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Philosop hie du langage

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  • Philosophie du langage
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  • Le langage est un problme philosophique La philosophie ntant rien dautre que la pense de la pense si le langage est le vhicule de la pense, il est ncessairement lobjet dune rflexion philosophique. 2
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  • Lopinion de Descartes Les animaux nayant pas de pense, ils ne peuvent matriser le langage qui est une proprit de lhomme. Bien qu ils mettent des bruits qui sont le reflet de leurs passions (douleur, colre, sensualit), ils sont incapables de formuler un discours rapport propos et encore moins de comprendre des symboles. La parole des perroquets nest pas signifiante. Cest du psittacisme*. En revanche, les sourds-muets, mme sils sont dpourvus de la parole, possdent le langage. Le langage est indissociable de la prsence dune me qui a des penses. 3
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  • Texte : Descartes Les btes nont pas de penses () il ne s'est toutefois jamais trouv aucune bte si parfaite, qu'elle ait us de quelque signe, pour faire entendre d'autres animaux quelque chose qui n'et point de rapport ses passions ; et il n'y a point d'homme si imparfait, qu'il n'en use; en sorte que ceux qui sont sourds et muets, inventent des signes particuliers, par lesquels ils expriment leurs penses. Ce qui me semble un trs fort argument, pour prouver que ce qui fait que les btes ne parlent point comme nous, est qu'elles n'ont aucune pense, et non point que les organes leur manquent. Et on ne peut dire qu'elles parlent entre elles, mais que nous ne les entendons pas ; car, comme les chiens et quelques autres animaux nous expriment leurs passions, ils nous exprimeraient aussi bien leurs penses, s'ils en avaient. Lettre au Marquis de Newcastle, 23 novembre 1646. 4
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  • Texte : Dennett Le concept de chat Un chien possde-t-il un concept de chat ? Oui et non. S'il importe peu que le concept de chat propre au chien soit proche du vtre en extension (le chien et vous classez les mmes entits en chats et non-chats), il existe cependant une diffrence essentielle entre vos deux concepts : le chien ne peut pas considrer son concept. Il ne peut pas se demander s'il sait ce que sont les chats ; il ne peut pas se demander si les chats sont des animaux ; il ne peut pas essayer de distinguer l'essence du chat de ses simples accidents. On ne peut pas dire que les concepts appartiennent au monde du chien la faon des chats. En revanche, les concepts appartiennent bien notre monde, parce que nous disposons du langage. Un ours polaire possde vis--vis de la neige des comptences que ne possde pas un lion, on pourrait donc dire que l'ours polaire possde un concept dont le lion manque un concept de neige. Mais aucun mammifre dpourvu de langage ne peut avoir un concept de neige comme nous en avons un, parce qu'un mammifre dpourvu de langage n'a aucun moyen de considrer la neige en gnral ou en elle-mme . () l'ours polaire ne peut pas manipuler ce concept. DENNETT, Daniel, La diversit des esprits, Paris : Hachette, 1998, pp. 205 206. 5
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  • Quest-ce que le langage ? Selon la dfinition quon lui donne, on attribuera la facult du langage aux animaux ou non. Dans une optique spiritualiste, on pourrait dfinir le langage comme le vhicule de la pense humaine au moyen de la parole . Quelle autre dfinition pourrait-on concevoir pour le langage ? 6
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  • Un systme de signes pour communiquer Si nous admettons, comme beaucoup dthologistes*, que le langage est un systme de signes mis dans lintention de communiquer, nous devrons admettre que les animaux utilisent avec succs des langages. Dans une perspective matrialiste, il est assez naturel que les animaux pourvus dun systme nerveux central lutilisent aussi pour communiquer. Il est indniable que lutilisation de ses cordes vocales a donn ltre humain une capacit de communiquer incomparablement efficace. Mais les paroles ne sont quune petite partie de tous les signes possibles et lhomme lui-mme fait usage de bien dautres signes pour mettre des messages : cris, gestes, mimiques, dessins, etc. 7
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  • Les trois dimensions du langage Le langage peut tre tudi selon trois perspectives : smantique*, tude du sens des signes, syntaxique*, tude de lorganisation des signes, pragmatique*, tude des relations des noncs avec lenvironnement. 8
