reflet et effets de l’exil sur le personnage de mohammed

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1 République Algérienne Démocratique et Populaire Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique Université Larbi Ben M’Hidi –Oum El BouaghiFaculté des Lettres et des Langues Département De Français Option : Littérature Francophone et Comparée Mémoire élaboré en vue l’obtention du diplôme de Master Thème : Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed Dib dans « Les Terrasses D´Orsol » entre Autobiographie et Autofiction Réalisé et présenté par : Sous la direction de : M. REHAHLIA Seddik Mme. BOUCHENE Karima Devant le jury : Président : M. NABTI Amor Rapporteur : Mme. BOUCHENE Karima Examinateur : Mme. ZEGHIB Nardjess Année Universitaire : 2016/2017

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Page 1: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

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République Algérienne Démocratique et Populaire

Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique

Université Larbi Ben M’Hidi –Oum El Bouaghi–

Faculté des Lettres et des Langues

Département De Français

Option : Littérature Francophone et Comparée

Mémoire élaboré en vue l’obtention du diplôme de Master

Thème :

Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

Dib dans « Les Terrasses D´Orsol » entre Autobiographie

et Autofiction

Réalisé et présenté par : Sous la direction de :

M. REHAHLIA Seddik Mme. BOUCHENE Karima

Devant le jury :

Président : M. NABTI Amor

Rapporteur : Mme. BOUCHENE Karima

Examinateur : Mme. ZEGHIB Nardjess

Année Universitaire : 2016/2017

Page 2: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

2

Remerciements

Je remercie Dieu, le tout puissant pour tout.

Je tiens, tout d’abord, à exprimer toute ma gratitude et tout mon respect à

mon encadreur de recherche Mme Bouchene Karima pour sa bienveillance,

son soutien, ses conseils avisés et ses encouragements. Et surtout sa patience.

Je remercie également les membres de jury pour m´avoir permis de présenter

ce modeste travail.

Je tiens aussi à adresser mes plus vifs remerciements à Mes Parents pour leur

aide, et leur soutien moral durant l’élaboration de ce travail et jusqu’aux

dernières minutes.

Page 3: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

3

Dédicace

Je dédie ce travail à mes parents …

Page 4: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

4

Sommaire

Introduction ..................................................................................................... 5

Présentatif ...................................................................................................... 10

1. Biographie de l’écrivain ..................................................................................................... 11

2. Présentation de l’œuvre « Les Terrasses d’Orsol » .......................................................... 15

3. Résumé de l’histoire ........................................................................................................... 16

4. Les personnages .................................................................................................................. 17

5. Le temps et l’espace du récit ............................................................................................. 19

5.1. Le temps ...................................................................................................................... 19

5.2. L’espace ....................................................................................................................... 20

L’exil, la folie et l’errance dans « Les Terrasses d’Orsol » ........................ 21

1. L’exil en question ............................................................................................................... 23

1.1.Déchirure entre l’exilé et sa propre présence (exil psychique)

25

1.2. Séparation avec le groupe social et Séparation avec le groupe social 29

1.3. Exil temporel ............................................................................................................... 31

1.1. 1.4.Echapper à l’exil vers

l’exil…………………………………………………….Error! Bookmark not

defined.

1.5. Exil spatial ................................................................................................................... 36

2. L’errance ............................................................................................................................. 39

3. Entre errance et exil ........................................................................................................... 43

4. La folie ................................................................................................................................. 44

4.1. Définition ..................................................................................................................... 44

4.2. La folie en littérature ................................................................................................. 46

4.3. La folie dans « Les Terrasses d’Orsol » ..................................................................... 47

Analyse autofictionnelle et autobiographique de « Les Terrasses d’Orsol »

......................................................................................................................... 51

Conclusion ...................................................................................................... 60

Annexe ............................................................................................................ 64

Bibliographie & Sitographie ........................................................................ 69

Page 5: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

5

Introduction

Page 6: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

6

Les traumatismes et les désirs dont souffrait l’âme algérienne n’ont

jamais cessé de marquer les écrits de ses hommes de plume, que chacun

extériorise à sa guise, pour réfuter une condition ou espérer un remède et

accomplir une appétence, Mohammed Dib est l’un de ces célèbres écrivains,

qui a engagé son style de nature exceptionnelle et unique, afin de décrire au

lecteur de plus près la souffrance et faire entendre le cri du pays et son

peuple.

Auteur de plusieurs œuvres majeures, Dib une grandeur dans la

littérature maghrébine. Porteur de multiples prix, salué par Malraux, dès son

premier roman « La grande maison » 1952. Prix Mallarmé pour son recueil

de poème « L’enfant-jazz » 1998 et encore prix de la Francophonie de

l’Académie française.

Nous avons choisi le roman « Les Terrasses d’Orsol» une œuvre

majeure, tout à la fois exigeante et accessible, qui se compose de plusieurs

chapitres, ce qui est intéressant, une fusion narrative qui témoigne à la fois de

l’appartenance culturelle de Dib dans le milieu littéraire, ainsi que sa vision.

Sur le plan littéraire, et plus précisément dans le roman de l’écrivain

algérien Mohammed Dib. L’exil comme thème prend plus d’ampleur et de

riches tentatives de l’expliquer, et décrire les sensations qu’il engendre aux

exilés. Le thème de la séparation domine dans le texte. De là naît une

ambiguïté générale qui affecte le sens. Il faut dire que l’auteur ne considère

pas les deux étapes de la vie de l’exilé comme distinctes avec un passé et un

présent (ou un avenir). Il considère tout cela comme un ensemble vécu en

même temps. La nostalgie du passé et l’exil peuvent surgir à n’importe quel

moment et à la fois peuvent avoir un impact sur la personne et la personnalité

Page 7: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

7

de l´auteur et son personnage, cas d’Ed dans le corpus sur lequel nous

travaillons, ce qui nous met devant la problématique suivante

Comment Dib a pu représenter son personnage à travers l’exil et

pourquoi il a choisi un tel motif pour en évoquer, en d´autres termes de quelle

manière l’exil a pu influencer sur notre personnage voire Ed et quels étaient

ses effets, pourrait on les considérer comme les effets de l’exil dont souffre

Dib même, par voie de conséquence s’agirait-il d´un roman autobiographique

ou autofictionnel ?

Nous avons mis les hypothèses suivantes :

• Dib choisirait ce motif pour mettre en vue le traumatisme dont il

souffrait voire l’exil et l’errance.

• L’exil favoriserait la folie et l’errance comme effets majeurs de la quête

de soi

• Les Terrasses d Orsol reflèterait la vie personnelle de l’auteur.

Pour pouvoir confirmer ou infirmer ses hypothèses nous allons faire

appel aux approche suivantes :

• L´autobiographie et l’autofiction parce qu´elles s´intéressent à chercher

dans le roman les traces autobiographiques et les expériences

personnelles qui sont communes entre l’œuvre et la biographie de

l’auteur, notamment celles qui ont été façonnées par l’auteur voire

fictionnalisées, nous nous appuyons sur les travaux de Dobrovsky et

Philipe Lejeune

• La seconde approche sera psychocritique car notre problématique vise à

discerner les effets de l’exil sur la personnalité et le comportement du

personnage nous allons nous inspirer des travaux de D.Widlocher.

• Dans l’étude de l’exil nous allons nous fonder sur les travaux

d’Aurélia KLIMKIEWISCZ.

Page 8: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

8

Nous allons viser à pallier ce manque dans l’espoir d’apporter un

éclairage nouveau sur cette œuvre prestigieuse.

L’exil ranime un ensemble de questions sociales, politiques et morales,

voire philosophiques, qui concernent autant les notions de l’errance et de la

folie dans un cadre littéraire, que de mémoire, d’histoire et de l’Autre.

Ce travail a pour visée de démontrer que « Les Terrasses d’Orsol » est

un roman autobiographique et autofictionnel tout en prenant en considération

la notion de l’exil, l’errance et la folie comme aspects formels, mais aussi

pour démontrer que cette charge autofictionnelle représente l’extériorisation

de tous les angoisses personnels de l’auteur, qui, pour les exprimer a eu

recours au dédoublement à la fois de personnalité et des endroits et espaces.

Pour ce qui est du choix de l’auteur et de l’œuvre nous avons été motivés

par nombreuses raisons, que nous développerons de la manière suivante :

Pourquoi avoir choisi Mohammed Dib parmi toute une liste d’écrivains

maghrébins. Afin de rendre hommage à l’homme ayant non seulement

marqué la littérature maghrébine mais aussi la littérature universelle.

Dib se projette dans ses personnages, En effet, il est écrivain mais

surtout écrivain algérien, conscient de son enracinement dans une aire

identitaire, malgré le colonialisme.

D’un autre côté, il a été formé à l’école française, il est de culture

française et s’exprime en langue française. Deux pôles se dégagent donc ici :

un pôle identitaire, celui de l’algérianisé et un pôle intellectuel celui de la

francité. Nous pourrons dégager quelques éléments référés à l’un ou à l’autre

pôle chez le personnage retenu. Ainsi, le fait d’être algérien inclut de prime

abord le symbole de la mère patrie, identité d’ailleurs souvent utilisée par les

écrivains algériens.

Page 9: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

9

Notre travail est scindé en trois chapitres :

Le premier chapitre sera consacré à la présentation de Mohammed Dib

sa biographie et son parcours, nous allons feuilleter les différentes stations par

lesquelles est passé et voir les points communs entre sa vie et ses écrits.

Le deuxième chapitre s’intéresse à l’étude de l’exil et ses différentes

formes ainsi que son évolution terminologique et la définition de l’errance, et

la folie en tant que effets capitaux de l’exil et établir la relation qui

s’entremêlent à la fois entre exil/folie/errance et raison/ effet.

Dans le troisième chapitre nous présenterons les outils nécessaires à

l’analyse, nous allons évoquer l’autobiographie selon Philippe Lejeune. Par

la suite, la référence à l’autofiction selon Doubrovsky et Colonna

Nous terminerons notre travail par une conclusion où nous exposerons les

résultats de notre modeste recherche.

Page 10: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

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CHAPITRE I

Présentatif

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1. Biographie de l’écrivain

Le lien qui unit la vie et l’œuvre de Dib, est exceptionnellement fort, et

plutôt ambigu ; raison pour laquelle il est essentiel d’aller feuilleter sa

biographie, ses voyages, et ses écrits. L’œuvre de Mohammed Dib est à la

fois une des plus anciennes de la littérature algérienne francophone, et une de

celles qui marquent encore le plus profondément l’actualité brûlante de ces

toutes dernières années. Ce qui le rend sans conteste l’ un des fondateurs de

cette littérature dès les années 50.

Nait le 21 Juillet 1920 à Tlemcen, au sein d’une famille bourgeoise

ruinée, dans une ancienne citée aux riche passé culturel de l’ouest algérien,

c’est la capitale intellectuelle et religieuse, l’héritière de musique et d’art ; qui

avait nourri l’Andalousie musulmane ; et fleuron de la civilisation magrébine

de Tlemcen. Il commence ses études primaires et secondaires en français à

Tlemcen et les poursuit à Oujda au Maroc. En 1945 il revient à Tlemcen et

commence une carrière de dessinateur de maquettes de tapis. En 1946 il

publie son premier poème dans la revue "Les Lettres", publiée à Genève sous

le nom de Diabi. En 1948 aux rencontres de Sidi Madani prés de Blida, il y

fait la connaissance de Jean Cayrol, Albert Camus, Jean Sénac, Bric

Parain, Louis Guilloux, il est ensuite syndicaliste agricole.

