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Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France Prédiction tirée d'un vieux manuscrit sur La nouvelle Héloïse, roman de J. J. Rousseau

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Page 1: Prédiction tirée d'un vieux manuscrit sur La nouvelle

Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

Prédiction tirée d'un vieuxmanuscrit sur La nouvelle

Héloïse, roman de J. J.Rousseau

Page 2: Prédiction tirée d'un vieux manuscrit sur La nouvelle

Borde, Charles (1711-1781). Auteur du texte. Prédiction tirée d'unvieux manuscrit sur La nouvelle Héloïse, roman de J. J. Rousseau.1760-1762.

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Page 3: Prédiction tirée d'un vieux manuscrit sur La nouvelle

)'1.1 1-1

¡.01 PREDICTION

T jrO'UN VIEUX MANU~CRU

S U R~~OT~Z~~ZO&J~NO*VFELZEHEL(

#

H 0 M A Ni~ /OB~?~~

Page 4: Prédiction tirée d'un vieux manuscrit sur La nouvelle
Page 5: Prédiction tirée d'un vieux manuscrit sur La nouvelle

PAjED7Cr7(3JV

1T R. E E

2?*<~JV r~jE~JT MANUSCRIT.

J*L N ce temps il paroîtraen France unhomme extraordinaire,venu des bordsd'un Lac & il criera au Peuple, je fuispoSëde du Démon de l'enthouuafme j'aireçu du Ciel le don de l'inconséquence ¡je fuis Philofbphe. & Profeffeur du para-doxe.

Er la multitude courra fur fes pas &

plufieurs croiront en luiEt il leur dira Vous êtes tous des (cé-

Jérats & des fripons, vos femmes fonttoutes des femmes perdues & je viensvivre parmi vous. Et il abufera de ladouceur naturelle de ce Peuple pour luidire des injures absurdes.

Et il ajoutera, tous les hommes fontvertueux dans le pays où je fuis né, & jen'habiterai jamais le pays où je fuis né.

Et il foutiendraque les Sciences & lesA ij

Page 6: Prédiction tirée d'un vieux manuscrit sur La nouvelle

!es Arts corrompent nécenairement ie~

ïno'urs & il écrira fur toutes fortM deSciences & d'Ans.

Et il. (outiendra que le Théâtreeft ânefource de proftitution & de corruptiony& il fera des Opéras & des Comédies.

Et il écrira qu'il n'y a de vertu quechez les Sauvages, quoiqu'il n'ait jamaisété parmi eux, & qu'il foit bien digned'y être.

Et il conseillera aux hommes d'allée

tous nus & il portera des habits galon-nés quand on lui en donnera.

Et il dira que tous les Grands font desvalets méprifables & il fréquentera les,Grands, utôc qu'ils auront la curiouté dele voir comme ,un Animal rare venu des

pays lointains.Et il s'occuperaà copier de la Munque

francoi~e & il dira qu'il n'y a point deMuuque Françoise.

Et il dira au~L qu'tletHmpoCible d'a-voir des mceurs, S~ de lire des Romans;& il fera un Roman & dans fon Roman,

.on verra le vice en action & la vertu enparoles, & ~es perjfonna~es feront force"!

d'Amour& de Phil.otbphie..Ff il voudrafaire entendre à tout l'U-

nivers qu't!. a été un homme à bonnes

fortunes, & qu'il fait écrire des Lettres

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Amour, &:qu'it en a reçu;&~ cepen''dant on connoïtra évidemment qu'i! atompofé lui-mêmeles Lettres qu'H a re-~aes.

Et dans fon Roman on apprendra Fartde htbornefphilofophiquementune jeunen!Ie.

Et !'Éco!iere perdra toute honte & tou-te pudeur & eUe fera avec Maître-des fbtti~s &des maximes.

Et elle lui donnera la première un-baifer for la bouche & elle l'invitera à'venir coucher avec eHe, il y couche-fa & p!)edev)endragro(Ïede métaphy-~que; & fes bi!!ets doux feront des Ho*mé!ies phitofbphiques.

