réfrigération congélation - tice.agrocampus-ouest.fr · 4.2 cinétique de congélation ......

21
1 Réfrigération - Congélation Juliane Floury Département Agroalimentaire

Upload: hoangdieu

Post on 31-Oct-2018

221 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

1

Réfrigération -

Congélation

Juliane Floury Département Agroalimentaire

2

1 Généralités et définitions : les traitements par le froid .....................................................................3

2 Principes ................................................................................................................................................4

2.1 Influence de la température sur les cinétiques de croissance des micro-organismes ..............4

2.2 Influence de la température sur les réactions biochimiques (Arrhenius) ....................................4

2.3 Influence de la cristallisation de l’eau sur les micro-organismes ................................................5

Baisse de l’activité de l’eau aw ......................................................................................................5

Détérioration des membranes cellulaires .......................................................................................5

3 Réfrigération .........................................................................................................................................5

4 Congélation ...........................................................................................................................................7

4.1 Formation de la glace .......................................................................................................................7

Nucléation ......................................................................................................................................7

Croissance des cristaux .................................................................................................................7

Dimension des cristaux ..................................................................................................................7

Forme des cristaux ........................................................................................................................7

Recristallisation ..............................................................................................................................8

Température de congélation commençante ...................................................................................8

4.2 Cinétique de congélation et bilan énergétique ............................................................................ 10

Cas de l’eau pure ......................................................................................................................... 10

Cas d’un aliment .......................................................................................................................... 11

4.3 Vitesse de congélation et influence sur les produits .................................................................. 12

Vitesse de congélation ................................................................................................................. 12

Répartition et taille des cristaux ................................................................................................... 12

détermination et optimisation du temps de congélation ............................................................... 13

4.4 Modification des aliments pendant la congélation ; évolution au cours du stockage ............. 14

Modifications survenant dans les espaces liquides résiduels ...................................................... 14

Modification des aliments pendant l’entreposage à l’état congelé ............................................... 15

5 Décongélation ..................................................................................................................................... 16

6 Production de froid ............................................................................................................................. 16

6.1 Production de froid mécanique ..................................................................................................... 16

Cycles à compression .................................................................................................................. 17

Bilans d’énergie ........................................................................................................................... 17

6.2 Fluide frigorigène ........................................................................................................................... 18

6.3 Production de froid cryogénique .................................................................................................. 19

6.4 Conclusion ...................................................................................................................................... 20

6.5 Matériel de congélation .................................................................................................................. 20

Les congélateurs à air discontinus ............................................................................................... 21

Les tunnels à air pulsé ................................................................................................................. 21

Les tunnels à lit fluidisé ................................................................................................................ 21

Les congélateurs à plaques ......................................................................................................... 21

Les congélateurs à tambour ........................................................................................................ 21

7 Bibliographie ....................................................................................................................................... 21

3

1 Généralités et définitions : les traitements par le froid

On ne peut parler des traitements thermiques sans évoquer le rôle de la réfrigération et de la congélation sur la conservation des aliments. Généralement, plus on voudra conserver, stocker longtemps un produit alimentaire, et plus il faudra abaisser la température de stockage (figure 1).

Figure 1 : temps de conservation de quelques aliments en fonction de la température de stockage

La conservation par le froid est divisée en deux groupes principaux : Le terme réfrigération est utilisé pour des températures de stockage supérieures à 0°C. Celui de congélation est employé pour les températures inférieures à 0°C.

Si la réfrigération a pour effet de ralentir les réactions enzymatiques et chimiques, et par conséquent de

ralentir aussi la multiplication et le métabolisme des micro-organismes, elle ne permet qu’une conservation relativement courte (quelques jours).

En effet, des micro-organismes pathogènes se développent encore à 6°C, on peut citer Listeria monocytogenes, Yersina enterolytica et les salmonelles. A cette température, Clostridium botulinum est encore capable de produire ses redoutables toxines. Parmi les germes d’altération, les Pseudomonas, des moisissures et des levures peuvent se développer dans les réfrigérateurs ménagers. Une autre altération est fréquente au froid : le rancissement et l’hydrolyse des matières grasses. La congélation est un terme général désignant le changement d’état d’eau liquide en glace, et consiste

en un abaissement et en un maintien de la température du produit à une température négative de façon à congeler l’eau.

La congélation combine à la diminution de la température, la diminution de la disponibilité de l’eau « libre » des aliments servant à la croissance des micro-organismes, puisqu’une partie de l’eau est sous forme cristallisée. La combinaison de ces deux systèmes permet une conservation longue des aliments (plusieurs mois). Néanmoins le rancissement des acides gras insaturés reste un problème même à –20°C. Nous verrons que la vitesse de congélation ainsi que la température finale de conservation sont des points critiques des procédés de congélation. Ainsi, le terme « surgélation » constitue une sorte de label qui garantit que le produit est congelé « le plus rapidement possible », c'est-à-dire que c’est une congélation effectuée de façon à franchir rapidement la zone de cristallisation et achevée seulement quand la température moyenne du produit atteint –18°C. Nous verrons également que les traitements de réfrigération et de congélation doivent absolument être réalisés sur des aliments sains, aussitôt que possible après les transformations préliminaires (lavage,

4

épluchage, blanchiment, etc.). Enfin le traitement doit être continu jusqu’à la consommation : c’est la chaîne du froid.

2 Principes

2.1 Influence de la température sur les cinétiques de croissance des micro-organismes

Figure 2 : temps de génération moyen de différents groupes de microorganismes en fonction de la

température

Les microorganismes meurent progressivement lorsque les cellules sont placées dans une atmosphère à une température très faible, et la vitesse de décès est en principe d’allure logarithmique. Après un stockage à basse température, les micro-organismes doivent être exposés à une température favorable pendant un temps suffisamment long avant de pouvoir recommencer à se reproduire, à croître activement et normalement. Globalement il faut retenir que les produits congelés sont stables microbiologiquement (par arrêt des réactions métaboliques cellulaires), mais ne sont pas stériles. Microorganismes psychrotrophes : On parle de microorganismes psychrotrophes lorsqu’ils se multiplient activement aux températures de réfrigération couramment utilisées (+6°C), leur température optimale de croissance étant généralement plus élevée (+10,+20°C) ou davantage parfois. Microorganismes psychrophiles : On les dit psychrophiles lorsqu’ils se développent non seulement aux basses températures, mais encore les exigent, et ont leur optimum aux environ de 0°C. Ainsi ce type de microorganisme peut se développer en dessous de –5°C, voire même jusqu’à des températures aussi basses que –10°C. La plupart des moisissures et des levures appartiennent au groupe des microorganismes psychrotrophes, mais heureusement, pratiquement toutes les bactéries pathogènes, sauf exception, ne peuvent plus se reproduire en dessous de +5°C environ. Les coliformes peuvent se développer en dessous de +5°C, voire même jusqu’à 0°C.

