revue professionnelle - aqepet si sherlock holmes et arsène lupin avaient été amis d’enfance ?...

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12 $ | PP 40010582 Hiver 2017 Langue Favoriser l’écriture pour améliorer les habiletés en lecture + Compétences transversales La marionnette pour communiquer autrement + Développement personnel La gestion du stress pour prévenir l’anxiété : quelques pistes d’intervention à utiliser en classe + Et encore plus... Revue professionnelle Dossier L’apprentissage intégré des langues _ Rédacteurs invités Olivier Dezutter et Lynn Thomas fière partenaire des enseignants, offre l’impression de ce numéro

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LangueFavoriser l’écriture pour améliorer

les habiletés en lecture

+

Compétences transversalesLa marionnette

pour communiquer autrement

+

Développement personnelLa gestion du stress pour prévenir

l’anxiété : quelques pistes d’intervention à utiliser en classe

+

Et encore plus...

R e v u e p r o f e s s i o n n e l l e

Dossier

L’apprentissage intégré

des langues_

Rédacteurs invités

Olivier Dezutter

et Lynn Thomas

fière partenaire des enseignants,offre l’impression de ce numéro

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Et si Sherlock Holmes et Arsène Lupin avaient été amis d’enfance ?

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Présentation05 Ce n'est qu'un au revoir...

Audrey Cantin

07 Quand l’actualité fait réfléchirGeneviève Carpentier

09 Les offres de formation de l'AQEPGuylaine Gagné

Langues10 Favoriser l'écriture pour améliorer

les habiletés en lectureAmélie GendronCatherine Turcotte

12 Il était une fois une belle histoire de familles à l'école !Brigitte Gagnon Annie Charon

16 À la découverte du Poteau rose ou du Pot aux roses ? Le rôle des frontières lexicales en production écrite chez l'élève du primaireAgnès CostergDaniel Daigle

Mathématiques27 J'ai... Qui a ? : un jeu divertissant permet-

tant de réviser et de consolider les acquis des élèves en mathématiquesThomas RajotteGabrielle Côté

Interdisciplinarité37 Trois formules pédagogiques pour favoriser

l'interdisciplinarité en classe du primaireMarilyne Boisvert Katryne Ouellet

CRIFPE41 Pour assurer une école bienveillante : le

Soutien au Comportement Positif (SCP)Steve Bissonnette

44 La souffrance au travail des enseignants du Québec : quelles causes, quelles solutions ?Arianne Robichaud

Adaptation scolaire et sociale46 La dysphasie et l'inclusion pédagogique

en classe régulièreJudith Beaulieu Marilyn Dupuis-Brouillette

DOSSIER48 Lire-écrire entre les langues pour

mieux apprendre à lire et à écrireOlivier DezutterLynn Thomas

50 Pourquoi et comment tenir compte du répertoire plurilingue français-anglais des élèves lors de l'enseignement grammati-cal ? L'exemple des constructions verbalesIsabelle GauvinJoël thibault

53 Justifier : un outil pour apprendre la grammaire en français... et en anglais !Marie-Hélène ForgetIsabelle Gauvin

56 Les approches plurielles pour lire et écrire entre les langues à l'école primaire en Colombie-Britannique (Canada)Cécile Sabatier

60 Les pratiques d'écriture en français et en anglais langue seconde d'élèves de sixième primaire participant à un programme d'anglais intensifLynn ThomasSunny Man Chu Lau

63 Comment évoluent les compétences en écriture en français des élèves faibles participant aux programmes d'enseignement intensif de l'anglais langue seconde ?Ismail Bou SerdaneOlivier Dezutter Véronique Parent Corinne Haigh

66 L'écriture des textes identitaires : un voyage intérieur pour tous les élèves !Céline Renaulaud

68 Lire entre les langues... à l'intérieur d'un seul livre ! Place aux livres bilingues et plurilingues dans les classesOlivier Dezutter

Domaines généraux de formation70 Les projets entrepreneuriaux avec les

élèves en difficulté d'apprentissage au primaire : une avenue prometteuse !France Dubé Isabelle Plante Brigitte Gagnon Danny Brochu

Compétences transversales73 La marionnette pour

communiquer autrement !Joany Darsigny

Développement personnel79 La gestion du stress pour prévenir

l'anxiété : quelques pistes d'intervention à utiliser en classeCatherine Fréchette-SimardIsabelle Plante

Articles de partenaires20 Antidote 9 : des trésors insoupçonnés

pour l'apprentissage intégré des languesDolores Tam

31 L'apprentissage de la finance, un mot à la foisMarie-Christine Daignault

76 Bientôt le Mois de la nutrition. Passez à l'action !Catherine Dufour Hélène Gayraud

CHRONIQUESAu fil des mots

22 La richesse des racines latines et grecques pour le développement du vocabulaireKathleen Wissel-TurnerOphélie Tremblay

Les trois favoris

24 3 livres, 3 cycles, 3 activités en mathématiques !Emmanuelle Rousseau

Les savoirs enseignants

32 An, am, en, em, aon, ou aen ? Comment écrire le son /ã/ ?Brigitte StankéChristian Dumais

33 Des migrants au fil du temps (1/3) Filles du roi, filles de quoi ?Chantal Déry Danny Legault

34 Les fractions : par où commencer ?Raymond Nolin

Valorisation

81 Les lauréates du prix Robotique Zone01/AQEP 2016-2017Catherine VerretValérie Goulet Marceau Isabelle Ménard Annie Julien

Chroniques découvertes

84 Vivre le jeuMaude-Annie CourtemancheJosée GoupilIsabelle Lemay

86 Vivre la lectureDiane ManseauJulie St-PierreCaroline CarleSandra Thériault

SommaireS

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Canalise les ressources Diffuse dans le réseau

Partenaires financiers :PRISME a été développé par l’AESTQ, un OBNL dont la mission est de contribuer à l’amélioration de la qualité de l’enseignement de la science et de la technologie afin que la culture scientifique prenne une place importante au Québec.

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Revue professionnelle trimestrielle publiée par l'Associa-tion québécoise des enseignantes et des enseignants du primaire (AQEP). L'adresse de correspondance est AQEP, Université de Montréal — FSE-CRIFPE, C. P. 6128, succursale Centre-Ville, Montréal (Québec) H3C  3J7. Le numéro de téléphone est le 1 866 940-AQEP. Les textes apparaissant dans la revue professionnelle Vivre  le  pri-maire n'engagent que la responsabilité des auteurs et, à moins de mention contraire, ne constituent pas une prise de position de l'AQEP. Afin de donner aux auteurs des articles toute la reconnaissance à laquelle ils ont droit, il importe de préciser que la reproduction d’articles issus de la présente revue n’est autorisée qu’à des fins éducatives, en mentionnant la source. L’utilisation du masculin n’a d’autre but que d’alléger les textes.

_ Rédactrice en chef – Geneviève Carpentier _ Comité de lecture – Maude-Annie Courtemanche,

enseignante, Karina Ferland, enseignante, Cynthia Larouche, enseignante, Mélanie Martin, conseil-lère pédagogique en français, Anne Robitaille, enseignante et Claudine Sauvageau, conseillère pédagogique.

_ Coordination de la revue – Tom & Tom _ Design graphique – Tom & Tom _ Mise en pages – Tom & Tom _ Correctrice-réviseure – Com1script _ Impression – Bureau en gros

Collaborateurs au volume 30, numéro 4Judith Beaulieu, Steve Bissonnette, Marilyne Boisvert, Ismail Bou Serdane, Danny Brochu, Audrey Cantin, Caroline Carle, Geneviève Carpentier, Annie Charron, Agnès Costerg, Gabriel le Côté, Maude-Annie Courtemanche, Daniel Daigle, Marie-Christine Daignault, Joany Darsigny, Chantal Déry, Olivier Dezutter, France Dubé, Catherine Dufour, Christian Dumais, Marilyn Dupuis-Brouillette, Olivier Duzetter, Marie-Hélène Forget, Catherine Fréchette-Simard, Guylaine Gagné, Brigitte Gagnon, Isabelle Gauvin, Hélène Gayraud, Amélie Gendron, Valérie Goulet Marceau, Josée Goupil, Corinne Haigh, Annie Julien, Sunny Man Chu Lau, Danny Legault, Isabelle Lemay, Diane Manseau, Isabelle Ménard, Raymond Nolin, Katryne Ouellet, Véronique Parent, Isabelle Plante, Thomas Rajotte, Céline Renaulaud, Arianne Robichaud, Emmanuelle Rousseau, Cécile Sabatier, Julie St-Pierre, Brigitte Stanké, Dolores Tam, Sandra Thériault, Joël Thibeault, Lynn Thomas, Ophélie Tremblay, Catherine Turcotte, Catherine Verret, Kathleen Whissell-Turner,

Dépôt légal, Bibliothèque nationale du QuébecISSN 0835-5169

Abonnement individuel  :[email protected] ou coordonnées du siège social

Adhésion à l’AQEP Incluant l’abonnement à la revue Vivre le primaire1 an (4 numéros) = 50  $ (taxes et livraison incluses)2 ans (8 numéros) = 90  $ (taxes et livraison incluses)Prix à l’unité = 12  $ + frais d’envoi (taxes incluses) (pour information, écrivez à [email protected])

Conseil d’administration _ Audrey Cantin, présidente _ Geneviève Carpentier, vice-présidente

et rédactrice en chef de la revue Vive le primaire _ Vicky Carpentier, coresponsable de la revue _ Magalie Deschamps, trésorière _ Anne Dumontet, secrétaire _ Marie-Hélène Fréchette, responsable du congrès _ Myriam Villeneuve-Lapointe, coresponsable

du congrès _ Guylaine Gagné, responsable de la formation _ Caroline Gravel, responsable de la promotion _ Sara Belcourt, responsable des communications _ Annie Julien, responsable de la valorisation

Les personnes oeuvrant au sein du conseil d’administration de l’AQEP sont toutes bénévoles.

Siège social – AQEPUniversité de MontréalPavillon Marie-Victorin, FSE—CRIFPE90, avenue Vincent-D’Indy, bureau C-559Montréal (Québec) H2V 2S9

Tél.  : 1 866 940-AQEP (2737)

Téléc.  : 1 866 941-AQEP (2737)

Courriel  : [email protected]

Pour joindre l’équipe de Vivre le primaireVous pouvez écrire, en tout temps, à la coordination de la revue en utilisant l’adresse de courriel suivante  :[email protected].

Pour tout ce qui concerne les adhésions et les change-ments d’adresse, vous pouvez écrire à l’adresse suivante  : [email protected].

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Ce n'est qu'un au revoir..._

Je vous écris ces mots avec mon petit dernier, Thomas, bien au chaud collé en portage sur sa maman. J’en suis à faire un bilan de mon implication à l’AQEP et, aussi, à accueillir ma déci-sion de ne pas renouveler mon man-dat, après neuf ans, au sein du CA. Vous lisez, entre les lignes, le défi que ça suppose de se détacher d’une asso-ciation qui est devenue aussi impor-tante qu’une famille. _

Rien de moins. _

Avant de quitter, je souhaite partager mon expérience comme bénévole et professionnelle de l’éducation afin de souligner l’impact exceptionnel de chaque professionnel de l’éducation rencontré au cours de mon parcours associatif, de donner le gout aux indécis d’adhérer volontairement à leur asso-ciation et, pourquoi pas, de s’impliquer auprès de l’AQEP._

Depuis mes études au baccalauréat en éducation préscolaire et enseignement primaire, je m’implique de près ou de loin avec notre seule association pro-fessionnelle en enseignement primaire, soit l’AQEP. J’ai commencé en validant les informations sur les cocardes des participants aux ateliers du congrès annuel pour ensuite m’impliquer dans le développement de la chronique Rat de bibliothèque, devenue Vivre la lec-ture. La vie a aussi fait en sorte que j’ai pu honorer le travail de la pédagogue Jacinthe Mathieu en créant un prix, le prix Jacinthe, aux côtés de Louise Groleau et Martin Lépine. Ces deux

inconnus sont rapidement devenus des amis et des inspirations pédagogiques dans ma pratique quotidienne. _

Depuis 2009, c’est de façon plus offi-cielle que je m’implique au sein du CA. J’y ai tellement appris et évolué ! Au départ, je ne connaissais rien des rouages; aujourd’hui, c’est dans le rôle de la présidence que j’accompagne, grandement aidée de mon équipe, les nouveaux à trouver leur place dans leurs responsabilités. Tout ça a été possible grâce à l’appui de mes pairs. _

En parallèle à ma vie professionnelle d’enseignante au primaire qui changeait de niveau pratiquement chaque année ou à ma vie de maman, j’ai côtoyé des professionnels de l’éducation (étudiants, enseignants, conseillers pédagogiques, universitaires) inspirants, volontaires, critiques, curieux, innovants, généreux, et surtout, désireux d’offrir aux ensei-gnants du primaire du Québec un lieu de référence créé par les enseignants, pour les enseignants. Grâce à eux, ensemble, de grandes choses ont été réalisées. Pour nos 30 ans d’association, laissez-moi vous rappeler quelques-uns de ces projets. Avec une équipe d’admi-nistrateurs changeante, mais toujours impliquée, nous avons : • développé différents formats de for-

mation (soirées au Salon du livre, colloques le samedi, congrès annuel) ;

• poursuivi le développement de la revue professionnelle Vivre le pri-maire en relevant les différents défis liés au contenu et au graphisme, tout en nous assurant de la garder en ver-sion papier (l’une des dernières) et

Audrey CantinEnseignante ressourceÉcole Saint-Joseph [email protected]

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électronique ;• ajouté des prix de reconnaissance dans les domaines de

l’enseignement primaire de la lecture et de la robotique pédagogique (et bientôt en mathématiques) ;

• suscité des lieux d’échanges sur Facebook, l’infolettre, le site Internet, par des sondages pour l’ajustement des services ou l’écriture d’avis ;

• ajouté des rabais pour le quotidien de la classe auprès de partenaires du milieu.

_

Tous ces projets, n’auraient pas été possibles sans la touche per-sonnelle de Stéphan, Josée, Sandra, Julie (et toutes les autres Julie !), Lise, Mylène, Mélanie, Geneviève (et l’autre Geneviève !), Martin, Magalie, Loïc, Caroline (et l’autre Caroline !), André, Mélissa, Marie-Hélène, Myriam, Sara, Annie, Anne, Guylaine et Vicky (et tous les autres dont le nom m’échappe à ce moment précis, mais que le cœur se souvient)._

Chers bénévoles et professionnels de l’éducation, merci pour les moments partagés et pour le lien de confiance accordé. La suite ne sera que plus incroyable et appréciée des membres de l’AQEP, car je vous sais brillants, pédagogiquement impliqués et innovants. Nous avons fait et vous poursuivrez la création de miracles avec le temps disponible. _

Chère équipe, vous avez de quoi être fière ! _

Par mon adhésion volontaire à l’association, je vous encourage-rai dans vos idées et je vous dis : MERCI !

DEVENEZ MEMBRE et bénéficiez d’une multitude d’avantages

Recevez la revue professionnelle Vivre le primaire

Obtenez des réductions importantes lors de votre inscription au congrès et aux colloques

Obtenez jusqu’à 60% de rabais chez nos partenaires Bureau en Gros, La Capitale Assurances, Librairies Monet, Pantoute

et La Liberté, Brault et Bouthillier, Spectrum-Nasco, fdmt et chez certains chiropraticiens.

Et bien plus !

25$ adhésion étudiante | 50$ adhésion régulière

Détails et adhésion au aqep.org

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Quand l’actualité fait réfléchir_

Pour mon mot de rédactrice, j’ai essayé de trouver un sujet très pédagogique, mais l’actualité prend toute la place dans mon esprit, dans mon cœur. Les notions de pouvoir et de consentement m’habitent en tant que pédagogue, en tant que maman, en tant que femme. Je ne peux m’empêcher de réfléchir à mes gestes, à mes paroles et à ma position en tant qu’ancienne enseignante et maintenant chargée de cours. Est-ce que j’utilise toujours mon pouvoir de manière positive et exemplaire ? Est-ce que j’ai déjà rabaissé ou ridiculisé un élève ou un étudiant en faisait une blague, une mimique ou un commentaire ? Est-ce que, sans le vouloir, j’ai montré à des enfants ou à de jeunes adultes que le fait d’être en situa-tion de « supériorité » me donnait plus de droits ? Je me ques-tionne sur le rôle, en tant que pédagogues, que nous pouvons jouer dans le développement de l’estime de soi de nos élèves. Comment leur inculquer et leur apprendre à se respecter, à s’aimer ? Comment développer chez les jeunes le sentiment d’indignation qui devrait nous habiter lorsque nous sommes témoins de situations inacceptables ? Comment leur donner le courage de dénoncer lorsque la situation est inadmissible ?_

Une parcelle de réponse à toutes ces questions est probable-ment de prendre le temps de les écouter, la fameuse écoute active ! Lors d’un souper, une bonne amie, enseignante au primaire, me racontait que sa fille de six ans se faisait courir après dans la cour d’école par des petits garçons qui voulaient l’embrasser. La petite fille n’aimait pas ça et se sauvait pour vrai. Sa maman l’a encouragée à en parler aux enseignants qui surveillaient lorsque la situation arrivait. Malheureusement, la petite s’est fait dire par l’enseignant que ce sont des jeux d’en-fants et qu’elle doit apprendre à courir vite. Je comprends et j’ai vécu les cours d’école bondées. Je sais qu’il n’y a pas assez

d’enseignants pour surveiller et intervenir lors de toutes les chicanes. Je comprends que plusieurs plaintes d’enfants sont des peccadilles et qu’ils doivent aussi apprendre à gérer leurs conflits de manière autonome, mais comment en arrive-t-on là ? Cette petite mérite qu’on s’attarde à son problème._

Elle mérite de ressentir de l’empathie et elle doit pouvoir compter sur les adultes signifiants qui l’entourent. Elle mérite que l’on prenne du temps qu’on n’a pas. Elle doit apprendre à se respecter et elle doit savoir que lorsqu’elle dénonce, des gens interviennent. Un des points communs dans les histoires sordides qui pullulent dans l’actualité est justement le fait que les victimes n’osent pas dénoncer. Elles ont peur des repré-sailles et elles ont peur de ne pas être prises au sérieux. J’ai envie d’apprendre de ces histoires, de grandir et de devenir meilleure. J’ai envie de remettre en question mes actions et de poser des gestes concrets pour m’améliorer. Dans cette histoire d’enfants, les petits garçons aussi méritent qu’on s’attarde à eux, qu’on les rencontre et qu’on discute avec eux du plaisir partagé et de la notion de consentement. Sans devenir alar-mistes, nous nous devons d’être fermes._

Finalement, en tant que pédagogues, nous disons souvent que la classe est comme une minisociété et, comme dans toutes sociétés, les gens en situation d’autorité devraient utiliser leur pouvoir de manière positive en favorisant l’émancipation de tous. Bien sûr, nous pouvons et nous devons nous interroger sur l’environnement de travail, sur les ressources mises en place pour nous épauler et sur le peu de temps et de forma-tion que nous avons pour accompagner tous ces jeunes, mais nous ne pouvons pas utiliser ces éléments comme des excuses pour défendre l’indéfendable._

Geneviève CarpentierDoctoranteUniversité de [email protected]

Dans cette ère de l’éducation positive, apprenons à tous nos jeunes à dire

et à comprendre le sens du mot non.

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LES COLLOQUES DE FORMATION DE L’AQEP 2017-2018

MATHÉMATIQUEle samedi 10 février 2018 UQAR, CAMPUS DE LÉVIS

DIFFÉRENCIATION PÉDAGOGIQUEDATE ET LIEU À VENIR

LITTÉRATURE JEUNESSE AQEP – ADP DATE ET LIEU À VENIR

Inscription obligatoire au aqep.org/colloques

SOIRÉES EN ENSEIGNEMENT AVEC LA LITTÉRATURE JEUNESSE

AQEP-MESSAGERIES ADP

SALON DU LIVRE DE GATINEAUle jeudi 1er mars 2018

17       h       30 à 19       h       30

SALON DU LIVRE DE QUÉBECle vendredi 13 avril 2018

17       h       30 à 19       h       30

Inscription obligatoire au aqep.org ou adp-pedago.com

Pour toutes questions, vous pouvez contacter Emmanuelle Rousseau:

[email protected]

Soirées gratuites

Entrée gratuite au Salon du Livre

Tirages sur place les membres de L’AQEP obtiennent 5 coupons

supplémentaires

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Guylaine GagnéEnseignante en 4e année et responsable bénévole de la formation à l’[email protected]

Les offres de formation de l’AQEP_

Soucieuse de développer et de soutenir la formation continue des enseignants du primaire, l’AQEP organise, depuis trois ans, des colloques dans diverses régions du Québec ainsi que des soi-rées de formation en plus du congrès annuel. Cette année, trois colloques seront offerts ainsi que trois soirées de formation en lien avec l’enseignement avec la littérature jeunesse._

Le vendredi 17 novembre 2017 à Montréal a eu lieu la première soirée de formation en enseignement avec la litté-rature jeunesse AQEP - Messageries ADP au Salon du livre de Montréal. Lors de cette soirée ouverte à tous, les partici-pants ont eu la chance d’assister à quatre ateliers qui présentaient diverses façons d’utiliser la littérature jeunesse pour enseigner différentes disciplines. En plus des ateliers animés par les conseil-lères pédagogiques de Messageries ADP, il y avait Entrer dans le dictionnaire animé par madame Kim Thúy. Outre l’accès gratuit à cette soirée de forma-tion, chaque participant a reçu un bil-let d’entrée au Salon du livre et a eu la chance de participer à cinq tirages totali-sant une valeur totale de 500 $. De plus, les membres de l’AQEP ont reçu cinq coupons de tirage supplémentaires._

Deux autres soirées de formation en enseignement avec la littérature jeu-nesse AQEP – Messageries ADP seront offertes, soit le jeudi 1er mars 2018 au Salon du livre de Gatineau ainsi que le vendredi 13 avril 2018 au Salon interna-tional du livre de Québec. _

Le samedi 10 février 2018 à l’Univer-sité du Québec à Rimouski, campus de Lévis aura lieu le Colloque mathéma-tique. Lors de cette journée, des ateliers adaptés aux trois cycles du primaire seront proposés pour outiller davantage les participants à enseigner les mathé-matiques. Parmi les ateliers offerts, il y aura, entre autres, celui de monsieur Thomas Rajotte, professeur de l’Univer-sité du Québec à Rimouski, campus de Lévis, qui parlera de l’utilisation du jeu en tant que moyen permettant d’ensei-gner et d’apprendre les mathématiques au primaire._

Le samedi 17 mars 2018 à l’Université du Québec en Outaouais, campus de Gatineau, se tiendra le colloque ayant comme thème la différenciation péda-gogique. Des ateliers présenteront com-ment différencier l’enseignement des différentes disciplines du primaire._

Le Colloque AQEP - Messageries ADP en enseignement avec la littérature jeu-nesse est également en préparation. La date et le lieu seront divulgués dans les mois à venir._

Le cout d’inscription à chacun des col-loques est de 60 $ pour les membres de l’AQEP et de 90 $ pour les non-membres et le diner est inclus. Pour avoir plus d’informations concernant ces différents évènements, nous vous invitons à visiter régulièrement notre site Internet aqep.org._

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Amélie GendronOrthopédagogue et assistante de rechercheUniversité du Québec à Montré[email protected]

Catherine TurcotteProfesseureUniversité du Québec à Montré[email protected]

Favoriser l’écriture pour améliorerles habiletés en lecture_

Tous les enseignants veulent que leurs élèves deviennent de bons lecteurs, c’est bien normal ! Parfois, les activités de lecture prennent beaucoup de temps, au détriment des activités d’écriture, considérées plus longues et plus char-gées. Or, saviez-vous que cela n’est pas nécessaire ? Au contraire, il est possible d’améliorer diverses habiletés en lecture en faisant écrire les élèves. En effet, plusieurs études se sont penchées sur la question et ont conclu que certaines approches en écriture avaient un effet sur la fluidité, l’iden-tification de mots et la compréhension écrite. Ceci s’ex-plique par le fait que le rôle de lecteur, comme le rôle de scripteur, font tous deux appel à divers processus cognitifs très similaires en lecture et en écriture. Donc, en améliorant certaines compétences chez le scripteur, on augmente cer-taines compétences du lecteur._

Notre équipe de recherche s’est intéressée à cet enjeu et a découvert que deux chercheurs américains, Steve Graham et Michael Hebert, se sont attelés à la tâche exhaustive de lire toutes les recherches expérimentales et quasi expérimen-tales portant sur des interventions en écriture qui auraient un impact sur la compréhension en lecture. La métaanalyse produite nous guide à travers les pratiques en écriture qui

ont eu une influence positive sur les résultats en lecture des élèves. Cette métaanalyse met en lumière, par des données empiriques, que diverses activités d’écriture représentent un levier important pour la compréhension en lecture. Il ne s’agit pas ici de dicter les paramètres d’un programme clés en main aux intervenants, mais bien de documenter des pratiques et réfléchir aux liens qu’entretiennent l’acte de lire et l’acte d’écrire. Donc, voici les trois recommandations que les auteurs adressent aux enseignants souhaitant améliorer la compréhen-sion en lecture de leurs élèves via l’écriture :_

1- Faire écrire les élèves à propos des textes qu’ils lisent

Un élève qui écrit sur ce qu’il a lu doit analyser le texte, en trouver les idées principales, faire des liens avec d’autres idées/notions/connaissances antérieures, bref il doit s’approprier son contenu. Cette appropriation plus approfondie du texte aug-mente sa compréhension. Cette pratique serait même bénéfique pour les élèves à risque ou en difficulté. Toutefois, ces derniers ont besoin d’un enseignement explicite rendant claires les carac-téristiques des textes attendus, en plus de nombreuses occasions d’écrire à propos d’une lecture. Dans cette visée, l’élève peut :• Écrire une réaction au texte (donc une écriture plus per-

sonnelle), une analyse ou une interprétation du texte. La réaction peut être une réponse au texte lu ou un récit d’une expérience personnelle liée au thème. L’analyse ou

En améliorant certaines compétences chez le scripteur, on augmente certaines

compétences du lecteur.

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l’interprétation peut se faire sous diverses formes : une ana-lyse d’un personnage, un texte qui explique comment les informations du texte peuvent être utiles, un texte pour développer un élément du texte, etc.

• Écrire à partir d’un texte lu et en faire un résumé. Cette pra-tique demande aux élèves de dégager l’essentiel du texte et peut se faire de différentes façons : dégager l’idée principale de chaque paragraphe, remplir un organisateur graphique, décrire des étapes énumérées dans le texte (procédure), etc. Ce type de pratique se révèlerait davantage efficace pour les élèves à partir de la 3e année.

• Prendre des notes à propos du texte. Il s’agit de réduire le texte en phrases ou en mots-clés porteurs de sens. Les élèves vont écrire dans la marge, par exemple.

• Répondre à des questions sur le texte (un classique !). Répondre par écrit aux questions d’un texte le rendrait plus facilement compréhensible et mémorisable que si l'on y répond verbalement. Il s’agit bien sûr de poser des questions aux élèves qui les amènent plus loin que les informations purement littérales.

_

2- Enseigner aux élèves les processus et connais-sances nécessaires à la production de textes

Comme l’écriture et la lecture partagent des processus en com-mun, il est sensé de croire qu’en enseignant les processus en écriture, il y ait un transfert en lecture. Les études démontrent que non seulement ce transfert est possible, mais qu’il y a transfert sur plusieurs habiletés en lecture. Voici le type de pratiques recensées et les connaissances et habiletés qu’elles contribuent à améliorer en lecture : • Enseigner le processus rédactionnel, les structures de textes,

la construction de phrases et de paragraphes améliore la compréhension en lecture.

• Enseigner l’orthographe lexicale et la construction de phrases lors de l’écriture améliore la fluidité en lecture.

• Enseigner l’orthographe lexicale améliore la lecture de mots._

3- Augmenter le temps consacré à l’écritureLa production de texte amène les élèves à sélectionner leurs idées, à les structurer et à les expliciter afin d’être compris par un lecteur. De ce fait, l’élève qui produit des textes de façon régulière devrait être plus attentif au choix des idées et à la structure des textes qu’il lit et, ainsi, mieux les comprendre (Graham et Hebert, 2010). Ainsi, il n’est pas nécessaire d’enga-ger les élèves dans une interminable production de texte avec planification et mise au propre. Il s’agit plutôt de faire vivre une variété d’expériences d’écriture aux élèves. Voici quelques suggestions faites par les auteurs pour augmenter les occasions d’écrire régulièrement :• Avoir un correspondant ;• Tenir un journal ;• Interagir avec d’autres élèves avec un journal dialogué ;• Écrire des critiques de livres, de films, de jeux, etc._

Toutes ces approches sont plus efficaces que plusieurs autres souvent utilisées en classe : laisser les élèves lire un texte indi-viduellement, leur faire relire un texte, demander de discuter à propos d’un texte ou leur donner des consignes avant de le lire sans impliquer un temps pour écrire. Toutefois, même les approches reconnues comme les plus efficaces offriront des effets minimes si les élèves n’écrivent pas fréquemment et si on ne leur enseigne pas de façon explicite des connaissances

et stratégies utiles en écriture. Il faut également garder en tête que d’autres pratiques en écriture qui n’ont pas été mises en lumière par les chercheurs peuvent être adéquates pour améliorer la production de texte, la syntaxe, la grammaire et de nombreux autres apprentissages essentiels. Par exemple, les ateliers d’écriture permettent aux élèves d’écrire sur une variété de sujets, avec différentes intentions et sur des supports variés._ Enfin, lorsque les élèves comprennent qu’il existe des connaissances et stratégies partagées en lecture et en écri-ture de texte, il est plus facile pour eux de lire en se mettant à la place de l’auteur et, en retour, d’écrire en se mettant à la place du lecteur !_

Deux chercheurs américains, Steve Graham et Michael Hebert, se sont attelés

à la tâche exhaustive de lire toutes les recherches expérimentales et quasi

expérimentales portant sur des interventions en écriture qui auraient un impact sur la compréhension en lecture.

Référence

_ Graham, S. et Hebert, M. A. (2010). Writing to read: Evidence for how writing can improve reading. A Carnegie Corporation Time to Act Report. Wa shington, DC: Alliance for Excellent Education.

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Brigitte GagnonConseillère pédagogique et doctorante en éducationComission scolaire des Hautes-Riviè[email protected]

Annie CharronProfesseure en didactiqueUniversité du Québec à Montré[email protected]

Il était une fois une belle histoire de familles à l’école !_

Voici l’histoire d’une équipe d’enseignantes de première année du primaire qui ont choisi de créer un projet nova-teur dans le cadre d’une recherche-action afin de soutenir les parents dans l’accompagnement de leur enfant lors de la période de devoirs et de leçons._

Origine du projetLe projet relaté dans cet article est en continuité avec une initiative des enseignantes à l’éducation préscolaire qui, l’an-née précédente, avaient réussi à mobiliser près de cinquante familles lors d’ateliers de littératie familiale tenus à l’école, en

soirée, tout au long de l’année. Ces ateliers avaient pour but de sensibiliser les parents à l’importance de l’émergence de l’écrit, de les outiller dans le choix de livres, de leur fournir des

activités clés en main pour vivre de beaux moments avec leur enfant autour de livres de qualité et d’identifier avec eux les attitudes à adopter pour donner le gout de lire à leur enfant.Au terme de ce projet, plusieurs parents ont manifesté de l’in-térêt pour bien accompagner leur enfant dans ses premiers apprentissages en lecture et en écriture. En effet, lors de la tenue d’un groupe de discussion qui a permis de faire le bilan du projet de recherche-action, les parents présents nous ont fait part de préoccupations. Ces derniers anticipaient le pas-sage de leur enfant en première année : comment soutenir notre enfant lors de la période de devoirs et de leçons ? Plus spécifi-quement, comment faire étudier des mots ? Quelles stratégies favoriser pour aider notre enfant lors de sa lecture quotidienne ? Quels sont les types de questions à poser afin de s’assurer de la compréhension de lecture de notre enfant ? Comment enrichir son vocabulaire ? _

La passation du flambeau ! Les trois enseignantes de première année ont été interpelées par ce besoin identifié par les parents de leurs futurs élèves et ont sollicité l’aide de leur conseillère pédagogique (la coau-teure de cet article) afin de créer une offre de soutien parental en continuité avec l’expérience de l’année précédente. Une équipe s’est progressivement formée avec les enseignantes et la conseillère pédagogique. Une orthopédagogue, une cher-cheuse en didactique (la coauteure de cet article), le directeur ainsi qu’une bibliothécaire ont formé une communauté d’ap-prentissage pour élaborer des ateliers destinés aux parents. De plus, afin de poursuivre avec les élèves la découverte d’œuvres littéraires amorcée l’année précédente, elles ont profité de ces rencontres collectives pour créer une série d’activités pédago-giques (7) intégrant la lecture et l’écriture et les expérimenter avec leurs élèves tout au long de l’année. _

Objectifs de recherche-actionCe projet visait deux objectifs : • Outiller les parents pour l’accompagnement de leur enfant au

regard de l’entrée formelle dans l’écrit (stratégies de lecture et d’écriture, orthographe, lexique, compréhension de lecture)

Marie-Claude Verrier, Josée Roy et Julie Desautels, enseignantes de 1re année

Ces ateliers avaient pour but de sensibiliser les parents à l’importance de l’émergence de l’écrit, de les outiller dans le choix de livres, de leur fournir des activités clés en main pour vivre de beaux moments avec leur enfant autour de livres de qualité et

d’identifier avec eux les attitudes à adopter pour donner le gout de lire à leur enfant.

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• Proposer des ateliers en classe intégrant la lecture et l’écri-ture et partager le fruit des apprentissages des élèves lors de soirées familiales.

_

Concernant le premier objectif, nous illustrons concrètement l’organisation des ateliers destinés aux parents lors des soirées de littératie familiale._

Les soirées familiales : un succès impressionnant ! L’équipe a convié les parents à quatre moments durant l’an-née. Chaque soirée comportait un thème particulier et était construite autour d’ateliers rotatifs, permettant ainsi à l’en-semble des parents présents (environ 60) de vivre trois types d’activités de 20 minutes chacune :• Un modelage avec les enfants devant les parents L’orthopédagogue animait une activité permettant aux

parents de voir concrètement comment intervenir auprès de l’enfant lors de la période de devoirs et de leçons. À la fin de l’animation, elle répondait aux questions des parents.

• Un atelier de trucs et de stratégies sur les thèmes de la soirée Cet atelier présentait des idées concrètes pour rendre les temps de lecture ou d’écriture agréables et ludiques. Par exemple, lors d’une des soirées, Julie Provencher, spécia-liste en accompagnement parental en lecture, est venue partager ses trucs et ses outils pour donner le gout de lire aux enfants.1

• Une activité parent-enfant permettant de mettre en pra-tique les observations et les stratégies enseignées

Cette activité était animée par les enseignantes dans chacune de leur classe. Elle permettait aux dyades (parent-enfant) de vivre une activité de lecture ou d’écriture dans un climat agréable en utilisant des outils et des stratégies présentés dans les autres ateliers.

_

Chaque soirée comportait un thème particulier. Les voici sous forme de tableau : _

Au terme de chacune des trois premières soirées, les parents recevaient de la documentation à réutiliser à la maison. Pour les parents qui ne pouvaient être présents, un résumé des contenus de la soirée leur était envoyé dès le lendemain. _

Des ateliers stimulants et créatifs pour conjuguer lire et écrire ! En ce qui concerne le deuxième objectif, les élèves de ces trois classes ont eu l’occasion de vivre différents ateliers inté-grant certaines dimensions de la lecture (comprendre, réagir et apprécier) ainsi que des stratégies d’écriture en expérimentant la démarche des orthographes approchées2. Sept ateliers ont

été créés et expérimentés dans les trois classes. Chacun d’eux tenait compte d’intentions pédagogiques permettant d’exploi-ter la richesse d’albums de littérature jeunesse sélectionnés judicieusement avec le soutien de la bibliothécaire. _

Lors de la dernière soirée familiale, les élèves ont pu expo-ser leurs travaux dans le cadre de kiosques et expliquer aux parents présents leur démarche d’apprentissage. Cette soirée a permis aux parents de voir le fruit de leur collaboration avec l’école pour soutenir leur enfant dans ses premiers apprentis-sages en lecture et en écriture. _

Soirée 1 Soirée 2

L'importance de lire pour le plaisir

Présentation d'un passeport lecture

Accompagner son enfant dans ses apprentissages en lecture

Soirée 3 Soirée 4

Accompagner son enfant dans ses apprentissages en écriture

Portes ouvertes sur les sept ateliers réalisés en classe au

courant de l'année

Ce qui ressort de l’évaluation qui a été complétée par une trentaine de parents lors

de la dernière soirée, c’est que ce projet leur a permis de prendre conscience qu’ils

ont un rôle essentiel à jouer auprès de leur enfant pour soutenir l’apprentissage

en lecture et en écriture.

