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DISSERTATION 51m LES DIFFÉRENTS STYLES D'ARCHITECTURE EMPLOYÉS JUSQU'A NOS JOURS POUR LA CONSTRUCTION DES IGLISES, ET SUS LE STYLE LE PLUS CONVENABLE A ADOPTER POUR LES MONUMENTS RELIGIEUX AU XIX 5 SIÈCLE. Far C. L. FLECIWT Jeune, Architecte à Lyon. t s LYON. IMPRIMERIE DE BOURSY FILS, Rue de la Poulaillerie, 19. 4 486. - Document 1111111111 III Hill 111111 IIIH 0000005618644 s - s

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DISSERTATION51m LES

DIFFÉRENTS STYLES D'ARCHITECTUREEMPLOYÉS JUSQU'A NOS JOURS

POUR LA CONSTRUCTION DES IGLISES,ET SUS LE

STYLE LE PLUS CONVENABLE A ADOPTER POUR LES MONUMENTS

RELIGIEUX AU XIX 5 SIÈCLE.

Far C. L. FLECIWT Jeune,Architecte à Lyon.

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LYON.IMPRIMERIE DE BOURSY FILS,

Rue de la Poulaillerie, 19. 4486.

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INTRODUCTION..

L'architecture sacrée fut de tous temps et chez tous lespeuples liée à l'idée d'un Dieu. 11 fallut donc disposer lesmonuments en harmonie avec la puissance (le la divinité;c'est pourquoi, dès la plus liante antiquité, la constructiondes temples devint un art hiératique , et pourquoi aussiles peuples de la Grèce, de l'Egypte et de l'inde en divini-sèrent les inventeurs.

L'étendue et la forme fuient sujettes à des règles inva-riables en corrélation avec la construction du mdnde, etplus particulièrement du ciel, demeure que tous les peu-ples ont assignée à cet art invisible et éternel dont le noni

est Dieu. -L'art d'élever des temples devait coïncider par l'imagi-

nation avec la structure de la terre et (lu eiel;aussi la con-

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structioii des premiers temples fut-elle attribuée aux (lieux,comme les seuls maîtres clans l'art tic l'Architecture sa-crée.

Lorsque l'homme réfléchit sur ce qui l'entoure, ce n'estrias la matière qui fixe ses regards, c'est l'ordre intelligentet immatériel qui fixe sa méditaiion par la divine liarmo-nie qui frappe son esprit.

Je passerai sous silence les temples (le i:Égypte et del'lne pour arriver plus rapidement aux beaux l.emps an-tiques de l'art en Grèce, qui ne furent qu'un brillant re-flet d'une civilisation élevée. Elle reçut,de l'Orient le prin-cipe de ses croyances et de ses institutions, mais elle fitlargement fructifier les germes qu'elle avait reçus. Lesprincipes d'harmonie et d'esthétique y furent développésavec un talent admirable. Mais comme ces croyances etces institutions étaient matérialisées par le culte, la mani-festation des sentiments religieux et hiératiques suivit cetteimpulsion. Les artistes ne s'attachèrent donc qu'à donnerau développement de leur pensée une apparence de ma-térialisme qui l'exprimât parfaitement, et réalisèrent parlà l'expression de l'esprit dans la pensée. C'est ce degréde civilisation qui o amené dans les arts ces formes éton-nantes qui témoignent de l'indépendance de leur espritaffranchi (les entraves d'une imitation servile. L'art attei-gnit bientôt son apogée, et lorsque la sculpture se per-fectionna, la décadence de l'architecture commença, carelle n'exista 'plus que pour la seconder dans sa manifesta-tion matérielle.

Cette décadence se lit sentir encore plus vivement chezles Romains, imitateurs des Grecs. C'est coque nousprou-vent les monuments élevés jusqu'ù Consuantin. Mais alorsmie ère nouvelle se créa, où l'esprit humain conçut la

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présence d'un Dieu immaéricl, dominateur de l'univers,et le christianisme fut appelé à faire dominer l'esprit surla matière. L'art grec parlait aux sens; l'art chrétien, parson essence toute divine, devait parler à l'âme, en passantpar la beauté des sens pour arriver , par le principe sym-bolique, à la beauté morale.

Les premiers âges de l'ère chrétienne n'offrent jusqu'auquatrième siècle aucun monument (ligne de remarque,les persécutions ayant fait exclure les beaux-arts des égli-ses chrétiennes. Mais lorsque l'église devint triomphante,elle sut les rappeler et s'approprier tout ce qui était hu-main, sans avoir la crainte, comme dans les temps primi-tifs, que le luxe et la richesse étouffassent la piété, et quel'âme fût maîtrisée par la sensualité. Aussi vit-on, à cetteépoque, renaître les beaux-arts qui, par leur alliance avecla religion, devinrent les plus fermes et les plus éloquentsprédicateurs de la foi.

Les églises chrétiennes, qui jusqu'à cette époque n'a-vaient été que des basiliques romaines, furent reconstrui-tes ou restaurées sur de nouvelles formes. La propagationde la religion catholique dans toutes, les régions occiden-tales amena la construction d'un grand nombre d'églises,et les arts, (lui furent apportés d'Orient en Occident, vin-rent se fixer dans les cloitres, seuls lieux oit ils pussentprospérer par l'émulation et la méditation.