2.2 Influence de la température sur les réactions biochimiques (Arrhenius)

La constante de réaction k pour une réaction chimique, biochimique, enzymatique, etc. dépend de nombreux paramètres : le pH, la teneur en eau, mais surtout de la température. L’effet de la température sur la constante de vitesse de réaction est importante et dans la majorité des cas peut être décrit par la loi d’Arrhénius.

5

Constante de vitesse de réaction : RT

E

e.ak

E: énergie d’activation de la réaction (J.mol-1) R : constante des gazs parfaits (8,314 J.mol-1.K-1) T : température absolue (K).

2.3 Influence de la cristallisation de l’eau sur les micro-organismes

Baisse de l’activité de l’eau aw

La transition de phase eau-glace a l’avantage de figer la structure du tissu, et d’isoler l’eau sous la forme de cristaux de glace, eau qui n’est par conséquent plus disponible ni comme solvant, ni comme réactif. La diffusion des autres espèces chimiques au sein du tissu est de ce fait très lente, ce qui contribue, en même temps que l’abaissement de la température, à diminuer la vitesse de la plupart des réactions.

Détérioration des membranes cellulaires

La formation des cristaux de glace a en revanche l’inconvénient d’entraîner souvent une détérioration mécanique de la texture du tissu. En effet, lorsque l’eau se transforme en glace, le volume augmente d’environ 9%. Par la suite, en se refroidissant, la glace subit une légère contraction. Les constituants autres que l’eau, les lipides notamment, se contractent lors de la congélation. Ces variations de volume provoquent des tensions internes pouvant atteindre plusieurs centaines de bars. Dans le cas des fruits et des légumes ces changements de volume, souvent non homogènes, provoquent des déchirures internes ; ils peuvent probablement briser des parois cellulaires et par conséquent être la cause d’une perte de liquide (exsudation) lors de la décongélation. Attention : Le stockage au froid n’est en aucun cas une méthode efficace de conservation des aliments, puisque la croissance des microorganismes psychrophiles et psychrotrophes est au mieux seulement retardée. Si on souhaite stocker des aliments périssables plus de quelques jours, alors il est nécessaire d’améliorer l’effet protecteur des basses températures en introduisant d’autres moyens de nature antimicrobienne (effet destructeur des microorganismes).

3 Réfrigération

Nous venons de voir que le froid arrête ou ralentit l’activité cellulaire, les réactions enzymatiques, le développement des micro-organismes. Il faut refroidir rapidement (cinétique rapide) pour éviter le développement de microorganismes : produit sain froid précoce froid continu

Réalisons le bilan thermique sur un aliment de masse m, de géométrie cubique de face de surface A et de

température , placé dans une enceinte où règne la température e (inférieure à ). La puissance thermique (ou flux de chaleur) échangée entre l’aliment et le milieu extérieur est égale à la quantité de chaleur dQ enlevée au produit pendant l’intervalle de temps dt :

)(AAdt

dQe

Cette expression est appelée première loi de Fourier.

La quantité élémentaire de chaleur dQ perdue par l’aliment de masse m dans l’intervalle de température d

s’écrit quant à elle : dQ = m Cp d où Cp est la chaleur massique de l’aliment (J.kg-1.°C-1).

6

Des deux relations on tire : ) - ( . . m .A

dtd

epC

qui correspond à la vitesse de refroidissement. La relation obtenue montre qu’on peut agir sur trois paramètres principaux pour accélérer le refroidissement :

- essayer d’obtenir une différence de température - e maximum - essayer d’avoir une terme A/m maxi : portionner l’aliment

- essayer d’augmenter le coefficient d’échange de chaleur Constantes physiques de l’eau importantes :

Eau liquide à 20°C : Cpe = 4,18.103 J.kg-1.°C-1

Glace à 0°C : Cpg = 2,1.103 J.kg-1.°C-1 Chaleur latente de congélation de l’eau à 0°C : L = 335. 103 J.kg-1

Ordre de grandeur de la conductibilité thermique de quelques matériaux :

Matière Conductibilité thermique (W.K–1.m–1).

Acier inox 13-73 Aluminium 204 Air (immobile) à 20°C 0.0251 Glace à -10°C 2.33 Eau (immobile) à 20°C 0.597 Aliments 0.2 – 0.6 (selon la teneur en eau)

La réfrigération permet d’étaler dans le temps la mise sur le marché des produits frais et le transport, du lieu de production au lieu de consommation. Elle permet également la maturation des viandes en augmentant la tendreté des fibres musculaires. Cependant, elle enlève parfois au produit de la saveur. Elle provoque aussi la perte des vitamines oxydables, en particulier de la vitamine C.

7

4 Congélation

Pouvoir de conservation a deux effets : (a) Elimination de l’eau liquide transformée en glace, entravant toute activité microbiologique et

ralentissant considérablement les activités enzymatiques. (b) Effet thermique avec refroidissement des produits traités jusqu’à des zones de températures pour

lesquelles toutes les activités biologiques sont très réduites.

4.1 Formation de la glace

Nucléation

On sait que la température de fusion de la glace est, à la pression ordinaire de 0°C. Dans le sens inverse toutefois, c’est-à-dire lorsque l’eau pure est refroidie progressivement, la congélation ne se produit pas dès que la température atteint 0°C ; la formation de cristaux (de glace), ou nucléation, est toujours précédée d’un phénomène qu’on appelle surfusion. Autrement dit l’eau reste pendant un certain temps à l’état liquide à une température inférieure à celle du point de fusion. Ce phénomène de surfusion s’observe aussi avec diverses solutions aqueuses. La nucléation est favorisée par la présence de cristaux de divers sels insolubles, ou de particules solides de nature variée (poussière par ex). Dans les aliments c’est toujours à une telle nucléation hétérogène que l’on, a affaire, de telle sorte que la surfusion est relativement faible.

