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Notes du mont Royal Ceci est une œuvre tombée dans le domaine public, et hébergée sur « No- tes du mont Royal » dans le cadre d’un exposé gratuit sur la littérature. SOURCE DES IMAGES Google Livres www.notesdumontroyal.com

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Page 1: Notes du mont Royal · Oratorem voluit effeme, non Prologum: Voftrum judicium fecit, me aclorem dédit.* Sed hicaélor tantumpoteritafacundia, Quantum iUepotuit cogitare commode,

Notes du mont Royal

Ceci est une œuvre tombée dans le domaine public, et hébergée sur « No-tes du mont Royal » dans le cadre d’un

exposé gratuit sur la littérature.SOURCE DES IMAGES

Google Livres

www.notesdumontroyal.com 쐰

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L E S ' Qa* ,• C

OMEDIES D E \

TERENCE, RADUITESen FRANÇOIS,

Par M AD AME D*** A ï E O D E S R E M A R QJJ E S.

dernière Edition revue', tarrigee, & enrichie de figures à chaque Çomefiie,

T O M E I I

Suivant la Copie Je Farte.

A A M S T E R D A M , Chez J A c^u E s O L L I E E ,

II. DC. L X X X X L

•V.

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P U B L I I

[TERENTII ! HEAUTON-' TIMORUMENOS.

LHEAUTON TIMORUMENOS

DE

TERENCE-

A ij

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T I T U L U S, feu DlDASCALIAjl

ACTA LUDIS MEGALENSIBUS,\

L- CORNELIO LENTULO, L. VA-

LE RIO FLACCO AS,D I L I B U S

CURULIBUS. EGIT AMBIVIUS

TURPIO. MO DOS FEC'lTFL AC­

CUS CL AU DU. G R ASC A EST

MENAS DRU. ACTJ FRÏiiUMC

TIBIIS IMPARIBUS. DEINDE

DU A BUS, DEXTRIS. ACTA ETIAMÇ

TERTIO. TI. A X MTRONIO. M*

JUVENTIO C O U

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L E TITR E.

C E T T E P I E C E F U T J O U E ' E

P E N D A N T LA FESTE DE CY.

B E D E , S O U S LES EDILES CU-

R U L E S L. CORNELIUS LEN-,

TULUS, ET L. VALERIUS F L A C-

CU'S, PAR L.A T R O U P E D* A M-

B I V ï U S ' T U R P I O. F L A C C U S"

A F F R A N C H I D E C L A U D I U S

F I T L A M U S I O J J E , E L L E E S T

P R I S E D U G R E C D E M E N A N T

DRE. ELLE F U T JOUE'E PRE-

MIEREMENT A Vt C D E S F L U-

T E S I N E G A L E S } EN S U I T E

A V E C LES D E U X F L U T E S

DROITES: ET ELLE LE FUT POUR

LA TROISIE'ME FOIS S O U S LE

C O N S U L A T D E T I T U S SE M.

P R O N I U S , ET DE M A R C U S

J U V E N T I U S .

A iij

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P E R S O N N E DRAMATISA

TROLOGUS. CHREME S,fttuxtfaterCliti}bom&

Antifbik. CZITIPHO, *doUfcms,filim Chrtmttis. MEHEDEMUS, faux, puterClinU. C h l N I A, aioltfctns, filiusMenedemi. SOS T R A T A.uxorCbrtmetU. ANTIPHI L AyfilisCbrometù&SofirsiU,

amicaClinU. B A C C HI S, meretrixstmicaClitiphoms, HUTRlX AnttfhiU. T H R T G I A, Anc'tllxBacehidit. S T RU S, Servus Clitifbonis. D R 0 M O, Servus ClinU.

Scena eft in pagoSuburbano.

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PERSONNAGES DE LA PIECE.

L E P R O L O G U E . C H R E M E S, peredeClitiphori Bc d'Anti»

phila. CLITÎPHON, filsdeChremes. jMENEDEME. père de Clinia. CLINIA, fils deMenederae. SO S TR A T A,, femme de Chrêmes. A N T I P H I L A , fUlede Chrêmes Bc de

Softrata, Maiftrefle de Clinia. B A C C HI S. Courtiiane, MailrrerTedeClL

tiphon. L A NOURRICE d'Antiphile. PHRYGIA, Servante de Bacchis. S Y RU S, Valet de Clitiphon. O R O M O N , Valetdeainia,

L/^Scen* tftdattt un petit Hamsupris fAthtnts,

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6*

N E eut fit voftrûm minmt, cûr partes fehï Eoe'ta dederit, quafunt adolefienttum:

là primumdicam t deinde<quod vent elo*-

quar.

Ex intégra Grtca integram Comcediam

f. Hodie fitm acturus Heauton-timorumettoni-

Duplex que, ex argumenté fi*Sa eftfimplici.

Novameffé oftehdi, & que effet, hune, qui-feripferit,

Et cuja.Gratafit, nipartemmaxumam -

Exifiimarem fiire voftrûm, id dicerem.

io. Nunc, quam ob rem bas partes didicerim » paucisdabo.

Oratorem voluit effeme, non Prologum:

Voftrum judicium fecit, me aclorem dédit.*

Sed hicaélor tantumpoteritafacundia,

Quantum iUepotuit cogitare commode,

,ie. Jfflui orationem hahc fcripfit, quam dittu-ru' fitm.

Namquod rumores diftulerunt malevoli,

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LE

P R O L O G U E .

AFin qu'aucun de vous ne trouve étrange que nôtre Poète ait donné à un Vieillard

un rôjp qu'on ne donne d'ordinaire qu'aux jeunes gens, je vais, avant toutes cnofes, vous éclaircir ce point, 8c enfuite je vous di-ray ce qui m'amène devant vous. Je dois au-jourd'huy reprefenter l'Heauton-timorume-nos, qui eft une Pièce tirée toute entière d'u­ne feule Comédie Greque , avec cette diffé­rence , que le fujet eft double , quoi qu'il ne foit que lïmple dans l'original. Vous favez prcfentement, Meilleurs, quelle eft cette Co­médies 8c vous comprenez qu'elle peutpaflbr pour'nouvelle. Je vous dirais maintenant qui en eft l'Auteur, 8c le nom du Poète qui l'a faite en Grec, li je n'eftois perfuadé qu'il n'y a prefque perfonne parmi vous à qui ces deux choies ne foient également connues. Je vais donc vous expliquer pourquoy noftre Poète envoyé ici un nomme de mon âge ; c'eft, Mef-fleurs, pour deffendre fa caufe, 8c non pas pour vous faire le Prologue de fa Pièce ; il a voulu que vous foyez les Juges, Se que je fois l'Avocat ; mais cet Avocat n'aura qu'au­tant d'éloquence que luy en aura pu donner celuy qui a fait le Plaidoyer que je vais reci­ter devant vous. Premièrement pour ce qui cil des bruits que quelques envieux ont femez,

Tome II. B

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t * PROLOGUS.

Multos contam'majfe Gracas, dumfacit

Paucas Latinas : faclum hic ejfe id non ne-

got:

Neque fe id pigere , e$> demie faBurum au-

tumat.

10 Habet bonorum exemplum : quo. exemple

fibi

Licere id facere, quod illi fecerunt, put ut.

Tum quod malevolus vêtu* Poe ta dictitat,

Repente ad fiudium hune fe opplicajfe mufi-

cutn >

Amicûm ingenio fretum, haudnaturofua:

tf Arbitrium voftrum, voftra exifiimatio Valebit. Quamobrem omîtes vos oratos ve~

Ne plu* iniquûm pojjit quàm tquùm ora-tio.

Facile oqui fuis , date crefeendi cepiam

Novarum qui jbeBandi faciunt copiam, 30 Sine vitik : ne ille pro fe diBum exiftu-

met, Jjlui nuper fecit fervo currenti in lia Deceffe populum. cur infano ferviat î

De illius peccatis plura dicet, cttm dabit Altos nova* > nififinem maled'tBU facit.

3f Adepte aquo animo : date poteftatem mihi% Statariam agere ut liceat perfilentium:

1

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P R O L O G U E . i r que -noftre Poète a confondu 5c mêlé plufieurs pièces Grecques pour en,faire peu de Latines; c'eft dequoy il ne prétend pas fe defièndre; il dit au contraire qu'il ne s'enrepentpoint, 8c il eipere qu'il le fera encore à l'avenir. J l a pour luy l'exemple de beaucoup de gens fort habiles , 8c il prétend avoir droit de faire ce que tant deperfonnes de mérite ont fait avant luy ayee beaucoup de fuccés. En fécond lieu, Meilleurs, un vieux Poète envieux luy repro­che qu'il s'elr mis tout d'un coup à faire des Comédies, s'appuyant plutôt fur l'efprk de fes amis, que furfon heureux naturel. ' Ç'eft à vous à examiner cetteaceufation, il veutbien s'en rapporter à voftre jugement, 8c fans ap­pel ; la feule prière que j'ay à vous faire pour luy, c'eft que vous n'ayez pas plus de petite à écouter les contes des méchans, qu'à vous ren­dre aux fentimens des gens de bien ; ibyez ju-ftes, 8c par vos applaudiûemens donnez du courage a ceux qui travaillent à vous donner des Pièces nouvelles 8c fans défauts. * Je dis Voyez les uns défauts, afin que ce méchant Auteur qui Remar-vous fit voir l'autre jour une Pièce de fa fa- f»«. çpn, dont toute la beauté confiftoit en un Ef-clave qui couroit de toute fa force, Ce devant qui le peuple s'enfuyoit ; ne prenne pas cela pour luy. Pourquoy Terence s'àmuferoir-il à parler pour- un iou.' Si ce vieux rêveur ne met fin à fes impertinences, nous vous entretien­drons plus aulcfig de toutes fes fottifes, quand nous vous donhcron$"n'autres Pièces. Ecou­tez-nous avec un efprit defintereflë, 8c don-nez-moy la liberté de joiierdevant vous, fans eftre interrompu, cette Pièce qui eft d'un ca­ractère tranquille 8c repofé; afin que j e n a

• B ij

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I l TROLOGUS. Ne femper férues currens, iratus fentx, Edax parafitus , fycophanta autem impu­

tons, Avants leno, ajpdue agendi fint mihi

40 Clamore fummo, cum labore maxumo. Meaxaufn, caujam hancjufiam ejfe animum

inductte, Ut aliqua pars laberis mmuatur mihi. Nàm nunc novae qui firibunt, nil panant

fini: Laboriofa fi qutt efi, ad me curritur: Si levis efi, ad alium mox defertur gregem. In hoc efi pur a oratio. experimini, In utramque partent ingenium quid pojpt

meum. Si nunquam avari pretium fiatui artime*, Et eum ejfe quafium in animum induxi ma-

xumum, fo Jfhtam maxumi firvire vofiriicommodis,

Exemplum fiatui te in me, ut adolefient uli Vobis placere Jhtdeant, potius quantfibi.

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P R O L O G U E . i } ibis pas toujours obligé de jouer aux dépens démon poulmon, Se avee bien de la peine, des pièces où l'on voit un Efclave éibuffle à force d'avoir couru; un Vieillard en colère, un Parafre gourmand , un impudent Syco-phante, & un avare Marchand d'Elêlaves. Pour l'amour de rnoy, 8c en faveur de mon âge, ayez la complaifance de fouffrir que je com­mence à n'effre plus fi chargé, car ceux qui font aujourd'huy des Comédies, n'ont aucun ' égard à ma vieillefle; s'il y en a une extrême­ment pénible, on vient à moy, 8c celles qui font faciles à jouer, on ne manque jamais de les porter à une autre troupe. Le Mile de cette Pièce eft pur; voyez donc ce que je puis dans l'un & dans l'autre de ces deux caraâeres. Si je n'ay jamais confulte l'avarice pour fixer un prix à mon art, 8c fi j'ay toujours pris pour le plus grand gain que je pûfle faire, l'honneur de fervir à ycs divertiflemens, faites en moy un exemple qui donne aux jeunes gens une en­vie de travailler à vous plaire plûtoft que de fuivre leurs plaifirs.

8 iij

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P U B L I I

TERENTII HEAUTON-

T I M O R U M EN O S.

A C T U S P R I M U S . S Ç E N A I.

CHREMES, ME NE DE MU S.

CHREMES.

Q Unnquam hoc inter nos nupera noti-. t'm admodum eft,

Iride. adtb quod agrum in proxumtt hic mercftttti es,

Nec rei fere fane amplius quijquam fuit ;

Tamen vel virtus tua me, vel vicinitas, S J$u°d ego in propinqua parte amicitU puto ;

Eacit, ut te attdacter moneam, & familiariser,'. J2>uod mihi zidere prêter atattm tuam

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LHEAUTON-TIMORUMENOS

D E

T E R EN C E -

A C T E PREMIER. S C E N E I.

C H R E M E S , M E N E D E M E .

C H R E M E S .

QUoy qu'il n'y ait que tres-peu de temps que nous nous connoiffions , Se que ce ne (bit que depuis que vous avez acheté une maison prés de la mienne

( car c'eftprefque toute la liaiibn qui eft entre nous ; ) néanmoins, ou voflre vertu, ou le voifinage, qui, félon moy, tient le premier rang après l'amitié, m'oblige à prendre la li-berté de vous dire en ami, qu'il me femble que vous vivez d'une manière qui ne convient

B iiij

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i* HEAUTON-TIMORUMENOS. Facere, sfrpraterquam tes te adhortatur tua. Nam.pro deâm atqut hominum ftdtm \ quid

vis tibi l 10 JOJhiid quarts!annos fexagmtanatus es,

Aut plus eo, ut conjicio: agrum m hit regio-ntbus

Meiiorem, neque pretii major is nemo habet: Servos complures ; proinde quafi nemofiet, Ita tute attente illorum cfficta fungere.

if rfunquam tam mane egredior, neque tam vefpere

Domum revortor, quin te in funde confpi-cer

Fodere, aut arare, aut aliquid ferre : deni-que

Nullum remittis temput, neque te refpicis. Hoc non voluptati ejfe, fatis certbfcio.

xo At enim me, quantum hic operis jiat, pceni-tet.

J$)uod in opère faciundo opéra confumis tua. Si fumât in iliis exercendis, plut agas.

MENEDEMUS.

Chrême, tantumne ab re tua eft otii tibi, Aliéna ut cures, eaque, nihil qua ad te atti-

ntnti

CHREMES.

xrHomo fum: humant nihil » me alienum pet­to.