Page 12: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

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De 1950 à 1952 Mohammed Dib travaille au journal "Alger

Républicain" avec notamment Kateb Yacine. Il y publie des reportages, des

chroniques et des textes engagés sur le théâtre en arabe parlé. Il écrit aussi

pour le journal "Liberté" appartenant au parti communiste algérien, cet

environnement militant explique en partie l'écriture de ses trois premiers

romans publiés, La Grande Maison (1952), L'Incendie (1954) et Le Métier à

tisser (1957), trilogie qui décrit l'Algérie colonisée et la lente prise de

conscience progressiste. Où il a exposé une écriture qualifiée, souvent

abusivement du réalisme, même si cette tonalité y est dominante. Il se marie

avec Colette Bellissant en 1952 dont il aura quatre enfants ; sept ans après son

mariage il s’est rendu en France, pour fuir les ennuis de la police coloniale, il

s’est installé en France grâce à l’intervention d’André Malraux, Albert camus

et Jean Cayrol. Il s'installe dans le sud de la France chez ses beaux-parents à

Mougins dans les Alpes maritimes ; il a sillonné des pays de l’Europe de l’est.

Il a pu fréquenter plusieurs milieux de la classe moyenne de sa société,

côtoyer le petit peuple dont il fait siens les désirs au moment où il se met à

écrire au privilège de cette formation première, et à aiguiser son sens de

l’observation et son regard critique. Il représente une des consciences

brillantes de l’Algérie en combat.

En 1964 il s’installe dans la région parisienne à Meudon puis à Celle –

saint Cloud prés de Versailles. Ses premières œuvres sont inspirées de sa ville

Page 13: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

13

natale elles décrivent la pression de l’Algérie rurale dans le roman national, il

retourne, après l’indépendance au premier genre avec la mythologie et ses

premières amours. D'ailleurs dès cette époque Dib écrit d'une manière plus

personnelle des textes moins connus, dont la veine dominera lorsqu'après

avoir été expulsé d'Algérie en 1959 il publiera des recueils poétiques de plus

en plus exigeants (Ombre gardienne, 1961 ; Formulaires, 1970 ; Omneros,

1975 ; Feu, beau feu, 1979 ; O Vive, 1987.).

En 1962, le roman Qui se souvient de la mer est une peinture, de la

guerre qui choisit délibérément le fantastique plutôt que le réalisme pour

suggérer l'horreur, cependant qu'en 1964 Cours sur la rive sauvage développe

la quête initiatique autour de laquelle se construit en partie le volet non-

réaliste de cette œuvre, et qu'on retrouvera dans La Danse du roi (1968), Dieu

en Barbarie (1970). Le Maître de Chasse (1973), Habel (1977) , qui reflète la

scène fictive hors de l’Algérie où il poursuit le portrait caché des choses, et

leurs essences.

Il enseigne en 1974 à 1977 à l’université de Californie à Los Angeles qui

lui inspirera son roman « La trip » ; il se rend plusieurs fois en Finlande. Il

collabore avec Guillevic à des traductions d’écrivains finlandais. Ces séjours

lui inspirent sa « Trilogie nordique »dont « Le sommeil d’Eve » « Les

Terrasses d’Orsol» et « Neiges de marbre ». Il poursuit le voyage des

territoires de l’exil, lieu des rêves, de l’aventure toutefois, de l’identité

Page 14: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

14

dépersonnalisée ; ainsi que « L’Infante maure » qui s’est imposée comme un

quatrième volet.

De 1982 à 1984 Mohammed Dib est “professeur associé” au Centre

international d'Études francophones de la Sorbonne.

Avec « Le désert sans détour », Dib est revenu à son espace originel, il

nous mène, alors à un seuil, où les grands portraits des mythologies gréco-

latines, et égyptiennes, évoluent alentour de la destinée de deux personnages.

« L’un coupable d’avoir provoqué un massacre, l’autre complice »1

Dans ses dernières œuvres Simorgh, puis Laezza (terminée deux jours

avant sa mort) il revient sous la forme d’un puzzle littéraire, sur ses souvenirs

de jeunesse.

Mohammed Dib a reçu de nombreux Prix, notamment le Prix Fénéon en

1952, le prix de l'Union des Écrivains Algériens en 1966, le prix de

l'Académie de poésie en 1971, le prix de l'Association des Écrivains de langue

française en 1978, le Grand Prix de la Francophonie de l'Académie française

en 1994, attribué pour la première fois à un écrivain maghrébin. Il a obtenu en

1998 le Prix Mallarmé pour son recueil de poèmes L'enfant-jazz.

En 2003, de nombreuses rumeurs faisaient état de la possibilité de

l’attribution de prix Nobel de la littérature « sûrement mérite mais hélas non

attribué »2

« […] cette somme Dibienne n’a pas été consacrée par le prix

Nobel que l’écrivain méritait sous quelques chapitres que puisse

1 http://www Dz. lit -Mohammed Dib .mht « mémoire de maîtrise des lettres modernes ».

2 idem

Page 15: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

15

être abordée sa trajectoire ? Dib, pourtant, ne s’en plaignit jamais

mais d’un mal naît toujours un bien c’est, maintenant lui qui

manquera au Nobel »1

Il meurt à La Celle Saint-Cloud le 3 mai 2003, la littérature algérienne,

magrébine et universelle a perdu l’une de ses plumes, la flamme Dibienne est

éteinte à l’âge de 83 ans dans son domicile.

2. Présentation de l’œuvre « Les Terrasses d’Orsol »

Vue aujourd’hui comme la plus importante production algérienne en

langue française, l’œuvre littéraire de Mohamed Dib est aussi celle qui

manifeste un renouvellement constant des formes et des thèmes en même

temps qu’elle a su garder une unité intacte et s’installer dans la continuité.

Les productions qui ont suivi le départ de Dib de sa terre natale

expriment le début de la transformation opérée sur ses écrits, l’Algérie n’est

désormais plus l’unique espace référentiel.

L’expression se déplace vers l’exploration des territoires de l’exil,-lieu de la

perdition identitaire, de la quête acharnée d’un nouveau moi- et s’octroie une

reconnaissance internationale à effet double.

« Les Terrasses d’Orsol » est une œuvre qui lie au genre romanesque,

qui se compose de 22 chapitres tout au long de 231 pages. Il est le premier

volet de la trilogie nordique où on trouve aussi « Le sommeil d’Eve » et

« Neige marbre ».Il a fait sa première apparition en 1985 édition Sindbad,

11 http://www Dz. lit -Mohammed Dib .mht « mémoire de maîtrise des lettres modernes ».

Page 16: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

16

rééditée par l’Edition : La différence .PARIS en 2003. Réédité une troisième

fois par Chihab édition, Alger, septembre 2011 c’est cette édition que nous

utilisons comme corpus.

Les qualités d’écriture employées dans le roman maintiennent que la

fiction accède à des faits réels, Ecrits en fragment, l’absence d’homogénéité

des structures qui s’étendent par l’éclatement de la linéarité, dans le discours

littéraire les expressions allusives sont formellement écrites en italique. Elles

apparaissent au lecteur peu habitué comme accessoire. Mais, en réalité, ce

discours est le centre du roman lui-même.

3. Résumé de l’histoire

Ed, le narrateur, malade lors de sa visite chez Dr Rahmony. Un

cancérologue et amis de ces parents et marqué par la dissolution de son

mariage avec Eida, quitte Orsol, sa ville natale sa femme et son unique fille

Elma, son poste d’enseignant à l’université pour une mission de longue durée

à Jarbher. Une ville lointaine exilé envoyé en mission pour découvrir le

mystère de cette ville, semble condamné à vivre le temps vide de la répétition

: se soumettre à l’obligation de retourner sans cesse à la fosse, interroger sans

résultat, les habitants complices et indifférents et envoyer des rapports sans

espoir d’être lus, à un gouvernement lointain, aussi indifférent que les

habitants de Jarbher.

Page 17: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

17

Dans le troisième et le neuvième chapitre, Ed, pour échapper à la

solitude, va sortir de l’hôtel. Il visitera le cinéma pour regarder un film sous la

recommandation du Garçon de l’hôte Fichter. Ed se présente même au

tournage de ce film dont il a oublié le titre. Le nom du film est perdu, malgré

qu’il se soit présenté deux fois au film. Tout au long du roman, Ed cherche à

se souvenir de ce nom, il ne le trouvera qu’à la fin.

Ed fait la rencontre de Talilo lors d’une soirée, invité par ses amis de

Jarbher, où il incite Ed à venir en voyage avec lui sur une ile proche. Il a

rencontré Aelle, une femme charmante aux yeux verts, Ed est amoureux

d’elle et de la force de la vie qu’elle l’entoure, il ressent comme une évasion

de sa vie pleine d’angoisse, une sorte de libération de sa prison. A son retour à

Jarbher les repères d’Ed sont plus fragiles et effacés que jamais, il rencontre

sur un pont de la ville un voyageur, où il se sent qu’il se voit lui-même en cet

homme, à la fin Ed oublie son nom, sa mission, toute son aventure juste un

titre de filme et un nom « Véra ».

4. Les personnages

Ed ou Aed : le narrateur, le personnage principale et le héros de l’histoire.

Eida : la femme d’Ed.

Elma : la fille unique de ED et Eida.

Page 18: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

18

Dr Rahmony : cancérologue bien connu et ami des parents d’Ed.

Les Dodrick : les amis d’Ed à Jarbher.

Talilo : c’est l’ami d’Ed.

Rouka : une amie de Talilo

Kursi : la femme du musicien.

Les deux garçons d’étage, l’un deux se nomme Fichter .

Voldragar : Le navigateur et le commandant de bord du bateau qui mène Ed,

Talilo et leurs amis sur l’ile.

Page 19: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

19

5. Le temps et l’espace du récit

5.1. Le temps

Les repères spatio-temporels dans Les Terrasses d’Orsol ne correspondent

en aucune façon à ce qui se passe au monde réel, car ces derniers sont état de

suppression ostentatoire faite par l’écrivain, qui à son tour dessine son texte

en décalage avec l’univers extérieur.

Il a annoncé au début de son texte que les faits de cette histoires se

déroulent dans une ville nommée Jarbher ; et la notion du temps est

simplement indiquée par le mot semaines qui passent, l’expression qui montre

que l’attente commence à marquer les jours, et les nuits, chose qui a rendu

l’esprit très confus et désorienté même pour le lecteur qui n’a pas pu arriver à

distinguer dans les traits de l’histoire entre le passé et le présent voire

l’avenir… « et pas de nouvelles aujourd’hui, pas de nouvelles hier » (p. 99).

« Il est atteint comme d’une balle qui aurait mis tout ce temps pour le

rejoindre (p.200). Ce désarroi traduit à merveille la quête que mène Dib et

reflète sa nature rude et dure à évaluer comme expérience « appréciée » dans

sa confusion.

Le temps est décrit par Dib dans ce roman d’une manière « Elastique » qui

peut s’étendre entre les durées et se passer dans une série parfaite de

séquences et fragments illustrant –comme nous l’avons déjà cité- la nature de

Page 20: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

20

la quête et le but tracé dès le début de l’histoire par le protagoniste que par

l’auteur même .

