publication annuelle mc.blandin

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(septembre 2011 - juillet 2012) L’Sénat et pi c’mint qu’in s’in sert Le sénat, et comment on s’en sert Marie Blandin - Sénatrice du Nord Au Sénat : Romain Poujol 15 rue de Vaugirard 75291 Paris cedex 06 Email : [email protected] Pour me contacter... Sur Facebook, la page : Marie-Chrisne-Blandin-Sénatrice Sur Twier : @mcblandin 1 ©Sénat Deux semaines plus tard, j’ai changé de mission, en passant de ma passion de lue contre les conflits d’intérêts dans le domaine scien- fique et sanitaire, à un défi movant : la Présidence de la CCEC, commission de la culture, de l’éducaon et de la communicaon. Après quelques textes de lois complexes, et des demandes de ren- dez vous à n’en plus finir avec tous les représentants des industries culturelles, la campagne présidenelle, puis législave, m’ont ame- née à partager les enjeux de l’éducaon et de la culture dans de nombreux meengs. L’écologie polique nous entraîne tous au plus près du terrain (vi- sites de prison, rencontre de grévistes…) sans oublier les enjeux lointains (sahraouis oubliés, notre très africaine dépendance éner- géque) et la problémaque sociétale inachevée de l’égalité dans la diversité. Nous voici en cet été 2012 avec de nombreux parlementaires, dans une majorité de gauche bien installée. Mais tout reste à inventer pour faire passer dans le réel les pistes que nous avons coproduites dans Europe Ecologie. Comment se mere en transion écologique si la croissance reste brandie comme la soluon à tous les maux ? Comment construire des modes de vie agréables dans la sobriété et la symbiose avec les milieux naturels, si la frénésie publicitaire n’est pas contenue ? Reconnus et compétents, les élus écologistes ne sont qu’au début de la complexité : faire mieux avec peu de moyens, faire juste dans une société embrigadée dans la compéon sans scrupules, faire responsable, en ne scellant pas le bonheur du jour sur les dégâts de demain ou la ruine du Sud. Marie Blandin Trente degrés, un ciel bleu sans nuages, le samedi premier octobre 2011… Climat exceponnel pour un jour inédit, celui où le Sénat passe à gauche. C’est dans ce cadre que les dix élus écologistes sont parvenus à fonder un vrai groupe parlementaire. ET LE SÉNAT VIRA À GAUCHE Retrouvez plus d’infos sur : www.mariechrisneblandin.eelv.fr Dans le Nord: Secrétariat: Valérie Spender Permanence parlementaire : Mathilde Steinauer 130 rue du Faubourg de Douai 59000 Lille Téléphone : 03.20.09.72.64. Email : [email protected] Communicaon : Priscilla Cassez

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Publication annuelle sénatoriale, de septembre2011 à juillet 2012

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Page 1: Publication annuelle MC.Blandin

(septembre 2011 - juillet 2012)

L’Sénat et pi c’mint qu’in s’in sert Le sénat, et comment on s’en sert

Marie Blandin - Sénatrice du Nord

Au Sénat :

Romain Poujol

15 rue de Vaugirard

75291 Paris cedex 06

Email : [email protected]

Pour me contacter...

Sur Facebook, la page : Marie-Christine-Blandin-Sénatrice

Sur Twitter : @mcblandin

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©Sénat

Deux semaines plus tard, j’ai changé de mission, en passant de ma passion de lutte contre les conflits d’intérêts dans le domaine scien-tifique et sanitaire, à un défi motivant : la Présidence de la CCEC, commission de la culture, de l’éducation et de la communication.

Après quelques textes de lois complexes, et des demandes de ren-dez vous à n’en plus finir avec tous les représentants des industries culturelles, la campagne présidentielle, puis législative, m’ont ame-née à partager les enjeux de l’éducation et de la culture dans de nombreux meetings.

L’écologie politique nous entraîne tous au plus près du terrain (vi-sites de prison, rencontre de grévistes…) sans oublier les enjeux lointains (sahraouis oubliés, notre très africaine dépendance éner-gétique) et la problématique sociétale inachevée de l’égalité dans la diversité.

Nous voici en cet été 2012 avec de nombreux parlementaires, dans une majorité de gauche bien installée. Mais tout reste à inventer pour faire passer dans le réel les pistes que nous avons coproduites dans Europe Ecologie. Comment se mettre en transition écologique si la croissance reste brandie comme la solution à tous les maux ? Comment construire des modes de vie agréables dans la sobriété et la symbiose avec les milieux naturels, si la frénésie publicitaire n’est pas contenue ?

Reconnus et compétents, les élus écologistes ne sont qu’au début de la complexité : faire mieux avec peu de moyens, faire juste dans une société embrigadée dans la compétition sans scrupules, faire responsable, en ne scellant pas le bonheur du jour sur les dégâts de demain ou la ruine du Sud.

Marie Blandin

Trente degrés, un ciel bleu sans nuages, le samedi premier octobre 2011… Climat exceptionnel pour un jour inédit, celui où le Sénat passe à gauche.

C’est dans ce cadre que les dix élus écologistes sont parvenus à fonder un vrai groupe parlementaire.

Et LE SénAtvirA à gAuchE

Retrouvez plus d’infos sur :www.mariechristineblandin.eelv.fr

Dans le Nord:

Secrétariat: Valérie Spender

Permanence parlementaire : Mathilde Steinauer

130 rue du Faubourg de Douai

59000 Lille

Téléphone : 03.20.09.72.64.

Email : [email protected]

Communication : Priscilla Cassez

Page 2: Publication annuelle MC.Blandin

Un groupe écologiste au Sénat.

Leila Aïchi, Aline Archimbaud, Esther Benbassa, Corinne Bouchoux, Ronan Dantec, Jean Desessard, André Gatolin, Joël Labbé, Jean Vin-cent Placé et moi-même, avons été élus le 25 septembre 2011... Re-joints par Hélène Lipietz, grâce au jeu des chaises musicales des listes avec le premier gouvernement en mai de Jean Marc-Ayrault, puis cet été par Kalliopi Ango Ela grâce au remaniement du même gouverne-ment en juin.

Nous partîmes une en 2001, puis quatre en 2004, cinq en 2007, dix en septembre 2011 et maintenant douze !

Dès l’installation de la Haute Assemblée, et l’élection de Jean-Pierre Bel à sa tête, il fallu d’abord faire modifier le réglement intérieur du Sénat pour officialiser la création du premier groupe écologiste. Quinze sénateurs et sénatrices étaient auparavant nécessaires pour constituer une entité. Notre accord avec le Parti Socialiste comportait cette modification. Il fallu quelques mois, et puis, la modification du réglement du Sénat a fait passer de 15 à 10 le nombre d’élus mini-mum pour la constitution officielle d’un groupe parlementaire. Avoir “un groupe”, c’est une première. Nous étions 10, c’était tout juste, mais réél et prometteur.

Un peu plus de moyens, déjà, matériellement. Tous nos assistants peuvent donc s’appuyer sur de nouveaux collaborateurs qui orga-nisent, coordonnent les divers travaux. Une secrétaire générale, Fiona. Un chargé de communication, Jean-Marie. Enfin, Nicolas, qui travaille sur les finances et le budget. Et chaque sénateur, chaque sénatrice dispose de sa propre équipe.

Un peu plus de moyens, c’est aussi et surtout en terme de travail légi-saltif et de rapport de force politique. Plus de travail pour chacun et pour le groupe, mais enfin! Plus besoin de mendier un temps de pa-role, ou de négocier dans les couloirs. Nous avions la liberté d’expres-sion et la liberté de vote, nous avons la garantie de le montrer. C’était tout l’enjeu d’un groupe parlementaire indépendant.

Alors, il a fallu s’organiser. Jean-Vincent Placé à la Présidence, moi à la vice-présidence, Jean à la trésorie, Corinne au secrétariat. Intelli-gemment, nous avons constitué ensemble ce bureau. Une répartition équitable homme/femme, ancien/nouveau, Paris/province...

Nous nous réunissons toutes les semaines, juste avant la réunion heb-domadaire du groupe. Avec nos équipes, nous sommes une bonne quarantaine de personnes à travailler ensemble, dont presque une trentaine se retrouve au rendez-vous du groupe..

Et moi, “vétérante écolo de la maison” avec Jean, me voilà à changer de métier, avec un drôle de paquet cadeau : la présidence de la Com-mission Culture.

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Au sommaire

Me voilà changeant de métier

Verdir la Haute Assemblée - p 2 & 3• Un groupe écologiste au Sénat.• Changement de « métier ».• Mes tonnes carbone.• La biodiversité, premier débat.

Culture, un bien commun renouvelable - p 4 & 5• Débat budgétaire.• Les Scènes Nationales.• Les oeuvres orphelines.• Europe et financement de la culture.• Le sens et les outils.• rencontre avec... Mémoires Croisées.

Culture: faire lien avant de se faire voir - p 6• Capitales européennes de la culture.• EPCC, objet de désir.

Culture scientifique: la liberté de comprendre et de choisir - p 7• Une vraie place.• Une gouvernance incontestable.

vers une école épanouissante et émancipa-trice? - p 8 & 9• Luttes pour l’école.• Une militante pédagogue et formatrice de

la non violence au Sénat.• Carte Scolaire : mission d’information.• Le métier d’enseignant au cœur d’une am-

bition émancipatrice.• Merci à ... Olivier Masson.• Parole de... Magali Deval.

Communication Médias - p 10 & 11• Comment concilier liberté de l’internet et

rémunération des créateurs?• Médias: contre la concentration de la

presse.• rencontre avec... les lauréates du prix Al-

bert Londres.

Toujours garder de l’énergie... - p 12 & 13• Les travailleurs de l’amiante.• La Ligue Protectrice des Animaux.• Les Déboulonneurs.• Tindouf.• Survie, une association qui réveille l’éthique

de la France.• rencontre avec... La démocratie et Aung

San Suu Kyi

Sans oublier d’exercer tous ses droits parlemen-taires - p 14• Les prisons• Visite du Centre de Rétention Administra-

tive de Lesquin.• rencontre avec ... Salah Hamouri

En toute transparence - p 15• Mon budget de l’année.

En aparté - p 16• Vigilance...• Du pain sur la planche.• Election à la Présidence de commision

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vErdir LA hAutE ASSEMBléE

Page 3: Publication annuelle MC.Blandin

Changement de « métier »

Dans ce “PACS écolo-PS”, se cachait tout au fond une présidence de commission. Sans garantie sur le périmêtre et le pouvoir réel d’une commission Développement Durable, j’ai préféré la CCEC : la Commis-sion de la Culture, l’Education et la Communication, mais aussi la recherche, la vie associative et le sport. Une commission dont j’ai tout de suite mesuré l’ampleur chronophage. Ses champs de compétences sont innombrables, en évoloution permanente, tiraillés entre l’intérêt général et les lobbies des industries culturelles.

Présider une commission est certes, pour EELV, un honneur et une carte de visite, mais c’est à l’ensemble de la majorité de gauche que profite une bonne animation.

Y faire valoir l’écologie et nos valeurs s’invente chaque jour: transparence, partage de pouvoir, pro-motion de sujets oubliés, proposition de nouveaux critères d’action et d’audition d’acteurs habituelle-ment peu écoutés.

C’est ainsi que mon travail de parlementaire s’est complètement métamorphosé. Vite, vite, faire le deuil de savoirs acquis lors du précédent mandat. Adieu conflits d’intérêts, scandales sanitaires, contamina-tions, risque nucléaire.

