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DROIT PROCESSUEL CHAPITE 1 – LES JUGES DE LA FAMILLE Famille : « concept introuvable » aux définitions à géométrie variable (Art. 12 e 16 DDHC, art. 10 Pré. C°46) - « au fond chaque famille a une destinée qui passe par plusieurs phases au fil des ans » J. Carbonnier - « ménage d’une personne » Juges : - Création JAF (Loi 8 janv. 1993), existence d’autres juges (Pénal, Com.) - Concentration du contentieux = 1 seul juge : Familiengerich, Family Division, Tribunal de la famille II – COMPETENCES II – MOYENS D’ACTION A – JUGES DU COUPLE JAF, juge unique du TGI - Divorce : prononcé, conséquences, homologation, prestation compensatoire et pension alimentaire et révision - Conciliateur , Juge de la mise en état, des REF, de l’urgence - Résidence de la famille OU résidence habituelle de l’enfant OU du parent qui exerce seul l’AP OU défendeur MAIS SI demande conjointe = choix des parties d’1 des lieux de résidence des époux Appréciation au jour de Dm en D (requête initiale) TGI - Compétence résiduelle en matière de divorce - Contentieux du changement de RM : sur requête conjointe des époux SI opposition / mineur ALORS homologation / refus motivé - Nullités du mariage : mariage blanc, bigamie… - Rupture unilatérale PACS : intérêt patrimonial JDT : - Majeurs et mineurs - Couple en crise : art. 217 à 219, conjoint HEMV - Protection personnelle et patrimoniale des PPHYS B – JUGE DE L’ENFANCE JDE : - Magistrat TGI, compétence civile + pénale - Compétence exclusive mesures éducatives, retrait et exercice de A –MESURES o Entre époux : Pacification des litiges L 26 mai 2004 - Requête unique pour Dm en divorce de l’art. 251 - Mesures provisoires (art. 255): injonction / proposition de rencontrer un médiateur, pension alimentaire, désignation de prof pour inventaire - Volonté de favoriser l’accord entre époux Entre enfant et parent : - JAF, chef d’orchestre du divorce : o Suppression de droits de visite (373-2-1), rarement retrait de l’AP (danger / motifs graves), Confier l’enfant à un tiers o Délégation de l’AP (art. 377) - JDE, mesures d’instructions : o Protège l’enfance en danger, saisine + aisée, action + rapide o Pouvoir d’ordonner enquêtes sociales, expertises psy o AEMO, AEA à la demande des parents oui de l’ASE, du tuteur, du mineur… - JDT : saisine d’office, mesure de tutelle - TGI : o Dm de déclaration d’abandon : accouchement sous X, enfant confié à l’ASE délégation de l’AP à un tiers adoption / restitution de l’enfant à ses parents biologiques. Pupille de l’Etat o Délégation indirecte (224-8 CASF) : meilleur projet d’adoption

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DROIT PROCESSUELCHAPITE 1 – LES JUGES DE LA FAMILLE

Famille : « concept introuvable » aux définitions à géométrie variable (Art. 12 e 16 DDHC, art. 10 Pré. C°46)- « au fond chaque famille a une destinée qui passe par plusieurs phases au fil des ans » J. Carbonnier- « ménage d’une personne »

Juges : - Création JAF (Loi 8 janv. 1993), existence d’autres juges (Pénal, Com.)- Concentration du contentieux = 1 seul juge : Familiengerich, Family Division, Tribunal de la famille

II – COMPETENCES II – MOYENS D’ACTIONA – JUGES DU COUPLE

JAF, juge unique du TGI- Divorce   : prononcé, conséquences, homologation,

prestation compensatoire et pension alimentaire et révision

- Conciliateur , Juge de la mise en état, des REF, de l’urgence

- Résidence de la famille OU résidence habituelle de l’enfant OU du parent qui exerce seul l’AP OU défendeur MAIS SI demande conjointe = choix des parties d’1 des lieux de résidence des épouxAppréciation au jour de Dm en D (requête initiale)

TGI- Compétence résiduelle en matière de divorce- Contentieux du changement de RM   : sur requête

conjointe des époux SI opposition / mineur ALORS homologation / refus motivé

- Nullités du mariage   : mariage blanc, bigamie…- Rupture unilatérale PACS   : intérêt patrimonial

JDT :- Majeurs et mineurs - Couple en crise   : art. 217 à 219, conjoint HEMV- Protection personnelle et patrimoniale des PPHYS

B – JUGE DE L’ENFANCE

JDE :- Magistrat TGI, compétence civile + pénale- Compétence exclusive mesures éducatives, retrait et

exercice de l’AP notamment pendant procédure de divorce des parents

- Saisines limitées   : père, mère, enft, Proc., juge- Provisoire   : relais Si santé, sécurité, moralité en danger

JAF, juge « naturel » de la famille- Dm de délégation d’AP, attribution de l’exercice de

l’AP, constat d’exercice commun / statue sur l’exercice unilatéral

- Résidence de l’enfant, droits de visite, contribution à l’entretien de l’enfant

JDT- SI décès / HEMV des parents, domicile du mineur- Gestion des biens de l’enfant (Tutelle / AL), saisine

JDE/JAF pour actes personnes de l’enfant, émancipation > 16 ans

TGI- filiation, art. 378 C. Civ. Désintérêt des parents.

A –MESURESo Entre époux : Pacification des litiges L 26

mai 2004- Requête unique pour Dm en divorce de l’art. 251- Mesures provisoires   (art. 255): injonction / proposition

de rencontrer un médiateur, pension alimentaire, désignation de prof pour inventaire

- Volonté de favoriser l’accord entre époux     Entre enfant et parent :

- JAF, chef d’orchestre du divorce   : o Suppression de droits de visite (373-2-1),

rarement retrait de l’AP (danger / motifs graves), Confier l’enfant à un tiers

o Délégation de l’AP (art. 377)- JDE, mesures d’instructions   :

o Protège l’enfance en danger, saisine + aisée, action + rapide

o Pouvoir d’ordonner enquêtes sociales, expertises psy

o AEMO, AEA à la demande des parents oui de l’ASE, du tuteur, du mineur…

- JDT   : saisine d’office, mesure de tutelle- TGI   :

o Dm de déclaration d’abandon : accouchement sous X, enfant confié à l’ASE délégation de l’AP à un tiers adoption / restitution de l’enfant à ses parents biologiques. Pupille de l’Etat

o Délégation indirecte (224-8 CASF) : meilleur projet d’adoption

o Retrait de l’AP (378 s. C. Civ.) Si enfant victime d’infraction pénale, désint^ manf.

B – CONFLITS DE COMPETENCES JAF / JDE : Décision JAF modifie l’exercice de AP MAIS saisine du JDE par un parent CAR dangerArt. 375-3 al. 2   : modif / JDE SI fait nouveau (Requête en Divorce et Séparation de corps, résidence et droits de visite depuis L 5 mar 2007) MAIS modif Dt visite impossible par JDE MAIS Civ. 1ère 14 mars 2006 : interprétation extensive de l’art. 375 au profit du JDE Enfants étrangers isolés : JDE saisi et non JDT Absence d’AP, enfant à l’ASE : mesure d’AEA, délégation AP au JAF(377) , retrait AP au TGI (378-1), déclaration judiciaire d’abandon au TGI (350),tutelle (373 Enfant / Tiers :JDE statue et non JAF en pratique TGI / JAF : décisions du JAF/TGI, Th accessoire Compétence territoriale :

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CONCLUSION A. GOUTTENOIRE Divorce sans juge :

- uniquement pour DCM + sans enfant- juge notaire POUR désengorge les tribunaux MAIS contentieux post-divorce- Avocat obligatoire s’efface , Privatisation du divorce

Eclatement des compétences pour RM- art. 217 à 219 : JDT- art. 220 s. : JAF

I – LE JAF II – CONFLIT DE COMPETENCES Double compétence : couple + enfant i 4 mars 02

- délégation-partage   : permet à un tiers de participer à l’exercice de l’AP plus favorable que la délégation d’AP « misérable »

- 0 compétence JAF si désaccord SI exercice commun de l’AP   :

- art. 371-4   : droit d’entretenir des relations avec ses grands-parents, droit de l’enfant, grands parents peuvent saisir.

Anticipation du règlement des effets du divorce- Conciliation, Médiation- Pouvoir d’investigation (sans secret professionnel)

= mesure d’enquête sociale attentatoire aux libertés individuelles + points de rencontres (visites médiatisées) ont un fondement juridique depuis Loi 5 mars 2007

JDT / JAF :- JDT, surveillance patrimoniale de l’AP et autorisation

dans le cadre de l’administration légale (pure et simple / sous contrôle judiciaire)

- Loi 5 mars 207, modification de la tutelle des mineurs : compétence JAF pour autorisations SI désaccord des parents

JDE / JAF :- JDE, juge d’appel du JAF, saisi plus facilement- Art. 371-4 : AJ Famille, Eté 2007

Enfants étrangers isolés- JDT saisi pour tutelle mais 0 compétence sur la

personne de l’enfant- JDE saisi, Conseil Général compétent pour recueil des

mineurs étrangers isolés (Loi 5 mars 2007)- Saisine des 2 possible   : en pratique par l’Ase !

Dossier d’Assistance Educative- F   : JDE place l’enfant chez son père car la mère est

schizophrène. JAF saisi par la mère fille récupérée noyée dans la baignoire. Responsabilité de l’Etat Français. Affaire Bretonne

- JAF peut-il avoir communication o Oui SSI Dm du JAF Principe du contradictoire Parties identiques devant JAF/JDE

L’ASE a accès au dossier MAIS pièces retirées par le juge si danger enfant / tiers DONC accès au JAF MAIS avocat DONC on ne peut autoriser le retrait de pièces LQ il y a un avocat

Identité des parties JDE -- JAF (père) (grands-parents) (AP)

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CHAPITRE 2 - LE MINEUR ET LES PROCEDURES JUDICIAIRES (AU CIVIL)I – L’ENFANT, PARTIE AU PROCES CIVIL II – L’ENFANT, ENTENDU

A – PRINCIPE   : REPRESENTATION DE L’ENFANT « substitution de la volonté de la personne qui touchera cet acte, la volonté d’une personne qui lui sert d’organe » R. Savatier Parents : mineur incapable DONC parents titulaires de l’AP (+ exercice, art. 371-1 C. Civ.) et administrateurs légaux (art. 389-3) DONC actes juridiques au nom et à la place du mineur. Administration légale pure et simple / sous contrôle judiciaire SI décès ou privation de l’AP d’un des parents Administrateur ad hoc :

- Depuis Loi 6 avr. 1910, désigné par décision de justice pour organiser la défense des intérêts d’une enfant

- Contradiction d’intérêts entre l’enfant / représentants légaux constatée par le juge : ASJF (Civ. 1ère 1999)

- Perte du monopole du JAF, nomination exceptionnelle CAR substitution aux parents

- Objet et durée du mandat définis strictement : pouvoir d’accomplir seuls les actes d’un tuteur sans autorisation du conseil de famille, désignation dans procédures où enfant non pourtant partie.

Avocat : instauré par CIDE, assiste la Parole de l’Enfant

B – ACTION PERSONNELLE DE L’ENFANT Action en justice, droit d’être entendu en justice sur le fond :

- ouverte SI intérêt, qualité et capacité à agir OR Mineur incapable DONC exception initiale / subsidiaire prévue (parents défaillants)

- €   : o Saisine CEDH personnellement MAIS épuisement voies de recours

interne. MAIS saisine en pratique via représentant légalo Droit de demander réparation devant jur° interne : art. 13 Cedh, Z c/

Royaume Uni, 10 mai 2001 c/ Anderson c/ Suède 1992 Îlots de droit à faire valoir personnellement ses prétentions :

- Action en recherche de paternité par les parents mineurs d’un mineur : art. 328- Action en recherche de maternité : enfant (art. 325)- Autorité parentale : Parents et MP uniquement SAUF

o Assistance éducative : Intérêt de l’enfant en dangero  Doct. : ISE donc enfant présento Action e justice = droit subjectif + expression d’une liberté publique,

d’accéder à la justice

A – CONSECRATION DU DROIT A LA PAROLE DE L’ENFANT Niveau international :

- Art. 12 + 13 CIDE : droit de l’enfant doué de discernement d’être entendu dans les procédures le concernant. Applicabilité directe depuis RJp Cass. Civ. 1ère 18 mai 2005 + 22 nov. 2005

- CEDH, 9 juin 1998, Bronda : volonté de l’enfant de 14 ans de ne pas quitter sa famille à sérieusement prendre en compte MAIS CEDH, 23 sept. 2003, Sophia Dagrun Hansen : volonté SSI 0 pression parentale ET CEDH, 8 juill. 2003 Sahin c/ Allemagne : seuls souhaits à ne pas prendre en compte.

CEEDE, 4 juin 1996, Ratifiée / Fce fin 2007 : Cf art. 3, droit véritable- Art. 24 CEDFUE : libre expression de l’opinion des mineurs- Art. 11, 23, 41 et 42 REGL Brux. II Bis : mise en œuvre de la Convention de La

Haye 25 oct. 1980, motifs de non reconnaissance en matière de responsabilité parentale, force exécutoire des droits de visite et retour d’enfants en cas d’enlèvement international

Niveau national- Un texte général, conformité au droit européen   : art. 388 C. Civ.

o Avant 2007 : Rejet d’audition du mineur SI défaut de discernement, mineur déjà entendu, risque de pression parentale

o Depuis L 5 mars 2007 : audition de droit- Mosaïques de textes particuliers

o Modalité d’exercice de l’AP : sentiment de l’enfant (373-2-11)o Mesure d’assistance éducative : art. 1182 NCPC, 388-1 C. Civ (ROP

selon Civ. 1ère 30 juin 1981 + 25 juin 1991) CAR décisions graves impliquant rencontre avec le juge SAUF déjà entendu et rejet motivé (0 discernement, Cass. 14 Fév 2006)

o Dispense de comparution à l’audience : art. 1189 NCPCo Emancipation audition : art. 477o Changement de nom, prénom (60), adoption (345) consentement du

mineur de plus de 13 ans à peine de nullité, audition des mineurs de 13 ans toujours possible sur 388-1 C. Civ.

B – MISE EN ŒUVRE Demande d’audition : droit au mineur de faire la dm d’être entendu L2007 Droit au silence :lutte c/ utilisation d’enfant comme « témoin » Organisation de l’audition : directe par le juge, assisté par avocat, accompagné par une personne de son choix (sauf refus par juge car c/ ISE) Effets : aucune qualité à la procédure conférée

Parole de l’enfant : consigné dans PV

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CONCLUSION (A. GOUITENOIRE) Mineur, sujet de droit : objet sujet de droit pour CIDE -- au-delà de sa protection -- procéduralisation du droit de la famille depuis loi 1980 (lim. AP)

I – ENFANT, PARTIE AU PROCESE CIVIL II – L’ENFANT ENTENDUA – PRINCIPE   : REPRESENTATION DE L’ENFANT

Représentation classique = volonté du représenté OR représentation parentale = volonté du représentant CAR Pb de capacité juridique DONC écran opaque ! Affaire Gabriel Russier : institutrice séduit par un élève mineur, elle finit par se suicide Action des parents pour atteinte à la vie privée alors que le journaliste relate les propos du mineur « Touche pas à ma filiation » A. Gouttenoire Administrateur ad hoc :

- Défense d’une position autonome   : art. 3-1 CIDE : ISE donc maintien PE et écarte expertise biologique + Cass. : Grand père conteste la filiation (PE : 5 ans auj. + réouverture du délai de contestation majorité)

- Représentation de l’enfant non partie   : Si DAP, père apprend qu’il a un enfant et veut le récupérer alors levée de DAP, AAH pour protéger ISE

- Procédure d’assistance éducative   : o Mineur juridiquement capable sous réserve de discernement OR que

faire si partie à la procédure ET sans discernement ? Représentation (A. Gouttenoire) … par AAH (TGI Lyon) AAH liste (décrets), avocats, assoc., anciens TS, Pdt CG

o Mineur étranger isolé : nomination AAH MAIS hypocrisie Car idem retour à la frontière DONC obligatoire mais asile dans les 2 jours !

B – ACTIONS INTENTEES SEULES PAR LE MINEUR

Procédure d’assistance éducative : saisine JDE Incapacité du mineur = protection MAIS si danger ALORS capacité  Loi 2002, Avenir de l’Ecole : mineur de +16 ans veut continuer ses études mais ses

parents refusent Capacité substantielle reconnue au mineur : LEG W Mineur parent, Nationalité (apd 16 ans), Mariage (18 ans)

A – DROIT A LA PAROLE DE L’ENFANT Applicabilité de la CEEDE : en 1993, refus d’applicabilité directe CAR Dr FR non adapté Bruxelles II Bis + Couple dans le Lubéron :

- Texte de compromis qui organise l’audition du mineur dans la procédure Le plus gros contentieux en matière d’enlèvement d’enfant Fce/All. CIRC Mars 2007 Chancellerie : nécessité d’entendre l’enfant

Texte général national (388-1) et textes particuliers :g- audition de l’enfant- émancipation- changement de nom / adoption SI mineur de + 13 ans

Convention de La Haye, 25 oct. 1980 :- Principe = retour de l’enfant- Exception = refus de retour de l’enfant SSI

o Retour dangereux établio Refus de l’enfant du retour exprimé dans des conditions sereine

(Arrêt Sophia G), Turquie, pression exercée sur l’enfant. Une petite fille demande à être entendue par le juge au cours de l’enquête sociale. Jamais entendue, demande par un tiers refusée.  en pratique : demande indirecte / parent ou avocat d’enfant ! (Revue Dr. Famille Déc. 2007)

B – MISE EN ŒUVRE Audition de droit SSI conditions remplies Enfant = partie, préconisé par P. Murat Discernement : présomption de discernement apd moment où Dm faite / enft Audition de l’enfant # interrogatoire qui sert la cause du divorce Audition indirecte par avocat  Accompagnateur : 0 régime jur, mission a juridique (voir schéma !) Effets de l’audition : enfant à la périphérie de l’instance, non partie Parole de l’enfant : consignation / PV non dans le détail mais tendance générale « on ne peut faire de l’audition de l’enfant un chambre noire d’où il n’en sortirait rien » Rivier, contenu de la décision donné mais non sentiment.

Note R. Dati, Suppression de la double compétence JDE au civil et au pénal pour un même mineur = AS : passage dans la délinquance considèrent que ce doit être le même juge, information du passé (AEA) pour mesure pénale répression et non assistance éducative A. Gouttenoire :

Interdiction de cumul des fonctions (protection / punition) au nom de l’impartialité (art. 6 CEDH) Bébé dans la poubelle = JDE saisi pour mesure éducative bébé + mère + délaissement de mineur ! Resocialiser et punir !

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CHAPITRE 3 – LES MINEURS DELINQUANTS Minorité pénale ?

- NON   : dès que le mineur est doué de discernement il est pénalement responsable, Pas d’immunité pénale- Responsabilité pénale   : OUI mais Dt FR sanctionne par mesures éducatives et non par une peine- Droit pénale des mineurs + répressif   : écarter l’excuse de minorité pour < 16 ans, sanction éducative.-

I – MINEUR DELINQUANT Mineur juridiquement capable à la procédure # mineur victime sera représenté Tendance à faire sortir l’enfant de l’enfance lorsqu’il est délinquant : 2°GM, revirement et tendance à protéger l’enfant délinquant aussi avec des mesures éducatives dont le vecteur est la procédure. Spécificité de la procédure et spécialisation des juridictions : DCC 11 août 1993, CEDH, 1999 + 204

- JPE / JDE, TPE, Cour d’Assises des Mineurs, Chambre des mineurs avec 2 magistrats spécialisés en appel- JDE   : double casquette : civile + pénale, procédure spéciale- Lettre R. Dati   : Droit de + en + technique, opportunité que le juge ait compétence hors assistance éducative

mineur jugé au pénal sans regarder le dossier d’assistance éducative formation spécialisée, réseau pour assistance éducative + pénal

- Personnalisation des peines renforcée en droit pénal - Non publicité des débats   :

o Principe pour CEDH + Droit FR CAR Erreurs de jeunesses ne se poursuivent pas dans la vie d’adulte à l’instar des mesures éducatives, Droit à une 2° chance

o Idem mesures casier judiciaire.- Affaire T & U c/ RU : GB connaît ne immunité pénale des mineurs qui tombent ensuite dans le système public des

majeurs : 11 ans à l’époque. Participation effective empêchée selon la CEDH s’ajoute au principe matriciel de présence et participation du mineur à son procès.

- Part de responsabilité parentale   : Mesure prise rigoureuse (pas de sanction 6 mois après l’acte) et proportionnelle à l’évolution du mineur depuis les faits. Le passage à l’acte est souvent isolé. Mais les MAP sont prises par le Parquet sans avocat, atteinte à la présomption d’innocence. Intervention de la PJJ + assistances éducatives.

- Protection renforcée des droits de la défense   : avocat obligatoire. « les mineurs ont leurs juges et leurs avocats », délinquance récurrente !

- Interrogatoires de mineurs depuis Loi Perben II 9 mars 2004   : C. Cass. a refusé d’annuler la procédure alors que l’enregistrement n’avait pas fonctionné.

- Médecin lors GAV   : rétention mineur de 10 à 13 ans = idem GAV mais 12h.

II – APPORT DE LA LOI DU 5 MARS 2OO7 Composition pénale ouverte du mineur Présentation immédiate : privilégier la voie judiciaire, le Parquet n’est pas juge Infractions particulières : TAG, Happy

III – MINEUR VICTIME Circonstance aggravante pour auteur + lien victime / auteur (asc./desc.), la plupart mineur de 15 ans Infractions spécifiques :recours à la prostitution de mineur, atteintes sexuelles sur mineur de 15 ans, non représentation d’enfants, privation d’aliments et de soins,interdiction de vente de produits (tabac, alcool) mineur au W, personnes vulnérable Mineur incapable juridiquement d’agir DONC risque d’extinction de la prescription : non opposable au mineur, retardée (meurtre viol, tourisme sexuel) MAIS Capacité du mineur à la procédure Accompagné par AAH : CPC, protection des intérêts de l’enfant Cass. Oct. 2006   : Saisine JDT pour désignation AAH par le père accusé par la mère de viol sur enfants lors d’une procédure de divorce. Elargissement désignation AAH, le JDT devient juge de droit commun au civil et a pénal (art. 382 C. Civ.) Procédure Mélanie : filmer les enfants victimes

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CHAPITRE 4 – LES ACTIONS RELATIVES A LA FILIATION

I – INTRODUCTION I – ETABLISSEMENT JUDICIAIRE Aujourd’hui : reconnaissance non réservée aux enfants naturels CAR le mari peut reconnaître l’enfant SANS que la mère ne l’en empêche Perte de l’intérêt de l’action en rétablissement de la présomption de paternité Egalité des filiations dans le C. Civ. Sur |effets| Vérité : principe uniquement, exceptions nombreuses Stabilité : CF. FulMal Action à fin de subsides : conservée pour les enfants incestueux, accessoire à la filiation Parquet civil, autorité de l’OEC Actions relatives à l’établissement de la filiation : |enfant | # contestation à tout le monde

2 actions : Pater / Mater Obstacles : inceste, accouchement sous X (Cedh 10 janv. 2008) FNR : supprimée par ratification de l’ORD. 2005 Preuve de paternité et maternité :

- Mater semper certa est : Cf CMPDécalage entre mère définie par l’accouchement et la mère génétique. CA Paris, mère porteuse

Possession d’état- Délai de 5 ans 10 ans pour acte de notoriété

constatant la possession d’état- PE post mortem

III – CONFLITS DE FILIATION Principe chronologique :

- Conflit de filiation en apparence résolu CAR confusion date de la filiation / date des effets de la filiation- SI pluralité de reconnaissance prénatales / présomptions de paternité toutes effet à la naissance

Parquet- Contestation de la filiation SI fraude / indices (art. 336)- PE opposable au MP ?

o MP soumis au même régime (AG)o Art. 333 al. 2 « nul sauf MP » : MP peut agir pendant 10 ans qqsoit la durée de la PE DONC si PE + de 5 ans

dont le MP se rend compte ALORS contestation de la filiation (si fraude) CMP : intérêt supérieur de l’enfant !

Acte d’enfant sans vie libéré par la C. Cass. (Cf. colloque)

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CHAPITRE 5 – DIVORCE Pacification : entrée de la médiation Droit de divorcer : ADLC, Claude de dureté supprimée

- séparation depuis + 2 ans- « divorce répudiation » selon H. Fulchiron MAIS séparation de deux ans !

Sévérité du divorce pour faute : lutte contre les faux divorces pour faute DCM : + rapide, 2/3 mois à Lyon, 1 seule audience Tous divorces contentieux ont assignation Accélération des effets patrimoniaux du divorce : mesures procédures pour anticiper Passerelles favorisées qqsoit le cadre : Divorce à la carte, faveur faite aux accords Divorce pour faute maintenu !

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LES JUGES DE LA FAMILLE

INTRODUCTION

« A chacun sa famille, a chacun son droit » mais qu’en est-il à l’égard des ses juges ?

Au sens large, la famille peut être définie comme l’ensemble des personnes descendant d’un auteur commun et rattachées entre elles par le mariage et la filiation.Dans un sens plus étroit, la famille correspond au groupe formé par les parents et leurs descendants, ou même plus restrictivement encore, par les parents et leurs enfants mineurs1.

Mais a-t-on une véritable définition juridique de « la famille » ?

