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Report No. 30149-TN

République Tunisienne Etude d’Evaluation de la Gestion des Finances Publiques

-XLQ�������Algeria, Libya, Malta, Morocco, Tunisia Country Unit (MNC01) Operational Core Services Unit (MNACS) Middle East and North Africa Region

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ACRONYMES ET ABRÉVIATIONS

ADEB Aide à la décision budgétaire CFAA Evaluation des responsabilités fiduciaires en matière de gestion financière (Country

Financial Accountability Assessment) CGB Comité général du budget CGF Contrôle général des finances CGSP Contrôle général des services publics CNI Centre national informatique CPSCL Caisse des prêts et de soutien aux collectivités locales DGT Direction générale du Trésor DGCP Direction générale de la comptabilité publique DGDF Direction générale des dépenses de fonctionnement DGDD Direction générale des dépenses de développement ENA Ecole nationale d’administration EPA Etablissements publics à caractère administratif EPNA Etablissements publics à caractère non administratif HCCAF Haut Comité du contrôle administratif et financier INSAF Informatisation des services administratifs et financiers MDCI Ministère du développement et de la coopération internationale MDT Millions de dinars tunisiens SIADE Système d’information automatisé de la dette extérieure

Regional Vice-President Christiaan Poortman Country Director Theodore O. Ahlers Sector Director Hasan Tuluy Sector Manager Samia Msadek Task Team Leader Pierre Messali

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CFAA – TUNISIE \ RAPPORT

TABLE DES MATIERES

PRÉFACE REMERCIEMENTS RÉSUMÉ ....................................................................................................................... i

1. LA PRÉPARATION DU BUDGET ..................................................................................1 1.1 La préparation du budget obéit à une procédure peu institutionnalisée … 1.2 La procédure de préparation du budget permet un examen coordonné des crédits… 1.3 La procédure de préparation du budget nécessiterait quelques aménagements… 1.4 Les réformes en cours de l’approche de la gestion budgétaire

2. LA PRÉSENTATION DU BUDGET ................................................................................7 2.1 Les documents budgétaires sont nombreux et bien présentés… 2.2 Les diverses composantes du budget de l’Etat forment un ensemble clair… 2.3 Les documents annexés à la loi de finances ne fournissent pas une vue consolidée de l’ensemble

des comptes publics

3. L’ADOPTION DU BUDGET PAR LE PARLEMENT ........................................................13 3.1 Une procédure d’adoption du projet de loi de finances très encadrée… 3.2 Une procédure qui a évolué récemment dans le sens d’un rôle accru du Parlement… 3.3 Une procédure qui gagnerait en efficacité si ces procédures étaient standardisées…

4. L’EXÉCUTION BUDGÉTAIRE ......................................................................................15 4.1 Des outils d’exécution budgétaire classiques, souples et efficaces… 4.2 Les procédures légales de modification des crédits ouverts … 4.3 Les procédures légales permettant de modifier la répartition des crédits …4.4 La régulation d’ensemble de la dépense s’opère par gel des crédits… 4.5 La gestion des crédits de personnels s’opère dans de bonnes conditions de fiabilité…

5. LA DÉCONCENTRATION ET LA DÉCENTRALISATION................................................21 5.1 Le système budgétaire et financier tunisien est fortement déconcentré 5.2 Mais il reste encore faiblement décentralisé 5.3 La transparence des flux budgétaires … peut être encore améliorée 5.4 Les perspectives d’élargissement des compétences communales restent faibles

6. LES RELATIONS DU BUDGET & DU SECTEUR DES ETABLISSEMENTS PUBLICS & DES ENTREPRISES PUBLIQUES...............................................................................25 6.1 Un système de relations budgétaires & financières directes d’une bonne transparence 6.2 Un système de contrôle très réglementé et très diversifié…

7. L’EXÉCUTION COMPTABLE DE LA DÉPENSE ............................................................28 7.1 Un circuit comptable de la dépense structuré, fiable et institutionnalisé… 7.2 Un circuit exhaustif, qui unifie tous les paiements de l’Etat… 7.3 Un circuit comptable de la dépense informatisé et intégré… 7.4 Un circuit comptable des recettes lui aussi intégré et informatisé… 7.5 Un système de dépense qui engendre des délais de paiements acceptables 7.6 Un système comptable rigide… qui produit des résultats fiables en fin d’exercice… 7.7 Un système comptable … en partie simple et non en partie double… 7.8 Un système comptable qui parvient à produire des comptes globalement justes…

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CFAA – TUNISIE \ RAPPORT

TABLE DES MATIERES (Suite)

8. LA GESTION DE LA TRÉSORERIE ET DE LA DETTE ...................................................41 8.1 Une gestion de la trésorerie de type professionnel… 8.2 Une gestion de la dette récemment professionnalisée et déjà efficiente

9. LE CONTRÔLE DE LA DÉPENSE..................................................................................44 9.1 Un contrôle interne a priori … qui s’est allégé mais qui reste encore assez formel 9.2 Un audit interne a posteriori exercé par des inspections internes… 9.3 Un contrôle externe par la Cour des comptes qui s’exerce dans de bonnes conditions 9.4 Le Haut comité du contrôle…, un organe spécifique à l’Etat tunisien 9.5 Le contrôle exercé par le Parlement est effectif et consistant mais reste à approfondir

ANNEXES .....................................................................................................................

Annexe 1. MODIFICATIONS RECENTES APPORTEES A LA LOI ORGANIQUE Annexe 2. SCHEMA SIMPLIFIE DES PRINCIPES DE CLASSIFICATION DES DEPENSES

DE LA NOMENCLATURE BUDGETAIRE Annexe 3. GESTION DES CREDITS DE PERSONNEL Annexe 4. PLAN COMPTABLE EN PARTIE DOUBLE Annexe 5. QUELQUES ELEMENTS SUR LES DELAIS DE PAIEMENT

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CFAA – TUNISIE \ RAPPORT

PRÉFACE

Ce document est le produit d’une étude sur la gestion des finances publiques et des pratiques comptables du secteur public en Tunisie, plus couramment appelée par la Banque : Country Financial Accountability Assessment ou plus simplement «"CFAA"». Il s’agit d’un outil d’examen des responsabilités et risques budgétaires et financiers dans le domaine de la gestion des finances publiques.

L’objectif principal de cette étude est d'apprécier tant le cadre juridique et réglementaire que les procédures et pratiques de la gestion financière dans le secteur public en vue d’apprécier le risque d’utilisation des fonds publics pour des fins autres que celles initialement prévues. Il ne s’agit donc nullement de l’appréciation de la politique budgétaire ou financière du pays. Cette étude constitue un diagnostic et non un audit, qui vient compléter les études menées jusque là dans le domaine des finances publiques.

En outre, cette étude vise à conforter les efforts du Gouvernement tunisien en matière de réforme de la gestion budgétaire. Les analyses et les résultats auxquels elle aboutit permettent de mieux apprécier les capacités humaines, matérielles et institutionnelles à entreprendre les réformes envisagées.

Ce document couvre les aspects suivants de la gestion des finances publiques : préparation, présentation, vote et exécution du budget, comptabilité publique et système d’information et de reporting, relations financières entre l’Etat et les collectivités locales et contrôle, entre l’Etat et les entreprises et établissements publics et contrôle, contrôle interne et externe.

L’étude du CFAA a été initiée et effectuée d’un commun accord avec le Gouvernement tunisien. Elle a débuté au mois de mars 2003 et s’est étalée sur une période de quatre mois, avec deux missions de travail et de collecte de l’information menées conjointement avec les autorités tunisiennes. Le présent rapport a été préparé en étroite collaboration avec les autorités.

La mission du CFAA remercie chaleureusement les autorités tunisiennes pour leur accueil et leur étroite participation à ses travaux, sous la coordination principale de MM. Chedly AISSA, Secrétaire général du ministère de l’économie et des finances et Kamel Ben REJEB, Directeur général au ministère du développement et de la coopération internationale. Les responsables rencontrés tout au long de l’étude sont nommés dans l’annexe au présent rapport. Leur courtoisie, leur disponibilité et leur appui constants ont grandement facilité le déroulement des travaux. Qu’ils en soient ici chaleureusement salués et remerciés.

La mission du CFAA était constituée, sous la direction de Pierre MESSALI, spécialiste en gestion budgétaire et financière à la Banque mondiale (MNACS), de M. Hachemi ALAYA, consultant, Professeur d’économie à l’université de Tunis, de M. Yvon GELEZEAU, consultant, Trésorier principal du CHU de Nantes, de Mme Catherine COLLARDEY, consultante, magistrat en Chambre régionale des comptes Rhône-Alpes, et de M. Jean-Luc GORREMANS, consultant, spécialiste en gestion budgétaire et de personnel au ministère des finances à Paris.

Les travaux ont été supervisés par M. Théodore AHLERS, directeur du département Maghreb à la Banque Mondiale ainsi que par Mme Samia MSADEK, manager régionale en gestion budgétaire et financière (MNACS). Ils ont été soumis à un comité d’analyse critique composé de M. Aristomène VAROUDAKIS, économiste senior à la région MENA, Mmes Anne MONDOLONI, spécialiste en gestion financière (OPCFM), Soukeyna KANE, spécialiste en gestion financière (AFR) et Paloma ANOS CASERO, économiste à la région MNA.

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REMERCIEMENTS

Les membres de l’équipe du CFAA tiennent à remercier toutes les instances officielles pour leur soutien et leur collaboration active.

Ces remerciements s’adressent en particulier à MM :

Chedly AÏSSA, Secrétaire général du Ministère des finances Kamel Ben REJEB, Directeur général au ministère du développement & de la coopération internationale M. Mohamed Lotfi FRAD, Adjoint au Directeur général au ministère du développement & de la coopération internationale Abdessatar HADJ TAÏEB, Chef du CGB Mme Fawzia SAÏD, Directeur général du DGDF Fredj SAHLI, Directeur général de la comptabilité publique Hammouda ATROUS, Trésorier général de Tunisie Kamel GUERMAZI, Directeur général du contrôle des dépenses publiques Mohamed HADDAR, Chef du contrôle général des finances M. Abderrahman JATLAOUI, Chef du Contrôle général des services publics Khaled MARZOUK, Directeur général du Centre informatique Mme Faïza KÉFI, Président de la Cour des comptes Abdellatif KHARRAT, Président de chambre à la Cour des comptes Habib HADJ SAÏD, Président du Haut Comité du contrôle administratif & financier Moncef SAIED, Directeur général des participations Ridha ABDELHAFIDH, Directeur général du Comité des contrôleurs d’Etat Mokhtar HAMMAMI, Directeur général des collectivités locales au Ministère de l’intérieur Mounir BOUMASSOUER, Directeur général de l’infrastructure au MDCI Mme Amina YOUSSEF, Directeur général de la gestion financière au Ministère de la santé Abdelkader ZGOLLI, Directeur général des services communs au Ministère de l’éducation nationale Noureddine BERRAJEB, Directeur général des services communs au Ministère de l’agriculture Abderrahmane BOUHRIZI, Président de la commission des finances de la Chambre de députés, Et à tous les députés, membres de ladite commission

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RÉSUMÉ

Introduction

Le système tunisien de finances publiques est régi par un cadre légal et réglementaire très élaboré Le système budgétaire et financier de la Tunisie est régi par une loi organique du budget du 25 novembre 19961, modifiée tout récemment (loi du 13 mai 2004)2 et prise en application d’une disposition générale de la Constitution3. La loi organique est un texte relativement simple, lisible et concis (48 articles) qui régit le cadre global des finances publiques pour les dispositions générales et la présentation du budget (Titre I), la préparation et le vote du budget (Titre II) et enfin, l’exécution et le règlement du budget (Titre III). Cette loi organique est complétée par un « Code de la comptabilité publique » (de niveau législatif) très complet, en date du 31 décembre 1973 et par des textes particuliers pour les organes et fonctions de contrôle. La fonction de contrôle externe, de type juridictionnel, est exercée par une « Cour des comptes » instituée par la Constitution elle-même ainsi que par des dispositions législatives. De plus, les lois de finances sont soumises à un contrôle de constitutionnalité prévu lui aussi, par la Constitution. Ce cadre constitutionnel, législatif et réglementaire des finances publiques est de qualité et offre globalement des garanties élevées en matière de fiabilité et de transparence. Le système repose sur les grands principes qui fondent le droit budgétaire français. Outre les grandes règles de l’unité, de l’annualité, de l’universalité et de la spécialité, le système reprend le principe de la séparation stricte des fonctions des ordonnateurs et des comptables qui sont responsables pécuniairement auprès de la Cour des comptes, ainsi que les grandes règles en matière de contrôle ex ante de la dépense et de contrôle et d’audit interne et externe. Il en est de même enfin, des règles de report comptable, notamment la loi de règlement, qui arrête les comptes annuels définitifs du budget après déclaration de conformité par la Cour des comptes. Le système repose par ailleurs, en vertu de la loi organique, sur le Plan de développement quinquennal qui fixe les grands objectifs macroéconomiques de la nation ainsi que la liste des projets d’investissements publics à réaliser durant la période ; ce qui établit un lien étroit avec le budget. Le système de la dépense repose sur le principe d’une forte déconcentration au niveau local ; une caractéristique très positive qui constitue sans doute un élément important de son efficacité au regard de l’impact de la dépense publique sur le développement. Enfin, le secteur public (établissements publics et entreprises publiques) est relativement important et fait l’objet d’un contrôle effectif par l’Etat.

1 Modifiant la précédente loi organique datant du 8 décembre 1967 2 Les modifications de la loi organique font l’objet d’une annexe au rapport compte tenu de sa publication très récente, alors même que le présent rapport était déjà rédigé. Il en a été cependant été tenu compte dans le corps du rapport lorsque cela était nécessaire. 3 Constitution du 1er juin 1959, art.36 « La loi autorise les recettes et les dépenses de l’Etat dans les conditions prévues par la loi organique du budget »

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…qui ménage cependant une place importante à la pratique, laquelle s’avère le plus souvent de bonne facture. Le système tunisien repose sur une organisation administrative et sur des compétences humaines et des moyens matériels de bonne qualité. La fonction publique est dimensionnée assez correctement, sans surcapacités notables et les agents sont recrutés à un bon niveau de formation, notamment au niveau de la haute administration et des organismes d’audit et de contrôle. De ce fait, la pratique des acteurs du système de finances publiques est à la hauteur de la qualité de son cadre juridique. De ce fait aussi, lorsque le cadre juridique est encore peu formalisé, comme c’est le cas de la procédure de la préparation du budget ou de la tenue de comptabilité, les pratiques retenues sont le plus souvent de bonne facture, fondées sur une préoccupation manifeste de bonne gestion des deniers publics. Ce recours fréquent à la pratique comporte cependant des aspects moins positifs qui affectent parfois la transparence, non point en termes de rendu des comptes qui est généralement correct, mais plutôt en termes de clarté et de neutralité des procédures de décision. Cette caractéristique, assez fréquente en régime de finances publiques traditionnelles, risque de s’avérer très vite un handicap voire un obstacle, à la modernisation des modes de gestion budgétaire dans laquelle les autorités tunisiennes souhaitent, très opportunément, s’engager en vue d’améliorer l’efficience de la dépense publique. En effet, l’expérience des différents pays engagés dans de telles réformes montre que la gestion par objectifs, résultats et performance est indissociable de l’existence d’un cadre de relations claires et stables avec les ministères dépensiers. La contractualisation et le partenariat sont même un élément essentiel du succès de ces dispositifs. Ceci suppose donc que les autorités tunisiennes s’engagent plus avant dans une meilleure formalisation des procédures et des relations entretenues aussi bien entre le ministère des finances et les ministères dépensiers, qu’entre les ministères et les organismes d’audit interne ou externe ainsi qu’avec le Parlement, disposant désormais de deux chambres indépendantes. Sous ces réserves, le système tunisien de la dépense publique peut être aujourd’hui affecté d’un facteur de risque budgétaire et financier, tel que défini dans la préface ci-dessus, faible4.

Le présent rapport s’articule autour de plusieurs thèmes qui décrivent et analysent la dépense publique à chacun de ses stades ou en chacune de ses composantes à la lumière du risque budgétaire et financier qu’il recèle. Un bref résumé est présenté ci-dessous.

1. La préparation du budget : une procédure peu institutionnalisée, qui repose cependant sur de bonnes pratiques mais qu’il sera nécessaire de réformer dans le cadre de l’évolution vers une gestion budgétaire par les objectifs et la performance.

4 Sur une échelle d’évaluation du risque à 4 niveaux : faible, moyen, important et très élevé.

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La procédure de préparation du budget répond aux principaux critères de bonne gouvernance communément admis en la matière. Elle permet notamment d’assurer une bonne cohérence entre le budget, le cadrage macroéconomique et la politique économique générale du gouvernement. Elle assure aussi la nécessaire discipline qui permet d’imposer à l’ensemble des ministères dépensiers le respect des objectifs, choix et arbitrages décidés au niveau de l’exécutif. Enfin, elle permet aux ministères dépensiers d’exprimer véritablement leurs besoins budgétaires dans un cadre organisé et rationnel de négociation avec le ministère des finances et les autorités supérieures de l’Etat. La négociation budgétaire est incontestablement une procédure nourrie et dynamique. Cette procédure reste cependant peu institutionnalisée au niveau notamment des structures de détermination du cadrage général du budget (pas de structure ad hoc) et peu formalisée au niveau de la phase de négociation avec les ministères dépensiers (une seule circulaire en début d’année, pas de notification officielle des résultats finaux du processus de fixation des budgets). Le pragmatisme dominant de cette procédure peut cependant s’expliquer par l’intégration de la procédure dans le cadre institutionnel du Plan quinquennal très formalisé et, somme toute, très directif, notamment en matière de crédits de développement (investissements). Ce pragmatisme doit néanmoins être apprécié en perspective : il ne devrait plus pouvoir assumer sa part avec autant d’efficacité dans le bon déroulement de la procédure. En effet, s’il concourt dans le cadre de la logique actuelle de gestion budgétaire par les moyens à une efficacité non contestable de la procédure -bonne construction des budgets, coordination administrative entre les projets d’investissement et leurs moyens de fonctionnement récurrents, calcul précis des crédits de personnel-, il devrait néanmoins trouver ses limites dans le cadre de la réforme en gestation qui exigera davantage de formalisme, d’information et de clarté au niveau procédural. La contractualisation des budgets qui préside à la détermination des objectifs, des résultats et des moyens à mettre en œuvre, notamment dans une prévision de dépenses pluriannuelle, appelle nécessairement un cadre de négociation, d’arbitrage et de notification plus formalisé que celui existant aujourd’hui.

2. La présentation du budget : une présentation du budget assez satisfaisante, qui couvre à de très mineures exceptions près, l’ensemble des recettes et des dépenses publiques de l’Etat, mais qui ne fournit pas encore de vision consolidée des comptes publics (Etat, collectivités locales et sécurité sociale) et qui requiert des améliorations de nomenclature.

Dans l’ensemble, les documents relatifs au projet de loi de finances et ses différentes annexes sont de bonne facture, clairs et riches en informations utiles. Le rapport général joint au projet de loi et le rapport sur les données budgétaires fournissent des informations satisfaisantes, même si sur certains points des états récapitulatifs et synthétiques seraient souhaitables (états sur les relations entre l’Etat et les collectivités locales notamment). L’exhaustivité du budget est quasi-certaine, sauf pour ce qui a trait aux engagements hors bilan de l’Etat (garanties par l’Etat de prêts effectués par d’autres entités) et certaines dépenses de trésorerie non remboursées (avances aux entreprises) qui devraient être budgétisées, mais dont les masses relatives restent minimes. Les documents budgétaires ne présentent cependant pas de tableau schématique d’équilibre du budget, élément pourtant essentiel à l’appréciation du budget. De même, les documents ne font pas état de comptes consolidés entre l’Etat, les collectivités locales et les organismes de sécurité sociale.

Les états de recettes sont présentés dans un cadre rétrospectif bien adapté à l’évaluation de leur réalisme. Les fascicules budgétaires ministériels présentent les dépenses dans un cadre rétrospectif

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qui facilite l’appréciation de leur évolution. Les crédits de personnels et les effectifs font l’objet d’une présentation exhaustive. Les crédits d’investissement sont présentés sous une forme pluriannuelle qui renseigne sur les engagements de l’Etat pour les années à venir et sur les échéanciers de paiement. Ces derniers gagneraient cependant à mieux distinguer entre les projets en continuation et les projets nouveaux. La nomenclature budgétaire enfin, malgré une modernisation récente, doit être améliorée pour être plus conforme à la norme GFS. Les critères de destination et de fonctionnalité de la dépense ne sont qu’imparfaitement satisfaits. Il en est de même du critère programmatique qui est essentiel pour la réforme envisagée de gestion par objectifs.

3. L’adoption du budget : une procédure très encadrée par des textes de valeur supérieure qui, en pratique, a permis au Parlement d’accroître son rôle dans l’adoption du budget et qui va encore évoluer suite à la mise en place du bicaméralisme et de la réforme des modes de gestion budgétaire. La procédure d’adoption du budget par la Chambre des députés est régie par la Constitution et la loi organique et constitue une garantie de non-dénaturation du projet de loi de finances et de ses équilibres. Néanmoins la pratique a conduit ces dernières années à un renforcement du rôle de la Chambre des députés, essentiellement au niveau de ses méthodes de travail au sein de la commission des finances qui, du reste, est bien dotée en moyens humains et matériels. Cette procédure mérite d’être améliorée par une certaine standardisation des moyens d’échanges avec le gouvernement (questionnaires des parlementaires) et un renforcement de la procédure -interne à la Chambre- d’examen et de présentation des amendements. L’instauration à compter de 2005 du bicaméralisme va sans doute jouer dans le sens de la modernisation de la procédure. De même, la réforme des modes de gestion budgétaire conduira progressivement à une évolution des méthodes d’examen des budgets.

4. L’exécution budgétaire de la loi de finances : des outils d’exécution classiques qui permettent d’assurer la maîtrise des équilibres initiaux mais qui traduisent aussi, au travers de certaines procédures, un certain interventionnisme du ministère des finances, non exempt de lourdeurs et qui s’avèrera incompatible avec la réforme des modes de gestion budgétaire par objectifs.

L’exécution de la loi de finances s’opère dans de bonnes conditions générales de préservation des équilibres globaux initiaux. La loi organique et la pratique du ministère des finances donnent au gouvernement les outils adéquats pour réaliser cette préservation. Le blocage et le gel de crédits notamment, pratiqués à des fins de régulation conjoncturelle, sont un signe manifeste de maturité et de discipline budgétaire à porter à l’actif du système (sous réserve d’une transparence vis-à-vis du Parlement qui reste à améliorer). A un niveau plus fin du suivi de l’exécution budgétaire, deux procédures motivées par un souci de gestion prudente des crédits, conduisent cependant à un certain interventionnisme du ministère des finances et à des résultats qui restent peu convaincants. Au demeurant, ceux-ci pourraient être atteints sans ces lourdeurs à coloration bureaucratique. Il s’agit en premier lieu, de la mise à disposition différée des crédits d’investissement des projets nouveaux qui n’intervient pas en bloc en début d’année, comme pour les autres crédits, mais projet par projet, par autant d’arrêtés du ministère des finances pris en cours d’année. Les raisons invoquées à l’appui de cette procédure (régulation globale de la dépense d’investissement,

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optimisation des crédits en fonction de l’état de maturité des différents projets, incitation à la bonne gestion) ne sont que partiellement convaincantes. De tels objectifs, certes louables, pourraient être pareillement atteints par le jeu normal des procédures courantes de mise en œuvre des projets d’investissement (contrôle des engagements ex-ante, procédure d’autorisation préalable des marchés publics, etc.) Il s’agit en second lieu, de la procédure d’autorisation par le ministère des finances des mouvements de crédits d’investissement entre lignes budgétaires au niveau le plus fin de la nomenclature (paragraphe et sous paragraphe). Ces mouvements sont nombreux, peu transparents et témoignent d’une insuffisante flexibilité dans l’utilisation des crédits entre lignes budgétaires et d’une insuffisante autonomie des ministères dépensiers. Ces deux procédures, assez similaires dans leurs conceptions et objectifs, ne semblent pas soulever aujourd’hui de grandes difficultés au niveau des ministères dépensiers. Elles pourraient cependant se heurter assez vite à des obstacles dans le cadre d’une mise en place de modes de gestion budgétaire plus axés sur les objectifs, les résultats et la performance. Ces nouveaux modes de gestion s’avèrent en effet, incompatibles avec une restriction de l’autonomie de gestion des ministères dépensiers car, ils visent précisément à leur conférer une plus grande autonomie et marge de décision en contrepartie de résultats fixés et attendus. Il y a lieu de préciser que la réforme toute récente de la loi organique a fait un premier pas en ce sens, en conférant plus de pouvoirs aux ministères dépensiers en matière de mise à disposition des crédits d’investissement et de virement de crédits. Il reste cependant insuffisant. A l’inverse, il faut noter favorablement que le mode de gestion des crédits de personnel est de nature à bien responsabiliser les ministères dépensiers grâce à une décentralisation importante des pouvoirs de gestion au profit des responsables de personnels et à des procédures de contrôle central très poussées sur la base d’une informatisation bien établie. Cette situation permet d’envisager favorablement une évolution des modes de gestion budgétaire par les objectifs et résultats dans la mesure où le coût des personnels revêt une dimension importante dans toute action ou programme public.

5. La déconcentration et la décentralisation : une forte déconcentration, facteur d’efficacité de la dépense publique au service du développement, mais une assez faible décentralisation, malgré l’existence de capacités institutionnelles et humaines dans les régions. La forte déconcentration de la dépense publique est une caractéristique du système tunisien. La quasi-totalité des dépenses de fonctionnement au plan local sont déconcentrées sans difficulté particulière. De même, les dépenses d’investissement sont largement déconcentrées au niveau des gouvernorats, voire décentralisées. Le formatage des crédits en lois de finances facilite ces transferts de crédits en gestion et surtout, la répartition des compétences facilite la mise en œuvre des opérations matérielles. Cette forte déconcentration est un facteur d’efficacité dans la mise en œuvre de la dépense publique et dans son impact sur le développement. La décentralisation concerne essentiellement les municipalités, plus marginalement les régions. Elle est limitée aux services municipaux de proximité (nettoyage, voirie, éclairage, etc.) et s’opère dans des conditions assez bonnes. Les concours de l’Etat aux communes (et régions) sont globalisés et obéissent, pour le fonctionnement courant, à des règles fixées par la loi avec des critères de péréquation. Les concours en investissement sont déterminés par projets et sont fixés dans le cadre du plan quinquennal.

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La transparence de ces relations budgétaires entre l’Etat et les collectivités locales reste à améliorer. Un état récapitulatif annuel de ces relations devrait être fourni en annexe avec les documents de la loi de finances. De même, si les modalités d’approbation des budgets des 15 principales communes sont fixées par des textes, les décisions elles-mêmes sont peu transparentes.

6. Les relations avec le secteur public : un cadre de relations budgétaires transparent, un cadre légal et réglementaire de suivi et de contrôle très complet mais une pratique qui devrait être renforcée. Le secteur des établissements et entreprises publiques est particulièrement développé et diversifié malgré un mouvement récent de privatisation. Le cadre des relations budgétaires entre l’Etat et ce secteur est transparent dès lors que l’ensemble des concours budgétaires directs sont listés dans les documents budgétaires tant pour les établissements publics administratifs (état annexe à la loi de finances) que pour les autres entités (dans les fascicules budgétaires des ministères de tutelle). Les concours indirects (exonérations diverses, etc.) font l’objet de mesures législatives ou réglementaires par définition transparentes, mais qui ne font pas l’objet d’état récapitulatif en annexe à la loi de finances. Les contrôles de ces établissements et entreprises s’opèrent dans un cadre légal et réglementaire très complet tant par les ministères de tutelle (notamment la direction générale des participations de l’Etat) que par les organismes de contrôle et d’audit ainsi que par un corps de contrôle spécifique (le Comité des contrôleurs d’Etat). En pratique toutefois, certains aménagements pourraient être apportés pour améliorer l’efficacité des contrôles (rythme de versement des subventions en fonction de la situation de trésorerie en cas de régulation conjoncturelle) et la transparence (meilleure circulation des rapports des corps de contrôle).