J’aurais pu continuer, rester membre de l’OPECST, par exemple. Mais on ne peut demander l’éthique d’un côté et ne pas se l’appliquer à soi-même de l’autre.

Mes nouveaux collègues écologistes au Sénat se voient alors “hériter” de mes domaines précédents. Les passages de relais sont essentiels. La biodiversité revient à Joël Labbé et Ronan Dantec, les problèmes de l’amiante à Aline Archimbaud, l’OPECST à Corinne Bouchoux...

Mes tonnes carbone 2012 , très légères: ni Rio+20, ni JO.

Un mélange de convictions, de pragmatisme et de cir-constances a modéré mes déplacements.

Chaque commission permanente organise un voyage annuel (Chine, Argentine, Inde, Canada furent les pré-cédents...). Faute de pouvoir organiser cette année un voyage en Afrique Sahélienne (seul continent non visité par la CCEC), j’ai emmené ma commission à Londres en Eurostar. Au menu : médias et sports (JO obligent), sur le site sélectionné avec un budget prévisionnel de 2,2 millards d’euros. Il atteignait les 9 millards lors de notre visite en février, 13 milliards aujourd’hui...! Les leçons de la Grèce ne sont toujours pas tirées...Pourtant invitée à plusieurs reprises j’ai décidé de ne pas me rendre aux JO : pour cause d’agenda et de partena-riat avec Dow Chemical (souvenez-vous : l’agent orange, Bhopal, …). Je serais bien allée soutenir les Jeux para-lympiques : mais les moyens ne sont pas les mêmes, point d’invitation protocolaire.Rio, le sommet de la Terre, c’est tentant, mais place aux élus thématiques et aux acteurs de la société impliqués (Ronan Dantec y est allé, le Nord Pas de Calais y a envoyé une délégation composite remarquable). J’ai néanmoins eu le plaisir de participer à la conférence de presse de lancement de la Caravane des Paysans avec la fondation Edgard Morin... à Paris.

la biodiversité, premier débat du groupe.

Alors que certains répètent avec pertinence, que l’écologie ne se limite pas à l’environnement, je considère que ce thème fondateur doit rester un coeur de préoccu-pation visible pour les parlemen-taires. J’ai donc insisté pour que, symboliquement, notre tout pre-mier débat soit sur le sujet de la biodiversité.

Car il n’y aura pas de société juste et durable si l’humanité scie la branche sur laquelle elle est assise depuis plus de deux millions d’an-nées.

Religions monothéistes et scien-tistes ont beau nous gonfler de certitudes rassurantes, les êtres humains sont bels et bien dépen-dants du bon état des écosystèmes et c’est un devoir du politique que d’y veiller.

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vErdir LA hAutE ASSEMBléE

Page 4: Publication annuelle MC.Blandin

2012 : la culture en débats

A l’occasion de l’agenda électoral décisif pour notre pays, j’ai participé à un certain nombre de débats interrogeant la culture :

19 janvier : BIS de Nantes, “Politiques culturelles : quelle réforme, quels modèles pour demain?”

31 janvier : Cercle de l’éducation populaire : “promou-voir une politique de jeunesse et d’éducation populaire”

10 février : Oiseau Mouche : clôture du colloque “La création portée par des artistes singuliers : la diversité de l’épreuve de la perte de sens”.

16 février : Forum Livre Hebdo : “Quelles politiques pour le livre?”

27 mars : Scènes Nationales , “Quelles visions pour les arts de la Scène et la culture vivante?”

Débat budgétaire: derniers mauvais coups de la droite.

Le 18 novembre 2011, Nicolas Sarkozy (toujours Prési-dent de la République), prononçait lors du forum d’Avi-gnon, une phrase dont lui seul - ou ses “plumes” tou-jours avides de phrases choc - ont le secret... Cette fois ci, le chef de l’Etat nous annonçait que : “la culture est un investissement qui va nous permettre de sortir de la crise, et non une dépense qu’il faudrait couper”...

Résultat : 4 mois plus tard il amputait de nombreux cré-dits au secteur de la création.

Gel de 6% des crédits de la mission culture (soit 47 mil-lions d’euros), diminution de 11 millions des ressources de l’audiovisuel public, 11.2 pour le livre et les industries culturelles, augmentation de la TVA sur la billetterie de spectacles...Cette réduction des crédits a entraîné des conséquences graves pour les acteurs de la culture, notamment en termes d’emploi et de programmation, voire de pérennité de certaines structures.

le 24 juillet, au Sénat, nous avons voté le rétablisse-ment des crédits spoliés.

Au 104, les Scènes Nationales commentent les programmes des partis politiques.

Tous les programmes des candidats ont été passés au crible. Les accusations ont donné le ton. Selon l’anima-teur, la culture dans les programmes de la campagne présidentielle n’apparaitrait que comme “un supplément d’âme”. Quant aux politiques, hier écrivains ou haute-ment diplômés, ils ne brillaient pas par leur culture....

Je rongeais mon frein car le programme EELV, volet culture, faisait tout de même des propositions construc-tives. D’ailleurs un intervenant s’en rendit compte et cita quelques avancées... Persiflages... “on en reparlera quand ils seront élus”. Oui, on connait la chanson.

Après une (très) longue pause, dans laquelle tout le monde se congratulait, la table ronde des politiques a commencé. Le climat de la salle était assez hostile et méprisant pour la classe politique, absente dans le pre-mier atelier.

Seule présente dès le matin, on m’a demandé de réagir à ce que j’avais entendu: je les ai fait rire en disant que tous les maux dans leur bouche accusaient toujours les «hommes» politiques, et que, femme, j’étais donc tout à fait sereine...

En revanche, ni «lettrée» par de grandes humanités, et même pas Enarque, je me suis publiquement deman-dée si dans cette enceinte d’orateurs si intelligents, ma parole était recevable... J’ai tout de même porté les grandes lignes écologistes sur la culture : la coopération plutôt que la compétition, la culture de tous, avec de la démocratie qui s’appuie sur la diversité, une mission de service public... Cela fait quand même sens!

Le temps a été rare, pris en otage par des interventions trop longues. Il a fallu jouer des coudes pour placer une critique sur le Centre National de la Musique (CNM), et aussi sur les conflits d’intérêts et l’argent public donné au privé. Sur la démocratisation, j’ai rappelé la nécessité de partir de la culture de tous, et aussi celle d’apprendre par l’approche sensible, la rencontre des oeuvres et des artistes dès le plus jeune âge. Et encore celle de revoir l’audiovisuel, la publicité, le fonctionnement du CSA, et de donner des outils de désaliénation par l’éducation à l’image.

Etranges sensations pour cette journée... J’ai perçu une grande ingratitude pour notre travail quotidien et beso-gneux, celui qui défend pied à pied les moyens et l’auto-nomie des acteurs culturels.

Visiblement, leurs lunettes n’avaient de focale que sur le parti d’hier au pouvoir, l’UMP, et le parti espéré par beaucoup pour demain, le PS.

Ailleurs et hier, c’est aussi ici : «Mémoires Croisées»

J’ai participé au mois de mai 2012 à la rencontre «Mémoires croisées», organisée par le Président du Sénat Jean-Pierre Bel, la délégation sénatoriale à l’outre-mer ainsi que le comité pour la mémoire et l’histoire de l’esclavage. Comme le rappelait Benjamin Stora, universitaire, «seule la construction d’un récit national républicain est à même d’intégrer les mémoires blessées et de fermer les plaies». Cette passionnante journée a permis à de nombreuses personnalités d’apporter leur contribution au débat : sénateurs, historiens, anthropologues, artistes, acteurs culturels et associatifs ont entamé un processus de mise en commun des récits et des histoires jusqu’ici fragmentés.

J’ai pour ma part porté la parole des écologistes en insistant sur le fait que les politiques avaient besoin des chercheurs et que nous nous engageons à nous nourrir de leurs travaux dans nos décisions publiques. J’ai également rappelé le succès de «Mine de rien», pièce de Rachid Boudjedra (1995), témoignage de personnages déracinés , l’un dans les

rencontre avec....

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CulTuRE, uN BiEN COMMuN RENOuVElABlE

Page 5: Publication annuelle MC.Blandin

les oeuvres orphelines enfin reconnues!

En octobre 2010, je faisais adopter à l’unanimité, une proposi-tion de loi relative aux oeuvres visuelles orphelines. Cette pro-position de loi quelque peu appauvrie par la droite alors majo-ritaire à la Chambre haute, n’a malheureusement jamais été mise à l’ordre du jour de l’Assemblée Nationale. Malgré tout, une disposition me tenait particulièrement à coeur : la défi-nition dans le code de la propriété intellectuelle de “l’oeuvre orpheline”, c’est-à-dire d’une oeuvre dont les auteurs ou ses ayants droits ne peuvent être identifiés et donc en pratique, sans autorisation de l’auteur, la reproduction de l’oeuvre était impossible. A l’occasion de l’adoption d’une loi sur la numéri-sation des livres, le Sénat et l’Assemblée nationale ont intégré la définition de l’oeuvre orpheline dans le code de la propriété intellectuelle, comblant un vide juridique important. Ainsi, s’éloigne l’utilisation opportuniste de la mention «DR» et la spoliation des photographes par les éditeurs de presse.

Europe et financement de la culture

Nous avons pu constater que le droit communautaire consi-dère les opérateurs culturels de la même manière que les opérateurs économiques, et ce malgré la réaffirmation du ca-ractère spécifique de la culture par la convention de l’Unesco entrée en vigueur le 18 décembre 2006. Aussi, j’ai proposé à la commission de la culture, de l’éducation et de la commu-nication de créer un groupe de travail sur l’influence du droit communautaire sur le financement des services culturels.Le principe général prôné par la commission européenne est l’interdiction des aides publiques afin de protéger les échanges dans le marché intérieur et donc la concurrence. Cependant certaines peuvent être jugées compatibles sous certaines conditions. Vincent Eblé, sénateur, a rendu son rapport, consul-table sur le site du sénat, en proposant une feuille de route permettant de sortir par le haut de la situation d’inquiétude et d’exaspération rencontrée sur les territoires. Début juin, un courrier plutôt encourageant du cabinet de la commissaire européenne chargée des affaires culturelles Androulla Vas-siliou, nous informait de la possible modification par la com-mission européenne du règlement d’habilitation du Conseil. Cette modification aurait pour but de permettre à la commis-sion de déclarer certaines catégories d’aides (dont les aides à la culture), compatibles avec le marché intérieur. Une bonne nouvelle certes, mais la vigilance doit être de mise.

galeries du métro, l’autre dans les galeries d’une mine de charbon, la solidarité des autres en question. J’ai tenu à souligner l’importance de la culture. Orienter l’effort de la culture DE tous (et ce n’est pas assassiner Molière!) afin de participer à rendre justice et à faire société.J’ai été touchée par le témoignage de Lilian Thuram, qui grâce à sa fondation, va à la rencontre des enfants afin de débusquer le conditionnement insidieux : ni la couleur de peau, ni le genre, la nationalité ou la religion ne peuvent conditionner la qualité d’une personne. Il faut sortir des prisons identitaires qui voudraient que l’on raconte son his-toire par sa couleur. Lilian Thuram a dénoncé le discours ouvertement xénophobe qui se propage de plus en plus en France; lui dit ne pas avoir à coller à son groupe mais plutôt il se doit de lutter contre toute stigmatisation.J’ai promis de rencontrer à nouveau AXIOM, jeune artiste Nordiste et porte parole d’AC le feu! Il a exprimé avec clarté, dans le contexte actuel de (re)montée du racisme, le lien entre la relégation qui se vit actuellement dans les quartiers et les reléguations liées à l’histoire coloniale. Nous nous sommes entendus sur l’importance de reconnaitre la culture DE tous.

