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RfleXions1 45mai2011Tome 16

Rtine mdicaleDystrophie pseudo-vitelliforme de ladulte

Dossier

Orbito-palpebralPrparation de la graisse autologue au vue dune lipostructure orbitaire

StrabologieSyndromes de Stilling-Trk-Duane et paralysies du VI prcoces

Reconstruction de la surface oculaire

ThrapeutiqueCiticoline et neuroprotection

5me Congrs Ophtatlantic24 et 25 Juin 2011 - La BauleISSN : 1274-5243

Coordination scientifique :

David Touboul

4Crdits

FMC par anJBHsant

De linformation la formation du spcialiste

EditorialReconstruction de la surface oculaire

D a v i d To u b o u lPH, CRNK, CHU de Bordeaux

J

ai lhonneur et le plaisir de vous prsenter ce nouveau dossier de Rflexions Ophtalmologiques consacr aux pathologies dlabrantes de la surface oculaire et leurs modalits de reconstruction.

Il faut bien dire que les affections svres de la surface oculaire sont relativement rares mais potentiellement fortement invalidantes et parfois bilatrales. Leur prise en charge, prcoce, adapte et parfois pluridisciplinaire est un enjeu majeur dans notre profession. Il est certain que nous reconnaissons habituellement mieux ce que lon dj vu et il est donc primordial de diffuser des informations claires et illustres pour orienter judicieusement ces yeux dlabrs vers les centres les mieux arms pour combattre ces pathologies. Lorsque la transparence est compromise, la kratoplastie est une alternative bien maitrise. Cependant, les choses se compliquent singulirement lorsque le limbe est touch car lpithlium sera dfaillant et vascularis. Ainsi, le premier volet de ce dossier sera dvelopp par le Pr Carole Burillon sur la thmatique des perspectives de cultures de cellules souches pithliales proposes en alternative la dlicate greffe de limbes. Lutilisation de greffes de membranes amniotiques est souvent un bon alli dans la lutte contre lanarchie de la cicatrisation des atteintes svres la surface oculaire. Cest pourquoi le Dr David Touboul rappellera ici ltendue de ces indications. La conjonctive est souvent un problme important pour ladaptation de verres sclraux ou de restitution dune cintique palpbrale correcte. Le Dr Franois Thoumazet fera la lumire sur les modes chirurgicaux communment utiliss. Ladaptation dune lentille rigide de grand diamtre est souvent pertinente pour optimiser la vision de patients dont la surface oculaire reste parfois trs remanie. Les rgles et les limites de ladaptation de ces dispositifs seront dtailles par le Dr Florence Jourdan. Enfin, lorsque rien nest plus possible pour restituer un passage efficace de la lumire, lalternative de la kratoprothse reste envisager. Le Dr Louis Hoffart proposera une revue des perspectives possibles dans ce domaine. Toute lquipe de ce dossier vous souhaite une bonne lecture !

Bulletin dabonnementJe mabonne pour un an, soit 10 numros et hors-srieDductible de vos frais professionnelsMdecin Institution Interne/Etudiant (joindre un justificatif ) Etranger (Dom-Tom inclus) 1 an : 60 1 an : 90 1 an : 40 1 an : 70 2 ans : 90 2 ans : 160 2 ans : 60 2 ans : 130

RfleXions Ophtalmologiques4Crdits

FMC par an

Crditez votre FMC :Abonnez-vousEn application de larrt de juillet 2006 portant homologation des rgles de validation de la FMC, un abonnement un priodique mdical rpondant aux critres de qualit dfinis par les CNFMC donne droit 4 crdits FMC/an, dans la limite de 40 crdits sur 5 ans. Le critre retenu pour marquer la dmarche volontaire du mdecin est le paiement dun abonnement. Cet abonnement doit tre prouv par une facture.

Nom :............................................................................ Prnom : ................................................................................ Adresse : ................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................ Email : ............................................................................................................................................................................

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Bulletin retourner : JBH Sant, 53, Rue de Turbigo - 75003 PARISUne facture justificative vous sera adresse

N145 - Tome 16 - mai 2011 - RfleXions Ophtalmologiques

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COMIT SCIENTIFIQUEJ.P. ADENIS J.L. ARNE G. BAIKOFF Ch. BAUDOUIN J.P. BERROD A. BRON E. CABANIS G. CHAINE J. COLIN Ch. CORBE G. COSCAS Ph. DENIS J.L. DUFIER P. GASTAUD A. GAUDRIC Ph. GIRARD H. HAMARD T. HOANG XUAN J.F. KOROBELNIK D. LEBUISSON J.F. LE GARGASSON P. LE HOANG Y. LACHKAR P. MASSIN A. MATHIS M. MONTARD S. MORAX J.P. NORDMANN Y. POULIQUEN G. RENARD G. SACHS J. SAHEL J.J. SARAGOUSSI G. SOUBRANE M. WEISER

SOMMAIRE5Edito : Reconstruction de la surface oculaire David Touboul

DOSSIERReconstruction de l a surface ocul aire

COMIT DE RDACTION ET DE LECTUREGlaucome : Alain BRON Infectiologie : Isabelle COCHEREAU, Tristan BOURCIER Rtine mdicale : Eric SOUIED, Karim ATMANI Uvites : Bahram BODAGHI Neuro-ophtalmologie : Dan MILA Ophtalmo-oncologie : Laurent KODJIKIAN Surface oculaire : Serge DOAN Corne : Benot BRIAT, Marc MURAINE, David TOUBOUL Cataracte : Pascal ROZOT, Patrice VO TAN, Herv ROBIN Contactologie : Martine CROS-BOIDEVEZI Rtine chirurgicale : Frank BECQUET, Laurent KODJIKIAN Chirurgie rfractive : Olivier PRISANT Paupire et orbite : Eric LONGUEVILLE, Jean-Marie PIATON Strabo/ophta pdiatrie : Emmanuel BUI QUOC Chirurgie crnio-faciale : Jrme ALLALI Congrs, Divers : Arnaud SAUER

8 12 16 18 22

Cultures de cellules souches pithliales : un espoir

Carole Burillon

Greffes de membranes amniotiques : mode demploi David Touboul Traitement des symblpharons Franois Thoumazet Verres de contact appui sclral : quand et comment

Florence Jourdan

Kratoprothses : indications et rsultats en 2011 ? Louis Hoffart

Rtine mdicale

26 30

Dystrophie pseudo-vitelliforme de ladulte Violaine Caillaux, Karim Atmani

O r b i t o - pa l p e b r a lPrparation de la graisse autologue au vue dune lipostructure orbitaire Emilie Merc, Jean-Paul Adenis

Chirurgie

34 37

Le Simulateur Ophtalmique Chirurgical Eyesi Kaan Saracoglu

St r a b o lo g i eSyndromes de Stilling-Trk-Duane et paralysies du VI prcoces Emmanuel Bui Quoc

Th r a p e u t i q u e

Directeurs de la rdaction : Bahram BODAGHI et Pierre-Yves SANTIAGO Rdacteur en chef : Olivier PRISANT Conseiller Spcial de la Rdaction : Alain GAUDRIC

43 49

Citicoline et neuroprotection Aude Couturier, Olivier Calvetti

ActualitPerformances cliniques des lentilles de contact journalires jetables souples, au confort amlior J. Wolffsohn, O. Hunt, A. Chowdhury

UNE DITION J.B.H. SANT53, rue de Turbigo - 75003 Paris Tl. : 01 44 54 33 54 - Fax : 01 44 54 33 59 E-mail : [email protected] Site : http ://www.jbhsante.fr Directeur de la publication : Dr Jacques HALIMI Secrtariat Gnral de rdaction : Yalle ELBAZ Maquette : Clmence KINDERF Service commercial : Nathalie BOREL Abonnements : Louise ASCOLI

S u r fa c e o c u l a i r e

52 55

Lallergie oculaire : mise au point et perspectives en 2011 M. Touati, S. Doan

Sym pos i u mOCT Spectral Domain /Spectralis 2011 Valrie Le Tien

21,35,41,58 Agenda 56,57 Rencontres... 5 Abonnementlment joint : 1 jet B+L

Imprimerie GYSS ISSN : 1274-5243 Commission paritaire : 0112 T 81079 Dpt lgal : 2me trim. 2011

Les articles de Rflexions Ophtalmologiques refltent lopinion des auteurs et nengagent en aucune faon la responsabilit de la Socit ditrice. Aucun article publi dans ce numro ne peut tre reproduit quels que soient la forme et les procds sans lautorisation expresse de lditeur.

Adhrent au CESSIM

N145 - Tome 16 - mai 2011 - RfleXions Ophtalmologiques

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Dossier

R E CO N ST R U C T I O N D E L A S U R FA C E O C U L A I R E

Cultures de cellules souches pithliales : un espoirC a ro l e B u r i llo nS e r v i c e d O p h t a l m o l o g i e , H p i t a l E . H e r r i o t - Ly o n

rsumLa culture de cellules souches limbiques autologues dans les dficits en cellules souches sest dveloppe il y a plus de 10 ans sous limpulsion dquipes japonaise et italienne. Elle a prouv son efficacit mais la technique de culture nest pas uniformise et demande des impratifs de culture et de validation des cellules qui bloquent sa diffusion . Les cellules souches pithliales proviennent du limbe controlatral lorsquil est sain, mais galement de lpithlium de la muqueuse orale lorsque le dficit en cellules souches limbique est bilatral. Le feuillet pithlial reconstitu doit contenir des cellules prognitrices et des cellules prsentant des marqueurs de lpithlium cornen. Nous prconisons la culture de ces cellules sur un polymre thermosensible qui saffranchit du traitement enzymatique pour transfrer le feuillet sur la corne et qui conserve la membrane basale assurant une meilleure adhsion au stroma sans suture. Ainsi, les cultures ex vivo de cellules souches pithliales autologues permettent de reconstituer la surface cornenne dans la majorit des cas et denvisager la ralisation dallogreffe de corne dans un second temps avec un risque de rejet rduit.