Et te Phiiofbphetui apprendra que'les parens n'ont aucune autorité fur leurst!!es, quant au choix d'un Epoux & ities peit!ra comme des barbares & desdénaturés.

Et il restera de recevoir des honorairesdu Père r~r la délicatejde naturelle àtout homme qui craint !a peine atHicUve;& i! ra~evra de l'argent de la fille, maisen cadi~e & il prouveraque c'eft très-bien ''ait.

Et H s'enivrera avec un Seigneur An-~!ois, qui l'infultera & il propofefa auSe~neur Anglois de fe battre avec luij'

A in

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& fa Maîtrefre qui anra perdu l'honneutde fon fexe, décidera de celui des hom-mes & elle apprendra au Maître, qui lui

a tout appris, qu'il ne doit point fe battre.Et il recevra une penfion du Mytor~t

& il ira à Paris & il n.y fréquenterapointles gens fenfés & honnêtes, & il n'y verraque des filles & des Petits-Maîtres & ilcrcira avoir vu Paris.

Ft il écrira à fa Ma!n-ene q"e les fem-mes font des Grenadiers, 6c qu'eUes vonttoutes nues & qu'elles ne réfutent rienà tous les hommes qu'elles rencontrent.

Et lorfque ces mêmes femmes le rece-vront à la Campagne, & auront corn"tnence à Sourire à fa vanité, il trouve-ra en elle des prodiges de vertu & deraifon.

Et les Petits- Maîtres le méneront chezdes filles de mau~aife vie, & il s'y eni-vrera comme un Sot; & il couchera avecces filles & il écrn-a fon aventure à faMattreCfe & elle le remerciera

Et il recevra le portrait de ~a Mat"trefïe, & fon imagination ~allîtmera àla vue de ce portrait & fa Mahrefle luifera des leçons obfccnes de chafleté fo-licair.e..

Et cette fille fi amoureure, cpoutera lepremier homme qui viendra. du bout do.

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tnonde ;&cette fille fi habile, n imaginera

aucun expédient pouf empêcher ce ma-tiage; & elle pa(ïera hardiment des brasd'un Amant dans ceux d'un époux.

Et le Mari faura avant de i'époufef,du'eHe eft amoureufe & aimée à la fureura un autre homme & il'fera volontaire-ment leur malheur, & il fera pourtant ont'honnête homme, & cet honnête hommefera pourtantun Athée.

Et aum-tôt après le mariage,la femme'fe trouvera très-heureufe; & elle écriraà'fon Amanr, que fi eUeétoit encore !ibre;elle épouferoit fon Mari plutôt que ÎM.

Et le Philosophevoudra fe tuer.Etil fera une longue Dif~ertauon, pout

prouver qu'on doit toujours fe tuer lors-qu'on s perdu fa Mauteue; 8c fon amïlui prouvera que la chofe n'en vaut pas'la peine; & lePhilofoph~ne fe tue~pas.

Et il ira faire le tour du monde, pourdonneraux enfans de& Ma~treue te temsde croître & pour revenir enÏuire êtreleur Précepteur 6e leur apprendre txvertu tomme à leur Mere.

Et il n'auia rien vu dans le tour du~

th6n<de.Et' H reviendra en Europe.Et'cependant le Mari de Maïtrene~

vA M)~J

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qui <ait toute leur intrigue, fera venir fèbel Ami dans fa- maifon.

Et la femme vertueufefautera à (on coaà <onarrivée; S~ le Mari fera charme &ils s'embraieront chaque jour tous lestrois & le Mari leur fera de jolies plai-~antenesfur leur aventure, & il les croiradevenus rat(bnnab!es; & ils s'aimerontttoujours avec tran<poit, & ils prendrontp!ainr à jfe rappeler leur tendrene & leursvotuptes, o:Usfe ferreront!amain,&:ils pleureront.

Et le btt Ami étant dans un Bjteau feu!av.ec ~a Maurede, voudra la jetter dansi'eaa & fe précipiter avec e!!e.

