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Headquarters

International Crisis Group

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Preventing War. Shaping Peace.

Reprendre en main la ruée vers l’or au Sahel central

Rapport Afrique N°282 | 13 novembre 2019

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Table des matières

Synthèse .................................................................................................................................... i 

I. Introduction ..................................................................................................................... 1 

II. La sécurisation privée des sites aurifères : l’Etat entre résignation etinstrumentalisation .......................................................................................................... 4 

III. Une ressource convoitée par les groupes politico-militaires au Sahel ............................ 6 

IV. L’or artisanal, nouvel enjeu pour les jihadistes au Sahel ................................................. 8 

V. Restaurer la présence d’un Etat régulateur ...................................................................... 10 

A. Reprendre en main la sécurité des zones aurifères ................................................... 10 

B. Démontrer l’utilité de l’Etat sur les sites les plus accessibles .................................... 11 

C. Renforcer les mécanismes régionaux et internationaux de contrôle du secteuraurifère artisanal ........................................................................................................ 12 

VI. Conclusion ........................................................................................................................ 15 

ANNEXES

A. Carte du Sahel ................................................................................................................... 16

B. A propos de l’International Crisis Group ......................................................................... 17

C. Rapports et briefings sur l’Afrique depuis 2016 .............................................................. 18

D. Conseil d’administration de l’International Crisis Group ................................................ 21

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Principales conclusions

Que se passe-t-il ? Au Mali, au Burkina Faso et au Niger, un boom aurifère suscite la convoitise croissante de divers groupes armés. Les forces de sécurité peinent à contrôler les zones d’orpaillage dans des régions délaissées et parfois même abandonnées par l’Etat.

En quoi est-ce significatif ? Des groupes armés, dont des jihadistes, trou-vent dans l’exploitation aurifère artisanale une nouvelle source de financement, voire un terrain de recrutement. Sans régulation du secteur, cela risque d’ali-menter la violence au Sahel central.

Comment agir ? Les Etats sahéliens devraient réinvestir les zones aurifères de manière directe ou par l’entremise d’acteurs privés et mieux formaliser l’ex-ploitation aurifère artisanale. Des mécanismes sous-régionaux et internationaux pourraient permettre de limiter les exportations clandestines d’or et le risque que ce commerce finance le militantisme et le terrorisme.

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Synthèse

Au Mali, au Burkina Faso et au Niger, des pays du Sahel central, des groupes armés s’emparent depuis 2016 de sites d’orpaillage dans des zones où l’Etat est faible ou absent. Leur convoitise est attisée par le boom du secteur aurifère artisanal depuis la découverte, en 2012, d’un filon saharien allant du Soudan jusqu’en Mauritanie. Ces groupes armés, y compris jihadistes, trouvent dans ces mines d’or une nouvelle source de financement, voire un terrain de recrutement. Des réseaux informels sont de plus en plus impliqués dans le transport du métal précieux. L’orpaillage artisanal risque donc d’alimenter la violence et les réseaux criminels transnationaux. Les Etats sahéliens devraient encourager la formalisation des activités aurifères, tout en veil-lant à ne pas s’aliéner les orpailleurs. Ils devraient redoubler d’efforts pour sécuriser les sites d’orpaillage et éviter que les forces de sécurité ou les milices alliées ne devien-nent des éléments prédateurs. Les gouvernements de ces pays et de ceux qui achètent leur or devraient renforcer leur régulation du secteur.

Les Etats de la région peinent à remplir leur mission de sécurité dans les mines d’or. Face au risque d’appropriation violente des ressources aurifères par des acteurs armés non étatiques, les forces de sécurité des pays sahéliens sont en nombre insuf-fisant et hésitent à se déployer dans des zones rurales où leur présence est contestée. L’Etat est tenté de déléguer – de manière informelle pour l’instant – la responsabili-té de la sécurisation des mines à des acteurs armés locaux et non étatiques. Mais ce dispositif montre d’importantes limites : la capacité des autorités à réguler les sites miniers, même de manière indirecte, s’étiole à mesure que la sécurité se dégrade et que des groupes armés contestent les autorités publiques. Des groupes armés de toutes natures risquent de s’autonomiser et d’exploiter les ressources aurifères en contournant de plus en plus l’Etat. Signe des violences accrues, deux attaques ont récemment tué plus d’une soixantaine de civils travaillant dans l’extraction de l’or au Burkina Faso – la première contre un site artisanal du Nord-Ouest en octobre et l’autre près d’un site industriel de l’Est en novembre.

Le boom du secteur aurifère artisanal menace les Etats du Sahel central par d’autres aspects. Les enjeux financiers associés à l’exploitation aurifère artisanale sont devenus considérables ces dernières années. Cela a conduit à la formation de réseaux commerciaux locaux, régionaux et internationaux informels spécifiques. Ceux-ci peuvent contribuer au financement de groupes armés et/ou du terrorisme et à une augmentation du blanchiment d’argent dans la région en raison de l’immixtion de trafiquants dans l’économie aurifère artisanale.

Bien que les dynamiques locales varient au Sahel, chaque pays peut prendre des mesures pour développer une présence assainie des pouvoirs publics sur les espaces miniers et prévenir les risques de captation des ressources minières par les groupes armés, y compris jihadistes :

Dans les zones aurifères marquées par l’insécurité, les Etats devraient soit déployer leurs forces de sécurité à proximité des sites (mais pas nécessairement dans les mines elles-mêmes), soit formaliser le rôle des acteurs locaux non étatiques en matière de sécurité des espaces miniers et mieux les encadrer. Dans tous les cas,

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les dispositifs de sécurisation des sites devraient s’accompagner de mécanismes de gouvernance afin d’éviter que les forces chargées de la sécurité deviennent des éléments prédateurs, ce qui pousserait les orpailleurs dans les bras des groupes armés qui s’opposent à l’Etat.

Dans les zones où les Etats peuvent exercer leur autorité sans devoir mobiliser d’importants moyens sécuritaires, ils devraient encourager la formalisation des activités aurifères, notamment en délivrant des permis d’orpaillage et en mettant en place des comptoirs aurifères. Cette politique devrait s’accompagner de l’octroi d’avantages fiscaux ou de la mise à disposition de services de base pour montrer aux orpailleurs que l’Etat peut leur être utile. Les Etats devraient également trou-ver un équilibre entre industrialisation des sites, génératrice de revenus pour l’Etat, et préservation d’un orpaillage artisanal pourvoyeur d’emplois, afin de ne pas s’aliéner les orpailleurs.

Les Etats du Sahel central devraient renforcer le contrôle des circuits de commercia-lisation de l’or afin de réduire le risque de blanchiment d’argent et de financement des groupes armés. Ils devraient harmoniser leurs cadres légaux et développer des mécanismes financiers spécifiques pour que la production d’or emprunte des réseaux formels de commercialisation, privés ou publics, plutôt que des réseaux informels. Au niveau international, les Emirats arabes unis (Dubaï spécifique-ment), la Suisse et la Chine, principaux importateurs d’or en provenance des pays sahéliens, devraient renforcer le cadre légal de leurs importations d’or.

Dakar/Bruxelles, 13 novembre 2019

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Reprendre en main la ruée vers l’or au Sahel central

I. Introduction

Au Sahel central (Mali, Burkina Faso et Niger), l’exploitation aurifère s’est intensi-fiée depuis 2012, portée par un filon particulièrement riche qui traverse le Sahara d’Est en Ouest.1 Après les premières découvertes au Soudan (Jebel Amir) en 2012, d’autres ont eu lieu au Tchad entre 2013 et 2016 (Batha eu centre, Tibesti au nord du pays), au Niger en 2014 (Djado au nord-est du pays, Tchibarakaten au nord-est d’Arlit, et dans l’Aïr), puis enfin au Mali (nord de la région de Kidal) et en Mauritanie (Tasiast, à l’ouest du pays) en 2016. L’exploitation artisanale de ces sites est facilitée par la circulation transfrontalière d’orpailleurs expérimentés venus de la sous-région, notamment des Soudanais, des Maliens et des Burkinabè.2

Ces récentes découvertes s’ajoutent à l’or déjà exploité à Tillabéri (ouest du Niger), à Kayes, Sikasso et Koulikoro (sud du Mali) ou dans diverses régions du Burkina Faso. Elles font de l’or artisanal un enjeu central au Sahel. La production artisanale repré-senterait désormais près de 50 pour cent des volumes produits industriellement.3 Elle atteindrait chaque année 20 à 50 tonnes au Mali, 10 à 30 tonnes au Burkina Faso et 10 à 15 tonnes au Niger, soit une valeur monétaire globale située entre 1,9 et 4,5 milliards de dollars par an, si l’on se réfère au cours mondial de l’or.4 L’essentiel est exporté à Dubaï, qui déclare 1,9 milliards de dollars d’importations d’or en prove-nance de ces pays (plus le Togo).5 Dans ces trois pays, plus de deux millions d’acteurs seraient directement impliqués dans l’orpaillage artisanal : un million au Burkina Faso, 700 000 au Mali, et 300 000 au Niger selon des estimations de Crisis Group.6 Le nombre d’emplois indirects pourrait être trois fois plus élevé.7

Outre des problématiques sociales, environnementales et de gouvernance poli-tique majeures, déjà couvertes par la littérature, l’exploitation aurifère artisanale

1 Certains sites aurifères au Mali, au Niger et au Burkina Faso sont exploités de façon artisanale depuis plusieurs décennies. Au Mali, l’exploitation artisanale de l’or existe depuis le treizième siècle. 2 Raphaëlle Chevrillon-Guibert, Laurent Gagnol, Géraud Magrin, « Les ruées vers l’or au Sahara et au nord du Sahel. Ferment de crise ou stabilisateur ? », Hérodote, no. 172 (2019). 3 « L’or à la croisée des chemins », Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), 2018. 4 Les estimations basses reposent sur les déclarations des autorités nationales, et les plus hautes sur des entretiens avec des acteurs impliqués dans l’exploitation aurifère artisanale. Entretiens de Cri-sis Group, Ouagadougou, Niamey, Agadez, Bamako, 2018-2019. Ces ordres de grandeur reprennent en partie les estimations de l’OCDE. « L’or à la croisée des chemins », op. cit. 5 Une partie de la production du Burkina et du Niger est exportée depuis le Togo, d’où son inclu-sion. « Gold worth billions smuggled out of Africa », Reuters, 24 avril 2019. 6 Ces estimations reposent sur des entretiens avec des acteurs de l’exploitation aurifère artisanale. Entretiens de Crisis Group, Ouagadougou, Niamey, Agadez, Bamako, 2018-2019. 7 « L’or à la croisée des chemins », op. cit.

