programme solaire mondial

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IEPF Le Programme solaire mondial une nouvelle dynamique pour les EnR INSTITUT DE L ÉNERGIE ET DE L ENVIRONNEMENT DE LA FRANCOPHONIE NUMÉRO 46 – 1 er TRIMESTRE 2000 Organisation Internationale de La Francophonie Le Programme solaire mondial une nouvelle dynamique pour les EnR

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Programme Solaire Mondial

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IEPF

Le Programmesolaire mondial

une nouvelledynamique pour les EnR

INSTITUT DE L ÉNERGIE ET DE L ENVIRONNEMENT DE LA FRANCOPHONIE

NUMÉRO 46 – 1er TRIMESTRE 2000

Organisat ion Internat ionale de

La Francophonie

Le Programmesolaire mondial

une nouvelledynamique pour les EnR

Sommaire

Numéro 461er trimestre 2000

est publié trimestriellement par l’Institut de l’énergie et de l’en-vironnement de la Francophonie (IEPF).56, rue Saint-Pierre, 3e étageQuébec G1K 4A1 Canada Téléphone : 1 (418) 692-5727Télécopie : 1 (418) 692-5644Courriel : [email protected] Internet : www.iepf.org

Directeur de la publication :El Habib Benessahraoui

Rédacteur en chef invité :Boris Berkovski

Comité éditorial : El Habib Benessahraoui Sibi BonfilsFrançois DorlotDibongué A. KouoBoufeldja BenabdallahJean-Pierre NdoutoumSory I. DiabatéCarole Grass-Ramalingum

Édition et réalisation graphique :Caractéra inc.

Photo de la couverture :PhotoDisc Imaging

Photos des pages 21 et 23 :tirées de la brochure de la Commission Solaire Mondiale, 1er mai 1998

ISSN 0840-7827

Tirage : 4000 exemplaires

Dépôt légal :Bibliothèque nationale du QuébecBibliothèque nationale du Canada

Les textes et les opinions n’engagent que leurs auteurs.Les appellations, les limites, figurant sur les cartes de LEF n’impliquent de la part de l’Institut de l’énergie etde l’environnement de la Francophonie aucun jugementquant au statut juridique ou autre d’un territoire quel-conque, ni la reconnaissance ou l’acceptation d’une limi-te particulière.

Prix de l’abonnement annuel (4 numéros) :40 $ CAD ; 28 $ USD ; 30 € EUR ; 16 000 CFA ; 380 000 Dongs vietnamiens

Poste-publications – ConventionNo 155 7440

INSTITUT DE L ÉNERGIE ET DE L ENVIRONNEMENT DE LA FRANCOPHONIE

Le Programme solaire mondial : une nouvelle dynamique pour les EnR

MOT DU DIRECTEUR EXÉCUTIF 3

ÉDITORIAL 4L’énergie propre et renouvelable pour une meilleure qualité de vie par Boris Berkovski

1) AUX SOURCES DU PROGRAMME SOLAIRE MONDIAL

Les énergies renouvelables et l’ONU par Luis G. Marques 6

Déclaration de Harare 10

2) LE PROGRAMME SOLAIRE MONDIAL EN AFRIQUE

Vers une utilisation à grande échelle des énergies 14renouvelables en Afrique par Jacques-Césaire Mba-Nze

Le développement des énergies renouvelables 20en Tunisie par Faïza Kéfi

Les énergies renouvelables au Niger par Yahaya Saleye 24

Petite centrale hydroélectrique de Nyakabanda (Rwanda) 29

3) LES INSTITUTIONS SE MOBILISENT

France : vers un développement durable 30des énergies renouvelables par Jean-Louis Bal

Énergies renouvelables pour la construction 34 de l’avenir des îles par Cipriano Marin

Électrification rurale décentralisée de cinq îles au Vanuatu 38

L’énergie rurale au service du développement par B. Benabdallah 39

Biomasse 42

Logiciel RETScreen MC version 99 42

Coopération EDF – CSM 43

Programme d’action 1998-2005 44

4) DIMENSIONS TECHNOLOGIQUES DES ENRL’énergie éolienne par Maxime Kleinpeter 45

5) EnR : préparer l’avenirÉducation et formation sur les énergies renouvelables 51 par Osman Benchikh

EL HABIB BENESSAHRAOUI

Le Programme solaire mondial : une nouvelle dynamique pour les EnR 3

Le rôle des énergies renouvelablespour le développement durable etpour l’amélioration de l’accès àl’énergie moderne, notamment auprofit des populations rurales etdémunies, a été mis en exerguesolennellement lors du Sommet de la planète Terre.

