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RAPPORT DE STAGE BURUNDI- ÉTÉ 2008 Présenté à L’Agence consultative en éthique de la coopération internationale (ACECI) Par Geneviève Laroche Québec 2 février 2009

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RAPPORT DE STAGE

BURUNDI- ÉTÉ 2008

Présenté à

L’Agence consultative en éthique de la coopération internationale (ACECI)

Par Geneviève Laroche

Québec 2 février 2009

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TABLE DES MATIÈRES

REMERCIEMENTS ..................................................................................................... iii

INTRODUCTION ......................................................................................................... 4

1. Le mandat .................................................................................................................. 5

2. La place de l’agriculture dans la vie sociale et économique du Burundi ................ 6

2.1. Une pratique chargée d’histoire ................................................................................ 7

2.2. Des coutumes bien liées ........................................................................................... 8

2.3. Une activité génératrice de revenus .......................................................................... 9

2.4. Pertinence de l’approche éthique dans le domaine agroalimentaire burundais ........... 10

3. Les acteurs du monde agricole .................................................................................. 10

3.1. Les acteurs gouvernementaux ................................................................................... 11

3.2. Les instituts de recherche et d’enseignement ............................................................ 16

3.3. Les organisations internationales .............................................................................. 20

3.4. Les ONGs et organisations nationales et locales ....................................................... 26

3.5. Les bailleurs de fonds ............................................................................................... 31

4. Nature des interactions ............................................................................................. 34

4.1. Acteurs/population ................................................................................................... 34

4.2. Acteurs/acteurs ......................................................................................................... 37

5. État de la productivité agricole et de la sécurité alimentaire................................... 39

5.1. La production agricole .............................................................................................. 40

5.2. L’accessibilité à la nourriture.................................................................................... 44

5.3. La conservation et la transformation ......................................................................... 46

5.4. Le cadre législatif ..................................................................................................... 47

6. Responsabilité des acteurs envers la population ...................................................... 49

6.1. Responsabilité des bailleurs de fonds ........................................................................ 49

6.2. Responsabilité des acteurs gouvernementaux ............................................................ 51

6.3. Responsabilité des organisations non-gouvernementales........................................... 52

6.4. Responsabilité des instituts de recherche et d’enseignement ..................................... 53

7. Recommandations aux acteurs ................................................................................. 54

CONCLUSION ............................................................................................................. 56

BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................................ 57

ANNEXES ..................................................................................................................... 60

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Remerciements

À l’ACECI, et plus particulièrement

à Ginette et Yvan sans qui ce stage n’aurait pu avoir lieu;

À ATI et à tous ses membres,

sans qui je n’aurais pu me rendre aussi loin

À mes parents et à mon frère,

pour leur soutien et leur amour inconditionnel

À Françoise,

pour la patience et le temps donné

à me faire aimer la langue de chez-vous

À KABURAHE Antoine,

pour l’accueil et la disponibilité

À Machance,

avec qui j’ai parcouru les rues de Bujumbura

À tous les organismes rencontrés;

à tous ces gens qui m’ont donné de leur temps

et m’ont expliqué les rudiments de leur métier

et exprimé leur amour de l’agriculture

et des paysans burundais, et en particulier à SIMBASIZE Léonard;

À Diomède le poète,

qui a gravé son cœur de Burundais dans le mien,

et qui m’a tant fait aimer ce pays.

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INTRODUCTION

Le Burundi est un minuscule pays d’Afrique de l’Est où vivent près de 8 millions de personnes.

Longtemps divisé par la guerre, le pays est en période post-conflit et cherche à retrouver la

prospérité qu’il avait réussit à atteindre au début des années 1980. Parmi les nombreuses actions

posées par le gouvernement et les différentes organisations locales, nationales et internationales

présentes sur le terrain, plusieurs touchent directement ou indirectement au secteur agricole.

Ainsi, entre aide humanitaire d’urgence, projets de développement transitoires et appui aux

associations locales pour renforcer leurs capacités, il n’est pas toujours évident de comprendre

dans quelle mesure toutes ces actions menées répondent vraiment aux besoins réels des

populations rurales du Burundi, et quels sont leurs impacts sur le milieu agricole.

C’est dans le but de clarifier un peu la situation et de prendre le pouls de la réalité vécue sur le

terrain que l’ACECI, en collaboration avec AgroalimenTerre International, a mis sur pied un

stage d’une durée de trois mois au Burundi. Ce stage pavait la voie en étant la toute première

expérience de l’ACECI en matière d’études de terrain portant sur les questions éthiques de la

coopération internationale.

Le présent rapport se veut un retour sur les expériences retenues de l’été et un résumé des acquis

et des observations qui furent effectuées au cours de ces trois mois passés à voyager entre

Bujumbura, Kirundo et Gitega. Il se veut aussi et surtout le fruit d’une réflexion qui s’est

prolongée plusieurs mois après le retour, et qui a permis de remettre bien des pièces de casse-tête

en place. Ainsi, il sera fait mention du mandat qui a été confié à la stagiaire, de l’importance de

l’agriculture au Burundi, des rôles joués par les différents acteurs dans ce domaine et de leurs

relations entre eux, de l’état de la situation agricole et alimentaire actuelle et finalement de la

responsabilité des acteurs envers la population rurale du Burundi. Au final, quelques

recommandations seront faites aux principaux acteurs, et ce dans l’unique but de les aider à

tendre, toujours, vers une plus grande éthique de travail et un plus grand souci des populations.

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1. Le mandat

La stagiaire est partie du Québec avec un mandat clair, qui avait préalablement fait l’objet de

discussions entre les parties concernées (l’ACECI et elle-même) et qui avait été mis par écrit

dans un document qui fut signé par les parties avant le départ. Ainsi, les objectifs du stage

étaient bien connus, et la stagiaire, quoique peu expérimentée dans le domaine de l’éthique et de

la responsabilité sociale des organisations, et ne connaissant ni le contexte agricole ni le contexte

social burundais, se sentait pleinement en mesure de les remplir. Les deux parties étaient

néanmoins conscientes que les contraintes du terrain allaient certainement rendre la tâche ardue,

voire impossible à remplir en entier.

L’ACECI et la stagiaire avaient ainsi fixé cinq objectifs :

1- Effectuer une enquête socio-économique dans un ou des villages pour répertorier les actions

antérieures des organismes nationaux ou internationaux et en faire ressortir les bons coups et

les échecs;

2- Analyser la responsabilité sociale des acteurs impliqués dans le secteur agroalimentaire et

dans la lutte contre la faim et la pauvreté au Burundi;

3- Repérer les mécanismes de coopération entre les services publics et les instances

internationales ainsi que l’implication de la société civile

4- Connaître les forces et les faiblesses de la population burundaise ainsi que son potentiel pour

ensuite faire l’analyse de leur responsabilité avec un regard éthique

5- Développer des aptitudes afin d’accompagner ceux qui feront un stage similaire après elle.

À ces cinq objectifs s’ajoutaient les objectifs définis par la stagiaire et l’organisme partenaire de

l’ACECI pour ce stage, AgroalimenTerre International (ATI), puisque l’ACECI adhérait aussi à

ces objectifs. Par contre, ceux-ci ayant fait l’objet d’un autre rapport1, ils ne seront pas traités ici.

1 Voir le rapport de stage rédigé pour le compte d’AgroalimenTerre International en décembre 2008 par la stagiaire.

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2. La place de l’agriculture dans la vie sociale et économique du Burundi

L’agriculture au Burundi occupe une place plus que prépondérante, et ce tant dans la vie sociale

qu’économique du pays. Outre les cultures vivrières traditionnelles (manioc, patate douce,

pommes de terre, bananes, haricots, légumes divers, céréales) retrouvées sur les parcelles

exploitées selon les régions, on y retrouve également quelques cultures d’exportation, comme le

café, le thé, le palmier à huile et le coton. L’élevage y est aussi répandu, bien qu’on n’y retrouve

surtout que du petit bétail (chèvres) et des vaches laitières dans certaines régions. Les pâturages,

autrefois bien visibles et présents, ne le sont guère plus que dans la plaine de l’Imbo et dans

certaines régions du sud-est (Cochet, 2004).

a. b.

c.

Figure 1. Quelques paysages agricoles du Burundi. a. La plaine de l’Imbo. b. La Crête

Congo-Nil. c. Les marais cultivés sur les plateaux centraux.

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Un bref voyage en autobus suffit pour comprendre que chaque coin du pays, chacun de ses

paysages a été touché et est toujours conditionné et modifié par les paysannes et les paysans qui

le façonnent à leur manière, selon les contraintes du terroir et en réponse à leurs besoins

spécifiques. Influencée par de multiples climats et contraintes de terrain, l’agriculture burundaise

prend plusieurs visages lorsqu’on passe de la plaine (figure 1a) à la montagne (figure 1b) aux

plateaux (figure 1c). Plus que les paysages extérieurs, l’agriculture a façonné les mœurs et la vie

sociale de ces gens, à tel point que les traditions et la culture en général en sont restées

imprégnées. Pas étonnant, alors, que l’agriculture occupe une place prépondérante dans

l’économie du pays. D’une importance historique et culturelle indéniable, l’agriculture est, au

Burundi, plus qu’une manière de gagner sa vie; c’est un mode de vie intimement lié à l’identité.

2.1. Une pratique chargée d’histoire

L’agriculture est, partout où elle est praticable, l’une des plus anciennes forme de subsistance

retrouvées sur les territoires habités par des sociétés organisées (Mazoyer et Roudart, 2002). Le

Burundi ne fait pas exception à cette règle. En effet, malgré l’incohérence des différentes

théories relatives à l’histoire ancienne et au peuplement de ce territoire, une constante se

dégage : l’agriculture y occupe une place centrale, et ce dès le début de son occupation

(Netpress, 2008; Cochet, 2004). Ce lien étroit entre développement du territoire et de la société

au fil des ans s’est perpétué même à travers les cycles de royauté et l’époque coloniale, comme

en font d’ailleurs foi les récits des Allemands et des Belges. L’histoire contemporaine du

Burundi ne serait pas non plus étrangère à la pratique agricole et à la difficile cohabitation entre

villes et milieux ruraux sur ce territoire; c’est d’ailleurs la thèse défendue par Cochet (2004).

Vue sous un autre angle, il serait tout aussi possible de dire que l’histoire de la société

burundaise a contribué de manière significative à modifier les paysages agricoles et les pratiques

qui s’y sont succédé. Que ce soit l’introduction d’espèces d’origine américaines comme les

haricots, le café, la canne à sucre et la tomate, la disparition progressive de l’éleusine des

champs cultivés, l’apparition des arbres fruitiers (manguiers, avocatiers) et des bananeraies près

des habitations ou l’implantation, plus récente, de bandes arbustive le long des courbes de

niveaux, les pratiques sont le reflet d’une société qui fut influencée, au cours de son histoire, par

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de multiples acteurs internationaux. Ces épisodes historiques ont, à leur manière, transformer le

monde agricole et sont autant de signes de son évolution progressive à travers le temps.

2.2. Des coutumes bien liées

Des liens aussi forts entre histoire et agriculture mènent nécessairement à des liens tout aussi

forts entre la culture et les traditions agricoles. En effet, le rythme de vie des Burundais est dicté,

pour une grande majorité d’entre eux, par celui des saisons de culture. Les saisons de travail, de

même que la division du travail, ont été tributaires des pratiques agricoles utilisées et de la

nécessité de retirer assez de biens de la terre pour survivre jusqu’à la prochaine saison.

Inversement, les pratiques sociales ont aussi, tout comme l’histoire, contribué à l’évolution des

systèmes agricoles, ou encore en limitent le développement. Le cas de la tenure des terres et tous

les aspects fonciers fortement liés au genre en sont un exemple frappant. En effet, au Burundi, la

tradition veut que ce soient les hommes qui héritent de leur père la terre dont ils bénéficieront

pour faire vivre leur famille. Les femmes, pour leur part, ont encore énormément de problèmes

lorsque vient le temps de revendiquer une terre qu’elles exploitent pourtant depuis de

nombreuses années. Cette situation est, peut-être aujourd’hui plus que jamais, un problème

décrié par plusieurs organisations comme étant une limite au développement d’une agriculture

viable, en plus de représenter, selon elles, une situation discriminatoire injuste (Ha Niyonzima,

2008).

L’agriculture a aussi fortement teinté la langue. Par exemple, plusieurs noms des mois de l’année

en kirundi font référence aux semis ou à la saison des pluies, si essentielle à la prochaine

récolte, et les jolies femmes sont comparées à des génisses bien portantes. Les fêtes, comme la

fête des semailles, sont encore célébrées, et les danses traditionnelles sont imprégnées de gestes

qui rappellent nécessairement des animaux ou les travaux des champs. L’agriculture a aussi

permis le développement d’un régime alimentaire particulier au Burundi, qui lui aussi est

imprégné de traditions. La fabrication et la consommation de bière de bananes, produit local par

excellence, en témoigne éloquemment.

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2.3. Une activité génératrice de revenus

L’agriculture est aussi une activité économique essentielle dans le pays. Ce secteur offre de 40 à

56% de contribution au PIB, en plus de constituer 95% de l’offre alimentaire (MINAGRIE,

2008). Difficile d’en être autrement, alors qu’elle emploie 92 % de la population, et qu’elle est si

fortement liée à l’histoire et aux rythmes sociaux (MINAGRIE, 2008)! En effet, 86 % des

revenus tirés de l’exportation proviennent de la vente des cultures de rente comme le café, le thé,

le coton, le sucre et l’huile de palme (figure 2).

a. b.

Figure 2. a. Palmeraie dans les environs de Rumonge. b. Étape de l’extraction de l’huile de

palme.

Cette statistique reste vraie, bien que ces secteurs aient été affligés au cours des dernières années

par des crises successives qui ont dramatiquement fait chuter les prix sur les marchés extérieurs,

faisant ainsi fondre les revenus de l’État. Les crises sont donc d’autant plus gravement ressenties

dans ce pays qu’elles touchent la grande majorité de la population, dont les revenus étaient en

grande partie basés sur ces produits agricoles destinés à l’exportation. La vente des produits

agricoles autoconsommés et écoulés sur le marché intérieur, par le biais des marchés locaux ou

plus centraux, des kiosques de lait, des bars ou des restaurants, reste aussi une activité plus ou

moins lucrative, mais aussi de plus en plus souvent la seule source de revenus des paysans. Le

commerce des produits agricoles est à ce point essentiel pour les familles que plusieurs

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personnes n’hésitent pas à dévaler en vélo, à vive allure et au péril de leur vie, les pentes

abruptes séparant leurs terres du marché de Bujumbura pour y vendre leurs bananes.

Évidemment, bien avant l’instauration de l’économie de marché impliquant l’usage de la

monnaie et la production de cultures de rente exportables pour faciliter l’entrée de devises et

enrichir le pays, l’agriculture fut l’objet de commerce informel entre les gens. Encore

aujourd’hui, il est communément admis que ce type d’économie, prépondérante dans le pays, est

toujours tributaire de l’agriculture pour fonctionner. Il est par contre difficile de quantifier ou

même de qualifier correctement ce secteur informel, bien que sa présence se sente un peu

partout. Ainsi, l’agriculture fut toujours l’objet d’échanges et de commerce, qu’il fût formel ou

informel; seules les proportions relatives de ces deux types d’économie se sont modifiées au

cours des années.

2.4. Pertinence de l’approche éthique dans le domaine agroalimentaire burundais

Les brèves explications données montrent à elles seules que l’agriculture est primordiale pour les

Burundais. En tant qu’activité imbriquée tant dans les mœurs, les expressions, les fêtes que

l’économie et la vie sociale en général, il est tout à fait normal, voire même essentiel, d’y porter

une attention particulière. Le regard qui fut porté sur l’agriculture au Burundi en fut un, plus

souvent qu’autrement, se bornant à la description des techniques utilisées et à la faisabilité de

l’introduction de nouvelles innovations. Aujourd’hui, par contre le contexte agricole doit être

revisité, et ce par une multitude d’acteurs provenant de différents domaines. En effet,

l’agriculture n’est-elle pas, en elle-même, une activité hautement multidisciplinaire? Le regard

qui doit maintenant être posé se doit d’être pluridimensionnel, et non pas uniquement technique

ou axé sur l’amélioration des pratiques en place. Ainsi, la perspective éthique trouve toute sa

pertinence et son utilité dans l’objectif d’en arriver à avoir une vision plus large du secteur

agricole et d’en comprendre mieux les fondements.

