photojet de co2 et réserves internes en gaz carbonique chez zea mays

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Planta (Berl.) 114, 109--118 (1973) by Springer-Verlag 1973 Photojet de CO 2 et r6serves internes en gaz carbonique chez Zea mays Pierre Thibault Centre d'Etudes Nucl6aircs de Cadarache, B.t?. n ~1, F-13115, Saint-Panl-lez-Durance, France Regu le 8 juin / 5 juillet 1973 Illumination Burst of CO 2 and Carbon Dioxide Inner Reserves in Zea mays Summary. When a leaf of maize (Zeamays) is illuminated following a long enough period of darkness (t "-~ 10 rain) under pure nitrogen, the oxygen evolution occurs only after a lag time from one to several minutes. During this delay, a burst of C0~ occurs the maximum of which corresponds to the start of oxygen evolution. The source of carbon dioxide is thought to be a stable internal CO2 reserve which has been previously formed in the leaf and is assumed to be malic acid. For as yet unknown reasons the carbon dioxide issued from the reserve by action of light at the beginning of illumination is not fixed and escapes into the atmosphere; this process could require the phytochrome system. Introduction D6s 1938 Blinks et Skew ont observ6, par une m6thode potentio- m6trique, une diminution transitoire du pH externe dans les premi6res secondes d'illumination de plantes sup@ieures (61ectrodes coll6es centre la surface de la feuille) ou de suspensions d'algues. L'interpr6tation de ce r6sultat en termes de photoproduction de gaz carbonique a ~t6 con- firm6e trois ~ns plus tard par Emerson et Lewis (1941) sur onze esp6ces d'algues. En 1949 Van dcr Veen met en cause la g6n6ralit6 du ph6nom6ne en montrant que sur certaines plantes les premi6res secondes de lumi6re provoquent, an contraire, un surcroit de consommation de gaz carboni- que; toutefois l'ann6e suivante il retrouve, sur chlorelles, les r6sultats d'Emerson et Lewis. Depuis lors cette photod6carboxylation temporaire a 6t6 observ6e de nombreuses lois aussi bien sur chlorelles (Gaffron et Rosenberg, 1955; Brown et Witthingham, 1955; Gaffron, 1957; Warburg etal., 1968) que sur plantes sup4rieures (Bj6rkman, 1966; Schmid et Gaffron, 1968; Berry et al., 1970). Ce ph6nombne, incontestable du fair de la multiplicit6 des techniques raises en oeuvre pour son observation, reste toujours incompris malgr6 !es hypotheses pr6sent4es durant ces trente derni6res ann6es.

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Page 1: Photojet de CO2 et réserves internes en gaz carbonique chez Zea mays

Planta (Berl.) 114, 109--118 (1973) �9 by Springer-Verlag 1973

Photojet de CO 2 et r6serves internes en gaz carbonique chez Zea mays

Pierre Th ibau l t

Centre d'Etudes Nucl6aircs de Cadarache, B.t?. n ~ 1, F-13115, Saint-Panl-lez-Durance, France

Regu le 8 juin / 5 juillet 1973

I l l umina t ion Burs t of CO 2 and Carbon Dioxide Inner Reserves in Zea mays

Summary. When a leaf of maize (Zea mays) is illuminated following a long enough period of darkness (t "-~ 10 rain) under pure nitrogen, the oxygen evolution occurs only after a lag time from one to several minutes. During this delay, a burst of C0~ occurs the maximum of which corresponds to the start of oxygen evolution. The source of carbon dioxide is thought to be a stable internal CO 2 reserve which has been previously formed in the leaf and is assumed to be malic acid. For as yet unknown reasons the carbon dioxide issued from the reserve by action of light at the beginning of illumination is not fixed and escapes into the atmosphere; this process could require the phytochrome system.