Et ils appe!!eront tout cela de la Philo*fbph~e & de ta vertu.

Et à force de porter Phiîbfopriie &Vertu,on'ne comprendraplus ce que c'eAVertu & Phito~bpMe.

Et la Vertu, félon leurs maximes, neconn~erx plus dans là crainte & lafuite du danger; elle connftera dans lepiainr de s'y expofer fans ce<Ïe & laPhilofophie ne fera plus- que l'air, de ren-dre le vice intëre~nt.

Et la MiuttefTe du Philofophe auraquelques &tbres & uu ruideau dans ~bnjardin ,& appellera cela fon 2~/< &perfonne ne pourra coïnMehdrece quec'eû.quecct~~e..

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Bt eue donnera tous les jours à mana-ger à des moineau~ dans fon jardin; &:elle veillera-fur, fes dbmeâiquesmâles &:femelles, pour qu'ils ne tafîent pas les~mêmes fbtti<esqu'ë!!e.

Et e!!e jouera au milieu de fes Ven-dangeurs & tneme elle eu fera refpec-tée & elle teiUera du chanvre avec enx,~ayanr fon Amant à fes côtés.

Et le Phi)ofop!ie voudra tei!!er du'chanvre, le lendemain, !efut!endematn~& toute fa vie.

Et les' ~'endan~euts cnanteront des,Chanfons & le Phitofbphë fera enchanté'de leur mélodie, encore que ce ne ~bitpas de !a Mufique Italienne.

Et elle élèvera ~es enrans avec grand.foin prenant {garde qu'ils ne parient )a-mais en compagnie, & que personne neleur apprenne qu'ib y a un Dieu.

Et elle fera gourmande mais elle ne'mangera des pois & ides rcves que rare-ment & dans le Sallon d'Apollon & let'out par morttncation phitoiophtque.

Et elle fera pédante dans tout ce qu'ellefera & dira &. toutes les remmes ferontméprisables auprès d'ëUe.

Et le btl amt ira pêcher dans un I.acavec fa Ma~tre(Ie, & il prendra des poiC-~ous, & il les rejettera. dantTeau', fau$;

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s'cmbarfatter fi les gensontdequot di-Ner & il craindrade nùïr@ aux animaux,il a de tous.

Et il aimera !e vin &: ,i! en boira &:quand il en aura bu avec excès*, il regar-dera la gorge des Va!afanes avec conca-t~i~ence & il prendra querelle avec fon<neit!eur Ami Sc~il dira des ordures grof-~ères à j[a ce!e~e & fainte Ma![rc(îe Seil fera pis encore avec des fillés de joie.

Et i! aimera toujours le vin & il enet! boira toujours; & U Soutiendra qu'i! n'y& que les yvrocnes qui foient honnêtesgens & que les gens fobres font desfourbes.

Et lorrque ra. Maîtreue lui aura promistin rendez-vous, & qu'au lieu de ce reri-dez-vous, elle lui proposera de faire uneaction d'humanité & de charité, il diraqu'il deteKeîa vetta, & il entcera en!fureur:

Et il deviendra amoureuxdel'Amie dejRt Ma~reHe, étant à côt~ de fa Maïtreue.

Et l'amie de ~a Maîtrene deviendra.a'mourcu~e de lui.

Et il lot appliquerauri bài~t ardent furÏà main &'cependant il'aimera toujoursw

fa Ma~reHe, comme un furieux & U

s'ccrifra toujours, ôfamteVef M'~1 t'fa Mame& nMutt~

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Et avant que de mourir, elle prêchera.encore fuivant fa coutume; & elle parleratoujours jïnqu'à ce que les forces luimanquent & elle fe parera comme uneCoquette & elle mourra comme unefainte.

Et <e écrira cependant à(on Be! Ami,qu'eue nnit comme elfe a commencé rc'ed à dire qu'elle t'aime avec autant depamon qu.e jamais.