La famille n’est pas définie dans le code civil où le mot apparaît rarement  ; il n’existe pas de titre « la famille » dans le code napoléon ; le mariage et la filiation se trouve sous le titre « les personnes » car le code ne connaît que des liens juridiques entre les personnes (liens entre les époux, liens parents/enfants, liens frères/sœurs…). La famille n’a pas de personnalité juridique, ce n’est qu’une collection de liens interindividuels.

Certes il existe un code de l’action sociale et des familles et un code de la famille et de l’aide sociale, mais il n’existe pas de « code de la famille » au sens propre du terme.En outre, le mot famille ne recouvre pas le même sens selon les différents codes et ce, du fait de l’autonomie de plusieurs pans du droit.

Il est donc difficile de trouver une unité structurelle à la notion de famille.

Aussi, peut-on tenter de définir la famille par ses fonctionnalités. La famille a une fonction politique : c’est la cellule de base de la société, le lieu de socialisation de l’enfant ; c’est le lieu de reproduction de la société, la famille est un lieu de socialisation privé.

La famille a également une fonction économique : par le passé, la famille était surtout une unité de production. Ce rôle a diminué : aujourd’hui la famille est surtout envisagée comme une unité de consommation.

On peut aussi donner une définition d’ordre quantitatif : en 1804 la famille était légitime, juridiquement et socialement la famille était fondée sur le mariage. Aujourd’hui ce n’est plus vrai, il faut compter avec le concubinage et le Pacte Civil de Solidarité (PACS). Ainsi, alors que la famille du 19ème siècle était démographiquement une famille « mariée », à l’heure actuelle, la famille en chiffre est une famille morcelée.

Ces approches permettent-elles de trouver une définition de la famille ?

Il est à noter que le mot « famille » n’a pas un seul sens. La polysémie de ce terme se retrouve ainsi en sociologie.

Irène THERY, lors du Colloque de Sudres tenu en Janvier 2002 et publié chez BRUYLANT, « Le respect de la vie familiale au sens de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales  », propose quatre sens au mot « famille ».

Le sens romain : la famille romaine est caractérisée par son caractère étendu : la famille regroupe tous ceux qui sont sous la potesta du pater familias, à savoir non seulement les membres unis par un lien de parenté mais aussi les esclaves, les animaux…On retrouve ce caractère très large aujourd’hui à travers les familles recomposées, les familles homosexuelles.

La famille par la parenté consanguine, par le sang : mais attention, il ne s’agit pas de la biologie au sens strict du terme mais de la parenté qui nous est donnée socialement par la loi, par le droit.La filiation au sens sociologique, juridique, est toujours une donnée culturelle et pas nécessairement biologique, même si elle s’y adosse.

La parenté par l’alliance. On a ici un élargissement. La famille est alors le résultat de l’équation parenté plus alliance.La famille nucléaire : la famille réduite à son noyau : la famille conjugale : la famille-ménage. La perception et la

singularité de cette famille ne se révèlent qu’à partir du XVII – XVIIIèmes siècles.

Il faut aussi remarquer qu’il peut y avoir un décalage entre la définition usuelle que l’on retient et des définitions données dans tel ou tel domaine, des définitions conventionnelles.

1 Lexique des termes juridiques, Dalloz, 14ème édition 2003.

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Aujourd’hui, la définition usuelle de la famille c’est la famille nucléaire. Mais ce sens est interrogé. Or, comme le souligne Irène THERY, « quand les définitions usuelles cessent d’aller de soi, on se tourne vers les sciences du normatif » c’est-à-dire le juridique : c’est le métier du droit que de poser des normes. Il convient alors de se demander s’il existe dans notre ensemble de normes une définition de la famille ?

L’article 12 de la Déclaration universelle des Droits de l'Homme énonce « Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes. » ; L’article 16 poursuit ainsi : « 1. A partir de l'âge nubile, l'homme et la femme, sans aucune restriction quant à la race, la nationalité ou la religion, ont le droit de se marier et de fonder une famille. Ils ont des droits égaux au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution. 2. Le mariage ne peut être conclu qu'avec le libre et plein consentement des futurs époux. 3. La famille est l'élément naturel et fondamental de la société et a droit à la protection de la société et de l'Etat. » ; enfin l’ article 25.1 à son tour évoque le terme de famille mais n’apporte aucun élément définitionnel : « 1. Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ; (…) ».

L’article 10 du Préambule de la Constitution française de 1946 proclame que « la Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ».

L’article 12 sur le droit au mariage de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (CEDH) dispose « A partir de l’âge nubile, l’homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l’exercice de ce droit » mais ne définit pas ce qu’est la famille.

L’article 8.1 CEDH sur le droit au respect de la vie privée et familiale annonce quant à lui que «  Toute personne a le droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance » mais ne définit pas non plus la notion de famille.

Le constat est sans appel : il n’y pas de définition juridique de la famille.

Mieux vaut se résigner à constater qu’elle est à géométrie variable, qu’il s’agit d’une série de cercles concentriques au contenu éminemment variable (« Au fond, chaque famille a une destinée qui passe par plusieurs phases au fil des ans, J. CARBONNIER, Droit civil, t. 2, p. 15). Le cercle le plus large englobe toutes les personnes descendant d’un auteur commun. Peuvent s’y ajouter les alliés, voire d’autres personnes agrégées de façon ponctuelle aux intérêts familiaux. En resserrant le cercle, la famille peut se réduire au couple et à ses enfants, voire au seul ménage. Dans ce cercle étroit apparaissent parfois des structures atypiques  : famille monoparentale, famille recomposée (la recomposition familiale aboutissant au bout du compte à élargir à nouveau un cercle qui s’était réduit). A l’extrême, certains envisagent que la famille puisse se réduire au «  ménage d’une personne », désignant ainsi des personnes dont le célibat est interrompu par des aventures, tout en reconnaissant que « les mots jurent entre eux » (P. MALAURIE et H. FULCHIRON, Droit civil, La famille)2.

A l’instar de Myriam LALOUBERE, attachons nous à lister tout ce qui de près ou de loin régit les relations entre ces personnes en n’omettant pas de prendre en compte l’impact des politiques familiales sur l’évolution de « cette cellule sociale par excellence ».

La création par la loi du 8 janvier 1993 du juge aux affaires familiales, substitué au juge aux affaires matrimoniales, pourrait laisser croire qu’un seul juge est compétent pour tout le contentieux familial. Autant dire tout de suite que c’est un leurre. Dans notre système judiciaire, plusieurs juges sont appelés à être compétents dans la matière familiale : le juge aux affaires familiales naturellement, le juge des tutelles, le juge des enfants et le Tribunal de Grande Instance en formation collégiale. Le contentieux familial s’entendant des actions ayant pour objet la nullité du mariage, le changement de régime matrimonial, le divorce et la séparation de corps, la filiation, l’adoption, le changement de nom de l’enfant, l’obligation d’entretien et l’autorité parentale, les obligations alimentaires, les successions mais également tout ce qui touche aux mineurs en dangers et mineurs délinquants.

A titre liminaire, il est à noter que d’autres magistrats de l’ordre judiciaire qui, quant à eux ne sont pas «  spécialistes » du contentieux familial, connaissent des litiges touchant directement la famille.

A ce titre, le juge pénal est compétent pour connaître des infractions érigées par le législateur pour protéger la famille, tant dans son existence juridique : bigamie, défaut de déclaration de naissance, défaut de remise, substitution, simulation ou dissimulation d’enfant, enlèvement, non-représentation de mineur ; que dans son existence matérielle : délaissement de mineur, provocation à l’abandon d’enfant, abandon moral et éducatif de l’enfant, etc.

Le tribunal de commerce peut également être amené à statuer de manière incidente sur la famille, et plus particulièrement sur les régimes matrimoniaux ; c’est par exemple le cas lorsqu’un époux commun un bien revendique la qualité d’associé.

2 J.-J. LEMOULAND, V° Famille, Rép. Civ. Dalloz, 2005.

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Il est intéressant de voir comment est appréhendé le contentieux familial chez nos voisins européens 3. Certains connaissent un éclatement du contentieux, plus ou moins semblable au notre : en Autriche : le tribunal d’arrondissement est la juridiction de droit commun en matière familiale, le tribunal de l’arrondissement de Vienne est compétent quand aucun autre tribunal d’arrondissement ne se reconnaît compétent ; en Belgique, les juridictions compétentes en droit de la famille sont le juge de paix comme juge des référés en matière familiale (mesures urgentes) et le tribunal de la jeunesse qui statue à juge unique et constitue l’une des sections du tribunal de première instance ; au Luxembourg on dénombre non moins de quatre juges de la famille, comme en France, le président du tribunal d’arrondissement compétent pour statuer sur le divorce et ses conséquences, la filiation, l’adoption, le changement de régime matrimonial, la nullité du mariage (il est aussi compétent en référés pour prendre les mesures urgentes), le tribunal de la jeunesse statuant à juge unique peut modifier la décision sur la garde des enfants, le juge de paix est compétent en matière de pension alimentaire due pour les enfants et le juge des tutelles en matière d’autorité parentale.

Remarquons alors que de nombreux Etats ont relevé le défi, du moins ce qui nous semble l’être, de la concentration de tout le contentieux familial entre les mains d’un seul juge. Aussi, en Allemagne, la juridiction compétente est le tribunal de la famille (Familiengericht) statuant à juge unique ; en Angleterre et au Pays de Galles la Division de la Famille (Family Division) de la High Court ; en Espagne le tribunal civil de première instance ; aux Pays-Bas le tribunal d’arrondissement a une compétence de droit commun en matière familiale (Rechtbanken) ; en Pologne la chambre des affaires familiales et des mineurs du tribunal d’instance ; enfin, en Suisse le tribunal du canton a une compétence de droit commun en matière familiale.Cette unité du contentieux familial a le mérite d’une meilleure visibilité pour le justiciable et permet d’éviter l’écueil des conflits de compétence.

En définitive, il convient donc de savoir dans un premier temps quelles sont les compétences de chaque juge (I), puis quels sont les moyens d’actions dont ils disposent (II).

I- Quels juges pour quelles compétences ?

Il faut ici distinguer selon les juges qui vont intervenir au regard du couple (A) et ceux qui interviennent au regard de l'enfant (B) .

A- Les juges du couple

Ce sont ceux qui vont s'intéresser à la relation qui peut exister entre deux personnes, le plus souvent entre un homme et une femme liés juridiquement par le mariage mais pas seulement. Les juges ne seront amenés à se prononcer qu'en cas de conflit qui n'arrive pas à se résoudre de lui même.

1- Le juge aux affaires familiales

Il est un juge unique du tribunal de grande instance délégué aux affaires familiales. Il connait de presque toutes les questions liées au divorce (article 228 du Code civil). En effet, il a compétence pour prononcer le divorce quelle qu'en soit la cause, il en régle les conséquences dans les divorces contentieux ou homologue la convention que lui présentent les époux (convention nécessaire dans le divorce par consentement mutuel, conventions bienvenues dans les autres cas de divorce). Il est également seul compétent après le prononcé du divorce pour statuer sur la modification de la pension alimentaire et sur la révision de la prestation compensatoire ou de ses modalités de paiement. En outre, il exerce une mission conciliatrice (art. 252 et s. ; NCPC art.1071, al1), et est juge de la mise en état (NCPC art.1073), juge des référés (NCPC art.1073), et de l'urgence (NCPC art.1109).Sa mission est très particulière, il n'a pas à dire qui a raison ou tort. Il est un conciliateur dont la mission est de favoriser la recherche de solution entre époux pour les conséquences du divorce. Il est également un organisateur du provisoire aménageant la situation des époux et des enfants pendant la durée de l'instance. Enfin, il est le juge des litiges de l'après divorce, c'est à dire des modifications apportées à la prestation compensatoire et aux pensions alimentaires.

3 A.J. fam 2006 « La parole de l’enfant dans les procédures familiales en Europe ».

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Le juge territorialement compétent est celui où se trouve la résidence de la famille. Si les parents habitent séparément c'est le juge où réside le parent avec lequel réside habituellement l'enfant mineur en cas d'exercice commun de l'autorité parentale ou le lieu de résidence du parent qui excerce seul l'autorité parentale. Dans les autres cas, autrement dit quand il n'y a pas d'enfant, le tribunal territorialement compétent est celui du lieu de résidence du défendeur c'est-à-dire celui qui n'a pas pris l'initiative de la procédure.S'il y a demande conjointe, le juge compétent est selon le choix des parties celui du lieu où réside l'une ou l'autre des parties.Lorsque le litige porte uniquement sur la pension alimentaire, la contribution au charge du mariage, l'éducation de l'enfant ou la prestation compensatoire le juge compétent peut être celui du lieu où réside l'époux créancier. La compétence territoriale est déterminée par la résidence au jour de la demande ou en matière de divorce au jour où la requête initiale est présentée.Il faut bien comprendre que le JAF au regard du couple a toute compétence pour prononcer la dissolution du mariage et régler toutes les conséquences qui en découlent. Et il est, à ce titre, un juge de la famille.

2- Le tribunal de grande instance

Il n'a en matière de divorce qu'une compétence résiduelle. Il ne prononce le divorce que si le juge aux affaires familiales lui renvoie l'affaire, renvoi qui est de droit si l'une des parties le demande.Le TGI trouve également compétence dans le cadre d'un changement de régime matrimonial voulu par les époux en dehors de toute hypothèse de divorce. En effet, le projet de changement de régime matrimonial établi par acte notarié devra être homologué par le TGI de la résidence de la famille qui sera saisi par requête conjointe des deux époux. A noter que cette homologation judiciaire est nécessaire dans seulement deux cas : en cas d'opposition ou en présence d'enfant mineur. Le juge ne pourra qu'accorder ou refuser l'homologation, il ne peut se subtituer à la volonté défaillante des époux. Le refus d'homologation devant être motivé par l'interêt de la famille.Le tribunal de grande instance est également compétent sur toutes les questions relatives aux nullités du mariage.(mariage blanc, absence de consentement, mariage caché,bigamie).

Il faut noter que dans l'hypothèse d'une rupture de PACS si a priori le juge n'est pas amené à en connaître, l'article 515-7 al11 in fine précise que dans le cadre d'une rupture unilatérale, faute d'accord entre les partenaires, le juge statue sur les conséquences patrimoniales de la rupture, sans préjudice de la réparation du dommage éventuellement subi, notamment en cas de faute, tenant aux conditions de la rupture. La compétence revient alors au tribunal d'instance ou au tribunal de grande instance en formation collégiale selon le montant du litige.

3- Le juge des tutelles

Il est un magistrat du tribunal d'instance intervenant comme juge unique ainsi nommé en raison des fonctions essentielles dont la loi l'investit dans la protection des majeurs ou des mineurs incapables.Dès lors, on peut s'interroger sur son rôle au sein de la famille et plus particulièrement au sein du couple. Et pourtant, il intervient dans ce cadre à deux égards :- Lorsque le couple est en crise au titre des demandes d'autorisation et d'habilitation prévues par les articles 217 et 219 du code civil, lorsque le conjoint est hors d'état de manifester sa volonté (article 1286 NCPC). - Et d'une façon plus générale, lorsque l'un des membres du couple voire les deux ont besoin d'être protégés au titre des mesures de protection prévues par la loi lorsque au regard de l'altération de ses facultés mentales ou physiques une personne a besoin d'aide.Il faut noter que si sa première compétence est limitée au couple marié, au titre de la seconde il a une compétence générale à l'égard de toute personne qu'elle soit en couple au non. Mais, lorsqu'elle l'est, nécessairement, la protection mise en place, aura une incidence sur la vie du couple.

Mais la famille ne se résume pas à l'existence d'un couple, le plus souvent la notion de famille prend toute sa dimension avec l'enfant. Et c'est à ce titre de la relation entre parent et enfant que les juges sont souvent amenés à se prononcer.

B- Les juges de l'enfance

Plusieurs juges peuvent avoir vocation à statuer sur le sort d'un enfant et il n'est pas toujours facile de s'y retrouver. A priori, chacun d'eux a des fonctions et des objectifs bien définis.Selon qu'il est victime du décès de ses parents, de leur séparation, de leur abandon, ou de leur incapacité à le protéger, son sort pourra être tranché par le juge des tutelles, le juge aux affaires familiales (JAF), le tribunal de grande instance (TGI) ou le juge des enfants.

1- Le juge des enfants

Il est un juge du tribunal de grande instance qui est en charge des mineurs. Sa compétence est double à la fois pénale et civile.

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Nous évacuons ici sa compétence pénale bien que pouvant toucher la famille, c'est avant tout un problème de délinquance des mineurs, les mesures prises ne concernant que la personne du mineur. Ce qui nous intéresse avant tout, c'est sa mission en matière d'assistance éducative dans la mesure où cette compétence affecte la famille dans sa structure puisqu'il touche à la relation parent/enfant. La compétence du juge des enfants est déterminée de manière rigoureuse. Elle est exclusive pour prononcer une mesure d'assistance éducative, elle ne peut modifiée l'attribution de l'autorité parentale qui relève de la compétence des JAF et lorque les parents de l'enfant sont divorcés ou engagés dans une procédure de divorce, le juge des enfants ne peut retirer l'enfant de son mileu actuel que « si un fait nouveau de nature a entraîner un danger pour le mineur s'est révélé postérieurement à la décision statuant sur les modalités de l'exercice de l'autorité parentale ou confiant l'enfant à un tiers ». (article 375-3 Cciv). Pour empêcher des immixtions arbitraires dans la vie familiale, le droit de saisir le juge des enfants a été limité à tout ceux qui d'une manière quelconque connaissent de l'éducation de l'enfant c'est à dire le père, la mère, la personne ou le service à qui l'enfant a éte confié, le mineur lui même, le procureur de la république ou le juge d'office. L'intervention du juge des enfants est nécessairement provisoire ne s'inscrivant pas, a priori dans une perspective à long terme, mais entre un avant et un après, tant que les parents ne parviennent pas à mettre fin eux-mêmes au danger encouru par l'enfant. En effet, le juge des enfants intervient lorsque « la santé, la sécurité ou la moralité d'un mineur non émancipé sont en danger ou si les conditions de son éducation sont gravement compromises » (article 375 al1 Cciv). Il faut noter l'imprécision délibérée de ces notions qui ont pour objectif d'assouplir l'intervention du juge. En effet, à la différence du retrait de l'autorité parentale il n'est pas nécessaire que les parents aient commis une faute.Il faut noter qu'il est le seul magistrat qui reçoit une formation spécialisée systématique sur les questions relatives à l'enfance. Il est nommé spécialement dans cette fonction et n'est pas interchangeable dans une juridiction.

2- Le juge aux affaires familiales

Il est un juge du tribunal de grande instance nommé par le président et délégué spécialement aux affaires familiales.C'est le juge « naturel » de la famille et plus spécialement de la séparation familiale. Ainsi, comme il a été dit précédement, c'est lui qui connaît des affaires de divorce, de séparation des couples non mariés et de leurs conséquences à l'égard des enfants. C'est au regard de ces conséquences que sa compétence nous intéresse ici. Autrement dit, au regard de l'autorité parentale et donc de la situation de l'enfant. A ce titre le JAF a deux compétences. Il statue sur les demandes de délégation d'autorité parentale, qui consiste à en transférer l'exercice à un tiers auquel les parents ont confié leur enfant ou qui a recueilli ce dernier. Mais, surtout le JAF statue sur l'attribution de l'exercice de l'autorité parentale le plus souvent dans le cadre de la séparation des parents (divorce, séparation de fait, séparation de corps, séparation hors mariage), mais également en dehors de tout séparation, simplement lorsqu'il y a désaccord entre les parents au sujet d'une décision concernant l'enfant.Son rôle se limite à constater l'exercice en commun de l'autorité parentale ou de statuer sur l'exercice exclusif de l'autorité parentale d'un seul parent. Mais, en ce cas, le retait de l'autorité n'est pas motivé par le danger de l'enfant, mais l'exercice des droits et devoirs qui est confié à un seul parent au motif de l'interêt de l'enfant. Par exemple, lorsque qu'il y a une absence de communication qui affecte la prise en charge éducative. Le parent qui n'exerce pas cette autorité conserve des droits de visite et d'hébergement et un devoir de surveillance qui impose qu'il soit informé de toutes les décisions importantes concernant l'enfant.Le JAF est donc amené à statuer sur l'exercice de l'autorité parentale, la résidence principale de l'enfant, les droits de visite et d'hébergement et la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant.Il faut noter que le juge aux affaires familiales doit systématiquement se déterminer en matière d'autorité parentale en référence à l'intérêt de l'enfant d'où sa classification en tant que juge de l'enfance malgré l'incidence que cela peut avoir sur les parents.Par ailleurs, il est également compétent pour fixer les modalités des relations entre l'enfant et un tiers parent ou non (article 371-4 Cciv). Ce texte vise les grands-parents mais pas seulement. Il vise également tout tiers qui a, avec l'enfant, des relations privilégiées qu'il convient dans son intérêt de maintenir.Il convient de déterminer sur ce point en disant que le JAF est avant tout le juge de l'accord. Le mode normal de saisine du juge étant la demande d'homologation de la convention des parties (article 373-2-7 Cciv). La saisine contentieuse n'étant prévue qu'en second lieu (article 373-2-8 Cciv). De plus, même dans cette hypothèse le juge doit s'efforcer de concilier les parties et à tout moment un accord peut être soumis au juge (article 373-2-10 Cciv).

3- Le juge des tutelles

Il est un juge du tribunal d'instance non spécialisé. Sa fonction est de pallier à la vacance de l'autorité parentale, que les parents soient décédés ou dans l'incapacité de manifester leur volonté. Il ne dispose pas de pouvoirs propres de décisions à l'égard de l'enfant mais est chargé d'organiser sa protection et d'exercer un contrôle sur les décisions prises à son égard par les personnes compétentes.D'après l'article 393 du Code civil le juge des tutelles territorialement compétent est celui dans le resort duquel le mineur a son domicile.S'agissant de la compétence matérielle, le juge des tutelles n'est compétent qu'à l'égard de la gestion des biens de l'enfant mineur. Ainsi il pourra mettre en place une tutelle ou une administration légale sous contrôle judiciaire. Cependant, cela ne signifie pas qu'il ne puisse jamais intervenir dans un litige touchant à la personne du mineur. Son rôle de surveillance générale des administrations légales de son ressort doit le conduire, le cas échéant, à signaler au juge des affaires familiales ou au juge des enfants les difficultés ou anomalies constatées sur la personne du mineur. Le juge des tutelles est également compétent pour prononcer l'émancipation du mineur de plus de seize ans. Compétence

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exclusive qui accorde au mineur émancipé pleine liberté de disposition sur sa personne sous les seules réserves du mariage et de l'adoption.

4- Le tribunal de grande instance

Le TGI connaît des procédures tendant à faire et à défaire la filiation. Sa fonction peut être créatrice de liens au regard des procédures d'adoption ou d'action en recherche de paternité qui relève de sa compétence. Mais aussi destructrice de liens comme dans le cadre d'une contestation de paternité ou d'une déclaration judiciaire d'abandon. Il est également compétent en matière de retrait total ou partiel de l'autorité parentale sur le fondement des articles 378 et suivants du Code civil, dans le cadre d'une action autonome, dés lors que soit par des mauvais traitements, soit par une consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques ou un usage de stupéfiant, soit par une inconduite notoire ou des comportements délictueux, soit par un défaut de soin ou un manque de direction les parents mettent manifestement en danger la sécurité, la santé ou la moralité de l'enfant. Le tribunal jouit d'un grand pouvoir. Il peut être total en ce cas il prive les parents de tous les attributs de l'autorité parentale et ce à l'égard de tous leurs enfant ou seulement partiel en ne retirant que certains attributs de l'autorité parentale ou le limitant à certains enfants ou ne frappant qu'un seul parent.Ces magistrats ne sont pas spécialisés et sont, a priori, des non spécialistes des questions de l'enfance ou de la famille et pourtant leur compétence en la matière n'est pas négligeable.

Il faut donc constater un éclatement du contentieux familial au sein de l'organisation judiciaire qui améne plusieurs juges à prendre des décisions concernant la famille mais ces juges n'ont pas tous les mêmes pouvoirs. Et parfois leurs décisions s'interfèrent entre elles.

II- Quels juges pour quels moyens d'actions ?

Nous avons vu en quelles circonstances il était possible de faire intervenir des juges dans la sphère familiale. Une fois introduit, quels moyens d’actions disposent-ils dans leur sphère de compétences spécifiques ? (A) N’y a-t-il pas des collusions de procédures et des interactions entraînant des conflits de compétences ? (B)

A'- Les mesures envisageables

Les moyens d’actions mis à la disposition des juges de la famille sont nombreux car nombreux sont les juges intervenant dans la sphère familiale. Il y a d’abord les juges (JAF ou TGI) qui interviennent dans l’histoire du couple (alliance – mariage des étrangers, divorce et rupture du lien) et d’autres dans l’histoire de l’enfant (juge des enfants, juge des tutelles).

Ces quatre juridictions peuvent disposer, a priori, des mesures légales d’instruction prévue par le nouveau code de procédure civile et notamment celles exécutées par un technicien : enquête sociale et expertises, notamment en psychologiques et psychiatriques.

A chaque intervention, à chaque compétence, correspond des moyens d’agir, de prévenir, de protéger ou de sanctionner. Ils sont multiples : nous allons exposer les principaux à la disposition des juges.

1 - Concernant les relations entre les époux

La loi du 26 mai 2004 a donné au juge aux affaires familiales davantage de possibilité pour apaiser le conflit (C. Civ., art. 252-3) et tenter de régler les questions qui se posent au jour de l’audience, mais aussi pour anticiper et régler les questions qui se posent dans un proche avenir et en cela rassurer les parties, pacifier le litige (C. Civ., art. 255).

