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Historique du système de sécurité sociale en France. Sommaire : Introduction Chapitre I : Les origines de la sécurité sociale, de Bismarck à Beveridge. 1. Le modèle allemand. 2. Le cas anglais. Chapitre II :Les débuts de la protection sociale en France. 3. Les racines de la sécurité sociale. 4. De la loi du 30 avril 1930 au plan français de sécurité sociale de 1945. Chapitre III : De 1945 à nos jours. 5. La réforme de la sécurité sociale. 6. La sécurité sociale d’aujourd’hui. Conclusion Bibliographie Table des matières

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Historique du système de sécurité sociale en France.

Sommaire   :

Introduction

Chapitre I : Les origines de la sécurité sociale, de Bismarck à Beveridge.

1. Le modèle allemand.

2. Le cas anglais.

Chapitre II : Les débuts de la protection sociale en France.

3. Les racines de la sécurité sociale.

4. De la loi du 30 avril 1930 au plan français de sécurité sociale de 1945.

Chapitre III : De 1945 à nos jours.

5. La réforme de la sécurité sociale.

6. La sécurité sociale d’aujourd’hui.

Conclusion

Bibliographie

Table des matières

Introduction

En France, l’Etat régalien se doit faire respecter l’ordre à travers la police, l’armée et

la justice. Et du même fait, l’Etat doit s’assurer de la protection de toute personne résidente

sur le territoire et des français non résident. Mais plus qu’une question policière ou judiciaire,

une question sociale s’est alors posée. Aujourd’hui, cet ordre social est garanti par la sécurité

sociale. Les conversations du « café du commerce » nous laisserons entendre que c’est une

institution dont les français sont fier, qui permet au plus grand nombre de survivre dans cette

France trop proche du libéralisme. Et pour d’autre, elle est le fruit de beaucoup des maux de la

dette publique, avec un déficit croissant chaque année. Il serait alors intéressant d’observer

comment s’est développer cette idée de sécurité social, avec comme point d’orgue la création

de celle-ci, et par quel mécanisme la sécurité sociale du XXIè siècle est ce qu’elle est (on

pensera évidemment à la mise en place de la couverture maladie universelle en l’an 2000).

Dans cette optique, nous nous proposons d’étudier l’histoire de la sécurité sociale.

En premier lieu, nous observerons les deux systèmes, de Bismarck et de Beveridge, qui ont

marqué le monde protection sociale, avec respectivement la mise en place des assurances

sociales pour l’un et sa planification pour l’autre.

Ensuite, nous nous attacherons à voir d’une part comment la France a su développer ses

propres moyens de protections sociales et d’autre part comment à partir des avancées réalisées

en Allemagne et au Royaume-Uni, la France a fini par mettre en place la sécurité sociale.

Enfin, dans un dernier temps, nous analyserons les dernières réformes de la sécurité sociale

depuis sa création et nous essaierons de résumer l’organisation actuelle de cette institution.

En ce qui concerne l’analyse des deux premières parties, nous nous appuierons principalement

sur l’ouvrage collectif, Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, qui traite le cas des trois pays

cités. Et pour ce qui du traitement structurel du dernier chapitre, nous reviendrons le plus au

souvent au livre de G. Dorion et A. Guillonnet, La sécurité sociale.

Chapitre I : Les origines de la sécurité sociale, de Bismarck à

Beveridge.

1. Le modèle allemand.

L’Allemagne fut selon Gerhard A. Ritter « le premier pays  à se doter d’une nouvelle

forme, relativement complète, de sécurité sociale […] qui sous Bismarck créa dès 1880, une

assurance obligatoire en matière de maladie, accidents du travail, vieillesse et invalidité, pour

une grande partie de la population et notamment les travailleurs »1. Bismarck s’intéressa à la

législation sociale par « crainte que la classe ouvrière ne constitue un danger pour l’Etat. »2. Il

a ainsi l’idée de lier la classe ouvrière à l’Etat grâce à des prestations sociales. D.Zöllner

insiste ainsi sur le fait que « dans la mesure où sa politique sociale était, avant tout, un moyen

pour lui d’atteindre un but, Bismarck était en principe ouvert aux méthodes de mise en œuvre

de cette politique – avec cependant un bémol – le refus de protéger les travailleurs dans le

cadre de leur vie professionnelle. »3 dans un souci de maintien de la concurrence de l’industrie

allemande vis-à-vis de l’étranger. Il maintiendra donc le travail de nuit et le travail dominical.

C’est ainsi, que dans une Allemagne déjà profondément sociale, avec « les articles 20 et

28 de la Loi fondamentale de la République fédérale sous les termes d’ « Etat fédéral

social » (sozialer Bundesstaat ou Rechtsstaad social). »4, Bismarck prononcera en 1881, le

message impérial. Ce discours annonçait le premier plan complet de création d’un système

public d’assurance sociale pour les travailleurs.

1.1 Les différentes formes de protections sociales et les premières lois.

Comme nous l’explique G.A. Ritter, il est nécessaire d’étudier les traditions allemandes

« pour expliquer le rôle pionner joué par l’Allemagne dans l’avènement de l’assurance

1 RITTER G.A., « La sécurité sociale en Allemagne de Bismarck à nos jours », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.7, l.26

2 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p. 25, l. 25.

3 Ibid, p.26, l. 36.

4 RITTER G.A., « La sécurité sociale en Allemagne de Bismarck à nos jours », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.7. l.11-14

sociale. »5. Ce système se compose des quatre méthodes que connaît la protection sociale :

l’épargne, l’assistance, les obligations à la charge de l’employeur et l’assurance6.

1.1.1 L’assistance.

On passera directement à l’assistance, sans discuter de l’épargne, qui comme nous

l’explique D. Zöllner, n’a pas « d’importance pratique ». L’assistance a pour but comme son

nom l’indique d’assister les plus pauvres en leur offrant l’aumône. D’abord pratiquer par

l’Eglise, les villes se chargèrent ensuite d’apporter leurs aides, en subventionnant la création

d’hôpitaux puis en créant leurs propres institutions pour indigents. Une réglementation de

cette pratique apparue au milieu du XIXème siècle, dans le cadre de la Loi prussienne de 1842

sur l’obligation en matière d’assistance aux indigents. Celle-ci affirmait que les communes

avaient l’obligation d’offrir une aide pour le « maintien du minimum vital »7. D.Zöllner

insiste ensuite sur le fait que c’est cette assistance ancienne qui engendra l’aide sociale

d’aujourd’hui, avec les subventions pour le financement public et ce qu’il appelle

« l’application du principe du besoin », qui n’est autre que la compensation sociale.

1.1.2 Les obligations de l’employeur.

Les obligations de l’employeur sont des institutions sociales pré-existantes dans de

nombreuses entreprises prussiennes. On y recensera ainsi, l’assurance accidents et les caisses

maladies et de secours. Là encore, D. Zöllner montre que la législation va venir se greffer sur

les traditions. Il y eut tout d’abord, l’Ordonnance prussienne de 1801, obligeant les maîtres à

subvenir à leur personnel en cas de maladie. Puis, c’est le « Code de commerce allemand de

1861 qui ordonnait à l’armateur de prendre en compte les frais imposés par les soins et la

guérison d’un marin »8. Ensuite, en ce qui concerne les accidents du travail, la Loi impériale

de 1838, complétée par une loi de 1969, instaurait la notion de responsabilité des entreprises

de chemins de fer vis-à-vis des personnes transportées. C’est ainsi que les entrepreneurs

prirent la décision de s’assurer contre les accidents dont ils étaient civilement responsables.

Dans le système des assurances sociales, on nommera cette obligation : « la contribution de

l’employeur et du financement exclusif par l’employeur de l’assurance accident. »9.

5 RITTER G.A., « La sécurité sociale en Allemagne de Bismarck à nos jours », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.9, l.4.

6 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.30, l.44.

7 Ibid, p.32, l.11.

8 Ibid, p.33, l.6.

9 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire

1.1.3 L’assurance.

L’assurance s’est d’abord développée à partir de l’assurance maritime et de

l’assurance incendie. Sur la période de 1833-1857, on observa la création de 50 compagnies

d’assurances. Cependant, comme le dénote D. Zöllner, l’assurance privée n’a eu qu’un faible

rôle dans la mise en place de l’assurance sociale et n’a été aucunement bénéfique pour les

classes les plus pauvres. Mais l’introduction de caisse de secours peut tout de même présager

du futur financement des assurances sociales. Ce sont les corporations qui ont les premiers

mis en place ce système de caisses de secours. Chaque membre était sensé cotiser auprès de la

caisse, pour qu’en cas de maladie ou autres impairs médicaux, il soit couvert par la caisse.

Ces corporations disparurent avec l’établissement du « Code du commerce prussien de

1845 qui aboli tous les privilèges » de celle-ci10, mais les caisses de secours purent continuer

d’exister. D. Zöllner continue : « Une étape importante de l’évolution fut franchie avec un

règlement de 1849. Les communes furent autorisées à adopter un statut local tendant :

- à déclarer obligatoire pour les ouvriers des fabriques aussi l’adhésion aux caisses de

secours,

- à obliger les propriétaires des fabriques à verser aux caisses de secours des travailleurs

des contributions pouvant aller jusqu’à la moitié de la somme à la charge des

travailleurs qu’ils employaient,

- à obliger les propriétaires des fabriques à verser des contributions aux caisses de

secours des travailleurs, sous réserves d’imputer cette somme sur le prochain

salaire. »11.

En 1874, l’Allemagne comptait environ 10 000 caisses de secours regroupant deux

millions de membres. L’auteur allemand apporte là encore son bémol, en soulignant que seul

une minorité des ouvriers (qui étaient au nombre de 8 millions à cette époque) adhéraient à

ces caisses.

1.1.4 L’assurance sociale de Bismarck.

C’est en 1880, que le chancelier allemand décida d’instaurer sa politique sociale, avec

pour commencer la mise en place d’assurance obligatoire, pour au début l’assurance accidents

seulement. Puis, vint le discours du 17 novembre 1881 sous le nom de message impérial

définissant la nouvelle politique sociale de l’Allemagne, et qui en plus de prendre en compte

Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.34, l.5.

10 Ibid, p.35, l.22.

11 Ibid, p.35, l. 29-39.

l’assurance accidents, faisait allusion à l’assurance maladie ainsi qu’un secours étatique

important en cas de vieillesse et d’invalidité.

L’assurance maladie fut mise en place par le biais des nombreuses caisses de secours

existantes. Et les cotisations se décomposaient comme suit : deux-tiers à la charge de

l’employé et le reste à la charge de l’employeur. Cette loi fut adoptée le 31 mai 1883 par le

Reichstag et mis en vigueur le 1er décembre 1884.

Quant à l’assurance invalidité, il fut beaucoup plus difficile de la mettre en place du

fait d’un refus de la part des industrielles de voir cette assurance confiée aux coopératives.

Bismarck usa de son poids politique pour faire passer la loi. Et pour la première fois, une

assurance sociale fut financée en partie par l’Etat.