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3. Les acteurs du monde agricole

L’importance du secteur agricole explique la présence d’une multitude d’organismes et

d’intervenants dans le milieu rural. Ceux-ci, qu’ils soient gouvernementaux ou non, de petite ou

de grande envergure, orientent la plupart de leurs actions dans des créneaux spécifiques à

l’agriculture, mais aussi à la situation post-conflit qui caractérise le pays. Au premier abord, le

secteur semble être organisé à la manière d’une immense toile d’araignée dont le patron de

tissage est difficilement reconnaissable tant les acteurs et niveaux d’intervention sont liés et

dépendants les uns des autres. Ainsi, la compréhension des mécanismes qui dynamisent le

secteur, et la part d’autonomie de chacun des acteurs dans le milieu rural est loin d’être évidente

à saisir pour un étranger, n’ayant de surcroît jamais eu à faire face à une telle organisation

pluridimensionnelle. Néanmoins, la complexité de ce système peut, en elle-même, être

révélatrice. Cette section traitera donc plus en détail des acteurs principaux dans le domaine

agricole, en regard de leurs domaines et méthodes d’intervention.

3.1. Les acteurs gouvernementaux

L’importance capitale du secteur agricole dans la vie sociale, culturelle et économique du

Burundi implique nécessairement que la plupart des ministères et organes gouvernementaux ait

une influence sur l’agriculture et le milieu rural en général, et ce à des degrés divers. Les

problématiques spécifiquement agricoles, elles aussi, relèvent de plusieurs ministères et

commissions. Le Ministère de l’Agriculture et de l’Élevage (MINAGRIE), d’un côté, est chargé

des affaires purement agronomiques touchant tant à l’élevage qu’aux productions végétales et à

la pisciculture. Les questions environnementales reliées à la pratique agricole ou au monde rural,

pour leur part, relèvent du Ministère de l’Environnement. La Commission nationale des Terres et

Autres Biens est, elle, chargée de régler et de trancher les litiges concernant les droits de

propriété sur les terres. La commission nationale de lutte contre la faim est évidemment aussi

directement liée aux questions agricoles, puisque ses recommandations visent principalement la

législation sur les types de cultures autorisées sur le territoire (OGM ou non) et les avenues à

envisager pour augmenter la production agricole au pays (Buzingo, 2008). D’autres ministères et

organes gouvernementaux, comme le Comité National de Coordination des Aides (CNCA), sont

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indirectement impliqués dans le domaine agricole burundais puisqu’ils interagissent avec des

acteurs présents dans ce milieu.

Au-delà de toutes ces implications, il est possible de considérer que le principal acteur

gouvernemental est le Ministère de l’Agriculture et de l’Élevage (MINAGRIE), dont les bureaux

ministériels, contrairement à la majorité de l’appareil étatique situé à Bujumbura, se trouvent à

Gitega (figure 3).

Figure 3. Bureaux du MINAGRIE à Gitega.

Ce ministère relève directement du 2e vice-président de la République du Burundi. La structure

du bureau central du MINAGRIE est présentée à la figure 4.

MINAGRIE- 3 Directions Générales

DG de l’Agriculture DG de l’Élevage DG de la Planification

de l’agriculture et de l’élevage

Production végétale Production animale Statistiques

Promotion des semences Santé animale

et des plants

Fertilisation des sols

Figure 4. Structure administrative du MINAGRIE

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En plus du bureau central, le MINAGRIE compte des équipes d’agronomes et d’autres employés

regroupés au sein des Directions Provinciales de l’Agriculture et de l’Élevage (DPAE) dans

chacune des provinces du Burundi.

Les missions du MINAGRIE, telles que définies par le décret ministériel n° 100/38 du 3 janvier

2006, sont au nombre de 14, et couvrent l’ensemble du monde rural et des activités de

production agricole (Annexe 1) (MINAGRIE, 2008). Ainsi, ce ministère est responsable de la

conception et de la mise en œuvre de la politique nationale en matière d’agriculture et d’élevage,

de l’organisation des filières agricoles, de favoriser l’atteinte d’une sécurité alimentaire durable

notamment par le passage à l’agriculture de marché, de la protection des cultures et des

ressources environnementales du milieu agricole (en particulier l’eau et les sols) et de

l’amélioration de l’état de santé de la population. La vulgarisation et la diffusion de

l’information agricole relèvent également de ce ministère (Ntihabose, 2008). Au niveau législatif

et du commerce extérieur, le MINAGRIE est également responsable du contrôle des échanges

transfrontaliers de matériel agricole vivant, et de la législation en matière d’amélioration des

variétés végétales et animales.

En tant que ministère responsable d’une activité aussi importante au Burundi, il est normal que

son champ d’action soit vaste et qu’il couvre l’ensemble des activités de ce secteur. Les liens

avec d’autres ministères et organismes sont, en ce sens, aussi inévitables que logiques. Il est

entre autres intéressant de souligner qu’un lien existe, du moins sur papier, entre ce ministère et

le ministère de la santé, témoignage de l’attention portée à la production vivrière et à la qualité

des aliments produits. Il faut également noter que le MINAGRIE profite de l’appui d’une

multitude d’acteurs internationaux (FAO, PAM, OCHA, HCR, UNICEF, CRS, Caritas-

Belgique…), et ce tant au niveau institutionnel qu’au niveau des actions sur le terrain pour

remplir ses missions. Toutes les DPAE sont également partenaires d’organismes sur le terrain

(nationaux ou internationaux), avec lesquels elles collaborent pour des projets agricoles qui

correspondent en tout ou en partie à l’une des missions du ministère. Elles sont entre autres

impliquées dans la cueillette de données statistiques sur l’état de la production agricole à chaque

saison de culture, dans les projets de sécurité alimentaire dont la distribution de boutures saines

de manioc résistantes à la mosaïque sévère, dans les programmes de vulgarisation, etc.

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Le financement du ministère ne provient qu’en maigre partie du budget national, qui ne lui

consacre qu’un faible 3 % des dépenses (Ntitangiraneza, 2008), et ne couvre que les salaires des

fonctionnaires. Il semble que la tendance vers la décentralisation de l’État ne peut excuser ce

financement qui n’est certes pas proportionnel à l’importance que revêt l’agriculture pour les

habitants du pays. De plus, il s’avère que depuis quelques années, le Ministère de

l’Environnement ait reçu davantage de fonds que le MINAGRIE, forçant celui-ci à se délester de

certaines de ses responsabilités au profit d’un ministère qui a les fonds nécessaire pour gérer les

projets, ce qui n’est pas sans créer des frictions au sein de l’appareil gouvernemental. Pour

contrer ce sous-financement, le MINAGRIE compte sur des sources de financement extérieures,

qui fonctionnent essentiellement par projets. Par exemple, depuis peu, le programme Initiative

pour les Pays Pauvres Très Endettés (IPPTE) de la Banque Mondiale fournit au MINAGRIE les

fonds principaux nécessaires à la réalisation de ses projets. Les organismes fournissent donc

aussi un support financier non-négligeable au ministère, que ce soit directement via les DPAE ou

les Directions Générales.

Les méthodes d’intervention du MINAGRIE sont multiples. Au niveau des DPAE, il revient aux

agronomes communaux et au personnel responsable de répondre aux besoins des agriculteurs de

leur province, et d’assurer un suivi-évaluation des récoltes et de la production. Par exemple, les

agronomes des DPAE, parfois en collaboration avec ceux de la Direction générale de la

protection des végétaux, sont responsables des alertes phytosanitaires et du dépistage des

maladies affectant les principales productions (figure 5). Or, de l’avis de plusieurs agriculteurs

rencontrés, et même de l’aveu de certains membres du personnel du MINAGRIE qui ont été

interviewés, les agronomes ne sont ni en nombre suffisant, ni suffisamment payés, ni assez

motivés pour répondre aux demandes faites par les agriculteurs en terme d’appui (Kaburahe,

2008; Simbasize, 2008; Nderagakura, 2008). En effet, les salaires suffisent à peine à payer les

frais de transport pour se rendre sur les collines, et souvent les plus difficilement accessibles sont

délibérément évitées. Les tâches des agronomes et du personnel des DPAE se concentrent donc

essentiellement sur l’appui aux projets des bailleurs et non à celui de la population directement.

La population, pour sa part, fait appel aux DPAE essentiellement pour obtenir des produits

phytosanitaires et effectuer le diagnostic des plantes attaquées par des agents pathogènes. Or,

puisque les équipements des laboratoires sont assez sommaires, il est fréquent que cette tâche

revienne à l’ISABU (Institut des Sciences Agronomiques du Burundi), avec qui le MINAGRIE a

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établi un partenariat. Les DPAE offrent certes des appuis techniques, mais non des appuis aux

initiatives locales (Nderagakura, 2008).

a. b.

Figure 5. Dépistage de maladies dans les bananeraies de Nyamurenza (Province de Ngozi).

a. Régime de bananes attaqué par Pseudomonas sp.

b. GIRUKWISHAKA Adelin (Dir. Protection des Végétaux, MINAGRIE), la

stagiaire et Marc (DPAE, Ngozi), les deux agronomes dépisteurs.

Au sein de l’administration du ministère, les principales actions sont relatives à la coordination

des interventions avec les organismes partenaires, et à la mise en place de stratégies et de

systèmes de suivi-évaluation pour, entre autres, remettre sur pied le système d’information

statistique dont les activités sont suspendues depuis 1993. La planification de la stratégie

agricole nationale 2008-2015 a aussi été à l’ordre du jour des activités du MINAGRIE jusqu’à

cet été, toujours en collaboration avec les organismes partenaires. La collaboration avec les

autres ministères, dont celui de l’environnement, est rendue de plus en plus nécessaire

également, et mobilise beaucoup de ressources. Le contrôle du transport transfrontalier des

organismes végétaux est aussi sous le contrôle de ce ministère, mais des sept postes de contrôle

prévus aux frontières, seulement deux sont actuellement en opération, ce qui témoigne une fois

de plus du manque de ressources compétentes au MINAGRIE.

Ainsi, il est clair qu’au Ministère de l’Agriculture et de l’Élevage, les moyens tant techniques

que financiers sont nettement insuffisants pour lui permettre de remplir ses missions. Dans une

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situation financière précaire, ayant souffert de la perte de personnel compétent au cours des

dernières années et faisant maintenant face à des défis sans précédents, le MINAGRIE est dans

l’obligation de trouver des alliés qui pourront lui donner à la fois les moyens techniques et

financiers nécessaires à son maintien et à l’amélioration des services offerts aux agriculteurs

burundais.

3.2. Les instituts de recherche et d’enseignement

Le Burundi compte plusieurs instituts de recherche, dont les plus importants sont l’Institut des

Sciences Agronomiques du Burundi (ISABU) à Bujumbura et l’Institut pour la Recherche

Agronomique et Zootechnique (IRAZ) à Gitega. En ce qui a trait aux établissements

d’enseignement, il en existe plusieurs, mais le présent rapport ne traitera que de la Faculté des

Sciences Agronomiques de l’Université du Burundi (FACAGRO).

3.2.1. L’ISABU

L’ISABU est un centre de recherche national qui couvre quatre grands axes : les productions

végétales, les productions animales, les systèmes de production agricole et la socio-économie

rurale. Plus particulièrement, les projets se concentrent sur la production de semences de qualité,

les essences agroforestières et les arbres fruitiers, la lutte contre l’érosion, l’amélioration des

races bovines, les cultures fourragères, la rentabilité des exploitations agricoles et la

régionalisation de la production. Le centre collabore également avec le MINAGRIE pour réaliser

les analyses de sol et les diagnostics phytosanitaires dans ses laboratoires. Le principal objectif

de ce centre est de produire des recherches dont les résultats pourront contribuer de manière

significative à éclairer les décideurs dans le domaine agricole (Ntihabose, 2008). Malgré une

forte diminution des activités de recherche du centre depuis les années 1990, la demande pour

des avancées technologiques reste importante (Ntihabose, 2008). La provenance de cette

demande, des agriculteurs ou des décideurs reste, cependant, incertaine.

Le financement de l’ISABU provient directement de l’État. Or, les fonds utilisés par l’État pour

financer les recherches proviennent, eux, de l’aide bilatérale de la Belgique. L’ISABU profite

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également d’un programme de transfert technologique de la Banque mondiale pour la

dynamisation de la filière semencière.

a. b.

Figure 6. Quelques recherches en cours à l’ISABU. a. Tests de cultivars de manioc

résistants à la mosaïque sévère. b. Pépinière d’avocatiers sous ombrière.

L’ISABU axe donc ses recherches sur les sujets qui intéressent d’abord les bailleurs de fonds,

mais aussi la population, selon les dires du directeur. Par exemple, les semences performantes

sont demandées autant par l’opinion publique que par les producteurs pionniers et les ONGs

engagées dans la production de semences. Parmi les autres recherches actuellement effectuées à

l’ISABU, une visite des sites d’expérimentations a permis de constater que certains cultivars de

manioc y étaient testés, à l’été 2008, pour la résistance à la mosaïque sévère (figure 6a). Une

grande pépinière d’avocatiers était aussi en production, ce qui confirme l’engagement du centre

de recherche dans la filière de production d’huile d’avocat (figure 6b).

En ce qui concerne les méthodes d’intervention de l’ISABU en recherche, ce domaine reste

encore inconnu. S’il est probable que les recherches fassent intervenir des agriculteurs dans l’une

ou l’autre des phases expérimentales, il est moins évident, avec les informations obtenues, de

savoir si les propositions de recherche ont été élaborées suite à des observations sur le terrain, à

partir des préoccupations des agriculteurs, ou encore à partir des demandes venues de l’extérieur

du milieu rural.

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3.2.2. L’IRAZ

L’IRAZ est un centre de recherche régional partagé par les pays de la région des Grands Lacs, à

savoir le Rwanda, le Burundi et le Congo (figure 7). Sa mission est donc régionale, et en ce sens

l’IRAZ doit effectuer des études et exécuter des projets en commun avec les autres pays.

L’IRAZ dépendait au départ de trois centres nationaux (l’INERA au Congo, l’ISAR au Rwanda

et l’ISABU) pour déterminer les thèmes de recherche à initier, et l’IRAZ avait un mandat, dans

ce cas, de coordonner les recherches et de collaborer avec ces centres de recherche. C’était la

situation jusqu’en 1989. Après les événements de 1993, le financement des États est tombé, et

l’IRAZ a perdu son personnel, ce qui a eu pour conséquence de faire passer le nombre de projets

de recherche de 20 à 4. Aujourd’hui, l’IRAZ est financé par l’Union Européenne (600 000 Euros

par année).

En 1999, une structure provisoire fut mise sur pieds, qui donnait à l’IRAZ un mandat en quatre

points : 1) Unité des Ressources Phytogénétiques, 2) Collection régionale de cultivars de

bananiers, 3) Biotechnologies in-vitro et 4) Documentation et information.

Figure 7. Un des bâtiments de l’IRAZ, à Gitega, où s’effectuent les cultures de vitro-plants.

