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La Bataille par Ivan Gil & Frédéric Richaud, d’après le roman de Patrick Rambaud. Extrait de Casemate 46 (mars 2012)

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Page 1: par Ivan Gil & Frédéric Richaud, - Casemate

La Bataille

par Ivan Gil & Frédéric Richaud,

d’après le roman de Patrick Rambaud.

Extrait de Casemate 46 (mars 2012)

Page 2: par Ivan Gil & Frédéric Richaud, - Casemate

Que fait Napoléon sur lesbords du Danube en mai1809 ?Frédéric Richaud : Les meil-

leures troupes françaises étant embourbéesdans la guerre d’Espagne, l’archiduc Charlespasse à l’attaque. Ça ne lui réussit pas trop.Les Français prennent Vienne et se massentsur la rive droite du Danube, face aux Autri-chiens, sur la gauche.Et il n’y a plusde ponts…Plus de ponts,plus de barques,les Autrichienspratiquent la poli-tique de la terrebrûlée, donnant àNapoléon un avant-goût de la campagnede Russie. Toute l’armée impériale, dusoudard augénéral, pilleallègrement Vienne. Ça rapine et ça cambrioleà tout-va. On voit le géné-ral Masséna s’approprierune horloge de prix. Leschefs de guerre, quiont établi leurs quar-tiers généraux dansles grandspalais vien-

nois, prennent tout ce qui est à pren-dre. La Bataille montre des hommesavec leurs faiblesses, leur violence,leur méchanceté. On est loin del’image magnifiée de la grande arméenapoléonienne tirée à quatre épin-gles et respectueuse des règles. Cesont des soudards.Dont certains vont en espadrilles !

Privé de ses troupes aguerries, Napoléona réuni une armée importante, mais très dis-parate. L’argent manque, on n’a plus lesmoyens d’habiller tout le monde. Certainsvoltigeurs sont en espadrilles. D’autres vonten guenilles. Ils s’équiperont avec les vête-

ments des morts. Après chaque bataille,on récupère tout : les uniformes, lesarmes, des deux côtés. On verra un vol-tigeur, Paradis, ramasser, la nuit, les

armures des morts.Lors d’un pillage, vu comme un droit,un soldat menace de mort un officier.Est-ce crédible ?Le trait est peut-être un peu forcé, mais àpeine. Il y a une vraie promiscuité entre latroupe et l’encadrement. Depuis long-temps, ces gens se connaissent et montentau combat ensemble. Fayolle, qui défie lelieutenant-colonel Lejeune, est un person-

nage inventé, une espèce de rentre-dedansun peu fou comme il y en avait beaucoup.Il viole une morte !Cette scène, dans le roman, m’avait forte-ment impressionné. Elle ne choquera queceux qui croient au mythe de la guerre pro-pre. Des horreurs de ce genre, on peut endénombrer des milliers dans chaque conflit.On balance le corps d’un ennemi parla fenêtre !La scène montre bien la violence absolue,le mépris absolu pour la vie.Le général Molitor lance que les jeunessoldats « n’ont pas notre mépris ». Queveut-il dire ?Il évoque à la fois le mépris de sa proprevie et de sa gloire. Le mot admiration esttrop faible pour qualifier ce qu’ils ressen-tent pour leur empereur. Une absolue véné-ration. Leur vie est uniquement tournée versla guerre et la victoire. Seul compte le suc-cès militaire, la gloire de Napoléon. Per-sonne ne rechigne à suivre cet homme quiles mène à la mort.Même les hommes de troupe ?Oui. L’empereur est proche d’eux, présent

Case à case

La Bataille #1/3,Ivan Gil, Frédéric Richaud,d’après le roman de Patrick Rambaud,Dupuis, 15,50 €,16 mars.

© E

. Bon

y.

Balzac rêvait de la raconter. Patrick Rambaud* l’a fait et a décroché le Goncourt en 1997. Aujourd’hui, l’écrivain Frédéric Richaud adapte en BD cette bataille napoléonienne d’Essling qui, pour un résultat nul, fit 45 000 morts français et autrichiens. Un théâtre sanglant dont les coulisses, comme le voulait Balzac, révèlent « toutes les horreurs et toutes les beautés d’une bataille ».

