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1 Histoire des arts Un parcours au musée de Grenoble Arts du visuel Document réalisé avec l’aide du service des publics du musée de Grenoble

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Histoire des arts

Un parcours au musée

de Grenoble

Arts du visuel

Document réalisé avec l’aide du service des publics du musée de Grenoble

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Jacopo TORRITI Sainte Lucie environ 1295 Tempera sur bois. 170x64cm.

Sainte Lucie est le plus ancien tableau des collections italiennes du musée. Mosaïste et peintre, Jacopo Torriti est un des premiers artistes du XIIIe siècle qui, par l'originalité de sa conception, tend à dégager l'art italien de l'influence byzantine. Ce panneau est l'élément central d'un triptyque provenant de l'Église Santa Lucia in Selci à Rome. C'est sans aucun doute un ex-voto commandé par Angela Cerroni qui est représentée dans l'angle inférieur gauche du panneau. Sainte Lucie, à cause de son nom, était invoquée dans les cas de maladie des yeux. La sainte, vêtue d'un costume impérial byzantin, tient une lampe allumée à la main. Quoique le traitement frontal de la sainte soit encore archaïque, les ondoiements dans les plis du manteau et le traitement des anges annoncent les développements plastiques qui seront amorcés au début du XIVe siècle. Jacopo Torriti peut être considéré comme l'un des artistes qui ont préfiguré la vision de Giotto. Tempera sur panneau de bois, fond en feuilles d'or, absence de perspective et d'expression, vision frontale, modelé limité, statut des artistes considérés comme artisans, rôle du commanditaire, destination du panneau, symbolique des échelles de tailles, …

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Jacopo TORRITI Sainte Lucie environ 1295 Tempera sur bois. 170x64cm.

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Marco PALMEZZANO Nativité 1530 Huile sur bois transposé sur toile- 213x144

Dans cette représentation, l'Enfant indique, d'une manière inhabituelle, le ciel où se trouve un chœur d'anges. Dans le fond du tableau se déroule l'annonce aux bergers, que l'on voit accourir sur un sentier dans le paysage montagnard. Cette peinture en arc de cercle dans sa partie supérieure était sur bois à l'origine. Elle a été transposée sur toile pour des raisons de conservation en 1896.

Peinture à l'huile, bois remplacé par la toile, règles de la perspective, géométrie cachée, modelés ombre-lumière maîtrisés, références à l'Antiquité (colonnes, drapés..)

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Marco PALMEZZANO (1456-1543) Nativité

1530 Huile sur bois transposé sur toile- 213x144

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Pierre Paul RUBENS Saint Grégoire pape entouré de saints et de saintes 1607 huile sur toile 477 x 288 cm

Ce tableau, le plus grand format du Musée, est l'œuvre majeure de la collection flamande. Commandée en 1606 par les Oratoriens de la Chiesa Nuova à Rome au jeune Rubens, qui séjournait alors en Italie, l’œuvre ne trouva jamais sa place sur le maître-autel. Le peintre en réalisa une seconde version, toujours visible dans l'église aujourd'hui, et déposa l'original sur le tombeau de sa mère à Anvers quelques années plus tard. Saisi par les commissaires français vers 1800, le tableau rejoignit la collection du Musée en 1811. Grégoire Ier, dit aussi Grégoire le Grand, fut pape de 590 à 604. Imposant au centre du tableau, il est entouré à droite par sainte Domitille, luxueusement vêtue, et par les saints Achille et Nérée. A gauche se tiennent saint Maurice en cuirasse de soldat romain, et saint Papien appuyé sur un bâton. La colombe blanche du Saint esprit survole la tête du vieil homme. L'architecture est proche d'un arc de triomphe en ruines, composé d'une voûte à caissons, encadrée de pilastres. Elle symbolise la fin des croyances païennes au profit de la religion chrétienne victorieuse en la personne de Grégoire, pape, et de la Vierge à l'Enfant, encadrés dans la partie supérieure. On voit déjà dans ce tableau les composantes baroques qui feront de Rubens, à tout juste 31 ans, le chef de file de l’école anversoise. Les coloris somptueux, inspirés de la peinture vénitienne, et les étoffes gonflées sont magnifiés par la qualité de la lumière ; les diagonales structurent la composition, animée par l’usage des courbes et des contre courbes. Succès, afflux de commandes, situation sociale élevée amèneront Rubens à créer dès 1615 un véritable atelier, dans lequel des peintres de belle réputation lui serviront de collaborateurs. Rôle pédagogique des grands tableaux d'église au moment de la Contre-Réforme, débuts du Baroque et ses caractéristiques, importance du mécénat, place de l'atelier et des assistants dans la carrière de Rubens, questions d'authenticité au XVIIe, rendu des matières ...