5.2. L’espace

Comme nous l’avons toujours vécu avec Dib, il ne cesse pas de se

manifester –à travers ses textes- sous l’aspect de l’entre deux, que ce soit

pour les personnages et leurs personnalités ou les lieux et leurs symboliques,

dans cette œuvre l’espace se scinde entre la ville sous-sol et la ville et celle

d’en haut , pour mettre son texte entre la lumière de la vérité, voire la propre

identité mutilée et l’obscurité de cet exil et énigmes qui noircit son existence.

Le texte de Dib est marqué par une absence frappante de la mer , pour se

référer toujours au désert qui est en toute sorte le Maghreb par voie de

conséquence l’Algérie ; son pays natal désigné par Jarbher qui peut être

désigné par cette ville floue et très difficile à atteindre, marquée par des trajets

« orphiques » et des voyages mystiques dans l’inconnu, l’infini et

l’incompris……

Page 21: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

21

CHAPITRE II

L’exil, la folie et l’errance dans « Les

Terrasses d’Orsol »

Page 22: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

22

En commençant ce chapitre nous avons jugé utile , de chercher les

différentes définitions , et déterminations de l’exil comme concept et

caractère, pour pouvoir le cerner et définir ses limites et les circonscrire selon

ce qui servira à notre problématique.

Dans ce chapitre nous allons présenter l’exil à partir de plusieurs théoriciens

et psychanalystes et en chercher ses traces dans le corpus en exposant les

diverses formes sous lesquelles il peut se révéler.

Page 23: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

23

2. L’exil en question

Que veut dire le mot « exil » ? Du latin ex(s)ilium « bannissement, lieu

d'exil », le terme évolué en vieux français vers le mot « exill » signifiant

« détresse, malheur, tourment » et « bannissement ». D’après le dictionnaire

Grand Robert, l’exil peut se définir comme « l’expulsion de quelqu’un hors

de sa patrie, avec défense d’y rentrer » ou bien l’obligation de séjourner hors

d’un lieu. Un transfert dans un autre groupe social et par conséquent un

échange et une confrontation à travers sa rupture avec tout ce qui l’entoure

(langue, culture, etc.), l’exilé perd à la fois ses liens amicaux, et toute sorte de

sensations qui le maintiennent et attachent avec membres de sa société pour

établir des relations qui respectent à la norme de la vie en groupe . Cette

situation représente souvent pour l’exilé une source de souffrance, car il est

sans cesse dans une épreuve d’angoisse et d’énigme, parce que la personne

exilée cherche toujours le retour à son pays d’origine, une quête exprimée par

la nostalgie et l’attachement aux souvenirs. Il s’efforce de trouver son propre

sort, face à ce tout nouveau milieu où il cherchera sans fin une liaison pour y

retourner.

« L’histoire de tout exilé commence par une rupture avec

le lieu d’origine et l’anonymat auquel il est condamné dès

qu’il s’établit ailleurs. Incapable de se détacher de la terre

natale et incapable de se soumettre entièrement à la

culture de l’autre, il occupe un chronotrope de l’entre-

Page 24: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

24

deux, entre ici et ailleurs, entre avant et maintenant, entre

le réel et l’imaginaire. »1

Nous nous somme penchés sur les travaux de Isabelle Cielens -afin

d’enrichir notre définition- dans son ouvrage Trois fonctions de l’exil dans les

œuvres de fiction d’Albert Camus : initiation, révolte, conflit d’identité, en

faisant appel à la sémantique structurale pour obtenir une définition plus

synthétique du mot « exil », qu’elle désigne comme « séparation d’une unité

de préférence.»2

A partir de cette interprétation, nous constatons que les champs de

l’exil se diffèrent d’un contexte à l’autre et que la notion « exil » ou « la

séparation » qui désigne cette déchirure ou cassure s’oppose au non-exil voire

à l’appartenance et peut se formuler sur quatre niveaux distincts l’un par

rapport à l’autre: comme le montre CIELENS Isabelle dans son ouvrage cité ci-

dessus « soi/soi, soi/autre, soi/monde, soi/univers.»3

A notre tour nous allons les exposer indépendamment et voir de quel exil

s’agit –il dans notre roman.

1 KLIMKIEWISCZ Aurélia, Le brouillon de l’exilé, in Les nouvelles figures de l’exil de Salah

BASALAMAH,

, http://www.poexil.umontreal.ca/events/colloqfiguresexilsynop.htm

2 CIELENS Isabelle, Trois fonctions de l’exil dans les œuvres de fiction d’Albert Camus : initiation, révolte,

conflit d’identité, 1985, p. 7.

Page 25: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

25

2.1. Déchirure entre l’exilé et sa propre présence (exil psychique)

Cette forme de l’exil dite Selon Mbaye Diouf, exil « soi/soi » et comme

l’indique son nom, il signifie cette cassure qui pourrait être vécue comme une

division de l’être ou l’individu même, qui se sent éloigné et aliéné de sa

propre personnalité et son vrai moi, cette forme se caractérise par un rejet

choisi et voulu par l’exilé, qui souffre d’une sensation de vide de branle et de

chaos intérieurs et des anarchies morales avec soi « Cet exil déstabilise [les]

repères habituels de définition de soi et d’identification sociale [des sujets],

et provoque un sentiment de vide intérieur, de mélancolie passagère ou

latente, voire d’abattement moral. »1

L’exil se manifeste sous forme d’une incapacité, une quémande de

réponses pour satisfaire le désir de cette auto-exclusion, qui mène dans la

majorité des cas à la dépression et le refoulement dans le silence et la solitude

voire à la folie.

En ce qui concerne Les terrasses d’Orsol, nous avons constaté que les

traumatismes et le refus d’une telle vie concrétise ce type d’exil psychique,

Le sujet souffrant de cet exil se présente en tant qu’une personne qui

révèle l’expérience de la rupture et la séparation avec amertume.

1 - DIOUF Mbaye, L’énonciation de l’exil et de la mémoire dans le roman féminin francophone : Anne

Hébert, Aminata Sow Fall, Marguerite Duras, Thèse de doctorat, Québec, Université Laval, 2009.

2-Ibid.p 7.

Page 26: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

26

Le héros de l’histoire est dominé par ce besoin de tout comprendre et il

se fait aller avec une quête derrière les retrouvailles avec soi.

Dans notre corpus, « Les Terrasses d’Orsol » la désagrégation de son

mariage, marque le début de l’histoire par cette séparation avec sa femme

Eida et leur fille unique Elma, cet acte a tout bouleversé chez Ed dans sa

psyché que dans son foyer, qui devient lui-même un lieu où il se sent étranger,

de là commence son trajet avec l’exil intérieur et profond.

« Le regard d’Eida ma femme, se faisait accusateur à la seconde ou

il tombe sur moi « Les Terrasses d’Orsol » p. 22

Il se fait hanter par l’idée d’être malade« J’avais la maladie des

maladies »pour se trouver devant le cabinet de Dr Rahmony et y prendre la

nouvelle :qu’il a été atteint d’un cancer ou comme il l’a nommé Ed « La

maladie des maladies »qui l’a rendu -plus de cette séparation avec soi- un vrai

bilieux mélancolique en témoignant le terme de sa vie qui n’a plus de sens se

vire vers la mort .

« …tandis que je prenais la porte de son cabinet de consultations avec

ce gout acre a la bouche … Une fois dehors, j’ai marché, l’âme crêpée

de noir, j’ai marché, ne voyant soudain plus de sens à ma vie. « Les

Terrasses d’Orsol » p. 21

« Franchement je ne savais pas vivre, saurais-je mourir au moins. »

« Les Terrasses d’Orsol » p. 31

Page 27: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

27

La réalité de cette maladie est éphémère et Ed est sain et sauf, il se croit

malade mais Dr Rahmony entre dans le jeu de son patient par ce qu’il a

décidé de ne guère contredire ses malades « J’ai su du premier coup que vous

n’aviez rien… je me suis fait une règle de ne jamais contredire quelqu’un qui

se croit malade. » « Les Terrasses d’Orsol » p. 47

Dr Rahmony n’a pas voulu le contredire également par ce qu’il a

compris que Ed souffre d’un exil intérieur, et qu’il est en état d’abattement

continu avec soi, suite à sa séparation avec Eida et Elma, il lui a fait de la

peine une fois toutes les issues sont bloquées, de ce fait Dr Rahmony,

explique à Ed que la maladie :

« Est souvent notre dernier refuge quand toutes les autres issues se

ferment et que nous ne savons plus à quel saint ou à quel diable

nous vouer » p. 47

Cette situation entraine chez Ed une envie de s’isoler dans le vide et le chaos

qui dévorent sa véritable identité personnelle une fois les files d’appartenance

son coupés à ce propos Bishop explique :

« Le manque d’une identité personnelle constitue une forme d’exil

en raison du critère d’appartenance : sans identité, l’on ne

s’appartient pas, l’on est exilé de soi »1

La seconde scène où nous suivons l’exil de l’héros est quand il est arrivé

à Jarbher, Ed est arrivé sans rien amener dans son esprit, tout est supprimé de

sa mémoire, les repères spatio-temporels sont entièrement effacés de la tête; et

c’est l’oubli qui règne.

1 Neil Bishop, Anne Hébert, son œuvre, leurs exils, op. cit. p. 222.

Page 28: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

28

« J’ai posté mon rapport, je tire de la sorte un trait sur sept jours

de labour. Un rapport par semaine, c’est le troisième que j’envoie

… J’occupe le poste de … de quoi au juste ? » p.17

Ed est en décalage avec le monde réel ainsi qu’avec sa propre existence

et personnalité, leur superviseurs l’envoient en mission en dépit cet état d’âme

dominé par le désordre et le déséquilibre, Ed a accepté de partir en office non

par volonté mais par besoin de s’enfuir à cette mélancolie et ces embarras,

peut-être il se rattrapera et se réconcilie avec soi.

« …je n’avais pas salué mon affectation avec l’enthousiasme voulu

quand elle m’avait été notifiée, ah non. Mais jugez plutôt de mon

état, l’état ou j’étais alors en proie à la plus misérable des crises

morales… J’en étais arrivé simplement à ne plus vouloir vivre. La

moindre décision à prendre…me trouvait sans force ni volonté. »

p.19

Dans le cadre de sa tache toujours Ed part aux iles, il y perd le reste du

sens de sa vie , maintenant c’est le vide qui gère ses acte avec le hasard,

aucune liaison ni lien avec le monde et avec soi, il est vraiment perdu dans le

non-sens .

« …ma vie était déjà en train de s’engager sous son regard dans

une direction ni prévue ni souhaité. » p.117

« Je vis sans doute dans une histoire qui n’est pas la mienne. » p.

118

« Être à ce point coupé du monde ! » p. 142

« Je perds soudain la notion de ma propre identité, tout ce qui

m’entoure m’étrange. » p.143

Page 29: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

29

2.2. Séparation avec le groupe social et refus de l’autre:

Cette forme d’exil est dite par les spécialistes exil Soi/Autre, elle désigne le

fait de perdre tous les liens qui unissent le sujet à son groupe et le lui faire

appartenir. Un groupe avec lequel il partage les mêmes valeurs, coutumes et

traditions et religion.