Aujourd’hui, ces programmes sont toujours en cours, même si certains ont plus de succès que

d’autres. Le projet de conservation et de connaissance des ressources phytogénétiques du

Burundi et de la région des Grands Lacs est limité par le manque d’infrastructures adéquates

pour l’entreposage des semences. Par contre, le programme de mise sur pied de la collection de

référence régionale de cultivars de bananiers fonctionne très bien. En effet, l’IRAZ conserve et

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multiplie in-vitro plus de 265 cultivars de bananiers (dont 136 cultivars régionaux), ce qui en fait

une des plus grandes collections dans le monde. Certains plants de bananiers sont aussi, depuis

la crise, produits pour la FAO (quatre cultivars), ou encore pour des doctorants dans les centres

de recherche des pays membres. Les biotechnologies, pour l’instant, se limitent à la culture in-

vitro et à la constitution d’une banque de ressources génétiques pour les bananiers

(germoplasme). Finalement, l’information et la documentation agricole restent des tâches en

cours, et l’IRAZ compte faire avancer ce projet via des plate-formes électroniques gratuites

(AGORA, BCH, etc.) fournies par l’Université Cornell ou d’autres institutions, et administrées

par la FAO.

En termes de modes d’intervention, l’IRAZ répond davantage à des impératifs provenant des

grands organismes internationaux et des initiatives régionales, bien que celles-ci semblent encore

bien pâles. L’IRAZ entretient des liens avec des instituts de recherche nationaux, l’ISABU et

l’INECN (Institut national de l’environnement et de conservation de la nature), régionaux,

l’ISAR (Rwanda) et l’INERA (Congo RDC) et internationaux, le CGIAR (Consultative Group

on International Agricultural Research) et l’IITA (International Institute for Tropical

Agriculture) (CGIAR, 2008; IITA, 2008). Des recherches s’effectuent également en

collaboration avec le CIALCA (Consortium for Improving Agriculture-based Livelihood in

Central Africa), notamment sur la filière banane et l’innocuité de la production de bière locale au

Burundi (CIALCA, 2008; Ouma, 2008). Dans ces projets, la population rurale est mise à

contribution, puisque les projets fonctionnent essentiellement par études de terrain et

consultations (Ouma, 2008).

3.2.3. La FACAGRO

La Faculté des Sciences Agronomiques de l’Université du Burundi est située à Bujumbura. Les

cours sont dispensés aux quelques 200 étudiants des trois années d’ingéniorat par un corps

professoral composé de 28 personnes (Université du Burundi, 2008). Sa mission est double, soit,

d’abord, d’offrir une formation permettant aux étudiants de devenir des ingénieurs-agronomes

spécialistes des problèmes de l’agriculture en régions tropicales et, ensuite, de répondre aux

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besoins du monde rural par l’encadrement des agriculteurs, par diffusion d’un matériel végétal

adapté aux conditions écologiques (Université du Burundi, 2008).

La FACAGRO ne conduit actuellement que trois projets de recherche, soient sur les

champignons comestibles, l’amélioration variétale du riz d’altitude et l’assainissement

virologique et la micropropagation d’espèces alimentaires et agroforestières. Des professeurs

sont aussi impliqués dans des projets conjoints avec des universités belges, notamment dans le

domaine de la socio-économie rurale (Ndimubandi, 2008).

Les méthodes d’intervention et d’enseignement de l’Université du Burundi reposent sur la

pratique de la théorie. Cependant, aux dires de certains étudiants, les équipements de laboratoire

sont insuffisants et inappropriés, et les visites sur le terrain pas assez fréquentes pour leur

permettre d’acquérir une bonne connaissance du milieu rural dans lequel ils travailleront après

leurs études (Muvunyi, 2008).

Les instituts de recherche et d’enseignement souffrent dons à la fois d’un sous-financement et

d’un manque de personnel qualifié. Les équipements, parfois inadéquats, limitent également

l’avancée des projets. Il semble aussi que ceux-ci ne soient pas nécessairement enclins à se

tourner d’abord vers les besoins de la population, et que les décisions concernant les projets de

recherche ne se prennent qu’entre eux, suivant les demandes des bailleurs de fonds et respectant

ainsi l’allocation des budgets par projets.

3.3. Les organisations internationales

Le Burundi compte plus de 400 organisations non-gouvernementales sur son territoire

(Muderega, 2008). Plusieurs d’entre elles sont des organisations internationales, le plus souvent

gérées dans les pays du Nord. Chacune d’entre elles a un mode de fonctionnement et des

méthodes d’intervention propres, et il serait hasardeux d’émettre des généralités quant à leur

modus operandi. La durée du stage, en effet, n’a pas permis à la stagiaire de les visiter toutes, ni

d’apprécier l’ensemble de leur impact sur le terrain. Il ne sera donc fait, dans la présente section,

mention que de quelques cas.

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3.3.1. La FAO

La FAO est l’organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture. Elle « joue un

rôle de chef de file dans les efforts internationaux de lutte contre la faim. Elle aide les pays en

développement et les pays en transition à moderniser et à améliorer les pratiques agricoles,

forestières et halieutiques, et à garantir une bonne nutrition pour tous » (FAO, 2008). Au

Burundi, es bureaux de la FAO sont situés à Bujumbura, et des antennes sont présentes dans

chacune des provinces du Burundi. Son organisation, autant que les structures de financement

qui lui permettent de survivre et de réaliser des projets, sont aussi diversifiées que complexes. La

FAO au Burundi tire ses fonds de plusieurs bailleurs : le FIDA (Fonds international pour le

développement agricole), la Belgique, la Banque mondiale et l’Union Européenne

(Baranyitondeye, 2008). D’autres projets dont la FAO est partenaire sont financés par la Banque

africaine de développement (BAD) et le Programme des Nations Unies pour le développement

(PNUD).

Les programmes d’activités de la FAO s’articulent autour de deux pôles : Les projets de

développement (3 M $/an), dont la promotion de l’agriculture biologique et l’intégration agro-

sylvo-pastorale (courbes de niveau et implantation d’herbes fixatrices), et les projets d’urgence

réhabilitation (10 M $/an). Ces derniers se déroulent sur une période d’environ 18 mois chacun,

et actuellement 10 sont en cours. Les projets concernent autant la distribution de matériel

agricole (houes, engrais, semences de qualité) que des projets de diversification agricole ou

encore des projets à caractère plus régional (facilitation des échanges commerciaux), que la

gestion de l’eau ou la mise sur pied de chaînes de solidarité communautaires. Tous les projets

comprennent également un volet formation, s’adressant avant tout aux cadres pour favoriser

ensuite la diffusion de l’information vers les agriculteurs.

La FAO est présente dans une quantité incroyable de projets, allant de l’agroforesterie à la

diffusion d’espèces fruitières, en passant par la remise sur pied de la filière semencière (dont la

distribution de plants sains de manioc et de boutures de bananiers) et l’appui institutionnel au

MINAGRIE. Elle collabore, de ce fait, avec une multitude d’acteurs, qu’ils soient centres de

recherche (ISABU, IRAZ), ministères (MINAGRIE, Ministère de l’Environnement) ou

organisations non-gouvernementales (Catholic Relief Services, PAM, UNICEF, Caritas, etc.).

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Un exemple de l’ampleur de la collaboration et du nombre d’intervenants pouvant être amenés à

jouer un rôle dans un seul projet est donné en annexe 2.

Depuis 1996, la FAO est responsable de l’évaluation de la situation alimentaire dans le pays, ce

qui entre dans le volet «urgence-réhabilitation». En collaboration avec le PAM, le MINAGRIE

et des ONGs locales et internationales, l’organisme procède donc, en quelques jours de visites

dans les milieux ruraux et en collectant les données des rapports fournis par ses partenaires sur le

terrain, à l’évaluation de l’inventaire après les trois saisons de culture, évaluation qui conduit à la

création d’une carte du bilan alimentaire du pays, et cible les communes prioritaires pour l’aide

alimentaire. Cette carte est aussi assortie d’un bulletin d’alerte précoce pour les bailleurs de

fonds, qui indique les principales contraintes auxquelles les paysans seront confrontés en regard

de leur situation alimentaire.

La méthode d’intervention de la FAO est semblable à celle d’une courroie de transmission. En

obtenant des fonds de ses pays membres et des autres bailleurs pour des projets, elle mandate

ensuite des ONGs ou organismes privés pour effectuer le travail sur le terrain, tout en assurant la

supervision et la cohérence des actions partout sur le territoire. Les organisations partenaires, en

retour, rédigent des rapports qui sont transmis aux responsables de la FAO, soit au bureau

provincial ou au bureau central, donnant un aperçu de la situation vécue sur le terrain. Ainsi, la

FAO, à part lors de quelques visites en milieu rural, n’a pas beaucoup de lien avec les familles

agricoles. Elle se fie aux rapports émis par ses partenaires, et elle produit des rapports conformes

aux exigences des bailleurs pour l’octroi des fonds nécessaires à la poursuite des activités.

Le volet formation de chaque projet, pour sa part, est également réalisé par l’entremise des

organismes qui sont déjà actifs sur le terrain. Ce volet est assuré entre autres par la distribution

de fiches explicatives en français et en kirundi sur la régie de culture, ou les principaux

ravageurs et maladies de certaines plantes, notamment le manioc et le bananier. Il est intéressant

de noter que certaines fiches recommandent l’application de fertilisants chimiques sur les sols

pour favoriser l’implantation ou la croissance des plants, alors que la très grande majorité des

paysans n’a pas accès à ces intrants.

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Ainsi donc, la FAO assure un relai entre financement et projets de terrain, et n’est présente

auprès des populations que de manière indirecte, si ce n’est qu’elle procède à la distribution de

«semences de qualité» auprès des populations vulnérables qui sont directement touchées par les

programmes d’urgence/réhabilitation, ou qu’elle assure la supervision des agriculteurs impliqués

dans la filière semencière.

3.3.2. Le PAM

Le Programme alimentaire mondial est un organisme relevant à la fois des Nations Unies et de la

FAO. Sa mission est d’envergure : « éliminer la faim et la pauvreté dans le monde » (PAM,

2008). Le PAM entend réaliser cette ambitieuse aventure en répondant aux besoins d’urgence,

d’une part, et en appuyant le développement économique et social d’autre part. Sa mission est

également politique, puisque l’organisme s’efforce, par divers moyens, de mettre la faim à

l’avant-scène dans les stratégies et interventions des États pour faire entendre la voix des pauvres

qui en souffrent (PAM, 2008).

Au Burundi, le PAM articule ses actions autour de deux pôles. Les grands axes sont proposés par

le gouvernement burundais, mais les plans d’action annuels sont arrêtés par le CA du PAM à

Rome. D’abord, pour répondre à la situation d’urgence, le PAM distribue des vivres aux

populations vivant une forte insécurité alimentaire, qu’elles soient déplacées, rapatriées, ou

considérées comme vulnérables (Rufyikiri, 2008). Le but de ces distributions est de faire passer

la consommation minimale des gens de 1400 à 2000 Kcal/jour. Les distributions sont assurées

par des organismes sur le terrain, ou par des agents du PAM directement, dans des endroits

prédéfinis. Les critères de sélection des partenaires, de même que les modalités des envois,

peuvent être consultés à l’annexe 3. Les provinces les plus touchées par l’action du PAM sont

les provinces frontalières, ainsi que celles où les récoltes ont été les moins abondantes au cours

de l’année (Kayanza, Ngozi, Kirundo, Muyinga, Karusi, Cankuzo, Ruyigi, Rutanta et une partie

de Makamba).

La distribution des denrées se fait en accord avec la carte de l’insécurité alimentaire produite

trois fois par année, qui cumule des données sur la vulnérabilité alimentaire et l’évaluation des

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récoltes, en collaboration avec la FAO. Les vivres, aux dires du PAM, sont d’abord achetés dans

la région (en Ouganda ou en Tanzanie), mais les pourcentages exacts d’achats locaux ne sont pas

connus (Rufyikiri, 2008).

Le volet développement, pour sa part, comprend des projets de type « Cash for Work ». Les

partenaires du PAM (les organismes sur le terrain) proposent des projets agricoles où la main-

d’œuvre (les paysans) sera rémunérée selon les modalités fixées par le PAM. Ainsi, des projets

de bassins versants, d’herbes fixatrices, de pépinières agroforestières, de multiplication de

boutures de manioc et de multiplication de semences ont vu le jour dans différents coins du

Burundi. Le PAM finance aussi des projets de type «Food for Formation/Work». Par exemple,

un bénéficiaire qui participe à une formation en menuiserie recevra, en retour, une ration pour

cinq personnes. Tous ces projets ont généralement une durée de vie de deux ans, et mobilisent

environ 10 à 15 % des ressources du PAM au Burundi (Rufyikiri, 2008). D’autres projets

concernent la distribution de rations pour les enfants dans les centres nutritionnels, des cantines

scolaires et des programmes de santé maternelle et infantile. Ces projets ont entre autres pour but

de faire disparaître, petit à petit, la mentalité d’«assistanat» encore bien présente au sein de la

population burundaise (Rufyikiri, 2008).

Les projets développés par le PAM sont parfois issus des plans communaux de développement,

mais parfois ils émergent directement du plan d’action du PAM. Le PAM n’a pas de lien direct

avec les associations locales, mais seulement avec les organismes partenaires de ces

associations. Le PAM collabore donc lui aussi avec les ONGs locales, particulièrement celles

qui sont actives dans le milieu de la santé, de même que certaines autres dont Caritas et World

Vision (Rufyikiri, 2008). Le PAM travaille également en collaboration avec les DPAE (pour les

boutures de manioc) et les administrations communales pour effectuer ses opérations.

3.3.3. Intermon-Oxfam

Intermon-Oxfam est la branche catalane de l’organisme OXFAM International. Ses principales

missions correspondent aux grands axes de cet organisme international, et s’articulent autour de

la justice écologique, des moyens d’existence, des droits des femmes, de l’action humanitaire, de

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la bonne gouvernance et des services sociaux. Son plan d’action quinquennal est déterminé pour

la période 2007-2012. Les fonds de l’organisme proviennent à 70 % de bailleurs de fonds privés

(individuels), le reste étant financé par le gouvernement basque.

Au Burundi, Intermon-Oxfam remplit essentiellement une mission d’action humanitaire, et plus

spécifiquement dans le développement post-urgence et le développement à proprement ditLes

actions de l’organisme sont aussi en cohérence avec le Cadre Stratégique de Lutte contre la

Pauvreté (CSLP) du Burundi. Pour l’instant, Intermon-Oxfam n’a que très peu de projets actifs,

puisque sa présence au Burundi est récente (2006). Les projets sont d’abord proposés au

gouvernement, puis les DPAE partenaires sont impliquées si le projet obtient l’aval ministériel.

Un rapport annuel des activités est remis aux autorités burundaises

Les projets touchent à l’élevage, à l’agriculture et à la protection de l’environnement (arbres

agroforestiers, herbes fixatrices sur les courbes de niveau, multiplication de boutures de manioc,

chaînes de solidarité communautaires, etc.). Les bénéficiaires se trouvent dans la population

rapatriée (60 %) et vulnérable (40 %) comme les femmes chefs de ménage. Les femmes

constituent d’ailleurs 60 % des bénéficiaires des projets d’Intermon-Oxfam. Dans chaque projet,

des volets de formation concernant le VIH/SIDA, les questions de genre et la résolution

pacifique des conflits sont aussi présents.

Intermon-Oxfam entretient des liens avec la population locale des collines ciblées pour les

projets, en collaboration avec les DPAE et les administrateurs communaux. Bien que

l’organisme soit surtout impliqué au niveau de la gestion financière et de la logistique des

projets, il est en contact étroit avec les représentants des bénéficiaires lors des étapes

d’identification des besoins, d’élaboration du projet et de suivi sur le terrain. Des liens lient

également l’organisme à la FAO, par l’entremise du projet de multiplication de semences et de la

chaîne de solidarité communautaire. L’organisme se rapporte également au gouvernement via

ses rapports annuels, sans pourtant avoir de commentaires en retour de ces rapports

(Mugiraneza, 2008).

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3.4. Les ONGs et organisations nationales et locales

3.4.1. CED-Caritas Burundi

CED-Caritas Burundi est un organisme confessionnel qui se sert des paroisses catholiques

comme points de service pour offrir son expertise et ses projets à la population burundaise.

L’organisme est donc présent sur tout le territoire burundais. Ses actions sont séparées en cinq

services : promotion-santé, réhabilitation et développement, accompagnement social, logistique

et administration. Les projets agricoles sont concentrés dans le service réhabilitation et

développement, et certaines campagnes de distribution alimentaire s’effectuent également via le

service promotion-santé (dans les centres nutritionnels). Cependant, les principales actions de

l’organisme ont trait à la promotion de la santé.