Une première mesure susceptible d’apaiser le litige réside dans le dépôt d’une requête unique sur le fondement de l’article 251 du code civil pour toutes les demandes en divorce.

Dans le déroulement de la procédure, le juge peut prendre des mesures provisoires dans des domaines variés (rapport personnel entre époux, intérêts pécuniaires). Par exemple il peut décider de :

- délivrer une injonction de rencontrer un médiateur, injonction qui ne contraint qu’à une rencontre et mais aussi de leur proposer une médiation. Cependant, l’injonction d’entreprendre une médiation est de portée limitée si la mesure n’est pas acceptée par le ou les époux (C. Civ., art.255, al. 1).

- Fixer la pension alimentaire et la provision pour frais d’instance (C. Civ., art.255, al. 6).- Désigner tout professionnel qualifié en vue d’élaborer un inventaire estimatif ou de faire des propositions quant au

règlement des intérêts pécuniaires des époux (C. Civ., art.255, al. 9). …

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Les actions entreprises dès l’audience de conciliation par le jaf sont particulièrement importantes car souvent, comme le montre la pratique, ces mesures sont ensuite reprises dans la décision de divorce prononcée par le juge.

Dans les relations entre époux, l’intervention du jaf se caractérise par une volonté de favoriser un consensus entre les époux, et de prendre des mesures acceptées par les époux à l’issue du divorce plutôt que de faire preuve d’autoritarisme judiciaire. Cependant, en cas de désaccord, le juge statue sur les désaccords persistants entre eux (C. Civ., art. 267).

2 - Concernant les relations entre l’enfant et ses parents

Le choix de recourir à telle mesure plutôt qu’à telle autre n’est pas toujours facile à opérer. Ce qui ressort cependant de l’ensemble des dispositions est le souci, non de sanctionner le parent ou le tiers ayant la charge de l’enfant mais d’assurer la protection de l’enfant tant dans sa personne que dans ses intérêts patrimoniaux.

La loi du 4 mars 2002 sur l’autorité parentale a considérablement accru les prérogatives du juge aux affaires familiales dans le champ de l’autorité parentale et donc de la protection de l’enfant par rapport à ses parents. Ainsi le juge aux affaires familiales dispose d’une compétence générale qui a fait dire qu’il devenait l’homme orchestre du divorce. Il peut être amené à prendre les mesures suivantes, (mesures ayant une large portée sur les relations entre les membres de la sphère familiale) :

Tout d’abord, le jaf peut être amené à prendre des mesure de suppression des droits de visite (art. 373-2-1, al 2, c. Civ.) pouvant aller jusqu’au rare retrait de l’autorité parentale. Moyens utilisés en cas de danger ou de motifs graves. Le parent est écarté mais reste tenu de contribuer à l’entretien du mineur.

Il est également de sa compétence de prendre des mesures visant à confier l’enfant à un tiers (art. 373-3, al 2 et al.3, c. Civ.). L’un des parents ou le ministère public saisit par un tiers peut demander du vivant du parent déficient ou à l’occasion du décès de l’un d’eux, de confier l’enfant à un tiers, contrairement au principe selon lequel l’enfant doit demeurer avec ses parents. Il s’agit souvent dans ce cas d’un divorce conflictuel ou de circonstances exceptionnelles. Le tiers peut être chargé par le juge de requérir l’ouverture d’une tutelle (art. 373-4, al. 2 C ; Civ.) qui coexistera avec l’autorité parentale détenue par le parent survivant, notamment en cas de mauvaise volonté ou de désintérêt du parent exerçant l’autorité parentale. Cette mesure ne peut être que provisoire et s’achève soit par la majorité ou l’émancipation.

Enfin, le juge des affaires familiales peut ordonner la délégation de l’autorité parentale (art. 377 c. Civ.) demandés par un des parents ou un tiers dans les cas de renonciation volontaire par l’un des parents, de désintérêt volontaire, voir d’impossibilité d’exercer l’autorité parentale. Il y a alors une confiscation de l’exercice de l’autorité parentale, totale ou partielle. Il peut y avoir restitution de l’autorité ou transfert à un autre délégataire. Lorsque l’enfant concerné fait l’objet d’une mesure d’assistance éducative, la délégation ne peut intervenir qu’après avis du juge des enfants, rare fois où l’intervention d’un autre juge, en l’occurrence le juge des enfants, est explicitement prévue par les textes (al.3).

Le juge des enfants, quant à lui, plus facile à saisir et souvent plus rapide à la décision, agit pour protéger l’enfant en danger et est amené à prendre des mesures d’instruction ou d’accompagnement dans le cadre de l’assistance éducative. Les mesures d’instructions dont il n’a pas l’exclusivité lui permettra de demander à des personnes spécialisées  : enquête sociale et expertises notamment psychologiques et psychiatrique. Il dispose en outre d’un outil propre, la mesure d’investigation et d’orientation éducative, qui permet de croiser les regards d’un éducateur, d’un psychologue, et d’émettre ensuite des propositions.

En tant que mesure d’accompagnement, le juge des enfants peut ordonner une intervention éducative à domicile (mesure d’AEMO – assistance éducative en milieu ouvert), et des mesures d’assistance éducative (MAE) qui peuvent être demandées par l’un des parents, par la personne ou le service à qui l’enfant est confié, par le tuteur, par le mineur lui-même ou le ministère public dans une situation de mise en danger (quelque soit son importance), de désintérêt volontaire d’un ou des parents (cas de la fillette de parents SDF). Il peut s’agir d’aide apportée aux parents en vue de favoriser la restauration de leur autorité parentale. Il y a donc pour effet un contrôle sur l’exercice de l’autorité parentale. Cette mesure prendra fin par émancipation, à la majorité ou en cas de cessation de la situation de mise en danger.

Le juge des tutelles intervient quant à lui moins en fonction du statut des personnes que de leur état (incapacité de l’enfant qu’il soit mineur ou « majeur », dans le cas de la situation particulière du handicap). A la demande des personnes autorisées par les textes (parents, alliés, ministère public) ou sur saisine d’office, le juge des tutelles va ordonner la mise en place d’une mesure de tutelle à l’occasion du décès ou de l’impossibilité par les parents d’exercer l’autorité parentale (C. Civ., art. 390) dans le cadre d’un enfant mineur.

Le Tribunal de Grande Instance dispose également de nombreuses possibilités d’actions dans la sphère familiale, mesures qui s’avèrent particulièrement impactant sur la situation de l’enfant à l’égard de ses parents :

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Le TGI peut faire droit à une demande de déclaration d’abandon déposée par un particulier, un établissement qui a recueilli l’enfant dans le cadre de l’aide sociale à l’enfance (ASE) en cas de désintérêt volontaire manifeste (C. Civ., art. 350). Il y a alors délégation de l’autorité parentale à un tiers. Si l’enfant a été confié à l’ASE, il sera admis en qualité de pupille de l’état. Au terme de cette procédure, le juge pourra prononcer un jugement d’adoption de l’enfant (C.Civ., art. 353), une restitution de l’enfant à ses parents biologiques à conditions qu’elle corresponde à l’intérêt de l’enfant et que l’enfant n’est pas été placé en vue d’être adopté.

Le juge du TGI peut également prononcer une mesure de délégation indirecte (art. L. 224-8 CASF), possible si un demandeur propose pour l’enfant un meilleur projet que l’adoption, mesure prise de manière exceptionnelle, souvent dans le cas d’un enfant pupille de l’état. Il s’agit d’une forme particulière de la délégation de l’autorité parentale, relevant de la compétence du jaf.

Enfin, une mesure de retrait de l’autorité parentale (C.Civ.,378 et 378-1) est demandée par le ministère public, par un membre de la famille ou le tuteur de l’enfant en cas d’infraction pénale commise sur la personne de l’enfant, de mise en danger manifeste, de désintérêt manifeste en cas de mesure d’assistance éducative. Ce retrait de l’autorité parentale peut être total ou partiel, ne touchant que certains de ces attributs. L’enfant est alors confié à un tiers qui peut demander l’ouverture d’une tutelle. Cette mesure rare est révisable en tout temps si l’enfant n’a pas été placé en vue de son adoption et si l’intérêt de l’enfant le permet. Concernant l’efficacité des mesures diligentées par les différentes juridictions, il y a lieu de tenir compte d’un aspect essentiel  : c’est la dimension économique. Dans les procédures contentieuses (TGI, JAF), elles sont, sauf aide juridictionnelle, à la charge finale des justiciables. En revanche, dans les procédures de type plus inquisitorial où la protection de l’enfant est mise en avant (juge des enfants, juge des tutelles) elles sont entièrement prises en charge par l’état.

Dans la pratique, les moyens les plus performants c’est-à-dire ceux qui mettent en œuvre des actions complètes et approfondies (notamment avec interventions pluridisciplinaires) ne sont pas accessibles pour les justiciables qui doivent eux-mêmes en assurer la charge. C’est ainsi que devant le JAF, les justiciables renoncent souvent à demander une expertise psychologique pour les enfants, faute de pouvoir en faire l’avance de frais. En dehors de cette situation, la multiplicité des juridictions intervenant dans la sphère familiale conduit à des conséquences fâcheuses pour le justiciable à savoir des situations de conflit entre juges.

B'- Les conflits de compétences

Logiquement, le système juridique concernant la famille semble organisé et hiérarchisé. En effet, le juge aux affaires familiales est normalement le juge naturel de la famille comme l’illustre sa dénomination. Il gère donc les litiges de séparations des couples et ses conséquences dont l’exercice de l’autorité parentale. En cas de problèmes relationnels graves entre les parents et les enfants, c’est le juge des enfants qui intervient dans le cadre de l’assistance éducative voire le Tribunal de grande instance pour le retrait total ou partiel de l’autorité parentale. Le juge des tutelles est, quant à lui, chargé du contrôle de la gestion des biens de l’enfant soumis au régime de l’administration légale.

Néanmoins, plusieurs conflits de compétences peuvent survenir entre ces différents juges de la famille puisqu’ils pourront intervenir sur des litiges ayant des répercutions sur des décisions antérieures prises par l’un d’eux ou lorsque les justiciables choisissent la procédure la plus rapide.

Ainsi, un premier conflit peut intervenir entre le juge aux affaires familiales et le juge des enfants. En effet, l’hypothèse est la suivante : une décision du juge aux affaires familiales est intervenue pour définir les modalités de l’exercice de l’autorité parentale mais l’un des parents, sur le fondement d’un danger, saisie le juge des enfants pour qu’il les modifie.

L’article 375-3 alinéa 2 du code civil permet de régler ce dilemme. Il est prévu que le juge des enfants ne pourra modifier postérieurement une décision du juge aux affaires familiales que s’il est prouvé la survenance d’un fait nouveau de nature à entrainer un danger pour l’enfant. Dans un premier temps, les décisions pouvant être modifiées postérieurement par le juge des enfants ne concernaient que les requêtes en divorce ou jugement de divorce ainsi que les décisions de séparations de corps. Mais la loi du 5 mars 2007 a étendue cette possibilité aux requêtes en vue de statuer sur la résidence et les droits de visites afférents à un enfant ou aux décisions rendues entre les père et mère. Application récente de cet article Civ. 1re, 14 mars 2006, n° 05-13.360, D. 2006. Jur. 1947, ote M. Huyette, et Pan. 2430, obs. M. Douchy-Oudot; AJ fam. 2006. 288, obs. H. Gratadour ;RTD civ. 2006. 299, obs. J. Hauser ; Dr fam 2006, Comm. n° 144, obs. A. Gouttenoire). Ainsi que l’arrêt de Civ. 1 ère , 11 juillet 2006, n°05-05.007.

Ainsi les mesures de placement du juge des enfants sont légitimées par cet article. Cependant un problème apparait lorsqu’il s’agit de modifier seulement le droit de visite fixé par le juge aux affaires familiales. Normalement, le juge des enfants ne peut pas le faire. Mais, la cour de Cassation fait une interprétation extensive de l’article 375 alinéa 3 (Civ. 1re, 26 janv. 1994, Defrénois 1994, art. 35833, obs. J. Massip ; 10 juill. 1996, Bull. civ. I, n° 313; D. 1996. IR.

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205 ; RTD civ. 1997. 410, obs. J. Hauser ; 2 déc. 1997, RTD civ. 1998. 359, obs. J. Hauser) qui aboutie ainsi à un élargissement de la compétence du juge des enfants au détriment du juge aux affaires familiales. En effet, lorsque l’urgence le commande, il pourrait parfois suspendre les droits d’hébergement alors qu’aucun texte ne lui confère une telle compétence.

Il en résulte tout de même que malgré la possibilité pour le juge des enfants d’interférer dans le déroulement de l’exercice de l’autorité parentale, ses décisions ont un caractère temporaire et c’est la décision du juge aux affaires familiales qui sera appliquée lors de la fin de son intervention.

Le deuxième conflit de compétences qui peut intervenir concerne le cas des enfants étrangers isolés. En effet, le parquet a tendance à saisir les juges des enfants car il considère que ces enfants sont en situation de danger. Néanmoins, il s’agit, normalement, d’une vacance de l’autorité parentale qui nécessiterait l’intervention du juge des tutelles. En effet, le juge des enfants, bien qu’il puisse confier l’enfant à un tiers, ne dispose pas de la compétence lui permettant de transférer l’autorité parentale sauf de façon ponctuelle (article 375-7). Dans ce cas, il devrait avoir la mise en place d’une tutelle de l’Etat afin de garantir une protection totale à ces enfants isolés (Cour d'appel Versailles, 11 septembre 2003, RTD civ 2004, p 77, obs J. Hauser).

Le troisième conflit de compétences possible résulte de l’absence de l’exercice de l’autorité parentale. Ils s’agit du cas où un enfant a été confié aux services de l’aide sociale à l’enfance par décision du juge des enfants et les parents se désintéressent totalement de lui, qu’elles sont donc les conséquences à en tirer ? Plusieurs situations sont envisageables : soit il convient de maintenir la mesure de placement d’assistance éducative à long terme au juge des enfants, ce qui n’est normalement pas sa finalité ; soit demander une délégation de l’autorité parentale au juge aux affaires familiales sur le fondement du désintérêt manifeste (article 377 al 2) ; soit demander le retrait de l’autorité parentale au Tribunal de grande instance du fait d’un désintérêt de plus de deux ans (article 378-1 al 2) ; voire même demander une déclaration judiciaire d’abandon toujours auprès du Tribunal de grande instance lorsque le désintérêt est de plus d’un an (article 350) ; enfin il est possible de demander l’ouverture d’une tutelle lorsque les parents sont hors d’état de manifester leur volonté (article 373). Ainsi une multitude de possibilités sont envisageables dans cette hypothèse mais le plus souvent l’ASE se cantonne, par simplicité, au prolongement des mesures éducatives du juge des enfants.

Le quatrième conflit de compétences envisageable concerne l’hypothèse des relations de l’enfant avec des tiers. Normalement, il ne devrait pas avoir de litige puisque l’article 371-4 alinéa 2 donne compétence au juge aux affaires familiales pour « fixer les modalités des relations entre l’enfant et un tiers, parent ou non ». Néanmoins, dans la pratique, le juge des enfants accorde souvent des droits de visites aux grands-parents afin de maintenir les liens familiaux essentiels pour l’enfant alors qu’aucune disposition légale ne lui confère cette possibilité. Il devrait normalement se dessaisir de cette question au profit du juge aux affaires familiales.

Le cinquième conflit de compétences possible existe entre le Tribunal de grande instance et le juge aux affaires familiales. Il s’agit de l’hypothèse où le Tribunal de grande instance, par la théorie de l’accessoire peut prendre des décisions relevant de la compétence du juge aux affaires familiales. Ceci concerne l’hypothèse où il statut sur la filiation d’un enfant. Ainsi lorsqu’il établit ou modifie un lien de filiation, il peut statuer aussi sur l’exercice de l’autorité parentale, la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant et l’attribution du nom (article 331) alors que cela relève normalement de la compétence du juge aux affaires familiales. Il peut aussi fixer les modalités du maintien des relations avec la personne qui l’élevait lorsque l’action en contestation est recueillie (article 337) ou encore confier l’enfant à un tiers afin de recourir à l’ouverture d’une tutelle (article 374-1).

Le dernier conflit peut intervenir sur la compétence territoriale des juges. En effet, du fait de l’instauration de la mesure de résidence alternée de l’enfant certaines difficultés risquent d’intervenir tant sur la question de l’autorité parentale qu’en matière d’assistance éducative mais aussi de tutelle. En ce qui concerne la compétence territoriale attachée à l’autorité parentale, l’article 1070 du NCPC énonce que le juge aux affaires familiales territorialement compétent est « si les parents vivent séparément, le juge du lieu de résidence du parent avec lequel résident habituellement les enfants mineurs en cas d’exercice en commun de l’autorité parentale » et l’article 1180-1 du NCPC précise que la déclaration conjointe des parents pour l’exercer doit être déposée au greffier en chef du Tribunal de grande instance du lieu où demeure l’enfant. Ainsi la difficulté relève du fait que l’enfant est partagé entre les deux domiciles de ses parents. En ce qui concerne l’assistance éducative, l’article 1181 du NCPC précise que le juge des enfants compétent peut être le lieu où demeure le mineur. Là encore quel domicile sera réellement pris en compte.Enfin, en ce qui concerne la tutelle, l’article 1211 énonce que le juge territorialement compétent est «  celui du lieu où demeure le mineur » donc le problème est toujours le même. Cependant cette difficulté semble minime du fait de la nécessaire proximité des domiciles des parents pour que la mesure de résidence alternée soit possible et efficace ce qui devrait donner compétence aux juges du même ressort.

Néanmoins, ces situations démontrent bien la nécessité pour les juges de dialoguer sur les dossiers afin d’éviter ces conflits de compétences. Afin de faciliter la communication des dossiers, la Cour de Cassation a permis, par un avis du 1 er mars 2004,

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l’utilisation, dans certaines conditions, du dossier d’assistance éducative par le juge aux affaires familiales (D. 2004. Jur. 1627, note M. Huyette ; RTD civ. 2004. 498, obs. J. Hauser).

D’autre part, pour améliorer cette communication, Myriam Laloubère, vice-présidente du TGI de Bayonne, propose quelques projets.Dans un premier temps, elle suggère de créer une véritable « Jaferie » qui consisterait à réunir l’ensemble des juges aux affaires familiales du Tribunal de grande instance sous le management d’un « juge directeur » dans le but de répartir, en concertation, les tâches et les audiences et d’organiser une chaine de responsabilité. Ceci devrait permettre de rationnaliser le fonctionnement de la juridiction tant dans le rythme des audiences que dans les relations entre magistrats. Le but étant de fonctionner en équipe, de dialoguer sur les méthodes de travail de chacun, afin de permettre d’engager la réflexion sur de possibles évolutions. Le rôle du « juge directeur » serait très important puisqu’il organiserait la « Jaferie » mais il aurait aussi la mission d’instaurer des partenariats, dialogues, avec les autres professionnels (avocats, médiateurs, enquêteurs, les services de l’enregistrement et la caisse locale d’allocations familiales) permettant aux juges aux affaires familiales de combler leurs diverses lacunes (fiscales, notariales…). Dans un second temps, elle souhaiterait l’instauration d’une chambre de la famille au sein des Tribunaux de grande instance. Cela permettrait d’accroitre les pouvoirs du juge aux affaires familiales sur le problème spécifique des régimes matrimoniaux où leur liquidation est complexe. Mais aussi de regrouper les compétences du Tribunal de grande instance en matière de famille à celle du juge aux affaires familiales permettant un traitement commun unifié des affaires à caractère familiale aboutissant à l’accélération des procédures (mise en état…).

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Le mineur dans les procédures judiciaires

I. L’enfant entendu dans le procès civil

A. La consécration du droit à la parole de l’enfant

1) Au niveau international

2) Au niveau national

B. La mise en œuvre du droit d’être entendu

1) La demande d’audition

2) Le droit au silence

3) L’organisation de l’audition

4) Les effets de l’audition

5) La parole de l’enfant

II. L’enfant partie au procès civil

A. Le principe   : la représentation de l’enfant

1) Les représentants légaux

2) L’administrateur ad hoc

B. L’exception   : l’action personnelle de l’enfant

Introduction

D’après R. Savatier « une personne ne peut vivre une vie de droit qu’en s’exprimant par une volonté et il n’est pas de personne sans vie de droit »4. Mais qu’en est-il de l’enfant ?

L’ambigüité du terme enfant dans notre langue est certaine puisqu’il désigne à la fois l’enfant par l’âge, le mineur, et l’enfant par la filiation, celui que nous restons toute notre vie. Or dans le cadre de cette étude des procédures judiciaires, ce sont les droits de l’enfant mineur qui seront envisagés. Aux termes de l’article 388 du Code civil, le mineur est un individu de l’un ou de l’autre sexe qui n’a pas atteint l’âge de dix-huit ans accomplis, c’est-à-dire l’âge légal de la majorité. Il souffre en droit français d’une incapacité de droit dont le but principal est de former un véritable bouclier juridique contre sa crédulité et sa vulnérabilité.

4 R. SAVATIER in M. P. GIL-ROSADO, Les libertés de l’esprit de l’enfant dans les rapports familiaux, tome 22, Collection de thèses dirigée par B. BEIGNIER, édition Defrénois.

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En matière civile, il a longtemps été tenu à l’écart des procédures, même lorsque celles-ci le concernaient directement. Cette éviction semblait trouver son explication dans le fait que la volonté première et affirmée du législateur était de préserver l’enfant des conflits parentaux et de « protéger ainsi la spécificité même de l’enfance ».5 Pourtant, cette solution s’est avérée insuffisante et dérangeante puisqu’elle n’a fait que déplacer l’atteinte qui lui était faite. En effet, il n’était question que de régler des conflits entre adultes, la décision qui en résultait n’étant parfois satisfaisante qu’à leur égard. Ainsi, on se souciait peu de l’impact sur l’enfant des mesures envisagées, puisqu’il était d’avantage abordé comme l’objet de convoitises parentales qu’en tant que mineur subissant des décisions d’adultes, celles de ses parents ou d’un juge.

Mais progressivement, des droits lui ont été reconnus, dans un premier temps, sur le plan international, notamment par la Convention de la Haye du 25 octobre 1980 ainsi que la Convention internationale des droits de l’enfant signée à New York le 20 novembre 1989. Puis au niveau national, avec la loi du 8 janvier 1993, et plus récemment la loi du 5 mars 2007 sur la protection de l’enfance. La prise de conscience de l’intérêt de l’enfant à être associé à certaines procédures s’est traduite sur le plan juridique par cette vague de textes, matérialisant une reconnaissance progressive et remarquable de droits de plus en plus importants.

Ainsi, l’évolution contemporaine des droits de l’enfant aura contribué à la construction inachevée de ce que l’on oserait appeler aujourd’hui sans timidité, un droit processuel du mineur.

Toutefois l’on peut se poser la question de l’étendue des droits du mineur dans les procédures civiles ainsi que les modes de participation qui lui sont reconnus.

L’enfant a tout d’abord acquis le droit de donner son avis (I), qu’il soit partie ou non à l’instance. D’ailleurs, il a timidement acquis la qualité de partie dans certaines procédures (II), même si cela reste insuffisant aux yeux de certains auteurs.

5 P. MURAT, la participation de l’enfant aux procédures relatives à l’autorité parentale : bref regard critique sur la diversité des situations.

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I - L’enfant entendu

Aujourd’hui, un vaste mouvement, tant au niveau international que national, reconnaît à l’enfant le droit d’être entendu dans les procédures judiciaires le concernant. Ce droit à la parole de l’enfant est consacré dans les cas où celui-ci est partie à la procédure mais aussi dans les hypothèses où il n’est pas partie, quand la décision prise par le juge est susceptible de modifier ses conditions de vie.

On développera d’abord la consécration du droit à la parole de l’enfant (A), puis on étudiera la mise en œuvre de ce droit (B).

A) La consécration du droit à la parole de l’enfant

1°) Au niveau international

On peut d’abord citer la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) adoptée par l’Assemblée Générale de l’ONU le 20 novembre 1989, dite aussi Convention de New-York et à laquelle la France est partie. Ce texte consacre la liberté d’expression du mineur dans l’article 13 alinéa 1er ainsi que le droit pour l’enfant doué de discernement d’être entendu dans les procédures le concernant. L’article 12 al. 1 dispose en effet que « les Etats parties garantissent à l’enfant qui est capable de discernement le droit d’exprimer librement son opinion sur toute question l’intéressant ». Plus précisément, l’alinéa 2 prévoit qu’ « à cette fin, on donnera notamment à l’enfant la possibilité d’être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative l’intéressant, soit directement, soit par l’intermédiaire d’un représentant ou d’un organisme approprié ».

La Cour de cassation a longtemps considéré que la Convention dans sa totalité ne créait d’obligations qu’à l’égard des Etats parties ; les justiciables ne pouvaient donc l’invoquer devant les juridictions nationales. Elle a par la suite opéré un revirement de jurisprudence dans un arrêt du 18 mai 2005 en reconnaissant l’effet direct de certaines dispositions du traité (article 3-1 qui dispose que l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale pour toutes décisions le concernant, ainsi que l’article 12 précédemment cité). L’arrêt de la première chambre civile du 22 novembre 2005 a confirmé de façon plus explicite encore l’applicabilité directe de l’article 12. Il faut noter que le Conseil d’Etat qui a toujours apprécié l’effet direct de la Convention article par article, refuse de reconnaitre ce caractère à l’article 12.

Au niveau du Conseil de l’Europe, la Convention européenne des droits de l’Homme ne contient pas de dispositions sur l’audition du mineur en justice mais la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme prête une attention particulière à la volonté de l’enfant lorsque celle-ci est exprimée.