Enfin, il ne faut pas oublier de discuter, de l’autogestion, qui comme le dit D. Zöllner

est un élément caractéristique des assurances sociales allemandes. Les caisses de secours

étaient ainsi naturellement gérer par leurs membres, les coopératives professionnelles étaient

quant à elles confiées aux entrepreneurs qui étaient les seuls à les financer, et en ce qui

concerne l’assurance invalidité, c’était un comité composé de fonctionnaires, d’employeurs et

de travailleurs qui en était aux commandes à coté du comité directeur siégeant à titre

professionnel.12

1.2 L’évolution : de Bismarck à la fin de la République de Weimar.

Au niveau politique, comme l’explique G.A.Ritter, les assurances sociales n’ont pas eu

l’effet escompté. En effet, l’affaiblissement des sociaux-démocrates et des syndicats

socialistes n’a jamais eu lieu. Cependant au niveau social, on pourra noter que la loi de 1881

permis aux Allemands de maintenir un niveau de vie « normal » jusqu'à la fin de leur vie,

chose qui auparavant été quasi-impossible. De plus, G.A. Ritter insiste sur le fait que

désormais les travailleurs sont intégrés « au sein de l’Etat et de la société, grâce non pas à

l’opposition mais à la participation de leurs organisations »13.

Après le départ de Bismarck, s’observa une évolution progressive de cette assurance, avec

une « extension à une plus large partie de la population et par l’amélioration progressive des

12 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, pp. 42-4613 RITTER G.A., « La sécurité sociale en Allemagne de Bismarck à nos jours », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.10, l.41.

prestations »14. Ainsi en 1914, 15,6 millions de personnes étaient affiliées à l’assurance

maladie, contre 9,5 en 1900. On passe aussi de 19 à 28 millions d’affiliés à l’assurance

accidents15.

1.2.1 Le Code impérial des assurances sociales.

Celui-ci trouve son origine dans le souhait d’une « simplification du droit et de

l’organisation des assurances sociales »16. Fut donc soumis au Reichstag en 1910, le projet du

Code des assurances sociales, qui sera adopté et promulgué l’année suivante. Ce Code réuni

toutes les lois des assurances sociales existantes à ce jour, avec aussi l’introduction de

« nouveautés techniques » comme les appelle D. Zöllner. Du fait de ces dernières, près de 7

millions de travailleurs allemands étaient affiliés à l’assurance puisque celle-ci devenait

désormais obligatoire à l’ensemble des agriculteurs. Comme autre nouveauté, on peut aussi

observer la mise en place des caisses-maladies régionales qui étaient sensées remplacer les

organismes locaux préalablement supprimés.

Mais s’il fallait ne retenir qu’une seule « nouveauté », ce serait l’assurance survivants

qui joua un rôle des plus importants dans le développement de la politique sociale. Celui-ci

suppose l’octroi d’une pension à la veuve à la condition que celle-ci soit invalide. D. Zöllner

s’interroge sur la moralité de cette condition. Puisque si la veuve était encore valide, il lui

fallait aller travailler tout en élevant ces enfants, seule. Celle-ci recevait « à titre de

dédommagement, une somme égale au montant de la pension annuelle de veuve »17. Le

professeur de droit qu’est D. Zöllner, tout en signalant donc que cette loi était inappropriée,

nous explique que grâce à celle-ci, « était posée la première pierre d’un édifice dont la

construction s’est prolongée jusqu’à nos jours » 18.

1.2.2 L’évolution des branches sous Weimar (1919-1932).

C’est sous la République de Weimar, résultante de l’après première guerre mondiale,

que la protection sociale allemande connue de nouvelles évolutions, pour aboutir à

l’introduction de l’assurance-chômage en 1927.

14 Ibid, p.11, l.1.

15 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.58, l.22.

16 Ibid, p.60, l.32.17 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.63, l.20.

18 Ibid, p.63, l.26.

Ces treize années vont être prolifiques à l’établissement de nouvelles lois. D. Zöllner

compta environ six lois par an, alors qu’on était jusqu’ici aux alentours d’une seule par année 19. D’abord les plafonds d’affiliation des différentes assurances seront tous augmentés, avec

une mention spéciale à l’assurance pension qui connaîtra en 1928 un niveau jamais égalé ni

par son passé ni par son futur20. Ensuite, les conditions d’octroi des prestations vont connaître

de nombreux changements, avec, pour ne citer qu’eux : « l’introduction du droit aux

indemnités d’accouchement pour toutes les femmes assurées contre la maladie (1919), la

fixation à 18 ans de l’âge limite de perception de la pension d’orphelin octroyée dans le cadre

de l’assurance pension, l’inclusion de l’assurance trajet dans le domaine de protection de

l’assurance accidents (1925), la reconnaissance du droit à une pension en cas d’incapacité de

travail également pour les personnes atteint de 60 ans et ayant été au chômage depuis un an

(1929) … » 21. Comme énoncé précédemment, s’il ne fallait retenir qu’une seule des mesures

instaurée sous la République de Weimar, ce serait sans nul doute l’assurance-chômage.

C’est avec la démobilisation de 1919, que le problème du chômage apparu

brutalement. On put ainsi compter un million de chômeurs à cette date. Il faudra néanmoins

attendre le 1er octobre 1927, pour que la loi sur l’assurance-chômage entre en vigueur. Entre

temps, on essaya sans succès de mettre en place une assistance au chômeur. La loi du 1er

octobre 1927 ordonnait 22:

- La création d’établissements publics qui auraient pour mission de placer la main-

d’œuvre et l’assurance chômage,

- Le droit à une allocation-chômage et l’abolition du système de l’allocation aux

chômeurs en vigueur jusqu’ici.

- L’assurance concerne les personnes soumises à l’assurance maladie et à l’assurance

des employés.

- Le financement exclusif par cotisations des travailleurs et des employeurs versées aux

caisses-maladie.

A la suite de cette loi, le nombre de chômeur connu une augmentation « bien au-delà de

ce qui semblait normal ». Très tôt, le financement devint alors le plus gros problème de cette

19 Ibid, p.63, l.39.

20 Le plafond atteignit 8 400 RM, soit quatre fois le salaire moyen.

21 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.69, l.30-40.

22 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.76, l.4-20.

assurance. Différentes mesures ayant pour but d’assainirent les finances n’eurent pas l’effet

tant espéré 23.

D. Zöllner finira par conclure : « Le sort qui fut celui de l’assurance chômage à ses

débuts constitue une des circonstances qui ont abouti, en 1933, à un changement de régime

politique. Celui-ci, qui devait avoir des conséquences catastrophiques a aussi eu des

répercussions sur l’évolution des assurances sociales, encore que d’une manière beaucoup

moins profonde. »24 .

2. Le cas anglais.

Nous allons dans un second temps étudier le cas de l’Angleterre, qui a été, au même titre

que l’Allemagne, précurseur dans différents domaines de la protection sociale (notamment en

ce qui concerne la protection contre le chômage) et ensuite rénovateur avec le plan de

Beveridge.

2.1 De la « Poor Law » à la « National Insurance ».

2.1.1 La « Poor Law » : l’assistance aux indigents.

Cette loi pour les pauvres a été certainement l’une des plus anciennes lois de

protection sociale à avoir été mise en place en Grande-Bretagne. Instaurée en 1834, elle

« constituait la seule forme centralisée d’aide aux indigents existant à cette époque ». Cette loi

reposait sur 3 principes :

- « La présomption naïve, écrira A.I. Ogus, que toute personne apte au travail pouvait

en trouver un et ainsi assurer à sa famille et à elle-même un niveau de vie décent  ».

Donc seules les personnes âgées et les invalides pouvaient bénéficier de cette aide.

- « L’assistance devait être si peut attirante que, pour pouvoir l’accepter, un individu

devait être totalement dépourvu de toute autre possibilité d’aide ».

- « Le travail devant continuer à être stimulé, les conditions de l’aide ne devaient pas

dépasser le niveau de vie des ouvriers les plus mal payés » 25.

23- Fin 1929 : augmentation des cotisations à 3,5%- juillet 1930 : limitation des prestations avec dans un même temps une augmentation des cotisations à 4,5%- octobre 1930 : nouvelle hausse des cotisations à 6,5%

24 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.77, l.24.25 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.227, l.29-39.

Cette loi eut aussi pour effet la création des « workhouses » qui regroupaient les

demandeurs de cette aide. Mais celles-ci n’apparurent que dans les années 1860, comme le

remarque H.R. Southall « et se concentrèrent ensuite sur l’assistance aux orphelins et aux

malades ». La Poor Law fut finalement présentée comme un échec puisqu’ « en janvier 1909,

[…], quelque 20 600 hommes sans travail ou de santé déficiente furent secourus, bien moins

que ceux qui étaient assistés par les syndicats » 26. Et comme le dit A.I. Ogus, « dans les

années 1880, on était bien conscient de ce que la « Poor Law » ne constituait pas une solution

adéquate pour ceux qui étaient véritablement sans travail, mais l’aide étatique n’en était pas

moins limitée à permettre à ces personnes de se maintenir à flot » 27. Les différentes mesures

pour pallier ce problème du chômage, comme le programme de fourniture d’emplois, n’eurent

que peu de succès. On décida alors de mettre en place, comme en Allemagne, des bureaux de

placements, qui selon A.I. Ogus, devinrent pour W.H. Beveridge « une idée fixe ». Mais là

encore, l’échec fut au rendez-vous du fait d’un système de financement défaillant.

Il était donc nécessaire de réformer ce système de protection sociale, jusqu’ici peu

satisfaisant, et c’est ainsi qu’après l’Allemagne, la Grande-Bretagne allait mettre en place des

assurances sociales.

2.1.2 La « National Insurance ».

Le « National Insurance Act » de 1911 comportait deux grands volets. D’une part,

nous y retrouvions l’assurance maladie et l’assurance chômage d’autre part. Avec pour soucis

de ne déroger à l’idéologie britannique du « social welfare » 28. Et dans ce sens, les assurances

sociales étaient, comme l’énonce A.I. Ogus, « un compromis satisfaisant entre la

maximalisation de la jouissance individuelle par l’exploitation des libres forces du marché

combiné avec la protection juridique des droits de propriétés et des droits nés du contrat » et

« le transfert unilatéral des ressources d’une partie de la collectivité vers une autre au moyen

de l’intervention étatique » 29.

Pour ce qui est de l’assurance maladie, le combat du gouvernement fut âpre pour enfin

parvenir à la mettre en place. En effet, nombreux furent les opposants, tels les médecins ou les

26 SOUTHALL H.R, « Ni Etat ni marché, les premières prestations sociales en Grande-Bretagne », Comparer les systèmes de Protection Sociale en Europe – Volume 1 – Rencontre d’Oxford, Rencontre et Recherche de la MIRE, 1994, p.69, l.19-30.

27 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.249, l.28-32.28 « social welfare » que l’on peut traduire par « bien être social » ou « protection sociale », notamment très présent chez Beveridge.

29 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.254, l.36-44.

« friendly societies »30, qui voyaient d’un mauvais œil « la notion d’un service national

rétribué par l’Etat qui impliquerait un contrôle bureaucratique et gênerait le libre choix du

praticien par le malade » 31, ainsi qu’un système étatique qui constituait une concurrence

directe. Le gouvernement y répondit par des compromis, et la création de l’« Insurance

Committees », nouvel organe qui avait pour but de gérer ce système de santé, tout en ayant

une certaine indépendance vis-à-vis du gouvernement, ainsi que le maintien d’une forme

d’assurance volontaire (profitable aux « friendly societies »). Lloyd Gorges, ministre des

finances de l’époque, put ainsi mettre en application l’assurance maladie préalablement

instaurée en Allemagne.