Selon Bishop, cette idée de désunion se détermine par « …un sentiment

d’étrangeté, de rejet, d’infériorité, de dévalorisation »1.La personne peut être

séparée à l’intérieur de la communauté du quelle elle découle ou « en dehors

de l’unité de préférence».

La première des conséquences que peut entrainer cette forme d’exil est

ce sentiment de la non-appartenance, et la solitude soit infligée ou choisie par

le sujet, ce dernier se trouve en rupture avec son groupe où on le marginalise

et exclue, à cause d’une ou de multiples divergences bénignes(classe sociale,

ethnicité) ou conflictuelles (tendances politiques, religieuses..)

Dans Les terrasses d’Orsol, Ed est écarté de de son groupe, dès le début

de notre histoire, il a subit cet exil social. C’est à dire à ce sentiment de rejet

et de manque d’affection au sein-même de sa famille traumatisée.

Cet exil se manifeste sous forme d’un vide, et un éloignement voire une

rupture, née entre les membres de la famille d’Ed (sa femme et sa fille) qui lui

sont la société.

« Le regard d’Eida ma femme, se faisait accusateur à la seconde

ou il tombe sur moi » p. 22

1 CIELENS Isabelle, Trois fonctions de l’exil dans les œuvres de fiction d’Albert Camus, op. cit, p. 9.

Page 30: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

30

« … avait accueilli la nouvelle de ma maladie avec un sang-froid

ou entrait avant tout, je pense le refus d’être mêlée à un jeu qui la

concernait pas. » p. 24

Le groupe auquel appartient tout exilé est poussé par cette

différence à l’écarter et le marginaliser, car elle le considère

comme un étranger, chose qui pousse et repousse le sentiment de la

nostalgie et la ré -appartenance à augmenter et le désir du retour à

la ville natale règne « Orsol hante de plus en plus mes pensées …

ma bonne ville …Elle me manque. » p.98

Ed a préféré la solitude profonde, il s’est écarté de sa société et le monde

pragmatique, qui ne cesse de lui rappeler de sa situation critique incomprise.

Raison pour laquelle il a s’est évadé et échapper à la confusion et

l’indifférence de sa famille qui s’est montée flegmatique face à la décision de

la séparation ; Ed s’oriente donc vers la fosse qui l’a trouvée à Jarbher pour

résoudre son mystère, cette fosse qui devient elle-même un lieu d’exil.

« Je limite mes rencontre au strict minimum … j’ai grandement

besoin de solitude par contre, d’autant de solitude qu’il est

possible a un homme d’en avoir. » p.98

La fosse n’était pour Ed qu’un simple portrait qui reflète sa propre quête

autrement dit c’était lui-même, à Jarbher Ed était ignoré et écarté par tous les

habitants de cette ville, personne n’a pris conscience de sa présence aussitôt

Page 31: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

31

de son absence, les habitants se sont montrés indifférents envers lui, qui ne

cesse d’exprimer sa frustration et son traumatisme :

Ed a perdu sa famille, son foyer, à Jarbher il a perdu la notion du temps

et des lieus surtout avec cette fosse habitée par ces créatures mi- humaines.

Avec cette fosse Ed a décidé de prendre le défi d’élucider l’énigme de

ces êtres ainsi que sa présence, il y cherche de récupérer les marque de son

existence, peut-être il y aurait des facteurs qui l’identifient.

2.3. L’exil temporel :

Ce type d’exil est nommé aussi exil nostalgique ou exil (soi/monde) il est

caractérisé principalement par la perte de la notion du temps et la victime de

cet exil souffre de cette indifférence entre le passé, le présent et l’avenir, il ne

Page 32: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

32

distingue pas de l’avant de l’après vis-à-vis du moment de la déchirure du

groupe ou de soi. Comme le souligne Bishop, « La dimension temporelle peut

donc faire partie de l’exil, puisque celui-ci constitue souvent une rupture

entre l’avant et l’après »1

La personne qui éprouve ce type d’exil imposé -par rapport au temps-

ne différencie pas entre l’avant et l’après, il montre également un besoin de

revenir en arrière pour pouvoir digérer les souvenirs, il s’isole dans sa

mémoire pour en vivre, et quêter son soi, quand il s’agit d’un exil choisi le

sujet s’exil volontairement de son passé par ce qu’il représente pour lui une

source de tristesse et de d’angoisses, ce genre d’exilé échappe au passer pour

se retrouver dans le présent avec une identité retrouvée ; il refoule tous les

facteurs qui ont contribuer à perturber son existence et son identification par

rapport à sa société que soi-même, pour ce qui est Les terrasses d’Orsol l’exil

est proprement nostalgique plus que tout autre exil car Ed s’est orienté vers

les souvenirs pour pouvoir se retrouver une seconde fois.

« Je vis dans mon quartier qui fait partie de l'ancien Jarbher

entouré par des demeures de ce style,... La ville moderne aussi

possède de quoi séduire et même vous laisser muet ...immeubles,

ces ensembles implantés dans divers quartiers ...La splendeur et la

hardiesse dans l'innovation, fabuleuse ici, ont en effet des quoi

confondre...les hommes d'art, urbanistes, architectes, ingénieurs y

trouvent matière a leçon...une ville telle Jarbher de faire sa part à

1 Neil Bishop, Anne Hébert, son œuvre, leurs exils, op. cit. p. 43.

Page 33: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

33

l'ancien comme au nouveau lui confère la qualité d'un miracle »

Les Terrasses d'Orsol »p.34

Ed parle de sa ville natale Orsol comme si il y est au moment où il parle , le

lecteur de ce passage peut s’y imaginer, tellement Ed a su maitriser la

description, tout simplement il la regarde et décrit avec un cœur bourré de

manque de nostalgie et de besoin de s’y retourner.

« Je souhaite aussi revoir Orsol, ... comme on boit du thé à l'ombre

des platanes, comme on court au-devant de la mer, affronte de la

poitrine cette mer miterreinne notre vacillant sous le poids du

soleil... Et les nuits...lessivées de lune sur les blanches et tranquilles

Terrasses d'Orsol » p.87

2.4. Echapper à l’exil vers l’exil/

Ce titre parait dès la première lecture étrange et énigmatique, mais en réalité il

existe, il est dit aussi l’exil dé-exilant cette forme d’exil se distingue par le

choix volontaire de l’individu, qui se dirige vers l’exil pour s’enfuir une

situation, condition ou un contexte donné.

Ce contexte où le sujet est étouffé, il cherche un havre à apports positifs pour

pouvoir redémarrer à nouveau, il s’enfuit les tracasserie pour subir une

nouvelle forme de vie, pour aussi transformer ou se retrouver avec sa propre

personnalité ou avec autrui.

Page 34: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

34

Donc cet exil se manifeste comme un remède à des désirs et besoins non

accomplis dans la patrie première « non seulement de rétablir son identité en

exil mais aussi de remplir ses aspirations »1

En arrivant à cette étape nous pourrons que dire que l’exil est une

notions multiformes, et n’est pas une simple interrogation sur la cause du

départ soit de la personne qui quitte son pays , ou de la personne qui se sépare

avec l’envie de rester liée aux siens d’ « expulsion de quelqu’un hors de sa

patrie, avec défense d’y rentrer ». Phénomène complexe, l’exil peut être,

comme le montre Bishop :

« […] spatial et/ou non-spatial ; individuel et/ou collectif,

fondamental et/ou circonstanciel, temporel, social, sexuel, affectif,

voulu ou subi. Et à l’exil peut faire contrepoids diverses formes

d’anti-exil dont le déplacement, (l’ « exil ») spatial lui-même »2

Ainsi L’exil est, en effet changeant, et les causes sont aussi diverses que

les conjonctures et même varie d’une personne a une autre, comme Bishop

l’assure que « l’exil variera selon la subjectivité de chacun, […] et ce qui

fonctionne comme un anti-exil chez un sujet donné pourra fort bien revêtir

une fonction inverse chez un autre. »3

1 Neil Bishop, Anne Hébert, son œuvre, leurs exils, op. cit. p. 43. 2 Idem, p. 32. 3. BERTHET Dominique, Figures de l’errance, Paris, Le Harmattan, 2007 p. 43

Page 35: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

35

En contrecoup, et face à ce vide et cet exil le protagoniste essaye de

chercher dans ses gouffres un moyen pour combler ce manque, il a décidé de

mener une quête vers un autre endroit loin de l’indifférence des habitants de

Jarbher et de sa famille.il a choisi de s’exiler pour se dé-exiler ; une forme

nouvelle pour lutter contre cette étrangeté et mélancolie, chose que nous

avons remarquée dès le 5 ème chapitre où le personnage a commencé à

changer et se reconnaitre.

Le changement que commence à vivre Ed est le résultat des voyages

qu’il mène et en grande partie c’est grâce à ses rencontres avec Aelle, son

amante qui a tout représenté pour lui.

« Quelque choses, je le sens, est en train de changer en moi …je

n’aimerais pas avoir à montrer un autre visage aux gens. » p 45

« …j’étais couché et voici ce que j’ai vu un matin : j’ai vu Aëlle… belle et

blanche comme une statue des jardins. Je me suis assis dans mon lit, me

rappelant soudain, je cherche, encore à cette heure, quoi ? »

« A partir du moment où j’ai mis les pieds sur cette ile, j’ai perdu le

sens du tard et du tôt, du jour qui suit la nuit, qui suit le jour. »

p.171

Page 36: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

36

2.5. Exil spatial

Ce type d’exil est fortement marqué dans Les Terrasses d’Orsol dès le

moment où Ed a quitté Orsol pour se diriger vers Jarbher, sans qu’il soit

consenti ; la mission lui a été attribuée voire imposée,

La ville réceptrice (Jarbher) a marqué le début de la déchirure et rupture entre

Ed sa vie et ville. Jarbher est un nouvel espace géographique, un nouveau

territoire ; qui manque de confort, les membres de sa famille qui l’entouraient

autrefois d’affection et de chaleur ne sont point-là.

Ed se trouve subitement dans un nouvel espace inconnu qui le déstabilise et

le désordonne ; dans une ambiguïté spatiale, les lieux qui le murent

s’enchevêtrent, s’éclipsent et surgissent en créant un sentiment de spoliation

et de dépouillement.

Donc Ed a décidé de retrouver Orsol qu’il a perdue cela fait des années ,

il cherche soi avant Orsol, pour reprendre le dessus de son existence ; il se

réconcilie à la fois sa propre personne et récupére les repère de temps et

d’espace voire Orsol sa ville natale qui lui est actuellement la famille et tout

ce qu’il possède et attend ; surtout après cette perte d’envie en vie, à Jarbher

il n’y a que le silence et l’absence des signes et des mots, c’est la frustration ,

c’est le chaos ….