Dans ces contrées encore à demi barbares, l'art eut unmoment d'enfance, étain livré à des mains inhabiles; maisla religion, s'étendant de proche en proche, amena la né-cessité. Aussi voyons-nous déjà au onzième siècle des mo-nÙments qui témoignent d'une haute intelligence.

L'art , progressant. toujours , ne pouvait t'ester conti-nuellement confiné dans les cloitres. Une société d'ardu-

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tectes laïques se forma , et on viL bientôt s'établit unefusion qui' fut le premier pas vers cette architecture gigan-tesque et vraiment chrétienne où l'idée ! de Dieu se mêleà la pensée de l'infini, et dont la Trinité est le symbole.Elle se forma à elle une esthétique pleine de goùt, qui aétonné et étonne encore tout le monde chrétien par legrandiose de ses conceptions.

Cette époque o eu plusieurs phases; je lui en assigne-rai trois bien caractérisées depuis le treizième siècle' jus-qu'au milieu du seizième, époque de la décadence. Depuislors, on tenta de rentrer dans les règles de l'art antiquemais avec des modifications peu heureuses pour les mono-inclus, et qui leur imprimèrent un caractère froid et mo-notone, peu en harmonie avec l'esprit chrétien, si universelet si fécond.

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DE L'ART ANTIQUE GREC.

- Pour établir une appréciation - jute de l'art chez lesGrecs, j'ai cru devoir en tracer sommairement l'historiqueafin, de -faciliter l'intelligence par les rapports et- l'appro-•.pria(idn de leur culte avec leurs monuments sacrés.

Les Grecs, descendants des Plasges, hahitèrènt primiti-vement les plaines de hi Thessalie, les alentours du Cau-case et les rives du Pont-Euxin. Ce - peuples, naturelle- -ment doués d'un esprit vif, habitant les climats chauds descontrées méridionales, ne durent cependant pas à leurprc»-pro génie l'invention de l'art architectonique; mais ils leperfectionnèrent par cette émulation dont la cause étaitdans leur organisation en petites républiques aritocrati- -ques, qui toutes, à l'envi, cherchaient à se surpasser dansles arts.- -

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Ce peuple d'une imagination ardente, ayant diviniséle culte des Muses, c'est-à-dire des facultés intellectuel-les poussées à leur plus grand développement, exaltait tou-tes les productions du génie et du goût, et-divinisait enquelque sorte ses triomphateurs.

Une pareille émulation devait naturellement exercer unpuissant empire surl'imagination des artistes et pousser lacivilisation à une période excessivement avancée.

Ce principe les éleva dans les arts à un haut degré de -perfection, produisit dans,leurs éléments ces proportionsexactes et naturellés qui, font l'objet de, noire admiration,et inspira aux artistes les moyens d'enlever aux formesempruntées aux -lois de la nature ce qu'elles renfermaientd'aride et de sérieux pour les embellir par la simplicité, legoût et la symétrie la plus achevée, et de fixer à l'esthéti-que des limites qu'il n'est point permis d'outrepasser sanstomber dans l'exagération qui conduit à la décadence.

.L'influence de la religion sur les arts se fit sentir enGrèce plus qu'en aucun autre lieu. Les croyances cm-

- preintes de matérialisme exigèrent des monuments enharmonie avec elles ; aussi voit-on les temples suivre entous points ce sentiment, et 'ne 'développer dans leursformes et leur construction que des effets qui parlentaux sens' et non à l'esprit. Cette idée excluait 'toutereprésentation intérieurd, afin 'de reporter à l'extérieur

• tout l'effet qu'il devait produire , ainsi qu'on peut 'levoir par la descriptiondu temple de Thésée, à A.thènes'yqui est une des eonstructiohs4e la iplus,belle 'époquede l'art en Grèce. Ce temple était périptère et exa-style , d'ordre dorique ; son ordonnance était. pycno-style. Six colonnes soutenaient le fronton. .11 avait treize

, colonnes sur ses fafles longitudinales, y compris les deux

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colonnes d'angles. La cella était entourée d'une muraille,s

et formait un parallélogramme allongé et rectangulaire.Il était en marbre penthélique et couvert d'un toit plat.

Je pourrais en citer beueoup d'autres, tels que letempie d'Erccthée, dans l'Aeropolis d'Athènes, le temple deCérès, à Eleusis, elles temples du Péloponnèse, qui tousavaient les Ïnémes formes parce que le culte avait partoutles mêmes exigences.

Les artistes ne se bornèrent pas à la sculpture de lapierre ou du marbre; la fécondité de lèùr imagination etla brillante nature dans laquelle ils vivAient les engagê-rent à ôter à leurs monuments ce ton égal qui . les carac-térisait, et à y substituer des teintes différentes, qui ren-dissent plus sensibles les effets de chaque membre d'ar-ehuleeture, en rehaussant l'ornementation et les sculpturespar le brillant effet des couleurs harmonieusement dispo-sées, qui, dans les chapiteaux, servaient à faire détacherles feuilles des fruits, et les côtes des tiges. Lapolyehro-mie était donc une nécessité de l'art grec, afin de donneraux pierres le ton naturel des objets qu'elles étaient appe-lées h représenter et leur donner une animation qui dé-truisit la sécheresse qu'on remarque généralement danscette architecture tout horizontale.