7. L’exécution comptable de la dépense est d’une bonne fiabilité et avec des paiements sécurisés dans des délais globalement acceptables. Le circuit doté d’une informatisation intégrée, facilite le rendu de comptes qui reste cependant entaché de difficultés pour les dépenses sur ressources extérieures et de défauts inhérents à la persistance d’un système comptable en partie simple pauvre en informations. Le circuit de la dépense est défini par un code de comptabilité publique en vigueur depuis une trentaine d’années. Il est clair, sans chevauchement des responsabilités entre les différents acteurs (ordonnateur, contrôleur et comptable) et parfaitement connu d’eux. Il est bien adapté à la configuration déconcentrée de la dépense avec un déploiement du réseau comptable satisfaisant. La logistique de paiement est de qualité, assurant une unification du réseau de paiement des dépenses de l’Etat et évitant tout risque de « fuite ». Quelques faiblesses apparaissent cependant dans la procédure d’engagement, notamment au niveau des marchés publics, par non-respect systématique de la règle de l’antériorité de l’engagement comptable par rapport à l’engagement juridique (le caractère multiple de l’acte d’engagement semble responsable de cette difficulté). Les délais de paiement, quoique parfois un peu longs, sont dans l’ensemble assez satisfaisants. La comptabilisation des données est très fiable en fin d’année, facilitée en cela par l’informatisation intégrée de la dépense (ADEB). Toutefois, les situations mensuelles d’exécution manquent de fiabilité du fait essentiellement des difficultés de reporting en temps réel des dépenses sur ressources extérieures (projets co-financés par les bailleurs de fonds) gérés par un logiciel spécifique (SIADE) insuffisamment interfacé avec le système ADEB. De même, les situations mensuelles sont rendues dans des délais non négligeables de 10 jours en moyenne dus à des

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difficultés de rapprochements entre les états budgétaires et comptables qui diffèrent du fait de décalages entre les données d’ADEB et celles des paiements effectifs. La centralisation comptable s’opère dans des conditions techniques à parfaire afin de ramener les délais de 10 jours actuellement à 4 ou 5 jours. Cet objectif fixé par les autorités est réaliste, mais ne pourra être atteint que par une informatisation accrue. En bout de chaîne, la centralisation accélérée des donnés permettra d’accélérer la production des comptes servant à la confection de la loi de règlement, qui s’opère cependant d’ores et déjà dans des délais raisonnables (moins de deux ans au total). Une réduction de 6 mois du délai global est un objectif réaliste. La tenue de comptabilité s’effectue dans le cadre d’un système en partie simple, dont la réforme prévue depuis 1973 n’a pas encore abouti à des résultats tangibles. Il s’agit là d’une des principales faiblesses du système tunisien ; elle est d’autant plus singulière que le système comptable bénéficie depuis de très nombreuses années, d’une informatisation de conception très avancée . La direction générale de la comptabilité publique a entrepris de remettre cette réforme -lourde- en chantier avec notamment une assistance technique étrangère. Il s’agit d’une priorité première à laquelle toutes les énergies doivent être attelées. Il convient cependant de noter que l’absence d’un plan comptable en partie double ne pénalise que partiellement le système comptable dans la mesure où le bon professionnalisme des personnels comptables sur l’ensemble du réseau pallie une part des insuffisances dues à cette situation et assurent une fiabilité de haut niveau des comptes produits.

8. La gestion de la trésorerie et de la dette : une gestion de la trésorerie de type professionnel mais qui reste à améliorer sur certains points et une gestion de la dette récemment professionnalisée qui doit être mieux institutionnalisée. La gestion de la trésorerie publique est effectuée à partir des données fournies par la centralisation quotidienne des disponibilités du réseau du Trésor et du rapprochement avec le compte unique du Trésor auprès de la Banque centrale. La direction générale du Trésor opère sur ces bases les appels nécessaires à l’alimentation en liquidités du circuit. Deux principales carences de cette gestion concernent la non prise en compte de la trésorerie liée aux projets co-financés qui est tenue à part et l’incertitude dans l’appréciation des disponibilités quotidiennes qui est tirée du système ADEB sur la base du paiement effectif des dépenses. La gestion de la dette s’opère dans des conditions récemment professionnalisées mais déjà efficaces. Elle est effectuée par un personnel bien formé à la direction générale du Trésor. Une gestion active de la dette a d’ores et déjà été initiée avec une réorientation de l’encours vers des titres à long terme. L’enjeu de cette gestion est son institutionnalisation au sein du ministère des finances en vue de réduire les inconvénients liés à la multiplicité des intervenants et d’en améliorer le reporting. La transparence des informations est assurée : édition d’un rapport annuel exhaustif sur l’état de la dette et d’un rapport mensuel.

9. Le contrôle et l’audit des dépenses publiques : une panoplie complète et diversifiée (audit interne, externe, à priori et à posteriori) qui assure un audit effectif des dépenses publiques mais dont l’orientation vers un audit des performances s’accentue conformément à une évolution générale des finances publiques.

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Le contrôle ex ante effectué par le service du contrôle des dépenses est étroitement imbriqué au circuit de la dépense. Selon les textes, ce contrôle porte sur la vérification de la régularité de la dépense, notamment en matière de recrutement et de marchés publics (dont il préside la commission d’ouverture des plis) plus que sur l’économie générale de la dépense. La pratique confirme cette limitation de la portée du contrôle, d’autant qu’il s’est allégé depuis 1989, afin d’accélérer les paiements. L’informatisation de la dépense permettrait de faire évoluer ce contrôle vers une fonction plus proche de la régulation et de l’économie de la dépense publique notamment en l’impliquant plus au niveau des mises à disposition des crédits d’investissement et des mouvements de crédits au niveau fin de la dépense (voir section 4 ci-dessus). Une telle démarche pourrait être utile pour les ordonnateurs qui trouveraient un appui technique qui pourrait les aider à améliorer l’efficience de leurs choix de la dépense sans remettre en cause leur pouvoir de décision. Les services d’inspection interne, tels l’inspection des services comptables ou l’inspection de l’Agriculture, sont plutôt orientés vers le contrôle et l’audit du fonctionnement des services et de leurs activités. Ils effectuent une véritable mission de contrôle mais sont trop souvent sollicités par les ministres eux-mêmes pour des contrôles inopinés ou disciplinaires ou bien encore, pour des missions très proches de la gestion administrative qui perturbent leur mission principale et rend le déploiement d’une stratégie d’audit plus difficile. Les services d’audit interne à vocation interministérielle, le Contrôle général des services publics, rattaché au Premier ministre, et le Contrôle général des finances, rattaché au ministère des finances, exercent de véritables missions d’audit interne avec des moyens matériels conséquents et des personnels recrutés de très haut niveau de formation (Bac+7). Leurs méthodes d’audit sont très proches des meilleurs standards professionnels actuels et s’attachent de façon appuyée aux résultats et à la performance de la dépense publique. Leur vocation diffère en pratique essentiellement par le fait que le premier tend à se spécialiser dans le management des organisations publiques, en jouant d’ailleurs une fonction de conseil de plus en plus marquée, et le second tend à se spécialiser dans les audits financiers et dans l’audit des projets d’investissements co-financés par les bailleurs à leur demande. Le contrôle externe exercé par la Cour des comptes s’exerce dans un cadre légal et matériel satisfaisant qui répond aux normes d’indépendance, de champ d’investigation et de qualité érigées par l’organisation INTOSAI. Les magistrats de la Cour sont recrutés à un niveau de formation très élevé (Bac+7) et l’organisation de la Cour et de ses procédures sont bonnes, sous réserve que les projets d’institution d’une voie d’appel en faveur des comptables jugés en première instance soient menés à bien. La Cour joue un rôle important dans le processus de production de la loi de règlement puisqu’elle lui confère sa déclaration de conformité avant le vote par le Parlement et qu’elle produit à cette occasion un rapport d’analyse de la gestion annuelle des finances publiques de grande qualité. La Cour, dans ses rapports sur la gestion des dépenses publiques, qu’elle programme de façon indépendante et en s’attachant à observer une fréquence moyenne de 5 ans pour chaque entité contrôlée, s’oriente de plus en plus vers une approche d’évaluation des résultats et de la performance de la dépense publique, ce qui constitue une évolution très intéressante. Dans l’ensemble, les travaux de la Cour constituent un audit externe de la dépense publique de haute qualité. Il est indispensable que la Cour poursuive dans la voie de la généralisation de la publication de son rapport annuel qu’elle a déjà entamée au travers notamment de la publication par extraits au journal officiel. . Le système d’audit et de contrôle tunisien présente une spécificité avec l’existence du Haut Comité du contrôle administratif et financier qui assure une double fonction : la coordination des travaux des différents organes de contrôle et d’audit d’une part et, de l’autre, suivi de la mise en place des recommandations. Cet organisme rapporte directement au Président de la République et présente un rapport annuel en Conseil des ministres.

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Le Parlement enfin, exerce un contrôle sur les finances publiques à travers notamment les questions au Gouvernement avec débat ; cette procédure est assez récente. Les travaux de contrôle sous forme de commissions d’information ne sont pas encore véritablement développés mais le dynamisme de la procédure des questions y pallie en partie.

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1. LA PRÉPARATION DU BUDGET

1.1 La préparation du budget obéit à une procédure peu institutionnalisée mais qui repose néanmoins sur de bonnes pratiques.

La loi organique de 1996 (article 25) donne quelques indications assez générales sur la procédure de préparation du budget : les prévisions de dépenses des ministères techniques doivent être adressées au ministère des finances au mois d’août afin que celui-ci élabore, au vu des prévisions de recettes, le projet de budget qui est ensuite discuté en conseil des ministres et arrêté par le Président de la République.

La loi organique met donc en jeu les quatre acteurs principaux de cette phase de préparation du budget : i/ les ministères dépensiers, qui font leurs propositions, ii/ le ministère des finances qui élabore le projet de budget en rapprochant les recettes des dépenses, iii/ le conseil des ministres qui discute le projet et enfin, iv/ le Président de la République qui l’arrête.

En pratique, la procédure comprend deux phases bien distinctes mais qui néanmoins s’entremêlent au niveau du calendrier :

Une phase d’élaboration du cadre macroéconomique et budgétaire permettant de dégager les dépenses et recettes globales, le résultat budgétaire ainsi que le niveau d’endettement public;

Une phase de négociation des budgets des ministères dépensiers.

1.1.1 Première phase : le cadre macro-économique et le cadrage budgétaire d’ensemble.

Cette phase concerne pour l’essentiel les différentes directions du ministère des finances et le ministère du développement et de la coopération internationale.

Au sein du ministère des finances, la Direction générale du Trésor (DGT) joue un rôle majeur dans la prévision des recettes et de la dette mais un rôle moindre dans la prévision des hypothèses macro-économiques d’ensemble qui relève du ministère du développement et de la coopération internationale (MDCI). Par ailleurs, le Comité général du budget (CGB) et les deux directions générales du budget (fonctionnement et développement) jouent un rôle prépondérant dans la détermination des budgets ministériels.

Le cadrage macroéconomique relève principalement de la Direction de la prévision du MDCI qui formule le scénario de croissance dans un document dit « Budget économique ». Ce schéma de croissance annuel est articulé avec les prévisions du Plan de développement (quinquennal) et consiste en une actualisation de ses hypothèses annuelles. Un tableau d’équilibre macroéconomique (ressources-emplois) est finalisé au mois de juin. En outre, une prévision des recettes budgétaires est effectuée à partir de travaux macroéconomiques et permet d’effectuer des rapprochements avec ceux entrepris par la DGT. Par ailleurs, le MDCI pilote la procédure de détermination des projets d’investissement dans le cadre du Plan.

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S’agissant de la prévision des recettes, la DGT utilise des outils de prévision orientés sur le calcul direct des recettes et non sur des outils à caractère économétrique. Elle s’appuie sur de très bonnes compétences humaines et ses méthodes de calcul, bien que marquées par un certain empirisme, s’avèrent d’une bonne fiabilité (notamment pour les recettes fiscales), due notamment à une maîtrise des procédures d’actualisation des recettes de l’année en cours. Cependant, ses prévisions sont fiabilisées à un moment assez tardif dans l’année (mois de juin-juillet). Des efforts sont en cours pour parvenir à avancer cette prévision de recettes au mois de mai, c’est-à-dire à une date où l’actualisation des prévisions macroéconomiques de l’année en cours permet d’incorporer la connaissance des premiers résultats de la récolte agricole (11% du PNB) et de prévisions plus fiables de l’activité dans le secteur du tourisme.

Tableau comparatif des prévisions et réalisation des recettes fiscales

Années 1998 1999 2000 2001 2002 2003 moyenne

Prévisions

4.723 5.185 5.624 6.135 6.430 6.981

Réalisations

4.762 5.208 5.678 6.222 6.428 6.652

Ecart (%)

+0,8 +0,4 +1 +1,4 0 -4,7 ∗ +0,7 ∗∗

∗ Année atypique, guerre d’Iraq (en MDT) ∗∗ Hors 2003

S’agissant du cadrage financier, la DGT exerce également à ce niveau des prérogatives majeures : elle détermine le niveau de déficit budgétaire acceptable en fonction des capacités d’endettement sur les marchés intérieur et internationaux. Elle dispose à cette fin des éléments d’information nécessaires tant pour actualiser l’état d’exécution du budget que le scénario financier de l’année en cours et effectuer des prévisions pour l’année suivante.

S’agissant des prévisions de dépenses globales du budget, le CGB élabore, dès le début de l’année, une prévision propre d’évolution de la dépense budgétaire globale en se basant sur une actualisation de la dépense de l’année en cours et sur une projection des dépenses sur l’année suivante. Cet exercice d’actualisation et de projection est réalisé en interne, sans concertation avec les ministères dépensiers ; il aboutit vers le mois de mars à un scénario de dépenses qui inclut les dépenses dites contraintes (personnel, fonctionnement, intérêts de la dette, etc.) et fait ressortir une marge de dépenses supplémentaires possibles.

Ces différentes hypothèses provenant de différentes directions sont rapprochées et confrontées au sein de réunions internes au ministère des finances et du MDCI en vue de déterminer des arbitrages entre recettes et dépenses. Ces réunions aboutissent à un scénario définitif, après itérations successives, au mois de juillet. Ces réunions et arbitrages s’opèrent sans cadre institutionnel ad hoc (comité budgétaire ou structure de coordination de la préparation du budget).

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Les principales caractéristiques de la première phase de préparation du budget

-la procédure est peu institutionnalisée: il n’y a pas de comité ad hoc de préparation du budget pour permettre l’échange d’informations, le rapprochement des scénarios, les décisions à prendre que ce soit à l’initiative du ministre des finances ou du Premier ministre,

-la procédure n’aboutit à un scénario fiable qu’assez tard dans l’année (pas avant juillet),

-la procédure de cadrage général se poursuit alors même que les discussions et les négociations avec les ministères dépensiers s’engagent au mois de mai (cf. ci-dessous)

-il n’y a pas de directives ou d’instructions officielles particulières qui jalonnent cette procédure ou qui la concluent,

-la procédure est cependant efficace car elle aboutit à un véritable processus décisionnel qui structure toute la négociation budgétaire avec les ministères dépensiers

-la procédure s’effectue dans la continuité du cadre d’élaboration du plan quinquennal, notamment pour les investissements.

1.1.2 Deuxième phase : la préparation et la négociation des budgets ministériels Cette phase est du domaine du CGB et des ministères dépensiers. Le CGB édite en début d’année (février), une circulaire sur la préparation du budget qui est signée par le Premier ministre. Ce document fixe les grandes orientations de la politique budgétaire et les prescriptions méthodologiques pour préparer les dossiers budgétaires pour chaque type de dépenses. Il fixe aussi le calendrier de préparation du budget, mais ne fournit pas d’indicateurs pour actualiser le budget (le scénario budgétaire n’étant pas encore élaboré à cette période).

En complément à cette instruction, le Ministère des finances (services chargés de la préparation du budget) adresse aux ministères dépensiers un dossier-type pour la présentation de leur budget qui est ainsi rationalisée et homogénéisée entre les différents ministères. Les premières réunions de préparation des budgets entre les ministères dépensiers et les services du budget ont lieu en mai-juin (mais en 2004, des réunions préparatoires ont été prévues en mars). Elles permettent de dégager des enveloppes de reconduction et des enveloppes correspondant aux demandes d’actions nouvelles, dont certaines nécessitent un arbitrage ultérieur, entre juillet et septembre, le plus souvent au niveau du ministre des finances5.

Les résultats des réunions sont arrêtés en septembre6 puis soumis à l’approbation d’un Conseil interministériel, puis du Conseil des ministres7.

Ces résultats finaux ne sont pas notifiés officiellement aux ministères. Ces derniers reçoivent leur fascicule budgétaire pour vérification avant impression et transmission au Parlement8.

5 Exceptionnellement à un niveau supérieur 6 La procédure devait en 2004 être raccourcie afin d’avancer les résultats en juillet. 7 Fin octobre 8 15 novembre au plus tard

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Les principales caractéristiques de la deuxième phase de préparation du budget

-la négociation des budgets entre le ministère des finances et les ministères dépensiers est réelle et consistante. Elle favorise indiscutablement la responsabilisation des ministères.

-les négociations des budgets débutent en mai alors que les prévisions de recettes ne sont pas encore fiabilisées à cette période, d’où un risque de sur-estimation initiale des enveloppes de crédits négociées qui a été jusqu’ici maîtrisé grâce à une négociation scindée en mesures contrainte (notion de reconduction) et mesures optionnelles (notion de mesures nouvelles).

-la date d’achèvement des négociations est tardive (septembre) du fait d’une ouverture des négociations assez tardive (mai), laissant une durée totale de négociation assez courte (5 mois) qui pourrait être insuffisante dans les années à venir si la préparation du budget se complexifiait9 ou avec l’instauration du bicamérisme10.

-les budgets définitivement attribués aux ministères dépensiers ne donnent pas lieu à notification officielle, ce qui constitue la marque d’un certain manque d’achèvement institutionnel de la procédure de décision et d’un certain manque de clarté.

Au total, l’ensemble de la procédure de préparation du budget réunit les deux composantes essentielles d’un système budgétaire de bonne gouvernance :

La définition par une autorité du cadre, des objectifs et moyens de la politique budgétaire générale et sectorielle et la capacité à dégager des décisions finales en ligne avec ces objectifs ; Une qualité élevée de négociation des budgets avec les ministères dépensiers, traduisant leur degré d’implication dans leur programme d’action budgétaire.

1.2 La procédure de préparation du budget permet un examen coordonné des crédits d’investissement et des crédits de fonctionnement récurrents… La coordination entre les discussions sur les crédits de fonctionnement et d’investissement ne pose pas de problème institutionnel particulier dès lors que le cadre de discussion est commun est commun aux trois directions : le CGB, aux compétences verticales sur l’ensemble des ministères et qui coordonne les dépenses de fonctionnement et d’investissement, ainsi que les deux autres directions générales, la DGDF et la DGDD aux compétences horizontales11. Les réunions de discussion sur les budgets se passent en présence de ces trois directions, ce qui facilite la coordination. Par ailleurs, des représentants du MDCI, qui coordonnent les projets d’investissement du Plan et en assurent l’expertise au plan économique12, ainsi que du Premier ministère 13 et de la fonction publique, assistent aussi à ces discussions budgétaires. …qui parfois diffèrent pour des raisons liées exclusivement à une insuffisance de moyens.

Les difficultés d’harmonisation entre les projets d’investissements et la réservation des crédits de fonctionnement, lorsqu’elles se produisent, proviennent exclusivement de difficultés budgétaires et ne sont pas dues à des défauts ou hiatus de procédure.

9 Voir ci-après les observations sur les budgets par objectifs 10 Voir section 3 11 Ces deux directions sont dotées d’un effectif restreint de 5 ou 6 cadres, tandis que le CGB comprend une quarantaine d’agents. Leur fusion ne semble pas justifiée et n’est d’ailleurs pas envisagée. 12 La DGDD assurant de son côté une analyse de ces dépenses sous un angle relevant plus de la technique budgétaire 13 Via le service du contrôle des dépenses (voir sections 7 et suivantes)

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1.3 La procédure de préparation du budget nécessiterait quelques aménagements formels en vue d’améliorer son efficacité… La procédure devrait être, au plan formel, améliorée sur plusieurs points : - La prévision des recettes, base de départ de toute procédure de préparation du budget, devrait être fiabilisée plus tôt dans l’année (avril-mai au lieu de juillet), afin de permettre le démarrage des négociations budgétaires avec les ministères dépensiers sur des bases plus sécurisées. - Le cadrage d’ensemble du budget pourrait être mieux formalisé dans le cadre d’un comité ou structure ad hoc présidé par le ministre des finances et régi par un calendrier institutionnel. - La documentation de la phase de cadrage du budget pourrait être enrichie (circulaires d’étapes au-delà de la circulaire de début d’année, lettre du ministre des finances au Conseil des ministres indiquant les orientations de la politique budgétaire et définissant la politique budgétaire et les principaux indicateurs macroéconomiques et budgétaires…) - La procédure de négociation des budgets avec les ministères dépensiers devrait être conclue par un document officiel de notification du projet de budget arrêté au terme de la procédure. Ce document devrait être signé par le Premier ministre ou le ministre des finances. Il serait de nature à sécuriser la procédure et à lui conférer plus de rationalité et de transparence. Ces améliorations supposent notamment une modification du calendrier de la préparation budgétaire qui doit commencer et être fiabilisée plus tôt dans l’année. Les autorités se sont d’ailleurs engagées dans cette voie en 2004 pour la préparation du budget 2005. La discussion avec les ministères dépensiers pourrait avoir lieu plus tôt et être scindée en deux étapes : une première étape (mars-avril) pour fixer les budgets contraints (reconduction) avec une bonne marge de sécurité, ce qui suppose de disposer d’un premier scénario budgétaire (recettes-dépenses) en mars et, une seconde étape pour les mesures nouvelles (mai-juin), ce qui suppose de disposer d’une prévision fiable des recettes en mai. Les arbitrages seraient alors rendus en juin-juillet et la loi de finances serait prête en septembre-octobre.

…et qui, en tout état de cause, vont être rendus nécessaires par les orientations nouvelles prises par les autorités en matière de gestion budgétaire… Une meilleure formalisation du processus de préparation du budget, un avancement de son calendrier et un allongement de sa durée devraient, en tout état de cause, être rendus nécessaires à terme dans le cadre de l’orientation des autorités vers une approche de gestion budgétaire marquée par la fixation d’objectifs et de résultats (cf. infra) . L’expérience des pays engagés dans ce type de réforme indique la nécessité d’une formalisation plus grande (notamment pour la fixation des objectifs et résultats) et d’une durée de préparation du budget plus longue, notamment pour la discussion et la négociation des budgets. De même, l’introduction d’un cadre de dépenses à moyen terme (cf. ci-dessous) va dans ce sens. …et par l’instauration d’un bicaméralisme.

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La mise en place d’une deuxième chambre (Chambre des Conseillers) à partir de 2005 a d’ores et déjà conduit à avancer la date limite de dépôt du projet de budget à la Chambre des Députés du 15 novembre au 25 octobre14 ; Le bicaméralisme ne manquera pas de contraindre à un avancement en amont, du calendrier de préparation budgétaire.

1.4 Les réformes en cours de l’approche de la gestion budgétaire. La réforme de l’approche budgétaire par les objectifs et les résultats a fait l’objet d’une première étape avec la prise d’un décret en date du 24 novembre 2003. Elle est confirmée par la nouvelle loi organique du 13 mai 200415. Le décret de 2003 crée une unité de gestion au sein du Ministère des finances en vue de préparer le « projet de réforme de la gestion du budget de l’Etat ». Cette unité a pour mission de « mettre en place un système ayant pour but d’améliorer les méthodes de prévision, de suivi de l’exécution et d’évaluation des dépenses du budget de l’Etat par la méthode de la gestion par objectifs, et qui permet de lier les objectifs qualitatifs et quantitatifs aux moyens que nécessite leur réalisation ». Il s’agit d’une cellule avec des effectifs restreints, mais de haut niveau, dédiée exclusivement à cette réforme. Sa durée de vie est de 5 ans (jusqu’en 2008) et est soumise à un suivi et à une évaluation d’une commission au sein du ministère.

Les missions de l’unité de gestion par objectifs pour la réforme de la gestion du budget de l’Etat

l’élaboration d’une nomenclature budgétaire fonctionnelle et programmatique, la mise en place des normes et indicateurs de résultats, l’instauration d’un programme de suivi et d’évaluation de la réalisation des objectifs, la conception des programmes de formation des cadres à la gestion par objectifs, l’assistance des ministères dans la mise en œuvre de cette gestion par objectifs la préparation de la nouvelle structure du budget sur ces nouvelles bases.

Il s’agit donc, d’une véritable unité de réforme, dotée de pouvoirs élargis. La création d’une structure dédiée à cette réforme est positive ; elle devrait pallier la difficulté à faire « gérer » une réforme de ce type par des directions opérationnelles accaparées par la gestion quotidienne. Son efficacité dépendra de sa capacité à catalyser les compétences, notamment le CGB et les ministères dépensiers et à faire preuve de réalisme. De ce point de vue, une hiérarchisation des priorités s’impose.

Les trois premières étapes d’une réforme de la gestion budgétaire

L’adaptation de la nomenclature avec une codification économique et programmatique16 ;

L’élaboration d’un cadre de dépenses budgétaires à moyen terme (3 ans) qui s’avère toujours plus adéquat à la fixation et à la réalisation d’objectifs et de résultats ;

La détermination de programmes assortis d’objectifs et de résultats ainsi que d’indicateurs permettant leur évaluation.

14 Cf. art. 25 nouveau de la loi organique relative aux lois de finances du 13 mai 2004 modifiant la loi précédente. 15 La nouvelle loi organique regroupe les crédits selon des programmes et missions associés à des objectifs et des résultats. 16 Voir section 2

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Les autorités envisageraient, pour la mise en oeuvre de cette réforme, une assistance de la Banque mondiale. Il apparaîtra tout au long du présent rapport que le système budgétaire tunisien a atteint un stade d’évolution institutionnelle et de fiabilité qui autorisent, sans risque de détérioration de ses qualités fondamentales, le lancement d’une telle réforme, sous réserve de son application progressive et sous réserve qu’elle soit mise en œuvre en tenant compte du caractère incitatif qu’elle doit toujours présenter vis-à-vis des ministères intéressés. De ce point de vue, une mise en œuvre par expérimentations pilotes est sans doute souhaitable en vue de permettre une extension et une diffusion progressive de la réforme.

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2. LA PRÉSENTATION DU BUDGET

2.1 Les documents budgétaires sont nombreux et bien présentés… La présentation du budget est formalisée par les dispositions de la loi organique de 1996, modifiée en 2004. Le projet de budget déposé au Parlement comprend :

1. le projet de loi de finances proprement dit et ses annexes17,2. un rapport général sur le contexte économique et financier du pays, 3. un rapport général sur les données budgétaires 4. des annexes en forme de fascicules budgétaires pour chaque ministère.

Le projet de loi de finances comprend le projet de loi proprement dit, des annexes à valeur législative retraçant le détail des recettes (Tableau annexe A) et le détail des dépenses de l’Etat (Tableaux annexes B à F). Le projet de loi de finances proprement dit est un document important (une centaine d’articles). Les différentes annexes sont présentées sur une centaine de pages, ce qui donne la mesure de l’étendue de l’information transmise. Le standard de qualité de l’ensemble est d’un niveau élevé.

Les tableaux annexes à la loi de finances

Tableau A : Recettes du budget de l’Etat Tableau B : Dépenses du budget de l’Etat (crédits de paiement) Tableau C : Crédits de programmes de l’Etat Tableau D : Crédits d’engagement de dépenses de capital du budget de l’Etat Tableau E : Prévisions de recettes et de dépenses des fonds spéciaux du Trésor Tableau F : Recettes et dépenses des budgets rattachés pour ordre au budget de l’Etat

Les tableaux C et D correspondent aux crédits d’investissement développés selon une méthode qui sera examinée plus loin. Ils présentent les crédits par projets bien identifiés, avec mention de leur caractère national ou régional ainsi que la part financée sur ressources extérieures. Le tableau E présente les crédits des Fonds spéciaux du Trésor, qui sont définis par la loi organique, ainsi que les recettes associées (voir plus loin). Le tableau F enfin, présente les crédits relatifs aux transferts du budget de l’Etat aux établissements publics à caractère administratif (EPA) avec rappel des ressources propres et des dépenses prévisionnelles de l’entité. Les rapports généraux sont complets et bien présentés. Le rapport sur le contexte économique et financier est argumenté et illustré de nombreux tableaux macroéconomiques à l’appui des hypothèses retenues dans le projet de budget. Il en est de même pour le rapport sur les données budgétaires qui comporte notamment, des tableaux de recettes construits à partir des dernières exécutions connues (année n-1), une actualisation de l’exercice en cours (année n) et une prévision de l’année du budget (année n+1). Cette présentation est en pratique, très utile pour apprécier

17 Disponibles en version française

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objectivement le réalisme des prévisions de recettes associées au projet de budget18 ; elle constitue un facteur essentiel de transparence des finances publiques. Enfin, le rapport présente des tableaux rétrospectifs sur les dépenses publiques qui permettent une lecture en perspective très appréciable du projet de budget.