« Comment retrouverai-je Orsol après ces années d’exil ? » p.103

« Il me reste Orsol s’il me reste plus de famille et j’attends » p.104

« Le même silence que partout m’a suivi, ou attendu ici » p.113

Page 37: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

37

« Jarbher est bien la … dans sa grandeur non moins

monumentalement pétrifiée, vacante, que celle d’une cité morte. »

p.117

« Sans l’avoir voulu je vais dans un Jarbher qui rêve sa mort »

p.117

« J’en suis le seul passager, nous allons ainsi, assourdissant la

ville et sa froideur drapée de mutisme. » p.120

Même les voyages qui sont pour tout le monde un moyen pour se

réconforter et changer l’air pour ils ne le sont pas, car ils ne font que durcir le

sentiment de désarroi dont il souffre.. « Etre à ce point coupé du monde »

p.142

« Avoir accepté d’entreprendre ce voyage aux iles sans broncher,

sur la simple invitation d’un inconnu et aboutir, pour ajouter à

l’incertitude. » p.143

A force de ces traumatismes vécus par Ed dus à la séparation avec Aida

et Elma et pareillement avec Orsol E d ne fait plus confiance à la vie, car il a

tout perdu, hanté par cette crainte de perte Ed ne veut plus de Aelle, non par

absence de sentiment mais de crainte de la perdre encore une fois et partir

vers une autre quête de l’amour perdu.

« J’ose à peine regarder Aelle,… si je la regarde, je suis un homme

perdu, plus perdu que je ne le suis déjà. » p.151

« … je perds soudain la notion de ma propre identité, tout ce qui

m’entoure m’étrange. » p.143

Page 38: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

38

Lors de sa visite qui a duré des années Ed n’a pas pu s’appartenir à

nulle part, il s’est associé à tous les marginaux de la ville, a tous les

errants, les amis de la noirceur de la nuit car leur exil s’accroit sous

les rayons du soleil de Jarbher.

« …Moi, je suis de passage. Simplement de passage. – De

passage, de passage. Depuis combien de temps ? – Douze ans et

quatre mois (...) même si je dois mourir ici, je n’aurai été qu’un

voyageur » p.185

« Moi, toi nous ne sommes que des voyageurs » p.186

« Il m’est tellement étranger dans sa familiarité même. Pour de

vertigineuses secondes il a donné asile dans le monde de la mort. »

« Il paraît si exilé sous le soleil de cette ville ».

A travers ce chapitre nous avons essayé de cerner l’exil, ainsi

que ses définitions et diverses formes sur lesquelles peut se

manifester ce motif, nous avons constaté que l’exil est

multiforme et complexe, il dépend de la conjoncture et les

contextes où vivait le sujet exilé, et aussi la raison de cet exil

qui peut être choisi ou infligée

Page 39: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

39

3. L’errance :

Pour ce qui est notre intitulé et problématique nous nous sommes

interrogés sur l’exil et ses effets sur le personnage de Dib dans Les terrasses

d’Orsol ;

Dans le chapitre précèdent nous avons étudié l’exil, et nous avons trouvé que

l’exil ne pourra jamais se séparer de l’errance, pour cela nous allons explorer

l’errance.

Etymologiquement, l’errance ou verbe « errer » du latin « errare », ce

qui veut dire celui ou celle qui voyage sans cesse, c’est aussi aller au hasard, à

l’aventure aller là et là. Au sens figuré, une imagination errante, c'est-à-dire

qui se laisse aller librement sans but.1

Le verbe "errer" signifie aussi se tromper, avoir une opinion fausse,

s’écarter de la vérité. On parlera aussi d’errements. D’après Dominique

Berthet, si l’exil est varié par ces formes, l’errance l’est aussi. Il n'y a pas que

le corps qui se déplace, l'esprit erre au même titre que la pensée,

l'imagination, la réflexion, la recherche et surtout l'écriture qui erre à son

tour.2

Selon Dominique Berthet :

« L’errance peut s’envisager au moins sous deux aspects :

d’ordinaire, elle est associée au mouvement, souvent à la marche, à

1 Dictionnaire littéraire p.182 2 idem

Page 40: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

40

l’idée d’égarement, à l’absence de but. On la décrit comme une

obligation à laquelle on succombe sans trop savoir pourquoi, qui

nous jette hors de nous-même et qui ne mène nulle part. Elle est

échec pour ne pas dire danger. L’errance toujours vue sous cet

angle s’accompagne d’incertitude, d’inquiétude de mystère,

d’angoisse, de peur. C’est une épreuve. »1

En ce qui parait l’errant est égaré dans la nulle part, sans avoir aucune

destination ni objectif, mais en fait réel, l’errance a été toujours une quête que

mène l’errant derrière la certitude pour se détendre avec soi ou autrui voire

pour s’enfuir et se retrouver ; ce que confirme Dominique Berthet :

« Dans cette errance, l’objectif n’est pas de se perdre mais au

contraire de se trouver. »

Celui qui décide de mener cette quête est toujours pris bar le besoin de

la réussir, il refuse tout retour en arrière car cet acte d’y revenir n’est qu’ un

retour à l’endroit d’où on a senti le besoin de partir. Car l’errance relève de la

nécessité intérieure, nécessité de partir, de porter ses pas plus loin et son

existence ailleurs.

L’errance a plusieurs formes elle peut être réelle ce qui veut dire le sujet

se déplace effectivement ou fictive ou le déplacement se passe dans sons

esprit, elle n’est pas forcément continue il pourrait y avoir des pauses voire

des étapes, dont la durée varient d’une personne à une autre.

L’expérience de l’errance transforme, comme tout moment fort de

l’existence de la victime, soit en trouvant un remède soit une autre perte

1 BERTHET Dominique, Figures de l’errance, Paris, Le Harmattan, 2007, p. 9.

Page 41: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

41

totale, le plus important à signaler c’est qu’il y ait un changement nul n’est

pareil. « Le regard que l’on porte sur les choses a changé… »1

Selon Dominique Berthet l’errance, qui est en réalité une quête d’un

ailleurs qui peut s’avérer inaccessible, est une expérience qui change la

personne (l’errant) en terme de visions envers le monde et les choses qui

l’entoure.

Le concept de l’errance occupe une place dominante dans le récit Les

Terrasses d’Orsol. Exprimé toujours à travers Ed qui a été éloigné d’Orsol

vers Jarbher , dans son cas Ed après avoir été dévoré par l’exil , la nostalgie il

a choisi de s’éloigner et s’exiler lui-même pour se chercher et s’identifier , il a

refusé l’échec

« La ou j’étais arrivé, là où je me tenais, sur cette frontière

indécise, ne surnageait d’autres sentiments en moi que celui d’avoir

rêvé ma vie et que l’heure était venue de se réveiller. » p.32

« Orsol hante de plus en plus mes pensées…ma bonne ville me

semble pourtant pas pouvoir être plus lointaine. Elle me

manque. »p.98

« …un étranger –que suis-je d’autre. »p.101

« …je prends soudain la notion de ma propre identité, tout ce qui

m’entoure m’étrange » p.143

Ed ne se reconnaît pas dans ce pays, il commence par se perdre. Il perd

ceux dont leur présence le protège, sa famille( Eida et Elma sa fille) et les

êtres qui lui inspirent quiétude et appartenance. 1 BERTHET Dominique, Figures de l’errance, Paris, Le Harmattan, 2007

Page 42: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

42

« Je me sent pas d’affinités avec la tête que je porte » p.45

« Comment retrouverai-je Orsol après ces années d’exil ? Pour ce

qui de ma femme, de ma fille, de ma maison, le pire a déjà eu lieu. »

p.103

Le déplacement dans « Les Terrasses d’Orsol » est inséré dans l’esprit

d’Ed. Il est détenu par ses pensées perdues et celles des autres ainsi ses

souvenirs les plus profonds, par la nostalgie d’Orsol. Ses tentatives

d’échapper à ses sentiments d’égarement dans le vide et le silence qui

l’enclosent à tout instant.

« Le même silence que partout m’a suivi, ou attendu ici. » p.113

« Etre à ce point coupé du monde ! » p.142

« Je suis un homme perdu, plus perdu que ne le suis déjà » p.151

L’exil suscite le sentiment de l’errance qui à son tour provoque le

sentiment de l’égarement, alimenté par le vide et l’étrangeté qui l’entoure, Ed

s’emmène dans une confusion qui atteint non seulement ses repères mais

aussi sa mémoire, et sa présence de soi.

« …à présent incapable de distinguer entre ce qui a eu lieu et ce qui

n’est jamais arrivé. »p.195

Suscité par l’exil et l’errance, Ed se trouve égaré avec une mémoire

perdue et des repères entièrement supprimés, tout contrôle sur sa vie est

démoli .

« …ma vie était déjà en train de s’engager sous son regard dans

une direction ni prévue ni souhaité. » p.177

Page 43: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

43

« C’est bizzard comme le monde est de plus en plus plein

d’étrangers » p.184

« Alors tu restes assis, où tu es, tu n’y peux rien. Pas parce que tu

n’y peux rien [...] Non ce n’est pas ça : parce que tu n’es rien, vu ?

Et parce que tu n’es rien, tu n’y peux rien ! »

4. Entre errance et exil

Certes l’exil et la folie révèlent quasiment la même idée mais cela

n’empêche pas de trouver quelques points de dissimilitude ;car ils était

toujours des notions complexes, et souvent utilisées dans un sens

métaphorique.

Afin de mettre en exergue ces notions, nous nous sommes penchés sur

leurs dissemblances et similitudes aléatoires. L’errance, brise les lisières en

ayant une distension vigoureuse pour aller vers un ailleurs, un nul-part, qui

n’est pas toutefois géographique mais beaucoup plus utopique.

Par contre l’exil est définit par cet éloignement de l’endroit et le groupe

où l’exilé a senti le besoin de départ ou à vrai dire d’où il a été repoussé pour

y quitter.(volontaire ou imposé).

L’exil peut exister à travers l’espace d’une manière volontaire , l’errance

est à travers le temps dans le but chercher soi ou un groupe pour s’y

Page 44: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

44

appartenir ;quand l’exil est une raison, l’errance et une de ses stations ou

plutôt son prolongement.

« Alors que l’exilé est taraudé par la hantise du retour, l’errant est

avant tout celui qui, à force de bouger, finit par emporter ses

racines avec lui, ne les rattachant à aucun périmètre unique

privilégié ou exclusif. »1

5. La folie

5.1. Définition

D’après le Dictionnaire de psychologie le terme folie signifie la

déraison, c’est-à-dire la négation de la raison, que celle-ci soit imputée aux

dieux, aux passions ou à la maladie.il s’agit donc d’un concept plus large que

celui de la maladie mentale.2

A partir de l’année 1910, la folie en tant que terme propre n’est plus en

usage par ce que les spécialistes du domaine ont voulu le rendre à partir -de

leurs diagnostics- une véritable maladie dotée d’une origine médicale

concrète en l’affirmant. Et pareillement à cause de cette distinction qui se

manifeste variée au niveau d’expression et des

comportements. « L’individualisation des maladies mentales diverse, non

1 LAHENS Yanick, « Quand l’exil devient errance Conjonction, N°169, avril – juin 1986 p. 09.

1 Dictionnaire de la psychanalyse :p.285

Page 45: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

45

plus tenues pour des simples variétés d’expression d’un seul désordre

fondamental, mais pour des entités morbides distinctes. »

La conception de la folie est redevenue à la mode en même temps que

s’amplifiait, au milieu du XX siècle, une contestation philosophique et

politique de la médicalisation du « trouble mental ». M. Foucault a bien

exprimé l’idée et l’objectif de cette contestation qui vise à classer la notion de

la folie et en étudier l’évolution terminologique, qui a subi des changements

radicaux en partant du moyen âge à nos jours. cette contestation vise aussi à

s’interroger sur l’origine anthropologique en s’interrogeant « à partir de son

négatif » et revendiquer cette critique qui médicalise la folie et refuse

l’intervention de son anthropologie.