le sens et les outils

Un débat agite de nombreux acteurs de la musique, celui du projet de CNM, centre national de la musique. Une table ronde était d’ailleurs en Avignon organisée par Fu-turs Composés le lundi 9 juillet.Initialement présenté comme un dispositif de soutien à la création sur le modèle du CNC, centre national du cinéma, le CNM s’avère, par ses plus fervents supporters, et par les premières rédactions qui le préfigurent, surtout être une réponse à la baisse des profits des éditeurs de musique.Les majors bénéficient de 80% des revenus du secteurs, mais faute d’avoir anticipé la mutation numérique, ils ont encore faim.La comparaison avec le CNC est pourtant bancale: si le cinéma est vraiment une industrie culturelle, dans le do-maine de la musique, cohabitent des compositeurs, des interprètes, des orchestres et des choeurs subvention-nés, de nombreux passeurs publics du patrimoine et de la création, et les industries de la filière musicale.Le CNC trouve des moyens par des taxes appelant à contribution tous ceux qui véhiculent les contenus: bille-terie de cinéma, fournisseurs d’accès internet, diffuseurs de télévision, de DVD.Le CNM s’alimenterait de ce type de taxes, mais aussi de la rémunération pour copie privée, et des enveloppes que les sociétés de droits d’auteurs consacrent à l’aide à la création et à la diffusion.Présenté comme consensuel, le CNM est pourtant vive-ment décrié par un nombre significatif de réseaux qui craignent le démantélement du ministère, autant que le détournement des moyens en faveur des majors de l’édition phonographique. La concertation les a soigneu-sement évités.Quelques phrases de la préfiguration laissent d’ailleurs craindre qu’on est davantage sur une stratégie jacobine que sur une démarche vertueuse d’irrigation des terri-toires.Alors la vraie question n’est-elle pas de renverser l’ordre du débat, de dire la légitimité de l’intervention publique en matière de culture, de s’entendre sur le sens, et d’en définir quelques critères. la déclinaison des outils ne doit venir qu’après.Cette définition en amont nous rendrait d’ailleurs moins vulnérable vis-à-vis d’une Union Européenne qui exige la mise en concurrence de tout ce qui relève du marché.Pour ma part je rêve d’un consensus sur le soutien à ce qui fait émancipation et épanouissement, à ce qui contri-bue au développement social et culturel de chacun, à ces artistes, ces œuvres, ces projets ou ces structures qui, lorsqu’on les a rencontrés, rendent chacun plus lucide, plus capable d’exprimer ses émotions, plus apte à agir sur son destin, plus amateur de rencontrer les autres et de tisser des liens...Si tel était le cas, la petite formation qui ressucite le patri-moine breton et fait danser tout le village, le sextuor qui joue dans les prisons, ou le festival de jazz qui réunit pro-fessionnels et amateurs, français et étrangers, n’auraient pas à craindre la comparaison avec Lagardère. Ce n’est pas la taille qui rendrait éligible, c’est la pertinence.Et pour cela il faut un vrai ministère de la culture qui donne le LA, des collectivités qui ne se limitent pas à la course au rayonnement, la mise à contribution de tous ceux qui s’enrichissent sur la création.

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Rencontre avec William Klein lors de l’inauguration à la maison de la photo de Lille, à Fives.

©Laurent Mahieu

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cuLturE: FAirE LiEn AvAnt DE SE fAiRE VOiR.

Lille et Marseille-Provence, capitales européennes de la culture

J’ai été invitée à Marseille à participer à un débat sur les conséquences des “capitales européennes de la culture”. Après Lille en 2004, c’est le tour de Marseille de s’inscrire dans cette dynamique en 2013. L’idée du débat était de par-tir d’un bilan de l’expérience lilloise pour questionner le pro-jet marseillais. L’angle d’attaque choisi était celui des consé-quences durables de ce dispositif sur les villes, les acteurs et le pratiques culturelles.Ce fut l’occasion pour moi de rencontrer nombre d’acteurs culturels et de chercheurs de la métropole lilloise. Travail très dense et très riche, qui appelle des suites : le premier constat étant qu’hormis l’euphorie chronique qui accompagne l’évo-cation de Lille 2004 et ses petites soeurs “Lille3000” (festi-val culturel triannuel qui fait suite à l’année “capitale euro-péenne de la culture”), aucune évaluation, bilan, travail de recherche conséquent n’a permis d’en mesurer les effets sur le tissu culturel de la ville (et de la région).

Pourtant ce premier tour d’horizon a révélé des glissements à risque.

1. Du développement culturel à l’événementielCe type de travail, même s’il n’est pas incompatible avec cer-taines coproductions avec les habitants, ne participe pas de leur développement social et culturel - au sens d’acquérir prise sur le monde- dans la durée.

2. De la délibération à la gouvernance Public PrivéLe politique délègue et mandate à une structure ; le manda-taire (ici Lille 3000 dirigé par Didier Fusillier) n’a pas d’obliga-tion d’animer le débat démocratique: il dialogue avec qui il veut, comme il veut.Il n’y a pas d’évaluation.Depuis peu, Lille 3000 est désormais opérateur... pour Paris et l’animation des berges de Seine.La ville se félicite de cette compétence reconnue. Les élus écologistes depuis plusieurs années s’abstiennent de voter les subventions culturelles événementielles, car ils sont en demande d’une autre gouvernance, de type coopérative.

3. De l’oubli du sens et de l’Europe...de l’Europe... J’ai souhaité revisiter les textes fondateurs du dispositif: au fond la recherche du «rayonnement» est peut-être un but énoncé? Tant dans les textes fondateurs de 1985 (il s’agit alors de «rapprocher les citoyens de l’UE») que dans leurs évolutions, la dimension de citoyenneté européenne, la rencontre des peuples, sont prégnantes.A ce stade, je constate qu’aucun des artistes entendus pour préparer cette intervention n’a évoqué l’Europe, encore moins la diversité ou la citoyenneté européenne.

du sens... « le projet doit faire partie intégrante du dévelop-pement social et culturel» (article 4 de la décision de la Com-mission) :Cette phrase interroge l’articulation entre la politique cultu-relle locale préexistante, et la programmation de Lille 3000. Elle lie intimement social et culture.

Un travail avec les Roms et les lillois aurait pu prendre plus de place que celle dévouée au sein d’Europe XXL...(et des polé-miques sur les expulsions à l’approche des festivités), d’au-tant plus que ce peuple a la particularité d’être européen, avec moins de droits que les ... Européens.

Dans les discours des initiateurs de Lille 2004, on trouve plu-sieurs affirmations, comme : «recréer du lien social», mais aussi, « on a gagné dix à quinze ans de notoriété en une an-née avec Lille 2004» et «pour un euro investi, c’est cinq euros de recettes».

Certains ont fustigé l’orientation donnée par les acteurs économiques, la mise en compétition des cités entre elles, l’unique course à la renommée.

Au moins Marseille et lille auront-elles eu la chance de voir cette course se jouer avec le thème de la culture, même si ce n’est pas celle que l’on préfère. C’est quand même mieux que l’America’s cup, convoitée par Marseille, ou n’importe quelle foire commerciale ou rassemblement mondial des quatre quatre, ou rencontre internationale des traders!

EPCC, objet de désir plutôt qu’opportunité de statut.

L’EPCC est un « établissement public de coopération cultu-relle» statut, inventé par un sénateur du Nord, Ivan Renar. Une loi votée en 2002, instaure un cadre juridique nouveau dans le domaine culturel, l’établissement public de coopéra-tion culturelle (EPCC) organisant, dans le cadre de la décen-tralisation et de la logique du co-financement, le partenariat entre l’État et les collectivités territoriales, ou seulement entre ces dernières pour la gestion d’équipements culturels structurantsDix ans après le vote de la loi, on compte près de 70 EPCC en France, et afin d’évaluer le fonctionnement de cet outil, des membres du comité de liaison ont été auditionnés devant la commission de la culture du Sénat.Cette audition a donné lieu à un record d’affluence, car beau-coup de parlementaires sont aussi élus locaux: les rares 32 présents remplissent presque complètement la salle, cette dernière disposant de 40 places, alors que l’effectif total de la commission est de 56 membres!Les premières conclusions montrent que cela fonctionne, quand la structure devient le lieu convergent d’engagements locaux sur un même projet. Le statut permet de croiser des ressources humaines d’origines différentes : contractuels, fonctionnaires, détachés. Tous les secteurs de la culture peuvent l’utiliser. Et fort heureusement, c’est un prolonge-ment de l’action publique sur lequel l’Union Européenne ne trouve rien à redire.Les futures lois sur les collectivités seront une occasion d’améliorer le dispositif, au vu de l’expérience: rallonger le mandat du directeur (3 ans c’est un peu court), débattre de la taxe imposée aux salaires, alors que ce n’est pas le cas dans une collectivité, voir les liens possibles avec les inter-communalités, ou avec l’Institut français, qui agit à l’étran-ger. Il faudrait même explorer la possibilité que permet la maîtrise d’ouvrage, à savoir pouvoir récupérer, la TVA, comme le font les collectivités. Clairement, les EPCC sont de formidables outils de décentralisation.Dans le Nord Pas-de-Calais nous comptons entre autres La condition publique à Roubaix, Le Musée du Louvre à Lens, l’Opéra de Lille ainsi que la Coupole, centre d’histoire et de mémoire du Nord Pas-de-Calais. Vous pouvez trouver plus d’informations sur le site du comité national de liaison des EPCC : http://www.culture-epcc.fr/

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cuLturE SciEntiFiquE: LA liBERTé DE COMPRENDRE ET

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Le souffle du début des années 80 s’est perdu dans les couloirs des ministères. La responsabilité éclatée d’une politique est tou-jours facteur de risques : culture, éducation, recherche, industrie, loin d’unir leurs efforts se sont défaussés sur le voisin. La même esquive est à l’oeuvre entre l’État et les collectivités. Celles-ci, aux prises avec leurs restrictions budgétaires, ne se mobilisent pas, lasses de voir l’État renoncer à ses responsabilités.

Les chercheurs vertueux et pédagogues sont découragés par l’environnement compétitif exacerbé : sommés de publier, de breveter, d’être retenus dans des appels à projets, ils voient leur ouverture sur la société les pénaliser, du simple fait du temps «distrait» pour cette mission.

La fin de la ligne budgétaire de la culture scientifique du minis-tère de la recherche, au profit d’une externalisation à risque vers Universcience, à la fois établissement bicéphale parisien, et agence de financement pour le reste du pays, a donné l’estocade finale.

Imaginerait-on de confier à l’Odéon tout le budget du spectacle vivant, libre à lui de le répartir, après avoir prélevé son propre financement?

De plus, la fusion déséquilibrée du Palais de la Découverte et de la Cité des Sciences reste culturellement douloureuse : le pre-mier en fait les frais, perdant son comité scientifique, se sentant tiraillé vers la culture spectacle, et menacé dans ses espaces convoités du fait des appétits du Grand Palais. Sur le terrain, reste un champs de ruines, associations privées de subventions, licen-ciement de permanents, découragement de bénévoles. Dans des espaces, hier scientifiques et citoyens, s’engouffrent des spon-sors aux expositions partiales et partielles, prompts à occuper, pour leur propagande, le vide laissé par la sphère publique.