Les négociations internationalesautour du changement climatique et en faveur de la lutte contre la désertification montrent un largeconsensus quant à l’intérêt de l’uti-lisation des ÉnR et de la promotionde l’efficacité énergétique tant pour réduire les émissions de gaz à effet de serre que pour limiter la déforestation.

Force est de constater cependantque le développement des ÉnR aconnu des fortunes diverses, plus enraison de conditions réglementaires,législatives, institutionnelles ou de courte vue économique que de difficultés techniques.

Il faudrait, pour remédier à cela, uneautre façon de dire et de faire leschoses, en somme une dynamiquenouvelle pour les ÉnR. Le Processussolaire mondial initié par l’UNESCOen 1993 participe directement decette dynamique. Il exprime surtoutune volonté : celle de créer desconditions à même de fédérer desinitiatives, toutes les initiatives, dansce domaine et de les organiser versun même objectif, celui d’une utili-sation généralisée des ÉnR, pourqu’elles jouent pleinement leur rôledans la construction d’un dévelop-pement humain propre et durable.

Des hommes d’État ont accepté de s’engager pour créer cette dyna-mique nouvelle. La déclaration de Harare exprime leur volonté demobiliser la communauté interna-tionale et de la mettre en mouvementautour de et vers cet objectif. LesNations Unies cautionnent ladémarche dans une résolution del’Assemblée générale. Des institu-tions, certes encore peu nombreuses,s’impliquent et traduisent leur adhé-sion au projet par des chantiersrésolument inscrits dans le processus.

Nous avons voulu rendre comptede tout ce foisonnement d’idées, debonnes volontés et d’actes concretsdans ce numéro spécial de LEF. Enallant aux sources de l’information.En donnant la parole à ceux qui ontpensé le processus et agissent auquotidien pour sa mise en action.Puisse cette modeste contributionrenforcer les échanges et créer denouvelles collaborations, dans lesens des objectifs visés.

El Habib BenessahraouiDirecteur exécutif

Mot du directeur exécutif

L’ÉNERGIE PROPRE ET RENOUVELABLEPOUR UNE MEILLEUREQUALITÉ DE VIETout au long de l’histoire du monde,les questions de pouvoir ou d’indé-pendance, de richesse ou de pau-vreté, de privilèges ou d’égalité, de survie ou de faillite ont été étroi-tement liées à l’accès aux sourcesd’énergie. C’est ainsi que ni le succèsdes pays industrialisés, ni l’échecdes pays en voie de développementne peuvent être expliqués sans quelon se réfère à l’efficacité de leurssystèmes énergétiques. Aujourd’hui,plus que jamais, l’énergie est lemoteur du développement écono-mique et social.

Toutefois, le recours massif auxcombustibles d’origine fossile, qui a permis à l’humanité de satisfairependant le XXe siècle sa demandeénergétique, a posé un certainnombre de problèmes, dont lesatteintes à l’environnement, lapollution et la dépendance énergé-tique. Ceci a eu pour conséquenceque, progressivement, un consensusse soit fait autour de la notion dedéveloppement durable, consacréepar la Conférence des Nations Uniessur l’Environnement et le Dévelop-pement, connue aussi sous le nomde «Sommet de la terre» (Rio deJaneiro, 1992). C’est à la lumièredes conclusions et recommandationsde cette Conférence que les condi-tions ont été réunies pour donnerune nouvelle impulsion à l’utilisa-tion accrue des énergies renouve-lables (solaire, éolienne, biomasse,des marées, océanique, géothermale,petite hydraulique, etc.) qui per-

mettent de fournir les services énergétiques nécessaires au déve-loppement sans porter atteinte àl’environnement.