Croissance des cristaux

La croissance des cristaux de glace résulte du fait que des molécules d’eau migrent dans le milieu et viennent s’agréger à un germe existant. Elle peut avoir lieu même à une température proche du point de congélation. En pratique, dans les aliments, la vitesse de croissance des cristaux de glace dépend de la vitesse de

l’enlèvement de la chaleur (ou vitesse de refroidissement d /dt). Avec les produits alimentaires, la concentration agit dans le même sens : des substances en solution, telles que sels, alcools, sucres, protéines, … ralentissent la croissance des cristaux de glace :

Température (°C) Vitesse de croissance du cristal (mm/sec)

Eau NaCl 0.1M Ethanol 0.1 M Saccharose 0.1M

-9.1

61 41 29 6.6

Dimension des cristaux

La dimension des cristaux de glace à la fin de la congélation dépend du nombre de germes cristallins formés à l’origine dans le milieu liquide. Par conséquent la régulation de la nucléation par la température permet d’obtenir des cristaux de la taille souhaitée :

- à basse température la nucléation est rapide, et les nombreux germes donnent naissance à une multitude de cristaux de petite taille ;

- à une température proche du point de fusion, au contraire, la nucléation est lente, les noyaux cristallins sont peu nombreux, et il en résulte des cristaux de (relativement) grande taille.

Forme des cristaux

La forme des cristaux de glace (sphérulites, rosettes, dendrites, plaquettes ou étoiles hexagonales, …) a été étudiée au microscope. Elle dépend de la vitesse de croissance des cristaux, donc de la température de congélation : une congélation rapide produit des cristaux plus ou moins arrondis, une congélation lente des cristaux allongés, en forme d’aiguille.

8

Recristallisation

Au cours de l’entreposage à l’état congelé, le système cristallin évolue par suite de phénomène de recristallisation : certains cristaux de glace s’agrandissent au dépens de cristaux plus petits qui disparaissent ; les cristaux de taille inférieure à 2µm sont particulièrement instables.

Température de congélation commençante

Si on représente les variations, au cours de la congélation, de la température de l’eau pure et d’une solution aqueuse diluée, on obtient des courbes comme celles de la figure 3.

Congélation : température de congélation

commençante

Temps ou quantité

de chaleur enlevée

Température

0°CS

S

Eau pure

Solution diluéedébut

fin de

congélation

Temps ou quantité

de chaleur enlevée

Température

0°CS

S

Eau pure

Solution diluéedébut

fin de

congélation

• Courbes de congélation de l’eau et d’une solution aqueuse

Figure 3 : courbes de congélation de l’eau et d’une solution aqueuse

Dans le cas de l’eau pure, après surfusion (point S), la formation de cristaux de glace intervient et libère de la chaleur ; la température remonte à 0°C et reste constante pendant toute la durée de la cristallisation ; lorsque toute l’eau est transformée en glace, l’abaissement de la température reprend, à une allure plus rapide qu’au début car la chaleur spécifique de la glace est inférieure à celle de l’eau. Dans le cas d’une solution diluée, la température de début de congélation est inférieure à 0°C. Cet abaissement cryoscopique est inversement proportionnel à la fraction molaire de l’eau dans la solution : c’est la loi de l’abaissement cryoscopique de Raoult. Lorsque la substance en solution dans la phase liquide atteint le point de saturation, il se produit une cristallisation simultanée de glace et de la substance en cause. Le mélange qui cristallise alors présente une composition constante correspondant à la concentration saturante et s’appelle mélange eutectique. La température de fin de congélation, dite température eutectique ou cryohydrique, est une caractéristique invariable pour un soluté donné, et demeure constante pendant toute la durée de cristallisation du mélange eutectique.

Quelques ordres de grandeurs de température de congélation commençantes :

Aliments température de congélation commençante

Viandes, poissons Petits pois

Poires Concentré de jus d’orange, 80°Brix

Concentré de jus de pommes, 80°Brix

-1°C -1.1°C -2.4°C -6°C

-10°C

9

Diagramme de phases

(°C)

Eutectique (~corps pur) +

Cristaux de glace ou de soluté

(figé)

Courbe de congélation

Courbe de

cristallisation

e

Concentration (%)Ce

Cristaux de soluté

+ solution saturéeCristaux de glace + solution

saturée

Diagramme de phases

(°C)

Eutectique (~corps pur) +

Cristaux de glace ou de soluté

(figé)

Courbe de congélation

Courbe de

cristallisation

e

Concentration (%)Ce

Cristaux de soluté

+ solution saturéeCristaux de glace + solution

saturée

Figure 4 : diagramme de phases d’un mélange binaire simple

La figure 4 représente le diagramme de phases d’un mélange binaire simple (par exemple mélange saccharose/eau).

- La courbe 1 est la courbe des points de congélation (équilibre entre glace et solution) ; - La ligne 2 la courbe de solubilité ou de saturation (équilibre entre saccharose solide et solution), - Le point d’intersection des deux courbes est le point eutectique.

Dans le cas des aliments, on observe rarement une transformation eutectique franche : la température de « fin de congélation » (congélation totale de l’eau congelable, ou solidification maximum) d’un aliment, ou d’un tissu animal ou végétal, est en général inférieure à la température de l’eutectique le plus bas. Le tableau ci-dessous indique les températures de début de congélation et de « fin de congélation » de quelques solutions simples et de quelques aliments :

Solution ou Aliment Température de

début de congélation (°C) fin de congélation (°C) NaCl 1M NaCl 2M Saccharose 1M Saccharose 2M Poisson, viande (muscle) Fruits, légumes Lait, œufs Pain

-3.37 -6.9

-2.06 -4.6

-0.8 à –1 -0.5 à –3

-0.5

-21.13 (eutectique, 5.7 M = 22.4% en poids)

-9.5 (eutectique, 56.2% en poids)

-55

-70

Lorsqu’on mesure la variation de la température d’un aliment au cours de la congélation, on obtient des courbes assez régulières où le début de congélation et les divers eutectiques n’apparaissent généralement pas. De plus, l’allure des courbes dépend non seulement des caractéristiques du produit, mais aussi de la vitesse d’enlèvement de la chaleur (voir suite du cours) :

10

0°C

temps

Refroidissement

lent

Courbe de congélation : comparaison entre refroidissement

lent et refroidissement rapide.

Refroidissement

rapide

Figure 5 : courbes de congélation : comparaison entre refroidissement lent et refroidissement rapide

La formation des eutectiques successifs a lieu lorsque la température est inférieure à 0°C, elle s’accompagne d’une forte augmentation de la concentration des solutés qui ne sont pas encore à saturation. L’abaissement plus rapide de la température (voir deuxième partie de la courbe < 0°C) est dû au moindre dégagement de chaleur latente de fusion. A la température habituelle d’entreposage des aliments congelés –18°C), une partie non négligeable de l’eau congelable est encore à l’état liquide (2 à 15%) et possède des propriétés de solvant et de réactif. Certaines des réactions de détérioration qui se poursuivent ou qui interviennent spécifiquement dans les produits congelés sont dues à l’existence d’espaces liquides résiduels à concentration élevée en solutés ; il serait par conséquent recommandable, dans bien des cas, de faire appel à des températures d’entreposage inférieures à –18°C. La congélation lente conduit à la formation de cristaux de glace très pure, par conséquent à une concentration en solutés, dans les espaces liquides résiduels, plus élevée que lors de la congélation rapide.