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suscite au Mali, au Burkina Faso et au Niger de nouvelles préoccupations sécuritaires.8 Ces trois pays constituent l’épicentre de l’insécurité dans la région sahélienne, et la plupart des récentes découvertes aurifères sont survenues dans des zones où les Etats sont historiquement peu présents ou dont ils se sont retirés en raison de l’insé-curité croissante. Ils ne disposent donc pas des ressources humaines et techniques suffisantes pour encadrer une activité de cette envergure. Cela profite à divers acteurs armés (groupes d’autodéfense, bandits, trafiquants, groupes rebelles, jihadistes) qui tantôt contestent l’Etat, tantôt coopèrent avec lui et sont les dépositaires informels de l’autorité publique.

Ces enjeux sécuritaires ont pris une nouvelle dimension depuis 2016. Les plus récentes découvertes aurifères au Sahel (comme à Kidal) couplées à l’implantation nouvelle de groupes armés dans des zones où l’or était déjà exploité (nord du Burkina Faso, zone de Torodi au Niger) expose plus que jamais ces ressources à la prédation de groupes armés rebelles et jihadistes. Les sites miniers artisanaux deviennent pour eux une source de financement mais aussi un lieu de recrutement. L’or nourrit aussi les circuits internationaux de blanchiment d’argent. Au nord du Niger et du Mali, un certain nombre de grands entrepreneurs de l’orpaillage artisanal étaient – pour ceux qui se sont reconvertis – ou sont encore, des acteurs majeurs du narcotrafic. Ainsi les trafiquants achètent fréquemment l’or au-dessus du prix du marché, puis l’expor-tent via des circuits de contrebande.9 De tels schémas de blanchiment via l’or exis-tent ailleurs dans le monde.10

Deux incidents récents témoignent des violences grandissantes qui entourent l’ex-traction de l’or au Burkina Faso et plus largement au Sahel central, dans un contexte d’affaiblissement des Etats et de montée en puissance de groupes armés de diverses natures. Le 6 novembre 2019, des hommes armés non identifiés ont attaqué un con-voi de la Semafo, une entreprise canadienne exploitant la mine d’or de Boungou, dans l’est du Burkina Faso. Au moins une quarantaine de salariés auraient été tués, certains à bout portant, d’après les premiers témoignages.11 Si des attaques contre des gendarmes ou policiers chargés d’escorter de tels convois logistiques ont déjà été enregistrées dans la région, cette attaque se distingue par le nombre important de victimes civiles. Quelques semaines auparavant, le 4 octobre 2019, un groupe armé a tué une vingtaine d’orpailleurs dans une mine artisanale à Dolmané, près de la ville

8 De nombreux chercheurs et ONG se sont intéressés à ces problématiques dans les trois pays. Voir par exemple, Amadou Koita, « Orpaillage et accès aux ressources naturelles et foncières au Mali », Université du Québec à Montréal (UQAM), 2017 ; Emmanuel Grégoire et Laurent Gagnol, « Ruées vers l’or au Sahara : l’orpaillage dans le désert du Ténéré et le massif de l’Aïr », EchoGéo, 2017 ; Joseph Bohbot, « L’orpaillage au Burkina Faso : une aubaine économique pour les populations, aux consé-quences sociales et environnementales mal maîtrisées », EchoGéo, no. 42 (2017). Sur les enjeux de gouvernance politique au Burkina Faso, voir « A Golden Racket », Public Eye, septembre 2015. 9 Entretien téléphonique de Crisis Group, expert en ressources naturelles à Bamako, septembre 2019. 10 « Money Laundering /Terrorist Financing Risks and Vulnerabilities Associated with Gold », Finan-cial Action Task Force, juillet 2015. 11 « At least 37 killed in attack on Canadian miner Semafo convoy in Burkina Faso », Reuters, 6 novem-bre 2019. Entretien de Crisis Group, expert travaillant pour une société chargée de la sécurité d’en-treprises minières au Burkina Faso, Dakar, 6 novembre 2019.

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d’Arbinda au Nord-Ouest du pays.12 Dans les deux cas, les motivations et l’identité précise des assaillants sont inconnues.13

Ce rapport analyse les enjeux sécuritaires de l’orpaillage artisanal au Sahel cen-tral, véritable défi pour des Etats aux moyens limités et déjà très mobilisés dans la lutte contre-insurrectionnelle. Il repose sur des entretiens conduits dans les trois pays avec des acteurs gouvernementaux et internationaux, des responsables du sec-teur aurifère, des acteurs de l’orpaillage artisanal, des membres des groupes armés et des spécialistes du secteur aurifère et de l’économie des ressources extractives. Ce rapport propose des pistes pour identifier les modes publics et privés de sécurisation des sites, pour encourager la formalisation des activités aurifères et mieux contrôler les circuits de commercialisation de l’or.

12 « Burkina : une vingtaine d’orpailleurs tués lors d’une attaque dans le Soum », RFI, 5 octobre 2019. 13 Les deux attaques ont eu lieu dans des zones où des groupes jihadistes sont actifs mais aucune n’a été officiellement revendiquée.

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II. La sécurisation privée des sites aurifères : l’Etat entre résignation et instrumentalisation

Engagées sur plusieurs fronts, et notamment dans la lutte contre les insurrections jihadistes, les forces de défense et de sécurité des Etats sahéliens peinent à sécuriser les zones les plus enclavées de leurs territoires. Leur présence aux abords des sites miniers artisanaux est souvent insuffisante, voire inexistante, en dépit des richesses qui y sont extraites. Ce faible maillage du territoire profite à différents types de groupes armés et contraint les Etats sahéliens à tolérer, voire à encourager, que les acteurs locaux se chargent de la sécurisation de ces sites. Ceux-ci apparaissent comme un expédient nécessaire et peu coûteux tant qu’ils ne contestent pas l’autorité de l’Etat. Cela nourrit une économie privée de la sécurité, par ailleurs alimentée par le trafic d’armes sous-régional.

Dans le Sud du Mali, le principal mode de sécurisation repose sur les Dozo, chas-seurs regroupés en confréries et généralement équipés de fusils de chasses artisa-naux. Ils sont depuis plusieurs décennies sollicités par les Tombolomas, une forme de police des mines officieuse mobilisée par le propriétaire d’un site et rémunérée grâce aux taxes collectées auprès des exploitants. Représentant les chefs de village sur les mines, les Tombolomas assurent la sécurité des sites aurifères dans les régions de Kayes, Sikasso et Koulikoro sans que cela ne suscite de contestation tant au niveau local que national. L’augmentation du nombre d’orpailleurs ces dernières années rendant cette sécurisation plus incertaine, les forces de sécurité sont aussi déployées sur certains sites.14

Au Burkina Faso, les modes de sécurisation sont comparables à ceux observés au Mali, mais moins structurés et avec de plus grandes variations locales. La sécurisa-tion des sites aurifères artisanaux s’est formalisée sous le président Blaise Compaoré : elle était à la charge des concessionnaires, via des entreprises privées de sécurité avec l’appui des forces de l’ordre.15 Depuis le départ de Compaoré, les sites artisa-naux sont largement repassés sous le contrôle d’acteurs issus des communautés locales, parfois avec l’appui de policiers (Compagnies républicaines de sécurité) ou de gen-darmes.16 A l’Ouest, les orpailleurs sollicitent d’anciens bandits reconvertis pour l’oc-casion ou des Dozo, traditionnellement chargés de sécuriser les espaces ruraux dans les régions de la Boucle du Mouhoun, des Hauts-Bassins et des Cascades.17 Sur le pla-teau mossi, dans la province du Yagha (Sahel), au Centre-Nord et à l’Est, les Koglweogo, groupes d’autodéfense qui se développent depuis 2015, sont sollicités ou s’imposent dans la sécurisation de certaines mines artisanales.18

Le Niger semble de son côté hésiter entre plusieurs approches. Dans la région d’Agadez, marquée par une histoire récente de rébellions, l’Etat est soucieux d’affir-

14 Entretien téléphonique de Crisis Group, acteur de l’orpaillage à Sikasso, octobre 2019. 15 Entretiens de Crisis Group, acteurs de l’orpaillage et membres de la société civile du Yagha et du Soum, Ouagadougou, juillet 2019. 16 Entretiens de Crisis Group, acteurs de la société civile du Soum, Ouagadougou, juillet 2019. 17 Entretiens de Crisis Group, notabilités de l’Ouest du Burkina Faso, Ouagadougou, juillet 2019. 18 « Mouvement d’autodéfense au Burkina Faso : diffusion et structuration des groupes Koglweogo », Network of Researchers in International Affairs (NORIA), 15 novembre 2018.