Le temps où le développement étaitmesuré en termes économiques estrévolu, deux autres dimensions étantdésormais présentes : la dimensionenvironnementale et la dimensionsociale. Il s’agit là d’une nouvelledonne, qui bouleverse les critèresde choix de la politique énergétiqueau niveau mondial : d’une part, ilfaut assurer la production de l’éner-gie indispensable au développementsans mettre en danger l’écosystèmeet, d’autre part, il est essentiel d’ap-porter les services énergétiquesnécessaires au groupe formé de plusd’un tiers de la population mondialequi n’y a pas accès, notamment leshommes et les femmes qui viventdans les zones rurales et/ou d’accèsdifficile, surtout dans les pays endéveloppement.

La situation du monde serait sansnul doute encore plus préoccupanteen l’absence des efforts que l’huma-nité déploie pour utiliser l’énergierenouvelable à une plus grandeéchelle. Des possibilités d’emploinouvelles, un environnement propre, l’indépendance énergétique,l’édification de la paix et la durabi-lité du développement sont autantde facteurs qui poussent à faire del’énergie renouvelable un élémentimportant des sources mondialesd’énergie. Les connaissances tech-niques en matière d’énergie renou-velable sont très inégalementréparties.

Il convient donc de faciliter et de promouvoir le processus de

4 Liaison Énergie-Francophonie • N° 46

BORIS BERKOVSKI

Rédacteur en chef invité

Secrétaire général de la Commission solaire mondiale,

Directeur de la Division des sciences de l’ingénieur et de la technologie,UNESCO

Éditorial

Le Programme solaire mondial : une nouvelle dynamique pour les EnR 5

transfert et de diffusion des techno-logies en se fondant sur le principeque la sélection des technologies lesplus appropriées et leur adaptationaux conditions locales devraientavoir la priorité en matière de coopé-ration technologique. Cela conduiraà renforcer au niveau local la capa-cité de choisir, d’adapter, puis deperfectionner lesdites technologies.

Il est nécessaire d’accroître sensible-ment l’accès à l’énergie des popula-tions des pays en développementafin que des approvisionnements enénergie suffisants puissent améliorerles conditions de vie, diminuer lapauvreté, améliorer la santé etl’éducation, promouvoir les petitesentreprises et créer des activitésgénératrices de revenus, en particu-lier dans les zones rurales et isolées,réduisant ainsi les migrations despopulations rurales vers les centresurbains.

Un vrai coup de pouce à cet égarda été donné par la 19e sessionextraordinaire de l’Assemblée géné-rale de l’ONU (New York, 1997)consacrée au suivi du Sommet de laterre après cinq ans, qui a reconnunotamment que :

– l’accroissement de l’utilisation des énergies renouvelables peutréduire la dégradation de l’envi-ronnement résultant d’activitéshumaines dommageables tellesque la pollution industrielle et la déforestation.

– le contrôle des émissions de gazà effet de serre et autres gaz etsubstances dans l’atmosphèrerend nécessaire le recours à dessystèmes énergétiques rationnelset efficaces, notamment ceuxfaisant appel à l’énergie propre et renouvelable.

En 1995, à l’occasion du processusde préparation du Sommet solairemondial tenu à Harare (Zimbabwe),dix-huit chefs d’État et de gouver-nement ont décidé de donner unenouvelle impulsion au développe-ment et à l’utilisation des sourcesd’énergie renouvelables, tant dans

les pays en développement quedans les pays industrialisés, encréant la Commission solaire mon-diale. Cette Commission offre uneautorité et une orientation au plushaut niveau au Programme solairemondial 1996-2005, qu’elle aapprouvé en 1997.

Le Programme solaire mondial1996-2005 (PSM), une initiativemajeure en matière de développe-ment durable – qui comprendtoutes les énergies propres etrenouvelables – , est mis en œuvreavec la participation active desInstitutions spécialisées et desProgrammes des Nations Unies,ainsi qu’avec la Commission euro-péenne. L’un des objectifs de ceProgramme est de développer unclimat politique favorable pourl’utilisation à grande échelle desénergies propres et renouvelables,en démontrant notamment la viabi-lité économique et l’acceptabilitésociale des projets du PSM. Visantà créer une stratégie industriellecapable de satisfaire les besoinsd’un marché estimé à 200 milliardsde dollars en l’an 2005, le PSMprésente un grand intérêt, à la foispour les pays en développement etles pays industrialisés.