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Pierre Paul RUBENS

Saint Grégoire pape entouré de saints et de saintes

1607 huile sur toile 477 x 288 cm

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LE LORRAIN (dit), GELLEE Claude (patronyme) Paysage pastoral ; Campagne romaine, effet du matin (ancien titre) 1644 Huile sur toile H. 98, L. 137

Dans ce Paysage pastoral, Claude Lorrain mêle réel et imaginaire. On reconnaît à droite, le temple de la Sybille et l'évocation du site de Tivoli avec sa cascade et au centre le Ponte Molle à cinq arches, appelé aussi Pont Milvio. Le peintre a étudié ces éléments dans la campagne romaine ; il les a ensuite recomposés dans l’atelier pour restituer l’image d’une nature idyllique dans laquelle l’homme trouve harmonieusement sa place. L’œuvre, baignée d'une lumière froide du matin, a un pendant, un paysage au soleil couchant conservé à Buckingham Palace à Londres. Ces deux toiles illustrent l'intérêt de Claude, comme l'appellent les anglais, pour le temps qui passe, la succession des jours et des saisons, ou encore pour la lumière et ses effets. Peint en 1644 pour un haut fonctionnaire parisien, le tableau de Grenoble est un parfait exemple des paysages idéalisés inventés par l'artiste. Claude Lorrain avait acquis une maîtrise exceptionnelle des lois de la perspective aérienne, où l’illusion de la profondeur est rendue par l’utilisation de couleurs claires et froides à l’arrière-plan du tableau. Sa science de la couleur dans le rendu de l'espace et l'étude de la lumière, objet principal de son attention, lui confèrent une place de précurseur : Turner s’en inspirera deux siècles plus tard dans ses études atmosphériques. Un tel tableau, présent à Paris peu après son exécution, a certainement joué un rôle important pour le développement du paysage classique au milieu du siècle dans la capitale.

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Claude Lorrain Paysage pastoral 1644

1644 Huile sur toile H. 98, L. 137,

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Nicolas de LARGILLIERRE Portrait de Jean Pupil de Craponne 1708 Huile sur toile 92,5x74,8cm

Nicolas de Largillierre est considéré comme l'un des plus grands peintres du règne de Louis XIV et de la Régence. Excellent portraitiste, il aurait, dit-on, réalisé plus de mille effigies de ses contemporains. Ce goût nouveau pour le portrait résulte d'une évolution dans une société où la bourgeoisie est alors en pleine ascension.

Jean Pupil de Craponne est un gentilhomme du Lyonnais, d'âge mûr et de belle prestance. Le peintre le place devant un fond bleu-nuit dans une posture très simple: l'homme est montré à mi-corps, il regarde devant lui, tandis que son buste est orienté de biais. Son visage semble serti dans l'écrin de l'impressionnante perruque cendrée et de l'ample manteau brun- doré. Cet effet est renforcé par l'absence des mains, qu'on devine cachées sous l'étoffe. Largillière, réputé pour sa représentation fidèle du modèle, accorde à Pupil de Craponne une expression mi-sérieuse mi-amusée. L'homme nous considère avec un regard plein d'esprit.