Et te Mari enverracette lettre à rAmanc:Et on ne (aura jamais ce que l'Amant

eh devenu.Ft on ne fe ~ccira guéres de le (avoir.Er tout le Livre fera moral, oti!e &:

honnête, pui~u'U' prouvera que l'es fillesfont en droft de difpofer de !eur tteur, deleur mam &* de leurs faveurs, (ans con-fulter leurs parens, & fans aucun éga~dà rinégainé des conditions.

Et que pourvu qu'élles parlent coujoutsde vertu il eft inutile de la pratiquer.

Et qu'une jeune 6He peut d'abord coa'*cher avec un homme, &: qu'elte doit ett-fuite en cppufer un. autre.

Et qu'en te l'ivrant au vice, il fumtd'avoir de temps en temps des tctnordspour être vertueux.

Et qu'un Mari doit recevoir TAmancde fa temme dans fa maifon..

Page 14: Prédiction tirée d'un vieux manuscrit sur La nouvelle

Et que la, femme doit Fembfauef fansceue,&r (e pieté. de bonne grace auxp!ai(anfeties dnl~an,& aoxe~aremen~de l'Amanr.

Et elle dira que l'amoM e~ inutiledéplacéentre deux Eppux,& elle le ptoa''vera oo croiM !e prouver.

Et le Livre fera écrit d'un Hy'e em-phatique pour en impdfet aux perfonnes~mp!es.<<<-

EtrAuteur entaffera les pM&tes, ?croira enta~rtes~itbnnemens.

Et il entàtÏeM les exagcfations & u~e fera jamais d'exceptions.

Ëc!! voudra paro~tfcnerveux, &n nefera qu'outre & il aura grand foin de

conclure toujours du particaher au g~-fcra!.

Et il ne conno!tra ?a!Hais, ni la umpti-

cité, ni la ~eue, ni le natute!; & ~on

efput fera des tours de force, ju~qnes

dansles cbofes les plus puériles; & le Sat-c~fme !t''i tiendra roujours lieu de raifon.

P.r tout !e talent de l'Auteur fera de

donner des entor~s à laVerm,& te croc-en )an)beau bon Sens; & il contemplera

toujours de (on imagination & fes yeux

Ne verront jamais la Nature.Et (cmbiab)e aux Ltnpitiques, qui font

expr<;s des Mutes, pour monttet Fe~

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~eHehce de leurBaume, il empoisonnerales ames pour avoir la gloirede les guérir,& le poifon agira violemment fur reprit& fur le Meur; & l'antidote n'opéreraquefur !'e(prit, & le poifon triomphera.

Et il (e vanterad'avoirouvert un préci<pice &: il fe croira exempt de tout repro-che en disant, tant pis pour les jeuness~lles qui y tomberont, je les ai avertiesdans ma Préface & les jeunes filles nelisent jamais les Préfaces.

Et après que dans Con Roman il aura.dorade tour-à tour les Moeurs par la PM<Jofophie, & la Philofophie par les Moeurs,il dira qu'il faut des Romans à un Peuplaicorrompu.

~Et il dira fans doute au(H, qu'il faut des.Fripons chez un Peuple corrompu.

Et on le laiflera tirer la conséquence.Et il dira encore, pour (e;u!ti6erd'avoir

fait un Livre où respire le vice, qu~i) vitdans un nécle où il n'ett pas po~tbiad'être bon.

Et pour s'excuser, il calomnieral'Uni-vers entier.

Et il menacera de fan mépris tous ceuxqui n'eithneront pas Con Livre.Er les gens vertueux contreront (a

tohe d'un 00! de ptfié.Et on ne rappellera plus le Philofophe,

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& il fera nommé lè pï"< bloquent des)SophiAes.

Et on adîn!refacomment avec une Aine

pure & honnête, il a pu faire un Livre quine l'eft pas.

Et ceux qui croyoient en lui n'y cro~tont plus.

F 1 N.

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RÉFLEXIONS

POSTHUMES

R ~MK~ PrOC~ ~6 JE~/<~UE~ avec D~r~.

~,r

1y

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AVERTISSEMENTDE Z~.D/rF~.