L’Assemblée générale de l’ONU a adopté en 1998 et 1999 deuxrésolutions en faveur du Programmesolaire mondial 1996-2005 (référen-ces : A/RES/53/7 et A/RES/54/215respectivement). La Conférencegénérale de l’UNESCO a égale-ment adopté en 1997 et 1999 deux résolutions en faveur de ceProgramme (29 C/Résolution 14 et30 C/Résolution 19). La Commis-sion européenne, dans son «LivreBlanc» établissant une stratégie et un plan d’action communautaires :Énergies pour l’Avenir – Les Sourcesd’Énergie Renouvelables – COM(97) 599 final (26/11//97), a parti-culièrement souligné son attache-ment et son soutien au Programmesolaire mondial 1996-2005.

Le financement du Programmesolaire mondial 1996-2005 est

considéré comme un grand défi de la Commission solaire mondiale.La mise en place de deux ou troisprojets d’énergie propre et renou-velable à large échelle dans chaquepays comporterait un investissementde quelques 200 milliards de dollarsaméricains d’ici l’an 2005. Or,aucun instrument de financementn’est encore disponible pour satis-faire ces besoins. Il est impératifque de nouveaux instruments soientmis en place et que les mécanismesexistants soient renforcés pourassurer le financement des projetsd’énergie propre et renouvelable.Une des premières idées a été decréer un Fonds solaire mondial.Cette idée n’a pas encore étéconcrétisée.

Je suis persuadé que, parmi lesmesures pour favoriser l’utilisationaccrue des énergies renouvelables,la suppression progressive dessubventions aux énergies d’originefossile, les allégements fiscaux auxproducteurs et utilisateurs des éner-gies renouvelables et l’éliminationdes barrières douanières et autresqui rendent difficiles le transfert de technologie seraient les plusefficaces.

En tout cas, l’amélioration de laqualité de vie des deux milliardsd’êtres humains n’ayant pas encoreaccès aux services énergétiques debase devrait être l’objectif principalde l’utilisation accrue des énergiesrenouvelables dans les années àvenir.

Boris Berkovski

u ses implications territoriales, environnementales et économiques, celle-ci est un élément central du dilemme insulaire. En effet, l’adoption de modèlesénergétiques erronés pourrait hypothéquer nos économies, les options futuresde développement et l’environnement, car les solutions énergétiques sontétroitement liées à la façon dont sont gérées les ressources insulaires. Cetteinterdépendance est absolument évidente sur les îles ; en outre, les politiquesen matière de transport, d’eau ou de résidus sont, elles aussi, impliquées dansce sens, et constituent des aspects auxquels il est nécessaire d’apporter dessolutions satisfaisantes dans nos milieux.

Il est indéniable que les îles se heurtent et se sont toujours heurtées à uneinfinité de contraintes. Et c’est justement pour cette raison que de nombreuseslimites imposées par l’insularité doivent être abordées à partir de l’optiqued’une politique technologique basée sur la spécificité des îles et sur lavalorisation de leurs ressources. Et qui plus est, la spécialisation progressivede leurs économies oblige à introduire avec détermination des aspects dequalification technologique, et d’abandonner, en même temps, la culturetraditionnelle où primait la quantité, en raison du besoin qu’il y avait decouvrir les déficits historiques dont souffraient les territoires insulaires. Àl’heure actuelle, les îles doivent rechercher des solutions conjointes, baséessur une stratégie commune, où les facteurs dominants sont l’innovation etl’adaptation.

À l’aube du XXI e siècle, les îles s’apprêtent à relever les nouveaux défis qui ont surgi dans le monde actuel. Le chapitre 17 de l’Agenda 21 indique que les îlesconstituent un cas particulier, tant sur le plan del’environnement que sur le plan du développement, etqu’elles présentent des problèmes tout à fait spécifiqueslors de la planification du développement durable, étantdonné qu’elles sont extrêmement fragiles et vulnérables.Or, dans le contexte du développement durable, l’énergieest une pierre angulaire à prendre en compte lors desstratégies de planification.

Énergies renouvelables pour la construction de l’avenir des îles

34 Liaison Énergie-Francophonie • N° 46

V

Cipriano Marín est Vice-secrétaire général de INSULA (Conseil scientifique international pour le développement des îles). Il a été le Secrétaire du Sommet solaire des Îles (1999).