Les rivalités qui avaient produit cette émulation si favo-rable au développement des arts devinrent bientôt elles-mêmes la cause de leur décadence. Les guerres et lesrévolutions ehngècnt la face des états ; les artistes,n'étant plus honorés ni appréciés, s'expatrièrent, et por-téreat à home principalement leur talent dont ils nepurent transmettre qu'un faible reflet. Ils abandonnèrentles formes sévères- et gracieuses qu'ils avaient toujoursprises pour modèles, pour viser à l'effet; leur nationalité

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ayant cessé d'exister, ils matérialisèrent leur art et l'en-sevelirent sous l'or des Romains. Les Grecs avaient brillépar leur amour de l'ait tant que leur nationalité avaitexisté ; mais les Romains , dans lnr désir de briller, nel'honorèrent que par amour pour eux-iflêmes.

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ARCIIITÏCTURE ROMAINE OU NÉO-GRECQUE.

Les révolutions, ce tombeau des arts, ayant transportél'architecture du sein de la Grèce chez les Romains, cet -art rie fit que dégénérer dans cette nouvelle patrie, par un

• effet de l'esprit d'individualité dont ce peuple était imbu.Les architectes romains (je leur donnerai cc nom , ne

voulant pas faire partager aux Grecs ce qui n'est que l'ef-fet de l'égoïsme romain) cherchèrent à satisfaire le goût

• effréné du luxe et de la vanité, sans avofr égard à cettcno-hIe simplicité qui était un des plus beaux attributsdePart chez les Grecs. Ils se formèrent donc une esthétiquepropre à toùs leurs besoins; de là est né l'abandon totaldes principes et de l'ordonnance qui 'avait élevé à un sihaut degré l'art architectonique en Grèce. Les troneatu-,res furent rarement héureuses. Néanhoins, lorsqu'ils vou-lurent élever des monuments sacrés, ils -y introduisirent

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- -14---les arcs et , les voûtes par la nécessité d'établir de largesentrecolonnements et des couvertures en rapport Avec lanature-du climat. Cette innovatioti eût été la plus heu-reusede celles sorties de leurconception, s'ils eussent ccii-

- - servé, malgré cela, un caractère grand, noble et gracieux; -"mais la richesse qu'ils y étalèrent les surchargea de dé-tails qui leur enlevèrent la simplicité pleine dé noblesseque l'on remarque dans l'architectuicgrecque.

Ce mélange devint donc tout-à-fait tin autre style, maisil ne put être assujetti i aucune règle ;'tout y fut laissé àl'arbitraire et au ctijrice. - -

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NOYER ÂGE.

La plus grande époque du moyen Age est sans contreditla VCDUC de Jésus-Christ, qui, renonçant aux vàbités de ceinonde, mit, par sa mort, le sceau au livre dçs vérités mo-rales etéternelles, bannit toutes les cérémonies extérieu-res comme devant porter atteinte aux intérêts du cœur.,et transforma la vie matérielle des sens en un saint désirde perfection basé sur la croyance d'un Dieu plein de mi-séricorde, nous aidant à conquérir le bonheur réel fondésur l'exercice de la vertu, afin d'acquérir cet avenir bien-heureux et éternel auquel nous devons tous aspirer.

L'Évangile itous appoPtant le germe de la générationmorale,les arts suivirent cette impulsion. De cette époquedate ta naissance de l'aiyhitecture chrétienne.

Le moyen àge, qui devrait - commencer au temps despremies apôtres; ne date réellement que dela première

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migration des bordes germaniques. Ce premier événementamena la fondation de l'unité morale et extérieure de lachrétienté. - -

Cette révolution dans les moeurs et dans les croyances• religieuses s'opéra au huitième siècle, sous l'empire de

Charlemagne. Mais déjà à cette époque l'on vit surgir uneopposition du pouvoir temporel contre le pouvoir spirituel;elle amena des luttes qui entravèrent le développementde l'art et le confinèrent dans les'eloitres, seuls lieux oùil put prospérer par l'émulation et la méditation, qui luiimprimaient un caractère j'tïnité, en établissant des rap-proeheinents entre les différentes communautés des mè-mes ordres, et par là même Créaient un style à peu prèsuniforme,pour laconstruction des églises qu'il était néces-saire d'édifier pour le besoin des .populations nouvelle-ment converties au christianisme. Le plan des basiliqueslatines fut à peu près le seul suivi, en adoptant pour sa dis-Position le style roman ou à Plein cintre.

Les , nations germaniques et les bordes du Nord, qui,dans leurs migrations, avaient eoifondi leurs diverses na-tionalités, apportèrent à l'art chrétien les types générauxdafs les arts du dessin, mais ne purent donner aux for-mes traditionnelles pu caractère en harmonie avec le gé-nie qui leur était' particulier.