Un directeur engagé !

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ConclusionAu terme de ce projet, les constats sont positifs. Ce qui res-sort de l’évaluation qui a été complétée par une trentaine de parents lors de la dernière soirée, c’est que ce projet leur a permis de prendre conscience qu’ils ont un rôle essentiel à jouer auprès de leur enfant pour soutenir l’apprentissage en lecture et en écriture. Par exemple, certains ont mentionné avoir compris l’importance de lire et d’écrire devant leur enfant et avec leur enfant afin que ce dernier puisse avoir des modèles positifs et inspirants. D’autres ont manifesté leur apprécia-tion de l’accueil reçu lors des deux premières années de leur enfant à l’école de leur village. Le mérite revient bien sûr aux enseignantes et à leur directeur qui, chaque soirée, valorisaient la collaboration école-famille pour la réussite des élèves et réitéraient une invitation à venir régulièrement participer à la vie scolaire de leur enfant. _

Même si chaque projet est unique et prend la couleur de la culture de l’école, nous souhaitons que cet article puisse inspirer d’autres équipes intervenant en début de scolarité à développer des activités de littératie familiale permettant aux parents de s’impliquer concrètement dans le parcours scolaire de leur enfant dès son entrée à l’école. _

Notes1. Tout le matériel développé dans le cadre de ce projet est

disponible gratuitement sur le site : mieuxenseigner.com (Canada). Après s’être abonné gratuitement sur le site, il suffit de faire la recherche des documents dans le compte de Brigitte Gagnon.Le projet à l’éducation préscolaire s’intitule : Il était une fois un livre pour toi et moi !Le projet de première année s’intitule : Il était une fois une histoire qui se poursuit !

_

2. Nous tenons à remercier chaleureusement l’équipe de l’école St-Vincent (CS des Hautes-Rivières) pour leur engagement, leur professionnalisme et leur créativité débordante afin de faire de cette année scolaire une expérience enrichissante pour tous les élèves et leurs parents. Julie Desautels, Josée Roy et Marie-Claude Verrier, enseignantes, Lucie Beaudry, orthopédagogue, Daniel Leblanc, directeur retraité, et Nancy Lusignan, bibliothécaire.

Notes

1. Pour de plus amples informations sur les trucs et outils de Julie Provencher, consultez le site de l’auteure : www.pouvoirdelire.com

2. Les orthographes approchées sont des situations d’écriture contextualisées où l’enseignant invite les élèves à écrire en activant leurs connaissances et leurs stratégies orthographiques et en les amenant à réfléchir et à partager leurs hypothèses d’écriture. L’enseignant accorde également une importance à l’enseignement explicite de notions orthographiques et à la (co)construction du savoir orthographique à partir de la comparaison de l’hypothèse d’écriture à la norme orthographique (Charron, 2016).

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Agnès CostergDoctorante et chargée de coursUniversité de Montré[email protected]

Daniel DaigleProfesseurUniversité de Montré[email protected]

À la découverte du Poteau rose ou du Pot aux roses ? Le rôle des frontières lexicales en production écrite chez l’élève du primaire_

Imaginez l i re la phrase sui-vante : Lesjeunesfillessontallées-àlacampagnependantlafindesemaine. L’exercice est complexe. La lecture est lente et cela nuit à la compréhension. Si en lecture les frontières lexicales sont définies par des blancs gra-phiques, en écriture, l’élève doit lui-même les définir à partir des repré-sentations mentales qu’il a inscrites en mémoire. Or, chez certains élèves, par exemple les élèves dyslexiques et les très jeunes scripteurs, ces frontières lexicales ne sont pas toujours bien défi-nies et constituent donc un problème (Ruberto, Daigle et Plisson, 2011). Pour bien comprendre le principe des fron-tières lexicales, il importe tout d’abord de définir les propriétés des mots._

Définition du mot Pour devenir expert en lecture et en écri-ture de mots, l’apprenti lecteur/scripteur doit développer des connaissances liées aux propriétés des mots. Ces proprié-tés sont de trois ordres : les propriétés sémantiques, contextuelles et formelles (Nation, 2001). Premièrement, les pro-priétés sémantiques se rapportent au sens du mot. Le sens est l’aspect le plus important, puisque les mots ne pourront s’inscrire en mémoire que s’ils sont asso-ciés à leur signification. La capacité du jeune enfant à associer une forme orale

à un sens donné lui permet, très généra-lement et dès le début de l’apprentissage formel de l’écrit, de connaitre à l’oral les mots qu’il lit ou qu’il veut écrire (Daigle et al., 2015). Deuxièmement, l’élève doit prendre conscience des contraintes d’utilisation, c’est-à-dire que l’enseignant doit favoriser le développement d’une connaissance des contextes appropriés qui permettent l’utilisation des mots. Par exemple, l’élève apprend à utiliser le mot tapis lorsqu’il s’agit réellement d’un tapis, et privilégiera les mots car-pette ou paillasson plutôt que tapis dépendamment des contextes dans les-quels ils se trouvent. Troisièmement, par propriétés formelles, on entend toutes les caractéristiques du mot à l’oral et à l’écrit. À l’oral, cela signifie savoir pro-noncer et comprendre le mot. Une prise

de conscience des propriétés formelles du mot à l’oral signifie aussi être capable d’en analyser la structure interne/sublexicale, c’est-à-dire les composantes

du mot (rimes, syllabes, phonèmes). Pour l’élève, c’est être capable d’indiquer, par exemple, que le mot tapis est formé

Or, chez certains élèves, par exemple les élèves

dyslexiques et les très jeunes scripteurs, ces frontières

lexicales ne sont pas toujours bien définies et constituent donc un problème (Ruberto,

Daigle et Plisson, 2011).

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de deux syllabes ou que le troisième son est [p]. Alors que la conscience des mots à l’oral débute avant l’entrée for-melle dans l’écrit, c’est lorsque l’élève est confronté à l’enseignement/apprentis-sage formel de la lecture et de l’écriture qu’il développe une connaissance des propriétés des mots à l’écrit (Daigle et al., 2015). Ces propriétés réfèrent aux pro-priétés phonologiques, morphologiques et visuelles du code orthographique du français. Plus précisément, les pro-priétés visuelles de nature sublexicale concernent les particularités orthogra-phiques situées à l’intérieur du mot (par exemple, le n se transforme en m devant b dans le mot chambre, le phonème [o] dans le mot poteau s’écrit o dans la pre-mière syllabe et e-a-u dans la seconde, le mot habit contient deux lettres muettes non porteuses de sens, le h et le t). Les propriétés visuelles de nature lexicale ou supralexicale renvoient, quant à elles, à l’ensemble du mot (être capable de distinguer les mots homophones mère, mer et maire) ou à des séquences de mots (être capable de respecter les frontières lexicales et de produire l’avion plutôt que lavion)._

Problème lié aux frontières lexicales chez certains élèvesLa non-prise en compte des proprié-tés visuelles des mots est responsable de la majorité des erreurs orthogra-phiques chez l’enfant au primaire (Daigle, Costerg, Plisson, Ruberto et Varin, 2016). L’enseignant doit donc proposer un enseignement explicite de ces propriétés. Comme nous l’avons précédemment mentionné, une de ces propriétés concerne le début et la fin des mots. Dès le préscolaire, l’enseignant doit notamment favoriser le développe-ment des connaissances liées aux fron-tières lexicales afin que l’enfant ait une représentation mentale des mots où les frontières lexicales sont bien définies. La plupart des enfants n’éprouvent pas de difficulté avec les frontières des mots. Cependant, plusieurs enfants qui ont le français comme langue seconde, les apprentis lecteurs/scripteurs ainsi que certains élèves en difficulté peuvent avoir des représentations orthogra-phiques mal définies. Des mots qui ne sont pas encore correctement inscrits en mémoire peuvent être à l’origine d’erreurs, à l’écrit, de fusion de mots (par exemple, safame plutôt que sa femme) ou de segmentation de mots

(par exemple, d’emanda au lieu de demanda). Plusieurs données montrent que les enfants dyslexiques sont particu-lièrement à risque de commettre ce type d’erreurs (Daigle et al., 2016 ; Plisson, Daigle et Montésinos-Gelet, 2013). _

Activités pour travailler les connaissances des frontières lexicales Il est important de considérer le jeu pour travailler les connaissances des frontières lexicales aussi bien avec des enfants du préscolaire qu’avec des enfants plus âgés au primaire. En effet, le jeu procure trois avantages (Pierret-Hannecart et Pierret, 2005). En étant ludique, il augmente la motivation et l’engagement ; il suscite l’in-teraction entre les apprenants et il favorise l’expression/la participation des enfants plus timides ou anxieux (EHDAA). Aussi, il est important de travailler ces connais-sances à partir de questions à l’oral, sans soutien écrit, afin d’aider l’enfant à construire des représentations mentales des mots précises avec un début et une fin bien définis. Une boite à questions peut être créée et utilisée lors de la « rou-tine du matin » ou lors d’un défi durant la semaine ou encore en tant qu’activité récompense/privilège. Voici quelques exemples de questions :1. « Compte le nombre de mots dans les

phrases suivantes : Ce bateau a deux voiles./Les ours mangent du saumon./Son frère l’aide à faire ses devoirs. » ;

2. « Quel est le dernier mot dans les phrases suivantes : Sa grand-mère fait de bons gâteaux./Simon a perdu ses outils./Julie a rempli son ballon d’air. ? » ;

3. « Quel est le premier mot dans les phrases suivantes : Jean a reçu des cadeaux pour sa fête./Mon oncle pêche souvent./L’ordinateur de la classe est brisé. ? » ;

4. « Quel est le mot avant banane dans la phrase suivante : La banane est mure ? » ;

5. « Quel est le mot après apprend dans la phrase suivante : Marie apprend à jouer du piano ? » ;

6. « Échange le premier et le dernier mot dans la phrase suivante : Les garçons jouent. » ;

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7. « Construis une phrase de trois mots. »Comme spécifié en 1), 2) et 3), le degré de difficulté des phrases peut varier en intégrant ou non une liaison ou une éli-sion. Il est aussi possible d’inclure ces difficultés pour les questions 4), 5) et 6). Pour la question 7), il est envisageable de demander de construire une phrase avec une liaison ou avec une élision ou les deux. Les questions 1 à 7 varient égale-ment en termes de complexité, les ques-tions 1), 2) et 3) étant plus accessibles que les questions 4), 5), 6) et 7)._

Plus il y a d’informations rattachées à un mot, ou autrement dit, plus l’en-fant a développé une connaissance fine des propriétés d’un mot et notam-ment une connaissance des frontières lexicales, plus faciles seront son stoc-kage en mémoire et sa récupération lors des tâches de lecture et d’écriture (Villepontoux, 1997). D’où l’impor-tance de travailler cet aspect des mots. Enseigner les frontières lexicales, c’est ainsi aider l’élève à découvrir la distinc-tion entre les [poto oz] !_

Références

_ Daigle, D., Anctil, D., Berthiaume, R. et Bruneau, M.-J. (2015). La liste orthographique : des mots à mémoriser ou des cibles lexicales à apprendre ? Québec français, 175, 36-37.

_ Daigle, D., Costerg, A., Plisson, A., Ruberto, N. et Varin, J. (2016). Spelling errors in french-speaking children with dyslexia: phonology may not provide the best evidence. Dyslexia, 22, 137-157.

_ Nation, I. S. P. (dir.) (2001). Learning Vocabulary in Another Language. Cambridge: Cambridge University Press.

_ Pierret-Hannecart, M. et Pierret, P. (2005). Des pra-tiques pour l'école d'aujourd'hui (2e éd.). Éd. de Boeck (Collection outils pour enseigner)

_ Plisson, A., Daigle, D. et Montésinos-Gelet, I. (2013). The spelling skills of French-speaking dyslexic children. Dyslexia, 19(2), 76-91.

_ Ruberto, N., Daigle, D. et Plisson, A. (2011). Repré-sentations lexicales et compétence orthographique chez l’élève dyslexique. Montréal : Association francophone pour le savoir (ACFAS).

_ Villepontoux, L. (dir.) (1997). Aider les enfants en difficulté à l’école – L’apprentissage du lire-écrire. Bruxelles : de Boeck.

Tableau 1 : Les trois types de propriétés visuelles

Type de propriétés visuelles Explications Exemples

Sublexical

Les propriétés visuelles de nature sublexicale concernent les spécifi-cités orthographiques à l’intérieur du mot.

La lettre muette non porteuse de sens s dans jamais.

Le phonème [ã] dans le mot enfant s’écrit e-n dans la première syllabe et a-n dans la seconde.

Lexical

Les propriétés visuelles de nature lexicale renvoient à l’ensemble du mot.

Distinguer les mots homophones vers, vert, ver ou encore verre.

Supralexical

Les propriétés visuelles de nature supralexi-cale renvoient à des séquences de mots.

Respecter les frontières lexicales en produisant l’abeille et non labeille ou d’avoir et non d’a voir.

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Article de partenaire

Dolores TamFormatriceDruide informatique [email protected]

Antidote 9 : des trésors insoupçonnés pour l’apprentissage intégré des langues_

Vous avez accès à un ordinateur équipé d’Antidote ? Chouette ! Sans doute vous rend-il de fiers services pour trouver le mot juste, peaufiner vos écrits et préparer du matériel pédagogique pour votre classe. Si vous arborez un air étonné en lisant ma dernière affirmation, cet article est pour vous. Si vous souriez parce que vous le faites déjà, cet article est aussi pour vous ! Vous y découvrirez certainement de nouvelles richesses._

De l’utilisation des favoris à la création d’un lexique, quelques clics allègeront votre tâche vers l’atteinte d’un objectif simple : l’enrichissement du vocabulaire de vos élèves._

En accord avec le thème du présent numéro, plusieurs disci-plines seront abordées sous l’angle de l’apprentissage intégré du français. Notre objectif est de vous fournir des mots-clés dési-gnant des réalités concrètes et de vous aiguiller vers les ouvrages les plus utiles dans un contexte d’enseignement du français au cœur de différentes matières. En fin de texte, une section « Trucs et astuces » vous accompagnera dans l’utilisation du logiciel._

Science et technologie : univers vivantPour explorer le vocabulaire du monde végétal, parcourez les définitions, les cooccurrences et le champ lexical de mots tels que plante, arbre, fleur, feuille, pétale, conifère ou feuillu. _

En consultant les synonymes spécifiques de plante, on obtient les noms algue, fleur, herbe, légume, mousse, qui désignent tous des organismes observables au Québec. Demandez aux élèves de nommer une plante de chacune de ces catégories ou d’expliquer la différence entre une vivace et une annuelle. Ajoutez ces entrées à vos favoris pour les retrouver facilement en classe. Dans l’en-trée vivace du dictionnaire de définitions, cliquez sur Définition contient (section « Compléments »), puis triez les résultats par noms. Demandez ensuite aux élèves de repérer les plantes de la liste présentes sur notre territoire (houblon, rhubarbe, etc.)._

Géographie et histoire : Premières NationsLes Premières Nations nous ont légué plusieurs mots de voca-bulaire, maintenant intégrés au français. Voici quelques façons de les repérer._

Dans les guides, tapez le mot-clé Amérindien, puis sélectionnez Familles amérindiennes. Vous obtiendrez tout un lot de mots classés selon la nation d’origine. On y retrouvera notamment achigan, kayak, carcajou et poulamon._

Dans les dictionnaires, sélectionnez le critère de recherche Langue d’origine, puis choisissez Langues amérindiennes du Nord. Sélectionnez-y les mots de vocabulaire que vous étudie-rez en classe et ajoutez-les aux favoris. Saisissez les mots-clés langue amérindienne (recherche multimot) et sélectionnez

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_ Antidote 9, version 5 [Logiciel], Montréal, Druide informatique, 2017.

Hyperonyme (mot générique [de]) dans la fenêtre des résultats. Vous obtiendrez une liste de langues amérindiennes d’Amé-rique du Nord. Demandez aux élèves d’y repérer les langues qui sont parlées au Québec._

Dans une optique plus large, cliquez sur Définition contient en utilisant le nom des différentes nations. Pensez aussi à visiter le dictionnaire des familles (inuit, inukshuk, inuktitut). Jumelez le nom d’une nation et le mot Québec pour repérer les réserves amérindiennes. Par exemple, les mots-clés Abénakis Québec vous retourneront les résultats Wôlinak et Odanak, deux réserves du Centre-du-Québec. Repérez la définition de grands personnages : Cartier, Champlain, Donnacona. Saisissez Nouvelle-France et sélectionnez Chercher dans la définition pour en obtenir tout un lot !_

Art : appréciation et description des œuvres d’artQu’il s’agisse de l’œuvre d’un artiste reconnu ou de celle d’un élève, l’appréciation de l’objet prend tout son sens par la jus-tesse du mot. Tirez parti du dictionnaire des cooccurrences et du champ lexical, là où les couleurs, matériaux et, du même souffle, le vocabulaire s’étoffent. Pour alimenter la description des couleurs, consultez les cooccurrences du mot couleur, bien sûr, mais aussi de chacune d’entre elles. S’agit-il d’un bleu clair, d’un bleu ciel, d’un bleu canard ? D’un rouge vif, brique ou cerise ? Explorez également les matériaux (pierre, papier, bronze) ou la nature de l’objet (tableau, dessin, sculpture). Le parcours des cooccurrences nourrira non seulement la plume et le vocabulaire de l’élève, mais aussi son habileté à trans-mettre ses impressions et sa perception d’une œuvre._

Trucs et astucesPour obtenir rapidement les résultats escomptés, voici quelques pistes pratiques. Pour plus de détails, accédez au Guide d’utilisation d’Antidote par le menu Aide du logiciel. _

Recherche multimot. La recherche multimot consiste à saisir deux mots-clés dans la vedette des dictionnaires afin que l’outil de recherche les repère au sein de différentes entrées._

Recherche par critères. La recherche par critères permet de restreindre les résultats de recherche à certains critères pré-cis. On y accède par les petites jumelles situées à droite de la vedette. Un seul ou plusieurs critères peuvent être sélection-nés. Au primaire, on y ajoutera parfois le critère Fréquence afin de limiter certains résultats trop abondants au vocabulaire le plus fréquemment utilisé (à l’écrit), donc plus adapté aux connaissances lexicales des élèves du primaire. _

Filtrer l’affichage. Certaines entrées répertorient des sens dif-famatoires ou péjoratifs. Si l’on souhaite en épargner la lec-ture aux jeunes esprits, il est possible d’ajuster les réglages en conséquence : menu Antidote > Outils > Options > Interface > Contrôle d’accès > Filtrer dans les dictionnaires. _

Impression. Pour imprimer et distribuer des définitions, résul-tats de recherche, liste de cooccurrences et autres trouvailles : menu Antidote > Fichier > Imprimer._

Ajout aux favoris. Tant dans les guides que dans les diction-naires, cliquez sur le petit cœur situé dans le coin supérieur gauche de la fenêtre d’Antidote pour ajouter l’entrée ou le résultat de recherche à vos favoris. Préparer un cours devient un jeu d’enfant !_

Considérez ces démarches comme un point de départ et conti-nuez à explorer le monde fascinant des mots au cœur d’Anti-dote. Développez le réflexe de partager vos découvertes entre collègues et d’augmenter votre savoir-faire grâce à l’entraide avec vos pairs. Il n’y a pas qu’aux élèves que ça réussit !_

Le parcours des cooccurrences nourrira non seulement la plume et le vocabulaire de

l’élève, mais aussi son habileté à transmettre ses impressions et sa perception d’une œuvre.

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Chronique

Au fil des mots

Le rôle du vocabulaire est central dans la compréhension de texte : afin d’atteindre une compréhension efficace d’un texte, un élève doit connaitre de 8000 à 9000 familles de mots (Nation, 2006). Une des stratégies d’enseignement du vocabulaire est l’analyse morphologique des mots. Pourquoi ? Parce que les racines des mots sont extrême-ment productives : la connaissance d’une seule racine per-met d’inférer le sens de plusieurs autres mots de la même famille morphologique (Rasinski, Padak, Newton et Newton, 2008). Ainsi, développer la conscience morphologique et la connaissance des racines des mots peut contribuer à la fois à l’accroissement du vocabulaire et à la compréhension en lecture (Nagy et Anderson, 1984). _

Dans le but de favoriser le développement du vocabulaire des élèves du 3e cycle du primaire, nous proposons une interven-tion didactique ciblant les racines savantes et la formation de familles morphologiques. Puisque 87% du vocabulaire français est d’origine latine ou grecque (Bertrand, 2011), il est pertinent de cibler l’apprentissage des racines savantes ! La Progression des apprentissages (2009) propose d'identi-

fier les mots nouveaux d'un texte en leur donnant un sens, notamment à l'aide de la morphologie. Bien que ce docu-ment suggère l’utilisation de préfixes et suffixes pour nom-mer ces éléments d’origine latine ou grecque, nous opterons pour l’utilisation du terme racine. En effet, étant une des bases morphologiques d’un mot (Harris et Hodges, 1995),

c’est la racine qui constitue le morphème à la source de la formation des familles morphologiques. De plus, comme les racines latines ou grecques peuvent se retrouver en début de mot (p. ex. : vorace), en fin de mot (p. ex. : carnivore) ou au milieu (p. ex. : dévorer), l’appellation fixe préfixe ou suffixe serait erronée (Huot, 2005). _

L’utilisation de cette stratégie morphologique utilisant les racines latines et grecques est bénéfique pour l’apprentissage des autres matières scolaires. En effet, comme l’enseignant du primaire ne fait pas qu’enseigner le français, travailler sur les racines savantes est une belle façon de décloisonner les matières._

Intervention didactiqueLa séquence proposée prend appui sur les connaissances anté-rieures des élèves pour les amener à identifier la racine d’un mot qu’ils connaissent, afin d’inférer le sens d’un mot inconnu (Blachowicz et Ogle, 2001)._

Certains auteurs se sont intéressés à l’étymologie en réperto-riant des familles de mots (Rolland, 2008) ou encore en regrou-pant des racines latines et grecques productives du vocabu-laire français au sein d’un ouvrage de référence (Cellard, 2013). Or, à notre connaissance, il n’existe aucune liste francophone des racines latines et grecques les plus productives tirées des manuels scolaires des élèves du troisième cycle du primaire. Nous suggérons donc de partir des textes informatifs desti-nés aux élèves puisqu’ils regorgent de mots composés de ces racines (Green, 2008)._

Mise en situation• Présenter aux élèves un corpus de phrases dont les mots

contenant la racine ciblée sont identifiés en surbrillance (p. ex. : prédiction, dictée, verdict, etc.). 1. La prédiction de cet enfant s’est accomplie.2. Aujourd’hui, c’est Léa qui donne la dictée.3. Le verdict est prononcé par le juge.

• Demander aux élèves (ils peuvent être groupés par deux) de repérer, dans les mots en surbrillance, les parties du mot qui sont communes (la racine latine ou grecque) et de faire des hypothèses sur le sens des mots en surbrillance.

_

La richesse des racines latines et grecques pour le développement du vocabulaire_

Kathleen Whissell-TurnerÉtudiante au doctorat en éducationUniversité du Québec à Montré[email protected]

Ophélie TremblayProfesseureUniversité du Québec à Montré[email protected]

Puisque 87% du vocabulaire français est d’origine latine ou grecque (Bertrand, 2011), il est pertinent de cibler l’apprentissage des

racines savantes !

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Chronique

Au fil des mots

RéalisationÀ cette étape de la séquence didactique, l’enseignement expli-cite des racines latines et grecques est indispensable pour favo-riser le développement du vocabulaire des élèves. En effet, certaines racines, surtout les racines latines, sont opaques, c’est-à-dire qu’il peut s’avérer difficile de déduire leurs sens sans connaissances préalables. _

Une fois les élèves familiarisés avec la démarche, il est pos-sible d’enseigner plus d’une racine savante à la fois, par sous-thèmes, par exemple. Voici quelques suggestions : • Nombres : pri-, bi-, tri-, quadr-, penta-, hexa-, hepta-, octo-, etc.• Quantité : mono-, pluri-, poly-, etc.• Chaine alimentaire : carni-, herbi-, pisci-, omni-, -vore, etc.• Éléments : hydro-, aqua-, pyro-, aéro-, etc.• Parties du corps : pédi-, céphal-, digi-, bucco-, oto-, opto-, etc._

Pour l’enseignement des racines latines et grecques, nous sug-gérons de poursuivre la séquence comme suit : • Présenter la racine ciblée dans la mise en situation et son

sens (p. ex. : dic- ou dict- signifient dire).• Dénombrer, avec les élèves, les mots d’une famille morpho-

logique formée à partir d’une même racine (p. ex. : bénédic-tion, dictateur, dicton, dictaphone, etc.).

• Définir ces mots en s’appuyant sur le sens de la racine et comparer ces définitions à celle issue du dictionnaire afin de constater les similarités.

• Faire ressortir, s’il y a lieu, des contrexemples signifiants, c’est-à-dire des mots qui présentent la même suite de lettres, mais ne correspondant pas à la racine ciblée (p. ex. : médi-cament, médical, etc.).

• Intégrer les racines travaillées dans de nouvelles activités de pratique guidée, puis autonome, telle que la complétion de phrases.

_

IntégrationL’étape d’intégration des apprentissages doit permettre aux élèves de réinvestir leurs nouvelles connaissances dans diffé-rents contextes. Pour ce faire, nous suggérons deux activités : la création d’un jeu-questionnaire et celle de paires d’images._

Exemple de jeu-questionnaireQui suis-je ? Je suis ce qui est dit ouécrit à l’intention d’une autre personne.a) un autographeb) une dédicacec) une signature_

Exemple de paires d’imagesQuelle image représente mieux la phrase ci-dessous ? Ex. : Voici un dictaphone.

_

Ces activités permettent aux enseignants d’utiliser les créa-tions des élèves lors de périodes de transition. Ainsi, l’exposi-tion aux racines latines et grecques sera plus fréquente, ce qui favorisera, nous l’espérons, leur rétention et l’enrichissement du vocabulaire des élèves. _

Références

_ Bertrand, O. (2011). Histoire du vocabulaire français. Palaiseau : Éditions de l'école Polytechnique.

_ Blachowicz, C. et Ogle, D. (2001). Reading com-prehension: Strategies for independent learners. New York: The Guilford Press.

_ Cellard, J. (2013). Les racines grecques et latines du vocabulaire français. Bruxelles : De Boeck Supérieur.

_ Harris, T. L. et Hodges, R. E. (1995). The literacy dictionary: The vocabulary of reading and writing. Newark: International Reading Association.

_ Huot, H. (2005). La morphologie : Forme et sens des mots du français (2e édition). Paris : Armand Colin.

_ Ministère de l'Éducation du Loisir et du Sport (2009). Progression des apprentissages. Français, langue d'enseignement. Québec : Ministère de l'Édu-cation, du Loisir et du Sport.

_ Nagy, W. et Anderson, R. C. (1984). How Many Words Are There in Printed School English ? Rea-ding Research Quarterly, 19, no 3, p. 304-330.

_ Nation, I. S. P. (2006). How Large a Vocabulary Is Needed For Reading and Listening ? The Canadian Modern Language Review/La Revue canadienne des langues vivantes, 63, no 1, p. 59-82.

_ Rasinski, T. V., Padak, N., Newton, R. M. et Newton, E. (2008). Greek & Latin Roots. Keys to Building Voca-bulary. Huntington Beach: Shell Education.

_ Rey-Debove, J. (1984). Le domaine de la morpholo-gie lexicale. Cahiers de lexicologie, 45, p. 3-19.

_ Rolland, J.-C. (2008). Les grandes familles de mots. Récupéré le 26 septembre 2017, de http://projetba-bel.org/mots/index.php

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Chronique

Les trois favoris

3 livres, 3 cycles, 3 activités en mathématiques !_

Emmanuelle RousseauConseillère pédagogiqueMessageries [email protected]

Au printemps dernier, j’ai animé une conférence sur l’utilisation de la littéra-ture jeunesse pour enseigner les mathé-matiques et, pour cette chronique, j’ai eu envie de choisir parmi les titres que je propose lors de cette formation. _

À partir du 1er cycle - La Bouilloire, d’Etsuko Watanabe, est un album com-plètement fou, très riche visuellement. C’est d’ailleurs pour cela qu’il fait par-tie de mes favoris. Lors d’une lecture à voix haute, vous pourrez travailler quelques connaissances en mathéma-tiques (entre autres choses, le dénom-brement). Vous pourrez ensuite pro-poser à vos élèves plusieurs exercices et activités, dont des résolutions de problèmes, créées à partir de l’histoire. Comme c’est un album de grand format, il est agréable à animer, mais l’utilisation d’une caméra et d’un projecteur pour-rait bénéficier à toute la classe, surtout lorsqu’il s’agit de trouver ou de comp-ter des items dans les illustrations. _

La Bouilloire est l’histoire d’une petite fille nommée Blanche, toute de rouge vêtue, qui habite sur une colline, à l’orée d’une forêt. Un jour, sa maman, la trou-vant désormais suffisamment grande pour cela, l’envoya faire seule les courses. Elle lui demanda d’aller lui acheter une bouilloire. Cette requête se transforma en un périple extraordinaire, où la petite fille rencontra de nombreux person-nages, dans des mondes surprenants._

Dès la deuxième double page, les enfants sont invités à compter : « Combien d’ani-maux sont cachés dans cette forêt ? », se demande Blanche. Un peu plus loin, Blanche rencontre monsieur Grenouille qui lui demande de l’aider à compter les têtards pour le roi. Comme il y en a beaucoup, invitez les élèves à dénom-brer les têtards en les groupant par 10. Demandez-leur d’estimer la réponse. Qui sera le plus près de la bonne réponse ? Si vous pouvez projeter l’illustration sur le TNI, l’activité pourra se faire lors de la lec-ture. Sinon, vous pourrez y revenir plus tard en ayant photocopié cette page (en respectant les droits d’auteur, bien sûr)._

Quelques pages plus loin, Blanche entre dans la boutique de bouilloires, mais elle découvre qu’elle n’a pas assez d’argent pour en acheter une. Profitez de ce passage pour inventer quelques activités de résolutions de problèmes qui permettront aux élèves de dévelop-per des processus de calcul écrit pour l’addition et la soustraction. Vous pouvez changer les euros en dollars pour facili-ter la compréhension. Par exemple : « Si

Blanche a 5 dollars en poche, combien lui manque-t-il d’argent pour acheter la première bouilloire ? » (25 - 5 = 20) ou « Combien d’argent Blanche aurait-elle eu besoin pour acheter les deux bouil-loires qu’elle a choisies ? » (25 + 20 = 45)._

Dans les pages suivantes, Blanche fait l’acquisition d’une très grosse bouilloire, qu’elle échangera contre des plus petites. Vous pouvez vous en inspirer pour proposer un exercice sur les nombres croissants ou décroissants. Imaginez combien mesure chaque bouilloire. Par exemple : « Classe en ordre décroissant les bouilloires que Blanche a eues ».

_

Finalement, c’est un chaudronnier qui pourra offrir à Blanche une bouilloire de taille normale. Vous pouvez, encore ici, créer un exercice de résolutions de problèmes (Le chaudronnier fabrique six bouilloires. Blanche garde une bouil-loire et offre les autres au chaudronnier. Combien de bouilloires lui reste-t-il ?)._

En français, cet album offre aussi de nombreuses possibilités d’exploitations pédagogiques. Par exemple, lors d’une lecture interactive, vous pourrez relever quelques inférences :

— Quand l’auteur écrit « Son cœur bat fort », peux-tu me dire comment se sent Blanche ?

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— Quand Blanche dit : « Je dois vraiment faire attention… », à quoi pense-t-elle ? _

Vous pourrez aussi prendre le temps d’ex-pliquer des mots de vocabulaire, comme : lisière, être navré, piailler, artère, etc. Relevez aussi certaines expressions. Par exemple, demandez aux élèves de trouver une expression québécoise pour rempla-cer « faire les courses ». Puisque l’album fait un clin d’œil au Petit Chaperon rouge, vous pourrez aussi faire des liens avec d’autres lectures. Les illustrations étant particulières, vous pourrez aussi travail-ler l’interprétation : Lorsque Blanche sort du magasin, pourquoi, à ton avis, la page est-elle en noir et blanc ?_

Finalement, le livre offre même un jeu : une double page est un labyrinthe ! Les élèves adorent y jouer ! _

À partir du 2e cycle - Au deuxième cycle, pour travailler la mesure, j’ai choisi un album qui fait partie d’une série que j’aime particulièrement. Dans Le petit menuisier, de Lars Klinting, on retrouve Castor qui a décidé de faire de la menui-serie. Tout au long de l’album, il nous explique étape par étape comment fabri-quer une boite à outils. À la toute fin de l’album, on retrouve un plan des diffé-rentes pièces à assembler pour pouvoir refaire le projet à la maison. Utilisez cette

double page pour créer des exercices sur la mesure, par exemple :• Calculer le périmètre des différentes

figures planes du plan.• Sur de grandes feuilles, reproduire, à

l’échelle, les différentes pièces, donc, mesurer. Attention, dans le plan origi-nal, les mesures sont inscrites en mil-limètres ; vous pouvez donc aussi leur demander de convertir ces longueurs en centimètres.

• À partir de l’illustration, demandez aux élèves de colorier la surface des différentes figures du plan.

• Utiliser la figure du petit côté pour comparer les angles.

_

Voici quelques idées pour créer des exer-cices de résolutions de problèmes avec cette double page : • Castor souhaite finalement faire une

boite à outils deux fois plus grande. Quelle sera la mesure des quatre côtés du fond ?

• Quand Castor a acheté la barre ronde pour faire la poignée, le morceau avait 600 mm de long. Castor a coupé la longueur qu’il lui faut (352 mm). De quelle longueur est le morceau qu’il lui reste ?

• Si Castor fabrique 3 boites à outils, combien de morceaux a-t-il besoin en tout ? N’oublie pas de compter les vis et les clous !

_

Si cela est possible, vous pourriez bien entendu aider les élèves à confectionner leur propre boite à outils (il faudrait que les parties soient déjà coupées et qu’il ne reste que l’assemblage) ; un beau projet à faire en science !_

Dans la même série, vous trouverez éga-lement le livre Le petit pâtissier. Dans cet album, Castor va confectionner un gâteau. La recette est donnée à la fin de l’album. Vous pouvez donc aussi l’utili-ser pour travailler la mesure (les volumes et les masses). Pour créer des exercices de résolutions de problèmes, doublez ou triplez la recette ! Le troisième titre de la

série, Le petit jardinier, vous permettra de travailler les différentes parties des plantes, en science. Dans les trois cas, la particularité de cette série est que, bien que ce soit des textes de fiction, ce sont des textes qui précisent des « comment faire ». Ce sont des marches à suivre. En écriture, demandez aux élèves d’écrire une histoire qui met en scène Castor, par exemple : Le petit éditeur (Castor fabrique un livre) ou Le petit bricoleur (Castor fait un projet en arts plastiques… tiens, tiens, le même que les élèves ont à faire peut-être !) ou autre. Mettez à contribution les talents de chacun (faire de la couture, gagner à un jeu vidéo, créer un album photo, etc.). Comme dans la série, les élèves devront trouver le vocabulaire précis._

À partir du 3e cycle – Pour le troi-sième cycle, j’ai choisi un roman qui me tient énormément à cœur : Gros sur la tomate, de Dominique Brisson. Le narrateur, Bob, est un jeune garçon dyslexique, dysphasique, dyscalculique et dysgraphique. Il nous raconte son quotidien dans sa nouvelle école. Les dix-sept chapitres, très courts, peuvent convenir à une lecture à voix haute par l’enseignant ou à un cercle de lecture. La majorité des chapitres commencent ou contiennent un problème mathématique et la réponse que donne Ferdinand. Vous remarquerez tout de suite que la réponse que donne le personnage est erronée.