C'ESTpar hazard que cette

Lettre nous eft tombée entreles mains. Nous l'avons trouvéetrès-propre à éclaircir le poincÏe plus effentiel & peut-être lemoins connu de la querelle deM. Rouffeau avec M. Hume &:dès-là nous nous fommes per-fuadés que tous ceux qui pren"nent quelqu intérêt à cette af-faire, la verroient avec plaifirtenir fon rang parmi les piécesde ce ûngulici Procès.

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RËFLEXÏONS

Page 21: Prédiction tirée d'un vieux manuscrit sur La nouvelle

In IrTO TE~TC'TT TP'TT~r~T~TC'Jti~JbL.~J~JLU~b

POSTHUMESJ'Mr grand ~oc~ J~~y-

J~C~UES, jP~~JD.

LETTRE A MADAME DE.*~7~v OUs me demandez mon avisfur le fa~MM de David Hume»-

contre Jean-Jacques RouÛeau. Jevous dirai naïvement, Madame, ceque je penfe de cette ridicule avan-ture. Je trQuve que cette facétielittéraire en vaut bien une autrele bruit qu'elle fait, rimportance

Ain

Page 22: Prédiction tirée d'un vieux manuscrit sur La nouvelle

qu'on y à mis tout me Semble

curieux dans cette affaire; je croismême que le vrai moyen de con-moître un peu les hommes avec qui

nous vivons, eO d'approfondirque!<

quefois les miferes qui les occupentfi férieufement. Permettez-moi feu-lement de prendre les chofes d'un

peu loin c'eft fouvent une maniered'abréger.

Vous fçavez, Madame, que versle milieu du 6éc!e on vit éciorredes Philofophes e'e~-à-dire, unefociété d'écrivains qui avoient cou-tume de s'appeller ainfi. Vous fçavez

encore qu'on les admira parce qu'ilss'admiroient réciproquement.

Las de leur obfcurité ils ten-tèrent tout pour en Sortir. Ils s'enprirent a la raifon aux loix & auxmoeurs. Ils furent promptementcé-lébres, mais leurs (ucces ne furent

Page 23: Prédiction tirée d'un vieux manuscrit sur La nouvelle

pas de longue durée.Cet la~act Ir-ré~AiMe qui nous montre encore lavente quand nous ne hommes pluscapables de la fuivre parloit à

tous les cœurs, par-tout on plaidala caaie de l'humanité. Heureuïe-ment fes tri&es détracteurs n'é-toient ni amufans ni raHbnnaMes.SyAématiques fans invention t Phi'-

lofophes fans logique, ils vouloientencore être éloquens en écrivantcontre la vertu. Ils eurent cependantdes difciples qui embrauerent leursopinions fans les comprendre. Onles crut ingénieux, parce qu'ilsparurent extraordinaires on leurtrouva de la chaleur, parce qu'ilsdéclamoient continuellement. Eni-vrés de ces petits (ucces ils firentdes Poëtiques dont on fe moqua 3des Romans qu'on ne lut point,des Comédies qui tomberent; onen ~t une fur eux qui réuBit. Le

Page 24: Prédiction tirée d'un vieux manuscrit sur La nouvelle

Parlement leur impofa Clencë, la

Sorbonne les Bétrit; la Police les

menaça. Cependant, comme ils fe

vantoient toujours d'êtreper~cutés,ils auroient pu vivre encore auez

honorablement, s'il ne fe fût trouvé

un homme tout prêt à <e revêtirde l'admiration publique elle cher-choit un objet RouHeau parut.Nourri dans cette iecte qui s'enfaifoit honneur fon esprit tropardent en avoit reçu l'amour des

paradoxes, un orgueil e&éne;mais il avoit du fentiment, du génie,

9

une ame élevée ) une éloquencevive & fublime. Il vit que le mo-ment lui étoit favorable il ofa

mettre au jour fes propres penfées.