Les projets de CED-Caritas Burundi se font généralement en partenariat avec d’autres

organismes collaborateurs. Par exemple, le PAM fournit les aliments qui sont distribués dans les

centres gérés par CED-Caritas Burundi, l’UNIFEM est partenaire d’un projet à Cibitoke en

microcrédit pour les femmes, Caritas-Belgique collabore également à trois projets de

développement (dont un pour la production d’arbres fruitiers), etc. CED-Caritas est aussi

impliqué dans des projets financés directement par la Banque mondiale, comme le PRASAB.

L’organisme vient également en aide à des associations en étoffant leurs demandes de sous-

projets. CED-Caritas remet aussi un rapport annuel de ses activités à l’État burundais ainsi qu’au

PAM, l’un de ses bailleurs de fonds.

Les employés de CED-Caritas Burundi qui travaillent dans les paroisses sont en lien direct avec

la population, mais celle-ci n’a pas toujours son mot à dire dans l’exécution ou la réalisation de

projets. Par exemple, alors que dans des projets d’agroforesterie, la population est directement

impliquée dans le processus de mise en place et de gestion des activités sur le terrain, dans

d’autres, comme celles visant la distribution de nourriture ou la mise en place de cantines

scolaires, elle n’intervient qu’en tant que bénéficiaire (Ntitangiraneza, 2008). L’organisme

maintient aussi des relations étroites avec les autres associations et organisations présentes sur le

territoire, ce qui crée aussi indirectement un lien avec les populations locales. Les employés du

Bureau central à Bujumbura effectuent des descentes sur le terrain périodiquement, ce qui

renforce les liens entre les employés des paroisses et l’administration centrale de l’organisme.

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CED-Caritas Burundi est un organisme extrêmement bien implanté dans toutes les provinces

burundaises, ce qui lui donne certains avantages en termes de logistique et de capacités à mener

des actions de grande envergure. L’organisme peut donc plus facilement que d’autres répondre à

des demandes sur un grand territoire, et agir sur plusieurs fronts. En ce sens, il apparaît qu’il soit

un partenaire de choix dans des opérations qui nécessitent à la fois une grande mobilisation

d’effectifs humains et techniques. Supporté par et relevant de l’Église catholique, il n’est pas

étonnant qu’il soit aussi bien perçu dans un contexte où plus de 70 % de la population se réclame

de cette confession religieuse.

3.4.2. Help Channel Burundi

Help Channel Burundi (HCB) est un petit organisme œuvrant aussi essentiellement dans le

secteur agricole. Fondé en 2000 dans l’esprit de venir en aide aux veuves et orphelins en

détresse, et animé par un esprit chrétien, cet organisme se dévoue toujours à l’accomplissement

de sa mission première, soit d’être un canal pour redonner la dignité aux Burundais en détresse.

Cette mission tend aussi bien à renforcer les capacités des communautés rurales que la protection

des terres cultivables. Pour mener à bien ses activités, HCB compte sur une équipe composée

exclusivement de personnel burundais, en plus d’un collaborateur étranger du Mennonite Central

Committee. Le financement provient de plusieurs organismes (Projet Aménagement des Bassins

Versants du Ministère de l’Aménagement du Territoire, du Tourisme et de l’Environnement

(PABV), Opération des Nations Unies au Burundi (ONUB), Projet de Réhabilitation Agricole et de

Gestion Durable des Terres au Burundi (PRASAB), American Friends Service Committee (AFSC),

Food and Agriculture Organization of the United Nations (FAO), et Geneva Global Inc. (GGI), mais

en grande partie (71 %) du Mennonite Central Committee (HCB, 2006). Le financement est fixé

sur une base annuelle, mais renouvelable.

Les projets de Help Channel Burundi se déroulent dans quelques provinces seulement, et

comptent des activités «Food For Work» (distribution de viande de dinde aux personnes

travaillant dans les pépinières agroforestières ou autres), de production de plants agroforestiers et

forestiers pour le gouvernement du Burundi, des activités d’éducation et de sensibilisation sur les

feux de brousse, de distribution de semences ou de vivres dans les ménages vulnérables, de

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construction d’infrastructures (écoles, source), d’activités génératrices de revenus (dons

d’animaux), d’aide directe aux enfants atteints du VIH/SIDA (dons de matériel scolaire et de

vêtements) et de participation au système d’alerte précoce et de surveillance de la sécurité

alimentaire (SAP/SSA) de la FAO (HCB, 2006; Ndikuriyo, 2008). Les activités se font souvent

en partenariat avec des organismes aussi présents sur le terrain, avec les DPAE ou encore avec

des départements ministériels (Département national des Forêts est un partenaire depuis 2005).

Dans ses projets de pépinières agroforestières et forestières, HCB donne une grande place aux

populations en leur confiant la gestion des plants et les travaux manuels. Les administrations

locales sont consultées pour identifier les communautés où les projets pourraient être implantés,

selon certains critères (présence d’insécurité alimentaire et/ou de problèmes environnementaux

et bon accès à l’eau) (Brandon, 2008). Les bénéficiaires sont donc directement impliqués dans

les projets, et ce tout au cours de leur réalisation, bien qu’ils ne puissent se prononcer sur les

essences cultivées, puisque les plants sont fournis par le Ministère de l’Environnement ou la

FAO. HCB est aussi sensible au fait que les agronomes des DPAE délaissent leur travail de suivi

auprès des agriculteurs, et se substitue parfois à ces employés pour effectuer un suivi convenable

des projets et des problèmes vécus par les agriculteurs.

3.4.3. L’ADDF

L’Association pour la Défense des Droits des Femmes est basée à Bujumbura. Ses actions pour

la justice et l’équité entre les genres trouvent écho autant dans la capitale que dans les régions

rurales. Son financement provient de diverses sources, et notamment de la Norvège. Le

personnel de l’ADDF est aussi entièrement burundais, et composé d’hommes et de femmes.

Dans les communautés rurales, l’ADDF est impliquée dans la mise sur pied de chaînes de

solidarité communautaire par le prêt de chèvres aux femmes, et dans la construction et la gestion

par des femmes d’infrastructures comme des moulins à farine (Niyonzima, 2008).

L’ADDF se démarque des autres organismes qui interviennent en milieu rural, d’une part, par

ses zones d’intervention. En effet, l’association est surtout présente dans la région de Bujumbura

rural, une région délaissée par la plupart des organismes à cause de sa forte dangerosité. D’autre

part, l’ADDF est l’un des seuls organismes rencontrés qui dispense de la formation pratique et

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théorique aux femmes (donc aux bénéficiaires), donc qui outille intellectuellement et non

seulement matériellement la population concernée par ses actions préalablement au don

d’animaux.

3.4.4. La CECM

Le Burundi compte aussi une quantité impressionnante de compagnies ou d’organismes offrant

des services de microcrédit aux paysans et agriculteurs, et ce dans toutes les provinces. Pour sa

part, la Coopérative d’Épargne et de Crédit Mutuelle est née en 2000 sous sa forme actuelle et a

comme mandat de favoriser l’accès au crédit pour les femmes et d’encourager les initiatives

entrepreneuriales des communautés rurales. Avant sa fondation, la coopérative a profité d’un

support de Développement International Desjardins pour la formation de ses gestionnaires. La

formule coopérative mutuelle permet à la CECM de collecter aussi des dépôts, et ainsi de

favoriser l’épargne chez les gens, mais aussi de pouvoir rouler avec ses propres fonds sans

toujours attendre l’argent des bailleurs externes en cas de non-remboursement par ses membres.

La coopérative compte aujourd’hui 28 500 membres, dont 72 % sont des femmes (l’objectif

étant de 75 %). Les projets financés vont de l’ouverture de petits commerces aux prêts agricoles,

en passant par l’achat de petits équipements, d’animaux d’élevage ou d’articles scolaires. Les

prêts agricoles sont généralement d’une durée de 9 mois (octobre à juin), et sont généralement

octroyés à des groupements, ce qui permet une gestion plus serrée de l’argent, puisque els

membres des associations se surveillent davantage et se cautionnent (Nsabiyumva, 2008). Les

taux d’intérêts des prêts varient de 13,5 à 15 % par année. Le personnel de la coopérative se

rend sur le terrain avant la saison de culture, après le déblocage des fonds et lors des séances

prévues pour discuter des modalités de recouvrement. Ce dernier demande effectivement

beaucoup de ressources, puisqu’« il faut toujours être derrière les gens pour se faire

rembourser » (Nsabiyumva, 2008). Si une même organisation veut obtenir un deuxième prêt, elle

doit satisfaire à trois conditions : avoir respecté les modalités de remboursement, avoir épargné à

la CECM pendant la période et avoir entretenu de bonnes relations avec le personnel de la

CECM.

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30

La CECM est membre d’organisations internationales telles que World Women Banking et le

Réseau Panafricain des Institutions de Crédit (INAFI). Au niveau national, la coopérative est

enregistrée auprès de la Banque centrale comme institution de crédit, et est aussi associée au

PNUD et à l’UNIFEM. Avec les excédents annuels de ses propres fonds ou avec l’argent de

certains bailleurs de fonds, la coopérative procède à des campagnes de formation auprès de ses

membres sur le VIH-SIDA, la comptabilité et la gestion de projets.

En tant que coopérative, la CECM donne une très grande place à ses membres et aux

bénéficiaires de ses services, puisque ce sont eux, les membres, qui ont le pouvoir d’orienter les

actions et activités de la coopérative lors de l’assemblée générale annuelle. Ce modèle de gestion

participative garantit aux membres une voix et un pouvoir de décision intéressants. Par contre, il

est difficile de savoir si les membres des communautés rurales peuvent se rendre à l’assemblée

générale et y voter, et la question de leur implication dans la structure décisionnelle peut dès lors

être soulevée.

3.4.5. INADES-Formation Burundi

L’institut Africain pour le Développement Économique et Social (INADES-Formation) Burundi

est l’une des rares organisations à ne pas cibler les populations vulnérables pour ses projets

(Baridomo, 2008; Dossche, 2008). En effet, son public cible est avant tout composé

d’organisations paysannes structurées à différents niveaux et par domaines d’activités en

associations de base, unions et fédérations, confédérations nationales, etc. Par exemple, les

producteurs de café, de thé, de coton, de champignons ou les apiculteurs sont ciblés par ses

projets. INADES-Formation est donc engagé à accompagner les populations rurales dans leur

propre développement, en appuyant leurs dynamiques organisationnelles et entrepreneuriales. En

travaillant à la promotion sociale et économique des populations, cet organisme accorde une

importance particulière à leur participation libre et responsable à la transformation de leur

société.

Par le biais, entre autres, d’émissions de radio, de visites de suivi, d’ateliers/sessions de

formation, de voyages d’études et d’échanges, d’appui-conseils et de

participation/plaidoyer/lobbying, INADES-Formation offre un appui dans divers domaines,

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allant du financement à la communication, en passant par la décentralisation, l’entrepreneuriat,

le développement local et la gestion des ressources naturelles, entre autres. En plus de l’appui

direct, INADES-Formation offre un appui à distance sous forme de cours par correspondance,

partage des apprentissages à travers les livrets, revues, bulletins d’échanges et d’informations et

émissions de radio.

3.5. Les bailleurs de fonds

Au cours de son séjour au Burundi, la stagiaire n’a pas rencontré d’organismes bailleurs de fonds

en tant que tels. Ses observations ne sont donc basées que sur les informations recueillies auprès

des organisations bénéficiant de ces fonds, ou encore de personnes-ressources rencontrées lors

d’entrevues. L’information ne peut donc ni être complète, ni être totalement fiable. Cependant,

la stagiaire juge important de mentionner les types de modes de fonctionnement qu’il lui fut

possible d’observer sur le terrain, puisque ce sont de ces sources et de ces types de financement

dont dépendent tous les organismes, instituts de recherche et même ministères pour fonctionner

et mener à bien leurs activités en milieu rural. Bien qu’une multitude de bailleurs de fonds soient

présents dans le monde agricole et rural au Burundi, certains d’entre eux sont si importants qu’ils

ne pourraient être passés sous silence.

3.5.1. Le FIDA

En tout premier lieu, c’est le Fonds International pour le Développement en Agriculture (FIDA)

qui consent le plus d’argent au secteur agricole burundais depuis une dizaine d’années. En effet,

le FIDA a consenti 88 M $ dans ses projets au Burundi, dont 14 M $ en dons. Aujourd’hui, le

FIDA concentre son financement au sein de trois projets : 1) Projet de relance et de

développement du monde rural (34,2 M $, dont 20 M $ du FIDA), 2) Programme transitoire de

reconstruction en situation post-conflit (38,9 M $, dont 16,4 M $ du FIDA) et 3) Projet de

support à la réhabilitation du secteur de l’élevage (17,8 M $). Si une seule partie des coûts des

projets est consentie par le FIDA, la balance revient aux partenaires (OPEP, PAM, etc.) et

quelquefois au gouvernement burundais (FIDA, 2009). Il est intéressant aussi de noter que le

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FIDA n’accorde des subventions qu’à des organisations (et non à des États), et que les

gouvernements eux reçoivent de l’argent via les ententes de prêts entre eux et le FIDA (FIDA,

2008).

Le mandat de rédiger les projets pour les présenter au conseil d’administration du FIDA pour

approbation est confié à des sous-contractant. Une fois approuvés, ces projets reviennent entre

les mains du gouvernement burundais et des partenaires sur le terrain (PAM, FAO, PNUD, etc.).

Les projets du FIDA fonctionnent directement avec les populations locales, et suggèrent qu’une

grande place leur est réservée pour la mise en place et l’exécution des projets. En effet, les fonds

ne sont pas directement versés au gouvernement, mais plutôt alloués à des sous-projets qui

doivent être proposés par les communautés (avec l’aide d’ONGs ou d’autres partenaires locaux)

et acceptés par des comités régionaux et provinciaux composés, entre autres, du personnel du

MINAGRIE (FIDA, 2009). L’implication du gouvernement burundais dans la gestion des

projets semble donc secondaire. Le FIDA mise aussi sur les ONGS et l’administration locale

(chefs communaux et DPAE) pour la réussite de ses entreprises (FIDA, 2009). Par exemple,

c’est du FIDA qu’émerge la notion de chaîne de solidarité communautaire et de dons de

semences aux plus démunis pour améliorer la production agricole, projets maintes fois repris par

des ONGs et autres organisations visitées sur le terrain (FIDA, 2009).

Le FIDA ne participe pas uniquement au financement de projets sur le terrain. Il exécute aussi

nombre de travaux relatifs à l’étude de la situation au Burundi, et collabore à l’élaboration de

multiples documents concernant la lutte contre la pauvreté ou les plans de relance agricole et

économique (FIDA, 2009). Le FIDA collabore également avec une foule de partenaires

internationaux aussi impliqués dans l’aide internationale accordée au Burundi, ainsi que des

partenaires provenant du secteur privé (Banque Mondiale, Banque Africaine de Développement,

Coopération Allemande, USAID, etc.). La liste (non-exhaustive) des principaux bailleurs de

fonds impliqués avec le FIDA peut être consultée sur leur site internet

(http://operations.ifad.org/web/guest/country/projects/tags/burundi).

Ainsi, le FIDA est, semble-t-il, la pierre angulaire de l’aide accordée dans le secteur agricole au

Burundi. Si les projets ne se font pas en sa collaboration, ses partenaires ou autres bailleurs de

fonds s’inspirent fortement de ses réalisations pour bâtir leurs propres projets et, au final,

financer des activités similaires ou complémentaires.

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33

3.5.2. La Banque mondiale

Ensuite, il faut citer la Banque mondiale, via le projet de réhabilitation et d’appui au secteur

agricole du Burundi (PRASAB). Le but de ce projet est

d’appuyer les organisations des producteurs en vue de l’augmentation de la production agricole

et de lutter contre la pauvreté à travers l’augmentation des revenus tout en préservant les

ressources naturelles. Ceci se fera par le financement des activités destinées à augmenter la

production et renforcer les capacités institutionnelles et techniques des organisations des

producteurs, des services gouvernementaux, des opérateurs du secteur privé et des groupes

impliqués dans le développement rural (Banque mondiale, 2009).