Trois CASQUETTESFrédéric Richaud, 46 ans, ancien professeur de lettres, a lâché l’enseignement

pour une triple casquette. : biographe (Luc Dietrich, Boris Vian), romancier (Monsieur le Jardinier, La Ménagerie de Versailles) et scénariste de bande dessinée. S’il livre deshistoires originales comme Le Maître de peinture (dessin Michel Faure) ou La Prison(12e tome de Destins, dessin Eugenio Sicomoro), il adapte également en BD cer-taines de ses œuvres, Jean-Jacques (avec Pierre Makyo, dessin Bruno Rocco), Le

Peuple des endormis (dessin Didier Tronchet). Termine, avec Makyo, un albumsur Voltaire annoncé en juin chez Glénat. Et attend avec impatience

le retour de Tronchet des mers lointaines…

« Dans Vienne occupée, ça rapine à tout-va. Masséna s’approprie une horloge de prix… »

Frédéric RICHAUD

78

Page 3: par Ivan Gil & Frédéric Richaud, - Casemate

sur les champs de bataille. Il participe à safaçon aux combats. Lorsqu’un bouletfauche la jambe de son cheval, il faut queson état-major insiste pour qu’il se mette àl’abri. De ses hommes, il dit : « Je les tienspar le cœur. » Son passage parmi euxdéclenche des explosions de joie incroya-bles de la part d’hommes qu’il conduit àla mort. Bien sûr, tous n’ont pas le méprisde la mort qu’affichent les officiers. Lesdésertions sont nombreuses des deuxcôtés. Lorsque des Autrichiens refluent,leurs généraux leur tirent dessus pour lesrenvoyer au combat. En France, pour nepas être enrôlés, certains se cassent lesdents. Ainsi, ils ne peuvent plus déchirerle sac de poudre qui sert à remplir le fusil.Durant la guerre de 14-18, d’autres se tire-ront une balle dans la main ou le pied pouréchapper aux tranchées.Quand le courage fléchit, reste l’alcool.Dont on use et abuse. Le général Massénas’écrie : « Saoulez-moi ces foutriquets etmontrez-leur le drapeau ! » Napoléon auraune phrase terrifiante : « Monsieur le maré-chal, combien d’hommes avons-nous àdépenser ? » Dépenser… Ce sont despièces qu’on déplace et qu’on sacrifie.Ça va être un carnage.Trois morts à la seconde pendant les 30heures de combat qui s’étalent sur troisjours. On compte, en gros, cinq blesséspour un mort… C’est à cette époque qu’oncommence à s’occuper des blessés sur leschamps de bataille. Un chirurgien de laGrande Armée, Dominique-Jean Larrey, a

lancé les premières ambulances chirurgi-cales permettant de soigner les blessés surplace. Mais, la plupart du temps, on lesentasse sur des charrettes et en route pourles infirmeries.Quels soins peut-on leur prodiguer ?Un seul, l’amputation. Sans anesthésie. Lar-rey était célèbre pour couper un membreen une minute. Avec lui, on souffrait moinslongtemps. Il fallait décider vite qui on allaittenter de sauver. La colonne des blessésétait interminable. Cette folie d’hommesobligés d’agir dans l’urgence se retrouvaità tous les niveaux de l’armée. Les corps-à-corps sont-ils fréquents ?Fréquents et effrayants. Chaque affronte-ment commence pour un bombardementpuis c’est l’assaut. Nous montrons unecharge de cavalerie autrichienne. En face,les Français plantent la crosse de leurs fusilsdans le sol et tiennent bien haut leurs baïon-nettes sur lesquelles viennent s’empaler leschevaux. Et c’est le corps-à-corps. Labataille d’Essling préfigure la guerre future.Verdun sera Essling à la puissance mille.L’affrontement dans un chemin creuxest terrifiant et fascinant !C’est ce que voulait montrer Balzac, qui,un temps, a pensé raconter cette bataille.Il rêvait de nous « initier à toutes les hor-