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  • La smantique Smantique (du grec semantikos, qui signifie, qui indique ), tude du sens, envisag comme la relation de signification qui unit les mots aux choses ou comme la relation existant entre les signes et leurs utilisateurs. (Encarta) 9
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  • Le concept de signe Un signe est un objet porteur de signification, plus prcisment, selon de Saussure, le total rsultant de lassociation dun signifiant un signifi . Il sensuit quun signe peut tre nimporte quoi et que nimporte quoi peut tre un signe ds le moment o quelquun possde un code qui lui permet dinterprter le signe. On peut distinguer deux types de signes selon quils sont intentionnels ou non. Seuls les signes utiliss intentionnellement suivant des rgles systmatiques forment un langage. Les signes non-intentionnels sont des symptmes, des indices, des traces. Par exemple 10
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  • Texte : Andr Martinet Une conception nave du langage Selon une conception fort nave, mais assez rpandue, une langue serait un rpertoire de mots, c'est--dire de productions vocales (ou graphiques), chacun correspondant une chose ; un certain animal, le cheval, le rpertoire particulier connu sous le nom de la langue franaise ferait correspondre une production vocale dtermine que l'orthographe reprsente sous la forme cheval; les diffrences entre les langues se ramneraient des diffrences de dsignations : pour le cheval, l'anglais dirait Horse et l'allemand Pferd; apprendre une seconde langue consisterait simplement retenir une nouvelle nomenclature en tous points parallle l'ancienne. Les rares cas o il faut bien constater des entorses ce paralllisme constitueraient des idiotismes (...) Cette notion de langue-rpertoire se fonde sur l'ide simpliste que le monde tout entier s'ordonne, antrieurement la vision qu'en ont les hommes, en catgories d'objets parfaitement distinctes, chacun recevant ncessairement une dsignation dans chaque langue. lments de linguistique gnrale, A. Colin, 1960, pp. 14-15. 11
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  • Les langues naturelles Les mots sont les plus petites units signifiantes dune langue. Lorsque je prononce un mot, je propose un signifiant un interlocuteur qui lui associera un signifi (le concept indiqu par le mot). Si ce dernier ninterprte pas le mot selon lintention du locuteur, il y a ambigut. Pour quelques mots particuliers, cependant, leur sens est uniquement leur fonction. ces joncteurs ou oprateurs logiques ne correspond aucun signifi. 12
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  • Texte : La smantique Les logiciens divisent gnralement les mots ou les symboles linguistiques en oprateurs logiques, ou fonctions ( si , et , ou , ne... pas , tout , quelques) et en termes, ou prdicats, aussi varis que les sujets de discussion possibles ( rouge , grand , grand-pre , oxygne , pote de second ordre ,...). Tout terme signifiant ou prdicat d'un langage donn a une extension la chose ou l'ensemble de choses auxquels le terme se rfre et une intension la faon particulire dont cette chose ou cet ensemble de choses sont dsigns ou dtermins. Le pre de Chelsea Clinton , et prsident des tats-Unis en 1995 dsignent la mme chose - Bill Clinton - et ont donc la mme extension, mais ils visent cette entit commune de faon diffrente : leurs intensions sont donc diffrentes. Le terme triangle quilatral dsigne exactement le mme ensemble de choses que le terme triangle quiangle , ces deux termes ont donc la mme extension, mais ils ne signifient videmment pas la mme chose : l'un des termes porte sur le fait que les cts d'un triangle sont gaux, et l'autre sur le fait que ce sont les angles qui sont gaux. Dennet, D., La diversit des esprits, Paris : Hachette, 1998, pages 60 et 61. 13
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  • Lambigut des langues naturelles Dans une langue naturelle, un mme mot peut tre porteur de diffrentes significations (polysmie) et inversement, un concept peut tre dsign par plusieurs mots (synonymie). Les langues naturelles sont trs ambigus. Les langues artificielles ont prcisment pour but dliminer toute possibilit dimprcision dans le langage. 14
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  • Les mots nous trompent-ils ? Les mots nous imposent un dcoupage du monde que nous navons pas choisi. Le mot neige , par ex., ne correspond aucun mot de la langue des Inuits (inuk-tituk) qui dispose de plusieurs termes plus prcis. Les mots ne dnotent pas seulement les choses, ils connotent galement la ralit. Mais les connotations sont minemment variables. (Cfr. Les textes de Hobbes et Schopenhauer.) Des mots peuvent tre crs arbitrairement pour dsigner nimporte quel imaginaire, des visions, des fantasmes. Par exemple, les mots hydre ou sirne . Il est tentant de croire que, si le mot existe, il doit exister une ralit qui lui corresponde. Cest le paralogisme* sur lequel est fonde la thorie de lidalisme (ralisme des ides).hydreparalogisme Rien nempche cependant de forger un mot pour dsigner des absurdits logiques Je peux crer le mot carcer pour dsigner le cercle carr. Qui mempchera alors de formuler lnonc : Les carcers sont invisibles. ? 15