mots-clsCellules souches pithliales, Limbe, Muqueuse orale, Feuillet pithlial

a surface oculaire est couverte par un pithlium squameux stratifi et non kratinis au niveau de la conjonctive, du limbe et de la corne ; ces pithliums sont adjacents mais avec des phnotypes distincts (1, 2). Ces couches cellulaires protgent lil des agents pathognes, des invasions par les corps trangers et de la scheresse et apportent une qualit optique essentielle. La couche basale de lpithlium limbique se situe dans la zone transitionnelle entre la corne et la conjonctive et contient les cellules souches de lpithlium cornen (3, 4) appeles cellules souches limbiques (CS limbiques). Elles assurent le renouvellement de lpithlium cornen en gnrant des cellules damplification transitoires (TA) qui migrent de faon centripte partir de la couche basale limbique vers la couche basale de la corne (5, 6, 7). Les cellules souches limbiques peuvent tre partiellement compltement dtruites lors de traumatismes svres ou de maladies oculaires graves telles que le syndrome de Stevens-Johnson, le pemphigus oculaire ou les brlures thermiques ou chimiques. Il sensuit un envahissement de la corne par les tissus conjonctifs adjacents accompagns dune vascularisation et de lopacification de la corne conduisant une perte de la vue (8). Ces pathologies reprsentent les dficiences en cellules souches limbiques . Aucune greffe de corne nest alors possible en raison dun rejet rapide. Les patients souffrant dun dficit pithlial limbique peuvent tre traits par une transplantation de limbe autologue (9, 10), mais elle nest possible que lorsquil reste suffisamment de limbe (cest--dire en cas de dficience unilatrale). De plus, le limbe rsiduel doit tre prserv sur loeil valide pour ne pas entraner de dficit secondaire au prlvement. Or il faut prlever environ 70 80 darc de cercle de limbe Figure 1 : Pr-op (squelles de brlure la chaux) pour tre efficace. Il ne faut pas non 6 mois post-greffe de cellules souches pithliales orales

L

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Cultur es de cellules souches pithliales : un espoir

Figure 2 : K3= cellules pithliales P63= cellules prognitrices Evaluation de la qualit du feuillet pithlial greff in vitro

Figure 3 : Greffe de corne 18 mois aprs la greffe de cellules souches pithliales orales

Figure 4 : Histo du bouton cornen 18 mois aprs la greffe de cellules souches pithliales orales : Epithlium stratifi de bonne qualit

plus perforer lil sain, ce qui nest pas exceptionnel sil a t ls par laffection initiale et que lon a sous-estim lpaisseur limbique avant le prlvement. Une autre technique possible est la greffe de limbe allognique provenant de donneurs dcds. Elle peut conduire un rejet pithlial et ncessite donc la prise dun traitement immunosuppresseur avec de la ciclosporine orale nuisant la qualit de vie des patients, sans tre entirement garantie long terme : le taux de succs retrouv dans la littrature varie de 20% 60% 1 an. De plus, les taux de succs diminuent graduellement avec le temps (7, 11, 12).

Face aux contraintes et aux taux de succs rduit de la greffe de limbe, lutilisation clinique dpithliums obtenus par la culture ex vivo de cellules souches limbiques autologues pour amliorer les rsultats de la reconstruction de la surface oculaire a t dveloppe rcemment. La culture de cellules pithliales autologues a t ralise sur diffrents supports tels que le collagne, les membranes amniotiques (13, 14, 15), les gels de fibrine (16), et les gels de fibronectine et de fibrine rticuls (17). On observe que les membranes amniotiques sont le support le plus utilis, et donnent un succs total au mieux de 50%. Un seul essai sur la fibrine a donn 100% de succs, mais il diffrait des autres par le fait que lexplant tait non pas la biopsie native du limbe, mais un pithlium pralablement spar de son stroma par un traitement la dispase facilitant la mobilit des CSL. Cependant, quelque soit lessai, aucun contrle phnotypique ou de fonctionnalit na t effectu pour vrifier la qualit du greffon avant la greffe. Un nouveau procd de culture cellulaire a ainsi t dvelopp de faon parer ces inconvnients des supports jusque l utiliss : il sagit de la culture sur polymre de type UpCell qui prsente deux avantages : Lextraction des cellules pithliales, permet deffectuer, avant la greffe, des contrles de fonctionnalit et des contrles phnotypiques indispensables pour certifier la prsence des cellules ncessaires pour remplacer lpithlium cornen malade. Pour transfrer le feuillet, cette technologie permet de saffranchir du traitement enzymatique et de conserver la membrane basale et par l mme dassurer une meilleure adhsion au stroma sans suture, avec un maintien temporaire par une lentille de contact. Les services de lHpital Edouard Herriot Lyon, du Dr Odile Damour (banque de tissus et Cellules) pour la culture et du Pr Carole Burillon (ophtalmologie, dpartement de la corne) pour la slection et la chirurgie des patients ont dvelopp cette nouvelle technique qui a t initie au Japon par Nishida (18). La technique de culture innovante est base sur lutilisation dun polymre thermosensible (technologie UpCell) et permet la transplantation dun pithlium sans support, ce qui permet de rsoudre les problmes des supports comme la membrane amniotique ou la fibrine (problmes infectieux, sutures) et daugmenter les chances de russite. Les cellules sont cultives sur un insert de culture la surface duquelle est greff de manire covalente un polymre poly(N-isopropylacrylamide) (PIPAAm). Ce polymre intelligent est sensible aux variations de temprature : 37C, ce polymre est dshydrat ce qui facilite et permet ladhsion des cellules ; une temprature infrieure 32C, la surface shydrate rapidement et gonfle, entranant ainsi le dtachement du feuillet pithlial intact et vitant ainsi le recours des traitements par des enzymes protolytiques. Les cellules pithliales confluentes peuvent alors tre rcoltes en un feuillet intgre

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Cultur es de cellules souches pithliales : un espoir

conservant les jonctions intercellulaires ainsi que les jonctions entre les cellules et la membrane basale no synthtise. Le transfert est ais et ne ncessite pas de support. Grce la membrane basale prserve, le feuillet transparent adhre rapidement au stroma cornen et permet une adhsion rapide des feuillets transplants sans suture. Ainsi, si les deux yeux sont touchs, lutilisation de cellules pithliales provenant de la muqueuse orale du patient (par prlvement de la muqueuse sous anesthsie locale) va permettre en trois semaines de reconstituer un feuillet pithlial in vitro : ce feuillet devra possder un ratio de cellules produisant des clones larges et rguliers tmoignant de la prsence des cellules souches et sera constitu de cellules pithliales caractriss par des marqueurs identifiant lpithlium cornen (K3/75) la membrane basale (laminine 5), et la prsence de cellules prognitrices (p63, 1 intgrine). Il sagit dun feuillet de cellules cultives de 12 mm de diamtre, dlivrs dans du milieu Dubelco Modified Eagle Medium. Un premier essai clinique en tude prospective, monocentrique et non comparative a dbut en octobre 2007 au CHU de Lyon, lHpital Edouard Herriot, et les rsultats de 26 patients avec un an de recul sont en cours de publication (IOVS) : la reconstruction dun pithlium cornen de bonne qualit est obtenue dans 64% des cas avec un bnfice en terme de symptomatologie perue dans 100% des cas par le patient. Aucune autre tude de ce type na t conduite en Europe jusqu ce jour.

ralisation dans nos services (autorisation en 2008) et devrait aboutir aux mmes rsultats. Lquipe italienne de Rama et Pellegrini vient de publier ses excellents rsultats concernant la culture de cellules limbiques dans les atteintes cornennes strictement unilatrales (19). Le geste chirurgical ncessite la dissection superficielle de lpithlium pathologique prsent la surface de lil. Cest ce geste et non la greffe de lpithlium qui est en cause lorsquil y a des complications telles que linflammation facilite par la prsence de no-vaisseaux et prvenue par un traitement antiinflammatoire local prophylactique associe une corticothrapie gnrale systmique, lhmorragie sous le film pithlial en relation avec une hmostase insuffisante durant la dissection car les vaisseaux sanguins sont trs prsents dans lpaisseur de la corne ; dans ce cas, la non-adhrence du film pithlial est possible. La perforation de la corne est un risque potentiel si lpaisseur de la corne du patient est sur-value par le chirurgien ou si la pathologie initiale atteint le stroma en profondeur. Dans ce cas exceptionnel, une greffe de corne ou de membrane amniotique sera effectue en urgence. Au total, les risques encourus par le patient et lis ladministration de cellules souches pithliales cultives laide du process UpCell sont ngligeables au regard des bnfices escompts. La reconstruction dune surface pithliale de bonne qualit permet denvisager la ralisation dune greffe de corne sans risques de rejet et la rhabilitation de ces patients souvent jeunes dans la socit active.

>

> Sil reste suffisamment de limbe sain sur lil le moins touch, la culture de cellules limbiques controlatrales sur le mme support peut tre possible. Un PHRC est en cours deRFRENCES

Conflits dintrts : aucun

1-Thoft RA, Friend J. Biochemical transformation of regenerating ocular surface epithelium. Invest Ophthalmol Vis Sci. 1977;16:1420. 2-Wei ZG,Wu RL, Lavker RM, et coll. In vitro growth and differentiation of rabbit bulbar, fornix, and palpebral conjunctival epithelia: implications on conjunctival epithelial transdifferentiation and stem cells. Invest Ophthalmol Vis Sci. 1993;34:181418283-Schermer A, Galvin S, Sun TT. Differentiation-related expression of a major 64K corneal keratin in vivo and in culture suggests limbal location of corneal epithelial stem cells. J Cell Biol. 1986;103:49 62.

4-Cotsarelis G, Cheng SZ, Dong G, et coll. Existence of slow-cycling limbal epithelial basal cells that can be preferentially stimulated to proliferate: implications on epithelial stem cells. Cell. 1989;57:201209 5-Thoft RA, Friend J. The X, Y, Z hypothesis of corneal epithelial maintenance. Invest Ophthalmol Vis Sci. 1983;24:14421443. 6-Kinoshita S, Friend J, Thoft RA. Sex chromatin of donor corneal epithelium in rabbits. Invest Ophthalmol Vis Sci. 1981;21:434441. 7-Tsubota K, Satake Y, Kaido M, et coll. Treatment of severe ocular surface disorders with corneal epithelial stem-cell transplantation. N Engl J Med. 1999;340:16971703. 8-Shapiro MS, Friend J, Thoft RA. Corneal re-epithelialization from the conjunctiva. Invest Ophthalmol Vis Sci. 1981;21:135142. 9-Kenyon KR, Tseng SC. Limbal autograft transplantation for ocular surface disorders. Ophthalmology. 1989;96:709722;722723. 10-Muraine M, [Amniotic-membrane and limbic stem-cell transplantation in the management of ocular burns]. J Fr Ophtalmol., 2004, 27(10):1179-1190 11-Samson CM, Nduaguba C, Baltatzis Set coll. Limbal stem cell transplantation in chronic inflammatory eye disease. Ophthalmology. 2002;109:862868.Nishida K.Tissue engineering of the cornea. Cornea. 2003;22: S28S34. 12-Rao SK, Rajagopal R, Sitalakshmi G, et coll. Limbal allografting from related live donors for corneal surface reconstruction. Ophthalmology. 1999;106:822828. 13-Tsai RJ, Li LM, Chen JK. Reconstruction of damaged corneas by transplantation of autologous limbal epithelial cells. N Engl J Med. 2000;343:8693. 14-Koizumi N, Inatomi T, Suzuki T, et coll, Cultivated corneal epithelial stem cell transplantation in ocular surface disorders. Ophthalmology. 2001;108:15691574 15-Shimazaki J, Aiba M, Goto E et coll. Transplantation of human limbal epithelium cultivated on amniotic membrane for the treatment of severe ocular surface disorders. Ophthalmology. 2002;109:12851290. 16-Rama P, Bonini S, Lambiase A, et coll. Autologous fibrin-cultured limbal stem cells permanently restore the corneal surface of patients with total limbal stem cell deficiency. Transplantation. 2001;72:14781485. 17-Han B, Schwab IR, Madsen TK, et coll. A fibrin-based bioengineered ocular surface with human corneal epithelial stem cells. Cornea. 2002;21:505510. 18-Nishida K, Yamato M, Hayashida Y, et coll. Corneal reconstruction with tissue-engineered cell sheets composed of autologous oral mucosal epithelium. N Engl J Med. 2004;351:11871196. 19-Rama P, Matuska S, Paganoni et coll, Limbal stem-cell therapy and long-term corneal regeneration. N Engl J Med, 2010, 363:147-55