Le financement du projet est de 35 millions de dollars américains, et se concentre dans les

provinces qui ne sont pas touchées par le projet de relance et de développement du monde rural

du FIDA. Le projet de la Banque mondiale prévoit que l’intervention des ONGs et autres

organisations sur le terrain sera surtout d’appuyer les collectivités dans leurs demandes de sous-

projets, et de s’assurer de leur participation dans la plupart des étapes de conception et de

réalisation (Banque mondiale, 2009).

Au-delà du financement de projets agricoles et de partenariats avec d’autres organisations

agissant directement ou indirectement dans ce secteur au Burundi, la Banque mondiale a une

influence non-négligeable sur les grandes stratégies de réduction de la pauvreté, et donc sur les

grands axes du développement agricole au Burundi. En effet, l’élaboration du cadre stratégique

de lutte contre la pauvreté (CSLP) est nécessaire pour rendre le pays éligible au remboursement

d’une partie de sa dette extérieure (Banque mondiale, 2009). Ce programme de remboursement

étant géré par la Banque mondiale, on peut supposer que la pression exercée par cet organisme

sur le pays ne fut pas sans se répercuter dans le CSLP.

3.5.3. Les agences de développement

Plusieurs pays, en plus d’offrir des fonds pour soutenir des projets via l’aide multilatérale

consentie au Burundi par des agences internationales, ont des représentants de leurs agences de

développement respectives sur le terrain. Il en est ainsi, entre autres, des États-Unis (USAID), de

l’Allemagne (GTZ), de la Belgique (CTB), de la France (AFD), de la Suède, etc. USAID est

l’un des grands bailleurs de fonds de plusieurs organismes au Burundi. Ses fonds servent entre

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autres aux projets gérés par Catholic Relief Services, CARE Burundi, World Vision et Africare

(Ntitangiraneza, 2008). L’Union européenne est aussi bien représentée en termes d’agences sur

le terrain, soit pour exécuter ou encore pour financer ou gérer d’autres organisations qui elles ont

des projets plus concerts dans le domaine agricole.

4. Nature des interactions

Les interactions entre les acteurs et la population, d’une part, et entre les acteurs eux-mêmes,

d’autre part, sont de natures très diverses selon les contextes. Cependant, il ressort des

dynamiques entrevues lors des entretiens avec différents responsables d’organismes et des

agriculteurs que ces relations sont, la plupart du temps, très inégales.

4.1. Acteurs/population

Les relations entre les acteurs et la population ne sont pas toutes de la même force. Si certains

organismes réussissent fort bien à entretenir des relations étroites avec une partie de la

population vivant en milieu rural, d’autres restent plutôt à l’écart de ceux vers qui, pourtant,

leurs missions les mène.

4.1.1. Les relations étroites

Des relations étroites existent entre les organismes et la population lorsque celle-ci est

directement touchée par les actions de l’organisme, mais aussi et surtout lorsqu’elle peut prendre

part au processus de décisions qui mène au projet, qu’elle peut en modifier le cours selon la

situation réellement vécue sur le terrain et qu’elle bénéficie d’un soutien post-projet pour

l’appuyer dans la gestion et la poursuite de l’initiative au niveau local. Ces relations naissent

nécessairement entre partenaires présents du début à la fin, et non par de simples visites

périodiques sur les lieux. Il est donc beaucoup plus probable qu’une organisation favorisant

d’abord les échanges avec la population, bien intégrée au milieu et qui y est active depuis un

certain temps soit plus apte à nouer des liens étroits avec la population qu’une organisation

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nouvelle, peu connaissante de son milieu et qui mise d’abord sur de bonnes relations avec les

bailleurs de fonds. Les consultations préparatoires au projet à effectuer, par exemple, sont

d’excellentes manières de prendre le pouls de la communauté locale et d’y installer un climat de

confiance. C’est véritablement sur cette valeur que reposent toutes les relations de collaboration

franches et fécondes. Autrement, les relations ne peuvent qu’être empreintes d’une certaine

hypocrisie qui nuira inévitablement si ce n’est au bon déroulement du projet, au moins à des

difficultés quant à sa pérennisation.

Les relations étroites vécues, par exemple, dans un cadre d’appui à des associations locales qui

ont déjà certaines compétences et aptitudes peut mener à d’excellents résultats et faire

véritablement progresser à la fois la population locale et l’organisation. La relation ne devient

alors pas seulement une relation donneur-receveur, mais une relation à la fois donneur-donneur

et receveur-receveur, beaucoup plus édifiante pour les bénéficiaires. C’est ce qui fut constaté

avec les projets d’INADES-Formation Burundi, par exemple, avec la lecture des récits faits par

les producteurs et l’association de certaines actions posées avec les caféiculteurs. Ces projets, en

plus de considérer et de reconnaître une expertise déjà présente au sein d’une communauté,

favorisent l’épanouissement des personnes à travers des associations déjà formées, et

incidemment des communautés entières.

Par contre, certaines relations entre acteurs et population peuvent être à la fois étroites, mais non

basées sur le respect et la confiance mutuelle. Ces relations sont typiques des aides accordées

aux « populations vulnérables ». Déjà, l’appellation de la population concernée invite à la

considérer comme inapte ou temporairement incapable de voir à son propre développement, et

conduit insidieusement à des relations à sens unique où l’acteur donne et le bénéficiaire reçoit.

C’est le cas, par exemple, de situations telles que la distribution d’intrants ou de rations

alimentaires, ou de la mise sur pied de cantines scolaires. Dans ces cas, non seulement la

population est dirigée dans une aide sur laquelle il ne lui est pas possible de se prononcer, mais

encore se fait-elle la plupart du temps à travers des canaux qui lui sont plus ou moins extérieurs,

et qui ne prennent pas en compte l’organisation même de la collectivité, aussi informelle et

imparfaite soit-elle.

Dans le cas des projets où la population est rémunérée de quelconque manière pour son travail

(Food ou Cash for Work), ou encore qu’elle est impliquée directement dans son fonctionnement

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(chaînes de solidarité communautaires, filière des semences de qualité, multiplication de

boutures de manioc), les relations avec les acteurs sont encore assez étroites, puisqu’elles

supposent à tout le moins une collaboration efficace et une concertation assez grande pour les

mener à de bons résultats. Or, ces relations, bien qu’elles supposent un plus grand respect des

populations, restent des relations à sens unique, puisque les organisations qui donnent

n’expriment pas le désir clair d’apprendre ou de recevoir un apport quelconque de la

communauté en retour, si ce n’est en espèces (semences à rembourser ou plants à multiplier).

Dans les deux derniers types de relation exprimés, il n’est pas rare que l’étroitesse des relations

se transforme littéralement en dépendance aux services offerts à la population, et que

l’ « assistanat » s’installe et persiste encore davantage dans les mentalités. L’aide apportée, en ce

sens, devient donc carrément néfaste au développement, en inhibant tout désir de se prendre en

main, et condamne la population visée à redemander, année après année, une aide qui ne devait

qu’être ponctuelle au départ.

4.1.2. Les relations timides

Les acteurs des organisations n’entretiennent pas toujours des relations aussi étroites avec la

population. En effet, il semble que plus les organismes sont de grande envergure, plus ceux-ci

préfèrent faire appel à des organisations sur le terrain pour effectuer les projets, et moins ils ont à

entrer en contact avec la population. Bien sûr, ces organisations ne sont pas complètement

déconnectées du milieu rural, puisqu’elles y effectuent périodiquement des descentes pour

vérifier si les rapports reçus correspondent effectivement à la réalité sur le terrain. Or, il n’est pas

certain que ces contacts soient suffisants pour, d’une part, prendre la mesure de projets ou de

situations qui sont d’une telle complexité qu’elles demandent une surveillance jour après jour, et,

d’autre part, développer des relations très étroites avec les populations touchées par leur projet.

Cela est d’autant plus inquiétant que les missions de la plupart d’entre elles reposent sur l’appui

aux populations. Autrement dit, bien qu’elles soient responsables des actions posées sur le

terrain et de l’avancement des projets, elles ne peuvent compter que sur la bonne foi de leurs

partenaires pour rendre compte des actions réellement posées aux bailleurs de fonds.

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Des relations timides sont aussi vécues entre agronomes et communautés rurales difficiles

d’accès. En effet, plusieurs témoignages ont confirmé que les agronomes communaux et ceux

travaillant dans les DPAE ne se rendent pas sur les collines les plus éloignées, et que souvent des

communautés entières ne bénéficiaient pas du suivi auquel elles auraient pourtant droit

(Ndikuriyo, 2008; Simbasize, 2008). En effet, un agriculteur rencontré sur une colline près de

Gitega a avoué avoir un projet intéressant à développer avec des membres de sa collectivité dans

le milieu rural, mais ne trouvait pas d’appui ni au sein de la DPAE, ni au sein d’autres

organisations vouées pourtant à l’appui des communautés rurales et à l’augmentation de la

productivité agricole (Simbasize, 2008). Il est permis de croire que ce cas est loin d’être isolé, ce

qui démontre avec éloquence que malgré la quantité d’effectifs sur le terrain, les ressources ne

sont pas équitablement distribuées, ce qui contribue également à maintenir un climat de

méfiance qui empêche toute relation plus durable de se souder. Les chercheurs des instituts de

recherche et de la FACAGRO, pour leur part, ne semblent pas non plus très portés aux visites de

terrain, les limitant aux activités de recherche (où les relations sont à sens unique, mais cette

fois-ci de la population vers le chercheur, et non l’inverse).

4.2. Acteurs/acteurs

Les relations vécues entre acteurs sont elles aussi d’une incroyable diversité. Encore une fois,

elles sont marquées par de fortes inégalités, par des relations de pouvoir et par une compétition

qui n’est pas toujours favorable aux populations qu’elles visent toutes à aider.

4.2.1. Des relations de compétition à la base

Le grand nombre d’associations locales et nationales de toutes sortes au Burundi conduit

inévitablement à une compétition entre elles sur plusieurs fronts. En tout premier lieu, il est

essentiel de considérer que, dans un pays où le secteur économique formel est peu développé, le

fait de travailler dans un organisme financé de l’extérieur est une chance en soit. Donc, c’est

avec raison que chacune de ces associations lutte d’abord pour sauvegarder les emplois de ses

travailleurs. Cette lutte pour le financement passe très souvent par une compétition féroce dans

les réponses aux appels d’offres lancés par les principaux bailleurs de fonds ou les organismes

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internationaux détenant déjà des fonds pour l’exécution de projets divers sur le terrain. Les

associations n’ont en effet d’autre choix que de remporter certains de ces appels pour espérer

payer leurs employés et leurs frais d’administration, et poursuivre les activités qui, évidemment,

justifieront leur présence sur le terrain.

Cette compétition entre les organisations engendre une foule de conséquences néfastes. En effet,

selon certains responsables, les ressources limitées qu’elles possèdent sont plus souvent

concentrées sur la rédaction de rapports que sur le travail effectif sur le terrain, ce qui concentre

aussi les fonds dans les opérations administratives et en laisse moins aux populations

(Ndikuriyo, 2008; Ntitangiraneza). Les organisations, au sein d’une même communauté, peuvent

entreprendre des projets différents, ce qui les force également à maintenir une médiation et des

contacts entre eux qui mobilisent également beaucoup de temps.

4.2.2. Des relations de collaboration

Les ONGS et autres organisations présentes au Burundi font par contre certains efforts pour se

concerter et mettre leurs énergies en commun. Cette collaboration a plusieurs buts. D’une part,

elle permet aux différentes organisations de mettre sur pied des projets de plus grande envergure,

et ainsi d’obtenir plus de financement auprès des bailleurs de fonds. D’autre part, elle

rationnalise les opérations purement administratives, ce qui fait économiser beaucoup de temps

et d’argent aux organisations qui luttent d’année en année pour leur survie financière. Par

exemple, en 2007, les appels au financement de projets par secteur se sont faits en bloc par

différentes ONGs locales et internationales présentes sur le territoire burundais. Cette démarche

avait entre autres pour objectif de diminuer le temps et les ressources consacrées par chaque

organisation à la préparation de documents, et ainsi d’accroître l’efficacité de l’aide

effectivement apportée sur le terrain.

4.2.3. Des relations de dépendance

Les acteurs entretiennent également des relations de dépendance les uns envers les autres,

surtout lorsque l’une finance les activités de l’autre. Le dédoublement et le transfert de fonctions

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engendre nécessairement des relations qui nuisent à la transparence et à la confiance qui pourrait

exister entre les différents paliers d’organismes présents dans le secteur agricole au Burundi.

Cette dépendance est aussi néfaste pour le développement des organismes eux-mêmes, puisqu’ils

doivent limiter leurs actions aux cadres des projets qui sont financés par les autres organisations.

Leur autonomie s’en trouve dès lors amputée, et il est facile de concevoir que le pouvoir de

négociation lors de la signature des contrats d’exécution n’est pas le même selon que

l’organisme est prestataire de services ou qu’il débloque des fonds.

4.2.4. Autres types de relations

Les acteurs du secteur agricole entretiennent aussi des relations de connivence, parfois, lorsque

leurs intérêts convergent. Celles-ci ne sont pas toujours néfastes, au contraire, mais elles sont

toujours marquées par un certain manque de transparence, ou du moins par des ententes

informelles. Les relations d’affaires sont aussi très importantes, notamment entre les instituts de

recherche et les laboratoires privés, ou encore entre différents centres de recherche régionaux.

Les bailleurs de fonds, eux aussi, collaborent de façon étroite, mais il n’est pas certain que cette

collaboration soit d’abord orientée vers le mieux-être de la population. Bref, il ressort de ces

constatations que les relations entre les différents acteurs sont souvent loin d’être harmonieuses

et égales, mais qu’elles apparaissent toujours comme telles, pour bien paraître ou pour assurer la

poursuite du financement.

5. État de la productivité agricole et de la sécurité alimentaire

La situation agricole au Burundi est difficilement appréciable, puisque le pays manque de

données fiables sur ce secteur, et que le dernier recensement n’est plus représentatif de la

situation actuelle. Malgré tout, l’effervescence apparente des différents acteurs du secteur

agricole pourrait laisser à penser que la situation agricole et agroalimentaire générale au Burundi

s’améliore. En effet, si les intervenants mettent sur pied des projets qui, selon eux, sont si

profitables, les répercussions devraient être observables sur le terrain. Or, un coup d’œil rapide

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sur les collines suffit pour comprendre que si les projets réussissent dans une certaine mesure à

combler des besoins, ils ne parviennent pas à suffire à la demande.

5.1. La production agricole

5.1.1. Évolution et situation actuelle

Les activités de production agricole au Burundi s’étendent sur 792.510 hectares. Les

exploitations agricoles sont exigües, chaque ménage ne bénéficiant en moyenne que de 0,5 ha

pour subvenir à ses besoins en nourriture et en denrées à vendre au marché pour en retirer un

certain revenu. Les principales données concernant la production concernent essentiellement les

cultures de rente, puisque ce sont elles qui sont les plus importantes pour l’économie et la

balance commerciale du pays. Ainsi, une première difficulté de caractérisation de la situation se

pose, puisque ces cultures n’occupent que 10 % des terres cultivées. C’est donc dire que l’état de

la production des cultures vivrières, donc de la quasi-totalité de la production agricole destinée

au marché intérieur et à la consommation nationale sont peu connues, et semblent de peu

d’intérêts pour les principaux organismes chargés d’évaluer la production agricole du pays.