En visant toujours le même objectif qui est la non-médicalisation de la folie

d’une manière entière nait une catégorie de chercheurs qui donnent d’autres

dimensions à cette notion dans la société et la nature de l’individu souffrant

de cette pathologie « se réclamant plus ou moins de l’antipsychiatrie, nient la

validité d’une approche médicale ou psycho-pathologique des troubles

mentaux et cherchent leur origine dans des explications de nature politique

ou sociologique.1

1 Dictionnaire de Psychologie .d’après D.Widlocher

Page 46: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

46

5.2. La folie en littérature

La folie en littérature a pris plus d’ampleur avec le temps et

l’accroissement du nombre des écrivains en général et africains voire

maghrébins en particulier.

La folie représente pour eux un moyen d’expression Elle se présente

comme image de l’inspiration, signe d’un déchirement absolu ou ironie pour

exprimer les illusions ou les faiblesses de l’homme ; elle s’exige dans les

registres comique aussi bien que tragique.

D’après Christiane KEGLE dans son article « Folie et littérature » il

cite le nom d’un livre accessoirement intitulé « La folie », Pierre Jacerme

retrace selon un parcours diachronique allant de l'Antiquité à nos jours les

principaux champs sémantiques de la folie dans la littérature. Si l'Antiquité ne

laisse pas de fournir une thématisation extrêmement riche et diversifiée, il

n'est pas étonnant, par ailleurs, Jacerme montre que, contrairement à

l'Antiquité, le motif de la folie au Moyen-âge prend le sceau de la

méconnaissance et de l'anonymat. Le Tristan de la légende, par exemple, se

déguise en fou pour atteindre sa bien-aimée, la reine Iseut, qui ne le reconnaît

d'abord pas. Mais la figure de Tristan voyageant sur une nef apparaît aussi

comme le prototype du fou errant, à l'image de la folie qui « erre à l'horizon

de la conscience du Moyen-âge »1.

1 La Folie, op. cit. p. 44

Page 47: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

47

Au XX siècle, la comparaison entre folie et maladie mentale a été de plus en

plus critiquée, et le surréalisme a moralisé l’expression de l’inconscient sans

le contrôle de la raison. L’invention de la catégorie des « fous littéraires »1

Michel Foucault a ajouté -à propos de la notion de la folie dans la

littérature- dans son article « Histoire de la folie de l’âge classique »2 il

la difficulté due au fait de parler de la folie, subsiste paradoxalement

dans l’usage du langage qui est pour lui exclu ou étouffé, Ainsi parler de

formes de folie dans les ouvres littéraires, ils ont présenté la folie comme un

être de langage mais dont le langage fonctionne selon des règles singulières

que le lecteur doit décoder autrement dit sous forme de comportements et

paroles , attitudes cryptés qui demandent littérairement et indirectement au

lecteurs de les décrypter.

5.3. La folie dans « Les Terrasses d’Orsol »

Disant la folie c’est automatiquement mettre en vue un sujet qui a

perdu la raison, ses gestes et impulsions sont loin d’être contrôlés ; il

est exclu du groupe social duquel il fait partie.

« Les Terrasses d’Orsol » n’a pas été exclu de cette classification car

l’ensemble des événements et comportements d’Ed sollicitent vraiment une

1André Blavier, les fous littéraires, Paris, aux amateurs du livre [1982],2001).

2 FOUCAULT M. Histoire de la folie a l’âge classique, Paris, Gallimard, 1990.

Page 48: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

48

interprétation, si ce n’est pas une analyse, car il prouve dès le début du roman

des signes de perturbation et d’agitation. Il est introduit dans un état de chaos

mental, il se ressent hanté par une maladie chimérique qui le tourmente et

l’emmure.

« J’avais la maladie des maladies »

« Je n’ai de ma vie jamais reçu un tel choc…je tache de retrouver

mon calme…Trois heures plus après, j’en suis à me répéter : du

calme du calme »p. 8

Il n’était pas malade mais l’état où il vivait le pousse à y croire, Dr

Rahmony n’a pas voulu lui faire mentir devant sa famille qui a été si

indifférente , chose qui a aggravé la situation, et a montré de plus sa folie qui

n’a pas été une folie ordinaire ; la folie chez Ed était façonnée par un refus

d’alliance et un rejet de la famille , une mission imposée, un trajet vers

l’inconnu.il a quitté Orsol vers Jarbher qui ne connaissait pas ;où il s’est

monté distinct de l’ancien Ed est devient quelqu’un qui ne se connait pas et

qui se cherche sans cesse. Ed n’avait rien et il sa maladie était dans son ésprit,

il voulait la prendre comme issue pour attirer l’attention

« Une fois dehors, j’ai marché, l’âme crêpée de noir, j’ai

marché ne voyant soudain plus de sens à ma vie, ni à quoi que ce

fut en général, ou seulement celui de ce vagabondage » p.21

Page 49: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

49

« Je me suis fait une règle de ne jamais contredire quelqu’un qui se

croit malade »p 22

Dr Rahmony lui explique :

« …Est souvent notre dernier refuge quand toutes les autres issues

se ferment et que nous ne savons plus à quel saint ou à quel diable

nous vouer »p. 47

Il cherche à restaurer des liens avec les autres (la famille et les habitants

de Jarbher), avec cette maladie imaginaire, Il se sent emporté dans un univers

indécis et espacé de tout être lui inspirant possession et bien.

« Ne tombe-t-il-on pas malade aussi et tout simplement pour attirer

sur soi un regard plus humain que celui qui vous est d’ordinaire

accordé dans la solitude et la misère de ce monde sans pitié ? »p.

51

La folie chez Ed s’est marquée dès le début par les pertes de mémoire,

Ed se souvient plus de son travail « j’occupe le poste de… de quoi au

juste ? » il ne s’arrête plus de se tourmenter à cause de l’oubli du titre d’un

film qu’il a regardé :

« je suis incapable d’en retrouver le titre exact, il est pourtant en un

seul mot, très court en plus, come Véra ou Every» p.29

Elle s’est monté aussi comme le synonyme de la déraison et la perte de

conscience et d’égarement de soi et du monde.

« Etre à ce point coupé du monde »p.142

Page 50: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

50

« …je perds soudain la notion de ma propre identité, tout ce qui

m’entoure m’étrange » p.143

Les liens entre la mort et de la folie sont souvent très liées, ainsi notre

personnage fou exprime son désir de la mort dès les premiers passages de

l’exil et le trajet de l’errance ; Ed n’a pas cessé de chercher une raison

toujours absente pour vivre.

« Franchement je ne savais pas vivre, saurais-je mourir au

moins ? » p.31

En fin de ce chapitre nous tenons a dire que certes la folie est la perte de

raison et la maladie de l’esprit, mais la question qu’il faut se poser est –elle le

début d’une maladie ou l’achèvement d’une somme de maladies qui n’ont

pas été traitées par la société avant les médecins et psychanalystes.

Page 51: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

51

CHAPITRE III

Analyse autofictionnelle et

autobiographique de « Les Terrasses

d’Orsol »

De ce titre, nous analysons le récit du roman « les Terrasses d’Orsol »

En ayant à l’esprit la définition de l’autobiographie et de l’autofiction, dont le

premier élément constitutif à savoir que l’autobiographie est principalement la

vie réelle de l’auteur Mohammed Dib dans notre cas.

Page 52: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

52

Selon le pacte autobiographique, ainsi que le plan de l’analyse interne,

la différence entre l’autobiographie et le roman autobiographique n’est pas

repérable, car un roman peut imiter presque tous les procèdes de

l’autobiographie.

Pour S. Doubrovsky dans Fils, l’autofiction est une autobiographie qui

est déviée de son sens ou seulement le critère de l’authenticité des fait relatés

et absents, dans l’intérêt d’attirer le lecteur ainsi que d’après son cadre de

romancier, l’auteur se trouve obligé d’introduire des événements et même des

personnages qui n’ont probablement existés dans sa vie.

Philipe Lejeune rajoute que le repérage de la matière fictive dans le

roman diffère d’un lecteur a un autre selon l’ethnie, sa culture, sa religion

sans oublier le moment de la lecture.

Sur la première de couverture du l’œuvre de Mohammed Dib, figure

son nom, et sa photo, y figure aussi le titre et la mention générique (roman),

cela exclut tout rapport avec la réalité et place la diérèse au cœur de la fiction.

« Un titre doit embrouiller les idées non les embrigader »1

On distingue deux formes de titre selon Gérard Genette. Le premier

étant thématique, il désigne le contenu de l’œuvre. Le second, par contre, est

un titre rhématique, annonçant la forme ou le genre. Dans le cadre de notre

étude, le titre est plutôt rhématique d’où son aspect générique.

Orsol est la ville d'origine d’Ed. Non seulement son nom qui ne renvoi a

aucun lieu réel, ces habitants sont désignés comme spectres des créatures

1 Etude sur Umberto Eco, à propos du nom de la rose, par Gillian Verhulst, Ed Grasset.

Page 53: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

53

irréels, ainsi on nous remarquons que malgré de ce que représente Orsol pour

Ed, sa terre natale, la ville se réduit seulement à ses terrasses, c'est-à-dire à

des lieux d’observations.

« …une ville d’Orsol peuplée de spectres ou spectre moi-même, je

me reconnaissais parfois, et parfois non, dans le fantôme qui

multipliaient les glaces des magasins sur mon passage. »p.21

D’après Charles Bonn « … Qu'il s'agisse de Fouroulou chez Feraoun,

ou d'Omar chez Dib, les deux personnages sont des observateurs, des relais

commodes, grâce auxquels les écrivains pourront y décrire plus facilement un

milieu social, une réalité extérieure... » 1

Le choix des caractéristiques des personnages dans toute son œuvre ne

semble pas involontaire, mais plutôt opportune avec ce que Dib veut

divulguer de sa propre vie, qui est la source de toute production romanesque.

A titre d’exemple le choix du nom « Ed » pourrait être traduit comme une

interprétation qui renvoie à la fin du nom de l’auteur MohammEd, non

seulement le nom mais aussi que le parcours de Mohammed Dib et de son

personnage étroitement lié par l’exil2.

L’emplacement essentiel ou se développe les actes du personnage, la

ville de « Jarbher », un nom non identifiable en langue française, mais en

1 BONN Ch., La littérature algérienne de langue française et ses lectures. Imaginaires et discours d'Idées,

Editions Naaman, Canada 1974, pp. 26-27.Cité par Jamel Ali Khodja dans l’enfant prétexte littéraire, p.1 2 2 BONN Ch., La littérature algérienne de langue française et ses lectures. Imaginaires et discours d'Idées,

Editions Naaman, Canada 1974, pp. 26-27.Cité par Jamel Ali Khodja dans l’enfant prétexte littéraire, p.2

Page 54: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

54

peut lui associer simplement qu'elle est au bord de l'océan, et que ses maisons

sont en bois, traversée par une rivière nommée le Slän.

« À Jarbher…je me mets alors à surveiller l’océan... » p.88

« Il a un nom, ce fleuve ? Comment s’appelle-t-il ?...Le Slän »

p.187

Son arrière-pays est montagneux, cependant que ses habitants modestes,

qui se consacre à féliciter la vie mais reste cet allures de méfiance que le

narrateur ressent.