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mer son autorité.19 Depuis 2015, l’armée est présente aux abords du site principal de Tchibarakaten et assure des escortes hebdomadaires au profit des orpailleurs qui rejoignent Arlit et Agadez.20 Ailleurs, des formes de sécurité privée se développent. Dans le département de Torodi (Tillabéri), des comités de vigilance essaiment depuis 2016 face à la multiplication d’actes de banditisme contre des orpailleurs. L’Etat cherche cependant à encadrer et donner un cadre légal à l’action de ces groupes.21

Délibérée ou contrainte, la délégation de la sécurité à des acteurs privés a toute-fois ses limites. Dans le contexte d’affaiblissement progressif des Etats, le risque est réel que ces acteurs s’autonomisent, s’affranchissent de l’autorité de l’Etat, voire finissent par la contester. Ainsi, dans la zone aurifère de Kangaba (région de Kouli-koro) au Mali, des Dozo s’arrogent des missions de police et de justice en dehors de tout cadre légal ; début 2019, ils ont exécuté des individus suspectés de banditisme aux abords d’un site minier.22 A Sikasso, des Tombolomas ont déjà été emprisonnés à la suite de différends avec les forces de sécurité.23 Au Burkina Faso, les Koglweogo échap-pent largement au contrôle de l’Etat. Ils mènent des opérations de sécurité dans les mines et procèdent à des arrestations sans l’aval des autorités.24

Par ailleurs, inquiets face à l’extension progressive des insurrections jihadistes au Sahel central, les Etats ont commencé à mobiliser des acteurs armés locaux, y com-pris ceux chargés de la sécurité dans les mines, pour des opérations qualifiées d’ « anti-terroristes ». Ils mènent des missions de renseignement et patrouillent pour identi-fier, voire, dans certains cas, arrêter les suspects.25 Dans la région de Sikasso au Mali, des Dozo sont sollicités par les autorités pour jouer un rôle d’alerte précoce dans ce domaine.26 Dans la région burkinabè du Centre-Nord, qui abrite le plus grand nombre de sites aurifères artisanaux du pays, les Koglweogo sont déjà impliqués dans « la lutte contre le terrorisme » aux côtés des autorités.27

L’association de ces acteurs à la lutte « antiterroriste » en fait la cible des attaques jihadistes et les conduit à assumer un rôle auquel ils ne sont pas préparés. Ils ris-quent de se comporter moins en police privée chargée de sécuriser l’extraction de l’or qu’en groupes militarisés échappant en partie au contrôle de l’Etat, susceptibles de développer leur propre agenda et s’approprier les ressources minières.

19 La région d’Agadez a connu deux épisodes de rébellion (1990-1995, 2007-2009), est une plaque tournante des trafics sahariens et reste sous la menace de groupes jihadistes. L’Etat mobilise donc des moyens spécifiques aux abords de sites aurifères qui intéressent ces trois catégories d’acteurs. 20 « Rapport d’Etude sur la typologie des conflits dans le secteur minier au Niger », Haute Autorité à la consolidation de la paix, avril 2019. 21 Entretiens de Crisis Group, cadres du ministère nigérien de l’Intérieur, Niamey, mai 2019. 22 « Village de Dabali : deux hommes tués par de présumés chasseurs », Nord-Sud Journal, 8 jan-vier 2019. 23 Entretien téléphonique de Crisis Group, acteur de l’orpaillage artisanal à Sikasso, octobre 2019. 24 Entretiens de Crisis Group, acteurs de la société civile dans le Soum, Ouagadougou, septembre 2019. 25 En revanche, les Etats sahéliens n’utilisent pas ces groupes privés de sécurité contre les groupes politico-militaires. 26 Entretien électronique de Crisis Group, chercheur dans la région de Sikasso, juin 2019. 27 Entretien de Crisis Group, Koglweogo du Centre-Nord, Ouagadougou, septembre 2019.

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III. Une ressource convoitée par les groupes politico-militaires au Sahel

Des groupes politico-militaires qui se sont opposés ou s’opposent encore à l’Etat cherchent à s’accaparer des ressources aurifères. En prenant le contrôle de mines d’or ou en assurant la sécurité des sites et des routes d’évacuation du minerai, ces groupes (ou certains de leurs membres) peuvent y trouver un moyen de financement. C’est déjà le cas dans la région de Kidal (Mali), bastion de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), une alliance de groupes rebelles formée en octobre 2014 qui compte plusieurs milliers de membres, et à un moindre degré dans le Djado (Niger), où évoluent des groupes armés rebelles et trafiquants circulant entre le Niger, le Tchad et la Libye.28 Si le Burkina Faso ne compte pour l’instant aucun groupe de cette nature, la détérioration sécuritaire actuelle, liée à la multiplication des attaques jihadistes, pourrait pousser des groupes d’autodéfense communautaires dans cette direction.

Dans la région de Kidal, au Mali, la plupart des sites d’orpaillage artisanal sont contrôlés par des éléments de la CMA ou, dans une bien moindre mesure, de la Pla-teforme des mouvements du 14 juin 2014 d’Alger, une alliance de plusieurs dou-zaines de groupes armés progouvernementaux.29 L’or sert à la fois à l’enrichissement individuel des combattants et au financement des mouvements armés.30 Le plus sou-vent, la CMA impose des taxes aux orpailleurs en échange de la sécurisation des sites.31 Le boom aurifère à Kidal ne s’est pas accompagné – comme ailleurs – d’une recru-descence des actes de banditisme, ce qui suggère que le dispositif en place est efficace.

Au nord du Niger, l’exploitation aurifère artisanale, qui a débuté au printemps 2014 dans la zone de Djado, a vite été accaparée par des réseaux de plusieurs cen-taines d’hommes armés, majoritairement tchadiens et suspectés d’être liés à des groupes rebelles zaghawa ou toubou évoluant dans le Sud de la Libye.32 Ces acteurs auraient contrôlé certains sites aurifères et commercialisé frauduleusement l’or sur le territoire libyen jusqu’en 2016 au moins.33 Pour les chasser de la zone, mais peut-être également pour préparer l’arrivée de compagnies minières internationales, les autorités nigériennes ont fermé le site en 2017.34 Il n’a pas encore rouvert en dépit des engagements pris, ce qui a pour double effet de rediriger une partie des acteurs qui en vivaient vers d’autres sites aurifères (dans l’Aïr notamment) ou vers l’écono-mie criminelle, et de mécontenter les communautés locales.35 Malgré tout, quelques groupes d’orpailleurs étrangers continuent d’exploiter illégalement le site, parfois avec la complicité des forces de défense et de sécurité locales.36

28 Entretiens de Crisis Group, sources sécuritaires, Bamako et Niamey, novembre 2018 et janvier 2019. 29 Entretiens téléphoniques de Crisis Group, orpailleurs et membres de la CMA à Kidal, juillet 2019. 30 Voir le rapport Afrique de Crisis Group N°267, Narcotrafic, violence et politique au Nord du Mali, 13 décembre 2018. 31 Entretien de Crisis Group, membre de la CMA, Niamey, mai 2019. 32 « The Gold Rush in Northern Niger », Small Arms Survey, 19 juin 2017. 33 Entretien de Crisis Group, acteur de l’orpaillage dans le Djado, Niamey, janvier 2017. 34 Entretiens de Crisis Group, hauts responsables nigériens, Niamey, septembre 2018 et janvier 2019. 35 « La frontière Niger-Libye : sécuriser sans stabiliser ? », Institut français des relations interna-tionales (IFRI), décembre 2018. 36 Entretien électronique de Crisis Group, spécialiste du secteur aurifère artisanal au Niger, sep-tembre 2019.

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L’exploitation aurifère artisanale a également des conséquences positives dans ces zones. Elle offre aux combattants des perspectives d’emplois rémunérateurs, qui peuvent les inciter à déposer les armes. En Côte d’Ivoire, l’intérêt de certains ex-rebelles pour une reconversion dans le secteur aurifère aurait facilité le mécanisme de désar-mement, démobilisation et réinsertion (DDR).37 Dans la région d’Agadez, au Niger, de nombreux propriétaires de puits aurifères sont d’anciens rebelles ou trafiquants ; Saleh Ibrahim, ex-rebelle du Mouvement des Nigériens pour la justice (MNJ) et ancien baron de l’économie criminelle reconverti dans l’exploitation aurifère artisanale sur le site de Tchibarakaten, est aujourd’hui une personnalité éminemment respectée dans la zone.38 A Kidal, certains ex-combattants de la CMA et même du Groupe d’auto-défense Touareg Imghad et alliés (GATIA), un groupe créé en 2014 et qui fait partie de la Plateforme, ont depuis 2017 renoncé à la lutte armée pour se consacrer à l’or-paillage artisanal.39

Il n’est pas exclu, cependant, que ces combattants devenus orpailleurs soient rap-pelés par les groupes armés en cas de besoin. Les trajectoires individuelles au Sahara sont extrêmement changeantes et le fait de prendre part à l’orpaillage n’est pas incom-patible avec l’engagement dans des groupes politico-militaires.

37 « L’eldorado ouest-africain : Cartographie du commerce illicite de l’or en Côte d’Ivoire, au Mali et au Burkina Faso », Partenariat Afrique Canada, janvier 2017. 38 La quasi-totalité des anciens chefs de front et des combattants du MNJ ont été ou sont encore impliqués dans l’économie aurifère à Tchibarakaten ou Amzigar. Entretiens de Crisis Group, anciens membres du MNJ, Niamey et Agadez, 2017. Sur Saleh Ibrahim, voir « Lost in Trans-Nation: Tubu and Other Armed Groups and Smugglers along Libya’s Southern Border », Small Arms Survey, décembre 2018, p. 66. 39 A Kidal, la part de combattants reconvertis reste faible. Entretiens téléphoniques de Crisis Group, habitants de Kidal, août 2019.

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IV. L’or artisanal, nouvel enjeu pour les jihadistes au Sahel

Les Etats sahéliens et des organisations internationales, comme l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), s’alarment du risque d’acca-parement par les jihadistes de ressources aurifères dans des zones où les institutions étatiques sont faibles, voire absentes.40 Alors que les rançons des prises d’otage, source importante de revenus pour les groupes jihadistes au Sahel, se raréfient, l’or peut constituer pour eux un nouvel atout, à des fins de financement mais également de recrutement. Ce risque est d’autant plus élevé que les orpailleurs considèrent par-fois la présence des jihadistes comme une aubaine, et non comme une menace.