Après beaucoup de secousses, et lorsque l'art eut cou-quis une espèce d'indépendance, le , génieattcignit le dé-veloppement nécessaire pour dominer sans contrainte lesformes que la pensée faisait nait.re, et exerça une in-fluenec, sensible sur les monuments chrétiens par les rap-ports sociaux alors établis.

L'art chrétien prit un essor élevé et plein de vie -encherchant dans la pensée titre expression plus belle et

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plus harmonieuse, plus noble et plus digue, et en iTiéliletemps plus indépe6dante.

Ces peuples, composés d'éléments divers , s'oranisè-rent chaemi' d'une manière différente, selon leur intelli-gence et la nature de leurs sentiments intimes, sans pourcela perdre de-vue les caractères généraux et caractéristi-ques de l'art iiniversellementadoptés, et qui progresèèrcntconstamment, suivant le temps et le lieu où ils furent misen pratique et suivant le caractère d'unité qui lui étaitimprimé pal' ces nouveaux disciples, ce qui ne les empè-clin pas d'errer dans les. détails et de créer des dessiûssemi-barbares et ruélés d'expressions fantastiques em-preintes d'une certaine originalité, ce qui atteste que,danscc siècle, la science de la composition avait devancé debèaucodp celle de l'exécution. Dans cette architecture,Faré plein cintre s'établit en dominateur. Son principesymbolique était l'unité de Dieu et de son église.

Le plan, qui est celui de l'ancienne basilique romaine,fut presque toujours un paikillélogramme oblong. L'absidecentrale, à l'orient., y est constamment circulaire. fi existetoujours, ou presque toujours, deux autres absides laté-rales ii l'exréinité orientale des' collatéraux et appuyéessui' le mur .de l'est des transepts.

Au-dessous du choeur, qui est toujours plus élevé que

lereste de l'église, existe ordinairement une crypte souter-raine. Les plafonds des nefs sont formés par une voûtedeini_Tcylindrique qui en eouonne les dodipartiments..

Les piliers séparatifs des nefs sont élevés jusqu'à lanaissance de la voûte.. Quelquefois ornés de colonnettesaux angles, ils le sont quelquefois aussi de demi-colon-nes engagées,faimt saillie du milieu des pilastres, et sontcouronnés d'un chapiteau supportant les arcades qui sé-

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parent lala nef principale des eollai.éraux. Ces fûts, £lindri-ques, serni-cylindriques ou carrés, ne sont asservis àau-cûne règle; leùrs proportions varient à chaque instant,sans avoir égard ait dons ses rapports avec làl?auteur; ils sont légers ou massifs, suivant le eaprkedcl'ordônnateur. Le mot caprice exprime mal la pensée duconnaisseur qui, examinant attentivement l'ensemblesaisit avidement la pensée utile de 'cette ordonnance, parun effet de perspective admirablçment raisonné, qui sert àfaire valoir aux yeux du spectateur toutes les parties del'édifice par tin seul coup d'oeil, et à attirer tous les rayonslumineux sur l'autel, que les fidèles aiment à contempleravec ardeur.

Tous les détails de l'édifice sont sacrifiés , j l'ensembleparla raison quej'ai expliquée plus haut, que la science de

• la conception avait devancé de beaucdup celle de l'exécu-tion.

• Les bases des colonnes sont assez généralement imitéesde la base attique, mais elles sont exécutées avec peu deta-lent, Onti'ouvc quelques exemples debases dont lesanglessont coupés et d'autres ornés de feuillages.-

•. Le arcs doubleaux tombent presque toujours à plombdu dernier membre du tailloit et en porte à faux-du fùt

• de la colonne. Il en est quisont en vive arête, sans mou-turcs; d'autres dont l'archivolte est ornée d'une corde sur-niontée de plusieurs membres de moulures, et enfin d'au-tres dont l'archivolte est ornée de sujets tirés de l'Ancien

•ou du Nouveau Testament, grossièrement sculptés.•

Les chapiteaux des colonnes sont surmontés d'un toi!;loir chanfreiné', le plus souvent orné d'un cordon de bil-

• lettes; quelquefois aussi ils sont ornés de feuilles friséesou d'acnthc, de sujets fantastiques ou tirés de l'Eeiitizre

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'.sainte. Quelques uns accusent un commencement d'exé-cution de la volute corinthienne. Les croisées sont rares etde petite dimension. La-baie vient en s'élargissant d'unemanière très prononcée dans l'intérieur. Cet élargissementest souvent terminé par des colonnes - encaissées dans unraissaut formé par la haie,lesqucllcs colonnes, ornées d'unchapiteau 'fantastique, supportent une archivolte qui ter-mine cette haie. Cette archivolte est souvent zigzaguée ou -entourée de feuilles dechên ou d'unc.corde. La base descolonnes qui -correspond au bas de l'appui de la croiséeest .souvent ornée d'un cordon composé de billettes entredeux réglettes. . .