Il avoit tiop d'efprit pour ne pasfentir que des que l'on a corrompulufqu'à un certain point fes lecteurs~

comme il n'y a plus rien de beau

m de bon à leur dire ce n'e~

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guéres la peine de leur parler:Jean-Jacques s'appliqua d'abord

à faire aimer la vertu & fon maître.Il profcrivitle Fanatique & l'Athée;il joignit quelquefois la profondeur~u raifonnement à la hauteur desidées, au charme du jHyle. Lescœurs qui s'étoient flétris & ref-ferrés, fe rouvrirent à fa voix.En Juant fes écrits, celui qui n'étoitque fenfible devint fouvent plusjufle & plus éclaire celui quin'étoit que jufle acquéroit deslumieres & de la fenfibilité. Il ya même quelqu'apparence que cethomme fingulier croit une partie dece qu'il écrit car on prétend qu'ilne peut tout croire, parce qu'il fecontrarie a chaque infiant. Il eftvrai, Madame, qu'il dit tout-à-la'&isdu bien & du mal de la Religionqu'il proMe; mais peut-être auN!

que n'ayant pas affez de courage

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pour braver toute la corruption defon Hécle, il n'auroit jamais ofédétendre la Religion naturelle, fansinsulter un peu la Religion révélée.Pour moi je croirois volontiersqu'ilne s'eft fait bannir que par refpe6thumain.

Ici commence l'histoire de cequ'il appelle fes malheurs. Il Ht

imprimer fon Emile. le Par-lement plein de refpeQ: pour laReligion, & d'admiration pour lestalens de celui qui l'avoit fi pet,tménagée, le pourfuivit en gémiMant,Jean-Jacques eut le tems de gagnerla Suiue. Les fanatiques o~ les Phi-lofophes qu'il avoit décries, pro-Uterent de l'occanon: la haine mor-telle qu'ils lui avoient jurée, netarda pas à éclater. Dans des libel-les, dans quelques journaux, dansles lieux publics, dans les ~bciév

tés partjLcuHeres les Cuivres & les

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Athées le déchirèrent Impîtoya-blement. Il n'eft rien, J~adame,que l'on n'ait tenté pour le faireprofcrire par tous les Gouverne.mens, & lapider par tous les peu-pies. Vous fçavez que le malheu-reux Je~n-Jacques eft vain, em-porté, inconséquent; les injuresl'irritent; il fe roidit contre lemalheur il fe dépite contre laraifon & l'autorité. Il a fait tantde fotifes que fes affaires ne pou.vant plus fe racommoder, il luia fallu quitter la Suiue, pour l'An-gleterre dé-là fa liaison & faquerelle avec M. Hume.

Je vais tâcher à préient de vouspeindre en peu de mots ce célè-bre Anglois fes fuccès en Francefes admirateurs, fes bonnes fortu-nes, & fa conduite avec fbn ex-travagant protégé.

Vous n'ignorez vraifemblable-

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ment pas que nos Philosophes étoienttombés dans un grand décri, lorf-,qu'ils jugerent que David Humeétoit propre à entrer dans leur fectc,&: à la relever. Il étoit étranger,ttegmatique, hardi dans fes fyûê-

mes, & aiÏez fage dans"&s ac-tions. Il avoit fait rHi~oire de fon

pays pour l'Angleterre, & quatrevolumes de Philoiophie pour laFrance. Son Histoire qui n'avoitpas eu beaucoup de fucces à Lon-dres, réuiHttrès-bienà Paris, parmi

nos Philofophes & ~urs iecta-~

teurs t a caufe des quatre volumes<3e Philofophie qui étayoient leursprincipes. Ils en parlerent avec en-toufiafme on l'acheta, on ne lalut guéres, on la loua beaucoup.

M. Hume, qui vint alors en Fran-ce, eut encore plus de fuccés quefes livres on lui trouvoit la fu-blimité d'un grand homme., parce

Page 29: Prédiction tirée d'un vieux manuscrit sur La nouvelle

qu'il ne difoit que des chofes auex

communes, de l'aveu même de fesmeilleurs amis. Les femmes ai-moient fa converfation,parce qu'ilavoit fait des livres elles lifoientfes livres, parce qu'il daignoit cau-fer avec elles. On le trouvoit lemeilleur & le plus fimple des hom-

mes parce qu'il étoit quelquefois

un peu brufqt~&: un peu lourd~[uand il commencoit à s'égayer.