4.2 Cinétique de congélation et bilan énergétique

La puissance frigorifique nécessaire est définie par la quantité de chaleur à enlever par unité de temps (J.s-1 ou W). Cette valeur intervient notamment dans le dimensionnement d’un congélateur par exemple.

Cas de l’eau pure

Si on congèle de l’eau pure par l’intermédiaire d’un fluide frigorifique de température T , on observe 3 phases :

0°C

temps

Eau

liquide

Mélange

eau/glace Glace

Evolution de la température lors de la fusion de l’eau pure

surfusion

Chaleur

sensible

Chaleur latente

de congélation Chaleur

sensible

Figure 6 : évolution de la température lors de la fusion de l’eau pure

11

Bilan énergétique : Phase I : Refroidissement de la température initiale de l’eau jusqu’à une température légèrement inférieure au point de fusion (0°C) (extraction de chaleur sensible).

..CpmQ1

avec Cp : chaleur spécifique de l’eau Phase II : Palier de température au point de fusion pendant toute la durée du processus de changement d’état. Seule de la chaleur latente de changement d’état est absorbée par le milieu frigorifique et l’eau se trouve en équilibre biphasique eau liquide-glace.

LmQ .2

avec L : chaleur latente de fusion Phase III : Lorsque le changement d’état est complet, refroidissement de la glace, d’autant plus rapide que la diffusivité thermique de l’eau a considérablement augmenté au cours du changement d’état ; la température

de la glace décroît alors de manière asymptotique pour tendre vers T .

.'. pCmQ3

avec C’p : chaleur spécifique de la glace

Cas d’un aliment

0°C

temps

Pseudo

palier

Courbe de refroidissement d’une solution (eau+solutés) ou d’un aliment.

c

Température de fusion

commençante

Chaleur

sensible

Chaleur latente

de congélation Chaleur

sensible

Figure 7 : courbe de refroidissement d’une solution (eau+solutés) ou d’un aliment.

Par rapport à la courbe de congélation de l’eau pure, celle de la solution diluée présente deux différences essentielles : - la température de fusion est inférieure à celle de l’eau et l’écart entre le point de fusion de la solution et

celui de l’eau est d’autant plus important que la solution est plus concentrée (d’après la loi de l’abaissement cryoscopique de Raoult). A ce stade la congélation donne lieu à la formation de cristaux de glace pure (ou presque pure).

- Au fur et à mesure que la glace se forme, le soluté se concentre dans la phase liquide (cryoconcentration). Le point de fusion de la solution baisse donc en même temps que la concentration augmente (selon la loi de Raoult): on parle de température de congélation commençante.

- D’autre part, l’allure du palier de changement d’état est perturbée par le glissement progressif du point de fusion : au fur et à mesure que celui-ci diminue, la température de la solution diminue, à tel point qu’on ne peut plus parler de palier, on a en réalité un « pseudo-palier » plus ou moins visible, qui n’est qu’une simple zone de ralentissement de la chute de température.

- Lorsque la substance en solution dans la phase liquide atteint le point de saturation, il se produit une cristallisation simultanée de la glace et de la substance en cause. Le mélange qui cristallise alors

12

présente une composition constante correspondant à la concentration saturante et s’appelle mélange eutectique. La température de fin de congélation, dite température eutectique

Etant donné que l’on désire calculer la puissance frigorifique nécessaire par unité de temps, il faut connaître la quantité d’aliment que l’on se propose de congeler par unité de temps. De plus, il est conseillé de considérer 3 constituants :

- l’eau, - la matière grasse - et les autres (protéines, sucres, minéraux).

A noter que la conductivité thermique de la glace est 4 fois plus élevée que celle de l’eau ( g = 2.21 W.m-1.K-

1 et eau = 0.569 W.m-1.K-1 à 0°C).

4.3 Vitesse de congélation et influence sur les produits

Vitesse de congélation

La vitesse de congélation dépend principalement de la différence de température entre le produit à congeler et le milieu réfrigérant. Le tableau ci-dessous donne quelques exemples :

Vitesse de congélation

Vitesse d’abaissement de la température du produit

Appareillage

Lente 2°C / min Congélateur domestique (air stagnant à –18°C)

Rapide 10 à 100 °C / min Tunnel à air froid (ex : air à –40°C circulant à 20 km.h-1)

Ultra-rapide 1000 à 10000 °C / min Bain d’isopentane liquide (refroidi par de l’azote liquide*)

*le fréon, et encore moins l’azote liquide, ne permettent pas d’atteindre ces vitesses car ils donnent naissance, entre le bain et le produit, à une couche gazeuse qui ralentit les échanges thermiques

Répartition et taille des cristaux

C’est la vitesse de congélation qui détermine la distribution des cristaux dans les tissus. En effet, en pratique dans un aliment, la vitesse de croissance des cristaux de glace dépend de la vitesse de l’enlèvement de la chaleur, c'est-à-dire de la différence de température entre le cristal et le milieu qui l’entoure. Si la congélation est lente (< 1°C/min), la cristallisation extracellulaire, qui accroît la concentration locale en solutés, provoque une déshydratation progressive des cellules par osmose : l’effet de cryoconcentration qui se produit à l’extérieur des cellules se traduit par un déséquilibre osmotique (la force ionique et la pression osmotique du milieu extérieur sont plus élevées qu’à l’intérieur des cellules) et une migration d’eau vers l’extérieur, desséchant ainsi la cellule. Ce déplacement de l’eau, qui peut devenir irréversible s’il dépasse un certain niveau, explique en grande partie la baisse de turgescence, le décollement des tissus et l’exsudation d’eau que l’on observe lors de la décongélation de nombreux aliments ; il est la cause principale de l’amollissement des tissus végétaux. De gros cristaux de glace se forment et élargissent les espaces extracellulaires, tandis que les cellules plasmolysées diminuent considérablement de volume.

Cristal de glace

Congélation lente : développement progressif de cristaux de glace dans les tissus

Ces gros cristaux entraînent une compression mécanique tendant à écraser les cellules.