A l’inverse du système de l’assurance maladie, celui de l’assurance chômage n’avait

jamais été encore mis en place à l’étranger. De plus, A.I. Ogus, nous explique, que les deux

systèmes ne sont pas comparables du fait des « risques potentiels assurables ». Le chômage

résulte de problèmes économiques conjoncturels. De ce fait, le risque de chômage n’est  pas le

même selon les branches, d’où la difficulté à l’évaluer et l’assurer. A.I. Ogus résume cela par

« on trouvait normal que le bien-portant subventionnât le malade, la subvention par des

industries saines des industries malades trouvait beaucoup moins d’écho favorable » 32. La

gestion de la question fut confiée au Ministère du Commerce qui comprenait notamment

W.H. Beveridge et Llewellyn Smith. Du fait, du problème posé précédemment (la différence

du risque selon les branches), il en résultat une assurance obligatoire pour tous les ouvriers de

certaines industries comprenant la construction des navires, l’ingénierie et la construction.

Celles-ci connaissaient des fluctuations saisonnières au niveau de leur activité 33. Au final, on

s’accorde à dire que ce premier système d’assurance chômage reste assez restreint, d’où les

mots de Gilbert, « en fait, les auteurs du premier système mondial d’assurance chômage

obligatoire ont procédé à leurs calculs actuariels de façon à limiter le plus possible leurs

risques » 34.

2.2 L’idéologie du « welfare state » de Beveridge.

30 Sociétés d’assurance mutuelle.

31 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.257, l.1-432 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.258, l.12.

33 Ibid, p259, l.9

34 B. Gilbert, British Social Policy 1914-1945, 1970, p.53

W.H. Beveridge est considéré par beaucoup comme la personnalité la plus célèbre

dans le domaine de la sécurité sociale en Grande-Bretagne. Il est l’instigateur du plan, qui

porte son nom, et qui fut élaboré en pleine seconde guerre mondiale dans un souci, propre à

l’époque, de « remonter le moral de la population engagée dans la guerre contre le nazisme et

le fascisme » 35. Mais ce fut aussi le moment pour W.H. Beveridge d’essayer de supprimer les

droits acquis jusqu’alors par une « formulation analytique de principes fondamentaux »,

toujours selon les mots de J. Harris.

2.2.1 Les fondements du plan de décembre 1942.

Ce plan avait pour principe fondamental « d’abolir la pauvreté à travers la sécurité

sociale, c’est à dire un mécanisme d’assurance couvrant l’ensemble des risques sociaux »36.

Les premières versions du plan semblaient être beaucoup plus réformistes que le plan final de

1942. Selon J.Harris, elles préconisaient « la création d’un système de sécurité sociale très

logique, uniforme et complet, couvrant toute la population britannique, dans lequel, aussi bien

l’assurance privée que ce qui restait de l’ancienne loi contre la pauvreté basée sur le principe

de l’examen de ressources, seraient entièrement remplacées par une assurance nationale à

caractère contributif »37. Ainsi de nombreuses nouveautés étaient apportées, comme

l’assurance pour tous et des prestations à taux fixe38.

Cependant ces versions, dîtes « originales », engendraient des coûts que le ministère

des finances ne pouvait ou ne voulait financer. De ce fait, certains qualifieront le plan final de

« programme minimal », comme a pu l’écrire Emmanuel Reynaud, « un filet de sécurité, qui

ne devait garantir que le revenu nécessaire à la subsistance »39. Ce dernier consent à

reconnaître au plan de Beveridge qu’il eut l’originalité d’unifier l’administration de la

protection sociale, avec la création d’un service centralisé couvrant l’ensemble des risques

sociaux. Cependant, le plan comportait d’autres principes, dont 4 autres principaux.

Premièrement, s’ajoutait à l’unification administrative, des prestations uniformes garantissant

35 HARRIS J., « Le cas de la Grande-Bretagne », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.20, l.23

36 REYNAUD E., « Les retraites d’entreprise en Allemagne et au Royaume-Uni », Comparer les systèmes de Protection Sociale en Europe – Volume 1 – Rencontre d’Oxford, Rencontre et Recherche de la MIRE, 1994, p.235, l.37.

37 HARRIS J., « Le cas de la Grande-Bretagne », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.20, l.32-38.

38 Harris explique que « les pensions de vieillesse, les indemnités pour accident de travail et les allocations familiales seraient désormais attribuées en fonction d’un calcul scientifique des besoins de base (dit de « subsistance »). » p.21, l.2.

39 REYNAUD E., « Les retraites d’entreprise en Allemagne et au Royaume-Uni », Comparer les systèmes de Protection Sociale en Europe – Volume 1 – Rencontre d’Oxford, Rencontre et Recherche de la MIRE, 1994, p.235, l.42.

un minimum décent. Ce principe était déjà présent implicitement dans le cadre de l’assurance

nationale. Deuxièmement, on y retrouvait, les cotisations uniformes, qui étaient sous-jacent de

l’idée que « les assurances sociales ne devaient pas constituer un instrument de redistribution

de richesses »40. Et il en résulte qu’au niveau des prestations, « l’homme le plus pauvre et

l’homme le plus riche font l’objet d’un même traitement »41. Troisièmement, parallèlement à

la précédente mesure, le principe de « prestations suffisantes » fut mis en place. Avec « le

calcul des prestations uniformes en fonction d’une estimation des besoins faite avec soin »42.

Enfin, quatrièmement, le principe de couverture universel, principe déjà présent dans les

versions antérieur au plan de 1942 et qu’il réussit à conserver.

Toutes ces mesures avaient pour but de garantir et de remplir trois objectifs : le plein

emploi, les allocations familiales et la gratuité des soins médicaux43. Cependant, les principes

d’ « universalismes » : protection, cotisations et prestations, s’affaiblirent avec le coût qu’elles

engendraient. C’est ainsi qu’apparue l’échec du modèle de Beveridge en matière d’assurances

sociales.

2.2.2 L’échec du plan.

Il faut néanmoins nuancer cet échec, qui s’il a bien eu lieu, fut découvert bien plus

tard. Effectivement, jusqu'à la fin des années 40, le modèle « beveridgien » se félicitait

d’avoir fait reculé la pauvreté : « la dernière des enquêtes menées par Rowntree à York, en

1951, vint confirmer apparemment cette affirmation. Elle révéla, en effet, qu’au sein de la

population ouvrière, l’indigence avait décliné de 31% en 1936 à 3% en 1950 ; 20% de la

baisse de ce taux était mis à l’actif de la récente législation en matière de « welfare » »44. De

plus, l’opinion publique réconfortait le gouvernement dans cette approche, puisqu’on

considérait le système de sécurité sociale de Grande-Bretagne, comme celui étant « le plus

complet au monde »45.

40 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.269, l.19.

41 Ibid, p.269, l.27.

42 Ibid, p.270, l.4.

43 REYNAUD E., « Les retraites d’entreprise en Allemagne et au Royaume-Uni », Comparer les systèmes de Protection Sociale en Europe – Volume 1 – Rencontre d’Oxford, Rencontre et Recherche de la MIRE, 1994, p.236, l.5.

44 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.271, l.11.

45 HARRIS J., « Le cas de la Grande-Bretagne », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.22, l.25.

Au début des années cinquante, se développa en Angleterre, une nouvelle science

sociale, la « Social Administration » conduit par Richard Titmuss, qui vint ébranler ces

statistiques. Ce groupe avait pour ambition de « redécouvrir la pauvreté » et de démontrer que

les chiffres rapportés par les différentes enquêtes n’étaient guère concluants. Il mit en

évidence qu’il fallait prendre en compte les ressources et le niveau de vie d’une société

particulière à un moment donné pour pouvoir définir cette pauvreté46. L’insuffisance des

prestations et assurances professionnelles se fit sentir. De ce fait les cotisations passèrent de

11.9% en 1955 à presque 20% en 1959 47. Mais on ne peut attribuer complètement l’échec à

Beveridge. Puisque, à plusieurs reprises, le modèle de ce dernier a subi des écarts, avec

notamment « les lois de 1946 à 1948 qui instaurèrent l’Etat-providence de Beveridge et qui

comportaient des modifications du plan, provoquées en partie par des concessions

gouvernementales aux groupes de pression, mais également par la crise financière »48.

L’échec du modèle se caractérisa par l’introduction « des cotisations et des prestations

calculées en fonctions des gains et en encourageant les assurés sociaux à compléter leur

pension publique en s’affiliant à des régimes privés »49, issue de loi de 1959.

46 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.272, l.1-10.

47 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.274, l.3.

48 HARRIS J., « Le cas de la Grande-Bretagne », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.22, l.37.

49 Ibid, p.24, l.2.

Chapitre II : Les débuts de la protection sociale en France.

3. Les racines de la sécurité sociale.

C’est à travers l’initiative privée que la sécurité sociale va trouver ses racines, puisque

l’assistance et la prévoyance lui sont exclusivement dues. Cela passe premièrement par la

molle mise en place d’assurances privées, qui ne trouveront véritablement leur place qu’à la

fin du XIXème siècle et la loi du 9 avril 1898 contre les accidents de travail. Deuxièmement

par un « christianisme social »50 qui avançait l’idée que le salaire devait suffire à faire vivre

« un ouvrier sobre et honnête ainsi que les siens »51. Et enfin, c’est certainement à travers la

mutualité et les institutions patronales de prévoyance que l’initiative privée a joué son rôle le

plus important dans les fondements de la sécurité sociale française.

3.1 Des initiatives privées aux premières lois.

3.1.1 La mutualité.

Yves Saint-Jours va décrire la mutualité comme une institution qui permet de

« garantir, avec les moyens du bord, aux ouvriers dépourvus par définition de tout autre bien

que leur force de travail, contre les risques sociaux de leur existence : maladie, invalidité,

chômage, etc., en répartissant le coût des prestations de secours sur la collectivité de ses

adhérents »52. Cependant, les sociétés de secours mutuels ont longtemps été confrontées à un

vide juridique puis même à une interdiction, puisque les lois de 1810 et 1834 interdisaient

dans un premier temps tout groupement de plus de vingt personnes et dans un second temps

les associations partagées en section d’un nombre moindre. L’existence des sociétés de

secours mutuel (SSM) a donc eu lieu entre une certaine clandestinité et une certaine tolérance.

B. Gibaud qualifiera même ces institutions d’association en « liberté surveillée » et dégagera

deux types de mutualités : la mutualité de prévoyance ou ouvrière et la mutualité de secours

contrôlée par les autorités publiques et patronales53. La Révolution de 1848 a permis 50 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.151, l.20.