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Chronique

Les trois favoris

Voici un exemple tiré du roman : Exercice.« Le cours de mathématiques dure 55 min. Il s’est terminé à 10 h 25. À quelle heure a-t-il commencé ? »Réponse : 60 h du soir._

Si vous choisissez de faire la lecture à votre groupe (peut-être un chapitre par jour), écrivez les problèmes mathéma-tiques au tableau. Demandez aux élèves de trouver la bonne réponse et tentez de comprendre quel a été le raisonne-ment de Ferdinand. Cela pourra vous servir de révision ! Vous pourrez faire la même chose avec les exercices en fran-çais. Vous pouvez également noter les différentes expressions idiomatiques rencontrées dans le texte. Comme le personnage principal ne les comprend pas, il y en a beaucoup. Donnez la défi-nition de chacune d’elles. Si vous faites lire le roman en cercle de lecture, l’élève qui devra relever les expressions idioma-tiques pourra aussi trouver leur prove-nance. Changez régulièrement les rôles afin que les problèmes mathématiques soient résolus par des élèves différents. _

Avant la lecture, je vous suggère de défi-nir, pour les élèves, ce que sont les dif-férents troubles de l’apprentissage ren-contrés par le personnage. Cela servira à conscientiser les élèves aux réalités vécues par le personnage, et peut-être par d’autres élèves de l’école ou de la classe. La compréhension d’une différence aide souvent à ne pas juger les autres. Dans le roman, tentez d’associer les réponses et les problèmes vécus par Ferdinand aux différents troubles. Pour vous aider à expliquer ces troubles à vos élèves, je vous suggère les albums de la collection Au cœur des différences (vous trouverez les références à la fin de l’article). Bien que ce soit pour des enfants plus jeunes, l’explication est juste et efficace. _

Bien qu’en théorie je ne vous présente que trois livres par chronique, je vous offre un petit bonus aujourd’hui, pour les élèves

du 2e cycle et du 3e cycle. J’ai découvert un recueil de casse-têtes mathématiques ! Mathématic et tac propose 30 exercices de résolutions de problèmes humoris-tiques. En voici un exemple :« Casse-tête 8 »Au départ, mon livre avait trente pages. Je trouvais que c’était beaucoup. Heureusement, le chat a fait pipi sur les deux premières pages, mon petit frère en a mangé trois au milieu et j’ai renversé mon bol de chocolat sur les pages 24 et 25. Combien de pages me reste-t-il à lire ?Est-ce que ce n’est pas largement suffi-sant pour un enfant de huit ans ?Réponse :Nombre de pages illisibles ou dispa-rues : 2 (à cause du chat) + 3 (à cause de mon petit frère) + 2 (à cause du cho-colat), soit un total de 7.Il y avait trente pages dans mon livre. Il m’en reste donc 23 à lire : 30 - 7 = 23.Eh oui, c’est bien suffisant pour un enfant de huit ans… Il reste à espérer que mon petit frère n’ait pas mangé les meilleures pages, mais de toute façon, comme il me reste les pages 26 à 30, j’aurai le mot de la fin._

Vous pouvez garder une copie pour les meilleurs élèves qui en voudraient un peu plus, ou bien, une fois par semaine peut-être, proposez un casse-tête à toute la classe ; un défi mathématique ! »_

Si vous êtes intéressé par la conférence sur l’utilisation de la littérature jeunesse pour enseigner les mathématiques, ou si vous désirez recevoir la liste complète, n'hésitez pas à m'écrire !_

Références

_ Brisson, D. (2007). Gros sur la tomate. Paris : Syros. (Collection Tempo)

_ Hoestlandt, J. (2010). Mathématic et tac. Paris : Nathan. (Collection Nathan poche — Humour)

_ Klinting, L. (2017). Le petit jardinier. Paris : Albin Michel Jeunesse. (Collection Panda poche)

_ Klinting, L. (2017). Le petit menuisier. Paris : Albin Michel Jeunesse. (Collection Panda poche)

_ Klinting, L. (2016). Le petit pâtissier. Paris : Albin Michel Jeunesse. (Collection Panda poche)

_ Marleau, B. (2014). Les mots du ventre – La dyslexie. Sainte-Thérèse : Boomerang Éditeur Jeunesse. (Collection Au cœur des différences)

_ Marleau, B. (2008). Vincent et les pommes – La dysphasie. Sainte-Thérèse : Boomerang Éditeur jeunesse. (Collection Au cœur des différences)

_ Watanabe, E. (2012). La Bouilloire. Paris : Albin Michel Jeunesse.

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Thomas RajotteProfesseurUniversité du Québec à [email protected]

Gabrielle CôtéEnseignante au primaire et finissante au baccalauréat en éducation préscolaire et en eseignement primaireUniversité du Québec en Abitibi-Té[email protected]

J’ai… Qui a ? : un jeu divertissant permettant de réviser et de consolider les acquis des élèves en mathématiques_

Les mathématiques peuvent provoquer de l’inquiétude, du stress et même un sentiment d’anxiété chez les élèves du primaire et du secondaire (Lafortune, 2002 ; OCDE, 2015). Lorsqu’elles perdurent, ces émotions peuvent entraver forte-ment le cheminement scolaire des élèves (Adihou, 2011). Afin d’éviter que l’apprentissage des mathématiques engendre ce type de conséquences, Fosnot et Dolk (2010) suggèrent de transformer la classe en communauté de mathéma-tiques. Selon ces chercheurs, la création d’une telle commu-nauté constitue une composante pédagogique cruciale qui permet aux élèves de réfléchir collectivement et de mettre en place des discussions en mathématiques. À la différence des pratiques traditionnelles à l’intérieur desquelles le dia-logue s’établit entre l’enseignant et un élève, les participants de la communauté parlent entre eux, se posent des ques-tions et commentent mutuellement leurs idées. _

Si la mise en place d’une telle communauté exige de la rigueur ainsi qu’une classe mature, certaines activités permettent d’ini-tier et d’amener les élèves à collaborer au sein d’une tâche commune en mathématiques. Dans le cadre de cet article, nous présenterons spécifiquement le jeu J’ai… Qui a ? et nous expli-querons comment ce type de tâche peut contribuer à mettre en œuvre une approche collaborative au sein d’une classe. Enfin, pour démontrer la pertinence de ce jeu, nous présenterons le témoignage d’une nouvelle enseignante du primaire._

Le principe du jeu J’ai… Qui a ?Le principe du jeu J’ai… Qui a ? est relativement simple et peut s’appliquer à une multitude de concepts. Pour les besoins de cet article, nous présenterons cette activité en utilisant le concept des fractions. Afin d’entamer le jeu, une carte doit être distribuée à chaque élève (ou plus si l’on souhaite prolonger l’activité).

Comme représenté par la Figure 1, chaque carte comprend deux sections, soit une section « J’ai » et une section « Qui a ? ». À tour de rôle, les élèves nomment la fraction qui est représentée sur leur carte. Ensuite, en se référant à la section « Qui a ? » de leur carte à jouer, ceux-ci demandent à la classe qui est le propriétaire d’une fraction prédéterminée. En nous référant à la Figure 2, voici un exemple concret du jeu J’ai… Qui a ?

• L’élève qui a la première carte du jeu : « J’ai la première carte. Qui a un quart ? »

• L’élève ayant la seconde carte : « J’ai un quart. Qui a 3 dixièmes ? »

• Le jeu se termine lorsque l’élève qui possède la dernière carte nomme la fraction qu’il a entre les mains.

• L’élève ayant la dernière carte : « J’ai quatre septièmes et c’est la dernière carte ! »

Figure 1 : Exemples de cartes J’ai… Qui a ? pour un jeu abordant le concept de fractions

Figure 2 : Exemple d’une dernière carte J’ai… Qui a ?

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L’exemple ci-dessus démontre que ce jeu devient un défi de classe, où on veut faire le tour du paquet de cartes le plus rapidement possible. À cet effet, l’utilisation du chronomètre dans ce jeu est fort pertinente, et ce, afin de motiver les élèves à réaliser collectivement la tâche proposée de plus en plus vite._

Dans la version proposée de ce jeu, les élèves travaillent la prononciation, la reconnaissance ainsi que la lecture des frac-tions. Conséquemment, il s’agit d’une activité ludique qui est complémentaire à la dictée de nombres. Par ailleurs, il est possible d’utiliser ce jeu avec d’autres familles de nombres (nombres décimaux, nombres naturels, entiers relatifs, etc.). De plus, le jeu J’ai… Qui a ? peut aussi s’appliquer aux différentes opérations (p. ex. : « J’ai la première carte. Qui a 2 + 2 ? », « J’ai 4. Qui a 3 + 4 ? »), ainsi que plusieurs autres domaines des mathématiques (géométrie, mesure)._

Pourquoi jouer à J’ai… Qui a ?À notre sens, divers arguments peuvent être évoqués afin d’amener les élèves d’une classe à jouer à J’ai… Qui a ?. Dans un premier temps, il importe de mentionner que ce type de tâche permet d’impliquer l’ensemble des élèves d’une classe dans une activité à l’intérieur de laquelle la collabo-ration de tout un chacun est nécessaire à la réussite du jeu. Conséquemment, par les liens tissés entre les élèves, cette tâche peut contribuer à la solidarité de la classe. Cela peut servir d’assise à une éventuelle mise en œuvre d’une commu-nauté de mathématiques. De plus, selon les visées de l’ensei-gnant, ce jeu pourrait également être utilisé dans le cadre de sous-groupes de besoins._

Dans un deuxième temps, il importe de mentionner que le jeu J’ai… Qui a ? a un caractère fort polyvalent. En effet, dans un contexte ludique et agréable, ce jeu peut s’appliquer à dif-férents éléments de contenu en mathématiques. Par exemple, au lieu d’effectuer des dictées de nombres traditionnelles dans le cadre d’une évaluation hebdomadaire, un enseignant peut utiliser le jeu J’ai… Qui a ? pour apprendre aux élèves à nom-mer les nombres [voir Figure 3]. _

Autrement, il est aussi possible d’utiliser cette activité afin de consolider la confiance des élèves à l’égard des tables de multiplication ou d’addition [voir Figure 4]._

Troisièmement, ce jeu peut aisément être utilisé dans un contexte compétitif. En effet, une classe peut chronométrer la durée d’une partie de J’ai… Qui a ? et tenter de battre son record à l’intérieur d’une partie subséquente. Comme men-tionné par le Conseil supérieur de l’éducation (1999) ainsi que Lajoie (2003), le caractère compétitif du jeu constitue un levier pour motiver les garçons de la classe._

Finalement, il est important de mentionner que le jeu J’ai… Qui a ? peut être employé dans un contexte multidisciplinaire. En effet, ce jeu peut aisément être réutilisé afin d’aborder des éléments de contenu en français, en science, en univers social ou même en éthique et culture religieuse. Ces versions alter-natives du jeu sont faciles à créer et plusieurs de celles-ci sont accessibles sur le Web. L’exemple présenté au sein de la Figure 5 permet de voir que l’on peut utiliser le jeu J’ai… Qui a ? pour apprendre le nom des animaux._

Témoignage de madame Gabrielle Côté, enseignante primaireJe suis étudiante au baccalauréat en éducation préscolaire et en enseignement primaire et j’ai eu la chance de découvrir ce jeu lors de ma première année de stage au 3e cycle du pri-maire. J’ai beaucoup aimé l’idée et j’ai donc tenté de réinvestir celle-ci lors de mon troisième stage au 2e cycle. J’ai travaillé les fractions, les nombres décimaux et les tables de multiplication avec les élèves et j’ai pu remarquer la motivation montante de ceux-ci lorsque venait le temps d’y jouer une ou deux parties dans nos périodes de transition. Nous en faisions même une compétition avec l’autre classe du même niveau !_

Pendant mon dernier stage à temps plein au 1er cycle, après avoir observé les élèves qui apprenaient à reconnaître leurs

Figure 3 : Carte de J’ai… Qui a ? impliquant les nombres naturels

Figure 4 : Le jeu J’ai… Qui a ? pour travailler les tables de multiplication

Divers arguments peuvent être évoqués afin d’amener les élèves d’une classe

à jouer à J’ai… Qui a ?

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nombres, à lire et à écrire, j'ai réalisé que ce jeu pouvait être très bénéfique pour consolider les apprentissages de mes élèves (ce qui a effectivement été le cas). C’est aussi une façon très agréable d’apprendre tout en s’amusant !_

En conclusionNous recommandons vivement aux enseignants du primaire d’utiliser le jeu J’ai… Qui a ? dans leur classe. En plus d’être motivant, ce jeu permet une collaboration de l’ensemble des élèves vers l’atteinte d’un objectif commun. Considérant les apports potentiels du jeu et la facilité à laquelle il peut être mis en place, nous concevons que les enseignants du Québec devraient envisager l’utilisation de ce divertissement. N’hésitez pas à expérimenter le jeu J’ai… Qui a ? dans vos classes et vous saisirez le sens de l’expression « entretenir le plaisir d’apprendre » !_

Figure 5 : 3 cartes J’ai… Qui a ? visant l’apprentissage du nom des animaux

Références

_ Adihou, A. (2011). Enseignement-apprentissage des mathématiques et souffrance à l’école. Les Collectifs du Cirp, 2, 90-102.

_ Conseil supérieur de l’éducation (1999). Pour une meilleure réussite scolaire des garçons et des filles. Sainte-Foy : Conseil supérieur de l’éducation.

_ Fosnot, T. et Dolk, M. (2010). Jeunes mathématiciens en action : construire le sens du nombre, l’addition et la soustraction. Montréal : Chenelière Éducation.

_ Lafortune, L. (2002). Chères mathématiques : susciter l’expression des émotions en mathématiques. Sainte-Foy : Presses de l’Université du Québec.

_ Lajoie, G. (2003). L’école au masculin : réduire l’écart de réussite entre garçons et filles. Québec : Septembre éditeur.

_ OCDE (2015). Plus de peur que de maths. Paris : Organisation pour la coopération et le développe-ment économique.

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Article de partenaire

La finance est comme une langue. Pour bien la comprendre, il faut connaitre son vocabulaire et en mai-triser les concepts de base._

Les semaines qui précèdent le temps des Fêtes prennent souvent des allures d’un marathon de consommation. Pourquoi ne pas profiter de cette période pour jouer avec les mots liés aux finances ? _

C… pour consommationLes jeunes sont baignés tôt durant leur enfance dans cette ambiance festive d’avant Noël durant laquelle « on ne regarde pas à la dépense ». Où se trouve la limite entre consommation et surcon-sommation ? Comme consommateurs en devenir, les jeunes doivent apprendre plus tôt que tard les bonnes pratiques d’achat responsables et sécuritaires._

R… pour réduire, réutiliser et recyclerSi les cadeaux sont, pour plusieurs, essentiels, acheter ne l’est pas pour autant. Si l’on veut poursuivre la tra-dition, plusieurs options existent et acheter n’est pas toujours la solution. La valeur d’un bien ne se mesure pas seu-lement au prix payé ! Alors, on réutilise ? On « fait maison » ?_

Quand on y pense, réutiliser tombe sous le sens. Le jeune n’utilise plus un objet ou un vêtement, mais il sait que son ami

l’aime bien… Bingo ! Un autre est gour-mand et son ami se débrouille bien en cuisine ? Hourra, un cadeau « fait mai-son » sera toujours apprécié ! Ces idées se déclinent à l’infini : cadeaux individuels, échange, pige, etc._

A… pour achatsMalgré les meilleures intentions, il reste qu’un consommateur en devenir doit aussi apprendre à transiger. Les jeunes voient leurs parents acheter à l’épicerie, au centre commercial, par Internet… Quels sont les modes de paiement existants ? Quand, où et comment les utiliser ? En quoi sont-ils différents ? Comment les utiliser de façon sécuri-taire ? Carte de débit, argent comptant, carte de crédit, chèque, carte prépayée, versements au magasin (achetez main-tenant, payez plus tard), etc. _

Fêter autrement, est-ce possible ?Les jeunes grandissent en suivant la tradition familiale. A-t-elle changé au fil du temps ? Discuter en groupe du sujet peut être bénéfique pour eux. Ils prendront conscience que les choses changent. De plus en plus, le gaspillage est décrié. Progressivement, les gens vivent les Fêtes autrement. Inspirés de ce qu’ils constatent, les jeunes appren-dront petit à petit à faire des choix res-ponsables pour devenir des acteurs de ces changements positifs pour la pla-nète, pour la société et pour eux-mêmes._

À réaliser en classe Estimer la valeur des biens Objectif : se familiariser avec le prix de produits de consommation en consul-tant des circulaires d’épicerie ou d’autres

magasins de détail. Cette activité, inté-ressante pour les couts associés aux repas, s’étendrait facilement à l’ensemble des dépenses entourant les Fêtes._

Découvrir les modes de paiementObjectif : découvrir les avantages et les inconvénients des modes de paiement. Les jeunes apprennent les bonnes pra-tiques relatives à l’utilisation des modes de paiement ainsi qu’à la protection des renseignements personnels._

La surconsommation (vidéo)Objectif : guider le jeune vers de bons choix lors d’un passage à l’épicerie afin de respecter le budget. Une belle entrée en matière pour lancer une discussion._

Pour aller plus loinCes activités et plusieurs autres à réaliser en classe sont disponibles au www.des-jardins.com/enseignants. Ciblées pour chaque groupe d’âge et se glissant dans plusieurs matières, elles stimuleront l’apprentissage de la « langue » financière chez vos élèves._

Marie-Christine DaignaultChef de contenuMouvement [email protected]

L'apprentissage de la finance, un mot à la fois_

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Brigitte StankéOrthophoniste et professeureUniversité de Montré[email protected]

Christian DumaisProfesseur de didactique du françaisUniversité du Québec à Trois-Riviè[email protected]

An, am, en, em, aon ou aen ? Comment écrire le son /ã/ ?_

Rappelons que le français comporte quatre voyelles nasales : /ã/1 (p. ex. : lent : /lã/), /ɔ̃/ (p. ex. : bon : /bɔ̃/), /œ̃/ (p. ex. : un : /œ̃/) et /ɛ̃/ (p. ex. : pain : /pɛ̃/). Cette chronique traite plus particulièrement des graphèmes du son /ã/. Selon Pothier et Pothier (2004), la transcription de ce son ne serait toujours pas maitrisée à la fin de la 5e année du primaire, car la fréquence des deux graphèmes principaux, an et en, est presque équivalente (an : 49 % et en : 51 %). Toutefois, l’enseignement de la morphologie permet de faci-liter la bonne orthographe de ce son. Cette chronique porte sur le choix de la lettre a ou e des graphèmes an/am et en/em permettant de transcrire ce son._

Les graphèmes an/am Les adjectifs et les noms dérivés d’un verbe se terminant par le son /ã/ s’écrivent le plus souvent à l’aide de la lettre a (p. ex. : menaçant, vivant). Le son /ã/ précédé ou suivi des sons /∫/ (ch), /Ʒ/ (j) ou /g/ (gu) s’écrit très souvent à l’aide de la lettre a (p. ex. : chant, grange, langage)._

Les graphèmes en/emLe préfixe /ã/ s’écrit toujours à l’aide de la lettre e suivi de la lettre n ou m (en ou em). Le son /ã/ du suffixe /mã/ s’écrit toujours à l’aide de la lettre e

si ce mot est un adverbe.Les adjectifs et les noms n’étant pas dérivés d’un verbe s’écrivent le plus souvent à l’aide de la lettre e (p. ex. : prudent, garnement).Le son /ã/ des verbes commençant par ce son ou se terminant par la syllabe /ãdr/ s’écrit à l’aide de la lettre e (p. ex. : entendre)._

Autres graphèmesDe façon anecdotique, les graphèmes suivants sont utilisés pour écrire le son /ã/ : aon (paon, faon, lycaon, taon) et aen (Caen). _

Un enseignement possibleL’enseignement des différentes règles permettant de choisir le bon graphème du son /ã/ peut commencer une fois que les élèves comprennent les différentes classes de mots. Ainsi, l’enseignement des graphèmes du son /ã/, en fin des mots dérivés des adjectifs et des verbes, pourrait commencer en quatrième année du primaire. La règle faisant appel à la notion d’adverbe ainsi que les règles des préfixes et des suffixes pourraient commencer en sixième année du primaire. Par ailleurs, la règle portant sur la présence des phonèmes /∫/ (ch), /Ʒ/ (j) ou /g/ (gu) pourrait être abordée dans l’enseigne-ment des graphèmes an et en, soit en deuxième année._

Note

1. Les symboles utilisés dans cet article sont en alphabet phonétique international (API). Consultez les premières pages d’un dictionnaire pour avoir accès à cet alphabet.

Référence

_ Pothier, B. et Pothier, P. (2003). EOLE : Échelle d'acquisition en orthographe lexicale (du CP au CM2). Paris : Retz.

Chronique

Les savoirs enseignants — Langues

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Chronique

Les savoirs enseignants — Univers social

Des migrants au fil du temps (1/3) Filles du roi, filles de quoi ?_

Chantal DéryProfesseureUniversité du Québec en [email protected]

Puisque, dans le contexte actuel, on parle beaucoup d’immigration, il nous semble porteur de regarder com-ment, au fil du temps, des groupes de migrants sont arrivés au Québec et ont laissé leur empreinte. Dans cette première chronique d’une série de trois, nous parlerons des Filles du roi qui constituent 50 % de l’immigration féminine vers le Canada à l’époque du régime français._

Peupler la Nouvelle-France… viteLorsqu’en 1663, avec l’établissement de la monarchie absolue, Louis XIV prend en main la gestion de la Nouvelle-France, le nombre d’habitants s’élevait à 2500 et le ratio femmes-hommes était d’environ une pour huit. Il faut dire que l’admi-nistration précédente, la Compagnie des Cent-Associés, avait sciemment négligé le peuplement durable du territoire au pro-fit d’une colonisation de type comptoir, dont l’objectif premier était l’extraction d’un maximum de richesses au moindre cout. Or, puisque le transport et l’instal-lation des colons entrainaient des couts importants, il devenait moins profitable pour la compagnie de s’y engager. _

Afin de combler ce déficit démogra-phique, l’idée d’envoyer des femmes célibataires en Nouvelle-France se concrétise. Nommé intendant en 1665,

Jean Talon donne une impulsion à ce mouvement migratoire sans précédent pour l’époque et entreprend de faire venir davantage « d’orphelines », pour la majorité en provenance de l’Hôpital de la Salpêtrière à Paris. _

L’expression Filles du roi trouverait sa source dans les mémoires de Marguerite Bourgeoys et réfèrerait au fait que le royaume français finance la traversée de même que la dot nécessaire à leur mariage. Au total, de 1663 à 1673, Landry (1992) estime qu’environ 770 Filles du roi s’installèrent en Nouvelle-France. Citadines pour la plupart, elles provenaient principalement de La Rochelle, Rouen et Paris et avaient de 16 à 40 ans._

Des destins étonnantsLe tableau ci-dessous nous apprend que, bien que la majorité des immigrantes se sont mariées en bonne et due forme, de nombreuses Filles du roi ont vécu un parcours matrimonial plutôt sinueux. Ainsi, loin d’être des femmes subissant les fatalités du destin, plusieurs des Filles du roi ont connu une vie pour le moins rocambolesque._

Marie Ducoudray est une de celles-là. Le 25 aout 1670, elle signa une pro-messe de mariage (devant notaire) avec Jean Jouanne pour l’annuler rapide-ment par la suite. Trois jours plus tard, elle promet sa main (encore devant notaire) à Robert Galien, mais l’entente ne tiendra que 24 heures. Enfin, le 29 aout, Marie Ducoudray se tourna vers François Grenet afin de signer un nou-veau contrat de mariage. La célébration du mariage eut lieu le 15 septembre et de cette union naquirent sept enfants._

Le cas de Marguerite Roussel est aussi intéressant. Arrivée en Nouvelle-France en 1673, elle aura neuf enfants de deux pères différents. Toutefois, les archives nous indiquent qu’en 1693, elle retourna dans sa Normandie natale. Un destin étonnant quand on sait que la traversée à l’époque était une aventure difficile. _

À terme, l’établissement des Filles du roi en Nouvelle-France a contribué au développement démographique et à une consolidation de la langue française en Amérique. Alors qu’elles sont arrivées sans repère, elles ont su surmonter les épreuves d’une contrée souvent inhos-pitalière. Épreuves que surmonteront d’autres migrants, dont les Loyalistes, sujet de notre prochaine chronique._

Danny LegaultChargé de coursUniversité du Québec à Montré[email protected]

Références

_ Landry, Yves (1992). Les Filles du roi au XVIIe siècle orphelines en France, pionnières au Canada. Mon-tréal : Leméac

_ Société d’histoire des Filles du Roy. Récupéré de http://lesfillesduroy-quebec.org/

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Les fractions sont très fréquentes dans notre quotidien. Nous n’avons qu’à penser à la lecture de l’heure. Certains disent qu’il est « 16 heures 15 », alors que d’autres préfèrent utiliser la fraction d’heure et disent qu’il est « 16 heures et quart ». Les enfants sont donc exposés aux fractions bien avant leur entrée à l’école. Pourtant, pour de nombreux élèves, les apprentissages liés aux fractions demeurent très difficiles pendant toute leur scolarité (Picard, 2015). Il convient donc de présenter des activités agréables aux élèves dès le pre-mier cycle du primaire afin de les amener progressivement à apprivoiser le concept de fractions (Picard, 2015). Une fois cela dit, par où commencer ?_

D’abord, rappelons que les fractions peuvent prendre plu-sieurs sens : partie d’un tout, rapport, quotient, opérateur et mesure (Poirier, 20011). Il est donc primordial de soumettre aux élèves différents problèmes qui leur permettront d’ex-plorer tous ces sens. Plus les élèves seront exposés à une diversité de problèmes, plus ils seront en mesure de dévelop-per une certaine flexibilité entourant le concept de fraction. Ce n’est qu’une fois les différents sens de la fraction bien acquis par les élèves qu’on leur soumettra des problèmes où ils doivent opérer avec les fractions._

Ensuite, insistons sur le fait que, tout comme pour les pre-miers apprentissages des nombres naturels, il est essentiel d’utiliser du matériel de manipulation et des dessins afin de développer le sens de la fraction chez les élèves. Poirier (2001) précise qu’il faut inviter les élèves à recourir à la mani-pulation, à l’estimation et au calcul mental avec des fractions._

Quel matériel utiliser pour donner du sens aux fractions ?Le matériel apparent et accessible : une collection à organiserTout comme pour les premiers apprentissages du sens des nombres naturels, le recours au matériel de manipulation apparent et accessible est très utile. Que ce soit de petits objets ou de simples jetons, il est important que les élèves

puissent les dénombrer et les organiser de façon à simplifier leur raisonnement. Lorsqu’on aborde le concept de fraction, la disposition rectangulaire des objets est très utile puisqu’il est ainsi plus facile de partager la collection selon la fraction (voir les trois premières photos dans cet article). Il est aussi intéressant de montrer aux élèves qu’une diversité de façons d’organiser les objets permet d’obtenir un même résultat.

_

L’utilisation d’une collection d’objets amène les élèves à uti-liser certaines stratégies qui ne pourront pas être utilisées dans d’autres contextes. Il est donc essentiel de soumettre les élèves à d’autres matériels qui représentent des surfaces ou des longueurs._

Une simple feuille blanche à plier ou découper : une surface à diviserL’utilisation de surfaces est essentielle pour permettre aux élèves de concevoir le fait que deux surfaces dont la forme est dif-férente peuvent être équivalentes. Prenons les deux exemples suivants où les élèves ont découpé une feuille pour identifier le quart de la surface. Le découpage de la feuille permet d’insister sur l’importance d’avoir des parties équivalentes.

_

Une corde ou une droite numérique : une longueur à partagerL’utilisation de matériels qui soutiennent l’apprentissage des fractions de longueur est un élément important qui pourra ensuite être réinvesti lors de l’utilisation des droites numé-riques, du plan cartésien, de la ligne du temps, etc. Il est important que les élèves puissent déterminer la fraction d’une longueur, et ce, sans avoir recours à la mesure. Ainsi, l’utilisa-tion de matériels dont la longueur n’est pas précise ou exacte

Chronique

Les savoirs enseignants — Mathématiques

Les fractions : par où commencer ?_

Raymond NolinEnseignant au primaireCommission scolaire de Montré[email protected]

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Les savoirs enseignants — Mathématiques

est recommandée. Pour cela, le pliage d’une corde est une stra-tégie gagnante pour aider les élèves à déterminer la fraction de la longueur. Certains élèves réinvestiront même cette stratégie au moment de tracer une ligne du temps.

_

L’enseignement des différents sens de la fraction à l’aide d’une diversité de matériels doit se faire dès le début du primaire. De cette façon, le concept de fraction n’est pas enseigné de façon abstraite et les apprentissages subséquents tels que les opérations sur les fractions pourront se faire beaucoup plus aisément lorsque les élèves auront une compréhension appro-fondie des différents sens de la fraction._

En terminant, l’apprentissage du concept de fraction, tout comme celui des autres concepts en mathématiques, doit se faire en favorisant le développement d’une réversibilité logique des concepts. En ce sens, « lorsqu’on enseigne les fractions, on demande habituellement aux élèves d’identifier une fraction dans un tout préalablement divisé. [Demander aux élèves d’identifier le tout lorsqu’on connait une fraction] repose sur la réversibilité logique et constitue une habileté mathématique importante que les élèves gagnent à acquérir » (Small, 2014, p. 30)._

Note

1. Pour plus de détails sur les différents sens de la fraction, nous vous invitons à consulter les pages 105 et 106 de l’ouvrage de Poirier (2001).

Références

_ Picard, C. (2015). Les difficultés liées aux fractions. Montréal : Chenelière Éducation.

_ Poirier, L. (2001). Enseigner les maths au primaire : Notes didactiques. Saint-Laurent : ERPI.

_ Small, M. (2014). L’enseignement différencié des mathématiques. Montréal : Modulo.

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29e CONGRÈSde L’AQEP

MERCI À NOS COLLABORATEURS

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Le Programme de formation de l’école québécoise pour l’éducation présco-laire et l’enseignement primaire pour-suit notamment l’objectif d’amener les enseignants à favoriser des « appren-tissage[s] adapté[s] à la réalité des jeunes » (ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS, 2006, p. V). Selon le Groupe de travail sur la réforme du curriculum (1997), l’une des pistes pour y parvenir consiste à « considérer les possibilités d’interdis-ciplinarité » (p. 20). Cependant, des chercheurs (Larose, Hasni et Lebrun, 2008 ; Maingain et Dufour, 2002) ont fait valoir la difficulté pour les ensei-gnants d’y arriver, puisque les disci-plines, telles que présentées dans le programme, sont fortement cloison-nées. À l’instar de Maingain et Dufour (2002), nos expériences nous ont aussi permis de constater que l’interdiscipli-narité se heurte parfois à une forme de résistance dans le milieu de l’édu-cation, car elle sous-entend de conce-voir et de piloter des situations d’en-seignement-apprentissage complexes. Par conséquent, elle a « tendance à demeurer marginale » (Larose, Hasni et Lebrun, 2008, p. 264), alors que nous considérons primordial que les ensei-gnants prennent conscience du poten-tiel qu’offre l’interaction des disciplines pour l’atteinte maximale des objectifs

pédagogiques ciblés. Dans cet article, nous proposons donc trois formules pédagogiques qui, à notre avis, per-mettent de favoriser l’interdisciplina-rité en classe du primaire. Chacune d’elles est suivie d’un exemple concret afin d’offrir les meilleures chances de mise en œuvre possible. Avant cela, il convient de définir ce que nous enten-dons par interdisciplinarité. _

Définir l’interdisciplinarité L’interdisciplinarité est l’un de ces concepts difficiles à cerner. Selon Maingain et Dufour (2002), qui en pro-posent quelques balises dans un ouvrage y étant consacré, l’interdisciplinarité réfère au développement d’une repré-sentation d’une notion, d’une situation ou d’un problème par l’interaction de plus d’une discipline. Alors que cette définition renvoie à l’interdisciplina-rité au sens strict, Maingain et Dufour (2002) l’envisagent aussi au sens large.

Elle comprend l’interdisciplinarité au sens strict, la multidisciplinarité, la plu-ridisciplinarité et la transdisciplinarité. Premièrement, la multidisciplinarité se définit comme le traitement d’une question par juxtaposition de points de vue disciplinaires. Deuxièmement,

la pluridisciplinarité présente la même définition, à la différence que les disci-plines qu’elle met de l’avant concourent à l’atteinte d’un objectif commun. Troisièmement, en ce qui a trait à la transdisciplinarité, il est question du transfert d’un savoir provenant d’une discipline vers une autre. Dans le cadre de cet article, et dans l’objectif de s’ouvrir

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Trois formules pédagogiques pour favoriser l’interdisciplinarité en classe du primaire_

Marilyne BoisvertÉtudiante à la maitrise en éducationUniversité du Québec à Trois-Riviè[email protected]

Katryne OuelletÉtudiante à la maitrise en éducationUniversité du Québec à Trois-Riviè[email protected]

L’enseignant doit être conscient du potentiel

que les disciplines offrent lorsqu’elles interagissent

entre elles.

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à un maximum de possibilités, l’inter-disciplinarité, telle que nous la conce-vons, renvoie au sens large proposé par Maingain et Dufour (2002). _

Trois formules pédagogiques pour favoriser ’interdisciplinarité Chamberland, Lavoie et Marquis (2011) définissent une formule pédagogique comme une manière de s’y prendre pour soutenir l’acquisition de savoirs et le développement de compétences par les élèves. Envisagées ainsi, trois formules pédagogiques nous semblent particu-lièrement porteuses pour favoriser l’in-terdisciplinarité en classe du primaire : [1] le jeu, [2] le projet et [3] l’interview. Après les avoir définies, nous présentons un exemple concret où les disciplines du français et de l’univers social (US) interagissent entre elles. Effectivement, comme la maitrise du français est essen-tielle aux apprentissages dans toutes les disciplines (Conseil supérieur de la langue française, 2015), dont l’US, et que ces dernières sont souvent perçues par les enseignants comme étant secon-daires (Larouche, 2012), il nous apparait pertinent de proposer des exemples en ce sens. _

Le jeuSelon Chamberland, Lavoie et Marquis (2011), le jeu renvoie à l’ « [i]nteraction des élèves dans une activité à carac-tère artificiel, où ils sont soumis à des règles et dirigés vers l’atteinte d’un but »

(p. 65). Il peut se concrétiser de diffé-rentes façons, « allant du jeu de groupe avec animateur et interactions multiples au jeu conçu pour être utilisé en petits groupes, voire en solitaire » (p. 65-66). Au premier cycle du primaire, l’enseignant peut organiser un jeu autour de cartes imagées, de façon à ce que, par la des-cription orale, les élèves en viennent à nommer des moyens de transport rela-tifs à la réalité économique actuelle vue en US (MELS, 2009, p. 4-5). À tour de rôle, les élèves d’une équipe de quatre doivent donc piger une carte imagée d’un paquet. Ils doivent amener leurs pairs à deviner l’image, et ce, en exploi-tant consciemment des stratégies de communication orale (MELS, 2011, p. 87-88) préalablement enseignées. En supposant qu’il s’agisse d’un bateau, ils

peuvent le décrire, mentionner ses carac-téristiques ou encore en expliquer l’uti-lité. Les trois autres élèves doivent utili-ser des stratégies d’écoute (MELS, 2011, p. 88-89), puis se concerter pour devi-ner ce qui se trouve sur la carte. Quand l’équipe a deviné toutes les images du paquet, elle doit trouver le lien qui les unit, c’est-à-dire qu’elles se rapportent toutes à des moyens de transport._

Le projetLe projet suppose d’abord que les élèves réalisent en groupe-classe une carte conceptuelle à partir de ce qu’ils désirent apprendre sur un sujet. Par exemple, au deuxième cycle du primaire, les élèves pourraient se pencher sur la société iroquoienne des années 1500 (MELS, 2009, p. 5-6). Ensuite, en équipes ou individuellement, les élèves doivent cibler un élément qui les intéresse, éla-borer une ou des questions en fonction de ce dernier, effectuer une collecte de données pour répondre à leur(s) interro-gation(s), faire la synthèse des données recueillies et diffuser ce qu’ils ont appris

(Arpin et Capra, 2001). En fonction du moyen de diffusion sélectionné par chacune des équipes ou par chacun des élèves, par exemple un article de jour-nal, une vidéo ou une bande dessinée, l’enseignant peut concevoir un centre d’apprentissage à la diffusion. Ce centre aurait pour objectif de mettre à la dispo-sition des élèves des ressources leur per-mettant de mieux comprendre le moyen de diffusion choisi, de cerner son utilité et sa pertinence pour leur projet, en plus de s’approprier les façons de le mettre en œuvre. Ainsi, le moyen de diffusion oral, écrit ou multimodal, qui se rapporte à un support médiatique étudié en fran-çais (MELS, 2006, p. 87), participerait à l’interprétation singulière d’une réalité observée en US._

Une formule pédagogique consiste en une manière de s’y prendre pour soutenir l’acquisition de savoirs et le

développement de compétences par les élèves.