Vel me montre hoc, vel percontari puta ; Rectum eft ? ego ut faciam mon î ut deter-

ream.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 17 point à un homme de voftre âge & de voftre bien. Car au nom des Dieux, qu'avez-vous contre vous-mefme? que cherchez-vous? au­tant que je le puis connoiftre, vous avez fbi-xante ans, ou davantage ; dans tout ce pais il n'y a perfonne qui ait une meilleure Terre, ni de plus grand revenu j vous avez plufieurs Efclaves ; cependant vous faites avec autant d'application tout ce qu'ils devroicnt faire, que fi vous n'en aviez point- Quelque matin «HOC je forte de chez moy, ou quelque tard que je me retire, je vous trouvetoôjoursbê­chant ou labourant, ou portant quelque far­deau j enfin vous ne vous donnez aucun relâ­che, 8c vous n'avez nul égard à vous-mefme. Je fuis fur que ce n'eft point pour voftre plai-jir que vous en ufez ainfi. Vous me direzr peut-eftre, Je ne fuis pas content du travail que font mes Efclaves. Si vous employiez à les faire travailler tout le temps que vous mettez-, à travailler vous-mefme , vous avanceriez beaucoup davantage.

M. E N E D E M E-Eft-il poflïble , Chrêmes, que vous ayez fi

peu d'affaires chez vous, qu'il vous refte du temps pour vous mêler de celles des autres, & de ce qui ne vous regarde en aucune façon?

C H R E M E S . Je fuis homme, & en cette qualité je croy

eftre obligé de m'inrerefièr à tout ce qui arri­ve à mon prochain : prenez ce que je vous-dis,, ou pour des avis que je vous donne, ou pour ies inftrucrjons que je vous demande jafiaquè fi ce que vous faites cft bien fait, je le fafle comme vous-, ce s'il cft mal, que je vous ea détourne-

B v

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»8 HEAUTON-TIMORUMENOS.

MENEDEMUS. Mihïfic eft u/ttt : tibi ut opus eft faite, fa*

ce. CHREMES.

An quoiquam eft ufus homini,/e ut cruciett

MENEDEMUS. miki.

CHREMES. 30. Si quid laboris eft , noUem. fed iftud quid

mali eft ? Jijîaafo, quid de te tantum merniftii

MENEDEMUS. heu. hoi.

CHREMES. Nelacruma, atqtu ifthuc , quidquid eft ,ftt

me utfciam. Ne retire : neverere. crede , inquam , mihi » Aut con/olando, aut confilio, aut re juvero.

MENEDEMUS.

$f Scire hoc -vis ? CHREMES. hac caufa equidem, quadixi tibi,.

MENEDEMUS. Dicetur.

CHREMES, at iftos raftros interea tamert

Depone, ne laborn.

MENEDEMUS. minime '.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. i«

M E N E D E M E . Je trouve à propos de faire ce que je fais ;

pour vous, faites comme il vous plaira. C H R E M E S .

Jamais perfonne a-t-il trouvé à propos defe tourmenter ?

M E N E D E M E . Ouy, moy.

C H R E M E S -Si vous aviez quelque grand fujet dede'plai-

fir, je ne dirais rien j mais que vousefl-il ar­rivé ? je vous prie, qu'avez-vous donc com­mis de ii terrible que vous vous traitiez û cruellement ?

M E N E D E M E . Ahi, ahi!

C H R E M E S . Ne pleurez pas, dites-moy, je vous prie,'

ce que vous avez, ne me le cachez point, ne craignez rien, fiez-vous à moy, vous dis-je, je vous fbulageray, ou en vous confolant, ou en vous aidant de mes confeils Se de mon bien, s'il eft neceuaire.

M E N E D E M E . Lé voulez-vous favoir?

C H R E M E S . Ouy, feulement pour laraifbn que je viens}

de vous dire. M E N E D E M E .

Vous le fàurez. C H R E M E S .

Mais cependant quittez ce râteau, ne vou| fatiguez pas.

M E N E D E M E . Je ne le quitteray point.

Bvi

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»o BEAUTON-TIMOR.UMENOS.

CHREMES. quam rem agît i"

MENEDEMUS. Sme me, vacivom temput, ne quod duim

mihi Laboris.

CHREMES, nonfinam, inquam. MENEDEMUS.

ah > non aquumfaùs. CHREMES.

40 Hui, tam graves hos que fol MENEDEMUS.

fie meritum eft meum. CHREMES.

Hune loquere. MEHEDEMirS.

Eilium unicum adoltfcentulum Habeo, ah, quhl dixihaèere me\ imo habur*.

Chrême, Hune habeam neene; incertum eft.

CHREMES, quid ita ifthuc l

MENEDEMUS. fcih.

Eft i Cor'mtho hic advenu anus paupercula. 4f- Éjuefiliam Ole amare caepit perdit e,

Eropejam ut pro uxore haberet. hoc clam m* omnia.

VU- rem refiivi, coepi non humaniter, Heque ut agrotum animum- decuit adolefeen-

1 tu» Traiktre ,fid vi rfp via pervolgata patrum..

fu ftguotidie aecufabam: htm ! tièine hoc dieu. tant

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r L1IMUTON-TTMORUMENOS. i r

C H R E M U Que voulez-vous faire?

M E N E D E M E . Laiftez-moy , que. je ne me donne pas un

feul moment de repos. C H R E M E S . , . .

* Te ne le fouffriray pas, vous dis-je. J ? J M E N E 6 E M E. 'fi' M

Ah, ce que vous faites eftinjufte. tnejmt C H R E M E S . "!"' "

Quoy, un râteau fi pefant ! r*tt*** M E N E D E M E .

Apres ce que j'ay fait, j'en devrais avoir un bien plus pefant encore.

C H R E M E S . Parlez maintenant.

M E N E D E M E . J'ay un fils unique fort jeune. Ah, que dlf-

jt> j'ay un fils l je Pavois , Chrêmes ,.. car je ne fay fi je Pay encore.

C H R E M E S . Comment cela ?

M E N E D E M E . . Je vais vous le dire.' IL y a icy une certaihe-

vieille femme de Corinthe, qui n'a point de bien ; mon fils devint éperduè'ment amoureux: de la fille, de forte que fans que j'en fçûfle rien, il vivoitdéja avec elle comme fi elle cuit efté fa femme. Si-toft que je l'eus appris, je me mis inhumainement à le traiter, non pas comme je devois traiter un eforit malade,mais avec foute la dureté & toute la- rigueur que les pères exercent dans ces occafions. Tous les jours je luy faifois des reproches : Quoy, luy> dilbis-je, crovezrYous pouvoir continuer ce

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i l HEAUTON-TÏMORUMENOS. Licere fperas factre, me vivo pâtre, Amicam ut habeas prope jam in uxoris lo-

cot Erras, fi id créais, ejome ignoras, Clinia. Ego te meumejje dicitantifier volo,

ff. Dam, quod te dignum eft,faciès : fed, fi id no» facis,

Ego, quod me in te fit facere dignum, invene-ro.

Huila adtoex re ifthuc fit, nifiexnimiootio, Egoifthucatatisjsm arnori opérant dabam, Sed in Afiam abiihinc propttr pauperiem, ai;

que ibi 60. Simul rem érgleriam armis belli reppert.

Eoftremb, adeb res rediit : adolefcentulus Sape eadem, fr graviter audiendo viSus eft : ALtate meputavit ryfapimtsa Elusfcire, & provÛere, quam feipfum fi-,

bi. In Afiam ad regem militâtum abiit, Chrtj

me. CHREMES,

guidais] MENEDEMUS.

clam me profeSus, menfti très abeft.

CHREMES.

Ambo accufandi : etfi illud inceptum ta-mm

Animi eft pudmtis fignum, ér tâm infirmai. MENEDEMUS.

Ubi comperi ex Us, qui eifuere ctmfcii, Domum revorior mœftus, atque anime fera

70. Perturbato, atque inctrto pra egritudine. Adfido; accurrunt fervi : foccos detrahuntt

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L'HEAUTON-TÏMORUMENOS. 13 honteux commerce tant que je feray en vie, 8c vivre avec cette créature, comme fi vous erriez mariez ? Vous vous trompez fort, fi vous le croyez, Qinia, 8c vous ne me connoiflez guè­re. Je vous regarderay comme mon fils pen­dant que vous ferez ce que vous devez; mais fi vous ne le faites pas, je feray ce que je dois : tout ce libertinage ne vient que d'oifi-veté ; à voftre âge je ne ibngeois pas à faire l'amour ; me voyant pauvre, j'allay porter les armes en Afie, 8c là par mon courage j'acquis de la gloire 8c du bien. Enfin cela vint à tel point, que ce pauvre garçon, à force d'enten­dre toujours la melme choie, 8c de le voir traiter durement, n'eut plus la force de refif-ter; il crût que mon âge, 8ç l'amitié que j'a-vois pour luy , me faifbient voir plus clair que luy-mefme en ce qui le concernoit ; ah, Chrêmes, il s'en alla en Afie fervir le Roy de Perfe.

C H R E M E S . Que me dites-vous là !

M E N E D E M E . Il partit fans m'en rien dire ; il y a déjà trois

mois qu'il eil abfent. C H R E M E S .

Vous avez tous deux tort. Ce qu'il a fait néanmoins part d'un bon naturel , 8c d'un cœur bien fait.

M E N E D E M E . Lorfque ceux à qui il avoit fait confidence

de fon defièrn , m'eurent appris qu'il eftoit parti, je m'en revins chez moy accablé de triiteflc , l'efprit prefque troublé, 8c ne fa-chant à quoy me refoudre dansl'excezdemon chagrin. Je prens un fiege, mes valets accou-

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XJ, HEAUTON-TÏMORUMENÔSV Video altos feftinare, lectos fternere, Coenamapparare: pro fe qui/que feduli Faciebant, que illam mihi lenirent tnife-

riam. Jf. Vbi video hoc, ccepicogitare,Hem '.tôtmet

Solius folieiti fient caufit,. ut me unum ex-pleant i

AncilU, tôt me vefiiant ? fitmptus dont* Tantôt ego folus faciam ? fed gnatum uni-

cum, JQuem pariter uti hisdecuit, autetiam am-

- plius, 80. 3uod Ma atasmagisadhecutendaidonta

'fi' Fgoeumhine ejeci miferuminjufpitia mea-Malo quidem me dignum quovis députent, Si id faciam 1 nom ufque dam ille vitam il-m lam colet, ïnopem, tarins patria 06 mens injurias ,

te. Interea ufqUe Mi de me fupplicium da-bo ,

Labornns, qutrens, pareens, Mi ferviens-Ita facioprorfits, nihH relinqua in sutibus, Hec vas ,nec vefiimentum: corrafidmnia. Ancillas, fervos , nifi eos x qui opère rufii-

co tgo. Faciundo facile victum exercèrentfuunu

Omnes produxiacvendidi. infcripjiillicb Aides: mercedem, quafi talent a ad quindecim Coëgi : agrutn hune tnercatus fum : hit me

exerceoy

Decrtvi tantifber me minus injurie,

etf. Chrême, meo gnato facert, dum Jiam mi-fer:

Jxetmihxfas efje ulla me voluptate hit frai*

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. i f sent > ]es uns me deshabillent > les autres ie hâtent de mettre le couvert. & d'apprefterle louper ; enfin chacun fait de fon mieux pour adoucir mes inquiétudes. Quand je vis tout cet empreflement, jemcmisàfongerenmoy-mefmc, quoypour moy tout feultantdegens feront embarraflez ? tant de gens feront em-preflez àmefervir? j'âuray tant d'Eiclaves qui ne feront occupées qu'à faire les étofes pour mes habits ? je feray tout feul tant de depen-fe ? 8c mon fils unique qui dcvroit avoir part à tout cela autant 8c mefme plus que moy , efiant d'un âge à faire plus dedépenfe, ce fils unique, dis-je , mes durerez l'ont chafle! ah. fi je continuois cette manière de vivre, il n'y a point de malheur fi grand dont je ne me trouvant digne ! Jette le fera*pas aufli, 8c tout le temps qu'il fera dansla muere où il eft, ban-ni de fa patrie par mes injuirices, je me trai-teray d'une manière qui le vangera; je tra-vafiferay continuellement, j'épargneray, j'a-mafleray , je n'auray que iuy en vue. Cette réfolution fut bien-toft fuivie de l'effet, je ne laiflây rien dans la mailbn, ni meubles, ni éto­fes ; je vendis tout, Servantes, Valets, ex­cepté ceux qui en travaillant à la campagne, pouvoient gagner leur vie. Je mis aufli en mê­me temps ma maifor» en vente. 8cj'ay rarhaflë à peu prés quinze talents 5 j'ay acheté cette Terre où je travaille depuis le matin jufq.ues au fbir. Je me fuis imaginé, Chrêmes, que l'injure que j'ay faite à mon fils fera moins grande , fi je me rends malheureux aufli bien que luy s 8c j'ay trouvé qu'il n'eftoit pas jufte que je goûtafle icy aucun plaifir , que lorf-qtte celuyqui doit le partager, avec moy,feia

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2.6 HEAUTON-TIMORUMENOS. Nifi ubi ille hue fabvos redierit meus partie

ceps. CHREMES.

Ingenio te ejfe in liberos Uni puto, t$r lUum obfequentem, fi quis rteti aut commo­

de too.Traétaret. verùm neque tu iUum fatïnove*

ras, Nec te ille. hoc ubi fit, ibinonverèvivitur. Tu tllum, nunquam oftendifti, quanti pondè­

res, Nec tibi illeeft credere aufusqut eftaquompa.

tri. figuod fi effet fabtum, hoc nunquam eveniffent

tibi. MENEDEMUS.

Ita res eft, fateor: peccatumàmemaxumum efi.

CHREMES. Meneieme, at porro re&è fpero: ér-illum tibi Salvum affuturum ejfe hicconfido propediem.

MENEDEMUS. Utirnm ita Diifaxint.

C H R E M E S. fuient, nunc, fi comme-

item eft, Dionyfia hiefunt, hodie apud me fit volo.

MENEDEMUS. n o . Nonpoffum.

CHREMES. cur. Non! qutfotandem

aliquantulum • Tibi parce, idem abfens facere te hoc volt fi-

lius. MENEDEMUS.

Non convertit, qui illum ad laborem impelle-rim,

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. if de retour heureufement.

C H R E M E S . Je fuis pcrfuadé que vous elles un bon père»

8c qu'il auroit elle' un fort bon fils fi vous aviez fçû le prendre ; mais vous ne vous connoif-fiezpas bien l'un l'autre , & quand cela elt ainfi , ce n'ell pas vivre. Vous ne lui aviez ja­mais fait connoillre combien vous l'aimiez, 8c il n'a ofé vous faire les confidences que les enfans doivent faire à leurs pères. Si vous l'a­viez fait l'un 8c l'autre , tout ce defordre no feroit pas arrivé.

M E N E D E M E . .

Cela cil vray je l'avoue, j'ai grand'tort.'

C H R E M E S .

Mais, Menedeme, j'efpere qu'à l'avenir tout ira bien, 8c je m'allure qu'au premier jour vous l'aurez ici en bonne fanté.

M E N E D E M E . Fafienfcles Dieux que cela loitî

C H R E M E S . Us le feront j mais prefentement vous la­

vez qu'on célèbre ici la Felte de Bacchus, je' voudrois bien que vous virrfliez fouper chez moy fi vous le pouviez.