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  • Texte :Thomas Hobbes Les mots sont teints par les passions de celui qui parle. Les dnominations (names) des choses qui nous affectent, c'est--dire qui nous plaisent et nous dplaisent sont, dans les entretiens ordinaires des hommes, d'une signification flottante, parce que la mme chose n'affecte pas de mme tous les hommes, ni le mme homme en des moments diffrents. Etant donn en effet que toutes les dnominations sont attribues pour signifier nos conceptions, et que toutes nos affections ne sont que des conceptions, nous ne pouvons gure viter, quand nous concevons diffremment les mmes choses, de les nommer diffremment. Car quoique la nature de ce que nous concevons soit la mme, cependant les diverses faons dont nous la recevons en fonction de nos constitutions corporelles diffrentes, et des diffrentes faons dont notre opinion est prvenue, donnent toute chose une teinture de nos diffrentes passions. C'est pourquoi en raisonnant on doit prendre garde aux mots qui, outre la signification de ce que nous imaginons de leur nature, en ont une aussi qui vient de la nature, des dispositions et des intrts de celui qui parle. Telles sont les dnominations des vertus et des vices ; car l'un appelle sagesse ce qu'un autre appelle crainte; l'un nomme cruaut ce que l'autre nomme justice, etc. Lviathan IV, trad. Franois Tricaud, Sirey, 1971 pp 35-36. 16
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  • Il na jamais t marchand ! Hobbes nous montre que notre langage est toujours subjectif puisque nous choisissons des dsignations dont les connotations refltent nos affections et nos passions. Inversement, lemploi de certains termes dont la connotation est marque pour un interlocuteur pourra laffecter profondment et dchaner ses passions. Cliquez ici pour voir un court extrait du film Molire ralis par Laurent Tirard et interprt par Fabrice Lucchini et par douard Baer (2007). Cliquez ici pour voir MONSIEUR JOURDAIN. Il y a de sottes gens qui me veulent dire qu'il a t marchand. COVIELLE. Lui marchand! C'est pure mdisance, il ne l'a jamais t. Tout ce qu'il faisait, c'est qu'il tait fort obligeant, fort officieux; et comme il se connaissait fort bien en toffes, il en allait choisir de tous les cts, les faisait apporter chez lui, et en donnait ses amis pour de l'argent. Molire, Le Bourgeois gentilhomme, Acte 4, Scne 3. 17
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  • Texte : Schopenhauer Nous choisissons les dsignations favorables notre thse ! Le nom de protestants a t choisi par eux, de mme que celui d'Evangliques, mais le nom d' hrtiques par les catholiques. Le mme principe vaut pour le nom des choses, lors mme qu'il s'applique plus littralement elles : ainsi, quand l'adversaire a propos une modification quelconque, qu'on la qualifie d' innovation : car ce mot provoque l'hostilit. L'inverse est recommand, quand on est soi-mme l'auteur des projets. Dans le premier de ces cas, qu'on nomme, en guise de repoussoir, l' ordre tabli, dans le second la chienlit. Ce qu'un esprit tout fait serein et impartial appellerait, par exemple, un culte ou une thologie officiellement reconnue, l'un, voulant les dfendre, les qualifiera de pit, voire de ferveur, et leur adversaire de bigoterie ou de superstition . Au fond, il s'agit l d'une subtile ptition de principes : ce que l'on veut prouver, on le met d'avance dans le mot, dans la dnomination, dont on le tire ensuite au moyen d'un jugement purement analytique. Ce que l'un appelle s'assurer de sa personne , mettre en lieu sr , son adversaire l'appelle l'enfermer. Souvent, un orateur trahit l'avance son intention par les noms qu'il donne aux choses. L'un dit le clerg et l'autre les calotins. De tous les stratagmes, c'est celui- ci qui est le plus couramment employ, et d'instinct. Zle pieux = fanatisme. Faute ou escapade adultre. quivoques = cochonneries. Mal en point = par corruption et npotisme. Reconnaissance sincre = bon pot de vin. L'art d'avoir toujours raison, 1864. 18