13

Lorsque la congélation est rapide, la cristallisation se produit à peu près simultanément dans les espaces extracellulaires et à l’intérieur des cellules. Le déplacement d’eau est faible, et il se produit un très grand nombre de petits cristaux. Les phénomènes cités sont alors beaucoup moins marqués et les tissus sont beaucoup moins endommagés. Les modifications de texture liées à la sortie d’eau des cellules par osmose sont nettement moindres que lors de la congélation lente. Lors de la décongélation, les produits ayant été congelés rapidement largueront beaucoup moins d’exsudats que des produits congelés lentement dont les tissus auront été désorganisés.

détermination et optimisation du temps de congélation

Nous venons de voir que le paramètre principal qui va déterminer la qualité ultérieure du produit congelé est la vitesse de congélation, ou temps de congélation. Comment arriver à minimiser ce temps de congélation ? On s’intéressera ici à la durée de la congélation, et plus particulièrement à celle du palier de congélation correspondant à la formation de glace. Cette étape est en effet une phase critique pour laquelle la qualité finale du produit, qui on l’a vu précédemment, sera d’autant meilleure qu’elle sera rapide. Les phénomènes de transferts de chaleur dans un produit alimentaire sont gouvernés principalement :

- par la puissance de la machine frigorifique utilisée pour congeler le produit,

- par les caractéristiques du produit (taille, masse volumique , chaleur latente de congélation,

conductibilité thermique à l’état congelé c). A des fins de simplifications, on supposera que le produit se présente sous la forme de plaques planes d’épaisseur 2e faibles devant les autres dimensions (longueur et largeur), qui peuvent donc être assimilées à des plaques infinies de surface A. La température initiale de la plaque est supposée uniforme et égale à la

température de congélation commençante du produit ( c). La figure suivante schématise la plaque considérée en cours de congélation.

Détermination du temps de congélation

• Modèle de la plaque plane infinie

position

Couche

limiteFront de

congélation

e

e

c

CL

x

g g

dt . ) - ( . . A dQ ec

L . .dx . A dQ

En dt, il passe dQ :

Front de congélation avance de dx :

gCL

x 1 1

dQ

2.e e

) - (L .

tg

2

CLec

dx

Détermination du temps de congélation

• Modèle de la plaque plane infinie

position

Couche

limiteFront de

congélation

e

e

c

CL

x

g g

dt . ) - ( . . A dQ ec

L . .dx . A dQ

En dt, il passe dQ :

Front de congélation avance de dx :

gCL

x 1 1

dQ

2.e e

) - (L .

tg

2

CLec

dx

Figure 8 : calcul du temps de congélation dans le modèle de la plaque infinie

Cette équation est appelée formule de Planck. Elle est relativement approximative (puisqu’elle ne tient pas compte des phases de refroidissement), mais elle permet de mettre en évidence l’influence des principaux facteurs sur le temps de congélation. D’après cette formule, suivant les caractéristiques du produit et le mode de congélation utilisé, l’importance

des deux termes cl

1et

g

e

2 est variable, et donc on pourra jouer sur le temps de palier t.

Afin de réduire la durée du palier de congélation, il est possible de :

14

- augmenter l’écart de température entre le milieu extérieur (température de l’air a ) et la température de

congélation commençante du produit ( c) - diminuer l’épaisseur 2e du produit

- augmenter le coefficient de transfert de chaleur cl de la couche limite autour du produit (figure 9).

On subit en revanche l’influence des facteurs intrinsèques à la composition du produit : , g, Lc.

Modes de congélation - 1

• Réduire t congélation : e, ou

• Quelques valeurs de dans différentes conditions d’échange

Fluide (W.m-2.K-1)

Air calme 3 à 23 (selon Hr)

Air en mouvement 10 à 102

Tunnel de congélation 20 à 35

Lit fluidisé par de l’air 30 à 60

Eau calme 3.102

Eau agitée 103 à 2,3.103

Saumure 9.102

Modes de congélation - 2

-25

-20

-15

-10

-5

0

5

10

15

0 50 100 150 200 250

temps (min)

(°C

)

Air statique

Air pulséSaumure

Figure 9 : influence du mode de congélation sur le temps de palier

La démarche présentée ici pour une plaque plane est généralisable à d’autres modèles géométriques, et on démontre de la même manière que la durée du palier de congélation est égale

à :gclac

c RRLt

2

1

2dans le cas d’un cylindre infini de rayon R,

et à: gclac

c RRLt

2

1

3dans le cas d’une sphère de rayon R.

Pour un produit emballé, il faudra aussi inclure la résistance thermique de l’emballage (e’/ ’). Il est également possible de tenir compte des volumes non remplis à l’intérieur de l’emballage.

4.4 Modification des aliments pendant la congélation ; évolution au cours du stockage

Modifications survenant dans les espaces liquides résiduels

Il a été indiqué précédemment que l’une des conséquences de la congélation est d’accroître la concentration, dans les espaces liquides des aliments, des solutés présents. Les modifications physicochimiques consécutives à la cryoconcentration sont principalement :

15

- une augmentation de la concentration des sels - et une baisse de pH due à l’augmentation de la FI.

Ces modifications vont entraîner une diminution de la solubilité des macromolécules protéiques (par exemple les caséines du lait, les lipoprotéines du jaune d’œuf), la stabilité des éléments dispersés à l’état colloïdal ou globulaire (agrégation des globules gras dans les produits laitiers congelés). C’est à une semblable agrégation de l’actomyiosine que l’on attribue en partie la baisse du pouvoir de rétention d’eau, et par conséquent le durcissement de la texture et de la sécheresse à la mastication, du muscle de poisson conservé à l’état congelé. Des sels et des sucres peuvent aussi être précipités (lactose dans la crème glacée). Il peut résulter de toutes ces modifications une déstabilisation à la décongélation.

Modification des aliments pendant l’entreposage à l’état congelé

Les aliments congelés ne sont pas inertes. Leur qualité baisse progressivement au cours de l’entreposage en raison de modifications chimiques et physiques.

Durée d’entreposage

Le tableau ci-dessous indique approximativement les durées maximales de conservation que l’on peut atteindre pour divers aliments, tout en maintenant leur qualité à un niveau satisfaisant (dans des conditions adéquates d’emballage).