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N145 - Tome 16 - mai 2011 - RfleXions Ophtalmologiques

Dossier

Greffes de membranes amniotiques : mode demploiD a v i d To u b o u l- PH, CRNK, CHU de Bordeaux

rsumLa greffe de MA permet dapporter des facteurs trophiques de la cicatrisation et possde une fonction tectonique intressante pour la gestion des agressions aigus ou chroniques de la surface oculaire. Les modalits de sa mise en place sont guides par la causalit de la lsion. Le mode greffe mono ou multicouches vise lintgration dfinitive de la MA dans larchitecture cornenne, le mode patch utilise plutt la MA comme rservoir de facteurs trophiques. De nombreux adjuvants sont utiles pour encadrer le succs de son utilisation. Les indications opratoires sont nombreuses, essentiellement reprsentes par les brlures, les dcompensations bulleuses et les ulcres cornens. Lutilisation comme substrat pour lexpansion de cellules souches semble tre aussi une application judicieuse pour lavenir.

IntroductionLes greffes de membranes amniotiques (MA) sont devenues populaires en France depuis une bonne dcennie. Leur place dans larsenal thrapeutique est prsent relativement bien codifie. Ce bref article vise un rappel sur les modalits chirurgicales et les principales indications de cette technique.

Dfinition histologiqueLe ftus flotte dans un sac amniotique raccord au placenta. Il est compos dun pithlium pavimenteux mono-stratifi simple sous-tendu par une membrane basale riche en rticuline et un tissu conjonctif dense adhrent au stroma chorial qui se clivera au moment de la dlivrance.

Proprits biologiquesLe greffon de MA est une structure avasculaire et nest donc pas rejete par le systme immunitaire. Sa conservation - 80 C entrane une destruction majeure de ses cellules pithliales, seule la membrane basale garde ses proprits biomcaniques. Diffrents mdiateurs trophiques et facteurs de croissance sont retrouvs dans son chorion qui agit en pratique comme un rservoir qui dlivrerait progressivement ses principes actifs. Lapplication de la membrane basale sur une surface oculaire despithlialise donne un support sain pour la croissance dventuelles cellules souches. Ce support assure une migration cellulaire pithliale dirige et devient le promoteur de la synthse dun tissu conjonctif de soutien noform. Le plus souvent, le tissu greff disparat en quelques semaines et sintgre finalement dans le processus de cicatrisation. La MA possde aussi une rsistance lastique intressante pour le comblement des ulcrations.

mots-clsGreffe, Membrane amniotique, Corne, Limbe, Cicatrisation, Ulcre, Surface

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N145 - Tome 16 - mai 2011 - RfleXions Ophtalmologiques

Gr ef fes de membranes amniotiques : mode demploi

Mthode de prparation et dapplication (Figure 1)Le prlvement est encadr par une lgislation calque sur celle des greffes de cornes. Le don de placenta est possible aprs consentement clair, acceptation des contraintes de scurit et de traabilit, au dcours dun accouchement programm par csarienne. Les membranes sont clives du placenta, dcontamines et dcoupes en 20 30 carrs de 4 cm de ct appliqus, face stromale contre un support de nitrocellulose. Ils seront cryo-conservs - 80C pendant la priode de quarantaine et avant validation. Les srologies demandes sont : HIV, Ag p24, HTLV 1-2, HCV, HBV, Syphilis. Plusieurs contrles bactriologiques, fongiques et histologiques rythment la prparation du greffon avant conglation. Le jour de la greffe, la membrane se dcongle en 30 minutes temprature ambiante. La membrane est dtache de son film de nitrocellulose et est le plus souvent ajuste la surface oculaire face pithliale (lisse) vers le haut, face stromale (collante) contre lil. Le dbridement pithlial au del de laire de la greffe est important si lon souhaite favoriser la croissance du no pithlium des berges saines de la corne par dessus le greffon de MA visant une fonction de pseudo Bowman pour la cicatrisation. La suture est ralise au nylon 10/0 par des points spars. Certains oprateurs utilisent une colle biologique uniquement ou en association. La dissociation des deux produits de polymrisation est souhaitable afin dobtenir un collage rgulier. Ainsi, la MA pose lenvers et rcline en dehors de la zone couvrir, reoit une goutte de produit puis est bascule par une de ces extrmits sur le tissu recouvrir qui a pralablement reu la goutte du produit complmentaire. La raction chimique de rticulation est obtenue en quelques secondes, les plis sont lisss laide dune spatule mousse. La chirurgie des greffes de MA est le plus souvent peu douloureuse et peux tre ralise sous anesthsie topique si lil nest pas trop inflammatoire. Les risques sont minimes en dehors dun contexte infectieux sous-jacent. Il existe trois modes dapplication sur la corne (Figure 2)

Figure 1 : A-B /Conditionnement de la MA partir du placenta. C/Histologie de la MA. D/MA pose en mode comblement multicouches-greffe pour ulcre trophique central. E/MA pose en mode patch avec une seule suture priphrique en surjet pour kratoconjonctivite sche sevre post kratoplastie transfixiante.

Figure 2 : Modalits dutilisations chirurgicales des MA pour la corne.

Les MA ont aussi t proposes pour le traitement des pathologies de la conjonctive comme les symblpharons, la prvention de la rcidive des ptrygions. Le traitement postopratoire comporte une antibio-prophylaxie pendant 1 mois. Une lentille de contact souple est le plus souvent positionne en fin dintervention pour plaquer et protger le tissu pendant quelques jours. Les points sont enlevs entre le 15me et 30me jours postopratoire. La technique est rversible et reproductible plusieurs fois. De trs rares cas de ractions immuno-allergiques ont t dcrites au cours dune deuxime greffe. Les greffes de MA sont souvent associes des mesures adjuvantes : collyres anti inflammatoires, lubrifiants, bouchons matiques, ciclosporine, srum sanguin autologue, lentille de contact pansement, greffes limbiques, greffe de muqueuse buccale, lambeau conjonctival, colle biologique, colle cyanoacrylate, PTK.

La patch ou overlay : recouvrement de la zone traiter limage dune lentille pansement. La greffe ou inlay : mise en continuit de la membrane avec lpithlium sain environnant par ablation mcanique de la surface dficiente. Le comblement : mise en place de plusieurs couches de membrane superposes au lieu dune perte de substance stromale, greffe par dessus.

N145 - Tome 16 - mai 2011 - RfleXions Ophtalmologiques

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Gr ef fes de membranes amniotiques : mode demploi

Une autre utilisation, plus rcemment dveloppe, utilise la MA comme support la croissance dexpansions cellulaires in vitro destines traiter les dficit en cellules souches limbiques. (Cf. article du Pr C. Burillon). Lvolution dans le temps de la greffe de MA se fera selon 3 modalits :

Intgration : La MA reste en place, un voile opalescent est visible sous lpithlium cicatris. Cest le cas pour les yeux peu inflammatoires et le mode multicouches. Le patient doit tre inform du caractre opaque de la membrane et de la baisse de vision quil va ressentir. Perte ou Dislocation : Disparition brutale de la MA. Des lambeaux restent souvent visibles sur les points dattaches. Cest le cas lors dun dfaut de fixation ou dun arrachement lors dun frottement mcanique. Consommation : disparition progressive et totale de la MA. Le plus souvent dans les conditions inflammatoires. (Tableau 1)Tableau 1 : Prcisions sur les principales indications de lutilisation des MA en ophtalmologie.

Les contre- indicationsElles sont rares, ont peut citer, les ulcres trop profonds et trop larges, les infections actives. Les rsultats sont souvent surprenants si lindication est bien pose et la technique opratoire bien effectue. Par exemple, poser la MA en mode patch pour combler un ulcre trophique est souvent infructueux car lpithlium cornen ne peux pas prendre la MA comme support pour cicatriser. Cette approche serait en revanche bnfique pour les krato-conjonctivites sches svres pour lesquelles le respect de lpithlium est essentiel. (Figure 1)

ConclusionLa greffe de MA est un outil de reconstruction de la surface oculaire trs utile. Son usage doit tre raisonn en fonction des objectifs dun plan de cicatrisation dirig tabli au cas par cas en fonction de la nature de la lsion traiter. Il saccorde souvent avec de nombreuses mesures associes dont le choix permet doptimiser les bienfaits de ce don tissulaire.Conflits dintrts : aucun

RFRENCES1. Chan E, Shah AN, Obrart DP. "Swiss Roll" Amniotic Membrane Technique for the Management of Corneal Perforations. Cornea. 2011 Mar 23. 2. Nubile M, Dua HS, Lanzini M, Ciancaglini M, Calienno R, Said DG, Pocobelli A, Mastropasqua R, Carpineto P. In Vivo Analysis of Stromal Integration of Multilayer Amniotic Membrane Transplantation in Corneal Ulcers. Am J Ophthalmol.2011 Feb8. 3. Dekaris I, Mravici I, Barisi A, Draca N, Pauk M. Amniotic membrane transplantation in the treatment of persistent epithelial defect on the corneal graft. Coll Antropol. 2010 Apr;34 Suppl 2:15-9. 4. Asoklis RS, Damijonaityte A, Butkiene L, Makselis A, Petroska D, Pajaujis M, Juodkaite G. Ocular surface reconstruction using amniotic membrane following excision of conjunctival and limbal tumors. Eur J Ophthalmol. 2010 Dec 22. 5. Fu Y, Gregory DG, Sippel KC, Bouchard CS,Tseng SC.The ophthalmologist's role in the management of acute Stevens-Johnson syndrome and toxic epidermal necrolysis. Ocul Surf. 2010 Oct;8(4):193-203. 6. Tandon R,Gupta N,Kalaivani M,Sharma N,Titiyal JS,Vajpayee RB.Amniotic membrane transplantation as an adjunct to medical therapy in acute ocular burns. Br J Ophthalmol.2011 Feb;95(2):199-204. 7. Mannan R, Pruthi A, Rampal U. Combined phototherapeutic keratectomy and amniotic membrane grafts for symptomatic bullous keratopathy. Cornea. 2010 Oct;29(10):1207-8 8. Fish R, Davidson RS. Management of ocular thermal and chemical injuries, including amniotic membrane therapy. Curr Opin Ophthalmol. 2010 Jul;21(4):317-21. 9. Okada H, Tawara A, Kubota T, Nagumo H. Amniotic Membrane Transplantation for Repair of Leaking Glaucoma Filtering Blebs with Scleral Perforation. Ophthalmic Surg Lasers Imaging. 2010 Mar 9:1-4. 10. Shay E, Khadem JJ, Tseng SC. Efficacy and limitation of sutureless amniotic membrane transplantation for acute toxic epidermal necrolysis. Cornea. 2010 Mar;29(3):359-61.