Les principaux groupes jihadistes au Sahel tirent un intérêt financier de l’extrac-tion aurifère, activité halal (licite), dans leurs zones d’influence. Les modes de finan-cement varient d’une région à l’autre. Dans le Soum burkinabè, des unités jihadistes sont rémunérées par les orpailleurs pour effectuer des missions de sécurité sur les sites. Dans les zones de Tinzawaten, Intabzaz ou Talahandak, au nord de la région de Kidal au Mali, le groupe jihadiste Ansar Eddine (membre du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM)) n’exerce pas une présence armée destinée à la sécu-risation du site, mais prélève la zakat (impôt religieux) auprès des orpailleurs et du reste de la population.41

Ce serait aussi en prélevant la zakat que des groupes jihadistes affiliés à l’Etat islamique au Grand Sahara (EIGS) ou au Groupe de soutien à l’islam et aux musul-mans (GSIM) tireraient profit de l’exploitation aurifère dans l’Est du Burkina Faso.42 En dépit de la récente opération militaire Otapouanou, ils semblent encore contrôler plusieurs sites d’orpaillage, en particulier dans les espaces les moins accessibles des forêts et réserves classées, probablement en accointance avec d’autres groupes, comme des Koglweogo démobilisés.43

Une partie des orpailleurs compose avec les groupes jihadistes moins par convic-tion que par pragmatisme : ils se rangent du côté de ceux qui détiennent le pouvoir local et déterminent les conditions d’extraction de l’or, ou s’allient aux groupes jihadistes pour reprendre le contrôle de sites miniers disputés. Au Burkina Faso, dans la province du Soum, des orpailleurs auraient ainsi soutenu les jihadistes contre des Koglweogo qui s’étaient emparés du site de Kereboulé en 2016.44 Des orpailleurs peu-

40 « L’or à la croisée des chemins », op. cit. 41 Ansar Eddine est un groupe jihadiste fondé par Iyad Ag Ghaly en janvier 2012 dans la région de Kidal. Le GSIM d’Iyad Ag Ghaly est né en mars 2017 de la fusion des groupes jihadistes liés à al-Qaeda opérant au Sahel : Ansar Eddine, al-Mourabitoune et certaines unités sahariennes d’al-Qaeda au Maghreb Islamique (AQMI). Troisième pilier de l’islam, la zakat est l’aumône que doivent verser régulièrement les musulmans, selon leurs moyens. Dans les zones sous l’influence de groupes jihadistes, ce sont eux qui prélèvent la zakat. 42 L’EIGS, dirigé par Adnan Abou Walid al-Sahraoui, est né en mai 2015 d’une scission au sein du groupe jihadiste al-Mourabitoune. L’Etat islamique reconnait son allégeance en octobre 2016. 43 L’arrivée des groupes jihadistes a donné lieu à la conclusion d’accords verbaux de non-agression avec nombre de Koglweogo. Entretien de Crisis Group, acteur de la gouvernance du secteur auri-fère, Ouagadougou, mai 2019. 44 Ces Koglweogo étaient originaires de Boulsa (province du Centre-Nord) et leur chef, Elhadji Djiby, travaillait pour un proche de l’ancien opérateur aurifère Adama Kindo, PDG de l’entreprise minière

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vent aussi trouver à travers les groupes jihadistes des moyens d’obtenir justice. Dans la même province du Soum, des saisies de matériel d’orpaillage et même d’or lors d’opérations antiterroristes début 2019 auraient également rapproché les commu-nautés des jihadistes.45 Dans l’Est du Burkina Faso, le gouverneur a ordonné en 2018 la fermeture de sites miniers artisanaux, officiellement pour empêcher le financement de groupes terroristes ; les orpailleurs mécontents se sont tournés vers les jihadistes, qui ont rouvert certaines mines, comme celle de Kabonga.46

Dans l’ensemble, les sites aurifères restent pour l’instant une source de finance-ment secondaire pour les groupes jihadistes au Sahel. L’importance de l’or pourrait cependant s’accroitre à la faveur de leur implantation dans de nouveaux espaces riches en minerais, et alors qu’ils semblent rencontrer des difficultés de financement.47

Les sites aurifères semblent être aussi des lieux de recrutement pour les groupes jihadistes. A l’Est du Burkina Faso ou dans le département de Torodi au Niger, des prêches jihadistes qui appellent au respect de la Charia (loi islamique) sur les sites d’extraction ont été rapportés.48 La relative « moralisation » des mœurs dont ils sont crédités tend à satisfaire une partie des communautés environnantes, pour qui les vols, la consommation d’alcool ou encore la prostitution sont des problèmes récurrents.49

Les sites aurifères peuvent enfin servir de lieu de formation, notamment en matière d’explosifs, puisque l’exploitation aurifère en nécessite la manipulation. Plusieurs membres de la katibat (brigade) Khalid Ben Walid, branche sud d’Ansar Eddine, auraient reconnu avoir reçu une formation aux explosifs sur une des nombreuses mines d’or artisanales du nord de la Côte d’Ivoire, près de la frontière malienne.50 Les filières aurifères constitueraient aussi une voie d’approvisionnement pour la fabri-cation d’engins explosifs improvisés (IED), en particulier dans le centre du Mali et dans certaines régions du Burkina Faso où le nitrate d’ammonium, commercialisé par des entreprises dans le Sahel, est le principal composant des IED.51

Somika, vivement contestée par les communautés locales au temps de l’ancien président Compaoré. Entretien de Crisis Group, notabilité du Soum, Ouagadougou, septembre 2019. 45 Courriel de Crisis Group, acteur humanitaire dans le Soum, 28 mai 2019. 46 Entretien de Crisis Group, acteur humanitaire dans l’Est, Ouagadougou, juillet 2019. 47 Entretiens téléphoniques de Crisis Group, sources communautaires dans le Soum et le centre du Mali, septembre 2019. 48 Entretien de l’analyste dans le cadre de précédentes fonctions, acteur humanitaire, Niamey, avril 2019. 49 Entretiens de l’analyste dans le cadre de précédentes fonctions, acteurs de l’orpaillage, Agadez, janvier 2019. 50 « Vastes opérations de la sécurité d’Etat : Ces terroristes pris dans les mailles de la SE », L’Aube, 26 avril 2016. 51 Entretien téléphonique de Crisis Group, expert des IED au Sahel, 9 août 2019.

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V. Restaurer la présence d’un Etat régulateur

Au vu des risques sécuritaires associés à l’exploitation aurifère, les Etats sahéliens se doivent d’intervenir pour la réguler et sécuriser les sites artisanaux. Confrontés à de nombreux autres défis, ils seraient avisés de définir leurs priorités : dans l’immédiat, améliorer la qualité de leur présence ; et lorsque c’est possible, mieux encadrer les acteurs locaux de la sécurité. Un renforcement des réglementations sous-régionales et internationales ainsi qu’une amélioration des mécanismes de diligence pourraient également aider les Etats sahéliens à mieux contrôler la production d’or en limitant sa capture par des groupes armés violents.

A. Reprendre en main la sécurité des zones aurifères

Avant de redéployer les services publics dans les zones aurifères, les Etats sahéliens doivent sécuriser les mines d’or artisanales. Ceci est difficilement envisageable, à court terme du moins, dans les zones sous contrôle des groupes armés rebelles et/ou jihadistes, comme Kidal (Mali) ou le Soum (Burkina Faso). Ailleurs, l’Etat est encore en mesure de sécuriser les mines soit en y dépêchant ses propres forces, soit en pri-vilégiant une coopération sécuritaire avec des acteurs privés locaux, qui sont déjà présents mais devraient être mieux encadrés.

La présence des forces de l’ordre est requise autour des sites aurifères dont des groupes armés hostiles pourraient tenter de s’emparer. A l’Est du Burkina Faso, l’Etat devrait déployer ses forces sur certains sites d’orpaillage artisanaux qui ont été désertés par les jihadistes lors de l’opération Otapuanu, en mai dernier. Cette pré-sence renforcée de la force publique devrait s’accompagner d’un effort en matière de gouvernance. L’Etat pourrait s’engager à mettre un terme aux injustices et actes de racket perpétrés par ses propres forces et qui le décrédibilisent. Il ne s’agit pas d’un objectif irréaliste : dans différents sites sensibles de la région d’Agadez, au Niger, l’Etat a montré aux orpailleurs que sa présence rendait l’extraction de l’or plus sûre. En sécu-risant les sites artisanaux de la même manière, le Burkina contribuerait à restaurer la confiance entre ses forces armées et les populations. Une fois la sécurité assurée, les gouvernements devraient s’efforcer de retirer leurs forces armées des mines, tout en maintenant des forces de police mobile à proximité.

Dans certaines conditions, l’Etat devra aussi s’appuyer sur les acteurs non étatiques qui mènent déjà des opérations de sécurité sur certains sites aurifères. Le nombre de sites à sécuriser constitue en effet un défi majeur pour des forces de défense et de sécurité qui manquent de moyens et sont engagées sur bien d’autres terrains. Il ne s’agit pas de déléguer la sécurisation des mines à des groupes militarisés qui pour-raient échapper au contrôle de l’Etat et commettre des exactions contre des civils. Il s’agit plutôt de reconnaitre le rôle des acteurs locaux de sécurité, qui assurent déjà de facto des missions de police dans les mines et leurs alentours, et de mieux les enca-drer. Cela peut passer par exemple par la création de comités locaux – inclusifs sur le plan communautaire – qui relèveraient de l’autorité des maires ou des chefferies

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traditionnelles, à l’instar des Coordinations communales de sécurité (CCS) au Burki-na Faso, chargées de l’encadrement de certains groupes d’autodéfense. 52

Associer ces acteurs au lieu de les remplacer par des forces de défense et de sécurité présenterait un double avantage : les intéresser à la collaboration avec les pouvoirs publics et éviter de se les aliéner en les privant d’une activité rentable ; et soulager les forces de défense et de sécurité, de plus en plus accaparées par la lutte antiterro-riste. A plus long terme, les Etats sahéliens devraient envisager d’intégrer ces acteurs privés locaux aux forces de police territoriale (ou police de proximité), qu’ils tentent de mettre en place depuis plusieurs années, s’ils font preuve de discipline, d’efficacité et de probité.

