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2 Actu 4 AgendA 5 colloque Acfos 9 evolution de la prise en charge au cours des dernières décennies 6 par le Dr lucien moaTTi implantation cochléaire pédiatrique au royaume-uni en 2012 9 par le Pr Gerard o’DonoGHue résultats spécifiques de l’implant avant l’âge de 2 ans 14 par le Pr michel monDain L’enquête de Génération Cochlée 19 par nathalie ClaVieR sciences Les capacités verbales et visuo spatiales en mémoire de travail chez les enfants implantés 23 par Stéphanie PouyaT-HouÉe PédAgogie Les ateliers de décodage 29 par noëllie WeiSS livres 32 PArcours de vie Le témoignage d’aurélie 33 S S o o m m m m a a i i r r e e S o m m m a i S o m m i r e m a r e C onnaissanCes s urdités 11 rue de Clichy 75009 Paris Courriel : [email protected] revue trimestrielle Édité par aCFos action connaissance formation pour la surdité 11 rue de Clichy 75009 Paris Tél. 09 50 24 27 87 / Fax. 01 48 74 14 01 Site web : www.acfos.org directrice de la publication Pr Françoise Denoyelle rédactrice en chef Coraline CoPPin Courriel : [email protected] Comité de rédaction : Denise BuSqueT, Vincent CouloiGneR, Joëlle FRançoiS, nathalie laFleuR, V. l-C, aude de lamaze, Ginette maRlin, lucien moaTTi, isabelle PRanG, Philippe SÉRo-Guillaume Couverture : DSmB 25 rue de la Brèche aux loups 75012 Paris Tél./Fax. 01 43 40 19 58 Courriel : [email protected] Maquette : Coraline CoPPin impression : aCCenT ToniC 45-47 rue de Buzenval 75020 Paris n° CPPaP : 1112 G 82020 issn : 1635-3439 Vente au numéro : 12 abonnement annuel : 40 La reproduction totale ou La reproduction totale ou partielle des articles contenus partielle des articles contenus dans la présente revue est dans la présente revue est interdite sans l’autorisation interdite sans l’autorisation d’ACFOS d’ACFOS

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Actu 4

AgendA 5

colloque Acfos 9

evolution de la prise en chargeau cours des dernières décennies 6par le Dr lucien moaTTi

implantation cochléaire pédiatriqueau royaume-uni en 2012 9par le Pr Gerard o’DonoGHue

résultats spécifiques de l’implantavant l’âge de 2 ans 14par le Pr michel monDain

L’enquête de Génération Cochlée 19par nathalie ClaVieR

sciences

Les capacités verbales et visuo spatiales enmémoire de travail chez les enfants implantés 23

par Stéphanie PouyaT-HouÉe

PédAgogie

Les ateliers de décodage 29par noëllie WeiSS

livres 32

PArcours de vie

Le témoignage d’aurélie 33

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ConnaissanCes surdités

11 rue de Clichy75009 ParisCourriel : [email protected]

revue trimestrielle

Édité par aCFosaction connaissance formation pour lasurdité11 rue de Clichy 75009 ParisTél. 09 50 24 27 87 / Fax. 01 48 74 14 01

Site web : www.acfos.org

directrice de la publicationPr Françoise Denoyelle

rédactrice en chefCoraline CoPPin

Courriel : [email protected]

Comité de rédaction : DeniseBuSqueT, VincentCouloiGneR, Joëlle FRançoiS,nathalie laFleuR, V. l-C, audede lamaze, Ginette maRlin,lucien moaTTi, isabelle PRanG,Philippe SÉRo-Guillaume

Couverture : DSmB25 rue de la Brèche aux loups 75012 ParisTél./Fax. 01 43 40 19 58Courriel : [email protected]

Maquette : Coraline CoPPin

impression : aCCenT ToniC45-47 rue de Buzenval75020 Paris

n° CPPaP : 1112 G 82020

issn : 1635-3439

Vente au numéro : 12 €

abonnement annuel : 40 €

La reproduction totale ouLa reproduction totale oupartielle des articles contenuspartielle des articles contenusdans la présente revue estdans la présente revue estinterdite sans l’autorisationinterdite sans l’autorisationd’ACFOSd’ACFOS

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°39 3

ééditor ia ld itor ia lPar Françoise denoyeLLePar Françoise denoyeLLePrésidente

CChers lecteurs,

Ce numéro 39 est le premier de l’année 2012 etnous vous remercions encore pour votre soutienet votre fidélité. au cours de cette année nouspublierons les conférences du colloque acfos 9des 13 et 14 janvier dernier consacré à “l’im-plant cochléaire pédiatrique. etat des lieux etperspectives”. la publication des interventionssur les numéros courants de la revue permet uneédition plus rapide que des actes séparés, nousespérons que cette formule vous conviendra.

Comme toujours vous retrouverez égalementdans la revue des rubriques variées : pédagogie,psychologie, portraits, livres, actus... n’hésitezpas à nous écrire et à nous faire part de vos com-mentaires, remarques, souhaits... il est égale-ment possible de nous proposer un article à desfins de publication, il vous suffit pour cela d’é-crire à acfos, le comité de rédaction examineraensuite votre proposition.

Je profite également de ce premier numéro del’année 2012 pour féliciter et encourager lecomité de rédaction à poursuivre son travail.Cette revue n’existe que grâce à leur mobilisationenthousiaste et bénévole, et bien souvent chro-nophage.

Je terminerai cet éditorial en vous donnantquelques nouvelles du dépistage néonatal de lasurdité : les programmes s’étendent en Francemalgré l’absence de loi et il est urgent de lescoordonner : il est probable que le dépistage semettra en place avec une coordination par lesagences Régionales de Santé mais l’approchedes élections présidentielles empêche d’avoir unevision à moyen terme. nous vous donnons ren-dez-vous dans quelques mois pour plus d’informations. vv

AActuctu

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°394

A paraître...

le livret “troubles del’équilibre chezl’enfant” édité par acfossera disponible courantavril.

Vous trouverez toutesles informations sur sadiffusion sur notre sitewww.acfos.org

Vient de paraître...

“au fil des regards et descaresses...”livre de bord pourparents d’un tout petitbébé atteint de déficienceauditive (présentationd’ortho Edition).

“l’accompagnement”pluridisciplinaire proposéaux parents d’un toutpetit bébé atteint de défi-cience auditive génère

bien souvent en eux un sentiment préjudiciabled’incompétence.

Sentiment d’incompétence face à une situationinattendue, douloureuse, qui retentit sur leséchanges relationnels avec leur bébé, ébranle l’é-quilibre familial, perturbe l’organisation de leurvie quotidienne et nécessite l’intervention de “spé-cialistes”.

Sentiment d’incompétence mêlé d’un sentimentde dépendance à l’égard de “professionnels” déten-teurs d’un certain savoir.

Cet ouvrage a pour but de rassurer les parents, deles encourager, de stimuler leurs compétences, leurcréativité relationnelle, de leur démontrer pour-quoi et comment ils restent les artisans irrem-plaçables du développement psycho-moteur,psycho-affectif, cognitif et langagier de leur bébé.Ce petit être en devenir n’a-t-il pas essentiellement

besoin de tendresse, de sourires, de regards, decaresses pour entrer en communication avec sonentourage, s’épanouir, exploiter toutes ses poten-tialités, faire germer son langage ?

Dans une présentation originale, ce “livre debord” très pragmatique s’appuie sur les étapes-clés du développement d’un tout petit bébé (0-18mois) pour affûter l’observation des parents,suggérer des attitudes adaptées, proposer des sti-mulations multisensorielles et notamment audi-tives, à intégrer tout naturellement dans les actesde soins quotidiens et les routines interactives.

il sert de lien entre ce qui est vécu dans le huis closfamilial et l’équipe pluridisciplinaire, tout parti-culièrement l’orthophoniste, chargée de les accom-pagner sur les chemins d’un projet éducatifaudio-phonatoire étayé de supports visuo-gestuels.

Cet ouvrage sera aussi très utile à tout profession-nel susceptible d’intervenir auprès d’un tout petitbébé sourd et de sa famille.

Mars 2012, 176 p., 34 €ortho Edition 76-78 rue Jean jaurès 62300 IsberguesT. 03 21 61 94 94 - f. 03 21 61 94 95site : www.orthoedition.com

les actes de la 11ème

journée d'études deRamSeS “Françoisedolto et les sourds. His-toire, transmission etactualité” sont mainte-nant disponibles.

Prix adhérent : 18 €Prix non-adhérent : 25 €RaMsEschez Danièle azéma, 20 rue Littré 75006 Parissite : http://ramses.asso.fr/

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°39 5

AAgendAgendA

FOCuS

De nouvelles formations profession-nelles ACFOS sont proposées pour lapremière fois en 2012 :

ww FP3 : de la communication à la construction dela langue chez l’enfant sourdintervenants : annie Blum (orthophoniste,Psychothérapeute), Philippe SÉRo-Guillaume (linguiste, interprète en lSF),marta ToRReS (orthophoniste)dates : 31 mai et 1er juin 2012Lieu : Paris

ww FP4 : indications, réalisation pratique et résul-tats des explorations objectives des voies auditivesen 2012 intervenants : Didier BouCCaRa (oRl),Jacques leman (oRl)dates : 04 et 05 juin 2012Lieu : Paris

ww FP7 : L’accompagnement des parents dans larééducation orthophonique de l’enfant et de l’ado-lescent sourd. aptitudes et qualités de l’ortho-phonisteintervenante : Patricia CHaPuy, (Psychana-liste), Chantal DeSCouRTieux (orthopho-niste), isabelle leGenDRe (orthophoniste)dates :03 et 04 décembre 2012Lieu : Paris

Journées d’études Acfos :

ww etre jeune et sourd à l’ère d’internet : impactdes ntiC sur l’insertion socioprofessionnelledates :09 et 10 novembre 2012Lieu : Paris

Retrouvez toutes nos manifestationssur notre site www.acfos.org

MAiS AuSSi ...

ww FnsF : 26ème Congrès national “Quel patri-moine transmettre aux jeunes sourds”dates : 19 mai 2012Lieu : Parissite : http://fnsf.org

ww Centre Comprendre et Parler : L’accompagne-ment de l’enfant sourd et de sa famille : une dyna-mique multidisciplinaire en mouvementdates : 1er et 02 juin 2012Lieu : Bruxellessite : www.ccpasbl.be

ww BiaP : 47ème Convention dates : 27 april - 1er mai 2012Lieu : mercure Hotel, Berlin, allemagnesite : www.biap.org

ww Xiiie colloque de l’association internationalede Psychomécanique du langage : Perspectivespsychomécaniques sur le langage et son acquisi-tiondates : du 20 au 22 juin 2012Lieu : naples (université oreintale), italieCourriel : [email protected]

ww semaine d’amitié entre les adolescents sourdseuropéensdate : 22 juin 2012Contact : [email protected]

ww sForL et sFa : Congrès les 13, 14 et 15 octobre2012Lieu : Parissite : www.sforl.org ;http://sfaudiologie.fr/

ww Gers : Journée d’étude “accès à la langue, laculture et la citoyenneté”dates : 22 novembre 2012Lieu : université de nanterre, Parissite : www.gers-biling.net/

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°396

ccolloqueolloque AcfoSAcfoS 99

evolution de la prise en charge desevolution de la prise en charge dessurdités profondes au cours dessurdités profondes au cours desdernières décenniesdernières décenniesDR luCien moaTTi

Ce 9ème colloque d’ACFOS a obtenu un grand succès. Plus de 400 participants ont répondu

à notre appel et assisté deux jours durant à des exposés passionnants, dont ceux de nos

collègues venus de l’étranger (Espagne, Angleterre, Etats-Unis). Nous avons eu le plaisir

d’accueillir de nombreuses familles d’enfants ou de personnes sourdes (l’accessibilité était

assurée par la vélotypie et les interprètes en LSF que nous remercions) implantées ou

non, et professionnels (médicaux, éducateurs, enseignants) ainsi que d’autres personnes

impliquées à plus d’un titre.

Ce public a su apprécier les exposés d’une qualité professionnelle exceptionnelle et qui

visaient autant que possible à l’objectivité scientifique.

Notre revue “Connaissances Surdités” a décidé de publier l’intégralité des textes des

communications et des débats dans ses quatre prochains numéros en les fractionnant

comme lors des quatre demi-journées du colloque.

Les conférences de la première demi journée vous sont présentées ici. Avec le survol de “la

prise en charge au cours des dernières décennies”, et des enquêtes d’origines très diverses

sur les résultats à long terme des enfants implantés. “L’accompagnement, de l’enfant et sa

famille”, “quelques cas particuliers”, et “Les perspectives d’évolution” viendront ensuite.

Nous vous en souhaitons une bonne lecture.

cce colloque d’Acfos est consacré à l’implantcochléaire pédiatrique. ce choix est justifié en rai-son de l’actualité et des questions que pose cette

méthode, de son développement dans notre pays, et dugrand nombre des membres de notre association quien ont une connaissance approfondie sur tous les plans.

ils ont donc été en mesure d’élaborer le programmequi vous est soumis et d’en proposer certaines descommunications.

si, aujourd’hui, en ouverture de ce colloque Acfos2012 j’ai la tâche de vous parler de l’évolution des idéesen matière de surdité profonde au cours de ces der-nières décennies c’est que j’ai eu le privilège de les avoirvu se dérouler, sous mes yeux, depuis 45 ans, commeun long fleuve, pas toujours tranquille.

J’ai été, en tant que praticien de terrain, au contactpresque quotidien des enfants sourds et leurs familles.en tant que médecin orl audiophonologiste mais éga-lement comme médecin directeur, j’avais pour res-

ponsabilité de répondre aux questions des familles,questions que l’état des connaissances à l’époque ren-daient alors si souvent sans réponses.

cependant, avant d’aborder la question de l’évolutiondes idées en général, il me faut préciser que, pour moi,personnellement, cette période fut marquée tout aulong par la si difficile tâche dévolue au médecin audio-phonologiste chargé des premières investigations : cellede l’annonce du diagnostic à une famille, dans la plupartdes cas si peu préparée aux investigations en cours, àla surdité en général et celle de l’enfant en particulier,aux conséquences de cette surdité, et à la premièrequestion qu’ils posent : “parlera-t-il ?”

cette annonce qui est le premier acte d’éducation pré-coce, restera gravée à jamais dans la mémoire de cesparents si peu préparés. il aura fallu être franc, clair,ni lénifiant, ni pessimiste, disponible le temps nécessairesur l’instant et dans la suite. et cela n’a pas changédepuis.