La virtuosité de la touche, large et épaisse, la qualité des couleurs, chaudes et lumineuses, et la grande liberté de facture font de ce tableau l'un des plus brillants portraits masculins du peintre. Le musée de Grenoble possède aussi un portrait de femme et deux natures mortes également de sa main. Réalisme psychologique du modèle, variété des genres et hiérarchie, place du peintre à la cour, clientèle privée en plein développement, rôle du Salon et de l'Académie Royale de peinture et de sculpture, …

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Nicolas de LARGILLIERRE (1656-1746) Portrait de Jean Pupil de Craponne 1708

Huile sur toile 92,5x74,8cm

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François DESPORTES Animaux, fleurs et fruits 1717 - Huile sur toile, 124x231 cm

Ce tableau a été commandé par le Régent Philippe d'Orléans à François Desportes, peintre spécialiste de natures mortes, de peintures animalières et de scènes de chasse, et particulièrement doué pour le rendu des matières. Il s'agit ici d'une scène animalière dans laquelle l’observateur attentif peut également reconnaître une évocation des cinq sens. Le goût est ainsi représenté par les fruits, l'odorat par les roses et la truffe levée du chien à l'arrêt, le toucher par la texture de chaque matière et l'ouïe par la viole de gambe, le luth et les violons. Les allusions au sens de la vue se déchiffrent moins facilement. En plus du tableau en entier qui sollicite bien sûr notre regard, un symbole de la vue se cache sur la queue du paon : il s'agit des ocelles qui sont aussi appelés des "yeux". Le livre ouvert, quant à lui, fait référence au goût pour la musique de la société cultivée à laquelle s’adressait ce tableau mais permet surtout de déchiffrer une partition et de lire le chant qui lui est associé. Témoin du goût pour l'opulence sous la Régence, cette toile est un assemblage apparemment désordonné d'animaux, de fleurs et de fruits. Les différentes parties sont cependant organisées avec un sens très sûr de la composition où triomphe l'emploi des diagonales. Ce tableau, bel exemple au coloris somptueux et délicat de l'art de Desportes, est une œuvre majeure de la collection du XVIIIe siècle. Peinture animalière à tendance baroque, importance des symboles profanes, reflet des loisirs d'une élite de la société, rendu réaliste des matières …

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François DESPORTES (1661-1743) Animaux, fleurs et fruits 1717 - Huile sur toile, 124x231 cm

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James PRADIER Phryné, 1845 Marbre de Paros, traces de polychromie et d'or 1,80 x 0,50 x 0,50 m Legs de Jules Monnet-Daiguenoire en 1903

Après les années passées à Rome, de 1813 à 1819, James Pradier s'affirme comme le détenteur des valeurs classiques. S’il obtient de très nombreuses commandes publiques prestigieuses, le thème central de son oeuvre reste la figure féminine. La Phryné de 1845 démontre brillamment sa capacité d'adaptation à la modernité à travers une sensualité proche de celle exprimée par les sculpteurs romantiques. Une incertitude plane sur les origines iconographiques de cette sculpture qui semble cependant évoquer Phryné, une courtisane grecque, maîtresse de Praxitèle, accusée d'impiété devant l'Aréopage, le tribunal d'Athènes. Ce sujet demeurera longtemps un sujet de fascination pour de nombreux artistes et écrivains. Si le traitement de la draperie et des plissés reste néoclassique, l'attitude ambiguë de la courtisane à demi dénudée, ses formes pleines et suggestives témoignent d'un sensualisme et d'un réalisme puissants. L'emploi du marbre renforce la densité des formes et la rondeur des volumes et se prête à la souplesse des drapés dans un ensemble d'une grande élégance. Des traces de polychromie et d'or restent visibles, tandis que les marques de restauration et d'assemblage sont dissimulées sous la cordelette qui retient la draperie. Cette oeuvre à l'exécution impeccable répond au souci d'incarner la beauté idéale mêlée de pudeur et de réserve.