M E N E D E M E . Je ne le puis.

C H R E M E S . Pourquoy ; enfin, ménagez-vousunpeu,

je vous prie; je fuis fur que vollre fils le fou-haite, tout abfent qu'il eil.

M E N E D E M E . U n'eft pas juile que l'ayant obligé amener

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aS HEÀUTON-TIMORUMENOS. Hune me ipfum fugere.

CHREMES. ficcine eft fententut t

MENÈDEMUS. Sic.

CHREMES, bene vale..

MENEDEMUS. 6>tu.

A C T U S P R I M U S . »

S C E N A I I . CHREMES.

X~éAcrumns exeufft tmhi, Miferetque me ejus : fed, utdieitemples eft, Montre eportet me hunevicinum Phaniam Adcoenam ut veniat.ibo, lifam fi dotai eft.

f. Nil opus fuit monitore: jamdudum demi Trefio Mpud me ejfe aiunt: egomet convivut

moror. tbo adeb hinc intre. fed quid crepueruntfores l Hinc à me quifham egreditur ? hue concejfero.

w %?

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. * ta une vie fi laborieufe, je fuye moy-mefme le travail.

C H R E M E S . Eft-ce-là voftre refblution ?

M E N E D E M E . Oiii.

C H R E M E S . Adieu donc.

M E N E D E M E . Adieu.

A C T E P R E M I E R . SCENE II. C H R E M E S .

I

IL m'a tiré des larmes, 8c il me fait pitié. Mais le jour cil déjà bien avancé, il faut que

j'aille avertir noftre voifin Phania de venir louper avec nous , je vais voir s'il n'y feroit point allé. 11 n'a pas eu beloin d'avertifleur, on vient de me dire qu'il y eft déjà, c'eft moy-mefme qui fais attendre les autres, je m'en vais donc Mais d'où vient que l'on ouvre noftre porte ? qui eft-ce oui fort l je m'en vais me mettre ici dans ce coin.

w

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'jo HEAUTON-TIMORUMENOs.

A C T U S PRIMUS. S C E N A III.

CLITIPHO, CHREMRS.

C L I T I P H O. ,

N lhil adhuc eft, quod vereare ,Clinia : haud* quaquam etiam cejfant :

Etillam fimulcum nuntio tibihicttffuturttm Hodie, fcio. proin folicitudinem ijtamfalfamt

qut te Extradât,minas.

CHREMES. quicum loquitur filius ?

C L I T I P HO. pateradeft,

f. J$uem volui. adibo .Pater > opportune advenis, C H R E M E S.

6>uid ideft l CLIT1PHO.

hune Meuedemum noft'm* noftrum vicinum ?

CHREMES. probe.

CLITIPHO. Huic filium feis ejfel

CHREMES. tuidiviejfe in Afia.

CLITIPHO. non eft, pater, apuot

Koseft.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS.

A C T E P R E M I E R . S C E N E III .

C L I T I P H O N , C H R E M E S .

C L I T I P H O N.

TU n'as pas encore fujet de craindre, ils ne tardent pas, Clinia, & je fuis fur

qu'elle viendra aujourd'hui avec le Valet que tu lui as envoyé; enfin, défais-toy de ce cha­grin mal fondé qui te tourmente.

C H R E M E S . Avec qui parle mon fils ?

C L I T I P H O N . Voilà mon père comme je le fouhaitois,

je vais lui parler. Mon père, vous venez bien à propos.

C H R E M E S . Qu'eft-ce que c'eft ?

C L I T I P H O N . Connoiflez-vous un certain Menedeme no­

tre voifih. C H R E M E S .

Oui. C L I T I P H O N .

Savez-vous qu'il a un fils ? # C H R E M E S .

Oiii, j'ai oui dire qu'il e'ft en Afie.

C L I T I P H O N .

Il n'y eft plus, mon père, ileiVchez nous.

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31 HEAUTON-TIMORUMENOS.

CHREMES. quid aisî

C L I TI P HO. advenientem, i navi

egredientem, abduxi illico Ad cocnam : nam mihi magna cum eojam

inde u/que à pueritia « i o Semper fuit familiaritas.

CHREMES. voluptatem magnum

mtntiat. Quam vellem Menedemum invitatum, utno-

bifcum hodie efiet ampli us, Vt hanc Utitiam nec opinanti primat objict'

rem domif Atque etiam nunc tempos efi.

C L 1 T I P H O. Cave faxis : non opus efi,

pater. CHREMES.

Jjhtapropterî C L I T I ? H O.

quia enim incertum efi etiam quid Je faciat. modo venit,

i j- Timet omnia ipatrit tram, & anhnum arnica ft erga utfitfua.

Eam miftre amat. propter eam hoc turba at­que abitio evenit.

C H RE ME S. • fcio. CL1TJTHO.

Hune firvolum ad eam in urbemmifit, &tgt nofirum uni Syrum.

CHREMES, jjhsid narrât f

CHRE*

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r t'HEAUTON-TIMORUMENOS. s | C H R E M E S .

Que dites-vous là ! C L I T I P H O N.

Tout à l'heure comme il arrivoit je l'ai pris au fbrtir du vaiûeau, Se je l'ai amené fouper chez nous , cardés noftre enfance nous avons cité fort bons amis.

C H R E M E S . Vous m'apprenez-là uue nouvelle qui me

fait un fort grand plaifirj que je voudrais bien que Menedeme vint augmenter la bonne compagnie, afin que je fufle le premier à lut donner cette jove dans ma maifon, Se lors qu'il s'y attend le moins. Mais il eft encore temps.

C L I T I P f l O N . N'en faites rien, s'il vous plaît, mon père,

il ne le faut pas. C H R E M E S ,

pourquoy cela? C L I T I P H O N.

Parce qu'il eft encore incertain de ce qu'il doit- faire ; il ne vient que d'arriver ; tout lui fait peurj il craint la colère de fon père, 8c il ne fait pas bien comme il eftdans l'efprit de là Maiftrefle, il en eft éperduè'ment amoureux, c'eft pour elle qu'eft arrivé tout le deibrdre, 8c qu'il s'en étoit allé.

C H R E M E S . Je le fài.

C L I T I P H O N . Il a envoyé un petit Laquais chez elle, Se j'ai

envoyé Syrus avec lui. C H R E M E S .

Et bien,que dit-il? Tome II. C

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34 HEAUTON-TIMORUMENOS. * • CLIT1PHO.

quid Me? femiferumejfe. CHREMES, miferum ! quemminu' credereeftt

^uidreliqui eft quia habeat , qua quidem in homme dicuntur bona,

Parentes, patriam incolumem, amicos, genus, cognatos, diyjtias ?

Atque hac perinde funt, ut illius animas, qui ea pojjidet ;

6)ui utifcit,ei bona; Mi, qui non utitut rêtre, mala.

CLïTIPHO. Imo Me fenexfuit importunas femper : tjonunc

' nihil mugis Vereor, quam ne quid inillutn iratusplusfatis

faxit pater. CHREMES.

ij". Illene- ( fed reprimam me : nom, in me tu effe hune, Mi eft utile.)

C El T 1 RHO. JUjuid tutetecum?

CHREMES.

dicam. ut ut erat, manfutii tamen oportuit.

Portajfe aliquanto iniquior erat, prater ejus lu-. bidinem :

Pateretur: nam quemferret, fi parentem non ferre t fuum?

Hunccine erat aquom ex illius more, an illum ex hujus vitoere ? &

30. ®>uodMum infimulatdurum, idnoneft,nam\ parentium injuria ^

Uniufmodi funt ferme, paulo qui eft homo t0-_ lerabilis,

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L'HEAUTON-TTMORUMENOS. « C L I T I P H O N .

Ce qu'il dit ? ilditqu'ileftmd-heureux. C H R E M E S .

Mal-heureux ? lui ? qui trouvera-t-on qui le foit moins ? qui l'empefche d'avoir tout ce que les hommes appellent des biens. D re­trouve fon perc 8c fon païs en bon état, il a des amis, de la nai fiance, desparens, des ri-chefles; il eftvray que toutes ces chofes font comme eft l'eforit de ceux qui les pofledent ; elles font de grands biens pour ceux qui favent s'en fervir, 8t de grands maux pour ceux qui n'en font pas l'ufage qu'ils en devraient faire.

C L I T I P H O N . Mais, mon père, ce bon-homme a toujours

elle fâcheux ; 8c prefentement dans la colère où il eft contre fon fils, je crains bien qu'ilne le mal-traite plus qu'il ne devrait.

C H R E M E S . Qui lui ? bas. Mais il ne faut pas que j'en

dife trop s car il eft bon pour ce pauvre père de tenir ce jeune garçon en crainte? -

C L I T I P H O N . Qu/eft-ce que vous dites tout bas, mon

pcreT C H R E M E S .

Je vais vous le dire. Quelque fâcheux que fût Menedeme, fon fils nedevoit pourtant ja­mais s'en aller. Il le trouvoit peut-cftre un peu moins équitable qu'il ne l'aurait fouhahé. II faloit le fouffrir, car s'il ne fouffre fon père, qui fouffrira-t-il donc? lequel à vôtre avis eft le plus jufte, qu'un pcre'vive à la fantaifie de fon fils,, ou qu'un fils vive à là fantaifie de fon

Îere ? Et pour ce qui eft de la dureté dont il accule ; il n'y a rien de moins, car les ri.

C i j

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3 * HEAUTON-TIMORUMENOS. Scortari crebro nolunt, nolunt crebro conviva-

rier. Prabent exiguë fumtum : e^ea fient, tamen,

ad virtutem omnia. Verumubianimasfemelfi cupiditate devin-'

xit mala, If. Heceffiefi, Clitipho, confiUa confiqui confimi-

lia. Hoc Scitum efi, ptriclum ex aliis facere, tibi quoi

ex ufu fiet.

C L I T I P H O.

Itn credo.

C H R E M ES.

ego ibo hinc intrb, ut videAmj nobis quid coma fie t.

Tu, ut tempos efi diei, vide fis ne qui hinc abeAi longius.

A C T U S . P R I M U S . S C E N A IV.

C L I T I P H O.

Uam iniqui fient, patres, in otnnes adole-fientes, judices,

'ui aquom ejfe cenfent nos jam aputris illico "nafci fines,

Neque illarum-affines rerum ejfe, quai fertado-lefcentia.

Ex/ua libidine modérantur, nunt que. efi, non que. olitn fuit.

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L"HEAUTON-TIMORUMENOS. 3? gueurs des pères font prelque toutes de la mefme forte , je parle des pères qui font un peu raifonnables ; ils ne veulent pas que l'on îbit toujours dans les vilains lieux, ils ne trou­vent pas bon qu'on aille fouvent au Cabaret, Us donnent peu d'argent, & tout cela n'eft que pour rendre les enfans plus vertueux. Mais lors qu'une fois de mauvaifes inclinations le lbnt emparées de l'eforit des jeunes gens, il faut nécessairement que toutes leurs actions le fentent de cette corruption. Mon fils , c'eti une belle maxime, qu'il faut faire fon profit du mal d'autrui.

C L I T I P H O N. Je \ecroy.

C H R E M E S . Je vais entrer pour voir ce que nous au­

rons à fouper, fongez à ne vous pas éloigner à l'heure qu'il eu.

ACTE PREMIER. S C E N E I V .

C L I T I P H O N.

QUe les pères font injuries à l'égard de tous les enfans ! de croire que nous de­

vons eftre des barbons en venant au monde, Se ne point fentir toutes les parlions de lajeu-nefle. Ils veulent nous régler par les inclina­tions qd'ib ont aujourd'hui, Se non pas par celles qu'ils avoient autrefois. Ha, fi jamais j'ai un fib , en vérité je forai un père bien

C iij

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•59 HEAUTON-TIMORUMENOS. f. Mihi fi unauamfilius erit, naillefacilime utii

turpatre. Rttm éf cognofcendi, (y ignofcendi dahitur

pecctttilocus: Non ut meus, quimihiper alium ofienditjuam,

fententiam. Terii ! U mihi ubi adbibit plus paulo, fua qui

narrât facinora ! Nuncait, Tericlum ex aliis facito , tibiquod

exufufiet: IO. Aftutus ! ne ille haudfeit, quant mihinuni

furdo narr et fabulant. Magi' nunc me arnica dicta ftimulant,Da mi­

hi, atque, Affermihi. Cui quid refpondeam, nil habeo: nequeme

quifquam eft miferior. Nam Clinia hic, et fi k quoque fitarum rerutn

fatagit, attamen Habet beneac pudici eduBam, ignaram artis

meretricia. if. Mea efipotens, procax, magnifica ,fumptuofa»

nobtlis ; lum quod dem ei, Rectè efi : Nihil enim efii

mihi, relligioeftdicere. Hoc ego mali non pridem iuveni: nequeetiam^

dum feit pater.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. jç) commode! car il pourra me faire confidence de toutes fes folies, je ferai toujours preft à les lu» pardonner ; je ne ferai pas comme le mien qui veut m'apprendre fa Jielle morale en me parlant toujours des autres. J'enrage, quand après avoir un peu plus beu que de raifon, il Commence à me chanter fes beaux faits. Pre-fentement il vient de me dire, mon fils, c'eit une belle maxime de faire fon profit du mal d'autrui : perte qu'il efl fin ! ma foy il ne fait pas combien je fuis fourd à fes contes. Main­tenant je fuis bien plus touché de ces deux mots de ma Maîtrefiè, dotmez-moy 8c apportez-moy, aufquelsje nefai que répondre. Perfon-ne n'efl plus malheureux que moy! car pour Clinia, quoy qu'il ait affez d'affaires chez lui, au moins a-t-il une Maîtrefiè bien élevée, 8c qui n'efl point faite à toutes les manières des Courtifanes ; au lieu que la mienne efl une grofTe Dame, elle efl hardie, magnifique, dé-penfiere, enfin une perfonne du grand air. Lors qu'elle me demande de l'argent, je ne fais que marmoter entre les dents, car je n'ai garde de lui dire que je n'ai pas le fou. D n'y a pas long-temps que je me fuis mis cette épine au pie, & mon père n'en fait rien encore.

C iitj

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4o HEAUTON-TIMORUMENOS.

ACTUS SECUNDUS. S C E N A I.

C L I N1 A, C L I T I P H O.

C L I N I A..

S I midifecundi res de amore meo ejfent, jam dudum,fcio,

Venijfent: fid vereor, nt millier me abfente hic corrupta fit.

Concurrunt mulu opiniones, quimikianimum exangeant ;

Occafic, locus,itas, mater, cujutfubimperii eft,mala;

Çuinibilpritcr pretium jam dulce efi. C L I T I P H O.

Clinia. C L I N I A.

hei miferomihil CLITIPHO.

tZtiam caves, ne vident forte hinc te à patn aliquù exiens ?

CLINIA. Taciam. fed nefcio quid profeSo mihï animai

jpr&fagit mali. CLITIPHO.