Introduction

D6s 1938 Blinks et Skew ont observ6, pa r une m6thode potent io- m6tr ique, une d iminu t ion t rans i to i re du p H externe dans les premi6res secondes d ' i l l umina t ion de p lantes sup@ieures (61ectrodes coll6es cent re la surface de la feuille) ou de suspensions d 'a lgues. L ' i n t e rp r6 ta t ion de ce r6sul ta t en te rmes de pho top roduc t ion de gaz carbonique a ~t6 con- firm6e t rois ~ns plus t a r d pa r Emerson et Lewis (1941) sur onze esp6ces d 'algues. E n 1949 Van dcr Veen met en cause la g6n6ralit6 du ph6nom6ne en m o n t r a n t que sur certaines p lan tes les premi6res secondes de lumi6re p rovoquen t , an contraire , un surcroi t de consommat ion de gaz carboni- que; toutefois l ' ann6e su ivante il re t rouve, sur chlorelles, les r6sul ta ts d ' E m e r s o n et Lewis. Depuis lors cet te pho tod6ca rboxy la t ion t empora i re a 6t6 observ6e de nombreuses lois aussi bien sur chlorelles (Gaffron et Rosenberg, 1955; Brown et Wi t t h ingham, 1955; Gaffron, 1957; W a r b u r g etal., 1968) que sur p lan tes sup4rieures (Bj6rkman, 1966; Schmid et Gaffron, 1968; Be r ry et al., 1970). Ce ph6nombne, incontes tab le du fair de la mul t ip l ic i t6 des techniques raises en oeuvre pour son observat ion , reste tou jours incompris malgr6 !es hypotheses pr6sent4es d u r a n t ces t ren te derni6res ann6es.

Page 2: Photojet de CO2 et réserves internes en gaz carbonique chez Zea mays

110 B. Thibault

U n protocole exp6rimental, mis au point pour 6tudier les r6gimes transi toires de la photosynth6se (Gu6rin de Montgareuil et al., 1967) permet d 'observer u n tel d6gagement de CO~ ehez les feuilles de mais (Zea mays) lorsqu'elles sont 6elair6es sous courant d 'azote pur. On se

propose d 'ana lyser cet effet en relat ion avee les r6serves internes en COz qui sont assoei6es aux capacit6s en oxyg6ne photosynth6t ique.

Materiel et m6thodes

Les exp6riences sont effectu6es sur des fragments de feuille d'enviroa 1 g pr61ev6s sur des plants de ma~s (Zea mays) de deux ou trois mois eultiv6s en serre.

L'@hantillon de feuille est plac6 dans une enceinte 6tanche thermor6gul6e 25 ~ C qui est balay6e par un courant gazeux en circuit ouvert (fig. 1). Un syst6me

de volet opaque, mobile, permet s volont6 de mettre l'~chantillon ~ l'obscurit6 ou la lumi~re.

Le mode op6ratoire consiste tout d'abord s placer la feuille s l'obscurit6 pendant 5 rain au contact d'un courant d'air ~- 1% CO 2 (phase de conditionnement) puis

61iminer sous l'action du vide (10 s) ]'atmosph6re de l'eneeinte qui est alors remplac6e par un courant d'azote pur (phase d'61ution) dirig6 successivement vers un analyseur amp6rom6trique de traces d'oxyg~ne et un analyseur de gaz carbonique

absorption infra-rouge non dispersive. On s'int6resse ici uniquement aux @hanges gazeux qui ont lieu pendant la

phase d'6lution sous azo~e. Le conditionnemen~ qui es~ effectu6 apr6s chaq~e 61ution n'a d'autre but que de reconstituer au sein de la feuille les r6serves en gaz carbonique de mani6re 5~ assurer la reproduc~ibilit6 des ph6nom6nes observ6s.

La r6p6tition des cycles conditionnement-61ution se fair par un dispositif de programmation d'61ectro-vannes. L'utilisation de deux circuits ind6pendants d6bit continu permet de refaire le z6ro des appareils de mesure pendant ehaque phase de conditionnement. Les contr61es de d6bit sont effectu6s ~ l'aide de micro- d6bitm6tres 61eetriques. Le temps de transfert des gaz entre les deux analyseurs a 6t6 d6termin6 afin d'ajuster sur les enregistrements les vitesses d'apparition de l'oxyg6ne et du gaz carbonique.

La lumi6re est d61ivr6e par un monochromateur solaire ~ haut flux dans le visible (Andr6, 1966).

Analyseur /knatyseu r Debitmetre

] Ext6r~eur

- - - ~ Etectrovannes programm~es

Fig. 1. Representation sch6matique du montage

Page 3: Photojet de CO2 et réserves internes en gaz carbonique chez Zea mays

Photojet de CO z chez Zea mays 111

R6sultats

Mise en dvidence du photojet de CO s

La figure 2 pr6sente les vitesses de ddgagement de CO S e t ]e cas 6ch6ant d 'O 2 sous courant d 'azote d ' abord 5~ l 'obscurit6 (10 rain) ensuite

la lumi~re ~t 489 nm (10 rain). La courbe 1 relative au gaz carbonique peut se d6composer en trois phases successives :

une lib6ration 5~ l 'obscurit6 dent ]a vitesse est max imum entre une et deux minutes;

un jet d~s lo d6but de l ' i l lumination;

une plus grande d6croissance de la vitesse d'6mission au cours de l '6clairement par comparaison avec le ph6nom6ne obscur (courbe 1 ').