51 Ibid, p.151, l.24.

52 Ibid, p.148, l.22-26.

53 GIBAUD B., « La mutualité française entre Etat et marché, naissance d’une identité (1850-1914) », Comparer les systèmes de Protection Sociale en Europe – Volume 1 – Rencontre d’Oxford, Rencontre et Recherche de la MIRE, 1994, p.191, l.24.

l’abrogation de la loi de 1810. Napoléon III utilisa alors la mutualité de prévoyance comme

moyen de régulation de la question sociale. Elle a donc joué un rôle sécuritaire 54, en plus de

son rôle sanitaire « naturel ». Les SSM ont été réellement régit pour la première fois en 1952

avec le décret du 26 mars qui stipulait « que :

- une société de secours mutuel serait créée par les soins du maire et du curé dans

chaque commune où l’utilité en serait reconnue par le préfet,

- le président en serait nommé par le président de la République, c’est-à-dire le futur

empereur, en l’occurrence,

- les statuts seraient soumis à l’approbation du ministère de l’intérieur,

- les fonds excédants un certain quota seraient obligatoirement déposés à la Caisse des

dépôts et consignations. »55

De plus, le but de ces sociétés était uniquement d’assurer des secours temporaires aux

malades, blessés ou infirmes. L’adhésion à celle-ci resta cependant toujours facultative. On

comptait en 1898, 451 800 malades indemnisés et 59 600 retraités recevant leurs allocations

retraites56. Et c’est cette année, le 1er avril, qu’une loi décréta l’indépendance de la mutualité

française.

3.1.2 Les institutions patronales de prévoyance.

Parallèlement à la mutualité, s’est développé au cours du XIXème siècle, des

institutions de prévoyance et de retraite mis en place par le patronat. Le but était d’inciter les

ouvriers qualifiés à rester au sein de l’entreprise en leurs garantissant une retraite ainsi que de

se prémunir contre les risques de recours en responsabilité lors de maladies et autres accidents

de travail57. C’est ainsi que les caisses patronales de retraite et de prévoyance virent d’abord le

jour au sein des entreprises où le travail comportait des risques pour les ouvriers. De plus on

peut noter que le patronat suivait l’exemple de l’Etat qui garantissait déjà depuis 1853 une

retraite aux fonctionnaires58. Néanmoins, préexistait toujours le risque que l’entreprise fasse

54 Ibid, p.193, l .21.

55 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.149, l.1-9.

56 PROST A., « Le cas de la France », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.28, l.37.57 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.149, l.24.

58 PROST A., « Le cas de la France », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.28, l.1.

faillite. Dans ce cas, l’ouvrier n’avait aucun droit particulier59. La réglementation fut de plus

complétée par deux lois :

- celle du 27 décembre 1890, qui stipulait qu’un ouvrier (ou employé) aurait le droit à

des dommages-intérêts (en fonction des cotisations déjà versées pour sa retraite) s’il

était confronter à un licenciement abusif,

- ainsi que celle du 27 décembre 1895, qui rendait, en cas de faillite de l’entreprise,

toutes les sommes versées aux institutions de prévoyances, au profit des ouvriers (ou

employés)60.

Enfin Y. Saint-Jours, nous explique que l’Etat a dû se tourner vers un système d’assurance

vieillesse obligatoire afin de généraliser les retraites face à des employeurs peu enclins à

mettre ces mesures en place d’eux-mêmes61.

3.1.3 Le soutien de l’Etat : législatif et financier.

Comme on l’a vu précédemment, dans le cas de la mutualité et des institutions

patronales de prévoyance, l’Etat a dû jouer son rôle de législateur afin de réguler la protection

sociale. Mais ce rôle s’est exercé sans pour autant imposer d’obligations. Y. Saint-Jours va

alors nous dire que ce rôle a été insuffisant jusqu’ici. En effet, le but de la protection sociale

était au préalable d’aider les classes les plus pauvres à sortir de leur condition d’indigence.

Cependant, il nous explique les pauvres n’ont pas cette capacité à épargner qu’ont les classes

moyennes où riches, qu’ils ne peuvent renoncer à une consommation immédiate pour une

consommation future. De ce fait, seuls les plus riches se présentèrent à la Caisse nationale de

retraite. Ce qui n’était pas le but premier escompté62. Il fallait donc que l’Etat fasse plus. En ce

sens, il a progressivement apporté un soutien financier aux organismes privés ce qui n’était

guère suffisant pour combler les besoins. On décida alors d’opter pour un système de

subvention d’Etat, alors qu’il était possible de retenir la solution des assurances sociales (a

l’instar de Bismarck en Allemagne). Mais là encore, ce système qui prévoyait d’assurer une

majoration de rente viagère aux titulaires de livrets individuels à la Caisse nationale des

retraites ou tout autre SSM à partir du moment où ils avaient cotisaient pendant 25 ans et

59 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.150, l.23.

60 Ibid, p.150, l-32-42.61

Ibid, p.150, l.44. 62 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.152, l.9-30.

avaient plus de 70 ans, fut un échec, puisque délaissé par les plus pauvres63. C’est ainsi que

l’Etat du se résoudre à la mise en place d’obligations légales.

3.2 Les obligations légales.

L’Etat instaura trois types d’obligations différentes : les obligations de l’Etat, des

employeurs et des salariés.

3.2.1 L’obligation de l’Etat.

Comme on l’a vu précédemment, l’Etat n’apportait jusqu’alors qu’un simple soutien

financier. Mais trois différentes lois sont venues contraindre l’Etat a s’impliquer plus

fortement. Il y eut d’une part, la loi sur l’assistance médicale gratuite en 1893, puis la loi sur

l’assistance à l’enfance en 1904 et enfin la loi du 14 juillet 1905 sur l’assistance des vieillards

et infirmes qui se retrouvaient sans moyens de subsistance64. Mais le vote de cette dernière ne

fut pas si aisé. Les libéraux s’y opposèrent. Ainsi Y. Saint-Jours rapporte le discours du

Compte de Lanjuinais, parlementaire de l’époque : « Dans un pays véritablement libre, le rôle

de l’Etat devrait se borner à très peu de chose près, aux fonctions pour lesquelles il a été créé,

c’est à dire la paix extérieure et intérieure. Le reste n’est pas son problème et j’estime en

particulier que tous les problèmes concernant l’assistance publique seraient beaucoup moins

onéreux, si leur résolution était complètement abandonnée aux petites collectivités […] »65. Y.

Saint-Jours nous expliquera ensuite que si l’Etat s’est imposé ces obligations d’assistance

publique, c’était avant tout dans le but d’emboîter le pas de l’Eglise. Enfin, on peut observer

que l’assistance publique a rapidement supplanté la mutualité qui comme on l’a vu n’était que

facultative, puisque à la veille de la première guerre mondiale, les dépenses de l’assistance

atteignaient les 425 millions de francs contre seulement 30 pour la mutualité66.

3.2.2 L’obligation des employeurs et des salariés.

Avec la loi de 1910 sur l’institution des retraites ouvrières et paysannes, les

employeurs durent s’acquitter d’une participation obligatoire en matière de prévoyance

63 Ibid, p.153, l 1-8.

64 DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, 2004, p.9, l.20.

65 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.154, l.6-11.

66 GUESLIN A., GUILLAUME P., De la charité médiévale à la sécurité sociale, Paris, Ed. ouvrière, 1992, pp.139-151.

sociale. Pour la première fois, le salaire se trouvait divisé en deux parties, l’une directe, et

l’autre indirecte, reversé à l’institution de prévoyance. On reviendra plus amplement sur cette

loi dans la partie 1.3.3. Mais il est a noté que là encore, il a été très difficile de mettre en place

cette loi. Le patronat et les libéraux étant naturellement contre, à quelques exceptions de

patron qui touché par la « doctrine sociale de l’Eglise »67.

Pour ce qui est de l’obligation salariale, les libéraux s’y refusèrent tout autant. Le

député Denys Cochin résuma leur pensée : « Quand vous aurez donné à l’ouvrier un conseil

judiciaire pour l’obliger à verser ses économies dans votre caisse de retraites, vous l’aurez

privé de bien d’autres emplois qu’il aurait préféré […] Vous le retenez dans le salariat en

exigeant un emploi exclusif de son petit capital, en lui imposant un seul mode de

placement »68. Mais cette opposition fut veine. La loi sur l’institution des retraites ouvrières et

paysannes instaurait le partage des cotisations entre l’employeur et le salarié.

67 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.154, l.31.

68 Ibid, p.155, l.12.

3.3 Les acquis sociaux.

Dans cette sous-partie nous allons nous permettre de revenir sur les différents acquis

en présence avant la guerre de 1914.

3.3.1 L’assistance publique.

Jusqu’à la fin du XIXe l’assistance publique dépendait du ministère de l’intérieur, elle

n’était considérée que comme « un instrument de défense de la société »69. C’est à partir de

1889 et du congrès international de l’assistance publique qu’elle prendra une forme de

protection sociale. Et cela est passé par les lois sur l’assistance médical gratuite (1893), sur

l’assistance aux vieillards, aux infirmes et aux incurables (1905), et sur l’assistance aux

familles nombreuses (1913). Cependant D. Renard caractérise cette assistance comme une

assistance qui « n’entend pas couvrir par ses prestations des risques particuliers : la maladie,

la vieillesse, la famille, auxquels sont consacrées des législations spécifiques. En

conséquence, elle ne bénéficie pas aux indigents définis d’une façon générale, mais aux

individus privés de ressources au regard des risques concernés […] »70. Cette assistance a vu

le jour du fait des préoccupations républicaines de l’époque, afin d’affirmer la nouvelle

République et de lutter contre l’Eglise. On peut trouver deux avis qui s’opposent à la

« réussite » de cette politique d’assistance. D’une part, D. Renard ajoute qu’elle s’atténue

lorsque le projet républicain semble se consolidé71 et d’autre part, Y. Saint-Jours écrit

qu’ « elle a connu, en l’absence d’autre mesure sociale, un grand rayonnement » avec 1 320

000 secourus en 190672.

3.3.2 La réparation des accidents du travail.

Avant la loi du 9 avril 1898 sur la réparation des accidents du travail, pour obtenir

l’indemnisation d’un accident du travail, la victime devait prouver la matérialité de l’accident,

69 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.155, l.39.

70 RENARD D., « Les rapports entre assistance et assurance dans la constitution du système de protection sociale français », Comparer les systèmes de Protection Sociale en Europe – Volume 1 – Rencontre d’Oxford, Rencontre et Recherche de la MIRE, 1994, p.106, l.16.

71 Ibid, p.107 l.21

72 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.157, l.23.

l’étendue du préjudice subi et la faute de l’employeur. Et comme le fait remarquer Y. Saint-

Jours, même en réussissant à remplir ces conditions, la victime n’avait souvent pas les

moyens matériels d’aller au bout de la procédure. Le résultat de ce phénomène était la

formation d’un ensemble, « selon l’expression utilisée à l’époque, de déchets humains de

l’industrie »73. Pourtant, il existait déjà une caisse nationale d’assurance contre les accidents

de travail. Créée en 1868, elle n’eut pas le succès escompté, puisque seul quelques grands

industriels y avaient recours.

La loi qui était adoptée en 1898 reposait sur trois principes :

- « l’abandon de toute idée d’assurance obligatoire contraire au principe de l’autonomie

de la volonté des individus,

-  l’introduction d’une répartition forfaitaire fondée sur le risque professionnel,

- la modulation de la réparation forfaitaire dans l’hypothèse d’une faute inexcusable

dans la réalisation du risque »74.

