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Rapport d’Etat d’un Système Educatif National (RESEN) Guide méthodologique pour sa préparation Alain Mingat, Mamy Rakotomalala et Jee-Peng Tan Equipe DH-PPTE, région Afrique, Banque Mondiale Mai 2001

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Rapport d’Etat d’un Système Educatif National (RESEN)

Guide méthodologique pour sa préparation

Alain Mingat, Mamy Rakotomalala et Jee-Peng Tan

Equipe DH-PPTE, région Afrique, Banque Mondiale

Mai 2001

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Table des matières Première partie : Que cherche-t-on et comment peut-on procéder ? 4 Introduction 4 Chapitre 1 : Contexte global de l’évolution du secteur de l’éducation 6 1. Les tendances démographiques 6 2. Les agrégats macro-économiques et les finances publiques 7 3. Placer le financement de l’éducation dans une perspective comparative 7 4. Examiner les possibilités d’évolution dans la décennie à venir 7 Chapitre 2 : Analyse des scolarisations 8 1. Examen global de la couverture éducative par niveau et évolution 8 2. La structure des scolarisations dans les différents types d’écoles 8 3. Mesure agrégée de l’efficience quantitative du système 8 4. Détermination du profil moyen de scolarisation 9 5. Questions d’offre et de demande pour instruire les politiques éducatives 13 5.1 Analyse de l’accès en première année du cycle primaire 13 5.2 Analyse de la rétention en cours de cycle primaire 15 Chapitre 3 : Analyse des aspects financiers 18 1. L’évolution des ressources publiques par niveau et type de dépenses 18 2. Analyse détaillée des dépenses de l’année la plus récente 19 3. Estimation des dépenses non-gouvernementales pour l’éducation 20 4. Estimation des coûts unitaires sur la base des données agrégées 21 5. Estimation des coûts unitaires dans une perspective micro 21 6. Evaluation du niveau et de la structure du salaire des enseignants 23 7. Analyse du coût des constructions scolaires 25 8. Identification des contraintes agissant sur la couverture du système 26 Chapitre 4 : L’efficacité interne et la qualité de l’éducation 28 1. Indicateurs de flux et d’efficacité interne au sens classique 29 2. Vers une mesure de la qualité et des facteurs à considérer pour l’améliorer 30 Chapitre 5 : L’efficacité externe associée à la production du capital humain 32 1. Allouer les ressources entre niveaux et types d’éducation 33 2. Mettre institutions et comportement en ligne avec ce qui socialement souhaitable 37 Chapitre 6 : L’équité et les disparités dans les systèmes d’enseignement 39 1. L’équité dans les scolarisations 40 2. L’équité dans la répartition des ressources publiques en éducation 41 2.1 La dimension structurelle 41 2.2 La dimension distributive 43

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Chapitre 7 : Les questions de gestion du système éducatif 45 1. La gestion administrative et la répartition des moyens et des personnels aux écoles 46 1.1 La cohérence dans les allocations de moyens et de personnels aux écoles 46 1.2 Les économies d’échelle 49 2. La gestion pédagogique et la transformation ressources-résultats au niveau des écoles 50 Chapitre 8 : Synthèse et estimation d’un modèle de simulation pour la politique éducative 53 1. Une synthèse hiérarchisée des résultats obtenus 53 2. Un modèle de simulation pour instruire les arbitrages et la politique éducative 54 Un exemple de modèle de simulation 55 2.1 Bloc des ressources publiques 58 2.2 Bloc des dépenses courantes 58 2.3 Bloc des dépenses en capital pour la construction des salles de classe 60 2.4 La confrontation des dépenses et des ressources 60 Seconde partie : Exemples de tableaux vierges susceptibles d’être utilisés 62 Troisième partie : Exemples extraits de RESEN réalisés dans certains pays 76 1. Extrait du Chapitre 1 du RESEN pour le Bénin 77 (le contexte Macro du développement de l’éducation) 2. Extrait du Chapitre 2 du RESEN pour la Mauritanie 81 (analyse des scolarisations : indice d’efficience et profil de scolarisation) 3. Extrait du Chapitre 2 du RESEN pour le Bénin 88 (analyse des scolarisations : facteurs d’offre et de demande) 4. Extrait du Chapitre 2 du RESEN pour le Niger 95 (analyse des scolarisations : facteurs d’offre et de demande) 5. Extrait du Chapitre 3 du RESEN pour Madagascar 98 (analyse des aspects financiers : Perspective globale) 6. Extra it du Chapitre 3 du RESEN pour le Niger 112 (analyse des aspects financiers : Coût unitaires selon la méthode micro) 7. Extrait du Chapitre 4 du RESEN pour le Bénin 116 (l’efficacité interne et la qualité du système d’enseignement) 8. Extrait du Chapitre 5 du RESEN pour Madagascar 123 (l’efficacité externe associée à la production de capital humain) 9. Extraits du Chapitre 6 du RESEN pour la Guinée 134 (analyse de l’équité; disparités dans les scolarisation) 10. Extraits du Chapitre 6 du RESEN pour le Bénin 138 (analyse de l’équité; distribution des ressources publiques) 11. Extraits du Chapitre 7 du RESEN pour le Burkina Faso 142 (questions de gestion; dimension administrative) 12. Extraits du Chapitre 7 du RESEN pour la Mauritanie 148 (questions de gestion; dimension pédagogique)

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Rapport d’Etat d’un Système Educatif National (RESEN) Guide méthodologique pour sa préparation

Introduction Ce Guide est constitué de trois éléments : i) une description des points et des domaines abordés ainsi que des arguments analytiques pour conduire le travail; ii) une liste de tableaux illustratifs pouvant servir de référence pour organiser et présenter les données collectées, sachant que ces tableaux ne sont donnés qu’à titre d’exemple et doivent bien sur être adaptés aux conditions particulières de chaque pays; iii) une liste de documents de références ou de matériaux qu’il peut être utile de consulter dans la réalisation concrète du travail. Ce guide est susceptible d’être utilisé par les équipes nationales comme par les équipes sectorielles de la Banque Mondiale (éventuellement d’autres partenaires techniques et financiers) pour préparer un rapport d’état sur le système d’éducation et de formation de tel ou tel pays. Ce rapport contient les éléments de base pour construire le diagnostic des éléments structurels d’un système éducatif et, sur cette base, pour construire un dialogue fructueux de politique éducative dans la perspective d’améliorer à moyen terme les performances du secteur. Tant la définition d’un plan décennal de développement du secteur que la préparation des projets de la Banque Mondiale (et des autres partenaires techniques et financiers) peuvent trouver dans le RESEN des éléments utiles. Enfin, le rapport contribuera à l’identification par les pays de leur stratégie de réduction de la pauvreté, pour ce qui est des actions dans le secteur de l’éducation et de la formation. Bien que sans doute variable selon les circonstances nationales particulières et les ressources en temps et en personnes affectées à sa réalisation, le temps nécessaire pour constituer un RESEN est probablement de l’ordre de 6 mois. Il doit toutefois être souligné que ce guide méthodologique s’attache aux éléments les plus centraux du RESEN et que des adaptations doivent être opérées, ou des compléments incorporés, pour répondre à la diversité des conditions spécifiques nationales. Enfin, l’esprit dans lequel l’exercice est conçu est celui de produire des informations et analyses, classiques pour certaines et nouvelles pour d’autres, sur la base des données disponibles qui par ailleurs sont souvent insuffisamment exploitées; il ne s’agit pas de s’engager dans des collectes de données nouvelles lourdes. Il est possible que l’analyse réalisée suggère l’utilité de poursuivre le travail, mais ceci doit être considéré comme une activité devant se dérouler dans un autre cadre. Le plan de référence utilisé pour le RESEN est structuré en 8 chapitres selon l’architecture suivante : Chapitre 1 : Cadre contextuel global de l’évolution du secteur de l’éducation : aspects démographiques, macro-économiques, finances publiques; estimation des contraintes et des marges pour le financement du secteur éducatif; rôle potentiel de l’initiative PPTE pour desserrer ces contraintes et perspectives potentielles à moyen terme. Chapitre 2 : Analyse des scolarisations : description de l’évolution des effectifs scolarisés et des taux de scolarisation par niveau éducatif, rôle du secteur privé et des écoles communautaires, analyse de l’accès et de la rétention dans les différents cycles d’études et estimation des profils de scolarisation;

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estimation du rôle respectif des facteurs situés du côté de l’offre et de la demande de scolarisation pour rendre compte des problèmes de scolarisation. Chapitres 3 : Coûts et financement du système : description de l’évolution des ressources publiques mobilisées pour le système et de la distribution de ces ressources par niveau d’études et fonction; on aura une perspective sectorielle intégrant les contributions des ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement technique et professionnel mais aussi des autres ministères pour leur contribution à des activités de formation (santé, agriculture, ..). Au-delà des contributions publiques, on cherchera à estimer celle des parents et des communautés tant dans les établissements publics que privés. Estimation des coûts unitaires de scolarisation par niveau d’études par la méthode macro, puis par la méthode micro en identifiant les facteurs agissant sur le coût et estimant des fonctions de coûts. En particulier, on examinera l’impact des groupements d’élèves et du niveau de salaire des enseignants sur les coûts unitaires; on examinera aussi le coût et le financement des constructions scolaires. Chapitre 4 : L’efficacité interne du système et la qualité de l’éducation : on examinera les flux d’élèves dans les différents cycles (redoublements et abandons) et on en tirera des indices d’efficacité. On identifiera par ailleurs les données disponibles sur les résultats scolaires des élèves et leur mise en relation avec les moyens en personnels et matériels mobilisés au niveau des écoles. Chapitre 5 : L’efficacité externe associée à la production du capital humain : on examinera dans quelle mesure la production actuelle du capital humain dans le pays (la distribution en quantité et en qualité des formations terminales au sein d’une cohorte de jeunes) correspond aux demandes de l’économie duale du pays. Quels infléchissements apparaissent nécessaires pour améliorer l’efficacité et l’équité des investissements éducatifs dans cette perspective ? Chapitre 6 : L’équité et les disparités au sein du système d’enseignement : il s’agira d’examiner les différenciations selon le sexe, la zone d’habitation et le revenu (si les données d’une enquête de ménages récente peuvent être exploitées) dans les scolarisations (taux et profils) d’une part, conséquemment dans la répartition des crédits publics mis à disposition du secteur, d’autre part. Chapitre 7 : Questions de gestion du système . Trois aspects principaux seront abordés i) les aspects qui concernent, au niveau du système, la distribution des responsabilités entre le centre, les échelons décentralisés et les établissements d’une part, l’administration et les communautés de l’autre; i) la répartition des moyens et des personnels en articulant l’analyse au niveau inter-provincial et l’analyse entre établissements individuels d’enseignement au niveau intra-provincial; iii) la gestion pédagogique des écoles et l’éventuelle capacité différentielle des établissements individuels à transformer les ressources à leur disposition en résultats scolaires chez les élèves. Chapitre 8 : Questions transversales et estimation d’un modèle de simulation : il s’agira ici d’une première approche de consolidation et de synthèse sur quelques questions structurelles clés du système en articulant les éléments empruntés aux divers chapitres du corps du rapport. Un modèle de simulation sera estimé pour permettre au comité ultérieurement en charge de faire des propositions pour la politique éducative du pays, de disposer d’un instrument pour cadrer ses propositions.

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Chapitre 1 : Contexte global de l’évolution du secteur de l’éducation (5-10 pages) 1. Les tendances démographiques Il s’agit de documenter les évolutions au cours des 10-15 dernières années, ainsi que les évolutions probables au cours des 10-15 prochaines années, d’une part de la population totale du pays, de l’autre de la population d’âge scolaire; on considère en priorité la classe d’âge qui correspond à celle de l’âge théorique du niveau primaire ou du cycle de base, mais il est utile de disposer en fait d’une base démographique dans laquelle on dispose de la population à plusieurs période du temps par année d’âge, de 6 à 24 ans; la distinction entre garçons et filles ainsi qu’entre espaces géographiques (distinction globale entre urbain et rural et entre provinces ou régions) est également souhaitable. Cette base démographique sera notamment utile dans la perspective des chapitres 2 et 6 du rapport. Il convient de signaler que les données démographiques (quelle que soit la précision apparente des chiffres disponibles) sont parfois de qualité incertaine; parfois le dernier recensement de la population est relativement ancien, parfois la confiance qu’on porte aux chiffres publiés n’est pas totale. De façon évidente il faut garder à l’esprit ces limites et être d’autant plus prudent que les données sont anciennes et qu’on considère des espaces géographiques limités; ainsi on maîtrise souvent assez mal l’intensité des phénomènes de migration entre zones ou espaces géographiques. Cela dit, des estimations, même approximatives, sont souvent meilleures que l’ignorance, même si on doit opérer de façon prudente. Une autre raison, pour laquelle les projections démographiques doivent être regardées avec la circonspection nécessaire, est qu’il peut exister des circonstances dans lesquelles les grands mouvements classiques d’évolution sont perturbés par des phénomènes soit spécifiques (guerres, migrations forcées de populations) soit relativement nouveaux à l’échelle des évolutions démographiques (on pense évidemment à l’impact du VIH-SIDA). Les implications de ces phénomènes doivent évidemment être incorporées dans les analyses démographiques (par exemple, on attendait 18 millions d’habitants au Mozambique à la fin des années 90, sur la base des données du début des années, mais il n’y en avait que 15,7 au recensement effectif de la population). Au-delà des impacts numériques sur le volume et la structure par âge de la population, il convient de cibler ces implications sur la population concernée par l’école, c’est à dire d’une part sur la morbidité et la mortalité des enfants et surtout des enseignants, d’autre part sur le nombre des orphelins et des enfants n’ayant qu’un seul parent. De façon générale, il est généralement utile de confronter certaines données de recensement et des projections qui en découlent, avec des observations directes issues des enquêtes de ménages lorsque celles-ci sont disponibles. Nous reviendrons sur ce point dans les chapitres 2 et 6. Enfin, de façon plus spécifique, il est observé que les données directes des recensements font apparaître de façon artificielle des phénomènes associés aux âges ronds au moment de la collecte; on trouve ainsi un gonflement (parfois très substantiel) du nombre des enfants de 10 ans au détriment de ceux qui ont soit 9 ans soit 11 ans. Ces phénomènes parasites doivent être traités à l’aide de techniques de lissage (coefficients de Sprague ou moyennes mobiles) avant que les projections ne soient effectuées pour obtenir des données sur le nombre d’enfants par année d’âge.

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2. Les agrégats macro-économiques et les finances publiques La discussion est organisée ici en premier lieu sur les articulations entre i) le produit national (PIB), ii) les recettes fiscales et parafiscales de l’état (RE) et iii) les ressources publiques nationales affectées au secteur de l’éducation (RPED). RE = α.PIB (avec α pour la pression fiscale) RPED = β .RE (avec β pour la proportion des recettes pour l’éducation) REPD = α.β . PIB (avec α.β pour la part des dépenses publiques d’éducation dans le PIB) Les évolutions dans le passé jusqu’à la période présente du PIB, ainsi que des coefficients α et β , sont évidemment importantes à documenter pour comprendre comment les ressources publiques nationales pour l’éducation sont déterminées. Du point de vue du secteur de l’éducation, on a tendance à considérer que les évolutions (passées ou dans un futur utile) tant du PIB que du coefficient α, sont exogènes; c’est évidemment beaucoup moins le cas en ce qui concerne le coefficient β car il manifeste des choix budgétaires qui sont dans une certaine mesure susceptibles d’être modifiés. Cela dit, deux éléments très importants sont aussi à prendre en considération : i) le service de la dette (intérêt et capital) et ii) l’intervention de capitaux extérieurs; ceux-ci peuvent prendre la forme de dons et/ou de prêts, de support budgétaire général ou au secteur en particulier, soit pour des dépenses courantes soit pour des dépenses d’investissement, sachant que la frontière entre ces deux catégories en principe exclusives, peut être en fait relativement floue. De façon simple, le service de la dette correspond à un prélèvement initial sur les recettes, avec comme conséquence de réduire le volume des ressources publiques effectivement disponibles pour les actions domestiques du gouvernement; de façon symétrique, les flux de capitaux étrangers entrant vont évidemment avoir l’effet contraire. Selon les pays, ces deux éléments peuvent avoir un rôle relativement modeste ou au contraire très notable; de même, dans un pays donné, il peut y avoir eu (ou non), au cours de la dernière décennie, des variations substantielles dans leur influence au cours du temps. La documentation suffisamment détaillée de ces deux aspects est donc incontournable pour compléter l’analyse initiale. 3. Placer le financement de l’éducation dans le pays dans une perspective comparative Aussi bien en ce qui concerne la dimension démographique que celles du contexte macro-économique et des finances publiques et celle de la priorité budgétaire accordée à l’éducation, il est utile de donner un éclairage de comparaisons internationales (pays de la même région, pays situés à des niveaux de développement comparables). Cette mise en perspective est intéressante pour situer la position du pays et ainsi imaginer les possibilités des marges de manœuvre ou l’ampleur des contraintes pour le pays analysé. 4. Examiner les possibilités d’évolution dans la décennie à venir Après avoir documenté les évolutions au cours des dix années passées, il est également d’intérêt d’examiner quelles pourraient être les évolutions au cours de la période future. Il sera ainsi utile

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d’évaluer (sur la base des données fournies par les macro-économistes) quelles pourraient être les évolutions du PIB et de la pression fiscale d’une part, et comment pourrait évoluer la priorité (coefficient β) donnée par le pays à l’éducation d’autre part. Cette priorité pour l’éducation est évidemment à mettre dans le contexte de l’initiative PPTE et de l’allégement correspondant du service de la dette, ainsi que des modifications possibles dans les priorités budgétaires de l’état vis-à-vis du secteur de l’éducation dans l’optique de la stratégie du pays pour la réduction de la pauvreté.

Chapitre 2 : Analyse des scolarisations (15-25 pages) Il peut être utile de donner d’abord un bref rappel des réformes, récentes ou en cours, susceptibles d’affecter le nombre ou la structure des scolarisations de sorte à illustrer le contexte de la politique éducative du pays. 1. Examen global de la couverture éducative par niveau et évolution Une première étape consiste à décrire les effectifs scolarisés par niveaux et types d’éducation, et ce sur une période d’une dizaine d’années (ou davantage si nécessaire). Il s’agit plutôt de donner une image temporelle globale, ce qui n’implique pas de documenter chacune des années pour les années les plus anciennes. En utilisant les données sur la population scolarisable pour les années d’âge théorique correspondant à chacun des cycles d’enseignement, on peut ainsi décrire l’évolution des taux bruts de scolarisation par niveau au cours de la dernière décennie. Il peut être utile de placer la structure des taux de scolarisations par niveau dans le pays avec ce qui est observé dans des pays comparables (pays de la même région, pays de même niveau de développement économique). 2. La structure des scolarisations dans les différents types d’écoles Dans de nombreux systèmes éducatifs cohabitent des établissements publics et des établissements d’autres types, notamment privés (confessionnels et/ou laïcs) ou communautaires, recevant, ou non, des subventions de l’Etat. Il est intéressant de documenter comment les effectifs globaux présentés précédemment se distribuent entre les différents types d’établissement et quelle est la dynamique dans le temps de cette distribution. 3. Mesure agrégée de l’efficience quantitative du système L’idée générale est ici de confronter le volume du financement public alloué à l’éducation avec une mesure de la couverture globale du système scolaire. Pour calculer cette mesure de couverture globale, on peut se fonder sur la structure des taux de scolarisation observés aux différents niveaux scolaires (primaire, premier cycle et second cycle secondaire, enseignement supérieur). Une étape intermédiaire pour le calcul consiste à transformer la structure des taux de scolarisation en celle des niveaux terminaux de scolarisation d’une cohorte de jeunes entre ceux qui n’ont pas eu accès à l’école (aucune année de scolarisation) et ceux qui ont bénéficié, à la fin de leurs études, d’un nombre plus ou moins grand d’années de scolarisation. On calcule ainsi une durée moyenne d’études (ou une espérance de vie

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scolaire) d’un individu au sein de sa génération. Pour contraster cet indicateur de couverture globale du système (durée moyenne des scolarisations) avec le volume des ressources publiques mobilisées, deux méthodes simples peuvent alors être mises en œuvre : * la première consiste à faire le rapport des deux grandeurs et calculer l’indicateur du nombre moyen d’années d’études pour des dépenses publiques en éducation représentant 1 % du PIB du pays. Ce rapport peut être calculé à différents moments dans le temps, permettant ainsi d’identifier si le système améliore, ou détériore, sa performance sur ce plan. Le rapport estimé dans le pays sous analyse peut aussi être contrasté avec la valeur observée dans des pays comparables. * la seconde consiste à mettre directement les deux grandeurs en regard dans un graphique sur lequel est représentée non seulement la position du pays considéré, mais aussi celle d‘autres pays qui lui sont raisonnablement comparables. Les données sur un échantillon large de pays sont disponibles dans les bases de l’UNESCO ou de la Banque Mondiale. On examine alors dans quelle mesure le pays réussit à obtenir une couverture globale de son système éducatif qui est performante compte tenu des ressources publiques qu’il mobilise, eu égard à sa position relative vis-à-vis des autres pays. 4. Détermination du profil moyen de scolarisation Au point 1, ci-dessus, on utilise la statistique du taux brut de scolarisation. Or cette statistique, qui donne certes une idée de la capacité relative d’un cycle d’enseignement, en référence à la population d’âge théorique correspondant, est très peu pertinente pour mesurer la couverture effective du cycle considéré. Il y a à cela deux raisons principales : i) la première est que cette statistique est une moyenne qui vaut sur l’ensemble des différentes années du cycle (par exemple souvent 6 années pour le cycle primaire), alors qu’il est possible (en fait fréquent) qu’il y ait des abandons d’études en cours de cycle, si bien que ceux qui le terminent sont moins nombreux que ceux qui l’ont commencé; ii) la seconde raison est que les redoublements augmentent de façon artificielle le chiffre réel, car il y a alors un double compte. Le graphique ci-après illustre les problèmes rencontrés. %

60 52 43

26

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1 2 3 4 5 6 7 8 Classes

Les lignes horizontales en traits pleins épais marquent la position des taux bruts de scolarisation, respectivement de 52 % dans le primaire et 10 % dans le premier cycle secondaire, alors que les lignes