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James Pradier, 1790 -1852

Phryné, 1845 Marbre de Paros, traces de polychromie et d'or

1,80 x 0,50 x 0,50

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Gustave DORE Lac en Ecosse après l'orage 1875/1878 - huile sur toile 90x130cm

"Je suis mon propre rival, je dois effacer et tuer l'illustrateur afin qu'on ne parle de moi que comme peintre". C'est en ces termes que Gustave Doré regrette de n’avoir connu la gloire que par ses illustrations et non en tant que peintre. À sa mort, à l'âge de cinquante et un ans, il a en effet exécuté près de 200 tableaux, qui n'ont pas rencontré le succès mérité.

Lac en Écosse après l'orage est la première toile de l'artiste entrée dans un musée français de son vivant, grâce à un don. Peint à la suite d'un séjour en Écosse, ce paysage s'organise en une vision tellurique de la nature : tout semble s'animer. Les brumes s'effilochent, laissant apparaître la roche rugueuse et mouillée. Les rayons lumineux se déplacent, jouant avec la couleur des mousses. La masse imposante de la montagne avance, se déplaçant comme un énorme animal. La touche est nerveuse ; ses épaisseurs imitent la dureté des rochers et le moelleux de la végétation. La palette, réduite à des tons froids, permet des contrastes marqués d'ombre et de lumière. L'utilisation d'un gris d'aspect métallique, donne au minéral une brillance humide. Perdus dans cette nature hostile, deux oiseaux planent au-dessus du lac, seules sources de vie. Tardivement attaché à une conception romantique du paysage, et bien qu'isolé dans cette veine, Gustave Doré a signé là un tableau unanimement reconnu comme un chef-d'œuvre.

Spécificités du Romantisme, tableau comme un état d'âme…

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Gustave DORE (1832-1883) Lac en Ecosse après l'orage

1875/1878 - huile sur toile 90x130cm

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Claude MONET Coins de l'étang à Giverny 1917 - Huile sur toile 117x83cm

Cette toile a été donnée au musée par Claude Monet en 1923 pour, selon ses propres paroles, "encourager ce musée dans ses tendances modernes". Depuis 1884, l'artiste était installé à Giverny, petit village du Val de Seine, où il se passionnait pour l'aménagement de son jardin. En 1893 il avait agrandi sa parcelle et fait creuser le fameux étang aux nymphéas, terme scientifique désignant une variété de nénuphar blanc. Conçu comme un petit paradis, ce jardin d'eau comportait des plantes aquatiques variées: roseaux, iris, nénuphars... En 1895, le pont japonais vint compléter cet atelier en plein air.

L’œuvre appartient à une série de quatre études consacrées à la rive nord-est de l'étang. L’artiste s’attache à dépeindre la végétation luxuriante et les effets de la lumière sur l'eau, à travers le rideau de saules. L'absence de ciel, la grande variété des touches et l'imbrication étroite des couleurs entre elles atténuent l'effet de profondeur et créent une sensation de mise à plat de l'espace.

Claude Monet, au cours d'une carrière particulièrement longue, est certainement l'artiste qui a poussé le plus loin les limites de l'impressionnisme, au point d'être reconnu aujourd'hui comme un précurseur de l’abstraction gestuelle.

Impressionnisme, liberté de l'artiste, nouveau marché de l'art (galeries), langage plastique en lien avec la science (recherches sur la lumière et la couleur) et la modernité (sujets urbains et industrialisation), place de la photographie, influence de Monet dans l'art de la 2ème moitié du XXe ( Abstraction gestuelle) …

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Claude MONET (1840-1926) Coins de l'étang à Giverny 1917 - Huile sur toile 117x83cm

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Henri MATISSE Intérieur aux aubergines 1911 - Détrempe à la colle sur toile 212x246cm