Le partage de la culture scientifique est pourtant une question de démocratie. Chacun doit pouvoir participer au débat public avec compétence, avoir les outils de compréhension et d’arbi-trage.

L’envahissement de la publicité et de ses mensonges, le char-latanisme moderne, depuis les horoscopes dans les quotidiens jusqu’aux prédictions par sms, les peurs irraisonnées nourries d’obscurantisme, ou les consentements irresponsables à des produits à risque, appellent ce gouvernement de progrès et de changement à un sursaut démocratique.

Un pilotage politique qui permette de retrouver le sens de la culture scientifique, qui promeuve la compréhension et le débat pluridisciplinaire sur les enjeux de notre monde est nécessaire-ment un pilotage interministériel, garant de cette mission de ser-vice public.

Mais l’État seul ne peut relever les enjeux de la culture scien-tifique. Les acteurs primordiaux que sont les collectivités ter-ritoriales et les associations, dans toute leur diversité, doivent pouvoir contribuer à ce défi. L’outil pourrait en être un commis-sariat ou une Agence de la culture scientifique rassemblant les partenaires. Le ministère chargé de l’éducation populaire y aurait sa place! L’essentiel est la visibilité du budget dédié, la recon-naissance de tous les acteurs, y compris les nomades, et une sérieuse volonté politique de partage et d’échange de la connais-sance des sciences et des techniques.

Culture scientifique : une gouvernance contestable

En 2009 se met en place une nouvelle gouvernance de la culture scientifique, qui échappe au ministère.

décret du 04/12/2009 : Universcience (issu de la fu-sion problématique du Palais de la Découverte et du Palais des sciences) devient “pôle national de réfé-rence” pour la CSTI

2010-2011 : réflexions pilotées par Universcience sur l’état des lieux et la gouvernance à mettre en place

Les instances de gouvernance en cours d’installation:

Conseil National de la Culture Scientifique (CNCS, dont la première réunion a eu lieu le 6 mars 2012). Sa mission est d’éclairer le gouvernement en matière de politique nationale de la CSTI. Il est présidé par Claudie Haigneré, présidente d’Universcience. J’en suis membre, mais pour cause d’agenda, mes contri-butions sont jusqu’ici épistolaires.

Dans chaque région, des Pôles Territoriaux de Réfé-rences (PTR) sont désignés (en cours). Tantôt établis-sements (reproduisant le travers d’Universcience), tantôt réseaux régionaux, ces pôles sont pour l’ins-tant d’une grande hétérogénéité.

Des commissions thématiques (CT, constituées sur proposition d’Universcience ou du CNCS) alimente-ront la réflexion aux niveaux national et territorial.

Un comité opérationnel assurera le lien entre les PTR et les CT d’une part et entre le CNCS et Universcience d’autre part.

La composition de ces instances ne fait pas l’unanimi-té dans le milieu de la CSTI, les nombreuses associa-tions d’éducation populaire, au contact d’un public nombreux et varié, s’en sentent notamment exclues. Il est urgent de travailler en réseaux et de mieux tenir compte des initiatives issues des territoires.

une vraie place pour la culture scientifique

Alors que nous utilisons des innovations tech-nologiques de plus en plus sophistiquées, alors que certaines applications mériteraient précaution et interrogation, les pouvoirs pu-blics ont tourné le dos à leurs engagements passés, et négligé de façon coupable le par-tage de la culture scientifique.

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luttes pour l’école.

Lors du débat budgétaire fin 2011, le mi-nistre de l’éducation d’alors, Luc Chatel, vantait sa sinistre comptabilité, par les éco-nomies réalisées à grands coups de suppres-sions de postes.Sur le terrain, des écoles, des équipes en-seignantes, des parents d’élèves se mobi-lisaient, luttaient. J’ai reçu de nombreuses sollicitations, souvent transmises aux mili-tants et élus locaux. Par courrier, j’ai plaidé les situations criantes et j’ai répondu pré-sente aux mobilisations à chaque fois que mon agenda me l’a permis, quitte à le tordre un peu.Lors d’un rassemblement, j’ai rencontré les parents d’élèves de l’école Aicard, à Lille, dans le quartier du faubourg de Béthune. Aux cotés de Lise Daleux, élue à la petite enfance à Lille, j’ai constaté l’immense fossé entre le discours ministériel qui tentait de nous faire croire que les écoles des quar-tiers en difficulté seraient épargnés, et la réalité de terrain, constatée, où des mamans étaient chaussées de simples sandalettes, par - 6°C !La situation de cette école, qui a perdu une classe, est aussi symptomatique des déci-sions de l’administration qui ne prennent pas en compte les politiques menées par les collectivités territoriales. Ces collecti-vités qui ont la charge des bâtiments et du périscolaire sont étranglées entre les réelles nécessités et les décisions lapidaires et ina-daptées.

Mais dans ce domaine, le cas d’école a été la lutte au lycée Van Der Meersch de Roubaix. Le rectorat avait des velléités de fermeture progressive. La mobilisation des équipes enseignantes, des parents d’élèves, des col-lectivités comme le Conseil Régional par la Vice-présidente Europe Ecologie Les Verts, roubaisienne, Majdouline Sbaï a fait recu-ler les décisions administratives. Les inves-tissements de rénovation de la cité scolaire à laquelle ce lycée appartient et les projets de renouvellement urbain alentours étaient menés consciencieusement par la ville, le Conseil général du Nord et le Conseil régio-nal du Nord Pas de Calais. Ils ont eu gain de cause.

A Outreau, j’ai rencontré une délégation de professeurs du lycée professionnel P. Clerc. La baisse des moyens conjuguée à la réforme du bac professionnel les frappaient de plein fouet. Les projets étaient désastreux : pour un lycée qui venait de perdre 21 postes en 5 ans, ils allaient perdre 6 postes enseignants à la rentrée de septembre 2012... pour une réduction d’effectifs de 10 élèves!

… Puis vint “le changement” et les pre-mières mesures pour compenser les coupes franches que l’enseignement scolaire avait subi. En juin, le ministre Peillon annonce 1000 créations de postes pour le premier degré dès la rentrée 2012 ; puis le projet de loi de finance rectificative (étudiée en juil-let par les parlementaires) budgette 6000 postes dans le secondaire. Dans le Nord, sur les 18 postes créés affectés dès juin (premier degré), 7 sont des affectations nouvelles, tandis que 11 (dont 2 postes RASED) sont des abandon de suppression. L’école Aicard n’en bénéficie pas.

une militante pédagogue et formatrice de la non violence au Sénat

Par désir d’ouvrir le Sénat à d’autres acteurs que les habituels institutionnels, j’ai invité Elisabeth Maheu-Vaillant, dans le cadre d’une audition “Comment on peut prévenir et gérer la violence à l’école”.

Elle est membre du Mouvement pour une Alternative Non-violente, péda-gogue de formation initiale et de formation continue. Le MAN participe à une coordination qui soutient le projet de Proposition de Loi de Jean-Pierre Sueur, relative à l’éducation à la résolution non-violente des conflits.

Il y a tellement à faire sur la formation des enseignants. Travailler sur la vie commune, la prise de parole. Elisabeth Maheu-Vaillant explique que ses in-terventions se font en stages, sur inscription individuelle et volontaire d’en-seignants et autres personnels. Malheureusement ils reviennent ensuite dans leur établissement face à des gens qui, eux, n’ont pas bougé.

Il serait préférable de travailler sur des équipes d’une quinzaine d’enseignants, sur place. Elle se trouve souvent confrontée au problème du manque de temps pour le travail d’équipe. Cela interpelle la problématique des rythmes scolaires, qui ne saurait se limiter à la découpe des temps d’enseignement.

Certes, en formation initiale, un enseignant suit des cours de psychopédago-gie, de psychologie, mais il ne bénéficie que de très peu d’exercice pratique. Les enseignants doivent anticiper les montées d’émotion et donc la régula-tion de la parole.

Il faut se rappeler que si un lycée tient, c’est parce que les élèves adolescents sont consentants.

Les chartes d’établissements ont été trop banalisées. Elles devraient clarifier la loi, le règlement local co-élaboré, les règles de vie de tel ou tel lieu et le non négociable. Après, on explore les marges de manœuvre de chacun.

La diminution des moyens de la formation continue ont gravement affecté la pédagogie de la prévention des conflits, qui demande du temps et des exer-cices pratiques.

Au moins faudrait-il un module, juste avant rentrée, pour aider les jeunes professeurs arrivants.

Après ces éclairages, ma commission veillera à la bonne fin des propositions du MAN reprises dans un projet de Proposition de Loi de Jean-Pierre Sueur, en instance, qui n’est pas encore inscrit par son groupe à l’ordre du jour. Si un parlementaire peut déposer un beau texte... encore faut-il que son groupe en fasse réellement un enjeu.

Au moins essaierons-nous de faire vivre ces idées dans la loi Peillon pour l’école.

Olivier Masson.

Militant infatigable de l’éducation, il a été la plume des contenus du programme, la cheville ouvrière de la Convention de Lille, la garantie de la qualité de la pa-role EELV aux assises de la pédagogie, organisées par le CRAP, à la rencontre avec les directeurs d’IUFM. Au-jourd’hui vigilant sur les intentions du Ministre Peillon, il nous exorte tous à réclamer plus de transversalité, plus d’ouverture, plus d’attention aux expériences pé-dagogiques innovantes.

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Devant l’école Aicard, lors du rassemblement de cet hiver 2011-2012 ©Nourc

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Carte Scolaire : mission d’information.

La carte scolaire était, au départ, un simple outil ayant vocation à répartir de façon équilibrée, les élèves dans les établissements, avec un objectif clairement affiché de mixité sociale.

Nicolas Sarkozy avait promis de la supprimer lors de son élection en 2007. Il s’est contenté de “l’assouplir”, arguant une lutte contre la guettoïsation.

La mission d’information sénatoriale a donc eu pour but d’étudier les recherches menées durant le mandat présidentiel de Sarkozy. Ces recherches, diligentées par des experts, ont permis de croiser les données relevées partout en France, dans les territoires. Dégageant ainsi l’accroissement des inégalités scolaires, pourtant déjà bien marquées, avec cet assouplissement de carte sco-laire.

En synthétisant, les écarts sont tels, du milieu urbain au milieu rural, des grandes agglomérations aux villes moyennes, des zones prioritaires aux quartiers favori-sés, du public au privé, qu’il devient urgent d’arrêter le processus de casse de l’éducation, et y rétablir la justice et la politique de mixité sociale …

Ce rapport bouscule les habitudes: au privé de parti-ciper à l’exécution de critères sociaux du public, aux territoires de s’organiser autour de quelques établisse-ments, ce qui donne de la souplesse aux parents, aux autorités le courage de ne plus fermer les yeux sur les demandes opportunistes d’options...http://blogs.senat.fr/carte-scolaire/

Je suis une enfant de l'école de la République. De nos jours, cela ne veut plus dire grand-chose parce qu'à coup de suppressions de postes, de baisses des subven-tions, d'augmentations des effectifs dans les classes, nous en avons perdu le sens : une école ouverte à tous et où tout le monde peut réussir, quel que soit son milieu social et son niveau scolaire, une école ouverte sur le monde, où les enseignants ont le temps et les moyens de réaliser des projets d'établissement, une école qui forme des citoyens, pas des moutons.