Les fascicules budgétaires de chaque budget ministériel sont présentés de façon lisible, sur la base d’une nomenclature récemment modernisée19, et avec nombre de tableaux récapitulatifs. Les effectifs sont retracés dans ces mêmes documents avec des informations très complètes sur l’état des prévisions de départs et de recrutements20. Les dépenses d’équipement sont présentées dans les formes prescrites par la loi organique21. Ces documents contiennent aussi des tableaux présentant les crédits en perspective, avec rappel des derniers crédits votés et des dernières dépenses connues. Il s’agit là d’une présentation pertinente qui accroît la lisibilité du budget et des finances publiques. Les crédits correspondant à des actions nouvelles (mesures nouvelles) sont présentés d’une façon spécifique et sont distingués des autres crédits assurant le fonctionnement à l’identique des services (services votés22) ; autant d’éléments qui accroissent le contenu informatif des documents budgétaires.

…et incluent une présentation pluriannuelle des crédits d’investissement qui améliore leur visibilité… Les crédits d’investissement sont présentés selon une perspective pluriannuelle en application des articles 13 et 14 de la loi organique. Ils sont présentés en trois composantes distinctes.

La présentation pluriannuelle des crédits d’investissement

Les crédits de programme représentent le coût total d’un projet ou programme d’équipement (ou d’une tranche de projet ou programme) indifféremment du calendrier de sa réalisation qui peut dépasser le cadre annuel

Les crédits d’engagement représentent la limite dans laquelle les crédits de programme peuvent être engagés. C’est en réalité l’élément budgétaire essentiel.

Les crédits de paiement représentent la limite annuelle dans laquelle les crédits d’engagement peuvent être ordonnancés.

Les crédits d’engagement sont pluriannuels et sont donc reportables d’année en année pour leur part non engagée, avant la fin de l’exercice. Les crédits de paiement non consommés avant la fin de l’exercice ne sont en revanche, pas reportés ; ils donnent lieu à ouverture nouvelle de crédits sur le budget de l’année suivante. Cette présentation pluriannuelle des crédits d’investissement fournit une image plus réaliste des engagements de l’Etat. Elle fournit notamment une vision des engagements sur les opérations qui restent à couvrir sur les budgets suivants. En revanche, la présentation de ces crédits d’investissement dans le corps de la loi de finances (tableau D) ne permet pas de distinguer les crédits d’engagement correspondant aux programmes nouveaux de ceux correspondant aux crédits

18 A vrai dire, la seule méthode pertinente de présentation des recettes 19 Cette nomenclature reste cependant encore à moderniser (voir plus loin). 20 Voir la section sur les crédits de personnel 21 Voir la section sur les crédits d’investissement 22 Définis par l’article 28 de la loi organique

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de programmes ouverts au titre de projets antérieurs. Elle ne permet pas également de distinguer dans le montant des crédits de paiement la part correspondant à des crédits d’engagements de l’année de celle correspondant à des engagements antérieurs. Des tableaux fournissant de tels échéanciers existent cependant dans les fascicules budgétaires de chaque ministère ; il en est de même pour le rapport sur les données budgétaires qui reproduit un tableau global de ce type pour l’ensemble du budget. …et une nomenclature budgétaire récemment modernisée mais qui appelle encore des modifications. La nomenclature a été réformée en profondeur par un décret du 18 mars 1999. Elle repose sur une classification des dépenses selon leur nature en fonction de critères administratifs et fonctionnels. La nomenclature des dépenses fonctionne sur la base d’une classification simple et logique qui va du global au particulier, partant du titre vers le sous-paragraphe (cf. tableau ci-dessous). La numérotation se fait sur la base d’un code à 17 chiffres23. L’exemple ci-après permet de suivre la codification pour les lignes 9-1-01-01101-0002-001 et 9-3-06-06663-0034.23-04:

Ministère24 Section25 Partie

Article

Paragraphe

Sous-paragraphe

9 1 01

01101

0002

001

Lignes Ministère des finances

9

idem

Dépenses de gestion

3

Dépenses de développement

Rémunérations

06

Investissementsdirects

Personnel permanent

06663

constructions-

aménagement de recettes bureaux

de contrôle

Indemnité spécifique

0034.23

Hôtel des finances à

Bizerte (code région 23)

Indemnité kilométrique

04

Génie civil et lots

annexes

Cette nomenclature ne prend pas en compte le caractère économique et programmatique de la dépense26. En ce sens, elle n’est que partiellement conforme à la norme internationale GFS définie par le FMI. Une nouvelle modification de cette nomenclature doit donc être mise à l’étude, d’autant plus rapidement que la volonté des autorités de s’orienter progressivement vers une gestion du budget par les objectifs, les résultats et la performance nécessite un ciblage des dépenses permettant de mieux les répertorier en fonction de leur nature économique et surtout en fonction de leur incidence sur la définition de programmes associés à des objectifs. En ce sens, l’introduction d’un identifiant programme spécifique est une première priorité. Les autorités devraient adopter le mode de classification programmatique le plus simple et le plus rapidement opérationnel en tenant compte notamment de sa mise en application informatique qui doit pouvoir être réalisée, au moins dans un premier temps, sans modification importante du système actuel de codification.

23 fonctionnement: 16 chiffres; investissement: 17 chiffres. 24 Ou chapitre 25 Le titre est précisé par les sections. 26 Pour les dépenses de développement, l’article codifie le caractère fonctionnel de la dépense

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2.2 Les diverses composantes du budget de l’Etat forment un ensemble clair, qui ne comporte cependant pas de tableau formel d’équilibre général…

La loi de finances présente de façon normative, dans ses premiers articles, les montants globaux des recettes et des dépenses du budget (Articles 1 et 2) ainsi qu’une décomposition de ces montants (Articles 3 à 11) selon une méthode cohérente et conforme à la loi organique ; toutefois, cette présentation souffre l’absence d’un tableau d’équilibre de l’ensemble du budget. Cette information est néanmoins présentée dans le rapport sur les données budgétaires. C’est l’article 7 qui indique le montant du résultat du budget (déficit ou excédent) et qui résulte de la contraction entre le montant des remboursements d’emprunts en capital et le montant du capital correspondant aux emprunts nouveaux. Une telle présentation, pertinente au plan comptable, a cependant l’inconvénient de ne pas faire apparaître de façon immédiate et parlante le montant du déficit

Tableau schématique de l’équilibre des recettes et des dépenses du budget de l’Etat (budget 2004)

Recettes Dépenses Solde

• Titre 1. Dépenses de Gestion 7.807 6.635 +1.172

• Titre 2. Développement (hors emprunts en capital) 161 2.070 - 1.909

• Fonds spéciaux du Trésor 490 490 0 --------------------------------------------------------------- ------- ------- -------- Totaux 8.458 9.195 -737

Déficit

• Emprunts 4.272 3.535 +737 --------------------------------------------------------------- ------- ------- -------- Totaux généraux 12.730 12.730 0

N.B. par construction, ce tableau est toujours équilibré. (en millions de dinars)

…mais qui assure une couverture exhaustive des recettes et dépenses du budget de l’Etat… La présentation du budget couvre l’ensemble des recettes et dépenses de façon exhaustive. Aucun fonds extrabudgétaire n’a été répertorié. Le budget de l’Etat, tel qu’il apparaît dans la loi de finances, recouvre en fait plusieurs catégories de recettes et dépenses différentes :

La couverture du budget de l’Etat en recettes et dépenses

-les recettes générales du budget non affectées (y compris les recettes d’emprunts)

-les dépenses budgétaires classiques des différents ministères

-les recettes et dépenses retracées dans les fonds du trésor qui regroupent les fonds spéciaux du trésor et les fonds de concours

-les dépenses et recettes des établissements publics pour ordre (mais seuls les crédits correspondant aux subventions de l’Etat sont effectivement comptabilisés au budget27)

-les recettes et dépenses des budgets annexes qui concernent les budgets autonomes de certains services publics non dotés de la personnalité morale28 (aucun budget annexe n’est répertorié en 2004).

27 Les ressources propres des établissements et les dépenses totales sont comptabilisées pour ordre 28 Aucun budget annexe répertorié en 2004. De plus cette procédure est supprimée par la nouvelle loi organique du 13 mai 2004

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Le cas particulier des recettes et dépenses des fonds du trésor, définis par les articles 22 à 24 de la loi organique de 1996, mérite des commentaires, d’autant qu’ils recouvrent deux types de comptes très différents : - Les fonds spéciaux du trésor sont des comptes de recettes affectées à des dépenses particulières. Ils sont inscrits dans la loi de finances en recettes et dépenses29 et font l’objet d’un développement complet dans le tableau annexe E de la loi de finances. Ils sont au nombre de 28, répartis aux budgets de 14 ministères ou entités et représentent un montant total de 490 millions de dinars, soit 3,8% du budget de 2004. Les plus importants sont le Fonds national pour l’emploi (80 MDT) rattaché au budget de la Présidence, le Fonds de développement des communications et des technologies de l’information (60 MDT), le Fonds de développement des autoroutes (55 MDT), le Fonds de restructuration du capital des entreprises publiques (50 MDT), le Fonds de développement de la compétitivité industrielle (44 MDT), etc. Ces fonds représentent une exception au principe de non-affectation des recettes, dès lors qu’ils permettent d’affecter à une activité particulière une recette en liaison directe avec cette activité, et apportent une souplesse en gestion, dans la mesure où le montant des dépenses peut être majoré en gestion à concurrence des recettes supplémentaires constatées et dans la mesure également où les soldes créditeurs sont reportables automatiquement. Hors ces particularités, ces comptes fonctionnent comme les autres lignes de dépenses budgétaires et ne doivent pas être assimilés à des fonds extrabudgétaires. - Les fonds de concours correspondent à des crédits ouverts en contrepartie de recettes correspondant à « des sommes versées par des personnes physiques ou morales pour contribuer au financement de certaines dépenses publiques » (art. 22 de la loi organique). Ils ne sont pas inscrits en loi de finances mais les crédits correspondant sont ouverts en gestion lorsque les recettes sont effectivement rattachées au budget. Ils représentent des montants variables, mais toujours faibles, de l’ordre de 50 MDT par an30, soit moins de 0,5% de l’ensemble des recettes du budget. Là encore, ces fonds ne peuvent être assimilés à des fonds extrabudgétaires dans la mesure où leur création et leur fonctionnement sont strictement encadrés par la loi organique et leurs dépenses strictement reportées au budget. …sauf pour deux types de dépenses correspondant à des avances de trésorerie non régularisées et à des dépenses liées aux garanties accordées par l’Etat. Deux types de dépenses sont effectuées en exécution sans être prévues au budget initial, ce qui limite quelque peu l’exhaustivité et la sincérité du budget initial. Les sommes en cause sont minimes lorsque comparées aux masses budgétaires. Il s’agit essentiellement de :

Certaines dépenses correspondant à des avances de trésorerie faites par l’Etat à des entreprises ou entités et qui ne sont pas remboursées31. Ces dépenses devraient être budgétisées en prévision et en exécution dans un fonds du trésor ou bien relever d’une procédure de caisse d’avance servie par une subvention annuelle du budget.

Certaines dépenses correspondant à des garanties accordées par l’Etat à des prêts contractés par des personnes publiques différentes du budget de l’Etat32. L’Etat est amené à couvrir les dépenses de remboursement en cas de défaillance de l’emprunteur. Le budget initial ne prévoit

29 Ils représentent au budget 2004 des sommes de 490 millions de dinars. 30 La même procédure existe dans le système budgétaire français mais pour des montants beaucoup plus importants (4 Milliards d’euros en 2003). Une part de ces fonds de concours sont constitués par les fonds rattachés au budget de l’Etat en provenance du budget de la Communauté Européenne 31 Ne sont pas visées ici les avances aux particuliers dès lors qu’elles sont gagées sur dépôt de bijoux en or 32 Contingent liabilities en terminologie comptable anglo-saxonne.

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aucun système de constitution de provisions de ces dépenses éventuelles qui sont supportées lorsqu’elles interviennent, par le budget de l’Etat. Il semble toutefois que cette pratique n’est plus ou presque utilisée. Cette absence de budgétisation s’inscrit aussi dans la ligne de la méthodologie comptable arrêtée pour le budget qui ne retient aucun élément de comptabilité patrimoniale (accruals accounting) ; ce point sera analysé plus loin dans la section réservée à la comptabilité (voir plus loin).

2.3 Les documents annexés à la loi de finances ne fournissent pas encore une vue consolidée de l’ensemble des comptes publics (Etat, Collectivités locales et Sécurité sociale) Les documents de la loi de finances ne fournissent pas de vue globale de l’ensemble des comptes publics ; seules sont retracées les recettes et dépenses du budget de l’Etat ainsi que le rattachement pour ordre des budgets des établissements ou entités publics bénéficiaires de subventions du budget de l’Etat.

Les budgets des collectivités locales et des organismes de sécurité sociale ne sont donc pas retracés dans la loi de finances. Les comptes des collectivités locales sont cependant déjà retracés dans des rapports d’exécution budgétaire (des efforts pour parvenir à une consolidation sont même en cours). La présentation de tels comptes consolidés est déjà fournie chaque année au FMI.

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3. L’ADOPTION DU BUDGET PAR LE PARLEMENT

3.1 Une procédure d’adoption du projet de loi de finances par le Parlement très encadrée par les textes supérieurs de valeur constitutionnelle ou supra législative. Les conditions d’adoption du budget par le Parlement sont encadrées par les articles 28, 30 et 33 de la Constitution de 1959 qui renvoient pour ses dispositions pratiques à la loi organique de 1996, notamment ses articles 30 et 31. La Constitution fixe essentiellement le cadre du nouveau bicaméralisme en matière de loi de finances grâce à une disposition de 2002 : le projet de loi de finances est donc désormais soumis aux deux Chambres (la Chambre des députés et la Chambre des conseillers) avec, en cas de désaccord entre les deux chambres, un système de conciliation ; la Chambre des députés conserve le droit du dernier mot. La Constitution fixe aussi une procédure de sauvegarde de mise en application du budget par tranches trimestrielles en cas de non vote au 31 décembre de l’année. Elle fixe enfin le principe de la création de commissions spécifiques pour l’examen de la loi de finances. La loi organique, quant à elle, fixe les formes dans lesquelles le projet de loi est voté (vote par section et ministère pour les dépenses, puis vote global) et les restrictions aux pouvoirs des parlementaires en matière d’amendement afin d’éviter de dégrader l’équilibre initial par des amendements qui réduiraient les recettes ou augmenteraient les dépenses. Les parlementaires ont cependant la possibilité de présenter des amendements de majoration de dépenses en les compensant par une majoration de recettes ou de réduction d’autres dépenses. Les mêmes dispositions s’appliquent à l’examen des lois de règlement ou des lois rectificatives. A noter que la Constitution ne prévoit pas de délai pour le dépôt du projet de loi de finances au parlement qui s’opère aujourd’hui au 15 novembre, ce qui est très tardif. Ce délai a été ramené au 25 octobre par la nouvelle loi organique. A noter enfin, que les lois de finances sont soumises au contrôle du Conseil constitutionnel par saisine du Président de la République mais non par le Parlement.

3.2 Une procédure qui, en pratique, a néanmoins évolué ces dernières années dans le sens d’un rôle accru du Parlement. La procédure d’examen et d’adoption du budget s’est renforcée ces dernières années grâce notamment au renforcement du rôle de la commission des finances mais aussi des autres commissions spécialisées. Le projet de loi de finances donne lieu à un examen approfondi en commission, qui se traduit notamment par des questions écrites au gouvernement et des auditions des ministres suivies de l’établissement de rapports spécifiques par ministère et par commission spécialisée ainsi que d’un rapport général sous la direction d’un rapporteur général du budget qui instruit les documents budgétaires pour les commissions et coordonne la discussion en séance plénière avec le gouvernement. Les commissions disposent, à titre permanent, de personnels techniques dotés d’un statut propre au Parlement et d’un niveau équivalent à celui des fonctionnaires de l’Etat.

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Le débat budgétaire s’organise pendant une période d’environ un mois (6 semaines avec la nouvelle loi organique). Le projet de loi de finances donnait lieu lors des débats budgétaires des années précédentes, à toutes sortes d’ajouts de dispositions parfois sans rapport avec les finances publiques (les cavaliers budgétaires) ; ces pratiques qui dénotent d’une absence de maîtrise voire d’un défaut d’organisation du débat budgétaire ont aujourd’hui disparu sous l’effet d’une rationalisation du débat budgétaire.

3.3 Une procédure qui gagnerait en efficacité si ces procédures étaient plus standardisées… Un nombre important de questions et d’informations font l’objet d’échanges entre le gouvernement et le parlement afin de nourrir le débat budgétaire, notamment par l’envoi de questionnaires. Ces échanges mériteraient d’être mieux standardisés soit sous forme de documents officiels (annexes, états récapitulatifs de diverses actions globales de l’Etat qui n’apparaissent pas à la lecture des documents budgétaires épars, rapports, etc.), soit en enrichissant le contenu des questionnaires adressés aux différents ministères et en les diffusant plus en amont du débat budgétaire afin d’expliciter et d’illustrer les informations contenues dans les fascicules budgétaires et de faciliter la compréhension des parlementaires. La procédure d’amendement des parlementaires mériterait sans doute d’être modernisée. Si le droit de chaque parlementaire de déposer des amendements doit être maintenu, il conviendrait de réfléchir à un examen centralisé en commission des finances de tous les amendements déposés afin que le Rapporteur général puisse faire valoir sa position sur chacun d’entre eux et assurer en quelque sorte une pré-tutelle de ces amendements. De même, les amendements déposés par le Rapporteur Général au nom de la commission des finances, devraient pouvoir faire l’objet d’un traitement à part afin de leur donner plus de force.

...notamment dans la perspective de la mise en place du bicaméralisme qui va rallonger la durée du débat budgétaire d’ensemble et conduire chaque assemblée à agir de façon plus rationalisée. Le bicaméralisme va aboutir à un dépôt du projet de loi de finances plus tôt dans l’année et la Constitution prévoit un système de concertation entre les deux assemblées en cas de désaccord, ce qui obligera les deux chambres à faire preuve de plus de maîtrise dans leur calendrier et surtout dans la définition de leurs stratégies propres. Cette concurrence nouvelle entre les deux Chambres va sans doute jouer le rôle d’aiguillon à la modernisation des méthodes de travail ; l’expérience du bicaméralisme dans tous les pays montre en effet, une tendance à la standardisation des méthodes parlementaires et la technicisation croissante du travail des députés. Le Parlement tunisien semble être conscient des enjeux qui se dressent devant lui et semble disposer des moyens matériels et humains pour y répondre. La réforme en cours de la procédure de gestion budgétaire (gestion par objectifs et par résultats, budgets de programmes, cadre à moyen terme, etc.) constitue aussi un autre enjeu majeur dans l’évolution de son rôle d’approbation du budget.

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4. L’EXÉCUTION BUDGÉTAIRE DE LA LOI DE FINANCES

4.1 Des outils d’exécution budgétaire classiques, souples et efficaces…

L’exécution du budget suit un circuit classique : « mise à disposition des crédits » ouverts en loi de finances initiale auprès des ministères, mouvements éventuels entre les lignes de crédits mis à disposition, éventuelles annulations de crédits ou ouvertures de crédits supplémentaires en fonction des règles de la loi organique, exécution comptable proprement dite de la dépense (voir section 5 suivante), clôture de l’exercice et production des comptes de clôture (loi de règlement) La loi organique codifie toutes ces procédures qui, avant l’engagement réel de la dépense, peuvent sensiblement modifier le profil d’exécution du budget, soit en changeant le plafond global des dépenses, soit en modifiant la répartition des crédits au sein d’un plafond global inchangé. La loi organique s’attache à concilier le nécessaire discipline budgétaire qui doit présider au respect de l’autorisation parlementaire et la flexibilité qui doit être laissée aux gestionnaires pour exécuter le budget. Ses dispositions sont de bonne qualité et permettent de garantir que un risque limité de dérive de l’exécution et, en tout état de cause, une bonne traçabilité, aucun mouvement n’étant possible sans référence à une réglementation précise. …mais une procédure de mise a disposition des crédits qui se révèle être assez lourde et bureaucratique pour un résultat peu convaincant. La procédure de mise à disposition des crédits est fixée par les articles 32 à 35 de la loi organique. Globalement, l’ouverture des crédits votés au budget, sans aucune modification possible, se fait par décret (dit décret de répartition) en tout début d’année33 pour chaque ministère (dit chapitre), par titre (fonctionnement, investissement) et par article. L’ouverture des crédits à un niveau plus fin (paragraphe et sous-paragraphe) c’est-à-dire au niveau des projets eux-mêmes, se fait ultérieurement par un arrêté du ministère des finances et il y a autant d’arrêtés que de projets. Il y a lieu de noter le caractère essentiel de cette procédure car elle se situe au début de la chaîne d’exécution de leur budget par les ministères dépensiers et c’est bien à la mesure de son effectivité que s’apprécie leur autonomie de gestion, tout au moins à la première étape de l’exécution. Il faut, à ce niveau, distinguer entre les crédits de fonctionnement et d’investissement.

Les crédits de fonctionnement donnent lieu à ouverture immédiate au niveau des paragraphes et sous-paragraphes, en début d’année, aux budgets des ministères, ce qui permet leur utilisation immédiate. La procédure ici ne pose pas de problème.

Par contre, concernant les crédits d’investissement, les ouvertures de crédits d’engagement et des crédits de paiement au niveau du paragraphe et sous-paragraphe (au cœur donc de la dépense) n’interviennent qu’au coup par coup, lorsque le projet est prêt à être lancé, après approbation des diverses instances chargées d’approuver les projets d’investissements, par signature d’arrêtés successifs du ministère des finances. S’agissant des opérations en continuation (projets en cours lancés les années antérieures), une ouverture en bloc des crédits d’engagement est cependant effectuée en début d’année à hauteur de 50% des besoins, ce qui simplifie la procédure.

33 Décret du 29 décembre 2003 pour le budget 2004 publié au journal officiel du 30 décembre 2003

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Cette mise a disposition différée des crédits d’engagement et de paiement pour les projets nouveaux, par autant d’arrêtés du ministère des finances que de projets, se justifie selon les autorités à trois niveaux essentiels : - Elle est nécessaire afin de faire correspondre la répartition exacte des crédits aux différentes composantes34 des projets (études, gros œuvre, etc.), lesquelles ne peuvent être connues que lorsque le projet est en ordre de marche. Cette observation est exacte, mais elle relève d’une conception excessivement centralisée de la mise à disposition des crédits, dont la répartition au niveau des composantes des projets pourraient être assouplie et transférée à une autorité plus proche du ministère exécutant35.

- Elle joue comme facteur d’incitation à la mise sur pied rapide des projets par les ministères dépensiers qui ne font pas toujours preuve de la diligence nécessaire pour accélérer le déroulement des projets. Cet argument n’est que partiellement convaincant dès lors que les crédits ne peuvent, en tout état de cause, être consommés que si le projet est en état de marche36.

- Elle permet d’optimiser, au sein de chaque ministère, la répartition des crédits de paiement37 et d’éviter que des crédits soient inutilement « gelés » sur des projets en attente alors que des insuffisances de crédits peuvent apparaître sur d’autres projets plus « performants ». Cet argument est recevable et témoigne d’un souci louable d’optimisation de la dépense, mais il aura perdu de sa valeur avec la nouvelle loi organique38, dès lors que la décision de répartition de ces crédits entre projets relève désormais d’un arrêté du ministre dépensier lui-même. Au total, il apparaît que la procédure de mise à disposition des crédits pour les projets d’investissement nouveaux correspond certes à un souci louable de gestion précautionneuse des crédits par le ministère des finances, mais n’y répond qu’imparfaitement et dans des conditions qui devraient d’ailleurs perdre un peu plus de leur valeur avec la mise en place de la nouvelle loi organique. De surcroît, cette procédure lourde et marquée par un certain interventionnisme du ministère des finances va aussi très rapidement entrer en contradiction avec la logique de gestion par les objectifs et les résultats que les autorités souhaitent mettre en place. Une telle logique implique en effet une responsabilisation accrue des ministères dépensiers dans l’utilisation et l’optimisation de leurs crédits qui s’accommoderait mal d’un tel régime d’autorisation préalable.

4.2. Les procédures légales permettant de modifier le plafond global des crédits ouverts dans loi de finances initiale sont utilisées dans un souci de préserver la discipline budgétaire. La loi organique prévoit en premier lieu la possibilité modifier le budget initial par une loi de finances rectificatives (Art.42). Il s’agit de modifications d’ampleur, qui demeurent exceptionnelles dans la tradition tunisienne. Depuis 1990, seules deux lois de finances rectificatives ont été adoptées, dont la dernière en 2002 suite au retournement conjoncturel consécutif aux attentats du 11 septembre et à la situation dans les pays du Moyen Orient qui ont compromis le scénario de croissance initialement prévu.

34 Ces composantes correspondent à la répartition par paragraphe et sous-paragraphe 35 le Contrôle des dépenses devrait pouvoir jouer ce rôle (voir sections suivantes) 36 L’incitation vaudrait si les crédits pouvaient être dépensés alors même que les projets n’étaient pas bouclés, ce qui évidemment ne peut être le cas, sauf hypothèse particulière de consommation excessive de crédits d’étude. 37 et non des crédits d’engagement qui ne pourraient être ainsi mouvementés sans accord du ministère intéressé et sans procédure réglementaire lourde de virement de crédits (voir plus loin cette procédure) 38 Art. 33 nouveau de la loi organique modificative du 13 mai 2004.

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S’agissant de modifications par voie réglementaire, la loi organique prévoit la procédure d’ouverture de crédits supplémentaires par voie de décret d’avance devant être ratifiée par une loi de finances complémentaire (Art. 41). Il s’agit de cas d’urgence (calamités ou nécessité impérieuse d’intérêt national) qui revêtent un caractère exceptionnel. En dehors de ces deux possibilités, il n’est guère possible de dépasser le plafond global du budget, sauf pour les crédits dits évaluatifs dont les montants sont fixés dans la loi de finances à titre prévisionnel et dont les dépenses correspondantes peuvent aller au-delà en exécution : il s’agit, selon la loi organique, des crédits relatifs à la dette publique (intérêts et capital), des crédits relatifs aux fonds du Trésor (fonds spéciaux et fonds de concours) et des crédits correspondant à des projets co-financés par des ressources extérieures en cours d’année. Dans ces deux derniers cas cependant, la majoration des dépenses devra être compensée par une recette d’égal montant ; ce qui est neutre au niveau de l’équilibre général du budget. Il n’y a pas d’autres possibilités ; tous les autres crédits étant limitatifs c’est-à-dire, bornés en exécution par le plafond du crédit inscrit en loi de finances : la dépense peut être inférieure à ce montant mais en aucun cas elle ne peut lui être supérieure. En pratique, l’exécution de la dépense reste, au niveau global du plafond du budget, très proche de la prévision initiale du budget en loi de finances. Il n’y a pas de dépassement significatif qui traduirait une absence de maîtrise de l’exécution, ce qui constitue un facteur d’appréciation positive du risque budgétaire. Par ailleurs, les éventuelles modifications des plafonds initiaux sont d’une bonne traçabilité puisqu’elles sont toutes répertoriées dans la loi organique et quantifiées par le système de reporting (voir section suivante). Le tableau ci-dessous donne une bonne image de la discipline budgétaire qui préside à la conduite de l’exécution des dépenses budgétaires.

Etat de l’exécution des dépenses du budget de l’Etat entre 2000 et 2003 (hors dette)

Années 2000 2001 2002 2003

LFI Réal % LFI Réal % LFI LFR Réal % LFI Réal %

4.294 4.277 99,6 4.607 4.590 99,6 4.902 4.957 4.930 99,5 5.283 5.249 99,4Dépenses de gestion

Dépenses de développement sur ressources générales

TOTAL : …………………...

Dépenses de développement sur ressources de prêts

extérieurs*

Fonds spéciaux*

Fonds de concours*

1.320

5.614

440

406 -

1.272

5.549

441

410

52

96,4

98,8

100

101,0

n.s.

1.400

6.007

460

413 -

1.350

5.940

546

462

65

96,4

98,9

118,7

111,8

n.s.

1.485

6.387

460

438 -

1.415

6.372

460

438 -

1.372

6.302

556

486

50

92,4

98,7

120,8

110,9

n.s.

1.518

6.801

485

439 -

1.445

6.694

518

506

39

95,2

98,4

106,8

115,2

* Ces lignes regroupent des dépenses financées sur ressources affectées (emprunts extérieurs, recettes de fonds spéciaux ou de fonds de concours ) et non pas sur recettes générales, de sorte que le dépassement des dépenses par rapport au crédit prévu au budget initial est toujours compensé par une recette d’égal montant et que l’effet sur le résultat global du budget est neutre. Par ailleurs, par construction,

les fonds de concours ne donnent pas lieu à inscription de crédits en loi de finances initiale, ce qui ne permet pas d’établir une comparaison entre crédits votés et crédits exécutés.

Ce tableau fait apparaître un montant global de dépenses exécutées très proche de celui prévu en loi de finances initiale. Sur la période 2000-2003, le taux d’exécution des dépenses du budget sur ressources générales ressort à 99,3%, ce qui traduit une bonne maîtrise de l’exécution du budget et

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un respect des équilibres initiaux.