Néanmoins, il existe certains chiffres concernant les productions vivrières. Selon les données

recensées dans le document de la Stratégie agricole nationale (SAN), la production globale de

légumineuses a connue une baisse importante (34 %) entre la période 1988-1993 et 2007, et celle

des céréales une légère baisse de 3 %. Moins affectés, les rendements en bananes et plantains

ainsi qu’en légumes-racines (tubercules de pommes de terre, racines de manioc, patates douces)

ont pour leur part connu une hausse (tableau 1). En 2008, il faut également noter que les

rendements des cultures ont tous diminué. Le manioc fut la principale culture affectée, avec des

baisses de l’ordre de 80 % des rendements, causées par des attaques à la mosaïque sévère.

Si la production globale de denrées alimentaires a augmenté de 24 % en à peu près 25 ans, il faut

la mettre en relation avec l’augmentation de la population, qui elle a connu un bond de 45 %, et

avec l’extension des superficies cultivées, qui elle a fait un bond de 39 % (SAN, 2008). Ainsi,

s’il est faux de prétendre que la production agricole a diminuée au Burundi au cours des années,

il est par contre vrai d’énoncer que la production par habitant, elle, a chuté. Cette situation a pour

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conséquence une augmentation de l’insécurité alimentaire, et justifie encore le recours à l’aide

alimentaire internationale (SAN, 2008).

Tableau 1 : Évolution de la production vivrière par groupe de cultures (en milliers de t) et

leur contribution dans la production vivrière globale (en %)1990 - 2007

Année 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 Total %

Céréales

Légumineuses

Tubercules et

racines

Bananes et

plantains

293

366

1411

1547

300

375

1448

1586

306

383

1485

1626

300

374

1449

1585

213

292

1155

1305

290

345

1403

1564

273

324

1364

1544

297

298

1296

1527

314

291

1501

1573

266

262

1497

1526

251

224

1481

1516

274

282

1613

1549

282

282

1707

1603

246

246

1545

1569

280

280

1641

1587

290

250

1575

1636

287

247

1508

1654

290

241

1527

1721

5639

6079

29 409

30 951

8

8

41

43

Total 3617 3709 3800 3708 2965 3602 3505 3418 3679 3551 3472 3718 3874 3606 3788 3751 3696 3779 72 078 100

Source : MINAGRIE et FAO (SAN, 2008).

Pour ce qui est de l’évolution de la production des cultures de rente, elle est variable selon le

type de production. Les cultures de café et de coton ont connu des baisses plus ou moins

marquées depuis les années 1990, mais la culture du thé, grâce à l’extension des superficies en

culture, a connu une hausse de production (SAN, 2008). La production de quinquina a

passablement augmentée au cours des dernières années, tandis que le coton est en chute de

production depuis le milieu des années 1990. La production d’huile de palme, pour sa part, est

toujours une filière stratégique sur laquelle le pays veut miser, et dont la production semble assez

stable depuis quelques années. La plupart des filières des cultures de rente au Burundi sont déjà

ou sont en voie d’être libéralisées.

Les cultures de céréales sont aussi importantes au Burundi, puisque plusieurs ménages ou

associations cultivent du riz, du blé et de l’orge. Cependant, ces cultures restent modestes, et les

rendements peu élevés. Le riz attire néanmoins l’attention à cause du potentiel de production

dans les marais, qui est une alternative intéressante au riz pluvial et au riz irrigué de la plaine de

l’Imbo.

Du côté de l’élevage, le Burundi ne compte que très peu d’éleveurs et les troupeaux sont

essentiellement composés de petit bétail (chèvres, moutons) et en moindre partie de bovins. Bien

que la crise ait décimé les troupeaux et ait fait partir en fumée les efforts d’amélioration

génétique, le cheptel est en pleine reconstruction (grâce notamment aux dons d’animaux et aux

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chaînes de solidarité communautaires). La pisciculture, de son côté, est en décroissance et en

déstructuration.

Bref, le Burundi est un pays où la production agricole n’est en difficulté qu’en regard de

l’augmentation de la population qui l’oblige à s’améliorer en termes de rendements pour

toujours permettre à ses habitants de s’en nourrir et d’en retirer des revenus pour vivre.

5.1.2. Principaux obstacles à la production agricole

Les différents organismes sur le terrain ont chacun leur théorie relative aux difficultés

rencontrées par les producteurs agricoles quant à l’augmentation des rendements de leurs

cultures et, globalement, à l’augmentation de la production agricole du pays. Pour le PAM, les

causes de l’insécurité alimentaire et de la faible productivité agricole au Burundi sont les

changements climatiques et la surpopulation, les pratiques culturales déficientes et le faible

usage de la fumure organique et du compostage sur les exploitations agricoles. De son côté, la

stratégie agricole nationale 2008-2015 soutient également que les changements climatiques, la

dégradation des ressources naturelles, le manque d’intrants et d’actifs agricoles (semences,

cheptel) et la difficile modernisation du secteur agricole sont les principales causes de la faible

productivité (SAN, 2008).

Pour ce qui est de l’impact des changements climatiques sur la production agricole, il est

indéniable. En effet, selon plusieurs experts rencontrés sur le terrain, le régime des pluies, en

étant modifié quant à la distribution des précipitations au cours de saisons culturales par les

perturbations climatiques mondiales, sont la cause d’épisodes de sécheresse ou de pluies qui

nuisent à la production agricole, limitent les rendements et favorisent l’apparition de nouvelles

maladies autrefois bénignes (Rurantije, 2008; Ngenzebuhoro, 2008). De plus, la perturbation des

pluies conduit à la dégradation plus rapide des terres, puisque les glissements de terrain sont plus

fréquents. Les cultures les plus touchées par ces perturbations sont les légumes-racines et les

tubercules, les légumineuses et les arbres fruitiers (Ngenzebuhoro, 2008). La dégradation des

ressources naturelles, et plus concrètement des sols agricoles, est donc aussi l’une des causes de

la faiblesse des rendements et des difficultés rencontrées par le secteur agricole.

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La superficie des terres exploitées par chaque ménage agricole est aussi montrée comme l’une

des principales, sinon la plus grande limite à l’augmentation de la production sur le territoire

(SAN, 2008). Cette situation est bien sûr préoccupante, puisque le système d’héritage fractionne

à chaque génération les superficies cultivables par les ménages, déjà bien petites. Cependant, il

faut reconnaître que le Burundi, contrairement à plusieurs pays sur le continent, jouit de la

possibilité d’effectuer trois récoltes au cours d’une seule année, et ainsi de maximiser

l’utilisation des petits lopins de terre de manière enviable. Il faut également considérer que la

superficie des terres exploitées ne correspond encore qu’à 47 % des terres potentiellement

cultivables au Burundi (SAN, 2008). Cette donnée vient certainement mettre en perspective la

dite précarité foncière et l’exigüité des exploitations agricoles familiales, et permet de relativiser

la situation.

L’utilisation minimale ou nulle de la fumure organique est certes un facteur qui a contribué à la

baisse des rendements des cultures, puisque la matière organique et les éléments nutritifs qu’elle

contient contribuaient jadis de façon significative à la production et au maintien de la fertilité des

sols. Par contre, l’absence d’utilisation des engrais minéraux azotés, qui ne contiennent que peu

de matière organique, ne peu être considérée comme une cause de la baisse des rendements,

mais seulement comme un facteur qui lui aussi limite leur augmentation.

La surpopulation est aussi un facteur contesté de cause d’insécurité alimentaire. En effet, selon

certaines études, malgré le doublement de la population depuis cinquante ans, la production

agricole se serait maintenue à des niveaux acceptables, et le statut nutritionnel n’en aurait pas

tant souffert. Néanmoins, cette cause est maintes fois reprise par les principaux organismes

présents dans le secteur agricole pour justifier la baisse de rendements des cultures et le recours à

davantage d’aide alimentaire.

Le milieu rural souffre également d’un problème de monétarisation (Nsabiyumva, 2008). En

effet, les échanges informels y sont davantage la norme, et l’argent sous forme de liquidités ou

de prêts (microcrédit, entre autre), trop peu présent. L’une des raisons à cela est que la plupart

des entreprises de microcrédit sont centralisées à Bujumbura, et ne bénéficient pas des

infrastructures nécessaires pour ouvrir des succursales ou des points de service en milieu rural

(Nsabiyumva, 2008).

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5.2. L’accessibilité à la nourriture

5.2.1. L’apport nutritionnel

D’abord, l’accessibilité à la nourriture doit être comprise au niveau qualitatif. En effet, bien que

les besoins minimaux soient exprimés en termes quantitatifs à l’aide d’indicateurs comme els

kilocalories, il est nécessaire de s’interroger d’abord sur la diversité des sources alimentaires et

des nutriments consommés par la population burundaise. Ces données permettront de

comprendre davantage la situation alimentaire réellement vécue, et de mettre en perspective les

chiffres donnés quant à la consommation quotidienne. En effet, si l’appréciation de l’apport

nutritionnel ne se faisait qu’en kilocalories, il suffirait de boire de la bière de bananes ou de

manger du riz pour remplir les critères.

L’accessibilité à la nourriture est directement reliée à l’état de la production agricole. En regard

des données mentionnées plu haut, il est possible de prétendre que la baisse des rendements dans

la production de légumineuses, jumelée à l’explosion des prix sur les marchés tant centraux que

locaux, a nécessairement entraîné une diminution de la quantité de protéines consommées par les

habitants, puisque la consommation de protéines d’origine animale reste marginale et restreinte

aux ménages les plus fortunés. En revanche, les bons rendements constatés dans les productions

de bananes et de légumes-racines laissent croire que l’apport en glucides est meilleur que celui

en protéines, bien que la hausse des prix du riz ait pu en limiter la consommation quotidienne.

La consommation en vitamines et minéraux reste encore tributaire de l’accessibilité aux fruits, à

l’huile de palme, au lait et aux feuilles de manioc, qui constituent l’essentiel des aliments

contenant les principaux éléments minéraux et vitaminiques. Le rapport sur la Stratégie Agricole

Nationale (SAN) résumait la situation ainsi en 2008 :

Suite à la crise et aux divers aléas climatiques survenus, la situation nutritionnelle, qui était déjà

fragile sur le plan de l’équilibre nutritionnel, s’est sérieusement dégradée, particulièrement pour les populations vulnérables et sinistrées par la guerre civile. Actuellement, la couverture énergétique est

assurée à 75 %, celle en protéines à 40 % et celle en lipides à 22 %. Au cours des quinze dernières

années, la production n’a pratiquement pas augmenté alors que la population continuait de croître au

rythme de 3% par an. Le déficit alimentaire s’est accru au cours du temps de sorte qu’actuellement le pays se trouve dans une situation catastrophique avec plus de 70% de la population qui est en

insécurité alimentaire.

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En termes plus quantitatifs, le régime calorique quotidien minimal au Burundi est fixé à 2000

kcal/personne. C’est donc pour remplir ces besoins que les rations d’aide alimentaire sont

distribuées aux populations les plus vulnérables. Celles-ci consistent en 16 à 18 kg de céréales

(maïs), 15 kg de haricots, 25 g de sel et 1 L d’huile végétale. Ces rations, cependant, selon le

directeur général de CED-Caritas Burundi, sont des «rations de misère» (Ntitangiraneza, 2008).

En regard des données des années antérieures, il est possible d’observer que le Burundi était

autosuffisant à 95 % en denrées alimentaires avant la crise, mais le bilan nutritionnel qualitatif

était déséquilibré, avec d’importantes lacunes en sources de protéines et lipides animales et en

vitamines et minéraux (SAN, 2008). Le taux d’augmentation de la population, pour sa part,

conserve une croissance stable à environ 3 %. Ainsi, il semble que la guerre fut le principal

agent de diminution quantitative et qualitative de l’apport nutritionnel dans le pays, en entraînant

la destruction des infrastructures existantes et, surtout, en déstructurant profondément les

milieux ruraux en provoquant des déplacements et des exodes.

5.2.2. Les prix sur les marchés

La crise alimentaire a aussi eu son lot d’impacts sur l’accessibilité alimentaire. En effet, au

niveau mondial, les prix des denrées de première nécessité ont explosé. Cette situation fut

ressentie par les ménages ruraux au Burundi, puisque l’achat de denrées de base et d’huile au

marché conditionnent ni plus ni moins leur existence. Ainsi, l’augmentation des prix des

haricots, du maïs et des céréales, en plus de l’huile et même de la bière, a grandement limité les

quantités achetées par les ménages dont les revenus, eux, n’ont pas connus une telle hausse. Par

exemple, le riz se vendait cet été à 1100 Fbu le kilo, alors qu’il était deux fois à trois fois moins

cher un an auparavant. Les conséquences furent d’autant plus ressenties que la production

agricole était parallèlement en baisse.

La hausse des prix du carburant fut aussi un facteur non-négligeable, bien que son impact soit

moins direct. En effet, le carburant a eu un impact significatif sur le prix des denrées agricoles

importées, ce qui a contribué à en augmenter le prix. D’autre part, il fut plus difficile d’écouler

les denrées agricoles exportées sur les marchés étrangers, et les recettes provenant des cultures

de rente n’en furent que moins élevées pour les producteurs.

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Les prix sur les marchés internes sont aussi influencés par les stratégies de mise en marché des

producteurs. En effet, ceux-ci ne possèdent pas de structures d’entreposage leur permettant de

préserver leurs denrées agricoles pour les écouler plus lentement sur le marché. De plus, les

agriculteurs souffrent souvent d’un manque de ressources financières, et la tentation de vendre

immédiatement l’excédent des récoltes est grand. Tous ces facteurs réunis incitent les

producteurs à écouler en même temps leurs récoltes sur les marchés, ce qui fait baisser les prix.

Les producteurs ne bénéficient donc pas d’un très bon prix de vente. Lorsque la saison avance,

les quantités sur les marchés diminuent, et les prix augmentent. Or, les producteurs ayant vendu

leurs denrées moins chères au début de la saison voient leur pouvoir d’achat diminuer lorsque

ces mêmes denrées, qu’ils doivent maintenant acheter, se vendent plus cher. Plutôt que de payer,

certains d’entre eux préféreront parfois consommer la part des récoltes qui aurait dû servir

comme semences l’année d’ensuite. Ainsi, l’instabilité de l’offre au marché crée aussi sa part

d’insécurité financière et alimentaire, et complique l’accessibilité à la nourriture.

5.3. La conservation et la transformation

Le secteur global de la conservation des aliments et des semences en post-récolte est très peu

développé au Burundi. En effet, les pertes estimées en post-récolte se chiffrent à près de 60 %

des rendements récoltés pour certaines cultures, ce qui est extrêmement préoccupant. Autrefois,

des structures d’entreposage communautaires étaient présentes sur plusieurs collines et

permettaient de limiter les pertes, mais leur usage a diminué au cours des années, et les

infrastructures se sont détériorées au point de n’être plus utilisables aujourd’hui. Plusieurs

organismes, dont Help Channel Burundi, considèrent d’ailleurs que le principal défi de

l’agriculture burundaise se situe au niveau de la conservation des récoltes et de la préservation

des semences pour les prochaines saisons culturales (Ndikuriyo, 2008; Baranyitondeye, 2008).

L’importance de ce secteur est pourtant sous-représentée dans les projets de développement dans

le monde rural, ce qui n’est pas sans laisser pensif. En effet, il pourrait être d’intérêt de se

pencher sur ce problème, plutôt que de concentrer uniquement les efforts sur la production de

denrées et de semences de qualité.

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L’une des avenues envisagées pour améliorer la qualité des aliments est la transformation. Or, ce

secteur, puisqu’il nécessite davantage d’infrastructures, n’est que très peu développé, du moins

au niveau des cultures vivrières. En fait, seules les unités de transformation d’huile de palme

sont retrouvées sur les exploitations familiales, ou les équipements nécessaires à la

transformation de la banane en bière. Pour les cultures de rente, les unités de transformation sont

davantage centralisées, puisqu’elles nécessitent de plus gros équipements et investissements. Un

institut, le centre National des Technologies Alimentaires (CNTA) est pourtant chargé d’étudier

plus en profondeur les questions de transformations alimentaires. Cependant, il semble bien que

cet institut travaille davantage sur des problèmes relatifs à la transformation des cultures de rente

pour l’exportation que sur la conservation des cultures vivrières par des procédés de cannage ou

de déshydratation, par exemple.

