devenu au fil des années un véritable classique. Il suscite un intérêt croissant et des lecteurs fervents, comme en témoigne l’édition récente chez Gallimard, de ses œuvres complètes.

48 dessins de Thierry Vernet.

Exemplaire en belle condition.

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56 - VAN DER ELSKEN & HOSOE

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56. VAN DER ELSKEN (E.) & HOSOE (E.). Otoko to Onna. Man and woman. Tokyo, Camer Art Inc, 1961, in-8°, couverture jaune à la bradel, jaquette illustrée, bande annonce et emboîtage.

Édition originale.

Poèmes de Taro Yamamoto, textes d’Ed van der Elsken et de Tatsuo Fukushima. Le premier s’intitule Eikoh Hosoe et le second Image and Idea. Rédigés à la demande de l’artiste, ils mettent en avant le caractère innovant de son travail, dans un domaine où le corps est souvent traité de manière romantique, esthétisante ou pudibonde. L’ouvrage fut récompensé par le prix de jeune photographe de l’Association des critiques de la photographie en 1961, l’année de sa parution.

33 photographies en noir et blanc d’Eikoh Hosoe. D’une grande intensité graphique, ces photographies sont d’une rare élégance et confinent progressivement à l’abstraction. Hosoe croit au dialogue entre les sexes, à la fusion de ces corps diaphanes, presque abstraits, symboles pour lui de l’essence de la vie. Le goût de l’artiste pour la mise en scène s’exprime notamment à travers les accessoires : une pomme, une fleur, un poulpe. Né en 1933, Eikoh Hosoe fut l’un des principaux photographes japonais de l’après-guerre. En 1959, il fonda l’agence Vivo avec Shomei Tomatsu et Ikko Narahara. Le livre qu’il consacra en 1963 à l’univers baroque de l’écrivain Yukio Mishima, Ordeal by roses, fut salué dans le monde entier.

La maquette de la couverture fut réalisée par Minoru Araki.

Exemplaire bien complet de la bande annonce et du texte original en anglais de Van der Elsken.

M. Parr-G. Badger, The Photobook, A History volume I, p. 279 ; Japon 1945-1975, Un renouveau photographique. Paris, Marval, 2003, pp. 10, 92-96, reproduit.

57. MISHIMA (Y.) & HOSOE (E.). Barakei Shinshuban. Killed by roses. Tokyo, Shueisha, 1963, in-folio, toile illustrée, jaquette acétate transparente, boîte d’éditeur.

Édition originale.

Texte de Yukio Mishima.

42 photographies de Hosoe, dont deux imprimées sur des pages à rabats, et 4 compositions de Kohei Suigiura imprimées sur papier japon transparent. Mishima admirait en Eikoh Hosoe le photographe du célèbre danseur Tatsumi Hijikata. Il le sollicita en 1961 pour illustrer son recueil d’essais critiques, L’Assaut de la beauté. De cette première collaboration naquit le livre de portraits de l’écrivain, qui confia plus tard avoir été physiquement transporté dans un monde étrange. Le tour particulièrement théâtral qu’Hosoe conféra aux images rendit l’ouvrage célèbre. Tout d’abord, il fit appel à d’autres modèles : les deux danseurs Hijikata et Motofuji et l’actrice de cinéma Kyoko Emani. Il les fit évoluer devant une toile peinte d’après la Vénus endormie de Gorgione, commandée à cette occasion. Des objets de Mishima complétèrent ce somptueux décor. Le résultat fut la création d’un véritable choc esthétique, auquel tout concourt : la présence obsédante des corps, l’éclairage, le décorum, à la fois kitsch et poétique...La créativité du célèbre graphiste Kohei Suigiura, auteur de la mise en pages et des compositions en prélude, contribua largement à cet effet. Publié en 1963, le livre sera entièrement revisité quelques années plus tard, notamment par un autre maquettiste, Tadanori Yokoo, et paraîtra sous le nom d’Ordeal by roses.

Exemplaire en belle condition, état rare.

Édition limitée à 1 500 exemplaires, tous signés par l’artiste et l’écrivain.

M. Parr - G. Badger, The Photobook, A history vol. 1, pp. 280-281 ; Andrew Roth, The Books of 101 books, pp. 164-165 ; A. Wilkes Tucker-D. Friis. Hansen-K. Ryuichi-T.Joe, The History of the Japanese photography, 4, 219, 344, 351.

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58. GONET (J. de). Album. Concours Objet 2000. [décembre 1985], in-4° de 38 ff., revorim mat original avec la mention « Objet 2000 - Proto Zéro ».

Document essentiel pour l’histoire de la reliure, présenté par Jean de Gonet comme étant unique (Colophon. Vendredi 13 décembre, 1985, exemplaire unique).