Quels que soient les acteurs impliqués dans la sécurité (forces de défense et de sécurité ou acteurs privés), les pouvoirs publics devront veiller à ce qu’ils ne se compor-tent pas en forces de prédation sur les sites miniers. Il convient d’imaginer, là encore, des mécanismes de contrôle par les acteurs concernés – mineurs mais aussi com-munautés environnantes – qui intègrent des élites politiques et coutumières locales, mais aussi des organisations locales de la société civile. La formation de comités locaux – inclusifs – qui surveillent et encadrent les activités sur et aux abords des sites auri-fères pourrait permettre de limiter les abus de la part des représentants de l’Etat.

B. Démontrer l’utilité de l’Etat sur les sites les plus accessibles

Sur les sites où les Etats peuvent encore exercer leur autorité sans mobiliser d’im-portants moyens sécuritaires, ils devraient soutenir un processus de formalisation de l’orpaillage artisanal.53 Pour les Etats sahéliens, il est en effet essentiel de savoir qui opère sur les sites aurifères artisanaux et surtout de contrôler autant que possible la filière d’extraction pour réduire le risque de financement de groupes armés, y compris jihadistes. Etablir un cadre légal pour l’exploitation artisanale de ces sites aurifères serait aussi pourvoyeur de recettes fiscales. Cela reposerait entre autres sur l’enregis-trement et la délivrance de permis d’orpaillage, la mise en place de comptoirs auri-fères et d’un contrôle technique des méthodes d’extraction. Afin de démontrer son utilité et de convaincre les orpailleurs artisanaux de coopérer, l’Etat devrait leur donner des garanties de sécurité, des avantages fiscaux (qui peuvent aussi porter sur les biens d’équipement importés) et/ou accès à des services publics.

Les Etats sahéliens ont récemment pris des initiatives en ce sens, mais sans aller au bout du processus, faute de volonté politique ou de capacité institutionnelle suffi-

52 En vertu du décret 2016-1052, les CCS sont chargées de l’encadrement technique, de la coordina-tion ainsi que du suivi et de l’évaluation des activités des groupes d’autodéfense dès lors que ceux-ci sont reconnus par le ministère de la Sécurité comme des structures communautaires locales de sécurité (SCLS). Mais les CCS ne sont pas encore opérationnelles et des inquiétudes portent sur le pouvoir trop important qui serait dévolu aux maires en leur sein. Des réflexions pour réviser le décret 2016-1052 sont en cours. Entretien de Crisis Group, acteur impliqué dans la mise en œuvre de cette réforme, Ouagadougou, juillet 2019. 53 La formalisation n’implique pas nécessairement l’industrialisation. Il s’agit d’encadrer juridi-quement l’exploitation aurifère artisanale afin de renforcer la transparence du secteur et de réduire ainsi sa vulnérabilité à la pénétration de réseaux criminels. Voir à ce sujet, « Pratiques exemplaires : la formalisation et le devoir de diligence dans le secteur minier artisanal et à petite échelle », Impact, mai 2018.

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sante. Le Burkina Faso a ainsi mis en place des conditions fiscales avantageuses pour ceux qui vendent leur production à la nouvelle agence étatique créée en novembre 2015, l’Agence nationale d’encadrement des exploitations minières artisanales et semi-mécanisées (ANEEMAS).54 Il est encore trop tôt pour évaluer l’impact de cette mesure. De son côté, le Niger envisage actuellement la création de couloirs d’orpaillage (zones délimitées et réservées à l’orpaillage artisanal formalisé) qui seraient sécuri-sés et dotés de services de base (eau, électricité, santé, éducation, etc.) accessibles aux orpailleurs.55 Cela pourrait les rendre plus attractifs que les couloirs créés au Mali, critiqués pour être faibles en teneur minérale et sur lesquels aucun service n’est disponible.56 Les couloirs d’orpaillage ont vocation à structurer les orpailleurs en coopératives et à accueillir des entreprises semi-mécanisées.

Les Etats sahéliens doivent aussi trouver un équilibre entre préservation de l’or-paillage artisanal et industrialisation du secteur, qui crée des recettes fiscales mais risque de mécontenter les communautés locales. Elle peut en effet détruire une par-tie des emplois que génère l’exploitation artisanale et susciter des conflits fonciers lorsque les espaces concernés sont habités par des populations expulsées sans dédom-magement systématique ou adéquat.57

Par ailleurs, la présence d’une entreprise minière sur un territoire n’améliore pas toujours les conditions de sécurité. Bien que ces sociétés puissent financer le déploie-ment des forces de l’ordre, elles constituent elles-mêmes des cibles, comme en témoi-gnent les récents enlèvements de personnels expatriés d’entreprises minières au Niger ou au Burkina Faso.58 Enfin, les conséquences sociales et environnementales de l’exploitation industrielle peuvent donner lieu à des violences, en particulier au Mali et au Burkina Faso. Le 8 août 2019 à Youga, dans le Centre-Est du Burkina Faso, des riverains ont saccagé les équipements d’une société minière turque et blessé plu-sieurs salariés.59

C. Renforcer les mécanismes régionaux et internationaux de contrôle du secteur aurifère artisanal

Les groupes armés qui exploitent les sites aurifères dépendent de circuits commer-ciaux d’exportation. Dans les zones qu’ils contrôlent, l’or exploité par des orpailleurs ou des membres de ces groupes est souvent vendu par des réseaux informels connec-tés à des pays frontaliers : l’est du Burkina Faso et la région de Tillabéri (sud-ouest du Niger) sont ainsi connectés à des circuits de revente au Ghana et au Togo, le sud

54 Entretien de l’analyste dans le cadre de précédentes fonctions, acteur de l’orpaillage, Ouagadou-gou, avril 2019. 55 Entretien téléphonique de Crisis Group, spécialiste du secteur aurifère artisanal au Niger, août 2019. 56 Entretien téléphonique de Crisis Group, acteur de l’orpaillage artisanal au Mali, juin 2019. 57 Un tel cas est par exemple survenu à Tillabéri à l’été 2017 : l’Etat a fermé certaines mines et expulsé leurs exploitants pour permettre à une compagnie minière étrangère de s’installer. Entretiens de l’analyste dans le cadre de précédentes fonctions, responsables étatiques et orpailleurs, Tillabéri (Niger), janvier 2019. 58 « Trois employés de la mine d’or d’Inata enlevés dans le nord du pays », Jeune Afrique, 24 sep-tembre 2018 ; « Un cadre canadien d’une compagnie minière enlevé au Burkina », AFP, 17 janvier 2019. 59 « Attaquée et critiquée, une mine d’or turque dans la tourmente au Burkina Faso », France 24, 13 août 2019.

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du Mali à la Guinée, la région de Kidal (nord du Mali) à l’Algérie et le nord d’Agadez (centre du Niger) à la Libye. En bout de chaîne, les exportations se destinent princi-palement à la Suisse, la Chine, et surtout Dubaï.60

Limiter le commerce informel transfrontalier de l’or, associé à un risque accru de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme, passe avant tout par une réduc-tion de l’attractivité de certains régimes fiscaux et par l’élaboration de politiques publiques incitatives pour que la production d’or emprunte des réseaux formels de commercialisation plutôt que des réseaux informels. Une harmonisation de la fisca-lité entre les pays de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) permettrait d’éviter que des pays comme le Togo, le Mali et la Guinée, dont la fiscalité est avantageuse, ne deviennent des destinations d’or de contrebande.61

Pour favoriser les circuits formels de commercialisation, deux solutions sont envi-sageables. D’abord, à travers la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), les Etats sahéliens pourraient acquérir l’or artisanal extrait sur leurs ter-ritoires, comme le fait déjà la Guinée par exemple.62 Cependant, la BCEAO ne peut imprimer du franc CFA, la monnaie des Etats de l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA), pour acheter de l’or sans affaiblir la valeur de sa monnaie, ce qui n’est pas possible dans le cadre de la parité fixe qui unit le Franc CFA à l’euro. Pour acheter de l’or sans imprimer de monnaie, la BCEAO devrait puiser dans ses propres réserves en devises, qui restent limitées.

De manière alternative ou complémentaire, les Etats sahéliens peuvent encoura-ger la participation du secteur privé formel dans l’exploitation minière artisanale. Ces acteurs privés devraient tenter de capter la chaîne d’approvisionnement de l’or en offrant aux acteurs artisanaux des prix supérieurs à ceux du marché. Le manque à gagner que cela engendre à court terme serait compensé par les profits réalisés plus tard grâce aux économies d’échelle et au développement de moyens de production plus effectifs. Le secteur artisanal serait ainsi préservé des trafiquants qui utilisent parfois l’or pour blanchir de l’argent. A plus long terme, des institutions telles que la Banque mondiale et la Banque africaine de développement devraient soutenir ce pro-cessus par des programmes qui renforcent la capacité des mineurs artisanaux à former des coopératives pour extraire de l’or de manière durable et transparente, conformé-ment aux normes internationales.63

Sous réserve de mettre en place des mécanismes nationaux de traçabilité effi-caces, cela permettrait de réduire le risque de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme en récupérant le contrôle d’une partie des flux informels. Cela présen-terait également d’importants avantages financiers pour l’UEMOA et la zone du franc CFA. Les autorités des différents pays doivent donc renforcer les contrôles dans les aéroports, les exportations clandestines vers Dubaï se faisant principalement par

60 « Gold worth billions smuggled out of Africa », op. cit. ; et « A Golden Racket », op. cit. 61 « L’or à la croisée des chemins », op. cit ; « Curbing Illicit Mercury and Gold Flows in West Africa », Organisation des Nations unies pour le développement industriel (Unido), novembre 2018. 62 Correspondance électronique de Crisis Group, Roberto Sollazzo, expert en économie des res-sources naturelles, 19 septembre 2019. 63 Entretiens de Crisis Group, opérateurs aurifères du secteur privé, expert en ressources naturelles, octobre 2019.