CIPRIANO MARÍN

Le Programme solaire mondial : une nouvelle dynamique pour les EnR 35

Du point de vue énergétique, laplupart des îles présentent toute unesérie d’avantages et d’inconvénients,qu’il est nécessaire de bien soupeserafin de pouvoir prendre les décisionsles plus adéquates.

Parmi les inconvénients, on peutrelever tout particulièrement :

Isolement et dépendance.Un facteur qui conditionne actuel-lement les îles est leur dépendanceextrême quant aux produits énergé-tiques d’importation. Ce phénomènese manifeste avec la plus grandeévidence dans les domaines dutransport et de la production d’élec-tricité. Dans la majorité des cas,l’acquisition de produits énergétiquesreprésente plus de 15% de latotalité des importations des îles.

La production d’énergie constitue,par ailleurs, un chapitre fort impor-tant du PIB. Il s’agit là d’une lourdecharge, qui limite très souvent lespossibilités de développement etd’épanouissement de la qualité devie des habitants insulaires.

Gamme de ressources énergétiques limitée.Les sources d’énergie convention-nelles disponibles sont, en général,limitées, voire inexistantes. Les îleselles-mêmes ne disposent pas desources d’énergie très variées. Or,ces facteurs ne font qu’augmenter la vulnérabilité insulaire, donnantlieu, parfois, à une surexploitationou à un épuisement prématuré deleurs ressources si limitées.

Spécialisation des économies.En raison de la spécialisation exces-sive de la plupart des économiesinsulaires, celles-ci se voient obligéesd’installer des capacités énergétiquesdémesurées ; en effet, elles doiventêtre à même de couvrir des phéno-mènes tels que la demande saison-nière, les changements brusquesintervenant sur le marché, ou encorela dispersion territoriale, nettement

infrastructures de production et destockage énergétique sur des terri-toires très limités, ce qui entraîne,évidemment, des coûts externesextrêmement élevés.

Utilisation peu efficiente desressources énergétiques.La plus grande partie des étudesprospectives portant sur les possibi-lités d’économie et d’efficience éner-gétiques mettent en évidence desparamètres de réduction potentielledépassant, dans certains cas, 20%.Ainsi donc, la rationalité énergétiqueappliquée aux nouveaux types deconsommation constitue, à l’heureactuelle, l’un des grands défis àrelever.

Par ailleurs, les modes de mobilitéet de transport interne importés sont, en ligne générale, absolumentinefficaces, et entraînent, de façonprogressive, une augmentation de la facture énergétique insulaire. Surnombre d’îles à forte présence dusecteur des services, la consommationénergétique due au transport dépasse50% de la totalité.

Par contre, de l’autre côté de labalance, les îles jouissent des avan-tages suivants :

D’abondantes sources d’énergie renouvelables.La majorité des îles disposent d’excel-lentes ressources dans le domainedes énergies renouvelables, qui sont,souvent, suffisantes pour assurer unelarge autonomie énergétique. Tou-tefois, actuellement, ce sont des ressources énergétiques peu utilisées,si l’on considère le potentiel réel qui existe en fait.

Les énergies solaire, éolienne, micro-hydraulique et houlomotrice sontdes sources d’énergie fort abondantesdans l’ensemble de la géographieinsulaire. En règle générale, il s’agitde sources d’énergie qui se complè-tent mutuellement, vu que la pénuried’une modalité est compensée, sur la

plus prononcée que ce n’est le casdans d’autres régions.

L’incorporation de beaucoup d’îles àl’offre touristique globale impliquenotamment l’adoption de comporte-ments et l’apparition de nécessitésénergétiques fort difficiles à assumer.Les destinations touristiques insu-laires se voient forcément contraintesde faire face aux nombreux problèmesénergétiques supplémentaires quidécoulent de cette activité, ce qui,dans la plupart des cas, implique en même temps une transformationradicale des modèles culturels tradi-tionnels en matière de consommation.

L’échelle, un facteur conditionnantau niveau de la technologie et du marché.Deux difficultés additionnelles rési-dent dans l’échelle même des îles.D’une part, leurs dimensions limitenténormément l’efficience des systèmesénergétiques conventionnels, conçuset élaborés pour d’autres économieset pour d’autres territoires. Ainsi, parexemple, on constate fréquemmentque les coûts de la production d’éner-gie électrique peuvent, sur les petiteset moyennes îles, jusqu’à décuplerles prix de référence continentaux.D’autre part, le facteur d’échellecomplique énormément les condi-tions du marché. En effet, les petitsmarchés énergétiques insulaires nesont pas très attrayants, et dépendentbien souvent de la capacité publique,par ailleurs hypothétique, d’assumerleurs déficits.