Pergin' ifthuc prius dijudicare, quamfcis, quid t/eri fiet ?

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fHEAUTON-TIMORUMENOS. 41

f f l " ! 3Ê ^ # ^ ' # * ACTE SECOND.

S C E N E I.

C L I N I A , C L I T I P H O N .

C L I N I A.

SI je devois avoir de bonnes nouvelles de ma Maiftrefle , je fuis fur qu'il y a déjà du

temps qu'ils feroient ici. Mais je crains qu'on mon abfence elle ne fe foit gâtée Emilie cho­ies concourent à me tourmenter & à me don­ner ce foupçon, Poccafion, le lieu, l'âge, la mè­re qu'elle a, qui n'aime que l'argent.

C L I T I P H O N . Clinia.

C L I N I A . xQue je fuis malheureux !

C L I T I P H O N . Veux-tu donc prendre garde que par ha­

sard perfonne ne te voye en fortant de chez ton père?

C L I N I A . J'y prends garde. Mais en vérité j'ai un ce*»

tain préfentiment de je ne fai quel niaL heur.

C L I T I P H O N . Jugeras-tu toujours des choies, avant quq

d'en lavoir la vérité? C »

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4 * HEAUTON-TIMORTJMENOS.' C L I N I A.

Si nihil mali effet, jam hic adeffent, C L I X I P H O.

jam aderunt. C L I N I A.

quando ifihuc eriti C L I T I T H O.

lo. Non cogitas hinc longule effe : ej> nofti mores mulierum i

T>um moliuntur, dum comuntur,annuseft. C L I N I A.

ô Clitipho > Timeo,...' •

C L I Tl P H O. refpira : eccum Dromone»

cum Syro unà adfitnt tilt.

ACTUS SECUNDUS, S C E N A I I .

SYRUS, DROMO, C LITI P H 0\

C L I K I A,

SYRUS.

A in tu i DR O MO,

fie eft. SYRUS.

verum, intérêts duro fermones cedimus,

llta.fi i.fient relitt*.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 4 ) C L I N I A.

S'il ne m'étoit arrivé quelque malheur, il y a long-temps qu'ils feroient ici.

C L I T I P H O N . Ils y feront dans un moment?

C L I N I A. Quand arrivera donc ce moment ?

C L I T I P H O N . Tu ne penfes pas qu'il y a un peu loin d'ici;

& d'ailleurs ne connois-tu pas les femmes, pen­dant qu'elles fe coèfFent 8c qu'elle» s'ajuftent, un an fe parlé.

C L I N I A. Ah , Clitiphon j'appréhende...

C L I T I P H O N . Prens courage, voici Drornon avecSyrus.

ACTE SECOND. S C E N E I I .

S Y R U S , D R O M O N , C L I T I P H O N ,

C L I N I A.

M1 S Y R U S .

E dis-tu vfay? D R O M O N .

Cela eft comme je te le dis.

S Y R U S . Mais pendant que nous nous amuibns à eau*

1er, nous les avons laiiïëos derrière. C.vj

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44 HEAUTON-TIMORUMENOS.

C l I T I P f l O .

tnulier tibi adeft, audin* Clinia î

C,L I N I A.

Tgoveroaudionuncdemum, & video, &va+ > leo, Clitipho.

D R O M O.

Minime mirum : adeo impediu funt : ancilla-rumgregem

f. Ducuntfeeum.

. CLINIA.

périt ! unâe iUifunt anciUaT CLITIPHO.

men' rogas.1 S T RU S.

Non oportuit relief as. portant quid rerum I CLINIA.

hcimihi ! s r R u s.

Aurum, veftem\ c*"sejj>erafcit, r$>nonnovei. runt viam.

TaBumà noble ftulte eft. abi dum tu % Tir orne» , illieobviam.

Propera, quidftas? CLINIA.

va tnifero mihi» quanta dk fpe decidil

CLITIPHO. î o. JQuid ifthuc ? qut res te fidieitat autemi

CLINIA. togitaeqmdftett

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L'HEADTON-TIMORUMENOS. if C L I T I P H O N.

Tu vas avoir tout à l'heure ta Maiftreflè ici, cntends-tu Clinia ?

C L 1 N 1 A . Oui, j'entens enfin, je voy & je commence

àrelpirer. D R O M O N.

Je ne m'étonne pas qu'elles foient demeu­rées derrière , elles font fi embaraflëes -, el­les mènent avec elles une troupe de Ser­vantes.

C L I N I A . Je fuis perdu ! d'où luy viennent ces Ser­

vantes ? C L I T I P H O N .

Mêle demandes-tu ? S Y R U S.

Nous ne devions pas les quitter ainfi; elles portent tant de hardies.'

C L I N I A . Ah , mon Dieu !

S Y R U S. Tant de bijoux, tant d'habits ! il commen­

c e a fe faire tard, 8c elles nefavent pas le che­min. Nous avons fait une fortifie; Dromon, retourne fur tes pas,' va au devant d'elles, bât e-txrji marche donc.

C L I N I A . Qne je fuis malheureux ! quelles efperance*

p "ay-je point perdues ! C L I T I P H O N .

Qu'as-tu ? qu'eft-ce qui te chagrine donc encore ?

C L I N I A . Peux-tu me faire cette demande l n'en»

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tfi HEAUTON-TIMORUMENOS. Vidtri tu ancillas, aurum, vefieml quam ego

eum un» ancillul» Hic reliant, uhde ejfe cenfes f

CLITIPHO. vah, nunc demum inteU

lego.

s r s. u s. • Hit boni, quid turba efi 1 ides noftrt vix ex­

pient , Jcio. Shtid comedent ! quid ebibent ! quid fene er'tt

noftro mifer/us ? if Sed video, eccos, quos volebam.

C L I N I A. bJupiter, ubinameflfidest

Hum egopropter te errant patria careo démens, tu interealoci

• Conlocupletafti te, Antiphila, & me in bis de/eruifti malts:

Propter quant infumma infamiafum, ér meo patri minus obfequens :

Cujus nunepudet me, & mi/eret, quibarunt mores cantabat mihi, '

to Monuijfe fruftra: neque potuijfe eum unquam me ab bac expeUere.

Jjhtod nunc faetam tamen : eum gratum mihi ejfepotuit, nolui.

Hemo efi mi/erior me.

S r RU S.

r hic denoftrisverba errât videUcet Qtu bîcfumtts locuti. Clinia , aliter tuura

amorem, atqut efi, accipis; tfam eje vit a efl eadem , ©• animue te ergst,

idem ac fuit,

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. & tends-tu pas qu'elle mené des Servantes, qu'el­le fait porter des bijoux, des habits, elle crue j'ay laiflee avec une feule petite Servante}, d'où crois-tu qu'elle ait eu tout cela ?

C L I T I P H O N. Ha ! je t'entends enfin.

S Y R U S. Bons Dieux , quelle troupe ! je fuis fur que

noftre raaifon aura peine aies loger. Qu'elles vont manger ! qu'elles vont boire ! eft-if rien de plus malheureux que va l'eftre noftre bon­homme ! Mais je voy des gens que je fouhai-. tois fort de trouver. •

C L I N I A. Oh, Jupiter, où eftla bonne foy.' pendant-

que j'ay la foiblefte de quitter ma patrie pour l'amour de vous, & d'eftre errant comme un fugitif, vous vous enrichiriez, Antiphile, 8c vous m'abandonnez dans ces malheurs, vous qui elles caufe que je fuis blâmé de tout le monde, 8c que je n'ay pas obeï à mon père comme je le devois : prefentcment je meurs de honte 8c de dépit, qu'il m'ait averti tant de fois inutilement, luy qui ne ceflbit de me chanter toujours les manières de faire de ces créatures , 8c qu'il n'ait jamais pu m'arracher d'auprès d'elles. Je m'avife à l'heure qu'il eft de luy obéir; 8c lorsqu'il m'en aurait fçû quel­que gré, je ne l'ay pas voulu faire. Perfonne n'eft plus malheureux que moy.

S Y R U S. Voilà un homme qui eft apparemment

trompé par ce que nous venons de dire Dro-mon 8c moy. Moniteur, vous croyez que vô­tre Maiftrefle eft toute autre qu'elle n'eft : car 8c fa manière de vivre eft toujours la rrrcûne,

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nS HEAUTON-TIMORUMENOS. i f Quantum ex ipfa re conjtcturamcepimut.

C L I N I A. Quii eft obfecro ? nam mihi nuncmhilrerum

omnium eft, Quoi malim, quam me hoc falsb fujpica-

rier.

S T R U S.

Hoc primum, ut ne quidhujut ignores : anufl Qwt eft dicta mater ejje ei, antehac , mn

fuit. 30 Eaobiit mortem : hoc ipfain itmere altéra

' Hum narrât, forte audivi.

C L I T I P H O.

qutnam eft altéra î

S T R U S. Mane , hoc , quoi coepi, primum enarrem}

Clittpho: Poft ifthuc veniam.

CLITIPHO. propera.

s r R u s. jam primum omnium,

Ubiventum ai adis eft, Hromo pultat fores : Anut qutiam prodit. hoc ubi aperuit oftium, Continue hicfe conjecit intrb .- ego confequor :

. Anutforibuc obdit peffulum, ad lanam redit. Htc fciri potuit, aut nufquam alibi, Cli-

nia, , Quo ftudio vitam fuam te abfente exege-

rit, 40 Ubi de hnprovifo eft interventum mulieri.

Nam ea rts dédit tum exiftumandi ccpiam^ , Quotidiana vit*, confuetudinemj.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 49 Se ion cœur n'eft point changé, au moins au­tant que nous avons pu en juger par ce que nous avons vu.

C L I N I A. Et qu'avez-vous vu? dis-le mov, je te prie,'

car de toutes les chofes du monde, il n'y en a point que je fouhaite avec tant d'ardeur, que de voir que je la foupçonne injuftement.

S Y R U S. Premièrement, afin que vous foyezinftruit

de tout, la Vieille qui pafloit pour la mère d'Antiphile, ne l'eftoit pas, 8c elle eft morte j j 'ai oui cela par hazard en chemin comme elle le contait à une autre ?

C L I T I P H O N . Eh qui eft cette autre ?

S Y R U S. Donnez-vous patience, que j'achève avant

toutes chofes ce que j'ay commencé , ' après cela je vous le diray. 0

C L I T I P H O N . Dépefche.

S Y R U S. D'abord, lors que nous fommes arrivez à

fa nvaifon, Dromon a heurté à la porte ; une certaine vieille femme eft venue, qui n'a pas eu plûtoft ouvert, qu'il eft entré ; je l'ay fuivi,-, en mefme temps la vieille a fermé la porte au verrou, 8c eft retournée à fon travail. C'eft en cette occafion, ou jamais , Moniteur, que vous pouvez connoiftre la vie que voftre Maiftrefle a menée en voftre abfence : quand on furprend une femme, & qu'on arrive au­près d'elle à l'heure qu'elle s'y attend le moins, ondoiteftreperfuadé que l'état où on la trouve eft une fuite de fes occupations ordi-

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fà HEAUTON-TIMORUMENOS. Jjhse, cuju/queingeniumutjit, déclarât md*

xume, Texentem ttlam ftudiose ipfam offindimuc,

éff. Mtdiocriter veftitam vefte lugubri, Ejus anuie caufa, opiner, que trat mortua, Sine auro tum ornatam, ita ut ique ornaotuT

fibi, Nulla mala re effe expolitam muliebri : Capillus paffus, proîixut, circum caput

fo. Rejectus negligenter. pax !

C L I N I A-

Syremi, obfecrpi Ne me in Ittitiam ftuftra conjiciasK

S T R U S. anus

Subtemen nebat : preterea tma ancillula Erat : eatexebat unàpannisobfita, XeglectW, immunda illuvie,

C L I T I P H O. fihtcfunt, Çlinia',

ff. Vera, ita ut credo. quis te efifortunatior ! Sein' tuhanc, quam dicitjorditatamérfordi-

dam t , Magnum hoc quoque fignum efi dominam effet

extra noxiam, Cum ejus tam negleguntur internuntii: Nam difeiplina eft eifdem, munerarier

60. Ancillas primum , ad dominas qui affectant viam.

C L I N I A. Terge , obfecro te, & cave ne falfam graA

tiam Studeas inire. quid ait, ubi me nommas t

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. ft haires ; & ce (ont ces occupations ordinaires qui marquent parfaitement les inclinations des gens. En arrivant nous l'avons trouvée qui travailloit en Tapifferic avec grande appli­cation : elle eftoit vêtue fort Amplement en habit de dciiil, fans doute à caufe de la Vieille qui eitoit morte. Elle eftoit fans aucun orne­ment , comme font celles qui ne s'habillent, true pour elles. Elle n'avoit rien de tout ce dont les femmes fe fervent pour relever leur beauté j fes cheveux eftoient épars, mal ran­gez, fiotans négligemment autour de fa telle, ah!

C L I N I A . Je te prie , mon cher Syrus , ne me jette

pas dans une faufie joye. S Y R U S .

La Vieille luy filoit des laines ; de plus il j àvoit là une petite Servante fort mal vêtue, fort négligée, fort mal propre, qui travailloit au mefher avec Antiphile.

C L I T I P H O N . Si cela eft vray, comme je le croy, Clinia^

qui eft plus heureux que toy ? prends-tu gar­de à cette Servante qu'il dit qui eftoit û mal vêtue , fi fale ? c'eft une grande marque que la Maiftrefle vit fans reproche. quand on voit les confidens fi négligez : car c'eft une règle générale , on fait des prefens aux Servantes quand on veut eftre bien receu des Mai/bref-les.

C L I N I A . Continue, je te prie, Syrus, 8c prensbier»

garde à ne te pas faire de telle auprès de moy rinsfujet. Cnfa-t-elre dit quand tu m'as nom­mé?

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«•* JIEAUTON-TIMORUMENOS. f~ s r R u s.

XJbidicimus rediijfe te, & rogare u(i Veniret ad te, mulier ttlam définit

6g Continué, ejr lacrumis opplet os totumfibii ut

Facile fcires defiderio idfieri tuo.

C L I H I A.

Tr* oaudio, ita me dit ornent, ubi fim na*

A Ita timui,

CLITITHO. at ego nil ejfe fcîbam, Clinia.

Agedum vicijpm , Syre, die au* Ma eft al* fera.

S t R U S. 70 Adducimus tuam Bacchidem.

CLITITHO. hem, auid Bacchidem t

Eho ; fcelefte, qui ittam adducis ? S T RU S.

qui illam ego! ad nosfcùs , licet.

CLITITHO. Ad fatremne ?

s r R u s. ad eum ipfum.

CLITITHO. o hominis impudentem audaciam ï

s r R u s. heu*

Tu, non fit fine periculo fac'mus magnum •** memorabile.

CL I T I T H O. Hoc vide, in mea vit a tu tibi laudemisquafi-

tum, fcelusi.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. « S Y R U S .