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en traits pointillés obliques caractérisent la réalité des scolarisations dans le pays : sur 100 enfants d’une génération, 60 accèdent à l’école et seulement 26 (moins de la moitié) achèvent effectivement le cycle primaire. En absence de redoublement et en supposant une structure régulière des abandons au long du cycle, on obtient une valeur moyenne de la scolarisation sur le cycle de 43 % [(60 + 26)/2]. Mais comme il y a dans ce système un taux de redoublement de 21 %, on retrouve ainsi le taux brut de scolarisation de 52 % [43x1,21]. On voit bien dans cet exemple que le chiffre de 52 % ne permet pas de résumer de façon pertinente la situation de la couverture de la scolarisation primaire dans le pays. En fait le chiffre de 52 % résulte de la combinaison i) du taux d’accès en 1ère année (60 %), ii) du taux de scolarisation en 6ème année (26%), ces deux chiffres impliquant un taux de rétention en cours de cycle de 43 % (26/60), et iii) de la fréquence moyenne des redoublements (21 %). Si on ne devait retenir qu’un chiffre pour caractériser la couverture effective de la scolarisation primaire, ce serait celui de 26 % (taux de scolarisation en 6ème année), car si on considère que le cycle primaire est un voyage, par exemple entre Bamako et Conakry, on mesure bien que le voyage est réussi lorsqu’on arrive à Conakry, pas quand on s’est perdu sur la route. Cet argument est soutenu par les observations empiriques qui suggèrent qu’un jeune ait validé au moins 5 années d’un enseignement primaire de qualité raisonnable pour i) que ses chances soient fortes d’être ultérieurement un adulte alphabétisé de façon durable, ii) qu’il puisse contribuer au progrès et iii) qu’il soit capable de saisir les opportunités existantes pour sortir de la pauvreté. Sur le plan de la réflexion de politique éducative, on voit bien aussi la supériorité du profil de scolarisation sur le taux brut de scolarisation; la statistique du taux net de scolarisation (rapport du nombre d’élèves scolarisés d’âge normal à la population scolarisable de la même tranche d’âge) n’est pas considérée ici en raison des problèmes encore plus sérieux qu’elle présente lors de son utilisation. La question pratique est maintenant de déterminer comment estimer ces profils. Plusieurs techniques peuvent être imaginées sachant qu’il s’agit au sens large d’examiner d’une part combien d’élèves d’une génération donnée accèdent à telle ou telle classe (du cycle primaire, ou plus largement, du système éducatif) et d’autre part combien il y a d’enfants dans le pays ayant le même âge. Cela dit, on peut identifier plusieurs approches (complémentaires) pour réaliser cette opération, d’une part selon l’usage qu’elles font des données démographiques classiques, des données de recensement scolaire et des estimations tirées des enquêtes de ménages d’autre part selon la perspective, transversale ou longitudinale, qui est suivie. Dans tous les cas, une appréciation du niveau de qualité accordée aux différentes sources d’information est évidemment cruciale. 4.1 Si on a bonne confiance à la fois dans les données démographiques agrégées et les dans les statistiques scolaires, une première possibilité consiste à regarder au cours d’une année t donnée le nombre de non-redoublants dans chacune des classes et à le rapporter au nombre de jeunes de même âge dans le pays. On obtient ainsi un instantané transversal du profil de scolarisation. Cela dit, comme il a pu y avoir des évolutions dans l’accès à l’école au cours des dernières années, ce profil peut déformer la réalité en faisant croire que la rétention est plus mauvaise qu’elle n’est en réalité (si le taux d’accès suit une évolution croissante). Pour éviter cela, on peut adopter une approche longitudinale dans laquelle on examine la situation de la cohorte qui est aujourd’hui par exemple en dernière année primaire. On identifie d’abord combien d’enfants sont rentrés à l’école 6 ou 7 ans auparavant (en tenant

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compte du nombre d’années d’études du cycle et de la fréquence des redoublements) qu’on rapporte à une classe d’enfants d’âge correspondant (examiner la distribution des âges à l’entrée et calculer la moyenne, ou bien calculer la taille d’une cohorte fictive qui aurait la même distribution d’âge que celle des entrants à l’école) dans le pays pour calculer un taux d’accès à l’école de cette cohorte. En rapportant le nombre de ceux qui accèdent en dernière année du cycle l’année t et ceux qui accédaient à la première année de ce même cycle n (6 ou 7 dans l’exemple) années auparavant, on estime un taux de rétention longitudinale de cette cohorte. Cette méthode est intéressante, mais elle présente toutefois l’inconvénient essentiel de fournir des indications pour une cohorte ancienne alors que des évolutions ont pu être réalisées depuis aussi bien en ce qui concerne l’accès que la rétention en cours de cycle. Pour obtenir des estimations qui sont récentes et sans biais systématique, une méthode pseudo-longitudinale apparaît intéressante. Elle consiste premièrement à calculer le taux d’accès en première année du cycle pour l’année la plus récente et ensuite à attacher le profil de rétention «actuel» estimé sur la base des données transversales des non-redoublants dans chacune des classes du cycle au cours des deux dernières années scolaires. Ce faisant, on peut calculer de manière longitudinale la rétention des élèves entre la classe (j) au cours de l’année (t) et la classe (j+1) au cours de l’année (t+1). En procédant ainsi entre chaque couple de classes du cycle et en composant de manière multiplicative les informations pour chacun de ces couples, on peut estimer le profil de rétention entre la première année du cycle et n’importe quelle autre jusqu’à la dernière année du cycle. On voit que dans cette méthode (comme d’ailleurs dans la méthode longitudinale complète), on n’utilise les données démographiques que pour l’estimation du taux d’accès, le profil de rétention, attaché à ce taux d’accès étant estimé en n’utilisant que les données internes du système scolaire. Comme ces données sont généralement disponibles pour de nombreuses années, ce calcul peut être conduit à la fois pour la période actuelle et pour des périodes situées 5 ou 10 années avant pour juger des évolutions. Le schéma ci-après visualise les principales méthodes utilisables pour estimer les profils recherchés sur la base des données scolaires et des données démographiques.

Années scolaires 93-94 94-95 98-99 99-00

CP1 non redoublants NR13 NR14 NR18 NR19 Population 6 ans POP63 POP64 POP68 POP69 % accès NR1j/POP6J 68 70 75 74 % rétention longitudinal 62 CM2 non redoublants NR63 NR64 NR68 NR69 Population 11 ans POP113 POP114 POP118 POP119 % accès NR6j/POP11J 33 36 44 43 % rétention transversal 48 51 58 58 % rétention pseudo longitudinal 54 64

[Π (Nri,j/Nri-1,j-1)]

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Dans le schéma, NRij correspond au nombre de non-redoublants dans la classe i (i=1 si CP1; i=2 si CP2; … ; i=6 si CM2) au cours de l’année scolaire j (j=3 si 1993-94; j=4 si 1994-95; … ; j=9 si 1999-2000). POPkj correspond au nombre des jeunes d’âge k (k=6 si 6 ans; k=11 si 11 ans) au cours de l’année scolaire j. 4.2 Si on a une confiance insuffisante dans les données démographiques et/ou dans les statistiques scolaires, il peut être utile d’avoir recours à l’utilisation des données d’une enquête de ménages. Rappelons que, dans tel ou tel pays, les données du dernier recensement de la population peuvent être anciennes si bien que les projections faites deviennent incertaines; elles peuvent aussi être récentes, mais qu’on juge néanmoins prudent de conforter les mesures précédentes par des estimations fondées sur une enquête de ménages. La confiance insuffisante dans les données peut aussi concerner les statistiques scolaires. Même s’il est vrai qu’on dispose souvent aujourd’hui de données plus ou moins fiables, ce n’est pas le cas de tous les pays; les données sur les effectifs scolarisés peuvent en particulier être sujettes à caution notamment pour les trois raisons suivantes : i) On cherche les effectifs de non-redoublants, mais la distinction entre redoublants et non-redoublants peut être mauvaise en particulier pour les premières années du cycle primaire; ainsi, certains élèves, inscrits l’année (t) dans la première classe du cycle, quittent en fait très rapidement les études pour les reprendre l’année suivante; bien que formellement inscrits au cours de l’année (t), ils n’ont pas été présents, si bien que lors de leur réinscription au cours de l’année (t+1), ils peuvent être comptabilisés comme de nouveaux entrants. ii) Il y a des incitations chez les directeurs d’école à surestimer leurs effectifs soit parce que les matériels pédagogiques sont donnés à l’école sur la base des effectifs déclarés, soit parce que les directeurs d’école reçoivent eux-mêmes une prime de fonction qui est assise sur les effectifs déclarés, soit enfin par excès de zèle des directeurs pour montrer que la politique du gouvernement d’extension de la scolarisation est une réussite. iii) La collecte des informations n’est pas exhaustive (en particulier si la collecte a eu lieu dans une période de grève), mais le service des statistiques scolaires publie les chiffres pour les écoles qui ont répondu. Dans ce cas, la couverture de la collecte est variable selon les années; si des estimations ne sont pas faites pour les écoles manquantes, il s’ensuit que l’application des méthodes d’estimation des profils mentionnées ci-avant est évidemment susceptible d’imprécisions et de biais. Si on considère que les données scolaires sont adéquates et que les données démographiques sont incertaines, il est alors pertinent de compléter l’analyse du point A ci-dessus par l’estimation du taux d’accès en première année du cycle estimé dans l’enquête de ménages; on calcule alors la proportion des jeunes de 10-11 ans qui ne sont jamais allé à l’école, de laquelle on dérive le taux d’accès en première année d’études au moment de l’enquête. Sur cette base on articule les analyses de rétention en cours d’études sur base des statistiques scolaires, comme dans le point A, ci-avant. Si on considère que les statistiques scolaires sont elles-mêmes de mauvaise qualité, on peut poursuivre l’investigation au sein des données de l’enquête de ménages pour estimer la totalité du profil; cela dit, cela suppose que la taille de l’enquête de ménages soit suffisamment grande pour que ce travail donne des résultats d’une précision satisfaisante.

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6. Question d’offre et de demande pour instruire les politiques éducatives Supposons maintenant qu’à l’aide de ces diverses techniques, on obtienne le profil de scolarisation recherché. Supposons qu’il soit celui représenté ci avant (taux d’accès en première année primaire de 60 %, taux d’accès en sixième année primaire de 26 % (taux de rétention de 43 % sur le cycle), et 21 % pour la proportion des redoublants au sein des effectifs scolarisés. En référence à une perspective de scolarisation universelle effective (atteinte de la 6eme année), cela signifie que le pays souffre d’une insuffisance à la fois en matière d’accès en première année et de rétention en cours de cycle. Une pratique commune consiste à penser les remèdes dans la sphère de l’offre scolaire. Il suffit de construire des écoles et de former des maîtres; il est certes possible que cela soit nécessaire; mais l’argument est un peu court. Examinons de façon successive le cas de l’accès et celui de la rétention. 5.1 Analyse de l’accès en première année du cycle primaire Observant un taux d’accès de 60 %, une question de base est de déterminer dans quelle mesure ceux qui n’ont pas accès à scolarisation sont dans cette situation a) parce qu’il n’y a pas d’école dans leur proximité géographique ou que l’école est d’une capacité insuffisante pour répondre aux besoins, ou bien b) parce qu’ils ont décidé de ne pas fréquenter cette école, pourtant localement présente. Lorsqu’un enfant est dans le premier cas, il est clair qu’il y a carence du côté de l’offre scolaire; cela dit, on ne peut évidemment pas assurer que cet enfant fréquenterait effectivement l’école si elle existait. Il est alors sans doute raisonnable d’anticiper qu’il se comporterait comme la moyenne des autres enfants effectivement exposés à une offre localement présente de caractéristiques standard. Au niveau agrégé, la réalité se trouve donc quelque part entre deux configurations extrêmes, à savoir i) celle dans laquelle une offre existe effectivement dans 60 % des villages (pour 60 % des enfants), sachant que tous les enfants de ces villages ont effectivement accès à l’école, et ii) celle dans laquelle une offre existerait localement pour tous les enfants (dans tous les villages), mais avec seulement 60 % d’entre eux qui s’inscriraient en première année du cycle. Pour ces enfants qui ne vont pas à l’école en dépit d’une offre locale, la question se pose alors de savoir dans quelle mesure i) cette école ne leur convient pas (ou pas suffisamment, mais on doit chercher à identifier les caractéristiques qui devraient être adaptées), et ii) cette école, qui pourrait leur convenir, est trop coûteuse (coûts directs et coûts d’opportunité), pour leurs parents, compte tenu des contraintes que ceux-ci subissent. Sur le plan pratique, il est préférable d’abord de chercher à répondre à la première question. Cela suppose qu’on sache a) évaluer la fréquence des situations dans laquelle les enfants n’ont pas d’école à proximité, et b) évaluer le taux d’inscription effectif des enfants qui ont une école de caractéristiques ordinaires dans leur proximité géographique. Ce travail peut être conduit de deux façons complémentaires, sachant que la disponibilité des données n’est souvent pas spontanément assurée : la première consiste à fusionner des informations sur les nouveaux entrants scolarisés dans un village donné (généralement disponibles dans le service des statistiques scolaires) avec celles sur le nombre des jeunes d’âge correspondant dans le même village et les villages alentours, eux-mêmes pourvus ou non d’école. La disponibilité de ces dernières informations suppose l’existence d’un recensement récent, plus la capacité de fusionner les deux sources; cela est parfois possible. La seconde méthode consiste à utiliser les données d’une enquête de ménages, sachant que celle-ci, pour être vraiment utile, doit comporter, outre bien sur des données sur la fréquentation scolaire (actuelle et passée) des jeunes,

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des informations sur la distance du domicile du ménage à l’école primaire la plus proche. Il est donc clair que ces analyses ne sont pas immédiates (elles peuvent faire l’objet d’un travail spécifique en marge de l’analyse sectorielle si les contraintes de temps l’imposent); il ne fait pas de doute non plus que l’absence de telles analyses peut conduire à des erreurs majeures de politique éducative ! Un des résultats les plus fondamentaux, et les plus utiles, de ce type d’analyse est de déterminer combien parmi les enfants qui ne s’inscrivent pas à l’école i) sont en situation d’offre inexistante et ii) sont en situation de pouvoir être scolarisés, mais ne le sont pas. Il est bien sur intéressant, de façon complémentaire, de savoir comment ces chiffres se repartissent entre garçons et filles, urbains et ruraux et habitants de telle ou de telle région ou province. Imaginons qu’on trouve que les proportions suivantes pour i) les enfants en situation d’offre lacunaire, et ii) les enfants qui accèdent à l’école en situation d’offre avec ces caractéristiques standard; pour illustrer des configurations différentes, deux cas sont considérés.

Proportion d’enfants en situation d’offre lacunaire (%)

Proportion d’enfants qui accèdent à l’école lorsqu’une offre locale est présente (%)

Cas 1 32 88 Cas 2 10 67

Dans le cas 1, 32 % des enfants sont actuellement en situation d’offre lacunaire; par contre lorsque l’offre (avec ces caractéristiques actuelles) est présente, 88 % des enfants accèdent effectivement en première année primaire. Dans ces conditions, il est clair que des progrès significatifs dans l’accès à l’école peuvent être réalisés par une politique de développement de l’offre selon les modalités traditionnelles; on pourrait ainsi passer d’un taux d’accès de 60 [(32 x 0) + (100-32) x 88] à 88 %. Dans le cas 2, la situation est assez différente, car il n’y a que 10 % des enfants qui sont en situation d’offre lacunaire, alors que seulement 67 % des enfants accèdent à l’école lorsque celle-ci existe pourtant dans leur proximité raisonnable. On estime alors que, même si une politique classique d’offre pouvait certes contribuer à réaliser des progrès, ceux-ci seraient finalement relativement modestes avec une augmentation seulement de 60 [(10 x 0) + (100-10) x 67] à 67 % du taux d’accès à l’école. Ceci suggère alors qu’il soit nécessaire de se poser le second type de questions sur les facteurs associés à non fréquentation de l’école en situation de l’offre locale d’une école de caractéristiques traditionnelles. Il reste bien sur deux groupes de raisons, des raisons de nouveau situées du côté de l’offre (caractéristiques des écoles), et des raisons situées du côté de la demande (coûts et bénéfices privées), sachant qu’on a évidemment tendance à cibler les politiques scolaires comme instrument premier pour l’action (de nombreux facteurs sans doute importants sont toutefois exogènes pour l’analyse de l’école). Pour que les caractéristiques de l’école soient davantage à même de rencontrer les demandes familiales, on peut penser à une grande variété de facteurs potentiels : contenus des programmes, caractéristiques du maître, calendriers et horaires scolaires (sur l’année et/ou la journée), … Comme le poids de chacun de ces facteurs (leur importance même) est susceptible de différer d’un lieu à l’autre sur le territoire d’un pays donné selon les traditions et/ou les activités économiques locales, il peut

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certes être utile de chercher à les identifier de façon spécifique; mais il est probablement surtout utile de savoir qu’en telles circonstances, c’est surtout en développant une structure institutionnelle dans laquelle on articule (dans les modes de fonctionnement et éventuellement de financement, ainsi que dans les modes de relation entre l’état et les différentes communautés) les nécessités et les exigences d’une école nationale d’une part, avec les aménagements nécessaires pour rencontrer au niveau local les demandes effectives des familles d’autre part. 5.2 Analyse de la rétention en cours de cycle primaire Il y a bien sur une continuité entre l’accès et la rétention puisque ce sont partiellement, mais partiellement seulement, les mêmes facteurs qui exercent leur influence. Nous ciblons ici les aspects plus spécifiques de la rétention en cours d’études. Ce qui est en fait clairement spécifique de la rétention, c’est que la question des abandons ne se pose que pour ces enfants qui ont eu un jour accès à l’école (il y avait alors une offre et une demande qui s’étaient rencontrées), et qui, un autre jour, vont mettre un terme à leurs études. Ce qui est spécifique de la rétention, ce sont donc les changements qui se sont constitués entre ces deux moments. Ces changements entre l’accès à l’école et l’abandon des études, peuvent de nouveau concerner des défaillances du côté de l’offre de services éducatifs ou bien du côté de la demande familiale. Les défaillances du côté de l’offre peuvent elles-mêmes être potentiellement de nature quantitative ou qualitative, sachant que celles du côté de la demande peuvent concerner une augmentation des coûts de scolarisation pour les familles et/ou une diminution de la perception des bénéfices qui lui sont associés. * Concernant en premier lieu l’offre de services éducatifs, une raison des plus drastiques est qu’il est possible que l’école dans laquelle l’enfant a été inscrit en première année d’études, n’offre pas une possibilité sur place de continuité éducative jusqu’à la fin du cycle primaire. Dans ces conditions (situation d’école incomplète), l’enfant devrait aller dans une autre école généralement éloignée du domicile parental, avec pour conséquence, une probabilité très forte d’abandon des études; cela dit, dans ces conditions, il y a bien arrêt prématuré des études, mais il serait plus pertinent de dire que c’est l’école qui abandonne les élèves, plutôt que ce sont les élèves qui abandonnent l’école. Pour évaluer dans quelle mesure ces situations, dans lesquelles la continuité éducative jusqu’en fin de cycle n’est pas assurée, peuvent contribuer à rendre compte du niveau de rétention en cours d’études primaires dans un pays, on peut procéder de la façon suivante :

. on peut d’abord penser à caractériser chaque école selon le nombre des années d’études offertes, et calculer (au niveau national ou par province ou région), au cours d’une année scolaire donnée, la proportion des élèves qui sont scolarisés dans une école à cycle incomplet. Cette méthode n’est pas très bonne d’une part parce les écoles incomplètes n’ont par définition pas tous les niveaux du cycle (on sous-estime ainsi la fréquence réelle de ces situations), et d’autre part parce que certaines écoles peuvent ne pas offrir tous les niveaux au cours d’une année scolaire déterminée, et pourtant assurer la continuité éducative des élèves qui y sont scolarisés (parce qu’il y a des recrutements alternés ou parce que certaines écoles sont récentes mais offriront progressivement les différents niveaux du cycle lors des premières années de fonctionnement (on surestimerait ainsi la réalité de la non-continuité éducative). Pour éviter le

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premier écueil, on pourrait calculer la proportion des élèves dans des écoles dites incomplètes sur la base des nouveaux entrants de première année, mais cela laisserait intacte la seconde difficulté.

. une méthode préférable consiste à utiliser des données individuelles d’écoles sur deux années scolaires successives. En effet, il peut ne pas être pertinent de qualifier une école qui n’offrirait pas toutes les classes du cycle au cours d’une année scolaire déterminée comme n’assurant pas la continuité éducative à ses élèves. Une raison peut-être que l’école assure un recrutement en année alternée, ou bien que l’école est de création récente et qu’elle augmente son offre progressivement pour être en fait complète et offrir toutes les classes aux élèves le moment venu. La méthode proposée ici permet d’éviter ces inconvénients. Elle se fonde sur le calcul, pour chaque école, d’une série de taux de transition entre cours successifs sur deux années successives (rapport du nombre des nouveaux entrants de CP2 au cours de l’année t+1, et du nombre des nouveaux entrants de CP1 au cours de l’année t,….). Si un de ces taux de transition vaut 0, cela signale une situation de discontinuité éducative dans cette école. On peut alors identifier (par sommation des données des différentes écoles) dans chaque classe du cycle la proportion des élèves qui ne peut poursuivre ses études localement. Par agrégation multiplicative de ces taux sur les différentes classes du cycle, on obtient une estimation de la proportion des nouveaux entrants qui ne peut atteindre la dernière année du cycle en raison d’une offre locale qui n’assure pas la continuité éducative. Par complémentarité on peut calculer quel est le taux de rétention (entre la première et la dernière année du cycle) des élèves scolarisés dans ces écoles qui permettent potentiellement aux élèves d’avoir une scolarité complète sur le cycle. Ceci donne une idée de ce que pourrait être la rétention des élèves si la continuité éducative était assurée dans toutes les écoles. Le tableau ci-après donne le genre de résultats qu’on peut obtenir dans deux pays A et B, deux pays supposés être caractérisés par un même taux moyen de rétention de 50 %.

Taux de rétention

moyen (%) % entrants en première année dans une école n’offrant la continuité éducative sur le cycle

% rétention dans les écoles offrant la continuité éducative sur le cycle

Pays A 50 17 60 Pays B 50 44 90

Dans le pays A, il y a relativement peu d’élèves (17 % des entrants en 1ère année) qui sont scolarisés dans une école où la continuité éducative n’est pas assurée, sachant que dans les écoles où elle l’est, seulement 60 % des nouveaux entrants en première année du cycle vont jusqu’à son terme. Dans le pays B, au contraire, ce sont 44 % des entrants en première année qui sont dans un contexte qui ne leur permet pas d’achever localement le cycle; par contre dans les écoles où la continuité éducative est assurée, ce sont 90 % des élèves qui resteront scolarisés jusqu’à la fin du cycle d’études. Sur le plan de la politique éducative, le message n’est évidemment pas le même :

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. dans le pays B, la difficulté essentielle réside dans l’offre d’enseignement; lorsque l’offre (telle que couramment organisée) est présente, la rétention des élèves est forte (90 %). Cependant, elle est souvent défaillante (pour 44 % des entrants de 1ère année), et la politique éducative doit cibler l’extension d’une offre classique de scolarisation pour tous les élèves sur l’ensemble du cycle (cela ne veut bien sur pas dire qu’il ne serait pas utile de l’améliorer pour augmenter la qualité); . dans le pays A, il y a bien sur 17 % des entrants de première année qui sont exposés à une offre quantitativement inadéquate, et il ne fait pas de doute qu’il faille corriger cet aspect. Cela dit, la mesure n’aura qu’un impact limité sur le chiffre national de rétention dans le cycle (il pourrait ainsi passer de 50 à 60 %), car la rétention est mauvaise (60 %) même dans les écoles qui assurent effectivement la continuité éducative. Dans ce contexte, il est clair qu’il faut examiner comment augmenter la rétention dans les écoles du pays, sachant que ce ne sera pas en offrant davantage de ce qui ne marche pas actuellement suffisamment bien, qu’on est susceptible de résoudre le problème; des changements plus profonds apparaissent incontournables. * concernant en second lieu les évolutions de l’équilibre entre les coûts et les bénéfices perçus par les familles de la scolarisation de leurs enfants depuis l’entrée en première année, plusieurs aspects peuvent être examinés. Une possibilité est que les coûts aient augmenté, une autre est que les bénéfices aient diminué (ou bien sur que les deux termes aient évolué en même temps dans un sens défavorable à l’école).