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  • Texte : Roger Caillois La magie des mots Celui qui emploie un mot pense rarement en prciser le sens. A mesure qu'il parle ou qu'il crit, il lui donne une signification, puis une autre et ne rflchit pas qu'elles sont incompatibles. Plus le mot est vague, plus il lui est facile de l'accommoder son discours. Et s'il en ignore tout fait la porte, rien ne le retient d'en user entirement sa guise, sans limite d'aucune sorte. Son caprice ne rencontre plus la moindre rsistance. Aussi en voit-on plus d'un se plaisant joindre en mille phrases sonores des mots qui leur paraissent pleins d'un magique pouvoir et dont ils seraient vivement embarrasss de dfinir le contenu. Ils semblent enfiler des perles de couleur. Quel frein les arrtera ?(...) Je ne m'explique pas autrement ce got si rpandu de certaines ttes pour les vocables dont elles n'entendent pas vraiment la signification : c'est qu'elles se trouvent alors moins gnes encore que de coutume dans le maniement des signes. Si l'on dit table, douleur, malice, chacun sait suffisamment ce que ces mots veulent dire, car il a toute vive l'exprience de la chose et on ne le trompera pas facilement : on ne peut rien avancer qu'elle ne commande troitement. Mais, si l'on dit dialectique par exemple, ou transcendance, on a dj les coudes franches et chacun volontiers commence se faire prendre soi-mme des vessies pour des lanternes. Si vous dites maintenant justice ou libert sans prciser ce que vous entendez par l, tout vous est permis, et d'abord d'appeler ainsi l'iniquit et la tyrannie. Car tout est affaire de dfinition. Qui ne se souvient d'avoir entendu dire un conqurant protger pour asservir? La ruse tait grosse et ne persuada presque personne. Mais ce ne sont pas les ruses que je redoute ; ce sont les diverses formes de l'inconscience et une tmraire navet. ROGER CAILLOIS, Babel, orgueil, confusion et ruine de la littrature, Librairie Gallimard, 1948, pp.183-185. 19
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  • La philosophie analytique Analytique et linguistique, philosophie, mouvement philosophique du XXe sicle dominant en Grande-Bretagne et aux tats-Unis depuis la Seconde Guerre mondiale, qui vise analyser le langage et les concepts qu'il exprime. Le mouvement reut quantit d'appellations diverses, parmi lesquelles analyse linguistique , empirisme logique , positivisme logique , analyse de Cambridge et philosophie d'Oxford , ces deux dernires tant tires des universits anglaises o l'influence de cette mthode philosophique tait particulirement prpondrante. Les philosophes analytiques et linguistiques taient unanimes pour dfinir l'activit propre la philosophie comme la clarification du langage, ou encore celle des concepts. Ils se fixrent le but de trancher les dbats et de rsoudre les problmes qui surgissent en philosophie de la confusion linguistique. (Article de LEncyclopdie Encarta) 20
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  • Texte : Wittgenstein Le but de la philosophie Le but de la philosophie est la clarification logique de la pense. La philosophie n'est pas une doctrine mais une activit. Une uvre philosophique consiste essentiellement en lucidations. Le rsultat de la philosophie n'est pas un nombre de propositions philosophiques, mais le fait que des propositions s'claircissent. La philosophie a pour but de rendre claires et de dlimiter rigoureusement les penses qui autrement, pour ainsi dire, sont troubles et floues. [...] WITTGENSTEIN, Tractatus logico-philosophicus, trad. P. Klossowski, NRF, Gallimard, 1961. 21
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  • Du mot lnonc Un locuteur produit des noncs en groupant des mots. Il est intressant de se demander quelles conditions doivent obir les noncs pour avoir du sens. Un nonc qui ne serait quune suite de mots juxtaposs alatoirement, bien que chacun des termes dont il est compos ait un sens, naura probablement pas lui-mme de sens. Ex.: chamelle en ne lopard extrioris. La syntaxe est lensemble des rgles de groupement des termes de la langue. Un nonc est interprtable dans une langue sil est smantiquement et syntaxiquement bien form. 22
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  • La reprsentation dans le langage On croit souvent que le sens dun nonc est dtermin par les seules rgles de la smantique et de la syntaxe. Cependant, un ensemble dfini dnoncs est comparable une peinture. Lide traditionnelle du ralisme tient ce que toute uvre dart reprsente quelque chose. Aujourdhui, tout lart non- figuratif nous a convaincu que la copie de la ralit nest pas la seule fonction de lactivit artistique. Un discours doit-il reprsenter quelque chose ? Comme les peintures, les actes de parole ne sont pas gouverns seulement par lintention de dcrire des tats de fait. Cest seulement une part infime du langage qui parle du monde propos . La plupart du temps, lintention qui produit la parole vise un effet qui nest pas de la mme nature quune information objective : blesser, sduire, obtenir, dissuader, critiquer, effrayer, amuser, exciter, endormir, etc. 23