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R E CO N ST R U C T I O N D E L A S U R FA C E O C U L A I R E

Traitement des symblpharonsFr a n o i s Th o u m a z e tS e r v i c e o p h t a l m o l o g i e , C H U P e l l e g r i n / C l i n i q u e To u r n y , B o r d e a u x .

IntroductionLes symblpharons sont des brides qui se forment entre la conjonctive bulbaire et palpbrale. Ils sont lis une altration de la cicatrisation conjonctivale ou peuvent faire suite une altration de la jonction membrane basale/pithlium, un remaniement cicatriciel du tissus sous pithlial, ou une altration de composants spcifiques du tissu conjonctival. Nous citerons les diffrents modes dapparition et nous nous intresserons aux modalits de prise en charge.

EtiologiesTraumatiques : Les brlures thermiques ou chimiques par bases (figure 3) ou acides peuvent gnrer de graves adhrences rtractiles dans les culs de sac conjonctivaux.

>

> Infectieuses : Conjonctivites staphylococciques, fausses membranes, diphtrie, herps, zona et surtout le trachome et ladnovirus sont des pourvoyeurs de symblpharons avec une localisation plutt dans le cul de sac conjonctival infrieur. > Iatrogne : Des injections episclrales chronique et divers traitements topiques au long cour peuvent tre responsables de pseudopemphigodes . >Immunologiques :

CliniqueIl sagit dune affection particulirement grave pouvant aller jusqu' la symphyse de la conjonctive tarsale et bulbaire (ankyloblpharon). La classification de Tauber et Foster (1) est la meilleure classification clinique des symblpharons: > Stade 1 : la conjonctive est rythmateuse avec des adhrences et des synchies. > Stade 2 : des brides diminuent la profondeur des culs de sac conjonctivaux. > Stade 3 : apparition des symblpharons proprement dit. > Stade 4 : accolement des paupires et impossibilit douverture des yeux (ankyloblpharon). (Figures 1 et 2).

Dermatoses et maladies auto-immunes sous pithlialeet intra pithliales: elles sont lies lapparition dautoanticorps dont les cibles antigniques concer nent les pitopes de nombreuses molcules de complexe de jonction. La pemphigode cicatricielle est la cause la plus frquente. Maladies systmiques et atteinte de la conjonctive bulbaire : maladies rhumatismales, vascularites et maladies de systme.

mots-clsSymblpharons, Maladie auto-immune, Autogreffe muqueuse, Immunosuppression

Figures 1 et 2 : Ankyloblpharon lors dune pemphigode bulleuse.

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Traitement des symblphar ons

Figure 3 : Symblpharon suprieur majeur il droit, post brlure par base. Empreinte de lil sur la paupire.

Figure 4 : rsultat aprs de multiples greffes de membranes amniotiques et une greffe de muqueuse buccale et chirurgie du ptosis squellaire.

Autres : La maladie du Greffon Versus Hte, Maladies dutissu lymphode associes aux muqueuses (Lymphome de MALT), LOGIC syndrome congnital.

TraitementMdicalIl est simple lors de la pathologie iatrogne par arrt du traitement incrimin. Lors de traumatismes et brlures, le lavage des culs de sac, les collyres (antibiotiques, cortisoniques, dimticone) et les larmes artificielles ainsi que le recours des conformateurs peuvent amliorer et prvenir la gravit des symblpharons cicatriciels. Lors de la pemphigode cicatricielle les alternatives thrapeutiques sont les immunosuppresseurs (cyclophosphamide, mthotrexate, azathioprime), la corticothrapie gnrale, presque abandonne, on lui prfrera la corticothrapie locale au dbut, la ciclosporine topique ou gnrale.

Autogreffe de muqueuse conjonctivale : selon ltiologie et la gravit, soit le lambeau de rotation pdicul de conjonctive dun fornix lautre, soit une plastie en Z conjonctivale pour de symblpharons externes, soit un lambeau de glissement vers le bas et laisser une sclre nue sur 3 ou 4 mm de haut. Enfin on peut raliser sur de plus larges adhrences une autogreffe de muqueuse conjonctivale prleve dans le culde-sac controlatral. G re ff e d e m u q u e u s e b u c c a l e (Figure 4) p e r m e t u n prlvement de surface plus importante. Le prlvement est gnralement effectu au dessus du sillon labial ou en pleine joue sur la muqueuse jugale. Greffe autologue de muqueuse nasale (2) a t dcrit avec succs pour des brlures chimiques, physiques et un Steven Johnson. Greffe de muqueuse prputiale (3) en dernier recours aprs chec de greffes de membranes amniotique et muqueuses buccales rptes.Conflits dintrts : aucun

Que retenirLa prvention du symblpharons passe par une prise en charge prcoce et multidisciplinaire. Lautogreffe de muqueuse conjonctivale ou buccale reste performante. Laffection est particulirement grave au cour de la pemphigoide cicatricielle o les patients sont menacs de ccit en labsence de traitement.

ChirurgicalLobjectif de cette prise en charge est de rtablir la profondeur des culs de sac conjonctivaux afin damliorer la mobilit oculaire et la fonction visuelle par une meilleure rhabilitation de la surface oculaire. Prise en charge du trichiasis afin de limiter linflammation conjonctivale et lincidence des complications cornennes. Occlusion des points lacrymaux par des bouchons matiques ou cautrisation pour des tests de Schirmer infrieur 2 mm. Traitement des entropions en repositionnant la lamelle antrieure. Chirurgie des ulcrations et perforations cornennes : La Colle cyanoacrylate pour de ulcres de moins de 1mm, ou des greffes de membrane amniotique (inlay), des patches (overlay) ou des greffes en multicouches (filling) selon lindication, sont dcrites pour la gestion des ulcres cornens.

RFRENCES1. Tauber J. Ocular cicatricial pemphigoid. Ophthalmology. 2008 Sep;115(9):1639-40; author reply 1640-1. No abstract available.PMID: 18762085 [PubMed - indexed for MEDLINE] 2. Chun YS, Park IK, Kim JC.Technique for autologous nasal mucosa transplantation in severe ocular surface disease.Eur J Ophthalmol. 2011 Feb 9. pii: 803E2681-8966-4EA6-9B4E-1A505D7C8E70. 3. Lee JH, Sa HS, Woo K, Kim YD. Prepuce Mucosal Graft for Forniceal and Conjunctival Sac Reconstruction in Surgically Intractable Symblepharon. Ophthal Plast Reconstr Surg. 2010 Oct 20.

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R E CO N ST R U C T I O N D E L A S U R FA C E O C U L A I R E

Verres de contact appui sclral : quand et commentFlo re n c e J o u r da nPraticien attach des Hpitaux de Marseille

rsumLes verres appui sclral sans contact cornen existent depuis fort longtemps (Fick-1888), et, aujourdhui, ils sont devenus particulirement performants grce lutilisation des matriaux trs haut Dk (permabilit loxygne). Ils sont une solution souvent inespre pour certains patients fortement handicaps par des dlabrements de la surface cornenne et chez qui tout a t tent sans bnfice suffisant. Ils permettent, de part leur gomtrie, de protger les cornes malades des agressions extrieures et de replacer les pithliums bims dans un milieu liquidien bienfaisant. Leur bnfice est la fois antalgique, optique et thrapeutique.

IntroductionDans les pathologies responsables de destruction de la surface oculaire, il arrive quaucun traitement ne permette de soulager la douleur, la photophobie, ni de restaurer lintgrit de lpithlium cornen. Ladaptation dun verre appui sclral sans contact cornen et permable loxygne offre alors des possibilits de rcupration remarquables.

Cas cliniqueMme P- 43 ans-: Paralysie faciale droite post-radique (Sarcome dEwing) avec lagophtalmie et atteinte svre de la surface oculaire droite . Elle se plaint depuis 10 ans de brlures, photophobie, gne visuelle, trs handicapantes et sans traitement efficace. AV : 4/10 P10 LAF : Remaniement de lpithlium avec kratite dense, no-vaisseaux superficiels et profonds , paississement de la conjonctive bulbaire infrieure. (Figures 1 et 2)

mots-clsRservoir liquidien, Trs haut Dk, Protection mcanique, Pouvoir antalgique

Figure 1 : Paralysie faciale

Figure 2 : Orbscan montrant la destructuration cornenne

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Ver r es de contact appui sclral : quand et comment

Adaptation en lentille SPOTOD : M2 XO2 + 3 CxY + 1.75 AV : 9/10 P 1.5 LAF : gurison de la kratite Disparition des douleurs , des insomnies(port permanent), diminution des traitements adjuvants. Amlioration sensible de la qualit de vie personnelle et professionnelle.

Figure 3 : Les 3 tailles

Matriels et mthodeCaractristiques des SPOTLa SPOT est une grande lentille rigide en fluoro-silico-acrylate qui lui confre une trs grande permabilit loxygne (Dk entre 100 et 140 db). Elle est fabrique par tournage nanomtrique sur chane numrise avec une excellente reproductibilit. Elle existe en 3 diamtres (16,17,18 mm) pour sadapter aux diffrentes ouvertures palpbrales, et en 10 profondeurs (1 10) par pas de 200 microns, compatibles avec des protrusions cornennes diverses. (Figure 3) Sa gomtrie est compose de 3 parties : une zone priphrique appui sclral, une zone de transition limbique et une zone optique qui passe en pont au-dessus de la corne , sans la toucher. (Figure 4)

Figure 4 : Les 3 zones (photo Dr Delcampe)

Intrts des SPOTCes caractristiques lui confrent les qualits suivantes : Constitution dun rservoir liquidien pr-cornen permettant l p i t h l i u m c o r n e n d t re n o u v e a u h u m i d i f i e n permanence et favorisant la cicatrisation (Figure 5) Barrire mcanique protgeant la corne et limitant lvaporation des larmes Correction des aberrations optiques induites par les lsions cornennes Cette lentille est remarquable par son action antalgique, cicatrisante et optique . De plus elle est trs stable et son confort de port est quivalent celui dune lentille souple.

