résumé destins tragiques ouinsolites

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Destins tragiques ou insolites-Michel Cartier Mon histoire est celle d’un homme dont la trajectoire est assez singulière, jalonnée de nombreux traumatismes psychiques. C’est ainsi que je suis passé du paradis à l’enfer pendant mon enfance vécue à Viverols au cœur des Monts du Forez en Auvergne ; après y avoir connu le meilleur de mon existence, j’y ai côtoyé le pire au centre d’évènements déchirants ou désastreux dans le cercle familial. À l’âge de douze ans et demi (1959, soit un an après mon frère), parce qu’issu d’un milieu financièrement défavorisé, je devins pensionnaire de l’École Militaire Préparatoire Technique EMPT de Tulle, appartenant ainsi à la dernière génération des élèves que l’on appelait encore « Enfants de Troupe » dans les années 60. J’y ai particulièrement mal vécu la coupure des liens maternels, la privation de liberté, les excès disciplinaires et le vol de mon adolescence, tandis que des calamités continueront à s’abattre sur ma famille. J’appartiens sans doute à la catégorie des élèves à laquelle le Général de corps d’armée A. Dessendre, l’un des anciens Présidents de notre Association, fait allusion « On a fait souvent la remarque que durant son séjour à l’école, l’Enfant de Troupe vivait une discipline sévère et à la limite un peu rude pour de jeunes âmes éloignées du foyer parental […] Peut-être certains, égarés en ce milieu ou trop faibles ont-ils alors perdu quelque joie de vivre. Il faut le reconnaître. […] » (Citation empruntée à l’Avant-propos de la Revue historique des armées n°159). Ces périodes feront de moi un névrosé s’engageant dans une première psychothérapie à l’âge de vingt-cinq ans, à l’issue de laquelle j’arrêterai d’imputer tous mes maux à mon séjour à l’EMPT.

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Page 1: Résumé destins tragiques ouinsolites

Destins tragiques ou insolites-Michel Cartier

Mon histoire est celle d’un homme dont la trajectoire est assez singulière, jalonnée de nombreux traumatismes psychiques. C’est ainsi que je suis passé du paradis à l’enfer pendant mon enfance vécue à Viverols au cœur des Monts du Forez en Auvergne ; après y avoir connu le meilleur de mon existence, j’y ai côtoyé le pire au centre d’évènements déchirants ou désastreux dans le cercle familial. À l’âge de douze ans et demi (1959, soit un an après mon frère), parce qu’issu d’un milieu financièrement défavorisé, je devins pensionnaire de l’École Militaire Préparatoire Technique EMPT de Tulle, appartenant ainsi à la dernière génération des élèves que l’on appelait encore « Enfants de Troupe » dans les années 60. J’y ai particulièrement mal vécu la coupure des liens maternels, la privation de liberté, les excès disciplinaires et le vol de mon adolescence, tandis que des calamités continueront à s’abattre sur ma famille. J’appartiens sans doute à la catégorie des élèves à laquelle le Général de corps d’armée A. Dessendre, l’un des anciens Présidents de notre Association, fait allusion « On a fait souvent la remarque que durant son séjour à l’école, l’Enfant de Troupe vivait une discipline sévère et à la limite un peu rude pour de jeunes âmes éloignées du foyer parental […] Peut-être certains, égarés en ce milieu ou trop faibles ont-ils alors perdu quelque joie de vivre. Il faut le reconnaître. […] » (Citation empruntée à l’Avant-propos de la Revue historique des armées n°159). Ces périodes feront de moi un névrosé s’engageant dans une première psychothérapie à l’âge de vingt-cinq ans, à l’issue de laquelle j’arrêterai d’imputer tous mes maux à mon séjour à l’EMPT. J’hériterai de ma vie d’Enfant de Troupe d’un certain nombre de valeurs (courage, ténacité, sens du devoir et des responsabilités…) qui seront en particulier reconnues pour la construction de ma carrière professionnelle. Les premières seront exploitées également dans ma vie privée ; je pense par exemple à la participation à des marathons passé l’âge de la quarantaine ou encore à l’élaboration de ce récit dans laquelle j’ai investi une énergie peu commune, tant pour l’écriture que pour mes démarches d’enquêtes… En 1964, en classe de première – année précédant le bac –, je décidai d’interrompre mon parcours scolaire pour venir en aide à ma mère, devenue veuve avec à sa charge un enfant en bas âge. Après un départ laborieux dans la vie active, la reconnaissance de mes valeurs ainsi que l’acharnement à merelever de mes complexes m’ont valu d’être promu ingénieur en partant du bas de l’échelle et à devenir un expert dans mon domaine de spécialisation mais aussi à devenir un homme de challenges. Aussi et en point d’orgue, alors que j’étais âgé de cinquante-cinq ans, je finis par tomber dans le néant en coupant court de façon impromptue à cette carrière riche et bien remplie où j’ai toujours donné le meilleur de moi-même; une restructuration du service que j’animais, accompagnée notamment de la nomination d’un successeur à mon poste