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voie aérienne.64 Les Etats sahéliens devraient interdire aux particuliers de transpor-ter de l’or dans leurs bagages, un procédé qui permet de contourner les contrôles opérés par le fret aérien.65

Les pouvoirs publics devraient faire preuve de plus de vigilance afin d’identifier les circuits de commercialisation et d’exportation qui pourraient financer directement ou indirectement des groupes armés non étatiques, dont ceux accusés de terrorisme. Au niveau sous-régional, une réflexion devrait être entamée par les Etats concernés pour développer un mécanisme de certification harmonisé avec le guide de l’OCDE sur le devoir de diligence pour des chaînes d’approvisionnement en minerais. La sous-région pourrait s’inspirer du Mécanisme régional de certification (MRC) mis en place par la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs pour éliminer l’appui financier aux groupes armés.66 Au Mali en particulier, le Groupe d’experts des Nations unies pourrait, dans le cadre de son mandat actuel, s’intéresser à la ques-tion du financement des groupes armés et du terrorisme via l’or, notamment dans la région de Kidal.

Au niveau international, Dubaï est aujourd’hui le principal importateur d’or des pays du Sahel et d’Afrique de l’Ouest. Cet or emprunte, en large partie, des circuits d’exportation clandestins.67 A ce titre, il est de la responsabilité des Emirats arabes unis de renforcer le cadre légal de leurs importations d’or, au-delà des efforts récents, notamment en vue de prévenir tout risque de blanchiment d’argent et de finance-ment du terrorisme.68 Les importateurs d’or artisanal devraient être tenus de recueillir des informations supplémentaires sur les vendeurs, de vérifier l’authenticité des cer-tificats d’origine, des autorisations d’exportation et certificats délivrés par les douanes nationales.69 La Suisse et la Chine, autres importateurs majeurs, devraient aussi ren-forcer leur contrôle des chaînes d’approvisionnement et imposer à leurs entreprises des mécanismes de diligence raisonnable.70

64 « Curbing Illicit Mercury and Gold Flows in West Africa », op. cit. 65 Ainsi que le recommande notamment le rapport « The West African El Dorado: Mapping the Illicit Trade of Gold in Côte d’Ivoire, Mali and Burkina Faso », AfricaPortal, 1er janvier 2017. 66 « Mécanisme régional de certification (MRC) », Initiative régionale de lutte contre l’exploitation illégale des ressources naturelles, Conférence internationale sur la région des Grands Lacs. 67 18 pour cent des importations d’or par les Emirats arabes unis provenaient d’Afrique en 2006, contre 50 pour cent en 2016. « Gold worth billions smuggled out of Africa », op. cit. Dubaï déclare avoir importé chaque année entre 40 et 60 tonnes d’or du Mali depuis 2013, l’essentiel provenant de l’or artisanal exporté clandestinement. « Curbing Illicit Mercury and Gold Flows in West Africa », op. cit. 68 Le mécanisme Dubai Good Delivery établit des normes en matière d’approvisionnement des raf-fineries. Les autorités certifient par ailleurs qu’un nombre limité de raffineries acceptent l’or importé dans des bagages à main. « Gold worth billions smuggled out of Africa », op. cit. 69 « The West African El Dorado: Mapping the Illicit Trade of Gold in Côte d’Ivoire, Mali and Burkina Faso », op. cit. 70 Pour plus d’informations sur les lacunes dans l’application par la Suisse de sa loi sur le blanchi-ment d’argent, voir « A Golden Racket », op. cit.

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VI. Conclusion

Le boom aurifère au Sahel ouvre de nouvelles perspectives, notamment en matière d’emplois, et suscite de nombreux défis environnementaux, sanitaires, sociaux et sécu-ritaires. Le risque sécuritaire est particulièrement élevé dans un contexte régional où la faiblesse de l’Etat favorise le développement de groupes armés, y compris jihadistes, qui mènent des opérations de sécurité sur les sites d’extraction et/ou taxent les exploi-tants à la place des pouvoirs publics.

Les Etats sahéliens ne peuvent se désintéresser de l’orpaillage artisanal ou se con-tenter de sous-traiter la sécurité des sites à des groupes armés mal encadrés. Alors que l’autorité de l’Etat est contestée dans de nombreuses zones rurales, il est risqué de lais-ser des sites aurifères aux mains de groupes armés aux motivations diverses. L’usage de la seule force, cependant, ne permettra pas aux Etats de rétablir leur autorité sur des territoires disputés.

L’Etat ne retrouvera sa place sur ces sites que s’il démontre son utilité et, en pre-mier lieu, sa capacité à réguler l’exploitation et le commerce de l’or artisanal. Le sec-teur aurifère artisanal dépassant le seul cadre national, mieux maîtriser les circuits de commercialisation implique pour les Etats de la sous-région d’harmoniser leurs approches et leurs cadres de régulation. Cela nécessite enfin, au niveau internatio-nal, un contrôle renforcé des circuits d’exportation et d’importation.

Dakar/Bruxelles, 13 novembre 2019

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Annexe A : Carte du Sahel

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Annexe B : A propos de l’International Crisis Group

L’International Crisis Group est une organisation non gouvernementale indépendante à but non lucratif qui emploie près de 120 personnes présentes sur les cinq continents. Elles élaborent des analyses de ter-rain et font du plaidoyer auprès des dirigeants dans un but de prévention et de résolution des conflits armés.

La recherche de terrain est au cœur de l’approche de Crisis Group. Elle est menée par des équipes d’analystes situées dans des pays ou régions à risque ou à proximité de ceux-ci. À partir des informations recueillies et des évaluations de la situation sur place, Crisis Group rédige des rapports analytiques rigou-reux qui s’accompagnent de recommandations pratiques destinées aux dirigeants politiques internatio-naux, régionaux et nationaux. Crisis Group publie également CrisisWatch, un bulletin mensuel d’alerte précoce offrant régulièrement une brève mise à jour de la situation dans plus de 70 situations de conflit (en cours ou potentiel).

Les rapports de Crisis Group sont diffusés à une large audience par courrier électronique. Ils sont égale-ment accessibles au grand public via le site internet de l’organisation : www.crisisgroup.org. Crisis Group travaille en étroite collaboration avec les gouvernements et ceux qui les influencent, notamment les médias, afin d’attirer leur attention et de promouvoir ses analyses et recommandations politiques.

Le Conseil d’administration de Crisis Group, qui compte d’éminentes personnalités du monde politique, diplomatique, des affaires et des médias, s’engage directement à promouvoir les rapports et les recom-mandations auprès des dirigeants politiques du monde entier. Le Conseil d’administration est présidé par Mark Malloch-Brown, ancien vice-secrétaire général des Nations unies et administrateur du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD).

Robert Malley, président-directeur général de Crisis Group, a pris ses fonctions le 1er janvier 2018. Ancien-nement directeur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord de Crisis Group, il a plus récemment servi en tant qu’adjoint spécial auprès de l’ancien président américain Barack Obama ainsi que son con-seiller dans la campagne anti-ISIL, et coordinateur pour le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord et la région du Golfe à la Maison-Blanche. Précédemment, il a été adjoint spécial pour les affaires israélo-palestiniennes auprès du président Bill Clinton.

Le siège d’International Crisis Group est situé à Bruxelles et l’organisation a des bureaux dans sept autres villes : Bogota, Dakar, Kaboul, Nairobi, Londres, New York et Washington, DC. Elle est également présente dans les villes suivantes : Abuja, Alger, Bangkok, Beyrouth, Caracas, Gaza, Djouba, Guatemala, Hong Kong, Jérusalem, Johannesburg, Kaboul, Mexico, Rabat, Tbilissi, Toronto, Tripoli, Tunis et Yangon.

Crisis Group reçoit le soutien financier d’un grand nombre de gouvernements, de fondations et de donateurs privés. Actuellement, Crisis Group entretient des relations avec les agences et départements gouverne-mentaux suivants: Affaires mondiales Canada, Agence française de développement, Ministère australien des Affaires étrangères et du commerce, Agence autrichienne pour le développement, Agence japonaise de Coopération internationale, Département fédéral des Affaires étrangères de la Confédération suisse, Département pour le développement international du Royaume-Uni, Fonds d’affectation spéciale d’ur-gence pour l’Afrique de l’Union européenne, Instrument contribuant à la stabilité et à la paix de l’Union européenne, Irish Aid, Ministère danois des Affaires étrangères, Ministère fédéral des affaires étrangères de l’Allemagne, Ministère des Affaires étrangères et de la coopération internationale des Émirats arabes unis, Ministre des Affaires étrangères du Qatar, Ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères, Ministère islandais des Affaires étrangères, Ministère luxembourgeois des Affaires étrangères et euro-péennes, Ministère néerlandais des Affaires étrangères, Ministère néo-zélandais des Affaires étrangères et du commerce, Ministère norvégien des Affaires étrangères, Ministère suédois des Affaires étrangères, et la Principauté du Liechtenstein.

Crisis Group entretient aussi des relations avec les fondations suivantes: Carnegie Corporation of New York, Charles Koch Foundation, Henry Luce Foundation, John D. and Catherine T. MacArthur Foundation, Korea Foundation, Open Society Foundations, Ploughshares Fund, Robert Bosch Stiftung, Rockefeller Brothers Fund, UniKorea Foundation et Wellspring Philanthropic Fund.

Crisis Group remercie ses donateurs, et tout particulièrement l'Union européenne, pour le financement de ce rapport.

Novembre 2019

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Reprendre en main la ruée vers l’or au Sahel central

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Annexe C : Rapports et briefings sur Afrique depuis 2016

Rapports et Briefings Spéciaux

Exploiter le chaos : al-Qaeda et l’Etat islamique, Rapport spécial N°1, 14 mars 2016 (aussi dis-ponible en anglais et en arabe).

Seizing the Moment: From Early Warning to Ear-ly Action, Rapport spécial N°2, 22 juin 2016.

Counter-terrorism Pitfalls: What the U.S. Fight against ISIS and al-Qaeda Should Avoid, Rapport spécial N°3, 22 mars 2017.

Council of Despair? The Fragmentation of UN Diplomacy, Briefing spécial N°1, 30 avril 2019.