Ce tableau est le joyau de la collection du musée de Grenoble pour le XXe siècle. Il a été offert par la famille de l'artiste en 1922. Peint en 1911, il représente l'atelier que Matisse occupait alors à Collioure. L'espace est saturé de motifs décoratifs : des fleurs à cinq pétales couvrent le sol et le mur, des arabesques se déploient sur le paravent et la nappe. Des objets sont représentés sans volume en raison de l'absence d'effets lumineux. Ce sont les couleurs qui, par leurs contrastes, engendrent la lumière, répartie de façon égale dans tout l'espace. Matisse a utilisé la détrempe à la colle. Son aspect mat et sans épaisseur ôte toute matérialité aux éléments représentés. La fenêtre qui ouvre sur un paysage sans profondeur fait penser à un tableau placé au mur. Sur la table, l'assiette de poires, la petite sculpture et le vase apparaissent dans une position stable, tandis que les aubergines semblent glisser vers le sol. Le miroir sur la gauche reflète des objets transformés, simplifiés, réduits à l'état de signes plastiques. Certains ont même disparu. Tous ces facteurs contribuent à faire de cet intérieur une surface plane, comparable à un tapis. Seule la cheminée offre une ébauche de profondeur, mais, placée contre le bord gauche du tableau, elle n'est pas montrée en entier. Des objets ont été habilement fondus dans ce décor: ils rappellent que Matisse était peintre, sculpteur et qu'il pratiquait également le dessin. Des cadres vides en attente de leur tableau sont ainsi accrochés au-dessus de la cheminée ; une petite sculpture dont le modèle a été exécuté par Matisse lui-même, repose sur la table, tandis qu'un carton à dessins vert patiente sagement contre le miroir. Simplification des formes, mise à plat de l'espace, rapport intérieur extérieur, rôle de la couleur et de la ligne…

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Henri MATISSE (1869-1954)Intérieur aux aubergines

1911 - Détrempe à la colle sur toile 212x246cm

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Albert GLEIZES Espace rythmé selon plan 1920 Peinture à la colle sur toile 355,5x274,5 cm

Le début des années 1920 représente une période charnière dans l'œuvre du peintre cubiste Albert Gleizes. Après trois années passées à New York, il opte pour une peinture ordonnant des figures géométriques en aplats, et publie un ouvrage important, Du Cubisme et des moyens de le comprendre. Il connaît alors sa première exposition individuelle et internationale à la galerie Der Sturm de Berlin.

Donné au musée en 1927 sous le titre Espace rythmé selon le plan, ce tableau est en fait l'étude d'une peinture murale pour la Gare de M(oscou) qui ne fut jamais réalisée mais n'en demeure pas moins le projet le plus ambitieux d'Albert Gleizes dans ce domaine. Il existe des études préparatoires pour cette composition, de plus petites dimensions, au pochoir et au fusain.

Hormis les quatre silhouettes humaines et les deux motifs à carreaux qui rappellent les immeubles new-yorkais, le sujet de cette œuvre est un jeu abstrait de figures découpées, aux arêtes vives, faisant contraster angles et arcs de cercle qui se juxtaposent les unes aux autres autour d'un axe dominant. Chaque couleur, chaque plan trouve son correspondant au sein de la composition. Les couleurs, rigoureusement posées en aplats, gagnent en intensité chromatique et la palette s'enrichit d'une très grande variété de bleus, de verts, de jaunes, de gris et de noirs. La matité, due à la présence de tempera, conserve à ce projet toute sa fragilité et son aspect d'esquisse.

Comme l'indique son titre, cette peinture met en évidence les possibilités dynamiques du plan. Le regard du spectateur est confronté à des cadences, à des répétitions, à des points de mesure. Il est sans cesse en mouvement et participe ainsi à ce rythme unificateur qui scande toute la surface de la toile et permet à ce vaste sujet de conserver son caractère synthétique et monumental. . Place du cubisme et caractéristiques, rôle des formes géométriques et de la couleur, rythme et cadences…

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Albert GLEIZES

Espace rythmé selon plan 1920 Peinture à la colle sur toile 355,5x274,5 cm

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Max ERNST La forêt 1927 Huile sur toile H. 80.7, L. 100