Les voûtes sont toutes à plein cintre ou surhaussées pardes piedsdroits et en beieeau d'arête sans nervures. Lesvottes des collatérdux, qtii s'élèvent jusqu'aux reins de lavote de l'a nef principald, sont calculées afin d'offrir unerésistance à la poussée des voûtes supérieures. Le choeur,est sôuvent entouré de chapelles rayonnantes, séparées del'abside par des piliers en faisceaux de -.colonhes jumelles,ou pilastres; 'ct surmonté d'un arc plein cintre, dont l'or-nementation., est composée de sujets, billettes, fleurs ou -entrelacs vàrié suivant l'époque de leur édification, maisle plus souvent d'une facture très reléehéc.-'

Le choeur, qui est toujours placé entre l'abside et laT grande nef , est le plus souvent surmonté d'une' calotte

mi-sphérique qui prend naissance sur le plan carré duclocher paé quatre. encorbellements souvent ornés deculs-de-lampe. Au-dessous de la calotte régné souventun triforium dans le goût des entourages de croisées dumonument-

Les façades sont ordinairement simples; la seule orne-rueritation existe dans la porte d'entrée, ornée d'une ou de

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(toux colonnes de chaque côté; suppéitant une archivoltedans l'intérieur de laquelle est un tympan où sontsculp.tés des attributs religieux. La porte est souvent surmontéepar un jour circulaire de très petite dimension. On voitsouvent l'archivolte retournée Former un retour horizontalqui détermine une imposte à Palette.

Codime utile voit danscette description, les monumentsromans du sixième où onzième siècle ne manquaient nid'esthétique ni de go(t ; leur plan était admirablementcombiné, et aujourd'hui, sui , de pareils prinéipes et avecla science qui fait l'apanage de notre siècle , oit verraits'élever des monuments dignes d'admiration; car, aux épo-ques où ils furent construits, la science de conception exis-tait bien, mais non celle d'exécution, les cloîtres étantseuls en possession de la' science arehitcctoniquè chré-tienne.

Le siècle, 'marchant à l'affranchissement des arts audouzième siècle, commença une légère ombre 1e sécula-risatioii. Les guerres des croisades ayant amené lai fusionpresque en une même nation, et aveeks mêmes idées reli-gieusS, de ions les peuIès occidentaux, le génie des arts

répanditparmi eux, et, aidés de cette imagination pro-gressive, ils voulurent éviter à l'oeil l'effet lourd et disgra-cieux de la forme romaneou û plein cintre, et pour ceta ysubstituèrent l'are en tiers-point, autrement dit l'ogive.

• 'Cette époque est appelée épôque de transition par lafusion qui s'est opérée entre l'architecture claustrale etl'architeeturè indépendante, celle des sociétés de constikic-leurs libres; c'est ce 'que nous voyons dans les monumentsdu douzième siècle, où le style plein cintre se trouvemélé

à t'ogive, mais timidement développé. Le style de Ôetteépoque conserve toujours le nième genre d'oriiementatiqn

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que le roman, par l'asservissement où il était encore auxidées claustrales. Mais lorsque ces sociétés curent forméentre elles-une alliance, lorsqu'elles. eurent admis dansleur sein un Wolfram d'Eiehembach, Pierre de Monte-reau, Thomas et Renaud Cormon, Jean Wast, Enguerrand,Eudés de Montreuil, Jean de Cliches, Maurice de July,Jean Hutin, Robert de Luzarches, et l'immortel. Erwinde Steinbach, orque les guerres de religion 'n'occupèrentplus les nations, les arts se firent jour parmi le peuple, etune révolution sociale s'opéra naturdhlemcnt, avec calme,sans bruit et sans violence. Les besoins de la société lademandaient, mais la demandaient radicale; aussi la mé-tamorphose fut-lle complète chez tons les peuples del'Europe au treizième siècle, et l'architecture à ogive de-vint-elle le style daprès lequel s'élevèrent toutes les con-structions religieuses depuis cette époque jusqu'au milieudu seizième siècle. -

Le véritable principe d'architecture à ogive se distingue,par une étroite connexité avec la basihiqtevoûtée; du styleroman ou à plein. cintre. Le planest, à peud'exeeptionsprès, dans les mêmes conditions que . précéderninent; ilcontient toujours trois nefs, rarement cinq. Le choeur, quiest toujours placé à l'orient, est flanqué sur ses côtés dedeux transepts ou bras de croix. L'abside terminale estdans des dispositions polygonales, à trois, cinq ou sept$ns Le choeur estpeu élevé au-dessusdela nef, centrale,par l'absence des cryptes, qui se pratiquaient peu à cetteépoque. Les ,bascôtés ou nefs collatérales sont séparés dela nef centrale par des piliers ou faisceaux de colonnettessupportant les arcades en arc d'ogive qui séparent ces dif-férents compartiments. Le chœqr n'est plus, comme dansles anciennes basiliques, rétréci et resserré dans un es-

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• pace étroit, et ne forme plus un compartiment à part; ila la méhe largeur que la nef centrale, dont iLparait, avecl'abside, former le prolongement, flans quelques égliseson remarque des chapelles rayontiantes. entourant .l'ab-side et formant comme, une auréole autour du lieu trèssaint."La façade, compose ordinairement d'une porte prin-

cipale en, forme d'ogive, Li voussure biaise fortement en-foncée et garnie dans la voussure 4e sculptures et de dé-tails