Ce fut le cas dans l’arrêt Bronda contre Italie du 9 juin 1998. Dans cette affaire, la Cour considère qu’il faut sérieusement prendre en compte le fait qu’une adolescente de quatorze ans ne souhaite pas quitter sa famille d’accueil.La Cour a toutefois précisé que l’avis de l’enfant n’a de valeur que s’il est exprimé dans un contexte serein dépourvu de pressions parentales (arrêt Sophia Gudrun Hansen contre Turquie du 23 septembre 2003).La Cour a également estimé qu’une juridiction ne peut se baser uniquement sur les souhaits exprimés par l’enfant sans prendre de mesures d’expertise ou tenir d’audience (arrêt C. contre Finlande du 9 mai 2006).Quoi qu’il en soit, la Cour refuse d’imposer aux tribunaux une audition systématique de l’enfant (arrêt Sahin contre Allemagne du 8 juillet 2003).

Le Conseil de l’Europe est aussi à l’origine de la Convention européenne sur l’exercice des droits de l’enfant (CEEDE) signée par la France le 4 juin 1996 mais entrée en vigueur bien plus tard dans notre pays puisque la France ne l’a ratifiée qu’à l’automne 2007. Il faut préciser que l’effet direct de la plupart des dispositions de la Convention ne semble pas pouvoir être contesté.

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Dans son préambule, le traité expose que les Etats signataires sont convaincus que les droits et les intérêts supérieurs des enfants doivent être promus et qu’à cet effet, les enfants doivent avoir la possibilité d’exercer ces droits, en particulier dans les procédures familiales les intéressant.L’article 3 dispose qu’ « un enfant qui est considéré par le droit interne comme ayant un discernement suffisant, dans les procédures l’intéressant devant une autorité judiciaire, se voit conférer les droits suivants, dont il peut lui-même demander à bénéficier :a- recevoir toute information pertinente,b- être consulté et exprimer son opinion,c- être informé des conséquences éventuelles de la mise en pratique de son opinion et des conséquences

éventuelles de toute décision ».Cette Convention consacre donc un véritable droit pour le mineur doué de discernement d’être entendu dans les procédures judiciaires qui le concernent. Le traité reconnait aussi au mineur un droit à l’information ce qui permet de garantir l’effectivité de sa participation à la procédure. Il faut noter que le droit reconnu au c) est une disposition originale à laquelle la France devra se conformer.Il est en revanche regrettable que la violation des dispositions de la Convention ne puisse faire l’objet d’un recours devant la Cour européenne des droits de l’Homme.

Au niveau de l’Union européenne, la Charte des droits fondamentaux dispose dans son article 24 que les enfants peuvent exprimer leur opinion librement. Ce texte consacre donc la liberté d’expression de l’enfant mais ne lui reconnait pas le droit d’être entendu dans les procédures judiciaires le concernant. A ce titre, la Charte est en retard par rapport aux autres textes internationaux.

L’Union européenne n’est cependant pas en reste en ce qui concerne le droit du mineur à être entendu puisqu’elle est à l’origine du Règlement Bruxelles II bis (règlement du 27 novembre 2003 n° 2201/2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale). Quatre articles de ce règlement font référence à « la possibilité pour l’enfant d’être entendu » :

l’article 11, qui concerne la mise en œuvre de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants et plus particulièrement le retour de l’enfant enlevé par un des parents,

l’article 23, sur les motifs de non reconnaissance des décisions en matière de responsabilité parentale, les articles 41 et 42, sur la force exécutoire des décisions concernant le droit de visite et le retour de l’enfant

après un enlèvement international.En résumé, dans les matières visées, la possibilité donnée à l’enfant d’être entendu au cours de la procédure est la condition pour qu’une décision rendue dans un Etat membre soit reconnue et se voit attribuer force exécutoire dans les autres pays de l’Union européenne. Le magistrat saisi est tenu de vérifier que cette possibilité a été offerte au mineur. Si ce n’est pas le cas, il ne pourra pas reconnaitre la décision et cette dernière ne sera pas exécutoire dans l’espace judiciaire européen. Le règlement communautaire attache donc une importance particulière au droit à la parole de l’enfant puisque le respect de ce droit est la condition de l’efficacité des décisions prises par les Etats membres sur le territoire de l’Union européenne.Si l’enfant a demandé à être entendu, son audition ne peut être écartée, dans les matières visées aux articles 11, 41 et 42, que pour défaut de discernement. Pour la matière visée à l’article 23, l’audition peut être écartée en cas d’urgence (on peut penser qu’en pratique, le défaut de discernement sera aussi un motif de rejet de l’audition).En revanche, le règlement ne modifie pas les règles nationales applicables en matière d’audition. Il n’est donc pas obligatoire que l’enfant soit entendu par un juge au cours d’une audience.

2°) Au niveau national

La question de l’audition de l’enfant est d’abord abordée dans un texte général, l’article 388-1 du Code civil. Cet article a été réformé par la loi du 5 mars 2007 sur la protection de l’enfance.

Avant la réforme, la règle issue de la loi du 8 janvier 1993 était la suivante : le juge pouvait prendre l’initiative d’entendre l’enfant dans une procédure le concernant s’il l’estimait nécessaire mais ce n’était en rien une

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obligation. En revanche, si c’était le mineur qui sollicitait une audition, le juge ne pouvait rejeter la demande que par une décision spécialement motivée. En pratique, le juge pouvait facilement refuser d’entendre le mineur qui en faisait la demande. Il pouvait en effet justifier le rejet de l’audition par le défaut de discernement du mineur  ; par le fait que le mineur avait déjà été entendu au cours de la procédure, lors d’une enquête sociale par exemple  ; par l’existence d’un risque de pression parentale ou de conflit de loyauté. Le droit pour le mineur discernant d’être entendu dans les procédures le concernant n’était donc pas totalement reconnu par le droit français.

En revanche, l’exigence de motivation du refus d’entendre l’enfant qui en fait la demande apparaissait comme une véritable obligation procédurale. En effet, dans une décision de la première chambre civile du 18 mai 2005, la Cour de cassation a sanctionné l’arrêt rendu par une Cour d’appel, les juges du fond n’ayant même pas répondu à la demande d’audition formulée par l’enfant dans la procédure relative à la fixation de sa résidence.

La réforme du 5 mars 2007 a modifié l’article 388-1 du Code civil. Désormais, si le juge est toujours libre de prendre ou non l’initiative d’entendre l’enfant, l’audition est de droit lorsque c’est le mineur qui en fait la demande. Cela signifie que si les conditions énumérées par le texte, à savoir le discernement de l’enfant et l’existence d’une procédure le concernant, sont remplies, le juge ne peut plus refuser d’entendre l’enfant. Avec ce texte, le droit français consacre un véritable droit pour l’enfant discernant d’être entendu dans une procédure le concernant. Cette réforme a aussi eu pour but de mettre le droit français en conformité avec les textes internationaux tels que la CIDE, la CEEDE et le Règlement Bruxelles II bis. En effet, ces textes ne prévoient pas de restriction au droit pour le mineur discernant d’être entendu dans les procédures le concernant alors que le droit français antérieur à la réforme ne reconnaissait à l’enfant que le droit de demander une audition, celle-ci pouvant très bien être refusée par le juge.Or, avec la reconnaissance de l’effet direct de l’article 12 de la CIDE dans l’arrêt du 18 mai 2005, le droit national était menacé d’être écarté en vertu de la règle selon laquelle les traités internationaux prévalent sur les lois internes. En application du Règlement Bruxelles II bis, les décisions françaises risquaient également de ne pas être reconnues ou de ne pas avoir force exécutoire dans l’espace judiciaire européen. Une réforme s’imposait donc.

Des textes particuliers traitent également de l’audition du mineur dans des procédures spécifiques. C’est le cas de l’article 373-2-11 du Code civil qui dispose que lorsqu’il se prononce sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, le juge doit notamment tenir compte des sentiments exprimés par l’enfant dans les conditions prévues à l’article 388-1 du Code civil. Le droit du mineur d’être entendu est ici renforcé puisqu’en plus du renvoi aux dispositions de l’article 388-1 du Code Civil, le législateur rappelle au juge que les sentiments de l’enfant sont utiles à la prise de décision, ce qui pourra l’inciter à convoquer lui-même l’enfant en vue de son audition si celui-ci n’en a pas fait la demande.

En matière d’assistance éducative, l’article 1182 du nouveau Code de procédure civile dispose que « le juge entend le mineur capable de discernement ». Ce texte accorde à l’audition de l’enfant une place encore plus importante que celle conférée par l’article 388-1 du Code civil puisqu’il pose une véritable obligation pour le juge d’entendre le mineur doué de discernement dans ce type de procédure. Le mineur n’a donc pas besoin de solliciter une audition, c’est le juge qui doit en prendre l’initiative. L’audition ne peut être écartée qu’en l’absence de discernement ou en cas d’urgence (article 1184 du nouveau Code de procédure civile). La Cour de cassation considère que l’audition du mineur dans la procédure d’assistance éducative est de droit et que c’est une mesure d’ordre public (Civ. 1ère, 30 juin 1981 et 25 juin 1991).Le caractère obligatoire de l’audition s’explique d’abord par le fait que la procédure d’assistance éducative peut aboutir à des décisions particulièrement graves pour le mineur. Une rencontre entre le juge et l’enfant s’avère donc indispensable. De plus, l’article 375-1 al.2 du Code Civil dispose que le juge doit s’efforcer de recueillir l’adhésion de la famille (et donc du mineur) à la mesure envisagée. Cela implique nécessairement que la famille et notamment le mineur, soient auditionnés par le juge.

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L’obligation d’entendre le mineur implique que soit fait mention dans la décision du fait que l’audition a bien eu lieu ou à défaut, que soient précisées les raisons de son rejet, et ce sous peine de cassation (Civ. 1 ère, 8 juin 1999). Cependant, la Cour de cassation s’est montrée moins exigeante sur ce point dans un arrêt de la première chambre civile du 14 février 2006. Dans cette affaire, elle a admis que la Cour d’appel ne précise pas dans sa décision les raisons pour lesquelles l’audition avait été écartée dans la mesure où l’absence de discernement de l’enfant ressortait clairement du dossier. Une telle jurisprudence est de nature à atténuer le caractère obligatoire de l’audition du mineur dans les procédures d’assistance éducative mais on peut également penser qu’il ne s’agit que d’un arrêt d’espèce.

Selon l’article 1189 du nouveau Code de procédure civile, le juge peut dispenser l’enfant de comparaitre à l’audience. La Cour de cassation, dans un arrêt du 28 novembre 2006, en a déduit que la présence et l’audition du mineur à l’audience sont facultatives, l’audition de l’enfant n’étant obligatoire qu’au cours de la procédure. Il faut cependant préciser qu’en l’espèce, les enfants, absents de l’audience, étaient représentés par leur avocat, ce qui leur permettait tout de même de défendre leurs intérêts et d’exprimer leur volonté.Dans tous les cas, il serait préférable que cette dispense fasse l’objet d’une décision spécialement motivée par le juge dans la mesure où la présence de l’enfant à l’audience reste le meilleur moyen pour lui de faire entendre sa voix et de participer à la décision.

En matière d’émancipation, l’article 477 du Code civil dispose qu’elle ne peut être prononcée qu’après audition du mineur. Là encore, le droit d’être entendu a une portée plus large que dans l’article 388-1 du Code civil puisque l’audition du mineur est une condition de l’émancipation ; elle doit obligatoirement avoir lieu si le juge souhaite émanciper le mineur. Le mineur n’a donc pas besoin de la solliciter ; c’est le juge qui doit en prendre l’initiative.En revanche, si le juge refuse de prononcer l’émancipation, il n’est plus soumis à l’obligation d’entendre l’enfant. Le mineur doué de discernement pourra toutefois demander son audition sur le fondement de l’article 388-1 du Code civil.

Pour l’élaboration d’une décision de changement de nom et prénom (article 60 al. 2 et 61-3 du Code civil) ou d’adoption (article 345 al. 3 du Code civil), le consentement du mineur de plus de treize ans est requis et ce, sous peine de nullité de la décision. L’obligation de recueillir son consentement implique nécessairement l’audition de l’enfant de plus de treize ans. Mais dans ce type de procédure, le mineur ne dispose pas seulement du droit d’être entendu : on lui reconnait un véritable pouvoir quant au contenu de la décision prise par le juge. Sa participation à la procédure est ainsi renforcée.Les enfants de moins de treize ans dont le consentement n’est pas exigé pourront toujours demander à être entendu sur le fondement de l’article 388-1 du Code civil.

Enfin, dans certaines procédures, l’enfant peut être titulaire d’un droit de veto. Dans ces cas là, la validité de la décision du juge est subordonnée à l’absence de refus de l’enfant. Cela n’implique pas forcément que l’enfant ait été auditionné puisque la décision sera valable dans l’hypothèse où le mineur aura exprimé son consentement lors d’une audition mais aussi lorsque l’enfant ne se sera pas exprimé du tout. En revanche, ce droit de véto accroit considérablement le poids de la parole de l’enfant puisque celle-ci a une influence directe sur la décision prise par le juge.Ce mécanisme est utilisé pour les prélèvements de moelle osseuse (article 1241-3 al. 4 du Code de la santé publique) ainsi que dans le cadre de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur l’enlèvement international d’enfant. En application de ce traité, l’autorité administrative ou judiciaire compétente pour ordonner le retour de l’enfant ne peut prendre cette décision lorsque l’enfant refuse de retourner dans son pays d’origine.Cependant, la Cour de cassation a considérablement réduit la portée de ce droit de véto dans un arrêt de la première chambre civile du 14 février 2006. Dans cette affaire, la Cour de cassation considère que l’opposition des enfants ne suffit pas à elle seule à justifier le rejet d’une demande de retour. Il faut par ailleurs que le retour fasse courir un risque grave aux enfants.

B) La mise en œuvre du droit d’être entendu

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Si le droit du mineur d’être entendu dans les procédures judiciaires le concernant a été consacré, sa mise en œuvre soulève quelques difficultés.

1°) La demande d’audition

En ce qui concerne la demande d’audition formulée par le mineur sur le fondement de l’article 388-1 du Code Civil, l’article 338-2 du nouveau Code de procédure civile dispose qu’elle peut être présentée au juge sans forme particulière et à tout niveau de la procédure, y compris pour la première fois en appel.En n’imposant ni formalisme particulier ni condition de délai, on favorise ainsi l’accès du mineur à l’audition.

En vertu de l’article 388-1 du Code Civil, on a vu que lorsque c’est le mineur qui demande à être entendu, l’audition est de droit dans la mesure où les conditions énumérées par le texte sont remplies, à savoir, le discernement de l’enfant et l’existence d’une procédure le concernant.Qu’entend-on par « une procédure concernant l’enfant » ?Il suffit que l’enfant ait un intérêt à être entendu. D’après la Circulaire du 3 mars 1993 relative à l’application de la loi du 8 janvier 1993, les décisions prises dans le cadre de la procédure doivent être susceptibles de modifier les conditions de vie du mineur et de mettre en jeu ses intérêts personnels. Cette influence doit être directe.On peut prendre comme exemple la procédure de divorce à laquelle l’enfant n’est pas partie. Dans le cadre de cette procédure, le juge va être amené à fixer la résidence de l’enfant ainsi que les modalités d’exercice de l’autorité parentale .L’enfant est ici directement concerné par la procédure et peut donc demander à être entendu.La Circulaire considère aussi que la procédure de changement de régime matrimonial des parents est une procédure dans le cadre de laquelle le mineur peut demander à être entendu. Dans cette hypothèse là, le mineur est concerné par la procédure dans la mesure où les intérêts touchés par la procédure (ceux de ses parents), ont une influence directe sur les siens.L’intérêt de l’enfant à être entendu est donc envisagé de manière large.

Pour qu’il soit fait droit à la demande d’audition du mineur, il faut également qu’il soit doué de discernement.La loi ne fixe pas l’âge du discernement. Le discernement fait donc l’objet d’une appréciation subjective de la part du juge. La circulaire de 1993 invite le juge à se baser sur plusieurs critères, à savoir, l’âge, la maturité et le degré de compréhension.Le problème est que le juge va devoir déterminer si l’enfant est discernant alors qu’il ne l’a jamais rencontré. Il est rare en effet qu’un juge convoque l’enfant pour évaluer son discernement. Le magistrat va donc s’appuyer sur d’éventuels rapports sociaux ou psychologiques concernant l’enfant, sur des témoignages afin de déterminer son degré de maturité. En l’absence de tels documents, le juge aura tendance à se baser uniquement sur le critère de l’âge en estimant par exemple que de façon générale, un enfant de 4 ou5 ans n’est pas discernant. Cette méthode est contestable puisque certains jeunes enfants font preuve d’une grande maturité et pourraient donc être entendus.

Ainsi, la demande d’audition formulée par le mineur ne peut être rejetée que dans des cas limités. La décision de refus d’auditionner doit être motivée. Elle n’est susceptible d’aucun recours (article 338-3 du nouveau Code de procédure civile). Il s’agit donc d’une mesure d’administration judiciaire.

La loi du 5 mars 2007 a consacré un véritable droit pour le mineur d’être entendu lorsqu’il en fait la demande. Cependant, pour que ce droit soit effectif, il faut que le mineur en soit informé. La CEEDE attache beaucoup d’importance à cette question puisqu’elle consacre le droit à l’information du mineur. A ce titre, la loi du 5 mars 2007 a inséré un dernier alinéa à l’article 388-1 qui précise que le juge doit s’assurer que le mineur a bien été informé de son droit à être entendu. Selon la Circulaire du 16 mars 2007, cette information peut être faite par tous moyens, notamment par l’intermédiaire des parents. Cependant, peut-on faire confiance aux parents dans un contexte aussi explosif qu’un divorce par exemple ? Comment être certain que l’information a bien été transmise à l’enfant par les parents ?

2°) Le droit au silence

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Le droit d’être entendu soulève également la question du droit au silence. En permettant à l’enfant de donner son avis dans les procédures le concernant, le législateur a sans conteste voulu lui accorder un droit subjectif. Ainsi, même lorsque c’est le juge qui convoque l’enfant, celui-ci devrait avoir la possibilité de refuser d’être entendu. Cependant, la réforme de 2007 est venue semer le trouble en insérant dans l’article 388-1 la formule suivante : « lorsque le mineur refuse d’être entendu, le juge apprécie le bien-fondé de ce refus ». Si ce dernier estime que le refus est injustifié, pourra t-il contraindre l’enfant à parler ? Lorsqu’elle est demandée par le juge, l’audition est-elle une obligation et non un droit ?

3°) L’organisation de l’audition

La loi du 5 mars 2007 a posé comme principe l’audition directe du mineur. Désormais, il faut privilégier la rencontre entre l’enfant et le juge. C’est en principe le juge qui doit auditionner l’enfant. Le mineur peut toujours être entendu par une tierce personne désignée par le juge, un travailleur social par exemple, mais il faut dans ce cas que l’intérêt de l’enfant le commande et que le juge motive sa décision. Ce type de décision est une mesure d’administration judiciaire insusceptible de recours.Le tiers désigné par le juge doit se contenter de recueillir l’avis de l’enfant puis il doit le transmettre au juge.

L’article 388-1 alinéa 4 du Code Civil dispose que l’enfant peut être entendu seul ou accompagné de son avocat ou d’une personne de son choix. A ce titre, le juge doit s’assurer que l’enfant a bien été informé de la possibilité d’être assisté d’un avocat. L’enfant peut choisir lui-même son avocat. S’il n’en connait pas, le juge saisira le bâtonnier qui en désignera un. (article 338-7 du nouveau Code de procédure civile).Lorsque l’enfant choisit d’être assisté par un avocat, il bénéficie de l’aide juridictionnelle en application de la loi du 8 janvier 1993. L’avocat ne doit pas être payé par les parents et ce, pour garantir sa neutralité.

Lorsque l’enfant désigne lui-même la personne qui l’accompagnera lors de l’audition, le juge exerce un contrôle sur ce choix. S’il est contraire à l’intérêt du mineur, le juge peut lui substituer une autre personne. L’intérêt de l’enfant réside dans la neutralité de la personne qu’il a choisie comme accompagnateur. Le but est d’éviter que cette dernière fasse pression sur l’enfant et tente d’influencer sa parole.Le rejet du choix du mineur et la désignation par le juge d’une autre personne (un travailleur social ou un avocat désigné par le bâtonnier) sont des mesures d’administration judiciaires insusceptibles de recours.

Dans tous les cas, l’article 388-1 du Code Civil ne confère à l’accompagnateur du mineur qu’un rôle d’assistance. L’accompagnateur est là pour conseiller le mineur, pour le rassurer et en aucun cas pour être son porte-parole.Cependant, un arrêt de la première chambre civile du 22 novembre 2005 est venu semer le trouble. En effet, sur le fondement des articles 3-1 et 12-2 de la CIDE, la Cour de cassation a accepté que l’avocat soit entendu à la place de l’enfant et qu’il rapporte les sentiments de ce dernier.Pour certains, cette jurisprudence est opportune dans la mesure où il est peut-être moins intimidant pour l’enfant de se confier à son avocat plutôt que directement au juge.Cependant, cette pratique est contraire à la lettre du texte : selon l’article 388-1, l’avocat doit assister l’enfant lors de son audition et non pas le remplacer. Cette jurisprudence est également contraire à l’esprit de l’article 388-1 puisque le but de la loi est de privilégier la rencontre entre le juge et l’enfant et de permettre à l’enfant d’exprimer lui-même ses sentiments. De plus, en instaurant une pratique s’apparentant à une intervention du mineur au travers de la représentation par son avocat, cette jurisprudence rend confuse la place de l’enfant dans la procédure. En effet, l’alinéa 5 de l’article 388-1 précise que l’audition de l’enfant ne lui confère pas la qualité de partie à la procédure. Enfin, la Cour de cassation a rendu sa décision au visa de l’article 3-1 de la CIDE. Or, en quoi l’intérêt de l’enfant justifie t-il que le juge entende l’avocat plutôt que le mineur lui-même ?

4°) Les effets de l’audition

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L’enfant peut être entendu en application des dispositions de l’article 388-1 du Code Civil alors qu’il est partie à la procédure. Cependant, le plus souvent, l’enfant est auditionné alors qu’il n’est pas partie. C’est notamment le cas dans l’hypothèse d’une procédure de divorce de ses parents. L’article 388-1 alinéa 5 dispose alors que l’audition du mineur ne lui confère pas la qualité de partie à la procédure. Il ne pourra donc pas intervenir dans la procédure ou exercer des voies de recours contre la décision statuant sur le fond.Dans ces cas là, la situation procédurale est originale puisque le mineur est présent dans une procédure, peut exiger qu’on l’entende alors qu’il n’est titulaire d’aucun droit d’action.

5°) La parole de l’enfant

L’article 388-1 du Code Civil ne précise pas comment doit être recueillie la parole de l’enfant. La Cour de cassation, dans un arrêt de la première chambre civile du 19 janvier 1994, a estimé que le juge n’était pas obligé de consigner l’audition de l’enfant dans un PV.Cette jurisprudence présente certains avantages : l’enfant peut s’exprimer en toute liberté puisque ses parents n’auront pas connaissance de la teneur de ses propos.Elle présente aussi des inconvénients au regard du principe du contradictoire énoncé à l’article 16 du nouveau Code de procédure civile. Le défaut de PV exclut les sentiments de l’enfant du débat judiciaire ; les parties n’ont pas la possibilité de se défendre contre les propos de l’enfant alors que ceux-ci vont pouvoir influencer la décision du juge.Certains tribunaux optent donc pour une solution qui concilie les différents intérêts : après l’audition de l’enfant, le juge résume aux parties ce qui a été dit tout en sélectionnant ce qui peut être entendu.

Dans sa décision, le juge n’a pas à dévoiler les propos tenus par l’enfant lors de l’audition. Il ne doit pas non plus préciser s’il a statué on non en conformité avec les sentiments de l’enfant car cela reviendrait à en révéler la teneur.En revanche, la Cour de cassation impose au juge de tenir compte, lors de la prise de décision, des sentiments exprimés par l’enfant si celui-ci a été auditionné (arrêt du 10 juin 1998) A ce titre, le juge doit préciser dans sa décision qu’il a bien souscrit à cette obligation et ce, sous peine de cassation (arrêt du 20 novembre 1996).

Si le juge doit tenir compte des sentiments exprimés par l’enfant lors de son audition, quel est le poids de la parole de l’enfant ? Le juge est-il tenu de suivre l’avis de l’enfant ?

A ce sujet, l’article 373-2-11 du Code Civil relatif aux décisions fixant les modalités d’exercice de l’autorité parentale dispose que le juge doit tenir compte des sentiments exprimés par l’enfant mais n’impose pas au juge de se conformer aux souhaits de l’enfant (Civ. 2ème.25 mai 1993).Le juge ne peut déléguer son pouvoir de décision en matière de fixation du droit de visite et d’hébergement en le subordonnant à l’accord de l’enfant (Civ. 2ème.11 octobre 1995).

Dans le cadre de la procédure d’assistance éducative, l’article 375-1 du Code Civil précise que le juge doit prendre en compte l’avis de l’enfant et s’efforcer de recueillir l’adhésion de la famille et donc du mineur à la décision envisagée. Cependant, le juge peut toujours aller à l’encontre de l’avis de l’enfant si l’intérêt de ce dernier l’exige.

Lorsque l’enfant a été auditionné en application de l’article 388-1 du Code Civil ou dans le cadre de la procédure d’émancipation de l’article 477 du Code Civil, dans le silence des textes, on doit là encore s’en remettre au pouvoir souverain d’appréciation du juge quant au poids à accorder à la parole de l’enfant. Le juge peut adopter une solution contraire à celle souhaitée par le mineur si cela s’avère plus conforme à son intérêt.