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°39 7

evolution de la prise en chargeevolution de la prise en charge

le début de cette aventure se situe pour moi aux alen-tours de 1965 dans un service hospitalier d’orl àParis, dirigé par le docteur charles eyriès qui avait dixans auparavant réalisé la première implantationcochléaire au monde1. Aussi surprenant que cela puisseparaître cette conjonction n’était que fortuite : M. eyrièsavait totalement occulté cette période de sa vie, et moi-même était trop jeune orl pour pouvoir le convaincrede reprendre l’aventure, ni même de réaliser vraimentl’intérêt de cette méthode. la motivation essentielle quiémergeait était la nécessité de réagir devant ce quinous paraîssait comme un contre-sens : attendrel’âge de 6 ans pour commencer l’éducation des enfantssourds dans un établissement spécialisé.

déjà nos aînés proposaient de commencer plus tôt l’é-ducation, rédigeaient des ouvrages traitant de cesnotions, et des exemples montraient que des cas par-ticuliers d’enfants avaient déjà bénéficié d’une éduca-tion précoce. Mais rien n’était organisé tant sur le plandu diagnostic que sur celui de l’éducation, que ce soitdans le public ou dans le privé, comme si la démocra-tisation de l’éducation n’était pas proposée auxenfants sourds.

l’idée de l’importance de l’éducation précoce destinéeà ces enfants n’avait pas encore pris le courant dufleuve général… et surtout, aucuneligne directrice ne se dessinait, bienque certains auteurs en aientparlé depuis plus d’un siècle.

dans le milieu des années 60, nousavons démarré notre action,poussés, soutenus, guidés, aidéspar des aînés conscients de cettesituation et prêts à nous en donner les moyens. nousconnaissions tous des enfants dont l’éducation avaitdébuté vers l’âge de 4 ou même 6 ans, mal ou pasappareillés (l’appareillage ne se concevant qu’après unelongue période d’éducation).

nous étions donc quelques uns qui espérions alors quepar une éducation auditive précoce, par un apport pré-coce de la lecture labiale, et surtout un apprentissageprécoce de la parole nous parviendrons à une “nor-malisation” de ces enfants.

en fait, par l’appareillage précoce, par le bain de langagefamilial et social (l’intégration en crèche puis en mater-nelle), par les sollicitations permanentes pour inciter àla formation du mot (en bannissant, à l’époque, gesteset mimiques) nous agissions sur la parole beaucoupplus que sur le langage. il s’agissait d’un travail de répé-tition de phonèmes et de mots plus ou moins contrai-gnant. finalement c’était une action sur les “déficits”

dans le but de réduire le symptôme apparent mais pasencore une action en profondeur2.

nous tentions de répondre à la toute première ques-tion que posaient les parents dès l’annonce du dia-gnostic “est-ce qu’il parlera ?”. en fait, nous étions dansla continuité de la “démutisation”, dans l’attente des pre-miers mots rassurants mais nous n’avions pasencore une action sur le langage. la vraie “bataille pourla communication” n’avait pas encore commencé…

dans un deuxième temps, à la lumière d’une meilleureconnaissance du développement psycho-moteur de l’en-fant entendant, mais aussi de celle des retards parfoisrencontrés dans celui des enfants sourds, nous avonspu élaborer une approche plus globale de l’éducationprécoce, en se basant sur les possibilités extra-verbalesde l’enfant et en insistant sur son développement cogni-tif et sensoriel. il s’agissait, par une action moins contrai-gnante sur la parole mais tout aussi active, de tendrevers une appétence pour le langage. nous écrivionsalors dans un texte collectif que : “le projet actuel metla priorité sur le développement de la compréhension,l’élaboration de la pensée, le respect de la dimensionrelationnelle pour aider l’enfant à s’approprier le langagepour une communication véritable”...

de plus, le rôle des parents à l’égard de l’enfant et notrerôle à leur égard s’est précisé, confirmé, renforcé3.

le sens du courant a continué d’avancer et nous aapporté l’audiométrie objective (electro-encéphalo-graphique, electrocochléographique, potentiels évoquésprécoces du tronc cérébral), qui ne remplacera en rienl’audiométrie subjective, seul véritable examen cliniquede l’enfant sourd, même le plus petit. Mais ceci a per-mis alors d’assurer un diagnostic juste et fiable, indis-pensable pour la sécurité de l’appareillage des pluspetits.

A cette même période, en 1971, le congrès mondialdes sourds ainsi que quelques missionnaires (souventparmi des parents impliqués) nous ramenaient à lalangue des signes. c’est également dans ces années-là (vers 1967) qu’apparaissait le cued speech quideviendra la lfPc. ces deux éléments vont enrichirconsidérablement les aides proposées et donc les pers-

Cette annonce qui est le premier acted’éducation précoce, restera gravée à

jamais dans la mémoire de ces parents si peupréparés“”

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°398

pectives d’orientation pour nos enfants, tout enapportant aux personnes se consacrant à l’éducationdes enfants sourds des tourbillons de nouveautés per-turbant considérablement la tranquillité du long fleuvese déroulant sous nos yeux. il n’est bien sûr pas ques-tion pour moi aujourd’hui d’entrer dans le débat, ce n’estpas le lieu et ce n’est pas mon domaine. Mais il est fortdommage que le débat sur le rôle et la place de la lsf,de la lfPc, etc. ait manqué de sérénité, faussé par dessectarismes de toutes sortes et de tous bords, dont lesenfants sourds et les familles auraient pu faire l’économie.

la langue des signes et la lfPc prenant progressive-ment leur place dans notre pays, la scolarité s’en esttrouvée profondément modifiée par l’ouverture des éta-blissements classiques à un enseignement allant versle modernisme, vers le monde extérieur.

Parallèlement la notion “d’intégration scolaire” desenfants sourds dans des classes ordinaires s’est déve-loppée avec comme impératif de lutter contre les “inté-grations sauvages” sans soutien adapté qui sont desplus néfastes pour les enfants.`

la dernière étape du fil de l’eau nous amène enfin à l’im-plantation cochléaire qui apportera également son lotde tourbillons non négligeables, mais aussi de progrèspour “permettre aux sourds de s’exprimer de vive voix”comme le souhaitait l’Abbé de l’epée dans un ouvrageen 1776 (institution des sourds et muets par la voiedes signes méthodiques, Paris, 1976, P. 155)4.

cette implantation, dont M. eyriès avait eu l’inspirationen 1957, revient des etats-unis vers la fin des années60 et commence alors à se développer en france.nous en reparlerons ces deux jours durant. les débutsde l’implantation furent entre les mains de collègues chi-rurgiens (loins des préoccupations audiophonolo-giques) et des ingénieurs, ce qui entraîna des incom-préhensions fort préjudiciables à une acceptationsereine de ce progrès incontestable.

en 1974 j’écrivais pour le revue de l’AnPedA5 (Asso-ciation des parents d’enfants sourds) que l’indication

d’une telle implantation se concevrait chez l’enfant,quand on aura eu la preuve de la valeur exacte de la dis-crimination obtenue, que l’on aura réussi une minia-turisation satisfaisante, fait la preuve de sa toléranceabsolue, de sa supériorité par rapport aux prothèsesconventionnelles, et surtout que les problèmes finan-ciers auront été réglés.

on peut espérer que ces deux jours de débats appor-teront tous les apaisements que nous attendionsalors. vv

Dr Lucien MoaTTI, oRL-Phoniatre

BibliographieBibliographie

1. Djourno a, eyriès C, ‘Vallencien B. “De l’exci-tation électrique du nerf cochléaire chez l’homme,par induction à distance, à l’aide d’un micro-bobi-nage inclus à demeure”, CR de la Société de biolo-gie 423-4, 9 mars 1957.

2. moatti. et coll “exposé de notre travail du Centreexpérimental d’audiophonologie infantile”, in “la surdité du premier age”, Colloque interna-tional de Besançon nov1969, editions Campo-novo/Besançon.

3. moatti l., P. Dussutour, Jean lillo, ChristineSchmelk, marianne Veyradier et coll. “l’éduca-tion précoce de l’enfant sourd”, p. 35, 41., in “actesdu colloque international organisé par la ministèrede l’education nationale” 11 et 12 octobre 1983.(CnDP 29 rue d’ulm 75230 Paris Cedex).

4. abbé de l’epée, “l’institution des sourds etmuets par la voie des signes méthodiques”, Paris,1776, p. 155.

5. moatti l., “l’implantation cochléaire”, RevueCommuniquer de l’association de parents d’en-fants déficients auditif (anPeDa), 1974, n° 19, pp24-29.

evolution de la prise en chargeevolution de la prise en charge

nous tentions de répondreà la toute première question

que posaient les parents dèsl’annonce du diagnostic Est-cequ’il parlera ?

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°39 9

een comparaison avec les décennies précédentes,nous pourrions dire que nous vivons actuellementdans “la meilleure époque connue” au niveau de

la surdité. c’est en effet “la meilleure époque” pour êtresourd profond, c’est “la meilleure époque” pour êtreparent d’un enfant sourd profond et aussi pour être unprofessionnel qui s’occupe d’un enfant sourd profond.

il n’y a pas si longtemps, en 1974, paraîssait le premierlivre sur la surdité chez l’enfant, devenu un classiquemaintenant. A l’époque, il y avait très peu de choses àoffrir à un enfant sourd : le diagnostic était tardif et lesappareils auditifs primitifs. Au niveau de l’éducation,l’espérance ou l’attente éducative des éducateurs vis-à-vis des enfants était très faible, ce qui était dramatiquepour eux. l’implant cochléaire n’existait pas encore. lasurdité intéressait peu, aucune politique de santépublique n’était proposée au royaume-uni, l’importancesocio-économique de la surdité dans notre vie étaitnégligée.

Mais tout cela a changé.

Au niveau technique, nous avons à présent à notre dis-position un choix important de prothèses mais égale-ment des prothèses implantables.

Beaucoup de choses ont donc changé au niveau tech-nologique, mais certains aspects restent les mêmes.Pour les parents, la colère et le chagrin sont toujoursprésents lors de l’annonce d’un diagnostic de pour leurenfant. Pour eux, c’est la première fois qu’ils sontconfrontés à la surdité mais pour nous professionnels,la situation est différente d’il y a 40 ans.

Je voudrais insister sur le fait qu’il n’y a pas de familletypique, qu’il n’y a pas de parents typiques. J’avais parexemple en face de moi la semaine dernière deuxparents sourds profonds de naissance qui communi-quaient en langue des signes et étaient implantés.dans cette famille, et c’est incroyable, 6 personnes sontimplantées. leurs enfants sont bilingues, bien évi-demment. vous pouvez donc rencontrer tous les casde figure.

il faut également rappeler que la fréquence des troublesassociés reste la même : un tiers des enfants sourdsprofonds ont des difficultés spécifiques. les années pas-sent mais ce nombre reste inchangé.

l’importance des contacts, du soutien entre parentsreste très importante au niveau de la communication,du transfert émotionnel et des informations.

les parents, bien sûr, veulent toujours faire du mieuxpossible pour leur enfant. Mais c’est souvent très dif-ficile parce que les avis et les conseils des profession-nels sont parfois contradictoires : tous sont sincèresmais leurs avis peuvent être très divergents, même surdes points fondamentaux.

enfin, aujourd’hui, comme auparavant, l’accès aux ser-vices de qualité n’est pas toujours évident. des solutions(techniques, humaines, financières) existent maiselles ne sont pas toujours accessibles à tous.

les changements des 40 dernières années sont doncindéniables, mais certaines choses demeurent malgrétout identiques, quelles que soient les époques.

Je voudrais aborder à présent la question de la neu-robiologie de la surdité : les résultats à long terme, laplasticité du cerveau ainsi que l’importance de l’im-plantation précoce. en Angleterre, l’implantation bilaté-rale est pratiquée depuis quelques années. Je vais vousen présenter un état des lieux.

implantation pédiatrique au Royaumeimplantation pédiatrique au Royaumeuni en 2012 uni en 2012 

PaR le PR GeRaRD o’DonoGHue*

ccolloqueolloque AcfoSAcfoS 99

Prothèses classiques

Prothèses implantables

nous avons la chance d’avoir un système auditifmagni-fique au niveau technique :nous disposons d’un outil trèscomplexe. nous possédons quelques milliers de cellulesinternes proches des voies centrales auditives, quitransmettent les informations auditives au cerveau.

en cas de de surdité, c’est évidemment complètementdifférent. il y a une perte massive de cellules ciliées. cen’est pas seulement important au niveau de lacochlée, mais également au niveau des voies cen-trales : on constate une diminution importante dessynapses.

sur ce schéma n°1, nous pouvons observer la qualitédes synapses au microscope chez une personne enten-dante.

sur le schéma n°2, on constate que le nombre decontacts a diminué chez une personne sourde.

l’organisation des aires auditives dans le cerveau estcomplètement modifiée en cas de surdité. lesrecherches effectuées au niveau du développement ducerveau nous ont permis de comprendre qu’il faut uti-liser notre système sensoriel le plus tôt possible dansla vie faute de quoi ses capacités sont perdues défini-tivement. ce que je pourrai résumer par la formule “useit or lose it” !

Mais avant l’apparition des implantations cochléaires,il n’était pas possible d’accéder aux voies centralesparce qu’il n’y avait pas de cellules ciliées.

la surdité a aussi des impacts importants sur des fonc-tions cognitives autres que l’audition et notamment surla mémoire de travail. Je reviendrai sur ce point trèsimportant.

des travaux sur le développement des centres auditifsont été réalisés. on a fait des coupes du cerveau enfonction de l’âge et on a regardé la densité des pointsde contact dans le cerveau.