Seven Opportunities for the UN in 2019-2020, Briefing spécial N°2, 12 septembre 2019.

Afrique

A Tale of Two Councils: Strengthening AU-UN Cooperation, Rapport Afrique N°279, 25 juin 2019.

Afrique australe

Zimbabwe: Stranded in Stasis, Briefing Afrique N°118, 29 février 2016.

Zimbabwe’s “Military-assisted Transition” and Prospects for Recovery, Briefing Afrique N°134, 20 décembre 2017.

Afrique centrale

Tchad : entre ambitions et fragilités, Rapport Afrique N°233, 30 mars 2016 (aussi disponible en anglais).

Burundi : anatomie du troisième mandat, Rap-port Afrique N°235, 20 mai 2016 (aussi dispo-nible en anglais).

Katanga: Tensions in DRC’s Mineral Heartland, Rapport Afrique N°239, 3 août 2016.

Union africaine et crise au Burundi : entre ambi-tion et réalité, Briefing Afrique N°122, 28 sep-tembre 2016 (aussi disponible en anglais).

Boulevard of Broken Dreams: The “Street” and Politics in DR Congo, Briefing Afrique N°123, 13 octobre 2016.

Cameroun : faire face à Boko Haram, Rapport Afrique N°241, 16 novembre 2016 (aussi dis-ponible en anglais).

Boko Haram au Tchad : au-delà de la réponse sécuritaire, Rapport Afrique N°246, 8 mars 2017 (aussi disponible en anglais).

Burundi : l’armée dans la crise, Rapport Afrique N°247, 5 avril 2017 (aussi disponible en an-glais).

Cameroun : la crise anglophone à la croisée des chemins, Rapport Afrique N°250, 2 août 2017 (aussi disponible en anglais).

Eviter le pire en République centrafricaine, Rap-port Afrique N°253, 28 septembre 2017 (aussi disponible en anglais).

Nouveau départ pour les relations entre l’Union africaine et l’Union européenne, Rapport Afrique N°255, 17 octobre 2017 (aussi dispo-nible en anglais).

Cameroun : l’aggravation de la crise anglophone requiert des mesures fortes, Briefing Afrique N°130, 19 octobre 2017 (aussi disponible en anglais).

Extrême-Nord du Cameroun : le casse-tête de la reconstruction en période de conflit, Briefing Afrique N°133, 25 octobre 2017 (aussi dispo-nible en anglais).

Vers une action concertée en RDC, Rapport Afrique N°257, 4 décembre 2017 (aussi dis-ponible en anglais).

Sept priorités pour l’Union africaine en 2018, Briefing Afrique N°135, 17 janvier 2018 (aussi disponible en anglais).

Poker électoral en RD Congo, Rapport Afrique N°259, 4 avril 2018 (aussi disponible en an-glais).

La crise anglophone au Cameroun : comment l’Eglise catholique peut encourager le dia-logue, Briefing Afrique N°138, 26 avril 2018 (aussi disponible en anglais).

Poker électoral en RDC : les enjeux montent, Briefing Afrique N°139, 8 juin 2018 (aussi dis-ponible en anglais).

RDC : l’onde de choc Bemba, Briefing Afrique N°140, 15 juin 2018 (aussi disponible en an-glais).

Extrême-Nord du Cameroun : nouveau chapitre dans la lutte contre Boko Haram, Rapport Afrique N°263, 14 août 2018 (aussi disponible en anglais).

Soutenir la population burundaise face à la crise économique, Rapport Afrique N°264, 31 août 2018 (aussi disponible en anglais).

Election présidentielle au Cameroun : les frac-tures se multiplient, Briefing Afrique N°142, 3 octobre 2018 (aussi disponible en anglais).

Tchad : désamorcer les tensions dans la bande sahélienne, Rapport Afrique N°266, 5 dé-cembre 2018 (aussi disponible en anglais).

Crise anglophone au Cameroun : comment arri-ver aux pourparlers, Rapport Afrique N°272, 2 mai 2019 (aussi disponible en anglais).

Tchad : sortir de la confrontation à Miski, Rap-port Afrique N°274, 17 mai 2019.

Dernier accord de paix en RCA : les conditions du succès, Rapport Afrique N°277, 18 juin 2019 (aussi disponible en anglais).

Burundi : à court d’options, Rapport Afrique N°278, 20 juin 2019 (aussi disponible en an-glais).

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Reprendre en main la ruée vers l’or au Sahel central

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Afrique de l’Ouest

Burkina Faso : transition acte II, Briefing Afrique N°116, 7 janvier 2016.

Mettre en œuvre l’architecture de paix et de sé-curité (III) : l’Afrique de l’Ouest, Rapport Afrique N°234, 14 avril 2016 (aussi disponible en anglais).

Boko Haram sur la défensive ?, Briefing Afrique N°120, 4 mai 2016 (aussi disponible en an-glais).

Nigeria: The Challenge of Military Reform, Rap-port Afrique N°237, 6 juin 2016.

Mali central : la fabrique d’une insurrection ?, Rapport Afrique N°238, 6 juillet 2016 (aussi disponible en anglais).

Burkina Faso : préserver l’équilibre religieux, Rapport Afrique N°240, 6 septembre 2016 (aussi disponible en anglais).

Nigéria : les femmes et Boko Haram, Rapport Afrique N°242, 5 décembre 2016 (aussi dis-ponible en anglais).

Watchmen of Lake Chad: Vigilante Groups Fighting Boko Haram, Rapport Afrique N°244, 23 février 2017.

Le Niger face à Boko Haram : au-delà de la contre-insurrection, Rapport Afrique N°245, 27 février 2017 (aussi disponible en anglais).

Islam et politique au Mali : entre réalité et fiction, Rapport Afrique N°249, 18 juillet 2017.

Une arme à double tranchant : comités de vigi-lance et contre-insurrections africaines, Rap-port Afrique N°251, 7 septembre 2017 (aussi disponible en anglais).

Herders against Farmers: Nigeria’s Expanding Deadly Conflict, Rapport Afrique N°252, 19 septembre 2017.

Nord du Burkina Faso : ce que cache le jihad, Rapport Afrique N°254, 12 octobre 2017 (aus-si disponible en anglais).

Force du G5 Sahel : trouver sa place dans l’embouteillage sécuritaire, Rapport Afrique N°258, 12 décembre 2017 (aussi disponible en anglais).

Preventing Boko Haram Abductions of School-children in Nigeria, Briefing Afrique N°137, 12 avril 2018.

Frontière Niger-Mali : mettre l’outil militaire au service d’une approche politique, Rapport Afrique N°261, 12 juin 2018.

Stopping Nigeria’s Spiralling Farmer-Herder Vio-lence, Rapport Afrique N°262, 26 juillet 2018.

Narcotrafic, violence et politique au Nord du Ma-li, Rapport Afrique N°267, 13 décembre 2018 (aussi disponible en anglais).

Nigeria’s 2019 Elections: Six States to Watch, Rapport Afrique N°268, 21 décembre 2018.

Facing the Challenge of the Islamic State in West Africa Province, Rapport Afrique N°273, 16 mai 2019.

Returning from the Land of Jihad: The Fate of Women Associated with Boko Haram, Rapport Afrique N°275, 21 mai 2019.

Parler aux jihadistes au centre du Mali : le dia-logue est-il possible ?, Rapport Afrique N°276, 28 mai 2019 (aussi disponible en anglais).

Corne de l’Afrique

Ethiopia: Governing the Faithful, Briefing Afrique N°117, 22 février 2016.

Sudan’s Islamists: From Salvation to Survival, Briefing Afrique N°119, 21 mars 2016.

South Sudan’s South: Conflict in the Equatorias, Rapport Afrique N°236, 25 mai 2016.

Kenya’s Coast: Devolution Disappointed, Brief-ing Afrique N°121, 13 juillet 2016.

South Sudan: Rearranging the Chessboard, Rapport Afrique N°243, 20 décembre 2016.

Instruments of Pain (II): Conflict and Famine in South Sudan, Briefing Afrique N°124, 26 avril 2017.

Instruments of Pain (III): Conflict and Famine in Somalia, Briefing Afrique N°125, 9 mai 2017.

Instruments of Pain (IV): The Food Crisis in North East Nigeria, Briefing Afrique N°126, 18 mai 2017.

Kenya’s Rift Valley: Old Wounds, Devolution’s New Anxieties, Rapport Afrique N°248, 30 mai 2017.

Time to Repeal U.S. Sanctions on Sudan?, Briefing Afrique N°127, 22 juin 2017.

A New Roadmap to Make U.S. Sudan Sanctions Relief Work, Briefing Afrique N°128, 29 septembre 2017.

How to Ensure a Credible, Peaceful Presidential Vote in Kenya, Briefing Afrique N°129, 2 octobre 2017.

Managing the Disruptive Aftermath of Somalia’s Worst Terror Attack, Briefing Afrique N°131, 20 octobre 2017.

An Election Delay Can Help Avert Kenya’s Cri-sis, Briefing Afrique N°132, 23 octobre 2017.

Uganda’s Slow Slide into Crisis, Rapport Afrique N°256, 21 novembre 2017.

After Kenya’s Leaders Reconcile, a Tough Path Ahead, Briefing Afrique N°136, 13 mars 2018.

Somalia and the Gulf Crisis, Rapport Afrique N°260, 5 juin 2018.

Averting War in Northern Somalia, Briefing Af-rique N°141, 27 juin 2018.

Al-Shabaab Five Years after Westgate: Still a Menace in East Africa, Rapport Afrique N°265, 21 septembre 2018.

Improving Prospects for a Peaceful Transition in Sudan, Briefing Afrique N°143, 14 janvier 2019.

Managing Ethiopia’s Unsettled Transition, Rap-port Afrique N°269, 21 février 2019.

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Salvaging South Sudan’s Fragile Peace Deal, Rapport Afrique N°270, 13 mars 2019.

Bridging the Gap in the Nile Waters Dispute, Rapport Afrique N°271, 20 mars 2019.

Averting Violence in Zanzibar’s Knife-edge Elec-tion, Briefing Afrique N°144, 11 juin 2019.