. Les coûts peuvent augmenter notamment pour deux raisons : i) on sait que les coûts d’opportunité augmentent avec l’âge; ainsi, les enfants plus âgés sont plus capables de contribuer à la production domestique (sachant par ailleurs que les parents sont souvent réticents à ce que leur fille soit en dehors du foyer lorsqu’elles approchent de la puberté); ii) les coûts directs et d’opportunité augmentent aussi lorsque l’enfant doit redoubler une classe. . Les bénéfices perçus par les familles peuvent diminuer, et ce également pour deux catégories de raisons : i) il est possible que l’école se révèle ne pas avoir la qualité anticipée ou avoir certaines caractéristiques jugées non souhaitables par les familles (maître trop souvent absent, calendrier scolaire non compatible avec les activités agricoles, contenu des apprentissages trop éloigné des préoccupations locales,...); ii) il est possible que le jeune ne se révèle pas réussir suffisamment dans ses études si bien que les parents en viennent à penser que les bénéfices initialement envisagés ne se matérialiseront pas. Ces différents facteurs peuvent avoir un impact, et il est évidemment utile de chercher à évaluer empiriquement d’abord leur intensité et ensuite leur impact. Cela dit, il est important de citer ici de façon plus spécifique l’influence des redoublements de classe. Le redoublement de classe est susceptible de jouer un rôle particulier dans l’explication des abandons des études en cours de cycle. En effet, le redoublement est considéré par les familles comme un signal fort que l’enfant ne réussit pas bien à l’école et que les bénéfices attendus ne seront pas atteints. Comme le redoublement implique par ailleurs une augmentation des coûts pour les parents, on peut alors anticiper qu’il conduira à modifier, pour ces derniers, le bilan des coûts et des bénéfices dans un sens de la sortie de l’école. Sur un plan plus agrégé et comparatif, on peut aussi observer en premier lieu que : i) le taux de redoublement varie de façon très forte d’un pays à l’autre (2 % au Zimbabwe,

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14 % au Niger, 24 % en Côte-d’Ivoire, 30 % au Cameroun, 36 % au Togo en 1995) sans relation nette avec le niveau de développement, et ii) son niveau se révèle être extrêmement stable sur les trente dernières années dans la très grande majorité des pays (14 % au Niger en 1980 et en 1995, 20 % en Côte-d’Ivoire en 1980, 24 % en 1995, 30 % au Cameroun en 1980 comme en 1995). D’une façon générale, les redoublements sont beaucoup plus fréquents dans les pays africains francophones et lusophones que dans leurs homologues anglophones (bien qu’ il y ait des pays comme le Malawi dans lequel la fréquence des redoublements est forte). Un des arguments importants donnés en faveur des redoublements est lié à la qualité des systèmes et aux apprentissages individuels. Il a été montré que cet argument n’était pas empiriquement valide aussi bien dans des analyses comparatives sur données nationales agrégées (les élèves qui sont scolarisés dans un système dans lequel les redoublements sont fréquents n’ont pas en moyenne de meilleurs niveaux d’acquisitions, Mingat et Sosale, 2000) que dans des analyses sur données individuelles dans des pays particuliers (les élèves qui redoublent ne progressent pas mieux que leurs homologues de même niveau d’acquisitions qui sont passés dans la classe supérieure, Confémen, 2000). Par contre si l’impact des redoublements sur la qualité du système n’est pas avéré, celui sur la fréquence des déperditions précoces en cours de cycle est, lui, empiriquement bien établi. Ainsi, il a été estimé qu’en moyenne, les systèmes qui avaient un point de plus de redoublement, avaient un taux de rétention sur les six premières années d’études de 0,8 point plus faible (il est montré que l’impact est plus fort chez les filles que chez les garçons). Si dans un pays donné (pays A, pour suivre l’exemple précédent), le taux de redoublement est de 25 %, l’estimation précédente suggère que si ce taux était ramené à 10 %, la proportion des entrants en primaire qui termineraient le cycle pourrait être augmentée de 12 % [(25-10) x 0,8]. On arrive ainsi à un taux de rétention qui pourrait passer i) de 50 de la 60 % en assurant la continuité éducative dans les 17 % des écoles qui ne l’offrent pas et ii) de 60 à 72 % en réduisant la proportion des redoublants de 25 à 10 % des effectifs scolarisés. A l’issue de ces estimations, on peut juger si le résultat obtenu en termes de rétention est, ou non, suffisant. Si on juge le résultat plus ou moins convenable, cela suggère que les politiques correspondantes (assurer la continuité éducative et réduire les redoublements) seraient a priori plus ou moins adéquates pour traiter du problème; si on juge au contraire le résultat insuffisant, cela implique que les politiques éducatives «classiques» ne seront, elles-mêmes, pas suffisante et qu’il faudra explorer des politiques éducatives nouvelles et peut-être plus difficiles : i) assurer suffisamment de flexibilité dans le fonctionnement des écoles pour rencontrer les demandes familiales, puis ii) agir directement sur la demande en subventionnant les familles pour lesquelles leurs conditions économiques limitent la scolarisation de leurs enfants.

Chapitre 3 : Analyse des aspects financiers (20-25 pages) 1. L’évolution des ressources publiques par niveau et type de dépenses Dans certains pays, il existe plusieurs ministères en charge de services éducatifs; ainsi il peut exister un ministère pour le primaire et le secondaire général, un autre pour le supérieur et un troisième pour

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l’enseignement technique et professionnel, sachant que certains programmes peuvent en outre être organisés ou financés par le ministère de la santé, de l’agriculture, de la justice, du travail,.. Par ailleurs, certaines structures locales peuvent recevoir des subventions globales non affectées, mais ces subventions peuvent pour partie servir à financer des services éducatifs. L’idée est de consolider les dépenses publiques pour les activités d’éducation et de formation indépendamment des arrangements nationaux particulier, en évitant à fois les oublis et les doubles comptes. On a, à ce stade, une conception budgétaire agrégée en série temporelle sur une dizaine d’années si possible, avec deux distinctions importantes. La première s’attache à la séparation entre budgets votés et dépenses réalisées, avec la possibilité de décalages entre les deux, soit qu’il y ait eu des dépassements (situation inflationniste, hausse significative des salaires en cours d’année,..), soit que les inscriptions budgétaires n’aient pas été en totalité mises en œuvre (embargo budgétaire en cours d’année ou bien difficultés du secteur à exécuter les actions décidées). Il importe ici de comparer les budgets et les dépenses effectives, et d’identifier les raisons des éventuels écarts. La seconde distinction est entre les dépenses de fonctionnement et les dépenses en capital. Concernant les dépenses de fonctionnement, on examinera leur distribution par niveaux et types d’enseignement, ce qui impliquera en général des regroupements de chapitres budgétaires et la prise en compte explicitée de conventions de ventilation; concernant les dépenses en capital, on cherchera à séparer ce qui est financé sur budget national, et ce qui est financé sur ressources extérieures, dons ou prêts. Cette série temporelle des données budgétaires, par niveaux éducatifs et types de dépenses, doit permettre d’apprécier l’évolution des priorités entre niveaux dans les affectations budgétaires au cours des dix dernières années. 2. Analyse détaillée des dépenses de l’année la plus récente On cherche ici à cibler l’année la plus récente pour laquelle les dépenses effectives sont disponibles. Les dépenses de cette année serviront de référence aux analyses ultérieures, et de base pour le modèle de simulation qui sera construit par ailleurs (chapitre 8). L’idée est de réaliser un zoom du tableau précédent en apportant des compléments d’informations sur la distribution fonctionnelle des dépenses tant en distinguant les différentes catégories de dépenses (personnels assurant d’une part directement l’enseignement et d’autre part des activités d’appui, dépenses pédagogiques, dépenses sociales en nature ou en espèces) ainsi que les différentes structures (établissements scolaires, services centraux et décentralisés, subventions aux établissements privés,…). Ceci suppose une analyse assez détaillée et dont la cohérence doit être testée de façon relativement serrée. L’expérience montre qu’il est pertinent de partir d’une description claire de la distribution des personnels qui sont effectivement employés dans le système. Il peut ainsi exister des personnels qui exercent effectivement leur activité dans le système éducatif et qui sont payés sur le budget d’autres ministères (éducation physique avec des personnels du ministère de la jeunesse et des sports, enseignants de matières artistiques avec des personnels du ministère de la culture, enseignants qui effectuent un service civique et qui peuvent émarger au budget des armées ou du Premier ministre,...); mais il peut aussi exister des personnels qui émargent au budget de l’éducation et qui n’exercent aucune activité dans le système (détachés dans d’autres fonctions ou dans d’autres ministères, ou bien personnels «fantômes»).

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Pour faire cet inventaire global, il est souvent utile de confronter plusieurs sources dont notamment i) les statistiques scolaires (personnels employés dans les établissements d’enseignement), ii) les données de la direction du personnel du ministère de l’éducation, iii) celles de la fonction publique ou des structures spécialisées pour les personnels de l’éducation, iv) celles de la solde et v) celles du budget. Par ailleurs, il ne s’agit pas seulement d’un comptage de nombre car il est important de réconcilier aussi le nombre des personnels avec les montants financiers correspondants; ceci doit se faire sur la base d’informations d’une part sur la distribution des personnels par catégories de qualifications et de salaires et d’autre part sur les niveaux moyens de salaires de ces différentes catégories. La réconciliation des chiffres de ces différentes sources constitue un travail parfois difficile; mais ce travail doit être fait, car il constituera une base essentielle pour les analyses ultérieures ainsi que l’estimation et le calage du modèle de simulation. Enfin, il est important de ventiler ces personnels qui exercent effectivement leur activité dans le système, d’une part en distinguant si cette activité est une activité directe d’enseignement (enseignants «à la craie»), et d’autre part en distinguant les différents types de structures dans lesquelles ces activités sont exercées (établissements scolaires, services administratifs ou d’appui au niveau central ou aux niveaux décentralisés en distribuant selon les différents niveaux et types d’éducation et de formation). Au-delà de ce travail important concernant les personnels, leur distribution par qualification et niveau de salaire, fonction et service offert, ainsi que les masses salariales correspondantes, il est important de compléter la connaissance des dépenses effectives pour l’année de référence pour le matériel pédagogique, les manuels scolaires, l’entretien, les fluides, les transports sachant qu’on doit souvent se contenter de données agrégées sur ce qui relève du pédagogique d’une part, du fonctionnement logistique ordinaire d’autre part; mais ceci est évidemment affaire de jugement et de circonstances (l’idée n’est sans doute pas de descendre à un niveau excessif de détail). Il importe aussi d’identifier le montant des dépenses de nature sociale (dépenses de cantines scolaires, de restaurants universitaires, de logements universitaires, d’internat ainsi que les sommes affectées aux bourses pour les élèves et étudiants dans le pays et à l’étranger). Il est utile de consolider les dépenses par niveau d’éducation en attachant à chaque niveau les dépenses d’administration qui lui correspondent et en ventilant les dépenses valant pour plusieurs niveaux avec une clef de répartition appropriée (de façon fréquente, on choisit une répartition au pro-rata des dépenses salariales affectées). On peut alors établir la structure des dépenses courantes par niveau d’éducation en distinguant les différentes composantes (enseignants dans les établissements, non-enseignants dans les établissements, dépenses pédagogiques, administration et dépenses sociales). 3. Estimation des dépenses non gouvernementales pour l’éducation Les budgets gouvernementaux constituent généralement la source principale des ressources mobilisées pour le secteur de l’éducation et de la formation. Cela dit, ce n’est pas toujours le cas (en particulier à certains niveaux d’enseignement), sachant que dans presque tous les systèmes, les différentes dépenses extra-gouvernementales ont un poids significatif. Ces autres acteurs peuvent être nationaux (communautés locales, parents d’élèves des établissements publics et privés) ou étrangers (aide internationale, organisations non-gouvernementales).

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Ces informations sont en général plus difficiles à obtenir que les données budgétaires d’une part en raison de la multiplicité des acteurs concernés, d’autre part en raison de l’absence de documents comptable mesurant les dépenses sur une base régulière. Cela dit, des estimations restent souvent possibles, même s’il s’agit souvent davantage d’ordre de grandeur que de mesures précises. Lorsqu’une enquête de ménages relativement récente existe, elle peut constituer une source précieuse pour faire une estimation des dépenses des parents (en analysant aussi leur variabilité selon le statut des établissements fréquentés et les caractéristiques économiques et sociales des parents). Pour les dépenses des communautés, une enquête rapide auprès d’un petit échantillon d’entre elles peut servir de base à une estimation grossière agrégée. On peut alors construire un tableau montrant les différentes contributions, gouvernementales et autres, par niveaux et type d’éducation, et les consolidant au niveau national (en examinant éventuellement des différences de structure selon le niveau d’enseignement). 4. Estimation des coûts unitaires sur la base des données agrégées Sur la base des dépenses agrégées par niveau éducatif et du nombre des élèves scolarisés, on peut directement calculer des coûts unitaires (coûts par année et par élève). Les dépenses prises en compte sont celles correspondant au fonctionnement courant. Il est utile de conduire le calcul de façon séparée pour les différents types de structures (écoles publiques, écoles privées, écoles communautaires,..) dans la mesure ou plusieurs types de structures co-existent dans le pays. Il est utile de comparer le niveau et la structure (personnels enseignants et non-enseignants, matériels pédagogiques, administration, dépenses sociales) des coûts unitaires entre les différents niveaux et types d’enseignement. Il sera aussi utile d’exprimer les coûts par élève en unités de PIB par tête du pays de sorte à pouvoir faire des comparaisons internationales avec des pays raisonnablement comparables, pays de la même zone géographique (en distinguant notamment les pays anglophones et francophones), et pays du monde se situant plus ou moins au même niveau de PIB par tête. Il se révèle souvent intéressant de comparer le niveau des coûts unitaires de chaque niveau d’enseignement dans le pays et dans les pays (ou groupes de pays) utilisés comme comparateurs; mais l’examen de la structure relative des coûts unitaires des différents niveaux éducatifs, entre le pays et les pays utilisés pour la comparaison internationale, peut aussi être très instructive. 5. Estimation des coûts unitaires dans une perspective micro Il est commode de partir d’une décomposition du type suivant pour analyser le coût unitaire à un niveau d’éducation donné : 1) B = MS + MNS

2) B = MSE + MSNE + MFONC + MSOC + MADM

3) B = (NENS x SMENS) + (NNENS x SMNENS) + MFONC + MSOC + MADM

4) B/NEL = [(NENS/NEL) x SMENS] + [(NNENS/NEL) x SMNENS] + MFONC/NEL + MSOC/NEL + MADM/NEL

5) CU = (SMENS/REENS) + (SMNENS/RENENS) + FONCU + SOCU + ADMU

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Expression dans laquelle : B Budget

MS Masse Salariale

MNS Masse Non Salariale

MSE Masse Salariale des Enseignants

MSNE Masse Salariale des Non Enseignants

MFONC Masse des dépenses de FONctionnement

MADM Masse des dépenses d’ADMinistration

NENS Nombre d’ENSeignants

SMENS Salaire Moyen des ENSeignants

NNENS Nombre de Non ENSeignants

SMNENS Salaire Moyen des Non ENSeignants

NEL Nombre des Elèves scolaris és

CU Coût Unitaire

REENS Rapport Elèves-ENSeignants

RENENS Rapport Elèves-Non ENSeignants

FONCU dépenses de FONCtionnement Unitaire

SOCU dépenses SOCiales Unitaires

ADMU dépenses d’ADMinistration Unitaires

Selon les besoins, la décomposition peut être poussée plus ou moins loin. Par exemple, les dépenses de fonctionnement peuvent être éclatées en dépenses pédagogiques (elles-mêmes éventuellement entre livres, matériels et appui pédagogique) et en dépenses logistiques générales; de même, les dépenses sociales peuvent être éclatées entre dépenses en nature et dépenses en espèces, qui elles-mêmes peuvent être écrites comme dépendant de la valeur monétaire de l’aide par élève ou étudiant et de la proportion des élèves ou étudiants qui en sont bénéficiaires. On pourra noter que la formulation ci-dessus souligne l’importance du rapport élèves-maîtres. Dans le cas où il y a un maître par classe (généralement dans le primaire avec usage de maîtres polyvalents), la formule est directement applicable. Elle l’est aussi lorsque le système utilise des enseignants spécialisés dans certaines disciplines; toutefois dans cette configuration, le temps de service des enseignants diffère généralement du temps d’enseignement des élèves, si bien que le rapport élèves-maîtres diffère de la taille de la classe (contrairement au cas du primaire). Il peut alors être intéressant de faire apparaître dans l’identité structurelle ci-dessus 3 facteurs en lieu et place du rapport entre le nombre des élèves et celui des maîtres : la taille moyenne de la classe (TCL), ainsi que le temps moyen hebdomadaire de service des enseignants (TSER) et le temps hebdomadaire d’enseignement des élèves (TEL) qui résulte de la définition des programmes dans le pays : REENS = TCL x (TSER/TEL). Dans cette configuration, l’expression finale de décomposition s’écrit alors : 5’) CU = [(SMENS/TCL) x (TEL/TSER)] + (SMNENS/RENENS) + FONCU + SOCU + ADMU

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6. Evaluation du niveau et de la structure du salaire des enseignants Comme les salaires (en particulier des enseignants) représentent une part essentielle des budgets des ministères de l’éducation, il est généralement important d’examiner avec plus de détails le premier terme de l’identité (cela est vrai en particulier dans les premiers niveaux d’enseignement ; pour les niveaux plus élevés, il est possible qu’il soit pertinent d’examiner aussi avec attention les autres termes). Dans cette perspective, sur la base des données sur la distribution des personnels par qualification dans les différents niveaux d’enseignement et sur la grille de salaires des enseignants, il est utile de construire un tableau dans lequel on détermine le salaire moyen des enseignants à chacun des niveaux éducatifs (tableau 3.7). Ce tableau (qu’il est en fait utile de construire avant de chercher à construire le tableau 3.2) permet d’identifier dans quelle mesure la structure des salaires entre les différentes catégories d’enseignants est raisonnable (on doit s’attendre à un écart de l’ordre de 10 % pour une année d’études, qu‘il s’agisse d’études générales ou de formation professionnelle initiale). Il permet aussi, avec les données sur les rapports élèves-maîtres (tableau 3.8), de construire la production du tableau 3.9, qui structure la décomposition du coût unitaire explicitée dans l’identité 5), ci-dessus. Le tableau 3.7 permet aussi d’ouvrir à deux types de questions importantes dans une perspective de politique éducative, à savoir : i) dans quelle mesure le niveau de salaire des enseignants dans le pays est- il bas ou élevé ? et ii) dans quelle mesure les gains en matière d’apprentissage chez les élèves, qui seraient associés à avoir des enseignants de catégorie plus élevée, sont- ils commensurés avec les coûts salariaux supplémentaires à acquitter pour le budget du ministère ? Examinons ici la première question, sachant que la seconde sera abordée plus avant dans le chapitre 4) de ce texte. Concernant la première question, deux approches complémentaires peuvent être suivies. La première approche est comparative internationale; dans cette approche, on calcule le salaire moyen des enseignants en unités de PIB par tête dans le pays (donnée disponible dans le chapitre 1), et on compare cette valeur avec le salaire des enseignants dans des pays comparables. Dans le pays, ce calcul peut être fait pour les différents niveaux d’études, mais la comparaison internationale ne peut en général être conduite que pour les enseignants du primaire pour des questions de disponibilité de données. Le tableau 3.10 permet de rassembler les données et d’étendre la comparaison au rapport élèves maîtres. On peut alors examiner i) pourquoi le coût unitaire du primaire est bas ou élevé dans le pays en termes de comparaisons internationales (tableau 3.5), et ii) si le pays n’est pas caractérisé par une balance particulière entre le niveau de rémunération des enseignants et l’intensité de leur usage (cette intensité étant ici mesurée par le nombre des élèves dont un enseignant a en moyenne la charge, sachant que l’intensité peut aussi prendre la forme d’un temps de travail plus ou moins long). La seconde approche est nationale, et on cherche à positionner le salaire actuel moyen des enseignants par rapport à ce qui pourrait être le niveau d’équilibre du marché du travail dans le pays pour des individus de niveau de qualification plus ou moins comparable. Cette analyse peut être conduite sur la base des données d’une enquête de main-d’œuvre ou éventuellement d’une enquête de ménages si la taille est suffisamment grande et si le questionnaire permet d’identifier les revenus individuels. Cette procédure est évidemment bonne, sachant qu’on ne doit pas limiter l’analyse au sous

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échantillon des individus qui ont effectivement un emploi rémunéré dans le secteur moderne de l’économie. En effet, dans un certain nombre des pays, notamment des pays à niveau de développement faible dont nombre de pays africains, l’équilibre du marché du travail se fait davantage sur les quantités que sur les prix (des formés en nombre substantiel peuvent rester sans emplois, alors que les salaires des individus employés sont très rigides à la baisse). On peut alors tout à la fois i) comparer le salaire des enseignants employés, avec celui d’autres fonctionnaires et celui de personnes, de même niveau d’éducation, employées dans le secteur privé, et ii) mesurer le niveau de revenu de personnes de niveau de qualification comparable exerçant une activité dans le secteur informel de l’économie (ainsi que le nombre de personnes dans ce dernier groupe, qui constituent une réserve d’offre de travail pour la fonction enseignante). Dans un certain nombre de cas, on ne dispose pas soit des données adéquates, soit du temps nécessaire pour conduire cette analyse. Il reste toutefois possible (utile) de chercher à répondre à la question, fusse de manière plus «rus tique». Deux types d’informations peuvent être utiles : i) les premières concernent la dynamique des recrutements et sorties de la fonction enseignante. Si le salaire des maîtres est très inférieur au salaire d’équilibre, on doit sans doute s’attendre à avoir des difficultés à recruter et à observer des sorties prématurées de la profession; si au contraire le salaire est très au dessus du salaire d’équilibre, les démissions doivent être rares et le nombre de candidats très supérieur aux besoins dans les concours de recrutement. Les secondes informations utiles concernent une comparaison des salaires des enseignants pratiqués dans le secteur de l’enseignement public avec ce qui est observé dans les établissements privés (enseignants permanents), en particulier si ceux-ci ne sont pas lourdement subventionnés par l’état. Ces deux types d’information sont généralement assez faciles à rassembler; elles peuvent apporter un éclairage très utile sur le point de savoir où se situe le niveau de salaire des enseignants dans le pays, à l’intérieur du marché du travail national. Il est enfin généralement utile de consolider ces différentes informations, internationales comparatives et nationales, pour former un jugement articulé sur le niveau de salaires des enseignants. Plusieurs configurations peuvent alors se présenter en croisant les deux perspectives :

En termes de comparaisons internationales ⇒ ⇓ En termes de comparaison nationale

Salaires dans le pays < niveau de référence international

Salaires dans le pays > niveau de référence international

Salaire moyen des enseignants < salaire d’équilibre A C

Salaire moyen des enseignants > salaire d’équilibre B D

* Dans la configuration A, le niveau de salaire des enseignants est bas aussi bien dans une perspective nationale qu’internationale. Il y a donc a priori des arguments pour augmenter le salaire; on peut éventuellement à cette occasion (et en fonction des circonstances locales) introduire des éléments, tels qu’une augmentation du temps d’enseignement, une modification du calendrier scolaire, des incitations pour les enseignants exerçant dans des conditions difficiles ou obtenant des résultats très bons chez leurs élèves, dans l’objectif d’améliorer dans le même temps le fonctionnement du système.