A l’âge de six mois, on constate qu’il y a davantage deconnexions qu’à la naissance. A deux ans, c’est encoreplus dense, mais à six ans il y en a moins. les travauxde Huttenlocher (schéma 4) montrent donc quequelque chose se passe entre deux et six ans ; lenombre de synapses diminue progressivement. or, l’ap-prentissage d’une langue demande une capacité de cal-cul très importante. c’est pourquoi il est nécessaire d’of-frir des stimulations très précoces à l’enfant si l’on veutoptimiser le système de mise en place du langage : il fautintervenir quand le cerveau est encore sensible, adaptable.

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°3910

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les implants cochléaires peuvent-ils influencer ces élé-ments dans le cerveau? de nombreuses études ont étéréalisées dans ce sens.

il y a une bonne corrélation entre la cochlée et le cor-tex chez les personnes entendantes. cette corrélationdisparait en cas de surdité, mais elle peut être réactivéepar une stimulation électrique.

l’imagerie cérébrale fonctionnelle permet de mettreen évidence les zones d’activation cérébrales normaleschez l’homme, lors des stimulations auditives.

chez le sujet sourd profond implanté précocement,nous pouvons voir que ces zones ne sont pas exacte-ment semblables mais qu’elles sont peu différentes. Aucontraire, chez les sujets implantés très tard, les zonesd’activation ne sont pas du tout celles qui sont nor-malement liées à l’audition.

Marc Marschark a voulu voir s’il y avait une différenceau niveau du cerveau entre les enfants entendants etles personnes implantées très jeunes. il a réalisé uneétude en prenant des groupes d’enfant équivalents, dumême âge. il a réalisé plusieurs tests, basés sur l’ap-prentissage, la mémoire, la vitesse de traitement, l’or-ganisation et beaucoup d’autres tâches (cf livre “deafcognition, fondations and outcomes (perspectives ondeafness)”, 2008).

les résultats ont montré qu’il y avait bien une différenceentre le groupe d’enfants entendants et celui d’enfantsimplantés. les enfants implantés atteignent presque lemême niveau, mais les résultats des entendants sont,en moyenne, meilleurs.

carole flexer considère que la prothèse n’est qu’un outilpour accéder au cerveau. il est essentiel de com-prendre que ce n’est pas ce que nous entendons quiest important, mais ce que nous faisons avec ce quenous entendons.

dans les faits, un enfant entendant entend 46 millionsde mots avant l’âge de quatre ans (Hart and risley).Pour apprendre à lire, il faut y consacrer 20 000heures (dehaene). c’est long !

or un enfant sourd, même implanté, qui conserve unecertaine surdité, a besoin d’entendre 3 fois un mot ouun concept nouveau pour l’apprendre (Pittman). ima-ginez la quantité que cela représente ! les travaux deHuttenlocher et dabholkar (1997, J comp neurol387:167-178) revêtent une grande importance surcette question : ils ont montré à quel point il faut d’é-normes capacités de calcul pour entendre 46 millionsde mots. il en est de même pour la lecture, 20 000heures de lecture. il faut donc stimuler le cerveau dèsle plus jeune âge, quand il est adapté à l’apprentissagedu langage. Plus tard, les résultats ne seront pas lesmêmes.

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de plus, les enfants sourds ont besoin d’être dans desconditions acoustiques favorables à l’école, dans lesclasses ou à la maison.

L’implantation cochléaire précoce est donc un atoutmajeur.

en Angleterre un système de dépistage universel a étémis en place. Avant la mise en place de ce dépistage,l’âge moyen à l’appareillage était de deux ans. A présent,l’enfant reçoit ses appareils auditifs dans les premiersmois de sa vie. de très nombreuses recherches mon-trent à quel point une intervention précoce est primordiale.

des études classiques ont également montré que si l’in-tervention a lieu dans les six premiers mois de l’enfant,celui-ci peut atteindre un niveau de langage normal sison niveau cognitif est normal. Par contre, si les capa-cités cognitives de l’enfant sont déficientes ou s’il a destroubles associés, le niveau normal ne sera jamaisatteint.

l’âge à l’implantation s’est amélioré entre 2000 et2010. la plupart des enfants sont implantés lors deleur deuxième année.

si on implante très précocement, les bénéfices sontimportants, mais il est important de rappeler que le dia-gnostic de surdité doit être aussi précis que possible.les mesures électrophysiologiques sont indispensablesmais, même aujourd’hui, les tests doivent être réaliséspar des équipes bien habituées à l’implant chez desenfants jeunes.

L’implantation bilatérale

J’ai été heureux d’apprendre que la Haute Autorité desanté a accepté d’en proposer également en france.

en Allemagne, la pratique de l’implantation bilatérale acommencé après l’an 2000. Maintenant, le nombred’implantés bilatéraux est assez incroyable.

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en 2005, tant en france qu’en Angleterre le nombred’implants bilatéraux était faible.

en Angleterre, c’est en 2009 que notre Haute Autoritéde santé a accepté de financer les implants bilatéraux.c’est pourquoi leur nombre a beaucoup augmenté bienque que le système de santé anglais soit beaucoupmoins généreux que le système français. les adultesn’ont accès qu’à un seul implant, sauf s’ils sont aveuglesou dans des cas particuliers. Pour les enfants enrevanche, on propose des implants bilatéraux simultanés.

en Angleterre, un audit de toutes les équipes d’im-plantation (quinze environ) a été mis en place. nousavons décidé de standardiser les tests pratiqués parles différentes équipes et d’utiliser les mêmes équipe-ments. ce fut un travail assez long à mettre en placecar comme en france, les orthophonistes utilisent diffé-rentes évaluations.

Même si c’est difficile, il est très important à mon sensde réaliser des études à long terme pour savoir exac-tement ce qu’apporte l’implantation bilatérale à l’enfant.Pour l’instant, nous avons mille cas et nous com-mençons à écrire notre rapport pour notre Haute Auto-rité de santé. ces études prendront des années, maisce travail est très important.

d’autres études sont également en cours. en Alle-magne, par exemple, l’implant cochléaire est proposédans certains cas de surdité unilatérale de l’adulte pourremplacer le cross Aid qui est le traitement habituel.nous verrons dans deux ans s’il y a vraiment un béné-fice dans les cas de surdité unilatérale.

Bien évidemment, les bons résultats à long terme sup-posent la mise en place de beaucoup de paramètreset ne dépendent pas uniquement de la technologie.

un certain nombre de conditions doivent être réuniessi l’on veut proposer un soutien efficace de l’enfant etde sa famille :

ww le diagnostic doit absolument être clair et précis,ww il faut mettre en place un appareillage ou un implantcochléaire,ww le système éducatif doit être de qualité. si on a untrès bon implant ou appareil auditif, mais que l’école estmauvaise, les résultats ne seront pas les mêmes,ww le personnel d’accompagnement doit être bienformé, non seulement au niveau du diagnostic maisaussi au niveau de la prise en charge des enfantssourds,ww les services et le système d’information doivent êtreaccessibles pour toutes les familles, qu’elles soientaisées ou défavorisées,ww les informations données par les professionnels etles pratiques mises en place doivent être étayées pardes études prospectives validées. on ne peut se conten-ter d’opinions qui ne sont pas fondées scientifiquement.ww il faut qu’une bonne politique de santé publique, quise préoccupe de la surdité, soit mise en place.

l’avancée technologique n’est donc pas la chose la plusimportante.

Gerard o’DoNoGHUE, oRL, Nottingham,Royaume-Uni

* cet article est réalisé sur la base de la transcription despropos oraux tenus lors du colloque acfos 9. Toutes leserreurs ou inexactitudes sont de notre fait.

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ll ’acquisition du langage oral par un enfant déficientauditif congénital dépend :

1. de la précocité et de la qualité de la réhabilitation ducanal auditif, complété si besoin d’un canal extra-audi-tif, d’une rééducation et/ou d’une éducation adaptée,

2. de l’existence ou non de problèmes neurologiques(touchant la construction langagière de l’enfant) ou psy-chiatriques associés, et

3. de la qualité de l’investissement familial.

l’implant cochléaire est l’appareillage de référence pro-posé pour redonner une audition utile à un enfant défi-cient auditif profond bilatéral, mais il n’est qu’un des élé-ments de la prise en charge de l’enfant. comme préciséci-dessus, la précocité de la prise en charge influencela qualité du langage oral à l’âge adulte. Mais quelle pré-cocité? implanter à trois ans était précoce il y a 20 ans,implanter à deux ans était précoce il y a 10 ans, etactuellement, en l’absence de gain prothétique, uneimplantation vers 12 mois est proposée.

le but de ce travail est de présenter à la fois des casindividuels d’enfant implantés précocement, maisaussi une étude statistique publiée en 2010, et des fra-tries d’enfants implantés à des âges différents pour dis-cuter l’intérêt d’une implantation précoce.

exeMPle d’enfAnts iMPlAntésAvAnt l’âge de 12 Mois

le tableau 1 présente l’évolution de deux enfants : n.,implanté à 12 mois, et s. implantée à 14 mois. le pre-mier a une surdité génétique isolée, la seconde a une

surdité due à une méningite à pneumocoque. cesenfants ont tous deux été implantés en 2005 et ontactuellement six ans et demi.

A l’âge de 6 ans, les 2 enfants sont en cP et ont 5 ansd’implantation. leur perception auditive est bonne, ilssont capables de discriminer les voyelles et lesconsonnes, de répéter correctement les mots avec uneou deux syllabes, avec lecture labiale, et à voix nue. leurniveau de langue est satisfaisant. on constate sur ces2 enfants que la précocité de l’implantation a permisde bonnes perceptions (mais c’est également le cas sion implante plus tard), mais surtout une belle parole.en revanche, ils ont un niveau de lexique non compa-rable à celui des normo-entendants du même âge, maisqui reste de bonne qualité.

Tableau 1 : résultats en terme de perception auditive,de production du langage chez deux enfants implantés

Résultats spécifiques de l’implantRésultats spécifiques de l’implantcochléaire dans la populationcochléaire dans la populationd’enfants implantés avant l’âge ded’enfants implantés avant l’âge dedeux ansdeux ans

miCHel monDain, alain uziel, CaTHeRine BlanCHeT, FRançoiSe aRTièReS,aDRienne Vieu, maRTine Sillon, anniCk BaSTin, naDJma Galzi, JulielaBoueSSe, DelPHine eSPiTalieR, DÉPaRTemenT D’oRl - CHu monTPellieR

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résultats spécifiques de l’implant avant 2 ansrésultats spécifiques de l’implant avant 2 ans

avant l’âge de deux ans. (sir : échelle d’intelligibilité dela parole : 1 correspond à une parole inintelligible, 5 àune parole comprise par tout le monde sans effort –eviP : inventaire lexical calibré en âge – ces deux enfantsgardent un petit retard par rapport à la norme desenfants normo-entendants).

que nous APPrennent les étudesstAtistiques ?

nous avons étudié un certain nombre d’enfants (74),parmi lesquels certains avaient été implantés avantl’âge de 2 ans (32), et nous les avons comparés à desenfants implantés entre 2 et 3 ans, entre 3 et 4 anspuis entre 4 et 5 ans (1).

Tableau 2 : données descriptives des populations d’en-fants comparés.

les enfants implantés précocement pour l’époque del’étude (avant 2 ans) avaient en moyenne une perte de102 dB. les enfants implantés plus tard avaient para-doxalement un meilleur gain, c’est peut-être pourquoiils ont un peu attendu.

la perception auditive des enfants est présentée dansle tableau 3. fort logiquement, on constate que desenfants implantés avant l’âge de 2 ans entendent forcé-ment mieux qu’un enfant qui n’a pas eu d’implant. ils ontappris depuis plus longtemps à reconnaître et à utili-ser une audition, la période de déprivation a été moinslongue. on constate que ces capacités vont croître avecle temps : un an après, on est passé à 80 % de motscorrectement compris. Mais nous n’arrivons jamais à100 %. comme on le sait, l’implant permet une res-tauration d’un canal auditif, mais pas une restitution adintegrum. les enfants implantés entre 3 et 4 ans vontavoir la même progression.

retarder une implantation au-delà de 18 mois ou de 2ans fait que l’on laisse l’enfant dans un état de dépri-vation de stimulation auditive pendant un, deux ans deplus. certes, l’enfant qui sera implanté plus tard va sedévelopper et va comprendre plus de choses (sauf sila restauration du canal auditif intervient à un momenttardif où la plasticité de son cerveau n’est plus la même).Mais les enfants implantés plus tard, à l’âge de 7 ou 8ans ou 9 ans, n’auront pas les mêmes performancesen termes de capacité de reconnaissance d’un mes-sage sonore par rapport à un enfant implanté tôt. l’en-fant ne pourra jamais avoir un résultat comparable àcelui qu’il aurait eu s’il avait été implanté précocement.

Tableau 3 : evolution et comparaison des perceptionauditives en fonction de l’âge d’implantation (en % demots bisyllabiques correctement perçus en fonction dutemps) ; (groupe 1 : enfants implantés avant 2 ans,groupe 2 : enfants implantés entre 2 et 3 ans, groupe3 : enfants implantés entre 3 et 4 ans, groupe4 : enfants implantés entre 4 et 5 ans).

les éléments sont encore plus flagrants en ce quiconcerne la qualité de la parole (voir échelle de not-tingham cotée de 1 à 5) - (tableau 4 et 5). en cas d’im-plantation précoce, donc de restitution précoce du canalauditif, on constate une réelle progression de l’enfant : ilest intelligible vis-à-vis de son environnement (ses petitscopains, de sa famille) beaucoup plus tôt. quand lesenfants rentrent au cP, on constate certes une grandevariabilité individuelle mais ils ont tous une parole intelligible.

La perception auditive bissyllabiques dans le silence -Lo

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Tableau 4 : evolution de l’intelligibilité de la parole pro-duite par l’enfant en fonction du temps et de son âgelors de l’implantation (groupe 1 :enfants implantés avant2 ans, groupe 2 : enfants implantés entre 2 et 3 ans,groupe 3 : enfants implantés entre 3 et 4 ans, groupe4 : enfants implantés entre 4 et 5 ans).