David accorda fes faveurs àquelques jolies femmes & faconfiance à quelques Philofophes,Dans ces entrefaites, Jean-Jacques,qui venoit d'être lapidé en Suiffe,.

ycraignant d'être pendu en paffant

par Paris, y refla très-peu detems. Il y fut accueilli par desperfonnes d'une haute considéra-tion & d'un rare mérite qui plai-gnant de bonne foi fes folies &~ës malheurs pnerent M. Hume

Page 30: Prédiction tirée d'un vieux manuscrit sur La nouvelle

de l'emmener à Londres & del'y protéger.

Nous voici enfin, Madame, au fortde la quérelle de JeanJacques avecDavid mais je penfe qu'après lesréflexionsque nous venons de faire

nous aurions pu la deviner fansvoir les piéces du Procès. Je croismême que peu de gens auroienteu envie de les e~minert fi leslettres du Citoyen de Geneve n'a-voient donné un peu de coursaux injures que l'on lui dit c'eftpeut-être lui, Madame qui faitrelire à préient ceux qu'il a em-pêchés de l'être pendant plufieursannées. Au re~e, on me mande deLondres qu'il parle comme il écritainfi que vous le verrez par cefragment d'une lettre que je viensde recevoir.

M.MoM/?M<r Hume dit ~pauvre

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Jean-Jacques(à <~ui la tête a un peutourné ) e~ ami intime de mes efï-?'MetnH les plus inortels. Pendant le~OKr qu'il a fait à Paris il ne les~apr~KC pas quittés Cet hommee~o~ méprifer mes principes &M même les Aa'tr Jon e~rK froid

6' dt!r ne peut aimer ni ma Julieni mon Emile.Ma per/onnelui

»aura paru finguliere & mon oy<M~MM~eMCÛMn:K~.n!'€?ï MMt~!<M ~M. ~n décret le livre de

FE/prM &' tous les ouvrages de cettenature, je n'ai pas fait de bien à

B~M P&~o/op&~Me~, lui aiM etc recommandé publiquement para* des perfonnet qu'il eon/?~e &'~B/ecreteMent par mes ennemies Il (a).

(a) R~nSMa dit encore joametlemeMeom*me dans fa Lettre, qu'en arrivant Londresavec David il avoit lieu de croire qu'on l'ytraiteroit du moins avec humanité qu'on l'atMeffe dans <a tOMe &qu'il s'e& ttonvê déf-bonoté en mettant pied terfe. U dem~od~

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Vol!a, Madame, comme Jean Jac-que raifonne en Angleterre Se

l'on commence à raifonner à peu-près de même à Paris. Je vous fais

grace d'une foule de probabilitésplus détaillées & plus précifes. Iltire auiE quelques inductions fiétranges qu'il ne m'en faudroit

pas davantage pour croire à fa dou-leur & à fa bonne foi. Il fe plaint

parexemple, très-férieufementcom-me dans fon Mémoire, de ce que

tommeM il peut avoir perdu fi promptetneeela confidération qu'il ne devoit fans doute~u'~ (es ouvtaget it obfetve qu'il n'a pointécrit depuis qu'il eft tbm la fauve-gatde deM. Hume il dit qu'il avoit avant de partir dapain & de la gloire qu'il vouloit être honorétans être nehe qa'tl n'a reçu en Angleterre

que des aumônes & des libelles que les amis

de M. Hume font les auteort de toutes cesméchanceté: j & s'en vantent journellement.

La Lettre en qae&ion e& beaucoup plu< lon-.

gne mais vous y tfouverex des détails qui fontdans le Mémoire, & d'autres qui poutroiem

;t<ms ennuyer,

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M. Hume le menacoif quelquefoisdans fes rêves & ne le regardoitpas le jour auez tendrement.