Cette loi, qui était préalablement réservée à l’industrie s’est rapidement étendue à

l’agriculture, aux entreprises commerciales et aux exploitations forestières. De plus, le fait

que désormais ce soit à l’employeur de faire la preuve de la non-validité de l’accident du

travail rendait cette loi des plus novatrices dans le domaine.

3.3.3 L’échec relatif de la loi sur les retraites ouvrières et paysannes.

Cette loi du 5 avril 1910 était comme le fait remarquer A. Prost « une loi

fondamentale, car elle pose les principes sur lesquels le système français sera ultérieurement

organisé »75. Elle prévoyait que tous salariés, dont la rémunération annuelle n’excédait pas le

plafond des 3 000 francs, étaient obligatoirement assujettis. De plus, il existait la possibilité

pour ceux dont la rémunération était comprise entre 3 000 et 5 000 francs d’appartenir au

régime facultatif. Enfin ce système de retraite était financé par capitalisation et cotisation des

ouvriers et des employeurs76. A. Prost notifie qu’en 1912, avec le passage de l’âge de la

retraite de 65 ans à 60 ans, 6,7 millions de personnes sont affiliées au système obligatoire et

900 000 au facultatif, ce qui représentait 98,2 millions de francs de prestations. Le problème

fut que la cours de cassation, au mois de juin 1912, statua sur le fait que l’employeur n’avait

73 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.158, l.3.

74 Ibid, l.11-16.

75 PROST A., « Le cas de la France », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.31, l.5.

76 PROST A., « Le cas de la France », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.31, l.10.

pas à cotiser tant que le salarié ne prouvait pas qu’il avait lui-même cotisé. « Ce qui revenait

en fait à rétablir le livret ouvrier, supprimé en 1890 »77.

4. De la loi du 30 avril 1930 au plan français de sécurité sociale de 1945.

Dans l’après première guerre mondiale, Daniel Vincent, ministre du travail, tenta

d’instaurer le projet des assurances sociales, bien après que l’Allemagne de Bismarck l’ait

adopté. Ce projet finit par aboutir en 1930.

4.1 Mise en place des assurances sociales.

4.1.1 Les principes de la loi du 30 avril 1930.

Tout comme les assurances sociales de Bismarck, le système des assurances couvrent

l’ensemble des risques sociaux, maladie, accidents du travail et vieillesse, à l’exception du

chômage. Il s’étendait obligatoirement qu’à l’ensemble des salariés de l’industrie et du

commerce qui avaient un revenu inférieur au plafond d’affiliation, celui-ci fixant « un seuil de

respectabilité ou de démarcation de la condition ouvrière »78. Persistait donc la possibilité

pour les cadres, en fonction de leur propre intérêt, d’accepter ou de refuser l’affiliation. En ce

qui concerne les retraites, « la loi prévoyait dès l’âge de soixante ans et après trente années

d’assurance une pension égale à 40 % du salaire moyen résultant des cotisations d’assurance

obligatoire versées après l’âge de seize ans, et elle se fondait sur un régime mixte de

capitalisation et de répartition »79. C’était par une cotisation de 8 % du salaire, divisée

également entre l’employeur et le salarié que s’effectuait le financement de ces assurances

sociales.

4.1.2 Les différents problèmes rencontrés.

Des difficultés vont venir accompagner la mise ne place de cette législation. D’une

part, se posa le problème des médecins et de leurs honoraires. La loi de 1928, qui était à la loi

« originale » des assurances sociales prévoyant un système de paiement comme celui qui était

en vigueur en Alsace : « Le malade devait payer son médecin avec des tickets que la caisse lui

réglerait par l’intermédiaire de son groupement professionnel, pour éviter un rapport direct

77 Ibid, p.32, l.7.

78 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.170, l.16.

79 Ibid, p.170, l.22.

qui aurait pu devenir contraignant entre la caisse et le médecin »80, le tarif étant fixé par des

contrats collectifs. Cependant la loi de 1930, devant le refus du corps médical d’accepter

d’être payer par les caisses d’assurances sociales à un tarif imposé, laissa libre les médecins

d’accepter de soigner ou non les assurés. S’ils acceptaient, ils s’engageaient à être payer à un

tarif de responsabilité fixé par les caisses d’assurances sociales. Ces dernières ne relevant que

très peu leur tarif, les médecins passèrent outre la réglementation et comme l’écrit Y. Saint-

Jours : « les assurés sociaux en firent les frais »81.

Ensuite, ce fut l’organisation administrative qui fit défaut. En effet, du fait du grand

nombre de caisses existantes avant la loi (patronales, ouvrières, mutualistes,

confessionnelles), il était difficile pour la loi d’opter pour une plutôt que pour une autre pour

gérer ces assurances, d’où la création des caisses départementales. Cependant, devant le

lobbying des libéraux, la loi ne put mettre les caisses déjà en place sous la tutelle d’une caisse

départementale. Il fallut donc créer cette caisse et la placer au même niveau que les autres. Et

à l’inverse du problème rencontré avec les médecins et leurs honoraires, les caisses

départementales connurent un franc succès. A la fin de 1936, on dénombrait 727 caisses

d’assurances sociales et les 86 caisses départementales assuraient à elles seules 57 % des

assurés contre 20,6 pour les caisses mutualistes et 10,4 % pour les patronales82.

Enfin, fut rencontré le problème de l’articulation d’un système d’assistance publique et

celui d’assurance par répartition. Au départ, prédominait l’idée que l’assistance publique

serait progressivement remplacer, puisque rendu obsolète, par l’assurance. Mais, il fut

remarquer, dans les discussions autour de la législation non-élaboré définitivement, que la

substitution ne pourrait se faire si aisément. « Le passage de la qualité d’assisté à celle

d’assuré social se traduirait en effet par une moins bonne couverture du risque maladie »,

nous rapporte D. Renard83. La création de statut intermédiaire : assuré-assisté, fut instaurée.

Mais l’équilibre financier ne peut être respecter. En 1935, la coexistence des deux systèmes

est finalement est abandonnée par une réforme. Seuls ceux qui ne pouvaient bénéficier de

l’assurance, les non-salariés, continuèrent à percevoir l’assistance médicale gratuite.

4.1.3 Conclusion sur la loi des assurances sociales.

80 PROST A., « Le cas de la France », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.33, l.36.

81 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.171, l.15.

82 PROST A., « Le cas de la France », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.34, l.33.

83 RENARD D., « Les rapports entre assistance et assurance dans la constitution du système de protection sociale français », Comparer les systèmes de Protection Sociale en Europe – Volume 1 – Rencontre d’Oxford, Rencontre et Recherche de la MIRE, 1994, p.114, l.27.

Comme on a pu le voir les assurances sociales ne couvraient pas le risque de chômage

qui, au début des années 1930, n’était pas négligeable. Entre le début de la crise, en 1930 et

1936, on passa de 26 fonds de chômage à 1569 84. On peut donc regretter que l’Etat n’ait pas

su jouer un rôle plus important dans ce domaine. D. Renard dresse aussi un pal tableau du

régime de retraite-vieillesse. Les vieux salariés n’ayant en effet pas pu cotiser pendant les

trente années nécessaires étaient d’office exclus et se retrouvaient sans moyens de

subsistance, d’où la proposition par le Front Populaire d’une « allocation aux vieux

travailleurs salariés »85 qui sera finalement instituée en 1941 sous le régime de Vichy.

Y. Saint-Jours regrette quant à lui la « multitude d’organismes concourant au même

objectif et le dérapage de la tarification des honoraires médicaux »86. Eléments qui selon lui,

mèneront à l’unification de ce système et au plan de 1945.

Enfin, il ne faut pas oublier que parallèlement à l’institution de l’assurance sociale, le

11 mars 1932, les allocations familiales furent obligatoires afin de relancer la natalité. On peut

noter que seul le secteur agricole ne bénéficia pas de ce système de redistribution.

84

Ibid, p.35, l.39.

85 Ibid, p.36, l.9.

86 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.171, l.41.

4.2 Le plan français de sécurité sociale de 1945.

Le plan français de sécurité sociale est l’instigation de Pierre Laroque, qui a répondu à

l’appel du ministre du travail, Alexandre Parodi, pour l’élaborer. Pour beaucoup le « père

fondateur de la sécurité sociale »87 s’est largement inspiré du rapport Beveridge qui pose le

principe d’une extension de la sécurité sociale à l’ensemble de la population.

4.2.1 Les grandes lignes du plan.

Le plan français reposait sur trois principes : la gestion paritaire, l’unification des

caisses et l’organisation de transferts sociaux88.

- La gestion paritaire signifie que la gestion de la protection sociale devait se faire par

les assurés eux même et l’Etat. Ainsi les conseils d’administrations étaient composés

pour deux tiers de représentants des travailleurs et pour le reste de représentants des

employeurs. Cela marque pour la première fois, l’adhésion des salariés à la sécurité

sociale89.

- L’unification des caisses, trop nombreuses jusqu’alors avoir pour but de permettre

« une égalité des charges et des prestations sociales au plan national »90. Un système à

trois étages était crée, avec des caisses primaires, des caisses régionales et une caisse

nationale.

- L’organisation des transferts sociaux, avait, enfin, pour but de rendre la société plus

égalitaire en garantissant à l’ensemble de la population « contre les risques sociaux de

l’existence et assurer à chaque individu un minimum vital par le jeu de la solidarité

nationale ».91 Les prestations se voulaient ainsi les même pour tous, tandis que les

cotisations étaient fonction du salaire.

4.2.2 Les lois complétant le plan.

Même si à la libération le poids du patronat se trouvait affaiblit du fait de la

collaboration. Les patrons réagirent vivement à la mise en place de ce régime de sécurité

87 KERSCHEN N., « L’influence du rapport Beveridge sur le plan français de sécurité sociale de 1945», Comparer les systèmes de Protection Sociale en Europe – Volume 1 – Rencontre d’Oxford, Rencontre et Recherche de la MIRE, 1994, p.129, l.20.

88 PROST A., « Le cas de la France », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.36, l.22.

89 Ibid, p.36, l.30.

90 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, 172, l.40.91

Ibid, p.172, l.37.

sociale. Et retrouvant très vite leur poids d’antan, ils allaient exercer une certaine influence

sur le pouvoir politique de l’époque. De ce fait, comme l’explique Y. Saint-Jours, « en

présence d’un conflit qui risquait de s’éterniser sur le plan politique »92, le gouvernement

décréta, avant que cela ne se produise, l’ordonnance du 4 octobre 1945, puis celle du 19

octobre de la même année. Le nouveau système édicter devait assurer à tous les travailleurs

salariés la protection contre les risques envisagés par les assurances sociales. De plus la loi du

22 mai 1946 généralisa le régime de sécurité sociale à tout Français résidant sur le sol

national. De même, la loi du 13 septembre 1946 étendit l’assurance vieillesse à toute la

population active. Et la loi du 30 octobre 1946 prévoyait la réparation des accidents du travail

par la caisse de sécurité sociale modifiant le précédent régime de 1898 93.