Women and Al-Shabaab’s Insurgency, Briefing Afrique N°145, 27 juin 2019.

Time for Ethiopia to Bargain with Sidama over Statehood, Briefing Afrique N°146, 4 juillet 2019.

Somalia-Somaliland: The Perils of Delaying New Talks, Rapport Afrique N°280, 12 juillet 2019.

Safeguarding Sudan’s Revolution, Rapport Af-rique N°281, 21 octobre 2019.

Déjà Vu: Preventing Another Collapse in South Sudan, Briefing Afrique N°147, 4 novembre 2019.

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Annexe D : Conseil d’administration de l’International Crisis Group

PRESIDENT DU CONSEIL

Lord (Mark) Malloch-Brown Ancien vice-secrétaire général des Nations unies et administrateur du Programme des Nations unies pour le développement

PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL

Robert Malley Ancien coordinateur pour le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord et la région du Golfe à la Maison-Blanche

AUTRES MEMBRES DU CONSEIL

Fola Adeola Fondateur et président, FATE Founda-tion

Hushang Ansary Président, Parman Capital Group LLC ; ancien ambassadeur d’Iran aux Etats-Unis et ministre des Finances et des Affaires économiques

Gérard Araud Ancien ambassadeur de France aux États-Unis

Carl Bildt Ancien ministre des Affaires étran-gères de la Suède

Emma Bonino Ancienne ministre italienne des Af-faires étrangères ; ancienne commis-saire européenne pour l’aide humani-taire

Cheryl Carolus Ancienne haute-commissaire de l’Afrique du Sud auprès du Royaume-Uni et secrétaire générale du Congrès national africain (ANC)

Maria Livanos Cattaui Ancienne secrétaire générale à la Chambre de commerce internationale

Ahmed Charai Président-directeur général de Global Media Holding et éditeur de l’hebdomadaire marocain L’Observateur

Nathalie Delapalme Directrice exécutive et membre du conseil de la fondation Mo Ibrahim

Alexander Downer Ancien ministre des Affaires étran-gères d’Australie et haut-commissaire du Royaume-Uni

Sigmar Gabriel Ancien ministre des Affaires étran-gères et vice-chancelier allemand

Robert Fadel Ancien membre du parlement du Liban ; propriétaire et membre du con-seil du groupe ABC

Frank Giustra Président-directeur général, Fiore Group

Hu Shuli Rédactrice en chef de Caixin Media ; professeure à l’université Sun Yat-sen

Mo Ibrahim Fondateur et président, Fondation Mo Ibrahim ; fondateur, Celtel International

Yoriko Kawaguchi Ancienne ministre japonaise des Af-faires étrangères ; ancienne ministre de l’Environnement

Wadah Khanfar Cofondateur, forum Al Sharq ; ancien directeur général du réseau Al Jazeera

Nasser al-Kidwa Président de la fondation Yasser Ara-fat ; ancien médiateur adjoint de l’ONU sur la Syrie

Bert Koenders Ancien ministre néerlandais des Af-faires étrangères et sous-secrétaire général des Nations Unies

Andrey Kortunov Directeur général du Conseil russe pour les affaires internationales

Ivan Krastev Président du Centre pour les straté-gies libérales (Sofia) ; membre fonda-teur du conseil d’administration du Conseil européen des relations inter-nationales

Tzipi Livni Ancienne ministre des Affaires étran-gères et vice-Premier ministre d’Israël

Helge Lund Ancien président-directeur général de BG Group Limited et Statoil ASA

Susana Malcorra Ancienne ministre des Affaires étran-gères d’Argentine

William H. McRaven Amiral retraité de la marine américaine ayant servi comme 9ème commandant du commandement des opérations spéciales américaines

Shivshankar Menon Ancien ministre indien des Affaires étrangères et conseiller à la sécurité nationale

Naz Modirzadeh Directeur du programme sur le droit international et les conflits armés de la faculté de droit de Harvard

Saad Mohseni Président et directeur général de MO-BY Group

Marty Natalegawa Ancien ministre indonésien des Af-faires étrangères, représentant per-manent auprès de l’ONU et ambassa-deur au Royaume-Uni

Ayo Obe Présidente du conseil, Gorée Institute (Sénégal) ; avocate (Nigéria)

Meghan O’Sullivan Ancienne conseillère U.S. adjointe pour la sécurité nationale en Iraq et en Afghanistan

Thomas R. Pickering Ancien sous-secrétaire d’Etat améri-cain ; ambassadeur des Etats-Unis aux Nations unies, en Russie, en Inde, en Israël, au Salvador, au Nigéria et en Jordanie

Ahmed Rashid Auteur et journaliste spécialiste de la politique extérieure, Pakistan

Juan Manuel Santos Calderón Ancien président de la Colombie; Lau-réat du Prix Nobel de la paix 2016

Wendy Sherman Ancienne sous-secrétaire d’État des États-Unis pour les affaires politiques et négotiatrice en chef pour l’accord nucléaire avec l’Iran

Ellen Johnson Sirleaf Ancienne présidente du Libéria

Alexander Soros Membre, Open Society Foundations

George Soros Président, Open Society Institute ; président du Soros Fund Management

Jonas Gahr Støre Chef du Parti travailliste norvégien et du groupe parlementaire du Parti tra-vailliste ; ancien ministre norvégien des Affaires étrangères

Jake Sullivan Ancien directeur du personnel de pla-nification de la politique au départe-ment d’Etat des Etats-Unis ; adjoint suppléant au président Obama et con-seiller à la sécurité nationale au vice-président Biden

Lawrence H. Summers Ancien directeur du Conseil de la sé-curité économique et secrétaire du Trésor des Etats-Unis ; président émé-rite de l’Université de Harvard

Helle Thorning-Schmidt Directrice générale de Save the Chil-dren International ; ancienne Première ministre du Danemark

Wang Jisi Membre du comité de conseil en poli-tique étrangère du ministère des Af-faires étrangères chinois ; ancien di-recteur, Ecole des affaires internatio-nales, Université de Pékin

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Reprendre en main la ruée vers l’or au Sahel central

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CONSEIL PRESIDENTIEL Groupe éminent de donateurs privés et d’entreprises qui apportent un soutien et une expertise essentiels à Crisis Group.

ENTREPRISES

BP

Shearman & Sterling LLP

Statoil (U.K.) Ltd.

White & Case LLP

DONATEURS PRIVES

(5) Anonyme

Scott Bessent

David Brown & Erika Franke

Herman De Bode

Stephen Robert

Luděk Sekyra

Alexander Soros

Ian R. Taylor

CONSEIL CONSULTATIF INTERNATIONAL Donateurs privés et entreprises qui fournissent une contribution essentielle aux activités de prévention des conflits armés de Crisis Group.

ENTREPRISES

Anonyme

APCO Worldwide Inc.

Atlas Copco AB

Chevron

Edelman UK

Eni

HSBC Holdings Plc

MetLife

Noble Energy

RBC Capital Markets

Shell

DONATEURS PRIVES

(3) Anonyme

Mark Bergman

Stanley Bergman & Edward

Bergman

David & Katherine Bradley

Eric Christiansen

Sam Englebardt

The Edelman Family Foundation

Seth & Jane Ginns

Ronald Glickman

David Harding

Geoffrey R. Hoguet &

Ana Luisa Ponti

Geoffrey Hsu

David Jannetti

Faisel Khan

Cleopatra Kitti

Michael & Jackie Lambert

Samantha Lasry

Leslie Lishon

Malcolm Hewitt Wiener

Foundation

The New York Community Trust –

Lise Strickler & Mark Gallogly

Charitable Fund

The Nommontu Foundation

Brian Paes-Braga

Kerry Propper

Duco Sickinghe

Nina K. Solarz

Clayton E. Swisher

Enzo Viscusi

CONSEIL DES AMBASSADEURS Les étoiles montantes de divers horizons qui, avec leur talent et leur expertise, soutiennent la mission de Crisis Group.

Amy Benziger

Tripp Callan

Kivanc Cubukcu

Matthew Devlin

Victoria Ergolavou

Noa Gafni

Christina Bache

Lynda Hammes

Jason Hesse

Dalí ten Hove

Lindsay Iversen

Azim Jamal

Arohi Jain

Christopher Louney

Matthew Magenheim

Madison Malloch-Brown

Megan McGill

Hamesh Mehta

Tara Opalinski

Perfecto Sanchez

Nidhi Sinha

Chloe Squires

Leeanne Su

Bobbi Thomason

AJ Twombly

Dillon Twombly

Annie Verderosa

Zachary Watling

Grant Webster

CONSEILLERS Anciens membres du Conseil d’administration qui maintiennent leur collaboration avec Crisis Group et apportent leurs conseils et soutien (en accord avec toute autre fonction qu’ils peuvent exercer parallèlement).

Martti Ahtisaari Président émérite

George Mitchell Président émérite

Gareth Evans Président émérite

Kenneth Adelman

Adnan Abu-Odeh

HRH Prince Turki al-Faisal

Celso Amorim

Óscar Arias

Richard Armitage

Diego Arria

Zainab Bangura

Nahum Barnea

Kim Beazley

Shlomo Ben-Ami

Christoph Bertram

Lakhdar Brahimi

Kim Campbell

Jorge Castañeda

Joaquim Alberto Chissano

Victor Chu

Mong Joon Chung

Sheila Coronel

Pat Cox

Gianfranco Dell’Alba

Jacques Delors

Alain Destexhe

Mou-Shih Ding

Uffe Ellemann-Jensen

Stanley Fischer

Carla Hills

Swanee Hunt

Wolfgang Ischinger

Aleksander Kwasniewski

Ricardo Lagos

Joanne Leedom-Ackerman

Todung Mulya Lubis

Graça Machel

Jessica T. Mathews

Miklós Németh

Christine Ockrent

Timothy Ong

Roza Otunbayeva

Olara Otunnu

Lord (Christopher) Patten

Surin Pitsuwan

Fidel V. Ramos

Olympia Snowe

Javier Solana