Tableau 5 : influence de l’âge d’implantation sur l’intel-ligibilité de la parole produite par l’enfant. Plus l’im-plantation est précoce, plus intelligible est la parole.

concernant le niveau de langage apprécié par le stocklexical de l’enfant, le niveau de langue n’est pas com-parable à celui d’un normo-entendant. A l’âge de 8 ans,le niveau de langue est in fine moins bon, tant sur l’ex-pression orale que sur le lexique. l’enfant implanté pré-cocement a lui un meilleur niveau de vocabulaire et unemeilleure parole. le versant expressif est évalué sur l’é-chelle de Marie-thérèse lenormand. la constructionlangagière de l’enfant implanté précocement est diffé-rente, dès la maternelle, en regard de l’enfant

implanté plus tardivement, ce qui est plus confortablepour l’enfant et sa famille. les choses peuvent se rat-traper avec le temps, sauf si l’implantation a eu lieu au-delà de l’âge de 4 ans.

Tableau 6 : evolution du niveau de lexique des enfantsen fonction du temps et en fonction de l’âge d’implan-tation.

Tableau 7 : evolution du niveau de langage sur le versantexpressif en utilisant l’échelle de Marie-thérèse lenor-mand, en fonction de l’âge de l’enfant et de l’âge d’im-plantation. l’implantation précoce permet à l’enfant deprofiter une expression plus aisée le plus tôt possible.Mais une implantation tardive au-delà de 4 ans com-promet cette évolution.

intelligibilité de la parole produite : SiR

(de 1 à 5)

Evolution du niveau du lexique avec le temps

selon l’âge lors de l’iC

Evolution du niveau de langage – sur le ver-

sant expressif – échelle de MTL – évolution

avec les temps dans les différents groupes

intelligibilité de la parole produite (SiR)

à 7 ans en fonction de l’âge lors de l’iC

résultats spécifiques de l’implant avant 2 ansrésultats spécifiques de l’implant avant 2 ans

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Pour compléter ces données dans le silence, nous pré-sentons quelques résultats sur la perception dans lebruit, ce qui cadre plus avec la vie quotidienne desenfants (une école maternelle, forcément bruyante parexemple).

cette étude a été réalisée par Adrienne vieu etconcerne 2 groupes d’enfants ayant une duréemoyenne d’implantation de 4 ans. les implantationssont toutes unilatérales, et on compare un groupe de9 enfants implantés avant 18 mois, et un groupe d’en-fants implantés entre 2 et 3 ans. les enfantsimplantés tôt ont une meilleure discrimination dans lebruit (voir tableau 8).

Tableau 8 : Perception de phrases émises à 65 dB dansle bruit (s/n ratio + 10dB). les enfants implantés avantl’âge de 18 mois perçoivent mieux dans le silence maissurtout dans le bruit.

en conclusion, on peut résumer et affirmer au moinsqu’une implantation précoce permet une diminution dela période de déprivation auditive, et apporte un meilleurconfort dans le bruit.

etude de cAs fAMiliAux

si on veut être très simple, la qualité d’acquisition dulangage oral est influencée par trois paramètres (2,3) :ww la qualité et la précocité de la restauration du canal

auditif, celui étant complété de modes de communi-cation extra-auditifs si besoin ;ww l’absence de problèmes neurologiques ou psychia-triques associés ;ww la qualité de la stimulation au quotidien faite par lafamille (et non par les professionnels qui eux, n’élèventpas les enfants).

il nous a donc semblé intéressant de pouvoir étudierdes enfants ayant un niveau de stimulation familiale iden-tique et une prise en charge par des professionnels per-mettant la comparaison, avec des déficiences auditivesidentiques, et avec des pathologies associées éven-tuelles comparables. Pour cela nous nous sommes inté-ressés à des fratries.

B. et e. (tableau 9) sont frère et sœur et ont un syn-drome d’usher de type 1. B., le garçon a été implantéà 36 mois, e. sa sœur à 6 mois. ils ont actuellement 13et 7 ans. les comparaisons sont un peu difficiles à fairecar ils sont nés à l’époque où l’on commençait à béné-ficier de l’implant bilatéral dans les syndromes de usher.A l’âge de 3 ans, il est évident que B. n’avait pas de per-ception, alors qu’e. a très rapidement développé uneperception auditive de qualité puisqu’elle a étéimplantée très tôt. A l’âge de 3 ans, B. a un niveau deproduction de la parole et une intelligibilité de la paroleperçue moindre que sa sœur.

A l’âge de 6 ans, les 2 enfants ne diffèrent pas beau-coup en termes de qualité de lexique. Mais leur parolereste significativement différente. e. a une compré-hension sans lecture labiale de 86 %. elle est capablede répéter 82 mots/minute. elle a un accès à l’humour.elle utilise le téléphone.

Tableau 9 : evolution d’un frère implanté à l’âge de 3ans et de sa sœur implantée à 6 mois. les progrès sontplus rapides, et in fine la parole de meilleure qualité. lelangage est satisfaisant chez ces deux enfants.

dans le tableau 10, deux sœurs implantée une à 1,4an (f) et la seconde à 9 mois (M). seule une évaluationcomparative est disponible à 4 ans : M. implantée à 9mois a une perception meilleure que sa sœur, et parlemieux.

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Tableau 10 : comparaison de deux sœurs implantéestôt dans le cadre d’une déficience auditive profonde liéeà un syndrome de Waardenburg. M. évolue plus vite quesa sœur.

dans le tableau 11, il s’agit de triplés grand prématurés.Mat. garçon, et Mar. sa sœur sont nés en 2003. le3ème n’a pas de surdité.

le garçon Mat. a eu un implant cochléaire très tôt. 18mois de vie correspondent à 15 mois en âge corrigé.sa sœur Mar. a été implantée à 30 mois, ce qui repré-sente 26 mois en âge corrigé. Marie avait un bon gainprothétique avant implantation et elle a été implantéedevant l’absence de progression langagière malgré cebon gain prothétique (surdité moins profonde que sonfrère).

A l’âge de 3 ans, Mat., implanté le plus tôt, parlait mieuxet avait une meilleure perception auditive, (60 % versus42 %). idem à l’âge de 6 ans, en termes de perceptionauditive et d’intelligibilité de la parole. A âge comparable,Mat. a un niveau de langage oral, apprécié par l’elo surla partie réceptive qui est correct. il a 12 mois d’avancepar rapport à sa sœur. lorsque l’on juge de sa capa-cité à répéter, il est un peu meilleur que sa sœur.

donc même famille, même étiologie, même stimulation,mais paradoxalement le frère avec un surdité plus pro-fonde que sa sœur évolue mieux en raison d’une implan-tation plus précoce.

Tableau 11 : evolution de deux jumeaux (faux), Mat.implanté à 18 mois et Mar. implantée à 30 mois en rai-son d’une surdité moins profonde que son frère avecgain prothétique satisfaisant en tonale. Mat. évoluemieux avec la même étiologie de surdité (sfA : souf-france fœtale aiguë, PM : prématurité), la même sti-mulation familiale (de qualité).

Avant de conclure, nous voudrions dire que l’âge n’in-fluence pas le pourcentage de complications chirurgi-cales suite à l’implantation.

conclusion

Pour conclure, tous les résultats concordent sur le faitqu’il y a un bénéfice à avoir une prise en charge audio-logique de qualité la plus précoce possible. cela permetd’avoir une perception auditive plus précoce, d’acqué-rir très tôt les étapes de pré-langage et les étapes d’ac-quisition langagière. dix ans après, ces étapes sont nor-malisées, mais cela joue sur la qualité de la parole quiest bien meilleure, ainsi que sur la qualité de vie, qui estun élément plus difficile à quantifier.

Pour mettre en place ces conditions favorables à uneprise en charge précoce, il est nécessaire de passerpar un dépistage, néonatal ou autre, mais en tout casle plus précoce possible. la coordination entre lesréseaux de prise en charge des enfants avant l’âge de12 mois est indispensable. Bien sûr, ceci ne résout pasles problèmes associés, et chaque enfant resteunique. vv

Pr Michel MoNDaIN, oRL,cHU de Montpellier

RéférencesRéférences :

1. artières F , Vieu a, mondain m, uziel a, , VenailF: impact of early cochlear implantation on the lin-guistic development of the deaf child, otol neuro-tol., 2009,30 (6):736-42.

2. yoshinaga-itano C., Sedey al, Coulter Dk,mehl al : language of early and later-identifiedchildren with hearing loss, Pediatrics, 1998, 102 (5):1161-1171.

3. moeller mP, early intervention and languagedevelopment in children who are deaf and hard ofhearing, Pediatrics, 2000, 106 (3), e43.

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PPour pouvoir se faire le représentant des parentset de leurs enfants implantés, il est nécessairede bien connaître leurs situations et leurs

besoins. c’est pour cela que génération cochlée conduittous les deux ans depuis 1999 une enquête à desti-nation de tous les enfants implantés en france, portantsur le quotidien et focalisant sur leur scolarité.

l’enquête a été réalisée auprès de nos adhérents, parenvoi en décembre 2010 d’un questionnaire papier,dont nous avons dépouillé et analysé les retours en2011. 380 réponses ont été recueillies. nous avonsdonc un très bon taux de réponse de nos adhérents,de 50 % ; mais au-delà de cela, on estime la populationdes enfants implantés à 4 500, ce qui signifie que lesrésultats de notre enquête représentent donc près de10 % de la population globale. en termes statistiquesc’est significatif.

Profil de l’écHAntillon AnAlYsé

Age des enfants : suivi longitudinal sur les 6 enquêtes

la classe 4-12 ans est prépondérante dans lesréponses à notre enquête, mais elle l’est de moins enmoins. elle se fait à la fois “grignoter” par les moins de4 ans, qui en 1999 étaient plus rares à êtreimplantés ; et de l’autre côté par les plus de 13 ans quisont de plus en plus représentés (ce sont les 4-12 ansde 1999 devenus grands).

la répartition géographique de notre échantillon est lereflet de celle de nos adhérents. notre association étaità l’origine francilienne, 52 % des réponses proviennentdonc de Paris et sa banlieue, suivi par le quart nord-ouest avec un tiers des réponses. Mais nous retrou-vons des réponses de toute la france, y compris lesdom-tom.

l’iMPlAntAtion

Lieu et âge d’implantation

A la question “dans quel centre votre enfant a étéimplanté”, nos adhérents ont répondu pour 73 % unhôpital parisien (dont 55 % à trousseau et 18 % àrobert debré). or seulement 50 % des familles inter-rogées habitent la région parisienne. si certainesfamilles ont pu déménager en régions après l’implan-tation de leur enfant, ce chiffre s’explique certainementplus par l’attractivité des très gros centres d’implan-tation pour lesquels les parents sont prêts à parcou-rir des kilomètres.

Age de dépistage des enfants

il s’agit d’une donnée évidemment très importante,puisque l’un des critères d’une implantation réussie estlié à la précocité du dépistage et de l’implant. si on com-pare cette enquête et la précédente réalisée en 2009,on voit se dessiner un mouvement : sur un échantillonrestreint aux enfants de moins de 10 ans au momentde l’enquête, on constate que l’âge moyen de dépistage

l’enquête scolarité de Générationl’enquête scolarité de GénérationCochléeCochlée

Génération Cochlée est une association de parents dont les enfants sont sourds et porteurs

d’implants cochléaires. L’association existe depuis 1996 ;au départ centrée sur l’Ile-de-

France, elle est aujourd’hui d’envergure nationale et regroupe plus de 800 adhérents, tout

en restant exclusivement portée par des bénévoles. L’association se fixe comme missions

d’accueillir et informer les parents, de représenter leurs intérêts et de favoriser les

échanges entre eux. Pour cela, nous proposons aux parents une assurance pour l’implant

de leur enfant. Nous les sensibilisons via nos plaquettes d’information, notre journal

trimestriel d’information “La p’tite cochlée”, et des week-ends d’information organisés

tous les 2 à 3 ans.

PaR naTHalie ClaVieR

figure 1

ccolloqueolloque AcfoSAcfoS 99

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enquête scolarité et vie quotidienneenquête scolarité et vie quotidienne

est passé de 16 mois (c’est trop) à 14 mois (un peumieux mais toujours trop). cette baisse peut s’expliqueren partie par quelques familles qui ont bénéficié dudépistage précoce (moins d’une dizaine) mais leschiffres montrent que c’est loin d’être suffisant.

Age d’implantation des enfants

dans l’échantillon des enfants étudiés, le dépistage amené à l’implantation. si l’âge de dépistage a un peu évo-lué, qu’en est-il de l’implantation ?

sur ce graphique (fig. 2) sont présentés le nombre d’en-fants implantés à l’âge de 1 an, 2 ans… sont repré-sentées l’enquête actuelle, comparée à l’enquête de2007, soit 4 ans d’écart. on voit sans ambiguïté un glis-sement de l’âge d’implantation : le pic en 2007 était à3 ans, en 2011 il a glissé à 2 ans. si on se focalise surnotre population la plus jeune, c’est-à-dire les enfantsnés après 2007, on arrive à un âge moyen d’implan-tation à 18 mois.

cette moyenne nécessite toutefois de prendre desréserves sur le fait que cette classe d’âge n’est pascomplète dans notre échantillon, puisque des enfantsdétectés tardivement ne peuvent pas encore êtreimplantés à l’âge de 3 ans et demi.

lA scolArité

Préalable

nous avons simplifié les modes de scolarisation desenfants sourds suivant 3 catégories, que l’on peutretrouver sur le schéma suivant (fig. 3) :

l’enfant peut être scolarisé : soit comme un enfantentendant, dans une classe ordinaire, soit au sein del’education nationale, dans une classe adaptée (les cliset ulis), soit dans le secteur médico-social dans un éta-blissement d’enseignement spécialisé.

entre toutes ces structures il existe des passerelles etdes solutions hybrides. en plus de l’école, nos enfantsimplantés reçoivent un accompagnement d’un centrede soins (nécessaire pour le suivi orthophonique, psy-chologique,…) qui peut intervenir dans les 3 modes.

d’après nos résultats, 62 % des enfants suivent unescolarité ordinaire en inclusion individuelle, alors que lesdispositifs adaptés prennent en charge le tiers restant,à égalité entre les clis de l’education nationale et le sec-teur médico-social (19 % chacun).

si l’on analyse ces mêmes chiffres de façon segmentéepar niveau scolaire (fig. 4), on constate que l’inclusionest prépondérante quel que soit le niveau, mais elle dimi-nue fortement entre la maternelle et le primaire. elle

figure 2

figure 3

figure 4

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enquête scolarité et vie quotidienneenquête scolarité et vie quotidienne

remonte légèrement au collège avant de devenir écra-sante au lycée, faute de solution de type classe annexée.cela soulève une vraie question quant à la réalité d’unlibre choix d’une éducation adaptée à chaque enfant.

