nr 512 territoires - iau Île-de-france · 2014-03-04 · cadre des plans u2000 et u3m, ont essayé...

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D e nombreuses mé- tropoles misent sur l’innovation techno- logique et le déve- loppement d’applications à la croisée des sciences, de l’ingé- nierie et du design, pour dyna- miser leur économie. Dans cette perspective, elles mettent en œuvre des politiques et des pro- jets d’aménagement destinés à attirer et faire travailler ensem- ble chercheurs et concepteurs issus de disciplines différentes. Souvent dénommées Science cities (2) , ces opérations traduisent une vision beaucoup plus holis- tique de l’aménagement urbain que celle ayant présidé au déve- loppement de technopoles dans les décennies précédentes. Elles s’efforcent de regrouper univer- sités, centres de recherche, entre- prises de haute technologie et sociétés de services spécialisés sous forme de clusters, mais aussi d’apporter logements, transports, commerces et loisirs, afin d’offrir un environnement de travail et de vie mieux intégré et plus attractif pour les chercheurs. Un enjeu d’actualité pour l’Île-de-France Un des principaux griefs faits aux campus universitaires aménagés en France depuis cinquante ans est leur fonctionnement en vase clos, dans de grandes enclaves périurbaines isolées. Disposant d’espaces paysagers abondants, mais souvent peu attractifs par manque d’entretien, sous-équi- pés en infrastructures sportives ou sociales, désertés la nuit et pendant les vacances scolaires, ils cumulent bon nombre des défauts rédhibitoires des espaces de travail spécialisés, produits par la planification urbaine contemporaine. Les campus récemment construits, dans le cadre des plans U2000 et U3M, ont essayé de remédier à ces pro- blèmes, en privilégiant des sites d’accueil plus petits, mais aussi plus centraux, bénéficiant de ce fait de meilleures offre urbaine et desserte. U2000 a ainsi permis d’équiper plusieurs villes nou- velles franciliennes avec des campus universitaires assez bien intégrés (St-Quentin-en- Yvelines,Cergy-Pontoise, etc.). Quant à U3M, son principal objectif a été de mieux articuler la recomposition spatiale des équipements d’enseignement supérieur et de recherche avec des opérations structurantes d’aménagement urbain, telle que Paris-Rive gauche. C’est ainsi que l’université Paris VII-Denis Diderot, l’École d’ar- chitecture de Paris Val-de-Seine et l’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco) ont pu intégrer le projet urbain du quartier Masséna, dans et autour des Grands moulins de Paris. Les programmes universi- taires s’insèrent soit dans d’anciennes halles industrielles, soit dans la trame des « îlots ouverts » conçue par Christian de Portzamparc et leur gabarit volu- métrique est assez semblable à celui des autres bâtiments de ce secteur. Espace urbain hybride – à la fois campus académique et zone de logements, commerces Science Cities : campus scientifiques et clusters dans les métropoles du XXI e siècle Tan Kok Mun / JTC L’aménagement de campus scientifiques est un enjeu majeur pour les métropoles cherchant à attirer et fixer sur leur territoire les activités de recherche et développement innovantes, fondées sur l’échange de savoirs interdisciplinaires. L’étude Science Cities (1) analyse et compare les opérations les plus novatrices. N° 512 - juillet 2010 www.iau-idf.fr (1) www.iau-idf.fr/debats-enjeux/campus- scientifiques-et-clusters.html (2) Par exemple Adlershof Berlin, ETH Zurich, Kista Stockholm. Note rapide one-north, nouvelle Science City de Singapour

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Page 1: NR 512 Territoires - IAU Île-de-France · 2014-03-04 · cadre des plans U2000 et U3M, ont essayé de remédier à ces pro-blèmes, en privilégiant des sites d’accueil plus petits,

De nombreuses mé -tropoles misent surl’innovation techno-logique et le déve-

loppement d’applications à lacroisée des sciences, de l’ingé-nierie et du design, pour dyna-miser leur économie. Dans cetteperspective, elles mettent enœuvre des politiques et des pro-jets d’aménagement destinés àattirer et faire travailler ensem-ble chercheurs et concepteursissus de disciplines différentes.