Lorfque nous luy avons dit que vous eftiez de retour , & que vous la priez de vous ve­nir voir , elle a quitté d'abord ion ouvrage, & dans le moment fon viiàge a efté tout cou­vert de larmes, de manière qu'il cftoit fort aifé, de connoiftre que c'eftoit de l'impatience qu'elle avoit de vous voir.

C L I N I A. En vérité j'ay tant de ioye , que je ne fajr

©ù je fuis, après toutes les frayeurs que j'ay eues.

C L I T I P H O N . Mais pour moy je favois bien que tu n'avois

rien à craindre. Oça, Syrus, dy-moy à mon tour qui eft cette autre dont tu as parlé.

S Y R U S . Nous avons amené voftré Bacchis.

C L I-T* I P H O N. Ô h , comment? vous avez amené Bacchis?

Et di-moy, pendard, où la menes-tu? . S Y R U S .

Où je la mené ?chez nous apparemment. C L I T I P H O N .

Quoy, à mon père? S Y R U S .

A luy-mefme. C L I T I P H O N .

Oh, l'horrible impudence! , S Y R U S .

SaVez-vous bien, Monfieur, qu'on ne fait point fans péril des actions extraordinaires 8c mémorables.

C L I T I P H O N . Prends garde à ce que tu fais, coquin, tu

feux acquérir de la gloire aux dépens de mon

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74 HEAUTON-TIMORUMENOS. 77 Uéi fi paululummodo quid te fugerit, egoptA

rierim Jguid Mo facias t

S r RUS. At enim-

c L i T i p H o : quid, Znimî

S T RU S. fifinas dicam.

C L 1 N I A. fine*

C L I TI P H O. Sine.

s r RU s. ita tes eft hic nunc quafi cum..'.

CLITITfHO. quas, malum, ambages mihi

ÏHarrare occipit l C L I N IA.

Syre , verttm hic dicit : mitte : sti rem redu

• s r R U s .

Znimvero retiçere nequeo, multimodis inju-. rius,

8o Clitipho, es, neque ferri potis es. C L 1 N 1 A.

audiendtm hercle eft .-tace.

S T RU S. Vis amare : vis potiri : vis, quod des iUi,

effici: Tuum ejfe in potiundo periclum non vis ihaui

ftulti fapis, Si quidem id fapere eft,, v*He te id quod non

poteft contingere. Aut h&c mm Mis fient habenda, aut Ma cutt\

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L-HEAUTON-TIMORUMENOS. Sf repos, pour peu que tu ayes mal pris tes me-lures, nxc voilà perdu. Que pretends-tu faire enfin?

S Y R U S. Mais.

C L I T I P H O N. Quoy, mais'?

S Y R U S. Si vous me vouliez laitier parler, je vous le

dirais. C L I N I As

Laifle-le parler. C L I T I P H O N .

Et bien parle. S Y R U S.

Cette affaire eft prefentement comme fi.~ C L I T I P H O N .

Quel diable de galimatias me commence-t-il là.

C L I N I A. Syrus , CUtiphon a raifon , laifle tous ces

détours, & viens au fait. S Y R U S .

En vérité je ne puis plus me contenir, vous eues injuffe en toutes manières, Monfieur, 8c ton ne peut pi us vous fournir.

C L I N I A. Mon Dieu, Oitiphon , tay-toy , il le faut

entendre. S Y R U S .

Vous voulez eftre amoureux , vous voulez poueder voffre Maiifrefle, vous voulez qu'on trouve dequoy luy dooner, 8c vous voulez ne courir aucun rifque , vous n'eftes pas fbt , fi

routrant c'en ne l'eftre pas que de vouloir inipofllble : ou il faut prendre le bien avec

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j-6 HEAUTON-TIMORUMENOS. bis amittenda faut.

8f Harum d'uarum conditionum nunc utram malis, vide.

Rtfi confia um, quoi cepi, rectum ejfe & tu-tumfcio :

JXam tu* apud patrem arnica iecum fine meta ut fit, copia efi:

Tum,, illi argent um, amd pollicitu' es, eadtm bdc imieniam via:

6)uod ut efficerem, orando fardas jam auref" reddideras tnihi.

90 Jjhsid aliui tibivisl

C L l T I P H O.

fiquidem hoc fit.

SX RU S. Siquidem;experiundofcies»

C L I T l j? H O. Age âge, cedo ifihuc tuum confilium, quid

ïdefit S X RU S.

ajfimulabimus, Tuamamicam, bu jus ejfe.

C L I T I P H O. pulcre: cedo, quid hicfacietfuuT

An ea qmque bu jus dicetur, fi bac tma dedt-cori efi parum ?

S X RU S. , 'îmo ad tuam matrem abducetur.

CLITIRHO. quid éb !

' S X R U S. Umgumeft, Clitipht,

fjrTibifi narrem, quamobrem id faciam : vera caufaeft.

les

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. ff les charges, ou renoncer à tout ; voyez lequel de ces deux partis vous aimez le mieux. Je fuis pourtant perfuadé que j'ay bien pris mes mefures, 8c qu'il n'y a nul péril : car parla vous pouvez avoir voftre Maiftrefle chez vô­tre père avec vous fans aucune peur : déplus , par ce moyen je trouve l'argent que vous luy avez promis, & pour lequel vous m'avez rom­pu la telle il fbuvent, que j'en eftois déjà prê t que iburd. Que^vous faut-il davantage ?

C L I T I P H O N. Pourvu que cela foit ainii.

S Y R U S. Ah, pourvu; faites-en l'expérience, vous le

faurez. C L I T I P H O N.

Oça, dy-moy les mefures que tu as prifes. Qujeft-ce que c'eft ?

S Y R U S. Nous avons feint que voftre Maiftrefle cft

celle de Monfieur. C L I T I P H O N .

Fort bien. Mais je te prie de me dire ce qu'il fera de la licnne s paflera-t-elle encore pour élire à luy ? comme ii une feule ne luy faifoit pas déjà aflez de tort dans le monde i

S Y R U S. Elle ne pajfera nullement pour effre à luy ; au

contraire on la mènera à voftre mère. C L I T I P H O N .

A ma mère ! & faire quoy ? S Y R U S.

Il feroit long , Moniteur , de vous Conter pourquoy je le fais ; il vous doit fuffire que j'ay mes raifons.

Tome II. D

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j-8 HEAUTON-TIMORUMENOS.

CLITIPHO.

fabula : Nihilfati firmi vide», quamobrem accipert

hune tnihi expédiât metutn.

S T R U S.

Jetant, habeo aliud , fi ifthuc metuU , quoi ambo confiteamini,

Sine periclo ejfe.

C L I T I P H O. hujuftpodi, obfecro, aliquidreperi.

S T R U S. maxunû:

Ib» obviant hinc : dicam ut revortantur domum. CLITIPHO.

hem, too 3uid dixtit

S T RU S. ademptum tibi jam faxo omnem

metum, In aurem utramvit otiofi utdormias,

CLITIPHO. f^uid ago nunc ?

C L I N I A. tunet quodboni...

CLITIPHO. Syre, diemodi

Verum.

s r R u s. âge mode , hodie ferb ttc nequicquam

voles. C L I H I A.

Datur modo : fruere dum licet : nam nefeiat, IOJ- Eju' fit poteft as pofthtsc, an nunquam, tibi,

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L'HEAUTON-TIMORTOIENOS. te,

C L I T I P H O N . Ce Ibnt-là des contes ; 8c dans tout ce que

fu me dis. je ncvoyrien qui doive meraflù-rer.

S Y R TJ S. Attendez 5 j'ay un autre erpedient, où

vous ferez obligé d'avouer l'un 8c l'autre qu'il n'y a nul péril.

C L I T I P H O N . Ah, jeté prie, trouves-enquelqu'un com-

ine cela. S Y R U S.

Cela eftfait; j'iray au devant d'elles, 8c je leur diray qu'elles n'ont qu'à s'en retourner.

C L I T I P H O N . Quoy ? que dis-tu ?

S Y R U S. Ne vous mettez pas en peine, je vous ofte-

ray tout iujet de crainte , de lbrte que vous dormirez tranquillement de vos deux yeux. * Il s'en

C L I T I P H O N . VM en Que dois-je faire prefentement ? me [me

C L I N I A. umts. Je fiiis cPavis que tu profites..

C L I T I P H O N . Tu as raiibn. Syrus, Syrus, tedis-je, hola

Syrus. S Y R U S .

Allez, allez, aujourd'huymefinevous vous en repentirez, mais il fera trop tard, & vous le voudrez en vain.

C L I N I A. Je fuis d'avis, dis-je, que tu profites du bien

qui feprefentej car tu ne fais pas fi jamais tu retrouveras une pareille occafion.

D i j

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<fo HEAUTON-TIMORUMENOS.' CLITIPHO.

Syre, inquam. S r R U S.

pcrge porrb, tamen iflhuc âge.

C LIT I P H O. Verum hercle iflhue eft, Syre. Syre , inquam*

heu* btus, Syre-

S T RUS. Concaluit. f$uid vis i

CLITIPHO.

redi, redi.

S T R US.

Adfum, die quid eft l Jam bec qmque negftbis tibiplacere.

CLITIPHO. imo, Syre,

110 Et me, & meum amorem, &> famam per­mit to tibi,

Tu esjudex, ne quid accufandus fis, vide.

S T-R U S.

Ridiculum eft, te ifthuc me admonere , Cliti-pho:

Quafi ifthic minor mea res agatur, quam tua. Htc fi quid nobis forte advorfi evenerit,

ilfTtbi eruntparât» verba, buic hommi ver-. bera.

j^uapropter htc res neutiquam neglectui eft mihi.

Ssd iftstm exora, ut fttam effe adfinmkt.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. c#

C L I T 1 P H O N . Syrus, hola, arrefte, tedis-je.

. S Y R U S . Criez, criez, je ne laifleray pas d'aller mon

chemin. C L I T I P H O N.

Tu as raifpnen vérité, Syrus, &j'ayrort, hola, Syrus, encore une fois, arrefte, je te prie.

S Y R U S . Mon homme l'a eu chaude i que voulez-

vous? C L I T I P H O N.

Revien,revien. S Y R U S .

Et bien me voilà , que me voulez-vous ? j'auray beau faire, vous direz encore que cela ne vous plaift pas.

C L I T I P H O N. . Bien loin de cela , mon cher Syrus, je me remets entre tes mains, je t'abandonne mon amour, mon honneur & mon repos, je t'er» fais le maiftre, prens garde feulement de n'é­lire point blâmé.

S Y R U S. Voilà un plaifantavis à me donner, comme

fi j'avois moins d'intereft à cela que vous-mê­me ; fi par malheur cette affaire n'alloit pas reuflir , vous en feriez quitte pour quelques-réprimandes que vous auriez à efluyer ; mais l'homme qui vous parle n'en feroit pas quitte à fi bon marché, c'eft pourquoy vous pouvez juger fi je negligeray rien. Maisobtenez de Chnia qu'il fafle femblant que Bacchis eft fa Maiftreftc.

D iij

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*T* HEAUTON-TIMORUMENOS.

C L I N I A. fciîictt

TaBurum me ejfe. in eum jam tes rtdiit la» cum,

Utfitnecefiè. CLITIPHO. meritoamote, Clinia.

C L I N I A, n o Verum illa ne quidtituèet.

S T R U S. perdoBa eftproéi.

CLITIPHO. At hoc demiror , qui tamfacile, potueris Perfuadtre ilii, qui filet quos jbernere?

s r R u s. In tempère ad eam vent, qued rerum omniutm

ejl Primum. nam quendam miferè ojfendi ibi mi»

lit'tm, 11/ Eju'noBemorantem. Hoc arte traBabatvi»

rum, Cupidum ut iUius animum inopia.incenderet'^ Eademque ut effet apud te hoc quam gratijfi-

mum. Sed heut tu, vide fis nequid imprudent ruas. Patrem novifii ad h as res quam fit perjpicaxt

130 Ego te autem novi , quam ejjefoleas impo­tent :

Inverfaverba , everfas cervices tuas : Gemitus, fcreatus, tujps, ri fus, abfiine.

CLITIPHO.

Laudabk.

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L'HEAUTON-TIMORUMEKOS. t* C L I N I A.

Oh, cela s'entend, je le feray j & la chofe eft prefentement en tel état, qu'il eft abfolumen» neceflâire que je le faflè.

C L I T I P H O N . Je te fuis bien obligé, mon cher Qinja.

C L I N I A . Mais l'affaire eft qu'elle ne bronche pas.

• S Y R U S. Ho, elle eft parfaitement bien inftruite.'

C L I T I P H O N . Mais je fuis bien furpris que tu ayes pu la

perfuader fi facilement, car quelles gens ne rebute t-elle pas tous les jours ?

S Y R U S. Je fuis arrivé chez elle juftement dans le

moment favorable, 8c dans toutes les affaires, c'eft ce qu'il y a de plus important : car j'y ay trouvé un Capitaine qui la preiTôit vivement; elle menoit cet homme avec beaucoup d'a-drefle ; trouvant toujours des prétextes pour le refufer, afin de l'enflamer d'avantage par ce refus , 8c de vous en faire enmefmetempsun fàcrifice qui vous fuft agréable. Mais à pro­pos , Moniteur, prenez bien garde de ne rien faire imprudemment ; vous connoiflez voftre pere , vous favez comme il voit clair en ces fortes de chofes. Or eft-il que je fay la peine que vous avez à vous contenir. Je connois vos mots à double entente, l'agilité de voftre» cou, qui fait aller voftre telle comme unegi-rouete, voftre manière de toufler, rire, cra­cher. Trêve à tout ce raanege-là , je vous prie.'

C L I T I P H O N . Tu me donneras des louanges.

p iiij

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# 4 HEAUTON-TIMORUMENOS.

5 T R U S. •vide fis.

CLITIPHO. Internet mirabere.

6 X RU S. SeJ quam citbfunt confecuU mulieres !

CLITIPHO. 13/. Ubifunt ? cur retinest .

( S X R U S. jam nunc bac non tfitua.

CL1TIPHO. Scio, upud patrem ; at nunc intérim...

S X R U S. nibilo mugis.

C L I T I P H O. Sine.

S X R U S. nenfinam, inquum.

C L I T I P H O. qus.fi paulifitr.

SX RU S. veto.

C L I T I P H O. Saltem falutare.

S X R US. abeas, fi fapis.

C L I T I P H O. eo.quid

Ifihic! S X RU S.

munebit. C L I.T I P H O.

0 ftlictm hominem I SX RU S.

umbula.

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• LT1EAUTON-TIMORUMEN0S. éf S Y R U S .

- Prcnez-y-bien garde. C L 1 T I P H O N .

Tu m'admireras. S Y R U S .

Mais nos femmes nous ont fuivis de bien prés.

C L I T I P H O N . Où font elles ! pourquoy me retiens-tu ?