4.2.3 L’hostilité rencontrée.

Différentes catégories socioprofessionnelles furent réticentes à l’affiliation au régime

de sécurité sociale. La plus grosse opposition venait des cadres qui, ayant les plus gros

salaires, ne voulait payer des cotisations à la mesure de ceux-ci pour les prestations qu’ils en

auraient retirées. De plus, leurs retraites étaient menacées par le plafond de salaire soumis à

cotisations. Ainsi, ils revendiquaient un système de retraite complémentaire94. Pour répondre à

leur premier souci, qui concernait les cotisations, les cadres, représentés par la Confédération

nationale des cadres, obtinrent le plafonnement des cotisations. Et un régime complémentaire

de retraite pour les cadres fut instauré par la convention collective du 14 mars 1947 95.

En ce qui concerne les travailleurs indépendants, ils ont quant à eux refuser de rentrer

dans le régime général. Et comme le fait remarquer A. Prost, « il était impossible de prélever

des cotisations à la base comme pour les salariés […] La seule façon de financer la sécurité

sociale des non-salariés était de leur imposer un versement ». Mais sur quelle base ?96

L’universalité du régime de sécurité sociale ne pu donc être atteint en raison des

différents régimes spéciaux, agricoles et de la résistance des travailleurs indépendants.

92 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.175, l.33.

93 DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, 2004, p12, l.18.

94 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.174, l.21

95 PROST A., « Le cas de la France », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.38, l.22-27.96 PROST A., « Le cas de la France », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001, p.39, l.2.

Cependant, on peut noter qu’en 1946, 53% de la population était couverte contre le risque de

la maladie97.

97 DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, Paris, 2004, p13, l.6.

Chapitre III : De 1945 à nos jours.

5. La réforme de la sécurité sociale.

5.1 La planification des prestations sociales.

Alors que la France connaît une longue et forte croissance depuis les années cinquante,

l’idée de satisfaire les besoins sociaux commence à prendre le dessus sur les objectifs de

production98. On va retrouver cette volonté dans le 4e Plan de développement économique et

social de De Gaulle. A ce souci social, il ne faut pas négliger le problème économique

qu’engendrait jusqu’ici les prestations sociales ; puisque les dépenses de sécurité sociales

étaient évaluées à 16 % du Revenu national en 1960 99. Et comme l’écrit B. Valat, « il n’était

plus possible de s’en désintéresser […] il apparaissait désormais indispensable de disposer de

moyens d’action et de fixer des objectifs en matière de progressions des dépenses, si l’on

voulait espérer réaliser les objectifs du Plan »100. Cependant, comme le fait remarquer l’auteur

français, même si le Plan prévoyait une augmentation des prestations sociales, il n’en fut rien.

Le texte finalement votait par le Parlement ne comportait que de « vagues » promesses sans

aucune donnée chiffrée. Le gouvernement ne proposait qu’une simple procédure, qui

répondait surtout à la politique des revenus alors mise en place par Pierre Massé, le

commissaire au Plan : « chaque année, le « surplus » rendu disponible par la croissance serait

estimé et des recommandations effectuées dans le cadre du Plan sur son utilisation »101.

Devant, cette stagnation, le Conseil économique et social réclama que la revalorisation des

prestations sociales soit inclues dans le prochain Plan (de 1965 à 1970). Et à la suite de

diverses commissions, comme celle de Dobler qui annonçait une future hausse de 45% du

montant totale des dépenses pour 1970, le parlement finit, de nouveau, que l’Etat ne pouvait

accroître le financement des prestations sociales au cours du 5e Plan. Dans le même temps, le

Plan devait prévoir une hausse moins forte des cotisations, par rapport à la hausse des

prestations, en vue de ne pas toucher aux salaires directs. Dès lors, l’émergence d’une certaine

volonté d’accroissement de la protection sociale qu’on avait cru voir apparaître avant

98 VALAT B., Histoire de la sécurité sociale (1945-1967), L’Etat, l’institution et la santé, Economica, Paris, 2001, p. 442, l.22.

99 Rapport du Conseil économique et social sur l’évolution des prestations sociales et le financement de la sécurité sociale, Journal officiel, Avis et rapport du CES, 28 septembre 1963, p. 695 in VALAT B., Histoire de la sécurité sociale (1945-1967), L’Etat, l’institution et la santé, Economica, Paris, 2001, p. 443, l.29.

100 Ibid, p.444, l.3.

101 Ibid, p.446, l.10.

l’intégration de la sécurité sociale dans le Plan avait finalement été substituée aux besoins

d’amélioration de la productivité des entreprises alors que la France rentrait dans le marché

commun. On peut conclure que la planification a été restrictive sur la question de la

protection sociale.

5.2 L’essor des institutions complémentaire.

Outre la sécurité sociale, des institutions complémentaire ont pu s’instaurer ou évoluer

avec les « trente glorieuses ». Ainsi les retraites complémentaires vont être généralisées à

l’ensemble des salariés non cadres à partir du 8 décembre 1961102. Dans le même contexte, le

31 décembre 1958, un accord national interprofessionnel est conclu sur l’assurance chômage.

Celui-ci devait garantir des prestations proportionnelles aux salaires (comme c’est encore le

cas aujourd’hui) aux travailleurs qui perdaient leur emploi involontairement. Mais ce n’est

qu’après l’ordonnance du 13 juillet 1967 que l’accord est juridiquement reconnu103.

Différentes lois sont venues ensuite agrémenter celle-ci afin de régir les prestations allouées.

Ainsi, les salariés licenciés après 60 ans eurent la garantie de recevoir des ressources à la

hauteur de 70 % de leur salaire, avec l’accord de 1970. Et quatre ans plus tard, un autre accord

garantissait des prestations égales à 90 % du salaire des salariés licenciés pour motif

économique104. On peut aussi citer, comme autre institution sociale qui a su évoluer : l’aide

social qui a remplacé l’assistance, avec la création des bureaux d’aide sociale au niveau des

communes. Enfin, la mutualité a connu un essor important, avec plus de vingt millions de

mutualiste en 1975 contre treize, onze ans plus tôt. Y. Saint-Jours explique cela par la

capacité qu’a eut la mutualité à favoriser « la gratuité et une meilleure qualité des soins grâce

à un réseau de conventions conclues avec les hôpitaux […] »105.

5.3 La réforme de 1967.

L’idée de réformer la sécurité sociale apparue en 1966, alors que les commissions et le

Conseil économique et social poussaient le gouvernement à agir, soit dans un souci

102 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.190, l.18.

103 KORPI W., « Développement de la citoyenneté sociale en France : une perspective comparative », Comparer les systèmes de Protection Sociale en Europe – Volume 1 – Rencontre d’Oxford, Rencontre et Recherche de la MIRE, 1994, p.34, l.5.

104 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.191, l.5-9.

105 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, p.193, l.1.

d’économie budgétaire pour les premiers soit dans un souci de protection pour les seconds. Le

décret du 27 juillet 1966 allait conforter le souhait de ceux-là, puisqu’il ordonna

l’augmentation des cotisations patronales aux assurances sociales, ce qui, comme le fait

remarquer B. Valat, allait « en contradiction totale avec les objectifs du Plan »106. Le

gouvernement était encore, d’après Valat, prêt à aller plus loin et réformer le système de

sécurité sociale dans son ensemble, mais les élections approchant, cette refonte fut reportée au

printemps 1967.

5.3.1 Les ordonnances.

Alors, que les élections furent moins fructueuses que ne l’espérait le gouvernement,

puisque la majorité perdit sept places à l’assemblée, ce dernier décida de recourir aux

ordonnances afin de reformer la sécurité sociale. Ces ordonnances, aux nombres de quatre,

parurent le 21 août 1967107. D’une part, l’assurance vieillesse et l’assurance maladie,

maternité, invalidité et décès furent séparer d’un point de vue comptable et financier. Ensuite,

la caisse nationale de sécurité sociale fut diviser en trois caisses :

- La caisse nationale d’assurance maladie qui devait gérer les assurances maladie,

maternité, invalidité et décès et les accidents du travail

- La caisse nationale d’assurance vieillesse qui, comme son nom l’indique, gérait

l’assurance vieillesse

- La caisse nationale des allocations familiales qui, elle, gérait les prestations familiales.

La troisième ordonnances instituait la création un organisme de trésorerie commun à ces trois

caisses nationales. Et enfin, la gestion des intérêts communs des caisses nationales était

confier à l’Union des caisses nationales de sécurité sociales (U.C.A.N.S.S.)108.

5.3.2 Le paritarisme.

Déjà introduit dans les caisses d’allocation familiales, le paritarisme allait être

généralisé à l’ensemble des caisses nationales de sécurité sociale afin, selon les mots d’Y.

Saint-Jours, « d’éliminer la présentation majoritaire des assurés sociaux dans les conseils

d’administration au profit d’une influence prépondérante du Conseil national du patronat

français »109. Les conseils d’administrations devaient alors être composés de dix-huit

106 VALAT B., Histoire de la sécurité sociale (1945-1967), L’Etat, l’institution et la santé, Economica, Paris, 2001, p. 464, l.29.

107 Ibid, p.469, l.21.

108 ZÖLLNER D., SAINT-JOURS Y., OGUS A.I., HOFMEISTER H., MAURER A., KOLHER P.A., ZACHER H.F, HESSE P.J.,  Un siècle de sécurité sociale 1881-1981, publié par le Centre de Recherche en Histoire Economique et Sociale de l’Université de Nantes, 1982, pp.183-184.

109 Ibid, p.184, l.25.

membres, avec autant de membres issus d’organisations syndicales du salariat que du

patronat. Si une seule organisation prédominait du côté des patrons, avec le C.N.P.F, la

répartition des sièges était plus complexe du côté des organisations de salariés. On retrouvait

au final : 3 sièges pour la C.G.T., 2 pour la C.F.D.T. et la C.G.T.-F.O. et une pour la C.F.T.C.

et la C.G.C.110. On observe bien alors un éclatement du syndicalisme ouvrier face à un

monopole patronal et donc une redistribution des forces.

6. La sécurité sociale d’aujourd’hui.

Depuis 1967, la sécurité sociale n’a cessé d’évoluer de part le vote de différentes lois,

comme celle du 2 janvier 1978 qui institua un régime d’assurance personnelle en faveur de

toutes les personnes qui ne bénéficiaient pas de la sécurité sociale au titre d’un régime

obligatoire. Et, c’est la loi du 27 janvier 1999, rentrant en application le 1 er janvier 2000, qui

boucla la boucle avec l’institution d’une couverture maladie universelle en garantissant à tous

une prise en charge des soins par un régime d’assurance maladie111.

6.1. L’organisation actuelle.

La sécurité sociale se compose de quatre groupes de régime : le régime général des

travailleurs salariés non agricoles, le régime agricole, le régime des travailleurs non salariés

non agricoles et les régimes spéciaux.

6.1.1 Le régime général.

En 1987, 81.6 % de la population française était couverte par le régime général112. Ce

dernier peut aussi bien couvrir la totalité des risques que seulement une partie. Comme on a

pu le voir précédemment au niveau national, c’est désormais trois caisses qui assurent son

administration (les caisses d’assurance maladie, d’assurance vieillesse et d’allocations

familiales) auxquelles s’ajoute l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale qui en

assure la trésorerie. Localement, 129 caisses primaires d’assurance maladie, 16 caisses

régionales d’assurance maladie, une caisse régionale d’assurance vieillesse à Strasbourg et

115 caisses d’allocations familiales, assurent la prise en charge des prestations. Quant au

cotisation, la gestion en est confiée à 105 unions de recouvrement. Il faut enfin ajouter à cela, 110 Ibid, p.184, l.30.