reurs, toutes les beautés d’un champ debataille ». Il avait raison. Je me suis surprisà raconter avec plaisir cet univers d’une vio-lence inouïe. L’être humain est fasciné parl’esthétique de la guerre, l’uniforme, le sang.Les civils, du haut des murs de Vienne,contemplent le combat comme un spec-tacle. Les généraux, tenant les premiersrôles, ne peuvent décemment déchoir. Ungénéral blessé demande à ce qu’on lemaintienne sur son cheval pour ne pas déses-pérer ses hommes. Tomber serait du plusmauvais effet. Il faut tenir jusqu’à la fin dela représentation. Ensuite, on aura tout letemps de mourir.Votre Napoléon a l’œil méchant et lelangage d’un soudard.Il peut se révéler extrêmement méchant etvulgaire. Son langage est celui d’un mili-taire, ordurier. Il écorche les noms propres.Cavalier maladroit, il tombe régulièrement,mais ne veut pas que cela se sache.Le lieutenant-colonel Lejeune, lui, estun artiste.Ces officiers n’étaient pas que des soudards.Lejeune a introduit l’estampe en France.Beau, extrêmement cultivé, il écrit bien etc’est un excellent dessinateur. Mais aussi unhomme de guerre. Masséna, comme d’au-tres, est homme d’excellente culture. Cequi ne l’empêche pas d’être prêt à toutesles horreurs sur un champ de bataille.Ces hommes, dans leurs uniformes,avaient une sacrée gueule !Le dessinateur Michel Faure m’a fait décou-vrir, à La Défense, le salon des nostalgiques

79Suite page suivante

« Napoléon a une phrase terrifiante : Maréchal,combien d’hommes avons-nous à dépenser ? »

Frédéric RICHAUD

Page 4: par Ivan Gil & Frédéric Richaud, - Casemate

de l’Empire. Certains vouent encore à l’em-pereur une admiration incroyable. On endécouvre certains habillés en grognards,chaussés de bottes à talons immenses, por-tant des chapeaux tout en hauteur commeles Queen’s Guards de Buckingham. Ainsiéquipés, ils dépassent allègrement les deuxmètres. Imaginez la terreur que leur vuedevait déclencher parmi la population etles armées plus faibles !Revenons à la bataille. Quelle est la stra-tégie de Napoléon ?Appliquer un plan qui doit convaincre l’ar-chiduc Charles que, lui, l’empereur, estdevenu fou. Pour cela, il fait construire deuxponts flottants, un immense jusqu’à l’île deLobau, l’autre, moins long, de l’île à la bergetenue par les Autrichiens. 30 000 Françaistraversent, investissent deux villages. Cestroupes s’étalent de l’un à l’autre, le dos aufleuve, bien fragiles. Les Autrichiens ne résis-tent pas à la tentation et attaquent. Napo-léon n’attend que cela pour faire traverser

le gros de ses troupes – 60 000 hommes –et prendre le dessus.Ça marche ?Ça rate, car les Autrichiens lancent, en amontdu fleuve, des barques chargées de pierresqui démantèlent les ponts flottants. LesFrançais ont bien tendu des chaînes en tra-vers du fleuve, mais c’est insuffisant. D’au-tant que, pour en finir, les Autrichiens char-gent un moulin en bois sur quelquesbateaux, l’enflamment et envoient ce brû-lot sur l’ouvrage français. Piégeant les Français sur la rive gauche ! Masséna, Molitor, Lannes – qui y laissera sapeau – tiennent les villages et ne cèdentpas. Masséna réclame des boulets pourses canons. L’empereur lui fait répondre