S Y R U S . Dés ce moment elle n'eft plus à vous.

C L I T I P H O N . Ouy, chez mon père, s'entend,- Maïs en

attendant... S Y R U S .

En attendant, point de nouvelles, C L I T I P H O N .

Permets-le moy. S Y R U S .

Je ne le fouffriraypas, vous dis-je. C L I T I P H O N .

Eh, je t'en prie, un moment. S Y R U S .

Je vous le derfènds. C L I T I P H O N .

Au moins que je la laluë. S Y R U S .

Si vous elles fage, allez-vous-env C L I T I P H O N .

Je m'en vais. Et celui-cy? S Y R U S .

U demeurera. C L I T I P H O N .

Ah, qu'il eft heureux ! S Y R U S .

Allez feulement, marchez.

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66 HEAUTON-TIMORUMENOS;

- — •-•••• i —-•!••• - i ' mittm

ACTUS SECUNDUS. S C E N A III.

SACCHIS, ANTIPHILA, CLTNIA,

S r RU S, C L l T I P H O .

B A C C H I S.

7T+ Ttepol, Antiphilamea, laudote, frfoT' jttAli tunatamjudico,

Id cum ftuduifti, tfii forrm mores ut confimi-les forent:

Minimeque , ita me dit ament y mirer , fi to fiai qui/que expetit.

Nam mihi, quetle ingenium httberes > fuit in-, diçiooratio tua.

g Et cum egomet nunc mecum in anime vitatr* tuamconfidero,

Adeoque voftrarum omnium, "joigne qua ai fefefegregant ;

Et vos effe iftiufmoâi, e*}> nos non effe , haud mirabileeft.

Namvobieexpediteffi bonus i nos, quibufcum reseft, nonfinunt.

fffuippe ferma impulfi noftra nos amatbres co-lunt:

go Htcubiimminutaeft, illifuum animumalti conférant.

Nifi fi proffeBum eft interea aliquid , defèrt* •vivimue.

Vebk cum une femel ubi ttatem stgert dtcrt* tumeft vire,

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS» 6f

A C T E S E C O N D . S C E N E I I I .

BAGCHIS, ANTIPHILE, CLINIA,

SYRUS, CLITIPHON-

B A C C H I S.

EN vérité, ma chère Antiphile r je vous trouve bien-heureufe, & vous méritez tou­

te forte de lotianges, d'avoir pris foin que vos mœurs répcmdiflrntàvoftre beauté j je ne fuis Pas furprife que tout le monde vous délire, car je puis juger de voftre vertu par la converfa-tion que je viens d'avoir avec vous : & lorfque je coniîdere la manière de vivre de toutes cel­les qui comme vous ne veulent pas recevoir tout le monde, 2c qui ne fe donnent qu'à un feulj je trouve qu'il ne faut pas s'étonner que vous ayez les inclinations honneurs, 2c que nous ne les ayons pas. Il vous eft avantageux d'eftre ainfis mais nous ne le fuirions, caries gens avec qui nous avons à vivre ne nous le permettent pas. Comme ils ne nous aiment que pour noflrebeauté, fi-tôtque cette beau­té change, ils changent aufli , & portent ail­leurs leurs inclinations y de forte que fi nous n'avons efté un peu prévoyantes, nous nous trouvons abandonnées de tout le monde : 2c pour vous, lors qu'une fois vous avez refolu de palier toute voltre vie avec un feul homme

D vj

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«8 HEAUTON-TIMORUMENOS:^ Cujus mos maxumi efl confimilisvoftrûm , ki

ft ad vos applicant ; Hoc bénéficie «trique ab utrifque vero devin-

timmi, le Ut nunquam tdltt amori vofiro incidert pojfit

calamitas.. ANTIPHILA.

Htficio alias .-. me quidem femfer fcio fecifih fiduto,

• Ut ex Ulius commodo mettm compararem com-tnodum-

C h I N I Ai

ahl Ergo , mea Antiphila ,, tu nunc fila reJucem

me in patriam facis. Nam, dum abs te abfum,.omnes mihi laboret,

fuère, quos cepi, levés, ao Praterquam tut carendum quod era*\

S r P, U S. credo-

C L I N I A. Syre, vix fujfero.

Hoccine, memifirum, non liceremeo modo. »»f genium frui-ô

S X RU ». Into, utpatrem tuum vidi ejfe habitum> dite,

etiam dur tu dabiu -R A C.CHIS.

Jjuifnam hic adelefiens eft, qui intuitur nosl A N T I P HI L A.

ah-, retint me, obficra-B A C C H L S.

Amttbo, qu'td tibi efii AHTIPHILA-

difperiL

*

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 6> dont l'humeur vous convient,- vous avez le • plaifir de voir qu'on s'attache abfolument à vous , 8c vous eues liez également par cet choix que vous avez fait l'un de Vautre ; de forte qu'il eft impoflible que- voflre amour fi-nifle jamais.

A N T I P H I L E. Je ne fay pas ce que font les autres; mais

je fsi bien que pour moy j'ay toujours efté appliquée à faire mon unique plaifir de ecluy • de Chnia.

Ç L I N I A.* * Il dit

A h , ma chère Antiphile, vous elles auflicel»fans k feule caufe de mon retour; car depuis quequ'elle je vous ay quittée, toutes les fatigues que j'ay l'enten-euës n'ont efté rien au prix du cliagrin de ne de, elle ne vons pas voir. pa pM

S Y R U S. enter t vu* J'en fuis perfuadé. •

C L I N I A Syrus, je ne puis me retenir. Malheureux

que je fuis ! faut-il qu'il ne me foit pas per­mis de me fatisfaire ?

S Y R U S . Oh,vousn'eftespasaubout, 8c de l'humeur

que je connois voflre père, il vous en fera bien avaler d'autres.

B A C C H I S. Qui eft ce jeune homme qui nous regarde?

A N T I P H I L E . Ah, foutenez-rnoy, je vous prie

B A C C H I S. Qu*avez--vous.

A N T I P H I L E -Je n'en puis plus.

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& HEAUTON-TIMORUMENOS. B A C C H I S.

périt mifero, quidfiupes-t %f Antiphilo *

ANTIPHILA. •uitUon' Clinittm,. an non!

B A C C H I S. •quem vides!

C L l N I A. falve, anmemK

ANTIPHILA. O mi expeBate dinia, falve.

C L I N I A-ut voles!

ANTIPHILA. SoJvom veniffe goudeo.

C L I N I A. teneone te,

Antiphilo, Moxume anime exoptatommeot S Y RU S.

ite mtro : nom vos jamdudum expeBot fenex%

# * » | * i^W

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UHEAUTON-TIMORUMTNOS. ji B A C C H I S .

D'où vous vient cette défaillance l A N T I P H I L E.

Eft-ce Clinia que je voyî B A C C H I S ,

Qui voyez-vous ? C L I N I A ,

Bonjour, ma chère Antiphile. A N T I P H I L E .

Bonjour, mon cher Clinia, que j'avois d'un» patience de vous voir 1 >

C L I N I A . Comment vousportezvvous?

A N T I P H I L E . Quej'ay de joyede vous trouver en bonne)

tante P " _ C L I N I A . °

Eft-ce bien vous que je tiens, mon Anti­phile. que j'ay denrée avec tant de paflionP

S Y R U S. - Entrez au logis, car il y a déjà long tempe, «rue vous faites attendre noftre bon-homme.

W'

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<fz HEÀUTON-TIMORUMENOS.

ACTUS TERTIUS. S C E N A I.

CHREMES, MENZBEMUS,

CHREMES.

L Ucifcithocjam. cejfo pultare ofiium Vicini,primnm ex me ut Jetât fibiftliut»

Rediijfe, etfi etdolefcentem hoc nolle intelle-gai _ " '

Verum, cttm videam mifirumhmc tamexertù ciarier

g. Eju'abitu, celem tam infieratum gaud'mtn,

Cttm illi nihilpericli ex indiciofiet î

Haud faciam: nam, auodpotero, adjutabofè-nem.

Item ut filium nteum amico ataue aquali fuo

Vide» infervirt, *$>focimm ejje innegotiU, ;>«. Nos quoquo.fenès eft aquom fenibtu objej

qui. v

MENE.IX EMUS.

jtut ego frofecTo mgenio egregio ad mifi-tias

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r L'HrUUTON-TIMORUMENOS. 7$

ACTE TROISIEME. S C E N E I.

C H R E M E S , M E - N E D E M E ,

C H R E M E S .

IL commence déjaàfaire jour; pourquoynè vais-je donc pas tout â l'heure heurter sr la

porte de nôtre voifin, afin de lui apprendre le premier quefon fils eft de retour ? quoy qu'on me dife que ce jeune garçon ne veut pas qu'il le fâche. Mais voyant la douleur que ce pau­vre père ade l'abfence defon fils qu'il aime fi tendrement, pourrois-je lui cacher un bon­heur qu'il attend fi peu ; furtout puis que cela ne peut faire aucun tort à ce jeune garçon. En vérité je nefaurois m'en empefeher ; Scjefer-virai ce bon-homme en tout ce qu'il me fera polïible ; 8c comme mon fils Se le lien font fort unis, qu'ils vivent dans une parfaite ami­tié, 8c n'ont rien de cache' l'un pour l'autre, il eft jufte que nous autres vieillards nous vi­vions de mefme enfemble, 8e que nous nous rendions tous les bons offices que nous pour­rons.

M E N E D E M E . Ou je fuis aé plus que tous les autres hom­

mes pour la peine 8e pour les enauts, ou ce

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t+ . HEAUTON-TIMOKUMENOS. Naisse fum , aut illud falfum eft, quodvolgë

audio Dici, diem adimere agritudinem homirti-

bus. Nam mihi quidem quotidie augefcit tnagU Defilio agritudo ; ty quanta diutius uibeft, magie cupiotont o, & magie defiderel

CHREMES. Sed ipfum egrejfumforas video : ibo, alloquar* Menedeme, falve: nuntium apporta tibi, Cujus maxume te fieriparticipent cupis.

MENEDEMUS. *o. Nunquidnam de gnato meo audifti,' Chrtn

met CHREMES.

Valet, atque vivit. MENEDEMUS.

ubinameft, quafo ? CHREMES.

apud medomi» MENEDEMUS.

Meus gnatus ? CHREMES,

fie eft. MENEDEMUS.

venit ? CHREMES.

certc. MENEDEMUS.

Clinië Meus venit t

CHREMES.. dixi.

MENEDEMUS. - eomus, duemeddeumi

cbjeert.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 7 f «qu'on dit -d'ordinaire eft faux, que le temps emporte nos chagrins, car chaque jour je fens augmenter ceux que j'ai de l'abfence de mon fils ; & plus il y a de temps qu'il m'a quitté, plus je deiïre avec impatience de le revoir, fit, plus j'ai de regret de l'avoir perdu.

• C H R E M E S .

Mais le voilà Iui-mefinequi fort, je vais lu? parler. Bonjour, Menedeme; je vous appor­te une nouvelle que vous ferez bien-aue de lavoir.

M E N E D E M E . Avez-vous appris quelque choie de mon fil^

Chrêmes ? C H R E M E S .

Il iè porte fort bien. M E N E D E M E .

Eh, où eft-il, je vous prie? C H R E M E S .

Chez moy. M E N E D E M E .

Mon fils ? C H R E M E S .

Oui. M E N E D E M E .

Il eft venu ? C H R E M E S .

H eft venu. M E N E D E M E .

Mon cher Clinia eft venu ? C H R E M E S .

Cela eft comme je vous le dis. M E N E D E M E .

Allons j que je le voye, je vous prie.. \

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>« HÉAUTON-TIMORUMENOS. C H R E M E S,

' Non volt te /cire fe rediijfe etiam, ér tuuttnt ' Confpectum fugitat ei peccatum. tum hoc ti~

met, • Ne tua durit ia antiqua illa etiam adauStafit^

MENEDEMUS. Non tu ei dixifti, ut ejfem ?

CHREMES. non.

MENEDEMUS. quamoi rem, Chrême?

CHREMES. quiapejfumiifthuc inteatqueh»

illum confulu, Si te tam lent & vilto ejje anime oftenderit.

MENEDEMUS.

30. Nonpojfum: faits jam, fat'u pater durm fui.

CHREMES, ah,

Véhément in utramque partem, Mtnedeme, es nimis,

Aut largitatenimia, aut parfmonia. In eandemfraudem ex h acre atqueex illa in -

cides. Erimumolimpotiuicommearefilium d^uam paterert ad mulrerculam, que, paulu-

lo Tum erat contenta, cuique erant grata ont'

nia, Eroterruifti hinc. ea coatta ingrat tu Pofiillacoepit viBumvolgoquarert. Nunc, cumftnt magno intertriment0 non pol

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 7 / C H R E M E S .

11 ne veut pas que vous fâchiez encore qu'il eft de retour ; il vous fuit àcaufe de la faute qu'il a faite j 8c il craint que la dureté que vous aviez pour lui ne l'oit encore augmen­tée.

M E N E D E M E . Elt-ce que vous ne lui avez pas dit dans quels

fcntimens je fuis prefentement ? C H R E M E S .

Non. M E N E D E M E .

Et pourquoy non, Chrêmes ? C H R E M E S .

Parce que vous prenez-là un mauvais parti,' 8c pour vous 8c pour lui, de lui faire connoître que vous elles fi doux, 8c que vous ne pouvez refifter davantage.

M E N E D E M E . Je ne puis faire autrement i j'ayeuaflezde

rigueur jufqu'ici-C H R E M E S .

Ah! Menedeme, vous outrez tout, 8c vous panez d'une extrémité à l'autre, vous elles ou trop libéral, ou trop ménager. Quelqu» chemin que vous preniez de ces deux-là, vous tomberez dans le mefme précipice. Autrefois quand l'amour de voitre fils ne faifbit que commencer, au lieu de fouffrir qu'il allât chez une femme qui en ce temps-là fe con­tentait de peu, 8c qui avoit de l'obligation de» moindres chofes qu'on faifbit pour elle, vous' le chafiaftes de voitre maifon. Cette créature contrainte par la necelfité, receut en fuite mal­gré elle tous ceux qui la vouloient aller voir. Prefentement qu'il ne peut avoir ce commer-

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}« HEAUTON-TIM0R.UMENOS. Hubert, quidvic dore cupù.nam,uttu fc'uttl

40. Sjuatn ta nunc inftruBa pulcre ad pernicfcm fiet;

Rrimum jam oncillas fecum adduxit plus dé­cent

Oneratas vefte, atoutauro-.fatrapes fi fiet, Su ferre amatorriunquam ejusfutnptus qutat{ Nedumtupofs.

M E N £ D E M U S. eftne ta intud

CHREMES. fifit,rogas?

iff, Stnfi: nam eïunamcctnam, atoutejuscomi-tibut

hedi, quod fi ittrum mihi fit darda, aButn , fiet.