L'école d'aujourd'hui ne va qu'à une seule vitesse, celle des meilleurs, alors que chaque élève devrait pouvoir avancer à son rythme, selon ses capacités, ses centres d'intérêts.A l'école d'aujourd'hui, on enseigne la technique de la lecture, mais pas que lire, c'est s'évader, découvrir le monde, voyager, apprendre.A l'école d'aujourd'hui, on n'enseigne plus l'anglais en chantant, en jouant, en communiquant, on apprend déjà à écrire, à faire des phrases parce que l'anglais, c'est sérieux.A l'école d'aujourd'hui, on a des élèves qui disent "J'suis nul." et qui baissent les bras.

Je rêve d'une école où on a le temps et les moyens de chercher avec l'élève en quoi il est bon et de partir de là pour qu'il progresse en tout.Je rêve d'une école où l'on a à nouveau des enseignants qui ont le temps et les moyens de déceler les problèmes éventuels avant qu'ils ne se présentent et des Réseaux d'Aides Spécialisées aux Elèves en Difficulté (RASED) avec des psychologues, des maîtres E (psychopédago-gues) et des maîtres G (rééducateurs) bien formés et en nombre suffisant pour qu'ils puissent travailler dans de bonnes conditions avec les élèves pour les aider à avancer. Parce que parfois, il suffit d'un tout petit rien...Je rêve d'une école où l'on apprend en s'amusant parce qu'on aura bien le temps d'apprendre en s'énervant quand on sera grand.Je rêve d'une école qui fait la part belle à la peinture, à la musique, au chant, au théâtre, à la poésie, au sport, aux jeux parce que ce sont des moyens d'apprendre la géométrie, la grammaire, les règles et par dessus tout la confiance en soi et en les autres, indispensables pour bien grandir et avoir l'esprit libre pour profiter des en-seignements plus scolaires.Je rêve d'une école où l'on forme des citoyens, où l'on apprend aux élèves à réfléchir, à avoir des opinions personnelles, à comprendre la société et le monde dans lequel ils vivent, à être acteurs de leur vie et pas consommateurs.Je rêve d'une école qui part du postulat que chaque élève est capable et qui a le temps de lui redonner confiance et de le laisser progresser à son rythme.

L'école doit être un lieu où l'enfant s'épanouit, se déve-loppe, apprend à devenir à grand et pas seulement à lire, écrire et compter, à être évalué, classé, poussé ou dénigré. Parce que c'est en ouvrant des écoles qu'on fermera des prisons, je compte sur le nouveau ministre de l'éducation, sur les députés et les sénateurs qui se saisiront de cette question pour remettre à plat le sys-tème éducatif dans son ensemble, et pas seulement les rythmes scolaires, et pour replacer l'enfant à la place qu'il n'aurait jamais dû quitter : au centre.

Magali deval,Ancienne enseignante d’anglais et assistante familiale

le métier d’enseignant au cœur d’une ambition émancipatrice

Au sein de la CCEC, j’ai mis en place une mission d’infor-mation sur le métier d’enseignant, dont la rapporteure était Brigitte Gonthier Maurin (groupe communiste républicain et citoyen). Le rapport, intéressant, est dis-ponible sur le site du Sénat (Rapport d’information n° 601 (2011-2012) déposé le 19 juin 2012). Il commence par un bon diagnostic de la souffrance au travail. Pour ma part, je pense qu’il faut aider les enfants à acquérir les compétences narratives, à communiquer entre eux, à partager leur vécu : n’oublions pas qu’ils devront faire société demain ! Ouvrons la porte aux pédagogies plus attentives aux dialogues et au vivre-ensemble ; je songe aux écoles Freinet, par exemple.

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Conférence de presse avec Françoise Carton, Présidente de la mission ©Sénat

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Extrait de l’introduction de la table ronde par Marie Blandin.

«On a entendu au Forum d’Avignon en novembre 2011, que « la propriété intellectuelle est un concept de plus en plus volatile ».

Notre commission n’a pas l’intention de la laisser s’évaporer!

Il nous faut aujourd’hui prendre de la hauteur, et poser sérieusement les bases du cadre public que nous voulons donner aux pratiques liées à l’évolution des supports de communication et d’échange.

Notre priorité, c’est la culture, la création, les savoirs, leur production, leurs échanges.

Universitaires et artistes, militants et chercheurs, tous mesurent aujourd’hui la formidable contribu-tion des outils numériques et de la toile à la résolution des enjeux d’aujourd’hui et de demain, ainsi que leur aspect collaboratif, voire solidaire.

Dans le journal Le Monde du 3 janvier 2012 des intellectuels avertis (les GRECs – Groupes d’études et de recherches sur la culture) faisaient proposition de transformer HADOPI en compteur des flux pour calculer les droits des artistes. Lors de sa venue à Paris, Richard Stallman défendait le « Mécénat global »

La traduction par trop simplifiée devenait vite une redistribution d’une partie des fonds recueillis «selon la popularité des œuvres »

Personnellement je ne m’accommode pas que l’identification des «plus populaires» mette au pain sec les œuvres qui mettent plus de temps à se faire connaître, ou qui rencontrent un public plus étroit.

La diversité culturelle ne doit pas être un vain mot, et il est du devoir des pouvoirs publics d’en garan-tir la richesse.

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COMMuNiCATiON MEdiAS

Comment concilier liberté de l’internet et rémunération des créateurs ?

A la fin du mandat précédent, la commission de la culture avait organisé une table ronde sur les conditions du développement de la création de contenus culturels à l’heure du numérique.J’ai voulu que la commission approfondisse les réflexions, en organisant en janvier 2012 une table ronde, alors que les défis de la deuxième révolution numérique se précisent, de même que l’urgence à les relever.Avec comme question centrale : Comment garantir la rémunération des créateurs sans brider échanges et créativité sur internet?Un défi : mettre autour de la table des acteurs de différents horizons, sans se contenter a priori des représentants des instances officielles du type HADOPI... et ainsi donner à voir aux Sénateurs des initiatives coopératives.

La matinée était organisée en trois temps : - tout d’abord, un état des lieux de la protection du droit d’auteur sur Internet et des réponses juridiques actuellement mises en œuvre, ou envisagées, en France, en Europe et aux Etats-Unis ;- le deuxième temps était consacré à une évaluation de l’efficacité de ces réponses. Nous avons entendu tant la présidente de l’Hadopi que les détracteurs de la loi, puis les ayants-droit ;- enfin, nous avons tournés nos regards vers l’avenir. Les mutations en cours doivent nous permettre à la fois de créer les opportunités d’accroître l’accès de tous aux productions culturelles et de trouver les moyens pérennes d’améliorer la transparence et l’équité du financement de la création.

Les nouvelles technologies elles-mêmes pourraient y contribuer. Surtout, de nouvelles sources de financement sont encore à imaginer et à mettre en œuvre.

Cette table ronde était ouverte à la presse et aux professionnels concernés. Elle a fait l’objet d’un “rapport d’information” consultable sur le site Internet du Sénat

(rapport n° 478 (2011-2012) - publié le 20 mars 2012).

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rencontre avec....Prix Albert londres

Au Palais du Luxembourg, le prix Albert Londres a été remis en mai 2012, comme tous les ans, à la date anniversaire de la mort du grand reporter de la presse écrite. Il a été décerné à deux jeunes femmes pour leur reportage “Zambie, à qui profite le cuivre” sur le détournement d'argent européen: de l'aide au développement en Zambie arrivait dans la poche de Glencore, propriétaire de Metaleurop, et exploitant de cuivre en Zambie avec une technique très polluante à l'acide. La majorité de cet argent allait dans les paradis fiscaux.

Ce reportage a eu des conséquences: l'Union Européenne a engagé un moratoire sur le versement d'aide au développement via ce type d'industrie, Glencore a été sommé par la Zambie de rendre l'argent, et de cesser la méthode à l'acide. Les élections en Zam-bie ont été en faveur de celui qui a mené ce combat pour la santé des travailleurs, la préservation de l'environnement, la bonne utilisation de l'argent public. C'est aussi cela l'écologie...

(Prix de la presse écrite : Alfred de Montesquiou pour Paris Match. Prix audiovisuel : Audrey Gallet et Alice Odiot pour Zambie à qui profite le crime? Produit par Yami2 et diffusé sur France 5 le 31 mai 2011.)

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COMMuNiCATiON MEdiAS

Médias : contre la concentration de la presse

Alors qu’en Hongrie s’est installée une Commission de contrôle des médias composée de membres du parti du chef d’État en place, avec droit de perquisition des rédactions, la France échappe à ces dispositions dignes d’un autre temps, parce qu’elle a su se pro-téger grâce à de nombreux textes fondateurs pour la liberté de la presse depuis 1881 et évoluer avec l’Histoire, par exemple avec la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

Néanmoins les journalistes du SNJ, s’ils se félicitent de l’article 34 de la Constitution, qui place « le pluralisme et l’indépendance des médias » dans le domaine de la loi, s’interrogent sur l’application réelle de ces dispositions en période de concentration des médias.

Dans nos régions, les rachats de titres de presse aboutissent à des concentrations.Ces concentrations sont, dit-on, justifiées par une mutualisation des moyens : direction, ressources humaines, impression. Au passage, cela fait des chômeurs en plus.

Ces concentrations laissent au journaliste la liberté d’exercer la clause de conscience. Fort bien ! Mais, en termes crus, cela signifie: «Si cela ne te plaît pas, tu prends tes affaires et tu t’en vas !» C’est comme à l’usine au XIXe siècle !

Il devient urgent de garantir l’autonomie des rédactions face aux actionnaires et, pour le citoyen, la transparence (l’inscription dans l’ours du nom des actionnaires détenant plus de 10 % du capital serait un minimum).Nous avons plus confiance dans la déontologie des journalistes que dans celle des actionnaires et de ceux qui les servent, qui confondent souvent informations et intérêts de leurs annonceurs.

Les rédactions ont besoin de gages ; elles sont tiraillées entre leur déontologie et les pressions du marché. C’est pour cela qu’il revient au législateur de tout mettre en œuvre pour garantir la qualité de l’information dans une démocratie.

- Un article sur la crise bancaire sera-t-il traité de façon indépendante si l’un des actionnaires est une banque ? - Un article critique sur les agro-carburants passera-t-il sous le pilotage de Bolloré, qui a fait fortune avec ses plantations de pal-miers à huile en Afrique ? - Et comment expliquer une telle promotion de la voiture électrique dans tous ses titres ? Ce ne sont pourtant pas ses journalistes qui fabriquent les batteries de deuxième génération ! Ce serait plus clair pour le lecteur de savoir qui édite Direct Soir !

Les mutations à l’œuvre ne doivent pas être l’occasion d’éroder les droits des journalistes. Lors de l’examen de la loi HADOPI on a pourtant vu un sous-amendement Kert tendant à modifier, au profit des patrons de presse, le code du travail et à dénaturer l’usage de la propriété intellectuelle. Ce sous-amendement visait à livrer inconditionnellement tous les écrits d’un journaliste et les images qu’il détient à l’ensemble des titres et supports du même groupe ! A l’heure de la concentration, c’était la remise en cause du statut du journaliste de 1935 !

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Les travailleurs de l’amiante.