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* Dans la configuration B, le salaire des enseignants dans le pays est supérieur au salaire d’équilibre au plan national tout en étant inférieur au niveau de référence international. La situation est évidemment favorable pour le système. * Dans la configuration C, Le niveau de salaire actuel des enseignants dans le pays est inférieur au salaire d’équilibre national, tout en étant plus élevé que la référence internationale. Sur le premier plan, il y aurait des indications pour augmenter les salaires dans le pays; cela dit, cela conduirait à accentuer la difficulté du pays à obtenir une bonne couverture quantitative de son système scolaire; il s’agit sans doute d’un pays dans lequel le niveau général des salaires est «trop élevé». La question ne relève probablement pas principalement d’une approche sectorielle mais plutôt d’une approche macroéconomique. * Dans la configuration D, le salaire des enseignants est supérieur à fois au salaire d’équilibre dans le pays et à la référence internationale. Il est probable qu’une approche sectorielle est justifiée. On doit alors chercher les raisons de la rigidité des salaires et de leur fixation à des niveaux trop élevés compte tenu des ressources nationales; on peut aussi examiner les options pour réduire progressivement le salaire moyen des maîtres (on a ainsi parfois envisagé la création d’une nouvelle catégorie d’enseignants moins rémunérés; cette catégorie pourra alors accueillir les nouveaux recrutements tout en maintenant les avantages acquis aux enseignants antérieurement recrutés). 7. Analyse du coût des constructions scolaires Alors que les salaires constituent une part prépondérante des dépenses de fonctionnement dans les systèmes éducatifs, les constructions scolaires constituent une proportion importante des dépenses en capital, en particulier au niveau de l’enseignement primaire. Il est par conséquent important d’examiner leur montant et leur justification. Ceci est spécialement important dans la mesure où on observe une très large variance dans le coût des constructions aussi bien entre régions (les coûts, exprimés en devises, sont en moyenne plus élevés sur le continent africain) qu’entre pays africains; ils peuvent aussi varier de façon substantielle à l’intérieur de chaque pays tant selon le mode technique de construc tion que selon les intermédiaires intervenant dans leur financement et leur mise en œuvre. Au titre de la justification, la question est également importante. En effet, c’est un peu comme si les exigences pour les dépenses de fonctionnement étaient fortes vis-à-vis des pays (utilise-t-on la façon la plus coût-efficace de former les maîtres ? …), alors qu’elles sont plus faibles pour les partenaires techniques et financiers dans leur contribution pour les constructions scolaires (les ressources sont finalement fongibles, même si des procédures bureaucratiques inappropriées peuvent limiter cette fongibilité). Le coût des constructions scolaires peut être abordé directement en examinant la dépense en capital pour une salle de classe de 50 élèves équipée en mobilier de base pour les élèves et le maître; il est alors intéressant de comparer cette dépense dans les différentes options (techniques, financières, montage institutionnel) alternatives pouvant exister dans le pays. La dépense de construction peut aussi utilement être rapprochée des coûts de fonctionnement des services éducatifs que le bâtiment va abriter. Ce faisant, on transforme aussi la valeur du bâtiment en unités qui ont un sens dans le contexte local (ce ne sont plus des devises). Ce rapprochement peut se faire de plusieurs façons : i) la première consiste à évaluer la dépense initiale de construction d’une salle de classe en termes de nombre d’années de

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salaire de l’enseignant qui va l’utiliser; ii) la seconde consiste à estimer la valeur annuelle d’usage du bâtiment par élève et à la comparer au coût unitaire de fonctionnement d’une année scolaire.

CA = [D0 . k (1+k)n] / [(1+k)n – 1] Expression dans laquelle : CA est le coût annualisé de l’investissement initial (valeur annuelle d’usage d’une salle de classe pendant un an), D0 est la dépense initiale pour la construction et l’équipement d’une salle de classe, k est le coût d’opportunité du capital, et n la durée de vie anticipée de la structure construite. Il est évidemment utile de conduire les calculs pour plusieurs options alternatives de construction dans le pays. Il est également utile, dans la mesure du possible, d’inscrire les résultats obtenus dans une perspective comparative internationale. Un tableau, tel que 3.xx, peut être commodément employé pour synthétiser les résultats obtenus. Dans la mesure où diverses options alternatives peuvent exister pour la construction, il peut enfin être intéressant d’adopter une réflexion dans laquelle on part de l’option (option 1) la moins chère en termes de coût annualisé, pour explorer quels sont les gains pour les élèves à passer de cette option à une autre un peu (ou beaucoup) plus coûteuse (option 2, 3, ..). On peut alors se poser la question de savoir dans quelle mesure le coût différentiel entre l’option 1 et 2 (ou 2 et 3) est effectivement compensé par des gains commensurés pour les élèves, ou bien si un usage alternatif de ce coût différentiel ne serait pas davantage justifié (en termes de quantité ou de qualité). 8. Identification des contraintes agissant sur la couverture du système Dans certains pays, on peut observer que la couverture quantitative du système d’éducation est en retard par rapport à ce qui est constaté dans d’autres pays comparables. Par exemple, on observe (indépendamment de ce que nous en avons dit dans le chapitre précédent) que le taux de scolarisation primaire dans un pays est faible (30 %). On souhaite bien sur que ce pays puisse faire progresser de façon significative son taux de scolarisation dans les années à venir, mais une question d’importance est de déterminer quels sont les principaux facteurs qui ont conduit à cette performance modeste. Dans quelle mesure, ces facteurs sont-ils de véritables contraintes exogènes, ou bien correspondent-ils à des politiques éducatives implicites/explicites sur lesquelles il conviendrait d’agir. Pour aller dans cette voie, une décomposition du type suivant peut être mobilisée pour l’enseignement primaire public dans un pays donné (la formule peut être adaptée si une partie des effectifs est scolarisée dans le privé) : EDPRIM = DPED x PPRIM

EDPRIM/PIB = (EDPRIM/POPTOT) x (POPTOT/PIB)

= (EDPRIM/POPASCO) x (POPASCO/POPTOT) x (POPTOT/PIB)

= (EDPRIM/POPECOL) x (POPECOL/POPASCO) x (POPASCO/POPTOT) x (POPTOT/PIB)

= COUNIT x TSCOL x RAPDEP x (1/PIBPT)

= [(SALENS/REM) / (1-PDEPSAL)] x TSCOL x RAPDEP x (1/PIBPT)

= [(SALENS/PIBPT) x (1/REM) x 1/(1-PDEPSAL) x TSCOL x RAPDEP

EDPRIM/PIB = SALENSR x (1/REM) x 1/(1-PDEPSAL) x TSCOL x RAPDEP

EDPIB x PPRIM = SALENSR x (1/REM) x 1/(1-PDEPSAL) x TSCOL x RAPDEP

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ou bien TSCOL = EDPIB x PPRIM x (1/SALENR) x REM x (1-PDEPSAL) x (1/RAPDEP) Expression valant pour un niveau, le primaire par exemple, et dans laquelle : DPED Dépenses Publiques d’EDucation (monnaie nationale) EDPIB Part des dépenses d’EDucation dans le PIB PPRIM Part des dépenses publiques d’éducation pour le primaire EDPRIM Dépenses Publiques d’EDucation pour le primaire (monnaie nationale) PIB Produit Intérieur Brut (monnaie nationale) POPTOT POPulation TOTale du pays POPASCO POPulation d’Age SCOlaire du pays (correspondant au niveau primaire) POPECOL POPulation SCOlarisée dans le niveau primaire COUNIT COUt uNITaire de scolarisation dans le niveau primaire TSCOL Taux de SCOLarisation (rapport de la population scolarisée à celle d’âge scolaire) RAPDEP RAPport de DEPendance (rapport de la population d’âge scolaire et de la population totale) PIBPT PIB Par Tête du pays (monnaie nationale) SALENS SALaire moyen des ENSeignants dans le primaire (monnaie nationale) REM Rapport moyen Elèves-Maîtres dans le primaire PDEPSAL Part des DEPenses SALariales dans les dépenses totales de fonctionnement dans le primaire SALENSR SALaire moyen relatif des ENSeignants du primaire (salaire exprimé en unités de PIB par tête) La formule manifeste que la couverture scolaire dans le primaire (TSCOL) est d’autant plus importante i) que le pays affecte une part plus importante de son PIB (EDPIB) au financement public de l’éducation, ii) qu’il accorde une priorité plus forte à l’enseignement primaire (PPRIM) dans ses arbitrages sectoriels, iii) que le niveau de salaire des enseignants, exprimé en unités de PIB par tête (SALENSR), est bas, iv) que le rapport élèves-maîtres moyen (REM) est élevé, v) que les dépenses hors le salaire des enseignants (1-PDEPSAL) sont faibles et vi) que le rapport de dépendance démographique (RAPDEP) est faible. * Dans la formule de décomposition, les points 1 (part des dépenses publiques d’éducation dans le PIB) et 6 (rapport de dépendance démographique) doivent sans doute être considérés comme des contraintes exogènes au moins dans la moyenne période. Beaucoup de pays à faible revenu ont des difficultés à augmenter la pression fiscale globale, notamment parce que les taxes ne concernent pour une large part que certains segments de l’activité économique (les exportations et le secteur moderne notamment) et que ces activités d’une part sont souvent réduites en volume sachant d’autre part qu’elles sont souvent assez fortement taxées alors qu’on souhaite ne pas créer trop de frein à leur développement. La situation démographique est aussi une contrainte dans la moyenne période, même si on sait qu’à plus long terme des politiques sont possibles. * Les autres éléments, et en particulier la priorité accordée au primaire dans les arbitrages budgétaires au niveau intra-sectoriel du côté des ressources, et le salaire des maîtres ainsi que le rapport élèves-maîtres du côté des emplois, sont assez clairement sujets à des politiques éducatives. La formule a été présentée comme une identité comptable valant pour un pays donné; à ce titre, elle a surtout une valeur descriptive. Pour permettre de former un jugement sur le comment ces différents facteurs expliquent le retard de ce pays, il convient d’adopter une perspective comparative des deux

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côtés de l’identité. Pour ce faire, il est commode de prendre comme référence le cas moyen d’un groupe de pays relativement performants, par exemple, les pays à faible revenu d’Asie et/ou d’Amérique latine. On contraste alors la valeur numérique des indicateurs pris en compte dans l’identité dans le pays et dans la référence, notamment en calculant leur rapport (il est utile de vérifier que le produit des rapports sur les facteurs permet de retrouver la valeur numérique sur le résultat). Sur cette base, on peut identifier d’une part l’importance respective des contraintes et des éléments de politique éducative dans l’explication de la performance relative du pays analysé et d’autre part quels éléments de politique éducative apparaissent les plus cruciaux.

Chapitre 4 : L’efficacité interne du système et la qualité de l’éducation (10-20 pages) Le terme d’efficacité interne réfère souvent dans la littérature à ce qui touche aux flux des élèves (redoublements et abandons), ces éléments qui conduisent à un usage non optimal des crédits publics en éducation. Nous aurons ici à la fois cette conception standard, mais nous lui adjoindrons une dimension sans doute tout aussi importante qui est celle de la définition du contexte logistique d’enseignement et ses relations avec la qualité de l’école dans un contexte global caractérisé i) par la rareté des ressources disponibles pour faire fonctionner les systèmes d’enseignement et ii) par la volonté d’en améliorer la qualité. Dans tous les systèmes éducatifs, il existe des possibilités substantielles de choix dans les conditions d’enseignement (taille de classe, mode de groupements des élèves en double vacation ou en cours multiple, niveau de recrutement et de formation des maîtres, bâtiments scolaires en dur, modernes et de qualité «internationale», ou au contraire des constructions traditionnelles, …). On peut aussi accepter, ou non, que le système soit caractérisé par un niveau élevé de redoublement. Cette liste est loin d’être exhaustive et les combinaisons sont multiples à chacun des niveaux éducatifs. Par contre, toutes ces combinaisons ne sont pas également coûteuses; de même, pour un niveau de coût unitaire donné, il existe des substitutions possibles (recruter des enseignants plus qualifiés mais augmenter le nombre d’élèves par classe…). Sur la plupart de ces points, il existe dans la communauté éducative des opinions contradictoires et le recours à des données empiriques est sans doute incontournable. Des arbitrages sont aussi nécessaires eu égard à l’existence de la contrainte budgétaire. Ceux-ci peuvent être classés en deux grandes catégories, même si dans la pratique elles peuvent être imbriquées : i) des arbitrages entre le volume de ressources alloué en moyenne à chaque élève et le nombre des enfants scolarisés, et ii) des arbitrages entre les différents facteurs caractéristiques de l’organisation scolaire au sein des ressources moyenne par élève dont le niveau a été décidé au point précèdent. Le premier point constitue un arbitrage cadre important car on cherche en même temps que chaque élève puisse bénéficier des meilleures conditions d’enseignement et des meilleures acquisitions (aspect qu’on associe, de façon partiellement excessive à un niveau élevé de ressources par élève) et que le plus grand nombre des enfants du pays puisse bénéficier de ces conditions favorables. On sent bien le caractère généralement contradictoire de ces deux objectifs (eu égard à la contrainte budgétaire toujours présente) et la nécessite d’un compromis raisonnable entre eux. Le deuxième arbitrage est tout autant important car on sait, comme cela a été suggéré plus haut, qu’avec un niveau donné de

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ressources par élève, plusieurs combinaisons de facteurs sont possibles et qu’il faut rechercher celle qui est la plus efficiente, c’est à dire celle qui conduit au niveau maximum d’acquisitions chez les élèves. Nous aborderons ces questions dans un second temps, pour nous centrer en premier lieu sur les thèmes classiques étudiés au titre de l’efficacité interne. 1. Indicateurs de flux et d’efficacité interne au sens classique De façon générale, on cherche ici i) à donner des indications sur la fréquence des redoublements et abandons en cours de cycle d’enseignement, et ii) à en évaluer les conséquences au niveau du système quant à l’efficacité dans l’usage des crédits publics. On cherche ainsi à identifier le volume des ressources mobilisées dans un pays par rapport à une référence idéale dans laquelle il n’y aurait ni redoublements ni abandons en cours de cycle. L’idée pour la mesure de l’indicateur d’efficacité est simple. Elle consiste à compter le nombre des années-élèves théoriquement nécessaires pour produire le nombre des élèves qui accèdent en dernière année du cycle (redoublants non comptés) dans un système qui n’aurait ni redoublements ni abandons avec le nombre des années-élèves effectivement consommées dans le système. Les calculs peuvent être conduits sur la base du profil de scolarisation et on utilise une cohorte fictive de 100 élèves accédant en première année d’études dans un cycle qui en comprend n: Soit Nj le nombre des élèves non-redoublants scolarisés dans l’année d’études j (100 en 1ère année)

Tj la proportion de redoublants dans l’année d’études j La production de référence du système, en nombre d’années-élèves est [Nn x n] Mais le nombre d’années-élèves effectivement consommées est Σj,n [Nj/(1-Tj)] Et le coefficient d’efficacité CEff est le rapport des deux termes : CEff = [Nn x n] / Σj,n [Nj/(1-Tj)] ; ce coefficient est compris entre 0 (système qui ne produirait aucun sortant) et 1 (système sans redoublements ni abandons). On peut en outre décomposer le coefficient pour identifier deux coefficients, le premier correspondant à une situation dans laquelle il n’y aurait que des abandons (selon la fréquence observée dans le pays) sans redoublements (tj=0), et le second pour une situation hypothétique dans laquelle il n’y aurait aucun abandons mais avec une fréquence de redoublement telle que celle observée. Le produit des deux coefficients est égal à CEff, et la comparaison de leurs valeurs numériques renseignent sur la dimension qui a l’impact principal pour expliquer le niveau d’efficacité interne dans le cycle considéré. La comparaison des indices d’efficacité interne pour les différents cycles d’un même pays (y compris la distinction des deux composantes de chacun d’entre eux) peut renseigner sur les priorités d’action pour la politique éducative. La comparaison des coefficients dans le pays avec ceux de pays comparables complète la perspective. Enfin, dans la mesure où le calcul des indices peut être conduit à plusieurs moments du temps (il y a 5 ans, 10 ans), les évolutions en cours (situation d’amélioration ou de dégradation du système sur ce plan) peuvent être utilement documentées.

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2. Vers une appréciation de la qualité et des facteurs à considérer pour l’améliorer La manière traditionnelle d’apprécier la qualité d’un système éducatif est de l’ordre de l’expertise (discussion avec les acteurs concernés, visites de terrain, appréciations qualitatives et comparatives avec des observations faites dans d’autres pays, ..). Sans méconnaître l’utilité de telles pratiques, il ne fait pas de doute qu’elles sont insuffisantes; il est important, d’une part de donner une tonalité plus factuelle (empirique, non normative) à l’analyse, et d’autre part d’instruire les arbitrages inhérents à l’existence des contraintes (ressources financières et humaines notamment) qui caractérisent de façon essentielle la politique éducative. Il y a plusieurs ingrédients souhaitables à cette analyse nécessaire : i) la qualité de l’école ne se mesure pas à l’aune des moyens qui sont mobilisés mais à celle des résultats qui sont obtenus (niveau moyen des apprentissages des élèves qu’on souhaite être maximum et niveau de disparité de ces apprentissages entre élèves qu’on souhaite être minimum). ii) des moyens adéquats sont évidemment nécessaires pour que ces résultats souhaités soient obtenus, mais il y a au moins trois aspects à considérer dans la perspective d’une stratégie justifiée :

. a) au sein de la combinaison productive du résultat, chaque facteur à un impact qu’il convient d’évaluer, sachant que ce n’est pas l’impact moyen qui importe, mais l’impact marginal. On ne cherche pas à savoir s’il est utile d’avoir des maîtres éduqués (on le sait déjà et personne n’envisage de recruter des maîtres analphabètes) ; par contre ce qu’on cherche à évaluer de combien s’améliorent les acquis des élèves lorsqu’on utilise des enseignants qui auraient 11 ou 12 années d’éducation générale plutôt que 10, qui est la référence actuelle.

. b) les inputs ont un coût. A partir de conditions initiales spécifiées, il convient de mettre en regard l’impact marginal de chaque facteur avec son coût marginal, permettant ainsi le calcul de rapports coûts-efficacité; ces indicateurs doivent être comparés entre les différents facteurs de sorte à identifier les directions les plus pertinentes pour améliorer la qualité de l’éducation à moindre coût.

. c) il est enfin important de reconnaître que si les facteurs de l’organisation scolaire, et leur combinaison, ont évidemment une très grande importance pour la définition d’une stratégie pertinente pour la qualité de l’école, tout cela ne définit que le contexte (en quelque sorte logistique) dans lequel les apprentissages vont se faire, via les relations établies entre l’enseignant et les élèves qui lui sont confiés. Le contexte ne définit que des conditions favorables (conditions nécessaires) pour que les acquis puissent se construire, mais il ne s’agit pas de conditions suffisantes, la transformation des moyens mobilisés en résultats obtenus chez les élèves dépendant aussi d’autres facteurs également importants pour la qualité de l’école.

On voit que la réalisation d’une évaluation factuelle sur l’ensemble de ces points est évidemment une tâche extrêmement exigeante, tâche qui peut dépasser ce qui peut être fait dans le cadre de la production du rapport d’état d’un système éducatif. L’idée est de faire le meilleur usage des informations disponibles, car il n’est pas possible d’envisager une collecte de données spécifiques sur ces points si rien n’existe. Cela dit, il n’est pas rare que des informations pertinentes existent et puissent

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être utilement mobilisées. De façon globale, on peut penser à deux types d’informations : i) des données d’enquêtes spécifiques sur les acquisitions des élèves et ii) des données sur les résultats aux examens nationaux. * Les données d’enquête sur les acquisitions des élèves (plus souvent dans le primaire) ont à priori des caractéristiques intéressantes car les acquis sont généralement mesurés à l’aide de tests standardisés fondés sur le contenu des programmes en vigueur. Ces données seront par ailleurs spécialement intéressantes si i) elles ont été construites dans un contexte autorisant des comparaisons entre pays, et ii) elles utilisent une méthodologie dite de «valeur ajoutée», avec un test en début et un test en fin d’année scolaire. Les enquêtes MLA de l’Unesco-Unicef (Measurement of Learning Achievement) présentent l’intérêt de fournir des informations comparatives sur les acquisitions des élèves (langue, mathématiques et vie courante) pour une quinzaine de pays africains (francophones et anglophones), mais avec la limitation qu’il n’y a qu’une seule prise d’informations transversales en fin d’année scolaire. Les enquêtes conduites par la Saqmec et la Confémen sont à priori plus riches, notamment en raison de leur perspective longitudinale (même sur plusieurs années pour la Confémen); mais elles ne concernent qu’un nombre plus limité de pays (même si des raccords peuvent être faits entre les différentes sources, dans la mesure où les acquis des élèves de certains pays ont été mesurés dans deux réseaux d’enquêtes, notamment Confémen et MLA, ou bien Saqmec et MLA). Il existe par ailleurs un certain nombre d’enquêtes qui ont été faites dans des contextes nationaux (notamment dans le cadre de projets des partenaires bilatéraux ou multilatéraux ou de travaux universitaires). Selon les circonstances, ces données peuvent être mobilisées de deux manières complémentaires : i) on peut en premier lieu adopter une perspective comparative internationale, qui permet en particulier de situer le niveau moyen des acquis des élèves dans un pays en référence à celui de pays raisonnablement comparables (il peut être utile d’examiner quelles proportions de la classe d’âge sont concernées dans ces mesures dans chacun des pays) ; dans cette analyse, la prise en compte simultanée dans les différents pays utilisés dans la comparaison, du niveau moyen des acquis des élèves d’une part et des coûts unitaires de l’autre, peut s’avérer éclairante. ii) on peut en second lieu explorer (à l’aide de logiciels économétriques appropriés) les relations qui existent entre les acquis des élèves et leurs caractéristiques personnelles d’une part, celles du contexte dans lequel ils ont obtenu ces acquis d’autre part (formation du maître, taille de la classe, mode de groupement des élèves, disponibilité en manuels scolaires et matériels pédagogiques, nature des constructions scola ires, ..). Dans cette analyse, la mise en regard des impacts marginaux des facteurs d’organisation scolaire (quel est l’impact moyen sur les acquisitions lorsqu’on passe d’une taille de classe de 50 à 40 élèves ?, par exemple) et des coûts qu’il faudrait mobiliser pour obtenir ces impacts, est alors d’un intérêt particulier; en effet, une politique justifiée d’amélioration de la qualité de l’enseignement (sur quels facteurs agir?) serait celle qui permettrait les progrès maximums dans les acquisitions des élèves par unité de ressources additionnelles mobilisées. * Les données sur les résultats aux examens nationaux (dans le primaire et les deux cycles secondaires) présentent certes des inconvénients car il ne s’agit pas de mesures standardisées (mais il s’agit tout de même d’épreuves communes), sachant qu’elles correspondent à une mesure transversale et que celle-ci est située en fin de cycle. Elles présentent toutefois les vertus importantes de valoir pour

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toutes les écoles du pays et de concerner ce que le s écoles sont précisément en charge de faire, à savoir faire réussir leurs élèves dans le cadre des institutions nationales légitimes de certification. On ne peut bien sur pas utiliser le taux de réussite aux examens dans plusieurs pays pour en tirer des indications comparatives fiables sur la qualité respective des systèmes. Par contre, à l’intérieur du pays considéré, on peut utilement comparer le taux de réussite aux examens des différentes écoles. Ceci suppose évidemment qu’il soit possible d’identifier la réussite aux examens au niveau de l’école. Si tel est le cas, il devient envisageable de mettre en relation cet indicateur avec les caractéristiques de chaque école, telles qu’elles existent dans les données de base servant à la confection des annuaires statistiques de l’éducation (zone géographique d’implantation de l’établissement, rapport moyen élèves-maîtres, mode de groupement des élèves, indicateur de qualification des enseignants, caractéristiques des bâtiments scolaires, équipement de l’école et des classes, …). On peut alors identifier, sur données individuelles d’écoles, des relations comparables à celles identifiées au point précédent (sur données individuelles et utilisation de tests standardisés comme mesure du résultat), et conduire une analyse comparable de la politique pertinente (coût-efficace) pour améliorer la qualité de l’éducation dans le pays et pour le niveau d’éducation considéré. Chapitre 5 : L’efficacité externe associée à la production du capital humain (10-20 pages)