5.4. Le cadre législatif

L’agriculture est aussi régie par plusieurs lois et cadres qui relèvent de divers ministères. Il ne

sera fait mention ici que de deux exemples, qui illustrent assez bien comment la législation

burundaise, ou encore son absence ou ses lacunes, exercent une pression ou orientent les actions

gouvernementales.

5.4.1. Le Code foncier

Le code foncier et le droit coutumier au Burundi régissent les questions de propriété des terres.

Comme il le fut mentionné précédemment, le mode de partage des terres entre les membres

d’une même famille, ou les questions relatives au partage des terres ou à la reprise des terres par

les populations déplacées de retour au pays sont souvent litigieuses, et monopolisent une grande

part des ressources du système judiciaire. De plus, il faut se rappeler qu’une femme veuve n’a

pas le droit de réclamer la propriété des terres que son mari possédait. Avec la crise, le nombre

de veuves a considérablement augmenté, ce qui accentue l’incidence des conflits et crée des

situations qui deviennent de plus en plus tendues sur les collines. De plus, le code foncier actuel

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permet toujours une plus grande atomisation des terres, alors que les familles agricoles n’arrivent

plus à l’autosuffisance alimentaire.

Ainsi, la révision du code foncier est un enjeu majeur au Burundi, d’une part pour le rendre plus

clair et plus adapté à la réalité actuelle, et d’autre part pour diminuer la pression exercée sur les

terres agricoles. Or, bien que cette réforme soit en cours aujourd’hui, il s’avère qu’elle soit faite

par ceux qui possèdent actuellement les terres, ce qui laisse croire que des changements de fond

ne pourront être réalisés prochainement (Baranyitondeye, 2008).

5.4.2. Les biotechnologies

La législation entourant les biotechnologies et la recherche agronomique est plutôt lacunaire au

Burundi. Le pays s’est récemment engagé à respecter les statuts et à contribuer à la recherche au

centre international pour le génie génétique et la biotechnologie. De plus, le Burundi a signé le

Protocole de Carthagène sur la prévention des risques biotechnologique, et a ratifié de ce fait la

convention sur la biodiversité le 4 juillet dernier (Buzingo, 2008).

Or, bien que ces signatures impliquent un certain engagement de la part du gouvernement et des

responsables du secteur agricole, il semble que la plupart des élus ne comprennent pas les

enjeux, faute d’expertise et de connaissances sur ces sujets. La ministre en charge de la question,

même, ne connaît pas l’état actuel de la situation par rapport aux transferts technologiques et aux

questions touchant le génie génétique. D’autre part, les cultures OGMs semblent intéressantes au

premier abord à cause des promesses d’augmentation des rendements. Le gouvernement y trouve

donc un intérêt pour l’augmentation du niveau de sécurité alimentaire dans le pays. Il n’est pas

étonnant, alors, de constater que le Burundi n’ait aucune loi permettant de se prononcer en

faveur ou non de cette technologie du vivant.

Le Burundi ne possède par d’infrastructures lui permettant de déterminer si les denrées agricoles

importées (aide alimentaire, semences, boutures, etc.) sont issues du génie génétique ou

seulement de croisements intraspécifiques. Certains soupçons planent en effet sur l’introduction

d’aliments ou de semences génétiquement modifiées via les projets du PAM et de la FAO, mais

l’absence de données relatives à ce domaine ne permet pas d’aller plus loin (Buzingo, 2008). Par

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ailleurs, il est possible de dire que les variétés de manioc résistantes à la mosaïque sévère sont

issues du génie génétique, et qu’elles font actuellement l’objet de campagnes de multiplication et

de distribution à travers tout le pays.

Il ressort de ceci que le Burundi montre bel et bien un intérêt pour ces questions, mais que sa

capacité à légiférer est limitée, et que sa capacité d’exécution l’est encore plus. Les lacunes

législatives laissent donc le champ libre aux instituts de recherche et aux partenaires pour

effectuer des essais de cultures OGM. Cependant, pour l’instant le Burundi ne possède aucune

infrastructure permettant le développement de telles cultures. L’arrivée des OGMs sur son

territoire ne peut donc se faire qu’à travers l’introduction d’espèces développées ailleurs qu’à

l’intérieur de ses frontières.

6. Responsabilité des acteurs envers la population

Les acteurs du monde agricole se doivent, d’un point de vue éthique, de répondre aux besoins de

la population et de veiller à son mieux-être et à son épanouissement. Chacun, quelle que soit sa

place, a le devoir d’y voir et de tout mettre en œuvre pour qu’elle soit respectée et réellement

appuyée.

6.1. Responsabilité des bailleurs de fonds

La responsabilité des acteurs s’inscrit dans un cadre éthique qu’il est primordial de mieux

comprendre avant de déterminer quelles sont les responsabilités relatives à chacun. Il a été

montré précédemment que ce sont, au final, les bailleurs de fonds qui ont aujourd’hui le plus de

responsabilités dans le milieu agricole burundais, car ce sont de leurs initiatives et de leur

financement que dépendent à la fois le gouvernement, les organismes non-gouvernementaux et

les associations locales. Ainsi, bien que ces responsabilités n’effacent pas celles que les autres

acteurs doivent prendre, il importe néanmoins de cerner dans quel cadre éthique s’inscrivent les

responsabilités des acteurs qui sont les plus influents.

Les organismes bailleurs de fonds sont, depuis 2005, assujettis à la Déclaration de Paris sur

l’efficacité de l’aide (OCDE, 2005). Cette déclaration, entérinée par la plupart des organismes

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bailleurs et des pays donneurs, vise à modifier les pratiques dans le domaine du financement des

projets d’aide au développement pour les rendre plus efficaces et plus respectueuses des

situations vécues dans chacun des pays bénéficiaire.

La Déclaration prévoit premièrement des dispositions pour aligner l’aide accordée sur les

priorités des pays partenaires et pour renforcer les obligations des donateurs envers la population

et le gouvernement. La Déclaration stipule que les organismes bailleurs doivent prendre les

mesures qui s’imposent pour déléguer le plus de pouvoir possible aux autorités en place, soit les

organismes de terrain et le gouvernement, et veiller à ce que leurs actions viennent se greffer de

manière complémentaire aux plans définis au sein des institutions démocratiques du pays. Ainsi,

la Déclaration de Paris est claire quant à la responsabilité qu’ont les bailleurs envers la

population : elle doit être plus visible et plus directe, et elle doit surtout respecter les élus qu’elle

a mis au pouvoir. Les bailleurs doivent aussi prendre des dispositions pour rendre des comptes à

la population à travers un processus de vérification public, ce qui est une autre manière de la

respecter et de lui être redevable. La manière d’y arriver passe nécessairement par le respect et le

renforcement des institutions, et le financement devrait donc aller en ce sens, sauf si la

corruption est à ce point présente qu’elle représente un obstacle flagrant au développement. Le

financement et les projets lancés devraient aussi prévoir une plus importante délégation de

pouvoir aux organismes et au gouvernement.

Le document souligne finalement que des engagements doivent être pris pour octroyer du

financement sur une base pluriannuelle plutôt qu’annuelle. C’est donc une responsabilité

supplémentaire à laquelle les bailleurs de fonds doivent se conformer.

Au Burundi, le financement des projets est encore sur une base annuelle, mais il existe

également des projets à financement biannuel ou plus. Il est aussi évident que les responsabilités

des organismes sur le terrain sont bien exploitées, puisque ce sont eux qui doivent mettre les

projets en œuvre et s’assurer de la collaboration de la population. Par contre, il est loin d’être

évident que l’aide s’aligne sur les priorités gouvernementales. À considérer que la plupart des

grands organismes bailleurs ou gestionnaires de projets sont impliqués dans la rédaction des

plans stratégiques nationaux, il est plus près de la réalité de penser que ce sont ces plans qui

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s’alignent davantage sur l’aide octroyée et les possibilités de financement que l’inverse. En effet,

puisque 60 % du budget de l’État provient de sources extérieures, l’autonomie du gouvernement

pour décider de plans d’action et d’axes stratégiques est probablement grandement limitée.

6.2. Responsabilité des acteurs gouvernementaux

La Déclaration de Paris a aussi une implication directe envers les gouvernements. En effet, elle

invite fortement les gouvernements à prendre l’avenir de leur pays en main et à faire preuve

d’autonomie dans le choix de leurs priorités, à exercer une « souveraineté ferme et effective sur

leurs politiques et stratégies de développement » (OCDE, 2005). Les acteurs gouvernementaux

doivent donc cesser de se plier aux exigences des bailleurs de fonds, et reprendre le contrôle des

grands axes de développement de leur pays. Évidemment, cette autonomie n’est pas facile à

assumer du jour au lendemain, et certains ajustements doivent être faits pour y arriver. Les

acteurs gouvernementaux doivent aussi rendre compte des engagements tenus avec les bailleurs

de fonds à la population par un processus de vérification public. Ainsi, les gouvernements ont

d’abord à répondre à leur population, et ensuite aux bailleurs de fonds qui auront aligné leur aide

sur ses priorités.

De plus, cette souveraineté si chèrement souhaitée par les signataires de la Déclaration de Paris

implique que le gouvernement fasse son travail de protecteur du bien public et de défense des

intérêts de sa population. Ici encore, donc, la corruption n’a pas sa place, et l’écoute attentive des

besoins exprimés par la population rurale devrait donc être l’une des responsabilités primordiales

du gouvernement burundais. La transparence des processus de consultation de la population et

de décisions devrait aussi être assurée, et ce dans le but de bâtir une relation de confiance non

seulement entre la population et l’appareil gouvernemental, mais aussi entre le gouvernement et

les bailleurs, ce qui ne pourra que renforcer son autonomie et sa crédibilité. Le MINAGRIE,

dans cette optique, devrait recevoir les fonds nécessaires au plein accomplissement de ses

missions, et voir sa part du budget national franchement augmentée. En effet, ce n’est certes pas

avec 3 % du budget de l’État que ce ministère peut prendre toutes les responsabilités qui lui

incombent, et prendre les décisions qui sauront le mieux répondre aux besoins de la population

rurale.

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6.3. Responsabilité des organisations non-gouvernementales

Les organisations non-gouvernementales présentes sur le terrain au Burundi sont aussi touchées

par la Déclaration de Paris, mais plus indirectement que le gouvernement et les bailleurs de

fonds. En effet, celles-ci se voient confiées plusieurs responsabilités, dont celle d’être des

intermédiaires utiles, neutres, efficaces et non-superflus entre la population locale et

l’administration. Ce rôle doit être joué dans la mesure où la population est dans l’incapacité de le

jouer elle-même. Évidemment, les ONGs doivent aussi mettre à la disposition de la population et

du gouvernement, le cas échéant, de personnel compétent pour effectuer les tâches demandées.

Ainsi, elles doivent répondre avant tout aux besoins de la population, mais en même temps

respecter tout aussi bien les directives gouvernementales, ce qui est loin d’être évident lorsque

les plans ne sont pas cohérents avec la situation réellement vécue sur le terrain. Dans ce cas, il

faut rappeler que les besoins de la population doivent primer, puisque le gouvernement n’en est

que l’expression démocratique visible. Les ONGs doivent elles aussi demeurer ou devenir plus

transparentes, de façon à donner à la population tout le pouvoir de juger de leurs actions et de

demeurer des partenaires en qui elle peut avoir confiance et avec qui elle décide de poursuivre

son développement.

Au Burundi, la quantité impressionnante d’ONGs sur le terrain ne permet pas de tirer des

conclusions générales sur leur mode de fonctionnement en regard de leur responsabilité envers la

population. Si certaines d’entre elles excellent, d’autres au contraire sont plutôt douteuses. Par

contre, il est clair que la plupart des ONGs ne remettent pas de rapports complets au

gouvernement sur une base annuelle, ni ne rendent vraiment compte de leurs actions aux

bénéficiaires sur le terrain. Ce manque de transparence est révélateur soit de la non-confiance

qui règne entre elles et le gouvernement ou entre elles et la population, du peu d’attention

qu’elles portent à l’un et à l’autre, ou encore du nombre impressionnant de rapports qu’elles

doivent remettre à chacun de leurs bailleurs de fonds. Dans tous les cas, les ONGs devraient

revoir leurs pratiques et rendre davantage de comptes d’abord à la population en lui laissant une

place toujours plus grande dans leurs actions, ou du moins en renforçant sa capacité à le faire, et

ensuite au gouvernement.

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6.4. Responsabilité des instituts de recherche et d’enseignement

Finalement, les instituts de recherche et d’enseignement ont aussi leur part de responsabilités à

prendre envers la population burundaise. Elles ont à la fois le rôle de former, d’informer et d’agir

concrètement dans le monde agricole en produisant des savoirs et en les diffusant aurpès de la

population et du gouvernement. Gardiennes du savoir et garantes de l’innovation agricole, ces

institutions ont le devoir de voir à la qualité de l’enseignement donné et à la qualité de la

recherche qui se fait chez elles. Elles doivent aussi s’appliquer à orienter la recherche vers des

secteurs priorisés par le gouvernement, dans le but de mieux répondre aux besoins de la

population agricole et aux défis qu’elle suppose selon les circonstances et les milieux. Elles ont

la responsabilité de remplir leur mandat de conservation du patrimoine végétal et animal, et de le

protéger contre les menaces qui planent sur lui. Entre autres, elles doivent veiller au respect des

ententes et protocoles signés et ratifiés au niveau international par le Burundi, entre autres la

Convention sur la Diversité Biologique. Elles doivent aussi, dans la mesure du possible, produire

ou mettre à la disposition de la population et du gouvernement les connaissances qui pourraient

leur permettre de prendre les meilleures décisions possibles en regard des préoccupations

agricoles.

Les principaux acteurs dans le domaine de la recherche et de l’enseignement au Burundi ont des

relations diverses avec le gouvernement, et devraient voir à les consolider. Évidemment, comme

partout ailleurs, le financement public de la recherche est nettement inférieur au financement

provenant de sources privées ou extérieures au Burundi. Cela ne devrait pourtant pas empêcher

les instituts de recherche et la FACAGRO de veiller à ce que ces projets s’insèrent dans le cadre

des priorités fixées par le gouvernement, et qu’elles répondent le plus possible aux attentes du

milieu agricole. Ainsi, les projets devraient avant tout viser la conservation et la production de

denrées vivrières, et l’amélioration du cheptel animal. Les projets comme celui du CIALCA sur

les bananeraies et leur gestion est un excellent exemple de projet qui répond aux attentes du

milieu rural et à ses problèmes centraux, et devraient être encouragés. La FACAGRO, de plus,

devrait voir à la formation pratique sur le terrain de ses étudiants, et veiller à les conscientiser à

voir et concevoir les problèmes agricoles dans leur intégralité, c’est-à-dire ancrés dans le monde

rural et ses dynamiques complexes, et de ne pas les concevoir seulement d’un point de vue

agronomique.

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7. Recommandations aux acteurs

Après avoir étudié en détail les principaux acteurs du milieu rural et leurs relations entre eux et

avec la population, ile st possible d’énoncer certaines recommandations aux acteurs. Celles-ci ne

sont pas exhaustives, mais elles tendent toutes vers un plus grand respect et une plus grande

estime des populations concernées, donc de se recentrer sur leurs missions premières et d’être

attentifs aux effets collatéraux des projets mis en branle dans les communautés.

À tous

- Respecter les désirs de la population, et l’encourager avant tout à s’impliquer de plus en plus

dans les initiatives développées.

- Faire preuve de plus de cohérence entre les principes défendus et les actions entreprises sur le

terrain. En effet, certains rapports posent de bons diagnostics sur la situation agricole et sur la

force des organisations locales, mais les actions proposées et les axes d’intervention les font

dévier de la mission préalablement identifiée.

Aux centres de recherche

- Chercher à préserver le patrimoine génétique et biologique du Burundi. Il sera source

inestimable de diversité et pourra contribuer de manière importante à faire face aux

cham<ngemenst climatiques et à l’arrivée de nouveaux pathogènes sur le territoire national.