4.3. Les procédures légales permettant de modifier la répartition des crédits prévue dans loi de finances initiale sont utilisées de façon importante, notamment en fin d’année, dans des conditions d’efficacité et de transparence qui restent à améliorer. La loi organique prévoit plusieurs dispositions pour modifier la répartition initiale des crédits. Les dépenses imprévues. Elle prévoit en premier lieu une dotation pour dépenses imprévues, non répartie au budget initial et qui peut être répartie en exécution par décret en vue de faire face à des « dépenses urgentes ou imprévues » (Art.40). Le chapitre 25 pour « dépenses imprévues et non réparties » comporte deux dotations : une première en section de gestion (Titre premier) et une seconde en section de développement (Titre II). Au budget 2004, les dotations s’élèvent respectivement à 62,4 et 39,7 MDT, soit un pourcentage respectif des dépenses hors dette de 1,1% et de 1,9% qui reste fort raisonnable. En pratique, ces dotations donnent effectivement lieu à des transferts de crédits, voire des crédits de personnel pour procéder à des recrutements exceptionnels ou urgents. Aucun abus particulier n’a été décelé. Il s’agit au contraire d’une pratique qui donne aux autorités une souplesse d’intervention nécessaire en cas de circonstances urgentes et qui s’effectue dans la transparence puisque les mouvements s’opèrent par décrets publiés au Journal officiel. Les transferts de crédits entre ministères Des transferts de crédits entre ministères (ou chapitres) peuvent être opérés par décret lorsqu’ils sont nécessités par une réforme gouvernementale ou administrative (par ex à l’occasion d’une modification d’attributions entre ministères). Aucune limite de montant n’est fixée à ces transferts mais, en revanche, ils ne peuvent pas modifier la nature de la dépense, ni la répartition par article (nature et destination de la dépense)39. Il y a donc là, la marque d’une volonté de limiter les transferts de crédits à la seule modification du service gestionnaire de la dépense et de ne pas permettre à l’administration de modifier la nature de la dépense, qui a une portée plus importante en termes de politique budgétaire. Les virements de crédits au sein d’un même ministère (article à article, paragraphe à paragraphe) Les virements d’article à article sont autorisés sans limitation de montant mais au sein d’une même partie qui détermine la nature et la destination de la dépense par grandes catégories (rémunérations, subventions, fonctionnement, interventions, …)40. Ils sont autorisés par décret publié au Journal officiel et sont donc transparents. La nouvelle loi organique du 13 mai 2004 prévoit aussi la possibilité de virement entre parties dans la limite toutefois de 2% des crédits (cf. article 37 nouveau). Les virements de paragraphe à paragraphe (ou de sous paragraphe à sous paragraphe) sont autorisés sans limitation de montant, par arrêté du ministre des finances. Ils doivent cependant être effectués à l’intérieur d’un même article, afin de ne pas modifier la nature et de la destination de la dépense

39 Il s’agira par exemple de transférer un crédit de rémunération (partie) de personnel permanent (article) du ministère de la culture (chapitre) vers une ligne de crédit identique du ministère de l’éducation 40 Il s’agira, dans le même exemple, de virer un crédit de rémunération (partie) de personnel permanent (article) vers une ligne de rémunération de personnel non permanent (article) du ministère de la culture (chapitre).

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par catégories précises41. Ces virements de (sous) paragraphe à (sous) paragraphe sont de loin les plus nombreux, notamment en fin d’année, afin de maximiser les utilisations de crédits. Leur nombre important témoigne d’une insuffisante souplesse dans la gestion des crédits. La nouvelle loi organique42 va cependant assouplir cette procédure, notamment en matière de crédits de fonctionnement, puisque ces virements seront désormais de la compétence du ministère dépensier dans la limite des sous paragraphes. Il eut été opportun de prévoir un assouplissement jusqu’au niveau supérieur du paragraphe, notamment dans la perspective de la mise en place de nouveaux modes de gestion budgétaire par objectifs et résultats, qui nécessitera de laisser au gestionnaire une plus grande flexibilité dans la gestion des crédits à un niveau fin. Cette observation rejoint celle déjà faite plus haut pour la mise à disposition des crédits. Par ailleurs, ces mouvements de crédits de (sous) paragraphe à (sous) paragraphe s’opèrent par arrêtés non publiés au Journal officiel et donc sans transparence. Une telle publication pourrait être opérée sous forme simplifiée, par tableaux mensuels ou trimestriels édités dans des bulletins officiels, voire sur le site Internet du ministère des finances.

4.4. La régulation d’ensemble de la dépense s’opère par gel des crédits dans des conditions techniques satisfaisantes mais qui appellent plus de transparence vis-à-vis du Parlement. Le pilotage de l’exécution budgétaire à des fins de régulation conjoncturelle, pour faire face à d’éventuels retournements de conjoncture, s’opère pour sa part la plus importante, par gel (ou blocage) conservatoire des crédits. Le gel des crédits s’opère dans des conditions de transparence interministérielle satisfaisantes : note du Premier ministre à chaque ministre indiquant la politique sous-jacente à ce blocage, indication des paramètres relatifs au blocage et à sa mise en place. Les crédits bloqués et devenus non utilisés en fin de gestion tombent en annulation à la reddition des comptes et sont retracés en loi de règlement dans des conditions de transparence satisfaisantes. Cette procédure est au point et témoigne d’une maturité indéniable du système tunisien. Il reste cependant à la compléter pour une meilleure transparence, par une information du Parlement lorsque le dispositif est décidé. L’envoi, pour information, aux commissions des finances des deux chambres des actes officiels relatifs aux blocages de crédits irait en ce sens.

4.5. La gestion des crédits de personnels s’opère dans de bonnes conditions de fiabilité et de responsabilisation des ministères dépensiers. Les ministères assument la totalité des responsabilités en matière de gestion de leurs personnels, une part de ces responsabilités étant déléguée à l’échelon local dans les gouvernorats. Cette responsabilité est cependant assortie, au niveau central, de dispositifs institutionnels notamment en matière de recrutements et de dispositifs de contrôle informatique qui interdisent de fait toute possibilité de dérive et donnent aux autorités de tutelle (Premier ministre, ministre des finances) des moyens de contrôle au travers d’outils performants de reporting.

41 Il s’agira, toujours dans le même exemple, de virer un crédit de rémunération (partie) de personnel permanent (article) sous forme de salaire (paragraphe) vers une ligne de crédits de rémunération (partie) de personnel non permanent (article) sous forme d’indemnités (paragraphe) au sein du même ministère. 42 Articles 37 et 38 nouveaux de la loi nouvelle loi organique du 13 mai 2004.

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Le contrôle du fichier des effectifs est assuré grâce au logiciel de paye INSAF qui regroupe les dossiers de tous les agents de l’Etat (380.000 dossiers) avec un identifiant unique le numéro d’immatriculation attribué par la caisse de retraite. Ce système est aujourd’hui parvenu à un très bon niveau de sécurité ; il interdit l’emploi d’un même numéro d’identifiant pour plusieurs agents, n’admet que les numéros d’identifiant validés par la caisse de retraite et exige désormais une saisie et une validation pour la création du dossier, puis une saisie et une validation pour la paye soit l’intervention de 4 personnes ayant des habilitations distinctes pour chaque nouvel agent payé43. Il est prévu d’étendre son utilisation aux agents des établissements publics et des collectivités locales44 en 2005. L’énumération des tâches effectuées par les ministères dépensiers donne la mesure de leur responsabilité et de leur implication dans ce domaine, ce qui est assez rare dans les pays de la zone.

L’ensemble des tâches que les ministères dépensiers assurent en matière de gestion de personnel

Les ministères dépensiers : - Assurent les recrutements dans le cadre d’un arrêté-programme annuel : organisation des concours de

recrutement en liaison avec la Fonction publique et signature des actes correspondants. - Assurent tous les actes liés à la carrière de leurs agents : avancement, promotion (dans le cadre de

l’arrêté-programme) et discipline. - Assument la définition et la distribution des tâches, la définition des objectifs et l’organisation du

travail. - Procèdent aux engagements de crédits, suivant les cas au niveau national ou au niveau régional par

des ordonnateurs secondaires (nommés par décret) ; ces engagements sont visés par le contrôle de la dépense. La qualité de ces engagements, essentielle à la gestion prévisionnelle des crédits45, repose en grande partie sur la qualité des calculs de crédits effectués lors de la phase de préparation budgétaire (section 1).

- Procèdent à l’ordonnancement et au mandatement de la paye à partir des documents fournis par le CNI46 (logiciel de paye INSAF).

N.B. 1 - Il est à noter que les actes de recrutement-avancement ne sont pas soumis au contrôle a priori de la dépense en raison de la sûreté des procédures réglementaires et informatiques (une grande confiance est accordée au logiciel INSAF).

N.B. 2 - Il est à relever que les ministères dépensiers ne procèdent pas au calcul direct de la paye mensuelle, mais sous-traitent cette tâche très technique au Centre National informatique (voir ci-dessous).

La paie proprement dite (calcul mensuel des salaires de chaque agent et édition des bulletins de paie, reporting) de l’ensemble des fonctionnaires et des contractuels est donc effectuée de façon centralisée par le Centre national informatique (CNI) sur la base des éléments de paye saisis par les ministères et leurs services déconcentrés dans le logiciel INSAF. Les salaires sont systématiquement versés par virement bancaire, ce qui constitue une garantie de sécurisation supplémentaire des fonds publics. Les travaux du CNI s’apparentent donc à des travaux de sous-

43 Ces mesures ont été prises à la suite de la découverte d’une fraude de plus de 2 millions de dinars : un agent du ministère de la santé exerçant dans un gouvernorat disposait des deux mots de passe (création et validation). Il créait les dossiers de médecins vacataires fictifs en utilisant les n° d’immatriculation à la caisse de retraite d’agents décédés ou radiés et faisait verser les rémunérations sur plusieurs comptes en banque. 44 La paie des agents des collectivités locales est aujourd’hui calculée « à la main » 45 Dans le système tunisien, les crédits de personnels ne sont pas des crédits évaluatifs, ce qui oblige les gestionnaires à assurer une gestion précautionneuse de ces crédits. 46 Les ordonnances sont éditées au CNI ce qui oblige les ordonnateurs qui exercent dans les gouvernorats à faire le voyage pour les récupérer car elles ne sont pas envoyées par courrier pour des raisons de sécurité.

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traitance centralisée de la paie au profit des ministères dépensiers et en aucun cas, à une gestion de substitution des crédits correspondants. Au total, il apparaît que les ministères dépensiers sont pleinement impliqués dans la gestion de leurs crédits de personnels et de leurs effectifs. Ce point constitue un signe très favorable dans la perspective d’une évolution future vers un système de gestion budgétaire par objectifs et résultats. La fonction personnel (12% du PIB) représente une part importante du coût des actions de l’Etat et il est important que les ministères en aient une image claire et en soient responsabilisés par la gestion effective des crédits correspondants

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5. LA DÉCONCENTRATION ET LA DÉCENTRALISATION

5.1 Le système budgétaire et financier tunisien est fortement déconcentré … C’est une des caractéristiques principales du système tunisien que d’être fortement déconcentré. De fait, la majeure partie des dépenses de l’Etat (fonctionnement, investissement) sont réalisées au niveau local, soit sous forme déconcentrée, soit sous une forme apparentée à une forme décentralisée.

L’organisation administrative de l’Etat et des collectivités locales • L’Etat, entité centrale • Les Gouvernorats (24) qui sont des subdivisions d’Etat, non dotées de la personnalité juridique et dirigées par des gouverneurs, agissant en tant que représentants de l’Etat et dotés de pouvoir financier d’Etat, • Les Conseils régionaux, non élus, dotés d’une personnalité juridique distincte de l’Etat et disposant de budgets propres mais dirigés par les gouverneurs, agissant cette fois-ci en tant que représentants de la région 47,• Les Municipalités, élues, dotées d’une personnalité juridique distincte de l’Etat et disposant de budgets propres et dirigées par des autorités propres (le maire)48.

Selon une terminologie classique, la déconcentration d’un système budgétaire concernerait exclusivement les relations budgétaires entre l’Etat et ses subdivisions telles que les Gouvernorats. En revanche, la décentralisation concernerait les relations budgétaires entre l’Etat et des entités autonomes, telles que les municipalités. Dans le cas présent, les relations entre l’Etat et les Conseils régionaux relèvent plus d’une déconcentration que d’une décentralisation véritable dès lors que les opérations sont exécutées par le gouverneur et surtout que les investissements réalisés restent des investissements de l’Etat et non des Conseils régionaux. Mais, au-delà de ces problèmes de définition, il est clair que la dépense de l’Etat s’exécute essentiellement au niveau local, là où l’opération physique est exécutée. Dans la suite du rapport on englobera sous le terme « déconcentré » les crédits d’Etat exécutés au niveau des conseils régionaux par les gouverneurs. La nomenclature budgétaire des crédits est elle-même adaptée à cette classification. Ainsi, en matière d’équipement, les crédits sont identifiés dans le projet de loi de finances selon leur caractère national ou régional (voir les tableaux annexes B, C et D du projet de loi, cf. section 2.1 supra). Au budget de 2004, les crédits d’engagement à caractère régional représentaient 15% des crédits d’investissements directs (hors dépenses de souveraineté non susceptibles de présenter un intérêt régional comme les crédits de la défense par exemple). Il y a lieu de noter que la répartition entre les dépenses d’équipement centralisées ou déconcentrées est faite par décret, en fonction d’un classement selon la nature des dépenses et des projets ; et c’est cette répartition qui est reprise dans la nomenclature budgétaire. La classification de ces dépenses repose donc sur des bases objectives et claires qui facilitent la budgétisation et la réalisation des opérations. Aucune discussion ou négociation n’a lieu, après le vote du budget, entre l’Etat et les échelons locaux pour répartir les crédits.

47 En réalité, ces Conseils régionaux ne sont pas véritablement des collectivités locales indépendantes (non élues et sans exécutif propre, sans recettes propres importantes). 48 Il s’agit là d’authentiques collectivités locales qui relèvent d’une véritable logique de décentralisation.

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Les dépenses centralisées, déconcentrées ou décentralisées49

• Les dépenses centralisées sont gérées au plan central (ministère) par une autorité centrale (ordonnateur) • Les dépenses déconcentrées sont gérées au plan local (gouvernorat) par une autorité de l’Etat représentée au niveau local (Gouverneur ou directeurs régionaux des ministères) • Les crédits mobilisés dans le gouvernorat pour financer les dépenses déconcentrées sont dits des crédits délégués ; ils sont répertoriés dans la nomenclature budgétaire d’équipement comme des crédits d’intérêt national • Les dépenses décentralisées sont gérées au niveau du conseil régional et exécutées par le Gouverneur en tant que représentant de la région. • Les crédits mobilisés dans la région pour financer des dépenses décentralisées sont dits des crédits transférés ; ils sont répertoriés dans la nomenclature budgétaire comme des crédits d’intérêt régional.

Les crédits identifiés comme étant d’intérêt national ont vocation à être exécutés à l’échelon central ou à être délégués ; ceux identifiés comme d’intérêt régional ont vocation à être tous transférés aux régions. La répartition des crédits de fonctionnement ne s’opère pas en fonction de textes de cette nature mais elle repose sur un principe simple de rattachement de la gestion des dépenses à leur lieu de réalisation (ainsi, 95% des dépenses de fonctionnement de l’Education sont déconcentrées). On notera aussi le rôle majeur joué dans ce système de dépense par le gouverneur sur qui repose en fait l’exécution de la plus grande partie des dépenses du budget de l’Etat, que ce soit sur crédits délégués (en tant que représentant de l’Etat et ordonnateur secondaire50 ) ou sur crédits transférés (en tant que représentant du conseil régional et ordonnateur principal20). Il y a lieu de noter aussi que le ministère de l’équipement intervient en tant que maître d’œuvre (le maître d’ouvrage est le ministre ou le gouverneur) pour toutes les constructions de bâtiments civils de l’Etat et ce, que la dépense soit faite au niveau central ou au niveau déconcentré. Ceci facilite la réalisation physique et administrative des opérations. Enfin, il convient de relever que la répartition des compétences administratives suit de près celle des compétences en matières de crédits, ce qui facilite considérablement la déconcentration. Il ne servirait à rien en effet, de transférer des crédits à un gouverneur qui ne disposerait pas des compétences administratives pour mener à bien l’opération administrative et physique sous-jacente à la dépense.

…ce qui constitue un atout majeur du système tunisien dans la conduite d’une politique de développement par la dépense publique et un facteur de réduction du risque quant à l’utilisation effective des fonds publics. Cette forte déconcentration de la gestion des crédits du budget, assez rare dans les systèmes budgétaires de tradition centralisée constitue une particularité assez remarquable du système tunisien. Très ancrée dans la tradition politique et administrative du pays depuis de nombreuses années et jouissant d’une bonne fiabilité, elle confère au système une souplesse et une efficacité appréciables dans la conduite d’une politique de développement par l’investissement public. Elle

49 La section suivante sur le circuit comptable de la dépense expose de façon plus approfondie les mécanismes de cette déconcentration et de cette décentralisation. Notamment, la qualité des ordonnateurs qui mettent en œuvre les crédits délégués ou transférés n’est pas la même. 50 Voir ces termes en section suivante

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facilite aussi l’émergence de capacités humaines bien disséminées dans l’ensemble du territoire qui sont à la base d’une future décentralisation réussie. En termes de risque budgétaire et financier, le système actuel de déconcentration constitue certainement un facteur globalement réducteur de risque.

5.2 Mais il reste encore faiblement décentralisé. Le système de décentralisation actuel a été codifié en 1995. Il prévoit deux types de collectivités locales : les conseils régionaux (ou régions51) et les communes (ou municipalités). Les budgets des conseils régionaux ne représentent qu’une faible part des budgets des communes (moins de 10%) dès lors qu’ils recoupent des zones non communalisées sans ressources importantes. Globalement, les budgets de ces collectivités sont très faibles au regard du budget de l’Etat ; ils représentent une masse de l’ordre de 5% du budget de l’Etat. De fait, les compétences des communes sont limitées aux services de proximité offerts à la population : essentiellement la voirie, l’éclairage urbain et les ordures ménagères. Les communes ne sont pas compétentes en matière d’éducation, de services sociaux, de formation professionnelle, de santé, de police, etc. L’endettement moyen des communes reste faible (environ 15% des recettes de fonctionnement) mais certaines grandes communes sont endettées à des taux bien plus élevés. Les recettes des communes et des régions ont une structure identique mais reçoivent des parts différentes de chaque recette. Les recettes fiscales, qui représentent le tiers environ des recettes des communes, sont constituées par les taxes sur les immeubles bâtis, les terrains, le chiffre d’affaires des entreprises et la taxe hôtelière. Les recettes non fiscales comprennent les loyers, redevances, services des domaines et divers et représentent aussi un tiers environ des recettes. Les transferts de l’Etat représentent un montant moyen de 24% du budget de fonctionnement des communes (320 MDT en 2003). Ces parts varient cependant selon la structure fiscale des communes. Les concours de l’Etat aux collectivités locales sont de deux ordres : une subvention de fonctionnement globalisée, dont le calcul répond à des critères objectifs, et des subventions d’investissement finalisées par projets. La dotation globale de subvention de fonctionnement (108 MDT en 200452 ) figure au budget du ministère de l’intérieur (ligne budgétaire « soutien aux collectivités locales »). Elle est répartie entre les budgets des régions (14%) et les budgets des communes (86%). Les règles de répartition sont fixées par un texte et reposent sur des critères objectifs tels que la population des communes, l’effort de recouvrement fiscal, ainsi que des clés de péréquation. Les dotations d’investissement sont déterminées par référence à une enveloppe déterminée au programme d’investissement quinquennal du Plan. Le montant total au titre du plan 2002-2006 s’élève à 888 MDT, dont 38 MDT pour les régions et 850 MDT pour les communes. Une part d’environ 40% de ce montant (environ 350 MDT) est constituée par les concours budgétaires de l’Etat inscrits aux budgets des différents ministères. Les subventions sont versées par l’intermédiaire de la CPSCL, mais des versements directs sont aussi effectués à partir du budget.

51 Les régions recoupent les territoires des gouvernorats. 52 Une part de 25% du Fonds est prélevé pour des concours à d’autres bénéficiaires, de sorte que le montant total de la dotation inscrite au budget s’élève au total à 144Mds.

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5.3 La transparence des flux budgétaires entre le budget de l’Etat et les collectivités locales peut être encore améliorée. Globalement la transparence des flux budgétaires entre l’Etat et les collectivités locales reste à améliorer, notamment dans les documents budgétaires. Il semble qu’une annexe au projet de budget récapitulant l’ensemble des concours annuels aux collectivités locales serait le meilleur moyen d’y parvenir. En l’état actuel de la documentation officielle, il est difficile de parvenir à cette vision d’ensemble. Ceci va dans le sens de la recommandation qui vise à présenter des comptes consolidés de l’ensemble des comptes publics (Etat, Collectivités locales et secteur public). De même, l’application des dispositions relatives au calcul et à la répartition du Fonds des collectivités locales mériterait d’être mieux explicitée dans les documents budgétaires. La transparence des relations entre l’administration centrale et les collectivités locales pâtit aussi un peu du contrôle exercé sur les budgets et sur les dépenses des communes. Les budgets d’une quinzaine de communes principales (budget supérieur à 4 MDT) sont soumis à une procédure d’approbation préalable conjointe des ministères des finances et de l’intérieur, ce qui relève d’une logique de tutelle centralisatrice voire, peu transparente. L’approbation se fait sur la base d’un examen préalable du réalisme des recettes, de la politique de recrutement, de l’évolution des dépenses courantes et des dépenses d’investissement qui peuvent, le cas échéant, être remis en cause. Cette approbation préalable empirique ne semble pas répondre à des normes d’analyse financière objective et faisant l’objet de règles précises mais plutôt à un contrôle d’opportunité non motivé. Sans mettre en cause son bien-fondé, ce type de contrôle devrait être mieux défini et mieux documenté dans un texte réglementaire. Notamment, son rôle pourrait être limité aux communes dont le taux d’endettement est élevé ou dont le budget n’est pas équilibré.

5.4 Les perspectives d’évolution vers un élargissement des compétences communales restent faibles… Les communes ne semblent pas soucieuses de voir leurs compétences s’étendre au-delà de celles dont elles jouissent actuellement (gestion des services municipaux traditionnels et recouvrement les impôts de base), notamment elles ne semblent pas demandeuses de disposer de compétences nouvelles dans les secteurs qui ont une répercussion importante au niveau local (éducation, santé ou services sociaux). Néanmoins, des discussions ont lieu et des chantiers d’études sont en cours. ….alors que les capacités humaines et matérielles des collectivités locales sont bien réelles. De ce point de vue, le diagnostic est favorable. Les collectivités locales disposent (ou sont à-mêmes de disposer assez vite) des capacités techniques et humaines requises pour faire face à un éventuel élargissement de la décentralisation. De plus, comme il a déjà été dit, la forte déconcentration des crédits d’Etat favorise incontestablement l’émergence de capacités humaines au niveau local. Les personnels des communes sont bien formés, avec un taux d’encadrement satisfaisant : de l’ordre de 15%. Un centre de perfectionnement et de recyclage des cadres régionaux et communaux assure ses fonctions de façon effective). Les moyens de gestion financière sont en cours d’amélioration et permettront à brève échéance d’unifier la nomenclature d’exécution budgétaire avec celle du budget de l’Etat, ce qui devrait, aux moyens d’applications informatiques adéquates faciliter la transparence des comptes et la production d’une comptabilité analytique communale. De même, la liaison des programmes informatiques des communes et des services comptables de l’Etat en matière de recettes devrait faciliter la meilleure connaissance de ces recettes par les communes et aussi, d’exploiter des ratios de recettes permettant un meilleur pilotage du budget.

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6. LES RELATIONS DU BUDGET & DU SECTEUR DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS & DES ENTREPRISES PUBLIQUES.

6.1 Un système de relations budgétaires et financières directes d’une bonne transparence… Le secteur des établissements et des entreprises publiques tunisien est particulièrement développé malgré un mouvement récent de privatisation. Ce secteur est très diversifié puisqu’il comprend des établissements publics classiques, avec des statuts très marqués par le droit public et des entreprises publiques dont le fonctionnement se rapproche de celui des entreprises privées mais dont le capital reste majoritairement public. Il n’est pas dans le champ du CFAA de procéder à l’analyse de la politique de gestion du secteur public, mais seulement d’évaluer la transparence des relations budgétaires avec le budget de l’Etat et la valeur des contrôles opérés sur ces concours de l’Etat. La transparence des relations budgétaires directes entre le budget de l’Etat et ces entités est assurée au niveau des documents budgétaires. L’état F annexé au projet de loi de finances répertorie de façon exhaustive les dotations budgétaires affectées aux établissements publics à caractère administratif (EPA) tandis que les fascicules budgétaires ministériels recensent toutes les dotations affectées aux entités publiques autres que les établissements administratifs, notamment les EPNA53.Il ne peut donc exister d’entités bénéficiaires de concours budgétaires de l’Etat qui ne soit identifiée dans les documents budgétaires. A noter que l’état F précité, indique à côté de la subvention de l’Etat, un montant prévisionnel des ressources propres de ces entités. Inversement, certaines entités publiques (notamment les entreprises publiques) reversent au budget de l’Etat des dividendes ou autres excédents. Ces recettes du budget de l’Etat sont répertoriées dans l’état A annexé au projet de loi de finances en recettes non fiscales ordinaires54. Elles donnent lieu à établissement de listes exhaustives dans des documents spécifiques sans toutefois faire l’objet de descriptif aussi précis au projet de loi de finances que celui effectué en matière de dépenses. Néanmoins, le détail des comptes les fait apparaître. …mais des concours indirects moins transparents. Les concours indirects de l’Etat au secteur public, notamment aux entreprises publiques, tels que ceux résultant de dégrèvements ou exonérations fiscales ou facilités diverses sont toujours autorisés par disposition législative ; de ce fait, ils sont approuvés par le Parlement et donc, totalement transparents.

On peut cependant regretter que le rapport général de la loi de finances ne produise pas un état récapitulatif actualisé des mesures correspondant à ces aides indirectes (ce tableau devrait fournir uniquement la liste des mesures et non leur impact financier toujours très difficile à évaluer).

53 Il s’agit des établissements à caractère non administratifs ou autres entreprises publiques à statut divers. 54 Article 30-01 de l’état A, doté de 430 millions de dinars en 2004 (hors secteur pétrolier) .

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6.2 Un système de contrôle très réglementé et très diversifié…

Le système de contrôle du secteur public est très réglementé par une multitude de textes législatifs ou réglementaires. Les EPA de type classique (hôpitaux, musées, établissements scolaires ou universitaires, etc.) sont soumis au contrôle classique de leur ministère de tutelle et du ministère des finances notamment pour l’approbation des budgets. Ils sont aussi soumis au contrôle financier classique. Le versement des subventions est aussi suivi par les services du budget. Les EPNA sont soumis à une tutelle définie par un décret du 7 octobre 2002 qui prévoit l’approbation des budgets, le suivi de leur exécution ainsi que le contrôle des états financiers. Les entreprises publiques voient leur tutelle définie aussi par un décret du 7 octobre 2002. Cette tutelle au plan financier consiste aussi en l’approbation des budgets et au suivi de leurs états d’exécution ainsi que l’approbation des états financiers. L’Etat assure sa présence aux conseils d’administration par des représentants. Les EPNA et les entreprises publiques sont soumis par ailleurs à un organisme de contrôle : le Comité des Contrôleurs de l’Etat, créé par décret du 30 septembre 2002, avec à sa tête un Président ; la fonction de Contrôleur d’Etat ayant été définie par la loi du 1er février 1989. Ce service, rattaché au Premier ministre, doté d’un effectif de 24 contrôleurs permanents (1 pour 4 ou 5 entreprises en moyenne) et près de 80 contrôleurs non permanents (1 par entreprise) est chargé de veiller au respect de la réglementation en vigueur pour les entreprises publiques et de formuler des avis sur les principaux actes de gestion de ces entreprises (politique d’achat, procédures de conclusion des marchés publics, politiques d’investissement, recouvrement des créances et en général, toutes questions ayant une répercussion financière sur l’entreprise). Le Président du Comité des Contrôleurs d’Etat peut prendre, au vu des notes transmises par les contrôleurs, les initiatives nécessaires y compris le cas échéant, l’engagement de mesures de suivi en coordination avec les autorités de tutelle. Les Contrôleurs d’Etat siègent aux conseils d’administration des entreprises publiques et peuvent ainsi faire valoir leurs observations aux ministres de tutelle. Le ministère des Finances assure, au travers de la DGP55, en plus des prérogatives de tutelle sur les entreprises publiques, le suivi du portefeuille de l’Etat et le suivi de la liquidité et des états financiers des entreprises publiques et des EPNA. Enfin, les établissements et entreprises du secteur public sont soumis au contrôle et à l’audit des organismes de contrôle interne, notamment le Contrôle général des finances et le Contrôle général des services publics, ainsi qu’à celui de la Cour des comptes. Les comptes des établissements et entreprises sont par ailleurs audités chaque année selon les règles comptables en vigueur (voir le rapport sur les normes comptables privées du ROSC). Il faut aussi noter qu’une centralisation des bilans est opérée par la DGP et constitue ainsi une base de données sur les principaux indicateurs très appréciable. …mais qui pourrait être, en pratique, plus efficace. Dans l’ensemble, le cadre légal de contrôle et suivi du secteur public semble très au point. Cependant, quelques contrôles de base simples ne semblent pas véritablement effectués en pratique. Il en va ainsi :

55 Direction générale dotée d’une trentaine de cadres d’un bon niveau de formation

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De l’absence du suivi des rythmes de versement des subventions qui semblent déconnectés de la situation de trésorerie de l’établissement ; De l’insuffisante circulation des rapports des corps de contrôle auprès des services chargés du suivi et du contrôle du secteur (cf. DGP) ;

De l’insuffisance du suivi de la politique de filialisation des grandes entreprises publiques, considéré comme un secteur réservé aux sociétés mères56

De l’insuffisante coordination entre les services de la politique suivie par l’Etat en matière d’accords de garanties de prêts. Cette pratique de garanties de prêts est cependant en voie d’extinction, ce qui permet de mieux relativiser ces lacunes de coordination.