Alors que l’efficacité interne concerne le fonctionnement du système éducatif en utilisant comme mesure des résultats obtenus des éléments visibles alors que les élèves sont encore dans le cadre scolaire (niveau des acquisitions scolaires et carrières scolaires ainsi que les disparités dans ces deux dimensions entre différents groupes de population), l’efficacité externe s’intéresse à la performance des formés quand ils ont quitté le monde éducatif et sont entrés dans leur vie d’adulte sociale et productive. Au niveau individuel, on s’intéresse à déterminer si ce qu’ils ont appris à l’école a effectivement bien préparé les individus à une vie sociale et économique favorable pour eux. Dans une perspective macro ou sociétale, qui constitue l’aspect le plus important de l’efficacité externe, la question est de savoir dans quelle mesure la distribution des scolarisations et formations finales (en durée et qualité) des différents membres d’une génération, maximise les bénéfices économiques et sociaux que la société peut retirer de ces investissements, compte tenu du volume global de ressources mobilisées pour le secteur. On voit donc qu’on peut distinguer d’une part les effets sociaux et les effets économiques, et d’autre part les effets individuels et les effets collectifs. Les effets sociaux peuvent concerner des dimensions telles que la santé (on a ainsi observé que les mères plus éduquées étaient en moyenne plus efficaces pour la santé de leurs enfants), la vie civique (des individus plus éduqués peuvent mieux participer à la vie collective organisée et faire des choix politiques mieux informés) ou la population (la croissance démographique est mieux contrôlée dans les sociétés plus éduquées). Concernant l’impact de l’éducation dans la sphère économique, les relations entre l’éducation de la population d’une part, l’emploi et la croissance économique de l’autre, sont évidemment de première importance. Ces impacts, tant dans le domaine économique que social, peuvent être lus à la fois au niveau individuel (un individu plus éduqué peut avoir de meilleurs revenus que celui qui l’est moins) et au niveau de la

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société (les sociétés plus éduquées peuvent avoir une plus forte croissance économique, obtenir de meilleures performances dans les indicateurs de santé). Il est utile de souligner que les effets collectifs vont généralement au-delà de ce qui est approprié par les individus formés. Cette différence est ce que les économistes nomment «externalités». Pour illustrer le concept, prenons l’exemple d’un agriculteur éduqué qui améliore ses techniques de production (choix de production, usage de meilleures semences, mise en œuvre de techniques de travail du sol, usage adéquat d’engrais ou de produits phytosanitaires). Ces nouvelles techniques peuvent lui procurer un meilleur revenu; mais ceci peut aussi inviter ses voisins analphabètes à l’imiter et à ainsi augmenter les leurs. Si tel est le cas, les bénéfices pour la société de la formation du premier agriculteur vont au-delà des gains perçus par celui-ci. Il s’ensuit que pour analyser un système d’éducation et de formation en termes d’efficacité externe, on doit chercher à répondre à deux questions complémentaires : i) comment allouer les ressources disponibles entre les différents niveaux et types d’éducation et de formation de sorte à maximiser les bénéfices que le pays peut globalement retirer à moyen terme de ses investissements en capital humain? et ii) étant donnée l’importance des externalités et de la double nature (privée et publique) de ces investissements, comment identifier les mécanismes (financiers et institutionnels) qui conduiront à ce que les comportements individuels soient en ligne avec ce qui serait souhaitable du point de vue agrégé et social. Il est en général aussi important que difficile de répondre de façon tout à fait satisfaisante à ces deux questions, notamment eu égard à la disponibilité lacunaire des informations et analyses factuelles sur ces points dans la majorité des pays africains. Cela dit, ces questions sont suffisamment cruciales pour que des efforts soient faits dans cette direction. Il s’agira par conséquent de chercher à tirer le meilleur parti des informations disponibles et à chercher des éléments indirects qui permettraient de contribuer aux évaluations recherchées. 1. Allouer les ressources entre niveaux et types d’éducation Une approche probablement utile pour introduire l’analyse consiste à partir de l’idée que, dans leur très grande majorité, les pays africains sont, et resteront dans la période de moyen terme, des économies duales. Ces économies sont caractérisées par l’existence i) d’un secteur traditionnel (dont agricole) diversifié qui occupe la plus grande partie de la population active, et ii) d’un secteur moderne et salarié qui est très minoritaire en termes d’emplois même si ses potentialités de croissance sont éventuellement substantielles. Les stratégies de lutte contre la pauvreté proposent un corps pertinent pour penser la question traitée ici à savoir celle de l’allocation des ressources publiques entre grands niveaux d’éducation et de formation. Le schéma global de la stratégie consiste à reconnaître à la fois i) que la croissance économique est un moteur essentiel de la réduction de la pauvreté dans un pays (sans croissance la redistribution seule ne se fera pas vraiment), et ii) que la croissance seule ne suffira pas. Des mesures plus ciblées sont nécessaires pour faire en sorte que les individus les plus démunis d’une part puissent

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contribuer à la croissance et d’autre part sachent saisir les occasions, qui se présentent du fait de la croissance globale, pour sortir de la pauvreté. La croissance sera faite des trois éléments classiques suivants : i) gains de productivité dans le secteur traditionnel, ii) développement du secteur moderne plus productif, et iii) mobilité progressive de la population active de l’économie traditionnelle (et l’agriculture), moins productive, vers les segments plus productifs du secteur moderne. Dans cette perspective, le capital humain joue un rôle important.

. dans l’économie traditionnelle, les analyses empiriques (sur données individuelles, comme agrégées, sur données de pays ou dans des modèles de croissance sur données internationales comparatives) convergent pour souligner qu’une éducation primaire de qualité raisonnable constitue l’investissement formel à tout faire minimal en capital humain pour obtenir les gains de productivité recherchés. On a tendance à étendre le niveau primaire à l’enseignement de base de 9 ou 10 ans, mais il convient d’abord d’assurer le minimum qui est le primaire.

. dans le secteur moderne, la disponibilité en quantité et en qualité du capital humain est une condition importante pour son développement. Cela dit, l’expérience montre aussi sans ambiguïté que le développement de ce secteur dépend d’abord des politiques macro-économiques mises en œuvre (taux de change, code des investissements, code du travail, fiscalité, taux d’intérêt et fonctionnement du secteur bancaire). Il peut certes être contrarié par des insuffisances du côté du capital humain, et il faut donc que celui-ci soit disponible pour répondre aux demandes du marché du travail. Cela dit, ce sont clairement les demandes de l’économie qui sont directrices en la matière; ce ne sont pas les formations qui créent les emplois.

Compte tenu de ces deux observations de base, la contribution pertinente du secteur de l’éducation et de la formation à la croissance économique consiste de façon claire i) à assurer au moins une scolarisation primaire complète (6 années) pour l’ensemble de la population jeune du pays et ii) à organiser les formations techniques et professionnelles ainsi que l’enseignement supérieur en fonction des demandes effectives (en quantité et en qualité/caractéristiques) de l’économie. On voit d’ailleurs que cette stratégie d’ensemble orientée vers la croissance économique est en fait convergente avec la nécessité de cibler les populations les plus démunies pour faciliter leur inclusion dans le processus national de progrès et contribuer à leur sortie de la situation de pauvreté. Dans cette perspective, un ingrédient important est de déterminer où en est un pays au moment de l’analyse en référence à ces objectifs. L’information à construire est d’identifier dans quelle mesure l’équilibre actuel dans la structure des scolarisations et la répartition des financements entre les différents niveaux éducatifs est compatible avec les objectifs plus globaux de la stratégie de lutte contre la pauvreté. La politique à suivre est alors de cibler les changements souhaitables pour faire en sorte de transiter, dans la moyenne période, de la situation actuelle à celle identifiée comme souhaitable. Une façon classique est de calculer des taux de rendement sociaux de l’éducation. Cette méthode présente à la fois des aspects très souhaitables et des faiblesses notables, notamment dans le contexte de pays tels que les pays africains. Les aspects souhaitables sont qu’on examine les bénéfices sur le

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marché du travail et qu’on peut les mettre en regard avec les coûts de production du capital humain; c’est en effet la base pour une allocation pertinente des ressources. Les faiblesses sont par contre i) que la source des bénéfices est individuelle (la dénomination de taux social est justifiée seulement du côté des coûts), alors que les modèles de croissance ont mont ré l’existence d’externalités assez substantielles, et ii) que les estimations sont contingentes d’un équilibre concurrentiel du marché du travail. En effet, ce n’est que si les marchés sont raisonnablement à l’équilibre qu’ils fournissent les signaux recherchés pour l’allocation des ressources. Or dans de nombreux pays africains, il est assez clair que les marchés du travail moderne s’équilibrent davantage sur les quantités (avec un chômage parfois important) que sur les prix (souvent influencés par les modes de fixation administrative des fonctions publiques). Dans ces conditions, une façon simple de procéder consiste à examiner d’abord les équilibres du marché du travail en quantité, et à examiner de façon complémentaire la question des coûts et des modes de financement pour la production du capital humain. Pour mettre en œuvre cette analyse, il est à priori possible d’adopter une approche agrégée, sachant que des approches de nature individuelle peuvent aussi contribuer à notre connaissance sur le sujet. * De façon agrégée, on cherche à établir un bilan annuel formation emploi en confrontant pour une pseudo classe d’âge sortant du système au cours d’une année récente, d’une part la distribution des niveaux terminaux de scolarisation et d’autre part celle des emplois offerts par niveau de qualification.

i) La distribution des niveaux terminaux de formation peut assez directement être dérivée de l’analyse des scolarisations et des statistiques sur les diplômes délivrés dans les statistiques scolaires : parmi une classe d’âge de x milliers de jeunes, combien n’ont pas du tout accès à l’école, combien ont une scolarité primaire incomplète, combien quittent le système avec une scolarité primaire complète, une scolarité secondaire de premier cycle incomplète, puis complète, … jusqu’à : Combien sortent du système d’éducation-formation avec un diplôme d’enseignement supérieur validé ? ii) La distribution des emplois offerts sur une base annuelle au cours des années récentes est plus difficile à établir. En effet, on ne dispose en général pas de telles statistiques et on doit agir par estimations et approximations. En premier lieu, il faut souligner qu’on ne disposera jamais de données sur les flux annuels et il faudra travailler sur la base de stocks à plusieurs moments du temps; c’est par différence et ajustement pour cessation d’activité, que seront dérivées les estimations de flux annuels. Deux sources statistiques sont possibles pour estimer les stocks de personnels employés par niveau de qualification à un moment donné du temps (sachant que les différents pays peuvent être dans des configurations très différentes quant à la disponibilité de ces sources potentielles) : i) statistiques de l’emploi occupé dans la fonction publique, les entreprises parapubliques et les entreprises privées; idéalement ces informations font l’objet d’un recueil régulier si bien qu’on peut disposer d’une série temporelle. ii) Enquêtes sur la main d’œuvre ou, plus souvent, enquêtes de ménages réalisées à plusieurs moments du temps, dans lesquelles on connaît l’emploi exercé par les différents adultes du ménage.

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En mettant en regard ces deux distributions [classées i) par niveau terminal croissant pour les formations et ii) en allant du secteur agricole au secteur informel, et au secteur de l’emploi moderne par niveau croissant de qualification des emplois], on peut avoir une idée quantitative globale de la pertinence des arrangements actuels en matières de répartition des scolarisations par niveau d’éducation et de formation en fonction de la structure des demandes de l’économie du pays dans la période considérée. Ces informations sont évidemment utiles dans la perspective de la réponse à la question posée. Cela dit, il conviendra d’être prudent dans leur extrapolation pour la politique éducative future. En effet, ce genre d’exercice nous renseigne par nature davantage sur le passé que sur le futur. Ainsi, si la conjoncture économique anticipée pour les années à venir (il est rare qu’on envisage des difficultés majeures) diffère sensiblement de celle qui a prévalu dans les dix dernières et au sujet de laquelle les chiffres ont été produits, il est normal que des ajustements puissent être nécessaires; la situation est évidemment différente aussi selon que l’ampleur des déséquilibres observés dans la période passée (mais récente) est large ou bien modeste et qu’on a des raisons suffisantes pour penser que la conjoncture économique doit radicalement changer. On notera au passage les limitations des techniques traditionnelles de prévision des besoins en main d’œuvre. L’expérience de cette approche n’est pas bonne, notamment pour les trois raisons complémentaires suivantes : i) il est toujours difficile de faire des prévisions à 5 ou 10 ans qui aient une précision raisonnable, surtout quand les données initiales sont lacunaires (il est préférable de chercher des systèmes capables de répondre aux évolutions dans la demande que d’imaginer de façon rigide ce qui devrait rationnellement être fait); ii) quand on cherche des besoins, on en trouve toujours (généralement d’une ampleur plus forte que ce qui est économiquement justifié) plus, notamment lorsque la dimension des prix est absente de l’analyse, et iii) quand on a estimé des besoins, on en vient à utiliser les formes d’enseignement technique et professionnel existantes, alors que celles-ci peuvent être, pour certaines d’entre elles, tout à fait inefficientes. * De façon micro, la technique la plus courante est celle des enquêtes de suivi; elle s’applique principalement aux formations techniques et professionnelles et à l’enseignement supérieur (filières terminales débouchant normalement sur l’entrée dans la vie active). Une enquête de suivi consiste à observer le devenir de jeunes, diplômées au cours d’une année donnée, 12 ou 18 mois après la fin de ces études (dans des structures de type privé ou public, techniques ou professionnelles, dans telle ou telle spécialité de formation ou en tel ou tel lieu, dans une formule à temps plein ou en alternance, …). Selon que ces jeunes sont, ou non, employés, et si oui dans un métier qui est, ou non, en relation avec la formation qu’ils ont reçue, on dispose de premières indications très utiles. Lorsque ces indicateurs de résultats sont en outre mis en regard avec les coûts unitaires associés à ces différentes formations, on en dérive des indications plus claires sur la pertinence qu’il y aurait à augmenter, ou bien à réduire, la production de formés dans les différentes disciplines et dans les différentes formes de mise en œuvre (dont de financement) des formations. Comme dans la méthode précédente, il faut avoir conscience que les observations empiriques faites sont indexées sur la situation macro-économique ayant prévalu au moment de l’enquête et que les choses peuvent évoluer.

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2. Mettre les institutions et les comportements en ligne avec ce qui est souhaitable au niveau social Dans les analyses menées au point précèdent, on peut éventuellement conclure que la structure actuelle des scolarisations n’est pas celle qui est souhaitable. La question est alors de déterminer les politiques qui devraient être envisagées pour que les changements souhaités se matérialisent effectivement. D’une façon générale, il est utile de prendre en considération d’une part que les décisions individuelles de scolarisation sont fondées sur une appréciation des coûts (directs et d’opportunité) et des bénéfices anticipés, et d’autre part que l’éducation est à la fois un bien public et un bien privé mais que la dimension privée est évidemment d’autant plus manifeste qu’il s’agit de niveaux qui débouchent vers des emplois dont les revenus sont appropriés de façon individuelle. * Dans l’enseignement primaire , comme dans les autres niveaux d’enseignement, les parents perçoivent bien les coûts, mais peuvent percevoir moins bien les bénéfices, et ce, pour des raisons diverses : i) parce que la scolarisation des filles profitera à la famille de leur mari et pas à celle de ses parents; ii) parce que les bénéfices de la scolarisation présentent des dimensions qui ne sont pas valorisées par les parents telles qu’une certaine rupture avec les pratiques productives et sociales traditionnelles ou la mobilité géographique; iii) parce que les familles ne perçoivent pas l’existence d’aspects inter-générationnels tels que la réduction de la mortalité infantile ou l’amélioration de l’état de santé des enfants avec la scolarisation de sa mère, ou bien enfin iv) parce qu’une proportion notable des bénéfices associés à l’enseignement est dans le domaine des externalités. Dans ces conditions, il y a un risque que l’agrégation des comportements individuels spontanés, notamment de la part de certaines franges de la population (populations du milieu traditionnel, ruraux, familles de milieu modeste) conduise à un sous- investissement global par rapport à ce qui serait socialement souhaitable. La fourniture gratuite de services éducatifs de qualité formelle convenable est une référence utile (même s’il n’y a pas de raisons de refuser aux familles qui veulent offrir un enseignement privé à leurs enfants de le faire); mais il est possible que ceci ne soit pas réalisé et que des frais substantiels incombent aux familles (droits d’écolage officiels ou «sauvages», dépenses de manuels scolaires ou de fournitures essentielles) avec d’éventuelles conséquences à explorer sur l’accès et la rétention, pour certaines franges de la population en particulier. Il est aussi possible que même avec une école formellement gratuite, certaines strates de la population restent réticentes à scolariser leurs enfants avec des conséquences convergentes en matière d’efficience et d’équité. Cela implique alors une appréciation de nature différente de l’école elle-même. Il est certes a priori davantage possible d’agir sur les coûts que sur les bénéfices perçus pour modifier l’équilibre entre les deux termes dans un sens qui soit favorable aux scolarisations effectives des enfants (sachant qu’il convient d’identifier une stratégie qui, elle-même, soit correctement pertinente en référence aux ressources additionnelles qu’elle mobilise et aux résultats sociaux qu’elle permet d’obtenir).

. certaines actions sur les bénéfices sont possibles : un premier groupe d’actions cherche à agir, au sens large, sur les perceptions des parents; on peut ainsi citer des actions qui visent à modifier les comportements spontanés traditionnels en utilisant le médium de personnalités qui ont la confiance des populations telles que les autorités religieuses ou les leaders communautaires. Un second groupe d’actions considère que la fréquentation scolaire sera

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meilleure si l’école, soit propose des contenus perçus comme pertinents dans la vie locale et son amélioration, soit offre aux enfants un repas au cours du temps scolaire. Toutes ces actions n’ont pas le même coût (le repas pendant le temps scolaire est une action coûteuse alors que l’intervention des chefs religieux ou des leaders d’opinion l’est sans doute beaucoup moins) ni peut-être les mêmes impacts (sachant que ceux-ci doivent être évalués de façon factuelle et expérimentale).

. certaines actions peuvent chercher à réduire les coûts de l’éducation supportés par les familles pour la scolarisation de leurs enfants; sur ce plan également, plusieurs voies sont possibles : pour réduire les coûts d’opportunité, on peut considérer des actions simples et potentiellement efficaces tels que l’adaptation du temps scolaire, sur la journée (par exemple l’école fonctionne de 9h30 à 15h30 plutôt que de 7h30 à 11h30 et de 15h à 17h pour permettre aux enfants, les filles en particulier, de contribuer aux activités qui leur sont imparties dans le contexte social local), la semaine (décider que la journée de vacance hebdomadaire n’est pas décidée nationalement mais peut correspondre au jour du marché dans la localité) ou bien l’année pour s’adapter au cycle de la production agricole dans l’environnement de l’école. Ont peut aussi aider à l’organisation par la communauté de services qui vont libérer les enfants pour la fréquentation scolaire (garde de jeunes enfants). Dans la même direction, on peut penser, dans le cadre intersectoriel des stratégies de lutte contre la pauvreté à implanter des points d’eaux dans les villages pour libérer les filles de cette corvée qui les retient de fréquenter l’école; dans une perspective étroite et de court terme, on pourrait souligner qu’il serait sans doute possible de ne pas changer les habitudes sociales et que les filles fassent la corvée d’eau tout en fréquentant l’école si celle-ci fonctionne avec des horaires compatibles, sachant que dans une optique plus large, la formule dans laquelle les communautés peuvent disposer localement d’eau potable est évidemment préférable. Dans la mesure où toutes ces adaptations scolaires ont une dimension essentiellement locale, il est probable que la mesure de politique éducative de base est de donner au système cette liberté d’articuler des dispositions nationales communes (contenus imposés pour le noyau du programme, horaires globaux à respecter) et les déclinaisons possibles au niveau local pour définir les adaptations nécessaires pour que l’école rencontre les demandes familiales.

Ces types de mesure relativement classiques peuvent être potentiellement utiles, et il est bien sur nécessaire de commencer par les mesures les plus simples et les moins coûteuses; il est toutefois possible dans certains cas que, bien qu’utiles, elles ne soient pas suffisantes pour permettre la scolarisation de jeunes qui sont exposés à des conditions spécialement difficiles; ce sera notamment le cas d’orphelins suite à des conflits ou à la prévalence du VIH-SIDA (on compte qu’il y aurait environ 11 millions d’orphelins en âge d’être scolarisés et qui connaissent des difficultés avérées de scolarisation) ou de populations vivant dans des conditions de pauvreté extrême. Tous les pays ne sont pas également concernés, car si certains ne le sont que de manière marginale, d’autres le sont de façon majeure. Dans ces derniers cas, des mesures particulières et ciblées, parmi lesquelles des subventions financières directes aux individus concernés, ou plus probablement aux communautés qui assureraient des responsabilités avérées, doivent sans doute être envisagées; ces subventions doivent bien sur être mises en place de façon telle qu’elles soient directement attachées à la fréquentation scolaire effective.

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* Dans l’enseignement technique et professionnel ainsi que dans l’enseignement supérieur, la question de la régulation des services en quantité, comme en qualité et en caractéristiques (type et spécialités de formation), est une nécessité. Dans la plupart des pays africains, notamment francophones, cette régulation en réponse aux demandes de l’économie n’a que rarement été satisfaisante. De façon générique une telle régulation ne peut se faire que par les quantités (régulation administrative sur la base de données factuelles sur le marché du travail, l’insertion des formés et les coûts de formation) et/ou par les prix. Une raison importante des difficultés rencontrées dans les pays africains francophones est qu’on a souvent pensé que la régulation par les quantités était socialement difficile à introduire et que la régulation par les prix ne l’était pas moins. On s’est souvent contenté de modes implicites tels que la fréquence des abandons au cours des différents cycles (ce sont les difficultés internes au fonctionnement du système qui tiennent lieu de mode de régulation) ou l’utilisation de la contrainte budgétaire (on laisse entrer dans le supérieur des effectifs croissants mais les ressources ne suivent pas si bien que la qualité du service se détériore et qu’on réalise ainsi un arbitrage quantité qualité très inadéquat). On a parfois aussi utilisé des modes pervers de régulation tels qu’une sévérité excessive des examens, dont le bac, avec des taux de réussite très faibles et des nombres de candidats libres imposants; dans ce contexte, la régulation a comme fondement l’incapacité individuelle (c’est la faute des individus qui s’éliminent eux-mêmes) plutôt que la responsabilité des décideurs; c’est évidemment politiquement plus présentable (même si l’argument de contrôler la qualité de ceux qui ont accès au supérieur reste évidemment valide). Concernant enfin, la régulation par les prix, nombre de pays ont institué un système de bourses et d’aide sociale dans le technique et le supérieur pour attirer des candidats dans une période où la rareté de ces personnels était grande. Cela dit, le système a souvent été maintenu (généralement avec une générosité réduite toutefois quand les nombres ont augmenté et que les ressources de l’état sont devenues plus contraintes, notamment dans le cadre des plans d’ajustement structurels) alors qu’on est globalement passé d’une situation de pénurie à celle de fort excédent dans le supérieur; on aurait donc souvent une régulation par les prix fonctionnant plus ou moins à l’envers. Les ouvertures faites dans certains pays au développement de l’enseignement supérieur privé vont par contre dans la direction d’une meilleure régulation, même s’il n’est pas nécessairement souhaitable d’avoir un sous-système privé qui doive totalement s’autofinancer par les frais de scolarité et un enseignement public gratuit, de qualité et de pertinence médiocre tout en formant des jeunes en nombres inadéquats. Sur la base de la nécessité d’organiser une régulation des flux en fonction des demandes de l’économie et de maintenir une qualité souhaitable aux formations offertes, il sera utile de faire une évaluation des modes actuels de régulation (de leurs avantages et inconvénients), et d’examiner les options possibles comme base de discussion avec les décideurs et les acteurs du système.