Figure 5 : Le rservoir liquidien pr-cornen(photo Dr Touvron)

Indications des SPOTCes lentilles apportent un bnfice physique et optique dans les patholgies de surface : (Figure 6) > Destructions inflammatoires ou non inflammatoires de la surface oculaire (Lyell, Stevens-Johnson, G.V.H. , Brlures) > Scheresse oculaire(Goujerot-Sjgren)

Figure 6 : G.V. H.

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Ver r es de contact appui sclral : quand et comment

Troubles trophiques de la surface oculaire Anomalies congnitales des paupires (Figure 7)

> >

Adaptation des SPOTLa 1 re lentille est choisie en fonction de la taille de louverture palpbrale et laspect de la protrusion cornenne Lexamen la LAF vrifie la distance entre la face postrieure de la lentille et la face antrieure de la corne. Elle doit tre quivalente 200 microns. (Figure 8) Linstillation de la fluorescine permet de valider la bonne circulation des larmes. (Figure 9) Ladaptation doit grer : les diffrentes formes dappui sclral, lventuelle formation de bulle ( proscrire), le ventousage , lhydrophobie et lencrassement de la surface de la lentille (Figure 10)

Figure 7 : Dysmorphie cranio-faciale

RsultatsLes patients quips avec ces lentilles SPOT dcrivent : une diminution de la douleur et de la photophobie , un allgement du traitement local (ciclosporine , serum autologue),une diminution du nombre dinstillation de larmes artificielles par jour, une augmentation de lacuit visuelle .

Figure 8 : Distance lentille-corne (photo Dr Touvron)

DiscussionCes effets aboutissent une amlioration considrable du confort de vie tant sur le plan physique que sur le plan psychique et motionnel, mme sil ne sagit que dun traitement palliatif. L t u d e d e l a b i b l i o g r a p h i e re j o i n t c e s c o n c l u s i o n s : > France : quipes de Rouen et de Paris Bichat 2009 : 39 patients Stevens-Johnson et Lyell B Tougeron-Brousseau, A Delcampe,J Gueudry, L Vera, S Doan, T Hoang Xuan, M Muraine Vision-related function after scleral lens fitting in ocular complications of Stevens-Johnson syndrome and toxic epidermal necrolysis. Am J Ophthalmol. 2009

Figure 9

Figure 11 : G.V. H. Figure 10

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Ver r es de contact appui sclral : quand et comment

> Etats-Unis, quipe de Boston (Rosenthal) 2000, 2003, 2007 (33 GVH) DS Jacobs, P Rosenthal. Boston scleral lens prosthetic device for treatment of severe dry eye in chronic graft-versus-host disease. Cornea 2007Les limites sont de 4 ordres : > Ladaptation ncessite une courbe dapprentissage pour le contactologue et un soutien logistique adapt > La manipulation par le patient est parfois laborieuse au dbut et peut ncessiter limplication de lentourage > Ncessit de rincer la lentille pour liminer laccumulation de dbris muqueux et pithliaux > Ltat dpressif de certains patients peut entraner lchec de ladaptation

Recommandations de la HAS (J.O.du 25.01.2011): Destruction de la surface cornenne :

Syndrome de Lyell, Stevens-Johnson Squelles de brlures oculaires Dgnrescence de Terrien (ectasie marginale de lacorne) Conjonctivite chronique avec destruction pithliale cornenne Kratopathie bulleuse. En cas dchec des traitements conventionnels (lubrifiants,ciclosporine).Encart 1

3 fabricants dans le monde

ConclusionLes SPOT, lentille rigides de haut Dk, appui sclral , sans contact cornen, fournissent un rservoir liquidien et une protection mcanique salvateurs pour les pithliums malmens. Elles ont de larges indications dans les pathologies de surfaces chez des patients trs motivs au dpart et trs satisfaits larrive par les rsultats magiques de ces lentilles. Cette technique ancienne connat un regain dintrt grce lutilisation des matriaux actuels trs permables loxygne.

Perry Rosenthal aux Etats-Unis, Ken Pullum en Grande-Bretagne, Frdric Bachel (L.A.O) en FranceEncart 2

La question du port permanent

Conflits dintrts : aucun

Port diurne = la rgle Dans certaines indications le port nocturne est ncessaire pour le succs thrapeutique (anomalies palpbrales , paralysies) 2 risques : => dme cornen => InfectionEncart 3

CONGRS JRO 2012

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Les 12 mes Journes de Rflexions OphtalmologiquesParis, Cit des Sciences et de lIndustrie

Jeudi 15, Vendredi 16 et Samedi 17 mars 2012Coordination scientifique : Christophe Baudouin (Paris) et Pierre-Yves Santiago (Nantes)

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R E CO N ST R U C T I O N D E L A S U R FA C E O C U L A I R E

Kratoprothses : indications et rsultats en 2011 ?Lo u i s H o f fa rtService d'Ophtalmologie, Hpital de la Timone, Marseille

rsumL'indication de la mise en place d'une kratoprothse est le dernier recours pour les patients atteints de ccit cornenne. Les pathologies cornennes svres ne pouvant bnficier ou ne relevant plus d'une allogreffe de corne constituent les indications de ces techniques chirurgicales. Les volutions des gnrations successives de kratoprothses permettent dobtenir des rsultats acceptables en termes de rsultats fonctionnels et de rtention de la prothse mais la kratoprothse idale est encore en devenir. Les kratoprothses diffrent selon les matriaux, la forme et le type de fixation. L'acte chirurgical est complexe, ralis en un ou plusieurs temps. Le bnfice pour le patient est parfois spectaculaire, les complications postopratoires ne sont pas exceptionnelles.

L

es ccits cornennes constituent une des principales tiologies de dficience visuelle (2.5 % des causes mondiales soit 8 millions de cas) aprs la cataracte, le glaucome et la dgnrescence maculaire lie l'ge. Lpidmiologie de la ccit cornenne est complexe car elle concerne un nombre important de pathologies oculaires infectieuses et inflammatoires lorigine dune perte de transparence cornenne. En Afrique, une atteinte cornenne lie au trachome est lorigine de 90 % des cas de ccits. Les traumatismes oculaires sont galement responsables de 1.5 2.0 millions de nouveaux cas de ccit cornenne chaque anne dans le monde. Dans les pays industrialiss, les checs de greffe de corne et les brlures oculaires sont les principales tiologies de ccit cornenne. Lallogreffe de corne a bnfici des progrs de la microchirurgie moderne et des traitements immunosuppresseurs. Cependant, le pronostic moyen et long terme est toujours conditionn la survenue dun rejet immunologique ou aux altrations inluctables de la fonction endothliale du greffon conduisant le patient nouveau vers la ccit. Une alternative thrapeutique pour ces patients, ne pouvant plus relever des procdures de greffe humaine conventionnelles, est alors envisageable par lutilisation dune corne artificielle ou kratoprothse. Remplacer une corne opaque par une lentille de verre fut voqu il y a plus de 200 ans par un Franais, Guillaume Pellier de Quengsy [1]. La meilleure connaissance des biomatriaux a relanc lintrt pour ces dispositifs au XXme sicle et des solutions peuvent tre proposes ces patients. Ces substituts peuventtre synthtiques (Boston Kpro, Alphacor), combiner une optique synthtique et un support biologique (osto-odonto-kratoprothse) ou tre intgralement biologiques par synthse tissulaire (collagne recombinant).

Les dispositifs disponiblesLa Boston Keratoprosthesis (Boston Kpro)Le dveloppement de la Boston keratoprosthesis (Dohlman-Doane) a dbut dans les annes 60 mais elle ne reu lagrment FDA quen 1992. Il sagit dune kratoprothse intgralement synthtique et constitue de Poly-Mthyl Mthacrylate (PMMA). Deux modles sont disponibles : le type I consiste en une optique de PMMA en bouton insre au centre dun greffon cornen et maintenue par une contreplaque en titane. Le type II prsente le mme mode dinsertion mais le cylindre optique prsente une longueur axiale accrue permettant de traverser la paupire suprieure et est indique dans les cas de syndromes secs majeurs (Figure 1). De nombreuses publications ont rapport les rsultats obtenus avec ce dispositif et

mots-clsKratoprothse, Greffe de corne, Ccit cornenne.

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Kratopr othses : indications et rsultats en 2011 ?

plus de 3500 prothses ont t implantes ce jour [2]. Le taux de rtention de la prothse est de lordre de 95 % 8.5 mois et de 90 % 24 mois [3]. Lacuit visuelle postopratoire 1 an est de 1/10 me ou mieux chez 56 % des patients et de 5/10 me ou mieux dans 27 % des cas. Les complications sont similaires celles associes aux kratoplasties dont principalement les membranes rtroprothtiques et lapparition dun glaucome secondaire. Le succs dune telle intervention est assur par une slection stricte des patients en excluant les atteintes de la surface oculaire par syndrome de Stevens-Johnson ou les cas de pemphigode oculaire cicatricielle.

LOsto-Odonto-Kratoprothse (OOKP)Cette technique a t dcrite en 1963 par Strampelli [4]. Elle utilise la propre canine et los alvolaire du patient afin de supporter un cylindre optique en PMMA (Figure 2). La procdure chirurgicale est effectue en 2 ou 3 phases successives spares de 4 6 mois : La premire phase consiste extraire une canine et son os alvolaire afin dy insrer le cylindre optique aprs fraisage. Le dispositif obtenu est alors plac dans une poche musculaire en regard de los malaire en dessous de lil controlatral. Une greffe de muqueuse buccale est ralise sur lil devant tre implant. La 2 me phase consiste en la fixation du complexe dent, os alvolaire et cylindre optique en dessous de la greffe de muqueuse buccale aprs kratectomie, iridectomie totale, extraction intracapsulaire du cristallin et vitrectomie antrieure. Lintrt de ce type de prothse est doffrir une jupe biologique vascularise (dent et os alvolaire) qui sintgre aux tissus receveurs permettant ainsi une survie prolonge et un taux dextrusion faible de la prothse. Les rsultats obtenus avec lOOKP prsentent le suivi clinique le plus long dans le domaine des kratoprothses. En 2005, Falcinelli [5] rapporta sa cohorte de 181 patients avec un suivi mdian de 12 ans (de 1 25 ans). La probabilit de rtention tait de 85 % 18 ans. Le taux de complications postopratoires svres est faible avec 6 % de cas dextrusion. Lacuit visuelle postopratoire se situe entre 4 et 8/10 me. LOOKP est la technique de rfrence en prsence dun syndrome sec svre.