'finement, découpés, représentant des saints ou des

sujets symboliques, et de deux portes latérales ayant la• même forme, mais d'une dimnension . moindre. Ces troisportes sont séparées quelquefois par des contreforts ornéset. surmontés, sui' les côtés latéraux par des tours carréesou polygonales, qui se terminent par une flèche èlanèéequi semble vouloi élever dans les airs l'esprit

et le coeur'

du spectateur:,'-L'intérieur est peu orné et' laisse voir assez de surface

vide pour que le spectateur puisse juger que l'ornementa-tion Plek point l'effet du caprice. Les faisceaux de colon-nes suppcirlant les arcades qui séparent les nefs collatéralesdans la partie excédant le nu du mur perpendiculaire,,viennent se profiler jusqu'à-la naissance des ares doubleauxet des nervures. Ces colonnes sont seulement arrêtéesdans une certaine partie par un chapiteau léger, gracieuxet peu orné, qu'elles semblent ne faire que traverser, pour,venir se développer, en plusieurs rameaux composés dcdifférentes moulures, et formant les arcs doubleaux et lesnervures des voûtes légères et aériennes qui couronnentgracieusement l'édifice. Cette disposition imprime un'mouvement prolongé et contiii, qui donne une animationèxu.raordinaire à ces -voûtes par les croisures qui les cou-

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pent diagonalement et les subdivisent par parties réuniesau • eentreaiI moyen de clefs soit en panache, soit à di-verses nervures, qui leur donnent un aspectd'autaàt plusléger'qu'elles paraissent n'être supportées que par le jet etle mouvement vertical des piliers , et ne pas apparteniraux murs des côtés latéraux, paraissant n'être posés là quecomme clôture et afin de recevoir les croisées qui en fontl'ornement.,

On ne voit plus, àp&rtirde cette époque,.la demi-calottesphérique qui couronnait l'abside; les compartiments devoûte d'ogive se continuent sur cette partie comme suriesautres, toutefois en y déterminant des formes analogues,mais qui forment un résea p venant aboutir à une clefcentrale qui lance ses rayons jusqu'au point d'intersectionde chqcun des côtés du polygone.

Les feiétres suivent également le même principe ; leurencadrement esten•lirmonieparfaite avec les autres arcs.,Le principe ascensionnel y est égalementforrné par l'ogive;mais comme la fenêtre devait recevoir un remplissage vi-tré, si cc remplissage .n'cùt été formé que par des vitres,il eût produit un contraste désagréable àl'œil: c'est pour-quoi on y pratiqua des meneaux qui devaient rappekr lessubdivisions des autres parties de l'édifice. Les. baies de-ces croisées, pour former la symétrie avec ces meneaux,furent également ornées de moulures..

Les baies des portes et des trifofiums suivirentla.mémeimpulsion. Les corniches de couronnement, ainsi que lesvoussures des arcades, ares doubleaux et nervures, furentornés dé boulas, de gorges profondes; et terminés parde larges filets ou listels. Quelquefois, à la place de toutesces moulures, on se bornait à tailler en-chanfrein les an-gles des voussoirs et des baie. -

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Tous cesces ornements avaient pris naissance dans le prin-cipegéométrique qui a.pour base le triangle, image (le laTrinité, et les nombres' symboliques tirés des Saintes-Ecri-turcs. Un nombre, lorsqu'il était adopté dans un monu-ment, le régissait dans tout son ejisemble

Cette' architecture n eu différentes phases: la première,qui date du treizième siècle, n été appelée en Franèe styleogival primaire;la seconde, qui est du quatorzième siècle,prit le nom de style ogival secondaire; et la troisièie, quidate du quinzième au milieu du seizième siècle, fut appeléestyle , ogival tertiaire. Ces différentes époques de l'art seressentent du caractère plus ou moins florissant des sodé-,tésde constructeurs libres et de leur multiplicité

L'architecture ogivalç du treizième siècle est., belle,grande et imposante; elle a une pureté sublime et 'primi-tive qui la fait encore admirer par sa majestueuse simpli-cité. Son style symbolique, qui admettait comme point gé-né'rique'le triangle, emblème 'de la Trinité de Dieu, ex-cluait l'emploi d'ornements capricieux et désordonnés.Cette sévérité de formes, qui faisait la gloire de-ce siècle,soumettait les artistes à des règles rigoureuses qu'ils n'o-saient enfreindre. Le jeu des lignes, symboliques formaittoute leur esthétique; aussi combien ces monuments of-fraient-ils à l'âme ce sentiment religièux qui l'élevait enpensée' vers l'éternité! On voyait dispal!itre â cette épo-que ces figures hideuses qui avaient à peine une formehumaine, ainsi que ces grotesques peiQtures ou sculptu-res dont étaient ornés les portails, les frises et chapiteauxde pilastres et. de colonnesromanes,, et introduire, à laplace de ces images grossières, ces -beaux portails ornésd'une quantité de statues plus gracieuses, plus élégantes,imitant la Vierge, comme reine du iel, et les saints dont

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l'histoire raconte le plus grand dévouement et la plusgrande charité. A cette ornementation vint se joindre l'in-vention de ces vitraux peints qui ne décorent pas seule-ment les grandes -nefs de nos cathédrales., mais encoreles absides, et de ces roses à compartiments qui reflètent àl'intérieur des monuments une lueur douteuse, dont lecaractère élève l'âme et'porte le coeur au recueillement, sinécessaire dans le saint lien.