Souvent dé nom mées Sciencecities(2), ces opérations traduisentune vision beaucoup plus holis-tique de l’aménagement urbainque celle ayant présidé au déve-loppement de technopoles dansles décennies précédentes. Elless’efforcent de regrouper univer-sités, centres de recherche, entre-prises de haute technologie etsociétés de services spécialiséssous forme de clusters, mais aussid’apporter logements, transports,commerces et loisirs, afin d’offrir

un environnement de travail etde vie mieux intégré et plusattractif pour les chercheurs.

Un enjeu d’actualité pourl’Île-de-FranceUn des principaux griefs faits auxcampus universitaires aménagésen France depuis cinquante ansest leur fonctionnement en vaseclos, dans de grandes enclavespériurbaines isolées. Disposantd’espaces paysagers abondants,mais souvent peu attractifs parmanque d’entretien, sous-équi-pés en infrastructures sportivesou sociales, désertés la nuit etpendant les vacances scolaires,ils cumulent bon nombre desdéfauts rédhibitoires des espacesde travail spécialisés, produitspar la planification urbainecontemporaine. Les campus

récemment construits, dans lecadre des plans U2000 et U3M,ont essayé de remédier à ces pro-blèmes, en privilégiant des sitesd’accueil plus petits, mais aussiplus centraux, bénéficiant de cefait de meilleures offre urbaineet desserte. U2000 a ainsi permisd’équiper plusieurs villes nou-velles franciliennes avec descampus universitaires assez bien intégrés (St-Quentin-en- Yvelines,Cergy- Pontoise, etc.).Quant à U3M, son principalobjectif a été de mieux articulerla recomposition spatiale deséquipements d’enseignementsupérieur et de recher che avecdes opérations structurantesd’aménagement urbain, telle queParis-Rive gauche.C’est ainsi que l’université ParisVII-Denis Diderot, l’École d’ar-chitecture de Paris Val-de-Seineet l’Institut national des langueset civilisations orientales (Inalco)ont pu intégrer le projet urbaindu quartier Masséna, dans etautour des Grands moulins deParis. Les programmes universi-taires s’insèrent soit dans d’anciennes halles industrielles,soit dans la trame des « îlotsouverts» conçue par Christian dePortzamparc et leur gabarit volu-métrique est assez semblable àcelui des autres bâtiments de cesecteur. Espace urbain hybride– à la fois campus académique etzone de logements, commer ces

Science Cities : campus scientifiques et clusters dans les métropoles du XXIe siècle

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L’aménagement de campus scientifiques est unenjeu majeur pour les métropoles cherchant àattirer et fixer sur leur territoire les activités derecherche et développement innovantes, fondéessur l’échange de savoirs interdisciplinaires. L’étudeScience Cities(1) analyse et compare les opérationsles plus novatrices.

N° 512 - juillet 2010www.iau-idf.fr

(1) www.iau-idf.fr/debats-enjeux/campus-scientifiques-et-clusters.html(2) Par exemple Adlershof Berlin, ETH Zurich,Kista Stockholm.

Noterapide

one-north, nouvelle Science City de Singapour

Page 2: NR 512 Territoires - IAU Île-de-France · 2014-03-04 · cadre des plans U2000 et U3M, ont essayé de remédier à ces pro-blèmes, en privilégiant des sites d’accueil plus petits,

et bureaux –, ce « quartier universitaire » a l’ambition derecréer l’urbanité du Quartierlatin en l’adaptant aux modes devie contemporains. Il accueille,dans un espace resserré d’unevingtaine d’hectares, environ30 000 étudiants, chercheurs etenseignants. La récente sélection des projetsde Saclay et Condorcet pour« l’opération Campus »(3), vasteprogramme de modernisationimmo bilière d’une dizaine decampus universitaires français,interpelle la Région Île-de-Franceet de nombreuses collectivitésterritoriales franciliennes, car s’ilsne créeront pas d’université nou-velle, ces deux projets modifie-ront sensiblement la carte del’enseignement supérieur régio-nal. Ils se différencient non seu-lement par les disciplines scien-tifiques qu’ils regrouperont, oul’ampleur de leurs programmesimmobiliers, mais aussi par lecontexte territorial dans lequelils s’inséreront. Les questionsliées à leur programmation et àleur intégration seront donc, parnature, très différentes.