« Aucune de ces personnes affables et distinguées que je vois,

vraiment aucune. On s’adresse de gracieux sourires, les saluts

rivalisent de courtoisie comme rivalisent dans la même discrétion

les toilettes, les smokings portés, somptueux….je les regarde, la

générosité de cœur et d’esprit parait avoir cessé depuis longtemps

de relever chez elles de la simple et commune éducation pour

devenir une composante de la personnalité. Pas un de ces hommes,

pas une de ces femmes attablés çà et là, ils présentent ni les uns ni

les autres le comportement ou emprunté ou trop libre de qui était

un secret honteux, voir même l’ombre d’une contrainte sur leurs

visage ou on lit comme en un livre ouvert. »p. 25-26

réserve horrifiée d’étranges immensités. »p.60-61

Ed et tout au long de l’histoire ne mène pas sa quête pour chercher ce

qu’il connait déjà, mais plutôt pour avoir une identité au sein de Jarbher :

cette ville qui regroupe que les indifférents, Ed cherche un identifiant aux

hommes de la fosse, il veut décrypter le mystère de d ses spectres.sa

Page 55: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

55

préoccupation fondamentale d'Ed était de leur donner un nom. car il sait à

quel point est difficile cette tache la tache de nommer les choses.

« Mais il y a ce repère du diable, comment l’oublier ? Il ne va pas

avec le reste, avec tout ça, il ne cadre pas et je ne peux pas faire

(penser, me comporter) comme s’il n’existait pas. Ou comme si je

l’avais moi inventé. Alors comment faire, comment le

prendre ?...Des bêtes avais-je supposé le premier jour mais, figées

dans un sommeil de sauriens, si bêtes il y a comme je le pense, elles

ne se distinguaient pas ou guère des rochers …Les hideuses

créatures ne se signalent pas davantage ni plus vite au coup d’œil

que je donne …elles ont tout le temps été là, elles ont simplement

commencé à se mouvoir. Si lente, si peut dire, car elles le font de si

faible, si lente, si misérable façon que tous leurs labeur serait

susceptible de passer pour une hallucination. » p. 41-42

La chronique du narrateur est une création et une exécution appuyées sur

la vie de l’auteur, or, les différentes séquences qui forment la vie de l’auteur-

même s’incorporent dans la conscience du narrateur. Autant de pistes qui

semblent désigner une ville du Nord de l'Europe, dans laquelle le narrateur

pense parfois avec nostalgie à Orsol

« …boit du thé à l'ombre des platanes », « court au-devant de la

mer, affronte de la poitrine cette mer miterreine nôtre, vacillant

sous le poids du soleil », où l'on sent la nuit des effluves de jasmin

sur ses « blanches et tranquilles terrasses » p.85-86

Dès la première lecture des Terrasses d’Orsol le lecteur comprend que

cette histoire agit de l’Algérie singulièrement Alger ; et que le motif de l’exil

Page 56: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

56

qui s‘y présente marque l’écriture dibienne, à qui il a donné un statut, qui

reflète -non seulement le monde imaginaire là où il existe les spectres et les

fosses- mais plutôt , une quête d’un écrivain qui s’est cherché longtemps à

partir de La grande Maison jusqu’au dernières œuvres, ses œuvres qui

illustrent le sens propre de la quête des origines.

.

« L’attente commence à se faire longue, pas nouvelle aujourd’hui,

pas de nouvelles hier. Et bien moins encore les autres jours. On

prend son temps en haut lieu pour répondre à ma demande de

rappel…Comment retrouverai-je Orsol après ces années d’exil ?

Pour ce qui est de ma femme, de ma fille, de ma maison le pire a

déjà eu lieu. » p.103

Dib a su amalgamer sa propre mémoire et souvenir avec de la fiction, et

cette fusion a permis la naissance de la personnalité du narrateur, qui se

présente dans ce texte en reflétant la capacité qui marque Dib, quand il

supprime la frontière existante entre les deux (narrateur/auteur) c’est la

coexistence des fragments de souvenirs qui entremêlent l’identité de ce

narrateur et celle de l’auteur.

Les Terrasses d’Orsol n’est pas intégralement une autobiographie du

fait que l’œuvre découle du genre romanesque, et puisqu’il y engage si une

grande part de rêve. Mohammed Dib a évoqué sa propre expérience de quete

Page 57: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

57

d’identité et de l’exil sous forme d’une fiction mystique pour en former sa

propre fiction par le biais de son protagoniste Ed

En lisant Terrasses d’Orsol, on trouve que toutes les marques de

l’autofiction requises par Doubrovsky sont présentes sous forme d’une nuance

narratologique ; partant de la première page ce roman , l’identité du narrateur,

et du personnage principal se marque par l’emploi de la première

personne« je ».

« Je suis revenu »p.7

Ainsi, à travers son pacte autobiographique, Philippe Lejeune affirme

que, pour qu’il y ait autobiographie, il faut que l’identité du nom entre

auteur, narrateur et personnage principal soit assumée par l’énonciation. De

ce fait, le récit qui forme notre corpus respecte fidèlement ce pacte

autobiographique proposé par Lejeune.

Dans Les Terrasses d’Orsol, Mohammed Dib est l’auteur, le narrateur

et personnage principal ; donc la narration est autodiégétique comme

l’explique Philippe Lejeune -qui s’est inspiré de Figures III de Gérard

Genette- C’est ce qui est d’ailleurs pour Philippe Lejeune l’autobiographie

classique, dite autodiégétique.

« Aujourd’hui cela fait quatre mois exactement que je suis établi à

Jarbher. Quatre mois de mission, j’entame un autre…je vis dans

Page 58: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

58

mon quartier qui fait partie de l’ancien Jarbher entouré par des

demeures de ce style… p34.

L’utilisation de la troisième personne « il» dans la narration de l’avant

dernier chapitre, se manifeste comme une invitation de Dib à ses lecteurs pour

l’y découvrir, il relève d’habitude des marques de la biographie traditionnelle,

un narrateur, généralement absent, nous parle de l’histoire d’un autre. Mais ici

Dib se détache de son personnage

je crois vivre l’un de ces rêves qui nous font ressouvenir de lieux

pourtant jamais visités auparavant, de visages jamais vus. Nous

ignorons jusqu’où, unique, s’étend notre propriété. » p.35

Si nous feuilletons la vie de Dib nous trouverons assez de points

similaires entre ce roman et sa propre vie, Nous jugeons trouver dans ce

roman, une version modifiée de la vie même de Mohammed Dib.

Doubrovsky explique ainsi son projet :

Page 59: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

59

« L 'autofiction c'est la fiction que j'ai décidé, en tant

qu'écrivain de me donner à moi-même et par moi-même, en y

incorporant au sens »1

Dans le texte de Dib le trio (auteur/narrateur /personnage principal) sont

la même personne, et les intentions de chacun d’eux sont analogues, en

d’autres termes Dib raconte d’une certaine sorte des parcelles de ses

mémoires à travers le personnage, où il parait comme créateur et son

personnage se concordent intimement, quoique la trace autobiographique

soit comme évènements patents enserrés dans une carrure de grande capacité

de fiction qui donne le texte.

Dans le texte de Dib dit autobiographique, le narrateur s’adresse à un

double destinateur :à la fois sa propre personne( soi-même) et le lecteur, M.

Dib évoque son exil dont il a souffert tant, éloigné de sa terre mère

l’Algérie ; poussé par les tracasseries de la police coloniale Dib a signé son

contrat de départ dans les terres de mirage, exilé ou s’exiler peu importe pour

Dib ;le plus important c’est que nous soyons nous les lecteurs comme les

habitants d’Orsol, installés dans les terrasses et nous observerons

minutieusement ce qui se passe et comprendre ce que qu’un exil.

1 Doubrovsky Serge, Fils, Paris, Galilée, 1977, quatrième de couverture.

Page 60: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

60

Conclusion

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61

Notre étude aura mis en évidence le rôle central du thème de l’exil dans la

création romanesque de Mohammed Dib. Dans Les Terrasses d’Orsol, le

personnage principal est profondément affecté par l’exil, l’errance et d’un

certain degré de folie. Or, cet exil n’est pas une simple question

d’éloignement du pays natal mais plutôt un sentiment d’étrangeté qui ne cesse

de dévorer l’esprit et les cordonnés du personnage ces données qui forment

son identité.

A partir de notre travail nous avons constaté que l’exil dont souffrait Dib

même a pu avoir un impact sur le personnage de son écrit, qui devient en

quelques sortes, fou mais pas la folie que nous connaissions autrefois dans

son aspect traditionnel,

Nous avons pu démontrer que l’exil a été une raison directe et indirecte

des divers symptômes de l’errance et la perte de soi voire la folie du

personnage, également nous sommes arrivés à trouver que ces traumatismes

identitaires et psychiques ne sont qu’un reflet de l’exil de Dib qui les a forgés

dans un roman autobiographique et autofictionnel.

Dans le premier chapitre de notre travail, nous avons fait la présentation

de Mohammed Dib son parcours et son œuvre romanesque pour démontrer le

besoins qu’il éprouve de se représenter dans son œuvre. En effet à partir de

cette étude, il est indéniable de réfuter une identité fabriquée, dans un récit

jusque-là fidèle et justifié, mais qui ne cesse de se métamorphosé par un

croisement entre réalité et fiction.

Le deuxième chapitre est consacré à montrer que l’exil est un

phénomène complexe et multiforme. L’exil est :

Page 62: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

62

« Non seulement un rejet, un bannissement et un châtiment, mais aussi

une incompréhension, une aliénation, une perte d’identité. »1

En effet, pour reprendre les mots de Neil Bishop, l’exil peut être «

spatial et/ou non-spatial individuel et/ou collectif, fondamental et/ou

circonstanciel, temporel, social, sexuel, affectif, voulu ou subi ». Nous avons

également vu qu’il peut aussi y avoir un exil désexilant, c’est-à-dire un nouvel

exil qui serait libérateur d’une autre forme d’exil. Cette définition plurielle de

l’exil nous a servi de base pour notre analyse de notre corpus.

Toujours dans le deuxième chapitre nous avons œuvré davantage à la

définition de l’errance, ainsi que la folie. Deux notions importantes dans la

compréhension du thème de l’exil dans l’œuvre, et leur relation qui

s’entremêlent entre raison et conséquences.

Le troisième chapitre évoque les outils nécessaires à l’analyse. Ainsi,

nous avons dans un premier temps fait référence à l’autobiographie selon

Philippe Lejeune. Par la suite, la référence à l’autofiction selon Doubrovsky et

Colonna fut nécessaire. En effet, il s’agissait de comprendre si l’auteure

s’était fabriquée une fiction à partir d’un enchaînement par rapport à l’histoire

réelle.

Enfin, le thème de l’exil occupe une place centrale dans l’œuvre

Dibienne. Tout exil, choix ou nécessité, implique une errance, rupture à

plusieurs niveaux un éloignement des repères qui définissent l’individu par

rapport à lui-même et la société jusqu'à la folie, et entraîne forcément l’exilé

à une réévaluation de l’identité.