111 DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, 2004, p.14, l.32-36.112 DALIGAND L., JAQUES M.-C., JOSPIN G., MARION J., PARET M., Sécurité sociale, 2e édition, Masson, Paris, 2004, p.5, l.5.

les 4 caisses générales et 4 caisses d’allocations familiales installées dans les départements

d’outre-mer113.

La composition des conseils d’administration, qui avait été bouleversé avec la réforme

de 1967, a une nouvelle fois été modifié avec l’ordonnance du 24 avril 1996. Tout comme en

1967, représentants du salariat et du patronat se partagent le même nombre de place.

Toutefois, le nombre à changer. Désormais, treize sièges au plan national et huit au plan local

sont attribués aux deux camps. La durée du mandat des membres est raccourcie d’un an,

passant de six à cinq ans, tout comme celle du président et du vice-président élus par ces

membres. Cette ordonnance de 1996, instaurait de plus, la mise en place d’une union des

caisses d’assurances maladies pour le 1er janvier 1998. Cette structure composée des

« organismes de base des différents régimes obligatoires d’assurance maladie ayant une

représentation territoriale dans la région »114. Elle a pour objectif l’élaboration d’une politique

commune, régionale, de gestion des risques. Enfin, des commissaires du gouvernement sont

présents (en prenant part aux séances) au sein des quatre organismes nationaux et représentent

le ministre chargé de la sécurité sociale et le ministre de l’économie et des finances.

6.1.2 Le régime agricole.

La Mutualité sociale agricole est le seul organisme en charge de la gestion de la

protection sociale agricole des agriculteurs, qu’ils soient exploitants ou salariés agricoles. La

M.S.A. se constitue de 85 caisses dirigées par un conseil d’administration élu par une

assemblée, elle-même élu par les agriculteurs. Au niveau national, on retrouve les trois caisses

suivantes : la caisse centrale de secours mutuels agricoles, la caisse centrale d’allocations

familiales agricoles et la caisse nationale d’assurance vieillesse mutuelle agricole. Tout

comme pour le régime général, une union régionale et nationale s’est constituée afin d’établir

une « unité d’action et de représentation dans les domaines intéressés par la mutualité

agricole »115. Il faut, enfin, noter que les exploitants bénéficient d’une autre particularité.

L’obligation de s’assurer contre le risque maladie, maternité, invalidité et contre le risque

accident du travail leur incombe. Mais ils ont cependant le choix de l’organisme assureur116.

6.1.3 Le régime des travailleurs non salariés non agricoles.

Ce régime concerne les travailleurs indépendants que sont les artisans, les

commerçants, les industriels et les professions libérales. En ce qui concerne l’assurance

vieillesse, en plus des caisses de bases, il existe une caisse nationale pour les artisans : la 113 DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, 2004, pp.58-59.

114 Ibid, p.61, l.17.115 DALIGAND L., JAQUES M.-C., JOSPIN G., MARION J., PARET M., Sécurité sociale, 2e édition, Masson, Paris, 2004, p.8, l.17.

116 DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, 2004, p.65, l.26.

Caisse autonome nationale de compensation de l’assurance vieillesse artisanale (CANCAVA)

et une pour les industriels et commerçants : la Caisse de compensation de l’organisation

autonome nationale de l’industrie et du commerce (ORGANIC). Et pour ce qui est des

professions libérales, treize sections professionnelles, coordonnée par la Caisse nationale

d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL), gèrent ce régime de vieillesse.

Le régime d’assurance maladie est quant à lui géré par trois caisses : nationale avec la

CANAM, régionale avec la CMR et des organismes conventionnés (OC). La CMR ayant pour

but de déterminer les cotisations et les prestations des assurés alors que les OC en assurent le

paiement117.

2.1.4 Les régimes spéciaux.

Comme leur nom l’indique, les régimes spéciaux ont une gestion « spéciale »

puisqu’ils peuvent être aussi bien gérés par les caisses du régime général que par des

mutuelles ou des « services dotés ou non de l’autonomie administrative et financière »118. Le

plus ancien des régimes modernes est le régime minier, instauré avec la loi du 29 juin 1894119.

La caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines assure l’assurance vieillesse

et les pensions des survivants. Les unions régionales de sociétés de secours minières gèrent

l’invalidité, les accidents de travail et les maladies professionnelles ainsi que les prestations

familiales.

On retrouve ainsi de multiples régimes comme celui-ci, comme le régime des marins

et inscrits maritimes, le régime du personnel de la SNCF, celui des militaires de carrière, des

clercs et employés de notaires, des Français expatriés. Ceux-ci étant tous régit par des

systèmes bien différents120.

6.1.5 La couverture maladie universelle.

La législation du 27 juillet 1999, impose que « toute personne résidant régulièrement

en France et ne disposant pas d’une couverture sociale relève, à compter du 1er janvier 2000,

du régime général de sécurité sociale pour les prestations en nature des assurances maladie,

maternité »121. A cela, s’ajoute aussi le fait, que toute personne ayant un revenu par foyer

fiscal inférieur à 6 965 euros par an122, peut bénéficier d’une couverture complémentaire

gratuite sous conditions de résidence et de ressources. L’assuré doit alors choisir entre sa 117 Ibid, pp.66-67.118 DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, 2004, p.66, l.10.

119 DALIGAND L., JAQUES M.-C., JOSPIN G., MARION J., PARET M., Sécurité sociale, 2e édition, Masson, Paris, 2004, p.9, l.34.

120 Ibid, pp.10-12.

121 DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, 2004, p.67, l.23.

caisse d’assurance maladie et un organisme complémentaire. On dénombrait au 31 décembre

2002, 1,3 million de personnes étant affiliées à la CMU et 4,6 millions bénéficiant de la CMU

complémentaire123.

122 D’après un arrêté publié au Journal officiel du dimanche 29 mai 2005. Source : http://www.service-public.fr/accueil/cmu_revalorisation_revenus05.html .

123 DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, 2004, p.68, l.9.

6.2 Les prestations de la sécurité sociale.

La sécurité sociale offre différentes prestations en fonction des différentes branches

qui l’a compose. Comme on l’a déjà vu il existe six branches au sein de la sécurité sociale qui

sont les branches : maladie, invalidité, décès, accidents du travail, vieillesse et les prestations

familiales. L’assurance chômage est donc bien une institution complémentaire à la sécurité

sociale et ne fait donc pas partie de celle-ci.

6.2.1 L’assurance maladie.

Les prestations de l’assurance maladie ont pour vocation à rembourser, en nature,

totalement ou partiellement des soins de santé et à compenser, par des indemnités

journalières, la perte de salaire due à l’arrêt de travail. L’assurance maladie ayant un caractère

familial, ses prestations peuvent bénéficier aussi bien à l’assuré lui-même qu’aux ayants droit

de celui-ci. Ces ayants droits peuvent être : le conjoint de l’assuré ou toute personne vivant

maritalement avec lui, les enfants de moins de 16 ans à la charge de l’assuré ou de son

conjoint ou jusqu’à 20 ans s’ils poursuivent leurs études ou sont infirmes.

Pour l’ouverture des droits, l’assuré doit justifié avoir cotisé pendant une certaine

période précédant la maladie : c’est la période de référence. On distingue la période de

référence de courte durée et celle de longue durée124. L’assuré a droit et ouvre droit aux

prestations en nature pendant un an, s’il justifie, notamment au titre de 30 jours consécutifs,

de cotisations égales à celle dues pour un salaire correspondant à 60 fois le SMIC horaire ou

de 60 heures de travail salarié. Pour bénéficier de ce droit pendant deux ans, ce sont cette fois-

ci, les cotisations de l’année civile précédente qui sont prises en compte. Elles doivent être

égales au montant des cotisations dues pour un salaire de 2 030 fois le SMIC ou 1 200 heures

de travail salarié125. En cas d’arrêt de travail, pour bénéficier des indemnités journalières,

l’assuré doit là encore justifier des cotisations lors de la période précédent l’arrêt. Un contrôle

des malades est aussi effectué dans le but de vérifier le bien-fondé des arrêts de travail.

Les frais couverts par l’assurance maladie sont les frais médicaux, d’hospitalisation, de

soins et prothèse dentaire, pharmaceutiques, de transports des malades, de cures thermales et

de réadaptations professionnelles. L’assuré possède le libre choix du praticien. Il doit

cependant, dans la majorité des cas, faire l’avance des frais. Et le remboursement des frais ne

représente qu’une partie des sommes dépensées par l’assuré. La part restant à la charge de ce

dernier est appelé le ticket modérateur. Enfin on peut observer qu’il existe des cas permettant

à l’assuré de ne pas avoir à payer ce ticket en fonction de l’intervention pratiquée ou la nature

de l’affection, ou encore de la condition de l’assuré.

124 DALIGAND L., JAQUES M.-C., JOSPIN G., MARION J., PARET M., Sécurité sociale, 2e édition, Masson, Paris, 2004, p.28, l.2.

125 DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, 2004, p.28, l.5.

6.2.2 L’assurance maternité.

Tout comme l’assurance maladie, l’assurance maternité fournit des prestations en

nature ainsi que des indemnités journalières. Les bénéficiaires sont les même que ceux de

l’assurance maladie. Après avoir fait une déclaration de grossesse à la caisse primaire,

l’assurée bénéficiera d’un remboursement total des frais d’accouchement et des frais

médicaux occasionnés par celui-ci. Les indemnités journalières débutent six semaines avant la

date présumée de l’accouchement et se terminent dix semaines après. Cette durée peut-être

augmentée si l’assurée a à sa charge au moins deux enfants. « Cette indemnité journalière est

égale au salaire journalier de base moins les cotisations et contributions sociales obligatoires

pris en compte dans la limite du plafond de cotisation »126.

6.2.3 L’assurance invalidité.

L’assuré recevra des prestations de l’assurance invalidité s’il subit une invalidité

réduisant de deux tiers, au moins, sa capacité de travail. De ce fait, il lui sera alors attribué

une pension destinée à compenser la perte de salaire, ainsi qu’une prise en charge de ces

soins. Au contraire de l’assurance maladie et maternité, seul l’assuré bénéficie de cette

assurance. Mais comme on l’a vu précédemment, il lui faut justifier ces cotisations antérieures

à l’invalidité.

Trois catégories d’invalides sont établies. La première catégorie définit l’invalide

comme étant incapable d’exercer une activité rémunérée sans que son salaire puisse être

supérieur au tiers de la rémunération normale de sa profession. L’invalide incapable d’exercer

une profession quelconque est affilié à la deuxième catégorie. Et enfin, la troisième catégorie

regroupe les invalides de la seconde catégorie qui ne peuvent effectuer les actes ordinaires de

la vie sans l’aide d’une tierce personne. Cette distinction d’invalidité permet une

différenciation de la pension : 30 % et 50 % du « salaire annuel moyen calculé en fonction des

salaires précomptés dans la limite du plafond »127, respectivement pour la 1ère et la 2nde

catégorie. Il faut ajouter une majoration à la pension de 50 % pour les invalides de 3ème

catégorie.