Les artistes ne purent conserver long-temps intacte lasublimité de ces conceptions primitives. Les formes géo-métriques qui dominaient seules au treizième siècle vin-rent au quatorzième emprunter le secours de la sculp-ture. On ne se borna plus à la représentation de statues(le la Vierge et des saints; on commença timidement àorner de feuilles les chapiteaux légers; on orna de rin-ceaux les corniches gracieuses; on découpa finement lesvoussures des arcades, ainsi que les encadrements deshaies, des croisées et des triforiums. L'harmonie si ma-thématiquement calculée -rendait cette ornementationbelle, imposante et agréable , niais néanmoins un peusurabondante, en multipliant les détails et les accessoiresqui développaient quelquefois les effets d'une manièretimide et imparfaite. On s'écarta peu cependant des rè-gles mathématiques du siècle précédent. Je pense ne pasme tromper en n'attribuant cette déviation des règles pres-critespar ce style nouvellement créé qu'à l'état de prospé-rité des sociétés de constructeurs libres, qui, après avoirimporté chez nous ce style, tout à la fois beau, mystiqueet harmonieux, virent dans ce siècle leur nombre s'accroi-tre encore plus que dans le siècle précédent, et qui, n'é-tant plus soumises à aucun contrôle, dégénérèrent en co-teries de localités et de pays; de là la perte de cette unité,

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- 26 -qualité qu'on apprécie encore aujourd'hui, et qui avàil,rendu l'architecture à ogive primitive l'architecture chré-tienne universelle.

Cet esprit (le caste qui se développa vers la fin du qua-torzième siècle fit perdre aux artistes constructeurs la réa-lisation de leur pensée dans un jeu de lignes qui leur fitabandonner la pureté et l'élégance des profils et des mou-turcs des siècles précédents. On ne suivit plus les règlesgéométriques dans la composition des monuments, quidevinrent la proie de l'arbitraire et du caprice, ces avant-coureurs ordinaires de toute décadence dans les chosesde ce monde; néanmoins ce style conserva un grand ca-ractère religieux, intéressant â étudier.

Le quinzième siècle apparut à la suite de celui qui ve-nait de disparaitre, amenant avec lui une grande disso-lution de moeurs. L'art dut bientôt s'apercevoir du débor-dement général; aussi voit-on dans les monuments de cesiècle les règles sévères de la géométrie méconnues, et lesmonuments surchargés à l'excès d'ornements capricieuxdans toutes leurs parties. La sculpture ne prend plus pourmodèle la simple végéthtion des forêts; le gros chou friséest substitué à la feuille de chéne, et le chardon vulgaireà la feuille de vigne et au glaicul. Les statues n'ont pluscet air de béatitude céleste; les profils se corrompent etne sont plus que les produits d'une imagination égarée.On ne vit donc plus ou presque plus de surfaces perpen-diculaires; on ne vit plus que des détails tortueux, aux-quels l'imagination s'est épuisée à donner des formespeinées, et qui s'éloignent diamétralement de l'effet ad-mirable des constructions primitives du treizième siècle.

II

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RENAISSANCE.

Avec le milieu du seizième siècle, l'art ne devenantpins l'auxiliaire de la religion, un nouvel esprit dut doini-fier; ce nouvel esprit s'appela la mode; il fit abandonnertoutes les anciennes traditions. L'imagination ardenteet féconde des artistes des treizième et quatorzième siè-cles fit place aux froids calculs et ait d'unefoule ignorante qui ne visait qu'à l'effet. C'est ainsi quele style gréco-romain fut importé d'Italie, où il avait prisnaissance, dans nos contrées. On ne s'en tint pas à de ti-mides essais ; on voulut imiter l'antique en y faisant desadditions que l'imagination et la mode se plaisent ton-jours à trouver belles. On coupa,on trancha sur l'antique,afin de faire coïncider les formes capricieuses du jouravec les formes classiques grecques. Ainsi onvit apparaîtreun style qui était tin mélange plus ou moinsheureux des

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formes de plusieurs siècles, ce qui amena un chaos dés-espérant. Plusieurs de ces oeuvres, nous ne pouvons lenier, portent le cachet d'une conception et d'un arrange-ment savants, mais le principe d'harmonie y est-il parfai-tement observé? On nous permettra d'en douter.

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CONCLUSION.

Je dirai en terminant , après avoir passé en revue tousles différents genres d'architecture religieuse, que l'église,telle que nous la comprenons tous, est le temple (le Dieu;que la composition de sa construction doit comporter l'i-dée de cet étre mystérieux et invisible, et exciter lescoeurs, par sa forme, à cette réunion vers laquelle nousdevons tous aspirer.