On considère qu’en règle générale, il est préférable que ce soit le juge qui décide. Il ne faut pas faire peser sur l’enfant le poids de la responsabilité de la décision.

Cependant, dans les procédures où le mineur a le droit de consentir à la décision comme en matière d’adoption ou de changement de nom et prénom ou lorsqu’il dispose d’un droit de véto comme dans le cadre de l’enlèvement international ou du prélèvement de moelle osseuse, la parole de l’enfant a un véritable poids puisqu’elle doit être suivie par le juge.

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II/ L’enfant partie au procès civil

En principe, en raison de sa minorité, un enfant, dans une procédure judiciaire civile, est représenté (A’) bien qu’il lui soit quelques fois possible d’agir seul (B’).

A’) Le principe   : la représentation de l’enfant

Selon Gérard Cornu (in « Vocabulaire Juridique ») la représentation c’est une « action consistant pour une personne investie à cet effet d’un pouvoir légal, judiciaire ou conventionnel (le représentant), d’accomplir au nom et pour le compte d’une autre (incapable ou empêché [le représenté]) un acte juridique dont les effets se produisent directement sur la tête du représenté »

Elle consiste, pour réaliser un acte juridique, « à substituer à la volonté de la personne que touchera cet acte, la volonté d’une autre personne qui lui sert ainsi d’organe ».6

« Lorsqu’il est représenté, le mineur est conçu comme le membre d’un groupe, d’une famille aussi restreinte soit-elle et de ce fait encadré par une discipline familiale »7, c’est pourquoi, en principe, un mineur est représenté par ses parents, mais il existe des tempéraments ainsi, il pourra être représenté par un administrateur ad hoc et dans certains cas, être assisté par un avocat.

- les parents

Un mineur est juridiquement considéré comme une personne incapable. Ce sont ses deux parents qui sont titulaires de l’exercice de l’autorité parentale (article 371-1 du Code Civil) et qui sont ainsi ses administrateurs légaux. Ce sont deux missions qu’ils possèdent et qui sont distinctes. En vertu de leur exercice de l’autorité parentale, les parents peuvent prendre une décision à la place de leur enfant et c’est ce dernier qui subira les conséquences d’une telle décision, par exemple, les parents, dans l’exercice de leur autorité parentale vont inscrire leur enfant dans un club de sport et c’est l’enfant qui fera l’activité, il en est de même pour le choix d’un médecin (les parents choisissent le médecin qui soignera leur enfant).L’exercice de l’autorité parentale concerne les situations de fait. En revanche, les situations de droit relèveront de l’administration légale. En vertu de l’article 389-3 al 1 du Code Civil, « l’administrateur légal représentera le mineur dans tous les actes civils, sauf les cas dans lesquels la loi ou l’usage autorise les mineurs à agir eux-mêmes. ». En conséquence, dès qu’il faut passer un acte juridique, les parents agiront dans le cadre de l’administration légale. Dans cette hypothèse ils représentent l’enfant, ils effectueront les actes juridiques au nom et à la place de l’enfant uniquement parce qu’il est juridiquement incapable (et non en vertu d’un quelconque pouvoir de décision des parents sur leurs enfants). En tant qu’administrateurs légaux, les parents ne sont pas des acteurs juridiques, mais seulement des représentants qui sont placés sous le contrôle du juge des tutelles. Néanmoins, ce système de représentation varie selon la situation familiale. Par conséquent, l’administration légale est pure et simple (article 389-1 du Code Civil) lorsque les deux parents exercent en commun l’autorité parentale ; elle sera placée sous contrôle judiciaire lorsque l’un ou l’autre des deux parents est décédé ou privé de l’exercice de l’autorité parentale (article 389-2 du Code Civil) et lorsque les deux parents sont décédés ou privés de l’exercice de l’autorité parentale, l’enfant sera placé sous tutelle(article 390 du Code Civil).

Ainsi, le principe est celui de la représentation de l’enfant par ses parents donc de l’administration légale pure et simple. Cette représentation concerne essentiellement le patrimoine de l’enfant. En effet, en matière extrapatrimoniale, ce sont des droits qui ont un caractère tellement personnel que leur exercice requiert généralement le consentement de la personne concernée. Néanmoins, pour défendre les droits extrapatrimoniaux de leur enfant (exemple : liberté de l’esprit, religion, vie privée), les parents peuvent agir en justice au nom de l’enfant mais il faudra l’accord des deux parents alors qu’un seul d’entre eux peut agir pour une action relative à des actes patrimoniaux.

Dans le cadre de la représentation, les parents ne peuvent pas avoir plus de pouvoirs et de droits que le mineur qu’ils représentent. Le pouvoir des parents à l’égard de leur enfant a évolué au fil du temps puisque maintenant la

6 SAVATIER7 A. GOUTTENOIRE, Thèse, p.437

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parole est directement donnée à l’enfant lorsqu’il est capable de discernement et qu’un administrateur ad hoc peut être nommé s’il existe une opposition d’intérêt entre les parents et le mineur.

- l’administrateur ad hoc

présentation

La notion de représentation d’un enfant mineur par un administrateur ad hoc a été introduite dans le Code Civil par la loi du 6 avril 1910. Un administrateur ad hoc c’est « celui qui est désigné, par décision de justice, pour représenter une personne dont le patrimoine est soumis à l’administration légale ou judiciaire d’un tiers, dans un acte juridique emportant généralement opposition d’intérêt entre cette personne et l’administrateur de ses biens »8. L’administrateur ad hoc a vocation à organiser la défense des intérêts d’un enfant ou d’une personne vulnérable.

nomination

En cas de contradiction d’intérêts entre l’enfant et ses représentants légaux dans une procédure, l’article 388-2 du Code Civil prévoit que le juge des tutelles ou à défaut, le juge saisi de l’instance peut désigner un administrateur ad hoc chargé de représenter l’enfant. Depuis la loi du 8 janvier 1993, le juge des tutelles n’a donc plus le monopole de la désignation de l’administrateur ad hoc. Ainsi, le juge des tutelles, le juge aux affaires familiales peuvent désigner un administrateur ad hoc, ou même le juge des enfants bien que ce point de vue n’ait pas été repris par le Cour d’Appel de Rouen le 25 mai 1993 (qui a refusé la désignation d’un administrateur ad hoc pour un enfant de deux ans objet d’une procédure d’assistance éducative.).

La demande de désignation de l’administrateur ad hoc doit normalement émaner de l’administrateur légal, à défaut, l’article 389-3 du Code Civil permet que le juge procède à sa nomination à la demande du ministère public, du mineur lui-même ou d’office.

La nomination d’un administrateur ad hoc doit être assez exceptionnelle puisqu’en pratique, il se substitue aux parents bien que ces derniers soient toujours titulaires de l’exercice de l’autorité parentale. En fait, l’administrateur ad hoc intervient alors que les parents sont toujours titulaires de l’exercice de l’autorité parentale, et qu’ils sont toujours les administrateurs légaux de leur enfant, seulement leur administration légale est ponctuellement amputée, pour une procédure déterminée, par la mission qui a été confiée à l’administrateur ad hoc. C’est pourquoi, d’après l’article 389-3 du Code Civil, il est désigné lorsqu’il existe une opposition d’intérêts entre le mineur et ses représentants légaux. L’opposition d’intérêts doit être préalablement constatée par le juge avant toute nomination. Cela relève de son pouvoir souverain d’appréciation ( civ. 1ère, 5 janvier 1999). Il faut que les intérêts soient contradictoires, divergents ou que l’opposition soit une éventualité qui peut être sérieusement envisagée au cours d’un acte ou d’un procès. L’opposition d’intérêts apparaît dans tous les actes ou opérations qui ont pour objet de fixer ou de déterminer les droits du mineur et ceux de l’administrateur légal, par exemple, en matière patrimoniale, il existe une opposition d’intérêts quand l’administrateur légal et le mineur sont appelés à une même succession. En matière extrapatrimoniale, elle concernera les problèmes relatifs à la filiation, aux changements de noms, prénoms …Lorsque l’administration légale est pure et simple, l’opposition d’intérêts doit être constatée à l’égard de chaque parent (sinon, l’autre parent est toujours en mesure de représenter l’enfant et il sera inutile de nommer un administrateur ad hoc).

mission de l’administrateur ad hoc

L’administrateur ad hoc est désigné pour l’instance et pour cette seule procédure. L’objet et la durée de son mandat seront strictement délimités. (durée du mandat = durée de la procédure). Il ne bénéficie d’aucune rémunération pour son intervention.

8 G. CORNU, Vocabulaire juridique.

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L’administrateur ad hoc a qualité pour accomplir seul tous les actes civils qu’un tuteur peut faire sans autorisation du conseil de famille (civ. 1ère, 8 mars 1988). L’administrateur ad hoc doit respecter les pouvoirs du mineur donc si le mineur est en mesure d’agir seul (comme par exemple le paiement d’une dette [TI Montmorillon, 19 mai 1982]), l’administrateur ad hoc ne doit pas intervenir et l’ordonnance du juge des tutelles désignant un administrateur ad hoc doit même être annulée (civ. 1ère, 16 avril 1991).

En général, l’administrateur ad hoc est désigné dans les procédures où l’enfant a la qualité de partie, mais sans

avoir la capacité d’agir lui-même. Cependant, la Cour de Cassation a élargi le champ de compétence de l’administrateur ad hoc puisqu’elle a admis qu’il soit désigné dans des procédures où l’enfant n’est pas partie notamment dans les procédures relatives à l’autorité parentale (civ. 1ère, 23 février 1999). Le rôle de l’administrateur ad hoc est dans ce cas assez particulier : le mineur n’étant pas partie à la procédure il ne peut lui-même être considéré comme partie puisqu’il ne peut pas avoir plus de droits que le mineur qu’il représente. Il ne peut donc pas accéder au dossier, formuler de demandes, ou exercer une voie de recours. Ainsi, dans un arrêt du 9 février 2001, la Cour de Cassation a considéré que la tierce opposition formée par un administrateur ad hoc au nom d’un enfant naturel dans le cas d’une procédure relative aux modalités de l’exercice de l’autorité parentale était irrecevable.

N’étant pas une partie à la procédure, l’administrateur ad hoc recherchera un avocat et le désignera pour les aspects procéduraux de la procédure.

- l’avocat

présentation

L’avocat de l’enfant est né avec la Convention internationale des droits de l’enfant. Après la ratification de la convention, un rapport du Conseil d’Etat propose des aménagements nécessaires afin de promouvoir les nouveaux droits des enfants, dont la formation d’avocats volontaires spécialisés pour la défense des enfants.

mission

L’avocat sera là pour assister la parole de l’enfant plus que pour défendre ses droits, (sachant que l’enfant n’est pas partie au procès en divorce de ses parents). L’avocat de l’enfant a pour mission de l’aider à exprimer ses sentiments en l’assistant moralement. Si un avocat est choisi par le mineur alors ce dernier doit informer le juge (article 338-7 NCPC). En revanche, l’avocat n’est pas obligé de prévenir les représentants légaux même si, déontologiquement, l’avocat est poussé à le faire. Aucun âge minimal n’est imposé, par conséquent, dès qu’un enfant est en mesure de se faire comprendre, il peut demander à être entendu avec un avocat. L’avocat sollicité appréciera s’il doit accepter cette défense, il sera rémunéré soit par les parents soit par l’état au moyen de l’aide juridictionnelle.

B’) L’action personnelle de l’enfant

L’enfant mineur occupe une place importante au sein de la sphère juridique, bercé entre le souci permanent de protection et la reconnaissance toujours plus forte de droits. Au niveau procédural, l’enfant s’est ainsi vu reconnaître la possibilité d’être entendu au procès, un droit à la parole parfois déterminant dans l’issue d’une procédure. Afin d’agir en justice, il doit avoir recours à son représentant légal ou à défaut, à un mandataire ad hoc. Ainsi, l’enfant est un acteur tout à fait particulier des procédures civiles, un acteur doté de la parole auquel il manque le geste.

En droit français, l’action en justice est le droit pour l’auteur d’une prétention d’être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge en dise le bien ou le mal fondé. Or il n’est pas exclut qu’un enfant mineur soit l’auteur d’une prétention.

Toutefois, une action en justice n’est possible que sous certaines conditions, révélées notamment par l’article 31 du Code de Procédure Civil : « l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé ». Trois notions ressortent sous la forme de conditions : l’intérêt, la qualité et la capacité pour agir.Or l’enfant mineur est en droit français soumis à une incapacité de droit énoncé a contrario dans l’article 488 aux termes duquel c’est à la majorité, fixée à l’âge de 18 ans, que l’on acquiert la capacité. Cette incapacité paralysante est

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en fait un moyen efficace de protection du mineur contre sa propre ignorance ou contre ceux qui entendraient profiter de sa crédulité.

En France comme dans la plupart des Etats européens, le principe retenu est l’incapacité juridique pour le mineur d’agir en justice. Somme toute, comme tout principe il souffre d’une exception, et en l’espèce, elle est double. L’action personnelle du mineur est en effet prévue à deux reprises : soit elle est prévue initialement, soit elle est subsidiaire, cette seconde hypothèse étant celle de la possibilité pour l’enfant mineur, lorsque ses parents sont défaillant dans l’exercice de sa représentation, de demander personnellement ou par l’intermédiaire d’autres personnes ou organes, la désignation d’un représentant spécial ; c’est le cas du mandataire ad hoc pour ce qui est du droit français (Cf. supra).

Concernant l’action personnelle du mineur, elle est le résultat d’une reconnaissance exceptionnelle de sa capacité à exercer lui-même ses droits. Ainsi elle est une dérogation au principe de droit commun de l’incapacité du mineur. Diverses procédures envisagent l’action personnelle de l’enfant, chacune a ses particularités. Permettre à un enfant de saisir un juge c’est lui permettre de faire valoir ses prétentions, c’est la possibilité pour lui de défendre ses droits, notamment devant une juridiction, qu’elle soit européenne ou française.

Au niveau européen, il s’agit de s’intéresser non pas au juge communautaire mais au juge des droits de l’Homme. Avant toute chose, précisons que le Conseil de l’Europe a adopté, le 28 septembre 1995, la Convention européenne sur l’exercice des droits des enfants. Son but est de faciliter l’exercice par l’enfant des droits que lui reconnaît la Convention internationale des droits de l’enfant. Soulignons que l’innovation provient de son article 5 par lequel elle instaure pour l’enfant, « le droit d’exercer toute ou partie des prérogatives d’une partie à de telles procédures ». Malgré tout, la marge d’appréciation que la Convention laisse aux Etats s’avère trop importante et porte ainsi préjudice à sa portée juridique9. On ne peut que regretter cette inefficacité.

Nonobstant la portée paralysée de ce texte, il est admit que le mineur, lorsque l’un de ses droits fondamentaux reconnus par la Convention européenne des droits de l’Homme a été violé, peut saisir la cour de Strasbourg et ce personnellement10. En effet, afin de garantir largement la protection des droits fondamentaux qu’elle reconnaît, la Convention EDH ne pose aucune condition de capacité à la saisine. D’ailleurs, elle ne distingue pas selon les requérants, portant à son apogée l’effectivité des recours. Il est donc suffisant que le mineur invoque à l’appui de son recours, un intérêt personnel à agir sans qu’une autorisation de son représentant légal ne soit nécessaire.En revanche, il demeure une condition commune à tous les requérants, indispensable à la saisine de la cour EDH : il s’agit de l’épuisement préalable des voies de recours internes. Or cela peut s’entendre de deux façons différentes. Soit il s’agit pour le mineur d’épuiser toutes les voies de recours qui lui sont personnellement permises, soit il doit également épuiser celles qui ne lui sont permises que par l’intermédiaire de son représentant légal. Cette précision est d’une importance remarquable dans la protection des droits de l’enfant, puisque la première situation s’avèrerait nettement plus protectrice que la seconde, les voies de recours ouvertes personnellement à l’enfant étant en nombre restreint, il satisferait ainsi plus aisément la condition préalable de l’épuisement des voies de recours. Toutefois, il appert de la pratique que la grande majorité des requêtes présentées au nom d’un mineur devant le juge de Strasbourg, l’est par le représentant légal.

Sans quitter la cour européenne des droits de l’Homme mais sans continuer l’examen de la possibilité pour un mineur de faire valoir personnellement ses prétentions devant elle, intéressons nous à sa vision du droit interne concernant la place du mineur dans les procédures civiles.

La cour de Strasbourg a affirmé à plusieurs reprises qu’un mineur est en droit, comme toute autre personne, de demander réparation devant une juridiction interne, et la cour de préciser, directement ou par représentant interposé, d’une atteinte aux droits consacrés par la convention européenne des droits de l’Homme. Cette affirmation résulte d’une interprétation stricto sensu du texte de l’article 13 qui énonce que « toute personne dont les droits reconnus dans la présente convention ont été violés a droit à un recours effectif devant une instance nationale », interprétation que l’on

9 L’art. 1 al. 4 de la Convention prévoit que les Etats doivent choisir trois types de procédures familiales pour lesquelles l’enfant mineur non émancipé pourra exercer les droits reconnus par la présente Convention.10 H. SURREL, « Le juge des droits de l’Homme », Dr. Famille, juil.-août 2006, Etude 36, p. 28 et s.

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retrouve dans les arrêt Z c/ Royaume-Uni du 10 mai 2001, DP et JC c/ Royaume-Uni du 10 octobre 2002, E et autres c/ Royaume-Uni du 26 novembre 2002.Toutefois, la cour ne se promet pas à une interprétation extensive de l’article 13, puisque 10 ans auparavant, notamment dans un arrêt Anderson c/ Suède du 25 février 1992, elle avait précisé que « l’article 13 n’exige pas qu’un enfant de douze ans ait la capacité d’ester en justice lui-même, il suffit qu’un représentant légal le puisse en son nom »11.

Ainsi, la convention européenne des droits de l’Homme et son garant, le juge, reconnaissent une certaine capacité à l’enfant mineur, fondée sur l’article 13, avec toutefois une préférence affirmée et confirmée par la jurisprudence pour les recours formés par le représentant légal.

Sur le plan interne cette fois, le mineur est juridiquement incapable, marquant une impossibilité de droit de faire valoir personnellement ses prétentions devant une juridiction compétente. Il lui faut un représentant, soit légal, soit exceptionnel, le mandataire ad hoc. Toutefois, il est intéressant de remarquer que certains îlots d’exceptions existent, permettant au mineur d’ester en justice. Sans tomber dans le catalogue, il est nécessaire de s’arrêter sur les différentes procédures reconnaissant à l’enfant mineur le droit d’agir, à certaines conditions toutefois.

De manière générale, si ce sont les droits subjectifs du mineur qui sont mis en jeu, la question de sa capacité à agir lui-même est alors posée. Mais il n’est pas à exclure que ces nécessités disparaissent à la lumière de certaines atteintes faites au mineur ou à ses droits. En revanche, si ce sont les droits non subjectifs du mineur qui sont en jeu, sa qualité et son intérêt pour agir semblent faire défaut. Dans cette hypothèse, ce sont les droits des parents du mineur qui sont en jeu, l’enfant n’étant plus que l’objet de la décision, une décision qu’il subit.

Tout d’abord, le Code Civil admet certaines actions ouvertes à l’enfant.Notamment, en matière d’action en recherche de paternité, tout d’abord, l’article 328 du Code Civil énonce que «  le parent, même mineur, à l’égard duquel la filiation est établie a, pendant la minorité de l’enfant, seule qualité pour exercer l’action en recherche de paternité ou de maternité »12. Or cela signifie que la mère ou le père, même mineur, sont les seuls à pouvoir exercer une telle action. A défaut, nul ne saurait le faire à leur place, ce qu’avait retenu un arrêt rendu le 22 février 1972 par la première chambre civile de la cour de cassation, sous l’empire de l’ancien article 340-2, lequel ne faisait référence qu’à la mère de l’enfant.

Pour ce qui est de l’action en recherche de maternité, l’alinéa 2nd de l’article 325 du Code Civil énonce que l’action est réservée à l’enfant. Auparavant, l’action était permise également aux époux, ensemble ou séparément (ancien article 340-2 du Code Civil). Aujourd’hui, l’enfant est seul titulaire de l’action. Toutefois, il s’avère que seul le représentant légal serait habilité à agir, au nom du mineur.Enfin, l’action à fin de subsides est réservée à l’enfant ou à sa mère, même mineur, pendant la minorité de l’enfant (article 342 du Code Civil). Ils ont seuls la qualité pour agir.

Concernant en revanche l’autorité parentale, l’enfant ne peut agir. En témoigne la jurisprudence, et notamment un arrêt de la première chambre civile de la cour de cassation, du 4 janvier 1995, excluant l’enfant des « membres de la famille », consacré plus récemment par la réforme du 4 mars 2002, réservant exclusivement les actions relatives aux modalités d’exercice de l’autorité parentale aux parents et au ministère public13. Classiquement, l’autorité parentale appartient donc aux père et mère. Ainsi, en cas de litige relatif aux modalités d’exercice, les droits substantiels autonomes de l’enfant ne sauraient être concernés de sorte qu’il puisse être partie. L’action personnelle de l’enfant se heurte donc à deux obstacles : la qualité pour agir et l’intérêt à agir.Pourtant, il semblerait que l’enfant puisse être partie ce qui représente selon P. MURAT, « la situation la plus aboutit processuellement, mais exceptionnelle »14.

11 Cf. en ce sens A. GOUTTENOIRE, « Le statut juridique de l’enfant dans l’espace européen », dir. D. GADBIN et F. KERNALEGUEN, Bruylant, 200412 Art. 328 al. 1er du Code civ., issu de l’ordonnance n°2005-759 du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation (entrée en vigueur le 1 er janvier 2006). 13 Les actions relatives à l’autorité parentale sont des actions attitrées puisque l’intérêt à agir se double de la nécessité d’entrer dans les prévisions légales, lesquelles restreignent l’action à certaines personnes limitativement énumérées. En ce sens notamment, S. GUINCHARD, et alii, « Droit processuel », 2005, 3e éd., spéc. n° 703 14 P. MURAT, « La participation de l’enfant aux procédures relatives à l’autorité parentale : bref regard critique sur la diversité des situations », Dr. Famille, juil.-août 2006, p. 11 à 14 ;

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Ainsi en est-il de l’assistance éducative (article 375 du Code Civil). Classiquement, l’enfant ne pouvait intervenir dans la procédure évoquée que s’il se référait au danger que présentaient les choix éducatifs de ses parents. Mais selon les auteurs, il est certain que le recours au « danger » pour justifier une intrusion du juge dans la sphère privée, à la requête du mineur, s’estompe largement avec des conventions internationales focalisées sur l’intérêt supérieur de l’enfant. Toutefois, depuis un arrêt de la première chambre civile de la cour de cassation rendu le 21 novembre 1995 puis un décret du 15 mars 2002, le mineur peut agir personnellement en matière d’assistance éducative, sous réserve qu’il ne soit pas privé de discernement15, ce que retient l’article 375 du Code Civil. En effet, si le discernement de l’enfant fait défaut, il ne pourra agir personnellement et devra, pour saisir le juge, avoir recours à un représentant.

Toutefois, le principe demeure l’impossibilité pour l’enfant d’exercer personnellement une action en justice en matière d’autorité parentale.Cette exclusion de l’enfant des personnes ayant qualité pour agir est largement critiquée par la doctrine qui estime que la situation s’installe à contre-courant de la prise en compte récente et marquée du respect de la personne de l’enfant. En effet, si la finalité de l’autorité parentale est la satisfaction de l’intérêt de l’enfant, il est étonnant de ne par le retrouver au stade des personnes ayant qualité pour agir. Ainsi le fondement de son actuelle exclusion semble fragile, l’enfant étant largement intéressé dans l’exercice de l’autorité parentale. D’ailleurs, la situation peut rappeler celle de l’Irlande évoquée devant la cour de Strasbourg le 26 mai 1994, dans un arrêt Keegan c/ Irlande16 qui conclue que lorsque l’action est attitrée, le défaut de qualité pour agir des personnes concernées par l’action est susceptible de constituer une atteinte au droit à l’accès d’un tribunal. En effet, comme l’écrivent certains auteurs, notamment L. CADIET et E. JEULAND, « l’action en justice n’est pas seulement un droit subjectif ; ce droit est lui-même l’expression d’une liberté publique, celle d’accéder à la justice »17. Or priver l’enfant du droit d’agir alors que la décision le concerne tout particulièrement, et c’est le cas en matière d’autorité parentale, semble constituer une entrave au droit d’accès à un tribunal.

Outre le défaut pour l’enfant de qualité pour agir, il persiste la condition de l’intérêt à agir. Il est constant de retenir que l’enfant est dépourvu de cet intérêt pour agir, au sens juridique du terme, car s’il est bel et bien intéressé par l’évolution de sa situation à l’issue du procès, il n’en reste pas moins qu’il n’est pas titulaire de droits subjectifs relatifs à l’exercice de l’autorité parentale, susceptibles de fonder son action. Toutefois, la doctrine critique doublement cette affirmation. D’une part, elle estime la conception de l’intérêt pour agir trop étroite. En effet, les auteurs retiennent que l’intérêt individuel ne s’identifie pas nécessairement et exclusivement à l’atteinte portée à un droit subjectif ou à la méconnaissance d’un tel droit. L’intérêt personnel doit donc s’entendre largement. D’ailleurs, le préjudice, qu’il soit matériel ou moral, sans qu’il soit une atteinte à un droit subjectif, suffit à démontrer un intérêt personnel à agir. D’autre part, le droit français est profondément irrigué par la prise en compte accrue des droits de l’enfant ainsi que l’idée selon laquelle l’autorité parentale est un droit finalisé dans l’intérêt de l’enfant. Or, l’analyse traditionnelle selon laquelle une procédure relative à l’autorité parentale ne porte pas atteinte aux droits subjectifs autonomes de l’enfant, semble aller à contre courant de l’évolution actuelle. Principale illustration en est, la reconnaissance de droits subjectifs de l’enfant dans les procédures relatives à l’autorité parentale18. L’avènement de tant de droits reconnus à l’enfant ne peut permettre le maintient de son exclusion des procédures le concernant, et doit au contraire, lui permettre d’être reconnu comme une véritable partie, un acteur ayant le pouvoir de s’opposer aux atteintes faites à ses droits, même s’il s’agit de ses parents.