L'art de Max Ernst est l'un des plus originaux du groupe surréaliste. Après avoir été une des figures de proue du mouvement Dada, il arrive à Paris en 1920, invité par André Breton. Les tableaux et les collages de cette période jouent sur le registre des détournements de sens et des rapprochements insolites. En 1925, à Pornic, Max Ernst découvre par hasard le processus du frottage à l'aide d'une feuille de papier posée sur un vieux plancher et frottée à la mine de graphite. Selon ce principe élargi à la peinture, les toiles, placées sur des surfaces aux reliefs variés, sont recouvertes de pigment étalé au couteau, laissant apparaître les configurations du dessous (grillages, ficelles, bois...) par grattage. Le tableau intitulé La Forêt daté de 1927, a été élaboré selon cette technique. Max Ernst montre cette forêt comme une palissade impénétrable. Elle appartient à une longue série de plus de quatre-vingts exemplaires réalisés en 1927-28. Sous le pigment noir raclé au couteau affleure le motif en relief des veines du bois ainsi que les entrelacs obtenus par des ficelles posées entre les planches et la toile. Les couleurs (vert, rouge et jaune-orangé) ont été appliquées au préalable, créant par transparence de riches effets de texture. Le bleu du ciel dans la partie supérieure a été rajouté au pinceau. Le disque lunaire, dont la position en avant et en arrière des arbres constitue une aberration visuelle, confère à l'ensemble un caractère hallucinatoire que l'artiste est parvenu à maintenir tout au long de son œuvre, introduisant le spectateur dans le monde de l'inconscient et de ses mystères. Caractéristiques et place du surréalisme, recours à des procédés nouveaux (frottage, empreintes, rapprochements insolites, rayogrammes ...)

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ERNST Max La forêt

1927 Huile sur toile H. 80.7, L. 100

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François MORELLET Sphère-trames 1972 Acier inoxydable, diam. 245 cm Acquis de l'artiste en 1972

François Morellet crée en 1960, avec cinq autres artistes, une forme de création collective à travers le Groupe de Recherches d'Art Visuel (G.R.A.V.). Au cours de cette période, il abandonne pratiquement la peinture au profit de l'acier inoxydable, des ampoules électriques, des flashs, des néons…le tout activable, déclenchable, modifiable. Avec la superposition de lignes inclinées selon des angles variables (15°, 30°, 45°, 60°), il applique le principe de la trame sur le plan du tableau. Dès 1962, ce principe est adapté au volume, donnant naissance à la première Sphère-trames réalisée à l'aide de tubes d'aluminium soudés. L'œuvre du musée de Grenoble est une reproduction de l'original, d'un diamètre supérieur, exécutée en acier inoxydable. Formée d'éléments standards assemblés selon une structure orthogonale, elle transfère dans l'espace le principe de la perturbation optique. Suspendue, pouvant être animée d'une rotation, elle offre au regard une multiplicité de points de vue liés aux interférences des lignes entre elles, engendrant une sorte de réseau qui se dilate et se contracte sans fin. Refusant le principe d'immobilité de la sculpture, Morellet permet au spectateur de participer directement à l'œuvre par ses propres déplacements ou par les impulsions qui peuvent lui être données. En proposant des règles du jeu, l'artiste parvient à démystifier le rôle du créateur et le mystère de l'inspiration. Abstraction géométrique, introduction du hasard, règle du jeu, mise à mal de l'inspiration de l'artiste et de son statut, "dépersonnalisation" de la peinture…

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François Morellet, 1926 Sphère-trames, 1972

Acier inoxydable, diam. 245 cm Acquis de l'artiste en

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Pierre SOULAGES peinture avril 1985 - huile sur toile 222x628cm