Figure 1 : Kratoprothse de type Boston Kpro (Dohlman-Doane). ( gauche) Modle de type 1 et ( droite) modle de type 2, transpalpbral, indiqu dans les syndromes secs majeurs. Daprs [2].

LAlphacorIl sagit dune kratoprothse biocolonisable constitue dun polymre biocompatible, le poly(2-Hydroxythyl Mthacrylate) ou pHEMA, dont les proprits de transparence varient en fonction de son degr dhydratation, ce qui permet de mouler loptique centrale et la jupe poreuse priphrique en une pice unique sans jonction mcanique. Cette prothse prsente un diamtre de 7 mm pour une paisseur de 600 m. Deux modles sont disponibles : le type P pour patient phaque ou pseudo-phaque et le type A de puissance dioptrique suprieure pour patient aphaque et ne ncessitant donc pas dimplantation intra-oculaire complexe complmentaire. La technique chirurgicale comporte gnralement 2 phases : une premire phase dimplantation de la prothse au sein dune poche stromale antrieure de 300 m de profondeur, en regard dune trpanation de 3.5 mm de diamtre du stroma postrieur centre sur la pupille. Aprs un intervalle de 3 6 mois, une trpanation de 3 mm du capot cornen antrieur est ralise en regard de la trpanation postrieure exposant ainsi loptique (Figure 3). Les rsultats rapports dans la littrature comportent plus de 400 implantations avec un recul jusqu plus de 7 ans chez certains patients [6] . Nous avons lexprience de cette

Figure 2 : Kratoprothse de type Osto-odontokratoprothse (OOKP) Aspect postopratoire. (photographie personnelle)

Figure 3 : Kratoprothse de type Alphacor. Phase 1 ( gauche) : Alphacor insre dans une poche stromale ; Phase 2 ( droite) : trpanation du capot cornen superficiel exposant loptique de la kratoprothse. ( gauche) Aspect post-opratoire 1 mois aprs implantation.. ( droite) Coupe OCT montrant la kratoprothse implante au sein dune poche stromale. (iconographie personnelle).

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Kratopr othses : indications et rsultats en 2011 ?

kratoprothse au CHU de Marseille depuis 2009 et nous avons ralis ce jour 14 implantations. La meilleure indication de cette kratoprothse concerne les patients prsentant des rejets de greffe rptition avec une surface oculaire prserve et non inflammatoire. Les complications postopratoires sont essentiellement lies la survenue dune ncrose stromale de la corne rceptrice (54 % des cas) et lapparition dune membrane rtroprothtique (15 %). Le taux de rtention de la prothse 1 an est de 76.9 % dans notre srie ce qui est comparer aux 63 % de survie 1 an partir dune 2me allogreffe de corne [7].

partir de collagne humain recombinant. Les rsultats chez lanimal montrent une bonne intgration tissulaire, avec une recolonisation par les kratocytes et une rgnration des nerfs cornen. Ces substituts, en cours dvaluation chez lhomme, semblent intressants avec toutefois des rsultats encore infrieurs au greffons dorigine humaine [10].

ConclusionAu cours des dernires dcennies, des avances importantes dans le domaine des kratoprothses ont t ralises grce la meilleure connaissance des biomatriaux et lamlioration des techniques chirurgicales. Cependant, il persiste de nombreuses interrogations concernant les mcanismes biologiques dintgration, de ncrose ou de rsorption tissulaire associe limplantation dun implant cornen. De nombreux dispositifs ont t proposs mais peu restes disponibles pour les applications cliniques. LOOKP en prsence dun syndrome sec svre ou la Boston Kpro et lAlphacor en prsence dune surface oculaire prserve sont les principaux dispositifs disponibles et sadressent donc des indications bien distinctes. Des substituts cornens dvelopps par gnie tissulaire seront certainement disponibles dans un futur proche afin de palier au dficit mondial de greffons cornens, mais dans cette attente il y persistera encore de nombreux patients ne pouvant relever dune allogreffe et qui ncessiteront une implantation de kratoprothse.Conflits dintrts : aucun

De nouveaux conceptsDe nombreux groupes de recherche, motivs par la ncessit de trouver des substituts efficients aux greffons cornens humains, valuent de nouvelles approches avec lobjectif de dvelopper la corne artificielle idale. Bien que les progrs apports au design ou aux matriaux utiliss pour la ralisation des kratoprothses aient permis de minimiser les complications qui leurs sont associes, limplantation de ces dispositifs ncessite une ouverture de la chambre antrieure et les risques dinvasion pithliale, de fuite dhumeur aqueuse complique dendophtalmie et dextrusion restent relativement levs. Cest avec lobjectif dviter ces complications qua t conue la corne artificielle supra-descemtique (Keralia, Laboratoire Corneal). Cette prothse, dveloppe depuis le dbut des annes 90 [8], directement implante sur la membrane de Descemet aprs dissection lamellaire antrieure profonde a t value au cours dune tude europenne de phase I. Bien quelle prsentait chez lanimal une excellente biocompatibilit, chez lhomme les rsultats furent dcevants. Des modifications de cet implant devraient tre apports afin de permettre dobtenir des rsultats plus favorables. Des travaux sont galement poursuivis sur les biomatriaux, une quipe de luniversit de Standford dveloppe un nouvel hydrogel, dnomm Duoptix, avec des rsultats encourageants [9]. Une autre voie de recherche concerne le dveloppement de cornes artificielles intgralement biologiques et synthtises

Que retenir

Les kratoprothses sont indiques en cas de ccit cornenne bilatrale. Il ne doit pas co-exister dautre atteinte potentiellement ccitante : dcollement de rtine, maculopathie, glaucome En cas de syndrome sec, lOOKP reste la meilleure indication

RFRENCES1. Pellier de Quengsy G. Prcis ou cours d'oprations sur la chirurgie des yeux. D. Mequignon, Editor. 1789. p. 91. 2. Gomaa A, Comyn O, Liu C. Keratoprostheses in clinical practice - a review. Clin Experiment Ophthalmol 2010 Mar;38(2):211-24. 3. Aldave AJ, Kamal KM, Vo RC et coll. The Boston type I keratoprosthesis: improving outcomes and expanding indications. Ophthalmology 2009;116:640651. 4. Strampelli B, Valvo A, Tusa E. Osteo-odonto-keratoprosthesis in a case treated for anchylobepharon and total simbleraphon. Ann Ottalmol Clin Ocul 1965;91(6):462-79. 5. Falcinelli G, Falsini B,Taloni M et coll. Modified osteo-odonto-keratoprosthesis for treatment of corneal blindness: long-term anatomical and functional outcomes in 181 cases. Arch Ophthalmol 2005 Oct;123(10):1319-29. 6. Hicks CR, Crawford GJ, Dart JK et coll. AlphaCor: Clinical outcomes. Cornea. 2006 Oct;25(9):1034-42. 7. Bersudsky V, Blum-Hareuveni T, Rehany U et coll. The profile of repeated corneal transplantation. Ophthalmology 2001 Mar;108(3):461-9. 8. Espana E.M., Acosta AC, Stoiber J et coll. Long-term follow-up of a supradescemetic keratoprosthesis in rabbits: an immunofluorescence study. Graefes Arch Clin Exp Ophthalmol 2011 Feb;249(2):253-60. 9. Bakri A, Farooqui N, Myung D et coll. Biocompatibility of a hydrogel corneal inlay in vivo. Invest Ophthalmol Vis Sci 2006; 47: E-Abstract 3592. 10. Fagerholm P, Lagali NS, Merrett K et coll. A biosynthetic alternative to human donor tissue for inducing corneal regeneration: 24-month follow-up of a phase 1 clinical study. Sci Transl Med. 2(46): 46ra61.

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Rtine mdicale

Dystrophie pseudo-vitelliforme de ladulteViolaine Caillaux, Karim AtmaniService dOphtalmologie du Professeur Eric Souied - Centre Hospitalier Intercommunal de Crteil

a dystrophie fovo-maculaire de ladulte, ou pseudo-Best , ou dystrophie pseudovitelliforme, ou encore maladie de Gass, est une pathologie maculaire relativement rare, dcrite par Gass en 1974. Elle est dcouverte le plus souvent fortuitement, chez ladulte entre 35 et 55 ans, ou parfois devant un syndrome maculaire (baisse dacuit visuelle, mtamorphopsies, scotome relatif). Elle est caractrise par un dpt de matriel sous-rtinien rtro-fovolaire, le plus souvent bilatral, et dont lvolution se fait lentement vers latrophie centromaculaire. Il sagit dune entit distincte de la maculopathie vitelliforme de lenfant.

L

Cas cliniqueUn homme de 75 ans, se prsente en consultation pour une baisse dacuit visuelle bilatrale, prdominante droite, dinstallation progressive sur plusieurs annes. Il na ni scotome, ni mtamorphopsies. Lacuit visuelle est de 20/80 P6 droite et 20/40 P3 gauche. Lexamen biomicroscopique des segments antrieurs est normal. Lexamen du fond dil met en vidence une lsion fovolaire bilatrale, de petite taille (1/3 diamtre papillaire), lgrement surleve, jauntre avec des taches grises en son sein (Figures 1.1 et 2.1).

Sur les clichs monochromatiques, la lsion est bien visible en lumire verte et apparat attnue en lumire bleue. En outre, le clich en lumire bleue rvle la prsence de pseudo-drusen rticuls dans la rgion maculaire et en nasal de la papille. (Figures 1.2 et 1.3) Sur les clichs en autofluorescence, la lsion est hyperautofluorescente, aux bords bien limits (Figures 1.4 et 2.2). En angiographie la fluorescine, la lsion initialement hypofluorescente se colore progressivement avec une hyperfluorescence dbutant en priphrie, sans diffusion de colorant (Figure 1.5). En angiographie au vert dinfracyanine, la lsion est constamment hypofluorescente, bords nets (Figure 1.6). LOCT Spectral-Domain retrouve, droite comme gauche, une lsion rtro-fovolaire, hyper-rflective, en dme, situe au-dessus du plan de lpithlium pigmentaire et soulevant la rtine neurosensorielle, mais sans altrer les couches rtiniennes susjacentes. Il nexiste pas de signe exsudatif (Figure 1.7). Le diagnostic de dystrophie vitelliforme de ladulte sans complication novasculaire est pos.

une accumulation anormale, rtrofovolaire, de dpts de lipofuscine (matriel), qui confre la lsion son caractre hyperautofluorescent. Limagerie actuelle (OCT Spectral Domain notamment) permet de localiser avec prcision le matriel entre lpithlium pigmentaire de la rtine et la rtine neurosensorielle. Lhrdit de cette affection reste discute. Alors que certains auteurs suggrent une transmission a u t o s o m i q ue d o m i na n t e , d a u t re s soulignent que nombreux sont les cas sporadiques sans existence vidente dun schma de transmission hrditaire. Les lments cls du diagnostic reposent sur les caractristiques iconographiques du matriel vitelliforme : attnuation du matriel sur les clichs en lumire bleu, hyperautofluorescence du matriel, coloration progressive de la lsion en angiographie la fluorescine, hypofluorescence constante en angiographie au vert dinfracyanine. Lassociation des drusen miliaires ou des pseudo-drusen rticuls est frquente. Laffection est habituellement de bon pronostic. Lvolution est lente et se fait vers la dispersion (fragmentation) du matriel vitelliforme, puis vers latrophie centro-maculaire.