qu’il doit se débrouiller jusqu’au lende-main, le temps que les ponts soient réta-blis. Masséna répond : « Alors nous nousbattrons avec des bâtons. » Et il tient.Comment se termine cette bataille ?Par un match nul, chacun se retrouvant sursa berge. Pertes : 24 000 tués du côté autri-chien, 21 000 du côté français. Sur l’île deLobau, Napoléon semble perdu. Que faire ?Rester, lécher ses plaies ou se retirer ? Ildemande conseil au général Masséna qu’iltutoie et appelle André. « Tu es mon seulami, le seul qui ne me ment pas. Que dois-je faire ? » Masséna propose de transfor-mer l’île de Lobau en petite ville en atten-dant l’arrivée d’armées françaises, dont celled’Italie. Et ensuite de reprendre l’offensive.Les Autrichiens vont laisser faire ?Eux aussi pansent leurs plaies, eux aussiattendent des renforts. C’est un momentd’Histoire extrêmement fascinant. Les ren-forts français arrivent. En septembre, Napo-léon reprend l’offensive et balaie les troupesde l’archiduc. C’est la bataille de Wagram.L’Empire est à son apogée. Moins de 3 ansplus tard, Napoléon lancera près de700 000 hommes dans la terrible et funestecampagne de Russie…Allez-vous abandonner cette périodeà la fin de ce triptyque ?Pas sûr. J’ai très envie de suivre Lejeunedurant les guerres napoléoniennes sui-vantes. Et il y a d’autres œuvres de PatrickRambaud sur cette époque, aussi pas-sionnantes, même si elles n’ont pas décro-ché le Goncourt ! Il neigeait, sur la cam-pagne de Russie, L’Absent sur l’exil à l’îled’Elbe, Le Chat botté se déroulant dans leParis d’avant l’Empire…

Propos recueillis par Jean-Pierre FUÉRI* Interviewé dans Casemate 45 pour sa Cin-quième chronique du règne de Nicolas 1er.

80

Case à case

Illu

stra

tion

s ©

Dup

uis

2012

.

« Masséna réclame des boulets. Il n’y en a plus. Tantpis, lance-t-il, nous nous battrons avec des bâtons ! »

Frédéric RICHAUD

Page 5: par Ivan Gil & Frédéric Richaud, - Casemate

Case à case

81

© D

upui

s 20

12.

Suite page suivante

La Bataille #1/3, page 49.

COUPS DE CHANCEIvan Gil : Ma pré

sence sur

cette séri

e, ma pre

mière

bande de

ssinée, es

t due à

une série

de coups

de chan

ce.

En 2007,

à Angoul

ême,

je passe d

e longues

heures

à faire la

queue p

our

montrer,

sans résul

tat,

mes illust

rations à

tous les

éditeurs...

sauf à D

upuis.

Espagnol

ignorant d

u marché

franco-be

lge, j’étai

s persuad

é

que cet é

diteur ne

publiait

que des B

D pour enf

ants.

Le lendem

ain, je vo

is, dans

la queue

devant D

upuis,

un garçon

avec qui j

’ai

sympathis

é la veille

. On

discute, l

a queue

avance et

je me ret

rouve sur

le stand

Dupuis. Et

là, miracle

, mon

travail int

éresse un

certain

José-Lou

is Bocquet

. Un an

après, il m

’offre la

chance de

participer

à un tes

t pour “La

Bataille”.

Et je sui

s choisi.

ESPAGNOLS OU FRANÇAIS…J’ad

ore l’histo

ire militai

re,

la stratég

ie et les

wargames

.

L’époque

napoléonie

nne

en est rem

plie. L’Es

pagne

y a sa p

lace, mêm

e si

mes comp

atriotes

n’en garde

nt pas

un excelle

nt souveni

r.

Mais, avec

du recul,

on compre

nd que le

s

hommes so

nt les mê

mes

partout. P

artisans

ou soldats

, ils sont

entraînés

par la

folie de le

ur époque

et s’affr

ontent av

ec

la même

bravoure.

LE PIRE ENNEMILa d

ocumenta

tion est l

e

pire ennem

i de l’espr

it

créatif. C

ette époqu

e

est lointa

ine dans

le

temps, ma

is proche

par

son image

, car tout

, des

uniformes

aux briq

uets,

a été rép

ertorié. J

’ai

passé deu

x mois à

regarder f

ilms et

documenta

ires – à lire

livres d’Hi

stoire et

bandes de

ssinées su

r le

sujet. Et

puis, nouv

eau

miracle, es

t paru un

livre sur l

a bataille

d’Essling,

vite deven

u

ma bible.