Redoublement

dans notre échantillon, 46 % des collégiens sourdsimplantés cochléaires ont redoublé. c’est le double dela population moyenne. ces redoublements se produi-sent pour 62 % au moment du cycle 2, on peut sup-poser qu’ils servent à consolider les apprentissages fon-damentaux de lecture et d’écriture. cela semble plutôtpertinent par rapport aux retards que la surdité a puengendrer.

Accompagnement scolaire

quel que soit le mode de scolarisation des enfants, ilspeuvent bénéficier d’accompagnements particuliers.les codeurs lPc, qui historiquement sont associés ausuivi des enfants dans les choix d’éducation oraliste,accompagnent un tiers des enfants. le nombred’heures d’intervention augmente avec le niveau sco-laire de l’enfant, accompagnant ainsi le besoin decodage, qui n’est pas le même en maternelle qu’aulycée.

les interprètes lsf trouvent également leur placeauprès de 15% des enfants sourds implantés, avec desvolumes horaires similaires à ceux du codeur.

enfin le dernier intervenant en classe pour les enfantssourds peut être celui mis à disposition par l’educationnationale, à savoir un auxiliaire de vie scolaire. cela neconcerne que 5 % des enfants, car l’absence de for-mation des Avs et leur précarité rend leur accompa-gnement plutôt inefficace auprès d’enfants sourdsimplantés, qui ont besoin de professionnels formés auxproblématiques de la langue.

Accompagnement hors de la classe

l’accompagnement des enfants sourds est égalementtrès important en dehors de la classe (par exemple l’or-thophonie, le suivi psychologique, la psychomotri-cité,…). Pour cela, les parents confient majoritairementleur enfant à un centre de soins. Mais ce lien diminueau fur et à mesure que l’enfant grandit, et l’on passeainsi de 92 % des enfants suivis par le centre en âgepré-scolaire, à seulement 59 % des lycéens.

le centre de soins est le moyen d’accéder à l’ortho-phoniste. ces heures d’orthophonie sont variables ; legraphique (fig. 5) illustre les variations d’heures d’or-thophonie par niveau scolaire. il est rassurant de voir

que le plus d’orthophonie est prodigué pour installer lesbases, à l’âge de la maternelle, mais qu’au lycée on estplus dans l’entretien sur des horaires plus légers

la scolarité d’un enfant sourd n’est donc jamais simple,la solution mise en place pour une année ne sera pasforcément adéquate l’année suivante.

lA vie en fAMille

Mode de communication

nous avons demandé aux parents quel mode de com-munication ils ont utilisé avec leurs enfants, donnée quenous avons suivie sur toutes nos enquêtes (fig. 6).

on voit nettement s’éroder au fil des années la part dulPc, au profit des signes. de nombreuses explicationspeuvent être trouvées, mais en tout cas ce chiffredevrait permettre d’apaiser des tensions : il montre clai-rement que le projet d’un implant cochléaire chez l’en-fant n’est pas incompatible avec l’accès à la culturesourde signante.

Adaptations professionnelles des parents

si l’on demande aux parents quel est l’impact de l’ar-rivée de cet enfant sourd, on voit que c’est un vrai bou-

figure 5

figure 6

CC e livre numérique propose aux jeunesenfants sourds profonds ou malenten-dants une histoire attrayante sur le

thème de l’entraide pour les soutenir et lesmotiver dans leur acquisition de la languefrançaise orale et écrite.

Conçu spécifiquement pour les enfants sourds,cet outil multimédia, entièrement sous-titré,peut être montré à toute la classe. il apporteaux enseignants un support adapté aux diffi-cultés d’acquisition de la langue française. Cecoffret composé d’un DVD vidéo et d’undévédérom comprend l’histoire intégrale enlangue des signes française, en langage parlécomplété et en français oral. le dévédéromcontient également un guide pédagogique etdes activités autour du thème de l’ombre et dela lumière. vv

Editeur(s) : cNDP - chasseneuil du Poitou,Datha, Vitry sur seineDVD, 2011Prix : 29.90 €site : http://www.sceren.com/

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°3922

leversement dans le projet de vie : 57 % des mamansdéclarent avoir modifié leur activité professionnelle(39 % l’ont réduite et 18 % l’ont totalement arrêtée),contre seulement 12% des papas (10% réduction, 2%en arrêt complet).

conclusion

le mot de la fin revient au témoignage d’unemaman : “le quotidien de notre fille est transformé avecl’implant. on en oublierait qu’elle est sourde ! et c’estbien là le danger, parce qu’elle est sourde, et son inté-gration, excellente, lui demande en fait un effortincroyable, qu’on a du mal à mesurer”.

l’intégralité de cette enquête est à retrouver dans unnuméro Hors-série de la petite cochlée, publié pargénération cochlée, incluant de nombreux autresaspects de la vie quotidienne avec l’implant. vous pou-vez le retrouver sur le site Web www.generation-cochlee.fr. vv

Nathalie cLaVIER, Génération cochlée

enquête scolarité et vie quotidienneenquête scolarité et vie quotidienne

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°39 23

SScienceScienceS

ccette étude exploratoire a été menée dans lecadre d’un master 2 recherche en psychologiecognitive et développementale à l’université d’An-

gers, au sein du laboratoire de Psychologie des Paysde la loire “Processus psychologiques et contextes”,sous la direction de christine gaux & d’Annick Weil-Barais. elle est actuellement poursuivie dans le cadred’une thèse. l’objectif de la recherche est de préciserles spécificités du fonctionnement de la mémoire desenfants sourds avec implants. il s’agira en particulierd’étudier la mémorisation temporaire de différentesformes d’informations (verbale, visuelle), ainsi que leurrégulation par une instance de contrôle, une sorte dechef d’orchestre, appelé contrôle exécutif.

d’un point de vue finalisé, cette recherche vise à mieuxcomprendre la variabilité interindividuelle des capacitésmnésiques des enfants sourds implantés, l’incidencede l’implant sur l’acquisition du langage écrit dans le butde concevoir des outils pédagogiques adaptés à cettepopulation.

1. introduction

de nombreuses recherches montrent que l’apport desimplants cochléaires (ic) est considérable dans l’ac-quisition et le développement du langage oral et écrit.cependant, la pose d’un implant cochléaire ne permetpas pour autant d’accéder instantanément au langage

oral. le flux sonore apporté par l’ic, s’il est déterminant,est moins riche que le flux sonore naturel. il ne restaurepas l’intelligibilité de la parole d’autrui de façon complète.la pose d’un implant implique donc un accompagne-ment spécifique qui aide à l’intégration des modalitéssonores et visuelles de la parole et ne dispense pasforcément d’utiliser des procédés d’enrichissement dumessage visuel pour faciliter les redondances entreinformations auditives et visuelles. notamment, ley-beart et colin (2007) ont constaté la pertinence d’ex-poser très tôt à la lPc ces enfants.

Parmi les abondants travaux sur les incidences lan-gagières de l’ic pédiatrique, peu nombreux sont ceuxqui ont examiné son impact sur la mémorisation à courtterme des informations. certaines études estimeraientque la présentation simultanée de différentes modalitéspourrait avoir un effet délétère sur la mémorisation.

Burkholder et Pisoni (2006) soutiennent en effet queles signes manuels comme la lsf ou les clés de la lPcdétournent l’attention portée aux lèvres et aux sons etdonc que la parole est moins bien perçue. de leur côté,Bertoncini et Busquet (2011) pensent que les enfantsimplantés précocement ne fonctionnent plus commedes enfants sourds congénitaux qui n’auraient pas pro-fité d’une réhabilitation. de ce fait, il ne s’agit pluscomme auparavant de substituer la voie visuelle à la voieauditive pour la construction du langage ou pour saréception mais il convient, en fait, de rechercher entre

les capacités verbales et visuo-les capacités verbales et visuo-spatiales en mémoire de travail desspatiales en mémoire de travail desenfants sourds munis d’un implantenfants sourds munis d’un implantcochléairecochléaire

PaR STÉPHanie PouyaT-HouÉe, CHRiSTine Gaux & anniCk Weil-BaRaiS 

Son expérience sur le terrain en tant que professeur spécialisée auprès d’enfants sourds

alliée à un souci de réflexion théorique a encouragée Stéphanie Pouyat-Houée à

entreprendre un travail de recherche universitaire qui met le doigt sur la complexité des

mécanismes mnésiques temporaires. Ceux-ci nécessitent de pouvoir intégrer des données

normalement complémentaires mais perçues par des canaux perceptifs différents (auditif

ou visuel) avec d’éventuels conflits selon la nature linguistique ou visuo-spatiale de ces

informations.

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°3924

Capacités verbales et mémoire de travailCapacités verbales et mémoire de travail

ces deux voies (visuelles et auditives) une complé-mentarité bien réfléchie et adaptée à chaque situation.

une meilleure compréhension des stratégies demémorisation immédiate d’informations pourraitapporter des éléments de réponse aux différentes ques-tions qui se posent encore : quelle est la nature desreprésentations utilisées par les enfants sourdsmunis d’un ic pour mémoriser temporairement uneinformation ? et par conséquent sous quelle forme va-t-il la stocker en mémoire ? doit-on s’attendre à ce quel’enfant sourd muni d’un ic utilise une représentationsous une forme phonologique suite à l’accès au langageoral consécutif à l’implantation ? A l’inverse, l’utilisationinitiale de la lPc ou de la lsf, ne le conduit-il pas à pri-vilégier une représentation sous une forme visuelle ?

Pour tenter d’y répondre nous avons comparé les capa-cités de maintien en mémoire de travail (maintien tem-poraire de l’information) d’informations verbales etvisuo-spatiales d’enfants sourds munis d’un IC scola-risés du CP au CE2.

nous avons demandé aux enfants de mémoriser decourtes séquences d’informations soit de nature lin-guistique, dîtes “verbales” (mots), ou de nature “visuo-spatiales” (localisation de points dans une grille).

si les enfants avec un ic obtiennent des scores équi-valents, voire supérieurs dans la condition verbale parrapport à la condition visuo-spatiale cela signifie qu’ilspeuvent utiliser avec efficacité des représentations pho-nologiques pour mémoriser des informations. Au niveaupédagogique, l’enseignement et les apprentissages peu-vent dans ce cas être proposés dans un format verbaluniquement.

2. ProBléMAtique et HYPotHèses

selon la littérature on peut penser que l’architecturecognitive d’une personne sourde est la même qu’unepersonne entendante. ce qui diffère entre ces individusest le type de matériel manipulé (différent selon le sta-tut auditif) mais les mécanismes sous jacents à ces acti-vités sont structurellement les mêmes. Baddeley(1990, cité par fayol, & gaonac’h, 2007) a imaginé une

architecture cognitive dynamique à composantesmultiples représentant la mémoire de travail. ceconcept est intéressant pour notre étude car il permet,

en autre, de distinguer deux compo-santes hypothétiques de la mémoirede travail : le traitement des informa-tions verbales et le traitement desinformations visuo-spatiales. cettesituation “théorique” devient réellepour un enfant sourd.

l’équipe de Pisoni à indianapolis amené une série d’études sur le fonctionnement de lamémoire de travail phonologique des enfants sourdsimplantés. les résultats de leurs études montrent queles enfants sourds avec IC utilisent un encodage visuo-spatial dans des situations où les entendants utilisentun encodage phonologique (cleary, Pisoni et geers,2001).

l’utilisation d’un encodage visuo-spatial plutôt que pho-nologique n’était pas attendue compte-tenu de la pré-sence d’un ic. les auteurs considèrent que la limitationdans l’encodage phonologique des enfants avec ic seraitliée au fait qu’ils n’ont profité de l’ic qu’après l’âge de2 ans.

sachant que le développement du langage oral nedépend pas uniquement de l’audition elle-même maisaussi de la réception d’une information précise et juste,que la période sensible pour un développement optimaldu langage de l’enfant se situe avant 2 ans (leybaert,& colin, 2007), il est possible que l’enfant ne recourepas spontanément aux représentations phonolo-giques pour mémoriser une information suite à l’im-plantation. il est possible également qu’il continue à uti-liser/privilégier une représentation visuelle comme ille faisait au préalable.

d’autres travaux ont montré que la précocité de l’uti-lisation de la lPc préparait mieux à l’exploitation de l’im-plant (leybaert, schepers, renglet, simon, serniclaes,deltenre, Marquet, Mansbach, Périer, & ligny, 2005).

nous avons donc proposé aux enfants des séquencesaccompagnées de la lPc. en levant l’ambiguïté liée àla présentation verbale de l’information, nous pouvonssupposer que les enfants réussiront peut-être mieux àmémoriser l’information. Cette étude exploratoire viseainsi également à examiner si l’apport visuel de la LPC,en plus du son et de l’image, permet à l’enfant implantéd’améliorer ses performances lors de situations demémorisation verbales et /ou visuo-spatiales. nousavons donc comparé les performances d’enfants dansdifférentes situations de mémorisation à court terme.