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  • La pragmatique Le sens dun nonc nest jamais la somme des sens des mots qui le composent. Le sens dun nonc est toujours pour un destinataire. Ltude pragmatique du langage nous apprend que les noncs sont aussi des actes caractriss par une certaine force. Toute une srie de facteurs (le ton, le rythme, les contextes linguistiques ou non) affectent la signification des actes de langage. Dire cest faire ! (Austin) 24
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  • Texte : Austin Les noncs performatifs Toutes les nonciations que nous allons voir prsenteront, comme par hasard, des verbes bien ordinaires, la premire personne du singulier de l'indicatif prsent, voix active. Car on peut trouver des nonciations qui satisfont ces conditions et qui, pourtant, A) ne dcrivent, ne rapportent, ne constatent absolument rien, ne sont pas vraies ou fausses; et sont telles que B) lenonciation de la phrase est l'excution d'une action (ou une partie de cette excution) qu'on ne saurait, rptons-le, dcrire tout bonnement comme tant l'acte de dire quelque chose. Ceci est loin d'tre aussi paradoxal qu'il semble, ou que j'ai essaye - un peu trop sommairement - de ie faire paratre: on sera du, en effet, par les exemples que nous allons maintenant donner. Exemples : (E. a) Oui [je le veux] (c'est--dire je prends cette femme comme pouse lgitime) - ce oui tant prononc au cours de la crmonie du mariage. (E. b) Je baptise ce bateau le Queen Elisabeth - comme on dit lorsqu'on brise une bouteille contre la coque. (E. c) Je donne et lgue ma montre mon frre - comme on peut lire dans un testament. (E. d) Je vous parie six pence qu'il pleuvra demain. Pour ces exemples, il semble clair qu'noncer la phrase (dans les circonstances appropries, videmment), ce n'est ni dcrire ce qu'il faut bien reconnatre que je suis en train de faire en parlant ainsi, ni affirmer que je le fais : c'est le faire. Aucune des nonciations cites n'est vraie ou fausse: j'affirme la chose comme allant de soi et ne la discute pas. 25
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  • Sens performatif Le langage ne doit donc pas tre conu seulement comme un vhicule de sens empirique mais galement comme un vhicule de sens performatif. Dans ce dernier cas, lacte de parole peut tre compris indirectement, par une interprtation des circonstances environnementales ou est produite telle ou telle parole. 26
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  • Les sous-entendus, limplicite Un nonc est toujours interprt par son destinataire comme un acte qui dpend des circonstances. Par exemple, lnonc Il ne va pas trs bien na pas le mme sens la sortie dune fte o lon parle de quelquun qui a visiblement trop bu et dans un couloir dhpital o il est question dun patient cancreux. Le sens sous-entendu (ou implicite) lemporte parfois sur le sens littral . 27
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  • Texte : Ducrot Dire et ne pas dire Dans de nombreux emplois, l'nonc La situation n'est pas excellente donne penser qu'elle est franchement mauvaise. Mais un locuteur qui aurait prononc cette phrase et se verrait accuser de dfaitisme, peut toujours se retrancher derrire le sens littral de ses paroles ( Je n'ai pas dit a ), prtendre qu'on lui en fait dire plus qu'il n'a dt, et laisser l'auditeur la responsabilit de l'interprtation. Le sous-entendu a ainsi la particularit et l'inestimable avantage de pouvoir toujours tre reni. Comment le locuteur dcouvre-t-il le sous-entendu, si celui-ci est extrieur au sens littral . C'est toujours, selon nous, par une dmarche discursive, par une sorte de raisonnement. Mais ce raisonnement ne peut pas avoir pour point de dpart le seul nonc (sans quoi le sous-entendu serait ncessairement impliqu par ce qui est dit, et impossible alors renier). Il s'appuiera donc sur l'vnement que constitue lenonciation, sur le choix de l'nonc par le locuteur tel moment et dans telles circonstances. Le mouvement de pense qui produit le sous-entendu nous semble du type Si X a cru bon de dire Y, c'est qu'il pensait Z . Z est ainsi conclu c'est un troisime caractre des sous-entendus non pas de ce qui a t dit, mais du fait qu'on l'a dit : S'il me dit que la situation n'est pas excellente, alors que l'habitude est de donner des rapports favorables, c'est qu'il croit la situation vraiment mauvaise. 28
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  • Fly Me To The Moon Music By Bart Howard Fly me to the moon and let me play among the stars, Let me see what spring is like on Jupiter and Mars In other words: hold my hand, In other words : darling kiss me. Fill my heart with song and lett me sing for ever more, You are all I long for, all I worship and adore, In other words, please be true, In other words : I love you. Linterprtation de Diana Krall : 29