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Prix littéraireLe miel de la rue Jean Moulin

Chapitre 5 : Juillet

Le premier samedi de juillet, on a fait une excellente récolte. La reine nous a même félicitées.

Pourtant, ce soir-là, après le boulot, on n’était pas très fières de nous. On avait passé notre journée à butiner des couronnes à un enterrement. En voyant tous ces gens en noir qui sortaient du temple, en larmes, on avait le bourdon.

Num m’a affirmé qu’il y a une autre vie après la mort. J’espère, parce que cette vie, j’ai pas trop envie de la quitter un

jour.

Les jours suivants ont été très actifs. Les écoles étaient fermées, mais bien des enfants n’étaient pas encore partis vers la mer. On survolait la ville au-dessus de leurs têtes réjouies d’être enfin en vacances.

On avançait à un rythme infernal, puis, au bout de deux semaines, on s’est retrouvées en perte de vitesse. On avait ratissé toute la ville et on était encore très loin de mille. Il nous restait à peine deux mois. J’avais beau compter et recompter les bâtons sur la ruche, on avait fait seulement 695 fleurs. On a exploré les fonds de jardins, les pots cachés dans des coins perdus, les vieux bouquets qui pendaient sur les bords de poubelle. Rien. On avait tout répertorié. Chaque espèce y était passée. 695, pas une de plus, pas une de moins.

-« Ce qu’il nous faudrait, c’est encore un bon gros enterrement », a dit Num, avec un petit rire idiot.

On n’a même pas eu le temps de réagir qu’un camion de fleuriste a traversé la ville, chargé à craquer de fleurs plus appétissantes les unes que les autres.

-« A la grâce de Dieu ! » s’est exclamée Num, qui aime beaucoup butiner dans les églises.

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