Environnement extrêmementsensible.Les îles se caractérisent par la fragi-lité de leurs écosystèmes. La preuveen est que la proportion de zonesprotégées, ou qu’il est nécessaire deprotéger, y est bien plus haute quedans d’autres régions de la planète.

En milieu insulaire, les problèmesenvironnementaux de l’énergieacquièrent une importance extraor-dinaire. En outre, il est nécessairede reproduire, sur les îles, toutes les

plupart des îles, par une grandedisponibilité des autres.

Les petites dimensions peuventconstituer un avantage.Les sources d’énergie renouvelablesont une capacité de modulationexcellente à petite échelle, en compa-raison avec les schémas de produc-tion rigides conventionnels. Ainsi,les technologies des énergies renou-velables parviennent bien mieux às’adapter à l’échelle et aux besoinsinsulaires.

Les modalités spécifiques de l’économie insulaire n’exigent pasune consommation énergétiqueintensive.Sur les territoires insulaires, on nepratique quasi jamais d’activités économiques à grande intensitéénergétique, étant donné que, pourla plupart, on s’y oriente progressi-vement vers la tertiairisation. Lesconsommations intensives n’appa-raissent que de façon très ponctuelle,la plus grande partie de la demandeprovenant du secteur des services,du transport et du logement.

Le grand marché insulaire des énergies renouvelables.Considérées de façon individuelle,les îles ne sont pas des marchésénergétiques importants, à massecritique acceptable ; cependant, vuesde manière globale, elles constituent,à l’heure actuelle, le plus importantcréneau mondial en matière d’éner-gies renouvelables.

Au cours des dernières années, lacroissance relative la plus considé-rable des segments spécifiques liésaux énergies renouvelables a eu lieusur les territoires insulaires. Ainsi,par exemple, l’utilisation de l’énergieéolienne a connu une croissancecontinue sur les îles, face à une stag-nation dans les zones continentales.

En fait, aujourd’hui, les plus grandspourcentages d’énergies renouve-

lables dans le bilan énergétique sontenregistrés sur les îles, à tel point quel’on commence à assister à l’appa-rition des premières îles alimentéesà 100% par énergies renouvelables.

De la théorie à la pratiqueLe Sommet solaire des îles, qui s’est tenu au mois de mai 1999 surl’île de Tenerife sous les auspices de l’UNESCO, du World SolarProgramme (Programme solairemondial, 1996-2005) et d’INSULA,a mis en évidence que c’est précisé-ment sur les territoires insulaires quela stratégie de la durabilité énergé-tique est pleinement consolidée.

Les conclusions de l’Agenda solairedes îles émanant du Sommet allèrenttotalement dans ce sens, et appuyè-rent à nouveau les résultats de laSession spéciale de la XXIIe Assembléegénérale consacrée aux îles. Lors decelle-ci, l’eau, l’énergie et le tourismefurent considérés comme étant dessecteurs stratégiques.

Cette interrelation étroite entre desactivités fondamentales pour la survieactuelle des îles a en fait poussé à ce que les politiques énergétiquesportant sur les sources d’énergiesrenouvelables, formulées sur papier,se traduisent, en l’espace de quelquesannées seulement, en maints projetset réalisations ambitieuses. Et c’estprécisément sur les îles que sont misen œuvre des projets renouvelablesà 100%, quelque chose qui étaitabsolument impensable il n’y a que quelques années encore. Onpeut citer, dans ce sens, El Hierro(Canaries), Samsø, Aran, LaMaddalena, Galápagos et quelquesîles grecques. À El Hierro, parexemple, d’ici peu, tous les besoinsénergétiques seront couverts à partird’un système éolien hydraulique, qui permettra d’assurer l’approvision-nement en énergie électrique del’île, et ce avec une sécurité et unefiabilité totales.