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m’entraîna dans une chute vertigineuse en dépression dont je n’ai encore pu me relever plus de dix années après. À partir d’un travail de mémoire et d’enquêtes approfondies, j’ai reconstitué le parcours tout aussi atypique de certains de mes ascendants pour relater leurs péripéties et les épisodes les plus poignants de leur existence. Mon père, personnage central, est né indésirable et fut harcelé toute sa vie par le mauvais sort jusqu’à ce que mort s’ensuive avant d’avoir atteint la quarantaine, comme son père Gaston. Il alla d’échecs en échecs, souvent contre son gré, passant par exemple près d’un projet sérieux d’avenir dans l’armée ayant avorté pendant la période d’occupation allemande. M’intéressant à la destinée de deux de mes ancêtres au cours de la Grande Guerre, j’ai pu comprendre pourquoi une commotion au combat valut à l’un d’entre eux de finir ses jours en asile psychiatrique dans l’isolement le plus complet, pourquoi le second fut rappelé pour aller sur le front, alors qu’il était âgé de trente-quatre ans, veuf et père de trois enfants. Enfin, en reconstruisant l’histoire de mon grand-père paternel, j’ai ouvert, avec la collaboration de l’historien Jean-Lucien Sanchez, un chapitre de l’histoire judiciaire, celui de la relégation, dont notre pays ne peut se glorifier. Comme tant d’autres petits délinquants dont les prisons de la métropole souhaitaient se débarrasser, celui qui se présentait comme artiste lyrique fut condamné à cette peine démesurée pour une récidive dans des délits que l’on considèrerait comme mineurs de nos jours. Certains s’accordent à dire que la loi sur la relégation fut une des plus scélérates de la IIIe République. Qui plus est, elle fut un échec vis-à-vis du projet sous-jacent d’intégration des condamnés dans une perspective de colonisation de la Guyane.

L’Association « Au bout des mots » qui chapeaute la maison d’édition « abatos » – gérée par des bénévoles – reverse un fort pourcentage de ses bénéfices à d’autres Associations représentatives de populations en situation de handicap et que je me rallie à cette cause en lui rétrocédant mes droits d’auteur.

L’auteur, né en 1947 dans la région stéphanoise (Saint-Chamond), est ingénieur à la retraite. Fuyant l’HLM de cette localité où il s’installa au début de sa carrière, il s’est établi dans un petit village de la plaine du Forez. Après un départ laborieux dans la vie active, mis sur les rails par sa hiérarchie en reconnaissance de ses valeurs, il trouva sa voie pour devenir un homme de challenges parvenant à surmonter certains handicaps accumulés dans sa jeunesse Au cours de sa vie professionnelle, il est devenu un expert reconnu dans la maîtrise des problèmes de frottement (domaine de la tribologie). Dans cette spécialité, il est auteur ou coauteur de nombreuses publications et a rédigé un ouvrage de référence (édité au nom de son ancien employeur) qui a été traduit en anglais pour une diffusion à l’international.