Le photod6gagement do C02 qui constitue la deuxi6me phase pr6c6de, comme dans los exp6riences d 'Emerson et Lewis (1941), Brown et Wi t t ingham (1955) et Warburg et al., (1968) Bur chlorelles, ia product ion d 'oxyg~ne photosynth6t ique (courbe 2). On retrouve 6galement la corrcs- pondance ponctuelle, signal6e par Warburg et que 1'on peut voir aussi sur les courbes pr6sent6es par Emerson ,entre le max imum du jet do CO 2 et l 'appari t ion de l 'oxygbne. Pour certaines feuilles, la phase d ' induct ion qui pr6cbde I'6mission d 'O 2 n 'es t pas aussi net te; d~s le d6but de l'illu- minat ion il apparai t un peu d 'oxyg6ne dent la vitesse de product ion reste toutefois constante avan t de croitre pour at teindre sa valeur maxi- mum. Dans ce cas il y a correspondance entre ]es points de rencontre des tangentes d' inflexion trac6es sur les eourbes de product ion d'O2 et

COs.

" 7

Tc ~ ~ 480 nm / , / / \ \ , ,

5 i - - [

e ~ O 1 0 480 nm

> I I I P 0 2 4 6 8 10 12 lZ, 16 18 20

Temps min

Fig. 2. Vitesses d'6mission d ' O 2 et de 002 obtenues avec un fragment de feuille de Zea may8 (1 g) balay6 par un eourant d'azote pur d'abord ~ l'obscurit6 puis b, la lumi6re )l 480 nm (50 W.m-2). Ant6rieurement le fragment de feuille a 6t6 en

contact, & l'obseurit6 pendant 5 rain, avee de l'air enrichi en C02 (1%)

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112 P. Thibault

L'apparition du photojet de COa d6pend des conditions op6ratoires et notamment de la dur6e du s6jour pr6alable & l'obscurit6 sous azote: si l'6clairement intervient imm6diatement apr~s le traitement par Fair enrichi en CO 2 on n'observe ni production de gaz carbonique ni retard

l'6mission d'oxyg6ne. D'une fas g6n6rale ehaque fois que la lumi6re indui~ un d6gagement transitoire de CO 2 la vitesse d'6mission d'O 2 es~ faible, voire nulle.

Photo]et de CO 2 et activation du ddgagement d' oxyg~ne

Le fair que des conditions exp6rimentales bien d6finies entrainent un d6gagement d'oxyg6ne retard6 u 6t6 interpr6t6 comme un processus d%ctivation (Thibault et al., 1968) que chaque longueur d'onde comprise entre 400 et 800 nm est susceptible de mener & bien: la plus efficace se situant aux environs de ~ 740 nm (Thibault, 1969). Dans le domaine rouge lointain (4 > 720 nm) les intensit6s lumineuses utilis6es ne per- mettent pas l'Smission d'oxyg~ne et le degr6 d'activation est r6v~16 par un 6clairement ult6rieur & longueur d'onde plus courte, en l'occurence

480 nm: e'est ainsi qu'on a montr5 qu'un pr66clairement 2 740 nm d'intensit6 18 W . m -~ pendant 1 rain agissait de telle mani6re que le d6gagement d'oxyg~ne sous 2 480 nm 6tait quasi instantan6 (activation ~ot~le).

Compte tenu de la concomitance observ6e entre le photojet de CO 2 et ce processus d'activation (fig. 2) on a cherch6 ~ savoir si la photopro- duction de gaz carbonique pouvait ~voir lieu au cours de l'Selairement activateur ~ 740 nm indSpendamment de route production d'oxyg6ne ult6rieure.