Finalement, l’incapacité du mineur est certes, un rempart à sa jeune innocence, contre son incrédulité et contre la malveillance des tiers, elle n’en est pas moins un obstacle handicapant pour l’enfant dont la nécessité de faire valoir les intérêts semble transcender la distinction entre droits subjectifs et droits non-subjectifs, une distinction essentielle mais fragilisant considérablement la protection de l’enfant. Celui-ci, s’il n’est pas titulaire des droits en cause dans une procédure, notamment en matière d’autorité parentale, n’en demeure pas moins l’objet de la décision, parfois contraire à son intérêt. L’on peut alors se demander si l’incapacité de droit protège uniquement le mineur, ou ne l’expose-t-elle pas au risque de devenir la victime d’une décision obtenue entre adultes.

15 A. GOUTTENOIRE, Rép. proc. Civ. Dalloz, V° Mineurs, n° 188 et s.16 CEDH, 26 mai 1994, Keegan C/ Irlande : JCP G, 1995, I, 3823, n° 3217 L. CADIET et E. JEULAND, « Droit judiciaire privé », LexisNexis, Litec, 4e éd., 2004, spéc. n° 47118 Ces droits sont le droit d’être entendu, le droit d’entretenir des relations avec ses ascendants, avec ses frères et sœurs, droit aux relations personnelles de l’enfant avec chacun de ses parents, droit de l’enfant d’être associé aux décisions qui le concernent selon son âge et son degré de maturité.

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Ces droits sont le droit d’être entendu, le droit d’entretenir des relations avec ses ascendants, avec ses frères et sœurs, droit aux relations personnelles de l’enfant avec chacun de ses parents, droit de l’enfant d’être associé aux décisions qui

le concernent selon son âge et son degré de maturité.

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LES ACTIONS RELATIVESA LA FILIATION

Introduction La filiation : Définition et Principes directeurs L’ordonnance du 4 juillet 2OO5 : Révolution juridique controversée? L’établissement non judiciaire : prélude à l’établissement judiciaire Accessoire à la filiation : l’action à fin de subsides Juge et parties : compétence et jugement : qualité et délai pour agirI – L’établissement judiciaire de la filiationA. L’établissement judiciaire de la maternité1) Les anciennes actionsa) La réclamation d’état d’enfant légitimeb) la recherche de maternité naturelle2) La nouvelle action en recherche de maternité3) Les conséquences de cette actionB. L’établissement judiciaire de la paternité1) Action en rétablissement de la présomption de paternité2) Action en recherche de paternitéa) Histoire de cette action : de l’interdiction à l’admission libreb) Le nouveau régimeC. L’action en contestation de la possession d’état commune aux père et mère3II – La contestation judiciaire de la filiationA. La contestation d’une filiation établie par un acte1) Etablissement de filiation par un actea) Possession d’état conforme au titreb) Non-conformité entre le titre et la possession d’état2) Etablissement de filiation par une reconnaissancea) L’action en contestation de la reconnaissanceb) L’action en annulation de la reconnaissanceB. La contestation d’une filiation établie par possession d’état1) La contestation de la filiation établie par possession d’état constatée par un actede notoriétéa) L’objet de la contestation- Contestation de la possession d’état- Contestation de la vérité de la filiationb) Le régime de la contestation- Les titulaires et les délais- La force de l’acte de notoriété2) La contestation de la filiation établie par possession d’état judiciairementconstatéea) Une contestation par tierce opposition- contestation de la possession d’état- contestation de la vérité de la filiationb) Une contestation de droit commun- Une contestation sur le fondement de l’article 334 du Code civil- Les obstacles à une telle action

INTRODUCTIONChaque individu, tôt ou tard au cours de sa vie, est à la recherche de ses origines, chaque êtrehumain désire trouver ses ancêtres, ascendants. Par les actions relatives à la filiation, denombreuses pistes peuvent être explorées.1) Définition de la filiation et principes directeurs- Qu’est ce que la filiation ?La filiation est un lien de droit qui unit un individu à son père (filiation paternelle), à sa mère(filiation maternelle) ou à l’un d’eux seulement. Originellement un fait naturel, elle se change

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en un fait juridique. La filiation, plus précisément, les filiations, sont diverses et variées etreposent sur le lien du sang, ou bien le lien du coeur. Cette distinction tend à disparaître avecl’ordonnance du 4 juillet 2005 applicable au 1er janvier 2006.La filiation par le sang ou la filiation charnelle comprend la filiation légitime, c’est-à-direcelle de l’enfant dont les parents étaient mariés au jour de sa conception ou de sa naissance, et,la filiation naturelle. Cette dernière peut être simple – l’enfant est né de père et mère nonmariés, donc d’une relation sexuelle hors mariage – ou adultérine, autrement dit l’enfant estalors né de père et mère non mariés ensemble mais dont l’un est marié avec un tiers.La filiation par le coeur, soit la filiation adoptive, prend deux formes. Il s’agît de la filiationadoptive simple – l’enfant (adopté) voit établir un lien de filiation avec une ou deux personnes(adoptants) par décision de justice mais conserve des liens avec sa famille d’origine (de sang)– et plénière pour laquelle les liens de l’enfant avec sa famille d’origine sont totalementrompus.Les marginalisés du droit sont les enfants sans filiation, pluriels pendant longtemps, ilsforment désormais une catégorie unique. Tout d’abord, dans la logique du seul couple mariéjuridiquement reconnu, seul l’enfant issu de parents mariés étaient reconnu jusqu’à la loi du 3janvier 1972 qui posa un principe d’égalité entre toutes les filiations à l’article 334 du codecivil, exception faite en matière successorale. La loi du 3 décembre.2001 relative au conjointsurvivant a lissé toute différence entre les filiations au niveau successoral. Longtempsmarginalisée du droit, la catégorie des enfants adultérins a été finalement régie par le droit.Néanmoins, reste vacant, le sort des enfants incestueux. En effet, la loi prohibel’établissement d’une filiation s’il existe entre les père et mère de l’enfant l’un desempêchements à mariage prévus par les articles 161 et 162 du code civil pour cause deparenté : la filiation étant déjà établie à l’égard de l’un, il est ainsi interdit d’établir la filiationà l’autre parent « par quelque moyen que ce soit » (art. 310-2 C. Civ.). Deux types de liens defiliations incestueux sont ici visés : l’enfant né d’une relation ascendant / descendant, soit lestrois quarts des cas et, l’enfant né d’un frère ou d’une soeur (quinze pour cent des cas). Leprincipe demeure l’adage mater semper certa est, c’est donc en principe avec la mère que lelien de filiation sera établi, l’enfant n’ayant alors qu’une filiation maternelle saufaccouchement sous X. La double filiation, c’est-à-dire à l’égard du père en sus de la mèreréalise l’inceste. Ainsi, la filiation à l’égard du père est interdite et ne peut être établie « parquelque moyen que ce soit »1.La Cour de cassation a d’ailleurs interdit aux parents de tourner la règle en adoptant l’enfant2.- Les principes directeurs qui gouvernent de droit de la filiationEgalité et vérité gouvernent le droit de la filiation EgalitéL’article 310, ouvre le Titre 7ème « De la filiation » du Livre Ier consacré aux « personnes » duCode civil et proclame une pleine égalité entre toutes les filiations dès la loi Carbonnier du 3janvier 1972« Tous les enfants dont la filiation est légalement établie ont les mêmes droits et les mêmesdevoirs dans leurs rapports avec leur père et mère. Ils entrent dans la famille de chacund’eux. »1 Art. 310-2 C. Civ. in fine « il est interdit d’établir la filiation à l’égard de l’autre par quelque moyen que cesoit »2 Cass. Civ. 1ère, 6 janv. 2004, Dalloz 2004, n°362

De 1804 jusque dans les années 70, époque des Réformes Carbonnier, seul le couple mariéétait juridiquement reconnu, par suite seule la filiation légitime était admise. Etaient ainsimarginalisés les enfants nés hors mariage et adultérins.La loi du 3 janvier 1972 proclame l’égalité entre filiation légitime et naturelle, reconnaissantainsi l’enfant né hors mariage (simple, adultérin, incestueux bien que partiellement).L’art. 334 C. Civ. ancien disposait « L’enfant naturel a en général les mêmes droits et lesmêmes devoirs que l’enfant légitime dans ses rapports avec ses père et mère. Il entre dans lafamille de son auteur »Une exception était concédée en matière successorale car l’enfant naturel avait la moitié dece à quoi il aurait pu prétendre s’il avait été légitime (art. 759 ancien C. Civ.). Il s’agit d’unprincipe grandement discriminatoire. Cependant, la Belgique d’abord, puis la France ensuite

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ont été successivement condamnées par la Cour Européenne des Droits de l’Homme :CEDH, Marckx 13 juin 1979 : La Belgique est condamnée sur le fondement des articles 8(droit au respect à la vie privée et familiale) et 14 (refus de discriminations fondées sur lanaissance) pour les inégalités successorales mais en l’espèce la vocation successorale étaitabsente et l’intéressé était un enfant naturel simple.CEDH, 1er fév. 2000, Mazurek : La France est condamnée sur le fondement de l’article 1erdu Protocole 1 (droit au respect des biens). Ainsi « en tout état de cause l’enfant adultérin nesaurait se voir reprocher des faits qui ne lui sont pas imputables »La loi du 3 déc. 2001 sur le conjoint survivant gomme toute différence entre enfant à raisonde la filiation. La loi 4 mars 2002, rappelle ce principe d’égalité. Enfin, l’ordonnance du 4juillet 2005 supprime toutes les filiations et le mécanisme de légitimation, ne subsiste alorsque la distinction filiation par le sang / adoptive.

VéritéQu’est-ce que la vérité ? D’un point de vue juridique, c’est la filiation légalement établie. Dèslors, s’agit-il de vérité biologique ou sociologique ?La vérité biologique :La filiation est dans sa genèse un fait biologique que doit nécessairement traduire le droit.Ainsi, la vérité du sang semble être privilégiée aisément permise par les progrès scientifiqueset de la médecine. Le droit a pour mission de donner des parents à un enfant : parentsvéritables (par nature, chair par le sang), biologiques ou génétiques (géniteurs).Aujourd’hui, la vérité (paternelle / maternelle) biologique est accessible de sorte que la véritédevient celle offerte, démontrée par la science ; mais, les articles 16-11 s. du code civildemeurent des garde-fous encadrant les modalités de modes de preuve de filiation (AffaireYves Montant3, Loi du 6 août 20044).La filiation fictive préférée hier (plutôt que de laisser un enfant sans filiation) est refusée àl’heure où le modèle unique de mariage est contesté.La vérité sociologique :Définie comme une réalité parfois quotidienne sinon répétée que la loi ne peut ignorer. Elletraduit les rapports que peuvent avoir un homme et une femme avec l’enfant, et vice versa.C’est la possession d’état. Si la loi de 1972 plaçait la vérité biologique comme une directive,la recherche de la vérité sociologique, celle qui permet la garantie de plus de vraisemblance,était et doit être permise. (En ce sens, voir art. 311-12, 322 et 334-9 a contrario C. civ.)Demeurent des vérités interdites comme l’inceste (art. 310-2), hier comme aujourd’hui,l’accouchement sous X où la vérité biologique s’efface volontairement (art. 326), laprocréation médicalement assistée par tiers donneur pour laquelle n’existe aucun lien entre letiers donneur et l’enfant selon l’article 311-19 C. Civ.3 CA Paris, 6 nov. 1997, D. 1998 n°122 note Malaurie et Cass. Civ. 1ère 28 mars 2000, D. 1998, Somm. 356 Obs.Granet4 Loi n° 2004-801 du 6 août 2004 relative à la protection des personnes physiques à l’égard des traitement dedonnées à caractère personnel…

2) L’ordonnance du 4 juillet 2005- Histoire d’une réformeSuggérée et préconisée par le rapport élaboré par le Professeur Françoise Dekeuwer-Defossez5 et rendu au Garde des Sceaux en 1999, le droit de la filiation a été « simplifié » parun processus déroulé entre quatre actes : acte I : Loi du 9 déc. 20046 autorise le Gouvernement à simplifier le droitde la filiation par ordonnance acte II : Ordonnance du 4 juillet 20057 : promulguée très vite acte III : Décret d’application du 1er juin 2006 8 : livret de famille etprocédure en matière de filiation acte IV : Circulaire du 30 juin 2006 destinée aux magistrats du ParquetL’ordonnance est entrée en vigueur le 1er juillet 2006- Apports majeurs et critiques doctrinalesApports fondamentaux :L’un des apports majeurs est la suppression des filiations légitime et naturelle. Disparaissent

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ainsi les derniers privilèges pour les uns, et, de manière concomitante, les discriminationspour les autres. Cela étant, cet aspect de la réforme n’a qu’une portée symbolique car lapratique et le code civil (art. 316) évoquent toujours les filiations légitime et naturelle, neserait ce que par commodité. Aussi, et conjointement à l’abolition des filiations légitime etnaturelle, une réorganisation du titre 7 du livre 1er du code civil est opérée. Hier organisé endispositions communes à la filiation légitime et naturelle, filiation légitime, filiation naturelle,le code civil aujourd’hui évoque les dispositions générales communes à tous les enfants, puisl’établissement non contentieux de la filiation avant d’aborder enfin l’établissementcontentieux.5 Rénover le droit de la famille, Rapport au Garde des Sceaux, Documentation Française 19996 Loi n° 2004-1343 du 9 déc. 2004, Loi de simplification du droit7 Ordonnance n° 2005-459 du 4 juillet 2005, portant réforme du droit de la filiation8 Décret n°2006-640 du 1er juin 2006

Le second apport majeur est l’établissement automatique de la filiation maternelle qui figureénoncé à l’article 311-25 C. Civ. « la filiation est établie à l’égard de la mère par ladésignation de celle-ci dans l’acte de naissance de l’enfant »9. L’indication du nom de lamère dans l’acte de naissance suffit à établir la maternité, la reconnaissance n’étant plusnécessaire. Il est à noter que ce principe figure dans la disposition n° 6 de la CommissionInternationale de l’Etat Civil. De plus, la reconnaissance prénatale par la mère est et seratoujours possible. Enfin, l’accouchement sous X n’est pas remis en cause, l’art .341-1 C. Civ.demeurant inchangé.La possession d’état peut être établie à la demande de chacun des parents ou de l’enfant aujuge par acte de notoriété. Hier la simple possession d’état était suffisante, avec la réforme de2005 il s’agît désormais d’un acte de notoriété constatant la possession d’état qui doit êtreétabli. Le délai est de 5 ans.Critiques doctrinales :Certaines critiques doctrinales ont été émises à l’égard de l’ordonnance du 4 juillet 2005souvent perçue comme un prétexte pour proclamer « d’urgence » l’égalité des enfants.Qualifiée de réforme de « simplification », celle-ci ne semble l’être qu’en apparence rendantmême le droit illisible. « Le temps du droit de la filiation est celui du droit de la vie humaine :on ne légifère pas avec cette matière comme on peut le faire pour un contrat »10.Enfin,nombreux sont les délaissés du droit de la filiation : accouchement sous X, famillehomoparentale, filiations incestueuses, enfants nés de mères porteuses…11- Et nos voisins européens ?L’égalité des filiations est proclamée en Europe sans exception. La distinction entre enfantlégitime et naturel a été supprimée en Hongrie (1947), Espagne (1981), Belgique (1987),Allemagne, Croatie, Autriche, Pologne, Turquie et France. Elle subsiste toutefois encore enGrande Bretagne, Italie et Luxembourg.L’adage Mater semper certa est est reconnu partout sauf en Italie.9 L’ordonnance de 2005 entérine TGI Brive 30 juin 2000 (Dr. Fam. 2000, com. n° 108). Confirmé Cass. 14 fév.2006 (Dr. Fam. Mai 2007 com. n°107, P. Murat)10 P. Murat, A quand la ratification de l’ordonnance portant réforme de la filiation ?, Dr. Fam., Mai 200711 A. Gouttenoire, « A chacun sa famille, à chacun son droit ? », Dr. Fam. Juillet 2006, Alerte 41

S’agissant de l’accouchement sous X, il n’y a pas de consensus européen. L’Espagne parled’enfant « né de mère inconnue » alors que les « Boîtes à Bébé » fleurissent en Belgique. Entout état de cause l’accouchement sous X ne viole aucunement les articles 8 et 14 de laConvention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales.3) L’établissement non judiciaire de la filiationDeux principes jalonnent le droit de la filiation : Mater semper certa est : l’accouchement estun acte visible et peut dont être établi administrativement mais les conventions de mèresporteuses sont interdites en France (art. 16-7 C. Civ.). Le second principe est un mécanismede présomptions pour déterminer le père vraisemblableTrois modes légaux de preuve énoncés à l’article 310-3 C. Civ. coexistent :L’acte de naissance : mode de preuve de la filiation légitime, mode général de preuve de lafiliation maternelle depuis 2005, il doit comporter un certain nombre de mentions obligatoires

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énoncées à l’article 57 C. Civ. L’acte de naissance a force d’un acte authentique pour leséléments vérifiés par l’officier d’état civil.L’acte de reconnaissance est un acte juridique solennel unilatéral par lequel une personneaffirme sa paternité ou maternité à l’égard de l’enfantL’acte de notoriété constatant la possession d’état est la situation de fait qui produit deseffets juridiques fondée sur l’apparence (nom, traitement, renommée de manière continue,non équivoque, paisible et publique).4) Accessoire à la filiation, l’action à fin de subsidesL’action à fin de subsides, prévue à l’article 342 C. Civ., créée par la loi du 3 janvier 1972, estl’action par laquelle l’enfant qui n’a pas eu de « véritable » père peut réclamer des subsides(secours) à l’homme qui a au des relations avec sa mère pendant la période légale deconception. Il s’agit d’une mesure entre « une responsabilité sexuelle forcée et une paternitédiminuée ».

Le demandeur, soit l’enfant peut jusqu’à expiration d’un délai de 2 ans après sa majoritérapporter la preuve qu’une paternité par tout moyen. Cela étant la preuve est difficile car ils’agît d’un élément intime de la personne humaine. En cas de pluri paternité, la preuvecontraire par tout homme peut être rapportée. C’est l’hypothèse de l’amant de Madame ayantmis un enfant au monde dont le père est un autre homme.Une telle action a pour effet le versement de subsides par le « père » à l’enfant. Le mot a étépréféré à celui d’obligations alimentaires qui prend une connotation moins « familiale » maisle régime est quasiment identique. Néanmoins, il n’y a pas de réciprocité des obligations –donc de l’enfant à l’égard du père -, et le versement est proportionnel aux capacités dudébiteur. Enfin, aucun lien d’état n’est établi entre l’enfant et l’homme en question. Nom,autorité parentale, et droits de visite sont totalement exclus.5) La procédure civile relative à la filiationLes dispositions générales relatives au régime juridique des actions relatives à la filiation setrouvent aux nouveaux articles 318 à 324 du code civil. L’ordonnance de 2005 a apporté desmodifications surtout en ce qui concerne les conflits de filiation et les règles de prescription eta repris de nombreux principes en reproduisant parfois à l’identique certainsarticles( compétence du TGI, le recours à la preuve biologique). Afin d’analyser ce régime,nous distinguerons tout ce qui a trait au juge, puis aux parties- Le juge :Nous verrons successivement, la compétence, l’instance et le jugement. Sa compétence :Le principe est la compétence exclusive du tribunal de grande instance en matière de filiation.En effet, en vertu de l’article 318-1 nouveau du code civil, le TGI est seul compétent enmatière civile pour connaître des actions relatives à la filiation.

Le juge d’instance interviendra seulement lors de la délivrance de l’acte de notoriété quiconstate la possession d’état mais ne pourra trancher une question relative à la filiation, seul leTGI étant compétent.Ce principe vaut pour les autres juridictions, pénales ou administratives. Ainsi, par principetoute juridiction doit se déclarer incompétente si elle est saisie d’une action relative à lafiliation. On appelle cela une exception préjudicielle.L’article 319 nouveau du code civil (311-16 anc.) le prévoit expressément pour lesjuridictions pénales « en cas d’infraction portant atteinte à la filiation d’une personne, il nepeut être statué sur l’action civile qu’après le jugement passé en force de chose jugée sur laquestion de la filiation ». Cet article limite l’exception préjudicielle aux seules infractionsportant atteinte à la filiation d’un individu (ex : substitution d’enfant) qui obligera lajuridiction pénale compétente à surseoir à statuer. Par conséquent, lorsque le juge pénal saisid’une infraction, qui ne porte pas atteinte à la filiation directement mais qui suppose qu’il seprononce sur de questions de filiation, il pourra se prononcer sans avoir à surseoir à statuermais sa décision n’aura pas autorité au civil. L’instance :Le rôle du ministère public :En vertu de l’article 425-1 du nouveau code de procédure civile, le ministère public doit avoir

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communication des affaires relatives à la filiation, car la filiation intéresse l’ordre public.Un arrêt de la première chambre civile de la cour de cassation du 21 mai 1997 a posé ceprincipe à tous les degrés de juridictions.En outre, l’article 336 offre la possibilité au ministère public le droit d’agir en contestation dela filiation « si des indices tirés des actes eux-mêmes » « rendent invraisemblable » le lien defiliation ou que ce lien ait été «établi en fraude à une règle d’ordre public ».L’office du juge :L’ordonnance de 2005 a confirmé les pouvoirs que la loi de 1972 avait conférés au juge : Le juge peut alors statuer ultra petita en accordant un droit de visite à celuidont il écarte les prétentions= article 337 nouveau du code civil

Le juge peut ordonner d’office la mise en cause d’un tiers = article 324nouveau Le juge peut ordonner d’office une expertise sanguine ou tout autre mesured’instruction en vertu des articles 10 et 143 du NCPC.La preuve en matière de filiation :Tout d’abord la filiation est un fait juridique, donc sa preuve peut se rapporter par tousmoyens, ex : commencement de preuve par écrit, témoignages, photographies.Toutefois, de plus en plus, la preuve biologique s’est imposée :(La loi du 15 Juillet 1955 avait inséré à l’article 340 une nouvelle fin de non recevoir àl’action en recherche de paternité lorsqu’il était établi par un examen comparé de sang que cen’était pas le père.La loi de 1972 prévoyait que la fin de non recevoir tirée de l’exclusion de paternité pouvaitrésulter non seulement d’un examen comparé de sang mais aussi de toute autre méthodemédicale certaine.)Il faut noter que le droit a évolué en même au fur et à mesure de l’évolution de la sciencemédicale puisque des progrès considérables ont été effectués en matière d’expertisebiologique, les examens sanguins permettant d’aboutir à des exclusions de paternité dans defortes proportions, près de 99 %, ainsi, l’absence d’exclusion constitue une forte présomptionde paternité. Parallèlement, méthode des empreintes génétiques s’est développée.Un arrêt de principe du 28 mars 2000 rendu par la première chambre civile a considéré que« l’expertise biologique est de droit en matière de filiation, sauf s’il existe un motif légitimede ne pas y procéder ».Des arrêts ultérieurs ont précisé ces motifs légitimes : existence de preuves de paternité trèsfortes, décès du père prétendu, irrecevabilité de l’action. Cette solution reste valable sousl’empire du droit nouveau

Le jugement :La loi de 1972 pose le principe à l’article 311-10 anc (324 nouv.) de l’opposabilité ergaomnes des jugements en matière de filiation et admet un tempérament en ouvrant aux tiers lavoie de la tierce opposition.Le principe :L’article 324 al. 1er nouveau dispose que « les jugements rendus en matière de filiation sontopposables aux personnes qui n’y ont point été parties ».M. Fulchiron, dans son livre, note que cette disposition reprend la distinction doctrinale entreopposabilité du jugement et de ses effets= absolue, et autorité du jugement = relative. En effet,la décision passée en force de chose jugée fait preuve à l’égard de tous, et ses effetss’imposent aux parties comme aux tiers (autorité absolue)L’ouverture de la tierce opposition :L’article 324 al 1 in fine dispose que les personnes non parties au jugement ont le droit d’yformer tierce opposition.Sur la notion de tiers, un arrêt de la première chambre civile du 29 janvier 1975 a préciséque les ayants cause universels d’une des parties au litige ne faisaient pas partie des tiers viséspar le texte.La tierce opposition ne peut être formée que par ceux auxquels l’action est ouverte. De plus,le nouveau jugement ne produit d’effet qu’à l’égard des tiers qui ont agi en tierce opposition,car l’admission de la tierce opposition a pour seul effet de rendre la décision attaquée

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inopposable au tiers opposant.L’ordonnance de 2005 soumet la tierce opposition aux délais de l’article 321 du code civil,c’est-à-dire de 10 ans. Solution qui peut paraître cohérente puisque la filiation peut être établieou attaquée dans les mêmes délais.