A noter enfin, que les rapports sur la situation des établissements et entreprises du secteur public ne sont pas nombreux. Le rapport de la DGP sur l’activité des entreprises publiques est une initiative toute récente (2002) qui doit être relevée.

56 Cette surveillance des filiales était effectuée antérieurement à la loi de 1989.

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7. L’EXÉCUTION COMPTABLE DE LA DÉPENSE

7.1 Un circuit comptable de la dépense structuré, fiable et institutionnalisé depuis 30 ans, qui combine deux phases de la dépense bien distinctes… Le circuit de la dépense répond au critère de la séparation entre l’ordonnateur et le comptable et comprend donc deux phases : une phase dite administrative, relevant exclusivement de l’ordonnateur et une phase dite comptable, relevant exclusivement du comptable. Ce circuit est réglementé dans le détail par le code de la comptabilité publique du 31 décembre 1973 (et textes modifiés).

la phase administrative (ordonnateur) comprend

• L’engagement de la dépense : acte juridique et budgétaire par lequel l’Etat s’engage juridiquement vis-à-vis d’un tiers fournisseur ou prestataire de services. Il s’agit du bon de commande ou de la passation de marché ;

• La liquidation de la dépense : acte par lequel le montant de la dépense est définitivement fixé, après constatation du service fait (réception du bien ou de la prestation)

• L’ordonnancement de la dépense : acte par lequel l’ordonnateur donne l’ordre de payer au comptable, matérialisé par une ordonnance de paiement (émission).

la phase comptable (comptable public) comprend

• La vérification de la dépense : examen de la disponibilité d’un crédit régulièrement ouvert, de l’exacte imputation de la dépense, de la justification du service fait et de l’exactitude de la liquidation, du visa préalable de l’engagement de la dépense, de l’application des règles de prescription, de la production et de la régularité de toutes les pièces justificatives (art 136 du Code de la Comptabilité Publique) ;

• Le paiement proprement, après avoir vérifié le caractère libératoire du règlement (rétention d’oppositions au paiement…).

…une phase de contrôle très imbriquée dans le circuit de la dépense…

la phase de contrôle (contrôleur des dépenses) comprend

• Un contrôle ex ante de la dépense s’exerçant au stade exclusif de l’engagement : vérification de la régularité de l’acte juridique d’engagement (qualité de l’ordonnateur, régularité de la commande) et de la régularité financière de la dépense (disponibilité des crédits budgétaires, imputation de la dépense).

• Le contrôle des dépenses se matérialise par l’apposition sur l’acte d’engagement soit d’un « visa », parfois avec des recommandations ou observations 57, soit d’un « refus de visa motivé » (qui peut bloquer la suite de la procédure, sauf recours –rarissime- devant le Premier Ministre).

...trois acteurs indépendants…

57 Certaines dépenses sont toutefois dispensées du visa préalable des engagements comme les dépenses de la Présidence de la République et des Ministères de la Défense et de l’Intérieur ou des Postes à l’étranger ayant un caractère confidentiel, les actes de transferts de crédits aux Conseils Régionaux et aux Établissements Publics, certaines dépenses de faible montant à caractère occasionnel (art 88 du CCP), de moins de 500 dinars

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Le circuit de la dépense comprend trois acteurs indépendants : les ordonnateurs, les comptables et les contrôleurs des dépenses qui assurent le contrôle a priori des engagements de dépenses. Les ordonnateurs, les contrôleurs et les comptables sont placés sous des autorités différentes, appartiennent à des institutions différentes et jouissent de statuts propres qui organisent leurs fonctions sans empiétement des unes sur les autres. Les comptables sont, aux termes de l’article 15 du code de comptabilité publique, les seuls acteurs responsables58 personnellement, pécuniairement et systématiquement en cas de défaut dans la dépense (voir section sur la Cour des comptes) ; mais la responsabilité des ordonnateurs et contrôleurs peut être aussi engagée sur une base toutefois non systématique (voir plus loin Cour de discipline budgétaire).

Les ordonnateurs

…représentent les différents ministres gestionnaires de crédits qui sont autonomes vis-à-vis des comptables et des contrôleurs. Ils détiennent, seuls, le pouvoir d’engagement sur leur budget.

Les comptables

…appartiennent au réseau indépendant de la comptabilité Publique (5.000 agents), dépendant du ministère de finances mais jouissant, de par leur statut, d’une grande autorité et indépendance59.

Les contrôleurs des dépenses

…appartiennent à la direction du contrôle des dépenses de l’Etat, direction indépendante (200 agents), rattachée organiquement au Premier Ministre. La direction du contrôle est dirigée par un Contrôleur général et exerce ses missions au plan central et au plan régional dans les 24 Gouvernorats.

…et deux niveaux d’exécution de la dépense, avec une large déconcentration. Selon que la dépense est effectuée au niveau central ou au niveau déconcentré et selon la nature de la dépense, le circuit est différent.

Les ordonnateurs principaux ou secondaires ; Les gestionnaires des projets

• Les dépenses effectuées au niveau central sont engagées et ordonnancées par des ordonnateurs centraux (ministres) ou leurs délégués60.

• Les dépenses de fonctionnement du titre I effectuées au niveau déconcentré sont engagées et ordonnancées sur des crédits délégués dans les 24 Gouvernorats du Pays, par les ordonnateurs secondaires que sont soit les directeurs régionaux des différentes administrations, soit le gouverneur pour les crédits délégués du ministère de l’Intérieur.

58 toutefois un aménagement est prévu pour les dépenses réglées par paiement direct sur projets co-financés par les bailleurs de fonds (voir plus loin) 59 sauf cas exceptionnel et rarissime de réquisition de paiement, le ministre des finances ne peut pas contraindre un comptable au paiement d’une dépense irrégulière au regard du code de la comptabilité publique. 60 Par exception à la règle, les dépenses de certaines administrations centrales60 du Ministère des Finances (direction générale des Impôts, direction générale de la Comptabilité Publique) sont engagées et ordonnancées par des ordonnateurs dits secondaires.

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• Les dépenses d’investissement de l’Etat du titre II au plan local sont généralement engagées et ordonnancées par le gouverneur, agissant comme ordonnateur principal des conseils régionaux, après transfert (et non délégation) des crédits aux conseils régionaux.

• Les gestionnaires de projets sont « habilités » à exercer les fonctions d’ordonnateur secondaire.

Le contrôle central ou local

• Les engagements de dépenses sont visés soit par le Contrôle des dépenses au niveau central, soit par le Contrôle régional au niveau local selon le niveau d’exécution de la dépense.

Les comptables assignataires

Les comptables assignataires vérifient et paient :

• Au niveau central, les ordonnancements des ordonnateurs principaux et de quelques ordonnateurs secondaires : la paierie générale pour les ministères ainsi que 6 paieries départementales placées auprès des principaux départements ministériels

• Au niveau régional, les ordonnancements des ordonnateurs secondaires sur crédits délégués (ces comptables sont les receveurs des conseils de région).

7.2 Un circuit exhaustif, qui unifie tous les paiements de l’Etat et interdit tout système de paiement parallèle, ce qui constitue une garantie importante de fiabilité de la dépense. Toutes les dépenses budgétaires retracées dans la loi de finances transitent par le circuit de la Trésorerie Générale de Tunisie et le risque que des dépenses échappent à ce réseau est presque nul61. L’organisation unifiée de ce circuit est un gage de fiabilité de la dépense, qui facilite notamment la capture de toutes les informations comptables. Certes, il existe des circuits de paiement de dépenses plus rapides que le circuit classique, notamment la procédure de régies d’avances (limitées aux menues dépenses) ou de dépenses payées sans ordonnancement préalable62, les décaissements des dépenses payées sur ressources extérieures63, mais elles sont toutes encadrées par le réseau comptable unifié de telle sorte qu’il n’y a pas de possibilité de « fuite ». S’agissant des dépenses financées sur ressources extérieures, qui sont dans beaucoup de pays à la source de difficultés en comptabilité et en reporting, le code de la comptabilité publique (art 151

61 seules certaines opérations sur dons n’entrent pas dans le circuit (voir certaines opérations sur dons au budget de l’agriculture) 62 notamment certaines avances, les dépenses de remboursement de la dette, des dépenses dont la liste est fixée par un texte 63 dépenses inscrites au budget au titre des projets co-financés sur emprunts (ou dons) des bailleurs de fonds bi ou multilatéraux.

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bis) 64 prévoit dans le détail la procédure d’enregistrement de ces dépenses. Pour autant, comme il sera montré plus loin, cette fiabilité n’est garantie qu’en fin de gestion, de nombreuses opérations restant encore enregistrées en temps différé, avec parfois beaucoup de retard.

7.3 Un circuit comptable de la dépense informatisé et intégré qui permet une comptabilisation fiable des informations sur la dépense. Le circuit de la dépense est informatisé et intégré en Tunisie depuis plus de 10 ans, ce qui constitue un atout remarquable. Le circuit comprend un réseau principal « ADEB » qui relie l’ordonnateur, le contrôleur des dépenses (sur les engagements) et le comptable. Ce réseau fonctionne en temps réel et permet de fournir toutes informations sur l’état de la dépense en temps réel. Il enregistre les dépenses du budget de l’Etat et des fonds spéciaux du Trésor dans une base de données unique. L’automatisation permet ainsi de connaître l’état de consommation des crédits en temps réel et son intégration permet d’effectuer un rapprochement immédiat entre les écritures des ordonnateurs et des comptables ; rapprochement toujours difficile dans un système marqué par une forte séparation entre les deux réseaux des ordonnateurs et des comptables. Les engagements, ordonnancements et paiements65 peuvent ainsi être rapprochés à tout moment. Le réseau ADEB est alimenté directement et en temps réel en engagements et en ordonnancements par les ordonnateurs principaux (sur les crédits gérés au plan central) ou secondaires (sur les crédits délégués) pour ce qui concerne : - Les dépenses de matériel, - Les dépenses de transferts66,- Les dépenses des fonds spéciaux du Trésor, - Les dépenses d’investissement financées sur ressources intérieures (les dépenses financées sur ressources extérieures suivent un autre circuit, voir plus loin). Au plan des outils comptables, ADEB comprend plusieurs modules destinés notamment à la gestion des marchés publics, des engagements sur bons de commande ou sur régies d’avances. Le système permet d’effectuer des éditions classiques d’états comptables tels que les bordereaux journaliers des ordonnances visées et validées, les avis de crédits et les bordereaux récapitulatifs des avis de crédits, les situations d’exécution mensuelles, annuelles, les éventuels reports de crédits67. Le réseau est largement déployé sur le territoire : il comprend environ 900 postes de travail répartis sur 500 sites68.

Le réseau ADEB est alimenté par deux autres systèmes en réseau, qualifiés ici de réseaux annexes :

Le réseau INSAF pour les dépenses de personnel (voir supra) qui effectue la saisie des dépenses de personnel et produit des états récapitulatifs des dépenses de personnel par ministère, ce qui permet de re-saisir par la suite les ordonnances de paiements dans ADEB (une par ministère).

64 avec néanmoins une certaine confusion entre les dépenses et les recettes dans la rédaction de cet article : la « demande de tirage » («demande », dans le texte) tient lieu d’« ordonnance de paiement » en dépense, alors qu’une demande de tirage d’emprunt ne peut venir à l’appui que d’une recette. 65 Il s’agit des prises en charge de paiement et non du paiement effectif (voir plus loin) 66 Certains crédits d’intérêt régional sont transférés aux régions et gérés par le Gouverneur. Le transfert engendre immédiatement une ouverture de crédits dans la comptabilité du Gouvernorat et les dépenses suivent ensuite le circuit régional normal 67 Crédits engagés mais non ordonnancés 68 En moyenne 15 postes de travail dans chacun des 24 gouvernorats

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Le réseau SIADE69 qui saisit les opérations relatives à la partie des dépenses d’investissement financées sur ressources extérieures et qui produit les états récapitulatifs correspondants. Le basculement de ces opérations dans ADEB suit une procédure assez complexe et longue, mais néanmoins fiable.

69 Décret 17 octobre 1994 créant la base de données de gestion de la dette SIADE, voir aussi une circulaire d’application relative aux paiements directs, en date du 18 janvier 1996.

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Le lien complexe entre ADEB et SIADE

• Les engagements de dépenses sont d’abord saisis dans ADEB puis re-saisis dans SIADE,

• Les ordonnancements sont ensuite initiés dans SIADE, validés dans SIADE par le comptable assignataire,

• Au terme de cette phase, l’ensemble des opérations sont basculées dans ADEB par la voie d’un ordonnancement de régularisation s’imputant sur l’engagement sur lequel il se rattache,

• le comptable assignataire valide alors dans ADEB la prise en charge de cette dépense, en créant un avis de crédit à transférer au Trésorier général, comptable centralisateur, qui à son tour enregistre une recette au budget de l’Etat70. Ce n’est qu’à ce moment là que la dépense est véritablement intégrée dans les comptes et ceci explique le retard qui se produit dans le reporting de ces opérations.

Le réseau SIADE relie également la DGT, chargée de collecter les informations sur la gestion de la dette (mobilisation des ressources d’emprunt, remboursement de la dette en intérêts et capital) et la Banque Centrale. Les projets de modernisation en cours du système ADEB concernent principalement l’extension de la couverture comptable actuelle, qui englobe déjà la comptabilité de l’Etat et des gouvernorats pour les crédits délégués, à la comptabilité des conseils régionaux et aux 120 EPA les plus importants représentant environ la moitié des dépenses de l’ensemble des établissements publics71.

7.4 Un circuit comptable des recettes lui aussi intégré et informatisé, permettant une centralisation des opérations de recettes. Les recettes classiques (impôts, douanes, produits du domaine, diverses recettes hors dette) sont enregistrées en comptabilité via un autre réseau informatique, le réseau « RAFIC », indépendant du réseau des dépenses et non interfacé au système comptable. Globalement, la comptabilisation des opérations d’ordonnancement des dépenses et d’encaissement des recettes est donc réalisée au moyen de deux applications « principales » centralisées (l’une en dépenses avec des sous-produits ; l’autre en recettes avec d’autres sous-produits) qui décrivent les opérations budgétaires exécutées au niveau central et au niveau local. Elle permet d’obtenir des comptes en recettes et dépenses à intervalles réguliers (voir plus loin la centralisation comptable). Le développement et la modernisation du système RAFIC sont en cours de même que les liens avec le système de télé déclarations72

70 La dépense doit en effet être validée par un avis de crédit puisqu’elle a une contrepartie via la recette d’emprunt. Le logiciel d’ADEB ne permet pas de retracer une information importante selon que la recette résulte d’une mobilisation d’emprunt (consécutive à un paiement direct) ou d’une demande de décaissement sur des fonds déposés à la Banque Centrale, voire exceptionnellement dans une banque commerciale (il s’agit alors d’un décaissement sur dépôt, ce dépôt n’ayant lui-même pas été enregistré à l’origine en emprunt, comme il aurait dû l’être). 71 A raison de deux postes de travail par EPA, le développement prévoit l’équipement de 120 à 150 EPA par an pendant 3 ans. 72 Projet « Administration Communicante » (qui permettra les télédéclarations), utilisation des messageries, site WEB…

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7.5 Un système de dépense qui engendre des délais de paiements acceptables… Globalement, les dépenses sont exécutées dans des délais acceptables à chacun de ses stades (contrôle des engagements, ordonnancement et paiement). Les engagements de dépenses sont visés par le service du contrôle des dépenses dans des délais qui peuvent parfois dépasser le délai réglementaire de 6 jours (notamment pour les marchés), mais qui demeurent néanmoins raisonnables. Le contrôle des engagements de dépenses ne fait pas l’objet de critiques importantes de la part des services centraux des ministères : la nomenclature des pièces justificatives à produire au stade de l’engagement clarifie le contrôle et évite en grande partie les retards dus à un état d’impréparation des dossiers. Les observations des contrôleurs concernent surtout les erreurs d’imputations budgétaires ou les insuffisances au niveau des marchés. Globalement, le contrôle semble plus pointilleux dans les régions au point que certains ministères l’assimilent à un quasi-contrôle d’opportunité, générateur d’allongement des délais. Les ordonnancements sont exécutés par les ordonnateurs dans un délai moyen qui semble un peu long (probablement plus de deux mois en moyenne73). Un texte prévoit un délai d’ordonnancement de 3 mois pour les situations des marchés et de 45 jours pour les factures à régler aux entreprises publiques. Il n’est pas prévu de délai d’ordonnancement pour le règlement des factures aux fournisseurs privés. Les paiements (nets74) sont généralement effectués par virement75, très rapidement par les comptables assignataires (en quelques jours), si bien que le délai moyen total de règlement des factures avoisine les deux mois – avec un délai moyen un peu plus long pour les factures émises en fin d’année (deux tiers du budget sont exécutés en fin d’année). Les salaires sont quant à eux réglés, du 16 au 24 du mois en cours, selon un calendrier préétabli et sans retard. En outre, la Tunisie s’est dotée d’un système original de recours des usagers pour favoriser la réduction des délais de paiement : institution d’un « Médiateur » en 1998, mise en œuvre d’un système d'enregistrement des réclamations, traitement systématisé des prises en charge76, etc. Le système ADEB pourrait permettre, sans trop de difficultés, la présentation de tableaux de bord donnant les délais moyens de paiement des factures par ministère afin de mieux identifier les éventuels points de retards dans la chaîne de la dépense.

… mais qui comporte quelques incertitudes dans la qualité des engagements de dépenses, notamment pour les marchés publics… Au plan réglementaire, l’engagement financier doit toujours précéder l’engagement juridique (ou, au plus tard, être concomitant). Or, il a pu être observé que des marchés avaient été notifiés et

73 Voir analyse jointe en annexe de quelques dossiers pris au hasard. Il serait intéressant de faire une étude statistique exhaustive au moyen d’une édition sur ADEB des délais de paiement moyens par ministère (une telle application existe, mais établie par comptable et non par ministère elle fournit peu d’éléments pertinents). 74 Nets des déductions de retenues à la source légales (TVA, Impôts sur les Sociétés, Impôts sur les Revenus) 75 Les dépenses sont obligatoirement payées par virement lorsqu’elles dépassent le montant de 500 dinars pour les dépenses de matériel (généralement payées par virement également pour des montants inférieurs) et au-delà du SMIC pour les salaires – de 130 à 150 dinars environ selon les catégories de personnel 76. Elles sont centralisées au bureau d’enregistrement des réclamations et transmises aux services concernés qui doivent les traiter avant départ des agents en congés.

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conclus avant enregistrement de la proposition d’engagement financier, ce qui est certes exceptionnel mais néanmoins irrégulier. La définition insuffisamment précise du visa77 du contrôle des dépenses relatives aux marchés favorise sans doute cette confusion dans certains cas exceptionnels car, en pratique, le contrôle s’effectue à trois reprises successives – au stade du « signalement » du marché, au stade du « blocage » des crédits, puis au stade de la « proposition d’engagement ». Au plan de l’organisation de la chaîne de dépenses, les bons de commande qui viennent à l’appui des engagements sont édités séparément au lieu de l’être en un document unique, ce qui peut conduire parfois à des commandes passées hors circuit (cf analyse statistique de quelques dossiers d’engagement en annexe). Ces deux facteurs de confusion pourraient être évités par l’édition d’un document unique valant à la fois acte juridique et fiche d’engagement78. Cette solution serait judicieuse notamment dans le cadre d’un système moderne comme celui d’ADEB. Par ailleurs, certains engagements sont comptabilisés, pour des raisons pratiques, après réception des factures : c’est notamment le cas de certaines dépenses d’électricité, d’eau et de téléphone mais aussi de certains achats de médicaments dans les établissements publics. Il semble que le faible recours à la pratique des engagements provisionnels, pourtant prévue par la réglementation pour ces dépenses particulières, soit une des raisons de l’existence de ces engagements ex-post. Ces pratiques pourraient être aussi à l’origine d’arriérés de paiement dus à des reports de charges non financés (faute d’engagements préalables). En pratique cependant, il n’existe pas d’arriérés significatifs. …et qui est complexifié par l’organisation d’un double circuit d’ordonnancement pour les dépenses d’investissement selon qu’elles sont financées sur ressources intérieures ou sur ressources extérieures. Pour un même projet d’investissement financé sur ressources intérieures et extérieures, les imputations budgétaires diffèrent selon l’origine du financement. Il en résulte un dédoublement et une déconnexion des actes de dépenses (commandes, ordonnancements) d’un même projet.

Une simplification de cette procédure doit être recherchée afin de réduire la durée de régularisation des opérations de dépenses sur ressources extérieures. Une solution à étudier consisterait à comptabiliser les opérations dans SIADE et dans ADEB dès l’émission de la demande de décaissement, sans attendre le retour de l’avis de débit du bailleur de fonds ; ces opérations seraient alors maintenues en « Restes à payer » jusqu’à l’arrivée de l’avis de débit qui justifie la « recette » d’emprunt (ou le crédit sur le compte de dépôt). Cette réorganisation implique cependant de revoir les interfaces entre SIADE et ADEB. Les services du ministère des finances travaillent à la simplification de ce circuit.

77 Aucune dépense ne peut être engagée sans être revêtue au préalable du visa du service du contrôle des dépenses publiques » (art 88 du CCP) 78 Au moyen de différents codes-textes, la fiche d’engagement devenant selon la nature de la dépense et le code texte choisi, un bon de commande, un ordre de mission, une notification de marché…..

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Le double circuit des dépenses sur projets co-financés

• Engagement.

Les deux engagements relatifs à une même commande suivent un circuit identique : le chef de projet, gestionnaire des crédits, sollicite l’ordonnateur (DAF du Ministère au plan central) pour établir les deux propositions d’engagement79 correspondant à la commande (l’une pour la part financée sur ressources intérieures et l’autre pour la part financée sur ressources extérieures); ces deux propositions sont adressées au contrôle des dépenses pour visa.

• Ordonnancement.

Les deux ordonnancements correspondants aux deux engagements suivent deux circuits séparés :

- la partie de la livraison payable sur ressources intérieures fait l’objet d’un ordonnancement80 par le gestionnaire du projet, établi par l’ordonnateur (DAF du ministère) et transmis au Payeur destinataire (payeur général ou payeur régional) qui alors effectue le règlement.

- la partie de la livraison payable sur ressources extérieures fait l’objet, selon le cas : → soit d’un ordonnancement en forme de demande de déboursement manuelle81 transmise par le

gestionnaire du projet à la Banque Centrale82, pour décaissement de disponibilités détenues en comptes de dépôts, au profit du fournisseur,

→ soit d’une demande de « paiement direct »83 manuelle transmise directement par le gestionnaire du projet au bailleur de fonds (ce dernier effectue le virement au profit du fournisseur, et mobilise alors l’emprunt tunisien).

• Régularisation dans SIADE.

La régularisation dans SIADE de l’opération ne se fait qu’après réception de l’avis de débit du bailleur de fonds, ce qui explique les retards de régularisation de ces opérations. De même pour la validation de la recette, après réception de l’avis de crédit.

7.6 Un système comptable rigide et fixé dans le détail par le Code législatif de la Comptabilité publique, qui produit des résultats fiables en fin d’exercice, mais qui demeure imprécis en cours d’exercice du fait d’un suivi insuffisant de certaines dépenses en temps réel… La réglementation très détaillée du système comptable est sans doute un frein aux évolutions réglementaires nécessitées par la modernisation des techniques de gestion, qui exigent davantage de souplesse. Il a pu être observé toutefois que certaines dispositions ne sont déjà, de fait, plus appliquées.

Dans l’ensemble cependant, le degré de détail de la réglementation permet un suivi comptable et un reporting satisfaisants. Seuls deux défauts de suivi sont notables : - Certaines opérations d’avances ou de prêts à des entreprises ou établissements publics qui sont retracées en opérations de trésorerie du réseau comptable et non pas en opérations budgétaires

79 Saisi en temps réel dans l’application ADEB 80 Saisi en temps réel dans l’application ADEB 81 Saisie dans l’application SIADE après réception des documents adressés par le gestionnaire de projet, saisie en deux temps : 1/ saisie de la demande de déboursement ; 2/ saisie de l’avis de débit de la banque 82 Ou à la banque commerciale le cas échéant 83 Saisie dans SIADE après réception des documents adressés par le gestionnaire de projet, saisie en deux temps : 1/ saisie de la demande de déboursement ; 2/ saisie de l’avis de décaissement du bailleur de fonds

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comme cela devrait être le cas84. Les masses en jeu, relativement à celles de l’ensemble du budget, ne sont cependant pas importantes et ne sont guère de nature à fausser les résultats d’ensemble. - La plupart des opérations de dépenses financées sur ressources extérieures sont bien retracées dans les comptes mais avec retard comme il a déjà été indiqué. De même, les opérations de paiement du remboursement de la dette85. Ces deux types d’opérations sont cependant reportées dans les comptes de fin d’année, de sorte que le défaut n’apparaît qu’au niveau des situations d’exécution intermédiaire (mensuels notamment) et non pas en fin d’exercice. Il est à noter cependant qu’une circulaire du 10 juin 2003 du Ministère des Finances a prévu une production mensuelle des informations relatives au reporting des opérations sur ressources extérieures. Ses dispositions, non encore appliquées, malgré des mesures d’incitation très fortes pour accélérer la centralisation des informations comptables86, devraient permettre une amélioration notable de la situation. Afin de relancer les gestionnaires retardataires, certains ministères (comme le Ministère de la Santé) ont créé des tableaux de bord permettant de mesurer l’écart entre les opérations saisies dans SIADE et non portées dans ADEB.87.

Il convient enfin de rappeler que les dépenses donnant lieu habituellement à des reports de charges d’un exercice sur l’autre (dépenses de téléphone par exemple) et qui peuvent engendrer des biais dans les comptes, par décalage d’une année sur l’autre, ne semblent pas constituer des masses importantes. Aucun stock d’arriérés importants n’a été mis en évidence, après un apurement effectué en 2002.

…et du fait de lacunes d’interface entre la comptabilité budgétaire et la comptabilité générale. Le système comptable présente un défaut principal d’interface entre les données de l’exécution budgétaire et celle de la comptabilité générale. Ce défaut concerne l’absence d’indication de la date réelle des paiements dans ADEB, ce qui prive le réseau d’une information fiable sur le paiement effectif des dépenses et ne permet pas la sortie d’éditions automatisées fiables d’exécution provisoire en paiement effectif. En effet, les informations fournies par ADEB ne retracent pas les paiements (décaissements) effectifs mais seulement les ordres de paiement pris en charge88. Le décalage entre les deux états budgétaires et comptables peut engendrer des décalages de un à quelques jours selon le type de dépenses (1 à 3 jours pour les dépenses par virement bancaire, délai plus long pour les paiements en numéraires). Par ailleurs, le système ADEB ne permet pas d’éditer des états de restes à payer, puisque toutes les ordonnances sont censées être payées (validées dans ADEB)89.