DiscussionLa dystrophie fovo-maculaire vitelliforme de ladulte est caractrise par

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Dystrophie

pseudo-vitelliforme

de

ladulte

Figure 2 : il gauche. Lacuit visuelle est de 20/40 P3. Laspect de la lsion est similaire celui de lil droit, sur le clich couleur (2.1) et sur le clich en autofluorescence (2.2).

L a c u i t v i s u e l l e a u m o m e n t d u diagnostic est souvent bien prserve (entre 6/10 et 8/10), puis elle se dgrade d e f a o n l e n t e e t p ro g re s s i v e , e n fonction du stade volutif, mais reste souvent compatible avec la lecture pendant de nombreuses annes. Des complications type de novascularisation chorodienne sont possibles. Elles doivent tre redoutes devant toute aggravation des mtamorphopsies ou de scotome central brutal. lexamen du fond dil des hmorragies rtiniennes ou un dcollement sreux rtinien pourront tre observs. Les angiographies la fluorescine et au vert dinfracyanine aideront au diagnostic mais les novaisseaux chorodiens peuvent tre difficiles diffrencier du matriel lui-mme. Il nexiste lheure actuelle aucun traitement pour cette pathologie. La chirurgie (translocation maculaire avec rtinotomie sur 360et exrse du matriel) est inefficace [7 et 8]. La photothrapie dynamique peut entraner la disparition du matriel et une restitution du profil fovolaire en OCT [9], mais na pas montr de bnfice visuel long t e r m e [ 9 , 1 0 e t 1 1 ] . L i n j e c t i o n i n t r a vitrenne de bevacizumab a t associe, dans deux cas [13 et 14], une amlioration morphologique de la rtine (diminution du dpt de matriel, rsorption du liquide sous-rtinien en OCT), mais sans amlioration fonctionnelle.

Figure 1 : il droit. Lacuit visuelle est de 20/80 P6. 1.1- Clich couleur : la lsion est fovolaire, jauntre, de petite taille. 1.2- Clich anrythre : la lsion est bien dlimite 1.3- Clich bleu : le materiel de surcharge apparat attnu. A noter la prsence de drusen pseudo-rticuls dans laire maculaire. 1.4- Clich en autofluorescence : le matriel vitelliforme est hyperautofluorescent. 1.5- Angiographie la fluorescine : Temps veineux (1.5.1) : hypofluorescence initiale du matriel par effet masque. Temps tardif (1.5.2): hyperfluorescence progressive dbutant par les bords de la lsion. 1.6- Angiographie au vert dinfracyanine : Temps moyen (1.6.1) et temps tardif (1.6.2) : la lsion est hypofluorescente sur toute la squence angiographique. 1.7- Tomographie en cohrence optique (coupe horizontale passant sur la fovola) : masse hyper-rflective en dme, rtro-fovolaire, localise entre lpithlium pigmentaire et la rtine neurosensorielle. La dpression fovale est compltement efface.

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Dystrophie

pseudo-vitelliforme

de

ladulte

La dystrophie vitelliforme de ladulte doit tre distingue de la dystrophie vitelliforme de Best (ou maladie de Best), dont elle se diffrencie par de multiples caractristiques : dbut tardif, mode de transmission incertain, symptmes modrs, lctro-oculogramme normal ou subnormal. La maladie de Best, dcrite en 1905, apparat chez lenfant, entre 5 et 10 ans. Elle est dcouverte loccasion dune baisse dacuit visuelle, fortuitement ou dans le cadre dune enqute familiale. Sa transmission se fait sur le mode autosomique dominant (gne VMD2).

Latteinte est bilatrale, caractrise au stade initial par la prsence dun disque vitelliforme au niveau de la macula (aspect duf sur le plat ). Llectro-oculogramme (EOG) est altr avec un rapport dArden infrieur 145%. LEOG permet le diagnostic prclinique puisquil peut tre anormal avant mme lapparition des lsions rtiniennes. Il nexiste aucun traitement pour la maladie de Best.

ConclusionLa dystrophie vitelliforme de ladulte doit tre voque devant la prsence dune lsion fovo-maculaire jauntre, souvent bilatrale, autofluorescente, correspondant un dpt de matriel sous-rtinien. Lacuit visuelle est souvent peu altre lors du diagnostic. Il nexiste pas de traitement pour cette affection, qui volue progressivement vers latrophie centro-maculaire. Plus rarement, une baisse dacuit visuelle brutale peut tre en rapport avec le dveloppement de novaisseaux chorodiens.Conflits dintrts : aucun

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O r b i t o - pa l p e b r a l

Prparation de la graisse autologue au vue dune lipostructure orbitaireE m i l i e M e r c , J e a n - Pa u l A d e n i sService dOphtalmologie CHU Dupuytren - Limoges

IntroductionLa correction de lenophtalmie reste encore et toujours ce jour un rel challenge pour lensemble des chirurgiens sintressant lorbite. Malgr les avances en matire de biomatriaux, les implants solides tels que les implants dHA-TCP (hydroxyapatite tricalcium phosphate) risquent de perturber la motilit oculaire, de compromettre la fonction neurovasculaire particulirement celle du nerf optique. Dans le cas dun matriel non autologue sajoute un risque supplmentaire, savoir celui dune ventuelle raction de rejet. Cest pourquoi, la lipostructure ou micro-fat grafting a rcemment connue un nouvel essor plaant le tissu graisseux comme le matriel autologue de choix pour la restauration des volumes de la face. Cette technique est surtout utilise en chirurgie plastique afin de redonner du volume en injectant la graisse en sous cutan. En ophtalmologie, elle est dcrite dans le traitement des creux palpbraux et du Post Enucleation Socket Syndrome (PESS) ou syndrome de lil viscr ou nucl avec dans ce cas, injection de graisse autologue en intra-orbitaire. Chirurgie reconstructrice souvent primaire, elle peut galement intervenir secondairement en complment dune premire prise en charge chirurgicale ayant conduit un rsultat insuffisant. Dans notre

exprience, elle donne de bons rsultats en complment de greffe dimplants dHA-TCP et plus particulirement de greffes dermo-graisseuses. Elle savre galement utile en cas dexpulsion dimplant dhydroxy-apatite ou de biocramique vitant ainsi un nouveau rejet.

transfert. Elle sera plus tard nomme lipostructure et publie en 1994. (1) Il existe deux thories concernant la recolonisation dune cavit par les adipocytes : la thorie des adipocytes survivants et la thorie du remplacement cellulaire par lhte. Evoque pour la premire fois en 1950 par Peers et ensuite prne par Coleman et dautres, la thorie des adipocytes survivants est actuellement reconnue par la majorit des auteurs.

Principes de la lipostructure ou technique de ColemanLa premire description de greffe de tissu adipeux autologue date de 1893 (NEURER) et de 1910 dun point de vue ophtalmologique pur (LAUBIER). Toutefois, du fait dune rsorption graisseuse trop importante, lutilisation de ce tissu comme produit de comblement fut longtemps abandonne au profit des greffes dermo-graisseuses qui furent utilises jusqu larrive en 1986 de la technique de Coleman qui permit de relancer la greffe dadipocytes selon le principe du transfert dadipocytes purifis. Cette dernire est base sur la manipulation atraumatique du tissu adipeux au cours des diffrentes tapes dans le but dune atrophie ultrieure minimum : prlvement, purification par centrifugation dans la technique de Coleman telle quelle fut dcrite par lui mme et

Les deux tapes chirurgicales de laprparation de graisse en vue dun lipostructure : prlvement et purificationSeules les deux premires tapes de la technique de Coleman seront dtailles ici puisque correspondant la phase de prparation de la graisse autologue. La troisime et dernire tape de la technique, soit le transfert au niveau du site receveur (lorbite ici) ne sera pas dcrite dans cet article. Rappelons toutefois que le terme de transfert est prfr celui dinjection car il sagit dune technique de dpts bien codifie et diffrente de celle dune injection au sens strict du terme.

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Prparation de la graisse autologue au vue dune lipostr uctur orbitair Prparation de la graisse autologue au vue dune lipostr uctur ee orbitair ee

Le prlvementIl sagit dune lipoaspiration laide de canules daspiration bords mousses atraumatiques (longueur 15cm, diamtre 3mm) montes sur des seringues visses de 10ml. Aprs la ralisation de microincisions, celle-ci est effectue soit en graisse abdominale, soit au niveau de la fesse soit au niveau de la face externe de la cuisse via de multiples tunnels de prlvement. A noter toutefois que lorsqu une lipostructure vise esthtique doit tre ralise en paupire infrieure de faon complmentaire, la graisse ncessaire cette dernire doit tre prleve sparment au niveau de la face interne du genou. Pour la plupart des auteurs, une injection de xylocane 1% non adrnaline dilue dans 250 ml de srum physiologique injecte en ventail au niveau des sites de prlvement faciliterait le geste chirurgical le rendant moins traumatisant. Dans tous les cas, la ralisation dun vide limit lors du prlvement pour prlever sous faible pression savre tre galement un gage de scurit. Pour cela, il est ncessaire de prlever en ayant pris soin de laisser 0,5 1 ml dair comme amortisseur et ce pour une moindre rsorption ultrieure toujours selon le mme principe tre le moins traumatique possible pour les cellules graisseuses esprant ainsi un taux de survie ultrieur le plus fort possible pour un rsultat esthtique sur le long terme le meilleur possible . Enfin, les microincisions seront sutures avec des points spars de soie 6.0 par exemple.

rsultat post-opratoire et une moindre rsorption graisseuse, nest pas compltement rsolue, voici cependant ce quil est possible den dire ce jour.