Température d’entreposage -30°C -18°C -12°C -7°C

mois

Jus d’orange Fraises (avec sucre) Haricots verts Petits pois Epinards Poulet éviscéré Poulet rôti Muscle de bœuf Muscle de porc Poisson maigre Poisson gras

- -

24 24 24 -

14 24 15 8 5

10 12 10 10 10 7 3

13 8

3 à 5 2

4 2.4 3 3

<3 3

<1 5

<4 <2

<1.5

- 0.3 1 1

0.7 -

<0.6 <2

<1.5 <1.5 0.8

On voit que la durée de conservation dépend de façon considérable de la température ; elle varie dans un rapport à peu près inversement exponentiel avec la température de la chambre frigorifique.

Réactions de détérioration

Même congelé et entreposé dans de bonnes conditions, un produit ne peut se conserver indéfiniment : sa qualité se dégrade au fil des semaines en raison d’un certains nombre de processus dont celui qui est détecté le plus rapidement est le processus limitant : apparition d’un goût de rance, altération de la couleur, perte de valeur nutritionnelle, etc. Certaines des réactions de détérioration intervenant lors de l’entreposage des aliments sont catalysées par des enzymes. C’est le cas principalement du brunissement enzymatique des fruits que l’on conserve à l’état cru. L’addition d’acide ascorbique, de sucre ou d’anhydride sulfureux permet d’ inhiber ce brunissement tant avant qu’après la congélation. Parmi les réactions non enzymatiques dont les aliments congelés peuvent être le siège, on doit mentionner l’oxydation des lipides (poissons gras, petits pois), de la vitamine C (fraise), de pigments caroténoïdes, d’arômes. L’agrégation des protéines musculaires du poisson, et dans une moindre mesure de la viande, encouragée par un entreposage prolongé à une température insuffisamment basse, provoque une exsudation accrue à la décongélation et un durcissement de la texture.

16

5 Décongélation

La décongélation d’un aliment est plus lente que la congélation car il se forme à la surface puis dans les couches externes du produit, du fait de la décongélation, une couche liquide aqueuse. Or la conductivité thermique de l’eau est environ 4 fois moindre que celle de la glace, qui conduit d’autant mieux la chaleur qu’elle est plus froide. Il s’ensuit que lors de la décongélation la masse congelée est portée assez rapidement à une température de peu inférieure à 0°C, mais qu’ensuite la quantité importante de chaleur nécessaire à la fusion n’est transmise que lentement à travers la couche aqueuse qui s’est formée extérieurement. Et pendant ce temps, le produit reste près de 0°C, ce qui n’est guère favorable. En effet : - le produit est alors exposé à des concentrations relativement élevées de solutés ; - les cristaux de glace s’agrandissent ; - le développement de micro-organismes psychrophiles est facilité par la richesse de l’exsudat en composés nutritifs. C’est d’ailleurs un inconvénient fréquent des étalages de vente au détail. Il est donc préférable de décongeler rapidement. Cela ne présente pas de difficulté avec les légumes, que l’on plonge dans l’eau bouillante, ou avec des morceaux de petite taille de viande ou de poisson, que l’on peut cuire sans les décongeler au préalable. L’opération est toutefois moins facile dans le cas des fruits ou de gros morceaux de viande ou de poisson. Les fruits sont généralement décongelés à la température ambiante ; pour les viandes on a recours de préférence à la décongélation dans un réfrigérateur à < 10°C, ou dans l’eau courante, afin d’éviter une prolifération trop rapide de micro-organismes, et aussi de réduire l’exsudation. La décongélation par chauffage diélectrique présenterait de grands avantages, si le manque d’homogénéité de structure de la plupart des aliments n’avait pour conséquence de laisser certaines parties à l’état congelé tandis que des compartiments liquides sont surchauffés. Pour une remontée en température rapide, on peut utiliser le four à micro-ondes, mais pour un produit homogène sinon il y aura des variations de vitesse de décongélation entre les différentes parties. Par ailleurs, il faut utiliser de faibles puissances avec de brefs intervalles. De cette façon, on évite un décalage de décongélation entre l’intérieur et l’extérieur du produit.

6 Production de froid

Produire du froid, c’est transférer de la chaleur, donc de l’énergie, d’un corps solide, liquide ou gazeux, provoquant ainsi une baisse de la température de ce corps, à un autre corps ou à un milieu composé de plusieurs éléments, dont la température sera élevée d’autant. De nombreux phénomènes (endothermiques) peuvent être utilisés pour produire du froid : - réactions chimiques - transfert de chaleur du au changement d’état d’un corps (fusion, sublimation)

Dans ce cas on utilise entre autres la chaleur latente du corps, c’est-à-dire l’énergie dégagée ou absorbée pour passer d’un état solide ou liquide à un autre état physique.

- détente d’un gaz préalablement comprimé qui provoque une augmentation du volume de gaz et par suite une diminution de sa pression. Cette détente produit du froid.

Les deux techniques utilisées à l’heure actuelle pour la production du froid sont le froid mécanique et le froid cryogénique.

6.1 Production de froid mécanique

Le froid mécanique ou machine frigorifique utilise la vaporisation d’un fluide frigorigène. La surgélation mécanique fait appel au pouvoir d’évaporation à basse température d’un liquide frigorigène, qui absorbe au sein d’un évaporateur la chaleur dégagée par le fluide vecteur utilisé, le plus souvent l’air, et implique l’utilisation d’un compresseur, d’où l’appellation de « froid mécanique ».

17

Le froid mécanique est à produire sur chaque installation et en quasi permanence. Il entraîne un investissement spécifiques et une consommation d’énergie électrique quasi-permanente.

Cycles à compression

Ce procédé consiste à comprimer un gaz et à le liquéfier, ce qui entraîne une production de chaleur éliminée dans le milieu ambiant par un échangeur, puis à faire circuler ce liquide dans un évaporateur, placé dans une enceinte fermée. Le gaz obtenu revient au compresseur où il est à nouveau comprimé puis transformé en liquide par refroidissement dans l’échangeur. Dans cas des systèmes à compression, le fluide frigorigène est comprimé mécaniquement puis conduit à un échangeur où il se liquéfie.

Figure 10 : schéma de principe d’une machine frigorifique et diagramme enthalpique p,H

Ce cycle à compression est constitué de deux échangeurs : l’évaporateur et le condenseur. Partant d’une basse pression au point 1 (P1, T1), le fluide est comprimé jusqu’à la pression P2. Au cours

de cette compression, le fluide s’échauffe jusqu’à la température T2. A partir du point 2, le fluide passe dans un condenseur qui en récupérant une partie de la chaleur, fait

passer la température du fluide de T2 vers T4, température de condensation, en passant par l’étape 3. La pression est toujours de P2. Le fluide se liquéfie alors à température constante. Le condenseur sous-

refroidie alors le liquide frigorigène (passage de 3 à 4). Au point 4, le liquide passe par une vanne de détente où il subit une chute de pression de P2 à P1. La

détente provoque alors une vaporisation partielle. Au point 5, le mélange liquide-gaz passe par l’évaporateur qui rend possible la vaporisation totale en

prenant la chaleur nécessaire au milieu ambiant (l’enceinte à refroidir). Le fluide arrive alors au point 1 à la pression P1 et la température T1.