Destiné au collectionneur Fred Feinsilber par son auteur, fraîchement auréolé du premier prix du Concours Objet 2000, cet ensemble, réalisé à la main, à l’ordinateur ou photocopié, s’articule autour de trois parties, une introduction, rapide coup d’œil sur ce qu’était la reliure à la veille de ce concours, puis suit un descriptif technique de ce que devait être une reliure pouvant répondre aux critères requis par ce dernier, un objet nouveau et suffisamment avancé sur son temps pour prendre place dans notre environnement futur, et, comme noyau central, intitulé Concours Objet 2000, la genèse et les différentes étapes qui permirent d’élaborer cette fameuse reliure semi-industrielle en « RIM » souple.L’idée première était de proposer un système nouveau, satisfaisant sur le plan de la conservation, agréable à l’œil, d’un prix abordable, en adaptant les techniques que le praticien employait déjà pour ses cuirasses de création, à un système semi-industriel, afin de produire en série des reliures de faible prix, tant pour les institutions que pour les particuliers, répondant ainsi à une nécessité, celle de pouvoir conserver les livres.Pour ses reliures artisanales ou de création, Jean de Gonet avait auparavant mis au point un système fondé sur la dissociation des plats, réglant définitivement le problème de l’ouverture d’un livre, qui était enfin totale.Le « RIM », le matériau nouveau, est un élastomètre à double composant, polyol et isocianate, qui se moule à basse pression. Il avait fait ses preuves dans l’industrie automobile.Ce projet de reliure, avant d’être présenté au Concours Objet 2000 qui permit de financer un moule à la marque « De Gonet, Artefacts », dont les premières épreuves connues, chacune avec des variantes, portent le label Proto 1, 2, 3 ou 4, ne peut être évoqué sans mentionner l’épisode Dominique Bozo, directeur, et Daniel Abadie, conservateur de la bibliothèque du Musée d’Art moderne.À sa demande, Daniel Abadie chargea le relieur d’une mission, élaborer deux prototypes, l’un destiné aux ouvrages courants du musée, le second, pour ceux de la réserve. Ce projet figure ici dans sa totalité, avec notamment la maquette du plat Beaubourg au dessin choisi par le conservateur et dont le moule fut réalisé gracieusement par l’un des fidèles du praticien. Le projet n’aboutissant pas, intervint alors Jean Toulet, conservateur à la réserve des imprimés de la Bibliothèque nationale, passionné de reliure ancienne et moderne, qui suggéra au relieur de présenter son invention au Concours Objet 2000. Puis vont se succéder le dépôt du brevet, en Europe et aux États-Unis, et la création de la SARL Jean de Gonet Artefacts.

Une intéressante sous-partie traite de l’élaboration du moule, en époxy armé, depuis son étude graphique à sa réalisation à 4 empreintes, dans un souci d’économie.

9 photographies de reliures, maquettes de plats en « RIM » réalisées à l’ordinateur, et en colophon, L’homme-volant, constituent l’iconographie.

Annotations et corrections manuscrites à l’encre palladium.

L’Album, monté sur onglets, est conservé dans une boîte à dos de veau.

La reliure est l’une des toutes premières en RIM.

59. GONET (J. de). Reliures. Paris, Chez Cl. Guérin, 1982, in-8°, couverture et dos revorim Jean de Gonet portant la mention PROTO 3 sur le premier plat, et OBJET 2000 sur le second, chemise, étui.

Première exposition exclusivement consacrée à Jean de Gonet, organisée par Claude Guérin.

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Préface de Jean Toulet.

Rédaction et description par Antoine Coron.

En 1985, à la demande de Dominique Bozo, directeur, et de Daniel Abadie, alors conservateur de la bibliothèque du Musée d’Art moderne, Jean de Gonet conçut et réalisa un prototype de reliure radicalement différent des reliures habituelles de bibliothèques, par sa méthode de réalisation et par le matériau, moulé, qui constitue ses plats.Jean Toulet conseilla alors à Jean de Gonet de présenter cette reliure au Concours Objet 2000 qui se proposait de primer un objet contemporain et d’en financer l’exécution.Ce premier moule, réalisé à la marque de De Gonet Artefacts, a donc été financé par ce concours dont le praticien remporta le premier prix.Ce prototype est l’un des trois que Jean de Gonet réalisa sur son catalogue. C’est donc une des trois toutes premières reliures en RIM qui ait été réalisée, conjointement à la création de la SARL Jean de Gonet Artefacts et au dépôt du brevet.Des trois prototypes, celui-ci a été offert par le praticien à Fred…, la cheville ouvrière de ce projet.

L’une des pages de garde est couverte de ce texte manuscrit, daté janvier 1986 :

Mon cher Fred,la page des prototypes est terminée,

et celle du concours « OBJET 2000 » aussi.Je suis heureux que celui-ci rentre dans tes « archives » puisque ton

laboratoire est la cheville ouvrièrede ma tentative de coup d’État

au pays des reliures, des relieurs et des bibliophiles.

Le « REVORIM » a fait mouche du premier coup ; tu peux t’en réjouir avec moi.

Amicalement J. de Gonet.

L’exemplaire est enrichi d’un frottis, maquette d’une reliure.

60. KIEFER (A.). Die Unegeborenen. Une rêverie émanée de mes loisirs VII. Paris, Lambert, 2002, in-4°, broché, couverture, boîte d’acier brossé.

Collage de cendres et de plomb sur photographies numériques.

« Les livres ne se contentent pas d’accompagner la création de Kiefer, comme une production secondaire ou un commentaire. Ils y occupent une place centrale en constituant à la fois un lieu d’entrecroisement pour ses autres réalisations (installations et performances, sculptures et gravures, etc.), le creuset d’œuvres à venir ou l’aboutissement de réalisations antérieures. En tant que tels, ils sont un élément essentiel de son travail, un des plus significatifs et des plus fascinants. »

L’un des 108 exemplaires, numérotés de 1 à 108.

Édition limitée à 150 exemplaires, tous sur le même papier et signés par A. Kiefer.

D. Arasse, A. Kiefer, p. 47.

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