Certaines études estimeraient que la pré-sentation simultanée de différentes

modalités pourrait avoir un effet délétère surla mémorisation.“

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°39 25

3. MétHodologie

la population est constituée de 15 enfants sourds pro-fonds francophones implantés et âgés de 7 à 9 ans(âge chronologique moyen : 7 ans 10 mois, extrêmes78 et 107 mois). ces enfants ont été implantés entre18 mois et 6 ans 5 mois (âge moyen d’implantation : 3ans 1 mois). les critères d’inclusion dans cette étudeétaient les suivants pas de troubles associés, exposi-tion à la lPc mais plus forcément utilisateur, scolari-sation en cP (4), ce1 (7) ou ce2 (4), avec un mode decommunication plutôt oral mais certains enfants (5)étaient utilisateurs de la lsf ou du français signé.

dans les tâches proposées pour évaluer la mémoire detravail, l’enfant voit successivement s’afficher à l’écrandes images ou bien des points apparaissant dans unegrille. A l’issue de la séquence, il doit restituer immé-diatement les mots à l’oral ou bien la localisation despoints en pointant les cases de la grille tout en res-pectant l’ordre de présentation des items. le nombred’items à mémoriser progresse de 2 à 4 items. ladurée d’affichage à l’écran des items est de 4 secondesdu fait des conditions de passation avec le codage lPc.en effet, nous avons fait ce choix pour que l’enfant aitle temps de voir l’image ou le point dans la grille et lecodage du mot.

dans les situations de mémorisation verbales, desséries d’images (objets concrets ou animaux) sont pré-sentées à l’enfant selon quatre conditions :

ww suite d’images seules (i) ;ww suite d’images + les mots énoncés (son) ;ww suite d’images + les mots énoncés + la lPc (aide àla lecture labiale) ;ww suite de mots énoncés + la lPc.

Avant le début des épreuves, nous avons vérifié que lesimages étaient connues et que l’enfant pouvait lesdénommer (mots issus de la base de données Manu-lex, niveau cP).

dans les situations de mémorisation visuo-spatiale, desséries de points à localiser dans une grille sont pré-sentées selon quatre conditions :

ww suite de points seuls (P) ;ww suite de points + localisations des points énoncées(sons) ;ww suite de points + localisations des points énoncées+ la lPc ;ww suite des localisations des points énoncées + la lPc.

Pour les deux conditions avec du son et de la lPc, nousavons décidé de coder la grille à l’aide de chiffres de 1

à 9 en suivant le sens de l’écriture (horizontale et degauche vers la droite) et ainsi permettre de situer faci-lement à l’oral le point spatialement. excepté pour la der-nière condition (sans images), cette grille codée n’estpas présentée, ni expliquée à l’enfant.

toutes les épreuves étaient présentées sous la formed’un diaporama converti en format vidéo afin de ne pasintroduire de variantes dans leurs présentations.

exemples d’items pour les conditions i+s+lPc (fille) etP+s+lPc (sept).

Nous nous attendons à ce que les performances enmodalités visuo-spatiales soient supérieures à celles enmodalités verbales. en outre, cette supériorité devraitapparaître dans chacune des conditions impliquant unencodage visuo-spatial. en effet, l’enfant sourd implantémême précocement a développé tout bébé descompétences visuelles et a été stimulé dans ce sensafin de compenser sa perte auditive (exposition à la lPcou à la lsf).

nous nous attendons également à ce que les scoressoient semblables qu’il y ait présentation visuelle seule(images ou localisation de point) ou présentation accom-pagnée de la dénomination. enfin, nous pensons que lesperformances devraient s’améliorer avec une pré-sentation orale complétée par la lPc.

Capacités verbales et mémoire de travailCapacités verbales et mémoire de travail

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°3926

4. AnAlYse des résultAts

nous présentons les résultats des scores pondérés(sur 43,5) calculés en fonction de la longueur de la listeà rappeler (2 mots :6 (2*3) = 6 ;3 mots :9 (3*3) + 4,5= 13,5 ; 4 mots : 12 (4*3) + 12 = 24; total = 43,5).

en ce qui concerne l’effet de la nature de l’informationà mémoriser et l’effet d’interaction entre modalité etcondition de présentation, nous pouvons observer quele score moyen pondéré de rappels corrects des 15enfants est significativement plus élevé en modalitévisuo-spatiale (37,86 sur 43,5) qu’en modalité verbale(25,09 sur 43,5) [f(1,14)= 30,62; p<.001].

les enfants réussissent mieux à mémoriser lesséquences de points que des séquences de mots(images). comme le souligne la figure 1, les scores desépreuves en modalité visuo-spatiale sont supérieurs àceux en modalité verbale quelle que soit la condition. ladifférence entre ces deux modalités ne varie pas signi-ficativement en fonction de la condition. l’effet d’in-teraction entre les modalités et les conditions n’est passignificatif [f<1 ns].

figure 1 : scores moyens pondérés de rappels correctssur 43,5 dans l’ordre en fonction des modalités verbaleou visuo- spatiale (i/P=images ou points,i/P+s=images ou points+son, i/P+s+lPc= images oupoints+son+lPc, s+lPc= son+lPc).

en modalité verbale (figure 2a), les comparaisons deuxà deux des moyennes indiquent que la différence estsignificative entre les conditions i et i+s [f(1,14)= 6,08;p<.05] et entre i et i+s+lPc  [f(1,14) = 16,93; p<.01].

en revanche, la comparaison i et s+lPc n’est pas signi-ficative, en raison des différences importantes entreenfants dans cette condition de présentation. ces résul-tats indiquent que la condition la plus favorable pourmémoriser une information verbale est celle où l’on pré-sente une image seule sans l’aide de l’audition, ni de lalPc (moyenne=28,47/43,5).

figures 2 a et b : scores moyens pondérés de rappelscorrects dans l’ordre sur 43,5 dans la modalité verbale(2a) selon la condition de présentation i=images;i+s=images+son, i+s+lPc= images+son+lPc,s+lPc= son+lPc, et dans la modalité visuo-spatiale(2b) selon la condition de présentation P=points,P+s=points+son, P+s+lPc=points+son+lPc, s+lPc=son+lPc.

en modalité visuo- spatiale (figure 2b), les comparaisonsdeux à deux des moyennes indiquent que la différenceest significative entre les conditions P et s+lPc[f(1,14)= 9,66; p<.01] et P+s et s+lPc [f(1,14)=11,21; p<.01]. en revanche, la différence n’est pas signi-ficative entre P+s+lPc et s+lPc. ces résultats indi-quent que les trois premières conditions ne se distin-guent pas. seule la quatrième se différenciesignificativement des deux premières. la dernière condi-tion semble donc susciter des difficultés pour la mémorisation.

5. discussion et conclusion

L’analyse de l’effet de la nature de l’information à mémo-riser confirme que les performances en modalité ver-bale sont inférieures à celles en modalité visuo-spatiale.la supériorité des scores en visuo-spatial par rapportaux scores en verbal se manifeste quelle que soit lacondition de présentation des séries. Pour tous lesenfants, la partie visuo-spatiale leur a semblé plus facile

!Verbal Visuo-spatial

I/P I/P+S I/P+S+LPC S+LPC0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

Sco

res

moy

ens

pond

érés

de

rapp

els

corre

cts

dans

l'or

dre

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Modalité verbale

I I+S I+S+LPC S+LPC0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

Sco

re m

oyen

pon

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mot

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titué

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Modalité visuo-spatiale

P P+S P+S+LPC S+LPC0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

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Capacités verbales et mémoire de travailCapacités verbales et mémoire de travail

fig

. 1

fig

. 2

af

ig.

2 b

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°39 27

et ils étaient plus rapides dans l’exécution de cettetâche.

en effet, un enfant ayant été privé de son audition a ten-dance à développer et exercer ses stratégies de mémo-risation visuo-spatiale très tôt (leybaert, 2005). cecipourrait expliquer que même après une bonne réha-bilitation auditive, les enfants munis d’un ic réussissentnettement plus aisément les tâches de mémorisationvisuelles et spatiales.

notons toutefois que dans la modalité visuo-spatiale demémorisation, il n’est pas impossible que les enfantsaient utilisé une stratégie de codage verbal des casesde la grille. si cette stratégie était réellement utilisée,ce double codage (visuo-spatial et verbal) expliqueraitles performances plus élevées dans cette modalité. cecodage verbal pourrait aussi être exclusif, c’est-à-diresans recours simultané aux aspects visuels. dans cecas, répéter ces coordonnées dans la grille serait moinslong que répéter une liste de mots, expliquant de ce faitla supériorité des scores en visuo-spatial par rapportau verbal.

En modalité verbale, la condition qui semble la plus favo-rable pour mémoriser une information verbale est celleoù l’on présente une image seule. nous nous attendionsd’une part à ce que la mémorisation soit facilitée parla présentation concomitante del’image et du son, compte-tenu de laredondance entre informationsvisuelle et auditive, d’autre part, à ceque la lPc facilite l’utilisation de laboucle phonologique, donc l’au-torépétition des mots. cet écart estpeut-être dû à la durée de présenta-tion des images. dans notre procé-dure, le maintien du matériel à mémoriser est long (4s).cet écart est peut-être également dû à l’ajout simultanédu son qui peut être perturbateur.

Par ailleurs, les enfants ont pu privilégier un encodagevisuo-spatial. les enfants encoderaient l’informationsous une forme visuelle et n’utiliseraient pas spon-tanément un codage phonologique. dans ce cas, l’uti-lisation de la lPc n’est pas pertinente.

un autre élément doit être pris en considération. tousles enfants rencontrés n’ont pas été exposés de lamême façon à la lPc. la plupart d’entre eux l’utilisenten classe depuis la maternelle mais pas obligatoirementchez eux. la précocité de l’exposition à la lPc et l’uti-lisation régulière à la maison devront donc être prisesen compte pour valider ou infirmer notre hypothèse dedépart. il est possible enfin, que l’enfant ait trop d’in-formations à traiter et que la lPc soit un élément per-turbateur (Burkholer et Pisoni, 2006).

En modalité visuo-spatiale, on peut noter que les scoressont plus élevés. les enfants étaient plus à l’aise danscette modalité qu’en modalité verbale. cependant, lesperformances des élèves ne sont pas plafond et desdifférences apparaissent entre eux. la condition quisemble la plus pénalisante est celle avec le son et lalPc. dans cette condition, la grille n’apparaît plus. lesenfants sont obligés de faire appel à une autre straté-gie de mémorisation qui n’est pas uniquement visuo-spa-tiale. en effet, durant cet exercice la plupart des enfantsreproduisaient spatialement l’emplacement énoncé etse redisaient à l’oral la position entendue. ils utilisaientalors un encodage verbal et visuo-spatial. la tâchedevient double et probablement plus difficile.

cette étude prospective auprès d’enfants implantésnous a permis, malgré les différences interindividuelles,de constater que l’apport de la LPC, et plus particuliè-rement dans la modalité verbale, ne favorisait pas uneaugmentation de leurs performances de mémorisation.l’aide visuelle à la lecture labiale, permettant à l’enfantsourd implanté d’affiner sa perception du langage oral(appauvri), offerte par la lPc n’est pas judicieuse. ilserait intéressant de voir si une exposition très précoceainsi qu’une utilisation régulière en classe et à la mai-son de la lPc sont des paramètres influant sur sesrésultats.

On a pu aussi observer une différence entre leurs per-formances en modalité verbale et visuo-spatiale. Tousles enfants vus obtiennent un score visuo-spatial plusélevé. il serait intéressant de comparer ces résultatsà ceux d’un groupe contrôle d’entendants. Ainsi, nouspourrions vérifier si les performances en modalité visuo-spatiale sont typiques d’un enfant sourd implanté et deses capacités de mémorisation visuelle.

de même, nous pourrions examiner si les rappels enmodalité verbale pour la condition images seules (condi-tion la mieux réussie par les enfants implantés en moda-lité verbale) sont supérieurs pour des enfants enten-dants. Ces premiers résultats indiquent l’intérêt d’unetelle question pour l’enseignement. si l’utilisation de lalPc en complément de la verbalisation s’avère défa-vorable pour la mémorisation à court terme, préconi-ser son utilisation systématique ne serait peut-être paspertinent.

Capacités verbales et mémoire de travailCapacités verbales et mémoire de travail

l’apport de la lPC, et plus particuliè-rement dans la modalité verbale, ne

favorisait pas une augmentation de leurs per-formances de mémorisation.“

A l’issue de cette première étude, nous pouvons doncdégager différentes thématiques et espérer aller plusloin dans l’étude de la mémoire de travail des enfantsavec implants en ciblant plus précisément certainsparamètres. nous pourrions alors mieux comprendreles stratégies de mémorisation développées par cesenfants. vv

stéphanie PoUyaT-HoUéEProfesseur spécialisée au centre charlotte Blouin àangers et doctorante au Laboratoire de Psychologie desPays de la Loire (LPPL), Université d’angers.

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°3928

BibliographieBibliographie

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DDans le cadre de son action d’adaptationde ses campagnes de prévention à l’in-tention des personnes sourdes et mal-

entendantes, l’inPeS a édité un documentadapté au public sourd (traduction du titre enlangue des signes, illustrations explicites, etc.)qui donne les repères nutritionnels et lesrecommandations du Programme nationalnutrition-santé (PnnS) : 5 fruits et légumespar jour, des céréales ou féculents à chaquerepas, 3 laitages par jour, 1 ou 2 viande, pois-son ou œuf par jour, limiter les graisses, lesucre et le sel, boire de l’eau à volonté. la qua-trième page suggère par des images des repaséquilibrés en alternative à des repas tropriches, conseille de faire 3 repas par jour et sur-tout de bouger au lieu de rester sédentaire ! leflyer est téléchargeable gratuitement surinternet mais vous pouvez également en com-mander gratuitement pour votre structure.vv

Manger bouger c’est la santé !Réf : 25087411DE INPEs42, bd de la Libération 93203 stDenis cedex Tél. 01 49 33 23 71 - fax. 01 49 33 23 91 courriel : [email protected] : http://www.inpes.sante.fr

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°39 29

les ateliers de décodageles ateliers de décodage

Une équipe de codeurs du Haut-Rhin nous fait part de ses réflexions sur l’intérêt

d’apprendre aux enfants à mieux utiliser les interventions codées “en voix blanche”,

réflexions ayant abouti à la création et à la mise au point progressive d’ateliers de

décodage. Sont exposés dans cet article les outils utilisés pour repérer le niveau et les

besoins de chaque enfant, l’organisation de différents types d’ateliers avec leurs objectifs

et quelques exemples de situations pédagogiques motivantes. Une expérience intéressante

pour tout pédagogue du langage et de la communication.