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Références

_ Arpin, L. et Capra, L. (2001). L’apprentissage par projets. Montréal : Chenelière Éducation.

_ Chamberland, G., Lavoie, L. et Marquis, D. (2011). 20 formules pédagogiques. Québec : Presses de l’Université du Québec.

_ Conseil supérieur de la langue française (2015). Rehausser la maitrise du français pour raffermir la cohésion sociale et favoriser la réussite scolaire. Qué-bec : Gouvernement du Québec.

_ Groupe de travail sur la réforme du curriculum (1997). Réaffirmer l’école. Québec : Gouvernement du Québec.

_ Larose, F., Hasni, A. et Lebrun, J. (2008). Le rapport à l’interdisciplinarité scolaire chez des enseignants du primaire et du secondaire en contexte de réforme curriculaire : bilan d’expérience. In Baillat, G. et Hasni, A. (dir.). La profession enseignante face aux disciplines scolaires : le cas de l’école primaire (265-292). Sherbrooke : CRP.

_ Larouche, M.-C. (2012). D’une matière à une discipline… L’enseignement de l’histoire nationale au primaire au Québec, de 1980 à 2010. In Bouvier, F., Allard, M., Aubin, P. et Larouche, M.-C. (dir.). L’histoire nationale à l’école québécoise. Regards sur deux siècles d’enseignement (265-317). Québec : Septentrion.

_ Maingain, A. et Dufour, B. (2002). Approches didac-tiques de l’interdisciplinarité. Bruxelles, Belgique : De Boeck Université.

_ MELS (2006). Programme de formation de l’école qué-bécoise. Éducation préscolaire, enseignement primaire. Québec : Gouvernement du Québec.

_ MELS (2009). Progression des apprentissages au primaire. Histoire, géographie et éducation à la citoyenneté. Québec : Gouvernement du Québec.

_ MELS (2011). Progression des apprentissages au primaire. Français, langue d’enseignement. Québec : Gouvernement du Québec.

Pistes supplémentaires pour favoriser l'interdisciplinarité en fran-çais et en univers social au primaire Cycle du primaire

Formules pédagogiques utilisées selon Chamberland, Lavoie et Marquis (2011)

Amener les élèves à discuter, en sous-groupes, des membres de leur entou-rage en les nommant, en décrivant leur(s) rôle(s) ainsi qu’en mentionnant des faits de leur vie, et ce, tout en faisant le choix de mots appropriés

Premier cycle Groupe de discussion

Apporter des objets en classe (p. ex. : une carte, une broderie, un morceau de fourrure et une photo d’un roi) qui font référence aux réalités démo-graphique, culturelle, économique et politique de la société française en Nouvelle-France vers 1645 et demander aux élèves de rédiger un texte descriptif portant sur ce que l’objet leur apprend de cette période

Deuxième cycle Ressources du milieu

Sous forme de jeu-questionnaire en équipes, demander aux élèves de répondre à des questions portant sur des différences qui existent entre la société canadienne en Nouvelle-France et des sociétés anglo-américaines des Treize colonies vers 1745 en amenant des nuances et des précisions

Deuxième cycle Tournoi

Après avoir présenté aux élèves les changements survenus dans les sociétés canadienne et québécoise entre 1820 et 1905, leur demander d’abord de s’approprier ces informations en vue de réfléchir à leurs avantages et à leurs inconvénients pour ensuite les amener à confronter leurs idées

Troisième cycle Étude de cas

En assignant un rôle à tous les élèves, les amener à vivre le mode de prise de décision en politique de la société québécoise vers 1980, et ce, tout en s’assurant qu’ils suivent les règles convenues selon la situation de communi-cation, par exemple celle de s’exprimer au bon moment

Troisième cycle Jeu de rôle

L’interviewDe l’avis de Chamberland, Lavoie et Marquis (2011), l’interview ren-voie à interroger un individu afin de connaitre ses opinions, ses sentiments ou ses attitudes. Il se fait à partir de questions préparées à l’avance par les élèves et dans le but d’en rendre compte. Dans l’idée de vouloir inter-roger un individu pour mieux com-prendre les réalités démographique, culturelle, économique et politique de la société québécoise dans les années 1980 (MELS, 2009, p. 10-11), les élèves du troisième cycle du primaire peuvent au préalable travailler la phrase interro-gative en situation de communication orale et aux fins d’entretiens (MELS, 2011, p. 51), ainsi qu’exploiter des stra-tégies d’écoute (MELS, 2011, p. 88-89). De cette façon, les savoirs exploités dans l’activité concourent à atteindre l’objectif pédagogique en plus d’appro-fondir les apprentissages tant en US qu’en français. _

En conclusion, nous réitérons le fait que nous considérons que l’essentiel demeure l’atteinte maximale des objec-tifs pédagogiques par les élèves. Pour y parvenir, nous pensons que l’ensei-gnant doit être conscient du potentiel que les disciplines offrent lorsqu’elles interagissent entre elles. En définissant donc l’interdisciplinarité au sens large et en présentant trois exemples concrets permettant de la favoriser et, plus spé-cifiquement, d’encourager la pluridisci-plinarité ainsi que la transdisciplinarité, nous espérons avoir pu contribuer à une telle prise de conscience. _

Les auteures remercient les professeures Audrey Groleau et Sivane Hirsch de l’Université du Québec à Trois-Rivières de les avoir amenées à réfléchir sur la pertinence et la nécessité d’un enseigne-ment interdisciplinaire au primaire._

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Le Gouvernement du Québec adoptait, le 12 juin 2012, une loi visant la préven-tion et la lutte à l’intimidation et à la violence à l’intérieur des écoles. Après ce combat à l’intimidation et à la vio-lence, il est temps « de faire un pas de plus sur cette question en visant des écoles bienveillantes » (Beaumont cité dans Cloutier, 2017). Cette approche est d’ailleurs préconisée dans le plan d’action 2015-2018 « Ensemble contre l’intimidation » du ministère de la Famille du Québec. Or, le dévelop-pement d’une école bienveillante implique la création d’un milieu de vie sécuritaire, ordonné, prévisible et positif à l’intérieur duquel l’enseigne-ment et l’apprentissage sont favorisés. L’implantation du système Soutien au Comportement Positif (SCP) dans les écoles favorise le développement d’un tel milieu de vie._

Dans cet article, nous décrivons, au départ, le système SCP et ses différentes composantes. Par la suite, nous mon-trons les effets du SCP sur la diminu-tion du nombre d’écarts de conduite majeurs à l’intérieur d’une école de la région montréalaise contribuant ainsi à son développement comme milieu de vie bienveillant. _

Le système SCP et ses différentes composantesLe SCP représente, en contexte fran-cophone, une traduction du Positive Behavioural Interventions and Supports

(PBIS), système actuellement appliqué dans plus de 23 000 écoles étatsu-niennes1. Le SCP représente un modèle de réponse à l’intervention (RAI) com-portementale qui propose des mesures de prévention primaires, secondaires et tertiaires (Bissonnette, Gauthier et Castonguay, 2016). _

L’implantation du SCP débute par la mise en place des mesures de préven-tion primaires ou universelles au sein de l’école et de chacune des classes. Les mesures universelles préconisées par le SCP impliquent : 1. le déploiement d’in-terventions proactives ou préventives, 2. la mise en place d’interventions correc-tives ou curatives, 3. la prise en compte de conditions spécifiques liées à la mise en œuvre du système. _

Parmi les interventions préventives proposées par le SCP, notons les quatre interventions suivantes :1. l’identification de valeurs à préconiser

par le personnel scolaire auprès des élèves (voir la Figure 1) ;

2. l’élaboration d’une matrice compor-tementale indiquant clairement au

personnel les comportements désirés des élèves, et ce, partout dans l’école ;

3. l’enseignement explicite (modelage, pratique guidée et pratique autonome) et contextualisé par le personnel sco-laire de tous les comportements atten-dus auprès des élèves ;

4. l’élaboration d’un système de ren-forcement valorisant les élèves qui adoptent les comportements ensei-gnés préalablement.

_

Malgré la mise en œuvre de ces inter-ventions, certains élèves manifesteront des écarts de conduite nécessitant le recours à des interventions correctives. Les interventions correctives proposées par le SCP sont les suivantes :1. l’élaboration d’une classification des

écarts de conduite mineurs (p. ex. : être assis dans un endroit non auto-risé) devant être gérés par le person-nel scolaire et des écarts de conduite majeurs (p. ex. : une bataille, un acte d’intimidation) nécessitant que l’élève soit retiré du milieu dans lequel il se trouve et que ce dernier soit pris en charge par la direction ou les services complémentaires de l’école (voir la Figure 2) ;

2. l’identification des interventions pos-sibles pour la gestion des écarts de conduite mineurs et de celles prévues pour la gestion des écarts de conduite majeurs ;

3. la création d’un arbre décisionnel indiquant clairement à tout le person-nel de l’école « qui gère quoi ».

_

Pour assurer une école bienveillante : le Soutien au Comportement Positif (SCP)_

Steve BissonnetteProfesseur Département ÉducationUniversité [email protected]

Fig. 1 - Les valeurs identifiées

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L’efficacité des interventions préven-tives et correctives repose sur la prise en compte de conditions spécifiques liées à la mise en œuvre du SCP : 1. l’adhésion du personnel (minimum

80 %) à l’implantation du système au sein de l’école et des classes ;

2. le leadership de la direction d’école et sa reconnaissance formelle par le per-sonnel scolaire ;

3. la compilation informatisée des écarts de conduite majeurs et des expulsions de classe ;

4. la création d’une équipe SCP, de type communauté d’apprentissage profes-sionnelle (CAP), assurant l’implanta-tion du système ainsi que son moni-torage et sa régulation ;

5. la tenue d’une rencontre mensuelle de l’équipe SCP pour analyser les don-nées comportementales compilées et identifier des solutions aux difficultés rencontrées ;

6. l’accompagnement de l’école par un professionnel expérimenté du SCP afin de fournir au personnel les infor-mations et les formations requises.

_

La prise en compte de ces conditions augmente l’efficacité du système comme en témoigne, dans la section suivante, l’implantation réussie du SCP dans une école de la région montréalaise. Toutefois, notons qu’à ces mesures de prévention universelles seront éven-tuellement ajoutées des mesures com-plémentaires de prévention secondaires et tertiaires destinées aux élèves ayant des besoins particuliers._

Les effets du SCP sur la réduction des écarts de conduite majeursLes effets du système SCP sur le plan comportemental sont mesurés généra-lement à l’aide du nombre d’écarts de conduite majeurs rapporté par le per-sonnel scolaire. Généralement, lorsqu’un élève manifeste un comportement qui nécessite qu’il soit retiré de la classe ou de l’endroit où il se trouve et qu’il soit placé dans un local précis sous la supervision d’une personne prévue à

cet effet, un rapport d’écart de conduite majeur (adaptation de Office Discipline Referral (ODR)) est achevé par l’inter-venant scolaire impliqué. La synthèse de recherches produite par Irvin et ses collaborateurs (2004) a montré que l’uti-lisation des ODR représente une mesure valide pour évaluer le climat scolaire et le portrait comportemental de l’école._

L’implantation du SCP a été réalisée par notre équipe de recherche dans une école de la région montréalaise au cours de l’année scolaire 2016-2017. Cette école offre l’enseignement à plus de 400

élèves du niveau primaire. L’école offre également des concentrations en arts et en sports aux élèves du 3e cycle. _

Même si cette école dessert une clientèle de milieux très favorisés2, il y a eu, au cours de l’année 2015-2016, précédant l’implantation du SCP, 2488 écarts de conduite majeurs rapportés par le per-sonnel scolaire entre les mois de sep-tembre et mai inclusivement. Or, à la suite de l’implantation réussie du SCP au cours de l’année suivante, 2016-2017, et ce, comme mesuré par notre équipe de recherche à l’aide du School-wide

Tableau de classifi cati on des comportements problémati ques

ÉCARTS DE CONDUITES MINEURS ÉCARTS DE CONDUITES MAJEURS

Comportements qui nuisent personnellement à l’élève *

Comportements qui nuisent à l’ordre général

• L’élève n’a pas son matériel.• Il brise son matériel scolaire.• Il n’est pas assis à sa place.• Il ne suit pas les consignes.• Il se plaint ou argument.• Il triche.• Il ment.• Il uti lise un language inapproprié.• Il joue avec des objets inappropriés.• Il ne complète pas ses travaux.• Il encourage les mauvais comportements.• Il n’écoute pas la personne qui parle.• Il ne s’asseoit pas correctement.• Il n’assume pas ses responsabilités.• Il refuse de travailler.• Il refuse de coopérer.• Il n’a pas la tenue vesti mentaire requise.• Il est en retard.• Il s’absente de l’école sans permission.• Il dessin sur le bureau.• Il consomme des boissons énergisantes.

• L’élève répond impoliment à l’adulte.• Il lance des objets dangereux.• Il provoque les autres (se moque des autres).• Il ment régulièrement.• Il fait des crises de colère.• Il pousse les autres.• Il instule.• Il crie contre le personnel.• Il crache sur les autres.• Il harcèle.• Il humilie.• Il inti mide (gestes, paroles, atti tude).• Il fait des graffi ti s.• Il parti cipe à des jeux agressifs.• Il bouscule, pousse, fait trébucher.• Il empèche les autres d’apprendre.• Il semble consommer.• Il fugue.

Comportements qui nuisent à l’apprenti ssage des autres *

Comportements qui blessent ou illégaux

• L’élève parle quand il ne le faut pas.• Il répond impoliment à l’adulte.• Il brise le matériel scolaire.• Il dérange les autres.• Il lance des objets.• Il fait des bruits inappropriés.• Il se chamaille.• Il blasphème en classe.• Il provoque.• Il se met debout sur les meubles.• Il se déplace sans autorisati on.• Il n’est pas à sa place.• Il faut constamment abstracti on des consignes.• Il exclut les autres• Il quitt e la classe sans permission• Il emet des commentaires racistes, sexistes ou

autres.• Il court dans le corridor.• Il crie, parle fort.• Il ne respecte pas l’inti mité des autres aux

toilett es.

• L’élève uti lise un téléphone cellulaire ou un iPod à des moments et dans des lieux inappropriés.

• Il commet des acti ons qui blessent physiquement (mord, pousse, donne des coups de pied ou de poing, etc.).

• Il lance des objets qui blessent.• Il vole ou brise la propriété d’autruit.• Il se bagarre.• Il fume sur le terrain de l’école.• Il est en possession de drogues ou d’alcool.• Il est en possession d’armes.• Il lance un meuble.• Il menace de blesser ou d’endommager.• Il fait des graffi ti s menaçants.• Il fait des menaces de mort ou est responsable

de voies de fait.• Il est traffi cant de drogues.• Il est en état de consommati on.

* Si ces comportements durent malgré diverses interventi ons, il peuvent devenir des écarts de conduite majeurs.

Fig. 2 - Tableau

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Notes

1. Voir le site : www.pbis.org

2. Indice de défavorisation = 1

Références

_ Bissonnette, S., Gauthier, C. et Castonguay, M. (2016). L’enseignement explicite des comportements : Pour une gestion efficace des comportements des élèves en classe et dans l’école, Montréal : Éditions Chenelière Éducation.

_ Cloutier, P. (2017). Après la lutte à l’intimidation, l’école bienveillante. Le Soleil sur le site lapresse.ca. Récupéré le 13 juillet, de http://www.lapresse.ca/le-soleil/actualites/education/201706/11/01-5106570-apres-la-lutte-a-lintimidation-lecole-bienveillante.php

_ Irvin, L. K., Tobin, T., Sprague, J., Sugai, G. et Vincent, C. (2004). Validity of office discipline referral measures as indices of school-wide beha-vioral status and effects of school-wide behavioral interventions. Journal of Positive Behavioral Interven-tions, 6(3), 131-147.

Evaluation Tool (SET), le nombre a chuté à seulement 939 écarts de conduite majeurs au cours du même intervalle de temps. _

Afin de mesurer plus précisément les effets du système, il importe de tenir compte du nombre total d’élèves qui varie d’une année à l’autre dans les écoles montréalaises. Pour y arriver, il est possible d’obtenir, pour une année scolaire donnée, un ratio comporte-ments/élèves en calculant le nombre total d’écarts de conduite majeurs (ECM) et en le divisant avec le nombre total d’élèves ayant fréquenté l’école cette même année, ce qui fournit un nombre d’ECM par élève. _

Comme le montre le Tableau 1, le ratio comportements/élèves obtenu pour l’année scolaire 2015-2016 est 5,95 ECM par élève, alors qu’il chute

à seulement 2,16 ECM par élève pour l’année 2016-2017. Nous constatons ainsi une diminution considérable de 64 % du nombre d'EMC par élève à la suite de l’implantation du SCP. _

Ces résultats sont importants, car ils montrent les effets positifs du SCP selon un protocole méthodologique de type pré/posttest. Ce type de protocole est très difficile à produire au Québec, car généralement, les écoles ne disposent pas de données comportementales com-pilées avant de commencer une expéri-mentation avec le SCP. _

Notons que ces résultats positifs rejoignent ceux déjà obtenus dans 11 écoles à la suite d’une implanta-tion du SCP sur une période de deux années où une diminution moyenne de 39 % du nombre d’écarts de conduite majeurs a été constatée entre la pre-mière année d’implantation du SCP et la seconde année (Bissonnette, Gauthier et Castonguay, 2016). _

ConclusionLe développement d’une école bien-veillante implique la création d’un milieu de vie sécuritaire, ordonné, pré-visible et positif où l’enseignement et l’apprentissage sont favorisés. Or, l’im-plantation du SCP et de ses différentes interventions préventives et correctives favorise la création d’un tel milieu. De plus, la prise en compte des différentes conditions spécifiques liées à la mise en

œuvre du système contribue grande-ment à son efficacité. _

Par conséquent, pour faire un pas de plus dans la prévention et la lutte à l’intimidation et à la violence à l’inté-rieur des écoles, nous croyons ferme-ment que l’implantation du système SCP s’avère l’une des avenues les plus prometteuses en ce sens comme le montrent les résultats obtenus jusqu’à maintenant. Puisse les élèves québécois bénéficier d’un tel système !_

Tableau 1. Compilation des EMC par élève pré SCP et post SCP

Années scolaires

Nombre total écarts conduite

majeurs

Nombre total d'élèves

Ratio = ECM/élève

2015-2016

(pré SCP)2488 418 5,95

2016-2017

(post SCP)939 435 2,16

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Arianne RobichaudProfesseure en fondements politiques et sociaux de l’éducationUniversité du Québec à Montré[email protected]

La souffrance au travail des enseignants du Québec : quelles causes, quelles solutions ?_

La souffrance enseignante représente un enjeu de taille pour le système éducatif québécois et la société qué-bécoise dans son ensemble. En effet, ses différentes manifestations (malaise professionnel et identitaire, surcharge de travail, frustrations, anxiété, dépres-sion) sont particulièrement inquiétantes pour la santé globale du système sco-laire au Québec, et surtout pour les individus aux prises avec ce type de difficulté au quotidien dans l’exercice de leurs fonctions. Dans la province, les études sur la souffrance ensei-gnante sont, à ce jour, assez récentes et encore peu nombreuses, mais nous savons toutefois qu’environ 50 % des enseignants québécois affirment avoir vécu, au moins une fois en cours de carrière, de la détresse en milieu de travail (Mukamurera, 2008), que 60 % disent éprouver des symptômes d’épui-sement professionnel au moins une fois par mois (Houlfort et Sauvé, 2010), qu’environ 50 % des enseignants ont

déjà songé abandonner la profession (Mukamurera, 2008) et que le taux d’attrition actuel dans la profession varie, selon les études, de 15 % à 25 % (Tardif, 2013). Mais quelles sont les causes exactes de cette souffrance au travail ? Et plus précisément, que nous disent explicitement les enseignants sur les différents enjeux quotidiens menant à ce type de souffrance ?_

Dans le cadre d’une recherche réalisée auprès de 20 enseignants du Québec, notre principal objectif est le suivant : donner une voix aux enseignants qui affirment vivre différentes formes de souffrance au travail, et ce, afin de mieux en comprendre les sources et d’ainsi proposer différentes pistes de solution pour en diminuer l’impact au quotidien. Notre échantillon est constitué d’enseignants œuvrant dans la grande région de Montréal, et ce, à tous les niveaux d’enseignement (de la maternelle à la fin du secondaire, dans toutes les disciplines prévues au pro-gramme, titulaires de classe et spécia-listes confondus), et représente la mor-phologie sociale de la profession (30 % d’hommes et 70 % de femmes). Pour atteindre notre objectif principal, nous nous appuyons sur différentes hypo-thèses issues de recherches ayant tenté de mieux comprendre le phénomène de la souffrance enseignante, ou encore de recherches plus générales en sociologie : ces recherches, pour la plupart euro-péennes, nous informent notamment sur l’influence de différents facteurs sur

le bien-être au travail des enseignants (par exemple, les demandes ministé-rielles et les différentes politiques édu-catives qui transforment directement le travail enseignant, les relations aux col-lègues et à la direction d’établissement, le degré de reconnaissance accordé au travail des enseignants par la direction, les parents ou le public en général). Le but de cette recherche est donc double : mieux comprendre les causes de la souffrance enseignante telle qu’elle est décrite par les enseignants eux-mêmes, mais également circonscrire les facteurs et les enjeux spécifiques vécus par les enseignants du Québec. _

Si notre recherche se poursuit encore pour quelques années (2017-2020), plusieurs constats partagés par les enseignants interrogés (20 enseignants ayant participé à une première entre-vue semi-dirigée) ressortent déjà du lot. Parmi d’autres facteurs influents, les deux plus grandes sources de souffrance au travail concerneraient essentielle-ment 1- les difficultés vécues au sein des relations de travail avec la direc-tion d’établissement, puis 2- les frus-trations liées à l’aspect organisationnel des emplois disponibles (précarité, rela-tions à la commission scolaire, postes à pourvoir, contrats, listes de priorité, etc.). Afin de mieux illustrer l’importance de chacune de ces causes, mentionnons que 60 % des enseignants interrogés lient d’abord leur souffrance au travail à de mauvaises relations avec leur direction d’établissement et, en second lieu, aux

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enjeux relatifs à l’aspect organisationnel des emplois disponibles. Chacun de ces facteurs se décline ensuite en différents enjeux qui deviennent, à leur tour, d’im-portantes sources de difficulté._

D’abord, les difficultés vécues au sein de la relation des enseignants à leur direc-tion d’établissement semblent provenir d’un manque de soutien de la direction lorsque l’enseignant est confronté à un problème précis (élève(s) particulière-ment difficile(s), manque de ressources matérielles ou humaines pour la classe et les élèves, difficultés avec un parent d’élève), mais également de conflits nais-sant d’un manque de reconnaissance de l’autonomie et de la liberté profession-nelles de l’enseignant (un contrôle péda-gogique accru exercé par la direction sur le travail de l’enseignant), ou tout sim-plement de tensions interpersonnelles ayant trait à différents aspects de la per-sonnalité de chacun. Plusieurs ensei-gnants évoquent alors des sentiments de solitude, d’isolement, de frustration et, dans certains cas (20 % des partici-pants interrogés), l’impression d’avoir été ostracisés au sein de l’équipe-école par leur direction d’établissement._

Pour leur part, les frustrations liées à l’aspect organisationnel des emplois disponibles proviennent majoritaire-ment d’une impression de manque de reconnaissance de son travail par la commission scolaire d’attache, voire d’un manque de reconnaissance de son identité distincte en tant qu’individu : plusieurs enseignants affirment alors se sentir comme « de simples numéros » aux yeux de la commission scolaire, « facilement remplaçables » et plus ou moins importants. Une large part de la souffrance provoquée par cette situa-tion est dès lors liée à la perception des enseignants de ne pas être justement reconnus en termes professionnels, soit comme des professionnels compé-tents qui sont notamment passés par une formation universitaire de longue haleine avant de faire leur entrée dans la

profession. À ce titre, l’anxiété provoquée par la recherche constante d’un poste stable et permanent (et par la possibilité d’être décalé par un collègue, parfois à la toute dernière minute, dans les diffé-rentes listes de priorité) se transforme, aux yeux des enseignants interrogés, en un traitement tout à fait indigne d’une profession, menant même certains à

éprouver des symptômes dépressifs : d’ailleurs, 20 % des enseignants partici-pant à l’étude affirment avoir vécu une dépression, et ce, en lien direct avec les difficultés liées à la précarité d’emploi en enseignement. _

Ces deux causes de souffrance ensei-gnante ne sont, malheureusement, pas les seules : à ce titre, les ensei-gnants interrogés témoignent égale-ment de difficultés liées aux relations entre collègues, ou encore de difficul-tés liées à leur perception d’être peu (voire pas du tout) consultés par les instances décisionnelles à propos de politiques (intégration des EHDAA) ou de prescriptions (programme d’ensei-gnement, contenus à transmettre) qui les concernent pourtant directement. Toutefois, à la lumière des constats spécifiques présentés dans cet article, certaines recommandations peuvent être formulées, que nous empruntons notamment aux enseignants participant à notre recherche : d’abord, la nécessité de réaffirmer le rôle « humain » de la direction d’établissement par rapport à son rôle « administratif », dans le but d’assurer une meilleure présence de la direction dans l’école. Pour la majorité des enseignants interrogés, un accent posé sur les dimensions relationnelles du travail de direction serait suscep-tible d’accroitre le temps passé par la

direction à même l’établissement et, par le fait même, de favoriser la communi-cation, le soutien et la prise en compte réelle des problématiques vécues par les enseignants au quotidien. Et finalement, si la majorité des enseignants interrogés se disent favorables aux gains syndicaux ayant trait aux processus d’octroi des contrats et des postes en enseignement

(ancienneté, listes de priorité), plusieurs ressentent le besoin que ces processus soient plus souples et, encore une fois, plus humains : on souligne alors l’idée d’une permanence d’emploi arrivant beaucoup plus rapidement en carrière, de différentes mesures officielles et concrètes assurant aux jeunes ensei-gnants d’obtenir leurs premiers groupes dans des milieux moins difficiles ou encore, tout simplement, d’être réel-lement entendus et consultés par les instances gouvernementales au regard de décisions qui les concernent intime-ment, et au quotidien. Dès lors, nous ne pouvons que souhaiter, pour le bien des enseignants et de l’éducation au Québec, que ces derniers soient entendus. _

Références

_ Houlfort, N. et Sauvé, F. (2010). La santé psycholo-gique des enseignants de la Fédération autonome de l’enseignement. Montréal : Publications de l’École nationale d’administration publique.

_ Mukamurera, J. (2008). Portraits et défis de l’in-sertion en enseignement au Québec pour les nou-velles générations d’enseignants. In Portelance, L., Mukamurera, J., Gervais, C. et Martineau, S. (2008). L’insertion dans le milieu scolaire : une phase cruciale du développement professionnel de l’enseignant. Québec : Presses de l’Université Laval.

_ Tardif, M. (2013). La condition enseignante au Québec du XIXe au XXIe siècle. Une histoire cousue de fils rouges : précarité, injustice et déclin de l’école publique. Québec : Presses de l’Université Laval.

Les deux plus grandes sources de souffrance au travail concernent les difficultés vécues au sein des relations de

travail avec la direction d’établissement, et les frustrations liées à l’aspect organisationnel des emplois disponibles.

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Judith BeaulieuProfesseure en adaptation scolaireUniversité du Québec en [email protected]

Marilyn Dupuis-BrouilletteDoctorante en éducationUniversité de [email protected]

La dysphasie et l’inclusion pédagogique en classe régulière_

Qu’est-ce que la dysphasie ?La dysphasie est un trouble du langage dont l’origine est neurodéveloppemen-tale (Lussier et Flessas, 2009). En d’autres mots, il y a une atteinte au niveau des aires du cerveau reliées au langage qui provoque des difficultés de compréhen-sion, d’expression et parfois les deux. Ainsi, il existerait trois types de dys-phasie : la dysphasie réceptive, la dys-phasie expressive et la dysphasie mixte (Ellemberg, 2015). Chacune des atteintes peut avoir un niveau de sévérité léger, modéré ou sévère. Par exemple, un élève peut avoir une dysphasie réceptive légère et un autre élève peut avoir une dysphasie mixte dont les deux atteintes sont sévères._

De manière concrète, l’élève ayant une dysphasie entend ce que l’enseignant lui dit ; il n’a aucun problème relié à l’au-dition. Donc, il n’est pas malentendant ou sourd. De plus, l’élève peut éprouver des difficultés avec l’expression d’un

message, mais il n’a pas de problème relié aux organes de la parole (bouche, langue, etc.). Il est impossible d’avoir un diagnostic de dysphasie et d’avoir un problème relié aux organes de la parole (DSM-V). Donc, il n’est pas muet et ne peut avoir, par exemple, une fente palatino-labiale (bec de lièvre). De plus, il n’a pas de déficience intellectuelle ni de trouble du spectre autistique ; son trouble est exclusivement relié aux aires cérébrales qui traitent le langage, que ce soit la compréhension ou l’expression. Devant la complexité de l’évaluation de ce trouble, tous les élèves ayant une dys-phasie devraient avoir été évalués par un orthophoniste ou, à tout le moins, une équipe multidisciplinaire où un ortho-phoniste est présent. _

L’élève dysphasiqueAvant son entrée à l’école, l’enfant dys-phasique aura probablement déjà vécu des difficultés. Déjà, un orthophoniste devrait suivre cet élève dans votre école ou à l’extérieur de l’école et vous sou-mettra surement des pistes de différen-ciation et d’adaptation. Nous dressons ici un portrait général non exhaustif de l’élève dysphasique en contexte de maternelle et au primaire._

À la maternelleÀ la maternelle, la dysphasie influence le développement global de l’enfant sans pour autant l’empêcher de se dévelop-per dans sa singularité. Cette influence s’explique par le fait que le développe-ment langagier influence grandement le développement cognitif, par le choix des mots de l’enseignant, du raisonnement réalisé par l’élève au contact d’objets et de personnes, etc. En effet, selon Doyon et Fisher (2010), on apprend à parler d’abord, mais ensuite on parle pour

apprendre. Il faut savoir que l’élève dys-phasique a un potentiel tout comme les autres élèves de la classe. En effet, il peut réaliser la majorité des activités. Par exemple, il peut participer aux jeux symboliques avec ses camarades (p. ex. : poupée, déguisement, chevalier), réaliser des bricolages, faire des exer-cices de motricité globale, etc. Dans ces contextes, il se peut que ses difficultés langagières nuisent aux interactions entre les pairs. Les autres élèves et lui peuvent devoir être accompagnés : utili-sation de pictogrammes pour la commu-nication, pointage d’objets, etc. Pour cer-tains élèves dysphasiques, il se peut qu’il y ait du mécontentement ou des colères, puisqu’ils peuvent vivre de la frustration à ne pas toujours comprendre ce que les autres leur demandent ou qu’ils ne sont pas capables d’exprimer leurs demandes. Par exemple, un élève dysphasique veut un jouet, mais n’est pas capable de l’ex-primer à son camarade. Il peut prendre le jouet dans les mains de son ami et créer possiblement un conflit. _Lussier et Flessas (2009) nomment plu-sieurs pistes à mettre en œuvre dans la classe pour favoriser les apprentissages de l’élève dysphasique qui a des difficul-tés de compréhension. D’abord, lorsque vous lui parlez, il importe d’attirer son attention, de nommer son nom et d’uti-liser des gestes non verbaux naturels lorsque c’est possible. Par exemple, l’enseignant utilisant seulement des consignes verbales devra peut-être s’ajuster et associer la consigne de s’as-soir à l’image de l’élève assis ou bien lui-même s’assoir. Il va donc de soi que l’enseignant aura avantage à décortiquer les consignes pour le jeune enfant. Ici, l’élève peut tout à fait mettre en œuvre les tâches, mais doit être accompa-gné dans la compréhension des mots. De plus, les enseignants peuvent agir

Les élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou

d’apprentissage

Vous lirez ici le deuxième article d’une série d’articles de vulgarisation sur les élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (HDAA). Ces articles visent à vous brosser un portrait général des élèves inclus dans vos classes régulières.

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en tant que « modèles langagiers » en « pensant à voix haute » (autoverbalisa-tion) ou en commentant les actions des enfants au fur et à mesure (verbalisation parallèle) (Dupuis Brouillette, à venir). Ainsi, les élèves auront un modèle pour le choix des mots ainsi que pour la structure de la phrase. Bref, n’hésitez pas à répéter vos messages, à reformuler, à imager et à mimer pour vous assurer de la compréhension. Pour vous en assu-rer, n’hésitez pas à demander à l’élève de se mettre en action pour constater sa compréhension des consignes. Il ne faut pas éviter de parler aux élèves qui ont une dysphasie ; ce serait de ne pas les accompagner dans le développement du langage, lequel est incontournable._

Au primaireAu primaire, le langage oral a une place importante au quotidien. Inévitablement, l’apprentissage de la lecture et de l’écriture, donc du langage écrit, peut être affecté par la dysphasie (Tupula Kabola, s.d.). Plusieurs aspects sont présents dans le développement langagier, de la maternelle au primaire, mais ils prennent une place prépondé-rante dans l’apprentissage du langage écrit. D’abord, l’apprentissage de la conscience phonologique et, éventuel-lement, des correspondances entre les graphèmes et les phonèmes peut être touché. Il sera important de mettre du temps pour consolider l’apprentissage des sons afin d’assurer les bases de la lecture pour les élèves dysphasiques. Pour l’aspect de la morphologie, donc tout ce qui est en lien avec l’accord féminin/pluriel, singulier/pluriel et les verbes par exemple, il est important d’expliciter les relations qui existent et de laisser le temps à l’élève pour com-prendre ces règles. De plus, il se peut que ses phrases aient une structure incomplète ou incohérente, d’où l’im-portance du modelage langagier même au primaire. Même les mots qu’il utilise, ce qui relève de l’aspect sémantique ou lexical, peuvent être imprécis ou inadé-quats : il peut utiliser des mots-valises (choses, affaire) par exemple. Il sera peut-être nécessaire de modéliser des séances de communication en lien avec

les différentes fonctions et conventions du langage : par exemple, modéliser une conversation avec une amie. _

En compréhension de lecture, la com-préhension des mots et des phrases peut être plus difficile, puisque par définition, ces enfants peuvent avoir des difficultés à faire le lien entre des mots et ce à quoi ils réfèrent. En début d’apprentissage, il peut être utile d’as-socier les mots lus à des images. Aussi, il faudra s’assurer qu’ils connaissent les mots abstraits nécessaires à la réponse de questions (qui ?, quand ?, comment ?, etc.). Il faudra peut-être associer qui ? à une silhouette par exemple. Les élèves dysphasiques auront également peut-être des ennuis avec les inférences. Comme ils éprouvent des difficultés avec le langage, le double sens est plus difficile ; ils auront besoin de soutien (CENOPL, 2017). À l’écrit, il se peut que leurs phrases soient décousues ou qu’ils manquent d’idées. Il est donc possible de soutenir leurs idées en fournissant des images, en les prépa-rant avant une production écrite ou en faisant un remue-méninge en groupe._

ConclusionSomme toute, les élèves ayant une dys-phasie, peu importe la sévérité et l’at-teinte, ont un potentiel qu’il ne faut pas sous-estimer. Avec un choix judicieux

d’activités et d’interventions pédago-giques, les enseignants et professionnels peuvent certainement parvenir à inclure ces élèves dans la classe ordinaire. _Suggestions de lecture : • 100 idées pour venir en aide aux élèves

dyspraxiques par Amanda Kirby & Lynne Peters. Édition Tom Pousse, 2010.

• Vincent dans les pommes par Brigitte Marleau. Éditeur jeunesse Boomerang, 2008.

• Les victoires de Grégoire par Danielle Noreau. Éditeur Dominique et com-pagnie, 2010.

• Gros sur la tomate par Dominique Brisson. Éditeur jeunesse Syros, 2014.

Références

_ Leonard, L. B. (2014). Specific Language Impair-ment Across Languages. Child Development Perspectives, 8(1), 1-5. Récupéré de : http://www.blogorthophonie.com/chronique-2144

_ Ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec. Je grandis et je communique. Récupéré de : www.ooaq.qc.ca

_ Thordardottir, E.et al. (2011). Sensivity and Specifi-city of French Language and Processing Measures for the Identification of Primary Language Impair-ment at Age 5. Journal of Speech, Language, and Hearing Research. 54(2), 580-597.

_ Thordardottir, E. et Namazi, M. (2007). Specific Language Impairment in French Speaking Child-ren: Beyond Grammatical Morphology. Journal of Speech, Language, and Hearing Research. 50(3), 698-715.