84 il s’agit plus d’un défaut de présentation des écritures que d’un défaut de saisie des données comptables (voir ci-dessus section 2 sur la présentation du budget). 85 les dépenses correspondantes ne sont intégrées dans ADEB qu’une fois par an en fin d’exercice, si bien que la chaîne budgétaire n’est pas servie en cours d’année 86 le comptable assignataire peut refuser de payer l’ordonnance émise pour la part de la dépense supportée par la partie nationale, tant qu’il n’a pas reçu l’autre partie, la régularisation du décaissement sur ressources extérieures. 87 exemple 7,1 milliards de dinars comptabilisés dans SIADE en dépenses mais pas dans ADEB - au 16 mars 2004 - sur la gestion 2003, mais qui ne donnent pas d’information sur les opérations non encore saisies dans SIADE. 88 Avis de crédits et bordereaux de virements pour les dépenses payées par virement ; les bordereaux de virements sont classés par organisme de paiement (banque, CCP, autre comptable public) ; bons de caisse pour les règlements en numéraire ; pour les règlements par bons de caisse, les données d’ADEB sont transférées dans une autre application « Paierie » qui permet de reprendre les dépenses à régler par bons de caisse ; cette dernière application permet de suivre les paiements des bons de caisse et les restes à payer par bons de caisse. 89 Les virements bancaires rejetés sont cependant suivis dans un compte qui devient un compte de restes à payer sur virements rejetés

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Cette situation notamment, est à l’origine de retards dans la production des arrêtés de comptes mensuels et dans la centralisation comptable, qui n’est généralement réalisée, au mieux, que dans les 10 jours suivant la fin du mois, ce qui est assez long. Elle occasionne aussi des traitements manuels lourds de rapprochement des états budgétaires et comptables qui peuvent être à l’origine d’erreurs de comptabilisation. De fait, la liaison des données de l’exécution avec la comptabilité générale est réalisée par des fiches d’écritures manuelles, saisies dans une autre application distincte d’ADEB, dit module de « gestion des opérations de trésorerie » (module informatique propre aux paieries). L’organisation de ce système (saisie de fiches d’écritures) n’offre pas, en soi, une sécurité totalement satisfaisante. Mais la compétence et la rigueur des personnels comptables compensent les insuffisances technologiques et structurelles du système pour produire au final, des comptes justes, avec un risque d’erreur quasi-nul, ce qui mérite d’être souligné. L’objectif affiché des autorités tunisiennes est de développer l’intégration de toutes ces opérations, mais le calendrier de mise en place des actions de modernisation à entreprendre, notamment en matière informatique reste encore imprécis. Ces actions sont aussi largement dépendantes des décisions, plus lourdes, à prendre sur la mise en application du projet de plan comptable de l’Etat (voir ci-après).

7.7 Un système comptable dont l’exécution budgétaire se dénoue dans le cadre d’une comptabilité générale de l’Etat en partie simple (et non en partie double) et qui produit des données pauvres en informations comptables. Il s’agit là, sans aucun doute, de la plus grande lacune du système comptable tunisien, qui tranche avec l’état par ailleurs avancé de l’informatisation du circuit de la dépense et le professionnalisme des personnels comptables. La comptabilité officielle de l’Etat est tenue par les comptables publics. Elle décrit : - Les opérations budgétaires (ordonnances prises en charge dans ADEB en dépenses et recettes encaissées en recettes) - Les opérations dites de trésorerie mais qui comprennent en réalité des opérations d’imputation provisoire et des opérations sur comptes de dépôts. Les opérations de trésorerie proprement dites ne sont pas décrites dans des comptes mais seulement calculées par différence entre les recettes et les dépenses. De plus, certaines opérations de valeur (comptabilité valeur) sont prises en compte dans les opérations en deniers, ce qui est une anomalie comptable.

L’architecture comptable en partie simple présente les caractéristiques suivantes.

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L’architecture comptable actuelle en partie simple

x Il s’agit d’un système comptable tenu en recettes d’un côté, en dépenses de l’autre, sans articulation comptable entre les deux. x Chaque application enregistre néanmoins un maximum d’informations pour décrire les opérations qui s’ensuivent, notamment celles dites de trésorerie. x Les opérations autres que d’encaissements et de décaissements sont en revanche tenues en partie double. x Mais il n’y a pas de structure décrivant la comptabilité générale et ses différents modules décrivant les comptabilités auxiliaires (dépenses / recettes / comptes de dépôts….). x La comptabilité est décrite dans une liste de comptes comportant dix-neuf groupes90, mais il ne s’agit pas d’un plan comptable général normalisé. x Les opérations ne sont pas décrites selon le principe des droits constatés (pas de suivi comptable centralisé des restes à recouvrer par exemple). x Les dettes et créances ne sont pas retracées en comptabilité. x La comptabilité ne donne aucune information sur l’actif de l’Etat. • Il y a une confusion entre la comptabilité valeur et la comptabilité deniers. • Il n’y a pas de balance générale des comptes.

La Tunisie avait prévu de réformer sa comptabilité selon la méthode de la partie double depuis 1973 (art 68 du code de la comptabilité publique), mais sans résultat à ce jour. Le projet a été relancé activement en 1995-1996: un projet de plan comptable avait été arrêté en 2000, mais l’étude est demeurée théorique. Sa mise en application, qui passe par l’informatisation des opérations, a aussi été retardée du fait de la survenue d’autres problèmes techniques durant la même période : les aléas techniques dus au passage à l’an 2000 ont fragilisé l’exercice de réforme et l’arabisation des systèmes informatiques a absorbé beaucoup de capacités humaines et matérielles qui n’ont pu être affectées à la réforme. La Tunisie s’est engagée en 1996 dans un contrat de partenariat avec l’Union Européenne qui prévoit notamment la mise en œuvre d’un plan comptable normalisé. Pour toutes ces raisons, il est désormais urgent et indispensable d’engager cette réforme comptable. La programmation de cette mise en application fait l’objet d’efforts des autorités tunisiennes et devrait déboucher au plan réglementaire et informatique sur des cahiers de charges précis. Une assistance technique étrangère a été mise en place en 2004 à cet effet (voir en annexe une note technique sur cette réforme).

7.8 Un système comptable qui parvient néanmoins à produire des comptes d’exécution budgétaire mensuelle globalement justes (hors certaines opérations non intégrées), mais avec 10 jours de retard en moyenne… Dans le système tunisien, la comptabilité officielle de l’Etat est celle tenue par les comptables publics ; la centralisation étant effectuée par le Trésorier Général de Tunisie. Cette comptabilité décrit

90 Groupe 1 répertoriant des comptes de recettes ; groupe 2 listant des comptes de dépenses (par ministère) ; les autres groupes retraçant les opérations dites de trésorerie (en réalité, opérations de dépôts, d’imputation provisoire, comptes d’avances, comptes de transferts, comptes de correspondants…). Les subdivisions sont codifiées au moyen de chiffres, mais aussi de lettres – exemple des sous-comptes 28 dans le groupe 2

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les dépenses de l’Etat ordonnancées, visées et prises en charge par le comptable91. La centralisation des comptes est réalisée par la DGCP92, en charge elle-même des états finaux donnant lieu à la loi de règlement. La centralisation mensuelle s’opère avec des retards significatifs de 10 jours en moyenne93.L’objectif de la DGCP est de réduire ce délai à 4 ou 5 jours, l’idéal étant d’obtenir les résultats dès le lendemain de l’arrêté mensuel. Ces retards sont dus principalement au défaut d’informatisation de certains postes comptables, par absence de système comptable intégré (paieries) ou par défaut total d’informatisation (78 recettes des finances, voir infra) et au défaut de plan comptable qui permettrait de rationaliser la présentation des opérations et d’accélérer leur centralisation. Malgré ces retards, les opérations de centralisation sont réalisées avec justesse94 du fait de la rigueur et de la compétence des personnels comptables du réseau sur l’ensemble du territoire.

Le déploiement du réseau comptable et la centralisation

• 1 Trésorier général : comptable centralisateur et assignataire des opérations de la dette, des dépenses des Fonds spéciaux du Trésor et des comptes de dépôts et consignation. • 7 Payeurs des dépenses : Payeur Général + 6 Payeurs Départementaux (ministériels) • 24 Trésoriers Régionaux : comptables centralisateurs des opérations des comptables de leur circonscription, un par Gouvernorat • 24 Receveurs des Conseils de Région : comptables principaux des dépenses des régions • 278 Receveurs des Finances : dont 78 postes non encore informatisés • 49 recettes chargées des douanes • 83 postes à l’étranger, comptables principaux • 2.087 postes en EPA, 3.500 régisseurs

La centralisation comptable mensuelle des dépenses et recettes

-Au niveau des 24 Trésoriers régionaux : chaque comptable produit un « bordereau mensuel de comptabilité » récapitulant les opérations en dépenses-recettes du mois et calculant les disponibilités par différence. Les opérations des receveurs des finances non informatisées sont saisies dans le système informatique par les Trésoriers régionaux. Ceux-ci valident les opérations de tous les comptables du gouvernorat et adressent au trésorier général les bordereaux mensuels de comptabilité ainsi que les disquettes récapitulant les opérations ;

-au niveau du Trésorier général : celui-ci procède à la centralisation des opérations des Trésoriers régionaux et des paieries (payeur général + 6 paieries régionales)95, qu’il intègre à ses propres opérations. Celles-ci sont partiellement informatisées (intégration de disquettes96) ; elles ne le sont pas pour ce qui concerne l’exécution budgétaire. Les opérations de centralisation mobilisent trois personnes pendant une dizaine de jours. La technique de centralisation au niveau le plus élevé (Trésorerie générale) demeure donc très traditionnelle, ce qui semblerait pouvoir être modernisé relativement aisément sur certains points97.

91 dépenses validées par le comptable assignataire dans ADEB, point d’entrée unique de la description de l’exécution budgétaire, puis enregistrées en comptabilité générale. 92DGCP : 159 personnes – 8 directions : Personnel, Applications Informatiques, Etudes et Logistique Comptables, Règlement du Budget, Contrôle Comptable, Finances locales, Inspections, Perception et Contentieux 93 Les retards sont parfois supérieurs à 10 jours 94 hors opérations non intégrées. 95 Le Payeur Général reçoit mensuellement les pièces de dépenses des postes à l’étranger, enliassées pour préparer la loi de règlement. 96 Les pièces justificatives jointes aux « bordereaux de comptabilité » des Recettes des Finances sont initiés dans l’application informatique comptable du Trésorier Général. Les écritures permettent l’édition d’un « livre journal ». 97 Ainsi, le Trésorier Général établit encore manuellement la situation récapitulative de l’exécution budgétaire des dépenses des 7 Paieries, auxquelles il ajoute celles des fonds spéciaux dont il est le comptable assignataire. Pourtant ADEB pourrait éditer cette situation (le cas échéant avec des sous-totaux par comptable) – ce qui ne semble pas avoir été demandé ; la situation d’exécution budgétaire issue de la comptabilité auxiliaire des dépenses (ADEB) doit bien entendu correspondre à ce qui est retracé en comptabilité générale. Cette simplification permettrait d’accélérer sensiblement les opérations de centralisation.

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Une fois les écritures de fin de mois arrêtées, généralement 10 à 15 jours après la fin de chaque mois, le Trésorier général adresse des situations d’exécution budgétaire à différents partenaires (Présidence de la République, Ministre des Finances, DGCP, DGT, Institut d’études quantitatives, etc.) La DGT de son côté, enrichit les données transmises par le Trésorier général des opérations relatives à la dette (mobilisation de ressources d’emprunt des projets) dont il a connaissance dans SIADE, ou d’informations qui lui sont transmises par la Banque Centrale. Il est clair que cette centralisation comptable ne pourra être accélérée qu’en étendant l’informatisation et le réseau de communication entre les unités (liaisons intranet) et en modernisant le plan comptable. … et des comptes annuels de grande qualité (loi de règlement) mais avec quelques mois de retard. La loi de règlement est préparée par la DGCP, essentiellement à partir de la comptabilité produite par le Trésorier général et des comptes des ordonnateurs (vérification des rapprochements) qui conduisent à la confection du compte général de l’Administration. La loi de règlement ne récapitule que les opérations budgétaires (les opérations de trésorerie et l’arrêté général de comptabilité ne sont pas fournis au Parlement), mais elle récapitule toutes les opérations budgétaires (sauf sans doute quelques opérations sur dons, et certaines opérations d’avances et de prêts dépassant le cadre annuel et qui ne sont décrites que dans les opérations de trésorerie98). Malgré tout, le caractère exhaustif de la loi de règlement est largement satisfaisant, ce qui représente un des atouts majeurs du système tunisien en terme de fiabilité. La loi de règlement est globalement produite chaque année dans des délais encore un peu longs (voir ci-après). Le rapprochement entre les écritures comptabilisées par les ordonnateurs et celles produites par les comptables sont facilitées par l’intégration du réseau ADEB, mais les opérations qui tardent le plus à être centralisées sont celles des dépenses des projets financées sur ressources extérieures. L’objectif affiché par les autorités est de réduire le délai global de présentation du projet de loi de règlement au Parlement de 6 mois. Cet objectif semble raisonnable et permettrait de présenter le document au moins concomitamment au dépôt du projet de loi de finances initiale de l’année suivante : ainsi le projet de loi de règlement du budget de 2002 serait présenté en 2003, en même temps que le projet de budget de 2004.

Calendrier de la loi de règlement de 2002

Juillet 2003 : envoi des comptes des comptables publics mis en état d’examen Décembre 2003 : envoi du compte général de l’administration des finances Janvier 2004 : envoi du projet de loi de règlement Avril 2004 : déclaration de conformité par la Cour des comptes Juin 2004 : envoi du projet de loi au Conseil des ministres pour dépôt au Parlement

98 Dépenses déjà décrites plus haut

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8. LA GESTION DE LA TRÉSORERIE & DE LA DETTE

8.1 Une gestion de la trésorerie de type professionnel malgré une unification et une information à parfaire sur l’appréciation des besoins de trésorerie. La Tunisie ne connaît pas de problème de liquidités (cash-rationing). Il convient de rappeler que seul le Trésorier général dispose d’un compte à la Banque Centrale et que la trésorerie de l’Etat est donc centralisée. La situation de trésorerie est établie à partir du pointage des opérations du compte de la Banque Centrale ouvert dans les écritures du Trésorier général avec celles du relevé de compte de la Banque Centrale. Il convient au préalable de noter que le Trésorier général opère une centralisation quotidienne des disponibilités en trésorerie au sein du réseau comptable. Il opère les transferts nécessaires entre postes comptables pour optimiser l’alimentation des postes afin de faire face aux besoins de décaissement et de dégager les soldes de trésorerie excédentaire. La centralisation s’opère comme suit.

La centralisation quotidienne des disponibilités de trésorerie par le Trésorier général

Compte unique à la Banque Centrale Seul le Trésorier général dispose d’un compte ouvert à la Banque Centrale qui centralise toutes les opérations effectuées à un niveau inférieur99, les autres comptables peuvent initier des opérations mouvementant le compte du Trésorier général ouvert à la Banque Centrale, en agissant « pour son compte ».

Comptes des chèques postaux (CCP) Les autres opérations de trésorerie transitent par le réseau postal des CCP, eux-mêmes centralisés chez le Trésorier général dans ses comptes de dépôts et consignations. Les comptables doivent vider leur compte CCP et alimenter celui du Trésorier général lorsqu’ils n’ont pas besoin des liquidités qu’ils détiennent. Certains comptables ont été autorisés, à titre exceptionnel, à ouvrir un compte CCP spécifique aux opérations dont la trésorerie doit être affectée (en vertu des dispositions des conventions de financement).

Comptes en espèces Les disponibilités en espèces sont en principe limitées à 5 000 dinars, les excédents devant être reversés sur le compte du Trésorier général.

Disponibilités dans les banques commerciales

La comptabilité de l’Etat ne retrace pas les disponibilités détenues dans les banques commerciales, ni quotidiennement, ni en fin d’année. Il en existe cependant (notamment pour suivre les dons des bailleurs).

La centralisation quotidienne de tous les mouvements d’encaissements et de décaissements (hors opérations non intégrées) sur le compte de la Banque Centrale ainsi que les mouvements de fonds entre comptables est effectuée par le Trésorier général. Les opérations sont enregistrées dans une application ancienne qui retrace tous les avis de règlement, et qui permet d’en suivre leur apurement.

99 Les mouvements de fonds relatifs aux disponibilités affectées détenues dans des comptes de dépôts à la Banque Centrale ne sont pas intégrées au jour le jour par le Trésorier général, ce qui nuit au principe de trésorerie unique « Treasury Single Account »; il enregistre pour ordre, le solde en fin d’exercice en une seule écriture (au vu d’un listing produit par la Banque Centrale). Cette intégration ne se fait pas d’ailleurs sans inexactitude technique, les dépôts pouvant trouver leur origine dans des opérations qui ne sont pas décrites en comptabilité, comme les mobilisations d’emprunts

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Le rapprochement entre les écritures du Trésorier général et son relevé de compte à la Banque centrale est fait mensuellement chez le Trésorier général, mais il devrait être fait quotidiennement, étant admis que la centralisation des écritures du Trésorier général est quotidienne. Il conviendrait aussi d’intégrer dans cet exercice de rapprochement les disponibilités affectées aux projets co-financés, détenues pour l’essentiel à la Banque Centrale, voire certaines disponibilités détenues dans des banques commerciales (mais l’information fait ici défaut). Ces opérations de trésorerie (trésorerie courante détenue à la Banque Centrale et trésoreries affectées) font actuellement l’objet de traitements séparés, la trésorerie affectée étant complètement dissociée du processus de gestion d’ensemble de la trésorerie. C’est la DGT qui gère la trésorerie de l’Etat et assure l’alimentation en liquidités du circuit de la dépense publique par appel à la Banque centrale. Elle dispose d’un effectif de cadres bien formés à cette tâche et qui l’exercent dans des conditions professionnelles. La collecte des informations et l’estimation des besoins de trésorerie se fait auprès de la Trésorerie générale et de la Banque Centrale. Des tableaux prévisionnels sont tenus à jour toutes les semaines et couvrent un spectre large des recettes et dépenses.

Le tableau de prévision simplifié du Compte courant du Trésor à la Banque centrale

Recettes propres……………………………..….1 Dépenses hors dette…………………………… .2

Solde…………………………………………….3=2-1 Intérêts de la dette………………………………4

Solde après intérêts…………………………….5=4-3 Rembours. Principal…………………………….6

Solde avec dette………………………………...7=6-5 Emissions dette………………………………… 8

Solde après émission……………………………9=8-7 Solde antérieur. du compte courant…………….10

Solde du compte courant…………………… . .11=10-9 (+ou-)

Ces tableaux restent cependant entachés, au niveau des dépenses, par l’insuffisance déjà mentionnée due au fait que les paiements effectifs sont mal captés par le système ADEB : le système traite en effet les dépenses prises en charge par les payeurs alors que les paiements effectifs ne sont effectués qu’après un ou plusieurs jours pour les dépenses payées par virement (cette critique a été formulée notamment par le FMI), les décalages étant plus importants pour les décaissements en numéraire (mais le volume est faible).

8.2 Une gestion de la dette récemment professionnalisée et déjà efficiente… Les outils de gestion de la dette se sont beaucoup améliorés depuis la sortie du pays de la politique d’ajustement structurel (PAS) en 1986. C’est à compter de 1994 que la Tunisie a commencé à obtenir une notation favorable et à accéder aux marchés internationaux. Elle est agréée depuis 2003. De ce fait, le coût de la dette s’est accru et une ré-orientation sur le marché domestique s’opère ces dernières années. Depuis 1997, les instruments et les procédures d’émission ont évolué passant des Bons du trésor classiques (7 ans max.) vers les Bons du trésor assimilables (BTA) d’une duré variable de 2 à 12 ans. Il s’agit d’émission de Bons du trésor assimilables, effectuées dans le cadre d’adjudications hebdomadaires, et d’émissions mensuelles L’encours actuel de la dette intérieure

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représente aujourd’hui un tiers de l’encours total. Depuis 2003, il existe aussi un véritable marché primaire des bons d’Etat. Les émissions sont réalisées dans la transparence (communications aux professionnels, à la presse) et les offres sont établies par une commission. Il existe par ailleurs en Tunisie une société de compensation des valeurs mobilières; le système a été mis en place avec une coopération technique étrangère. La Tunisie s’oriente aussi vers une gestion active de sa dette en essayant d’en allonger le terme et en recherchant dans l’immédiat des emprunts remboursables en bloc à terme (à 5, 6 ou 10 ans). Un appui technique de la Banque Mondiale a été fourni à cet effet. Cette nouvelle politique implique donc au préalable de gérer un échéancier à long terme. Mais le stock de dette à long terme est encore insuffisamment recensé au jour le jour, compte tenu de la multitude d’intervenants dans le circuit.

…mais un reporting à améliorer grâce à une meilleure institutionnalisation de gestion au sein du ministère des finances. La mobilisation des fonds est réalisée (cf supra) directement par les chefs de projets, habilités à la réaliser en vertu des dispositions de l’article 151 bis du code de la comptabilité publique. Certes, ils doivent faire enregistrer leurs opérations dans le système SIADE auquel est reliée la DGT. Mais les opérations sont enregistrées, comme il a été indiqué, avec un certain retard ; ce qui nuit à la connaissance des opérations. Il en résulte un véritable problème de reporting et de connaissance de la dette elle-même, d’autant plus que les conventions de financement sont elles-mêmes signées et initiées par des acteurs différents selon qu’elles concernent des opérations bilatérales (ministère des affaires étrangères) ou multilatérales (ministère du développement et de la coopération). Le ministère des finances (DGT) n’est souvent informé des tirages d’emprunts que par les bailleurs eux-mêmes. Le reporting de la dette souffre donc encore incontestablement d’un manque d’institution-nalisation de la gestion de cette dette, notamment au sein du ministère des finances. La DGT est très consciente de cette situation et s’emploie à y remédier avec beaucoup d’énergie. Au plan de la transparence, la DGT établit un livre annuel de la dette, document exhaustif transmis à la Cour des comptes, mais non au Parlement.

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9. LE CONTRÔLE DE LA DÉPENSE

Le système tunisien du contrôle et de l’audit de la dépense publique est un système très élaboré, avec un contrôle interne, externe, à priori et à posteriori. Globalement le système de contrôle et d’audit assure un bon degré de fiabilité des dépenses publiques, mais il comporte encore quelques défauts auxquels il devrait pouvoir être remédié sans grandes difficultés.

9.1 Un contrôle interne a priori sur les engagements de dépenses qui s’est allégé mais qui reste encore assez formel. Le contrôle de l’engagement de la dépense publique, prévu par le code de la comptabilité publique comme il a été indiqué en section 3, est exercé par un service du contrôle de la dépense publique qui compte environ 200 membres dont 28 contrôleurs centraux et 24 contrôleurs régionaux (un par gouvernorat). Il est dirigé par un Contrôleur général et est directement rattaché au Premier ministère, et non au ministère des Finances comme cela est souvent le cas dans les systèmes de ce type. Le contrôle se matérialise par l’apposition sur l’acte d’engagement d’un visa préalable. Ce contrôle tend depuis un décret de 1989 à s’alléger afin d’accélérer le paiement de la dépense. Ainsi, certaines dépenses échappent au visa préalable en application de la réglementation : dépenses dites à caractère secret comme celles relevant de la Présidence de la République et du ministère de la défense et de l’Intérieur. Les dépenses « à caractère occasionnel » et de faible montant100 sont quant à elles notifiées au contrôle après engagement. Dans le même sens, pour certaines autres dépenses, l’engagement peut être transmis au contrôle pour un montant global en début d’année avec régularisation en cours d’année101 ou bien l’engagement peut être provisionnel sous un plafond déterminé102. Cette procédure de l’engagement de la dépense s’applique depuis 1989 aux régions et a été étendue en 1999 aux communes dont les recettes sont supérieures à 1 MDT. Les dépenses exécutées en régie d’avance font l’objet quant à elles d’une approbation à posteriori. Les diligences effectuées par le contrôleur pour apposer son visa sont classiques et portent, comme déjà indiqué, sur la régularité de la dépense : exacte imputation budgétaire, disponibilité des crédits et existence des pièces justificatives listées dans une circulaire du Premier ministre. La tâche la plus lourde concerne le contrôle de la qualité de la consultation lors de la procédure de marchés. Il semble que les contrôleurs disposent de manuels de procédure listant les justificatifs à fournir à l’appui des dépenses mais leur diffusion reste insuffisante. La solution optimale serait de prévoir une diffusion en ligne de cette liste de pièces justificatives associée au système ADEB de sorte que lorsqu’un ordonnateur initie une dépense dans le système, un aide en ligne lui indique précisément, en fonction de la nature de la dépense engagée, la marche à suivre en matière de pièces justificatives. Une telle solution n’est cependant pas actuellement à l’étude. De plus, toutes les

100 actuellement 12 000 dinars pour les travaux et services et 5 000 dinars pour les fournitures 101 dépenses de dette publique, charges salariales, moyens des services récurrents (locations d’immeuble, primes d’assurances), subventions et contributions, marchés publics dès lors qu’ils ont été autorisés par une commission ad hoc 102 plafond d’un tiers des crédits ouverts au budget pour les dépenses de matériel et gestion administrative ou de la moitié pour les dépenses relatives à la recherche scientifique et pour celles du ministère de l’enseignement supérieur et des établissements publics dont le budget est supérieur à 300 000 dinars.

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dépenses des établissements publics et une part importante de dépenses des collectivités locales sont encore traitées manuellement. Le contrôleur tient une comptabilité des engagements à partir de l’application informatique ADEB en liaison avec celle de l’ordonnateur, garantissant ainsi une certaine fiabilité de la procédure. Elle est toutefois limitée, comme déjà indiqué par le fait qu’elle s’arrête à la prise en charge de la dépense et ignore la notion de paiement; le contrôleur ne peut donc s’assurer véritablement de l’exacte disponibilité des crédits. De même, la procédure d’engagement de la dépense en trois temps (fiche signalétique, blocage des crédits et engagement de la dépense) pourrait utilement se limiter à la dernière étape, sans porter préjudice à la qualité du contrôle exercé. Le service du contrôle des dépenses traite environ 298 000 propositions par an dont 98 000 d’origine informatique, ce qui représente une vingtaine de dossiers par jour pour chaque unité de contrôle. Un délai légal de 6 jours est imparti au contrôleur pour refuser son visa. A défaut, la dépense est considérée comme approuvée (article 7 du décret de 1989 précité). Les textes ne prévoient cependant aucun délai en cas de demande complémentaire pour obtenir d’autres justificatifs, ce qui pourrait retarder le processus d’engagement de la dépense publique. Il semble que le délai moyen de traitement des dossiers soit satisfaisant, sauf cas particulier de rejet ; en tous cas, il n’alourdit pas particulièrement les délais de paiement. Le service du contrôle est aussi souvent sollicité pour d’autres missions comme celle de la présidence de la commission d’ouverture des plis pour les marchés publics. Le service produit semestriellement un rapport d’activité et de synthèse de ses observations sur les dossiers de dépenses. Il s’agit là d’une bonne initiative. Dans l’ensemble, il apparaît que le contrôle qui s’exerce au niveau central reste assez formel, sans s’attacher outre mesure à l’économie de la dépense ou à la régulation des finances publiques. Certains ministères estiment que le contrôle est plus approfondi au niveau local. Globalement, il apparaît que cette fonction de contrôle à priori devrait être modernisée. L’état de développement du système des finances publiques tunisien, le niveau de compétence des gestionnaires ainsi que la qualité de l’aide en ligne apportée par l’informatisation du circuit de la dépense devraient conduire à une implication plus grande du service du contrôle dans l’économie de la dépense, sans toutefois s’immiscer dans le domaine de son opportunité. Une telle démarche pourrait être utile pour les ordonnateurs qui trouveraient auprès du service du contrôle des dépenses un appui technique qui les aiderait à être plus efficient dans le choix de la dépense sans remettre en cause leur pouvoir de décision. En tout état de cause, cette modernisation apparaîtra indispensable dans la perspective de la mise en place d’une approche de logique budgétaire fondée sue les résultats et la performance vers laquelle la Tunisie semble souhaiter s’engager à terme. Le choix plus large laissé aux gestionnaires dans l’allocation des crédits devrait conduire à une redéfinition profonde du contrôle à priori de régularité classique.

9.2 Un audit interne a posteriori exercé par des inspections internes aux missions d’audit et de contrôle larges, mais insuffisamment définies, et dont certaines tâches ne relèvent pas directement des missions d’audit….

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Il existe en Tunisie deux types de missions d’audit interne qui interviennent sur l’aspect financier de l’activité des administrations : des missions d’inspection propres à chaque ministère et intervenant dans le champ d’activité de leur ministère et les missions d’audit interne à vocation interministérielle et plus générale. S’agissant des premières missions, deux exemples ont été retenus : l’inspection des services comptables propre au ministère des finances et l’inspection générale du ministère de l’agriculture. S’agissant des secondes, on retiendra le Contrôle général des services publics et le Contrôle général des finances103.