Chapitre 6 : L’équité et les disparités dans un système d’enseignement (10-15 pages) Dans l’analyse des systèmes d’enseignement, l’équité est une dimension importante à considérer dans la mesure où on souhaite que les enfants aient des chances de scolarisation aussi égales que possible. Les chiffres moyens sur les scolarisations, la mobilisation des ressources et les conditions d’enseignement sont importants dans une perspective globale, mais leur distribution est aussi d’un

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intérêt essentiel car les moyennes peuvent cacher des disparités sensibles qu’il est utile de décrire, d’en comprendre les raisons et d’examiner les possibilités de leur réduction. Deux angles complémentaires au moins peuvent être envisagés pour aborder ces questions :

* le premier angle d’analyse concerne la distribution des scolarisations aux différents niveaux du système selon des variables telles que le milieu géographique (région et opposition entre urbain et rural), le sexe ou le niveau de revenu de la famille; dans ce contexte, on considère que l’éducation est un bien, généralement désirable, mais dont ne spécifie pas la valeur; * le second angle d’analyse part de l’idée que l’éducation a une valeur et que c’est la distribution de cette valeur entre différents groupes de population qui peut servir de base pour mesurer le degré d’équité dans le système. Deux dimensions peuvent être considérées pour établir cette valeur : d’une part, on peut considérer que l’accès aux services éducatifs correspond à un accès aux ressources publiques mobilisées pour produire ces services; d’autre part, on pourrait considérer que le fait de recevoir de l’éducation se traduira en moyenne par des revenus futurs dans la vie adulte des individus. La seconde dimension est évidemment difficile à mettre en œuvre. Par contre la première peut assez facilement l’être et cette approche sera suivie dans la production du rapport d’état d’un système éducatif. On cherche alors d’une part à examiner comment sont distribuées les ressources publiques dans le système (dimension structurelle), et, d’autre part, dans quelle mesure certaines catégories de population réussissent, mieux que d’autres, à s’approprier ces ressources (aspects distributifs).

Sur la question de la distribution structurelle des ressources publiques au sein du système éducatif, deux aspects complémentaires peuvent aussi être considérés, à savoir celui de la distribution globale entre grands niveaux d’enseignement et celui de la distribution des ressources allouées à chacun de ceux-ci entre les différents établissements où l’enseignement est localement dispensé. Ce dernier point est important car il instruit dans quelle mesure les conditions de scolarisation peuvent varier d’un lieu à l’autre d’enseignement, alors qu’on souhaite que ces conditions soient raisonnablement homogènes. Cela dit, cette question peut aussi être considérée comme relevant de la gestion du système si bien qu’elle sera abordée dans le chapitre 7 ciblant ces aspects de gestion. Ce chapitre cible donc de façon plus particulière deux questions à savoir i) dans quelle mesure les chances de scolarisation sont-elles différentes selon quelques grandes variables sociales ? et ii) en quoi les choix faits en matière de distribution des ressources publiques ont-ils des conséquences en matière d’équité ? 1. L’équité dans les scolarisations L’approche est simple; elle consiste à mettre en regard deux ordres de statistiques, des données sur les carrières scolaires des individus (accès à l’enseignement primaire, secondaire ou supérieur, rétention au cours des différents cycles, transition entre cycles successifs) d’une part, des données sur les caractéristiques sociales de ces individus (sexe, origine géographique, groupe ethnique) ou de leurs parents (niveau de revenus en particulier), d’autre part. Pour réaliser cette analyse, deux sources d’informations peuvent être mobilisées : les statistiques scolaires (en conjonction avec les données démographiques) et les enquêtes de ménages.

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i) Avec les statistiques scolaires (et les données démographiques associées), on dispose de façon assez immédiate de données sur les taux d’accès ou de scolarisation, et même souvent les profils de scolarisation, selon le sexe et les zones administratives (provinces ou régions). Une limite évidente à l’utilisation de telles informations se trouve dans la précision des données démographiques, en particulier si le recensement est ancien et ceci d’autant plus qu’on considère des zones administratives nombreuses (les projections supposent des informations sur la fécond ité différentielle et sur les migrations, deux domaines caractérisés par des imprécisions majeures). Dans le primaire, on peut associer la localisation (urbaine ou rurale) de l’établissement et celle de ses élèves et ainsi évaluer les disparités entre les garçons et les filles résidant dans les villes ou les campagnes dans l’accès à l’école ou dans les profils de scolarisation; par contre au-delà du primaire, cette association entre localisation de l’établissement scolaire et celle de ses élèves n’est plus très valide car la plupart des établissements situés en villes accueillent des élèves originaires des campagnes. ii) Les données enregistrées dans les enquêtes de ménage sont à priori plus intéressantes car, outre le sexe des enfants et un descriptif de sa situation scolaire actuelle et passée, on connaît directement la localisation du ménage (rural/urbain, zone administrative); on dispose par ailleurs d’éléments factuels pour situer son niveau de richesse. Cela dit, la taille des échantillons est une limitation si on veut avoir des indications suffisamment robustes en particulier au niveau des zones géographiques fines. Au total, il n’y a pas de recettes définitives sur les manières de procéder et c’est surtout la disponibilité des informations qui définira la stratégie pertinente à suivre dans un pays donné. Il est utile de regarder les exemples de tableaux proposés dans la seconde partie de ce texte, ainsi que les exemples concrets de ce qu’il a été possible de réaliser dans des pays particuliers, donnés dans la troisième partie. 2. L’équité dans la répartition des ressources publiques en éducation L’idée est simple : de par leur scolarisation, les individus s’approprient les ressources publiques si bien que la distribution inégale des scolarisations aux différents niveaux éducatifs ainsi que le degré de différenciation des coûts unitaires entre ces niveaux vont créer un cadre structurel plus ou moins inégalitaire (qui constitue en lui-même une dimension importante de l’équité dans un système éducatif national), cadre au sein duquel des différenciations plus ou moins grande entre individus selon leur appartenance sociale vont se manifester. La première dimension globale de l’équité dans un système éducatif est souvent nommée structurelle, et la seconde, distributive. 2.1 La dimension structurelle Pour donner une dimension «sensible» à l’existence de la dimension structurelle, on peut partir de la comparaison entre 3 pays hypothétiques qui mobiliseraient le même volume de ressources publiques pour leur système éducatif, mais qui auraient fait des choix différents en matière de distribution des scolarisations et de coûts unitaires entre les différents niveaux scolaires.

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Pays A Pays B Pays C

Taux de scolarisation (%) Primaire Secondaire Supérieur

90 30 5

90 30 5

60 30 20

Coût unitaire Primaire Secondaire Supérieur

30 60 150

22 70 400

22 70 400

Sur le plan de la couverture scolaire, le pays A et le pays B ont une structure comparable aux différents niveaux éducatifs; par contre, le pays A propose une structure des coûts unitaires qui est, en termes relatifs, plus favorable au primaire (pour la majorité des élèves) et moins au supérieur que le pays B. On a donc bien l’intuition que la distribution des ressources publiques est plus égalitaire (moins concentrée) dans le pays A que dans le pays B. Si on étend maintenant la comparaison aux pays B et C, on voit que ces deux derniers ont une structure des coûts unitaires qui est comparable, mais que C a choisi d’avoir un taux de scolarisation dans le primaire qui est inférieur à celui de B pour pouvoir développer davantage son enseignement supérieur. La même intuition suggère que C ait une distribution des crédits publics qui est plus inégalitaire que B. Au total, on perçoit bien i) que les trois pays sont structurellement différents quant à la distribution des ressources publiques dans leur système éducatif et ii) que la structure des scolarisations et des coûts unitaires entre les différents niveaux éducatifs est à cet égard déterminante. Ces deux distributions sont en fait déterminantes en ce qu’elles influencent i) la structure des scolarisations terminales (le niveau scolaire le plus élevé) des individus, et ii) le volume agrégé des ressources publiques accumulées sur l’ensemble de leur scolarité. Pour montrer comment on peut conduire les calculs, prenons l’exemple du pays dont les caractéristiques structurelles de base sont données dans la partie gauche du tableau ci-après. Il est en général préférable de se fonder sur les données des profils de scolarisation avec un taux d’accès à chaque classe des différents cycles d’études. cela dit, par commodité, nous présentons ci-après des données moyennes par cycle d’études. Les calculs sont effectués dans une perspective transversale en se fondant sur la structure des taux ou du profil de scolarisation estimé pour une année donnée.

Ressources publiques Ressources publiques accumulées Cycle d’enseignement

Nombre d’années du cycle

Taux (%) scolarisation

% Niveau terminal Coût

unitaire Cumulées terminales

A chaque niveau terminal

%

Aucune scolarisation Primaire 1er cycle secondaire 2nd cycle secondaire Supérieur

0 6 4 3 4

60 25 12 4

40 35 13 8 4

- 10 25 40

250

0 60

160 280

1 280

0 2 100 2 080 2 240 5 120

0 18,2 18,0 19,4 44,4

Total - - 100 - - 11 540 100

On passe de la structure des taux de scolarisation à celle du niveau terminal par différence entre niveaux successifs; si 60 % d’une classe d’âge a accès au primaire, c’est que 40 % n’y ont pas accès et

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reste donc sans scolarisation. Puis si 60 % de la classe d’âge est scolarisé dans le primaire alors que 25% accédera au premier cycle secondaire, cela indique que 35 % ont le primaire comme niveau terminal de scolarisation; de la même manière on détermine que 13 % de la classe d’âge a comme niveau terminal le premier cycle secondaire, 8 % le second cycle secondaire et 4 % le niveau de l’enseignement supérieur. De la durée des cycles d’enseignement et des coûts unitaires dans chacun d’entre eux, on dérive la mesure des ressources publiques accumulées par les individus selon leur niveau terminal de scolarisation. Ainsi, ceux qui n’ont eu aucune scolarisation n’ont évidemment approprié aucune ressources publiques scolaires; ceux qui ont le primaire comme niveau terminal (on suppose que le cycle complet est réalisé) ont approprié 60 (10 unités monétaires multipliées par 6 années d’études). Ceux qui s’arrêtent à l’issue du premier cycle secondaire, ont individuellement bénéficié de 160 (60 dans le primaire plus 100 (25 unités monétaires multipliées par 4 années d’études) dans le premier cycle secondaire]; en procédant ainsi, on obtient 280 pour ceux qui sortent du système à l’issue du second cycle secondaire et 1 280 pour ceux qui font une scolarité jusqu’au niveau du supérieur. Sur la base du volume des ressources publiques appropriées par chaque individu selon son niveau terminal de scolarisation et du nombre d’individus (dans une population fictive de 100 jeunes) à chacun de ces niveaux, on détermine les ressources publiques globales mobilisées par cette population. Dans l’exemple considéré, ceux qui ont le primaire comme niveau terminal de scolarisation (35 % de la génération) s’approprient 18,2 % des ressources publiques globales allouées à cette génération; ceux qui mettent un terme à leurs études au niveau du premier cycle secondaire 18 %, du second cycle secondaire, 19,4 % et les 4 % de la génération qui accèdent au supérieur, 44,4 des ressources. Les distributions du niveau terminal de scolarisation d’une part, des ressources publiques globales de l’autre, peuvent être représentées de manière cumulative dans la courbe de Lorenz. % cumulé des ressources 100 B 90 80 70 60 Q 50 40 P 30 S 20 N 10 M A 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 % cumulé des individus

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La diagonale OB représente la référence d’équi-répartition (x % des individus obtiennent x % des ressources quel que soit x), alors que la courbe de Lorenz (OMNPQB) correspondant à la réalité de la distribution des ressources publiques dans le pays s’écarte ici sensiblement de la référence. Pour quantifier de façon synthétique cette distribution, deux indicateurs sont généralement utilisés :

. le premier est l’indice de Gini qui est calculé comme le rapport de la surface S (comprise en la courbe de Lorenz et la diagonale) et de celle du triangle OAB (il est évidemment commode de calculer S comme étant le complément à la surface comprise entre la courbe et les côtés OA et AB du triangle OAB). Par construction, l’indice de Gini a une valeur comprise entre 0 et 1; la valeur 0 correspond à l’équité parfaite de la distribution des ressources publiques en éducation entre les membres d’une génération, et la valeur 1, à la concentration totale des ressources publiques dans une seule main; par conséquent plus la valeur de l’indice est forte, plus la distribution des ressources publiques en éducation est structurellement inéquitable. Dans le cas considéré, sa valeur numérique est de 0,713 1. . le second est le calcul de la proportion des ressources publiques appropriée par les 10 % les plus éduqués de la génération. Dans le cas du pays fictif étudié, cette proportion est estimée, par interpolation linéaire (ou à partir d’une lecture directe sur la courbe de Lorenz) à 58,9 % (plus de la moitié du fonctionnement du ministère profite à seulement 10 % des individus de la génération). Cet indicateur est évidemment plus parlant que le coefficient de Gini car on est plus sensible à l’idée que 59% du budget sont appropriés par les 10 % les plus éduqués de la génération que de savoir que le coefficient de Gini est de 0,71. Ces calculs peuvent être conduits pour mesurer le degré d’inégalité structurelle dans la distribution des ressources publiques en éducation dans un pays à un moment donné du temps. Il est évidemment intéressant de comparer les indicateurs mesurés dans le pays avec ce qui est observé dans des pays comparables; il est également intéressant d’observer dans quelle mesure les évolutions enregistrées dans le système éducatif au cours des dernières années ont conduit à réduire ou bien à accentuer les inégalités structurelles; la représentation de la courbe de Lorenz, 10 ans auparavant par exemple (courbe en pointillés dans le graphique ci-dessus) permet aussi d’illustrer les évolutions. Enfin, l’analyse peut aussi être mobilisée de façon prospective pour simuler l’impact possible de mesures nouvelles de politique éducative dans la mesure où celles-ci sont susceptibles de modifier la structure des scolarisations et/ou celle des coûts unitaires. 2.2 La dimension distributive A l’intérieur de l’enveloppe structurelle qui vient d’être explorée, des différenciations sociales d’une plus ou moins grande intensité peuvent se manifester. Il n’y a toutefois pas de relation nécessaire entre l’intensité de l’inégalité dans les dimensions structurelle et distributive, même si on doit s’attendre à. ce que les inégalités sociales aient tendance à être plus intenses quand les structures sont elles-mêmes caractérisées par un degré plus élevé d’inégalités. Pour mesurer les disparités sociales dans la distribution des ressources publiques en éducation, et dans la suite à ce qui a été dit dans la première section de ce chapitre, deux méthodes sont possibles selon 1 [5000 – {[(75-40)x18,2/2] + [(88-75)x(36,2+18,2)/2] + [(96-88)x(56,6+36,2)/2] + [(100-96)x(100+56,6)/2]}] / 5000

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qu’on se fonde i) sur les données scolaires (et les données démographiques) ou ii) sur les informations contenues dans une enquête de ménages. Sur la base des statistiques scolaires, on identifie des profils de scolarisation d’individus de groupes sociaux différents (notamment garçons et filles), si bien que, sur la base de leur représentation dans la population jeune au niveau national, on peut identifier les ressources publiques appropriées par les différents groupes; on peut ainsi estimer l’ampleur des différenciations sociales dans la distribution des ressources publiques en éducation. Le même exercice peut être conduit sur la base des données d’une enquête de ménages sachant que les différenciations peuvent alors concerner, outre le sexe, la zone géographique (notamment urbain et rural, mais aussi la région ou la province si l’échantillon de ménages est de taille suffisante) ainsi que le niveau de revenu du ménage. Ces analyses sont évidemment spécialement appropriées dans la perspective de la préparation par le pays de sa stratégie de lutte contre la pauvreté.

Chapitre 7 : Les questions de gestion du système éducatif (10-15 pages) Les questions de gestion des systèmes éducatifs sont souvent abordées dans la littérature comme des questions d’une part de nature qualitative et institutionnelle (on identifie les relations, les fonctions respectives de chacun dans la chaîne hiérarchique, ..) et d’autre part de nature normative (comment il conviendrait de procéder pour ce soit comme il faut) dans lesquelles le rôle d’expertise est souvent primordial. Sans méconnaître l’utilité (mais aussi les limites évidentes) de ces approches, il reste possible de contribuer à la discussion sur ces questions importantes par des analyses de nature empirique et quantitative. On n’épuisera certes pas ainsi la question, mais on peut toutefois contribuer à générer des informations utiles sur quelques uns de ses aspects parmi les plus importants. De façon très simplifiée, on peut indiquer qu’au-delà de la politique éducative, qui définit les choix structurels sur les modes d’organisation et les moyens mis à disposition de chaque niveau d’enseignement, la gestion va intervenir dans les processus par lesquels ces décisions sont concrètement mises en œuvre dans la perspective de produire effectivement attendus. Si on suit cette ligne simplifiée, on peut définir deux dimensions complémentaires à la gestion d’un système éducatif, i) une dimension de nature administrative qui gère le budget et sa distribution entre les différentes régions ou provinces, et de façon ultime entre les différents établissements d’enseignement (sachant que, dans cette activité, les personnels constituent bien sûr un élément important puisqu’ils constituent la composante majoritaire des budgets). ii) une dimension pédagogique, qui concerne de façon centrale la transformation des ressources en résultats sociaux tangibles, sachant que c’est au niveau des établissements scolaires individuels que cette transformation prend place. Dans cette acception limitée de la gestion, un système serait donc d’autant mieux géré qu’il mettrait en place les mécanismes qui, d’une part, conduisent à une distribution pertinente des ressources entre établissements (gestion pédagogique), et, d’autre part, conduisent à ce que ces établissements produiraient le maximum de résultats chez les élèves qui leur sont confiés. Examinons de façon successive comment ces deux points peuvent être concrètement analysés sur une base factuelle.

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1. La gestion administrative et la répartition des moyens et des personnels aux écoles Sur ce plan, deux aspects peuvent être identifiés : le premier concerne au sens large la cohérence dans les allocations de moyens (dont en particulier les personnels mais aussi les bâtiments et les moyens de fonctionnement) entre écoles (les écoles et leur mode d’organisation existant au moment où l’analyse est conduite étant alors considérés comme des éléments exogènes); le second concerne les choix de gestion qui ont été faits, au sens large en matière de carte scolaire, et en particulier la question de la taille «optimale» des établissements. On examine alors la question des économies d’échelle dans la production scolaire. 1.1 La cohérence dans les allocations de moyens et de personnels aux écoles L’évaluation du degré de cohérence dans les allocations suppose qu’on dispose d’une référence théorique de ce que serait une allocation cohérente et qu’on sache mesurer l’ampleur de l’écart entre la réalité observée et cette référence. Cette dernière correspond par nécessité à une vision normative; cela dit, ce n’est sans doute pas imposer une norme trop violente que de suggérer i) qu’à un niveau d’enseignement donné, les écoles devraient disposer d’un volume de moyens et de personnels d’autant plus important qu’elles scolarisent un nombre plus grand d’élèves, ii) que les écoles qui scolarisent le même nombre d’élèves devraient avoir plus ou moins le même volume de moyens et disposer du même nombre d’enseignants et iii) qu’on devrait s’attendre à ce que des écoles dotées de moyens et de personnels comparables devraient avoir des effectifs d’élèves plus ou moins semblables. En d’autres termes, une distribution cohérente placerait sur une courbe unique la position de tous les établissements d’un pays, dans un espace confrontant l’effectifs des élèves d’une part et le volume des moyens ou le nombre des personnels de l’autre. Dans un tel espace et pour une école A donnée, le rapport entre les deux termes (la pente de la droite OA) correspond à la valeur de la dépense par élève (moyens/effectifs) ou à l’inverse du taux d’encadrement. (1/nbre d’élèves par personnel). S’il n’existe pas d’économies d’échelle dans la production scolaire au niveau éducatif considéré, et si la dotation des écoles est caractérisée par une cohérence parfaite, alors on doit s’attendre à ce que toutes la position de toutes les écoles soit située quelque part sur la droite OA. Moyens, Nombre de personnels * * * * * * * * * * * * * * ** * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * ** * * * * * A* * * * ** * ** *** * ** ***** * * * * * * *** * * * * ** * * * 0 Effectifs des élèves

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On peut alors projeter dans cet espace la position de toutes les écoles individuelles opérant à un niveau éducatif donné, en utilisant les données sources qui servent à la production des annuaires statistiques de l’éducation (l’enquête annuelle des établissements scolaires avec estimation des dépenses sur la base des fonctions de coûts présentées au chapitre 3 de ce guide). En opérant ainsi, on trouve en général que l’ensemble des données individuelles d’écoles forme un nuage de points qui, i) globalement, caractérise une relation croissante entre les moyens et les effectifs, ii) manifeste un certain degré de dispersion autour d’une tendance centrale et iii) que cette tendance centrale peut certes passer par l’origine, mais qui peut aussi correspondre à une ordonnée à l’origine positive, caractérisant un coût fixe dans la relation de coût ou l’existence d’économie d’échelle dans la production d’enseignement au niveau éducatif analysé. Pour synthétiser cette mise en correspondance globale dans la population des écoles individuelles entre moyens mobilisés (M) ou effectifs des personnels (EP) d’une part, effectif des élèves (EEl) de l’autre, il est évidemment commode d’estimer la relation statistique linéaire qui lie ces grandeurs : 1) EP = a + b.Eel ; R²=R²1 2) M = a’ + b’.Eel ; R²=R²2 Les valeurs a et a’ correspondent aux coûts ou au nombre de personnels fixes impliqués par le fonctionnement d’un établissement dès lors qu’il existe, et d’une certaine façon avant qu’il n’ait même inscrit aucun élèves (les moyens de base tels que l’équipe minimum pour assurer le service éducatif). Au-delà de cette équipe minimum, il convient d’ajouter des personnels pour assurer les services d’enseignement au fur et à mesure que l’établissement scolarise un nombre croissant d’élèves. Dans cette perspective, les coefficients b et b’ mesurent les coûts variables par élève (les coûts marginaux). Les relations ci-dessus permettent d’estimer la tendance centrale ou moyenne entre moyens et effectifs au sein de la population des écoles; cela dit, on peut observer généralement que nombre des écoles sont situées de part et d’autre ce cette tendance centrale. Il est ainsi intéressant de mesurer la variabilité inter-établisements des moyens ou du nombre des personnels pour des établissements scolarisant un nombre donné d’élèves (par exemple 150, 300 ou 500 élèves) ou l’ampleur de la variabilité des effectifs d’élèves entre des établissements disposant de moyens ou d’un nombre de personnels comparable. Le R² de l’estimation statistique est un indicateur de l’ampleur globale de ces dispersions parasites; sa valeur est inscrite sur un continuum compris entre 0 qui caractériserait un aléa complet dans les allocations et 1 qui caractériserait au contraire l’existence d’une formule parfaitement cohérente dans les allocations de moyens et de personnels aux écoles. Cet indicateur peut alors être utilisé comme une mesure du degré d’incohérence dans les allocations de moyens et de personnels aux écoles individuelles. Dans la réalité, on observe que le degré de cohérence dans les allocations a tendance à être meilleur dans le secondaire que dans le primaire; notons à titre de parenthèse que l’analyse dans le secondaire doit être menée par cycle car les coefficients a et b peuvent différer sensiblement entre le 1er et le 2nd cycle, sachant que des ajustements doivent être faits dans l’analyse si certains établissements ont des effectifs des deux cycles d’enseignement. Dans le primaire, les informations de ce type sont connues

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pour une quinzaine de pays africains et la valeur du R² varie de 0,60 (pays où l’aléa est maximum) à 0,92 (pays où l’aléa dans les allocations est le mieux contrôlé). Si on observe que le degré de cohérence dans les allocations de moyens ou de personnels laisse à désirer, une question d’importance est de déterminer dans quelle mesure cela vient d’une part de différences de dotations entre régions ou provinces et d’autre part de disparités de dotations entre écoles individuelles au sein des différentes régions ou provinces. Pour séparer ces deux composantes et identifier l’ampleur dans les dotations entre régions et provinces, il est commode de construire une batterie de variables muettes pour les différentes régions ou provinces (R1, R2, ..) et d’estimer des modèles du type estimé précédemment mais dans une spécification multivariée. 3) EP = a’’ + b’’. EEl + c2.R2 + c3.R3 …. ;R² = R²3 Par l’intermédiaire de la valeur numérique des différents coefficients c2, c3, .. (on considère ici que la région 1 a été utilisée comme modalités de référence) et de leur significativité statistique, cette spécification permet une première mesure des différences régionales; par comparaison des R² des modèles 1) et 3) on peut par ailleurs estimer l’intensité respective des disparités inter régionales globales et des disparités inter écoles au sein des différentes régions ou provinces. Ainsi, d’après le modèle 1), on trouve que l’aléa global est [1-R²1], alo rs que l’aléa résiduel dû aux disparités inter-écoles et intra-provinces est [1-R²3]. L’aléa dû aux disparités inter-provinces est donc [R²3-R²1]. La comparaison des deux derniers termes donne une idée de l’importance respective des disparités inter et intra provinces dans l’explication de l’aléa global. Cette séparation est utile car les politiques pour traiter de la réduction globale des disparités de dotations peuvent être différentes selon qu’il s’agit d’allocations différenciées aux provinces ou bien de disparités dans la gestion des moyens et personnels aux écoles individuelles. Une façon complémentaire intéressante de procéder est de considérer chaque province ou région comme une population d’écoles sur laquelle on peut conduire la même analyse que celle de l’équation 1, ci-dessus. On dispose alors d’une équation différente pour chaque province ou région; ceci permet d’une part d’examiner dans quelle mesure les disparités de dotations entre écoles sont plus importantes dans certaines zones que dans d’autres, et d’autre part de simuler le niveau des dotations moyennes pour des écoles de taille identique (on conduit généralement l’estimation pour une école dont les effectifs correspondent à la moyenne nationale. Après avoir identifié l’ampleur des aléas ou du degré d’incohérence dans les allocations de personnels et de moyens aux écoles, un jugement doit sans doute être fait pour déterminer si la situation actuelle est plus ou moins convenable ou si des améliorations sont nécessaires. Si on se trouve dans cette dernière configuration, il devient utile d’examiner de façon plus institutionnelle les raisons qui y ont conduit. Comment se font concrètement les décisions d’allocations de moyens et les décisions d’affectation et de transferts de personnels ? Existe-t- il des critères explicites et comment sont- ils appliqués ou bien contournés ? Quelles sont les incitations des personnels à occuper des postes en des lieux jugés difficiles, et si oui, celles-ci sont-elles suffisantes ? L’idée est évidemment de définir les principes et modalités par lesquels les améliorations nécessaires pourraient être envisagées et dans quel horizon elles pourraient être effectivement réalisées.