_ Tupula Kabola, A. (s.d.). Retard de langage ou dysphasie ? Comment y voir plus clair ? (billet de blogue). Récupéré de : www.blogorthophonie.com

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Dossier

L'apprentissage intégré

des langues

Lire-écrire entre les langues pour mieux apprendre à lire et à écrire_

L’apprent i s sage des langues secondes ou étrangères occupe une place de plus en plus importante dans le parcours scolaire des jeunes élèves et la pression des parents est forte pour améliorer les compétences de leurs enfants dans ce domaine. Ces dernières années, dans de nom-breux pays, cet apprentissage a été institutionnalisé plus tôt dans la scolarité. Dans les commissions sco-laires francophones du Québec, on observe aussi un autre phénomène : les formules d’enseignement intensif de l’anglais langue seconde mises en place au dernier cycle du primaire sont de plus en plus répandues. Fonctionnant selon un autre modèle, l’immersion en français est également en croissance constante dans les pro-vinces anglophones du Canada. La situation des langues à l’école évolue donc de manière importante. Il faut ajouter à ce portrait l’accroissement marqué de l’immigration non franco-phone qui vient modifier le contexte d’enseignement de nombreuses classes québécoises dans lesquelles les enseignants travaillent avec un public de plus en plus diversifié sur le plan culturel et linguistique. Dans de tels contextes, les enjeux et les défis

pour les enseignants, mais aussi pour les élèves, sont nombreux._

Dans le Programme de formation de l’école québécoise, les stratégies d’apprentissage sont présentées comme des éléments communs au domaine des langues et la connaissance de plusieurs langues est vue comme une occasion « d’enrichir la connaissance de sa propre langue » (Ministère de l’Éducation, 2006, p. 70). On peut toutefois d’une part se deman-der dans quelle mesure une collabora-tion effective existe entre l’enseignant généraliste responsable du développe-

ment des compétences dans la langue d’enseignement et l’enseignant spécia-liste responsable de la langue seconde, et d’autre part questionner l’effet réel de l’apprentissage de la langue seconde sur la maitrise de la langue d’enseigne-ment. Sur le terrain, les langues sont-elles enseignées en silos, à charge pour les élèves de faire eux-mêmes les liens entre ces deux apprentissages, ou bien une synergie est-elle pensable dans les interventions pédagogiques ? Dans le contexte québécois, les formules mises en place pour l’enseignement intensif de l’anglais langue seconde ont-elles un

effet négatif ou positif sur la maitrise du français ? Quelle place est faite, dans l’apprentissage des langues à l’école, aux compétences que certains élèves peuvent avoir dans des langues qui ne sont pas au programme d’enseignement ? Voilà quelques questions abordées dans le cadre de ce dossier spécial consacré à la lecture et à l’écriture entre les langues. Il témoigne de notre volonté de promou-voir une didactique intégrée des langues et de chercher à encourager une vision concertée du développement d’une com-pétence plurilingue chez tous les élèves. _

La majorité des articles qui composent ce dossier présentent des résultats de recherches récentes menées dans les milieux scolaires grâce à des ensei-gnants qui ont accepté d’ouvrir leurs portes aux équipes de recherche et que nous tenons à remercier pour leur pré-cieuse collaboration. _

Deux articles, ceux de Thomas et Lau ainsi que de Bou Serdane, Dezutter, Parent et Haigh, portent sur l’examen des impacts de l’enseignement intensif de l’anglais langue seconde sur les apprentissages

Lynn ThomasProfesseureUniversité de [email protected]

Olivier DezutterProfesseurUniversité de [email protected]

Le fil rouge de ce dossier réside donc dans une invitation à renforcer la collaboration entre

les enseignants généralistes du primaire et les spécialistes de l’enseignement des langues secondes, et à traverser

les frontières afin de permettre aux élèves de développer leurs compétences plurilingues par des activités qui les

conduisent davantage à lire et à écrire entre les langues.

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des élèves de sixième année du primaire en écriture, en anglais langue seconde et en français langue d’enseignement. Le premier article présente la manière dont les élèves parlent de leur rapport à l’écri-ture en anglais et en français et de son évolution lorsqu’ils sont engagés dans un programme d’enseignement intensif de l’anglais langue seconde. Le deuxième article examine le cas spécifique des com-pétences des élèves faibles scripteurs pour lesquels des inquiétudes avaient été exprimées par certains parents et cer-taines personnes enseignantes quant à la capacité de ces élèves de tirer profit de cet enseignement intensif. _

Forget et Gauvin ont réalisé une autre recherche dans des classes du 3e cycle du primaire offrant l’anglais intensif pour comprendre comment et à quelles conditions amener les élèves à résoudre, avec des pairs, des problèmes gramma-ticaux peut favoriser la construction des connaissances grammaticales en anglais langue seconde comme en français langue première._

Dans leur contribution, Gauvin et Thibault remettent en question le manque d’intégration des langues dans les approches didactiques à l’école pri-maire, surtout au regard de la diver-sité linguistique des jeunes dans de

nombreuses classes du Québec. Ils sou-haitent que soit davantage exploité le répertoire linguistique pluriel des élèves et montrent par plusieurs exemples comment il est possible d’intégrer une approche plurilingue lors de l’enseigne-ment de la grammaire. _

Pour sa part, Renaulaud relate une expé-rience de rédaction de textes identitaires dans une classe de français langue d’en-seignement au sein d’une école accueil-lant des élèves migrants en provenance de plusieurs pays. Elle explique com-ment l’expérience a été profitable pour tous les élèves, y compris les élèves qué-bécois francophones._

Chercheuse et formatrice d’enseignants de français langue seconde à Vancouver, Sabatier présente les approches pluri-lingues utilisées dans les classes d’im-mersion en français dans l’Ouest cana-dien pour favoriser le développement de la lecture et de l’écriture à l’école primaire. Elle souligne le fait qu’adop-ter des approches pédagogiques trans-langagières permet aux élèves de com-prendre les relations entre les différentes langues et d’ensuite mieux mobiliser leurs compétences en littératie dans toutes leurs langues pour améliorer leurs apprentissages scolaires._

Pour terminer, dans un article rempli d’images est présenté un nouveau type de ressource à considérer pour déve-lopper les compétences de lecture des élèves : les livres ou albums bilingues et même plurilingues._

Le fil rouge de ce dossier réside donc dans une invitation à renforcer la colla-boration entre les enseignants généra-listes du primaire et les spécialistes de l’enseignement des langues secondes, et à traverser les frontières afin de per-mettre aux élèves de développer leurs compétences plurilingues par des acti-vités qui les conduisent davantage à lire et à écrire entre les langues._

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Dossier Pourquoi et comment tenir compte du répertoire plurilingue français-anglais des élèves lors de l’enseignement grammatical ?L’exemple des constructions verbales_

L’enseignement du français langue pre-mière est une réalité… plutôt abstraite ! En effet, la diversité linguistique que l’on retrouve dans les écoles du Québec est telle que la langue d’enseignement (dorénavant FLens) n’est pas toujours la première que les élèves ont apprise, sans oublier que l’apprentissage de l’anglais langue seconde (AL2) commence dès la première année du primaire. Il semble toutefois que le répertoire linguistique pluriel des élèves n’est que peu pris en compte en classe de langue, que ce soit dans le cours de français langue

d’enseignement ou d’anglais langue seconde. Puisque dans les écoles fran-cophones du Québec, l’anglais est une langue seconde pour tous, nous poserons dans cet article les questions suivantes : pourquoi et comment tenir compte du bagage plurilingue français-anglais des élèves lors de l’enseignement gramma-tical ?1 Nous illustrerons notre propos à partir de l’exemple de l’enseignement d’une notion grammaticale, celle des constructions verbales._

Pourquoi ? Parce que l’apprentissage des langues ne se fait pas en vase closDepuis plusieurs décennies, des cher-cheurs2 postulent que l’apprentissage d’une langue repose sur les langues que connait déjà le locuteur. Ce postulat permet donc d’envisager l’apprentissage des langues, premières et secondes, en termes de « passages, de continuités et de circulations interlinguistiques » (Sabatier, 2008, p. 122) et encourage la mise en contraste du fonctionnement des langues connues par les élèves en classe. Dans la classe de FLens du Québec, il s’agirait notamment de mettre en perspective le fonctionnement du français et de l’anglais3. Une approche permet cette mise en relation : la didac-tique intégrée des langues._

Comment ? En mettant en pers-pective le fonctionnement des deux languesL’approche intégrée des langues n’est pas récente : il y a plus de trente ans, Roulet (1980) proposait d’axer l’ensei-gnement de la langue non seulement sur les différences entre les systèmes linguistiques par l’entremise desquels s’actualisent la langue d’enseignement et

Isabelle GauvinProfesseureUniversité du Québec à Montré[email protected]

Joël ThibeaultProfesseurUniversité de [email protected]

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la langue seconde, mais aussi sur leurs similarités. Plus précisément, il privilé-giait l’arrimage de l’enseignement des deux langues et, à titre d’exemple, prô-nait l’harmonisation des contenus gram-maticaux qui apparaissent dans chacun des cursus scolaires et des terminologies qui permettent de les discuter avec les élèves (De Pietro, 2014 ; Wokush, 2008). Cette approche présente l’avantage de porter sur un nombre limité de langues (la langue d’enseignement et la langue seconde), tout en s’appuyant sur la langue d’enseignement._

L’exemple de l’enseignement des constructions verbalesDès le primaire, l’enseignement des constructions verbales en FLens prévoit, entre autres choses, l’étude des catégories syntaxiques des verbes (c’est-à-dire leur appartenance à la catégorie transitive directe, transitive indirecte ou intransi-tive) et le recours aux manipulations de remplacement des groupes nominaux (GN) et prépositionnels (Gprép) par des pronoms compléments directs (le, la, les) et indirects (leur, lui) (MELS, 2009). Ce premier élément, l’enseignement des catégories syntaxiques des verbes, est d’ailleurs clairement abordé dans la Progression des apprentissages (MELS, 2009) dès la 4e année du primaire, même si le métalangage relié à la transitivité y est évité._

Dans le cadre d’une didactique intégrée, la mise en contraste des constructions verbales du français et de l’anglais peut aider l’élève à comprendre que certains verbes en français et en anglais par-tagent des propriétés syntaxiques, mais que d’autres affichent des différences._

Sur le plan des similarités, les élèves prendront conscience que certains verbes appartiennent à une même caté-gorie syntaxique. Dans le cas des verbes appeler et to call (exemples e et g), leur comparaison permet de constater leur construction transitive directe (avec un GN). De plus, les élèves noteront que, autant en français qu’en anglais,

le remplacement des compléments verbaux par un pronom est possible (exemples b et d ainsi que f et h). Pour ce qui est des dissemblances, ils consta-teront que certains verbes (exemples a et c) n’ont pas la même construction en français et en anglais : le verbe télépho-ner, par exemple, se construit avec un Gprép, to call et to phone avec un GN. Enfin, les élèves comprendront que le

pronom de remplacement est porteur de différents traits morphosyntaxiques et que, dans les deux langues concer-nées, il adopte une position différente (comparaison des exemples b et d ainsi que f et h)._

Quand l’élève compare les langues de l’école, il est appelé à saisir que la

Extrait de la Progression des apprentissages (2009), section « Lexique »

c. ajouter aux verbes1 de la liste des mots d’orthographe à l’étude des exemples qui illustrent l’emploi judicieux de la préposition (p. ex. : aller : aller à l’école ; aller en Ontario)

d. […]

e. justifier des changements de sens d’un verbe en faisant référence aux changements de constructions du groupe du verbe (p. ex. : parler de quelqu’un signifie qu’on dit quelque chose sur quelqu’un ; parler à quelqu’un signifie qu’on adresse la parole à quelqu’un)

1 Mettre en évidence la construction des verbes courants est profitable pour tous les élèves, mais particulièrement

pour les allophones.

Comparaison des constructions verbales du français et de l'anglais

Exemples français Exemples anglais

a

téléphoner à Jean-Pierre

téléphoner à Rosalie

b

lui téléphoner

lui téléphoner

c

to phone Jean-Pierre

to phone Rosalie

d

to phone him

to phone her

e

appeler Jean-Pierre

appeler Rosalie

f

l'appeler

l'appeler

g

to call Jean-Pierre

to call Rosalie

h

to call him

to call her

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Notes

1. Pour plus de détails, voir Gauvin et Thibault (2016). Les travaux présentés ici ont été menés dans le cadre de la recherche Savoirs grammaticaux du français et de l’anglais : identification de « passerelles » dans ces savoirs pour la classe de français langue d’enseignement et d’anglais langue seconde au Qué-bec (subvention octroyée à Isabelle Gauvin, CRSH Développement savoir, 2013-2015).

2. Pour un article phare dans le domaine, voir Cummins (1979).

3. Il pourrait également s’agir d’une prise en considé-ration des langues d’origine des élèves provenant de familles autochtones ou migrantes. Nous n’aborderons pas ici cette autre réalité.

4. Le métalangage utilisé en français et en anglais peut certainement occasionner une certaine confusion chez l’élève qui apprend ces deux langues en même temps. Pensons, entre autres, au groupe nominal, dont l’équivalent anglais est nommé nominal phrase. Pour que le métalangage soit un outil fécond qui favorisera l’appropriation des langues à l’école, il faut d’après nous qu’il soit harmonisé d’une langue à l’autre, ce qui n’est pas toujours le cas.

Références

_ Cummins, J. (1979). Cognitive/academic language proficiency, linguistic interdependence, the optimum age question and some other matters. Working Papers on Bilingualism, 19, 121-129.

_ De Pietro, J.-F. (2014). Qu’en est-il de la termi-nologie grammaticale dans l’enseignement des langues ? Babylonia, 2, 41-46.

_ Gauvin, I. et Thibault, J. (2016). Pour une didactique intégrée de l’enseignement de la grammaire en contexte plurilingue québécois : le cas des constructions verbales. Scolagram, Revue de didactique de la grammaire. 2. Récupéré de https://scolagram.u-cergy.fr/uploads/Scolagram%20n%C2%B02-mars2016/Gauvin-Thibeault-sco-lagram-2.pdf .

_ MÉLS (2009). Programme de formation de l’école qué-bécoise. Progression des apprentissages au primaire, français langue d’enseignement. Québec : Gouver-nement du Québec. Récupéré de www.mels.gouv.qc.ca/progression/secondaire/

_ Roulet, E. (1980). Langue maternelle et langues secondes : vers une pédagogie intégrée. Paris, France : Hatier et CREDIF.

_ Sabatier, C. (2008). Compétence plurilingue et dynamiques d'appropriation langagière. In Moore, D. et Castellotti, V. (dir.). La compétence plurilingue : Regards francophones (p. 105-126). Berne, Suisse : Peter Lang.

_ Wokusch, S. (2008). Didactique intégrée des lan-gues : la contribution de l’école au plurilinguisme des élèves. Babylonia, 1, 12-14.

construction verbale est une caractéris-tique inhérente à chacun des verbes, à un point tel qu’elle peut être la même d’une langue à l’autre (to call/appeler, mais aussi, par exemple, ouvrir/to open, écrire/to write), mais qu’elle peut aussi varier pour deux verbes (to phone/téléphoner ou encore regarder/look at, jouer à/play, chercher/to search for, par exemple). De ce

fait, nous pensons que l’observation gui-dée de ce type de corpus devrait faciliter la (méta)compréhension des construc-tions verbales en FLens ; elle peut en outre appuyer le développement de la compétence plurilingue de l’élève, qui se familiarisera dès lors avec la construction de nombreux verbes en anglais. _

L’approche que nous proposons ici s’ins-crit parfaitement dans les programmes actuels, même si aucune mention à cet égard n’y est explicitement formu-lée. N’est-il pas étonnant que les élèves apprennent la grammaire de deux lan-gues à l’école sans faire de « passerelles » permettant d’en comprendre le fonc-tionnement ? Ne serait-il pas pertinent, en plus d’utiliser le même métalangage grammatical4, de recourir aux mêmes outils, notamment les manipulations syntaxiques, afin de mettre au jour leur fonctionnement respectif ? Il ne s’agit

pas de modifier radicalement les pra-tiques d’enseignement de la grammaire, mais bien d’y inclure un volet compa-ratif entre le FLens et AL2, et ce, pour que les élèves puissent plus facilement s’approprier les contenus d’une langue à l’autre. Malheureusement, étant donné l’état actuel de la recherche, nous ne dis-posons pas de résultats nous permettant

d’affirmer que cette approche intégrée présente des avantages pour l’appren-tissage de la grammaire du FLens et de l’AL2. Nos travaux futurs nous per-mettront de concevoir des séquences d’enseignement « intégré », de les mettre à l’essai et d’en évaluer les impacts non seulement sur les connaissances gram-maticales, mais également sur les com-pétences linguistiques des élèves._

N’est-il pas étonnant que les élèves apprennent la grammaire de deux langues à l’école sans faire de « passerelles »

permettant d’en comprendre le fonctionnement ?

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Dossier Justifier : un outil pour apprendre la grammaire en français... et en anglais !_

Marie-Hélène ForgetProfesseure invitéeUniversité du Québec à Montré[email protected]

Isabelle GauvinProfesseureUniversité du Québec à Montré[email protected]

Au Québec, la volonté sociale et politique d’accroitre les compétences en français des jeunes Québécois (MELS, 2008) tout en les dotant de compétences plus solides en anglais (MELS, 2012) fait consensus. Dans cette perspec-tive, une première étape consisterait, si l’on se réfère à des recherches récentes (Genesee, 2010 ; Lyster, 2007), à enrichir l’enseignement du français langue d’enseignement (FL1) des principes d’une approche plus communicative largement répandue en enseignement de l’anglais langue seconde (AL2) et, inversement, à enrichir l’enseignement de l’AL2 d’une approche centrée sur l’étude du fonctionnement de la langue, répandue quant à elle dans les classes de FL1. _

Dans cette perspective, une recherche1 a été menée dans deux classes ordinaires du 3e cycle du primaire de deux écoles mon-tréalaises, situées dans des quartiers à majorité francophone et offrant l’anglais intensif, pour comprendre comment et à quelles conditions résoudre avec ses pairs des problèmes grammaticaux peut favoriser la construction des connaissances grammaticales en AL2 comme en FL1. Pour ce faire, nous avons placé des élèves en dyades et leur avons demandé de réécrire un court texte (l’un en français, l’autre en anglais) dans lequel nous avons préalablement inséré des erreurs grammaticales de divers types. Les élèves devaient donc repérer ces erreurs et s’entendre sur la correction à apporter, notamment en justifiant leurs propositions. Autrement dit, ils étaient placés dans une situation de communication dont le but consistait à réfléchir sur la langue. Les interactions de seize dyades (huit par classe) ont, à ce jour, été analysées._

Cette recherche a permis de constater que les élèves recourent à la justification afin de résoudre des problèmes grammaticaux, aussi bien en français qu’en anglais. Ce constat permet de pen-ser que la conduite de justification2 est un outil utile et utilisé spontanément par les élèves (Forget, 2015) pour communiquer et pour réfléchir sur la langue. Toutefois, si l’enseignant veut

maximiser l’efficacité de la justification pour la construction de connaissances grammaticales, il devrait s’assurer que les tâches qu’il soumet à ses élèves comportent certaines caractéristiques. Voyons lesquelles et pourquoi._

Toutes les justifications émises en FL1 et en AL2 ne sont pas utiles

Au cours des échanges ayant lieu pendant la réécriture négo-ciée d’un texte, les conduites de justification émises par les élèves peuvent avoir diverses fonctions, dont certaines vont contribuer plus que d’autres à la construction de connais-sances nouvelles ou à leur consolidation. En effet, lorsqu’une erreur est repérée et que l’un des deux coéquipiers est en mesure de la solutionner, ce dernier va simplement fournir la raison qui « explique » la correction :

Thomas lit la phrase suivante : I wonder whether the peoples*(...) Yasin, repérant l’erreur, réplique : Remove the s. Because people it’s already at the plurial3.

_

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Dans ce type d’échanges, il n’y a pas de nouveaux apprentis-sages à proprement parler (sauf si l’un répond à la question de l’autre par une explication) puisque les élèves savent spon-tanément comment résoudre le problème : ils recourent alors aux connaissances appropriées pour résoudre le problème cor-rectement, dans 90 % des cas en français et dans 75 % des cas en anglais. Pour s’assurer que les justifications des élèves les mènent vers de nouveaux apprentissages, les tâches soumises aux élèves devraient donc présenter des problèmes pour les-quels les élèves n’ont pas toutes les connaissances ou ont des connaissances qui nécessitent une consolidation pour être en mesure de résoudre le problème._

Dans d’autres cas, un problème est repéré par un élève, mais ni le problème ni la correction ne semblent acceptables pour son coéquipier. S’enclenche alors un « débat » qui se solde le plus souvent par une correction erronée ou neutre, c’est-à-dire qu’elle n’apporte rien de mieux au texte sur le plan grammatical :

Lyna lit la phrase et propose une correction : Elle est souvent privée de Nintendo par son papa et sa maman, ben « par ses parents » là.Rami : C’est « par son papa et sa maman », parce qu’on ne doit pas changer le texte, on doit juste le corriger. Lyna : C’est moins compliqué de dire « par ses parents » au lieu de toujours dire papa, maman, (parce que) ça se répète trop.Rami : Mais il faut pas changer le texte parce qu’ici c’est écrit « par son papa et sa maman ».

_

Dans ces échanges de type « débat », on constate que les « pro-blèmes » repérés par les élèves portent moins sur le système linguistique lui-même que sur l’esthétique du texte, sur leurs connaissances du monde, voire sur l’interprétation des consignes. Peu de progrès sont donc possibles sur le plan grammatical. Dans

les tâches à soumettre aux élèves, l’enseignant devra donc attirer l’attention des élèves sur des problèmes spécifiquement gram-maticaux, pour lesquels une seule réponse est possible._

Les conduites de justification révèlent leur potentiel pour l’ap-prentissage dans un troisième type d’échanges qui amènent les élèves à « chercher » la réponse à un problème pour lequel aucun des coéquipiers n’a de solution assurée et pour lequel une seule réponse leur semble possible :

Jasmine lit la phrase : In all the area* (mais en pro-nonçant un s) ? But I think it’s good all area too, it is like just…Alex : All, hum, countries ?Jasmine : No, all area is good, but it needs a plural I really think...Alex : Yeah, maybe.Étienne : Areas with a s ?Alex : Yeah. In all areas of the world. Because it’s in all of them, not only one.

Alex fournit à la toute fin de l’interaction la raison qui appuie sa conclusion aux termes du raisonnement coconstruit qui consistait à déterminer si area prenait ou pas un s dans ce contexte.À propos de la phrase « Toutefois, comme sa professeure a eu la grippe, elle *4 a pas pu donner la note finale de son texte vendredi », Diego fait cette remarque :

Diego : Mais t'es sûr ? Peut-être qu’il y a une virgule ? Vendredi, c’est un complément de phrase, donc tu pourrais le mettre au début.Cédric : Ouais, c’est vrai parce que tu ne dis pas « mon texte vendredi ». Ça ne va pas ensemble.Diego : À chaque fois qu'il y a un CP, je me souviens, on mettait une virgule avant… ou après…Cédric : Ouais, on va relire la phrase (lecture silencieuse).Diego : Là, on est surs que c’est un CP parce qu’on sait qu’on peut le mettre au début.

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L’échange a ici permis de consolider la notion de « complément de phrase »5. Dans ces deux exemples, les justifications émises par les élèves servent à appuyer des hypothèses en les fondant sur des raisonnements qu’ils pensent pouvoir être vrais, mais on sent bien leur incertitude : ils doutent, fournissent les rai-sons de ces doutes et, ce faisant, ils mettent leurs hypothèses à l’épreuve. Ils réfléchissent donc au fonctionnement de la langue et communiquent de manière authentique !_

La justification est un outil efficace à certaines conditionsCes échanges montrent que les erreurs qui amènent les élèves à « chercher » la solution au problème perçu ont un potentiel plus grand pour les apprentissages, d’où l’intérêt de proposer des tâches de résolution de problèmes grammaticaux qui foca-lisent sur le fonctionnement de la langue et placent les élèves en situation authentique de communication, et ce, autant en classe de français que d’anglais. Dans de telles situations, pour optimiser l’efficacité des justifications et pour les orienter vers la consolidation, voire la construction des connaissances spéci-fiquement grammaticales en français et en anglais, l’enseignant aurait avantage à :1. choisir des stratégies d’enseignement de la grammaire axées

sur le recours à la réflexion métalinguistique (par exemple, les dictées métacognitives, la médiation des apprentissages6) ;

2. cibler ou élaborer des problèmes pour lesquels une seule solution est possible et qui nécessitent la consolidation, voire l’acquisition de connaissances pour les résoudre ;

3. formuler des consignes qui orientent les élèves sur des pro-blèmes spécifiquement grammaticaux ;

4. encourager les élèves à questionner leurs pairs, à émettre des doutes, à justifier une hypothèse, à proposer une solution ou à appuyer celle d’un pair, toujours en précisant pourquoi ;

5. enseigner l’objet « justification », c’est-à-dire utiliser ces tâches pour faire remarquer aux élèves quand, comment et pour quelles raisons on se sert ou peut se servir de la justi-fication pour apprendre et mieux communiquer.

_

ConclusionEn classe de langue, l’usage de la justification ne sert encore trop qu’à vérifier l’état des connaissances des élèves. Or, quand les échanges sont motivés par la résolution de problèmes grammaticaux, les élèves émettent des solutions, des doutes ou des hypothèses et les justifient, explicitant alors leurs rai-sonnements grammaticaux que ce soit en FL1 ou en AL2. Ils examinent la pertinence et la justesse de leurs raisonnements, et construisent une solution fondée sur des connaissances plus solides des langues premières et secondes. Recourir ainsi à la justification pour apprendre la grammaire du français ou de l’anglais permet aux élèves de mieux comprendre chacune de ces langues et son système. Cela permet également de constituer la justification en tant que véritable outil langagier et cognitif jouant un rôle médiateur transversal dans et pour l’apprentissage de la grammaire, et ce, pour toutes les langues.

Nous émettons l’hypothèse que si les enseignants de français et d’anglais proposaient un tel travail sur les langues, jume-lant l’approche communicative et celle centrée sur l’étude du fonctionnement de la langue, les connaissances grammaticales et les compétences des élèves dans ces deux langues seraient accrues (Genesse, 2010 ; Lyster, 2007). Nos recherches se pour-suivent en ce sens._

Notes

1. Cette recherche dirigée par Isabelle Gauvin a été financée par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH), ainsi que par une bourse postdoctorale du Fonds de Recherche du Québec – Société et Culture (FRQ-SC).

2. Pour plus de détails sur la portée euristique de la justification dans l’apprentissage de la gram-maire, le lecteur est invité à consulter : Forget, M.-H. (2015). La justification orale : un outil pour apprendre la grammaire. Vivre le primaire, 28(2), 14-15.

3. Les justifications apparaissent en gras dans les extraits.

4. Les astérisques représentent des erreurs glissées dans le texte à réviser.

5. Les élèves de cette dyade n’ont pas relevé l’omis-sion du n’. Une intervention de l’enseignant devrait orienter les élèves vers cette erreur, intervention qui, en contexte de recherche, était par ailleurs impossible à faire sans biaiser les résultats.

6. Pour plus de détails, consulter par exemple les travaux de Marie Nadeau (La dictée 0 faute et La phrase du jour avec vidéos de pratiques en classe disponibles sur la page Facebook suivante : https://www.facebook.com/groups/852304104823499/ ou « La dictée 0 faute » et « La phrase dictée du jour » : un début de solution aux difficultés en ortho-graphe grammaticale téléchargeable à l’adresse : http://correspo.ccdmd.qc.ca/index.php/category/revision-correction/) et de Geneviève Beaulne (http://www.archipel.uqam.ca/9338/1/M14465.pdf).

Références

_ Chartrand, S.-G. (2013). Enseigner à justifier ses propos de l'école à l'université. Correspondance, 19(1). Récupéré de : http://correspo.ccdmd.qc.ca/Corr19-1/2.html

_ Forget, M.-H. (2015). La justification orale : un outil pour apprendre la grammaire. Vivre le primaire, 28(2), 14-15.

_ Genese, F. (2010). What do we know about bilin-gual education for majority language students ? In Bhatia, T. K. et Ritchie, W. (éd.). Handbook of Bilin-gualism and Multiculturalism (p. 547-576). Malden, MA : Blackwell.

_ Lyster, R. (2007). Learning and teaching languages through content: A counterbalanced approach. Ams-terdam/Philadelphia: John Benjamins.

_ MELS (2008). Plan d'action pour l'amélioration du français au primaire et au secondaire. Québec : Gou-vernement du Québec. Récupéré de : http://www1.education.gouv.qc.ca/ameliorationFrancais/

_ MELS (2012). L'anglais intensif : Ce que dit la recherche. Québec : Gouvernement du Québec. Récupéré de : www.mels.gouv.qc.ca.

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Dossier Les approches plurielles pour lire et écrire entre les langues à l’école primaire en Colombie-Britannique_

La diversité linguistique et culturelle constitue aujourd’hui un incontournable de la réalité des salles de classes partout au Canada. Le pluralisme de la clientèle scolaire n’est donc plus une exception et l’école cherche aujourd’hui à mobiliser ce dernier, ainsi que le capital culturel varié des élèves, pour en faire des tremplins aux apprentissages scolaires. _

Cette problématique est d’autant plus cruciale pour la construction d’une compétence du lire-écrire dans des contextes où la langue de l’école n’est pas celle de l’environ-nement social et où elle est en situation de langue seconde minoritaire, comme c’est le cas par exemple en Colombie-Britannique. Comment, autrement dit, passer d’une langue

à d’autres, des langues des familles à celle de l’école tout en articulant ces savoirs langagiers aux contenus disciplinaires liés à la littératie scolaire ? _

Approches plurielles et apprentissage du et en françaisNombreux sont les travaux (Candelier, 2008 ; Cummins, 2013 ; García et Li, 2014 ; Litalien, Moore et Sabatier, 2012 ; Prasad, 2014 ; Armand, 2012), pour n’en citer que quelques-uns, qui soulignent en effet la nécessité d’adopter des pratiques trans-langagières à l’école. Par ce terme, il faut entendre à la fois a) des pratiques qui mobilisent l’ensemble des langues et des variétés de langues qui composent le répertoire communicatif des apprenants et b) des approches pédagogiques qui per-mettent à ces derniers de comprendre les interrelations entre ces différents idiomes et la langue de l’école._

C’est à partir des années 1990 qu’a émergé, notamment en Europe, la prise en compte de la diversité linguistique et culturelle comme outil d’enseignement et d’apprentissage. Les premiers travaux, comme Candelier (2007) pour un rap-pel historique, s’inscrivent d’emblée dans un paradigme qui pose la diversité comme principe éducatif et la compétence plurilingue et pluriculturelle des individus (Coste, Moore et Zarate, 1997) comme atout pour apprendre. Cette compétence suppose que les locuteurs « maitrise[nt], à des degrés divers, plusieurs langues et, à des degrés divers, l’expérience de plu-sieurs cultures, tout en étant à même de gérer l’ensemble de ce capital langagier et culturel » (Coste et al., 1997, p. 12)._

Replacé dans le cadre des compétences littératiées en contexte scolaire, le développement de cette compétence unique, mais plurielle, conduit à privilégier des activités d’enseignement et d’apprentissage qui mobilisent plusieurs variétés linguistiques et culturelles (Candelier, 2008). En construisant des séquences pédagogiques qui mettent en scène la diversité linguistique et culturelle, ces activités didactiques prennent le nom d’ap-proches plurielles et elles visent à aider les élèves à établir

Cécile SabatierProfesseureUniversité Simon [email protected]

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des liens entre la langue de l’école et les langues familiales ou communautaires en prenant appui sur ces dernières pour faciliter l’accès à la langue de scolarisation. _

Au Canada, où l’anglais et le français sont les deux langues officielles et les deux principales langues de scolarisation, et où la population est extrêmement diversifiée1, c’est à partir du milieu des années 2000 que les pratiques pédagogiques s’intéressent aux langues et cultures qui composent le capi-tal symbolique des élèves plurilingues afin de soutenir ces derniers dans le développement de leur bilinguisme scolaire (Armand, Dagenais et Nicollin, 2008 ; Cummins, 2013). _

En plaçant toutes les langues et cultures au cœur des appren-tissages, les approches plurielles proposent une transposition éducative de la complexité des formes de socialisation que vivent les élèves. _

Repenser la notion de texte pour travailler la langue de l’écoleDans ce contexte de contacts (inter)langagiers et (inter)cultu-rels, l’entrée dans le lire-écrire en langue scolaire conduit à discuter la notion de texte. En concevant la littératie comme des pratiques sociales qui dépassent les capacités de codage et de décodage de textes écrits imprimés, les approches plu-rielles permettent de construire une perception critique de la réalité et du monde qui nous entoure (Sabatier, Moore et Dagenais, 2013). Ainsi, dans une unité didactique Lire la ville

portant sur le paysage linguistique urbain (Dagenais, Moore et Sabatier, 2011), les élèves réfléchissent à la manière dont la ville, par son environnement graphique, met en scène les rapports entre les individus qui l’habitent et les langues qu’ils pratiquent. L’intervention s’articule autour de trois leçons qui sont déclinées chacune en une série d’activités qui placent l’in-terprétation des élèves au cœur de la démarche. Les élèves par-courent la ville à la recherche des écrits en différentes langues. Ils doivent prendre des photographies de ces derniers pour ensuite proposer des interprétations quant aux rapports entre langues, cultures et communautés. Enfin, ils doivent créer une affiche pour partager l’information avec leurs camarades.

(Sabatier, Moore et Dagenais, 2013)

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En travaillant simultanément les dimensions orales et scriptu-rales écologiquement situées dans l’environnement urbain avec lequel ils sont familiers, les élèves développent leurs com-pétences littératiées par les formats d’interactions qui reposent sur l’emploi et l’apprentissage de tout un vocabulaire et de structures de phrases, en français langue de l’école, nécessaires à l’expression d’un discours critique sur le monde. _

Articuler les héritages familiaux et communautaires aux objectifs d’apprentissage du lire-écrire à l’école D’autres séquences pédagogiques sont construites à partir d’albums de littérature jeunesse (Litalien, Moore et Sabatier, 2012) ou de la rédaction de textes identitaires en différentes langues2 (Vatz-Laroussi, Armand, Rachédi, Stoïca, Combes et Koné, 2013) qui inscrivent le développement du lire-écrire dans une démarche transversale d’observation des langues pour mieux réfléchir le fonctionnement de la langue de l’école. La démarche prend appui sur un tissage réfléchi des expertises scolaires, familiales et communautaires. _

Cette articulation permet de travailler de manière intégrée les dimensions cognitives (les habiletés de lecture et d’écriture), linguistiques (le français langue scolaire), affectives et sociales (le rapport à l’autre) chez les élèves (Moore et Sabatier, 2014). Ainsi, dans une classe d’un conseil scolaire francophone de Colombie-Britannique, un enseignant prend-il appui sur les langues et les récits familiaux des élèves pour amener ces der-niers à rédiger en français un texte portant sur les légendes familiales ou culturelles. Cette activité mobilise d’abord un tra-vail sur la structure textuelle des légendes en français et sur les

différentes parties qui composent ce genre de texte. Cette étape peut s’effectuer à partir de la lecture collective d’un album de littérature jeunesse. Ensuite, elle implique un travail axé sur le vocabulaire nécessaire pour raconter l’histoire ; lors de cette étape, le passage entre les langues des familles et la langue de l’école est encouragé afin que les élèves développent les

champs sémantiques dans les différents idiomes de la classe. Enfin, les élèves rédigent leurs textes sur plusieurs séances pendant lesquelles ils sont amenés à effectuer des révisions en utilisant les outils nécessaires (dictionnaires, grammaire, aide-mémoire de la classe). _

Dans cette circulation d’une langue à l’autre (puisque les élèves sont encouragés à écrire dans les langues familiales), mais aussi par le recours aux expertises des familles et par la reconnaissance d’héritages culturels communautaires autres que ceux transmis par l’école, se met en place un rapport au lire-écrire sur un mode plurilingue._

De telles modalités de travail valorisent alors les savoirs d’expérience des élèves et de leurs familles et centrent les pratiques

pédagogiques du lire-écrire autour de la personnalité des élèves et de leurs

univers langagiers et culturels (Sabatier et Myre-Bisaillon, 2014).