"T o~ ~20

. 3 7- ~ o

~_ o

g

E "~ 20

~ g ~D 10

>

480 n m

I I I 4 8 12 16 20 24 28 32

Temps rain

Fig. 3. Vitesses d'6mission d'O 2 et de CO~ sous azote pur apr6s un traitement iden- tique 5. celui de la fig. 2. Les intensit6s des 6clairements 2 740 et ;t 480 nm sent

respectivement 18 et 50 W" m -2

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Photoje~ de CO 2 chez Zea mays 113

La fig. 3 repr6sente le d6roulement d'une exp6rience off l'6chantillon de feuille de mais b~luy6 par l'~zote eat 6clair6 s l~ minute 10 par 2 740 nm (18 W . m -a) pendant 1 rain puis replac6 & l'obscurit6 durant 10 rain a~rant d'6tre 6clair6 par ,~ 480 nm. La p6riode d'obscurit6 intercalaire u pour but de laisser s'effectuer 1s d6sactivation dent le tl/2 est voisin de 4 min (Thibault et al., 1968). L 'examen des courbes repr6sentant les vitesses d'6mission de CO S et d'O~ r6v61e un premier jet de CO 2 sous rouge lointain sans production simultan6e ou ult6rieure d'oxyg6ne puis un second sous ,~ 480 nm de la mani6re d6crite uu puragraphe 1. Si l ' interwlle de temps entre les deux 6clairements n 'est pus suffisunt (t < 2 min) on n'observe pus d'6mission de gaz carbonique sous 2 480 nm ni de retard appr6ciable au niveuu du d6gagement d'oxyg~ne: en d6finitive il semble bien que le phdnom~ne de photoproduction de guz carbonique au tout d6but d 'un 6clairement soit essentiellement Ii6 & lu phase que nous uvons appel6e phase d'activution.

E/let, sur le photo]et de C02, d'un dclairement rouge lointain pendant la phase de conditionnement

Pour la plupart des feuilles plac6es duns les conditions exp6rimentales des figures 2 et 3 ]a partie ascendante du photojet de CO S dure entre 1 rain 30 s e t 2 rain tout comme le temps de latence du d6gagement d 'oxy- g~ne. Si le t rai tement par Fair enrichi en gaz carbonique ou phase de condi- t ionnement est effectu6 sous un faible ~claircment 2 740 nm (5 & 10 W. m -a) la production de COe au d@but de l'i]lumination ~ 480 nm est fortement acc614r6e (fig. 4, courbe 1 A) par rapport au r6sultat obtenu 5~ 1'issue d'une exp4rience analogue o~t la phase de conditionnement se d6roule s l 'ob-

2~ 1A u / / / ~ 4.80 nm/ "~ 2A

g

E -~, 20

,,,_o ~ n l 0

0 I , t I r

2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 Temps min

:Fig. 4. Vitesses d'6mission d'O 2 e~ de 002 enregistr@es sous ~zot,e put selon que le tr~itement pr6alable par Fair + 1% C02 a @t~ effec~u6 sous Z 740 nm (7 W . m -2)

(courbes 1) ou ~ l'obscurit6 (courbes 2)

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114 P. Thibault

scurit6 (fig. 4, courbe 2A). Duns los deux cas il y a coincidence entre le maximum du jet de CO 2 et le point de d6part de la production d'oxyg&ne photosynth6tique (courbes 1B et 2B).

L'effet de ]'6clairement rouge lointain en pr6sence de CO 2 et d'O 2 se fair sentir m6me apr~s une p6riode d'obscurit6 relativement longue (10 rain) par rapport an temps de demi-d6sactivation (4 rain) mesur6

l'obscurit6 sous azote (cf. w

Discussion

Duns nos conditions exp6rimentales la feuille de ranis, 6clair6e sans CO 2 dans la phase gazeuse, produit malgr6 tout une quantit6 importante d'oxyg6ne (15 s 25 ~zl/mg de chlorophylle) qui s'explique par l'existcnce de r6serves internes de CO~, utilisables sous lumi6re, r6v616es par Gu6rin de Montgareuil et al. (1967). Cos auteurs ont montr6 que d'une part un apport de CO 2 avant l'6clairement 6tait indispensable s l 'obtention d'un tel d6gagement d'oxyg6ne at que d'autre part une analyse cin6tique et quantitative des 6missions d'O~ et CO 2 autorisait ~ concevoir deux r6serves internes en CO s respectiveInent labile et stable ~ l'obscurit6 sous azote. En reprenant leurs exp6riences Michel (1971) identifiait la r6serve labile ~ l'acide aspartique. Compte term de ce r6sultat, des tra- vaux en cours au laboratoire et du fair que la fixation de laCO2 par des feuilles de mais se poursuit ~ l'obscurit6 (Stamieszkin et al., 1971 ; Same- jima et Miyachi, 1971) par fl carboxylation du phospho-6nolpyruvate on pent assimiler s titre d'hypoth6se la r6serve stable s l'acide malique.