Bilans d’énergie

Pour des calculs simplifiés, on considérera le diagramme p=f(H) du fluide frigorigène considéré.

Pour une puissance frigorifique de 10 kW, avec un débit de frigorigène m , on aura les relations suivantes : - évaporateur : )H(Hm10kWQ 4122

- compresseur : )H(HmW 122théorique l’énergie fournie au cycle provient du compresseur.

- condenseur : )H(HmQ 231

Le coefficient de performance théorique : COP th = Q2/Wthéorique = (h1 - h5 ) / (h2 - h1 ) avec h1 - h5 : effet frigorifique Connaissant le COP du système moteur-compresseur (COPc = T1 / (T2 - T1)), on en déduit le rendement de

la pompe à chaleur : = COP th / COP c.

18

6.2 Fluide frigorigène

Le choix du fluide frigorigène se fera en fonction : - des propriétés thermodynamiques : température d’ébullition (basse), chaleur latente d’évaporation,

exposant polytropique (cp/cv). Elles doivent être cohérentes avec la faisabilité technique (température de condensation disponible, taux de compression) ;

- des critères de sécurité : inflammabilité, toxicité, influence sur la couche d’ozone et l’effet de serre, action sur les produits réfrigérés, détection (fuites) ;

- les données techniques : stabilité, corrosion avec matériaux ; action de l’eau, des lubrifiants ; conductivité thermique élevée ;

- des données économiques : coût, disponibilité ; maintenance ; statut légal. Tout produit pouvant s’évaporer dans les conditions de température exigées est un frigorigène potentiel. Par exemple pour l’eau, des températures faibles signifient de très basses pressions, avec un très faible masse volumique. Cela implique un compresseur de grande taille : l’eau est rarement utilisée. L’ammoniac (NH3), efficace et bon marché, est cependant toxique et inflammable dans certaines conditions. On l’utilise de plus en plus souvent dans les nouvelles installations frigorifiques. C’est un liquide incolore, à l’odeur acre. Une teneur de 0.2 à 0.3% dans l’air peut entraîner la mort. Une teneur de plus de 1% entraîne des dommages sur les fruits et légumes. Mais c’est un fluide qui n’est pas très polluant et qui s’utilise surtout à cause de son prix. L’utilisation des CFC (chlorofluorocarbones) est interdite pour les nouvelles installations du fait de leur longue durée de vie dans l’atmosphère et de leur réactivité avec l’ozone. Les composés HCFC (hydrochlorofluorocarbone, il y a remplacement partiel des atomes de chlore par de l’hydrogène) devront également être remplacés en 2020. Les recherches concernent de nouveaux mélanges, mais aussi l’amélioration de la gestion des groupes froid et la récupération des frigorigènes.

Compresseur

Les plus courants sont volumétriques, à piston (80 à 90% des compresseurs utilisés), à plusieurs cylindres, avec des clapets. Les compresseurs à vis (sans clapet) sont moins flexibles car ils supposent une demande en froid constante. Ils sont composés de deux rotors, l’un avec des lobes et l’autre avec des alvéoles. Au cours de la rotation, le gaz emprisonné entre les deux rotors est comprimé par réduction de l’espace disponible. Les turbocompresseurs (centrifuges) concernent de gros volumes, avec de faibles taux de compression. Ils sont adaptés au conditionnement d’air. Les groupes moteur-compresseur sont ouverts ou hermétiques (réfrigérateur ménager).

Condenseur

Le condenseur est un échangeur thermique dont le rôle est de faire passer le fluide frigorigène de l’état gazeux à l’état liquide par évacuation de la chaleur latente. Le gaz frigorigène est donc le fluide chaud. Comme fluide froid on utilise soit l’air, soit l’eau. Ces échangeurs de chaleur fonctionnent avec comme fluide de refroidissement :

de l’air en convection naturelle (réfrigérateur ménager) ou forcée (avec ventilateur) ; Les condenseurs à air conviennent aux petites installations mais nécessitent une surface d’échange

importante et un débit important ( mAQ ).

de l’eau par convection (installation taille moyenne) ou par évaporation. Le coefficient de transfert étant plus élevé, ils seront plus compacts. Les condenseurs à eau possèdent un meilleur coefficient

d’échange mais le fonctionnement à eau perdue entraîne des frais important de fonctionnement. Souvent l’eau est recyclée après refroidissement dans des tours de refroidissement.

19

Evaporateur

L’évaporateur est l’échangeur thermique le plus important du cycle de production de froid puisque c’est le point de production du froid dans le système frigorifique. C’est son efficacité qui détermine l’efficacité de toute l’installation frigorifique. Son rôle est de refroidir soit l’air de la chambre froide, soit l’eau glycolée pour le froid indirect, soit directement l’aliment placé à sa surface d’échange. Le transfert de froid répond toujours à la même loi que tous les transferts de chaleur (Fourier) :

mAQ

L’efficacité dépend de , donc du fluide utilisé (air, eau glycolée, ou conduction) et des autres caractéristiques de l’installation. Elle dépend directement de l’écart de température et de la surface d’échange. Comme tous les échangeurs, les évaporateurs sont sensibles à l’encrassage, et dans le cas du froid, on observe très souvent un givrage (dû à l’humidité de l’air) qui nuit au transfert thermique et empêche la circulation d’air. Il se produit si la pression partielle de vapeur d’eau dans l’air est supérieure à la pression de saturation de la glace à la température de la surface extérieure de l’évaporateur. Minimiser le givrage revient à : - minimiser l’évaporation d’eau du produit stocké (présence d’un emballage) - réduire l’écart de température entre air et frigorigène (compromis à trouver avec la surface

d’échange) - contrôler l’entrée d’air humide (limiter l’ouverture des portes en chambre froide, disposer des

antichambres) et la fuite d’air froid.

Détendeur

Il assure le passage du frigorigène de la haute à la basse pression par laminage et permet de régler l’alimentation de l’évaporateur en frigorigène. C’est souvent l’actionneur principal du contrôle automatique du circuit frigorifique. Plusieurs types existent : thermostatiques, pressostatiques, à flotteur, électriques et électroniques.