- Les parties et le droit d’agirNous verrons d’abord la qualité pour agir, dans laquelle nous insérerons les titulaires del’action, les conflits de filiation (qui peut entraîner une impossibilité d’agir) et enfin lescaractères de l’action, puis nous traiterons des délais pour agir, nouveauté apportée parl’ordonnance de 2005. La qualité pour agirLes titulaires de l’action :La loi de 1972 avait mis en place un système d’actions attitrées, par exemple, en vertu desarticles 321, 325 et 326 concernant l’enfant légitime, le désaveu était réservé au mari.L’ordonnance de 2005 a profondément modifié le système. Tout d’abord, la loi ne distingueplus la filiation légitime et naturelle.Par principe posé aux article 325 et 328 al 2, les actions tendant à l’établissement de lafiliation maternelle ou paternelle appartiennent à l’enfant.La contestation est ouverte ou fermée selon une règle simple :En cas de conformité du titre et de la possession d’état, seuls peuvent agir le père, la mère,l’enfant ou celui qui se prétend le parent véritable = art 333 nouveau du code civilSelon l’al 2 du même article l’action sera fermée à tous si la possession d’état a duré au moinscinq ans.A défaut de possession d’état conforme au titre, l’action peut être engagée par tout intéressédans les délais prévus à l’article 321.Le lien de filiation légalement établi peut également être contesté par le ministère public, maisseulement « si des indices tirés des actes eux-mêmes le rendent invraisemblable ou en cas defraude à la loi » art 336

A ce stade, il faut faire une remarque à propos des conflits de filiation :L’ordonnance de 2005 abandonne le principe de règlement des conflits de filiation adopté parla loi de 1972, à savoir la filiation la plus vraisemblable.Le nouvel article 320 pose le principe chronologique en tant que règle générale :En 1972 ce principe n’était valable que dans deux situations, en matière de filiation naturelle,une reconnaissance rendait irrecevable l’établissement d’une autre filiation naturelle qui lacontredisait (conflit entre deux reconnaissances contraires) et lorsque deux époux réclamentun enfant comme le leur, ils doivent démontrer l’inexactitude de la filiation préétablie.Désormais, un lien de filiation légalement établie fait obstacle à l’établissement légal d’unlien contraire tant qu’il n’a pas été annulé par une décision définitive. Voila une relativelimitation au droit d’agir, les titulaires des actions en établissement du lien de filiation nepourront agir sur ce fondement qu’après avoir agi en contestation du lien préexistant en cas deconflits.Ainsi, la première filiation établie en date empêche, au moins temporairement, l’établissementlégal d’un lien contraire.Le caractère personnel de l’action :L’article 1166, les actions relatives à la filiation ne peuvent jamais être exercées par lescréanciers agissant par la voie oblique.L’intransmissibilité de l’action :Ce principe découle de l’indisponibilité de la filiation.Deux limites :-ART 322 al 2 les héritiers peuvent poursuivre l’action déjà engagée par le défunt « à moinsqu’il n’y ait eu désistement ou péremption d’instance ».-ART 322 al 1, les héritiers peuvent agir de leur propre chef dès lors que le titulaire del’action est décédé avant l’expiration du délai pour agir, dans ce cas elle est intentée « dans ledélai restant à courir au jour du décès »

L’indisponibilité des actions :

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ART 323 nouveau « les actions relatives à la filiation ne peuvent faire l’objet derenonciation. »Ces actions ne peuvent donc être cédées à des tiers, faire l’objet d’une transaction… Délais pour agir :Par tradition et en raison de l’indisponibilité de l’état des personnes, les actions relatives à lafiliation étaient imprescriptibles.C’est la loi de 1972 qui a posé le principe de la prescription.L’ordonnance de 2005 a conservé ce principe en y ajoutant une différence importante, laprescription décennale est substituée à la prescription trentenaire.Domaine :L’article 321 pose le principe de la prescription décennale, attention, ce principe ne vautqu’en l’absence de prescription spéciale (ex : art 335 pour une filiation établie par lapossession d’état constatée dans un acte de notoriété prescription de 5 ans).La prescription de l’article 321 s’étend à l’action en contestation d’une possession d’état maispas aux reconnaissances ni à l’établissement d’un acte de notoriété.Régime :Prescription soumise au droit commun, elle est donc susceptible d’interruption ou desuspension.La prescription est suspendue pendant la minorité de l’enfant, l’enfant peut donc agir jusqu’àses 28 ans.Point de départ :Art 321 « au jour où la personne a été privé de l’état qu’elle réclame ou a commencé à jouirde l’état qui lui est contesté »Pour les actions en établissement de la filiation, la prescription courrait à compter du jour oùla possession d’état a cessé ou à compter de la naissance si l’enfant n’a jamais eu de

possession d’état, ou plus tard si l’enfant a joui de la possession d’état pendant quelquestemps.Pour les actions en contestation de filiation :-si filiation établie par la seule possession d’état ou par la délivrance d’un acte de notoriété, laprescription spéciale de l’article 335 s’applique, donc cinq ans à compter de la délivrance del’acte.-si l’enfant dispose d’un titre et d’une possession d’état conforme, l’action se prescrit par cinqans à partir du jour où la possession d’état a cessé.-si l’enfant n’a qu’un titre nu, le délai de dix ans pourra partir qu’à partir du jour del’établissement du titre, acte de naissance ou reconnaissance* **Un premier visage de la filiation dans le droit positif est ainsi dressé (définition, principesgouverneurs, balbutiements (simplification) avec l’ordonnance de 2005) de manière à ce que,faut-il le rappeler tout enfant puisse avoir accès à ses origines « naturellement » et« juridiquement » finalement de manière non contentieux, sinon gracieuse.Néanmoins, lorsque l’accès aux origines est obstrué, l’établissement contentieux, au serviceduquel la procédure civile relative à la filiation se trouve, prend alors le relais (du noncontentieux). La justice « au nom du peuple français » s’efforce alors d’établir un lien entre letriangle PMB (Papa-Maman-Bébé).Quelles sont dès lors les actions judiciaires relatives à l’établissement d’un lien defiliation ?L’établissement judiciaire du lien de filiation (I) et la Contestation judiciaire du lien defiliation (II) sont des instruments alors au service de tout enfant né en quête de père et mère.

I – L’établissement judiciaire de la filiationEn matière d’établissement de la filiation, avec l’ordonnance du 4 juillet 2005, on neraisonnera à l’avenir non plus à partir de la distinction entre filiation légitime et filiationnaturelle mais davantage selon la nature entre filiation maternelle et filiation paternelle, nousreprendrons donc ce schéma dans notre plan.Suivant les dispositions de l’article 310-1 C. Civ., la filiation peut être établie de façon extra

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judiciaire, par l’effet de la loi, par reconnaissance volontaire ou par possession d’étatconstatée dans un acte de notoriété. Mais elle peut également être établie à défaut par unjugement rendu à l’issue d’une des actions que nous allons envisager ci-dessous.Il faut également juste préciser que ces actions tendent à être banalisées par le progrès de lascience et de ce fait, bien qu’elles soient insérées dans le Code Civil, elles restentexceptionnelles.A. L’établissement judiciaire de la maternitéPour que l’on puisse établir par la voie judiciaire la maternité, il faut que l’enfant n’ait ni titre(acte de naissance ou reconnaissance) ni possession d’état à l’égard de la femme qu’il prétendêtre sa mère. Articles 325 et 326 C. Civ.En effet, si la filiation est établie par un titre, cette action est inutile, si l’enfant jouit de lapossession d’état à l’égard de la mère, il lui suffira de la prouver par un acte de notoriété oupar une action en constatation de possession d’état.L’action en recherche de maternité n’est donc possible qu’en cas d’abandon, d’enlèvement oude substitution d’enfants.

Avant l’ordonnance de 2005, on raisonnait encore à partir de la distinction filiation légitime/filiation naturelle, c’est pour cela que la loi reconnaissait deux actions possibles : l’action enrecherche de maternité légitime (l’action en réclamation d’état art. 323) et l’action enrecherche de maternité naturelle (art. 341 C. Civ.).Aujourd’hui, il existe une unification des actions grâce à la généralisation de la règle matersemper certa est, ces deux actions antérieures ont été alors réunies en une seule action enrecherche de maternité régie par l’article 325.1) Les anciennes actionsIl s’agit de voir rapidement les anciennes actions en recherche de maternité qui étaientpossible auparavant.a) La réclamation d’état d’enfant légitimeCette action tendait à établir la maternité d’une femme mariée et par contrecoup on endéduisait la paternité du mari de la mère par le jeu de la présomption de paternité.Une telle action ne concernait que des cas vraiment marginaux tel que la perte, le vol ou ladisparition d’enfants.Le législateur était très méfiant face à cette action qui mettait en exergue des situationscomplexes, douteuses voire scandaleuses.Aujourd’hui la preuve de la maternité pouvant être certaine grâce au progrès scientifique,cette action n’avait plus lieu d’exister.

b) la recherche de maternité naturelleCette action était largement ouverte puisqu’à l’époque l’acte de naissance ne pouvait être unepreuve de la maternité naturelle que sous certaines conditions. Mais la méfiance du législateurl’a conduit à en faire, toutefois, une action bien encadrée.Cette action était fermée pour les relations adultérines ou incestueuses (A.342 ancien).La preuve par témoins n’était admissible que lorsqu’il y avait un commencement de preuvepar écrit (art. 341 al.3 ancien).Avec la loi de 1972, cette action perdit une part de son utilité puisque désormais l’acte denaissance corroboré par la possession d’état valait reconnaissance (A.337 ancien).Et en 1982, la possession devint, en outre, un mode d’établissement extra judiciaire de lafiliation naturelle (art. 334-8 ancien).L’ordonnance du 8 janvier 1993 posa, quant à elle, le principe de la liberté de la preuve sousréserve de l’existence de "présomptions ou d’indices graves". (art.341 ancien)2) La nouvelle action en recherche de maternitéCette action a pour objet d’établir une maternité en mariage ou hors mariage. Il peut êtrenécessaire de contester au préalable une filiation déjà établie mais que l’on prétendmensongère.L’enfant est le seul titulaire de cette action en vertu de l’article 325 al.2 du C. Civ.Pendant la minorité de l’enfant, elle est exercée par le parent, même mineur à l’égard duquelle lien de filiation est établi. Cette action est exercée contre le parent prétendu ou ses héritierset à défaut contre l’Etat.

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En matière de délai, c’est le droit commun qui s’applique c’est-à-dire en vertu de l’article 321que l’action est ouverte dans les 10 ans à compter du jour où la personne a été privée de l’étatqu’elle réclame, la prescription étant suspendue au profit de l’enfant mineur quand bien mêmeil aurait été émancipé selon un arrêt de la Cour de cassation du 14/03/1978 (civ.1).Ce délai laisse à l’intéressé un temps suffisant pour la réflexion et d’éventuelles investigations.Cette action va toutefois être strictement encadrée pour pouvoir respecter certains impératifscomme le respect de la paix des familles et la stabilité des filiations.C’est pour cela qu’il existe 4 obstacles pouvant s’opposer à une action en recherche dematernité.- L’accouchement anonyme élève une fin de non recevoir à l’encontre de cette action enrecherche de maternité. Art. 325 al.1 et 326 « Lors de son accouchement, la mère peutdemander que le secret de son admission et de son identité soit préservé ».Cette disposition est critiquable, en effet, la convention de NYC du 26/01/1990 relatif auxdroits des enfants et qui est d’application directe en FRANCE, proclame dans son article 7-1le droit à la connaissance par chacun de ses origines personnelles et la convention européennede sauvegarde des droits de l’homme interdit toute discrimination liée au sexe. Or, cette fin denon recevoir n’existe qu’à l’encontre de l’action en recherche de maternité.L’art. 325 paraît alors contraire à la convention.Sur ce point, même s’il a été rendu à une faible majorité, l’arrêt Odièvre de la CEDH du13/02/2003 avait refusé de condamner la FRANCE et avait ainsi "validé" la législationfrançaise au regard des engagements contractés dans la CEDH. (dans cette affaire un enfantavait saisi la Cour de Strasbourg pour connaître le nom de sa mère).

- l’adoption plénière fait obstacle à l’action. A.352- l’action n’est pas possible si la maternité recherchée est incestueuse.- l’action est exclue lorsque l’enfant dispose déjà d’une filiation qui ne peut être contestée.(Art. 320).Nous allons ici voir les règles de preuve.Pour établir cette maternité, l’enfant doit prouver l’accouchement de la mère et son identitéavec celui dont la mère est accouchée, preuve qui peut se faire par tous moyens contrairementaux textes anciens.En effet, longtemps le législateur fut très prudent par peur de scandales et d’erreurs, il exigeaitdonc des adminicules.Pour la maternité, le seul adminicule envisagé était un commencement de preuve par écrit.En 1993, le législateur ne mit pas fin à ce système, la libre preuve de la maternité étaitsubordonnée à l’existence de présomptions ou d’indices graves. Mais la jurisprudence semontrait, toutefois très libérale.L’ordonnance de 2005 a mis fin à ce système, la preuve de la maternité est désormais libre.(art. .325)3) Les conséquences de cette actionCette action permet l’établissement du lien de filiation maternelle. Et même si la mère auraitété mariée à l’époque de la naissance de l’enfant, cette action ne concerne que la mère et n’aaucune conséquence sur la présomption pater is est. En effet, les deux liens de filiation

doivent être établis de manière distincte. La filiation paternelle devra donc être prouvée demanière autonome par une reconnaissance ou par possession d’état.B. L’établissement judiciaire de la paternitéL’établissement judiciaire de la paternité peut revêtir différentes formes selon qu’il s’agitd’une filiation en ou hors mariage.La loi est partie, en fait, de la constatation que jusqu’à une époque récente, il était impossiblede prouver directement la paternité. Elle a résolu donc la question par une présomption depaternité qui attribue de plein droit la paternité au mari de la mère A.312 al.1 ancienDonc en mariage, la filiation peut être établie par le jeu de cette présomption de paternité, soitque celle-ci soit rétablie après avoir été écartée par une action en rétablissement deprésomption de paternité (1), soit qu’elle découle du jeu de cette présomption consécutive àl’établissement judicaire de la filiation maternelle à l’égard d’une femme mariée.

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Si on est hors mariage, c’est l’action en recherche de paternité qui va jouer un rôle essentiel(2).1) L’action en rétablissement de la présomption de paternitéEn vertu des articles 313 et 314 du C. Civ. la présomption de paternité qui pèse sur le marid’une femme mariée peut être écartée dans deux hypothèses:- les époux sont en instance de divorce ou de séparation de corps et l’enfant a été conçuquand ils étaient légalement séparés.

- l’enfant a été déclaré sur les registres de l’état civil sans indication du nom du mari enqualité de père.Dans ces deux cas, la présomption retrouve néanmoins de plein droit sa force si l’enfantpossède la possession d’état à l’égard de chacun des époux et s’il n’a pas de filiation déjàétablie à l’égard d’un tiers. Le mari pourra également reconnaître l’enfant.Il est possible de rétablir les effets de cette présomption au moyen d’une action en justice.A.315 et 329. On rectifiera alors l’acte de naissance de l’enfant par une simple ordonnance derectification judiciaire rendue par le président du tribunal si toutes les conditions sont remplies,à savoir l’action est ouverte à chacun des époux et à l’enfant, il faut juste rapporter la preuvede la paternité du mari (expertise biologique). L’action peut être intentée par les parentspendant toute la minorité de l’enfant et par ce dernier dans les 10 ans qui suivent sa majorité.Cette action est prévue pour contrecarrer une manoeuvre de l’épouse qui voudrait soustraire unenfant à son mari en le faisant déclarer à la naissance sous son seul nom de jeune fille.2) L’action en recherche de paternitéCette action ne concerne que la paternité hors mariage. Ici, cette action n’est pas subordonnéeà l’absence de titre et de possession d’état même s’il en va de soi que cette action est intentéelorsqu’un enfant conçu et né hors mariage n’a pas été accepté par son père et lorsque celui-cine l’a pas reconnu et ne lui a pas donné de possession d’état.L’ordonnance de 2005 va venir simplifier l’établissement de la filiation paternelle mais avantil convient de retracer l’évolution de cette action en recherche de paternité.

a) L’histoire de cette action : de l’interdiction àl’admission libreC’est un historique assez tourmenté. Cette action était admise sous l’Ancien Régime. Elle adonné lieu à beaucoup d’abus, le législateur de la Révolution prit donc le parti de l’interdirepar une loi du 12 brumaire an II. La paternité naturelle ne pouvait résulter que d’unereconnaissance volontaire par le père.Les rédacteurs du Code Civil maintinrent la prohibition sous réserve d’une exception trèsmarginale, l’enlèvement de l’enfant au moment de la conception.L’état de droit est resté inchangé jusqu’au milieu du 19ème siècle où il y eut un largemouvement de contestation. En effet, elle privait de nombreux enfants naturels de tout droitdans la succession mais également la mère de tout moyen de contraindre le père à contribuer àleur entretien.Il a fallu attendre une loi du 16/11/1912 pour voir modifier la législation mais cette action enrecherche de paternité était soumise à des conditions strictes de fond et d’exercice : elle étaitautorisée que dans 5 cas et il existait plusieurs fins de non recevoir.La loi de 1972 n’aboli pas ce régime restrictif mais apporte seulement quelquesassouplissements.Ce système des cas d’ouverture a finalement été supprimé par la loi du 8/01/1993 notammentgrâce au progrès scientifique et à l’esprit des temps qui était favorable aux droits de l’enfant.L’ordonnance de 2005 va tirer un trait sur le passé. Désormais la paternité hors mariage peutêtre judiciairement déclarée et la preuve est libre, il suffit de prouver cette paternité, la preuvebiologique étant bien sûr aujourd’hui possible et même en principe de droit. (civ.1 14/06/2005)

b) Le nouveau régimeCette action a un caractère personnel, en vertu de l’A. 327 al.2, elle est réservée à l’enfant.Cependant, la mère a seule qualité pour agir pendant la minorité de l’enfant si la filiation ason égard est bien établie. A.328 al.1.Si la mère est décédée ou dans l’impossibilité demanifester sa volonté, l’action peut être intentée par le tuteur de l’enfant ou par ses héritiers.

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L’action est intentée contre le parent prétendu, le père, ou contre ses héritiers. S’il n’a pasd’héritiers ou s’ils ont renoncé à la succession, l’action peut être intentée contre l’Etat. A.328al.3Tout comme l’action en recherche de maternité, cette action est soumise aux délais de droitcommun c’est-à-dire 10 ans sachant que ce délai est suspendu pendant la minorité de l’enfant.Avant l’action devait être introduite dans les deux ans à partir de la naissance de l’enfant. Oncraignait le dépérissement des preuves et on voulait protéger la paix des familles.Il n’existe plus de fin de non recevoir à cette action mais certains obstacles empêchent sa miseen oeuvre.On ne peut établir une filiation paternelle incestueuse A.310-2 al.1On ne peut établir une filiation paternelle si une filiation légalement établie à l’égard d’unautre homme existe déjà.Cette action en recherche de paternité a pour effet, et pour seul effet, d’établir la filiationpaternelle de l’enfant, et ce, rétroactivement depuis la naissance de l’enfant.L’action à fin de subsides demeure également dans le Code Civil alors que la certitude de lapaternité peut être aujourd’hui facilement démontrée.

Il existe une dernière action à fin d’établissement de la filiation à envisager : c’est l’action enconstatation de la possession d’état.C. L’action en contestation de la possession d’état commune aux père et mèreLa possession d’état est "une réunion suffisante de faits qui révèlent le lien de filiation et deparenté entre une personne et la famille à qui elle dit appartenir". A.311-1C’est un mode d’établissement extra judiciaire mais toutefois il peut être nécessaire d’agir enjustice pour en faire constater son existence tel est le cas par exemple lorsque aucun acte denotoriété a été dressé ou ne peut plus l’être (la possession d’état alléguée a cessé depuis plusde 5 ans) ou que l’existence de la possession d’état est contestée par un tiers au motif qu’elleest entachée de vices ou qu’elle n’est pas suffisamment caractérisée.L’article 330 consacre expressément cette action qui avait été dégagée depuis longtemps parla jurisprudence.L’action avait antérieurement pour finalité de constater l’existence d’une possession d’étatdont découle l’établissement de la filiation mais il ne s’agissait pas de rechercherjudiciairement une filiation.Désormais, certains auteurs (par exemple Monsieur le président Fulchiron) pensent que cetteaction est devenue non seulement une action en constatation mais également une action enétablissement de la filiation.Cette action en constatation de possession d’état, comme auparavant, peut être exercée partous ceux qui justifient d’un intérêt légitime (10/03/1998 civ.1 notamment les grands parents).

Elle est toujours soumise aux délais de droit commun des actions relatives à la filiation A.321c’est-à-dire 10 ans mais pas à compter de la majorité de l’enfant, à compter de la date àlaquelle la possession d’état a cessé.Dès lors, un enfant pourra revendiquer la succession de celui qui s’est comporté comme sonpère ou comme sa mère en faisant constater qu’il jouit de la possession d’état à l’égard du decujus.La preuve peut être faite par tous moyens. Il s’agit de prouver l’existence d’une réunionsuffisante de faits qui révèlent le lien de filiation et de parenté.Il semblerait que le juge puisse ordonner une expertise biologique pour l’action enconstatation de possession d’état et que celle-ci puisse être demandée par les parties. Mais desavis ont, par contre, refusé que l’expertise soit de droit pour cette action.En conclusion la possession d’état judiciairement constatée entraîne l’établissement de lafiliation puisque cette possession d’état est une présomption légale de la filiation. Unemention sera ainsi portée en marge de l’acte de naissance indiquant que la filiation est établiepar possession d’état (selon les directives de la Chancellerie).Quand la filiation est constatée par un jugement, elle ne peut être contestée que si les tiersforment une tierce opposition au jugement.La présomption résultant de la possession d’état devient irréfragable lorsqu’elle a duré 10ans.Passé ce délai, on ne peut plus contester la filiation établie.

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Pour toutes les actions que nous venons d’envisager, il faut également préciser, que si le jugefait droit à la demande, le TGI peut aussi statuer sur l’exercice de l’autorité parentale, lacontribution à l’entretien et à l’éducation des enfants et sur l’attribution du nom de famille decelui-ci. (art. 331 C. Civ.)

II – La contestation judiciaire de la filiationA. La contestation d’une filiation établie par un acte1) Contestation d’une filiation établie par titreLa contestation d’une filiation établie par un titre a été remodelée par le législateur de 2005afin d’être au plus près des avancées en matière scientifique notamment, mais surtout en cequi concerne la stabilité des filiations qui doit être préservée. Pour autant la distinction établieen 1972 et complétée plus tard par la jurisprudence n’a pas été abandonnée en 2005.En effet, la Cour de cassation avait énoncé le principe selon lequel l’ancien article 322 al. 2pouvait être interprété a contrario, le texte prévoyait que « nul ne peut contester l’état decelui qui a une possession conforme à son titre de naissance. », a contrario il fallait lire que« tout intéressé peut contester l’état de celui qui n’a pas de titre de naissance conforme à sapossession ». Le principe étant ici que « mieux vaut une absence de filiation qu’une filiationerronée. »12Cette distinction est donc reprise en 2005, à savoir la contestation lorsque la possession d’étatest conforme au titre (a), et celle ou cette conformité n’existe pas (b).a) Possession d’état conforme au titre : l’affirmationd’une stricte contestationLe principe est énoncé à l’article 333 du code civil de la manière suivante : « lorsque lapossession d’état est conforme au titre, seuls peuvent agir l’enfant, l’un de ses père et mère,ou celui qui se prétend le parent véritable. L’action se prescrit par cinq ans à compter du jouroù la possession d’état a cessée. Nul ne peut contester la filiation lorsque la possession d’étatconforme au titre a duré au moins cinq ans depuis la naissance ou la reconnaissance, si elle aété faite ultérieurement. »Cet article met donc clairement en avant un principe et une exception.12 H. Fulchiron et Ph .Malaurie, « La Famille », 2007, p. 509

· Le principe d’une ouverture de l’action strictement délimitée :Le premier alinéa de l’article 333 prévoit donc une ouverture de l’action en contestation d’untitre établissant une filiation, à des personnes limitativement choisies par le législateur. Cesprivilégiés sont, la mère ou le père, dont le lien de filiation est en jeu, le « parent véritable »,c’est-à-dire celui qui voudrait faire « éclater » la vérité biologique, et l’enfant.Le délai de cette action est restreint à cinq ans, par rapport aux dix ans prévus antérieurementà 2005. Ce délai limité est prévu pour garantir la stabilité des filiations, puisque, comme l’aénoncé la Cour de cassation, « l’état des personnes ne peut demeurer incertain. »13Ce délai est, comme en droit commun, suspendu pendant la minorité de l’enfant, celui-cipouvant agir pendant les cinq ans qui suivent sa majorité, et ce quelle que soit la date àlaquelle la possession d’état a cessée.L’article 333 pose, en ce sens, une limite à l’action en contestation. Il prévoit en effet, que sila possession d’état a duré plus de cinq ans à compter de la naissance ou de la reconnaissance,elle est alors inattaquable. C’est ici une volonté de stabilité que démontre le législateur.· L’exception d’une filiation inattaquable :La possession d’état évoquée ici doit certainement recouvrir les mêmes qualités que toutepossession d’état en général, elle doit notamment être continue pendant ces cinq années, uneinterruption mettrait en cause son caractère paisible. L’absence de continuité permettrait doncune contestation. L’article précise que la possession d’état doit commencer, pour êtreinattaquable, à compter du jour de la naissance ou de la reconnaissance, ce qui veut direqu’une possession d’état de cinq ans qui débuterait après l’un de ces points de départs, nepourrait bénéficier de cette protection.Des critiques sont toutefois faites à cette exception, par exemple dans le cas où unepossession d’état conforme au titre est exercée pendant cinq ans, mais que les parents seséparent et que le père prétendu se désintéresse totalement de l’enfant postérieurement à cetterupture, même si la preuve peut être rapportée que cet homme n’est pas le père biologique de

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l’enfant, la filiation demeure inattaquable. Certains estiment par exemple que la possibilité13 Cass. civ., 9 mai 1900, de Wrède, DP 1905, I, 101

devrait restée ouverte, pour l’enfant à sa majorité ou pour le véritable père biologique, de fairetomber la filiation lorsque celle-ci ne correspond plus à la réalité. D’autres14, estime que cettepossibilité devrait rester ouverte à l’enfant au nom de son intérêt supérieur, en effet le faitpour lui, de décider si oui ou non, il souhaite voir sa filiation remise en question est unélément fondamental. Pour autant ce n’est pas ce qui a été choisi par le législateur. Celaengendrerait le fait que l’enfant serait alors « privé de participer à un moment de sa vie à toutdébat relatif à sa filiation. »15 et serait donc contraire son intérêt supérieur.b) Non-conformité entre le titre et la possession d’état :l’affirmation d’une contestation élargieCe cas est prévu à l’article 334 qui dispose que « À défaut de possession d’état conforme autitre, l’action en contestation peut être engagée par toute personne qui y a intérêt dans le délaiprévu à l’article 321. » On retrouve ici la conception de l’ancien article 322 a contrario, et sapossibilité d’agir en contestation ouverte très largement.Les titulaires de l’action sont donc « toute personne qui y a intérêt », que cet intérêt soit moralou pécuniaire.Le délai pour agir est celui de droit commun des actions en contestation de la filiation puisquel’article 334 renvoie expressément à l’article 321, qui prévoit que le délai est de « dix ans àcompter du jour où la personne a été privée de l’état qu’elle réclame ou a commencé à jouirde l’état qui lui est contesté. » Cet article reprend l’ancien article 311-17, qui peut semblercomplexe dans sa compréhension mais qui est simplifié en 2005. Le principe est le suivant : sil’enfant ne dispose que d’un titre nu, dans ce cas, le délai de droit commun débute au jour desa naissance.En effet le régime de l’action en contestation fondé sur 334, suppose que l’enfant n’ait jamaiseu de possession d’état conforme à son titre, si toutefois un telle possession avait eu lieupendant un temps aussi court fut-il, cet article ne pourrait être invoqué et il faudrait passer parle biais de l’article 333.14 A. Gouttenoire, « Touche pas à ma filiation », note ss TGI Lyon 05/07/07.15 A. Gouttenoire, note préc.