Cette année a été particulière sur le plan de la lutte contre l’amiante... et pour le droit de ses victimes.En septembre, la cour d’appel de Douai jugeait une requête du FIVA (fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante), qui s’appuyant -au-delà de la lettre- sur un arrêt de la cour de cassation, remettait en cause le calcul des sommes dûes aux victimes de l’amiante. En octobre la décision tombe et 17 victimes de l’amiante sont condamnées à rembourser des sommes perçues et dépensées... La cours d’appel de Douai déjuge ce qu’elle avait jadis accordé, jetant des familles déjà touchées sur le plan sanitaire dans une précarité accrue. C’est un scandale, et c’est le début d’une série de jugements qui vont s’égrèner tout au long de l’année et qui, à terme, peuvent concer-ner plus de 300 personnes en Nord Pas de Calais. La mobilisation autour des associations de victimes ne faiblit pas. Courriers et questions au ministre du travail (tutelle du FIVA) ne cessent de dénoncer que le FIVA s’attaque aux vicitmes plutôt qu’aux empoisonneurs et de demander à ce que le FIVA renonce à ces poursuites indignes. Aline Archimbaud, qui, désormais, suit les questions de santé-environne-ment au Sénat pour les écologistes, y participe activement, notamment avec le portage d’une motion parlementaire envoyée au ministre Xavier Bertrand. Avec le “changement” de majorité et l’arrivée de Marisol Touraine au gouvernement, il semblerait qu’on aille vers un apaisement de la situation.

Mais cette année a aussi été marquée par des actualités et des revirements sur le plan pénal. Plus de 13 ans après le premier dépôt de plainte, aucun procès pénal n’a encore eu lieu. Une décision de la Cour d’appel de Paris, en décembre 2011, venait annuler la mise en examen d’Eternit et de 5 de ses responsables... En Italie, le procès a bien eu lieu et en février tout le monde saluait la condamnation historique d’Eternit ! En juin 2012, la cour de cassation a cassé et annulé la décision de la cour d’appel, laissant à nouveau ouvert l’espoir d’un procès au pénal... Pour autant que les moyens en soient donnés à la justice! Une autre procédure est porteuse d’espoir : des res-ponsables du Comité Permanent Amiante (véritable outil de lobbyisme ayant contribué au retardement de l’interdiction) ont été mis en examen au mois de janvier dernier.

Les dangers de l’amiante ne sont pas derrière nous. Aujourd’hui l’enjeu de sécurité est primordial : les conditions de désamiantage et de traitement des déchets amiantés ne garantissent pas, en l’état actuel des réglementations et pratiques, de prévenir tout risque sanitaire pour les professionnels qui en ont la charge, et pour les occupants et voisins des bâtiments. L’enjeu est énorme, au vu des désamiantages qui sont à programmer. Luc Baillet, architecte et président du résoA+ (réseau de professionnels de l’amiante) avec qui je travaille en relation étroite... depuis les premiers désamiantages de lycées en Région Nord Pas de Calais (lancés avant que la loi n’interdise l’amiante en 1997), continue de nous apporter son expertise et ses alertes sur les manquements des procédures de diagnostic et les conditions de désamiantage. Avec Aline Archimbaud, nous l’avons mis en relation avec le cabinet de Cécile Duflot : ministre du logement, elle est concernée en premier chef par ce drame de l’amiante qui continue...

la ligue Protectrice des Animaux

Comme chaque année je reçois le bilan de la LPA. Cette fois-ci il est assez alarmant sur les conditions dans lesquelles l’association travaille sur la métropole lilloise. Je n’ai pas de mandat local, et n’ai pas de marges de manœuvres pour améliorer directement la situation. Néanmoins, rencontrer cette association qui assure de manière intelligente (parce qu’elle la couple avec celle de refuge et un travail de prévention important) la mission de fourrière pour les collectivités locales me per-met d’en comprendre de manière plus précise les difficultés. C’est toujours utile au législateur ! (et non, il n’y a pas besoin de cumuler les mandats pour “être sur le terrain”).Accompagnée de Cyrille Pradal et Pierre-Jocelyn Huyge (élus EELV respectivement à Lille et Villeneuve d’Ascq), je me suis rendue au refuge-fourrière de Roubaix où une équipe de bénévoles et de salariés nous ont accueillis et présenté les problé-matiques suivantes :- l’intérêt de développer des missions connexes à l’exercice de la compétence légale de fourrière, du type soin à la faune sauvage métropolitaine, zoothérapie, éducation au respect de la vie animale. La demande sociale existe, et ce n’est que reconnaître au monde animal son rôle de contributeur à la qualité de vie et de la ville.- la place, dans la ville, d’un tel équipement (le refuge de Roubaix est situé dans la zone de l’Union, grand site de renouvellement urbain entre Roubaix, Tourcoing et Wattrelos, il est donc voué à disparaître au bénéfice de la mutation de la ville): comment concilier le besoin d’accessibilité et de centralité avec les contraintes de voisinage et autres obligations légales d’éloignement d’établissement accueillant des animaux ?- l’importance de la prise de compétence “fourrière” par la communauté urbaine pour sortir d’une situation de prise en charge en dépit de la réalité des territoires (multiplication des interlocuteurs entre communes isolées et SIVU)... et de la diva-gation des animaux (cette prise de compétence est à l’étude suite à la demande des élus communautaires EELV).

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ET AuSSi: TOuJOuRS gArdEr dE L’énErgiE

POuR...

Les déboulonneurs, activistes salvateurs de nos espaces libres

de cerveaux...

Leur mission : barbouiller gentillement les pol-lutions visuelles de la publicité, présente des abribus aux murs de la ville, occupant un espace visuel indécent. Actes illégaux. Oui. Mais d’uti-lité publique. Cela s’appelle la désobéissance civile.

Les techniques publicitaires servent explicite-ment à influer et à modifier nos comportements. La publicité est un danger pour l’intérêt général. Elle exploite les vulnérabilités humaines en vé-hiculant des messages discriminatoires, faisant l’apanage du futile, de l’inutile et du gaspillage. Pis que cela, elle avilit, anihile, anéanti tout libre arbitre. “Elle favorise l’emprise pulsionnelle au détriment de l’exercice de la raison. Elle contri-bue au mélange permanent des genres et des discours qui est contraire au développement de l’intelligence. Elle entretient la confusion entre les faits et les opinions”, comme le dit très juste-ment Philippe Meirieu.

«Il serait inique que des barbouilleurs animés par un esprit civique de dépollution des images soient poursuivis et condamnés, alors que tant d’ignominies dues à la recherche du profit maxi-mum sont tolérées.» Edgar Morin.

J’avais témoigné, au procès, décrivant les pres-sions des lobbies pour minorer les choix du par-lement, et constaté le rôle d’utilité publique des déboulonneurs, plus fidèles au débat démocra-tique que les renoncements successifs des pou-voirs publics. J’avais dit l’état de l’opinion, l’état des convictions des sénateurs, droite et gauche confondues, et les malfaçons de l’élaboration du texte voté, ainsi que la non application des mesures du code: finalement les déboulonneurs sont plus fidèles à l’esprit de la loi. Ce sont des aiguillons pour la démocratie. Il est nécessaire d’ouvrir un réel débat national sur la place de la publicité dans l’espace public et la mise en place d’un cadre législatif rigoureux et contraignant.Au final, deux militants ont été condamnés à 200€ d’amende, la Cours d’appel de Paris reve-nant sur la relaxe prononcée par le Tribunal cor-rectionnel de Paris en avril 2010.

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rencontre avec....la Démocratie

Aung San Suu Kyi, opposante birmane est enfin sortie de la réclusion que lui imposait le régime de son pays. Elle s’est rendue en Europe recevoir le prix Nobel de la Paix, à Oslo... qui lui avait été attribué il y a vingt et un ans. Parmi ses nombreux rendez-vous en France, elle est venue au Sénat.

Avec des mots simples, elle a une fois de plus montré toute sa résolution, concluant son intervention devant les membres de la Conférence des Présidents par l’expression de “son espoir de pouvoir remercier chacun, quand elle reviendra, pour tout ce qu’il aura fait pour la démocratie en construction”

SuRViE une association qui réveille l’éthique de la France

J’étais invitée à l’institut de Sciences Politiques de Lille, avec d’autres, pour participer à une conférence-débat organisée par l’association Survie Nord. Le thème en était «Vers une nouvelle politique de la France en Afrique?»Les liens scandaleux que les gouvernements français entre-tiennent avec les dictateurs africains sont consubstanciels de stratégies que nous combattons:- une économie française dépendant d’énergies abondantes: l’uranium du Niger, le pétrole du Nigéria etc. Les bas prix dont profitent AREVA et les compagnies pétrolières ne se main-tiennent qu’aux dépens de prédations sociales et environne-mentales catastrophiques. Celles-ci engendrent des atteintes majeures aux droits de l’homme et des révoltes, que seule la répression de dictateurs soutenus, armés et conseillés peut mater.- des importations de poissons, de bois, de minerais, d’aliments tropicaux à des prix non équitables, reposant sur un consensus silencieux qui construit notre confort sur la misère des autres.- des exportations et des implantations financées par Bercy, soutenues par la COFACE, qui ne répondent pas toujours aux besoins de base des populations locales.Revenir à des liens de partenariats et de coopérations, plus justes et transparents, exige donc de revenir sur ces acquis et pratiques, et de concevoir notre économie autrement: cela fait partie de la transition écologique aussi. Pascal Canfin, maintenant ministre, et de tout temps mobilisé contre les bénéfices illicites et les placements frauduleux est un espoir pour ces justes causes.

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ET AuSSi: TOuJOuRS gArdEr dE L’énErgiE

POuR...

Une aventure qui a commencé à Paris, dans les dédales et méandres administratifs. Jusqu’au dernier moment, l’expédition était incer-taine. Le compte goutte des informations pratiques ne m’avait laissé guère le choix : j’ai fait ma valise avec des consignes de survie et de sécurité, à la hâte. Ce n’était guère engageant!

La sobriété de la vie sur place ne m’avait pas effrayée. Je connais l’Algérie et les Touareg, ayant enseigné là bas, il y a une trentaine d’année.

La condition du peuple Sahraoui est difficile. Leurs terres sont grigno-tées, les conditions de vie sont pénibles, mais ce n’est pas la misère qui y règne malgré la spoliation honteuse de leur territoire. Ils ont joué la carte de l’apaisement en 1991, après l’épisode du Front Poli-sario. Aujourd’hui, les jeunes du camp de réfugiés sont taraudés par la révolte. L’immersion dans les camps de réfugiés sahraouis révèle le vécu quotidien d’une insupportable situation transitoire d’une part, la solidarité des ONG et de l’Algérie d’autre part, qui permet la satisfac-tion des besoins matériels de base. C’est une aberration que subsiste encore en 2012 une terre d’Afrique non décolonisée officiellement, et donc un peuple sans État aux frontières reconnues de tous. Ce manque d’application des arbitrages internationaux favorise hélas le grignotage arbitraire d’un territoire, au risque de la confiscation illé-gitime de ses ressources. Les récents accords de pêche par exemple, se sont faits sans aucune prise en considération des sahraouis. La France qui refuse par un véto que la MINURSO vérifie aussi dans les zones du sud marocain les droits de l’Homme est ambiguë.

Reçus dans le confort, nous nous sommes interrogés sur le finance-ment de notre expédition, comme sur l’impossibilité de se procurer les coordonnées ou la liste des 150 participants...

Ma condition de parlementaire a fait que je n’ai été dispensée d’au-cun discours, d’aucune cérémonie. Néanmoins, nous n’avons pas pu aller voir l’école, ou les négociations quotidiennes pour se procurer de quoi vivre. En est sorti un texte commun, écrit avec les moyens du bord, qui nous a été censuré.