- Élaborer des stratégies qui permettront à la population de mieux conserver et de transformer

leurs aliments, leur conférant ainsi une valeur ajoutée.

- Effectuer des études de mise en marché des produits commercialisables, avant de lancer des

campagnes de culture de telles ou telles espèces. À ma connaissance, il n’existe aucune étude

sur le marché des fruits dans la sous-région, et pourtant nombre de projets comptent sur cette

production pour augmenter les revenus des ménages.

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Aux gouvernements et ONGs

- Encourager la monétarisation des ménages agricoles avec des formations ou l’appui à des

institutions de micro-crédit enregistrées auprès de la Banque centrale.

- Exiger des ONGs sur le terrain des rapports complets au gouvernement, et s’assurer d’un suivi,

quitte à faire le ménage dans les ONGs présentes sur le terrain.

- Encourager les initiatives des populations «non-vulnérables». Elles ont le leadership, les

aptitudes, la volonté et surtout, surtout, l’énergie nécessaire pour mener à bien leurs initiatives.

Malheureusement, elles sont complètement oubliées des projets qui visent d’abord les

populations plus défavorisées.

- Axer les actions gouvernementales et locales sur la production vivrière, incluant la recherche.

Certaines initiatives très intéressantes sont en cours, mais il faudra plus que le développement

de nouveaux cultivars pour améliorer la production.

Aux bailleurs de fonds

- Redonner graduellement le pouvoir de décision aux gouvernements et institutions

démocratiques en place;

- Faire preuve de transparence en rendant public les rapports et l’état du financement des projets

et des institutions gouvernementales;

- Respecter et laisser le choix au gouvernement de décider lui-même de ses grandes orientations.

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CONCLUSION

Le stage effectué à l’été 2009 a permis de remplir les objectifs fixés et de prendre connaissance à

la fois de la structure complexe du milieu agricole burundais, en plus d’y observer les différents

acteurs évoluer les uns avec les autres et avec la population. Les trois mois passés sur le terrain

ont été l’occasion de comprendre que la complexité des interactions était symptomatique de la

déstructuration du milieu et de la multiplication des engagements pris et des actions engagées

sans grande cohérence les uns avec les autres. Il fut aussi évident, à la suite du stage, que tous les

types d’aide n’ont pas le même effet, et ne répondent pas toutes dans la même mesure aux

impératifs agricoles qu’exige la situation actuellement vécue, et les impératifs supposés par

l’éthique de la coopération qui met la population au centre de toutes les actions et

préoccupations.

En effet, le stage a permis de révéler qu’en dépit de la bonne volonté des acteurs, plusieurs

actions mal coordonnées, le grand nombre d’acteurs impliqués dans un même projet et le peu de

place laissée à la population pour s’exprimer et au gouvernement pour gouverner ont eu des

conséquences plutôt mitigées sur le bilan agricole global et la situation de la sécurité alimentaire,

ne réussissant pas à rétablir la situation qui semble, selon les données disponibles, au mieux

stagner. Ainsi, les actions posées ne parviennent pas à concrétiser les buts fixés.

Il se trouve donc que les acteurs doivent refaire leurs devoirs en matière d’éthique, entre autres

en collant davantage aux prescriptions dictées dans la Déclaration de Paris et en accordant

davantage de respect et d’attention aux réels besoins de la population vivant essentiellement de

l’agriculture. Le rôle de l’ACECI, en ce sens, est de rappeler à tous, ONGs, associations locales,

gouvernements, instituts de recherche et d’enseignement, organisations internationales, agences

de développement et bailleurs de fonds, que leurs engagements doivent répondre aux besoins

humains, dans une vraie perspective d’entraide à double sens, et non seulement à sens unique.

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NGENZEBUHORO Emmanuella. 2008. responsable de la Seconde Commission nationale sur

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NIYONZIMA Mireille. 2008. Directrice de l’Association pour la Défense des Droits des

Femmes (ADDF). Entrevue réalisée à Bujumbura le 31 mai 2008.

NSABIYUMVA Marie-Louise. 2008. Directrice générale de la Caisse d’Épargne et de Crédit

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NTIHABOSE Salvator. 2008. Directeur général de l’Institut des Sciences Agronomiques du

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ANNEXE 1

Missions du MINAGRIE selon le décret présidentiel n° 100/38 du 3 janvier 2006

1) La conception, la planification, la coordination et l’exécution de la politique nationale en

matière d’agriculture et de l’élevage ;

2) L’organisation et le suivi des filières agro-alimentaires ;

3) La mise en place d’un système durable de sécurité alimentaire de la population ;

4) L’élaboration et la mise en œuvre de la politique nationale en matière de protection et de

fertilisation des sols ;

5) La promotion de la conservation, du stockage et de la transformation des produits agricoles et

d’élevage ;

6) L’élaboration et la mise en œuvre des stratégies de défense des cultures ;

7) La réhabilitation des cultures de base en voie de disparition ;

8) La promotion des productions animales et végétales appropriées ;

9) La promotion et l’encadrement des structures de santé animale ;

10) La définition et la mise en œuvre de la politique nationale de mobilisation pour l’auto-

développement et de la vulgarisation agro-sylvo-zootechnique ;

11) La promotion et l’encadrement de l’exploitation des eaux, des produits de la pêche et de la

pisciculture, en collaboration avec les autres Ministères concernés ;

12) L’identification et la promotion de nouvelles cultures ou variétés de cultures ;

13) La collaboration avec les acteurs publics et privés en matière de recherche agricole et

zootechnique en vue de promouvoir une agriculture de marché permettant la sécurité

alimentaire et l’accroissement des revenus de la population ;

14) L’amélioration de l’alimentation de la population, en collaboration avec le Ministère de la

Santé Publique et les autres organismes spécialisés.

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ANNEXE 2

Collaborations entre intervenants dans le projet de production de semences de qualité

La Coordination des Opération agricoles d’Urgence et de Réhabilitation

(FAO/CAUR) contribue à la réhabilitation des systèmes de production de

semences de bonne qualité en milieu rural.

Pourquoi ce programme ?

La forte désorganisation du secteur agricole;

L’affaiblissement généralisé des structures de production causé par plus de 10 ans de

conflit;

L’érosion des mécanismes traditionnels de survie développés de génération en génération

par les ménages pour l’acquisition des semences;

L’accès difficile aux autres intrants agricoles de base;

La dégénérescence des variétés en diffusion et la baisse de la production agricole;

sont parmi les raisons justifiant les interventions de la FAO/CAUR pour rétablir une sécurité

semencière minimale au niveau des communautés rurales. D’ou la mis en place, par la

FAO/CAUR, d’un Programme de production de semences de qualité depuis 2001.

2. Quel est l’objectif principal du Programme ?

Mettre rapidement à la disposition des ménages ruraux des semences de qualité déclarée pour les

aider à rétablir progressivement les mécanismes traditionnels de production de semences de

qualité.

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Les objectifs spécifiques étant de :

Contribuer à la réduction progressive de la dépendance du Burundi vis-à-vis de

l’assistance directe en nourriture ;

Sauvegarder le peu de germoplasme qui restait dans les instituts de recherche (ISABU et

universités) et éviter ainsi des pertes irrémédiables qui auraient gravement compromis la

reprise des activités dans un secteur aussi important pour la sécurité alimentaire du pays;

Réhabiliter les systèmes de production de semences au niveau de tous les maillons;

contribuer à la recapitalisation des familles rurales affectées par le conflit et restaurer les

mécanismes traditionnels de production et d’échange de semences entre les populations

rurales ;

Renouveler et élargir la gamme de variétés de pomme de terre, de riz, de blé, de sorgho,

de maïs, de haricot, de soja, d’arachide, de patate douce et de manioc en milieu rural par

la diffusion des variétés saines, performantes et résistantes aux maladies;

Encourager la relance d’un réseau de producteurs privés locaux, à travers l’assistance

aux associations et groupements communautaires;

Assurer la formation des agronomes et des encadreurs des groupements et associations de

producteurs;

Contribuer à l’amélioration de la circulation des informations agricoles;

Promouvoir et inciter l’émergence de petites unités de production de semences de qualité

au niveau des communautés rurales.

3. Quelle est la méthodologie utilisée ?

3.1 Multiplication des semences

Phase I: Appui aux structures nationales

de recherche [ISABU, FACAGRO,

Université de Ngozi], pour la

production de semences de pré-base. Cet

appui a été réalisé jusqu’en 2004 avant

que l’ISABU ne soit financé par le

Royaume de Belgique pour poursuivre

cette activité;

Phase II: Appui aux centres semenciers

des DPAE et aux ONG nationaux et

internationaux encadrant les

organisations paysannes (associations et

groupements) pour la production de

semences de base. Cette phase continue

même maintenant;

Phase III: Appui aux privés, associations

et groupements identifiés en

concertation avec les DPAE et les ONG

nationales et internationales partenaires

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de la FAO/CAUR pour la production de semences diffusables ;

Phase IV: Rachat d’une partie des semences produites dans le but de les distribuer aux

ménages les plus vulnérables.

3.2 Comment on fait le contrôle de qualité ?

Système de référence: système des semences de qualité déclarée mis au point par la FAO

(Etude FAO n°117: normes minimales dans un pays sans législation semencière);

Visite régulière des champs par les Consultants de la FAO/CAUR;

Un ingénieur agronome par DPAE fait un suivi des activités de production de semences

de la province et donne un rapport mensuel;

Des inspecteurs du Département de la promotion des Semences et Plants font la

surveillance des champs de production de semences et des magasins de stockage;

Les semences ne répondant pas aux normes définies sont déclassées et orientées vers la

consommation.

3.3 Phase de distribution des semences aux ménages vulnérables

Il y a des contrats de production et de remboursement de semences entre la FAO/CAUR

et ses partenaires;

La FAO se réserve le droit de racheter les semences ayant satisfait aux normes de qualité

déclarée;

Les semences remboursées ou rachetées sont distribuées aux ménages vulnérables de

préférence organisés en associations ou groupements ;

Font partie des groupes bénéficiaires les associations de ménages vulnérables constitués

de veufs, veuves, jeunes adultes chefs de ménages, de ménages Batwa et les ménages

déchargés des centres nutritionnels ;

Actuellement dans les foires aux semences organisées par la FAO/CAUR pour les

ménages vulnérables, les associations productrices de semences de qualité viennent

vendre leurs semences particulièrement pour les cultures de haricot et de maïs. Cela

permet de mettre en contact les acheteurs et les vendeurs.

3.4 Choix des intervenants en production de semences de qualité

Le choix des intervenants (privés, associations ou groupements) est guidé par leur

expérience dans le domaine de la production de semences de qualité;

L’expérience de la FAO/CAUR a permis de constater qu’il existe un réseau de

producteurs de semences qui a besoin d’être renforcé et mieux organisé;

La zone d’action couvre tout le pays avec l’objectif d’aboutir à terme à une autonomie

régionale en semences et matériel végétal de qualité.

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La réhabilitation de la production de semences de qualité s’appuie sur une stratification du

partenariat avec des spécificités à chaque niveau. Toutes les provinces sont appuyées par

la FAO/CAUR, soit directement via les centres semenciers gérés par les Instituts de

recherche et les DPAE, soit à travers un soutien aux réseaux associatifs de producteurs de

semences encadrés par les DPAE, les ONG nationales et internationales partenaires

opérant dans les provinces concernées.

4. Quels sont les activités d’accompagnement?

4.1 Infrastructures communautaires de stockage

La conservation des semences dans de bonnes conditions est parmi les facteurs

indispensables pour maintenir leur bonne qualité;

Ainsi la FAO/CAUR a initié un programme de réhabilitation des infrastructures

communautaires de stockage gérés par les usagers (associations/groupements);

Les critères de choix des associations bénéficiaires de ces magasins de stockage sont la

maîtrise de la technique de production, de protection et de conservation de semences de

qualité ainsi que la quantité élevée de semences produites.

4.2 Animation du groupe thématique « semences »

Le groupe thématique « semences » est un cadre de concertation des intervenants dans la

production de semences de qualité. Il se réuni tout les 2 mois dans le but de:

coordonner les activités des différents intervenants;

avoir une vision commune sur les priorités et les principales cultures en fonction des

saisons;

Faire une évaluation des besoins et des disponibilités en semences

Ce groupe thématique était surtout indispensable pendant la période de crise au moment

où la Coordination était très difficile.

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4.3 Formation des agronomes et des encadreurs des associations

Des ateliers de formation sur la

production, la protection et la

conservation des semences de

qualité: pomme de terre, haricot, riz,

soja et arachide, manioc et bananier

ont été réalisés au profit des

agronomes des DPAE et des ONG

partenaires ;

La FAO/CAUR élabore et distribue

des fiches techniques

(Kirundi/Français) sur les

principales cultures aux membres

des associations de producteurs de semences de qualité ;

Réédition en collaboration avec l’ISABU de quelques documents de vulgarisation

existants;

Formations des membres des associations de producteurs de semences, en collaboration

avec les ONG partenaires, sur des thèmes variés en fonction des cultures prioritaires dans

la province concernée.

5. Les difficultés rencontrées

Faible disponibilité locale de fumier organique et d’engrais minéraux;

Faible disponibilité des terres dans certaines régions et en fonction des cultures et des

saisons;

Manque d’infrastructures de stockage des semences de qualité ;

Aléas climatiques imprévisibles;

Dégénérescence des variétés en diffusion pour la pomme de terre; faible renouvellement

du germoplasme;

Nombre très limité de variétés en diffusion pour la pomme de terre, le blé, le sorgho, le

riz de basse altitude, l’arachide, le maïs, le soja et le manioc;

Certaines variétés sélectionnées n’ont pas été appréciées par les agriculteurs pour des

raisons diverses: Mbayuwayu (blé); Majambere (pomme de terre); Mugamba (maïs);

Facagro 441 (riz); A321 (haricot); etc.

Les petites quantités de semences et de matériel végétal de pré-base limitent les

superficies à emblavées en semences diffusables (soja, arachide, blé, patate douce,

haricot volubile).

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6. Perspectives

Stabiliser et pérenniser les acquis au niveau des structures associatives de producteurs de

semences de pomme de terre, riz irrigué de basse altitude, soja;

Poursuivre les interventions d’appui aux associations pour la production de

semences/matériel végétal de base et diffusables surtout pour les cultures de blé, manioc,

riz des marais de moyenne altitude, maïs, arachide, bananier, colocase et patate douce;

Réhabiliter les infrastructures communautaires de stockage;

Poursuivre le renforcement des capacités (formation, information) des producteurs de

semences;

Initier des unités de transformation pour que le producteur vende sa production à un prix

rémunérateur;

Améliorer la circulation de l’information sur les circuits de commercialisation des

semences et d’autres intrants agricoles (engrais minéraux, produits phytosanitaires, etc.);

Prospecter et identifier des variétés locales adaptées et acceptées par les agriculteurs à

introduire en multiplication (manioc, haricot, etc.).

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ANNEXE 3

Critères de sélection des organismes partenaires du PAM

pour la distribution de denrées alimentaires

Les partenaires des projets du volet «urgence» du PAM au Burundi doivent remplir les critères

suivants :

- Travailler auprès des populations vulnérables ;

- Disponibiliser un personnel suffisant et avoir une capacité technique nécessaire à la

distribution ;

- Pouvoir fournir le matériel nécessaire à la distribution ;

- Être mobiles ;

- Fournir un rapport mensuel complet et assurer une supervision sur le terrain lors des

opérations.

Déroulement de la distribution :

Les partenaires sélectionnés doivent fournir mensuellement au bureau du PAM à Bujumbura la

liste des bénéficiaires qui se qualifient pour recevoir l’aide alimentaire. Le PAM, une fois les

listes reçues, prépare le camion contenant les rations pour les familles et les achemine à son

entrepôt provincial ou directement à l’organisme. Celui-ci est chargé de procéder à la

distribution le jour-même de l’envoi. Le PAM assure en plus un suivi mensuel auprès du

partenaire, en plus d’un suivi post-distribution.