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De telles modalités de travail valorisent alors les savoirs d’ex-périence des élèves et de leurs familles et centrent les pra-tiques pédagogiques du lire-écrire autour de la personnalité des élèves et de leurs univers langagiers et culturels (Sabatier et Myre-Bisaillon, 2014). Les apprentissages littératiés se construisent à partir des savoirs des élèves et des environne-ments dans lesquels ils sont situés. Ils médiatisent un travail autour des connaissances sur l’écrit qui sont indissociables des pratiques de socialisation dans lesquelles elles se développent. _

ConclusionLire-écrire entre les langues conduit, par le biais des approches plurielles, à dépasser la vision (longtemps) problématique de la composition plurielle des sociétés, afin de trouver des modes de traitement de la pluralité – et de sa complexité – sur les plans politique, social et éducatif qui inscrivent le pluriel dans les pratiques pédagogiques. Ce déplacement conduit à sortir des modèles de référence sur lesquels l’enseignement des langues (notamment secondes ou premières en contextes minoritaires) s’est traditionnellement appuyé pour embrasser une articulation intégrée de la thématique de la diversité lin-guistique et culturelle à la question de l’enseignement-appren-tissage. Ce faisant, les approches plurielles posent le plurilin-guisme et la diversité comme des outils d’apprentissage pour travailler le lire-écrire entre les langues sur les plans cognitif, affectif et social. _RemerciementsL’auteure remercie les commissions scolaires, les enseignants, les élèves et leurs parents pour l’accueil dans les salles de classe afin de permettre ces recherches.

Notes

1. En Colombie-Britannique, par exemple, près de six habitants sur 10 ont déclaré l’usage d’une langue autre que l’anglais ou le français dans le contexte familial. Au premier rang de ces langues se trouvent le punjabi, le cantonais, le chinois (non spécifié) et le mandarin.

2. Voir à ce sujet l'article de Céline Renaulaud au sein de ce dossier

Références

_ Armand, F. (2012). Enseigner en milieu pluriethnique et plurilingue : place aux pratiques innovantes. Québec français, 167, 48-50. Récupéré de : http://id.erudit.org/iderudit/67710ac

_ Armand, F., Dagenais, D. et Nicollin, L. (2008). La dimension linguistique des enjeux interculturels : de l’Éveil aux langues à l’éducation plurilingue. Éducation et francophonie, 36(1). 44-64. Récupéré de : https://www.erudit.org/en/journals/ef/2008-v36-n1-ef2292/018089ar.pdf

_ Candelier, M. (2008). Approches plurielles, didactiques du plurilinguisme : le même et l’autre. Les Cahiers de l’ACEDLE, 5(1), 65-90. Récupéré de : https://acedle.org/old/IMG/pdf/Candelier_Cah5-1.pdf

_ Candelier, M. (2007). Éveil aux langues à l'école primaire – Evlang : bilan d'une inno-vation européenne. Bruxelles : De Boeck.

_ Coste, D., Moore, D. et Zarate, G. (1997). La compétence plurilingue et pluriculturelle. Strasbourg : Conseil de l’Europe, division des politiques linguistiques. Nouvelle version (2009) récupérée de : https://www.coe.int/t/dg4/linguistic/Source/Sour-cePublications/CompetencePlurilingue09web_FR.pdf

_ Cummins, J. (2013). Rethinking monolingual instructional strategies in multi-lingual classrooms. Revue Canadienne de Linguistique Appliquée, 10(2), 221-240. Récupéré de : http://www.aclacaal.org/wp-content/uploads/2013/08/7-vol-10-no2-art-cummins.pdf

_ Dagenais, D., Moore, D. et Sabatier, C. (2011). Lire la ville. Exploiter le paysage linguistique pour une approche plurilingue intégrée. In Cortier, C. et Cavalli M. (éd.). Langues régionales/minoritaires dans l’éducation bi/plurilingue, Langues d’ici, langues d’ailleurs (25-28). Graz : Conseil de l’Europe, Centre européen pour les langues vivantes.

_ García, O. et Li, W. (2014). Translanguaging : Language, Bilingualism and Education. London: Palgrave Macmillan Pivot.

_ Litalien, R-J., Moore, D. et Sabatier, C. (2012). Ethnographie de la classe, pratiques plurielles et réflexivité : Pour une écologie de la diversité. Revue Cana-dienne de l’Éducation, 35(2), 192-211. Récupéré de : http://ojs.vre.upei.ca/index.php/cje-rce/article/view/1287

_ Moore, D. et Sabatier, C. (2014). Les approches plurielles et les livres plurilingues. De nouvelles ouvertures pour l’entrée dans l’écrit et pour favoriser le lien famille-école en milieu multilingue et multiculturel. Nouveaux Cahiers de la Recherche en Éducation, 17(2), 32-65. Récupéré de : http://id.erudit.org/iderugit/1030887ar

_ Prasad, G. (2014). Portraits of Plurilingualism in a French International School in Toronto: Exploring the role of the visual methods to access students’ repre-sentation of their linguistically diverse identities. Canadian Journal of Applied Linguistics, 17(1), 55-71. Récupéré de : https://journals.lib.unb.ca/index.php/CJAL/article/view/22126

_ Sabatier, C. et Myre-Bisaillon, J. (2015). Lire et écrire : les liens École-Fa-milles-Communautés en contextes pluriels. Nouveaux Cahiers de la Recherche en Éducation, 17(2). Récupéré de : https://www.erudit.org/revue/ncre/2014/v17/n2/index.html

_ Sabatier, C., Moore, D. et Dagenais, D. (2013). Espaces urbains, compétences littératiées multimodales en immersion française au Canada. Glottopol, 21, 138-161. Récupéré de : http://glottopol.univ-rouen.fr/telecharger/numero_21/gpl21_09sabatier_moore_dagenais.pdf

_ Vatz-Laroussi, M., Armand, F., Rachédi, L., Stoïca, A., Combes, E. et Koné, M. (2013). Des histoires familiales pour apprendre à écrire ! Un projet École-Familles-Com-munautés. Guide d’accompagnement. Récupéré de : http://www.elodil.umontreal.ca/fileadmin/documents/Guides/ehf/08-complet.pdf

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Dossier Les pratiques d’écriture en français et en anglais langue seconde d’élèves de sixième année primaire participant à un programme d’anglais intensif_

Récemment, plusieurs recherches ont montré que pour développer la compétence d’écriture des élèves, il était important de prendre en compte l’ensemble de leurs pra-tiques d’écriture, quelle que soit la langue dans laquelle ils écrivent : la langue d’enseignement, la langue maternelle ou une langue seconde (Armand, 2011 ; Moore et Sabatier, 2014). Au fur et à mesure que les classes au primaire deviennent plus variées sur le plan linguistique et culturel et que les élèves développent l’apprentissage d’une langue seconde en contexte scolaire, les distinctions entre « écri-ture » et « écriture en langue seconde » ne sont plus toujours faciles à dessiner et il importe d’amener les élèves à tisser des liens entre leurs différentes pratiques d’écriture. _

Les pratiques d'écriture à l'intérieur et à l'extérieur de l'écoleDans une étude récente consacrée à la compétence d’écriture des élèves de 6e année inscrits à des cours d'anglais inten-sif1, on a demandé aux élèves de parler de leurs habitudes d’écriture dans les deux langues : le français langue d’ensei-gnement et l’anglais langue seconde, et de dresser ainsi en quelque sorte leur autoportrait de scripteur (Delcambre et Reuter, 2002). Les élèves étaient également amenés à partager leur point de vue quant aux tâches d’écriture exigées dans le contexte scolaire._

À l'intérieur de l'école, les élèves2 ont mentionné que dans la classe de français, ils écrivent des histoires, des poèmes et des textes d’opinion ; ils rédigent aussi un journal individuel, réalisent des présentations PowerPoint et créent des bandes dessinées. Dans le cadre des cours d’anglais intensif, les élèves rédigent également un journal hebdomadaire, des écrits libres, un compte-rendu de film et d'autres tâches d'écriture comme la création d'instructions pour un jeu de société._

En dehors de l'école, un bon nombre d’élèves ont indiqué qu’ils écrivent de façon autonome en français pour passer le temps, « pour le plaisir » (...) ou pour des raisons créatives et d’expres-sion. Myriam3 a rapporté que l'écriture l'aidait à se détendre, à laisser libre cours à son imagination. Jade a exprimé qu'elle écrivait une histoire fantastique sur les gobelins et les créatures et qu'elle aimait beaucoup plus cela que des sujets basés sur une expérience de vie réelle (par exemple, les passe-temps ou une critique de film) qui sont, de son point de vue, trop formels et ne lui permettent pas de refléter adéquatement le niveau de créativité dont elle était capable. Antoine a mentionné que l'écriture, « ça laisse sortir notre imagination ; souvent, j'écris

Lynn ThomasProfesseureUniversité de [email protected]

Sunny Man Chu LauProfesseureUniversité [email protected]

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plus des histoires là [à la maison qu’à l’école] ». Nadia rapporte qu’elle écrit par-fois quand elle ne peut pas dormir ; elle trouve utile d'écrire sur quelque chose dont elle veut parler : « J'écris sur des sujets qui me tentent, des sujets dont j’ai envie de parler ». Certains élèves font des rédactions très élaborées pour un objectif de socialisation, et même professionnel. Par exemple, Yasmine a mentionné qu'elle était en train d'écrire une chanson en anglais avec une amie et Adam a parlé d'une histoire qu'il a écrite lors de la quatrième année pour la partager avec ses parents et ses amis. Laure a déclaré qu'elle écrivait un scé-nario d'une pièce de théâtre en français et la traduisait en anglais. Elle a divul-gué dans l'entretien qu'elle aimerait travailler dans l'industrie de la musique en tant que chanteuse-compositrice ou devenir écrivaine ; par conséquent, elle était très motivée pour continuer à

écrire au-delà des tâches scolaires. On constate, à travers ces quelques témoi-gnages, que les pratiques d’écriture des élèves à l’extérieur de l’école sont aussi variées que les raisons qu’ils ont don-nées pour le faire. Il est aussi intéressant

de voir que certains de ces élèves qui commencent à approfondir leur langue seconde éprouvent de l’intérêt à s’expri-mer par écrit dans cette nouvelle langue en dehors des commandes scolaires._

Une attitude positive envers l'écriturePresque tous les élèves rencontrés en entrevue individuelle ont convenu qu'ils avaient un gout général pour l'écriture en français comme moyen d'expression personnelle :…ça me permet de faire libérer l’imagina-tion. (Gabriel)…ça me permet de sortir mes idées… je rêve souvent… J’aime les écrire, les sortir de ma tête, là. C’est ça. (Hugo) _

Ce gout pour l’écriture s'appliquait éga-lement à l'écriture scolaire, mais son

degré varie selon les types de tâches et les consignes. Par exemple, Léa a trouvé amusant d’écrire lorsque l'enseignant d’anglais a fait des jeux de préécriture avec eux. Le genre d'écrit à produire est donc également important. Une élève

était très fière de son écriture de poèmes en français, en particulier parce qu'elle lui donnait un sentiment d'accomplis-sement, car elle pouvait utiliser « des beaux mots » et parce que son poème avait été sélectionné pour l'affichage en classe. La plupart des élèves ont exprimé une préférence générale pour l'écriture imaginative plutôt que pour écrire un texte d’opinion ou argumentatif, princi-palement parce qu'ils ne connaissaient pas beaucoup ce dernier genre d'écriture et donc ils trouvaient plus difficile de trouver des idées. Par exemple, Mathis a trouvé la rédaction de son texte d'opi-nion en français (pour savoir si l'uni-forme devrait être obligatoire pour les élèves du primaire) très difficile, car il avait « de la misère à trouver des idées ». _

Qu’il s’agisse d’écrire en français ou en anglais, presque tous les élèves ont dit aimer avoir la liberté de choisir leurs propres sujets, que ce soit pour écrire des histoires ou dans leur journal, afin d'ex-ploiter leurs expériences et ressources personnelles familières :Ben parce que je pratiquais ce sport-là, ça me donnait plus d’idées. Si c’était que j’en faisais moins, ça aurait dû être différent là. (Adam) J’ai aimé faire des rimes parce que souvent j’en fais, et ben parce que j’aime aussi le thème que j’ai choisi. (Laure)_

Quelques élèves ont mentionné qu'ils s'inspirent des médias et des histoires qu'ils ont lues. Par exemple, Nadia était fière de son histoire à propos d’Hal-loween, car elle a utilisé de nombreuses idées des films qu’elle a regardés : « J'aime les films d'horreur... je prends des idées de films d'horreur ». De même, Emma a trouvé que c’était facile d'écrire le texte demandé dans le cadre du protocole de recherche, car le sujet était My Favorite Hero (mon héros préféré) et qu’elle a pu prendre plusieurs idées dans les films et les livres sur les superhéros qu'elle a regardés et lus. L'écriture a également été considérée comme « le fun » (amusante) lorsque les élèves pouvaient utiliser leur créativité et leurs talents dans des créa-tions multimodales qui combinent texte

Il est aussi intéressant de voir que certains de ces élèves qui commencent à approfondir leur langue seconde

éprouvent de l’intérêt à s’exprimer par écrit dans cette nouvelle langue en dehors des commandes scolaires.

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et image. William a décrit un projet de jeu de société qu'il a créé dans son cours d'anglais intensif : « (...) C'était le fun parce que tu pouvais dessiner, puis tu pouvais écrire en même temps » _

Étonnamment, un élève a mentionné que les sujets imposés pourraient être intéressants dans certaines circonstances. Cet élève a déclaré qu'il avait vraiment aimé faire l'examen de fran-çais du ministère parce que l'une des tâches était d'écrire une lettre au directeur de la science, et que les élèves avaient eu le choix concernant le sujet sur lequel ils ont élaboré leur propo-sition. Un élève a soutenu qu'il n’avait pas de problème face à un sujet imposé tant qu'il a l'occasion de faire des recherches sur le sujet et d'améliorer son apprentissage : Ça peut être intéressant de se faire imposer des thèmes pour mieux connaitre certaines choses…. Puis aussi, on peut aller cher-cher… [ce] qu’on ne sait pas trop, c’est quoi vraiment le thème qu’on s’est fait donner. _

Cependant, la majorité des élèves trouvent l’écriture moins intéressante et plus difficile lorsqu'ils doivent produire un texte sur un sujet imposé à propos duquel ils n'ont pas beaucoup de connaissances ou d'idées. Par conséquent, qu'il s'agisse d'un sujet libre ou imposé par la personne ensei-gnante, de leur point de vue, les élèves doivent se sentir concernés par le sujet ou avoir l'impression qu'ils pourraient apprendre quelque chose de significatif à l’occasion du proces-sus de recherche et d’écriture. Sinon, ils risquent de se sentir frustrés et déconnectés de la tâche. _

Les informations recueillies auprès des élèves ainsi que les éléments qui ressortent des recherches récentes sur la didac-tique de l’écriture nous amènent à formuler en conclusion cet ensemble de recommandations à destination des per-sonnes enseignantes. _

Notes

1. Le développement de la compétence à écrire en langue première et seconde à la fin du primaire dans des contextes d'intensification de l'enseignement de la langue seconde. Projet de recherche financé par le CRSH 2014-2017, Olivier Dezutter, chercheur princi-pal ; V. Parent, C. Haigh. C. Sabatier, L. Thomas et S. Man Chu Lau cochercheures.

2. Cet article concerne des entretiens avec 24 élèves en 6e année de deux écoles primaires publiques.

3. Tous les noms des élèves sont fictifs pour garder l’anonymat des participants.

Références

_ Armand, F. (2011). L’enseignement de l’écriture en langue seconde. Synthèse de connaissances soumise au ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport. Montréal : Université de Montréal. Accessible à www.ceetum.umontreal.ca/uploads/media/syn-these-connaissances-ecriture-langue-seconde.pdf.

_ Delcambre, I. et Reuter, Y. (2002). Images du scrip-teur et rapports à l’écriture. Pratiques, 113/114, 7-28.

_ Moore, D. et Sabatier, C. (2014). Les approches plurielles et les livres plurilingues. De nouvelles ouvertures pour l’entrée dans l’écrit en milieu multilingue et multiculturel. Les Nouveaux c@hiers de la recherche en éducation (NCRÉ), 17(2), 32-65. Accessible en ligne à https://www.erudit.org/revue/ncre/2014/v17/n2/1030887ar.pdf

Recommandations à destination des personnes enseignantes

• Encourager la sensibilisation linguistique : comparer et contraster le vocabulaire, la syntaxe, la phonétique entre la langue maternelle et la langue ciblée.

• Prendre le temps de faire des activités de préécriture. Par exemple, demander aux élèves de faire une carte conceptuelle pour organiser leurs idées avant d’écrire un texte d’opinion ou argumentatif.

• Encourager les élèves à tirer des expériences du monde réel et à établir des liens entre leurs connaissances et les activités d'écriture.

• Offrir une combinaison de sujets imposés et de libre choix, et peut-être un choix entre ceux-ci.

• Planifier des activités d'écriture en groupe et individuelles.

• Valoriser et encourager les activités d'écriture hors école.

• Présenter des stratégies explicites : en parler, les modéliser.

• Favoriser les connexions entre l’écriture et la lecture.

• Concentrer l’attention d’abord sur le sens du texte plutôt que sur la norme. Les corrections peuvent se faire dans un autre temps. Expliquer pourquoi il faut faire des corrections, et introduire des façons plus amusantes de les faire, comme en grand groupe, avec un partenaire, ou en faisant des jeux.

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Dossier Comment évoluent les compétences en écriture en français des élèves faibles participant aux programmes d’enseignement intensif de l’anglais langue seconde ?_

Le modèle d’organisation actuelle-ment le plus répandu pour la mise en place des programmes d’anglais intensif consiste à séparer l’année scolaire en deux parties bien distinctes de cinq mois. Pour respecter les exi-gences de la loi 101 qui ne permet pas, dans les écoles francophones, d’enseigner une autre matière en anglais comme cela se fait dans les programmes d’immersion, l’ensemble des matières à l’exception de l’anglais est donc concentré sur une partie de l’année et l’autre partie est réservée exclusivement au cours d’anglais langue seconde. Dans ce modèle, deux éléments ont suscité une inquiétude

spécifique pour ce qui concerne les élèves les plus faibles. D’une part, on peut craindre que la condensation des matières sur une demi-année impose un rythme d’apprentissage soutenu qui ne convient peut-être pas à tous les élèves. D’autre part, étant donné que les élèves ne suivent pas de cours de français durant cinq mois, ce pour-rait-il qu’ils en arrivent à « perdre leur français ou une partie de celui-ci » à un moment aussi crucial que le pas-sage de l’enseignement primaire à l’enseignement secondaire ?_

Parmi l’ensemble des résultats de la recherche que nous avons réalisée à pro-pos des effets des programmes d’ensei-gnement d’anglais intensif sur le déve-loppement de la compétence d’écriture des élèves (Dezutter, Bou Serdane, Parent et Haigh, 2015), nous disposons de don-nées spécifiques à propos des élèves que nous avons qualifiés de « faibles scripteurs ». Ces données apportent un éclairage rassurant quant à la situation de cette catégorie d’élèves. _

L’échantillon de notre recherche com-prend 179 élèves répartis dans dix classes de sixième année du primaire du secteur d’enseignement francophone. Parmi ces dix classes, quatre classes ont

recouru au modèle intensif sous la forme cinq mois/cinq mois (deux classes où le modèle intensif était organisé dans les cinq premiers mois de classe et deux classes dans les cinq derniers mois). Cet échantillon spécifique compte 78 élèves, dont 18 élèves faibles scripteurs._

Selon les données recueillies à tra-vers la passation d’un test standardisé pour mesurer la compétence d’écriture (Wechler, 2005) à trois moments de l’année scolaire (début-milieu-fin), nous avons pu constater que les élèves qui étaient en dessous de la moyenne du test en français au début d’année et que nous considérons dès lors comme « faibles scripteurs » ont connu un progrès signi-ficatif dans leur résultat global au test en français tout au long de l’année scolaire. La période d’enseignement intensif de l’anglais, qu’ils l’aient vécue en première ou en seconde partie d’année, ne semble donc pas avoir empêché une réelle pro-gression en français écrit. Des informa-tions plus précises peuvent être dégagées de l’analyse des textes écrits en français dans le cadre de la passation du test ainsi que des minientrevues réalisées aux trois moments de l’année avec quelques élèves._

La compétence d’écriture s’appuie sur la maitrise d’un ensemble de

Véronique ParentProfesseureUniversité de [email protected]

Olivier DezutterProfesseurUniversité de [email protected]

Ismail Bou SerdaneÉtudiant au doctoratUniversité de [email protected]

Corinne HaighProfesseureUniversité [email protected]

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connaissances, dont les connaissances linguistiques (orthographe grammati-cale et lexicale, syntaxe, ponctuation). En tenant compte des différences lin-guistiques entre le français et l’anglais, il nous a paru intéressant de porter une attention spécifique à deux types d’erreurs repérables d’une part dans la section du test où les élèves devaient produire une phrase unique au départ de deux segments, en s’appuyant sur une illustration fournie et, d’autre part, dans les courts textes écrits en français sur un sujet imposé. Nous avons comp-tabilisé les erreurs de syntaxe, en ce qui concerne particulièrement la place de l’adjectif épithète − un élément mis de l’avant dans le programme du ministère pour le dernier cycle du primaire − ainsi que les erreurs d’accord du participe passé dans l’emploi du passé composé, un aspect qui ne pose pas de problème en anglais (Rice et Wexler, 1996). À tra-vers ces deux éléments, nous vérifions la présence éventuelle d’erreurs dues à un phénomène d’interférence qui aurait amené les élèves à adopter en français une formule typique de l’anglais._

Nous présentons ci-après les observa-tions pour trois cas différenciés d’élèves appartenant à trois écoles d’enseignement francophone d’une commission scolaire en région mettant en place le modèle intensif sous la forme 5 mois/5 mois (deux classes où le modèle intensif était organisé dans les cinq premiers mois de

classe et une classe dans les cinq derniers mois). Les élèves regroupés dans notre catégorie « faibles scripteurs » appar-tiennent à des milieux socioéconomiques variés et détiennent des niveaux diffé-rents de compétence : un élève (Charles) a obtenu un résultat au test initial en français juste en dessous de la moyenne, une élève (Mélissa) présente des résultats moyennement en dessous de la moyenne et une élève (Camille) des résultats net-tement en dessous de la moyenne. De manière générale, l’ensemble des élèves

de cette catégorie ont commis, au fil de l’année, de moins en moins d’erreurs quant au placement de l'adjectif épithète et quant à la conjugaison des verbes au passé composé. _

Charles, qui a suivi le programme de l’anglais intensif dans la première moitié de l’année scolaire, n’a commis aucune erreur de placement de l’adjectif épi-thète par rapport au nom durant l’année scolaire dans les phrases et la production de texte du test. Il a respecté la position de cet adjectif par rapport au nom dans ses phrases (la grenouille verte saute).

Pour ce qui concerne l’emploi des verbes au passé, Charles a commis de moins en moins d’erreurs d’accord du participe passé composé, notamment dans les phrases du test. Il a commis une seule erreur d’accord dans le pre-mier test au début de l’année ([…] il a aussi gagner le prix du meilleur athlète). Dans le deuxième et troisième tests de l’année scolaire, il n’a commis aucune erreur de ce genre. Cette progression des résultats correspond à la perception de compétence partagée par Charles lors

de la deuxième minientrevue qui s’est déroulée à la moitié de l’année scolaire : « Ben j’étais moins bon en français au début de l’année, pis je suis amélioré […], fait que là, ben je me suis amélioré là ». En faisant la différence entre l’écriture en français et celle en anglais, Charles déclare également dans la deuxième minientrevue qu’il préfère écrire en fran-çais, car il reconnait mieux son vocabu-laire que celui de l’anglais : « Oui parce qu’en français, je connais au moins tous les mots là, tandis qu’anglais, j’connais pas toute ». _

De manière générale, l’ensemble des élèves de cette catégorie ont commis, au fil de l’année, de moins en moins

d’erreurs quant au placement de l’adjectif épithète et quant à la conjugaison des verbes au passé composé.

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Pour Mélissa, qui a suivi le programme de l’anglais intensif dans la deuxième moitié de l’année scolaire, dans le pre-mier et le deuxième tests en français, au lieu d’utiliser un adjectif épithète dans la phrase du test (la grenouille verte saute), elle a recouru à un adjectif attribut (la grenouille est verte saute), ce qui a rendu la structure de sa phrase incorrecte. Elle a utilisé la même structure syntaxique dans le test de début et de la moitié de l’année scolaire en anglais langue seconde. Mélissa, sur ce point, a déclaré dans la deuxième minientrevue de la moitié de l’année scolaire qu’elle ne fait

pas de différence entre la structure de la phrase en français et celle en anglais. Dans le troisième test, elle a employé l’adjectif épithète (la grenouille verte saute) corrigeant ainsi l’erreur de struc-ture de phrase commise aux premier et deuxième tests. Pour la conjugaison des verbes au passé composé, cette élève a commis moins d’erreurs au cours de l’année scolaire particulièrement en pro-duction de texte du test. Dans le premier test, elle a commis deux erreurs d’accord du participe passé avec l’auxiliaire être. Tandis que dans le deuxième et le troi-sième tests, elle n’a commis qu’une seule erreur de ce genre. Au cours de la pre-mière minientrevue, Mélissa a déclaré qu’elle ne connaissait pas les règles pour écrire le français : « Ouais en français

[…] je sais pas de règles là, de comment tout écrire là ». Au cours de la troisième entrevue, lorsqu’on lui a posé la question si elle avait eu l’impression d’avoir fait des progrès en écriture en français, sa réponse a été : « Surement […] »._

Camille, qui a suivi le programme de l’anglais intensif dans la première moi-tié de l’année scolaire, a commis elle aussi de moins en moins d’erreurs d’un test à l’autre durant l’année sco-laire pour un des deux problèmes lin-guistiques observés. Nous avons relevé

plus de quatre erreurs de conjugaison de verbe au passé composé dans les phrases et la production de texte du test dans le premier test de début d’année scolaire, deux dans le deuxième et le troisième. Quant au placement de l’ad-jectif épithète dans les phrases du test, la même erreur a été soulevée dans les trois tests de l’année scolaire. Il s’agit d’une erreur relative à la syntaxe de cet adjectif. Dans une phrase, au lieu de structurer la phrase comme suit : la grenouille verte saute, l’élève a utilisé l’adjectif comme attribut (la grenouille est verte saute), commettant ainsi une erreur de structure syntaxique de la phrase. Toutefois, malgré les erreurs commises par cette élève, nous avons constaté généralement une progression

de ses résultats durant l’année scolaire dans les phrases et dans la production de texte du test. Lors des premières minientrevues de début d'année sco-laire, Camille a reconnu qu’elle a des difficultés en écriture en français, mais qu’elle tente de s’améliorer : « Ah oui, j’essayais de faire moins de fautes, mais j’en faisais [au début de l’année sco-laire] ». Dans la deuxième minientrevue, elle déclare qu’elle a fait des progrès en écriture en français. Elle dit aussi avoir perçu une différence entre l’écriture en français et celle en anglais. Selon elle, « les structures et l’orthographe du français sont plus difficiles que pour l’anglais »._

En conclusionLes résultats des analyses statistiques, des résultats aux tests successifs, l’ana-lyse de certaines erreurs dans les pro-ductions écrites des élèves et les propos tenus lors des minientrevues convergent vers un constat rassurant : les élèves faibles qui participent à un programme d’enseignement intensif de l’anglais progressent dans la maitrise du français écrit et sont conscients de leurs progrès ainsi que de ce qui fait une différence lorsqu’ils écrivent en français ou en anglais. Nous ne disposons toutefois pas des éléments qui nous permettraient de comparer leur progression par rapport aux élèves de niveau similaire suivant le programme régulier d’anglais ; une piste à explorer pour une prochaine recherche._Références

_ Dezutter, O., Bou Serdane, I., Parent, V. et Haigh, H. (2015). Le développement de la compétence à écrire en langue première et en langue seconde à la fin du primaire dans des contextes d’intensifi-cation de l’enseignement de la langue seconde. In Perspectives actuelles sur l’apprentissage de la lecture et de l’écriture/Contributions about learning to read and write - Actes du Symposium international sur la littératie à l’école/International Symposium for Educational Literacy (SILE/ISEL) (221–241). Sherbrooke : Les Éditions de l’Université de Sherbrooke.

_ Rice, M. et Wexler, K. (1996). Toward tense as a clinical marker of specific language impairment in English-speaking children. Journal of Speech, Language and Hearing Research, 39, 239-257.

_ Wechsler, D. (2005). WIAT-II : Test de rendement individuel de Wechsler (2e éd.). Toronto: Pearson Canada Assessment.

Les élèves faibles qui participent à un programme d’enseignement intensif de l’anglais progressent dans

la maitrise du français écrit et sont conscients de leurs progrès ainsi que de ce qui fait une différence

lorsqu’ils écrivent en français ou en anglais

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Dossier L'écriture des textes identitaires : un voyage intérieur pour tous les élèves !_

Céline RenaulaudÉtudiante au doctoratUniversité [email protected]

« Mon père, c’est l’Afrique. Je suis fier de mon père » - un élève burkinabé.« Mon père est pilote du Saint-Laurent, c’est beau » - un élève québécois. « Mon pays est le pays des fleurs et des orangers » - une élève algérienne. « Dans mon pays, j’avais toujours des bonnes notes, j’étais la meilleure. Pour moi l’école ici, c’est comme un palais quand j’arrive » - une élève syrienne sco-larisée dans la classe depuis cinq mois. _

L’école québécoise et les élèves issus de l’immigrationL’école québécoise accueille depuis plusieurs années de nombreux élèves issus de l’immigration. Souvent, après un passage plus ou moins long dans une classe d’accueil, ces élèves sont

pour la plupart scolarisés dans une classe régulière. De nombreuses classes, qui étaient traditionnellement homo-gènes d’un point de vue linguistique, deviennent de fait des classes linguisti-quement hétérogènes, même si le fran-çais est la langue d’enseignement et la langue de l’école. Pour que ces élèves issus de l’immigration réussissent, il est fondamental qu’ils apprennent rapide-ment le français, afin de pouvoir s’inté-grer sur le plan scolaire et social. Selon Mc Andrew (2002) et Potvin, Magnan et Larochelle-Audet (2016), l’intégration des immigrants et de leurs descendants est aujourd’hui au cœur de la réussite du développement économique, social et culturel du Québec. _

Pertinence de l’écriture de textes identitaires dans le contexte québécoisDans ce contexte social, l’écriture de textes identitaires me semble être un outil didactique riche et adapté aux besoins des classes québécoises._

Cette démarche d’écriture, fondée sur des principes de pédagogie intercultu-relle, vise à répondre aux besoins des élèves allophones, mais aussi à ceux des élèves québécois francophones qui en tirent également profit sur le plan des apprentissages scolaires et sociaux. En effet, la démarche se veut inclusive et très bien adaptée à un public linguisti-quement hétérogène : elle est pour tous une source d’apprentissage et de déve-loppement humain. _

Les textes identitairesLes textes identitaires sont des récits de vie à travers lesquels les élèves - québécois et allophones/plurilingues - ont la possibilité d’écrire sur leur vécu, ceci dans un contexte d’écoute et de respect de chacun. L’écriture de ces textes contribuerait à la construc-tion identitaire des élèves-scripteurs, l’écriture étant un élément puissant de structuration cognitive et sociale (Bucheton, 2013 ; Pineau et Le Grand, 1993 ; Rachédi-Drapeau, 2010)._

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Note

1. Exemples de livres exploités en classe : Ici, c’est différent de là-bas de Naïma Oukerfellah, Bayard Canada Livres (2014) ; L’odeur du café de Dany Laferrière, illustrations de Francesc Rovira, Les éditions de la Bagnole (2014).

Références

_ Armand, F. (2012). Enseigner en milieu plurieth-nique et plurilingue : place aux pratiques inno-vantes ! Québec français, 167, 48-50.

_ Bucheton, D. (2013). Faire advenir le sujet écrivant. Communication présentée à l’AFEF, Association Française des Enseignants de Français, Paris.

_ Cummins, J. et Early, M. (2011). Identity texts, the collaborative creation of power in multilingual schools. London: A Trenham Book, Institute of Education Press.

_ Mc Andrew, M. (2002). La loi 101 en milieu scolaire : impacts et résultats. Revue d'aménagement linguis-tique (hors série), 69-82.

_ Perregaux, C. (2000). Biographie langagière : pra-tiques nouvelles d'un genre ancien. CRÉOLE, (3).

_ Pineau, G. et Le Grand, J.-L. (1993). Les histoires de vie, 2760. Paris : Presses universitaires de France.

_ Potvin, M., Magnan, M.-O. et Larochelle-Audet, J. (2016). Introduction : les enjeux de la formation du personnel scolaire sur la diversité. Dans M. Potvin, M.-O. Magnan et J. D. Larochelle-Audet (dir.), La diversité ethnoculturelle, religieuse et linguistique en éducation : Théorie et pratique (p. XI-XV). Montréal : Fides Éducation.

_ Rachédi-Drapeau, L. (2010). L'écriture comme espace d'insertion et de citoyenneté pour les immigrants. Par-cours migratoires et stratégies identitaires d'écrivains maghrébins au Québec. Québec : PUQ.

Plus spécifiquement, l’écriture de textes identitaires favoriserait non seulement le rapport à la langue d’enseignement, mais aussi à la langue et à la culture d’origine des élèves allophones/pluri-lingues, tout en soutenant la construc-tion identitaire nécessaire à l’intégra-tion scolaire et sociale (Cummins et Early, 2011)._

Ma démarche au sein d’une classe de 6e année primaireC’est en ayant comme objectif de soutenir l’apprentissage du français de tous les élèves, tout en favorisant l’intégration des élèves allophones dans les classes régulières et en pro-posant aux enseignants des outils pédagogiques basés sur une approche interculturelle, que j’ai décidé, dans le cadre de mon doctorat en didactique

du français, de mettre en place des ate-liers d’écriture dans une classe de 6e année du primaire dans une école de Québec. Au cours du printemps 2017, pendant deux heures par semaine sur une période de trois mois, une ensei-gnante m’a ouvert la porte de sa classe avec une grande générosité, et j’ai pu mener, avec sa collaboration, des ate-liers d’écriture avec l’ensemble des 24 élèves de la classe. Les élèves issus de l’immigration représentaient un quart de l’effectif total de cette école. Vingt-neuf pays y étaient représentés et 16 langues y étaient parlées. Il s’agit donc d’un environnement multiculturel riche et diversifié._

Un des premiers thèmes abordés, à l’oral et ensuite à l’écrit, a été la biographie langagière (Armand, 2012 ; Perregaux, 2000). La biographie langagière est un

récit de vie, un récit biographique lié au vécu par rapport aux langues (lieux et moments de l’apprentissage, per-sonnes qui entourent cet apprentissage, contextes, etc.)._

En racontant leur vécu par rapport aux langues, les élèves – tant les élèves fran-cophones québécois que les élèves allo-phones – ont pu prendre conscience qu’ils étaient détenteurs d’un riche savoir langagier._

Nous avons ensuite travaillé sur l’écriture de portraits. Les élèves avaient pour mis-sion de parler d’eux, de leur caractère, de ce qu’ils aiment et de ce qu’ils n’aiment pas dans la vie. Ils ont aussi pu parler de leur famille, de leurs amis, de leur vie. Cela a donné lieu à de nombreux échanges hauts en couleur et pleins de vie dont nous fournissons un petit aperçu en ouverture de cet article. _

Nous avons également abordé la théma-tique des souvenirs d’enfance. Là aussi, chacun s’est livré, avec plus ou moins d’empressement selon son caractère, au plaisir de se raconter…_

Chaque atelier a été, chaque fois, intro-duit par des discussions sur le thème que nous allions ensuite travailler, puis nourri par des lectures de textes litté-raires1 visant à inciter les élèves à explo-rer la richesse de la langue française, tout en ayant le droit d’utiliser des mots appartenant à d’autres langues faisant partie de leur répertoire linguistique (langue maternelle ou autres)._

Le fruit de l’engagement de chacunPour l’enseignante et moi-même, la plus belle récompense de cette série d’ate-liers a été l’intérêt certain manifesté par les élèves au fil des ateliers et la fierté qui pouvait se lire dans leurs yeux lors de la lecture de leurs textes, notam-ment lors du cercle de lecture qui a clos l’aventure, le dernier jour. Beaucoup

d’entre eux ont réalisé qu’ils étaient tout à fait capables d’écrire et qu’ils avaient beaucoup de choses intéressantes à dire sur eux et sur leur famille. _

Beaucoup d’émotions s’étaient donné rendez-vous ce jour-là ; quelques larmes ont été versées aussi, non pas des larmes de tristesse, mais des larmes teintées par le bonheur d’être capables de partager des petits bouts de vie, pouvant paraitre anodins, mais pourtant si importants dans la vie d’un enfant. Des tranches de vie qui, très souvent, n’ont pas ou peu leur place dans le contexte scolaire. Une aventure à recommencer à coup sûr, encore et encore !_

Beaucoup d’entre eux ont réalisé qu’ils étaient tout à

fait capables d’écrire et qu’ils avaient beaucoup de choses intéressantes à dire sur eux

et sur leur famille.