9.2.1 L’inspection des services comptables : une activité réelle et dynamique mais encore accaparée par les contrôles inopinés et par des tâches relevant de la gestion administrative. Le principe du contrôle et de l’audit de la gestion des comptables publics est posé par l’article 20 du code de la comptabilité publique qui prévoit que ce principe « incombe dans sa forme administrative au Ministre des finances qui l’exerce par l’intermédiaire des services centraux de son département et de l’inspection générale des finances ». L’inspection des services comptables dépend de la Direction de la comptabilité publique et ses fonctions ont été définies par un décret du 23 avril 1991. le service est bien doté en moyens humains et matériels (17 vérificateurs centraux et 48 vérificateurs régionaux) :

Quelques fonctions principales de l’Inspection des services comptables mêlant attributions de contrôle et audit et attributions de gestion

• inspection et vérification des postes comptables de l’Etat sur le territoire national, auprès des ambassades et consulats à l’étranger, des collectivités publiques locales, des établissements publics à caractère administratif et organisations assimilées ; • enquêtes sur les faits de discipline ou agissements irréguliers ou délictueux commis par le personnel des postes comptables dans l’exercice des fonctions • participation aux mesures de réforme du réseau de postes comptables; • choix des documents de contrôle à communiquer aux agents vérificateurs à l’occasion de leurs missions ; • suite à donner aux rapports établis par les agents vérificateurs (arrêts de débets des comptables) ; • relations avec le contentieux de l’Etat, la justice et les services du contentieux des collectivités publiques locales ;

Cette liste d’attributions fait clairement apparaître deux missions principales de contrôle et d’audit (vérification de postes comptables et enquêtes sur faits de discipline) tandis que les autres missions relèvent plus de tâches de conseil, qui en tout état de cause n’occupent qu’une part peu importante de l’activité. Le programme de travail des équipes de contrôle s’articule autour de trois composantes : la vérification classique des situations de caisse (10 à 16 vérifications mensuelles par inspecteur), opérée de manière inopinée, des vérifications approfondies portant sur un thème bien ciblé (de moins de moins nombreuses) et des vérifications dites « sommaires ». Ces vérifications sommaires sont engagées ponctuellement à la demande expresse du ministre et prennent, au fil des années, une part prépondérante par rapport aux vérifications approfondies ; ce qui a pour effet de perturber un peu le programme de travail du service et la définition d’une

103 Il existe aussi une mission de contrôle chargée du domaine de l’Etat

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stratégie de contrôle. Ainsi, sur les 166 vérifications sommaires effectuées en 2003, seul un tiers a porté sur des enquêtes liées à des insuffisances comptables ou détournements de fonds, un autre tiers a porté sur la résolution de différends entre comptables et citoyens, le dernier tiers relevant de tâches qui s’apparentent en réalité à la gestion administrative ayant peu de liens avec la notion de contrôle (missions d’assistance pour la passation de service et pour versements de fonds, gestion du service en cas d’empêchement du comptable). D’autres travaux de gestion administrative leur sont aussi confiés : vérification des additions des quittanciers104 et registres de perception avec rédaction d’un procès verbal à joindre par le comptable lors du dépôt de son compte (369 opérations de ce type en 2003). Quant aux vérifications approfondies, elles ont essentiellement consisté à instruire des dossiers pour fautes graves commises par des régisseurs (une dizaine de cas par an) –tâches par ailleurs utiles- au détriment d’autres missions essentielles, plus en ligne avec les fonctions d’audit et de pédagogie, visant à améliorer les procédures et le fonctionnement global des services. Il y a donc, à la fois dans les textes et dans la pratique, une tendance à confier à l’inspection des services comptables des tâches soit de contrôle sommaire au pied-levé, qui perturbent un peu son programme de travail et rendent plus difficile la définition d’une stratégie de contrôle et d’audit, soit des tâches de nature administrative qu’elle ne devrait pas effectuer. Il reste néanmoins que ce service d’inspection comptable fonctionne effectivement et contribue à une meilleure fiabilité du réseau comptable. L’activité de ce service, en même temps que la programmation du contrôle pour l’année à venir, sont retracées dans un rapport annuel non public mais soumis au Haut Comité du Contrôle Administratif & Financier (voir plus loin la description de cet organisme et l’analyse de son activité de coordination).

9.2.2 L’inspection générale du ministère de l’agriculture : une fonction d’audit réelle mais en dessous des objectifs annoncés. De nombreux ministères comme celui de l’Agriculture, de l’Equipement, de l’Education, etc.. disposent d’un service d’inspection et d’audit interne. La mission a retenu celui de l’Agriculture. Celui-ci est directement placé sous la responsabilité du ministère de l’agriculture. Cette inspection a des missions largement définies par un décret du 13 février 2001, notamment d’effectuer « toute mission de contrôle et d’enquête à caractère administratif, financier ou technique tendant notamment à s’assurer de la légalité des actes de gestion, d’évaluer la gestion et d’améliorer les circuits et les moyens d’action des services du ministère en vue de réduire les coûts de fonctionnement ». Cette inspection dispose cependant d’un effectif restreint : 14 personnes dont 10 inspecteurs de niveau différent, ce qui ne lui permet guère d’assurer toutes ses missions dans des conditions optimales. A l’image de ce qui se passe pour l’inspection des services comptables, elle est très souvent sollicitée par le ministre pour instruire dans l’urgence des affaires ponctuelles ; ce qui entrave la réalisation de son programme (de près de 20%) et lui donne moins de lisibilité. Elle est aussi chargée du suivi des recommandations dressées par le HCCAF.

104 ces tâches, indispensables mais peu valorisantes pour une inspection comptable, devraient peu à peu disparaître avec l’informatisation accrue du fonctionnement des postes comptables.

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Répartie en équipes de 3 personnes, pour des missions qui peuvent durer de 1 à 3 mois, l’inspection générale de l’Agriculture s’efforce de ne pas agir dans un but répressif mais tend à sensibiliser les services en direction d’une amélioration de leur gestion et de leur organisation. Elle souhaiterait d’ailleurs dépasser l’aspect de contrôle de gestion et orienter aussi ses missions vers un aspect plus technique (5 postes budgétaires ont été créés à cet effet en 2004).

9.2.3 Un audit interne interministériel effectué par le Contrôle Général des Services Publics et le Contrôle Général des Finances qui remplissent leurs tâches d’audit et de contrôle à un haut niveau, mais qui mériteraient cependant d’être mieux différenciés. Des missions similaires dans les textes… D’après les textes, les missions de ces deux organismes paraissent très similaires, Ils ont été créés le même jour par décret du 5 janvier 1982. Aux termes de l’article 1er de chaque décret, les missions sont définies de manière identique en indiquant les services et organismes qui sont appelés à être contrôlés par ces deux corps, à savoir tous les services de l’Etat, les collectivités locales et d’une manière générale, tous les organismes publics qui bénéficient directement ou indirectement d’un concours financier de l’Etat. Le CGF dispose toutefois d’une compétence exclusive pour contrôler les projets financés sur ressources extérieures, qui constituent d’ailleurs une part importante de son activité (environ 40%) qu’il remplit à la satisfaction des organismes bailleurs de fonds, en apportant notamment une approche d’audit qui privilégie les résultats et pas seulement la régularité de l’opération. Enfin, le CGSP est destinataire des rapports de tous les services d’inspection administrative et financière, ainsi que des rapports du CGF (art.3 du décret de 1982 précité.) Le CGSP et le CGF disposent de moyens d’investigation très larges, le secret professionnel ne leur étant pas opposable. Leur programme de travail est fixé en interne et est ensuite approuvé par leur ministre de tutelle et enfin discuté devant le HCCAF. L’un et l’autre sont très souvent sollicités par les ministres pour effectuer des missions spécifiques105, ce qui n’est pas anormal s’agissant d’organismes de haut niveau à la disposition du gouvernement pour intervenir en urgence ; toutefois, cela n’est pas sans conséquence sur la réalisation du programme de travail établi. Les deux organismes sont très bien dotés en moyens humains et matériels. Le recrutement se fait à un très haut niveau (recrutement direct via l’ENA, +7 ans après le baccalauréat ou par voie de concours). Chaque organisme dispose d’une cinquantaine de contrôleurs dotés d’un statut qui garantit leur indépendance et leur carrière. Les méthodes de travail sont de type contradictoire (rapport en trois colonnes) et reposent sur des standards d’audit de niveau élevé. Les recommandations des rapports sont suivies par le HCCAF. Les deux organismes ont produit des manuels de procédure complets et de qualité. Le CGF a notamment édité un manuel de procédure d’audit des services publics, un manuel d’audit des projets co-financés, un guide de vérification d’un poste diplomatique, un guide vérification d’une association. … mais qui dans la réalité se distinguent plus nettement.

105 art 2 du décret du 7 décembre 2000 pour le CGF et art 1er du décret de 1982 précité pour le CGSP

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Dans la réalité, le champ d’audit réservé au CGF semble plus classique en dépit des nouvelles dispositions prises par décret du 7 décembre 2000 qui définissent des champs d’investigation plus larges : vérification approfondie et générale de la gestion des comptes, vérification ciblée sur un thème, mission d’évaluation de l’activité et des résultats de la gestion, mission d’audit, d’enquête, d’expertise et d’inspection particulière (Art. 3). Concrètement, le CGF réalise environ 70 contrôles par an dont 30% (une vingtaine) portent sur les missions d’enquête et sur la vérification des postes comptables qui se déroulent selon des méthodes traditionnelles (contrôle de régularité de la dépense, vérification inopinée pour arrêtés de caisse et vérification plus approfondie pour les postes comptables, etc.). A l’instar des autres corps de contrôle, il s’attache à vérifier sous l’angle de l’économie, de l’efficacité, de l’efficience auquel il ajoute celui de l’environnement ( règle dite des 4 E). Comme le lui permet le décret du 7 décembre 2000 (Art. 1), il tente aussi d’introduire un contrôle des résultats et de l’évaluation de l’activité. Le CGSP travaille, pour sa part, sur la régularité mais aussi sur la qualité de la gestion par référence à des normes connues ou qu’il crées en collaboration avec l’organisme. Il peut proposer des mesures telles le changement du responsable, voire des sanctions administratives ou pénales, ce qui est de plus en plus rare. Il s’attache surtout à formuler des recommandations d’ordre organisationnel, voire à préconiser des études afin d’améliorer la gestion des structures contrôlées. Depuis 2003, il s’oriente même vers une mission de conseil au management auprès des organismes. Une équipe d’une dizaine de contrôleurs assiste pendant 6 mois les dirigeants pour les aider à améliorer leur organisation ou leur gestion afin d’atteindre les objectifs assignés à ces établissements par le Plan. Sans nier le souci légitime d’accompagner les organismes dans le développement de leurs capacités de management, il importe de bien définir la nature des opérations de conseil dans lesquelles le CGSP semble s’orienter ; il conviendra d’éviter le risque de confusion des missions de conseil et de contrôle, difficilement compatibles avec les évolutions les plus récentes en matière de normes et standards de bonne gouvernance. Si un tel risque ne paraît pas se manifester à ce stade, une réflexion devrait néanmoins être engagée sur l’orientation à donner à ces actions de conseil en gestion. Globalement, ces deux organismes d’audit et de contrôle remplissent leurs tâches à un niveau de qualité très élevé, garantissant ainsi l’effectivité d’une composante essentielle de la fonction de contrôle des dépenses publiques, elle-même facteur essentiel de réduction du risque dans un système de finances publiques.

9.3 Un contrôle externe par une Cour des comptes qui s’exerce dans de bonnes conditions… La Cour des comptes est une institution ancienne qui exerce des missions de contrôle des finances publiques de type juridictionnel. La Cour des comptes est une institution qui fonctionne depuis plus de trente ans (la loi instituant la Cour est une loi organique du 8 mars 1968 et sa première installation date de 1971) et qui dispose de réelles attributions et compétences. Elle est membre du comité directeur de l’AFROSAI et secrétaire général de l’ARABOSAI. Depuis octobre 2001, la Cour est membre du comité directeur de l’INTOSAI. Sur le plan fonctionnel, la Cour des comptes est bien pourvue en effectifs avec un contingent de 90 magistrats, recrutés à un haut niveau, identique a celui des deux organismes d’audit interne (ENA,

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Bac +7) et d’une centaine d’assistants. Une dizaine de magistrats ont suivi des formations auprès du Bureau du Vérificateur Général au Canada. Quelques-uns ont acquis une solide formation en matière de marchés publics et ont un profil d’ingénieur. La Cour est composée de 6 Chambres de 9 magistrats environ chacune. Chaque Chambre est dotée d’un secteur précis de compétences. La création de quatre chambres régionales qui dépendront directement de la Cour des comptes devrait à terme, conduire à renforcer le contrôle des services extérieurs de l’administration centrale, des établissements et entreprises publics ainsi que des collectivités locales. Deux chambres existent déjà : celle de Sousse fonctionne et celle de Sfax est en cours de création. Actuellement, le portefeuille de la Cour s’élève à un peu plus de 800 entités dont 25 ministères, 70 postes diplomatiques, 400 postes comptables, 100 collectivités locales dont 75 communes de plus de un million de dinars et 24 gouvernorats, 150 entreprises publiques et 60 EPA de plus de un MDT et 7 partis politiques. Ses méthodes de contrôle ont évolué. Après avoir exercé un contrôle par organisme, la Cour examine depuis 4 à 5 ans, un secteur entier avec une lecture transversale et mieux intégrée des problèmes ou difficultés rencontrées (exemple : filière oléicole). Elle s’attache à rechercher au travers de ses contrôles, la meilleure utilisation des ressources publiques avec une orientation récente vers un contrôle de la performance qui comporte des composantes touchant l’économie de la dépense, son efficacité, son efficience auquel elle rajoute son équité (règle dite des 4E). Les méthodes d’instruction des dossiers sont collégiales avec dépôt d’un rapport par un ou plusieurs magistrats de la Cour et examen par un contre-rapporteur. Ces deux rapports sont exposés devant les magistrats d’une Chambre et donnent lieu à des observations. En pratique, la Cour établit la contradiction avec les organismes audités par l’envoi d’un « Rapport provisoire » puis d’un « Rapport définitif » et assure le respect des droits de la défense sans qu’un texte n’ait encore expressément formalisé cette procédure. Avant d’entreprendre un contrôle, l’équipe d’instruction désignée doit faire valider sa démarche et sa méthodologie de contrôle par le comité du rapport présidé par le Premier président de la Cour des comptes. Une telle approche pourrait être vécue comme une atteinte au principe d’indépendance des magistrats, mais elle est admise par l’ensemble des magistrats comme procurant une garantie au principe de collégialité du contrôle. …et qui s’effectue dans le cadre des normes INTOSAI.

L’indépendance institutionnelle de la Cour des comptes Aux termes de l’article 69 de la Constitution du 8 avril 1976, la Cour des comptes fait partie, avec le Tribunal administratif, du Conseil d’Etat. Ce dernier n’a cependant aucune existence matérielle réelle et la Cour des comptes constitue bien, au même titre que le Tribunal administratif, une institution autonome et indépendante reconnue par la Constitution. L’indépendance institutionnelle de la Cour ne fait donc aucun doute et répond donc à la norme INTOSAI sur ce point.

L’indépendance des membres de la Cour des comptes L’indépendance de ses membres est garantie par leur statut de magistrats, qui leur assure l’inamovibilité dans leur poste. Le Président de la Cour des comptes est lui-même nommé par le

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Président de la République pour une durée illimitée sur la base d’un statut de magistrat qui le met à l’abri de toute pression de l’exécutif ou du législatif

L’indépendance financière de la Cour des comptes

Le fonctionnement administratif et les moyens budgétaires de la Cour relèvent du Premier ministère. L’article 9 du décret du 29 mai 1971 relatif au fonctionnement de la Cour des comptes prévoit cependant que « les dépenses sont engagées, liquidées et mandatées par le Président de la Cour des comptes ». En pratique, les crédits budgétaires de la Cour sont rattachés pour ordre au budget du Premier ministre sur des lignes budgétaires spécifique pour ses dépenses de fonctionnement106 et de même pour ses crédits d’investissement. Au plan de la gestion financière, la Cour fonctionne en réalité comme un établissement public doté de la personnalité civile et de l’autonomie financière. Les dépenses d’investissement sont cependant exécutées par les responsables du budget du Premier ministre. Plus important au regard des normes INTOSAI, la Cour des comptes définit ses propres besoins qui sont exprimés en propre par ses responsables à la fois auprès du CGB lors de la phase de préparation du budget et auprès du Président de la République à l’occasion de la présentation de son rapport annuel. Dans l’ensemble, la Cour des comptes est plutôt bien pourvue en moyens tant humains que matériels et n’a pas rencontré de difficultés budgétaires particulières susceptibles de porter atteinte à son indépendance

L’étendue du champ d’intervention de la Cour des comptes La Cour des comptes définit seule son programme annuel de travail qui est transmis au HCCAF qui ne peut le modifier. La Cour des comptes reste prioritaire dans ses contrôles. Elle s’efforce de réaliser l’ensemble du programme annuel qu’elle s’est assigné. Le champ d’intervention de la Cour est très large et porte à la fois sur les comptes des comptables publics et sur l’examen de la gestion des administrations d’Etat, des Conseils régionaux ainsi que des communes dont le budget est supérieur à un MDT, des établissements publics à caractère administratif ou industriel et commercial (article 3 de la loi du 8 mars 1968) ainsi que sur toutes les entreprises publiques dans lesquelles l’Etat, les gouvernorats ou les communes détiennent directement ou indirectement une participation en capital (article 1er du décret du 17 mars 1982) y compris sur les comptes des partis politiques. L’article 6 de la loi de 1968 précitée prévoit aussi que « la Cour des comptes apprécie les résultats de l’aide économique ou financière que l’Etat, les gouvernorats ou les communes accordent sous quelque forme que ce soit aux entreprises privées, notamment sous forme d’exonérations fiscales, garanties, monopole, protection douanière ou subventions ».

Les méthodes de contrôle de la Cour des comptes La Cour des comptes se fixe un objectif de vérification des entités en moyenne tous les cinq ans107.Ses pouvoirs d’investigation sont larges à l’exception des actes à caractère secret concernant la

106 À l’exception des salaires imputés sur une autre ligne mais qui sont délégués à la Cour deux fois par an. 107 délai qui n’a pu être validé par la mission.

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défense nationale, les affaires étrangères, la sûreté intérieure ou extérieure de l’Etat (article 21 de la loi de 1968). Une telle exception est en contradiction avec les normes INTOSAI qui ne prévoient pas de telles restrictions mais qui, en revanche, enjoignent aux institutions supérieures de contrôle de préserver le secret défense lorsqu’elles ont à en connaître. En pratique cependant, la Cour a été amenée à contrôler les budgets ministériels de la défense, de l’intérieur et des affaires étrangères sans se voir dresser d’obstacles particuliers. Sous cette réserve cependant, la Cour est habilitée à se faire communiquer tous documents, de quelque nature que ce soit; elle peut entendre tout fonctionnaire, tout gestionnaire de fonds publics ou membre des organismes de contrôle (article 21 de la loi précitée de 1968). Elle exerce son pouvoir sur pièces et sur place ( article 13 de la loi de 1968 précitée). Elle peut se faire assister d’experts. Les retards ou refus de communication de documents demandés auprès des différents services ou organismes sollicités au cours d’un contrôle peuvent donner lieu à l’inflation d’une amende pécuniaire par la Cour, en accord avec les normes INTOSAI. La Cour enfin, fonctionne sur une base de collégialité (cependant non inscrite comme telle dans les textes - articles 19, 20 et 21 de la loi précitée du 29 mai 1971) qui assure une garantie de qualité et d’objectivité, comme le recommande la norme INTOSAI. La production de la Cour des comptes La Cour des comptes établit annuellement un rapport qui reprend l’ensemble des observations et des recommandations formulées à l’égard des organismes contrôlés. Depuis sa création, elle a produit 18 rapports. Le 19ème portant sur sa production 2003 est en cours d’élaboration. Jusqu’à présent, ce rapport n’est pas public comme le prescrit la norme INTOSAI. Sa diffusion publique se limite à des extraits au journal officiel108. Toutefois, ce rapport est disponible dans les bibliothèques universitaires et quelques 600 exemplaires circuleraient chaque année assurant ainsi, selon les autorités tunisiennes, une information suffisamment large et qui touche tous les acteurs à même d’appréhender la portée de ce rapport. Il est clair que la publication de ce rapport par extraits au Journal officiel doit se généraliser et doit permettre à terme une publication générale même si celle-ci mérite une mise en forme particulière du contenu du rapport afin d’en permettre une lecture aisément accessible au public et d’éviter la divulgation sans précaution d’ordre pédagogique ou déontologique d’informations sensibles. Il faut aussi relever que le Premier président de la Cour présente le rapport annuel en Conseil des ministres avec un communiqué à la presse.

9.3.1 Une activité qui atteste d’un niveau de qualité d’audit et de contrôle externe élevé. La Cour des comptes exerce les activités traditionnelles d’une institution supérieure d’audit financier public de type juridictionnel qui sont de trois ordres: l’examen de l’exécution de la loi de finances (loi de règlement), le jugement des comptes des comptables publics et l’examen de la gestion des ordonnateurs administratifs.

108 le JO du 25 avril 2003 fait un résumé du 17ème rapport

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L’examen de la loi de règlement La Cour établit la déclaration de conformité et le rapport général sur l’exécution de la loi de finances qui sont présentés au Président de la République et remis à la Chambre des députés pour approbation de la loi de règlement (art 23 de loi 8 mars 1968). Le dépôt des comptes de l’Etat -le Compte de gestion du Trésorier général et le Compte général de l’Administration des finances- aux dates prévues par la réglementation, respectivement au plus tard les 31 juillet et 31 décembre de l’année suivante, a pour effet de rendre moins opératoires ses observations lors du vote du budget par le Parlement. Ainsi, au mois d’avril 2004, elle a déposé la déclaration de conformité sur l’exécution de la loi de finances 2002 pour un vote par le Parlement de la loi de règlement 2002 en septembre 2004, période au cours de laquelle, il examinera et votera le budget de l’année 2005. Consciente de ces retards, qui ont cependant été considérablement réduits ces dernières années en passant de 5 à un peu moins de 2 ans, la Cour s’efforce de réduire ces délais par un suivi régulier et annuel de la loi de finances tout en sensibilisant les divers services du Ministère des finances sur l’impérieuse nécessité d’accélérer leur propre production. Elle a ainsi mis en place très opportunément une procédure de commencement de l’examen des comptes sur la base de documents provisoires. La Cour effectue à l’occasion de l’examen de la loi de règlement, au-delà de la déclaration de conformité qui s’assure de la concordance entre les comptes des ordonnateurs et des comptables en fin de gestion, élément essentiel de fiabilité de l’exécution, un examen en profondeur de la politique budgétaire suivie par le gouvernement. La Cour émet à cette occasion des remarques récurrentes sur la gestion des personnels, sur la gestion de certaines opérations de trésorerie qu’il conviendrait, passé un certain délai, de budgétiser109, sur la gestion de la dette publique, etc. De ce point de vue, le rapport de la Cour constitue un document de premier intérêt qui témoigne de la qualité des méthodologies d’audit et de contrôle de la Cour. Il serait d’un grand intérêt pour la Commission des finances de la Chambre des députés de convier la Cour en audition pour commenter son rapport sur l’exécution de la loi de finances.

L’activité juridictionnelle de jugement des comptes des comptables Le jugement des comptes conduit, soit à décharger (quitus) le comptable de sa gestion, soit à mettre en jeu sa responsabilité pécuniaire et personnelle lorsqu’une irrégularité est détectée (débet). Le débet prononcé peut être remis par « décret » (article 40 du décret du 29 mai 1971). Les statistiques sur cette activité sont difficilement disponibles et leur formatage reste à parfaire. Cette activité s’exerce, comme déjà indiqué, dans des conditions normales (indépendance des juges, collégialité de la décision, méthode d’investigation, etc.) à l’exception cependant de la procédure d’appel qui n’existe pas dans le système tunisien. En effet, contrairement à d’autres systèmes d’origine francophone ou anglophone, la Cour juge en premier et dernier ressort (Art. 3 de la loi de 1968 précitée), sans procédure d’appel possible110. En revanche, il existe une procédure de cassation mais elle a lieu devant l’assemblée plénière de la Cour elle-même (Art. 18 de loi de 1968 et 75 de la loi de 1971). De ce fait, la même institution juge à la fois les faits et l’application de la loi et se retrouve être juge et partie. Les principes fondamentaux des droits de la défense que sont le

109 voir section 3 110 il existe des procédures de révision et de réformation prévues par les articles 59 à 74 de la loi du 29 mai 1971, mais elle ne constituent pas des procédures d’appel.

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double degré de juridiction qui permet à toute personne de se faire entendre une seconde fois et celui de la cassation qui conduit une instance supérieure à apprécier si les juges du second degré n’ont pas contrevenu à la loi, ne sont donc pas pris en compte et garantis. La Cour est consciente de cette imperfection de la législation et a engagé une réflexion en vue d’instituer une procédure d’appel au sein de la Cour des comptes, comme cela a déjà été fait pour le Tribunal administratif. Il faut cependant noter que la procédure de jugement du 1er degré comporte de nombreuses garanties pour le comptable (règle du double arrêt provisoire et définitif, instruction contradictoire avec rapporteur et contre-rapporteur).

L’activité d’examen de la gestion des ordonnateurs administratifs Les pouvoirs de la Cour à l’égard des ordonnateurs se limitent à un contrôle administratif qui peut conduire, en cas d’irrégularité constatée, à leur dénonciation auprès du ministre concerné dont ils dépendent, avec éventuellement saisine de la Cour de discipline financière. Cette dernière juge les fautes de gestion, sanctionnées par l’infliction d’une amende qui peut aller jusqu’à l’équivalent d’un an du salaire de la personne condamnée. En 2002, la Cour de discipline a été saisie à 22 reprises essentiellement par des ministres, ce qui constitue un bon niveau d’activité. L’essentiel des affaires jugées en 2002 porte sur des fautes de gestion commises au sein des établissements publics et entreprises publiques. La Cour des comptes a aussi la faculté de constater, à l’occasion de ses contrôles, que des personnes non habilitées à manier des fonds publics ont néanmoins manié de tels fonds et à les sanctionner au même titre selon la procédure dite de « gestion de fait », ce qui permet le reversement dans les caisses publiques des sommes indûment extraites (article 4 « nouveau » de loi de 1968). Dans ce cadre, elle peut aussi prononcer une amende de 50 à 500 dinars (Art. 4 de la loi de 1968). Cette activité de contrôle de la gestion des ordonnateurs est celle qui, au-delà de l’activité répressive des ordonnateurs défaillants, permet à la Cour d’examiner la gestion des finances publiques et d’effectuer une évaluation des politiques sectorielles en introduisant de façon très positive la notion de résultats et de performance.

Exemples de contrôles de la Cour ces dernières années

- Évaluation du projet « protection des villes contre les inondations ». - Gestion des terrains et bâtiments de l’Etat - Établissements de recherche scientifique - Institut national de la météorologie - Organisation du contrôle interne des entreprises publiques - Projet d’appui à la réforme hospitalière - Déconcentration-décentralisation

Le programme pour 2004-2005 prévoit notamment le contrôle des organismes de sécurité sociale et l’évaluation de la politique de sécurité sociale, le contrôle de la Compagnie tunisienne d’assurance du commerce extérieur, le contrôle de la filière de l’huile d’olive, etc.

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9.4 Le Haut Comité du Contrôle Administratif & Financier, un organe spécifique à l’Etat tunisien En 1993 (loi du 3mai 1993 et décret du 19 avril 1993), il a été crée le « Haut Comité du contrôle administratif et financier », établissement public à caractère administratif, directement rattaché à la Présidence de la République. Il se compose de tous les chefs des corps de contrôle, de deux directeurs généraux chargés du budget de l’Etat au Ministère des finances ainsi que du directeur général des entreprises publiques et des participations. Le Premier Président de la Cour des comptes, compte tenu de son statut d’indépendance n’y participe pas. Le HCCAF, dont l’effectif se compose d’une dizaine de personnes, dont 5 cadres de très haut niveau, est chargée de trois missions :

Il coordonne les programmes de contrôle de tous les corps d’inspection, interne et externe, y compris celui de la Cour des comptes qui lui soumettent chaque année leur programme de vérification ;

Il régule la fréquence des inspections (tous les 4 à 5 ans) et évite ainsi les chevauchements de contrôle tout en assurant un suivi régulier des inspections ;

Il propose toute modification de la structure de contrôle et d’audit qu’il juge nécessaire à l’amélioration de la fonction.

Afin de conférer une réelle efficacité au travail des différents corps d’inspection, le HCCAF suit aussi les recommandations émises dans les rapports ou que lui-même juge nécessaire d’émettre à la lecture de la centaine de rapports qu’il reçoit chaque année. Le suivi est assuré sous forme de questionnaires adressés aux structures concernées pour savoir ce qu’il est advenu des recommandations, soit directement par le HCCAF, soit par l’intermédiaire des corps de contrôles. Il donne lieu à l’établissement d’une note remise tous les ans au Président de la République. Le HCCAF se réunit tous les mois, avec compte-rendu adressé au Président de la République et organise chaque année un séminaire avec présentation d’une revue des contrôles. Il présente aussi un rapport annuel en Conseil des ministres sur les observations relatives au contrôle et à l’audit ainsi que sur les propositions de réglementation à modifier ou de restructuration à envisager. Il s’agit donc d’un organisme de coordination et de suivi des contrôles, dont la création a été rendue nécessaire en raison du nombre élevé d’organismes de contrôle et de la diversité des missions d’audit et de contrôle qu’ils effectuent, chacun pour leur part. L’aspect coordination, s’il s’effectue dans le respect de l’indépendance de chacun des corps de contrôle, notamment de la Cour des comptes dont l’indépendance ne doit pas souffrir d’exception, est un aspect très positif de rationalisation de l’action publique. De même, la régulation de la fréquence des contrôles, si elle s’effectue sur la base de critères judicieux, permet d’allouer de façon optimale les moyens destinés au contrôle des fonds publics. Enfin, le suivi des recommandations, s’il est effectué sur la base d’une hiérarchisation adéquate, est aussi un moyen d’optimisation des fonds publics.