Évolutions sociétales etpédagogiques Parmi les enjeux qui préoccu-pent les responsables universi-taires, celui du développementdurable (souvent interprété res-trictivement sous l’angle de l’ef-ficacité énergétique) tient uneplace de choix, car les universi-tés se doivent d’être à la pointede l’expérimentation dans cedomaine, non seulement pourune question de réputation, maisaussi et surtout pour réduire leurscoûts de fonctionnement. Ellesse doivent d’être exemplaires etpour cela de devenir, d’une cer-taine manière, les « laboratoiresvivants » de cette progressionqualitative. La pénétration desnouvelles technologies, le déve-loppement de l’apprentissage parl’interdisciplinarité et l’expéri-mentation jouent désormais unrôle essentiel dans la formationuniversitaire. Le processus deBologne, en standardisant lescurriculums et les diplômes surle modèle du LMD(4), facilite lamobilité estudiantine en Europe,ce qui constitue un profond vec-teur de brassage culturel. Par ail-leurs, l’enseignement supérieurs’ouvre de plus en plus à d’au-tres catégories sociales et à d’au-tres classes d’âge, que ce soit autravers de la formation continue,du transfert de technologie, oude la vulgarisation scientifique.Pour rester attractives, les univer-sités doivent donc répondre àtoutes ces mutations en renouve-

lant leur offre de formation et enréaménageant leurs campus. Il nes’agit plus seulement pour ellesd’abriter des activités d’apprentis-sage classique, il leur faut désor-mais accompagner et favoriser lesévolutions pédagogiques et le rap-prochement entre science etsociété.

« Cluster » : un conceptprotéiformeL’identification et la cartogra phiedes principaux clusters interna -tionaux réalisée par l’IAU îdF(5)

a mis en évidence que ceconcept, à la croisée du secto-riel et du spatial, est complexeet protéiforme, donc difficile àsaisir par nombre d’acteurs terri-toriaux. Réactualisés et théoriséspar Michael Porter, professeuren stratégie d’entreprise à Harvard, les clusters prennent enpratique des formes souvent va -riées selon les contextes locauxet sont loin d’être homogènes.Dans tous les cas, il s’agit pourles acteurs publics de favoriserl’émergence d’un cadre propice

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(3) Mais aussi de trois autres sites : Paris, Cergy-Pontoise et Paris-Est – Marne-la-Vallée. Le gou-vernement fait le pari que ce mouvement dereconfiguration et de reconstruction permet-tra à la fois de faire des économies de fonctionnement et de renforcer la visibilitémondiale et la productivité de la rechercheuniversitaire francilienne.(4) Licence, master, doctorat.(5) SOULARD Odile, LARTIGUE Sylvie, Clustersmondiaux : Regards croisés sur la théorie etla réalité des clusters, Paris, IAU îdF, 2008.

Bâtiment des Grands moulins de Paris accueillant les services centraux del’université Paris VII.

Définitions

CampusSelon William Mitchell, un campus est « une unité foncière séparée, claire-ment délimitée, occupée par une série de bâtiments et d’espaces vertsplanifiés. L’accès au campus peut être contrôlé par des murs, portes et postesde gardiennage et sa séparation d’avec la ville voisine peut être aussi bienjuridique que physique»(1). En pratique, le terme est généralement utilisé pourdésigner une implantation universitaire même à l’échelle d’un seul bâtiment.

ClusterSelon Cooke et Huggins, un cluster est « la concentration géographiqued’acteurs technologiques unis par des chaînes de valeur économique, évo-luant dans un environnement bénéficiant d’infrastructures de soutien, par-tageant une stratégie commune et visant à attaquer un même marché »(2).

SérendipitéLittéralement, ce mot forgé par l’écrivain anglais Horace Walpole en 1754désigne la faculté de trouver des choses utiles ou agréables que l’on ne cher-chait pas intentionnellement, autrement dit le don de faire des trouvaillesou, par extension, d’innover. Il est d’usage courant dans le monde de larecherche scientifique anglo-saxonne.Jacques Lévy, dans un article traitant de la «sérendipité», avait souligné que,« en multipliant les ressources dans lesquelles puiser tout en les mobilisantselon des filtres appropriés, on peut créer des conditions plus favorablespour l’émergence d’innovations. On est ici dans la gestion d’une contradic-tion fort stimulante entre l’impossibilité de programmer la création et les ten-tatives pour la rendre possible, d’où l’idée d’augmenter ce qu’on pourraitappeler ‘‘la productivité du hasard’’ »(3).François Ascher avait lui-même relevé que « le hasard est devenu un enjeuurbanistique majeur. On s’aperçoit en effet que les villes modernes hyper-fonctionnelles, où l’on ne fait que ce que l’on a prévu de faire, sontennuyeuses et peu favorables à la créativité. On découvre ainsi le plaisir,mais aussi les performances de la Ville et de ses espaces publics, de ceslieux où il se passe des choses imprévues, où l’on croise des inconnus, oùl’on se rencontre par hasard »(4).