Nam, ut alia omittam, pitifonda modo mi­hi

JjJuid v'tni abfumfit ! fie, Hoc, dicens, ajpe-rum,

Rater, efthoc. aliudlenius, fodes,vde. fo. Relet/idolia.omnia, omnes feriat : Omnes habuifolicitos.atque hacunanox. ftjhtid ttfuturum cenfes, quem aftidui exedent'î Sic me diiamabunt, ut tuarummiferitum eft , Menedtme, fortunarum.

MENEDEMUS.

faciat quod lubet: ff. Sumat,confumat,perdat: décret um eft pati,

Dumillummodo habeam mtcum. CHREMES.

fi certumeft tibi Sicfacere, illudpermagni referre arbitrer, Vtnefcientemfentiat te idfibidare.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 79 C e fins faire une dépenfe prodigieufe, vous v o i l à preft à tout donner. Car afin que vous ikchiez comme elle a maintenant tout ce qu'il f a u t pour bien ruiner les gens, elle mené avec «Le plus de dix filles couvertes d'or & d'ar­gent. Quand Ton Amant ferait un Satrape, il ne pourrait fournir à ces dépenfes, à plus for­t e raiion n'y pourrez-vous reûfter.

M E'N E D E M E. Eft-elle chez vous ?

C H R E M E S . Si elle yeflf belle demande! je l'ay bien

fenri qu'elle y eftj je luy ay donné un ibupé & à toute fi troupe, 8c fi j'endevoisdonner un autre , je ferais ruiné, car fans parler des autres chofes, en goûtant feulement le vin avec fi mine dédaigneufe, quelle quantité ne m'en a-t-elle pas gâté? enmedifant,celui-cieft un peu rude, bon père, voyez, je vous prie, fi vous n'en auriez pas de plus doux. J'ay per­cé tous mes tonneaux. Tous mes gens fùm-foient à peine à lafervir. Et ce n'eft Ht 'qjjpV ne nuit. Que penfez-vous donc devenir, vous qui ferez mangé tous les jours de cette maniè­re? quand jjay vu cela, je vous jure que vous m'avez fait pitié.

M E N E D E M E . Qu'il faflè tout ce qu'il lui plaira, qu'il dé­

penfe, qu'il confirme, qu'il perde, j'ay refolu de tout fouffrir, pourvu que je l'aye avec moy.

C H R E M E S . Si vous voulez en ufer ainfi , il me femble

au moins, qu'il eft fort important qu'il croyc que vous lui donnez de quoy faire toute cette dépenfe fins le fi voir.

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Bo HEAUTON-TIMORUMENOS. MENEDEMUS.

£j)uid fiaciam ! CHREMES.

quidvis potim quant quodco-gttets:

60. Peraliumquemvisutdes,fallite finas Technis per jervolum. etfi fubfienfiidquoquej Illas ibi ejfe, efi> id inter fie agere clanculum. Syrm,cum Mo veftro confiufiurrat : confier unt Confilia adoleficentes : rfi tibiperdere

6y. Talentum hocpacto fiatites eji, quamillo mi­nant.

Nonnuncpecuniaagitur,fiedillud, quo mode* Minimopericlo id demies adoleficentttlo. Nam fi fiemel tuum animum is intellexerit, Priées proditurum te tuam vttam, & priées

70. Pectmiam omnem, quam abs te amittas fi-lium ; hui,

Jjjhfantam fenefiramad nequitiam patefiecerif ! Tibi autem porro Ht non fitfiuave vivere. Nam détériores omnes fittmus licentia. fijhçodcunque inciderit in mentem, volet : ne-

que id 77. Putabit, pravumne an reBunt,fit quodpe-

tet. Tu, remperire, efi> ipfium, nonpoterispati. Dare denegaris ? ibit ad illud illico, fifihtomaxumeapud tejevalerefentiet, xtbiturum fie abs te ejfe illico minabitur.

MENEDEMUS.

80. Vtdereverum, atque itauti res eft, dice-

MENE-

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L'HEAUTON-TLMORUMENOS. Si M E N E D E M E .

Que dois-je faire ? C H R E M E S .

Tout ce que vous voudrez, plûtoft que ce que vous avez refolus faites donner par quel-qu'autre quel qu'il ibit ; laiflez-vous tromper par un Valet. Vous n'attendrez pas long' temps, je me fuis déjà apperceu qu'ils y tra­vaillent, 8c qu'ils machinent quelque choie entr'eux. Noftre Syrus eft toujours en chu-chetant avec voftre Valet. Les jeunes Mai-* « a u ­tres font aufli des conférences enfemble ; ùlent. vous ièroit plus avantageux de perdre * cinq *«»« cens écus de cette manière, que trois * pifto-»«f. les de l'autre. Ce n'eft pas à l'argent qu'il faut prendre garde, mais à le donner à ce jeune homme avec le moins de perilque nous pour­rons ; car fi une fois il connoît voflre foible, 8c que plûtoft que de ibuffrir qu'il s'en aille, vous eft es en e'tat de hazarder voftre repos 8c voftre bien ; Oh quelle porte ne lui ouvrez-vous pas à la débauche.' il arrivera de là que la vie vous fera à charge ; car la licence perd tous les hommes. Il voudra tout ce qui lui viendra dans l'efprit, {ans jamais examiner il ce qu'il demandera fera jufte ou non. Vous ne pourrez voir périr voftre bien, 8c le voir périr lui-mefme, vous lui refuferez de l'argent , aufli-toft il aura recours au moyen qu'il croira infaillible pour fe faire valoir auprès de vous, il vous menacera fur l'heure de vous quitter.

M E N E D E M E .

H me femble que ce que vous dites eft vray.

Tome II. E

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8* HEAUTON-TIMORUMENOS. CHREMES.

Somnum hercle ego hoc noire oculie non vidé meis,

T>um id qutro, tibiquîfiliumreftituerem. MENEDEMUS.

Cedo dextram : porro te oro idem ut faciat t Chrême,

CHREMES. Earatus fum.

MENEDEMUS. •fcin' quid nunc facerete

volo ? CHREMES.

8j-. Hic. MENEDEMUS.

quod fenjijiiiUosmeincipere foL. 1ère,

ld ut mMurent facere : cupio illidare Gjuodvolt: cupio ipfum jam videre.

CHREMES, operam dabo.

Syrus efi prthendendus, atque adhortandus mihi.

A me nefcio quis exit. concède hinc demum, ' 90. Ne nos internas congruerefentiant.

Eatdum hoc negoti mihi obfiat : 'Simus, & Crito,

Vicini noftrihic ambigunt de finibus: Me cepere arbitrum. ibo, ac dictm, ut dixe-

ram, Operam daturum me, hodie non pojfe his do­

re. Of. Continua hicadtro. • •

MENEDEMUS. itaquafo. Dii'vojlramfi-

deml

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. f* C H R E M E S .

En vérité je n'ay pas fermé l'oeil de toute la nuit, pour chercher les moyens de vous ren­dre voflre fils,

M E N E D E M E . Donnez-moy voftre main : je vous prie, mon

cher Chrêmes, de continuer comme vous ave* commencé.

C H R E M E S . C'eft mon deflein.

M E N E D E M E . Savez-vous ce que je, voudrois que vous

fiffiez ? C H R E M E S .

Dites-le moy. M E N E D E M E .

Puis que vous avez apperceuqu'ilstrament quelque fourberie, au nom de Dieu qu'ils fe hâtent, je defire extrêmement de lui donner tputee qu'il veut; je veux voir mon fils.

C H R E M E S . J'en aurai loin ; il me faut prendre Syrus

Se l'exhorter à le faire; mais quelqu'un fort de chez moy. Allez-vous-en, afin qu'ils ne s'ap-perçpi vent .pas que nous lovons de concert; j'ay une petite affaire , Simus 8c Criton, deux de nos voifins font en différend fur les limi­tes de leurs terres, ils m'ont pris pour arbi­tre, je m'en vais les trouver, 8c leur dire que je ne puis terminer cette affaire aujourd'hui, comme je leur avois promis, je feray ici dans ion moment.

M E N E D E M E . Je vous en prie. Grands Dieux! faut-il

que tous les hommes foyent faits de maniè­re qu'ils voyent beaucoup plus clair dans les

E i j

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tS HEAUTON-TIMORUMENOS. • s r R u s .

htm* CHREME S.

gttid tu ifthici

s r RU s. rtSi. equidemteittmrorx

Chrême, Tammane, qui hère tantumbiberis.

CHREMES. nihil nimit.

S r RU S. Nil, narras? vif a vtro efi, qtted dici foltB

10. Aquila feneiius. CHREMES,

eia. S r RU S.

mulier efi commoda: &

Encan, hae meretrix. CHREMES.

fane idem vifa efi mihi. S T R U S.

Et quidem hercle forma luculenta.

CHREMES. fie fatis,

S T RUS.

Jta non ut olim, fedutinunc, fané borna: Minimeque miror, Cliniahanc fi dépérit :

ir. Sedhabetpatremquendamaviium, miferum, atque aridum,

Vicinum hune : noftin i at quafi is non divi-tiis

Abundet, gnatu' ejus profugit inopia. Sein' effe facrum, utdicoi

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 8V ^ Y R U S.

Ha, Monfieur. C H R E M ES.

Que fais-tu icy ? S Y R U S.

Pas grand'cbofe. Mais en vérité je vous admire d'eftre levé défi bon matin, vous qui bûtes tant hier au foir.

C H R E M E S . Eh pas trop.

S Y R U S. Pas trop, dites-vous ? Ma foy, Monfieur ,'

vous avez comme dit le Proverbe lavieilleue de P Aigle.

C H R E M E S . Doucement, doucement.

S Y R U S. Cette femme eft de bon commerce; ellceft

agréable, cette bonne pièce. C H R E M E S .

Oui vraiment ; je l'ai trouvé ainfi. S Y R U S.

Et en vérité elle eft fort belle. C H R E M E S .

Eh, allez. S Y R U S.

Elle ne l'eftpas comme les femmes de voftre temps, mais pour ce temps-ci, elle eft fort belle, & je ne m'étonne pas fi Ciinia l'aime avec tant de pauion ; mais il a un certain père avide de bien, unmiferable que l'avarice a ren­du fec comme une alumete. Ce voifin que BOUS avons, le connoiflez-vous? ce vieux vi­lain, comme s'il n'avoit pas fes coffres pleins d'argent, avoit fouffert que la mifere cnaflaft fonfils de chez lui. Saviez-vouscequejevous dis-là; E iiij

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$S HEAUTON-TIMORUMENOS. C H R E M EA.

quidlego tufiitmtY Haminem fiftrino dignum.

S r R U S. quem t

CHREMES. ifthunc firvolum

Dko adUefcentis... S T R U S.

Syre, tihi timu'i mule. CHREMES,

. ^uipafftuejtidjyeri.

s r R u s. quidfaceretî

CHREMES. rogas t

Aliquidreperiret,fingeretfallacias, Unde effet adolefcenti amies, quod daret : Atque hune diffsilem- invitum fervaret fi~

nem.

S X RU S*

i.f. Garris. CHREMES.

hacfacta ai iiïo opartehant, Syre.

S r RU S.

1

Eho, quaf», lauias qui héros falluntt CHREMES.

Ego veûlaudo. S T RU S.

roitejani.

in lot»

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L'HEAUTÔN-TIMORUMENOS. 8aV C H R E M E S .

Comment? fi jelefavoïs? un homme qu'on devroit envoyer au moulin.

S Y R U S. Qui, Monfieur ?

C H R E M E S . Je veux parler du fot Valet de ce jeune

homme... S Y R U S.

J'ay eu grand peur pour toy, mon pauvre Syrus.

C H R E M E S . D'avoir fouffert que ion Maiftre ait efté

contraint de s'en aller. S Y R U S .

Qn'auroit-il pu faire ? C H R E M E S .

•Mêle demandes-tu? ildevoit trouver quel­que expédient ; inventer quelque rufe pouf* faire venifde l'argent à fan Maiftre qui l'an» ' roit donné àfaMaiftrefle; en faifant cela, il auroit fait le bien de ce fâcheux vieillard mal­gré luy.

S Y R U S . Vous vous moquez.

C H R E M E S . Encore une fois, Syrus, voilà ce qu'il devoit

faire. S Y R U S .

Ho, ho, je vous prie, louez-vous les Valet» qui trompent leurs Maiftres ?

C H R E M E S . Ceft félon, il y a des occafions où j'approu­

ve qu'ils les trompent. S Y R U S .

Fort bien, vraymcnt. Ev

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y

90 HEAUTON-TIMORUMENOS.

C H R E M E S.

qutppequà» Magnarum fiepe id remedium agritudmun»

'fi-Jam huic manfijfet unicus gnatus dotni.

S E RU S. go. Jocone anferio UUcdicat, nefcio i

Nifi mihi quidtm addit animum, que lubeat mugis.

CHREMES. Et nurse quid expeSat, Syre! an, dumhme

denub Abeat, cumtolerare hujus fumtus non queat i Nonne ad fenem aliquam fabricant fingit i 4

S X' R U S. ftolidus eft.

• CHREMES. • 3 y. Atte adjutare oporttt adolefcentuli

Caufa.

S Y R U S.

equidem facile facere pojfum, fi jubés i Etenim, quo paâo id péri foleat, calleo.

' CHREMES, Tantoherck melior.

s r RU s. non eft mentirimeum.

CHREMES. Tac erge.

SX RU S. at heus tu, facite dum eadem hu tut"

mineris ,

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 9* C H R E M E S .

Car fbuvent ces fortes de tromperies font ceffcr de très-grands chagrins. Par exemple, fans aller plus loin, ce fus unique, dont nous parlons, ferait demeuré chez ion père, il fon valet avoit e u de l'efpr it.

S Y R U S. Je ne fay s'il raille, ou s'il parle ferieule-

mcnt ; mais au moins ce qu'il dit me donne courage, & augmente l'envie que j'avois déjà de le tromper.

C H R E M E S . Et prefentement, Syrus, qu'attend donc ce

beneft ? que fon Maiftre foit encore obligé de s'en aller, pour n'avoir pas dequoy fournira la dépenfe de cette femme ? Eft-ce qu'il ne dreflera pas quelque batSrie contre ce bon homme ;

S Y R U S . C'eftunlourdaut.

C H R E M E S . Mais toy, tu devrais luy aider, pour l'a­

mour de ce pauvre garçon. S Y R U S .

En vérité je le ferais très volontiers, fi voua, me l'ordonniez, car en ces fortes d'affaires je fuis aflurement Maiftre paiTé.

C H R E M E S . Je t'en eftime davantage.

S Y R U S . Le menibnge n'eft pas mon vice.

C H R E M E S . Oça, fay donc.

S Y R U S . Mais vous, Moniteur , fouvenez-vous au

moins de ce que vous me dites, fiparhazard, E vj

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1.

%

j)i HEAUTON-TÏMORUMENOSV 40 Si quid hujttt fimilefortï aliquando evenerit, Lm,

Utfunthumana.tuusutfaciatfiliut.