Pierre Soulages explore la richesse et les ressources du noir depuis le milieu des années 1940. A partir de 1978 et dans les années suivantes, il approfondit sa démarche et réalise des peintures qui engendrent à la fois l'opacité de toute la surface et sa mutation en lumière. Le noir envahit l'espace et devient sa couleur de prédilection avec deux ensembles, les mono pigmentaires, constitués d'un noir unique, et les bi pigmentaires dans lesquels apparaît une autre couleur, le plus souvent en petites surfaces. Peinture, 222 x 628 cm, avril 1985 appartient à la série des polyptyques mono pigmentaires dont les deux tiers des œuvres sont de très grandes dimensions, toujours indiquées dans le titre, ainsi que la date d'exécution. Le noir d'ivoire est étalé en pâte épaisse à l'aide de brosses fabriquées par l'artiste, en larges gestes verticaux, horizontaux ou obliques. Il en résulte des bandes de stries qui parfois se croisent, dont la texture accroche, module et renvoie la lumière, provoquant des effets variables selon la nature de l'éclairage et le déplacement du spectateur. La juxtaposition des quatre panneaux est organisée par la continuité de certaines bandes striées qui, par leur recouvrement et leur orientation oblique, dynamisent la surface et rythment la composition. Le noir utilisé par l'artiste, qu'il nomme "outrenoir", n'est pas une non couleur mais fonctionne comme la somme de toutes les couleurs : les variations chromatiques qui en résultent éloignent cette œuvre du principe de monochrome absolu.

Place du monochrome dans l'art du XXe siècle (Malevitch, art minimal), invariants plastiques (matière, couleur, facture, lumière, composition…)

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Pierre SOULAGES (1919- )

peinture avril 1985 - huile sur toile 222x628cm

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Andy WARHOL Jacky Kennedy 1964 - Polymère synthétique et encre de sérigraphie sur toile 203,2 X 162,6 cm

Figure majeure du Pop Art américain, Andy Warhol est considéré au plan international comme un des plus grands artistes de la deuxième moitié du XXe siècle. En 1962, il adopte un procédé mécanique d'application sérigraphique sur toile qui permet l'élaboration de séries dont le motif est répété plusieurs fois (bouteilles de Coca-Cola, soupes Campbell, portraits de Marilyn Monroe…), à partir de photographies glanées dans la presse à grande diffusion.

La série consacrée à Jackie Kennedy a été réalisée dans les semaines qui suivirent l'assassinat du président Kennedy. Elle s'appuie sur les deux temps de l'événement : avant et après le drame. Avant, c'est l'image rayonnante de Jackie arrivant à Dallas, vêtue de son célèbre tailleur rose. Après, c'est Jackie en deuil durant la cérémonie des funérailles. Plus encore que l'image de l'épouse endeuillée, c'est l'image de Jackie souriante qui a valeur de symbole ici. À l'instar des portraits de Marilyn, Warhol crée une forme de vanité moderne où l'on peut lire, par-delà la beauté, la gloire ou le bonheur, les naufrages et les drames à venir.

Thématiques d'une société en changement, travail sériel, art comme une activité industrielle, délégation de l'acte créateur à d'autres personnes, questions d'authenticité dans l'art du XXe, artiste comme une machine, Warhol comme visionnaire d'une société "people", thèmes d'actualité …

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Andy WARHOL (1928-1987) Jacky Kennedy 1964 - Polymère synthétique et encre de sérigraphie sur toile 203,2 X 162,6 cm

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Tony CRAGG Horn 1981- Objets de récupération Acquis en 1988

A la fin des années 1970, Tony Cragg, pratique une esthétique du déchet fortement marquée par la vie urbaine. Il collecte des détritus qu'il assemble au sol ou au mur en de grandes compositions colorées. Horn se présente comme une accumulation d'objets variés qui ont tous été fabriqués, sauf un. Leur état évoque une décharge d'où ils auraient pu être prélevés, inventaire dérisoire d'objets déchus dont la société industrielle ne sait comment se débarrasser. En réalité, ils proviennent d'une usine désaffectée de la région lyonnaise. Les matériaux sont tout aussi divers que la nature des éléments, disposés d'une façon régulière, contraire à l'arbitraire de leur sélection. Séparés les uns des autres, ils dessinent au sol une forme de corne qui donne son titre à l'œuvre, sorte de "corne d'abondance" d'une archéologie de la vie moderne. La hauteur des objets justifie leur distribution dans l'espace, créant un effet "crescendo" qui dynamise l'installation. Leur position à même le sol favorise la proximité avec le visiteur, directement confronté à l'incongruité apparente de leur présence en ces lieux.

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Tony Cragg, 1949, Liverpool (Royaume Uni)

Horn ,1981 Objets de récupération

Acquis en 1988