(1) MITCHELL William J., Imagining MIT. Designing a Campus for the Twenty-First Century,Cambridge, MIT Press, 2007.(2) COOKE P., HUGGINS R., High-technology clustering in Cambridge (UK), in AMIN A., GOGLIO

S. et SFORZI F. (dir.), The institutions of local development, Aldershot, Ashgate PublishingLimited, 2003.(3) LÉVY J., Serendipity (www.espacestemps.net/document519.html).(4) Préface de VAN ANDEL P., BOURCIER D., De la sérendipité dans la science, la techniqueet le droit, Chambéry, L’Act Mem, 2009.

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aux collaborations croisées.Sur un plan méthodologiqued’abord. Le succès du concept,en l’absence d’une définitionclaire, le rend paradoxalementde plus en plus flou : tout devientcluster, dès lors que l’on constateune concentration géographiqued’activités du même type ou unréseau d’acteurs économiquesfortement innovants. Le conceptrassemble parfois artificiellementdes initiatives très variées, visantà regrouper des acteurs indus-triels et scientifiques pour qu’ilsse rencontrent, s’organisent etdéveloppent des collaborationsau sein de réseaux, formels ouinformels, facilitant la circulationde l’information et attirant parleur dynamisme les talents. Lesautorités publiques interviennentalors pour cibler prioritairementleurs initiatives de développe-ment économique, qu’il s’agissede construction d’infrastructures(routes, incubateurs, parcs scien-tifiques, etc.), d’investissementsdans la formation et la basescientifique, ou d’aide à la miseen place de structures finan-cières ou stratégiques (capital-risque, instruments de veille stra-tégique).Dans les faits, le succès de cer-tains clusters a attiré l’attentionsur les économies externes quela concentration de connais-sances et les environnementslocaux peuvent produire, stimu-lant ainsi la compétitivité deséconomies régionales : la SiliconValley, les clusters catalans, ouencore les Kompetenznetze alle-mands, recouvrent par exempledes réalités très différentes. Ainsicertaines politiques ou initiativespubliques en faveur des clusterscherchent à favoriser un ancrageterritorial fort de leurs acteurs,qui jouent un rôle d’aimant surdes activités qui ont tendance às’agglomérer autour du cluster,à l’instar de l’emblématique Sili-con Valley, mais aussi des dis-tricts industriels italiens. D’autresinitiatives cherchent à stimulerla mise en réseau des compé-

tences et l’intensité des liens ausein d’une région ou d’un payspour promouvoir l’innovation etbénéficier localement de sesretombées économiques, com -me le font par exemple les Kom-petenznetze en Allemagne ou les« pôles de compétitivité » enFrance. Enfin, certaines des ini-tiatives se situent entre les deux,articulant des efforts pour stimu-ler un cœur de cluster localisé etpour faciliter une meilleure miseen réseau des compétences,autour et partir de ce « centre degravité ».

« Sérendipité », propriétéfondamentale des processuscréatifsEn analysant la question desaménités urbaines nécessaires àla vitalité des campus acadé-miques ou au dynamisme desclusters industriels, on constateque les acteurs en charge de leurdéveloppement s’efforcent deconcilier les fonctions tradition-nellement dévolues aux campusuniversitaires (enseignement,recherche, transfert de techno-logie, sports, etc.) avec celles desparcs scientifiques (accueil etservice aux entreprises techno-logiques) et des centralitésurbaines (résidence, loisirs, com-merce, culture), voire même defusionner plusieurs d’entre ellesau sein d’un même bâtiment. S’ilest rare que ce mélange s’opère