Interprdtation du photoyet de CO S

Los conditions exp6rimentales qui conduisent an photojet de CO s sent celles qui permettent d'61iminer la r6serve en CO s labile. La produc- tion. de CO s /~ l'obscurit6 repr6sent6e sur la figure 2 par la premi6re partie de la courbe 1 provient en offer de la dissociation de cette r6serve (Gu6rin de Montgareuil et al., 1967). Ainsi, le d6gagement d'oxyggne pr6sent6 sur la m6me figure est la manifestation d'un processus photo- synth6tique utilisant le CO s interne provenant de la seule r6serve stable. Si l'on suppose ~ chaque instant un quotient photosynth6tique 6gal s l'unit6, la courbe 3 obtenue par addition des courbes 1 et 2 donne la variation de la vitesse th6orique de lib6ration du CO S produit ((in situ)). La continuit6 qni apparait entre la courbe 3 et la partie ascendante du jet (courbe 1) tend s montrer que ce dernier est issu du m~me r6servoir de CO S responsable du d6gagement d'oxyg6ne. Cette explication qui recouvre en partie cellos donn6es par Emerson et Lewis (1941) et Franck (1942) permet de consid6rer la d6croissance 5~ la lnmi6re de l'6mission de CO e (fig. 2, eourbe 1) comme le r6sultat global d 'un d6gagement et d'une prise concomitante.

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Photojet de CO~ chez Zea mays 115

En cons6quence on peut dire qua l'acide malique, provisoirement considgrg comma la r6serve en CO 2 stable, est g l'origine du photojet de gaz earbonique.

La mgme hypothgse a 6tg formul6e par Sehmid et Gaffron (1968) et par Berry (1969). Les premiers remarquent au surplus que ce ph5no- m6ne de photod6carboxylation est d ' au tan t plus aeeentu6 que les plantes poss~dent une moindre apti tude ~ ~mettre de l'oxyggne. Dens le eas du tabae il s 'agit de mutants jannes dont les chloroplastes sont pauvres en eengres de r6aetion appartenant au photosyst~me I I ou de plants d6- fieients en mangangsa. Warburg et el. (1968) ont 6galement montr6 que des ehlorelles d6barrass6es par dialyse de leur mangangse actif gtaient partieuligrement aptes g d6gager transitoirement du CO s sons lumigre. Le r61e du manganese an photosynthgse reste encore aujourd'hui mal comm. Tontefois Cheniae et 3/[artin (1968), Homman (1968) et Ben- t Iay im et Avron (1970) pensent que son site d'aetion est essentiellement li6 au photosystgme II . En d~finitive le point eommun entre les mutants jaunes et les plants d6fieients en manganese est une faible aetivit6 des eentres du systgme I I qui semble favoriser la photoproduetion tran- sitoire de CO s. De m~me ehez le mals le photojet de CO s apparalt uni- quement pendant Is phase d 'aetivation du dggagamer~t d'oxyggne. Toute- lois l 'aetivit6 momentan6ment r6duite du systgme I I n e paut pas ~tre attribu6e dens ee eas ~ une earenee en manganese: des dosages effeetugs par absorption atomique ayant donn6 des teneurs allant de 20 ~ 50 Exg/g de matigre sgehe.

La nature des r~aetions qui eonduisent s l'6mission de CO 2 est encore ineonnue mais on note que routes les longueurs d'onde du spectra visible provoqnent ee ph6nomgne avec eependant une effieaeit6 variable. Par eontre le m6eanisme de fixation du CO s est mieux eonnu et on peut s'interroger sur les raisons pour lesquelles le CO s produit <dn situ ~> n'est pas m6tabolis6 au d6but de l'6elairement. S'il s'6ehappe dens l 'atmos- phgre e'est que la vitesse de dgearboxylation du pr6enrseur est supgrieure

la vitesse de la rgaetion d'int6gration Ia plus lente. Chez les ehloro- plastes on sait d6js qne la vitesse maximum de fixation de CO s n 'est atteinte qu'apr~s plusieurs minutes au eours desquelles les interm6diaires phosphoryl6s du Cycle de Calvin se mettent en place (Walker et el., 1967). Un ph6nomSne du m6me genre pourrait peut-6tre rendre eompte de la eorr61ation qui existe ehez le ma~s entre photojet de COe et proeessus d 'aetivation du d6gagement d'oxyg6ne.