2) La contestation d’une filiation établie par reconnaissanceL’art 316 énonce que : « lorsque la filiation n’est pas établie dans les conditions prévues à lasection I du présent chapitre, elle peut l’être par une reconnaissance de paternité ou dematernité, faite avant ou après la naissance. »Il s’agit d’un mode d’établissement non judiciaire de la filiation, basé sur une volonté propreet personnelle des époux. Par le biais de cet acte, les pères et mères choisissent d’assumer leurparenté, ils font la démarche de se déplacer devant l’officier d’état civil afin que celui-ciétablisse un acte de l’état civil, mais la reconnaissance peut aussi se faire par acte notarié ouencore par aveu judiciaire. Avant l’ordonnance de 2005, ce mode d’établissement de lafiliation était réservé aux filiations dites « naturelles », aujourd’hui ce type de filiationn’existant plus, la reconnaissance est ouverte pour tous. Le problème de la reconnaissance estque sa noblesse est à double tranchant, bien sur elle est un mode d’établissement honorablepuisqu’il est basé sur un acte libre, mais il en découle qu’elle est un mode d’établissementfragile. En effet, la personne chargée de constater l’acte de volonté des parents n’est pashabilitée à exercer un contrôle de la vérité de cette filiation et seul l’officier d’état civil quiaurait des doutes, peut saisir le parquet qui décidera ou non de contester en vertu des pouvoirsque lui confère l’article 336. En conséquence les reconnaissances sont un moded’établissement de la filiation régulièrement contesté et il ne s’agit pas ici de voir comment lareconnaissance fait naître la filiation, mais de voir que ce mode d’établissement peut êtreanéanti par une contestation (a) ou par une annulation (b).Cette action, est depuis 2005, présentée dans le droit commun des actions relatives à lafiliation (art 318 et suivants.), alors qu’auparavant elle était prévue dans les dispositionsspéciales relatives à la reconnaissance (art 339 anc.)a) L’action en contestation de la reconnaissanceL’action en contestation de la reconnaissance peut être exercée dans deux cas : de la façon la

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plus courante sur le fondement des articles 333 et 334 du code civil, et de manière plusexceptionnelle sur saisine du ministère public, soit sur le fondement de l’article 336.Il faut écarter d’office le domaine de la procréation médicalement assistée et préciser en unmot le principe énoncé à l’article 311-20 : « Le consentement donné à une procréationmédicalement assistée interdit toute action aux fins d’établissement ou de contestation de la

filiation, à moins qu’il ne soit soutenu que l’enfant n’est pas issu de la procréationmédicalement assistée ou que le consentement a été privé d’effet. »L’action en contestation de la reconnaissance est donc prohibée.· La généralité : la contestation en cas de possession d’état conforme au titre ou encas de titre sans possession d’état conforme.La contestation en cas de possession d’état conforme au titre :Selon l’article 333 : « Lorsque la possession d’état est conforme au titre, seuls peuvent agirl’enfant, l’un de ses pères et mères ou celui qui se prétend le parent véritable. L’action seprescrit par cinq ans à compter du jour où la possession d’état a cessée.Nul ne peut contester la filiation lorsque la possession d’état conforme au titre a duré aumoins cinq ans depuis la naissance ou la reconnaissance, si elle a été faite ultérieurement. »On peut constater, au titre de l’alinéa 1er, que les délais ont été considérablement raccourcispuisque avant 2005, ce délai était de 10 ans, et de même, il fallait 10 ans pour que le lien defiliation soit inattaquable. Or, désormais, la filiation est considérée comme parfaite au bout de5 ans de possession d’état conforme au titre. Cela a toutefois suscité quelques interrogationsau sein de la doctrine.16 En effet, que dire de cette filiation inattaquable après cinq annéeseffectives ? Et si la sixième n’était pas aussi merveilleuse que les cinq premières ? Il se peuttout à fait que la mère ait choisi un père pour son enfant et que celui-ci ne soit pas le véritablepère biologique, mais qu’il reconnaisse l’enfant pour autant. Si tout se passe bien au sein decette « famille affective » pendant cinq ans, mais que, passé ce délai les relations parentalesse dégradent, qu’une rupture ait lieu et que, « le père affectif » ne démontre alors plus, tout àcoup, autant d’intérêt que le voudrait son statut ? La règle apparaît elle alors toujours aussiefficace que l’aurait voulu le législateur ? Le problème posé par cet article 333, qui semblevouloir privilégier la vérité affective sur la vérité biologique, pourrait toutefois être résolu si ledélai de prescription en la matière était suspendu pendant la minorité de l’enfant etrecommençait à courir à sa majorité. Cette possibilité semble dépendre de la nature de ce délai,à savoir est-ce un délai préfix ? « Selon le texte c’est la naissance ou la reconnaissance quiconstituent le point de départ du délai pour agir. L’ordonnance ne prévoit pas la possibilitéd’en différer le moment à la date de prise de connaissance des origines véritables de l’enfant16 F. Millet, la vérité affective ou le nouveau dogme de la filiation, JCP G, I, 112, p. 303

et il n’est pas davantage indiqué que l’action est susceptible de renaître à sa majorité. »17 Dece fait il semble qu’il s’agisse d’un délai préfix et cela pose alors des difficultés, la filiationest alors, selon F. Millet, fondée sur le choix de la mère et sur le lien du couple, « on prend lerisque de voir établie une filiation qui pourrait finalement ne plus correspondre ni à une véritéaffective, ni à une vérité biologique. »La contestation en cas de titre sans possession d’état conforme :Selon l’article 334 : « A défaut de possession d’état conforme au titre, l’action en contestationpeut-être engagée par toute personne qui y a intérêt dans le délai prévu à l’article 321 », c’està-dire dans les dix ans à compter du jour où la personne a été privée de l’état contesté.· L’exception : la contestation de la reconnaissance par le ministère public.Le rôle du ministère public en matière de filiation a beaucoup évolué en peu de temps. Eneffet avant 1972, le législateur considérait que le MP ne pouvait exercer une action encontestation de reconnaissance car elle entraînerait une ingérence injustifiée au sein de latranquillité des familles mettant en péril leur équilibre18. La loi de 1972 ouvrit cette action, etcelle-ci fut élargie en 1996, et enfin reprise en 2005 par l’ordonnance qui, dans son article 336énonce que : « La filiation légalement établie peut être contestée par le MP si des indices tirésdes actes eux-mêmes, la rendent invraisemblable ou en cas de fraude à la loi. » Ce mode decontestation qui, à l’origine était réservé à la reconnaissance, est désormais ouvert, à touteaction en contestation de la filiation.Le législateur, pour permettre cette saisine du MP, a prévu que les indices seraient basés sur le

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caractère intrinsèque de l’acte. Par exemple, une contestation douteuse serait celle au sein delaquelle, la différence d’âge entre l’enfant et l’auteur de la reconnaissance serait faible ; ouencore, celle dans laquelle la même personne établie une multiplicité de reconnaissances19.Quant à la preuve : le principe est celui selon lequel toute reconnaissance est présuméesincère et exacte, la charge de la preuve incombe alors à celui qui la conteste.17 F. Millet, étude préc.18 Arrêt de principe : Cass.civ., 17 décembre 1913, honoré Bodin, DP 1914, I, 261, n.P.Binet.19 Cass. civ. 1ère, 18 mai 2005, Dr. Fam. 2005, n°153, n. P. Murat

- Toutefois, s’il s’agit d’une reconnaissance de maternité, la contestation sera fondée sur ladémonstration de l’absence d’accouchement.- S’il s’agit de la contestation de la reconnaissance paternelle, la preuve est libre et peut doncêtre faite par tous moyens20, il faut établir que l’auteur de la reconnaissance n’est pas le pèresachant que la jurisprudence estime que le fait, pour la mère, de reconnaître que lareconnaissance est inexacte, ne suffit pas à établir cette preuve21.La contestation de la reconnaissance, si elle aboutit, n’est pas sans conséquences, en effet, lalégislation admet que l’auteur de la reconnaissance anéanti peut demander le remboursementdes sommes versées pour l’entretien de l’enfant, et même il pourrait se faire indemniser envertu du préjudice moral subit. Cependant la réalité est toute autre et en règle générale lessommes obtenues sont symboliques22. L’auteur de la contestation anéanti peut aussi êtrecondamné en réparation du préjudice causé à l’enfant23.La contestation n’est pas le seul mode d’anéantissement de la reconnaissance, en effet, en tantqu’acte juridique celle-ci peut aussi être annulée comme tout acte juridique.b) L’action en annulation de la reconnaissanceComme dans tous les domaines relatifs à la nullité, il faut distinguer que celle-ci soit relativeou absolue. En l’espèce, elle est relative dans deux cas :- Tout d’abord en cas de dol, c’est-à-dire qu’il y a eu des machinations par exemple, de lapart de la mère qui ferait croire à l’auteur de la reconnaissance qu’il est bien le père. Du faitde ces manoeuvres, le consentement de l’auteur de la reconnaissance n’est donc pas totalementlibre et éclairé.- Ensuite, l’acte serait nul de nullité relative s’il existe déjà une filiation entre l’enfant etun autre « père », et que ce lien n’a jamais fait l’objet d’une contestation.20 Cass. Civ. 1ère, 18 janvier 1989, JCP, 1989. IV. 10121 Cass. Civ. 1ère, 16 juin 1992, Bull. civ. I, n°18322 TGI Paris, 21 octobre 1997, ici sur les 500 000 F demander en réparation du préjudice moral, seuls 8 000 F luisont alloués.23 Cass. civ. 1ère, 21 juillet 1987, D. 1988, 225, n. J. Massip

La nullité absolue est, elle, prévue en cas de vices de forme ou de fond de la reconnaissanceen cause.Le législateur ne prévoit aucune disposition expresse relative à cette possibilité d’annulationde l’acte de reconnaissance, mais en fait, elle découle de sa nature profonde, en tant qu’actejuridique elle peut être annulée.Cette action en annulation concerne toutefois un domaine différent de l’action en contestation,en effet elle permet la mise en cause de la validité d’un acte et non pas l’anéantissement d’unlien de filiation, elle ne s’attaque pas à ce lien à proprement parler.Pour autant la tentation pourrait être grande pour les intéressés (la mère, l’auteur, les héritiersou l’enfant), de passer par le biais de l’annulation dans le but de mettre en péril le lien defiliation établi par reconnaissance.En ce qui concerne le délai pour agir, certains auteurs (notamment Mr Fulchiron), proposentd’appliquer un délai décennal en vertu de l’article 321, puisque celui-ci est relatif à toutes lesactions relatives à la filiation. Or, on peut considérer l’action en nullité de reconnaissancecomme en faisant partie, puisque c’est un acte qui permet l’établissement d’une filiation quiest attaqué, même si ce n’est pas le lien lui-même qui est en cause. Avant le délai pour agirétait de droit commun, soit 30 ans, or on peut aisément comprendre qu’il soit ramené à 10 ans,cela étant un gage de stabilité des filiations.

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B. La contestation d’une filiation établie par possession d’étatIl y a deux moyens d’établir la filiation par la possession d’état, constater la possession d’étatdans un acte de notoriété, (art 317 C. Civ.) ou par un jugement (art 330 C. Civ.). Or il estpossible de contester la possession d’état ce qui par effet domino remettra en cause la filiation.Cependant, le régime de contestation de la possession d’état établie par acte de notoriété (1)n’est pas le même que la contestation de la possession d’état établie par jugement (2).1) Contestation de la filiation établie par possession d’état constatée dans un actede notoriétéDepuis l’ordonnance du 4 juillet 2005, l’acte de notoriété revêt un caractère hybride. De cefait, on ne sait quel est réellement l’objet de la contestation (a) or de là découle son régime (b)a) L’objet de la contestationL’acte de notoriété tend à constater la possession d’état, donc si on le conteste, on conteste parlà, la possession d’état (i). Cependant, l’acte de notoriété est également indispensable pourl’établissement de la filiation, donc si on le conteste on remet en cause également par ce biaisla filiation (ii).i. Contestation de la possession d’étatL’article 317 alinéa 1 du Code civil prévoit que l’acte de notoriété fait foi de la possessiond’état. En d’autres termes, si l’acte est attaqué, c’est la possession d’état qui est attaquée. Lerequérant vise à démontrer, qu’il n’y a pas de possession d’état, ou que celle-ci est viciée. Eneffet, le fait d’établir un acte de notoriété inverse la charge de la preuve. Ainsi ce ne sera plusau titulaire de l’acte de notoriété de prouver la possession d’état mais à celui qui le conteste dedémontrer l’absence de possession d’état.Ce n’est qu’après avoir fait tomber cette possession d’état qu’il entraînera dans sa chute lafiliation. En effet, dans ce cas précis, la filiation n’avait pour unique support que la possessiond’état, sans elle, elle n’est rien.

Finalement, ce que le requérant vise à contester ici, c’est bien la filiation plutôt que lapossession d’état, simple moyen. L’action en contestation est bien une action d’état encontestation de la filiation. Preuve en est la place de l’art 335 du C. Civ, la prévoyant dans lecode. Il est inscrit au sein de la section 3 du titre sur la filiation intitulée des actions encontestation de la filiation.ii. Contestation de la filiationUne autre interprétation pourrait donc être donnée à l’article 335 du C. Civ. Il s’agirait alorsde contester la filiation établie par possession d’état sans pourtant contester la possessiond’état. Cette difficulté vient du fait que le législateur n’a pas défini la notion de filiation etoppose encore trop souvent, la filiation sociologique dont la possession d’état estl’ambassadrice, et lafiliation biologique. Or serait-il possible qu’un individu conteste la filiation biologique d’unenfant sans pour autant remettre en cause la filiation sociologique c’est-à-dire la possessiond’état de cet enfant ?Cette question n’est pas une hypothèse d’école car bien souvent la possession d’état n’est pascorroborée par la vérité biologique. La possession d’état est alors, souvent utilisée par desparents qui faute de pouvoir établir biologiquement leur parenté utilise cette voie médiane. Orlors de la délivrance de l’acte de notoriété par le tribunal d’instance, il n’appartient pas aujuge de vérifier la vérité biologique de la filiation. Donc la contestation de la vérité biologique,exclusivement, reste toujours possible et fondée. Restera au juge de savoir qu’est ce que lafiliation et ce que le droit devra préférer entre le sociologique et le biologique ?Il est bien précisé dans l’article 335 C. Civ. pourtant qu’est possible la contestation « de lafiliation » établie par possession d’état, en rapportant la preuve contraire. Qu’elle est la preuvecontraire, la preuve contraire de la filiation ou la preuve contraire de la possession d’état ?Tout dépend qu’est ce qu’on conteste.Cette ambivalence des objets de la contestation pose problème puisqu’il pourrait être concluen application de l’article 335 du Code civil, qu’un homme X qui se prétendrait père d’unenfant plus de cinq ans après l’établissement d’un acte de notoriété attribuant celui-ci à Y, neserait pas recevable à contester directement la paternité de Y, donc à proposer une preuve

biologique, mais le serait encore à contester la possession d’état, ce qui le dispenserait de cette

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preuve en cas de succès.24b) Le régime de contestationInscrite dans une section consacrée aux actions en contestation de la filiation, l’action del’article 335 du Code civil suit une sorte de tronc commun pour les titulaires de l’action et lesdélais (i), mais présente tout de même une particularité tenant à la force de l’acte de notoriété(ii).i. Les titulaires et les délaisSelon les termes de l’article 335 du C. Civ, la filiation établie par la possession d’étatconstatée par un acte de notoriété peut être contestée par toute personne qui y a intérêt. Cetteprécision par l’article 335 C. Civ était elle nécessaire ? L’article 334 C. Civ, comme on l’a vu,prévoyait déjà qu’à défaut de possession d’état conforme au titre, l’action en contestation peutêtre engagée par toute personne qui y a intérêt. Or on est bien dans un de ces cas où lapossession d’état n’est pas conforme au titre puisque par hypothèse, il n’y en a pas. Donc laprécision de l’article 335 était peut être inutile en ce qui concerne les titulaires de l’action.Quoiqu’il en soit la solution reste cohérente.En ce qui concerne les délais, l’action doit être intentée dans les cinq ans de la délivrance del’acte de notoriété. Le délai est suspendu pendant la minorité de l’enfant. Ce délai est court,c’est ici l’impératif de stabilité des filiations qui a inspiré le législateur.Le régime de la preuve pose également problème. En effet, depuis l’ordonnance de 2005,l’action en constatation de la filiation mais également en contestation de la filiation sontdevenues de véritables actions d’état. Ce faisant, peut on admettre dans ces actions que lapreuve biologique soit de droit ? En d’autres termes « la vérité biologique peut-elle constituerla « preuve contraire » à rapporter au sens de l’article 335 ?25A priori la question peut surprendre car ce qu’il convient de contester c’est la possessiond’état or celle-ci n’a que faire de la vérité biologique. Pourtant on sent bien que dernière lacontestation de possession d’état c’est la filiation qu’on entend faire tomber, dés lors pourquoise priver de la certitude procurée par ce mode de preuve.24 Dossier Dr. Fam. 200625 P. Murat in Dossier droit de la filiation, Dr. Fam.

ii. La force de l’acte de notoriétéPlus que la brièveté du délai pour agir, c’est le point de départ de ce délai qui pose certainsproblèmes aux commentateurs. En effet ce délai commence à courir, on l’a dit à partir de ladélivrance de l’acte et non pas de sa transcription en marge de l’acte de naissance. C’estpourtant après l’accomplissement de cette formalité de publicité que les tiers sont mis aucourant de cette nouvelle filiation ainsi établie.En vérité, « l’acte de notoriété ayant pour seul objet de prouver la possession d’état, la preuvecontraire prévue à l’article 335 » concernerait « uniquement cette possession. Il serait toujourspossible de prouver, pendant un délai de dix ans, que la possession d’état n’est pas conforme àla vérité, notamment par le moyen d’un expertise biologique ». Les tribunaux iront ils dans cesens ?2) Contestation de la filiation établie par possession d’état judiciairementconstatéeLa voie principale est celle de la tierce opposition (a), mais la doctrine émet l’hypothèse d’unecontestation de droit commun (b)a) Une contestation par tierce oppositionOn retrouve ici les mêmes problèmes que précédemment, la contestation peut porter et sur lapossession d’état (a) et sur la filiation (b)i. Contestation de la possession d’étatLa difficulté d’une telle contestation provient du fait de la difficulté de qualifier la réellenature de l’action en constatation de la possession d’état par un jugement. Cette action qui netend normalement qu’à constater la possession d’état, devient de plus en plus une actiontendant à établir la filiation, donc une action d’état.Comme toute les actions d’état, elle vaut erga omnes donc, la seule voie de recours est latierce opposition puisque l’action en constatation n’est pas attitrée.

L’intéressé peut agir selon l’article 321 du C. Civ, dans les dix 10 ans du jour où l’enfant a

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commencé à jouir de l’état qui lui est contesté.Le problème majeur étant que le jugement ne fait en effet que constater l’existence d’unepossession d’état qui peut avoir plus de dix ans, ce qui rendrait vaine la tierce oppositionpuisque le délai pour agir serait écoulé avant même que le jugement n’ait été rendu.Ne vaudrait-il pas mieux alors, faire courir le délai à compter du jugement devenu définitif àpartir duquel la filiation est réellement établie.ii. Contestation de la vérité de la filiationDepuis l’ordonnance de 2005, l’ambivalence de l’action en constatation de la possessiond’état commandera peut être au juge ou aux parties de situer l’objet de l’action et surl’existence de la possession d’état et sur l’établissement judiciaire de la filiation. Dès lors, dumoment que la question de la vérité de la filiation aura été tranchée, il ne sera plus questionensuite que la vérité judiciaire soit remise en cause, étant donné la force de l’autorité de lachose jugée.Si la filiation n’a pas été discutée, sera pareillement ouverte la tierce opposition. Mais làencore, on retrouve la difficulté de l’article 321 du C. Civ et de cette prescription.N’est il pas étrange que la filiation établie par possession d’état constatée par acte de notoriétépuisse être contestée dans les cinq ans de la délivrance de l’acte et qu’on ait pas une solutionsimilaire pour la filiation établie par possession d’état constatée dans un jugement.b) Une contestation de droit communLa doctrine s’interroge sur les possibilités d’une action fondée sur l’article 334 du Code civil(i), mais il existe certains obstacles à cette action (ii).i. Une contestation sur le fondement de l’article 334En effet, si la question de la filiation biologique n’a pas été traitée dans le jugement, il n’y apas véritablement d’autorité de la chose jugée sur ce problème. Ainsi cette filiation ne

pourrait- elle pas être contestée sur la fondement de l’article 332 et 334 du Code civil édictantune sorte de droit commun de la contestation.En effet l’article 335 du code civil ne prévoit que la contestation de la filiation établie parpossession d’état constatée par acte de notoriété, et non pas la contestation de la filiationétablie par possession d’état constatée par un jugement. Ainsi est-il permis de croire que cettedernière pourrait être intentée selon les règles du droit commun de l’article 334 du C. Civ.Sans titre (puisque le jugement ne faisant que constater une possession d’état ne peut êtreassimilé à un titre), l’intéressé pourrait alors agir dans les délais de l’article 321 du C Civ.Pour certains cette solution permet une contestation autrement impossible car non prévue parl’article 335 du C. Civ.Or pour ces auteurs, il est inconcevable qu’un tel mode d’établissement de la filiation, alorsque la vérité biologique n’a même pas été discutée au tribunal, donne une filiation plus forteque les autres.ii. Les obstacles à une telle actionMais cette analyse ne sauve pas tout à fait la contestation d’une filiation établie par possessiond’état constatée par un jugement. En effet on l’a dit, l’intéressé pourra selon le droit commun,contester dans les délais prévus à l’article 321 du code civil, mais on retombe donc ici sur lesproblèmes liés au point de départ de la prescription, c’est-à-dire à compter du jour où lapersonne a commencé à jouir de l’état qui lui est contesté. Donc l’action en contestation peutêtre prescrite avant même que la possession d’état ait été constatée.Mais plus encore le problème réside dans le fait qu’il n’est même pas certain que les articles332 et 334 du C. Civ soient applicables. En effet l’article 334 C. Civ se rapporte directement àl’article 332, qui se rapporte lui même aux filiations établies par acte ou par reconnaissance.D’où l’utilité de l’article 335 C. Civ, visant la filiation établie par possession d’état constatéepar acte de notoriété.Il semble donc que la filiation établie par possession d’état constatée dans un jugement soitexclue des articles 332 et 334 du C. Civ.

A l’inverse M. Le professeur P. Murat, considère que le jugement peut être considéré commeun titre.26 Mais dés lors s’élève un nouveau problème, si le jugement est un titre, et quel’enfant a déjà une possession d’état ayant duré 5 ans, n’y a t-il pas une fin de non recevoirédicté par l’article 333 alinéa 2, à toute action en contestation ?

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26 P. Murat, in Dossier droit de la filiation Dr. Fam. « A priori il ne paraît ni impossible ni contraire auxdéfinitions habituelles de retenir que le jugement constatant la possession d’état est un titre. »