Un autre grand domaine d’action, àl’heure actuelle, implique le binômeeau-énergie, deux éléments déjàmaintenant inséparables sur les îles.Dans ce sens, le Programme solairemondial vise à renforcer la stratégiede la production propre d’eau. Il ne faut pas oublier qu’il existe, d’oreset déjà, sous toutes les latitudes, des îles qui dépendent de systèmes de dessalage pour pouvoir survivreet se maintenir dans des conditionsenvironnementales non compétitivesen matière d’eau.

Parmi les facteurs découlant de cenouveau scénario des besoins insu-laires, il faut relever tout particuliè-rement le tourisme. Et, ici aussi, oncommence à assister à des réalisationsquelque peu surprenantes. L’Institutdu Tourisme responsable a lancé, en collaboration avec INSULA, lacampagne «Hôtels durables pourdes destinations durables» en vued’appuyer une nouvelle approche en matière de développementtouristique. Le point culminant decette campagne est la création d’unréseau international d’hôtels et decentres touristiques insulaires deréférence qui se caractérisent de par leur efficience énergétique etl’utilisation maximale des sourcesd’énergie renouvelables, y comprisl’emploi de systèmes passifs et laconstruction bioclimatique.

Ces quelques remarques montrentbien l’éventail encore à déployerdans le domaine des capacitéstechnologiques développées pourrépondre à la condition insulaire,même s’il faudra, dans ce sens,surmonter d’importantes barrièressur le plan du marché et de laformation technique.

En effet, nous ne devons guèreoublier que les aspects énergétiquesenglobent, sur les îles, une dimensionhumaine fortement liée à la longueaventure de la survie insulaire. Detout temps, l’habitant des îles s’estvu obligé de trouver l’abondance

36 Liaison Énergie-Francophonie • N° 46

Le Programme solaire mondial : une nouvelle dynamique pour les EnR 37

dans la pénurie. Il s’agit là de toutun ensemble d’idées qui apparaîtparfaitement résumé dans la phrased’un poète insulaire méditerranéen :

«L’habitant insulaire est un êtreapocalyptique. Et ce, parce qu’ilperçoit toutes les menaces. Il estindolent, et cesse de l’être dans lamesure où il est obligé de survivre.L’habitant insulaire est dédaigneux,hautain et simple. Un insulaire estun homme dans un rocher, et aussiun homme comme un rocher. Il nepeut pas tourner le dos à la géogra-phie, parce qu’il en est le fruit. C’estun homme obsédé par les voyages,et menacé par ceux-ci. Il est, toutcompte fait, l’habitant d’un paradiset d’un enfer».

Près de 90 % de la population de notre continent n’a pas accès à l’énergie marchande. C’est làune situation aberrante au seuil du troisième millénaire. Heureusement, grâce aux progrèsscientifiques et techniques qui rendent possible aujourd’hui l’exploitation des énergies nouvelleset renouvelables que sont la biomasse, le vent, l’eau ou le soleil, des solutions satisfaisantes ànotre déficit actuel sont à notre portée.

Je souhaite ardemment, en ma qualité de Président du Conseil Solaire Africain, que l’« espritd’Hararé » continue sans cesse de nous inspirer, afin que nous gagnions notre combat pourl’autosuffisance énergétique, étape obligée pour un développement durable.

Son Excellence,Monsieur Abdou Diouf

Président de la République du Sénégal de 1981 à mars 2000

Président du Conseil Solaire AfricainFévrier 1998

Sénégal

En juin 2000, l’IEPF a organisé deux ateliers nationaux sur la restructurationdu secteur électrique. Le premier s’est tenu du 14 au 16 juin à Ouagadougou,Burkina Faso, et le deuxième a eu lieu du 20 au 22 juin 2000 à Conakry,Guinée. Ces ateliers ont pour objectif de mettre au point un programme derenforcement des capacités techniques, juridiques, financières et économiquesdes acteurs impliqués dans les réformes en cours dans ces pays. M. DibongueKouo ([email protected]), responsable du programme « Politiques énergétiques »à l’IEPF, s’occupait de coordonner ces ateliers.

Brève

INSTITUT DE L’ÉNERGIE ET DE L’ENVIRONNEMENT DE LA FRANCOPHONIE (IEPF)56, RUE SAINT-PIERRE, 3e ÉTAGE, QUÉBEC (QUÉBEC) G1K 4A1 CANADA