L'architecture grecque remplit-elle ces conditions? Cestyle créé pour les climats chauds de la Grèce, de la Si-cile et de l'Italie, et en corrélation avec les exigences duculte de ces temps antiques, peut-il harmonieusements'approprier à notre sol et ù notre climat froid et humide?L'élégance de la disposition horizontale de l'architecturegrecque ne sera-t-elle pas complètement anéantie sous untoit autre que le toit plat, qui ne convient nullementù nos

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climats, qui comptent au moins six mois de neige on depluie?

Quelle sera la grâce d'un fronton, si vous lui donnez uneélevation plus grande que celle prescrite par les règles del'architecture grecque, et à quoi serviront les colonnadesentourant l'édifice, puisque tout le culte est à l'intérieur?

Larchitecturegrccque est certainement une oeuvre ad-mirable et parfaite; elle satisfaitl'intelligence et la raison,mais non le coeur et l'âme; la diversité de ses formes etl'unité de son ornementation, ses principes trop immua-bles, lui donnent une monotonie froide et glaciale, qui faitque l'imagination reste indifférente à soit

Les éléments delacomposition ne souffrent pas un plusgrand développement de formes sans être exposés à tom-ber dans des combinaisons architectoniques sans grâce, etqui ne s'harmoniseraient pas avec l'esthétique des édificesdestinés à une religion toute de mystère et dont l'essenceimmatérielle élance l'âme vers Dieu.

Le style roman ou à plein cintre o un caractère reli-gieux par le symbolisme qui le caractérise ; toutefois, enl'exécutant avec la perfection qui est un des attributs denotre siècle, et en le débarrassant de cet aspect massif,tlourd et écrasé qui lui enlève toute sa grâce, il se lie déjàà notre religion et à l'exigence de notre climat, mais ildemande une ornementation bien riche et bien suave pourl'harmoniser convenablement, et il ne peut pas toujourss'exécuter dans toutes les localités.

Le style ogival primaire, ce style qui élève l'âme etparle à l'esprit par la pensée, est un style vraimentchrétien. Né à une époque où les arts aidaient la religionet où la religion venait en aide aux artistes, il forma, parcette réunion, ce style qui, quoique peu chargé d'orne-

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inents, étonne encore aujourd'hui par la majesté qu'ilrespire. Je ne parlerài l)S de ces cathédrales immensesqui font l'admiration du monde chrétien par leur légèreté,la beauté de leur ordonnance, par ces flèches qui sem-blent défier les orages pour porter la prière jusqu'autrône de l'Eternel, par ces pinacles gracieux et ces clo-chetons élancés qui semblent accompagner de la voix etdu gesteces flèches gigantesques.

Mais combien, dans ce style, de petites églises sont har-monieuses et vraiment chrétiennes! Sans, faste d'orne-ments, elles élèvent l'âme par leur forme; la science deslignes compose toute leur esthétique, parce que ces lignesont toutes une attribution symbolique ctdivine, qui invitel'âme au recueillement et à la méditation, et la transporteen imagination vers cette région mystique où siège latoute-puissance de Dieu.

Dès long-temps les ennemis de ce style se sont écriésqu'il nécessitait pour son exécution des dépenses fabuleu-ses, incroyables par la quantité de sculptures nécessairespour produire l'effet désiré; mais on peut renvoyer cesennemis de l'art chrétien à l'étude classique des monu-ments de cet âge , et ils verront que l'ornementationd'une église dans le style ogival (lu treizième siècle estbien moins dispendieuse que celle d'une église, soit d'a-près le style antique, soit d'après le style bâtard appelé

- renaissance.Qu'ils veuillent bien, avec bonne foi, comparer la dé-

pense qu'exigera l'emploi de ces piliers massifs nécessitéspar l'établissement de portiques séparatifs deseollatéraux,et de ces portiques eux-mêmes, (lui doivent être surmon-tés d'un entablement ou architrave, d'une frise ou (l'unecorniche; qu'ils comparent cette dépense luxueuse avec

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l'tahlissemcnt de ces faisceaux de colonnes qui suppor-tent les arcades en arc d'ogive! Quelle différence donsl'ornementation, et cependant quelle différence dans lecaractère religieux del'un ou de l'autre style! L'un froidet glacial malgré son style grandiose ; l'autre suave etélancé, parlant à l'âme malgré sa structure simple et har-monieuse; dont toute la composition cherche à s'éleververs les splendeurs célestes. L'âme est gracieusement sa-tisfaite par cette perspective d'arceaux couronnés en pyra-mides, dont la pointe aiguë semble montrer le ciel, etces sveltes colonnettes qui se terminent cri nervuresélégantes pour ne former qu'un seul réseau. au sommetde l'édifice.

Qu'on nous donne donc dans les autres styles unescience de lignes qui par leur effet parlent à l'ùmecommcl'architecture ogivale du treizième siècle, alors j'admi-rerai un pareil chef-d'oeuvre; mais jusqu'à ce jour, quoi-que des artistes célèbrs nous aient donné quelques pro-ductions, aucune, à mon avis, n'approche du sentimentreligieux que fait naître dans l'âme cette architecture à lafois grande et simple, et n'offre ce symbolisme, premierélément du caractère chrétien.

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