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1.2 Les économies d’échelle Dans la discussion précédente, nous avons mentionné l’existence de l’ordonnée à l’origine [coefficient a ou a’ dans les équations 1) et 2)] en indiquant qu’il s’agit d’un coût fixe dans la production scolaire, mais sans en tirer de conséquences particulières. En fait plus la valeur de l’ordonnée à l’origine est importante (elle est en général faible dans le primaire et plus grande dans le secondaire, en particulier dans le second cycle et le technique), plus on doit observer que les coûts unitaires doivent être élevés dans les établissements de petite taille (les coûts fixes sont répartis sur un petit nombre d’élèves). Pour mettre cette structure en évidence, on peut repartir de l’équation 2) et diviser par le nombre des élèves de part et d’autre de l’égalité pour obtenir l’équation 4), qui offre une estimation du coût unitaire (CU) au niveau des établissements qui est hyperbolique par rapport au nombre des élèves : 2) M = a’ + b’.Eel 4) M/Eel = CU = a’/Eel + b’ Le graphique ci-après montre la distribution croisée du coût unitaire et de l’effectif des élèves au niveau des établissements d’un cycle donné d’enseignement (chaque étoile représente un établissement), ainsi que la courbe représentative de la relation moyenne (équation 4). Une appréciation visuelle de la courbe identifie, d’une part une zone dans la partie gauche du graphique dans laquelle les coûts unitaires sont relativement élevés et rapidement décroissants avec l’effectif des élèves, et d’autre part une zone dans la partie droite du graphique dans laquelle les coûts unitaires sont relativement faibles et sans variation significative avec les effectifs scolarisés (relation relativement plate). On définit ainsi un effectif Eel*, qui correspond au niveau «minimum» souhaitable des effectifs d’un établissement sur un plan économique. Bien sur, il faut davantage voir cette valeur Eel* comme une approximation plutôt que comme une valeur précise. Coût unitaire * * * * ** * * * * * * * * ** * * ** * ** * * ** ** * * ** * * * * * * ** ** * * * * ** * * * * * * ** * * * * * * ** * ** * ** ** ** **** *** ** ** ** ** * b’ * * * * * * * ** * * * * ** ** * * ** * * * * * * * * * * ****** **** *** ** * * * *** *** ******** ** * * Effectif des élèves Eel*

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La définition de ce seuil Eel* permet d’identifier quelle proportion des établissements se trouvent avec des effectifs inférieurs au seuil souhaitable. Si cette proportion est faible, on pourra juger que ce n’est pas une priorité de traiter cette question. Si par contre, cette proportion est relativement élevée, il devient important de s’y intéresser. Ceci sera évidemment d’autant plus important que la courbe a une pente forte dans la partie gauche du graphique et que les petits établissements ont des coûts unitaires plus importants par rapport à ceux des établissements dont l’effectif est supérieur à Eel*. Il faut cependant souligner qu’il peut y avoir de bonnes raisons pour l’existence d’établissements de petite taille, notamment éventuellement en relation avec la distribution dispersée des populations sur le territoire et le souci d’offrir des chances de scolarisation aux enfants de milieu rural (considérations en matière d’équité). Cela dit, si ces arguments ont bien sur leur validité, cela n’implique pas que la situation actuelle soit optimale, aussi bien en ce qui concerne i) le nombre des établissements de petite taille que ii) la pente même de la courbe dans la partie gauche du graphique. . sur le premier point, il est possible que certains établissements actuellement de petite taille accueillent un plus grand nombre d’élèves, soit par regroupement d’établissements, soit par regroupement de cycles; . sur le second point, il faut souligner que la pente actuelle de la courbe dans la partie gauche du graphique correspond aux arrangements actuels dans l’utilisation du temps des enseignants et en particulier au degré de leur spécialisation. En effet, plus les enseignants ont une spécialisation étroite, plus grand est le nombre minimum requis pour assurer les programmes. Dans une formule où les enseignants ont une plus grande polyvalence ou dans laquelle les contenus d’enseignements sont définis de façon plus large, la courbe devient alors plus «plate», comme la courbe marquée en traits pointillés dans le graphique, améliorant ainsi l’efficacité dans l’usage des ressources pour le secteur sans compromettre les objectifs d’équité. 2. La gestion pédagogique et la transformation ressources-résultats au niveau des écoles Nous avons examiné dans la seconde section du chapitre 4, sur l’efficacité interne et la qualité de l’éducation, qu’il était intéressant d’identifier les relations moyennes existant entre les conditions d’enseignement et les facteurs caractérisant l’organisation scolaire (moyens mobilisés) d’une part, les résultats obtenus chez les élèves en termes d’apprentissages ou de résultats aux examens nationaux de l’autre. La mesure de l’impact de ces facteurs sur le résultat, contrastée avec les coûts qu’ils impliquent, permet de déterminer les contours d’une politique globale concernant les moyens à mettre en œuvre pour obtenir les meilleurs arbitrages entre la quantité et la qualité de l’éducation offe rte. La première section de ce chapitre a souligné la nécessité de trouver les voies par lesquelles les dispositions décidées au niveau peuvent résulter en une allocation des moyens au niveau local qui soit caractérisée par un bon degré de cohérence. La question abordée maintenant est celle du comment les conditions «logistiques» d’enseignement mises en place au niveau des établissements se transforment en résultats tangibles observables chez les élèves. Cette question est évidemment importante parce qu’elle constitue un point central de la justification de l’existence même de l’organisation du système éducatif.

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On sait que cette transformation n’est pas automatique et que des moyens identiques peuvent porter des fruits différents selon les caractéristiques des élèves ou en raison de phénomènes jugés aléatoires tels que le charisme personnel de l’enseignant. Mais on sait aussi i) qu’il existe un certain nombre de facteurs techniques ou comportementaux dans la quotidienneté de la vie de la classe qui ont une importance cruciale sur ce que les enfants retirent de leur année scolaire, et ii) qu’ils sont susceptibles d’être optimisés, mais qui ne le sont pas, ou pas assez. Parmi ceux-ci, on trouve des aspects tels que le nombre d’heures d’enseignement effectivement faites sur l’année scolaire (combien de jours d’absence, de temps scolaire sur la journée, quelle durée des récréations ? ..), la planification que fait l’enseignant des activités de la classe, l’intensité et la régularité dans la préparation des leçons, les techniques pédagogiques mobilisées, la fréquence de production et de correction des évaluations, la mise en place de techniques d’aide aux élèves n’ayant pas bien acquis tel ou tel contenu du programme, le travail avec les parents, ... Toutes ces choses, si importantes pour la transformation des moyens mis à disposition des enseignants en résultats chez leurs élèves, sont plus ou moins laissées à l’initiative et à la bonne volonté des enseignants. Plus faibles ou implicites sont les dispositions prises pour réguler ces comportements, i) plus on doit craindre une variabilité importante dans les résultats obtenus chez les élèves scolarisés dans des établissements disposant de ressources comparables, et ii) moins on doit anticiper une relation forte entre le volume des moyens mobilisés dans un établissement et le niveau des résultats obtenus chez leurs élèves. Dans cette perspective, il est intéressant de mettre ces deux éléments en relation; ceci peut se faire concrètement de plusieurs façons : * Si on dispose des données d’une enquête d’évaluation des acquis des élèves organisée sur le principe de la valeur ajoutée [elle comporte un test T en début (T0) et en fin (T1) d’année scolaire], il est possible de conduire l’analyse en examinant les progrès des élèves en cours d’année scolaire en fonction de leurs caractéristiques personnelles et sociales, CE, et du contexte scolaire, mais en spécifiant celui-ci soit i) par ses caractéristiques, CS (éducation et formation de l’enseignant, taille de la classe et type de groupement des élèves, disponibilité en matériels pédagogiques, ..), soit ii) par la prise en compte des classes ou des écoles comme des variables muettes (CL) : a) T1 = f (T0, CE) ; R² = R²a b) T1 = f (T0, CE, CL) ; R² = R²b c) T1 = f (T0, CE, CS) ; R² = R²c La comparaison des modèles a) et b) implique que les différenciations totales entre classes, après contrôle des caractéristiques individuelles et sociales des élèves, expliquent à la marge [R²b - R²a], alors que les différenciations entre classes qui sont liées aux caractéristiques logistiques de ces classes ne rendent compte pour leur part que de [R²c - R²a]; dans la mesure où les différenciations totales entre classes tiennent d’une part aux différences d’ordre logistique et d’autre part aux différences dans l’efficacité avec laquelle l’enseignant se sert du contexte pour générer des résultats chez ses élèves, on peut alors identifier facilement la valeur de ces deux composantes. La première correspond à ce qui constitue le budget de l’éducation (ce qu’on paie) et la seconde à la façon dont on l’utilise. Plus la seconde composante est importante, plus on détecte des insuffisances dans la gestion pédagogique du système, et plus, évidemment, on doit cibler des améliorations dans ce doma ine par les actions appropriées.

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Alors que la présentation précédente peut apparaître difficile à comprendre pour qui n’est pas initié à ce genre d’analyse, il est généralement utile de la compléter selon deux axes complémentaires pour la rendre directement intelligible aux acteurs et aux décideurs politiques : en premier lieu, on identifie les résultats des élèves et les modes d’organisation scolaires sous une forme synthétique; on calcule ainsi pour chaque classe i) une moyenne du score final en affectant à chacun des élèves leurs caractéristiques moyennes dans l’échantillon (y compris un même niveau de score initial), et ii) le coût unitaire estimé sur la base des conditions logistiques prévalant dans la classe et du prix des facteurs (salaire de l’enseignant selon sa qualification, taille de la classe, matériels pédagogiques, nature de la construction). En second lieu, on présente dans un graphique ces deux mesures; ceci permet au lecteur de se faire une idée de façon visuelle i) de l’éventuelle faiblesse de la relation entre la moyenne des résultats obtenus par les élèves d’une école et le volume des ressources qui y sont mobilisées par élève, et ii) de l’ampleur de la variabilité des résultats obtenus dans des établissements scolaires dotés d’un volume comparable de ressources par élève; chaque point représente une école. Résultats moyens ajustés * * * *B * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * R1 *C * * * * * * * * * * * * *D * * * ** * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * A * * * * * * * * C1 Coûts unitaires

Un graphique tel que celui-ci manifeste de façon visible l’existence d’un faible niveau de gestion pédagogique du système dans la mesure où il y a peu de relation entre moyens et résultats, une forte variabilité des résultats pour des écoles ayant un niveau de coût unitaire comparable et l’existence d’un nombre appréciable d’écoles («délinquantes») qui ont à la fois des coûts unitaires élevés et un niveau de résultats, médiocre. * Si on dispose soit d’une enquête avec un seul test de fin d’année (type MLA par exemple), soit des seuls résultats aux examens en fin de cycle, une analyse comparable peut être conduite, si ce n’est que le score ne peut pas être ajusté (ou pas totalement). Il conviendra alors de conduire l’analyse en prenant en compte non pas les caractéristiques scolaires spécifiques de l’année d’observation du résultat, mais celles, plus générales, de l’établissement scolaire dans lequel la scolarité a été effectuée.

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Chapitre 8 : Synthèse et estimation d’un modèle de simulation pour la politique éducative A ce stade du travail, l’idée est d’une part de rassembler et de consolider les résultats obtenus dans chacun des chapitres précédents et d’autre part de commencer à préparer l’instruction des politiques qui vont structurer le développement harmonieux du système éducatif dans la moyenne période (souvent dans les dix prochaines années); cette consolidation des résultats et l’identification des politiques sectorielles constitueront bien sur des éléments de référence pour la stratégie de réduction de la pauvreté du pays (cela est en outre de nature à mieux équiper le secteur dans la concurrence intersectorielle pour la mobilisation des crédits PPTE du pays). Pour cela la préparation d’un modèle de simulation qui relie i) les objectifs quantitatifs de scolarisation, ii) les modes d’organisation et de financement des services éducatifs aux différents niveaux d’enseignement et iii) les dépenses publiques, en mettant ces dernières en correspondance avec iv) les ressources budgétaires susceptibles d’être mobilisées, constitue évidemment un instrument d’une pertinence particulière 1. Une synthèse hiérarchisée des résultats obtenus Au niveau de la consolidation et de la synthèse globale des résultats, il peut être utile de suivre une organisation hiérarchisée des questions pertinentes pour la politique éducative. L’expérience suggère qu’il est généralement pertinent de partir des questions les plus macro et les plus structurelles, pour descendre progressivement dans les questions plus spécifiques et les aspects plus secondaires. Parmi les questions structurelles, trois ont une importance tout à fait cruciale :

. i) dans quelle mesure le volume du financement public affecté au secteur est- il adéquat ? dans quelle mesure serait- il pertinent et possible de l’augmenter ? Dans quelle mesure serait- il souhaitable et possible (si oui, à quels niveaux d’éducation et de formation et selon quelles formules) de mobiliser davantage de ressources extrabudgétaires pour le financement du secteur ? . ii) quelles sont les priorités de développement du système entre les différents niveaux et types d’éducation ou de formation, notamment dans la perspective du rôle du secteur au sein de la stratégie de réduction de la pauvreté du pays ? Comment ces priorités se déclinent-elles aux différents niveaux et types d’enseignement entre des objectifs de quantité ou de couverture d’une part, de qualité des processus et des apprentissages de l’autre ? iii) Au-delà des perspectives moyennes, quels ciblages de populations particulières, et à quels niveaux d’enseignement, apparaissent importants à privilégier ? Quels instruments serait- il le plus justifié de mettre en place dans cette perspective ? Après avoir donné des éléments de réponses à ces trois questions, et identifié les grands objectifs des progrès jugés importants à envisager pour le système dans la perspective décenna le, on peut en venir à des aspects concernant de façon plus particulière chacun des différents niveaux d’enseignement. A ce stade encore, on s’attachera en premier lieu aux questions qui ont une portée générale ou budgétaire, laissant pour plus tard les questions de détails, qui peuvent certes être très significatives pour le fonctionnement quotidien du système (par exemple les critères d’allocation des personnels aux écoles ou les dispositions pour la distribution des manuels scolaires), mais qui n’interviennent pas dans les

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grands arbitrages globaux qui définissent les contours de la politique décennale et sa soutenabilité budgétaire à moyen terme. A ce stade, les questions les plus importantes concernent des aspects tels que le niveau cible à l’horizon du programme décennal (et les évolutions entre la période présente et l’horizon du programme) sur des points tels que : i) la part des scolarisations qui seront effectuées dans l’enseignement privé ou communautaire, avec quel niveau de subventionnement ? ii) le rapport élèves-maîtres dans l’enseignement public (la taille moyenne des classes, ainsi que les heures hebdomadaires d’enseignement des élèves et de service des enseignants si on se situe dans l’enseignement secondaire), iii) les caractéristiques et le salaire des maîtres qui seront recrutés sur la période du programme, iv) Le volume financier alloué aux différentes activités nécessaires pour faire fonctionner de manière convenable un niveau d’enseignement, outre la rémunération des «maîtres à la craie» (activités de support administratif et pédagogique au niveau central et décentralisé, formation continue des personnels, manuels scolaires, matériels pédagogiques pour les élèves et les maîtres, ..), v) types et coûts unitaires de la construction des salles de classe. Sur chacun des points structurels concernant l’architecture générale du système, comme sur ceux concernant les éléments structurants aux différents niveaux d’enseignement, la discussion initiale correspond aux directions qu’il apparaîtrait souhaitable de prendre et aux situations cibles auxquelles il serait souhaitable d’aboutir à l’issue du programme. Ces objectifs individuels, pour attractifs qu’ils soient, doivent maintenant être validés et confrontés en particulier à l’épreuve de la soutenabilité budgétaire globale de la politique éducative qu’ensemble ils constituent. De façon générale, la question est maintenant de passer du souhaitable au possible, eu égard notamment à l’existence des contraintes budgétaires. Des arbitrages seront nécessaires, et si c’est du domaine de l’approche technique de les décrire et de les chiffrer, c’est bien du domaine du politique de dire quels compromis sont meilleurs que d’autres et quelles priorités doivent être choisies. Dans cette perspective, l’estimation d’un modèle de simulation se révèle être utile; examinons maintenant la forme que cela peut prendre. 2. L’estimation d’un modèle de simulation pour instruire les arbitrages et la politique du secteur Les modèles de simulation de l’éducation existent depuis le milieu des années 80, notamment en liaison avec le développement de l’informatique individuelle et des tableurs en particulier. Cela dit, nombre de ces modèles (Banque Mondiale, Unesco, ..) et leurs dérivés, sont très détaillés et sont, dans une large mesure, des instruments de planification. On peut bien sur les utiliser dans un but de simulation d’options alternatives de politiques éducatives, mais ils présentent alors l’inconvénient d’une part de ne pas faire apparaître de façon très transparente les leviers effectifs de la politique éducative et d’autre part d’incorporer un nombre important de coefficients techniques qui sont caractérisés à la fois par une incertitude sur leur valeur numérique et une importance significative sur les résultats obtenus. Il apparaît en fait très préférable d’utiliser une spécification réduite, parcimonieuse dans ses besoins en données de base et transparente sur les principaux leviers de la politique éducative. Ce modèle, écrit dans un logiciel tableur (Excel), peut évidemment prendre des formes différentes pour s’adapter aux spécificités nationales. Il est toutefois probable que si la structure globale présentée ci-après correspond à ce qui est généralement utile, des aménagements locaux seront toujours nécessaires pour s’adapter aux particularités des différents pays.

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Pays : XXX

Hypothèses Année de base Années de Projection 2011 1999 2001 2003 2005 2007 2009 2011

Ressources nationales anticipées

PIB (en millions) 1 361 000 1 529 220 1 718 231 1 930 605 2 169 227 2 437 344 2 738 599 Taux de croissance annuel du PIB (%) 6.0% Population totale (en milliers) 5 986 6 326 6 685 7 064 7 465 7 889 8 337 Accroissement annuel de la population globale 2.8% PIB/Tête 227 376 241 752 257 037 273 288 290 567 308 939 328 471 Pression fiscale (%) 16.6% 16.6% 16.6% 16.6% 16.6% 16.6% 16.6% 16.6% Recettes fiscales (en millions) 225 926 253 850 285 226 320 480 360 092 404 599 454 608 % Education courantes par rapport aux recettes 16.5% 16.5% 16.5% 16.5% 16.5% 16.5% 16.5% 16.5% Total Ressources pour le secteur (en millions) 37 276 41 884 47 061 52 878 59 414 66 758 75 010

Besoins de financement public : Dépenses courantes

Préscolaire

Effectif enfants dans le public 20 000 16 647 17 206 17 765 18 324 18 882 19 441 20 000 Coût unitaire (Fcfa) 35 000 32 318 32 765 33 212 33 659 34 106 34 553 35 000 Coût total préscolaire public (en millions) 538 564 590 617 644 672 700 Effectif enfants dans le préscolaire privé 15 000 11 404 12 003 12 603 13 202 13 801 14 401 15 000 Subvention par élève (Fcfa) 0 0 0 0 0 0 0 Coût public du préscolaire privé (en millions) 0 0 0 0 0 0 0 Total dépenses courantes (en millions) 538 564 590 617 644 672 700

Primaire

Population scolarisable 6-11 ans 1 115 320 1 174 071 1 235 916 1 301 019 1 369 552 1 441 694 1 517 637 Accroissement annuel de la population scolarisable 2,6 % Taux d'accès au CI 100 % 87 % 91 % 96 % 100 % 100 % 100 % 100% Année cible 2005 Taux de rétention 80 % 45 % 51 % 57 % 63 % 68 % 74 % 80 % % de redoublants 10 % 27 % 22 % 16 % 10 % 10 % 10 % 10 % Année cible 2005 Taux d'accès en CM2 39% 46 % 54 % 63 % 68 % 74 % 80 % Taux brut de scolarisation 81% 83 % 90 % 97 % 99 % 99 % 99 % Elèves du primaire 907 383 972 103 1 111 737 1 267 138 1 355 856 1 427 277 1 502 460 Nombre d'élèves dans l'enseignement privé 98 324 103 983 117 370 132 010 139 364 144 716 150 246 % d'élèves dans l'enseignement privé 10,0% 10,8% 10,7 % 10,6 % 10,4 % 10,3 % 10,1 % 10,0 % Elèves du primaire public 809 059 868 120 994 367 1 135 128 1 216 492 1 282 561 1 352 214 Nombre d'élèves par enseignant 45,0 54,0 52,5 51,0 49,5 48,0 46,5 45,0 Nombre d'enseignants 14 993 16 545 19 507 22 941 25 350 27 586 30 049 Taux de déperdition annuel 2,.5 % Effectif enseignant permanent 12 867 12 232 11 628 11 054 10 508 9 989 9 496 Effectif enseignant contractuel 2 126 4 314 7 879 11 887 14 842 17 597 20 553 Coût enseignant permanent en unité PIB/Tête 4,5 4,99 4,9 4,8 4,7 4,7 4,6 4,5 Coût enseignant contractuel en unité PIB/Tête 3,5 2,61 2,9 3,2 3,5 3,5 3,5 3,5 Année cible 2005 Coût enseignant en unité PIB/Tête 4,7 4,4 4,2 4,1 4,0 3,9 3,8 Coût annuel moyen enseignant (Fcfa) 1 057 871 1 060 434 1 072 094 1 120 452 1 157 100 1 202 291 1 253 450 Coût enseignants (en millions) 15 861 17 545 20 913 25 704 29 333 33 166 37 665 Autres dépenses courantes/Coût enseignants (%) 40,0 % 37,3 % 37,8 % 38,2 % 38,7 % 39,1 % 39,6 % 40,0 % Autres dépenses courantes (en millions) 5 920 6 627 7 992 9 938 11 472 13 119 15 066 Total dépenses primaire public (en millions) 21 781 24 172 28 906 35 642 40 804 46 285 52 731 Coût unitaire (% du PIB par tête) 11,8 11,5 11,3 11,5 11,5 11,7 11,9 Subvention pour l'enseignement privé (en millions) 0 0 0 0 0 0 0 Subvention par élève du privé (Fcfa) 0 0 0 0 0 0 0 0 Total dépenses courantes (en millions) 21 781 24 172 28 906 35 642 40 804 46 285 52 731