6.2.4 L’assurance accidents du travail.

« Sont considéré comme accident de travail, quelle qu’en soit la cause, les accidents

survenus par le fait ou à l’occasion du travail »128. L’assurance prend en charge

126 DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, 2004, p.32, l.3.

127 Ibid, p.34, l.2.128 DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, 2004, p.36, l.30.

l’indemnisation la couverture des soins qui pourraient permettre à la victime de recouvrir sa

capacité de travail. Des indemnités journalières sont de plus versées pendant l’interruption

temporaire de travail. Elle est égale à 60 % du salaire de la victime jusqu’au vingt-neuvième

jour après le début de l’arrêt de travail. Elle passe ensuite à 80 % du salaire.

6.2.5 L’assurance vieillesse.

Nous avons vu dans la partie 6.1 que l’assurance vieillesse comptait de nombreux

régime (régime agricole, des travailleurs non salariés, spéciaux). Nous nous attarderons ici

seulement sur le régime général.

Depuis le décret du 26 août 1993, les salariés doivent totaliser 150 à 160 trimestres,

soit 40 ans, d’assurance pour bénéficier d’une retraite au taux plein de 50 % des salaires

plafonnés à 60 ans. Si à cet âge, un salarié n’à pas cotiser assez longtemps, il a droit à une

pension minorée en fonction du nombre de trimestres manquants par rapport à 65 ans ou au

nombre maximal de trimestres. A l’inverse une majoration peut être exercée les assurés ayant

un conjoint à charge, ayant eut un certain nombre d’enfants. Les femmes ont de plus la

possibilité d’une augmentation de leur durée d’assurance égale à deux années dans le cas où

elles auraient élevé un enfant pendant plus de neuf ans.

6.2.6 Les prestations familiales.

Si aux premières heures de la sécurité sociale, seules quatre prestations sociales

existaient, aujourd’hui on en dénombre une quinzaine129, comme les prestations de naissances,

les prestations périodique d’entretien soumises ou non à une condition de ressources, les

prestations de logement, les prestations versées aux orphelins ou à des parents isolés, les

prestations aux handicapés, etc. Cependant il n’existe qu’un seul régime de prestations

sociales, quelque soit les catégories professionnelles. Ces prestations sont attribuées à toutes

personnes résidant régulièrement sur le territoire français et ayant à charge un ou plusieurs

enfants. Le montant de ces prestations est déterminé d’après une base mensuelle de calcul fixé

par un décret.

6.3 Le financement de la sécurité sociale.

A l’origine la sécurité sociale était uniquement financée par les cotisations des salariés

et des employeurs. Et si ce mode de financement perdure avec les assurances maladie et

vieillesses (financées par les doubles cotisations) ou bien les allocations familiales et

l’assurance accidents du travail (quant à elles exclusivement à la charge des entreprises),

d’autres formes de financement sont envisagées pour soulager les entreprises de ce poids

gênant leur capacité d’investissement. Il est ainsi possible d’instituer : « une taxe assise sur 129 Ibid, p.44, l.25.

d’autres éléments de la valeur ajoutée, le transfert de charges des entreprises vers les

ménages, le financement d’une partie de la branche allocations familiales par une

augmentation de l’impôt sur le revenu, l’harmonisation des assiettes, l’utilisation au

maximum de l’assiette actuelle en l’étendant à l’ensemble des revenus versés par les

employeurs aux salariés, … »130. G. Dorion et A. Guionnet émettent aussi l’idée qu’il est

possible aussi de modifier le financement de la sécurité sociale par des changements fiscaux,

ainsi ils proposent : « l’affectation du produit des ressources fiscales procurées par la remise

en des avantages familiaux, l’affectation du produit de l’intégration des prestations familiales

dans l’assiette des revenus imposables, l’augmentation et l’affectation du produit de certaines

taxes, l’intégration des revenus remplacement dans l’assiette des cotisations sociales »131.

Aujourd’hui, le totale des cotisations des assurances maladie, vieillesse et

d’allocations familiales représente 37,6 % des salaires soumis à cotisation contre 28 % lors de

sa mise en place en 1946132. C’est au 1er février 1991 que la contribution sociale généralisée

(CSG) est entrée en vigueur (au taux de 1,10 %) sur l’ensemble des revenus. Sept ans plus

tard, ce taux est de 7,50 %. Au final on observe que la part des cotisations représente 56,5 %,

en 1998, de l’ensemble des ressources de la sécurité sociale, soit une baisse de 7 points par

rapport à 1995. On explique cela, d’une part, par l’augmentation de la part du financement

fiscal et d’autre part, par le fait que l’augmentation de la CSG a permis « d’étendre l’effort de

contribution à un ensemble de revenus plus large que les salaires, en particulier aux revenus

issus du patrimoine et aux retraites »133.

Le 24 janvier 1996, une ordonnance institua la Caisse d’amortissement de la dette

sociale (CADES) dans le but de répondre à l’endettement croissant de la sécurité sociale

depuis le début des années 1990. Depuis sa création, 0,50 % de l’ensemble des revenus

(définis par l’ordonnance) est prélevé pour rembourser la dette. Celle dernière s’élevait à

73,56 milliards d’euros au 7 octobre 2005. La CADES ayant remboursée 27,64 milliards au

30 juin 2005134.

130 DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, 2004, p.105, l.15.

131 Ibid, p.106, l.6.

132 Ibid, p.107, l.3. 133 DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, 2004, p.108, l.25.

134 http://www.senat.fr/rap/a05-071/a05-0719.html .

Conclusion

Même si la France n’a pas été la nation la plus innovante en matière de protection

sociale, elle a su s’inspirer à travers l’histoire des modèles germains et britanniques pour créer

la sécurité sociale. Cette institution touche désormais tous les français et les résidants sur le

sol français, et de ce fait occupe une place considérable dans la vie de la société. On vérifie

cet attachement à la sécurité sociale par les fortes réactions de l’opinion publique lorsque les

pouvoirs publics tentent d’affaiblir la couverture sociale. Mais il semble inéluctable que des

réformes soit apportées afin de sauver et de pérenniser une sécurité sociale confrontée depuis

de nombreuses années à une crise financière.

Pour parachever ce mémoire, nous reprendrons les mots de G. Dorion et A. Guionnet,

« la sécurité sociale n’est pas seulement le symbole qu’elle représente depuis plus d’un demi-

siècle, elle est aussi un moyen puissant de la politique sociale et économique »135. Ces auteurs

français nous expliquent ici qu’en plus des secteurs dépendants de la sécurité sociale, tous les

secteurs d’activités sont plus ou moins influencés par la politique de celle-ci. Il faut donc lui

ajouter un rôle économique à son rôle social.

135 DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, 2004, p.122, l.26.

Bibliographie

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RITTER G.A., « La sécurité sociale en Allemagne de Bismarck à nos jours », Un siècle de protection sociale en Europe, La documentation française, Paris, 2001

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DORION G., GUIONNET A., La sécurité sociale, Que sais-je ?, 8ème édition, 2004.

GUESLIN A., GUILLAUME P., De la charité médiévale à la sécurité sociale, Paris, Ed. ouvrière, 1992.

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DALIGAND L., JAQUES M.-C., JOSPIN G., MARION J., PARET M., Sécurité sociale, 2e

édition, Masson, Paris, 2004.

Site internet   :

www.securite-sociale.fr www.senat.fr www.service-public.fr

Table des matières

Introduction...............................................................................................................................4

Chapitre I : Les origines de la sécurité sociale, de Bismarck à Beveridge....................5

1. Le modèle allemand........................................................................................................51.1 Les différentes formes de protections sociales et les premières lois............................6

1.1.1 L’assistance............................................................................................................61.1.2 Les obligations de l’employeur..............................................................................61.1.3 L’assurance............................................................................................................71.1.4 L’assurance sociale de Bismarck...........................................................................8

1.2 L’évolution : de Bismarck à la fin de la République de Weimar..................................91.2.1 Le Code impérial des assurances sociales.............................................................91.2.2 L’évolution des branches sous Weimar (1919-1932)..........................................10

2. Le cas anglais...............................................................................................................112.1 De la « Poor Law » à la « National Insurance ».........................................................12

2.1.1 La « Poor Law » : l’assistance aux indigents.......................................................122.1.2 La « National Insurance »....................................................................................13

2.2 L’idéologie du « welfare state » de Beveridge...........................................................142.2.1 Les fondements du plan de décembre 1942.........................................................152.2.2 L’échec du plan....................................................................................................16

Chapitre II : Les débuts de la protection sociale en France..........................................18

3. Les racines de la sécurité sociale.................................................................................183.1 Des initiatives privées aux premières lois...................................................................18

3.1.1 La mutualité.........................................................................................................183.1.2 Les institutions patronales de prévoyance...........................................................193.1.3 Le soutien de l’Etat : législatif et financier..........................................................20

3.2 Les obligations légales................................................................................................213.2.1 L’obligation de l’Etat...........................................................................................213.2.2 L’obligation des employeurs et des salariés........................................................22

3.3 Les acquis sociaux......................................................................................................233.3.1 L’assistance publique...........................................................................................233.3.2 La réparation des accidents du travail..................................................................243.3.3 L’échec relatif de la loi sur les retraites ouvrières et paysannes..........................24

4. De la loi du 30 avril 1930 au plan français de sécurité sociale de 1945.....................254.1 Mise en place des assurances sociales........................................................................25

4.1.1 Les principes de la loi du 30 avril 1930...............................................................254.1.2 Les différents problèmes rencontrés....................................................................264.1.3 Conclusion sur la loi des assurances sociales......................................................27

4.2 Le plan français de sécurité sociale de 1945...............................................................284.2.1 Les grandes lignes du plan...................................................................................284.2.2 Les lois complétant le plan..................................................................................294.2.3 L’hostilité rencontrée...........................................................................................29

Chapitre III : De 1945 à nos jours.....................................................................................31

5. La réforme de la sécurité sociale..................................................................................315.1 La planification des prestations sociales.....................................................................31

5.2 L’essor des institutions complémentaire.....................................................................325.3 La réforme de 1967.....................................................................................................33

5.3.1 Les ordonnances...................................................................................................335.3.2 Le paritarisme......................................................................................................34

6. La sécurité sociale d’aujourd’hui.................................................................................346.1. L’organisation actuelle...............................................................................................35

6.1.1 Le régime général................................................................................................356.1.2 Le régime agricole...............................................................................................366.1.3 Le régime des travailleurs non salariés non agricoles.........................................362.1.4 Les régimes spéciaux...........................................................................................366.1.5 La couverture maladie universelle.......................................................................37

6.2 Les prestations de la sécurité sociale..........................................................................386.2.1 L’assurance maladie.............................................................................................386.2.2 L’assurance maternité..........................................................................................396.2.3 L’assurance invalidité..........................................................................................396.2.4 L’assurance accidents du travail..........................................................................406.2.5 L’assurance vieillesse..........................................................................................406.2.6 Les prestations familiales.....................................................................................40

6.3 Le financement de la sécurité sociale.........................................................................41

Conclusion...............................................................................................................................43

Bibliographie...........................................................................................................................44

Table des matières...................................................................................................................45