PaR noëllie WeiSS

ddepuis quelques années, l’équipe des codeuses del’institut pour déficients sensoriels “le Phare” (ill-zach) constate que la plupart des enfants, pour

lesquels elles interviennent, rencon-trent des difficultés à investir lecode. ces élèves déficients auditifs,appareillés et/ou implantés, ne peu-vent pas bénéficier pleinement desinterventions codées en situationscolaire. le projet des ateliers dedécodage est né d’une volonté derépondre à certains besoins repéréstels que, par exemple, leurs difficultés de réception dumessage codé.

dans un premier temps, ces ateliers s’adressaient àquelques enfants en inclusion individuelle. Puis, les pres-tations ont été affinées pour répondre à d’autresbesoins, aux demandes des parents ainsi qu’aux obser-vations de l’équipe pluridisciplinaire. les professionnelsutilisent différents outils tels certains tests orthopho-niques pour orienter les enfants vers ces ateliers. cetteannée, 25 enfants, âgés de 4 à 11 ans, fréquentent lesateliers de décodage. ils présentent un niveau de sur-dité variant de sévère à profond troisième groupe. ilsportent tous des contours d’oreille. 6 enfants sontimplantés.

l’orgAnisAtion générAle et ledérouleMent des Ateliers*

Au fil de l’année, les séances sont organisées autourd’événements saisonniers (carnaval, les saisons…).Avant de démarrer chaque séquence, les différents jeuxou objets sont présentés aux enfants. nous pouvonsainsi partir de leurs propres connaissances linguistiqueset enrichir leur stock lexical. sans s’en rendre compteles enfants travaillent autant sur la technique, c’est-à-

dire la perception précise et fine du mot codé, que surla compréhension d’un message codé en voix blanche.

nous cherchons à faire appel à la curiosité et à la viva-cité des enfants qui apprennent à manier le code dansdes situations ludiques. nous avons imaginé, créé, éla-boré et adapté des jeux variés afin de stimuler l’appé-tence au décodage. les outils sont répartis en troiscatégories distinctes : la conscience phonologique, ledécodage global et le décodage analytique.

les différents grouPes et leursoBJectifs resPectifs

les ateliers de découverte, ouverts toute l’année, sontproposés aux enfants. ceux-ci peuvent intégrer legroupe en fonction des observations d’autres profes-sionnels ou à la demande des parents. nous les ins-crivons dans un bain de langue codé. cette immersionleur permet de découvrir le code dans un contexteludique. Pour introduire des séquences sur l’hiver, nouspouvons par exemple, nous mettre en scène pour unesortie à la montagne : “Aujourd’hui, la neige est au ren-dez-vous. Je pars à la montagne faire de la luge. Mais,j’ai besoin de vous pour me préparer. J’ai besoin de mesbottes (codé en voix blanche). les enfants me les ten-dent et je les enfile. J’ai aussi besoin de mon foulard(codé en voix blanche)”…, etc.

PPédAgogieédAgogie

les outils sont répartis en trois catégo-ries distinctes : la conscience phonolo-

gique, le décodage global et le décodage analytique.“”

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°3930

l’objectif principal est “d’éduquer le regard” des enfants.les jeux proposés cherchent à attirer leur attention surle visage et les lèvres tout en suscitant leur intérêt. l’en-fant apprend dans un premier temps à regarder soninterlocuteur et à découvrir l’image labiale. Puis il affineson regard au cours des interactions. il apprend à fairedes liens entre les images labiales, la perception audi-tive des phonèmes et par la suite, les clés de configu-rations du code.

les ateliers de découverte ont aussi pour vocation d’ac-compagner les parents dans leur réflexion autour duprojet linguistique de leur enfant (rencontre préalablepour expliquer l’outil et le fonctionnement des ateliers- plaquette informative - échanges réguliers…).

les ateliers d’initiation s’articulent autour de deux objec-tifs principaux.

les séances s’inscrivent d’abord dans une progressionefficace autour des sosies labiaux. nous proposons desjeux de l’oie, des saynètes, des jeux interactifs… “Aujour-d’hui nous allons au marché. nous devons organiser ungoûter d’anniversaire. vous m’aiderez à acheter lesdifférents produits dont j’ai besoin. Mais attention ! vousdéposerez les objets où l’on entend le son [k] dans cecabas et ceux où l’on entend le son [g] dans le secondcabas”. cette mise en scène favorise un apprentissagerapide du décodage et une mémorisation des clés deconfiguration du code. les enfants affûtent leurregard et affinent leurs compétences afin d’utiliser lacomplémentarité des informations données.

de plus, nous renseignons régulièrement le “cahier desclés de la l.f.P.c” nominatif à chaque enfant. ce supportest intéressant dans la mesure où ils apprennent àrepérer les clés et leurs images labiales spécifiques.nous joignons l’illustration des objets que nous avonsutilisés pour aborder chaque configuration. A chaquepériode de vacances, ils rapportent le livret à la maison.ils peuvent le partager avec leurs parents qui pourrontréinvestir les mots dans des situations communica-tionnelles parfois codées.

nous travaillons également autour du décodage globald’un message codé. en partant des pré requis linguis-tiques des enfants, nous leur montrons en quoi le codepeut les aider, combien ils peuvent s’en servir rapide-

ment et en profiter pour progresser plus vite. dès queles enfants ont suffisamment confiance en leurs compé-tences de décodage, l’apport de la voie auditive et dela suppléance mentale est minimisé lors de situationsd’apprentissage du décodage.

les ateliers de perfectionnement et d’entraînementontpour objectif de donner les moyens à l’enfant d’être pré-cis dans son décodage par l’utilisation plus généraliséede logatomes, de jeux autour des paires minimales,

autour des groupes consonantiques...les enfants apprécient tout particu-lièrement le jeu du bingo. chaquejoueur a une planche sur laquellefigure des paires minimales, dessosies labiaux, des phrases sosies…le meneur du jeu tire un papier etcode en voix blanche la phrase. celuiqui a rempli sa planche le premier a

gagné. ce jeu est intéressant dans la mesure où il per-met de travailler le décodage analytique sans pouvoirs’appuyer sur le contexte.

ces situations ludiques aident les enfants à affiner leurscompétences de décodage notamment lors de situa-tion d’apprentissage.

nous travaillons également autour de la mémorisationet de la compréhension de messages codés plus longset plus complexes dans les conditions similaires à uneclasse (= mise en place d’outils artificiels pour repro-duire les bruits environnants d’une classe tels que lesbavardages, les bruits de fond, les interventions desélèves et/ou de l’enseignant…). les enfants perfec-tionnent leurs compétences afin de les utiliser en toutescirconstances. Pour débuter un tel travail, nous partonstoujours des centres d’intérêt des enfants : le jeu du “nioui ni non”, les incollables, les quiz ou les mots croisés…pour terminer sur des histoires plus ou moinslongues.

que s’est-il PAssé ? l’évAluAtion

l’évaluation est importante car elle permet de faire lepoint sur les finalités et les objectifs définis pour chaqueélève, de les comparer à l’action réalisée. elle peutdéboucher sur une remise en cause du projet, uneannulation, une modification, des aménagements, desredéfinitions…

ww le Test de Réception du Message Oral ou TERMOpermet d’objectiver les capacités et les performancesde l’enfant dans les différentes modalités de réceptiondu message oral : en audition seule, en lecture labialeseule, en lecture labiale + audition, en audition + lecturelabiale + l.P.c., en lecture labiale + l.P.c.

Les atleliers de décodageLes atleliers de décodage

les ateliers de découverte ont aussipour vocation d’accompagner les

parents dans leur réflexion autour du pro-jet linguistique de leur enfant.“

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°39 31

wwune grille d’évaluation a été élaborée pour faciliter l’ob-servation régulière des compétences des enfants danstrois domaines : le comportement, le niveau linguistiqueet le niveau de décodage. chaque catégorie sedécline en plusieurs indicateurs de compétences. sinous souhaitons, par exemple, évaluer l’attitude de l’en-fant face au message codé, nous allons observer l’en-fant sur plusieurs points : est-il attentif, intéressé, récep-tif à ce mode de communication ? est-il dans uneattitude de refus ou de rejet ? est-ce que le décodaged’un message lui demande une concentration pro-longé ? est-il fatigable ? est-ce que le code lui est pro-fitable ? dans quelles situations ?

cette grille permet à la fois de réajuster les interven-tions professionnelles et d’effectuer des bilans précis,notamment lors de la rédaction de P.i.A. (Projet indivi-dualisé d’Accompagnement).

ces ateliers de décodage sont animés au sein de l’i.d.s.le Phare depuis septembre 2008. ils répondent à unbesoin pour les enfants qui sont inscrits dans un pro-jet oraliste + l.f.P.c. en effet, nous avons pu remarquerque les ateliers étaient profitables pour les enfantsnotamment en situation scolaire. ce travail facilite lesinterventions des codeuses qui accompagnent lesenfants dans la découverte et l’appropriation du code.Pour les enfants qui fréquentent les ateliers de décou-verte, leur regard s’affine et s’oriente plus naturellementsur la codeuse. Pour ceux qui entrent dans l’appren-tissage des sons, des syllabes et de la lecture, ils pren-nent des repères et s’appuient davantage sur le codenotamment dans la discrimination des sons. enfin, pourles plus grands, ils apprennent à mobiliser leur atten-tion et à parfaire leurs compétences de décodage dansl’environnement sonore de leur classe.

très souvent, les parents nous interpellent pour savoircomment aborder le code de façon ludique, commentl’utiliser dans leur quotidien avec leur enfant… l’équipepluridisciplinaire de l’établissement s’interroge doncaujourd’hui sur la manière d’accompagner les parentsdans l’utilisation de cet outil auprès de leur enfant. nouspourrions proposer d’instaurer rapidement des temps

de rencontre bimestrielle avec les familles qui le sou-haitent (les parents, leur enfant sourd et sa fratrie.). Parl’intermédiaire de jeux, de comptines, d’histoires, de bri-colages…, nous montrons que le code l.f.P.c. peut deve-nir une vraie source communicative et qu’il peut êtreutilisé dans des situations ludiques transposables à lamaison. un temps de formation pourra être proposéaux parents afin d’affiner leurs compétences de codage.ces rencontres seront surtout l’occasion de pratiquer,d’échanger sur les différentes manières de commu-niquer avec son enfant, sur leurs expériences respectives… vv

Noëllie WEIss, codeuse en L.f.P.c.,fondation LePhare

* Les ateliers de décodage, collectifs ou individuels, sont des séances detravail ludique qui permettent à l’enfant d’acquérir des compétences dedécodage.

Les atleliers de décodageLes atleliers de décodage

nous montrons [auxparents] que le code lfPC

peut devenir une vraie sourcecommunicative et qu’il peutêtre utilisé dans des situationsludiques transposables à lamaison.

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°3932

CCet ouvrage collectif est en quelque sorte unesuite de la publication “enseigner et apprendreen lSF”1 des éditions du Cnefei, chroniquée

dans le n° 15 de notre revue. il s’agit des actes de lajournée d’études du 29 janvier 2011, organisée par leGeRS, Groupe d’etudes et de Recherche sur la Surdité.

quatorze auteurs, une introduction et treize contri-butions sont réunies. Des témoignages : la vie d’unefamille sourde signante depuis quatre générations,l’accueil en crèche d’enfants et de parents sourds, lepoint de vue d’une psychologue sourde de parentssourds, les développements informatiques en matièrede langue des signes, un hommage à Cyril Courtinmalheureusement disparu, pour le reste l’essentielest consacré à la pédagogie. en effet, d’emblée le tonest donné, comme l’indique en substance anne VanBrugghe dans son introduction : il ne s’agit plus dejustifier le bien-fondé d’une éducation bilinguefrançais/lSF ou de légitimer la langue des signesmais d’aborder concrètement la mise en œuvre des dis-positifs bilingues.

De manière générale la langue des signes sert delangue d’échange et de métalangue s’agissant dufrançais. Comme l’indique Denis lefèvre, directeurd’un établissement bilingue, l’approche constrastivefrançais écrit /langue des signes (la comparaison desstructures, des catégories grammaticales et des diffé-rences d’expression2) est centrale, y compris lorsqu’ilest question d’orthophonie. Voici ce que nous dit,s’agissant d’enfants de six à douze ans, l’orthopho-niste Séverine Dechaud-Jô : “Le travail sur les textes(réception, lecture et production, rédaction) constitue legros de nos interventions avec le repérage d’informationsessentielles, l’analyse globale, l’émission d’hypothèse surcette analyse, sur l’utilité du texte. Dans un secondtemps la langue à l’écrit est étudiée puis la Lsf puis lescorrespondances avec le vocal sont données. Un vrai tra-vail de métalinguistique s’engage au niveau de l’écrit(recul, questionnement polysémie, vocabulaire, conju-gaison, grammaire, syntaxe française/syntaxe Lsf,lecture labiale, traduction littérale (…)”, etc.

LivresLivres

contacts sourds-entendants.

Grandir etapprendre enlangue des signesoui, mais comment ?

gersedition l’Haramttan, 2011, 85 p., 18 €site : www.gers-biling.net

malgré l’inquiétude dont nous fait part annetteGorouben au sujet de l’éducation orale “dans certainsprogrammes bilingues je vois poindre une quasi-éva-cuation de l’oral”3, il semble qu’il y ait dans cedomaine plus de souplesse. en effet on lit sous laplume d’anne Van Brugghe présidente du GeRS etProfesseur-formateur que “L’éducation bilingue aprèsavoir conquis le droit d’exister dans sa capacité à fairegrandir et à apprendre en Lsf, a sans doute une partiedu chemin inverse à refaire pour revenir à un équilibreplus respectueux d’enfants ni tout à fait sourds ni tout àfait entendants, ni tout à fait muets ni tout à fait parlantsqui méritent qu’on accueille leur parole vocale aussi, toutcomme on accueille leur parole gestuelle (…). Pour tousquel que soit leur degré de surdité, la connaissance del’oral, à défaut de sa maîtrise et de sa pratique constituebien un objectif valide, si tant est que l’on s’en tienne àdes situations d’apprentissage qui prennent sens poureux et que l’on ne confonde pas le vocal comme l’objetd’un apprentissage ponctuel avec le vocal comme canalprivilégié de tous les apprentissages”4.