Photo]et de CO 2 et activation du ddgagement d' oxyg~ne

La dur~e de la phase de latence observ6e chez les ehloroplastes ~ la lois sur 1~ prise de CO s e t le d6gagement d'O~ d@and fortement de

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116 P. Thibault

l 'addition d 'ATP qui a pour effet d'acc615rer les deux mbcanismes (Seh/irmann et al., 1972). Ces m6mes auUeurs, notant une 6quivalence d'action des lumi~res rouge (664 nm) et rouge lointain (720 nm) sur la phase de latenee, coneluent que eette derni~re r6sulte d 'un manque d 'ATP progressivement fourni par la photophosphorylation eyclique: I 'ATP serait le facteur limitant la synthgse des interm6diaires phos- phoryl~s au d6but de l'gelairement.

Chez le mais il existe aussi une relation direete entre synth~se d 'ATP et activation du d6gagement d'oxyggne tout au moins pour les longueurs d'onde 650 et 740 nm (Thibault, Michel, 1971). Toutefois nos r6sultats s'6cartent des pr6e6dents du fair que l'6clairement 740 nm est environ deux lois plus actif que l'6clairement 650 nm. En outre nous avons montr6 l'existenee d 'un effet antagoniste rouge-rouge lointain visible sur la synthgse d 'ATP et le d6gagement d'02 qui nous a fair envisager une gventuelle intervention du syst~me phytochrome. I1 ne semble pas enfin que la mise en place des interm6diaires phosphoryl6s du Cycle de Calvin soit le seul processus qui limite l'intSgration du C02 et par cons6quent l'5mission d'O 2. Farineau (1969) note en effet, ehez le ma~'s et dans nos conditions exp~rimentales, une synthgse notable d'acide 3-phosphogly- c~rique (APG) (0,2 ~zmole/g de mati~re fralehe) bien avant que l'acti- vation soit totale tandis que le niveau de dihydroxyacgtone phosphate reste nul. I1 s'ensuit que le blocage du d~gagement d'oxyg~ne r6sulte plutSt de la non-r~duction de I 'APG. La rupture dans le cycle de Calvin qui en d~coule a pour consequence de ralantir ou d'annuler totalement les r6aetions de fixation du CO S mobilis6 de la r6serve interne et celui-ei s'6chappe vers l'ext6rieur. Compte tenu de l'6ventuelle intervention du syst~me phytochrome il est possible d'envisager son action sur une (~barri~re)~ interdisant la communication entre NADPH et APG con- formSment au schema ci-aprgs: la notion de baiIi~re est s prendre dans un sens trSs large qui peut aller de la membrane cellulaire ~ l ' inactivation enzymatique.

hv hv hv jetde ~ i

CO~

Syst~nle i ~--- NADPIt 4--- ] Systgme i A I~C02H---> (CO2)---> _ phytoehrome i 02 : ~-- ATP <--- photosynth6tique

i Barri6re :

RCO~H est la r6serve en gaz earbonique stable, supposSe 6tre l'acide malique ;

(COs) est un substrat earboxyl6 pouvant lib6rer spontangment du CO2, (le gaz earbonique lui-mgme n'est pas exeln).

Page 9: Photojet de CO2 et réserves internes en gaz carbonique chez Zea mays

Photojet de CO 2 chez Zea may8 117

I1 f au t 6galement r appe le r que chez le mais e t la canne ~ sucre il existe une intensi t6 l imi te voisine de 600 lux (Thibaul t , 1971) en dessous de laquel le l '6mission d 'oxyg~ne n ' e s t plus possible; ee r6su l ta t a y a n t 6t6 in terpr6t6 comme la mani fes ta t ion d ' un t r ans fe r t de mat igre , on peu t le r approcher de la r6act ion RCOfi-I --> (COs) qui n6eessi terai t un a p p o r t m i n i m u m d'4nergie.

Signalons encore que nous avons pu observer le p h o t o j e t de CO s duns les mSmes condit ions exp6r imenta les sur des feuilles de Saccharum o/ficinale et de Sorghum vulgare a p p u r t e n a n t t ou t comme le mais au groupe de p lan tes de t ype C a.

R~f~rences

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