La centrifugationInitialement, Coleman prconisait une centrifugation des adipocytes une vitesse de 3000 tours / min pendant 3 minutes, les seringues de 10 ml tant places dans un rack strile aprs avoir t obtures. (Figure 1) Aprs centrifugation, trois phases sont obtenues : en suprieur, a) : le surnageant avec prsence de triglycrides, au milieu b) : la phase dans laquelle se trouvent les adipocytes conserver et en infrieur c) : la phase contenant les produits sanguins, les dbris hmatiques et le reste du liquide dinfiltration. Aprs limination des phases (a) et (c), les adipocytes purifis sont transfrs dans des seringues de 1ml. On estime aprs la centrifugation ces paramtres, une rduction du volume graisseux de 30% environ. (Figure 2) Pour les dfenseurs de la centrifugation, son principal avantage est de concentrer les adipocytes mais aussi les adipose-derived stem cells (ADSC). Les ADSC sont les cellules souches prsentes dans le tissu adipeux qui ont le potentiel pour se transformer en de vritables adipocytes matures. Toutefois, linconvnient de ce moyen de purification est le risque daltrer lensemble de ces cellules et de compromettre leur survie une fois greffes. Si le protocole 3000 tours min-1 pendant 3 minutes prconis par Coleman lors de la description princeps de la t e c h n i q u e , re s t e re c o m m a n d p a r certaines quipes de chirurgie plastique et reconstructrice , il est de plus en plus remis en cause par dautres. Rcemment, une quipe corenne a

Figure 1

La purificationElle peut tre soit ralise par centrifugation soit par sdimentation ce qui correspond en fait un lavage au srum sal (BSS). Actuellement, la question centrifugation versus lavage au BSS de la graisse prleve pour un meilleur

Figure 2

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Prparation de la graisse autologue au vue dune lipostr uctur orbitair Prparation de la graisse autologue au vue dune lipostr uctur eeorbitair ee

ralis un travail de recherche exprimental comparant diffrentes dures et f o r c e s d e c e n t r i f u g a t i o n (2). L e u r principale conclusion tait la suivante : ds 1500 tours min-1 (tout comme 3000 tours min-1), le taux de cellules survivantes diminue considrablement pour une dure de centrifugation suprieure ou gale 5 minutes. Une dure de centrifugation limite serait donc un gage de scurit. Dailleurs, lquipe japonaise de chirurgie plastique de Tokyo a publi en 2008 les rsultats dune tude mene la facult de mdecine qui en utilisant le modle murin et la microscopie lectronique, consistait comparer quatre semaines la concentration dadipocytes et dADSC histologiquement non altrs aprs linjection de diffrents chantillons ayant tous t centrifugs pendant une dure similaire : 3 minutes mais avec des forces de centrifugation diffrentes : 400, 700, 1200, 3000, 4200 tours min-1 (3). Au vue de leurs rsultats, cette quipe recommande de centrifuger 1200 tours min-1 pour un meilleur rsultat court terme, laiss ant suppose r un meilleur rsultat moyen terme. Toutefois, pour beaucoup la centrifugation napporterait rien de plus ou trs peu avec de surcroit un risque non ngligeable dtre dltre pour les cellules comme nous venons de le voir.

(20% aprs disparition de leau injecte avec la graisse puis nouveau 20% aprs un phnomne de compactage graisseux) (4) . Dans notre srie sur le Coleman orbitaire, nous sommes pltot aux alentours de 30% de rsorption 6 mois (25% 35%) les patients avec des pourcentages de rsorption extrmes ayant t exclus. (Figure 3)

Comparaison de la centifugation versus le lavage au srum salDans la littrature, une seule tude rcente mene par une quipe de chirurgie maxillo-faciale, a compar les greffes de tissu graisseux autologue aprs centrifugation versus aprs lavage au srum sal. Cette dernire a t ralise dune part cliniquement sur une srie de 51 patientes et dautre part exprimentalement pour tudier in vitro par des mthodes histologiques et immunohistochimiques la survie, la structure et la prolifration des cellules adipeuses prleves et purifies. (5) Lanalyse des rsultats exprimentaux a permis de conclure un taux plus important de pradipocytes dans les tissus non centrifugs et une plus grande prolifration cellulaire. Les rsultats cliniques post-opratoires sembleraient eux aussi plus encourageants dans le groupe lavage au srum sal compar au groupe centrifugation . Cette tude soutient les dfenseurs de cette technique moins traumatisante mais aussi moins coteuse et plus simple mettre en place.

Figure 3

Le lavage au srum physiologiqueTrs rcemment, dans un article publi en septembre 2010, le Dr BIOULAC (Allemagne), recommande dadditionner de linsuline au srum pour le rinage : 40 UI dinsuline par litre de srum. Le lavage sera rpt trois fois liminant les traces danesthsie et de sang et protgeant ainsi la graisse. (4) A ce jour, avec la technique du lavage, on estime que dans un filling, ce dernier perdra environ 40% de son volume initial

Utilisation de PRF, oui ou non ?Concernant lutilisation de PRF (Platelet Rich Fibrin) ou PRP (Platelet Rich Plasma), concentr plaquettaire et immunitaire (mlang au surnageant graisseux issu de la purification), l encore il ny a pas de rponse prcise. Pour certains ladjonction de ce dernier favoriserait langiognse ainsi que la

prolifration des pr-adipocytes et aurait ainsi un effet bnfique sur la cicatrisation et la consolidation des micro-greffes graisseuses. Lide dutiliser le PRF est venu de la rflexion de certains auteurs sur les d i ff re n t s f a c t e u r s d e c ro i s s a n c e prsents dans le tissu lipoaspir : bFGF, IGF-1, VEGF et PDGF-BB, et qui auraient un rle sur la croissance des diffrentes cellules graisseuses prsentes dans le greffon. Ainsi, certaines quipes franaises ont c o m m e n c u t i l i s e r l e P R P, p o u r optimiser leurs lipostructures. Leurs rsultats cliniques seraient encourageants (6). Toutefois, concernant les tudes sur modles animaux les rsultats sont trs divergents. Une tude randomise ralise chez la souris par l qu i pe de c h i ru rgi e pl as t i qu e d e lhpital de Singapour en 2008: douze souris inclues dans le groupe tmoin (injection de PRF en mme temps que

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Prparation de la graisse autologue au vue dune lipostr uctur e orbitair e Prparation de la graisse autologue au vue dune lipostr uctur e orbitair e

la graisse prleve sur une seule et mme femelle selon la technique de Coleman) versus douze souris constituant le groupe contrle (injection de srum sal la place du PRF). concluait pas de diffrence significative entre les deux groupes en ce qui concerne les paramtres tudis soit le poids, le volume et les critres histologiques de la greffe explante pour analyse seize semaines post injection. (7) Par contre, une tude plus rcente, japonaise et mene sur des rats, a c o n c l u u n e m e i l l e u re s u r v i e d e s adipocytes dans le groupe avec PRP. (8) Lanalyse de la littrature et des tudes exprimentales napporte donc ce jour aucune rponse prcise ce sujet, les diffrents r s u l t a t s s a v re n t e n e ff e t t r s divergents et peu exploitables.

ConclusionEn conclusion, il nexiste ce jour aucun consensus concernant la prparation de la graisse autologue en vue de la lipostructure. Le problme de la rsorption graisseuse aprs la greffe reste pourtant le principal inconvnient de la technique. A ce jour, la plupart des auteurs et des tudes comme nous venons de le voir tendent recommander labandon de la centrifugation. Si ltape de purification nous semble primordiale, limiter la rsorption ne sarrte pas au stade de purification, la technique du transfert bien que non dveloppe ci nous semble tout aussi essentielle. En effet, la thorie des adipocytes survivants consiste dire que les adipocytes greffs survivent et continuent leur cycle de vie au niveau du site receveur. Ils passent ainsi par une phase dischmie le premier jour, puis par une phase de nettoyage des dbris

par les polynuclaires, macrophages et histiocytes, et enfin par une phase de revascularisation ds le quatrime jour. Cette revascularisation se fait de faon centripte expliquant la ncessit dinjecter des fragments graisseux de petite taille pour limiter au maximum la rsorption tant donn une phase dischmie dautant plus longue et dltre que la taille des fragments est importante. Au mme titre que linformation du patient sur les complications potentielles, le sensibiliser en propratoire cette problmatique de rsorption en post-opratoire, rsorption difficilement prvisible de faon individuelle ce jour, est essentielle. Obtenir un rel consentement clair est donc indispensable pour cette chirurgie qui se situe la limite entre la chirurgie orbitaire et la chirurgie esthtique et reconstructrice.Conflits dintrts : aucun

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Chirurgie

Le Simulateur Ophtalmique Chirurgical Eyesi*Kaan Saracoglu PhD, VRmagic GmbH, 68165 Mannheim, Allemagne, 2011

e qui est dj pratique courante dans lindustrie aronautique depuis bientt 50 ans innove prsent la formation des futurs chirurgiens : La simulation devient un nouveau standard dans linstruction et la formation professionnelle des praticiens et leurs collgues dans le domaine de la mdecine. P a rt i c u l i re me n t po u r l a c h i ru rg ie invasive minimale, les simulateurs peuvent rpondre la ncessit de nouvelles mthodes plus efficaces dans la formation des comptences microchirurgicales.

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Avantage de la simulationLes simulateurs offrent un environnement dapprentissage dans des conditions relles et scurise sans mettre en danger des patients. Les pathologies humaines non disponibles peuvent tre simules pour une formation chirurgicale. Mme des cas rares peuvent tre entrans plusieurs reprises dans un cadre dfini identique. La possibilit de rpter diffrentes manipulations permet une amlioration des conditions du cadre chirurgical fond sur des expriences mais sans risque pour aucun patient. Les simulateurs permettent dajuster la complication et la difficult de lintervention aux comptences de lapprenti. Il est possible de faire des expriences chirurgicales dans tous les domaines vitales, ce qui permet un programme dtudes gnralis et systmatique. Simultanment la grande accessibilit et disponibilit des simulateurs permettent une formation plus efficace et plus durable. Lestimation rtroactive i m p a r t i a l e e t i m m d i a t e a m l i o re lentranement par auto-valuation et peut diriger toute pratique complmentaire. Lanalyse des donnes de performance permettent de mieux mesurer la justesse ou les erreurs, la dure dachvement, lefficacit de la main droite ou gauche et le juste mouvement.

La ralit virtuelle dans lOphtalmologieActuellement, il y a sur le march de systme de ralit virtuelle de haut niveau concernant la formation ophtalmologique uniquement le simulateur chirurgical Eyesi produit par VRmagic. LEyesi offre un environnement de formation comparable la salle dopration y compris une strovision de la scne chirurgicale, microscope et des i