De retour en France, nous avons fait vivre le texte produit sous la forme d’une pétition. J’ai eu l’occasion de rencontrer d’autres élues EELV impliquées de longues date sur cette question, telle Nicole Kiil Nieslen qui continue à suivre la cause sahraouie depuis le Parlement européen. J’ai aussi pu mesurer la réserve de certains (à l’image de la position officielle de la France) à tenir une position difficile devant le Maroc...

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Tindouf, Sahara, désert et peuple en souffrance.

Fin février, une délégation compo-sée d’élus, d’ONG, d’associations, s’est rendue à Tindouf, au fin fond du Sahara, près de la frontière ma-rocaine, dans un camp de réfugiés Sahraouis.

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J’y ai constaté la rétention de 21 personnes dont les nationalités étaient variées : Guinée, Cap Vert, Albanie, RDC, Mali, Tunisie Cameroun (?) Algérie, Maroc, Chine, Mongolie...

Un enfant de deux ans et demi, était enfermé avec ses parents, dans une pièce familiale qui leur était réservée. Ce n’est vraiment pas la place d’un tout petit...Dans une salle particulière, un homme s’étonnait que je lui dise qu’au tableau il était répertorié RDC, alors qu’il est du Congo Brazzaville. Il est en forme physiquement, mais moralement consterné du sort qui lui est fait, exerçant un travail d’animateur et de facilitateur de dialogue dans les quartiers. Depuis 21 ans il est complétement intégré et a de la famille, ses sœurs, ici en règle.Dans une autre salle particulière, m’étant signalé comme gréviste de la faim par d’autres détenus, un malien était taciturne. En France depuis 2006, il est à la recherche de travail pour améliorer la vie de sa femme et de son fils de 5 ans, qui sont à Bamako. Son désir le plus cher, au vu de la situation bloquée, était de rentrer à Bamako auprès de sa femme et de son fils, plutôt que de rester ici enfermé.Les forces de police minorent la notion de grève de la faim évoquée par d’autres retenus : beaucoup se nourrissent peu, ne viennent pas au petit déjeuner, et mangent dans leur chambre ( ?). Ca pose question...

Le CRA de Lesquin est toujours bien tenu, relativement spacieux et éclairé. Ce qui est en cause et inadmissible c’est l’arbitraire de ces enfermements, le vécu de chasse à l’homme, le sentiment d’impuissance, d’inconnu devant les délais, et de non prise en compte des parcours personnels. Le chef de centre a entendu ma demande d’un espace végétal de promenade, indispensable aux petits (mais ils n’ont rien à faire là, et je m’interroge sur ce rôle détestable d’accommoder l’inacceptable).La France barbelée tourne le dos au monde réel et crée des situations stupides et douloureuses, à commencer par les autorisations de séjour sans droit de travailler.Cette visite, c’était avant le 6 mai 2012, c’était avant le changement! Et il n’y aura plus de petits dans les CRA....Et, et... Et hélas pas grand chose d’autre.Les vilains mots alibi de peur de l’appel d’air ont changé de bouche. Au cours d’une rencontre avec le nouveau ministre de l’inté-rieur, qui hélas a gardé la responsabilité de l’immigration, j’ai fait part de notre attente d’un vigoureux changement de climat: fin des chasses à l’homme dans le Calaisis, aide au parcours, aide au droit d’asile, soutien aux départements qui, comme le Pas de Calais font un effort considérable pour les mineurs isolés.J’ai aussi plaidé pour une révision de la stratégie nationale d’inclusion des Roms, à commencer par la fin des mesures transitoires, qui empêchent aujourd’hui ces hommes et ses femmes d’Europe d’avoir accès à un emploi.

Visite du Centre de Rétention Administrative de lesquin

C’était un samedi, début novembre et je n’avais pas averti de ma visite, faisant usage de mon droit parlementaire à visiter un centre de rétention. J’y ai été accueillie sans problème. Conformément à leurs procédures, le chef de centre, prévenu de mon arrivée, est venu me rejoindre.

Je me suis rendue au centre pénitentiaire de Longuenesse, près de Saint Omer. La surpopulation y a des effets désastreux. Dans certaines cellules, ils sont trois pour deux lits superposés, donc un matelas au sol, et chaque mouvement de l’un gêne l’autre.Cela génère inconfort et tension: la dignité humaine n’est pas respectée.Au centre médical j’apprends l’énorme dé-pendance aux drogues: 184 addictions à l’héroïne. Les surveillants se plaignent de manque de respect croissant, d’agressions orales et physiques, d’effectifs limités.Le médecin dit que ce qui manque le plus aux prisonniers, c’est un temps de pause, et de calme pour se retrouver, réfléchir, faire le point.De toute manière, dans la prison, on récolte les effets de cette politique ultra libérale de Sarkozy: destruction de tout ce qui fait lien et solidarité, puis politique répressive, et marchés juteux de prisons à construire, avec en plus à la clef des mar-chés pour SODEXO qui assure les « can-tines ». Ces « cantines » sont l’ensemble de marchandises qu’achètent les détenus, sans bénéficier d’aucun avantage lié à leur précarité. A l’inverse, les quelques heures de travail qu’ils exécutent ne sont pas payées au tarif réglementaire: c’est ça ou rien, dit le prestataire!

Prison

Une des prérogatives des parlemen-taires, est le droit de visite des lieux de privation de liberté. C’est un droit fonda-mental car il permet de témoigner de la situation de ces lieux fermés. Mais cela demande une préparation en amont, notamment avec les associations, pour être pertinent. Localement, je suis en lien avec l’antenne de L’Observatoire Inter-national des Prisons. Les sénateurs éco-logistes, fraîchement élus, ont tenu à se mobiliser collectivement sur ce rôle : le bureau d’Aline Archimbaud a organisé un premier séminaire sur ce thème en lien avec la commission justice d’EELV, afin de partager les fruits du travail militant et des informations et constats remontés des visites de parlementaires.

Question écrite au sujet des prisons

J’ai questionné le gouvernement quant à sa politique carcérale dans la région. Sur deux problématiques spécifiques :1. Promouvoir une solution de proxi-mité, permettant le maintien du lien familial, et à taille humaine suite à la fermeture programmée de la maison d’arrêt de Dunkerque (d’une capacité de 105 détenus, vétuste et en état de surpopulation - l’Etat ayant par ailleurs été condamné pour traitement dégradant par le tribunal administratif de Lille en février 2012). Ce remplacement est un serpent de mer qui revient régu-lièrement. Mais en 2011 les choses se précisent : l’option choisie était le remplacement par un centre péni-tentiaire plus important (capacité de 500 détenus) à Saint Venant dans le Pas de Calais.2. J’ai relayé les alertes de l’équipe de soins psychiatriques (dépendante du CHR) du Centre Pénitentiaire de Sequedin. Ils ont exprimé leur dif-ficulté à travailler par manque de place et de personnel pénitenti-aire pour conduire les détenus en consultation. L’arrivée prochaine d’un Centre National d’Evaluation dans les locaux inoccupés du centre pénitentiaire, inquiète les soignants à double titre : ils y voient l’impossi-bilité définitive d’occuper des locaux convoités aux fins d’ateliers théra-peuthiques et ils craignent la grande confusion que risque d’entraîner la proximité de psychologues de l’ad-ministration pénitentiaires (dans le but d’évaluer les détenus) avec leur activité de soin (les approches et les objectifs étant radicalement diffé-rents).

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Marc Boulnois, Maire de Norrent-Fontes, Ville hospitalière. ©Vivien Guihard

SANS OuBliER D’ExERCER TOuS SES DROiTS PARlEMEN-

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rencontre avec....Salah Hamouri, enfin libéré.

Sensibilisée par sa mère, et mobilisée dès la première heure dans le comité de soutien à Salah Hamouri, ce franco-palestinien détenu en Israël, j’ai appris avec soulagement sa libération en décembre 2011. Je suis venue l’accueillir à son arrivée à la gare Lille Flandres aux cotés de l’Association France Palestine Solidarité et des militants enga-gés, le 7 mai 2012 alors qu’il venait dans la région porter son témoignage poignant de 7 années de détention et faire vivre la pensée des détenus politiques actuels.

réserve Parlementaire

2011Commune de Merville Nord gymnase: 27 000 €Commune de Ronchin Nord équipe-ments sportifs: 27 000€Flonflons Flandres, festival d’accor-déon (Nord): 10 000€Association régionale des Traits du Nord, chevaux de traits: 5000€Semences Paysannes, pour la conser-vation et la mise en culture des varié-tés locales et anciennes: 15 000€Bastamag magazine alternatif: 5000€MDRGF, mouvement pour les droits et le respect des générations futures: 5000€Collectif contre la biopiraterie: 5000€Association Zooalil. (Nord): 5000€ATTACAFA, association multiculturelle, (Nord): 7000€Jeunes pour la coalition climat pour suivi du sommet de Cancùn: 1000€

2012ALTERMEDIA site internet: 5000€Association DROIT AU TRAVAIL collec-tif chomeurs: 8000€VIVAGORA publication internet de dé-bat sur les choix scientifiques: 8000€Association Fondation de l’écologie politique: 10 000€Jets d’encre, association soutien presse lycéenne : 8000€

2/ L’indemnité représentative de frais de mandat (IRFM), de 6 037,23 € nets strictement utilisable pour financer des dépenses matérielles liées au travail parlementaire : location ou achat d’une permanence, d’une photocopieuse, achat de documentation, des abonnements, la conception et l’impression d’un jour-nal, des frais de déplacements, de restaurants, d’hôtel (pour soi, pour des invités ou pour les assistants), de l’aide aux déplacements d’intervenants qui viennent de loin, des locations de salle pour un colloque.Pour ma part, je loue un local, je l’ai équipé, j’y salarie à ¾ temps une secrétaire en CDI, je provisionne pour son départ en fin de mandat.Cela me différencie de certains élus en situation de cumul qui ont une mairie ou un département ou une région, ainsi qu’un secrétariat dans ces institutions. Leurs indemnités sont plafonnées à 8272 euros.Beaucoup de mes collègues en mandat unique n’ont pas besoin d’une secrétaire en plus de leurs assistants, mais mon statut d’ancienne présidente de Région, allié à la disponibilité que me donne mon choix de strict mandat unique, nous amène un flot de courrier impressionnant.Si je regarde la répartition de mon IRFM, cela donne (en moyenne mensuelle) :

- pour les locaux, les charges, 27%. (1620 euros)- pour des frais remboursés à l’équipe, 4% (240 euros)- pour des publications, cartes de voeux, fournitures, 10% ( 600 euros)- pour des invitations au restaurant et mes hôtels en déplacement 7% (425 euros)- pour le secrétariat, salaire, retraite, URSSAF, ASSEDIC, 44% (2650 euros)- le reste 18% en divers et en provision légale (secrétariat) pour fin de contrat et provision si déplacement à l’étranger.

Depuis ma première élection, ma secrétaire, Valérie, conserve scrupuleusement tous les justificatifs. La transparence et la possibilité de contrôles aléatoires par l’institution serait une garantie de bon usage de l’argent public par tous.

3/ Une enveloppe pour embaucher des collaborateurs, qui ne nous est pas versée, mais qui nous permet de salarier des assistants.