complètement au sein même descampus universitaires, pourd’évidentes questions de gestion(une université ne pouvant offrirsur son domaine propre, tous lesservices et infrastructures dont abesoin une population) et desécurité (certains laboratoiresmenant des recherches sensibleset/ou dangereuses), une organi-sation harmonieuse des diffé-rents usages dans le territoireenglobant un campus peut mal-gré tout être obtenue, dans le butde maximiser les interactionsville-université et de favoriser uningrédient essentiel de l’innova-tion que les Anglais dénommentserendipity. Cette dispositionqu’offre un lieu, ou un moded’organisation, pour favoriser desrencontres ou des collaborationsstimulant création, découverteou innovation, semble d’abordêtre le fruit d’une bonne coordi-nation de la conception et de lamise en œuvre des différents élé-ments d’un « projet de territoirescientifique », quelle que soitl’échelle de ce territoire.

Le MIT, un campusscientifique au cœur d’uncluster high-techLe MIT(6) est souvent cité enexemple comme l’archétype ducampus scientifique et figurerégulièrement en tête des clas-sements universitaires internatio-naux. William Mitchell, qui a

dirigé sa faculté d’architectureet d’urbanisme pendant dix anset conseillé son président autournant du XXIe siècle, expliquequ’il y a trois manières de con -trôler le développement d’un campus universitaire(7) : par unrèglement d’urbanisme localassocié à un guide architectural,par un plan-masse assorti d’unprogram me de constructions et,enfin, par une planification fle -xible, fondée sur l’élaborationde ré pon ses spécifiques aux de -man des et opportunités nou-velles se présentant en « tempsréel ». Le campus du MIT est

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(6) Massachussets Institute of Technology.(7) MITCHELL William J., op. cit.

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Cafétéria et librairie du Stata Center MIT.

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Le Stata Center, nouvelle icône architecturale du campus du MIT, devant le Brain and Cognitive Sciences Complex.

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essentiellement le fruit de cesdeux dernières approches. Lapremière a produit le «complexeprincipal» (1910-1930). Son style« Beaux-arts néo-classique »,confère une image plutôt monu-mentale et austère à cette partiedu campus, en raison même dela masse et de la symétrie modu-laire de cet immense édifice. Ladernière approche a engendré,depuis la fin des années 1990,une série de bâtiments remar-quables comme le Stata Center.Inauguré en mai 2004, ce trèsgrand bâtiment abritant lesdépartements d’informatique, derobotique et de linguistique(8), estrapidement devenu la nouvelleicône du campus. Sa conceptions’est adaptée en se complexifiantpour tenir compte de plusieursévolutions programmatiques, aupoint de devoir intégrer en der-nière minute un parking prévuen superstructure dans un autrebâtiment. Les entrées piéton-nières du nouveau parking sou-terrain logé sous le Stata Centerdrainent vers ses espaces publicsdes usagers qui n’y travaillent pasforcément, favorisant ainsi lesopportunités de rencontre entreinformaticiens et chercheursd’autres disciplines. Les géné-

reux espaces de circulation durez-de-chaussée ont été dessinésde manière à favoriser les ren-contres et le brassage en multi-pliant les recoins éclairés naturel-lement, qui invitent à y flâner ouà s’y réunir en petits comités,d’autant plus qu’ils sont agré-mentés de sièges et de tableauxnoirs, et qu’ils distribuent desespaces diversifiés tels quecrèche, auditoriums, salles decours ou cafétéria.Avec le Brain and CognitiveSciences Complex, un bâtimentde recherche en neurologieconstruit face au Stata Center età deux pas de deux autres grandsinstituts de recherche, le MIT aréalisé un pôle de laboratoiresdans un secteur relativementpériphérique et relégué de soncampus, jouxtant une vieillezone industrielle. Ce quartierd’une quarantaine d’hectares(Kendall Square), aujourd’huifortement réaménagé en lienavec la ville de Cambridge,constitue le cœur d’un cluster dehaute technologie en plein essor.Il est en passe de devenir unchampion mondial de larecherche en biotechnologies.Le mécanisme-clé de ce proces-sus de transformation urbaine et