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Dossier Lire entre les langues… à l’intérieur d’un seul livre ! Place aux livres bilingues et plurilingues dans les classes_

Olivier DezutterProfesseurUniversité de [email protected]

Parmi l’ensemble des productions destinées aux jeunes lecteurs, nous souhaitons attirer l’attention sur une série de collections ou d’ouvrages qui ont pour caractéristique d’offrir une expérience originale de lecture dans deux ou plusieurs langues à la fois.1 _

Qu’il s’agisse d’éveiller la curiosité des élèves pour la diversité des langues et cultures du monde, de valoriser au sein de la classe les langues et cultures d’origine de certains élèves ou d’en-courager les élèves à lire à la fois en français et dans une langue seconde apprise à l’école comme l’anglais, les livres bilingues ou plurilingues méritent d’être mieux connus par les personnes enseignantes et les bibliothécaires, de faire leur entrée dans les classes et d’être mis entre les mains des élèves et de leurs parents. _

En classe, l’observation guidée des langues représentées dans ces ouvrages constitue une riche source d’apprentissages pour tous les élèves. Qu’ils parlent ou non la ou les langues étrangères insérées dans le livre, en comparant des éléments de la ou des langues étrangères avec la langue française, ils pourront réfléchir sur le fonctionnement des langues. Il s’agit par exemple de por-ter attention à la longueur des mots, aux mots qu’on croit recon-naitre, à l’organisation des phrases et à l’ordre des mots au sein de celles-ci, à la présence ou l’absence de certaines catégories grammaticales ou signes linguistiques comme les accents ou les signes de ponctuation ou encore à la manière de marquer le genre ou le nombre. De telles observations contribuent très effi-cacement au développement de la conscience métalinguistique qui joue un rôle important dans la qualité du développement langagier et de la capacité d’abstraction (Pinto et Euch, 2015)._

Dans le cas où les élèves proviennent de familles dont l’un des parents ou les deux pratiquent une langue d’origine autre

que le français, ces ouvrages présentent aussi une formidable occasion de lecture partagée au cours de laquelle pourront résonner et s’entremêler le français, l’arabe, le vietnamien, le portugais, l’espagnol, le chinois, l’innu ou l’allemand._

Parmi la multitude d’ouvrages disponibles, bien plus nom-breux qu’on ne peut le soupçonner, voici quelques exemples qui témoignent de la richesse et de la diversité de ces créations originales à faire entrer au plus vite dans les bibliothèques de classe et d’école._

Une collection de contes populaires bilinguesCréée il y a 30 ans par la Commission des écoles catholiques de Montréal et le ministère des Communautés cultu-relles et de l'immigration, la collection des Contes populaires des commu-nautés culturelles a été réalisée avec

la collaboration de personnes issues des diverses communautés culturelles de la région montréalaise. Ces personnes ont raconté un conte dans leur langue d’origine qui a été traduit et adapté en français, puis raconté à des classes du début du primaire à la première année du secondaire. Les élèves ont été invités à illustrer les contes entendus. La publication propose sur chaque page, en deux colonnes, le texte en français et en langue d’ori-gine, accompagné d’une illustration. La collection comprend 16 volumes. Parmi d’autres, les langues représentées sont le rou-main, le chinois, l’ukrainien, l’arabe, le créole et le vietnamien._

Un chapitre en français et un en anglaisÉditée en France, la collection Mini Dual propose une série de récits courts d’une trentaine de pages spécialement écrits pour les jeunes. L’originalité de la formule réside dans l’alternance de cha-pitres écrits en français et en anglais. Pour suivre l’histoire, il faut donc développer

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sa compétence en lecture dans les deux langues. Une version audio est téléchargeable sur la toile. Proposée pour les élèves qui ont déjà suivi un an de cours de langue seconde, la collec-tion est suivie par une autre destinée aux élèves qui en sont à leur troisième année d’apprentissage de la langue seconde._

Deux personnages principaux qui parlent deux langues différentes Dans la série d’albums Betty & Cat, éditée aux Pays-Bas, les deux person-nages principaux des histoires, un chat et un chien, parlent chacun une

langue différente. Ils semblent pourtant bien se comprendre et s’entendent comme larrons en foire. Chaque page ou double page présente, en parallèle, le point de vue d’un personnage dans sa langue (par exemple l’anglais pour le chat) et celui de l’autre dans sa langue à lui (l’espagnol pour le chien). La col-lection offre diverses combinaisons de langues entre l’anglais, le français, le néerlandais et l’espagnol, toutes des langues qui s’écrivent en alphabet latin._

50 poèmes en français et dans 50 langues différentesLa maison d’édition Rue du Monde offre une riche collection d’antho-logies de poésie illustrées pour les jeunes lecteurs. Le volume intitulé

Tour de terre en poésie est une anthologie multilingue compre-nant 50 poèmes issus de cinquante cultures différentes, pro-posés dans leur langue d’origine, dont des langues régionales, et en traduction française. Dans le volume au sein duquel se côtoient des auteurs renommés (Pessoa, Machado, Kadaré, Levi, Hamapaté Ba) et des textes d’auteurs anonymes sont explorés les thèmes universels de la famille, de la nature, de l’amour, de l’imagination, mais aussi des réalités sans fron-tières comme la guerre._

Les langues et les vêtements de chez nousSylvain Rivard, auteur, conteur et illus-trateur d’origine abénakise, a créé aux éditions Hannenorak une collection d’albums trilingues pour les enfants à partir de quatre ans. Chaque album

traite d’une pièce de vêtement associée aux premiers peuples du Canada : la ceinture fléchée, la couverture, la tuque et la chemise à rubans. Les textes sont présentés en français, en anglais et dans une langue autochtone : respectivement le cri, l’innu et l’abénakis._

La leçon de vocabulaireEt si l’on enrichissait notre vocabulaire en apprenant des mots et leurs contraires, en trois langues différentes ! Petit album

illustré de façon humoristique, le Dicotoro, en deux volumes, propose chaque fois une vingtaine de mots simples et leurs opposés (près-loin, haut-bas, silencieux-bruyant, cassé-ré-paré, éveillé-endormi…) en français, en anglais, en espagnol et… en taureau.

_

L’album Les mots autour du monde se présente sous la forme d’un minidic-tionnaire illustré qui invite à voyager dans 22 pays à travers quatre conti-nents et d’apprendre, dans chaque pays, dix mots qui se rapportent à des réalités locales : objets quotidiens, aliments, animaux, instruments de

musique, pièces de vêtement ou encore sports. Pour chaque mot présenté dans son alphabet d’origine avec une indication de sa prononciation, l’équivalent en français est fourni.

Boa leitura !Gutt lies !Bon lekti !God lesing !_

Note

1. Merci à Carole-Anne Deschoux et à Élodie Combes d’avoir attiré mon attention sur ce type de petits trésors.

Références

_ Commission des écoles catholiques de Montréal (1988). Tâm Cám. Conte vietnamien (2e éd.). Québec : Ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration.

_ Davy-Galix, C. (2016). Jazz for the President. Vincennes, France : Talents hauts.

_ Garcia Schnetzer, S. (2010). Dicotoro. Le nouveau dictionnaire des contraires en français, en anglais, en espagnol et en taureau, 1-2. Voisins-le-Bretonneux, France : Rue du Monde.

_ Henry, J.-M. (2017). Tour de Terre en poésie. Anthologie multilingue de poèmes du monde. Voisins-le-Breton-neux, France : Rue du Monde.

_ Jacobs, H. et Duvernois, C. (2016). At home with Betty & Cat en casa. Pays-Bas : Hennie Jacobs.

_ Les mots autour du monde. (2012). Paris, France : Rue des enfants.

_ Pinto, M. A. et Euch, S. (2015). La conscience méta-linguistique : théorie, développement et instruments de mesure. Québec : Presses de l’Université Laval.

_ Rivard, S. (2017). La couverture / The Blanket / Maksa. Wendake, Québec : Hannenorak.

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Les enseignants du primaire sont constamment à la recherche de moyens pour favoriser la motiva-tion et l’apprentissage des élèves. L’expérience d’une orthopédagogue et d’enseignants du primaire, qui ont expérimenté des projets entrepreneu-riaux avec leurs élèves dans le cadre d’une recherche-action, suggère qu’il s’agit d’une avenue prometteuse. Le présent article décrit le déroulement de cette recherche-action et présente quelques résultats. _

Contexte et déroulement de la recherche-actionDepuis quelques années, dans le projet Les Cuistots St-Vincent, près de 30 élèves ayant des difficultés d’apprentissage, accompagnés de leur orthopédagogue, occupaient chacun une fonction dans une microentreprise qui élabore et fait déguster des plats cuisinés. Leurs ensei-gnants et l’orthopédagogue en charge

ont constaté de nombreux effets positifs de ce projet sur les élèves, tels qu’une augmentation de leur motivation, de leur persévérance et de leur rendement en classe, ainsi que le développement de caractéristiques entrepreneuriales, tels le leadeurship, l’initiative et l’auto-nomie. Suivant ces observations encou-rageantes, l’orthopédagogue de l’école a sollicité la collaboration de conseillers pédagogiques et de chercheuses afin d’étudier empiriquement ces effets au moyen d’un projet de recherche-action. _

Qu’est-ce que l’entrepreneuriat scolaire ?Les projets entrepreneuriaux, implantés depuis près de 20 ans dans les milieux scolaires québécois, amènent les élèves à être au cœur de l’action en participant activement à la prise de décisions et à la réalisation des tâches à chacune des étapes de la démarche. Contrairement à d’autres types de projets, l’entrepreneuriat requiert de créer un produit, un service ou d’organi-ser un évènement dans le but de répondre à un besoin ou de résoudre une problé-matique réelle du milieu, pour un public cible qui s’étend plus loin que les partici-pants au projet eux-mêmes. En dépit des effets positifs connus qui découlent des projets entrepreneuriaux pour les élèves (Samson, Gingras, Morin, D., Pratte, Morin, M., Désilet et Leduc, 2015) ou en milieu défavorisé (Jean, 2011), peu de données sont disponibles quant à leur apport pour les élèves en difficulté, un élément spéci-fiquement ciblé par notre étude._

À la fois soucieux d’évaluer les retom-bées de l’entrepreneuriat et d’offrir un soutien aux enseignants qui souhaitent

s’initier à cette approche avec leurs élèves, un projet de recherche-action a été réalisé, visant à :1. développer des projets entrepreneu-

riaux dans différentes écoles primaires avec des élèves de 2e et de 3e cycles en difficulté d’apprentissage et en docu-menter la mise en œuvre ;

2. évaluer les effets de différents projets entrepreneuriaux sur divers indica-teurs relatifs à la motivation et à la réussite scolaire des élèves ciblés.

La première des deux années de la recherche-action s’est intéressée au projet Les Cuistots St-Vincent, qui a été initié en 2014 par l’orthopédagogue de cette école primaire, en plus d’évaluer le déroulement et les retombées des pro-jets entrepreneuriaux élaborés par sept autres enseignants de classes ordinaires qui œuvrent à la même école. Dans cet article, nous nous attarderons spécifi-quement aux résultats de l’an 1._

En s'appuyant sur le modèle de Guay et Prud'homme (2011) notre démarche comporte 6 étapes : la définition d'une situation actuelle et désirée, la planifi-cation de l'action, l'action, l'évaluation

Les projets entrepreneuriaux avec les élèves en difficulté d’apprentissage au primaire : une avenue prometteuse !_

France DubéProfesseureUniversité du Québec à Montré[email protected]

Brigitte GagnonConseillère pédagogiqueCommission scolaire des Hautes-Riviè[email protected]

Isabelle PlanteProfesseureUniversité du Québec à Montré[email protected]

Danny BrochuConseiller pédagogiqueCommission scolaire des Hautes-Riviè[email protected]

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des actions et la diffusion. Le schéma à la figure 1 présente la situation pédago-gique inspirée de Legendre (2005) pré-cisant les sujets (élèves concernés), les agents, (personnel scolaire impliqué) les objets (cibles d'apprentissage) et les élé-ments du milieu (contexte). Nous avons

effectué deux boucles consécutives pour les phases de 1 à 5, soit une boucle par année scolaire. Conformément au modèle, nous avons également pris en considération les triples finalités de la recherche-action, à savoir l’action, la for-mation et la recherche. _

Pour évaluer les effets des projets entrepreneuriaux sur la motivation et sur la réussite scolaire des élèves, des

questionnaires évaluant la motivation, l’engagement et les aspirations scolaires ont été complétés par 69 élèves, avant et après leur participation au projet entre-preneurial. Des entretiens individuels ont également été effectués auprès de certains élèves et de l’orthopédagogue,

alors que des entretiens de groupes ont été réalisés avec les enseignants. Enfin, les notes de français et de mathéma-tiques apparaissant au bulletin scolaire des élèves ont également été consignées._

Les principaux résultats obte-nus : des constats encourageantsLes effets les plus positifs ont été consta-tés en lien avec les aspirations scolaires et professionnelles des élèves. En effet,

l’intention de travailler dans un métier en lien avec les mathématiques et l’in-tention d’aller à l’école longtemps sont les deux indicateurs ayant enregistré la plus importante progression chez nos participants. Par contre, pour l’an 1, les effets positifs attendus du projet sur les variables motivationnelles ou le rende-ment n’ont pas été observés de manière quantitative. Ces résultats peuvent notamment s’expliquer par le fait qu’il est complexe pour les élèves en difficulté de transférer les apprentissages réalisés dans une situation particulière (en l’oc-currence l’entrepreneuriat) à d’autres contextes scolaires._

Cependant, les entretiens réalisés auprès des élèves révèlent, quant à eux, une vive appréciation du projet et des observa-tions positives sur différents indicateurs de réussite, tels l’engagement, la motiva-tion et l’effort. Voici certains extraits qui proviennent des entretiens individuels effectués auprès des élèves en difficulté : « On n’est pas obligés de faire les résolu-tions de problèmes sur des feuilles. Je ne savais pas que ça aurait été plus le fun que de le faire sur une feuille »._

« Puis aussi, même la lecture, ça impli-quait de la lecture parce que les courriels qu’on recevait, bien, on allait les lire à toute la classe, ça faisait la lecture […]. C’est plus actif. »« C’est les profs souvent qui font les choses. Tandis que dans le projet, c’était nous autres qui le faisions. »« Moi, papier-crayon, ça ne marche pas. Puis, tu vois, ça a passé comme dans du beurre les mathématiques, avec ce pro-jet-là, faire le français avec ce projet-là, ça a vraiment, vraiment été bien... »_

Fig. 1 - Situation pédagogique, an 1

Les effets les plus positifs ont été constatés en lien avec les aspirations scolaires et professionnelles des élèves. En effet, l’intention de travailler dans un métier en lien avec les mathématiques et l’intention d’aller à l’école longtemps sont les deux indicateurs ayant enregistré la plus importante progression chez nos participants.

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Références

_ Guay, M.-H. et Prud’homme, L. (2011). La recherche-action. In Karsenti, T. et Savoie-Zajc, L. (éd.). La recherche en éducation : étapes et approches, 3eéd. (p. 183-211). Montréal : ERPI.

_ Jean, N. (dir.) (2011). Résultats de l’analyse des retom-bées et des facteurs de succès des projets entrepre-neuriaux réalisés en milieu défavorisé (étude Valoris). Québec : Concours québécois en entrepreneuriat.

_ Samson, G., Gingras, M., Morin, D., Pratte, L., Morin, M., Désilet, J. et Leduc, S. (2015). La pédagogie à valeur entrepreneuriale : effets sur la réussite des élèves et les conditions de pratique des enseignants et autres intervenants scolaires (rapport de recherche). Document inédit.

_ Legendre, R. (2005). Dictionnaire actuel de l'éduca-tion. Montréal. Paris : Eska.

Conclusion Les résultats de la première année de l’étude soulignent certains bénéfices liés à la participation à des projets entrepreneu-riaux. En outre, certaines recommanda-tions peuvent être émises pour maximiser les bénéfices des projets entrepreneuriaux pour les élèves en difficulté. D’une part, afin de produire des effets sur la réussite scolaire, il importe que les enseignants et les orthopédagogues aient comme cible, dès l’élaboration du projet entrepreneu-rial, le développement de certaines com-pétences disciplinaires (lecture, écriture, mathématiques) qui seront transférables dans des tâches scolaires ultérieures. Ce faisant, les habiletés scolaires ciblées pourront être développées dans les projets entrepreneuriaux, ce qui est susceptible de se traduire par des gains sur le rende-ment scolaire des élèves. _

D’autre part, il s’avère important de faire des liens explicitement avec les élèves au sujet des compétences qui ont été

abordées et développées en mathéma-tiques et en français dans ce projet entre-preneurial, afin que ceux-ci puissent réin-vestir ces compétences ultérieurement. Ainsi, les élèves seront davantage à même de prendre conscience des apprentissages réalisés durant les projets entrepreneu-riaux et de transférer ces acquis dans d’autres tâches scolaires. _

Au terme de ce projet, nous souhaitons remercier Madame Joanne Ratté, ortho-pédagogue, qui a initié la démarche dans son milieu, et souligner l'engagement des enseignants (Édith, Julie, Josée, Érika, Diane, Yves, Caroline) qui ont fait de ce projet une belle réussite collaborative. Merci également à Marie-Eve Gadbois et Marie-Jocya Paviel, assistantes de recherche pour leur soutien généreux et bienveillant et à Madame Chantal Majeau, directrice, pour le soutien organisationnel dans la mise en œuvre du projet.

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Cet outil pédagogique, connu autour du monde sous différentes formes, fas-cine et fascinera toujours les enfants. Il suffit de la redécouvrir pour mieux l’apprivoiser et la faire vivre en classe. _

« Où est Will ? » Tous les enfants s’ar-rêtent et me regardent, les yeux fixés sur moi avec une grande curiosité. J’observe leur visage s’illuminer et j’ai soudainement l’impression de reve-nir dans ce monde magique où nous transporte la marionnette, mais sans elle. Je me demande aussi comment ce silence général peut prendre place aussi rapidement avec cette question posée

aussi doucement, dans le brouhaha de la classe. « Il est à la bibliothèque et ensuite à son cours d’arts. » Mateo, un petit garçon qui prend rarement la parole, ne serait-ce que pour la maî-trise du français ou du mutisme sélec-tif, me demande « Quand il va venir nous voir ? ». À ma grande surprise, je me retrouve en dialogue avec Mateo et la classe sur les occupations de Will et son retour en classe. Le lendemain, sorti d’une valise, ses cheveux de laine colorée, sa bouche en feutrine, il arrive express sur le terrain et présente aux enfants ses nouveaux livres et nouvelles découvertes. Voilà, je n’existe plus à

leurs yeux, un dialogue s’instaure entre Will et le groupe. À ma grande surprise, Mateo prend la parole haut et fort et

partage ses réflexions à Will, tandis que mon plus bavard prend plaisir à écou-ter discrètement. _

Au fil du temps, l’utilisation de la marion-nette m’a démontré qu’elle permet aux enfants d’avoir un nouveau regard sur les choses et de créer une relation de confiance unique. J’observe alors que les bienfaits communicationnels dans son rapport interactif offrent aux enfants des espaces d’expression révélateurs et enri-chissants. Cet objet de bois ou de laine, parfois mystérieux et étrange, captive l’at-tention des enfants et, doucement, une

relation marionnette/enfant se construit. Avec cet objet vivant qui peut parfois nous sembler banal, nous avons en main un outil de communication doté d’un potentiel éducatif extraordinaire et très puissant. Comme le mentionne Suzanne Hébinière, alors inspectrice générale de l’Instruction publique en France : « La marionnette évolue dans le véritable univers de l’enfant qui n’a pas les mêmes dimensions que la nôtre et c’est pourquoi son existence s’intègre si bien à la leur dont elle est le reflet, mais aussi l’espé-rance… Elle forme une sorte de pont entre le réel et l’imaginaire » (Joubert, 1966)._

Communication et pédagogie par la marionnette Au Québec, les mignonnettes que nous retrouvons en majorité dans nos classes se retrouvent généralement soit dans le coin des jeux de rôle ou dans le fond du

Joany DarsignyFormatrice et intervenante éducativeTADAAM la marionnette comme outil de [email protected]

La marionnette pour communiquer autrement !_

Avec cet objet vivant qui peut parfois nous sembler banal, nous avons en main un outil de communication doté d’un

potentiel éducatif extraordinaire et très puissant.

Crédit photo : Israel Valencia

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placard. La marionnette la plus connue de nos écoles se nomme la marionnette à gaine, celle qu’on insère comme un gant ; celle qui était grotesque à l’époque de Punch & Judy en Angleterre, ou celle de Bobino et Bobinette avec qui vous avez peut-être chanté vos comptines. Au fait, ce type de marionnette est à la fois le plus simple et le plus complexe à utiliser, ce qui, en majorité, occasionne

un retour au placard après quelque temps. Pour éviter cette rupture, il est primordial de la redécouvrir pour ainsi mieux l’adapter à sa pratique éducative. Au fait, il existe plus de 15 types de marionnettes, ce qui offre un large éven-tail d’interventions possibles en classe. Toutefois, nous devons savoir comment les utiliser pour ainsi mieux les intégrer au quotidien des enfants et soutenir les besoins du groupe. _

C’est par la relation marionnette/enfant qu’elle offre un rôle de soutien à l’enseignant, et ce, grâce au phéno-mène de distanciation qu’elle procure. Lorsqu’un enfant la manipule à son tour, cette même distance de lui envers l’objet lui permet de surmonter les blo-cages et ainsi favoriser l’apprentissage de la langue, par exemple. Il n’est pas rare que je voie des enfants timides et

discrets comme Mateo prendre la parole haut et fort tout en faisant rire aux éclats la classe entière. Comme le soulignait Anne Tremblay, psychoéducatrice et psy-chothérapeute : « C’est dans la relation que tu crées la motivation » (Tremblay, 2015)1. La marionnette a cette grande capacité de créer un nouvel espace inter-médiaire de jeu et d’apprentissage._

La marionnette vous permet de l’utiliser pour créer des situations

d’apprentissage où l’enfant participe activement aux rétroactions ou pour créer des situations de production de message (MEQ, 2008), que ce soit par l’animation directe de celle-ci ou par des improvisations de courtes saynètes présentées par les enfants. Comme le mentionne Vierka Hajkova (1973), « chaque leçon devenant alors amusante et attractive, l’enfant devient plus récep-tif et les résultats sont meilleurs ». _

Selon Sylvie Viola, spécialiste des modèles d’enseignement au primaire, cette approche marionnettique est une pédagogie expérientielle qui permet aux élèves d’intégrer leurs savoirs cognitifs et affectifs ou leurs savoirs théoriques et pratiques (Viola et Tremblay-Wragg, 2016)2. En République tchèque, le programme scolaire intègre les marionnettes depuis un peu moins d’un siècle. La découverte de Prague, la capitale de la marionnette, fut une véritable source d’inspiration pour faire revivre les marionnettes à l’école et com-muniquer nos messages positifs. _

Concrètement, comment l’utiliser en classe ?L’intégration de la marionnette au sein de sa pratique éducative peut paraître tout à fait naturelle pour certaines per-sonnes et s’avérer très difficile pour d’autres. Lors d’une intervention avec des enfants de six ans, il m’est déjà arrivé de me tromper de voix entre moi et le personnage. J’étais certaine que la magie que j’avais réussi à créer entre Will et la classe allait en déconcentrer quelques-uns. À ma grande surprise, rien n’avait changé et l’attention de tous était soute-nue, malgré tout. N’oubliez pas que les enfants retiendront beaucoup plus de positif que de faux pas avec celle-ci._

Pour intégrer un allié marionnettique en classe, préparez les enfants. Faites de courtes séances au début. Commencez par une discussion sans la marionnette et évitez de dire le mot marionnette. Présentez-leur votre ami spécial et expli-quez-leur que celui-ci a peur des enfants

C’est par la relation marionnette/enfant qu’elle offre un rôle de soutien à l’enseignant, et ce, grâce au phénomène de

distanciation qu’elle procure.

Crédit photo : Joany Darsigny

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1. Communication présentée dans le cadre de la formation Développer des habiletés sociales chez les enfants... pour prévenir les conflits !

2. Communication présentée dans le cadre de la formation Les modèles d'enseignement : les connaitre pour mieux les utiliser en classe.

Références

_ Hajkova, V. (1973). La marionnette artistique et éduca-tive. La Ferté-Macé : imprimerie B. Gallier.

_ Joubert, J. (1966). Comment faire ?... vivre les marion-nettes à l’école maternelle ?. Paris : Fernand Nathan.

_ Ministère de l'Éducation (MEQ) (2008). Programme de formation de l’école québécoise. Québec : Gouver-nement du Québec.

_ Tremblay, A. (2015). Développer des habiletés sociales chez les enfants… pour prévenir les conflits ! (pré-sentation). Montréal : Centre des Enseignantes et Enseignants de la CSDM.

_ Viola, S. et Tremblay-Wragg, É. (2016). Communi-cation présentée dans le cadre de la formation Les modèles d’enseignement au primaire : les connaître pour mieux les utiliser en classe, Montréal : Université du Québec à Montréal.

excités qui parlent trop fort. Le bruit lui fait mal aux oreilles et il quitte se cacher pour toute la journée si la situation ne revient pas au calme.

En milieu scolaire, vous n’avez absolu-ment pas besoin d’être un grand spécia-liste de la marionnette pour captiver les enfants. Toutefois, il est important de comprendre son langage et ses spécifi-cités pour faciliter son intégration et la maîtrise de l’objet. En d’autres mots, les techniques de base sont importantes, car la marionnette vous permettra d’animer de manière confortable, sans vous fatiguer et tout en vous amusant. Inévitablement, ce sera aussi plus facile pour vous de voir sous quel angle l’uti-liser. Peut-être que vous la préfèrerez pour la gestion de classe et pour révi-ser les règles de l’école ou pour discuter des conflits de la cour de récréation afin de Communiquer de façon appropriée (MEQ, 2008). Quoi que vous en fassiez comme utilisation, vous devez regar-der la marionnette lorsqu’elle s’adresse aux enfants, vous focaliserez ainsi leurs regards sur elle et non sur vous._

Ghislaine, une enseignante de la CSDM en milieu allophone, utilise une marion-nette dans sa classe depuis presque 10

ans. « Les enfants considèrent Robinette comme un élève de la classe. Quand elle parle, ils l’écoutent attentivement, on pourrait entendre une mouche voler ! Ils l’aiment vraiment parce qu’ils s’identifient à elle. Elle m’aide beaucoup, surtout en gestion de classe. Des fois, je fais juste prendre la voix de Robinette, sans même l’animer. Ils sont saisis parce qu’ils veulent lui plaire ! (rires) Ils font même attention pour ne pas la déran-ger lorsqu’elle est dans le coin lecture. Cette année, Robinette est au centre de la photo de classe ! Elle est magique. Elle restera dans ma classe jusqu’à ma retraite. »_

Osez conjuguer marionnette, pédagogie et communication, une ouverture sur un monde à la vision de celui qui l’anime ! _

Crédit photo : Israel Valencia

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Article de partenaire

Bientôt le Mois de la nutrition. Passez à l’action !_

Le Mois de la nutrition est l’occasion idéale pour aborder le sujet de la saine alimentation avec vos élèves. Vous êtes cette année encore à la recherche de la meilleure activité ? Vous pensez à déchiffrer les tableaux de la valeur nutritive avec vos élèves de 5e année, à parler de la provenance des aliments avec vos petits du 1er cycle ou à organiser une acti-vité culinaire ? L’essentiel est de bien planifier et de choisir une activité qui permet aux élèves de voir la saine alimenta-tion d’un œil positif. Voici donc trois principes à retenir pour assurer le succès d’une activité :_

1. Transmettre des messages positifs sur l’alimentation

Se nourrir permet de fournir de l’énergie à l’organisme, mais aussi de répondre à une foule d’autres besoins. Par exemple, manger, c’est aussi le plaisir de se rassembler autour d’un repas en famille ou de déguster son aliment préféré. Par conséquent, il est essentiel de parler des aliments de façon positive en insistant sur le fait que chaque aliment a une place dans

une alimentation équilibrée. On évitera ainsi de parler des « mauvais aliments » ou de leurs caractéristiques négatives (malbouffe, calories vides, cochonneries, etc.). D’ailleurs, il est recommandé d’éviter d’étiqueter les aliments comme étant « bons » ou « mauvais », car en interdisant certains aliments, ceux-ci ne deviennent que plus attirants. Rappelons-nous que la qualité globale de l’alimentation ne repose pas sur un seul aliment, un seul repas, ni même sur une seule journée. Pour favoriser une relation saine avec l’alimentation, il est impor-tant de dire aux élèves que manger sainement, c’est avoir du plaisir en savourant une variété d’aliments et en découvrant de nouvelles saveurs._

2. Communiquer de l’information de qualitéLorsqu’il est question d’alimentation, chacun de nous peut avoir son opinion et ses valeurs, qui sont entre autres façon-nées par nos préférences, nos habitudes, l’éducation que nous avons reçue et nos expériences personnelles. Toutefois, la nutrition est une science complexe, qui évolue rapidement et qui fait l’objet de tendances et de modes qui, souvent, ne sont pas basées sur des données scientifiques probantes. Afin de s’y retrouver parmi l’abondance d’information qui circule sur le sujet, il faut demeurer critique. Par exemple, sur Internet, il est important de s’assurer que l’information provient de per-sonnes ou d’organismes reconnus faisant preuve de rigueur scientifique. À cet égard, les nutritionnistes et les diététistes sont les seuls professionnels de l’alimentation. Au Québec, ils doivent obligatoirement faire partie de l’Ordre profession-nel des diététistes du Québec, lequel assure la protection du public, notamment en encadrant la formation continue et la pratique professionnelle de ses membres. Si vous souhaitez valider le contenu d’activités, de projets ou de documents liés à la saine alimentation, vous pouvez vous tourner vers les nutritionnistes de votre CISSS ou CIUSSS, de votre commis-sion scolaire, de votre communauté ou d’organismes nationaux qui offrent ce type de services. Leur rôle est bien illustré dans cette vidéo du Blogue C'est malade !._

3. Respecter la progression des apprentissagesPour avoir du succès avec une activité sur la saine alimen-tation, il faut l’adapter à l’âge des élèves. En effet, favoriser une progression des apprentissages permettra d’éveiller la curiosité des élèves et de maintenir leur intérêt tout au long de leur cheminement scolaire. De plus, certains concepts en

Catherine DufourM. Sc., Dt.P., nutritionniste, gestionnaire de projets, nutritionLes Producteurs laitiers du Canada

Hélène GayraudM. Sc., Dt.P., nutritionniste, gestionnaire de programmes, nutrition, éducation en milieu scolaire Les Producteurs laitiers du [email protected]

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lien avec la saine alimentation sont parfois trop abstraits pour les plus jeunes (ex. : le rôle des vitamines et des minéraux). Évidemment, chaque groupe et chaque enfant sont différents, mais voici des exemples de thématiques qui peuvent être adaptées à l’âge des élèves : _

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Il ne fait aucun doute qu’en réalisant une ou deux activités dans le cadre du Mois de la nutrition, vous susciterez l’intérêt de vos élèves. Toutefois, pour qu’il y ait un impact significatif à long terme sur sur leurs habitudes alimentaires, les enfants doivent vivre des expériences positives régulièrement, tout au long de l’année. _

_

En somme, il est essentiel de choisir avec soin l’approche à employer pour aborder la saine alimentation et de porter un jugement critique sur les activités. C’est ainsi que vous favori-serez le développement d’une relation positive avec l’alimen-tation chez les élèves et le succès de vos activités !_

Pour vous soutenir et vous outiller, l’équipe des diététistes des Producteurs laitiers du Canada conçoit et diffuse gratuitement, depuis plus de 10 ans, du matériel pédagogique qui permet aux enseignants d’aborder la thématique de la saine alimen-tation avec leurs élèves. Ce matériel pédagogique, élaboré avec l’aide d’experts en éducation et en santé publique, suit la pro-gression des apprentissages proposée précédemment et est arrimé au Programme de formation de l’école québécoise. Les outils offerts font actuellement l’objet d’une refonte complète qui comprendra un virage numérique. Pour connaitre nos res-sources actuelles et être au courant de toutes les nouveautés, visitez educationnutrition.ca/primaire._

Exemples de thématiques qui peuvent être adaptées à l'âge des élèves

2 à 5 ans

• Provenance des aliments

• Métiers en lien avec l’alimentation

• Découverte des aliments avec les cinq sens

6 à 7 ans

• Affirmation des préférences alimentaires

• Effets de quelques aliments sur le corps (ex. : les légumes et les fruits aident à se défendre contre certaines maladies)

• Écoute de son corps (faim, satiété, soif)

8 à 9 ans

• Identification des saveurs de base

• Effets physiques et chimiques de la transforma-tion des aliments

• Aspects culturels liés à l’alimentation

10 à 12 ans

• Effets de certains éléments nutritifs sur le corps (ex. : rôles du calcium et de la vitamine D dans la construction et le maintien des os)

• Planification de la réalisation d’une recette

Quelques questions à vous poser pour évaluer la qualité d’une activité :

L’activité que j’ai choisie permet-elle de…

• favoriser le plaisir et la découverte des aliments ?

• aborder la saine alimentation de façon positive ?

• insister sur l’importance de la variété pour une alimentation équilibrée ?

• communiquer des informations fondées sur des faits objectifs et des sources crédibles ?

• transmettre une vision de la saine alimentation qui n’est pas teintée de mes valeurs personnelles ?

• toucher des notions sur la saine alimentation adaptées à l’âge de mes élèves ?

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BIENBIEN

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INFO : STÉPHANE N° D’ÉPREUVE : 02 DATE : 18.04.2017PRODUCTION RELECTURE CRÉATION SERVICE-CONSEIL

N° DE DOSSIER : NQ-8124 NQ-8124 AnnMag AQEP_Demi_HorCLIENT : DFC – NUTRITION FORMAT FINAL : 6,5 × 4,5 pouces

DIVISION/SUJET : SCOLAIRE FORMAT MARGE PERDUE : S.O.

NUMÉRO D’ANNONCE : S.O. FORMAT MARGE SÉCURITAIRE : S.O.