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Secondaire général 1er cycle

Taux de transition effectif (CM2-6ème) 70% 70% 70% 70% 70% 70% 70% 70% Nouveaux entrants en 6ème (Collège) 44 085 55 118 67 837 82 425 94 813 108 268 122 868 Population 12 ans 161 244 169 738 178 679 188 091 197 999 208 429 219 408 Population 12 - 15 ans 606 691 638 649 672 291 707 704 744 983 784 226 825 536 Accroissement annuel de la population scolarisable 2.6% Taux de survie au collège 60% 49% 51% 53% 55% 56% 58% 60% % de redoublant dans le collège 15% 22% 20% 17% 15% 15% 15% 15% Année cible 2005 Taux d'accès en 6ème 27% 32% 38% 44% 48% 52% 56% Taux d'accès en 3ème 13% 17% 20% 24% 27% 30% 34% Taux de brut de scolarisation au collège 26% 29% 34% 40% 44% 48% 52% Effectif total d'élèves au collège 158 944 184 234 229 442 282 050 328 202 374 778 425 316 Nombre d'élèves dans l'enseignement privé 16 642 19 146 23 664 28 868 33 335 37 772 42 532 % d'élèves dans l'enseignement privé 10.0% 10% 10.4% 10.3% 10.2% 10.2% 10.1% 10.0% Nombre d'élèves dans l'enseignement public 142 302 165 089 205 778 253 182 294 867 337 006 382 784 Nombre d'élèves par enseignant 49.4 48.5 47.6 46.7 45.8 44.9 44.0 Nombre de divisions 2 535 2 995 3 804 4 771 5 666 6 605 7 656 Nombre d'élèves par division 50.0 56.1 55.1 54.1 53.1 52.0 51.0 50.0 Nombre d'heures hebdomadaire élève 30.0 Service effectif enseignant 26.4 26.4 26.4 26.4 26.4 26.4 26.4 26.4 Nombre d'enseignants 2 883 3 407 4 327 5 426 6 443 7 512 8 707 Coût enseignant en unité PIB/Tête 7.0 7.6 7.5 7.4 7.3 7.2 7.1 7.0 Coût annuel enseignant (Fcfa) 1 718 963 1 805 082 1 895 219 1 989 539 2 088 210 2 191 404 2 299 300 Coût enseignants (en millions) 4 956 6 149 8 200 10 795 13 455 16 461 20 019 Autres dépenses courantes/Coût enseignant (%) 30.0% 8.0% 11.7% 15.3% 19.0% 22.7% 26.3% 30.0% Autres dépenses courantes (en millions) 396 717 1 257 2 051 3 050 4 335 6 006 Subvention pour le privé (en millions) 0 0 0 0 0 0 0 Subvention par élève du privé (Fcfa) 0 0 0 0 0 0 0 0 Total dépenses courantes (en millions) 5 352 6 867 9 457 12 846 16 505 20 796 26 025

Secondaire général 2ème cycle

Taux de transition effectif 55 % 55 % 55 % 55 % 55 % 55 % 55 % 55 % Nouveaux entrants en 2nde (Lycée) 9 825 12 744 16 251 20 433 24 295 28 646 33 534 Population 16 ans 133 358 140 383 147 778 155 562 163 756 172 382 181 463 Population 16 - 18 ans 380 701 400 755 421 865 444 087 467 480 492 105 518 027 Accroissement annuel de la population scolarisable 2,6 % Taux de survie au lycée 80 % 71 % 73 % 74 % 76 % 77 % 79 % 80 % % de redoublants dans le lycée 10 % 19,7 % 16 % 13 % 10 % 10 % 10 % 10 % Année cible 2005 Taux d'accès en 2nde 7 % 9 % 11 % 13 % 15 % 17 % 18 % Taux d'accès en Terminale 5 % 7 % 8 % 10 % 11 % 13 % 15 % Taux de brut de scolarisation au lycée 8 % 9 % 11 % 13 % 15 % 16 % 18 % Effectif total d'élèves au lycée 29 625 35 479 44 970 57 025 68 376 80 959 94 774 Nombre d'élèves dans l'enseignement privé 4 297 5 175 6 597 8 413 10 143 12 077 14 216 % d'élèves dans l'enseignement privé 15,0 % 14,5 % 14,6 % 14,7 % 14,8 % 14,8 % 14,9 % 15,0 % Nombre d'élèves dans l'enseignement public 25 328 30 304 38 373 48 612 58 232 68 882 80 558 Nombre d'élèves par enseignant 23,0 23,0 23,0 22,9 22,8 22,8 22,7 Nombre de divisions 562 685 885 1 143 1 397 1 686 2 014 Nombre d'élèves par division 40,0 45,1 44,2 43,4 42,5 41,7 40,8 40,0 Nombre d'heures hebdomadaire élève 30.0 Service effectif enseignant 17,0 15,3 15,6 15,9 16,2 16,4 16,7 17,0 Nombre d'enseignants 1 100 1 317 1 671 2 121 2 549 3 026 3 554 Coût enseignant en unité PIB/Tête 7,0 7,6 7,5 7,4 7,3 7,2 7,1 7,0 Coût annuel enseignant (Fcfa) 1 718 963 1 805 082 1 895 219 1 989 539 2 088 210 2 191 404 2 299 300 Coût enseignants (en millions) 1 891 2 378 3 166 4 220 5 322 6 631 8 172 Autres dépenses courantes/Coût enseignants (%) 30,0 % 8 % 11,7 % 15,3 % 19,0 % 22,7 % 26,3 % 30,0 % Autres dépenses courantes (en millions) 151 277 485 802 1 206 1 746 2 452 Subvention pour le privé (en millions) 0 0 0 0 0 0 0 Subvention par élève du privé (Fcfa) 0 0 0 0 0 0 0 0 Total dépenses courantes (en millions) 2 042 2 655 3 652 5 022 6 528 8 377 10 623

Enseignement Technique et professionnel

Effectif d'élèves du privé 14 007 15 443 17 026 18 771 20 695 22 816 25 155 Accroissement annuel de l'effectif du privé 5,0 % Effectif d'élèves du public 20 000 6 737 8 948 11 158 13 369 15 579 17 790 20 000 Coût par élève (Fcfa) 100 000 128 247 123 539 118 831 114 123 109 416 104 708 100 000 Total dépenses courantes (en millions) 864 1 105 1 326 1 526 1 705 1 863 2 000

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Enseignement Supérieur

Etudiants du privé 4 314 4 756 5 244 5 781 6 374 7 027 7 747 Accroissement annuel de l'effectif du privé 5,0 % Etudiants du public 15 000 16 759 16 466 16 173 15 880 15 586 15 293 15 000 Coût / étudiant du public hors aides sociales (Fcfa) 221 135 243 801 268 791 296 342 326 717 360 205 397 127 Accroissement annuel du coût par étudiant 5,0 % Coût hors dépenses sociales (en millions) 3 706 4 014 4 347 4 706 5 092 5 509 5 957 Dépenses sociales moyennes par étudiant (Fcfa) 128 000 141 120 155 585 171 532 189 114 208 499 229 870 Accroissement dépenses sociales par étudiant/an 5,0 % Total dépenses sociales (en millions) 2 145 2 324 2 516 2 724 2 948 3 189 3 448 Total dépenses hors études étranger (millions) 5 851 6 338 6 863 7 430 8 040 8 697 9 405 Coût des études à l'étranger (en millions) 848 935 1 031 1 136 1 253 1 381 1 523 Accroissement/an du coût des études à l'étranger 5,0 % Total dépenses courantes (millions) 6 699 7 273 7 894 8 566 9 293 10 079 10 928

Consolidation des dépenses courantes par niveau (millions Fcfa)

Enseignement préscolaire 538 564 590 617 644 672 700 Enseignement primaire 21 781 24 172 28 906 35 642 40 804 46 285 52 731 Enseignement secondaire général 7 394 9 522 13 109 17 868 23 033 29 173 36 648 Enseignement technique et professionnel 864 1 105 1 326 1 526 1 705 1 863 2 000 Enseignement supérieur 6 699 7 273 7 894 8 566 9 293 10 079 10 928 Dépenses courantes du secteur 37 276 42 637 51 825 64 218 75 479 88 070 103 007

Construction de salles de classe

Besoins pour dépenses en capital dans le primaire

Coût par salle (en milliers Fcfa) 6 500 Nombre de classes / enseignant 1,00 Nombre de salles 14 993 16 545 19 507 22 941 25 350 27 586 30 049 Nouvelles constructions / an 776 1 481 1 717 1 205 1 118 1 232 Besoins en capital /an (en millions) 5 046 9 625 11 159 7 831 7 265 8 007

Besoins pour dépenses en capital dans le secondaire 1er cycle

Coût par salle (en milliers) 10 000 Nombre de divisions / salle 1.00 Nombre de salles 2 535 2 995 3 804 4 771 5 666 6 605 7 656 Nouvelles constructions / an 230 404 483 447 470 525 Besoins en capital /an (en millions) 2 302 4 044 4 833 4 473 4 697 5 253

Besoins pour dépenses en capital dans le secondaire général 2ème cycle Coût par salle (en milliers) 10 000 Nombre de divisions / salle 1.00 Nombre de salles 562 685 885 1 143 1 397 1 686 2 014 Nouvelles constructions / an 62 100 129 127 145 164 Besoins en capital /an (en millions) 616 997 1 291 1 270 1 448 1 638

Récapitulatif

Besoins et ressources totaux pour le secteur (millions de Fcfa)

Dépenses courantes 42 637 51 825 64 218 75 479 88 070 103 007 Dépenses en capital/an (salles de classe) 7 964 14 666 17 284 13 574 13 411 14 897 Dépenses totales 50 601 66 491 81 502 89 053 101 481 117 905 Ressources nationales 41 884 47 061 52 878 59 414 66 758 75 010

Ecart : Ressources – Dépenses (millions Fcfa)

Ecart sur les dépenses courantes 0 - 753 -4 764 -11 340 -16 065 -21 312 -27 997 Ecart sur les dépenses en capital / an - -7 964 -14 666 -17 284 -13 574 -13 411 -14 897 Ecart total - -8 717 -19 430 -28 624 -29 639 -34 722 -42 894

Données de base Hypothèses (fond jaune) Année cible différente de 2011 (fond bleu)

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Le modèle de simulation comprend 3 blocs : i) un bloc de ressources fiscales, ii) un bloc de dépenses courantes et iii) un bloc de dépenses en capital, l’idée étant de confronter les ressources disponibles et les dépenses associées aux politiques éducatives caractérisées au sein des deux blocs de dépenses. Chacun des trois blocs du modèle d’ensemble est organisé de la manière commune suivante : La première colonne (gauche) donne l’intitulé de l’item, la troisième colonne donne la valeur de chaque item pour l’année de base servant de référence à la simulation (les données proviennent des 7 premiers chapitres du RESEN) alors que la seconde colonne indique la valeur cible à l’échéance du programme (ici 2011) ou de l’année, plus rapprochée, au cours de laquelle une valeur cible doit être atteinte (par exemple on envisage que la proportion des redoublants passe de 27 % à 10 % dans le primaire dès 2005). Enfin, la partie droite du tableau donne l’évolution de la valeur de chaque item entre 2001 et 2011 (ici chaque deux années). On pourra noter que certains des chiffres du tableau dérivent directement des hypothèses faites (par exemple, le PIB au cours de l’année 2007 dépend de la valeur du PIB au cours de l’année de base et du taux moyen de croissance du PIB anticipé sur la période), alors que d’autres dérivent de calculs internes (par exemple, la masse salariale des enseignants au cours d’une année n est calculée comme le produit i) du nombre des enseignants au cours de cette année, ii) de leur salaire moyen exprimé en unités de PIB par tête au cours de l’année n, et iii) de la valeur du PIB par tête du pays estimée au cours de cette même année n). Dans la mesure où le modèle est organisé dans un tableur incorporant toutes les liaisons fonctionnelles, la modification d’une hypothèse (une valeur cible) sur un quelconque item conduit à une réestimation instantanée de l’ensemble du modèle. Examinons maintenant les différents blocs du modèle avec un peu plus de détails. 2.1 Bloc des ressources publiques (RES) On part de la valeur du PIB au cours de l’année de base, valeur qui est projetée sur la période de simulation par application de l’hypothèse sur le taux moyen de croissance économique en volume sur la période (un aménagement du modèle peut accepter que cette valeur ne soit pas constante sur la période). On passe ensuite à l’estimation des recettes publiques (fiscales et parafiscales) par application aux chiffres du PIB de la pression fiscale, elle-même susceptible d’évoluer sur la période de simulation; on considère que ces chiffres (fournis par les macro-économistes) sont exogènes du point de vue du secteur. On passe ensuite des recettes fiscales de l’état aux dépenses pour le secteur par application de la proportion des dépenses publiques dans les recettes de l’état, proportion dont la valeur est connue pour l’année de base et dont on peut faire des hypothèses quant à son évolution au cours du programme; cette proportion correspond à la priorité accordée par le pays au secteur, sachant qu’elle peut évoluer, notamment dans le contexte de la stratégie de réduction de la pauvreté du pays. 2.2 Bloc des dépenses courantes (DC) Ce bloc est constitué d’autant de sous-blocs qu’ il y a de niveaux ou types d’éducation au sein du secteur. Dans l’exemple donné dans ce document, on considère le préscolaire, le primaire, le secondaire premier cycle, le secondaire second cycle général, le secondaire technique et l’enseignement supérieur. La structure de ces sous blocs peut être plus ou moins détaillée selon les conditions prévalant dans le pays (par exemple, on peut introduire des lignes pour les écoles communautaires, effectifs et appui financier par élève et global, si cet item est pertinent dans l’organisation du système).

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* Bloc des dépenses courantes pour le préscolaire On a distingué ici le préscolaire public et privé avec l’évolution anticipé de leurs effectifs. Sur la base de la mesure du coût unitaire dans le public constaté au cours de l’année de base et d’hypothèses sur son évolution, on dérive simplement la masse budgétaire correspondante au cours de chacune des années du programme (on a utilisé ici le coût unitaire comme clef de passage entre les effectifs et la masse budgétaire, mais il aurait été possible de passer par les l’intermédiaire des taux d’encadrement, du nombre des maîtres, de leur salaire moyen et d’une estimation des dépenses hors salaires des maîtres, comme dans le primaire). Dans le privé, le coût budgétaire est fondé sur le montant de la subvention par élève et de son évolution anticipée au cours du temps. * Bloc des dépenses courantes pour le primaire Dans le primaire, outre l’indication de la population d’âge «normal» et de son évolution dans le temps, le modèle est fondé sur l’évolution du taux d’accès en première année primaire ainsi que sur la proportion des entrants de première année qui atteignent la dernière année du cycle. Ces deux informations, avec la proportion de redoublants (pour laquelle des politiques appropriées peuvent agir de façon significative), permettent de déterminer le taux brut de scolarisation du primaire (voir le point 5 du chapitre 2 de ce texte), ainsi que le nombre des élèves scolarisés dans le cycle d’enseignement; ces élèves sont ensuite répartis entre ceux scolarisés dans le privé et dans le public. Dans ce dernier ordre d’enseignement, on passe aisément du nombre des élèves à celui des enseignants nécessaires chaque année au cours du programme par l’intermédiaire du rapport élèves-maîtres (et de son évolution souhaitée). Pour passer du nombre des enseignants en postes à la masse salariale qu’ils représentent, on doit introduire deux éléments importants de politique éducative, à savoir d’une part les caractéristiques des enseignants recrutés au cours du programme en termes d’éducation, de formation et de statut et d’autre part la politique salariale mise en place. Dans le cas considéré, il y a un corps d’enseignants fonctionnaires qui va progressivement s’éteindre (taux d’attrition annuel estimé à 2,5 %), alors que tous les recrutements d’enseignants au cours du programme seront faits dans le corps des contractuels, dont le statut est moins avantageux. Ici le salaire est exprimé en unités de PIB par tête, la masse salariale étant, elle, exprimée en Fcfa (nombre d’enseignants x salaire moyen en unités de PIB par tête x valeur du PIB par tête en Fcfa). Connaissant la masse salariale des enseignants, reste à déterminer celle des dépenses autres que celles des «enseignants à la craie». Sur ce plan, la tentation est sans doute forte de définir un nombre relativement important (administration centrale, administrations décentralisées, inspections, personnels d’appui au niveau des écoles, formation continue des enseignants, examens et concours, manuels scolaires, matériels pédagogiques pour les élèves et les enseignants, ..). Ici, le parti a été pris de définir une enveloppe globale suffisante à l’intérieure de laquelle les arbitrages seront faits (ultérieurement) entre les différentes fonctions; on peut certes adopter une certaine décomposition, mais il paraît préférable de rester à un niveau assez élevé d’agrégation pour que le modèle reste simple et transparent; on fixe ainsi comment doit évoluer le volume global de ces dépenses, mesuré en proportion de la masse salariale des enseignants à la craie. On définit ainsi la masse budgétaire globale pour l’enseignement primaire public (et son coût unitaire) et la masse totale en incluant le volume de la subvention éventuelle accordée au fonctionnement des établissements privés.

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* Bloc des dépenses courantes pour le secondaire La structure des deux blocs de l’enseignement secondaire est identique; elle est par ailleurs semblable à celle du primaire à deux exceptions près : i) la première est que l’accès dépend du taux effectif de transition entre la dernière année primaire et la première année secondaire (pour le premier cycle) et entre la dernière année du premier cycle et la première année du second cycle (pour le second cycle secondaire); le taux de transition effectif devient une variable très importante (avec le taux de survie en cours de cycle et la proportion de redoublants) pour identifier les effectifs scolarisés dans chaque cycle. ii) la seconde particularité est que les enseignants sont spécialisés et que le nombre des heures d’enseignement des élèves diffère du nombre d’heures de service (théorique et réel) des enseignants; le rapport moyen élèves-maîtres est alors plus faible que la taille moyenne des classes (si les élèves ont plus d’heures d’enseignement que les enseignants de service). * Bloc des dépenses courantes pour le technique et le supérieur La forme du modèle choisie dans l’exemple emprunte à celle utilisée dans le préscolaire dans la mesure où on se fonde sur l’évolution du coût unitaire de scolarisation; le chiffre anticipé des élèves ou étudiants, comme celui de l’évolution du coût unitaire sont justifiés par les analyses faites dans le corps du rapport; dans le supérieur (mais il peut être pertinent de la faire aussi pour l’enseignement technique), on distingue deux composantes au coût unitaire, à savoir d’une part ce qui correspond à la production des services, et d’autre part ce qui correspond aux aides aux étudiants (en nature et en espèces); on sépare aussi les aides aux étudiants à l’étranger car il peut être pertinent que le pays pense à des évolutions différentes pour le financement des étudiants respectivement dans des institutions de formation nationales et dans des institutions situées dans d’autres pays. 2.3 Bloc des dépenses en capital pour la construction des salles de classe (DCCS) Dans le modèle, on identifie l’évolution du nombre de groupes-classes dans le primaire et dans les deux cycles secondaires. On associe alors nombre de groupes-classes au nombre des salles de classe nécessaires chaque année pour assurer les objectifs de scolarisation simulés. Des données en termes de stocks de salles, on peut en déduire les besoins en termes de flux annuels. L’utilisation d’un coût moyen unitaire de construction d’une salle de classe équipée dans le primaire et le secondaire permet alors d’aboutir à une estimation de la dépenses en capital pour les construction nouvelles de salles de classe dans ces ordres d’enseignement. Ce chiffre sous-estime évidemment les besoins réels globaux en capital car on ne tient pas ainsi compte i) ni des besoins éventuels de construction de services d’appui (inspections, Directions régionales), ni ii) des besoins de réhabilitation du stock existant, ni iii) des besoins en construction (et plus généralement en capital) de l’enseignement préscolaire, technique et supérieur. Cela dit, l’expérience montre que la construction de salles de classes (et de leurs accessoires) du primaire et du secondaire constitue une part substantielle des besoins totaux en capital du secteur. 2.4 La confrontation des dépenses et des ressources (DC) Sur la base des estimations des ressources publiques probables et des dépenses consolidées, courantes d’une part, en capital de l’autre, il est possible de se faire une idée sur la capacité du pays à financer

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telle ou telle des simulations de politique éducative structurelle identifiées. Dans la confrontation des ressources et des dépenses, il est sans doute utile de distinguer les dépenses courantes, qui doivent de façon orthodoxe être couvertes par des ressources nationales propres, et les dépenses en capital qui peuvent être couvertes, même pour une proportion importante (si les conditions sont propices), par l’aide extérieure. Normalement, le pays aura tendance dans un premier temps à envisager des progrès dans tous les domaines à chacun des niveaux d’enseignement. De façon tout aussi normale, cette première simulation conduit à un écart de financement (même limité aux dépenses courantes) qui peut être substantiel. Commence alors la phase dans laquelle des arbitrages doivent être faits. Cela prend en général la forme de réduction des ambitions sur tel ou tel point qui apparaît peut être moins prioritaire. La modification de la valeur cible sur un ou plusieurs points conduit alors à une ré-estimation numérique de l’ensemble du modèle avec une mesure de la sensibilité du résultat obtenu à des modifications sur tel ou tel item de politique éducative. L’idée est évidemment de conduire les itérations jusqu’au point où les dépenses deviennent plus ou moins en lignes avec les recettes prévisibles. Au-delà des aspects financiers, un élément qui peut aussi être pris en considération dans la discussion est la capacité physique ou logistique à mettre concrètement en place le programme. Ainsi, dans le pays considéré comme exemple, la rétention dans le primaire était initialement très faible (45 % des entrants en première année primaire atteignent pour l’année de base la dernière année du cycle). Il est évidemment important de cibler les politiques qui vont permettre une amélioration significative sur ce plan; cela dit, si cette politique réussit, alors que l’accès en première année deviendrait aussi universel, une conséquence est une pression très forte sur l’accès au premier cycle secondaire. Dans le cas analysé, le maintien simple du taux de transition effectif actuel conduirait à une explosion des effectifs de cet ordre d’enseignement; il est ainsi estimé qu’ils passeraient de 159 000 en 1999 à 425 000 à l’échéance du programme en 2011. Il est alors pertinent pour le pays de s’interroger (au-delà des déclarations génériques telles que celle indiquant qu’on vise un enseignement universel de 10 années) dans quelle mesure un tel accroissement est concrètement faisable : il faudrait multiplier le nombre de places offertes par 2,7 en 10 ans; ou bien créer 266 000 nouvelles places en 10 ans, soit 2700 places par an en moyenne. Comment cela se compare-t-il avec le rythme actuel de création de places, de recrutement d’enseignants et de construction d’établissements ? En un mot, est-ce simplement possible ?