Autres éléments du circuit frigorifique

Des réservoirs (« bouteilles ») permettent de stocker le frigorigène liquide, par exemple entre le condenseur et le détendeur. Des pompes à frigorigène sont utilisées pour les déplacements sur de grande longueur. On trouve aussi des séparateurs d’huile, des filtres, des absorbeurs d’eau (desséchant), divers robinets (purge, isolement), des échangeurs de chaleur interne, des instruments de mesure, etc.

6.3 Production de froid cryogénique

Le procédé cryogénique ne fait appel à aucune installation frigorifique. Il met en jeu un contact direct entre le fluide cryogénique et le produit. Cette technique utilise les propriétés liées au changement de phase des gaz, comme le dioxyde de carbone (CO2) et l’azote liquide (N2) pour obtenir des températures très basses. Le froid est dans ce cas produit par détente, à pression atmosphérique, de ce fluide cryogénique. Des injecteurs pulvérisent directement dans les caissons le fluide cryogéniques qui se vaporise avant d’être ensuite réparti uniformément dans l’enceinte par des turbines. Cette vaporisation absorbe de la chaleur : c’est une réaction endothermique. Le froid cryogénique est acheté en bouteille. Il est consommé comme matière première, disponible en permanence (stock de bouteille ou réservoir en location). Le coût d’investissement est faible (pas d’installation frigorifique) par rapport au froid mécanique, mais le coût de fonctionnement élevé car on utilise du fluide en circuit ouvert (pas de réutilisation possible). La vitesse de refroidissement est d’autant plus courte que la température du médium frigorifique est basse (voir ci-après), par rapport aux –18°C à atteindre dans le cas de la congélation par exemple.

20

Cela donne un avantage aux fluides cryogéniques, l’azote en particulier. En effet pour des raisons économiques, le froid mécanique produit par un fluide frigorigène est limité entre –30°C et –45°C contre souvent –60°C pour les fluides cryogéniques.

6.4 Conclusion

Chez les artisans, le froid mécanique est essentiellement utilisé à l’heure actuelle. Cependant le froid cryogénique, de par son faible coût d’investissement, sa souplesse d’utilisation et l’augmentation importante de la capacité de surgélation qu’il permet (il raccourcit le temps de congélation) se développe régulièrement au niveau des petites entreprises industrielles (plats cuisinés par exemple). Il faut signaler que le recours à des conservateurs ménagers, nommés à tort congélateurs, en vue d’effectuer la congélation de denrées est à bannir totalement ! les performances de ces appareils sont tout à fait insuffisantes pour assurer une congélation dans un temps suffisant. en très peu de temps. Il suffira d’environ 0.3 kg de fluide par 1 kg de produit pour terminer la congélation.

6.5 Matériel de congélation

Les congélateurs sont soit des enceintes, soit des tunnels. Les plus répandus, sont les congélateurs à air pulsé.

Figure 11 : schéma des différents types de congélateurs : (a) cryogénique à azote liquide par aspersion, (b) à

tunnels et à chambres, (c) à plaques horizontales, (d) à surface raclée et (e) en lit fluidisé.

Le choix du congélateur va prendre en compte :

- la capacité et le temps de séjour du produit ; - la vitesse d’air et la température nécessaires pour obtenir la congélation complète pendant le temps

de séjour ; - la capacité du système de réfrigération calculée ; - les coûts en énergie et la perte de poids du produit ; - le nettoyage du matériel.

Les matériels de congélation (figure 11) sont :

- cryogéniques par immersion dans un liquide froid ou par aspersion - à l’air froid en tunnels avec bandes transporteuses (linéaires, spirales), en lit fluidisé ;

par contact avec une surface solide froide : à plaques, à tambour, à surface raclée.

21

Les congélateurs à air discontinus

Ce sont des chambres froides dans lesquelles les produits sont entreposés sur des palettes ou sur des chariots. L'air refroidi au contact des évaporateurs est ventilé par des ventilateurs placés à l'extérieur pour éviter le dégagement de chaleur qu'ils entraînent. Ces chambres sont bien isolées et thermostatées.

Les tunnels à air pulsé

Les produits passent, soit dans des cartons ouverts, soit directement sur la bande transporteuse, dans un tunnel refroidi par de l'air froid et ventilé. Comme la longueur est importante, on utilise souvent des congélateurs à spirale.

Les tunnels à lit fluidisé

Les aliments suffisamment petits sont transportés par une bande à maille en inox. L'air froid est soufflé de bas en haut et le lit de produit se comporte comme un fluide. On dit que le produit est fluidisé. Il faut pour cela un débit d'air suffisant. La congélation est plus rapide et les particules n'ont pas tendance à se coller les unes aux autres.

Les congélateurs à plaques

L'évaporateur est constitué de plaques horizontales avec un espace de quelques cm. On dispose le produit sur ces plaques. L'avantage est un refroidissement très rapide (d'où son utilisation sur des chalutiers-usines) mais il est impossible de travailler en continu.

Les congélateurs à tambour

Le produit liquide ou pâteux est emmené par un tambour refroidi de l'intérieur. En fin de rotation, un couteau racleur détache le produit congelé.

Quelques remarques pour conclure La chaîne du froid est un élément indispensable à la conservation des aliments depuis la récolte jusqu’à l’assiette du consommateur. Cela veut dire aussi :

- des transports réfrigérés adaptés à tous ces produits (routiers et ferroviaires principalement) ; - des plates-formes ou entrepôts frigorifiques de concentration et distribution pour optimiser les flux

avec suivi en temps réel ; - des personnels qualifiés pour des adaptations nécessaires permettant de mieux gérer la

maintenance de tous ces équipements, et les évolutions actuelles pour préserver l’environnement et la qualité des aliments.

7 Bibliographie

Bimbenet J.-J., Duquenoy A., Trystram, G., Génie des procédés alimentaires: des bases aux applications, Dunod, Paris, Ch. 7 (2002).

Cheftel J.-C., Cheftel H., Besançon P., Introduction à la biochimie et à la technologie des aliments, Tec & Doc Lavoisier ed., vol. 2, Ch. 7 (1979).

Jeantet R., Roignant M., Brulé G., Génie des procédés appliqué à l’industrie laitière, Tec & Doc Lavoisier ed., Ch. 1 (2001).

Leniger H.A., Beverloo W.A., Food Process Engineering, D. Reidel, Dordrecht, Ch. 4 (1975). Mafart, P., Génie Industriel Alimentaire, Les procédés physiques de conservation, Tec & Doc Lavoisier

ed., Ch. 7 (1991).