Ainsi nos résultats peuvent ouvrir l’opportunité à d’éventuelles

prospections plus approfondies pour chercher entre les lignes de cette

grandeur littéraire et voir à quel point il a pu maitriser les esprits lecteurs et

1 MOUNIER Jacques, Exil et littérature, op. cit, 1986, p. 5.

Page 63: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

63

mener une quête derrière ce succès en se posant la question quel est le secret

de cette maitrise était-ce le caractère de l´´humanisme et l´ universalité que

dissimule ses œuvre ou autres ???

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64

Annexe

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65

« La dernière de Mohammed DIB »

M. Zaoui : que voulez-vous mettre exactement en relief à travers

l’histoire d’une rencontre entre un homme du sud et une femme du Nord,

d’une part, et l’histoire de leur enfant d’autre part ?

Dib : le mode d’emploi d’un livre se trouve dans le produit lui-même, ainsi

que toutes ses explications. Là, il s’agit d’un roman .On ne peut pas donner

d’explication didactiques, celles-ci y sont suggérées et le lecteur devrait avoir

à cœur de trouver seul ces explications .Cela fait partie des plaisirs de la

lecture. Un livre ne s’écrit pas comme une démonstration mathématique : on

pose un problème et on essaie de le résoudre. Il vient comme une sorte

d’inspiration, et à ce moment –là, le livre s’invente au fur et à mesure qu’il

s’écrit.

L’auteur ne sait pas forcément ce qui va se produire, donc ce qu’il va lui-

même dire .il est vrai que toute œuvre littéraire, une fois achevée, à un sens

mais ce sens n’est pas vraiment prévu au départ.

Un écrivain se découvre, et découvre son œuvre en écrivant ….

M. Zaoui : L’infante maure, c’est tout de même un titre qui suggère tant

de choses.

Dib : ce que j’ai voulu montrer, c’est tout simplement un enfant comment il

vit, comment voit le monde et comment il réagit. Il m’importe peu que cet

enfant soit d’un couple mixte ou qu’il vive dans un pays ou dans un autre.

C’est d’abord l’enfant qui m’intéresse

Page 66: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

66

Aujourd’hui, les voyages et les échanges se sont multipliés et font que les

gens se rapprochent de plus en plus .Il y a des gens qui voyagent

énormément, qui se rencontrent, qui se plaisent et parfois s’épousent.

Il y a de plus en plus d’enfants dont l’un des parents appartient à un pays

différent, à une langue différente et à une culture différente de l’autre. Je

dirai même que le monde va de plus en plus dans ce sens, et l’idéal serait que

le monde ne soit constitué que d’enfants issus de couples qui appartiennent à

des cultures différentes .Dans mon livre, nous nous retrouvons d’une manière

plus précise devant un couple dont l’homme est censé être un maghrébin. Il

peut être Algérien, marocain ou tunisien. La femme vient d’un pays nordique.

Cela pourrait être Suède, Norvège ou Finlande. Un enfant naît de cette union.

Les enfants qui sont riches de deux cultures sont également riches d’un

imaginaire et même de deux imaginaires qui se confondent. Un imaginaire

qui fait leur marque essentielle, qui fait leur identité.

C’est pour cela aussi qu’un enfant issu d’un mariage mixte –le mot « mixte »

ne me plait pas beaucoup –est un enfant qui a un monde de rêve beaucoup

plus grand, beaucoup plus étendue que celui qui a pour origine un seul pays,

une seule culture, qui se trouve bien enracinée, bien ancrée quelque part.

L’enfant a un espace pour son imaginaire, il est un peu le roi de son domaine

imaginaire .Une fille est en quelque sorte la reine d’où « l’infante »

M. Zaoui : justement pourquoi « l’infante » ?

Dib : Non, c’est un préjugé. Un adulte qui, pour certaines raisons, est obligé

de s’expatrier vit dans ce cas un déchirement, mais pas l’enfant .Sauf bien sûr

s’il existe au sein du couple un antagonisme irréconciliable qui entraînerait

le déchirement de l’enfant .Cela peut exister chez les couples qui partagent la

même langue. Des parents qui ne s’entendent pas font des enfants

malheureux. Ceux –là existent partout, ils n’ont pas besoin de venir pays

Page 67: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

67

différents pour ne pas s’entendre. à mon sens , il n’ y a donc pas de

déchirement mais une curiosité profonde .D’ailleurs, j’ai posé des questions à

des personnages adultes , issus de couples de ce genre qui m’ont confirmé

que , enfant, ils avaient ce rêve très vaste qui embrasse au moins deux pays

.L’idée surtout que le pays qu’ils ne connaissent pas leur apparaissent comme

un royaume féerique .Et si l’un des parents est absent , il est souvent imaginé

comme un grand personnage, dans son pays bien sûr. L’enfant rêve de cela

.Une fois adulte, il se rendra compte que ce n’est pas toujours vrai.

M. Zaoui : vos derniers romans apparaissent comme le point de départ

d’une réflexion sur l’exil. Mais on considère aussi que vous revenez à une

écriture plus intériorisée

Dib : étant jeune, c’est l’action qui prime ; avec l’âge la réflexion s’y

substitue. Un écrivain relativement jeune se pose des problèmes d’esthétique

et d’efficacité, mais avec l’âge, on pose de plus des questions de plus en plus

d’éthique, car dans la vie il y a des étapes qui font qu’on passe d’un stade à

un autre.

M. Zaoui : que ressentez-vous au moment d’écrire un roman ?

Dib : j’ai l’impression que ce n’est pas moi qui écris et qui invente, que les

choses se présentent toutes seules, et que je n’ai qu’à écouter et voir.

Concernant les dialogues et les discours, je n’ai même pas besoin de

chercher. Je les entends et je les rédige. J’ai fait cette constatation depuis

longtemps, c’est la partie de mes manuscrits que je corrige le moins. Les

dialogues dans leur état premier restent inchangés, exactement comme

d’autre personnes, en parlant en ma présence, me demandant de transcrire

leurs paroles en les maintenant telles quelles.

Page 68: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

68

M. Zaoui : vous avez dit un jour ; « Quand on prend le chemin de l’exil,

le retour est impossible ». Le pensez-vous toujours ?

Dib : à vrai dire, on ne revient jamais. Pas seulement de l’exil .Quand on part

on ne revient pas, c’est sûr.

Même s’il y a retour, ce n’est pas la même personne qui revient…

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Bibliographie & Sitographie

Page 70: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

70

Bibliographie :

I-Œuvre de Mohammed Dib (Corpus) :

DIB Mohammed, Les Terrasses d’Orsol, Chiheb Editions, Alger, septembre

2011.

II-Autres ouvrages et œuvres littéraires :

DOUBROVSKY Serge, Fils, roman, Paris, Galilée, 1977.

III-Œuvres théoriques et généraux :

Aurélia KLIMKIEWISCZ, Le brouillon de l’exilé in Les nouvelles figures de

l’exil de Salah BASALAMAH.

BLAVIER André, Les fous littéraires, Paris, aux amateurs du livre [1982-

2001).

BERTHET Dominique, Figures de l’errance, Paris, L’Harmattan, 2007.

BISHOP Neil, Anne Hébert, son œuvre, leurs exils.

CIELENS Isabelle, Trois fonctions de l’exil dans les œuvres de fiction

d’Albert Camus : initiation, révolte, conflit d’identité, 1985.

FELMAN Shoshana, La folie et la chose littéraire. Paris .le seuil 1978.

FOUCAULT Michel, Histoire de la folie a l’âge classique, Paris, Gallimard,

1990.

GASPARINI Philippe, Est-il je ? Roman autobiographique et autofiction,

Paris, Seuil, 2004.

GENETTE Gérard, Fiction et diction, Paris, Seuil, 1991.

GENETTE Gérard, Figure III, Paris, Seuil, 1972.

Page 71: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

71

HAMON Philippe, Le personnel du roman.

LAHENS Yanick, Quand l’exil devient errance, dans Conjonction, N°169,

Avril – juin 1986.

LEJEUNE Philippe, Le pacte autobiographique, Paris, Seuil, 1975.

STRAUSS André, Des exils du langage à la langue de la littérature in Exil et

littérature de Jacques MOUNIER, Grenoble, Ellug, 1986.

Dictionnaires :

Dictionnaire de Psychologie d’après D.Widlocher.

Thèses :

DIOUF Mbaye, L’énonciation de l’exil et de la mémoire dans le roman

féminin francophone : Anne Hébert, Aminata Sow Fall, Marguerite Duras,

Thèse de doctorat, Québec, Université Laval, 2009.

Sitographie :

http://www.poexil.umontreal.ca/events/colloqfiguresexilsynop.htm.

http//www. DZ lit –Mohammed Dib.htm.

http://limag.refer.org/Textes/Manuref/DIB.htm

http://mohammed.dib.free.fr/temoignages.html

Page 72: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

72

Résumé

Ce mémoire évoque un écrivain algérien, Mohammed Dib, l’un des

fondateurs de la littérature algérienne d’expression française Par son statut

particulier et compliqué à la fois. Qui lui permettent non seulement d’occuper

une place importante dans la littérature francophone mais aussi universelle.

De ce fait, notre travail de recherche consiste à une tentation de percer les

mystères de l’œuvre. Nous avons essayé d’étudier le rôle central du thème de

l’exil dans la création artistique de Mohammed Dib et la relation entre le réel

et le fictionnel dans le récit, tout en prennent en considération les notions de

l’errance et folie. Ainsi son identité l’auteur par rapport qui nous semble

fabriquée et complexe l’œuvre et pour cela, nous avons choisi comme corpus,

le célèbre roman de Mohammed Dib Les Terrasses d’Orsol, le premier volet

de la trilogie nordique.

Page 73: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

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Abstract

This memoir evokes an Algerian writer, Mohammed Dib, one of the

founders of Algerian literature of French expression by its special and

complicated status at the same time. That not only allow it to occupy an

important place in French literature but also universal.

As a result, our research is a temptation to unravel the mysteries of the work.

We tried to study the central role of the theme of exile in the artistic creation

of Mohammed Dib and the relationship between reality and fictional in the

narrative, while taking into consideration the notions of wandering and

madness. Thus, his identity, the author in relation to him, seems to be

fabricated and complex, and for this purpose we have chosen as corpus, the

famous novel by Mohammed Dib Terrasses d'Orsol, the first part of the

Nordic trilogy.

Page 74: Reflet et effets de l’exil sur le personnage de Mohammed

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ملخص

لوضع الفرنسية باللغة الجزائري الأدب مؤسسي أحد ديب، محمد الجزائري الكاتب تثيرالمذكرة هذه

أيضا ولكن الفرنسي الأدب في هامة مكانة لتحتل فقط ليس تسمح التي. واحد آن في ومعقد خاص

عالمية

المنفى موضوع مركزية دراسة حاولنا. العمل أسرار لكشف إغراء لدينا البحثي العمل يتضمن ولذلك،

المفاهيم الاعتبار بعين الأخذ مع القصة، في والخيال الواقع بين والعلاقة ديب محمد الفني الإبداع في

العمل ومعقدة أنفسنا على قطعناها يبدو بالمقارنة البلاغ صاحب هوية وهكذا. والجنون التيه من

الأول الجزء ،Les Terraces d’Orsol ديب محمد كتبها التي الشهيرة الرواية اخترنا فقد ولهذا،

.الشمال ثلاثية من