De manière générale cet ouvrage décrit les pratiquesbilingues plus qu’il ne les évalue. on comprendl’intérêt majeur de la langue des signes en terme decommunication. Cependant, dirigeant depuis plusd’une quinzaine d’années un master d’interprétationfrançais/lSF-lSF/français, je sais à quel point cetexercice requiert une formation rigoureuse et longue- deux ans alors que l’on s’adresse à des étudiantsrecrutés à bac plus 3 - et sélectionnés en fonction deleur culture générale, de leur capacité d’expression etde leur maîtrise des langues. on aimerait en savoir unpeu plus s’agissant de jeunes, voire de tous jeunessourds en phase d’acquisition du langage. Commentleur présente-t-on en langue des signes les catégoriesgrammaticales françaises, les articles, le verbe êtrepar exemple ? Comment réagissent-ils à cette présen-tation contrastive lSF/français ? il est sans douteencore un peu tôt pour que ces points soient abordés.ne doutons pas qu’ils le seront au fur et à mesure quel’expérience bilingue se pérennisera.

Ceci dit, la lecture de cet ouvrage est indispensable àqui veut prendre connaissance de l’état de l’enseigne-ment dit bilingue en France. vv

Philippe séRo-GUILLaUME, Linguiste, Direc-teur de la section Langue des signes françaises àl’EsIT

1. Enseigner et apprendre en Lsf, La Nouvelle revue de l’aIs, Hors-sériede juin 2005,cnefei. 2. Denis Lefèvre, Historique d’un projet bilingue à l’institut des jeunessourds de Bourg-en-Bresse, p. 67.3. annette Gorouben, clin d’œil sur… le progrès, p. 177.4. anne Van Brugghe, Grandir et apprendre selon ses besoins, Dialogue desourds et dialectique des méthodes, p. 158.

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°39 33

Présentation

aurélie est sourde profonde de naissance, appa-reillée à l’âge de 6 mois et implantée à 14 ans. ellea bénéficié du lPC dans son milieu familial depuistoute petite mais également du français signé auCeoP (Centre expérimental orthophoniquePédagogique). en intégrations colaire de 3 à 5 ansau sein de CoDali (Codage audition langage etintégration), elle a effectuée le reste de sa scolarité(de 5 à 20 ans ) en milieu spécialisé (CeoP, Coursmorvan, et lycée François Truffaut). elle aensuite effectué une formation d’éducatrice spé-cialisée en intégration à l’eFPP (ecole de Forma-tion Psycho Pédagogique).

Souvenirs d’adolescente sourde

“l’adolescence est une étape compliquée. lasurdité rend cette période plus difficile car lacommunication avec les autres n’est pas tou-

jours aisée. les adolescents entendants ont descodes de communication que j’ai eu du mal à per-cevoir, d’où un sentiment d’exclusion renforcée. Jeme souviens que depuis mon enfance, je me rendaischaque été en famille à la montagne où se réunis-saient des familles que je connaissais depuis tou-jours. au moment de l’adolescence j’ai ressenti unéloignement. etait-ce un sentiment provoqué parmon attitude ou la leur ? Je pense que cela venaitdes deux parties. Sans doute attendaient-ils “unmiracle ?” qu’ils puissent me parler naturelle-ment ? ou peut-être était-ce moi qui ressentais leschoses de façon plus sensible ? le fait est que cemilieu dans lequel je vivais tous les étés me parais-sait tout d’un coup moins confortable.

Je percevais certaines personnes mal à l’aise tan-dis que d’autres essayaient de se faire comprendreen articulant de façon exagérée. Ce qui auparavantne me gênait pas, prenait tout d’un coup de l’im-portance et signalait surtout à tout le monde quej’étais “différente”.

les adolescents vivent beaucoup par rapport à laradio, la télévision, aux médias en général, pleind’infos m’échappaient. J’étais obligée de deman-der et je n’étais pas très à l’aise pour solliciter lesautres, la peur que ce ne soit pas le bon moment.D’ailleurs comment savoir quand c’est le bonmoment, si la personne écoute ou pas ? Cela crée

une situation de dépendance permanente et quandon est ado on n’a qu’une seule envie : être le pluslibre et le plus indépendant possible.

avant l’arrivée du sous-titrage, j’étais dépendantedes autres pour ce qui concernait les sources d’in-formation immédiate notamment du code de mamère pour la télévision, plus particulièrement lejournal télévisé.

Souvent l’adolescent est passif (le fameux “bof”, le“je sais pas quoi faire”) il attend que les autresviennent à lui mais étant sourde, je devais multi-plier les efforts. J’ai eu parfois le sentiment de nepas avoir le choix, il fallait aller de l’avant, êtremoteur. C’est une démarche difficile à faire, quandon ne sait pas vraiment qui on est, ni ce qu’on veut.

Puis j’ai poursuivi ma scolarité dans un établisse-ment spécialisé, de la 6ème à la Terminale et j’aiconstaté un manque d’ouverture sur le monde detous ces jeunes sourds uniquement tournés versleur surdité. Comme s’ils étaient “aveugles” auxévènements qui se déroulaient autour d’eux. lasurdité pourrait-elle provoquer une certaine formede cécité au monde ?

mais en revanche, dans cet établissement j’ai pubénéficier de tous les moyens mis à notre disposi-tion par les enseignants : des cours photocopiés, desexplications supplémentaires dès que cela étaitnécessaire…

Sur le plan personnel pendant mon adolescence,j’ai effectué beaucoup de garde d’enfants sourds,de stages de lPC et de soutien scolaire. Grâce à cesexpériences qui m’ont énormément apportées enterme de responsabilité j’ai commencé à mener uneréflexion qui m’a amenée à choisir les études d’é-ducatrice spécialisée.

le regard des enfants sourds sur l’adulte est trèsdifférent selon que celui-ci soit sourd ou pas. lors-qu’ils rencontrent un adulte sourd il est souvent unmodèle dans la construction de leur identité. Faceà lui, ils peuvent se projeter dans l’avenir, imagi-ner quels adultes ils pourraient devenir. l’adultesourd peut témoigner de son ressenti, partager sonvécu. Cependant, attention à prendre de la dis-tance et faire la part des choses entre ce qui est liéà la surdité et ce qui ne l’est pas.

Parcours de vieParcours de vieDans le cadre de notre rubrique «parcours de vie», nous vous présentons le témoignage

d’Aurélie, 29 ans, sourde profonde de naissance et actuellement éducatrice spécialisée.

Elle nous fait notamment partager sa réflexion sur la difficulté à concilier la période de

l’adolescence et les problèmes rajoutés par la surdité. Son expérience personnelle et

l’analyse qu’elle a faite de cette période lui permet d’autant mieux d’accompagner et de

soutenir les adolescents sourds qu’elle côtoie dans l’exercice de son métier.

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°3934

Dans tous les cas même si cette période de l’ado-lescence est difficile il faut reconnaître que l’aidedes frères, et sœurs, des parents, des amis, et desprofessionnels de la surdité est importante : il estessentiel de se savoir entouré, aimé, compris.

Educatrice spécialisée auprès desadolescents sourds

et en lien avec mes collègues

Je travaille depuis septembre 2011 dans un grouped’internat mixte du collège dans lequel se trouventdes jeunes filles de 14 à 16 ans et des jeunes garçonsde 12 à 14 ans. ils utilisent des moyens de com-munication différents : la lSF, l’oral et le françaiscodé mais se retrouvent tous autour de la lSF.

les adolescents que nous accueillons, non seule-ment sont sourds, mais traversent une périodeparticulière de leur vie : l’adolescence, où l’enfanceet l’âge adulte se confrontent. Des transforma-tions physiques, psychologiques, personnelless’opèrent, auxquelles s’ajoute l’orientation sco-laire ou/et professionnelle. Cette période est sou-vent le temps pour l’adolescent de faire un bilan etde s’interroger sur sa place dans la famille, son his-toire familiale, sa filiation, son identité person-nelle. il est amené à réfléchir sur ses choix, sesenvies, ses possibilités, mais aussi à se questionnervoire critiquer les choix que ses parents ont faitspour lui : l’implant, l’enseignement spécialisé, oral,bilingue.

nous devons avoir du recul par rapport à tout cevécu et notre métier nécessite un bon équilibre per-sonnel. etre à l’écoute de l’adolescent est trèsimportant, car la vie des jeunes sourds n’est pas dutout simple, dans un milieu familial parfois pré-caire ou sous pression.

Comme la plupart des éducateurs connaissent lalangue des signes, et certains, comme moi, sontsourds, les adolescents en internat peuvent expri-mer leurs frustrations d’être souvent dans desfamilles qui privilégient l’oral, où ils se sententdonc isolés. Souvent lorsqu’ils arrivent le dialogueest déjà rompu depuis longtemps et ils manquentde confiance en eux. Ce qui explique parfois quecertains deviennent “des leaders” ils imposent leurautorité qui est reconnue comme légitime par lesautres car elle s’exprime en signes.

mon rôle est de valoriser les compétences indivi-duelles et d’encourager l’adolescent, par des entre-tiens hebdomadaires, des sorties sportives, desactivités, des séjours des visites au musée… lessorties extra scolaires sont très importantes dansmon travail car, sortis du cadre institutionnel, lesadolescents montrent une autre facette de leur

personnalité et la relation avec l’éducateur changede forme, ce qui apporte beaucoup dans leurconstruction. il est essentiel de leur faire com-prendre que l’adolescent sourd est d’abord un ado-lescent unique et important. et effectivement ilest sourd.

au travail d’éducateur s’ajoute le rôle de référentqui m’oblige à être vigilante à la circulation desinformations entre les différents professionnels(professeurs, psychologues, médecins, orthopho-nistes, assistants sociaux, collègues) intervenantauprès de l’adolescent, pour affiner et adapterensemble les objectifs de travail.

Parfois, le regard des familles sur les éducateurssourds est différent. ils peuvent nous questionneret sans doute aussi ne peuvent-il s’empêcher denous comparer avec leur enfant. lorsque certainstrouvent que je m’exprime bien par rapport à leurenfant, ils souhaitent parfois connaître mon par-cours. C’est à la fois gênant, mais malgré tout inté-ressant de les informer davantage sur les moyensdont j’ai pu bénéficier.

J’ai également la grande chance de travailler avecdes collègues qui s’adaptent facilement à mon han-dicap. ils ont l’habitude d’accueillir des stagiaireséducateurs sourds et s’expriment en français signé.

nous pouvons vivre pleinement notre fonctiond’éducateur car l’inJS possède des moyensadaptés tels que le téléphone portable, le courriel,et la plate-forme Viable pour prévenir les profes-sionnels sourds des contacts avec les familles,l’extérieur ou des professionnels entendants.

Je pense que d’avoir connu les difficultés de l’ado-lescence, rendue plus complexe par la surdité mepermet certainement d’accompagner les jeunessourds de façon plus privilégiée. mais par ailleursil me paraît également indispensable que des édu-cateurs entendants soient présents en binômesinon on pourrait craindre un “enfermement”. etl’objectif de notre métier n’est-il pas d’accompa-gner le jeune vers l’autonomie…?” vv

auréliecourriel : [email protected]

Parcours de vieParcours de vie

ConnaiSSanCeS SurditéS • marS 2012 • n°39 35

glossaireaFideo association française pourl’information et la défense des sourdss’exprimant oralementanPeda association nationale de parentsd’enfants déficients auditifsBuCodes Bureau de coordination desassociations de devenus sourds etmalentendantsCaMsP Centre d’action médico-socialeprécoceCedias etablissements et entreprises dessecteurs sanitaire et médico-socialCis Centre d’information pour la surditéCLis Classe d’intégration scolaireCMPP Centre médico-psycho-pédagogiqueCnaMts Caisse nationale d’assurancemaladie des travailleurs salariésCnsa Caisse nationale de solidarité pourl’autonomieCotoreP Commission techniqued’orientation et de reclassement professionnelCtes Commission territoriale de l’éducationspécialiséeCtnerHi Centre technique national

d’études et de recherches sur les handicaps etles inadaptationsdaP Déficience auditive profondeen education nationaleeVs emploi vie scolaireFnaPsy Fédération nationale des patientsen psychiatrieFnsF Fédération nationale des sourds deFranceGers Groupe d’études et recherches sur lasurditéHaBeo Handicap âge bientraitance écouteorientationiC implant cochléaireiJs institut de jeunes sourdsinJs institut national de jeunes sourdsinPes institut national de prévention etd’éducation pour la santéins Hea institut national supérieur deformation et de recherche pour les jeuneshandicapés et les enseignements adaptésLPC langue parlée complétéeLsF langue des signes françaiseMdPH maison départementale des personnes

handicapéesMdsF mouvement des sourds de FrancePPs Projet personnalisé de scolarisationraMses Réseau d’actions médico-psychologiques et sociales pour enfantssourdsrMi Revenu minimum d’insertionsaFeP Service d’accompagnement familialet d’éducation précoceseHa Section pour enfants avec handicapsassociéssessad Service d’éducation spéciale et desoins à domicilesseFis Service de soutien à l’éducationfamiliale et à l’intégration scolaireunPs union nationale des professions desanté uPi unité pédagogique d’intégrationunaFaM union nationale des amis etfamilles de malades mentauxunisda union nationale pour l’insertionsociale du déficient auditifuraPeda union régionale de parentsd’enfants déficients auditifs

HORS SéRIE N°4 : les Actes duColloque ACFOS VII

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