Page 6: par Ivan Gil & Frédéric Richaud, - Casemate

PEAU DE LÉOPARDIvan Gil : Admirez le tapis de

selle de l’o

fficier. C

’est une

peau de

léopard. L

es officie

rs

en raffola

ient. Aujo

urd’hui,

des fanas

de recon

stitutions

historique

s achètent

ou

fabriquen

t des uni

formes à

l’ancienne.

D’une varié

té folle,

ceux de l’é

poque nap

oléonienne

sont parti

culièremen

t prisés.

Même si j’a

i travaillé

auparavan

t pour le

petit

monde de

s soldats

de plomb

qui m’a in

oculé l’am

our des

uniformes

, mon scén

ariste

est très c

lair : je n

e dois

pas deven

ir esclave

des

équipemen

ts. Ça tom

be bien,

car je les

préfère p

as trop

rutilants.

J’essaye

de rendre

mes solda

ts réels, s

ales, ave

c

des unifor

mes abîm

és ou

incomplets

. On s’hab

ille comme

on peut, e

n compléta

nt son

équipemen

t avec de

s élément

s

d’autres r

égiments,

ou pris

sur l’enne

mi mort o

u blessé.

VISEZ L’ÉCHARPENon, l’

écharpe v

iolette de

Masséna ne

fait pas

partie

de l’équipe

ment de

base

d’un génér

al d’Empi

re. Il vou

s

faudra lir

e l’histoire

pour

en connaît

re l’origine

. Disons

qu’elle doi

t beaucou

p à la

personnali

té de l’ho

mme de

confiance

de Napolé

on.

ÉCLAIRAGEÀ pro

pos de cou

leur, trouv

er le

bon coloris

te fut u

n exercice

difficile.

Jusqu’au

test

magnifiqu

e et impre

ssionnant

d’Albertin

e Ralenti.

Elle

a trouvé l

a palette

qu’il

fallait po

ur rehaus

ser,

rendre for

midableme

nt riche

cette hist

oire si ad

ulte, si

historique

, si noire

. Je l’ai

aidée pour

les lumiè

res et les

ombres, lo

rsque celle

s-ci se

révélaient

indispensa

bles pour

rendre plu

s lisibles

certaines

planches q

ui devenai

ent

difficiles

tant elles

étaient

remplies d

e personna

ges.

CHEVAL DE RETOURJe d

essine les

chevaux

depuis l’â

ge de 4

ou 5 ans

.

Pourtant,

il reste to

ujours

des choses

à amélio

rer. Pour

moi, ils so

nt (presqu

e) une

récréation

: je les

dessine

sans référ

ence obligé

e.

Très agréa

ble.

Case à case

82

© D

upui

s 20

12.

La Bataille #1/3, page 50.

Page 7: par Ivan Gil & Frédéric Richaud, - Casemate

BOULET, OÙ ES-TU ?Ivan Gil : Belle scène, non ? Sa

compositio

n, point p

ar point,

est l’œuvr

e de Fré

déric

Richaud. T

oujours tr

ès précis,

très clair.

Ce ne f

ut pas u

ne

des cases

les plus d

ifficiles.

Des personn

ages figés

,

un cheval,

l’empereu

r... et

beaucoup

de fun !

Personne

ne compre

nd tout d

e suite

qu’un boul

et vient d

e casser

une jamb

e du chev

al de

l’empereur

avant d

’emporter

au moins

deux tête

s de

grenadiers

. D’où vient

le

boulet ? O

ù est-il a

llé ?

Regardez

bien, vous

le verrez

.

Je suis i

ncapable

de vous

dire comb

ien de tem

ps m’a

pris cette

image. J

e travaille

toujours s

ur plusieu

rs planch

es

à la fois

et passe

d’une case

à l’autre

selon mon

humeur.

UN PEU À L’OUESTAprè

s avoir vu

des films

et des ta

bleaux, lu

le livre

de Patric

k Rambau

d, j’avais

bien en tê

te mon N

apoléon.