Quoiqu'il en foit vous fçavez

que fes ennemis l'accufent ici hau~tement de la plus noire ingratitu-de, & que fes amis accufent M.Hume de perfidie & de fauQecé.Les autres ne prononcent point en-core fur les prétendus crimes deDavid, de peur de fe comprome--tre. Quant à moi qui les crois unpeu exagérés, je pente feulement

que nos deux Philofophes ne ~efont jamais beaucoup eflimés maisde quoi je fuis bien plus tur en-core, c'eft que les reproches quel'on fait à Jean-Jacques font atro-ces & cupides. Eh Comment ofe-t on accufer d'ingratitude & denoirceur un malheureux qui écrità ~bn Protecteur qui !e protègemalgré lui, une Lettre de quarante

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pages/poarlui prouver qu'H elt unmontre Peut-on rien imaginer deplus ridicule que cette charmanteLettre & toutefoisde plus touchant& de plus naturel f N'eû-il pas vi-~Me que l'ame du pauvre Rouf-feau étoit alors remplie d'aiHiction,de folie & de fureur?N~e&-i!pas clairqu'il n'ett point ingrat, s'il a bienjugé le PhUofbphe ? S'il fe trompe,c'efl tout-au-plus un fou & nonpas un méchant. Mais je voudroisbien ravoir quel mal cette Let.tre tant reprochée pouvoit faire àM. Hume. Coupable ou innocentaine devoit-il pas en rire & la brûler.S'il craignoit que fon dcfaHreuxprotégé fit quelque jour un Livrecontre lui pourquoi n'avoir pasattendu que ce Livre ftlt imprimé ?,

Un Philofopheeft, ce femMe, plustranquille; un bon homme eft plusindulgent.

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JL'SC.J'oubIiois de vous dire j

que l'on a fans doute pouue M.Hume à cette ridicule plaidoirie;je fuis perfuadé qu'il n'auroit poincpris les chofes au<E gravementqueles HIu~res amis qui ont fait im-primer fon Mémoire. En eNët

yqu'importoit à rHUtorien de !aMaifon de Tudor, que l'on crût àParis pendant quelques jours qu'ils'étoit moqué d'un Suide en An-gleterre ? Un homme fi fage fi bon& fi coaûderable(~ devoit-ils'a.charner après un malheureux pau-vre, infirme & profcrit qui n'a quefon orgueil & fa renomméeC'étoitbien la peine de faire un Mémoirefi Sérieux, d'y joindre une préfa-ce fi trifle & de couronner l'oeu-vre par la Lettre d'un Mathé-

(t) Je parle Mt d'tpt&< les E4tt6M<.

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maticien qui plaint Jean-Jacquesde

Ke~Mnf e~otre la vertu de M. Hume.Je fuis encore un peu étonné

que ce Mathématicien dont les

vertus pnt au moins l'éclat de cellesqu'il vient de célébrer, & foit per-mis cet ingénieux farcafme. Car en-fin pourquoi fe jujfUner de la plai-fante Lettre de M. de Walpolequ'on ne lui eut jamais imputéet

Vous voyez, Madame,que l'on aété un peu vîte ceux qui vous ontparlé de notre ami Jean-Jacquesétoient, félon toute apparence, pré-venus par les clameurs de quelquesfociétés. Mais ne trouvez-vous pascet acharnementincompréhenjfib!eOn diroit en vérité qu'on necherche à faire pauer ce pauvrehomme pour un montre, qu'afinqu'on ne le croie plus quand ilnous parlera d'honneur & de pro-bité. Je m'arrête~de peur d'en

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trop dire. Je vous demande mêmepardon de cette réflexion metan"colique. Je me trompe peut-être & je le (buhaite car il ~e-

roit fâcheux que j'euÛe bien ren-contré. Adieu Madame je vousenverrai, fans y joindre mes remar-ques, tous les Mémoires qui pour-ront furvenir. Je ne crois pointcette araire finie elle e& ce mefenible trop ridicule & trop pué-rile pour ne pas durer.

J'ai l'honneur d'être, oec.1