économique est bien sûr le trans-fert de technologie des labora-toires d’un campus vers des start-up voisines gérées par des uni-versitaires entrepreneurs, desétudiants à temps partiel ou fraî-chement diplômés. Mitchell explique que ce clustern’a jamais été prévu et pensécomme tel à l’origine, mais qu’ila émergé d’un processus orga-nique : « Pour comprendre salogique génétique, il ne faut avoirni représentation idéalisée de ladivision des tâches entre scienceet ingénierie, ni vision urbanis-tique faite de statues et de symé-trie, mais plutôt regarder lesdiverses manières avec les-quelles la recherche mondiali-sée et les impératifs écono-miques rencontrent les exi-gences locales dans un tissuurbain complexe, historique-ment déterminé et en évolutionperpétuelle.»(9)

Laurent Perrin, Odile Soulard

Note Rapide - N° 512Science Cities : campus scientifiques et clusters dans les métropoles du XXIe siècle

Directeur de la publicationFrançois DugenyDirectrice de la communicationCorinne GuillemotResponsable des éditionsFrédéric TheuléRédactrice en chefMarie-Anne PortierMaquetteVay Ollivier------------------------Diffusion par abonnement76 € les 40 numéros (sur deux ans)Service diffusion-venteTél. : 01 77 49 79 38www.iau-idf.frLibrairie d’Île-de-France15, rue Falguière 75015 Paris Tél. : 01 77 49 77 40 ISSN 1967 - 2144

Pour en savoir plus• Site web : www.iau-idf.fr/debats-

enjeux/campus-scientifiques-et-clus-

ters.html

• YUSUF Shahid et al, Growing Industrial

Clusters in Asia. Serendipity and

Science, Washington D.C., The World

Bank, 2008.

• SOULARD Odile, LARTIGUE Sylvie, Clus-

ters mondiaux : regards croisés sur

la théorie et la réalité des clusters ;

identification et cartographie des prin-

cipaux clusters internationaux, Paris,

IAU îdF, janvier 2008.

• HOEGER Kerstin, CHRISTIAANSE Kees, et

al, Campus and the City - Urban Des-

ign for the Knowledge Society,

Zurich, Gta Verlag, 2007.

• MITCHELL William J., Imagining MIT.

Designing a Campus for the Twenty-

First Century. Cambridge, MIT Press,

2007.

• COOKE P., HUGGINS R., « High-techno-

logy clustering in Cambridge (UK)»,

dans AMIN A, GOGLIO S. et SFORZI F.

(dir.), The institutions of local deve-

lopment, Aldershot, Ashgate Publi-

shing Limited, 2003.

(8) Espace de 70 000 m2 conçu par FrankGehry, architecte du musée Guggenheim àBilbao.(9) MITCHELL William J., op. cit., page 99.

Méthodologie

Des études de cas internationalesDans une série de monographies regroupées sous le titre générique de Science Cities, l’IAU îdF s’attache à croiser l’ana-lyse du projet immobilier universitaire avec celle du projet économique métropolitain. Il cherche à comprendre com-ment les campus s’insèrent physiquement dans leur quartier et, économiquement, dans l’écosystème industriel ettechnologique de leur métropole. Il se penche en particulier sur les relations de coopération et les partenariats déve-loppés par les universités avec les acteurs politiques et économiques. Dans un travail de benchmarking international,à la fois urbanistique, universitaire et économique, il est important d’analyser des opérations produites dans des métro-poles ayant une réputation d’innovation et d’excellence dans ces trois domaines. Même si les métropoles européennesnous sont plus familières, il est essentiel de regarder également vers l’Amérique du Nord, qui fait encore figure de réfé-rence en matière de synergies entre l’université, la recherche et l’industrie, ainsi que vers l’Asie du Sud-Est, dont le dyna-misme en matière de R&D et d’innovation est désormais établi. Les études de cas seront choisies de manière à cou-vrir un large éventail de situations, avec des campusacadémiques ou des campus d’entreprises à forte inten-sité de R&D, avec des sites de centre-ville ou périur-bains, des opérations de création, de réaménagement oude consolidation. Les premières monographies, publiéesdébut 2010, sont ainsi consacrées respectivement àdeux métropoles européennes, petites par la taille com-parée à l’Île-de-France, mais néanmoins exemplaires àcertains égards : Helsinki et Zurich. Deux autres Noterapide leur seront consacrées.

Singapour

ParisBoston

San Francisco

Helsinki

ZurichSéoul

0 1000 km

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