Un homme

expressi

f, dur,

très italie

n, un peu

en marge

de la réal

ité après

avoir

été un géa

nt penda

nt tant

d’années.

Pour lui, c

omme

pour les a

utres pers

onnages

historique

s, j’ai réa

lisé

beaucoup

d’ébauches

avant

de me sen

tir à l’ais

e. C’était

évidemmen

t beaucou

p plus

facile av

ec les per

sonnages

imaginair

es !

À LA MAINJe t

ravaille en

traditionn

el,

au crayon

, feutre,

marqueur,

pinceaux

etc. Et le

s

correction

s sous Ph

otoshop. J

e

dessine pa

rfois sous

Photosho

p

ou Painter

, mais ra

rement,

me senta

nt plus à

l’aise av

ec

une feuil

le de pap

ier à dess

in

devant m

oi. J’ai d

éjà bien

avancé m

on travail

sur le

tome 2 et

je travai

lle sur

le story-b

oard du t

ome 3.

Les lecte

urs n’atte

ndront pa

s

trop... À p

art les sa

medis

matins où

j’enseign

e et

quelques p

iges d’illu

stration

ou de conc

ept desig

n, je

consacre t

out mon te

mps

à “La Bat

aille”.

Case à case

83

© D

upui

s 20

12.

Suite page suivante

La Bataille #1/3, page 51.

Page 8: par Ivan Gil & Frédéric Richaud, - Casemate

S’EN IMPRÉGNER Ivan Gil : Une scène debata

ille, mais

statique

.

Chacun su

r ses posi

tions.

Après avo

ir lu le sc

ript, je

dessine d

e petits s

tory-

boards pou

r que le s

cript

devienne p

our moi un

monde

réel. Je m

’imprègne

de

l’atmosphè

re des scè

nes qui

m’appara

issent, je

cherche

ma docu.

Puis je dé

coupe sur

un petit

format e

t l’envoie

pour aval

à Frédéri

c.

MON PRÉFÉRÉVous

découvrez

Paradis,

le soldat

rouquin en

blanc.

Mon personn

age préfé

ré, un

jeune cam

pagnard

qui n’a

pas les y

eux dans

sa poche

.

Embrigad

é dans un

combat

qui le dé

passe, il p

ourrait

être vous

ou moi. I

l est très

facile de

s’identif

ier à lui,

de le com

prendre, d

’avoir peu

r

quand il

a peur. I

l souffre

quand les

chevaux

dévastent

un champ

de blé mû

r. Il

comprend

que le sil

ence des

oiseaux si

gnifie qu

e l’ennemi

approche.

AU BISTROTJ’aim

e réaliser

les premiè

res

étapes de

mon trav

ail dans

un bar. D

essiner m

es story-

boards dev

ant un b

on café.

Je retour

ne dans

ma cave

pour la m

ise au ne

t. Je

n’aime pa

s trop la

solitude,

peut-être

, un jour,

irai-je

travailler

en studio.

Cela doit

vous stimu

ler la créa

tion.

PRÊT À CONTINUEROn n

’en est pa

s encore là

,

mais, apr

ès cette t

rilogie,

j’adorerai

s continue

r à

travailler

avec Fréd

éric

sur les a

utres œuv

res

napoléonie

nnes de R

ambaud,

ou sur aut

re chose d

e

similaire. J

e me sens

paré.

Ce ne fu

t pas tou

jours le

cas. Je m

e revois h

ésitant

sur mon st

yle, mes in

fluences

allant du

manga a

u comic. O

u

devant re

prendre de

fond en

comble de

s pages d

éjà finies

parce que

Frédéric

et moi

venions de

déceler d

es erreurs

de docum

entation.

Aujourd’h

ui,

tout ça m

e paraît

à la fois

très proch

e et très

lointain.

J’ai 33 a

ns et je v

iens

de donner

à Casem

ate ma

première

interview

d’auteur

de bande

dessinée

!

Case à case

84

La Bataille #1/3, page 52.

© D

upui

s 20

12.