Ce crédit s’élève à 7 548,10 € bruts mensuels hors charges patronales et permet de rémunérer jusqu’à 3 personnes à temps plein ou 6 personnes à temps partiel.Au 1er juillet 2012, la rémunération mensuelle brute de base d’un assistant employé à temps plein se monte à 2 516,03 €.Cela me permet d’employer deux assistants à plein temps, Romain au Sénat, Mathilde à Lille, et une assis-tante à mi-temps, Priscilla en région. Cette somme est gérée par une association spécifique, l’AGAS, Asso-ciation de Gestion des Assistants de Sénateurs. Le problème de l’absence de convention collective pour nos assistants reste entier. Le groupement d’employeurs serait peut-être une solution.

4/ Autres avantages : la possibilité de voyager gratuitement en train en France, la prise en charge des frais d’expédition du courrier, des communications téléphoniques, l’équipement informatique, l’usage de voi-tures du Sénat ou de taxis pour des déplacements liés au mandat, et 6 aller-retour en avion en France. (40 pour ceux qui utilisent ce transport pour regagner leur circonscription). Cette année, je n’ai utilisé qu’un vol aller-retour pour Toulouse.

Pour ma part je voyage surtout en métro avec une carte Navigo, bien que mon statut de Présidente de com-mission me permette d’utiliser un chauffeur et une (grosse) voiture… Mais je ne le fais qu’à petites doses, ne voulant pas rater mon train, même si je sais que certains utilisent ce privilège pour rentrer en province ! Quand notre groupe s’est fondé, le Président Jean Vincent Placé avait aussi droit à une voiture : nous avons décidé de n’en avoir qu’une pour deux. Sur ce, nous n’avons pas complètement renoncé au système, car lorsque l’on termine une loi à deux heures du matin, il faut bien rentrer. Le Sénat gagnerait néanmoins à des moyens mieux mutualisés, et à des véhicules urbains plus sobres.

Entre IRFM, indemnité de frais de mandat, et enveloppe pour les assistants, nous avons, comparé à cer-tains élus locaux, des moyens confortables pour travailler. Quand certains trouvent que la France a trop de parlementaires, comparé aux Etats-Unis, il faut mettre cela au débat en même temps que les 20 assistants dont dispose là-bas chaque parlementaire. Nos assistants en revanche, au vu de leur niveau d’études, et de leur charge de travail, ne sont pas gâtés. Leurs salaires sont très faibles comparés à ceux des adminis-trateurs du Sénat.

un droit de tirage ambigu : la réserve parlementaire :Hier confisquée par quelques initiés -plusieurs millions d’euros pour cer-tains- et allouée en toute opacité, la réserve a, depuis l’arrivée de la gauche, gagné en équité et en trans-parence. C’est désormais le droit égal pour chaque Sénateur ou Sénatrice de faire en sorte que les ministères financent directement pour partie un ou plusieurs projets d’investissement de collectivité, ou un ou plusieurs pro-jets d’associations. Le total par élu est de 120 000 euros, qu’il s’agisse d’un élu « de base », d’un vice président, d’un questeur, ou d’un président de commission.

Même si je me suis imposée des cri-tères, ce fait du Prince garde sa part d’ambigüité et d’injustice, surtout en période de rareté des fonds publics. Si des « bénéficiaires » vertueux ont pu être sauvés grâce à l’apport inattendu de cette aide inespérée pour eux, il n’en demeure pas moins que le côté arbitraire porte en lui-même un relent de privilège voire de clientélisme. C’est d’ailleurs pourquoi je ne me suis jamais limitée à ma circonscription (donc à mon « électorat »). Un débat démocratique doit être ouvert sur le sujet, et au minimum, les sommes ainsi affectées devraient faire l’objetd’une publication sur le site du Sénat.Comme l’avait proposé dans une pro-position de loi le député écolo Fran-çois de Rugy.Pour ma part, j’ai soutenu diverses associations, et j’ai essayé de prioriser la culture, l’éducation, l’environne-ment, et des initiatives qui font lien et mutualisations.

MOYENS190.000 d’euros par mois dans la poche ?

On lit parfois que chaque Sénateur gagnerait 190.000 euros ce qui fait à juste titre bondir ceux qui se serrent la ceinture pour finir le mois, ou ceux qui n’y arrivent même plus.La transparence exige de clarifier cette somme. 1/ Dedans il y a ce que perçoit le Sénateur comme indemnité, qu’il peut utiliser librement, comme un salaire : 5388 euros net (7 100 brut), dont 1200 euros sont reversés au parti pour son fonctionne-ment (et depuis que je préside une commission, 6814 euros net ce qui m’a conduit à majorer mon reversement au parti. Ces derniers sont allégés car ils donnent droit à une réduction d’impôts de 66% des sommes versées, dans la limite de 15000€ par an. Même si nous travaillons souvent de nuit, nous sommes privilégiés.

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EN TOuTE trAnSPArEncE

Page 16: Publication annuelle MC.Blandin

Election de Marie Blandin à la Présidence de la Commission Culture, de l’Education et de la Com-munication. Au Sénat, le 6 octobre 2011:

Extrait :

Mme Marie-Christine Blandin, présidente. – Mes chers col-lègues, je vous remercie pour ce vote et l’ambiance dans lequel il s’est déroulé. Je remercie la majorité qui m’a fait l’honneur d’accepter que je la représente, malgré un choix difficile car il y avait pluralité de légitimités et de nombreux talents, au lendemain de l’émergence d’une nouvelle majo-rité de gauche au Sénat. Je voudrais remercier l’opposition et le président Jacques Legendre qui en a été le porte-pa-role pour ce vote blanc que je considère comme un signal de la poursuite de la bonne ambiance des travaux de notre commission. Je précise que ce type de vote ne s’est pas fait dans toutes les autres commissions.

Je suis fière de me voir confier cette responsabilité d’ani-mation de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Je suis fière également de servir cette commission qui fut présidée par Maurice Schumann, Jacques Valade et, récemment, par mon collègue nordiste Jacques Legendre. Je voudrais le remercier d’avoir, en plus de l’organisation de nos travaux, facilité notre accès à l’art par de nombreuses sorties, et d’avoir assuré une constante vigilance sur la francophonie et sur les excès de zèle de la commission des finances.

J’ai une pensée pour ceux qui ne travailleront plus à nos côtés. Les sortants reconduits se souviennent des partici-pations assidues et constructives de Jack Ralite défendant la culture contre la barbarie, d’Ivan Renar sur la culture scientifique, du vice-président Serge Lagauche sur le ciné-ma, les paysages défendus par Yves Dauge - il me faut aussi citer Ambroise Dupont qui est encore à nos côtés -, des métiers d’art de Catherine Dumas, ou du rapport, certes moins consensuel, sur la petite enfance étudiée par la pré-sidente Monique Papon.

Je retrouve avec plaisir des visages connus et j’accueille avec bonheur les sénatrices et sénateurs élus pour la pre-mière fois dans la haute assemblée en 2011. Je tiens à les féliciter en votre nom à tous.

(…)

Cette commission, même au cœur des débats les plus com-plexes et les plus aigus, est toujours restée un lieu de dia-logue, d’imagination, voire même d’audace contre le cou-peret trop aveugle de la commission des finances.

Nous n’en avons pas fini sur de nombreux sujets ni avec la complexité – je pense aux cultures numériques et aux droits d’auteur -, ni avec les finances – je pense aux effets sur le terrain des restrictions de ressources humaines – ni avec les innovations qui n’ont pas su trouver leur fonction-nement – je pense à RFI et à l’audiovisuel extérieur de la France (AEF).

Médias, éducation, culture, jeunesse, sport et même bud-get de l’environnement, tout ce dont nous débattons ici fait émancipation et épanouissement de l’individu, lien et échanges, production et transmission de savoirs, tout fait société, tout prépare l’avenir.

Nos opinions sont différentes et nous savons ensemble le prix de la diversité, de toutes les diversités : pluralisme de la presse, multiplicité des pratiques artistiques, projets blancs de l’Agence nationale de la recherche pour rendre éligibles des laboratoires aux disciplines plus marginales, la diversité culturelle ratifiée par l’UNESCO, que nous devons faire vivre, autant pour soustraire la culture à la concur-rence du marché que pour réinventer la démocratie cultu-relle.

Ici, nous travaillons pour la paix.

du pain sur la planche

La déclaration de politique générale du Premier Ministre a donné le ton d'un environnement financier contraint, peu propice aux projets neufs.Seul le principe de justice est venu donner un peu de lumière dans ce sombre paysage, tandis que quelques réformes socié-tales significatives montraient une volonté de changement: fin du cumul, mariage universel, droit d'adoption, vote des étrangers...Le même jour deux entrevues avec Aurélie Filippetti et avec Vin-cent Peillon confirmaient le programme chargé pour la commis-sion que je préside:- la réforme du CSA (et de l’ARCEP, peut-être) et de la nomination des présidents de l'audiovisuel public- une loi d'orientation pour l'école- une loi pour la recherche et l'enseignement supérieur- fin du protocole en vigueur de l'intermittence et l'invention de la suite- un texte sur l'enseignement artistique- et en plus trouver des ressources pour financer la télévision, si l'UE persiste à contester la taxe sur les fournisseurs d'accès internet, tout comme elle conteste la baisse de TVA sur les livres numériques!

Premiers bons signes néanmoins: le ministre Peillon lance une vaste consultation avant d'inventer sa loi. Et la ministre Aurélie Filippetti a obtenu le dégel des crédits du spectacle vivant.Faire valoir dans ces dynamiques menées par le parti majoritaire nos aspirations et nos spécificités écologistes reste un défi.Par exemple introduire la formation à la résolution non violente des conflits, pour prévenir et gérer la violence à l'école.Ou bien redéfinir la pertinence du soutien public à la culture, en donnant la priorité au développement culturel et social de cha-cun, et pas simplement à celui du nombre de structures cultu-relles....

Nous perdons la compétence budgétaire d’une femme rigou-reuse. Elle ne s’en serait pas laissée conter par Bercy. Il semble que l’arbitrage de Matignon viendrait de la décision de Nicole Bricq, d’exiger de Shell des garanties sérieuses de protection en-vironnementale avant d’autoriser la suite des opérations en mer de Guyane. Le premier ministre pouvait fort bien lui demander des explications sans la priver de son portefeuille. L’argument entendu de l’impossibilité juridique d’un moratoire ne tient pas debout. Pendant le Grenelle, j’avais arraché, avec mon groupe biodiversité, l’arrêt du projet de mine d’or de Kaw, ce qui est tou-jours possible pendant la prospection, avant le début de l’exploi-tation.

Les forages envisagés perceront des fonds situés entre 2000 et 3000 mètres pour atteindre des gisements à 6000 mètres. BP dans le golfe du Mexique creusait à partir de 2400 mètres sous la surface de l’océan... On a vu les dégâts de l’accident, l’écosystème détruit, les pêcheurs et éleveurs de crevettes ruinés.

Tout l’enjeu de la reconciliation des gens avec le politique réside dans les preuves que nous donnerons d’hommes et de femmes élus engagés pour défendre l’intérêt général sans que les lobbies ne tirent en sous main les ficelles.

En APArtE vigilance...

Le brutal et non désiré change-ment de portefeuille de Nicole Bricq est un mauvais signe pour la résistance du gouvernement aux pressions des intérêts privés.

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Direction de la publication : Marie-Christine BlandinCrédits photos : mentionnés sous chaque photographie.

imprimé localement à la Monsoise - Mons en Baroeulne pas jeter sur la voie publique

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