PUBLICATION : AQEP COULEURS : QUADRICHROMIE

DATE DE PARUTION : S.O. CETTE ÉPREUVE : 100 %

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L’anxiété et sa prévalenceL’anxiété constitue le problème de santé mentale le plus répandu chez les jeunes, avec une prévalence pou-vant aller jusqu’à 32 % (Merikangas, He, Burnstein, Swanson, Avenevoli, Cui et al., 2010). De surcroit, l’anxiété peut s’avérer difficile à identifier chez les élèves, si bien que ces derniers se retrouvent souvent laissés à eux-mêmes face à leurs difficultés. Pourtant, lors-qu’elle n’est pas prise en considération, l’anxiété qui apparait dans l’enfance tend à persister, voire à augmenter à

l’adolescence ainsi qu’à l’âge adulte. Il importe donc d’être sensible aux manifestations de l’anxiété chez les élèves afin d’être en mesure d’inter-venir efficacement face aux difficultés qu’elle amène. Or, en contexte scolaire, il existe peu de ressources destinées spé-cifiquement aux enseignants pour leur permettre non seulement d’identifier les élèves vulnérables à l’anxiété, mais aussi de leur offrir une intervention de première ligne afin de prévenir l’appa-rition de troubles anxieux. Pour pallier ce manque, le présent article propose d’abord de cerner le concept d’anxiété en exposant ses manifestations et ses impacts sur le plan scolaire. Puis, seront présentées des pistes d'intervention qui peuvent s'appliquer facilement en contexte de classe et qui peuvent être bénéfiques pour tous les élèves, particu-lièrement pour ceux qui sont aux prises avec des problématiques d’anxiété._

Les manifestations et impacts de l’anxiété à l’école L’anxiété peut être normale lorsqu’elle est présente à certains moments bien précis du développement de l’enfant, par exemple, la peur du noir, que l’on voit chez les enfants âgés de trois à six ans. Cependant, lorsqu’elle ne correspond pas à une phase précise de la vie et qu’elle entrave le fonctionnement quotidien de l’élève, l’anxiété devient problématique, voire pathologique. Les manifestations de l’anxiété sont souvent discrètes et peuvent être méprises pour de l’insé-curité ou des difficultés d’attention. En effet, l’anxiété chez l’enfant peut prendre différentes formes, comme des maux de ventre, des larmes, des comportements de retrait ou de refus, des difficultés de concentration ou encore des préoccupa-tions exagérées ou des craintes diffuses. Contrairement à des inquiétudes nor-males, l’anxiété provoque chez l’enfant une grande détresse qui ne peut être calmée par de simples gestes ou paroles rassurantes, ou en tentant de le raisonner. Par exemple, la peur qu’il arrive un mal-heur à ses parents durant son absence ou la crainte d’une catastrophe naturelle sont des inquiétudes susceptibles de prendre des proportions démesurées chez l’en-fant anxieux. Par conséquent, ce dernier aura tendance à éviter les situations qui lui font peur, ce qui peut mener à un manque d’assurance, à une faible estime de soi, à une timidité extrême et même à des pleurs face à des situations perçues comme étant menaçantes (Dumas, 2012)._

Par ailleurs, les problèmes d’anxiété entrainent, pour l’élève, plusieurs diffi-cultés d’ordre scolaire. Notamment, un niveau élevé d’anxiété est reconnu pour

Catherine Fréchette-SimardÉtudiante au doctorat et enseignanteUniversité du Québec à Montréal et Commission scolaire de Montré[email protected]

Isabelle PlanteProfesseure chercheuseUniversité du Québec à Montré[email protected]

La gestion du stress pour prévenir l’anxiété : quelques pistes d'intervention à utiliser en classe_

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altérer l’attention que l’enfant peut por-ter à la tâche qu’on lui présente. En effet, lorsque l’attention de l’élève anxieux est monopolisée par ses pensées envahis-santes et ses craintes, celle-ci n’est alors plus disponible pour se consacrer à la tâche demandée, ce qui amène égale-ment des déficits dans la mémoire à court terme (Eysenck, Derakshan, Santos et Calvo, 2007). En outre, l’anxiété est recon-nue pour avoir une incidence négative sur l’apprentissage, le rendement scolaire et même sur la diplomation (Woodward et Fergusson, 2001)._

Mieux gérer son stress pour prévenir l’anxiétéCertains élèves sont plus à risque que d’autres de vivre des problèmes d’an-xiété. Parmi les facteurs de risque, le fait de vivre beaucoup de stress et de percevoir que l’on manque de res-sources pour faire face aux évènements stressants est directement lié à l’aug-mentation de l’anxiété. En effet, moins l’enfant gère bien ses comportements

et ses émotions face à une situation stressante, plus il est susceptible de développer un problème de stress chronique, ce qui le rend vulnérable émotionnellement et à risque d’anxiété (Mclaughlin et Hatzenbuehler, 2009). Il est donc possible de travailler ses com-pétences à faire face au stress de façon à améliorer la réponse de l’élève devant le stress et ainsi le protéger des consé-quences négatives qu’il peut engendrer._

Quelques stratégies de gestion du stress à mettre en place en classe pour limiter l’anxiétéConsidérant les conséquences néga-tives associées à l’anxiété sur le plan personnel et scolaire, il apparait crucial d’intervenir le plus tôt possible. Pour y

parvenir, plusieurs stratégies peuvent être mises en place en classe dans le but d’améliorer les compétences de l’élève à gérer son stress. (1) La première est d’aborder la question du stress avec les élèves pour démystifier la façon dont il se manifeste et les impacts qu’il peut avoir sur le corps et les pensées. À cet effet, la page du Centre d’études sur le

stress humain est une ressource intéres-sante pour en savoir plus sur ce sujet : http://www.stresshumain.ca/le-stress.html. (2) Des techniques de respira-tion peuvent également être utilisées en classe et ont une incidence pratique-ment immédiate sur le niveau de stress ressenti. En effet, lorsque le corps réagit à une situation anxiogène, qu’il s’agisse de faire face à un ours ou à un exa-men mal préparé, la réaction de stress apporte un surplus d’énergie nécessaire pour combattre une menace potentielle. En s’arrêtant pour prendre plusieurs res-pirations lentes et profondes, on envoie au cerveau le message qu’il n’y a rien de dangereux à combattre et que le corps peut se détendre. (3) Encourager l’élève à prendre davantage de temps pour l’activité physique, principalement

lors des périodes de stress, comme durant les séances d’examen, est aussi une intervention bénéfique, puisque c’est une façon simple et efficace de dépenser l’énergie emmagasinée pour affronter la menace. (4) Finalement, une autre stratégie efficace consiste à encourager l’élève à faire face aux dif-férentes difficultés qu’il rencontre en l’aidant à trouver des solutions efficaces et des moyens de les mettre en applica-tion. Ce faisant, l’enseignant améliore la perception de contrôle de l’élève à faire face aux évènements stressants et, par le fait même, le protège des conséquences négatives du stress._

Références

_ Dumas, J. E. (2012). L’enfant anxieux. Comprendre la peur de la peur et redonner courage. Bruxelles : De Boeck Université.

_ Eysenck, M. W., Derakshan, N., Santos, R. et Calvo, M. G. (2007). Anxiety and Cognitive Performance: Attentional Control Theory. Emotion, 7(2), 336-353.

_ McLaughlin, K. A. et Hatzenbuehler, M. L. (2009). Stressful life events, anxiety sensitivity, and internalizing symptoms in adolescents. Journal of Abnormal Psychology, 118(3), 659-669.

_ Merikangas, K. R., He, J.-P., Burnstein, M., Swanson, S. A., Avenevoli, S., Cui, L. et al. (2010). Lifetime pre-valence of mental disorders in U.S. adolescents : Results from the National Comorbidity Survey Replication-Adolescent Supplement (NCS-A). Jour-nal of the American Academy of Child and Adolescent Psychiatry, 49(10), 980-989.

_ Woodward, L. J. et Fergusson, D. M. (2001). Life Course Outcomes of Young People With Anxiety Disorders in Adolescence. Journal of the American Academy of Child & Adolescent Psychiatry, (9), 1086-1093.

Parmi les facteurs de risque, le fait de vivre beaucoup de stress et de percevoir que l’on manque de ressources pour faire face aux évènements stressants est directement lié à

l’augmentation de l’anxiété.

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Deux évènements trépidants, met-tant en vedette des jeunes adeptes de robotique de partout au Canada, ont eu lieu au printemps dernier. Il s’agit de la « coopétition » régionale Robotique Zone01 à Québec ainsi que la Finale canadienne à Montréal. Lors de ces évènements hauts en couleur, Robotique Zone01 et l’AQEP ont honoré des enseignantes en leur remettant un prix pour l’ensemble de leurs actions en robotique pédago-gique dans leur milieu respectif._

Lauréates de la « coopétition » régionale à QuébecCatherine Verret ainsi que Valérie Goulet Marceau sont titulaires à l’École d’édu-cation internationale Notre-Dame-des-Neiges à Québec, une école accueillant des élèves non sélectionnés. Elles ont proposé à leurs 52 élèves de 4e année de travailler les machines simples, un des objectifs du programme de science 2e cycle, lors d’un module de recherche à l’aide de la robotique en classe. Devant le grand intérêt et la motivation des élèves pour continuer à faire de la robotique,

les deux collègues ont mis sur pied un club robotique parascolaire permettant à seize élèves choisis au hasard d’approfon-dir leurs connaissances à travers le projet Domo Arigato Mister Roboto._

C’est ainsi que tous les lundis midi, les enseignantes proposaient des défis robotiques Zone01 à leurs élèves. Après Noël, celles-ci leur ont enseigné la pro-grammation. Chaque semaine, les élèves testaient leurs robots sur les tapis. Ces différents essais permettaient aux équi-piers de discuter des modifications à apporter aux robots et d’être prêts pour relever le défi de la « coopétition » qui avait lieu au mois d’avril._

À la fin de l’année, les enseignantes observent que l’intérêt ainsi que les résul-tats des élèves du club robotique ont aug-menté en mathématiques et en science. Elles croient que la confiance gagnée en soi tout au long du processus est res-ponsable de ces changements positifs. Au-delà des améliorations académiques et du résultat à la « coopétition », les enfants ressortent grandis de cette expérience. Pour certains, faire face à la défaite a été

l’occasion de reconnaitre la valeur de l’ad-versaire. Quelques-uns ont appris à rece-voir l’aide d’autrui. D’autres ont compris que le travail d’équipe mène plus loin que de chercher à triompher seul. Le concours Robotique Zone01 leur a permis de mul-tiples possibilités d’apprentissage grâce au levier qu’est la robotique. _

Pour pouvoir se lancer dans cette belle et grande aventure, les enseignantes insistent sur le fait que cela nécessitait l’appui de leur milieu. Leur direction d’école a rendu possible ce projet par l’ac-quisition de matériel : des boites LEGO, des LEGO Mindstorms, en quantité suf-fisante et des tapis nécessaires pour les « coopétitions » Robotique Zone01. De plus, le conseil d’établissement a appuyé leur projet en leur octroyant un montant d’argent afin de payer les frais d’inscrip-tion à la « coopétition ». Finalement, les enseignantes précisent que la formation suivie avec l’équipe Robotique Zone01 leur a permis de bien accompagner leurs élèves dans leurs apprentissages et de se distinguer pour recevoir le prix Robotique Zone01/AQEP. _

Chronique

Valorisation

Les lauréates du prix Robotique Zone01/AQEP 2016-2017_

Catherine VerretEnseignanteÉcole d’éducation internationale [email protected]

Valérie Goulet MarceauEnseignanteÉcole d’éducation internationale [email protected]

Isabelle MénardEnseignanteÉcole au [email protected]

Annie JulienEnseignante et responsable à la valorisation, AQEPÉcole Sacré[email protected]

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Chronique

Valorisation

« Au programme international, les apprentissages réalisés pendant le pro-jet (savoir-faire, savoir-être) sont aussi importants que la finalité en soi. Notre expérience en est un très bon exemple ! », de dire Catherine Verret._

L’AQEP félicite Valérie Goulet Marceau et Catherine Verret en leur remettant un prix Robotique Zone01/AQEP. Elles se sont investies pleinement et ont pris plaisir à allumer la passion de la robo-tique chez leurs élèves afin que ceux-ci puissent découvrir leur potentiel. _

Lauréate à la Finale canadienne à Montréal Lors de la « coopétition » à Montréal, ce fut au tour d’Isabelle Ménard, une ensei-gnante cumulant vingt-quatre années d’expérience, d’être honorée. Isabelle est reconnue comme étant la spécialiste en science aux 2e et 3e cycles de l'école au Pied-de-la-Montagne, pavillon JJO. Au fil du temps, elle a continué de s’y démarquer en devenant la spécialiste en robotique. Il y a quatre ans, Isabelle a pu découvrir la robotique lors d’ateliers offerts par ruelle de l'avenir1. L’école a acheté des ensembles LEGO Mindstorms

EV3. Grâce à ces achats, la classe de 6e année d’Isabelle a pu participer à deux expositions de robots, en organiser une dans son école et être également pré-sente depuis 2014 à la Finale nationale de Robotique Zone01-WRO. L'an der-nier, constatant le désir des élèves du 2e cycle de faire de la robotique, l’ensei-gnante a proposé à sa direction d’école d’investir dans le produit LEGO WeDo. Les ateliers au 2e cycle ont été bien sûr un succès ! Les élèves débutants ont eu

comme défi d’inventer une utilité à leur robot : un robot qui classe les objets de même couleur ensemble, un robot qui écrit tout seul, un robot masseur… Les élèves ont ensuite présenté à l’ensemble de leur école leurs créations avant d’aller en « coopétition ». « Les meilleurs élèves en robotique ne sont pas nécessaire-ment les meilleurs élèves académiques. La robotique permet à d’autres élèves de rayonner. Il y a beaucoup d’entraide entre eux. On travaille tous ensemble. Notre but est que tous les élèves de la classe puissent réussir leur projet », de dire l’enseignante. Elle estime que la

robotique est un puissant outil d’appren-tissage. La robotique permet de valoriser les élèves et de mettre leur persévérance à l’épreuve en plus des acquis faits en mathématiques et en science. Isabelle suggère aux enseignants désireux de faire de la robotique de s’inscrire à un cours pour avoir une base ou d’avoir un mentor. Devinez le prochain défi que cette enseignante mijote… ? Elle souhaite que ses élèves de 6e deviennent les men-tors robotiques des petits apprentis de la

maternelle. Quel défi stimulant ! « Nous ne sommes pas surpris d’apprendre que plusieurs élèves ayant fait de la robo-tique avec Isabelle, maintenant rendus au secondaire, font le choix d'un établis-sement où la pratique de la robotique est possible », de déclarer Rémy Taupier, président de Robotique Zone 01. L’AQEP félicite Isabelle Ménard pour sa passion ainsi que son investissement en robo-tique auprès des élèves. L’AQEP est fière de lui remettre un prix Robotique Zone01/AQEP. _

Cette lecture a éveillé en vous l’intérêt pour la robotique ? Découvrez le site : http://www.robotiquezone01.ca où vous pourrez consulter la plus récente édition de Zone01 Magazine, le magazine de la robotique pédagogique en français._

Note

1. Par son action pédagogique, ses projets éducatifs intégrateurs et ses partenariats stratégiques, ruelle de l’avenir est un OBNL issu du Centre-Sud de Montréal qui mobilise les jeunes de 2 à 18 ans, ainsi que leur famille, dans leurs apprentissages et leur réussite scolaire.

« Les meilleurs élèves en robotique ne sont pas nécessairement les meilleurs élèves académiques. La robotique permet à d’autres élèves de rayonner.

Il y a beaucoup d’entraide entre eux. On travaille tous ensemble. Notre but est que tous les élèves de la classe

puissent réussir leur projet », de dire l'enseignante.

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EXPLICATION DU PRIXLes prix Jacinthe de reconnaissance en enseignement de la littérature jeunesse au primaire sont une initiative de l’AQEP afin de poursuivre l’oeuvre éducative de madame Jacinthe Mathieu.

Ces deux prix se veulent :Un témoignage du dynamisme et de l’implication dans le domaine de la littérature jeunesse d’un(e) pédagogue exceptionnel(le).

OULe partage d’un projet original créé par un(e) enseignant(e) passionné(e) qui propose une bibliographie innovatrice utilisant la littérature jeunesse pour favoriser les apprentissages et motiver les élèves.

PRIX CHAQUE LAURÉAT RECEVRA...• Invitation au congrès annuel de l’AQEP

(les frais d’inscription et d’hébergement défrayés par l’AQEP)• Trophée souvenir• Publication du projet dans la revue professionnelle Vivre le primaire• Chèque-cadeau d’une valeur de 250 $ de la Librairie Monet• Chèque-cadeau d’une valeur de 250 $ pour l’achat

de livres offert par Gallimard Jeunesse et L’école des loisirs• Lot de livres d’une valeur de 200 $ des éditions les 400 coups• Logiciel Antidote d’une valeur de 130 $ offert par Druide Informatique• Adhésion à un club de lecture d’une valeur de 100 $

de l’organisme Communication-Jeunesse• Abonnement MAX d’une valeur de 100 $ offert par L’école des Max• Abonnement d’une valeur de 35 $ à la revue Le Pollen• Abonnement d’une valeur de 25 $ à la revue Lurelu

2017-2018PRIX

JACINTHEPRIX DE RECONNAISSANCE EN ENSEIGNEMENT EN LITTÉRATURE JEUNESSE PRIMAIRE POURLES MEMBRES DE L’AQEP

Le 30 juin 2018 est la date limite pour déposer les documents de mise en candidature. Pour plus de détails, visitez le site www.aqep.org

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Chronique

Vivre le jeu

TitreMots rapidoCompagnieFoxMindAnnée2015Durée15 minutes environÂge recommandé8 ans et +

TitreForestCompagnieHelvetiaAnnée2017

RésuméLes joueurs doivent trouver rapidement un mot qui commence par une lettre colorée située au recto de la carte et qui fait partie d’une catégorie (animal/ célébrité/pays, etc.) située au verso de cette même carte. Les esprits les plus vifs diront haut et fort un mot correspondant par exemple à la catégorie « animal » et commençant par la lettre w donc wapiti. Celui qui réussit à dire en premier le mot en question gagne cette carte. Le gagnant est celui qui ramasse le plus grand nombre de cartes. Cette règle pourrait être assouplie avec des joueurs moins expérimentés.

Piste d’explorationTout d’abord, il pourrait être intéressant de demander aux élèves de créer leur propre jeu, mais cette fois en utilisant les thèmes abordés en classe. Ce jeu servirait d’abord d’amorce pour explorer nos connaissances sur un thème. Par la suite, il serait intéressant de refaire l’exercice à la fin de cette thématique pour démontrer aux élèves à quel point ils ont élargi leur champ lexical à force de lire sur un même sujet. Finaliser le tout en les écrivant sur notre mur de mots nouveaux !

Intérêt particulier Ce jeu est excellent pour développer notre vocabulaire et élargir nos connaissances générales. L’apprentissage est signifiant, car il se fait en étant en contact avec les réponses des pairs. Lors des essais, il arrivait souvent que certains devaient justifier leur mot en expliquant la signification ou la provenance de celui-ci. Il suscite donc la curiosité au point où j’ai même vu des élèves, entre les parties, explorer la carte du monde à la recherche d’un pays commençant par la lettre y !

RésuméLes joueurs sont invités à construire, une carte à la fois, une forêt joliment illustrée par les personnages de contes célèbres pour y découvrir de petits êtres cachés (lutins, fées, gre-nouilles et hiboux). Le but du jeu est de compter ces créatures et d’accumuler le plus de cartes possible. En effet, dès que sept personnages identiques se trouvent dans la forêt, on doit tenter d'être le premier à ramasser toutes les cartes sur lesquelles ils figurent. Selon la variante avec laquelle on décide de jouer, le but du jeu pourrait également être de se débarrasser de toutes ses cartes.

Piste d’explorationJ’utiliserais ce jeu au tout début de la 1re année pour vérifier la maitrise du concept du nombre chez les élèves. En effet, comme le nombre d’items à compter varie à chaque nou-velle carte jouée, il peut être intéressant d’observer les stratégies de dénombrement utilisées. De plus, ce jeu pourrait servir à classifier les cartes selon diverses propriétés : les vilains/les bons, les animaux/les personnes, etc. Enfin, on peut aborder le concept de « le plus/le moins », selon la variante du jeu avec laquelle on joue, à savoir s’il faut ramasser les cartes ou tenter de s’en débarrasser.

Pour aller plus loinLe jeu Forest pourrait aussi être utilisé comme amorce à un thème sur les contes. Par exemple, les élèves pourraient trouver le nom des personnages illustrés, faire un jeu d’asso-ciation pour regrouper les personnages issus d’une même histoire ou encore inventer une histoire mettant en vedette les personnages illustrés sur des cartes pigées. Cela pourrait mener à explorer le schéma du récit et produire de fantastiques contes réinventés !

Josée GoupilEnseignanteÉcole du [email protected]

Maude-Annie CourtemancheEnseignante de 1re annéeÉcole De la [email protected]

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Vivre le jeu

TitreTimeline ; inventionsCompagnieAsmodeeAnnée2011Durée15 minutes environÂge recommandé8 ans et +

RésuméTimeline ; inventions est un jeu faisant appel aux connaissances historiques. Il peut aussi bien s’adresser aux enfants de deuxième cycle aimant l’univers social et les sciences qu’aux adultes appréciant l’histoire ou les arts. Ce jeu est composé de 110 cartes illustrant une invention ainsi que son nom au recto. Puis, au verso, les mêmes informations accompa-gnées de l’année de sa création. La partie se déroule environ sur 10 à 15 minutes selon le nombre de joueurs qui y participent. Plus il y a de participants, plus ce jeu est enrichissant. Tout d’abord, une première carte est installée, date visible, au centre du jeu afin de pouvoir commencer la ligne du temps. L’objectif est de se départir des quatre cartes reçues en les insérant adéquatement sur la ligne du temps. Bien évidemment, les dates sont cachées. À tour de rôle, chacun tente de placer une carte à la fois. Si un joueur ne la place pas dans le bon interstice temporel, il la remettra dans le paquet et en piochera une nouvelle. Le gagnant est celui qui réussira à se départir de toutes ses cartes.

Piste d’explorationCe jeu peut être vraiment utile lorsqu’on aborde les thèmes des inventeurs ou tout simple-ment afin de parfaire ses connaissances générales. Ce qui est intéressant, c’est que plusieurs sujets y apparaissent ; on y voit aussi bien l’invention de l’élastique que l’invention de la souris informatique. Ce jeu en soi peut être difficile pour les enfants, car la notion des époques et du temps n’est pas toujours évidente pour eux. Cependant, en étant accompa-gnés, ils pourront y découvrir de nouvelles connaissances et justement intégrer les ères de la ligne du temps.

Isabelle LemayEnseignante de 5e annéeÉcole La Dauversière, [email protected]

L’AQEP tient à remercier ses collaborateurs. Vos jeux vous attendent en boutique.

lecture grammaire mathématiquessciencedéveloppement personnel

idée-cadeau

écriture oral univers socialéthique et culture religieuse

arts coup de coeur

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Chronique

Vivre la lecture | 1er cycle

Diane ManseauEnseignante, 1er cycle École Alfred-DesRochers, Commission scolaire de la Ré[email protected]

RésuméPrenez un bidon, un tuyau, une fourchette et une vieille planche puisés dans les déchets et des parents bricoleurs. Puis, voilà que naissent sous vos yeux un violon, une flute, un saxophone… Ajouter un assistant social un peu fou qui rêve de sortir des enfants d’un bidonville de la vio-lence, de la drogue et de la misère humaine. Voici la trame de fond de ce livre porteur d’espoir et redonnant dignité aux enfants délaissés vivant en bordure du dépotoir d’une grande ville.

Piste d’explorationÀ coup sûr, ce livre donne le gout aux petits musiciens en herbe de fabriquer des instruments de musique avec des objets récupérés. Une multitude de sites sur Internet vous dirigent vers tout plein d’idées originales pour y parvenir. Faire une liste d’objets nécessaires ou faire un texte descriptif de l’objet fabriqué pourrait être tout indiqué en français. Le but ultime : présenter nos réalisations ou nos habiletés lors d’une fête de Noël, par exemple. Pourquoi ne pas s’associer à l’enseignant de musique, afin de faire de ce moment un évènement festif ?

Saviez-vous que ?Cet album est inspiré de l’histoire vraie d’un orchestre qui a vu le jour au Paraguay à Cateura en bordure de la décharge publique. L’instigateur est un certain Favio Chàvez qui s’était donné comme mission de sortir les enfants de leur triste quotidien en leur redonnant espoir par la musique. Au gré de la musique classique, pop, rock…, ils ont eu la chance de parcourir le monde et de réaliser de grands rêves. Un film documentaire a été tourné afin de véhiculer leur histoire inspirante. Vous pouvez le visionner à l’adresse suivante : https://www.youtube.com/watch ?v=OyM-WaC0-Gg. Comme quoi tout est possible !

TitreL'incroyable histoire de l'orchestre recycléAuteurMichel PaquemalIllustrateurLionel Le NéouanicMaison d’éditionAlbin Michel JeunesseAnnée2016

TitreRosalie entre chien et chatAuteureMélanie PerreaultIllustratriceMarion ArbonaMaison d’éditionDominique et compagnieAnnée2015

RésuméRosalie entre chien et chat relate les états d’âme d’une fillette qui se sent comme une petite souris dans le grand remous de la séparation de ses parents. Elle se sent prise entre les deux êtres qu’elle aime le plus au monde, mais qui eux ne s’aiment plus. Le père étant représenté par un chien qui montre les crocs et la mère par une chatte qui cambre le dos. Elle fait preuve d’une grande maturité. Elle comprend que le quotidien ne sera plus pareil et compare sa vie à un monde coupé en deux. Elle aimerait tant, comme elle le dit si simplement, que tout se passe mieux.

Piste d’explorationCe livre est tout désigné pour aborder avec les enfants le délicat sujet de la séparation des parents. Cet album est illustré avec finesse par Marion Arbona qui a su transposer en images les jeux de mots subtils tout en poésie de Mélanie Perreault. Principalement ponctué de rouge, l’illustratrice a surement voulu faire émerger l’amour-haine véhiculé. L’amour inconditionnel de Rosalie face à ses parents et la haine qui déchire les deux protagonistes. Un incontournable à avoir à portée de la main pour glisser subtilement dans un sac d’école le moment venu. Il est à noter qu’il est aussi disponible en version numérique aux éditions Dominique et compagnie.

Saviez-vous que ?Rosalie entre chien et chat est en lice pour les Prix littéraires du Gouverneur général qui sont décernés depuis maintenant 80 ans et qui offrent notoriété et récompenses à la littérature d’ici. Sa nomination est grandement justifiée. Il est un de ces livres qui vous bouleversent, qui vous transpercent et que vous auriez aimé avoir écrits. Souhaitons-lui le mot de Cambronne !

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Vivre la lecture | 2e cycle

Julie St-PierreEnseignante, 2e cycleÉcole Fernand-Seguin, Commission scolaire de Montré[email protected]

TitreUn grand jour de rienAuteureBeatrice AlemagnaIllustratriceBeatrice AlemagnaMaison d’éditionAlbin Michel JeunesseAnnée2016

RésuméVous serez conquis par ce magnifique album qui est une ode à la simplicité, à « rien » et au moment présent. On y fait la connaissance d’un jeune garçon et de sa maman. Chacun pia-note sur un appareil électronique : lui, sur une console de jeu, elle, à l’ordinateur. Celle-ci lui demande d’aller jouer dehors. Au cours de sa promenade, il échappe sa console dans l’eau. Après cet incident, il « s’ouvre » à la nature qui l’entoure : il fait de belles découvertes, des odeurs lui rappellent de doux souvenirs… Finalement, il profite de chaque moment avec la nature et s’émerveille de petites choses. Fait intéressant à noter, Mme Alemagna est italienne, mais écrit en français. Une auteure-illustratrice à découvrir !

Pistes d’explorationDégager l’intention de l’auteure-illustratrice en utilisant une couleur fluorescente pour l’imper-méable et les pages de garde. // Discuter avec les élèves de ce qu’ils font de leur temps libre. Échanger afin de leur faire réaliser que la simplicité peut être aussi satisfaisante que tous leurs bidules électroniques. Les encourager à « s'ennuyer ». // Dresser une liste de moments « rien que ça » que les élèves peuvent faire en classe, à la maison. // Un « blanc » est laissé sur la disparition du père : la cause de son absence n’est pas nommée. Demander aux élèves d’interpréter ce blanc. // Interpréter l’apparition du papa souriant dans le miroir, à la fin de l’histoire.

Intérêt particulierLes illustrations méritent d’être scrutées attentivement, car elles regorgent de techniques dif-férentes, le collage y est souvent présent. Celles-ci permettraient de travailler tout le langage plastique (formes, lignes, couleurs, textures, motifs, superposition…) en arts.

TitreMon grand livre de l'espaceAuteureCatherine D. HughesIllustrateurDavid A.AguilarMaison d’éditionScholasticAnnée2016

RésuméDe la collection « National Geographic Kids », voici un documentaire très intéressant. Les deux pages entièrement consacrées aux conseils aux parents pourraient très bien être pertinentes pour des enseignants. Plusieurs sujets sont traités : le système solaire, la Terre, les étoiles et les constellations, la Voie lactée... La présentation graphique est très bien faite. La plupart des sujets sont traités sur une double page : la page de gauche présente une magnifique photo et celle de droite des informations. Les textes sont courts, la mise en pages est aérée et certaines informations sont mises en relief dans des cercles de couleurs contrastantes avec la couleur de fond de page. Fait intéressant : une question est lancée régulièrement aux lecteurs (p. ex. : Quel âge avais-tu lorsque… ? Quel nom donnerais-tu à une lune ?). C’est un outil indispensable au programme de science, et ce, pour les élèves et l’enseignant.

Pistes d’explorationIntroduire les tables des matières, les index et les glossaires. // Explorer le genre documentaire avant de faire une recherche sur un thème afin de la présenter autrement qu’en texte continu. // Travailler le système Soleil-Terre-Lune avec vos élèves. Je vous invite à consulter le site du Centre de développement pédagogique où une SAÉ à ce sujet est présentée. http://cdpsciencetechno.org/documentation/primaire/deuxieme-cycle/soleil-terre-lune/

Intérêts particuliersLa collection compte plusieurs autres titres ayant tous des thèmes que vos élèves adoreront : les dinosaures, les animaux, les pourquoi. Une collection à découvrir ! // Le numéro 1 du volume 28 de votre revue Vivre le primaire a proposé un dossier spécial concocté par le rédacteur invité, Pierre Chastenay, sur l’enseignement et l’apprentissage de l’astronomie.

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Chronique

Vivre la lecture | 3e cycle

Caroline CarleEnseignante, 3e cycleÉcole Fernand-Seguin, Commission scolaire de Montré[email protected]

RésuméArthur est convaincu qu’il sera un auteur célèbre : il a beaucoup de talent en écriture. En octobre, il apprend qu’un concours de rédaction est lancé et que son école y participe. Voilà enfin l’occasion de prouver son talent et de gagner le concours qui lui permettra de commencer une fructueuse carrière ! Il a amplement le temps d’écrire son histoire, la date de remise est le 1er avril. Mais voilà qu’il doit remettre un devoir d’écriture presque chaque semaine, en plus de tenir un journal de lecture. Il participe aussi à une pièce de théâtre dans laquelle il tient un des rôles principaux, de même qu’au journal de l’école. Le temps lui manque pour rédiger son histoire pour le concours. À cela s’ajoute du tutorat imposé avec son pire ennemi qui ne maitrise pas la langue écrite. Imbu de lui-même, il est certain de sa victoire même s’il n’a rien écrit de l’hiver. Finalement, Arthur triche au concours. Il gagne, mais il sait que ce n’est pas vraiment une victoire.

Piste d’explorationTout le roman se présente sous une forme épistolaire : les devoirs d’Arthur, ses articles pour le journal, les commentaires des enseignants, ses pensées dans son journal de lecture devenu journal intime, les courriels, les rapports de tutorat… C’est à travers tous ces écrits que sa personnalité se dessine. C’est une façon très intéressante de travailler les inférences avec les élèves, entre autres afin de comprendre les caractéristiques psychologiques des personnages. Une réflexion sur l’éthique et l’assiduité s’impose aussi à la lecture de ce livre.

Intérêt particulierLes devoirs qu’Arthur doit produire sont toujours expliqués. J’y ai puisé des idées intéressantes pour travailler l’écriture avec mes élèves.

TitreMa vie de grand et parfait génie incomprisAuteureStacey MatsonIllustrateurSimon KwanMaison d’éditionScholasticAnnée2016

TitreExpéditeur inconnuAuteureMarilou AddisonMaison d’éditionBoomerang éditeur jeunesse inc.Année2016

RésuméLudovic et sa sœur accompagnent leurs parents en vacances. Ceux-ci adorent voyager et veulent faire découvrir le monde à leurs enfants. Cette année, les deux jeunes ne sont pas très enthou-siastes à l’idée de quitter leurs amis tout l’été. Pour faciliter leur éloignement estival, leur mère donne à chacun un iPhone. Les parents installent aussi un ordinateur dans leur motorisé. Ludo et Mina peuvent donc se créer une boite de messagerie et rester en contact avec leurs amis. Dès la création de sa boite, Ludo reçoit un message étrange d’un expéditeur inconnu, suivi de plu-sieurs autres, de même que des courriels tout aussi bizarres. Les messages le mettent en garde contre des évènements qui finissent tous par se produire. Ludo s’inquiète vraiment, surtout que les évènements en question sont tous potentiellement mortels pour lui. Qui peut bien lui écrire en sachant tout ce qui va lui arriver ? Surtout que ça lui sauve la vie à quelques reprises !

Piste d’explorationSelon moi, la piste d’exploration principale du roman Expéditeur inconnu est l’éducation aux risques des rencontres dangereuses par Internet, de même que la dépendance aux technologies. Ludovic consulte son téléphone constamment ; il est terrorisé, mais continue de communiquer avec quelqu’un qu’il ne connait pas. Les élèves doivent comprendre qu’un tel comportement n’est pas sans risque. Il est de plus intéressant d’essayer de découvrir qui envoie tous ces mes-sages étranges et pourquoi.

Pour aller plus loinLe roman se révèle un roman fantastique à la toute fin. Finalement, Ludovic n’est pas exposé à un danger face à un inconnu, mais jusqu’à la fin, un malaise subsiste et c’est ce qu’il faut exploiter avec les élèves : on doit savoir à qui on s’adresse sur Internet.

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Vivre la lecture | Professionnel

Sandra ThériaultConseillère pédagogiqueCommission scolaire de Montré[email protected]

TitreJ'enseigne la lecture au primaire Meilleures pratiques pour maximiser mon sentiment de réussite en classeAuteurJennifer ScogginAdaptationGeneviève BrassardMaison d’éditionChenelière ÉducationAnnée2017

RésuméJennifer Scoggin offre, dans cet ouvrage, des conseils et des stratégies qui sont basés sur les meilleures pratiques pédagogiques en lecture aux États-Unis. L’auteure traite de plusieurs éléments essentiels à un enseignement de la lecture efficace et intéressant. Vous trouverez entre autres, dans cet ouvrage, des conseils qui vous permettront de faire de votre classe un environnement d’apprentissage des plus stimulants, de cultiver des relations positives avec vos élèves, de créer des évaluations de lecture en aide à l’apprentissage authentique et significatif et d’améliorer les choix de lecture que vous offrirez à vos élèves. L’auteure cherche aussi à faire réfléchir le lecteur et le mènera à reconsidérer sa philosophie de l’enseignement. Cela consiste entre autres à préciser et à redéfinir vos propres priorités afin qu’elles puissent guider vos décisions pédagogiques et vos façons de fonctionner en classe.

Piste d’explorationCet ouvrage ne présente pas de fiches ou d’activités en lecture. C’est plutôt un document qui vous aidera à alimenter votre réflexion d’enseignant, car on y propose des conseils pratiques à mettre en place au quotidien dans une gestion de classe relationnelle, des pistes de réflexion sur votre environnement de classe ainsi que des exemples ancrés dans le quotidien du primaire. On y aborde le climat de la classe, l’importance de la littératie, la façon d’envisager l’évaluation en lecture tout en acquérant de nouvelles stratégies pour maximiser votre sentiment de réussite et d’efficacité avec vos élèves. Disons que l’auteure cherche à vous redonner le gout d’enseigner et de vous redéfinir en tant que lecteur tout en soutenant vos élèves en lecture.

TitreEnseigner, c'est génial !AuteurLouis LarocheMaison d’éditionChenelière ÉducationAnnée2017

RésuméCet ouvrage, facile à consulter, pourra très certainement vous inspirer dans votre enseignement au quotidien. L’enseignant, Louis Laroche, partage ses idées originales, ses outils déjà mis à l’essai et qui ont fait leurs preuves ainsi que des activités géniales pour favoriser l’apprentissage des élèves de 8 à 12 ans. Il propose 80 activités signifiantes très bien décrites qui permettent de mettre en pratique concrètement les compétences du Programme de formation de l’école québécoise dans les matières suivantes : lecture, écriture, mathématiques, science et technologie, univers social, éthique et culture religieuse et arts plastiques. Ce pédagogue de grande expérience présente sa vision concrète et humaniste de l’enseignement, tout en communiquant ses conseils pratiques de gestion de classe.

Pistes d’explorationL’auteur présente d’abord comment il crée des liens avec ses élèves en début d’année et il expose ses idées et ses réflexions sur la gestion de classe. Ensuite, il nous présente pas moins d’une dizaine d’activités pratiques par matière, toutes déjà testées en classe. Chaque fiche d’activité pratique inclut une description, le niveau auquel elle s’adresse, la saison la plus appropriée pour réaliser l’activité, le type de regroupement, l’objectif en lien avec la progression des apprentissages, le temps de préparation, la durée, le matériel et la procédure. L’auteur donne des conseils, offre des variantes et des adaptations possibles ainsi que des prolongements aux activités proposées.

Intérêt particulierDès le début de l’ouvrage, l’auteur présente des liens entre les réflexions et les méthodes du grand maitre Leonard de Vinci et le fonctionnement d’une classe d’aujourd’hui. Toutes les acti-vités sont concrètes et l’accent est mis sur la manipulation. Plusieurs permettent aux élèves de bouger et de se dépasser intellectuellement. Les documents reproductibles sont très pertinents et ils offrent des liens et des références pour soutenir les activités.

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Chronique

Vivre la lecture

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écriture oral univers socialéthique et culture religieuse

arts coup de coeur

L’AQEP tient à remercier ses collaborateurs littéraires. Leurs livres vous attendent en librairie ou en ligne.

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