9.5. Le contrôle exercé par le Parlement est effectif et consistant mais reste encore à approfondir.

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Le contrôle de l’exécution de la dépense par le Parlement s’exerce formellement lors du vote de la loi de règlement. Il a déjà été mentionné que le dépôt de cette loi de règlement était encore tardif et que son examen perdait un peu de son intérêt lorsqu’il portait sur une gestion antérieure de près de deux ans comme c’est encore le cas (le retard était de 5 ans il y a quelques années). L’absence d’audition de la Cour des comptes lors de la remise de son rapport sur la loi de règlement a aussi été mentionnée dans la section sur la Cour des comptes. Mais le contrôle de l’exécution s’exerce aussi par la voie informelle, mais réelle, des questions d’actualité tous les 15 jours, des débats sectoriels et de toute mesure qui, en général, favorise la transparence de la gestion publique. Un effort certain a été réalisé en ce sens ces dernières années. L’organisation de la Chambre des députés en plusieurs commissions spécialisées est un élément qui favorise l’exercice de cette fonction de contrôle. Il faut toutefois noter que la Chambre des députés ne s’est pas jusqu’à présent attachée à la création de commissions d’information sur des sujets de finances publiques particuliers comme beaucoup de parlements le font. L’absence d’une tradition de présentation d’une loi de finances rectificative en cours d’année pourrait être perçue comme un facteur négatif du point de vue de l’information du Parlement sur l’exécution du budget en cours. Cette impression ne correspond cependant pas à la réalité et ce pour trois raisons principales : - L’information budgétaire du Parlement s’organise autour des questions au gouvernement, qui sont nombreuses tout au long de l’année et qui donnent lieu à des débats consistants.

- La discussion sur les budgets économiques dans le cade du Plan quinquennal est elle-même un cadre de référence omniprésent pour l’exécution budgétaire ; le Plan étant chaque année actualisé en glissement.

- Enfin, le débat sur le projet de budget de l’année suivante, au mois de novembre, comprend une partie très développée consacrée à l’état d’exécution du budget de l’année en cours. Le Parlement et le gouvernement tireraient sans doute avantage mutuel à donner à ces échanges d’informations multiples un cadre mieux formalisé tel que par exemple, l’organisation d’un débat unique sur l’exécution du budget à mi-année qui permettrait de préparer, voire de simplifier le débat lors de la discussion générale du budget de l’année suivante. Dans ses rapports avec les corps de contrôle, il convient d’observer que le Parlement n’est pas destinataire des rapports du HCCAF, ce qui limite son information sur l’état des contrôles exercés en interne et donc, sa capacité à orienter ses propres demandes d’investigation et d’information. En conclusion, la Chambre des députés tunisienne est bien outillée et dispose des compétences humaines et matérielles pour développer sa fonction de contrôle des finances publiques. Il importe désormais qu’elle évolue plus encore dans ce sens. Les projets de réforme des modes de gestion budgétaire devraient favoriser cette évolution et permettre au Parlement, dans son ensemble, de mieux exercer sa fonction de contrôle qui n’est pas moins importante que sa mission principale d’autorisation de la dépense publique.

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ANNEXE 1

PRINCIPALES MODIFICATIONS RECENTES APPORTEES A LA LOI ORGANIQUE DU BUDGET.

Loi organique du 13 mai 2004 modifiant et complétant la loi organique du budget du 8 décembre 1967.

article 11 (nouveau) : la répartition des crédits de chaque ministère peut désormais se faire sous forme de programmes ou de missions fixés par décret.

•Les programmes comprennent les crédits affectés a une action ou un ensemble d’actions homogènes mises à la charge de chaque chef d’administration en vue d’atteindre des objectifs et des résultats pouvant être évalués. •Les missions comprennent un ensemble de programmes concourrant à concrétiser une stratégie d’intérêt national.

article 25 (nouveau) : le projet de loi de finances est soumis à la chambre des députés et à la chambre des conseillers, au plus tard, le 25 octobre de l’année en cours. Ce délai était fixé au 15 novembre précédemment.

article 27 (nouveau) : le texte prévoit la présentation d’annexes explicatives au projet de loi de finances expliquant notamment la ventilation des crédits par programmes et missions. De même, le texte ouvre la possibilité de présenter des documents d’information supplémentaires à la demande des deux chambres111.

article 33 (nouveau) : la répartition par partie et article des crédits ouverts au budget se fait par décret (inchangé) .

•La répartition des crédits de fonctionnement: •par paragraphe se fait par arrêté du ministre des finances •par sous-paragraphe se fait par arrêté du chef d’administration112

•La répartition des crédits d’investissement •par paragraphe et sous paragraphe se fait par arrêté du ministre des finances pour les crédits d’engagement •par paragraphe et sous-paragraphe se fait par arrêté du chef d’administration pour les crédits de paiement113.

111 Texte précédent : … « de présenter tous autres documents nécessaires à l’information de la chambre des députés ». Texte nouveau : … « tout autre document jugé utile pour l’examen du projet de loi par la chambre des députés et la chambre des conseillers. » 112 le texte précédent prévoyait un arrêté du ministre des finances pour cette sous-répartition. 113 le texte précédent prévoyait un arrêté du ministre des finances pour cette sous-répartition

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article 37 (nouveau) : les virements entre parties peuvent être opérés dans la limite de 2% des crédits par décret. De même, les virements entre articles à l’intérieur d’une même partie, sans limitation de montant. Aucun virement ne peut être opéré au profit des rémunérations publiques.

• les virements des crédits de fonctionnement, au sein d’un même article, entre paragraphes peuvent être opérés par arrêté du ministère des finances. Les virements entre sous-paragraphes par arrêté du chef d’administration.

• les virements de crédits d’investissement (crédits d’engagement) entre paragraphes et sous-paragraphes peuvent être opérés par arrêté du ministre des finances tandis que les virements de crédits de paiement peuvent être opérés par arrêté du chef d’administration.

Le texte précédent ne prévoyait aucune possibilité de virement par arrêté du chef de l’administration.

article 29 bis : cet article organise la procédure de vote du budget en tenant compte de l’existence désormais des deux chambres avec un système de commission mixte paritaire chargée de régler les différents entre les deux chambres sur un texte de loi de finances en vue de parvenir à un texte commun. Il prévoit en cas de désaccord persistant un droit du « dernier mot »pour la chambre des députés. Les délais d’examen du projet de loi de finances sont fixés à 6 semaines (à partir de la date de dépôt) pour la chambre des députés et à dix jours (à partir de la date de transmission) pour la chambre des conseillers.

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ANNEXE 2

Schéma simplifié des principes de classification des dépenses de la nomenclature budgétaire

• Titre I et II : grande catégorie de la dépense -titre I : dépense de gestion et de remboursement des intérêts de la dette -titre II : dépenses de développement et de remboursement du capital de la dette

• Dépenses des Fonds du Trésor

• Section 1 à 5 : catégorie de la dépense -titre I :

section 1 - dépenses de gestion section 2 - intérêts de la dette publique

-titre II : section 3 - dépenses de développement section 4 - dépenses de remboursement du principal de la dette publique

-dépenses des Fonds du Trésor section 5 - dépenses des fonds du trésor

• Parties 1 à 12 : sous-catégorie de la dépense titre I – section 1 – parties 1 à 4

(rémunérations, moyens des services, interventions publiques, dépenses imprévues)

section 2 - partie 5 (intérêts de la dette publique)

titre II – section 3 – parties 6 à 9 (investissements directs, financement public, dépenses imprévues, dépenses sur ressources extérieures affectées)

section 4 – partie 10 (remboursement de la dette en capital)

Dépenses des Fonds du Trésor Section 5 – parties 11 à 12

(dépenses des fonds spéciaux du trésor, dépenses des fonds de concours)

• Articles - sous-sous catégorie de la partie

code à 5 chiffres – 2 chiffres Partie – 3 chiffres Article numéro d’ordre (ex : article 01.101 : 01 rémunérations publiques, 101: rémunérations publiques du personnel permanent)

• Paragraphes – sous-catégorie de l’article code numérique

(ex : article 01.101.code paragraphe : rémunérations publiques du personnel permanent- catégorie d’indemnités)

• Sous-paragraphes – sous-catégorie du paragraphe code numérique (ex : article 01.101. code paragraphe. code sous-paragraphe : rémunérations du personnel permanent – catégorie d’indemnité – nom de l’indemnité)

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ANNEXE 3

GESTION DES CREDITS DE PERSONNELS

STATUTS ET POSITIONS DES AGENTS DE L’ETAT ET DES ENTREPRISES PUBLIQUES PAR RAPPORT AU BUDGET.

Personnels des administrations de l’Etat. Les agents des administrations l’Etat peuvent appartenir à plusieurs catégories distinctes :

Les fonctionnaires

Les contractuels et temporaires

Les vacataires

Les agents des établissements et entreprises publiques

� les fonctionnaires sont recrutés dans les conditions générales de la fonction publique.

� les contractuels et temporaires sont recrutés sur titre, sur proposition du ministère

technique après avis du ministère des finances et accord du Premier ministre.

� les vacataires (payés à la vacation) appartiennent pour l’essentiel à quatre catégories :

- les fonctionnaires peu nombreux qui accessoirement sont chargés de cours - des médecins

- les ouvriers saisonniers employés par le ministère de l’agriculture pour des travaux d’entretien forestiers ou d’irrigation (près de 7000 agents) - les ouvriers des chantiers nationaux : payés par régie d’avance sur justifications fournies par le responsable local, il y a là un risque qu’il faut cependant relativiser car les crédits correspondants représentent une très faible proportion : moins de 1% des crédits de rémunération et sont limités à une enveloppe prédéfinie.

� les agents des établissements et entreprises publiques qui peuvent être employés

dans une administration de l’Etat à la suite d’une procédure statutaire de détachement. Ils sont payés par l’administration dans laquelle ils sont affectés.

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Personnels de l’Etat hors administration

Il existe, en dehors des administrations, des structures qui emploient des agents de l’Etat :

les établissements publics administratifs (EPA) tels les collèges, lycées, universités. Les personnels sont des fonctionnaires, rémunérés sur les crédits de l’EPA.

les établissements publics de santé (EPS) tels les hôpitaux. Les personnels sont des fonctionnaires, ils sont rémunérés sur les crédits de l’EPS.

les établissements publics non administratifs (EPNA)tels les organismes STEG (Gaz électricité), SONDE (distribution d’eau) ou office du planning familial. Les personnels ont un statut particulier, ils sont payés sur les crédits de l’EPNA.

les établissements publics (EP) ex : RNTA (régie nationale des tabacs et allumettes)

les sociétés nationales (SN) telles la Société de transport urbain

les sociétés d’économie mixte

Personnels des collectivités locales

les gouvernorats emploient des fonctionnaires payés par l’Etat114.

les Conseils régionaux (organes techniques qui sont sous la tutelle des gouvernorats mais dispose de la personnalité juridique) emploient des fonctionnaires payés sur fonds propres (taxes locales, subventions de l’Etat).

les communes emploient des fonctionnaires payés sur fonds propres (taxes locales, subventions de l’Etat, redevances).

Cas particuliers

114 Les fonctionnaires des gouvernorats peuvent être employés dans les conseils régionaux (et inversement) à la suite d’une procédure statutaire de détachement.

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certains contractuels sont payés sur le titre 2 « Equipement » dans le cas de projets cofinancés lorsque les bailleurs apportent 80 % des crédits du projet.

GESTION INSTITUTIONNALISÉE DES RECRUTEMENTS DES FONCTIONNAIRES.

Arrêté programme

Un arrêté programme annuel de recrutements et de promotions est établi par ministère. Au préalable, un chiffrage détaillé du coût du programme est établi afin de contrôler son inscription dans la limite des crédits votés. Ses annexes détaillent les types d’emplois, leur nombre, les modes de recrutement, le nombre de poste par nature et le mois de réalisation.

Cet arrêté doit recevoir le visa du ministère des finances et de la fonction publique avant d’être signé par le premier ministre. Il est ensuite envoyé aux ministères pour exécution et publié au journal officiel.

Arrêtés d’ouverture de concours

L’exécution de l’arrêté programme se traduit par la production d’arrêtés d’ouverture de concours qui couvrent :

- les concours externes, - les concours internes, - les promotions au choix (limitées au 1/10ème des entrées de corps – art 28 bis du statut des fonctionnaires).

Ces arrêtés sont soumis au visa du Premier ministre. Ils sont ensuite publiés au

journal officiel ainsi que dans la presse (4 journaux) à l’exception de ceux qui concernent les promotions au choix.

Ces arrêtés sont préparés par les ministères, à l’exception de ceux qui concernent les grades interministériels (cadres supérieurs) pour lesquels c’est la Fonction publique (qui relève du Premier ministre) qui assure le recrutement.

Concours et recrutement

La procédure d’organisation des concours est fixée par arrêté du Premier ministre. Un représentant de la Fonction publique est membre de droit des jurys avec droit de veto. Le résultat des concours est publié dans la presse et par voie d’affichage.

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Un arrêté de nomination est signé par le ministre technique (le plus souvent par son représentant directeur administratif et financier).

Les ministères (et leurs représentants à l’échelon local) ont accès au logiciel unifié de gestion et de paye INSAF1 par l’intermédiaire de terminaux actifs. Ils saisissent les recrutements et dans un cadre plus général, l’ensemble des éléments relatifs à la carrière des agents (fonctionnaires, ouvriers et contractuels).

Le Centre National Informatique (CNI) et les outils de gestion unifiée du personnel et de lapaye

Le Centre national Informatique (CNI) héberge, développe et exploite les systèmes d’information de l’administration.

Le CNI a développé depuis 1983 un logiciel (INSAF) de gestion du personnel, auquel a été ajouté un module de paye à partir de 1989, pour traiter de façon unifiée l’ensemble des personnels de l’Etat.

Le logiciel se présente sous la forme d’une base de données (SGBDR Oracle ) avec une architecture client serveur reliée à plus de 1300 postes implantés dans les départements ministériels, les directions régionales et certains organismes publics.

Tous les agents de l’Etat (près de 380 000 dossiers) sont inscrits avec un identifiant unique le numéro d’immatriculation attribué par la caisse de retraite.

Les fonctionnalités développées permettent :

⇒ La gestion des procédures administratives : � La prise en charge et le suivi des autorisations de recrutement. � Le calcul des avancements. � La rédaction et l’édition des actes correspondants sont automatisés.

⇒ La gestion des procédures de paye : � Procédure d’ordonnancement � Calculs de la paye � Editions des états de mandatement

⇒ La mise à la disposition des utilisateurs d’outils de reporting et d’indicateurs de gestion administrative et financière avec une orientation contrôle de gestion.

Ce système est aujourd’hui parvenu à un très bon niveau de sécurité, il interdit

l’emploi d’un même n° d’identifiant pour plusieurs agents, n’admet que les n°

1 Voir annexe relative au CNI.

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d’identifiant validés par la caisse de retraite et exige désormais une saisie et une validation pour la création du dossier, puis une saisie et une validation pour la paye soit l’intervention de 4 personnes ayant des habilitations distinctes pour chaque nouvel agent payé1 (puis 2 personnes pour la paye en cas d’éléments variables, ces éléments faisant systématiquement l’objet d’une édition de contrôle au CNI).

Il est prévu d’étendre son utilisation aux agents des établissements publics et des

collectivités locales en 2005. La paye des agents des collectivités locales est aujourd’hui calculée « à la main ».

1 Ces mesures ont été prises à la suite de la découverte d’une fraude de plus de 2 millions de dinars : un agent du ministère de la santé exerçant dans un gouvernorat disposait (pour simplifier la procédure !) des deux mots de passe (création et de validation). Il créait les dossiers de médecins vacataires fictifs en utilisant les n° d’immatriculation à la caisse de retraite d’agents décédés ou radiés et faisait verser les rémunérations sur plusieurs comptes en banque

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ANNEXE 4

PLAN COMPTABLE EN PARTIE DOUBLE

I / Les principaux inconvénients du système comptable actuel en partie simple

Les opérations comptables ne sont pas présentées en équilibre en débit et en crédit selon les normes couramment admises, ce qui nuit à la sécurité des données comptables.

Il n’existe pas de comptes financiers (disponibilités en caisse, en banque) : les disponibilités sont calculées par différence entre les recettes et les dépenses.

La liste des comptes n’est pas structurée comme celle d’un plan comptable selon une classification hiérarchisée.

Le système comptable n’offre pas la possibilité de tenir une comptabilité patrimoniale faisant apparaître le montant global et détaillé des dettes et des créances.

Le système de contrôle comptable est très limité.

II/ Les principaux avantages inhérents à la technique comptable de la partie double

La technique comptable en partie double offre une démarche rationnelle et normalisée, destinée à mieux présenter les comptes :

• La comptabilité est une technique qui consiste à décrire les opérations d’une entité : elle est construite de telle sorte qu’elle produise par elle-même, par son architecture et son organisation, des situations permettant de suivre les opérations de cette entité, de les contrôler (les opérations sont équilibrées en débit et en crédit), de les gérer.

• La comptabilité doit, si possible, produire mécaniquement les situations retraçant l’ensemble des opérations.

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• La présentation des documents comptables d’un système en partie double est normalisée, ce qui facilite la compréhension de tous les acteurs appelés à consulter les comptes de l’Etat Tunisien, dès lors appelés à utiliser un langage communément admis.

Elle permet d’enrichir la connaissance des opérations :

• de la situation financière de l’Etat, d’extraire de la comptabilité la situation patrimoniale de l’Etat, c’est-à-dire dans un premier temps la connaissance de ses dettes (restes à payer) et de ses créances (restes à recouvrer).

• L’enrichissement de ces connaissances résulte de la technique même de la comptabilité en partie double qui décrit en une seule opération, sa nature mais aussi sa destination, sa contrepartie. Chaque compte décrit donc la situation d’opérations, ou de destinataires, de même nature. Les comptes décrivant la nature des opérations sont subdivisés au niveau du besoin de description. Les destinataires (définitifs ou provisoires - comptes d’imputation provisoires) sont subdivisés par catégorie.

• elle permet d’accélérer la connaissance des rentrées de trésorerie au niveau national (par la mise en place d’une nouvelle procédure de transferts comptables permettant dans une prochaine étape d’accélérer le rythme de centralisation, notamment des nivellements des encaisses des CCP) et permet de générer des gains financiers au profit de l’Etat en mesure de mieux gérer sa trésorerie, en retardant le cas échéant le recours à l’émission d’obligations ou de bons du trésor en cas de besoin de trésorerie, ou au contraire en remboursant plus tôt certaines dettes financières.

• elle peut préparer, si le pays le souhaite, l’introduction d’un suivi patrimonial de certaines immobilisations de l’Etat.

Elle permet de clarifier la présentation des comptes :

• La nomenclature comptable, par sa construction, permet d’obtenir mécaniquement la situation à différents niveaux d’agrégats, puisqu’elle est hiérarchisée et significative.

Ex : le compte 41 « débiteurs ordinaires » peut contenir les opérations des comptes 411 « Débiteurs d’impôt », 412 « Débiteurs de produits divers, 416 « Créances contentieuses »

……………………………………. 418 « autres débiteurs ordinaires »;

le compte 411 peut lui-même être subdivisé en

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4111 « Débiteurs d’impôts directs », 4112 « Débiteurs d’impôts indirects », etc...

• La structure et la classification du plan comptable en partie double (qui contient des comptes qui n’existent pas dans le plan comptable en partie simple - notamment les comptes de trésorerie, les comptes de liaison entre comptables...) induisent mécaniquement une présentation des données comptables clarifiée.

Elle permet d’optimiser les automatismes comptables :

• elle permet de clarifier de nombreuses opérations, de rationaliser de nombreuses tâches, de revoir certaines procédures, et en définitive, de réaliser d’importants gains de productivité, même si dans certains cas, des documents supplémentaires devront être remplis (bordereaux de transfert entre comptables : documents nouveaux qui s’ajouteront aux imprimés utilisés actuellement). Ces nouveaux documents permettront : ⇒ d’organiser de nouvelles méthodes de recherches et de contrôles : contrôles comptables dans les services,

⇒ d’organiser des contrôles de gestion : les documents comptables présenteront la situation de nouveaux comptes, récapitulant la situation d’opérations de même nature, clairement identifiées dont les soldes sont significatifs,

⇒ d’enrichir la connaissance de l’information des dettes et des créances.

C’est en définitive une nouvelle technique de gestion qui est offerte aux services pour la gestion courante, et aux décideurs pour le suivi des opérations de l’Etat. La liste des comptes est bien évidemment fonction des procédures et des circuits retenus, chaque « butoir » dans le circuit étant identifié par un compte. Les circuits résulteront des méthodes de centralisation comptable, des procédures arrêtées. Les automatismes induits doivent être décrits dans un cahier des charges à communiquer au informaticiens

• Le plan comptable ne peut, à lui seul, décrire les opérations de l’Etat sous tous leurs aspects, et il est important de faire la distinction entre la comptabilité générale de l’Etat et les nomenclatures auxiliaires qui seront nécessaires pour des analyses détaillées. Ainsi, les débiteurs ou les créanciers, ne peuvent dans le cadre d’un plan comptable être identifiés individuellement : il y aura avantage, si besoin est, de les identifier dans des nomenclatures spécifiques, dont les codes pourront être structurés et utilisés selon des schémas séparés (exemple : organiser la recherche de l’ensemble des subventions perçues par un organisme subventionné par plusieurs ministères, à plusieurs titres : cette recherche ne pourra être effectuée à

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travers le plan comptable, mais au moyen d’un code «bénéficiaire de subvention », géré en dehors du plan comptable; ce principe peut bien entendu subir quelques exceptions justifiées, par exemple, par l’importance des mouvements financiers).

Elle permet de rationaliser la présentation des documents (balances comptables, comptes de résultats, bilans…) et de définir toute une panoplie de contrôles internes (dont certains peuvent être automatisés) :

• Le contrôle peut s’effectuer la simple comparaison des comptes : exemple du contrôle des opérations entre la comptabilité générale (dépenses prises en charges par exemple, qui peuvent n’apparaître, à l’extrême, que dans un seul compte) et les comptabilités auxiliaires (ordonnancements acceptés dans ADEB – dont le détail peut être donné par nature, par ministère, par objectif….), contrôle des disponibilités apparaissant à la balance avec les disponibilités apparaissant dans les comptes détenus par les banques (au moyen d’un état de rapprochement normalisé)….

Elle permet de tirer partie de la présentation des comptes pour :

• valoriser le rôle du Trésorier Général dans son rôle de collecte des informations comptables et financières.

• offrir une meilleure connaissance de la situation patrimoniale et financière de l’Etat et de la trésorerie de l’Etat.

• établir, voire automatiser les relations entre une présentation comptable et une présentation plus économique sous forme de Tableau des Opérations Financières de l’Etat (TOFE) correspondant aux normes internationales du FMI.

• offrir rapidement des informations standardisées, claires, fiables tout en bénéficiant d’informations complémentaires (situation patrimoniale, présentation sous forme de TOFE).

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CFAA – TUNISIE \ RAPPORT

LES ÉTAPES D’UNE INTRODUCTION DU PLAN COMPTABLE ET DU SYSTÈME COMPTABLE EN PARTIE DOUBLE.

1 – Arrêter • l’architecture comptable (liens entre comptabilité générale et comptabilités

annexes (des dépenses, des recettes, des comptes de dépôts….), • le plan comptable (qui est fonction de ce que l’on souhaite obtenir en bout de

chaîne – voir en conséquence les liens avec la nomenclature budgétaire et les documents finaux de sortie comme le TOFE),

• les procédures comptables (les règles de prise en charge des dépenses et de leur règlement, les imputations provisoires et leur déroulement),

• les différents jeux d’écriture, • les règles de la tenue de la comptabilité patrimoniale (au moins pour les dettes et

les créances)… • les procédures de rejets et d’annulations

2 – Dessiner les documents de sortie :

• balances comptables (aux différents niveaux comptables) , • bordereaux de versements de pièces comptables, • les fiches comptes de la comptabilité générale, des comptabilités auxiliaires, • les situations d’exécution budgétaire, les documents de fin d’année, • les fiches de contrôles comptables, etc…

3 - Prendre les textes institutionnalisant :

• la mise en application du nouveau plan comptable (décret, instructions d’applications…) • le calendrier de mise en œuvre aux différents niveaux comptables, dans l’ensemble du réseau.

4- Parallèlement réaliser :

• la mise en œuvre informatique (automatismes comptables, règles de contrôles, détermination des anomalies,…) • les menus de saisie (qui n’ont probablement pas de grandes modifications à recevoir) • les menus de consultations et d’éditions; • définir un calendrier de tests

5- Organiser la formation

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• supports • modules • formation de formateurs • formation elle-même

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CFAA – TUNISIE \ RAPPORT 83

ANNEXE 5

QUELQUES ELEMENTS SUR LES DELAIS DE PAIEMENT

Sondage relatif à quelques délais de paiement examinés, au hasard, à la Paierie Générale du Trésor de Tunis en mars 2004-10-13

Comptable

Ministère

nºordonnancegestion 2004

Nature de dépense

Montantarrondi

endinards

Engagement

date de lafacture

(1)

date del’ordonnancement

(3)

Délaien jours(4) = (3) – (1)

datearrivée

date du paiement (5) délaien jours(6) = (5) – (3)

délai totalde

paiement(7) = (5) – (1)

Justice 201 carburant –combustiblecarburant – combustiblecarburant – combustiblecarburant – combustible

27,445502

28,033667

engagt pourdépenses2004 maisfactures de

2003

30-11-200331-10-200330-11-200331-12-2003

05-03-200405-03-200405-03-200405-03-2004

961269665

10-03-200410-03-200410-03-200410-03-2004

non payé 19/3/04non payé 19/3/04non payé 19/3/04non payé 19/3/04

(a)(a)(a)(a)

Enseignementsupérieur

61 acquisition matérielscientifique(investist – titre 6)

2,672 engagt viséCF le 17/2/04

20-12-2003 03-03-2004 74 non payé 19/3/04 (a)

Enseignementsupérieur

44 acquisition matérielscientifique(investist – titre 6)

83,202 marché notifiéle 29-05-2003engagementdu 20-10-2003

10-12-2003 24-02-2004 76 16-03-2004 18-03-2004(jour de prise encharge + 1 jour)

2 (a) 99

Défense Nationale 33 achat de papier debureau

867 bon decommande du21/1/04

05-01-2004 06-02-2004 32 10-02-2004 17-02-2004 7 43

DéveloppementEconomique

4 23 arrêtés de transfert 25,000 dispense devisa CF

04-02-2004 04-02-2004 0 06-02-2004 06-02-2004 2 (b) 2

Affaires Etrangères 430 frais de réception 66 bon decommande du9/03/04engagt et visaCF du 2/3/04

18-02-2004

Moyenne en jours(factures seulement)Moyenne en mois(factures seulement)

09/03/2004 20

73.13

2.44

13-03-2004 17-03-2004 8

2.13

0.07

28

56.67

1.89

(a) : les factures de 2003 auraient dû être ordonnancées sur les crédits de 2003(b) : dépenses de transfert au profit des gouvernorats, prioritaires

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CFAA – TUNISIE \ RAPPORT 84

Sondage concernant quelques dossiers d’engagement au Ministère de la Santé en mars 2004

Nº d’engagt objet montant dateengagement

visa CF date bon decommande

date factureen exécengagt

remarque

287 carburant 1,165 09-03-2004 12-03-2004 09-02-2004 facture antérieure à l’engagt

231 pièces de rechange 600 03-03-2004 12-03-2004 13-03-2004 31-01-2004 facture antérieure à l’engagt

161 rideaux 165 19-02-2004 25-02-2004 26-02-2004 10-03-2004 procédure respectée

179 étiquettes 38 24-02-2004 27-02-2004 27-02-2004 04-03-2004 procédure respectée

marché gardiennagede un an renouvelablevisé par la commissiondépartementale desmarchés le 19/12/03

114,000,000

114,000,000

date �signalement�date �blocage des crédits�proposition d’engagt

19-01-200419-01-2004-

24-02-2004

11-02-200411-02-2004

27-02-2004 marché notifié le 19/12/03avant la proposition d’engagt

en exécution de ce marché :ordonnance du 12/3/04 comprenant 2 factures

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CFAA – TUNISIE \ RAPPORT