CHREMES.

Non ufitt venitt, fiera.

S X RU S.

fieroherckegoquoqut t ETeque eo nunc dica, que quidquamilium fen~

ferim 1 Sed, fi quid, nequid... qUt fit ejttt atat vides .-

4 / Et m ego te , fi ufitt veniat,. magnifiée,. Chrême,

TracJare poffim. CHREMES.

deifihoc, cum ufitt venerit, Videbimut quid oput fit. nunc ifthuc âge.

S r RU S. Nunquam commodités nnquam herum audiyt

loqui, Hec , cum malifacere crmlertm mi impunim

• fc Lkere. quifnam à nobit egreditur fbrtu t

^'hà

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r L'HEAUTON-TÏMORTJMÉNOS. 91 isomme cela peut arriver humainement, vôtre fils un jour alloit avoir quelque petite amure de cette nature.

C H R E M E S .

Ho» j'efpere que cela n'arrivera pas.

S Y R U S.

Jel'efpereauffienyeritç, &ce que je vous en dis, ce n'eu pas que j'aye apperçû quoy que ce foit en luy. Mais fi cela arrivoit, au moins n'allez pas vous.... vous voyez l'âge

u'ila. Etparmafoy, Moniteur, fil'occa-on s'en prefentoit jamais, j'ay dequoy vous

régaler comme il faut.

C H R E M E S .

Quand cela fera , nous aviferons à ce que nous aurons à faire ; à prefent longe à ce que je t'ay dit.

S. Y R U S .

De ma vie je n'ay oui mon Mailtre fi bien parler 5 il me donne pleine liberté de mal fai­re, Se je voy bien que je puis le tromper im­punément. Qui fort de chez nous?

in

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94 HEAUTON-TIMORUMENOS.

-. • - —* • • ' • '•••— — . • • - mern,

ACTUS TERTIUS. S C E N A III.

CHREMES, CLITIEHO, SYRUS.

' » C H R E-M E S.

Q Uidifthuc, qudfil quiifthic moseft, ClU tiphol itanejteri

Oportet i C L I TI T H O.

quid tgofeci ? CHREMES,

vidin' ego te modo mttnuminp-num huic

Meretrici infime t SYRUS.

aftaeftrei, perii.

CL I T I E H O.

menel CHREMES.

hifieoeulis : ne rugit. Tneis adeo indigne injuriam ilii, qui non <&-

ftineatmanum: f Nam iflhic qmdem contumelia eji : hommem

adtettmicumrecipere, • Atqueejus amicamfuèagitare. vel hereinvi-

no qunm immodeft ut Tuifiil

' S YR>V S. FacJutneJt.

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JVHEAUTON-TÏMORUMENOS. of

ACTE TROISIEME. S C E N E I I I .

CHREMES, CLITIPHON, SYRUS.

C H R E M E S .

QU'eft-ce donc, je vous prie, & qu'elles manières, Clitiphon? Eft-ce ainii qu'il '

en fautufer?

C L I T I P H O N. QyPay-jefait?

C H R E M E S . Ne vous ay-jepas vu porter la main aufei»

de cette Coumïane ?

S Y R U S . Voilà nos affaires faites, tout eft perdu.

C L I T I P H O N .

Qui moy ?

C H R E M E S . Ne le niez pas, je l'ay vu de mes propre»

yeux. Vous faites une injure à ce jeune hom­me, de ne pouvoir retenir vos mains; 8c c'eft affurement là un affront pour luy. Quoy, re­cevoir un ami chez vous , 8c vouloir toucher à fa Maiftreffe ! hier au foir encore à fouper, de quelle immedeftie fuftes-vous !

S Y R U S . Celaeftvray.

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"1 )o" HEAUTON-TIMORUMENOS.

CHREMES. quant moltfius ! ut equidem i

Ita me dit ornent, metui quid futurum deni-que effet, noviego

Amantïumanimum: graviteradvortunt-, qua noncenfeas.

CL1TIPHO. 10 At mihifides apud hune efi , nihil me ifiittt

facturant, pater. CHREMES.

Efio. at cette concédas ab ore eorum aliquatu tijber aliquo.

Libido multafèrt : eafacere prohibettua prof. fentia.

Ego de me facto conjecturant, nemo efimeorunt hodie,

Apud quent expromere omnia mea occultai Clittpho, audeam.

if Apud alium prohibée dignitas : apud alium ipfiusfaSipudet,

Ne ineptus , ne protervos videar. quod tlistra facere crédita.

Sed noftrum efi inttUegere , utcunque, atque ubicunque optes fit, obfeqni.

S T R U S. £>uid ifihic narrât t

CLIT1PH0. perii !

s r RU s. Clittpho, hacegopracipiotibit)

Homthis es fiugi &• tempérantis funftu* offi-cium.

CLITIPHO. tact,

td Sodés, CHREMES»

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r L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 07

C H R E M E S . De quelle importunité ! que Je meure tout

prefentement fi cela n'alla fi loin, que je crai­gnis qu'il n'en arrivait du defordre. Je con-nois l'efprit des Amans, ils prennent en mau­vaise part des ehofesàquoy les autres ne fon-geroient pas feulement.

C L I T I P H O N . Mais, mon père, mon ami eft fort afturé

que je ne feray rien qui le fâche. C H R E M E S .

Je le veux 5 cependant vous devriez vous éloigner un peu, & n'eftre pas toujours fur leurs talons. Les Amans ont mille chofesàfe communiquer, qu'ils n'oferoient dire devant vous, un tiers eft toujours incommode. Je ju­ge des autres par moy-mefme ; voyez-vous, Clitiphon , il n'y a aucun de mes amis a qui je vouluffe découvrir tous mes fecrets j la di­gnité de l'un me retient, la honte m'empê­che de les dire à l'autre, de peur de pafler pour fot ou pour éfronté. Croyez qu'il en eft de mefmc de ce jeune hommejc'eftànousde connoiftre le temps 5c le lieu où nous devons avoir de la comptaifance pour nos amis,

S Y R U S . * * 'W* Entendez-vous ce qu'il dit ? «** **'

C L I T I P H O N . aClïtu • Je fuis mort ! t"m'.

S Y R U S . Eft-ce là ce que je vous avois tant recom­

mandé ? Vous vous eftes comporté en homme prudent & d'une fort grande fagefle.

C L I T I P H O N . Tai-toy, fi tu veux.

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98 HEAUTON-TIMORUMENOS.

S T R U S. reltifanè.

CHREMES. Syre, pudtt me.

S T RU S. credo ; neque id injuria,

Jj)um mihtmoleftum eft.

CLITITHO. pergin' ?

S T R US. herclt verum dico,quod videtur.

CLITITHO. Norme accédant ad iUosî

CHREMES, eho qtm.fi, una accedurtdi via eft t

S T R US. Aftum eft: hic prius fi indicatif, quam ego

argemum effècero. Chrême, vm'tuhommifttdto mihi aufiultarel

CHREMES, quidfaciam l

s r R u s. jubé hune

if Ab&ehmcalieme. CLITITHO.

qub ego hinc ai tant t S T R U S. que? qub libet; daiBùteeums

Abi deambulatum. CLITITHO. deambulatum ! qui ?

S t RUS. vah, quafi défit locut.

Abi fane ifthac, iftorfum, que vu.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 0$

S Y R U S. Voilà comme il faut faire.

C H R E M E S. Syrus, en vérité j'ay honte pour luy.

S Y R U S. Je le croy, Monteur, & ce n'eft pas fana

fujet, cela me fâche bien moy, qui ne fuis pas Ion père.

C L I T I P H O N. Tu continues ?

S Y R U S . Ouy ma foy, je dis mon fcntiment.

C L I T I P H O N. Eft-ce que je n'oferois approcher d'eux?

C H R E M E S . Ho , h o . ne fautiez-vous en approcher;

fans faire des fottifes ? S Ï R U S k

Noftre affaire eft flambée 5 il va fe décov> vrk avant que j'aye tiré noftre argent. Mon» fieur, voulez-vous fuivre l'avis d'unfoti

C H R E M E S . Eh bien, quel eft cet avis ?

S Y R U S . Ordonnez-luy de s'en aller quelque part.

C L 1 T I P H 6 N. Où eft ce que j'iray ?

S Y R U S . Où? où il vous plaira. Cedez-leur la place,

allez vous-en un peu vous promener. C L I T I P H O N.

Me promener? où ? S Y R U S .

Voyez! comme s'il manquoiticy de prome­nade. Allez deçà, delà, où vous voudrez.

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rreo HEAUTON-TIMORUMENOS.

CHREMES.

rebteiicit : cenftol CLITITHO.

Xtiite eradicent, Syre, qui me bineextrudas. S X RU S.

ut tu fol tibi Toftbac comprimito iftas manus.

- . %

A C T U S T E R T I U S . S C E N A IV.

S r RU S, CHREMES.

s r R u s.

C Ex/en' verb ? quid illum forro crédit facïuZ rum, Chrême,

Hifieum, quantum Diidant ofU tibi, ferviu, caftigas, menés i

CHREMES. Égo ifihuccurabo.

s r R u s. atquinunc, hère, hic tibi affèr*

vanduseft... CHREMES.

liet. S T RU S.

(î/apiat : nam mihijam tninii tnmie/i que obtempérât.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 10» C H R E M E S .

H dit fort bien ; j'en fuis d'avis. C L I T I P H O N .

Que le diable femporte, Syrus, de me chalTer d'icy.

S Y R U S . Mais vous une autre fois longez à retenir

vos mains.

ACTE TROISIEME. S C E N E IV.

S Y R U S , C H R E M E S .

S Y R U S .

EN bonne fby, Monfieur, qu'en penféz-vous ? que croyez-vous qu'il deviendra, fi

vous ne le regardez de prés autant que vous pourrez , fi vous ne le chaftiez , fi vous ne ravertiflez ?

C H R E M E S . J'y prcndray garde.

S Y R U S . Voyez-vous Monfieur, c'eft prefentemeut

que vous devez l'obferver... C H R E M E S .

Cela fe fera. S Y R U S .

Si vous eftes fage : carde jour CJJ jour il fait moins de cas de «tes couléils. ,

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ïox HEAUTON-TIMORUMENOS.

CHREMES.

f JQttid tuf ecquid Je illo, quod dudum tecutn tgi> eg'ft*> syrel

Reperifii quod placent, an nondum etiam f S X RU S.

defallacia Dieu ? fi, imieni quandam nuper...

CHREMES. Jrugi es : cedo, quiet

S Y RU S. Dicam. verum, utaliudex alto inc'tdit...

CHREMES. quidnam, Syret

S Y R U S. fefiuma hic efl meretrix.

CHREMES. iiavidetur. S Y RU S.

imo, fifeias. »oHocvide, quodinceptetfacinut. Euit quidam

anus Corinthia Hic : huic drachmarum argenti hic mille de-

derat mutuum. CHREMES. •

gQuidtum f S Y RU S.

ea mortuaefl. reiiquit filiam adolef-centulam ;

Ea reliera huic arraboni efi pro illo argento. CHREMES.

inselligo. S Y RM S.

Hancficum hue adduxit, eaque efi hune ad uxoretntuam.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. io* C H R E M E S .

Mais toy, que dis-tu de l'affaire dontjet'ay tantoff parlé ? y as-tu travaillé, mon pauvre Syrus i as-tu imaginé quelque chofe qui te plaife ? ou n'as-tu encore rien fait ?

S Y R U S . Vous voulez parler de noftre tromperie ?

û, j'en ay trouvé une. C H R E M E S .

Tues un brave garçon ; dy-moycequec'eft. S Y R U S .

Je le veux. Mais comme une chofe fait ibu-venir d'une autre...

C H R E M E S . Qu'eft-ce, Syrus ?

S Y R U S . Cette Bacchis eft une fine mouche 1

C H R E M E S . Cela me parçift.

S Y R U S . Oh, vraiment fi vous faviez ! voyez ce qu'­

elle machine. Il y avoit autrefois icy une cer­taine vieille femme de Corinthe, àqui elle? dit qu'elle avoit prefté trente piftoles.

C H R E M E S . Eh bien?

S Y R U S . Cette Vieille femme eft morte , & elle a

laifle une jeune fille qui luy eft demeurée en gage pourfon argent.

C H R E M E S . J'entends.

S Y R U S . Elle l'a amenée icy avec elle, & c'eft celle

qui eft préfentement dansrapartement de vô­tre femme.

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i o * HEAUTON-TIMORUMENOS. \

CHREMES. if Jj)uid tum?

s r R u s. Cliniam orat, fibi uti id nunc det ; il'

lam illi tamen Toft daturam. mille nummûm pofcit.

CHREMES. & pofcit quidemS

s r RU s. bail

Dubium id eft ? CHREMES.

ego fie putavi. quid nunc c«J gitast

s r s u s. Egone ? ad Menedemum ibo i dicam banc effe

captam i Caria, Ditem , & nobilem : fi redimat, magnum

ineffe in ea lucrum. CHREMES.

10 Erras. S T R U S.

quid itat CHREMES,

pro Menedemo nunc tibi ego refijen* deo,

Non emo. quid au ?

s r R u s. optât a loquere.

CHREMES. et qui non tfi opus.

S Y R U S. Non opus eft ?

CHREMES.

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r L'HEAUTON-TIMORUMENOS. \oï C H R E M E S .

Qu'y a-t-il encore ? • S Y R U S.

• Elle prie Clinia de luy donner cet argent ; 8c elle dit qu'elle ne l'aura pas plutôt touché qu'elle luy donnera cette nlle pour nantiflê-ment de la iomme ; mais c'eft qu'elle luy de­mandé adroitement ces trente piftoles en pur don.

C H R E M E S . Elle les demande aflurément i

S Y R U S. .Ho cela s'en va fans dire.

. C H R E M E S . Je croyois bien que cela aboutiroit là. Eh

bien, fur cela que veux-tu faire ? S Y R U S.

Moy ? j'ifay trouver Menedeme, je diray que cette fille eft de Carie, 8c qu'elle y aefté enlevée i qu'elle eft riche 8c de bonne maifon ; 8c que s'il l'a racheté, il fera là un très-grand profit. . . -

C H R E M E S . Tu te trompes.

S Y R U S. Comment cela ?

C H R E M E S . Je vais te répondre pour Menedeme ; Je né

veux pas l'acheter moy, qu'as-tu à dire? S Y R U S.

Ah, répondez-nous plus favorablement, s'il vousplaift, Mon fie ur.

C H R E M E S . Mais il n'eft pas befoin de tout cela.

S Y R U S, Il n'en eft pas befoin ?

Tome I I . F

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to6 HEAUTON-TIMORUMENOS. CHREMES,

nonhercle-virb. S r R U S.

çjuii/lhuct mirer. CHREMES.

jamfcies. Mant mant; quid efl quedtam à nobi* gravi­

ter crepuere fores !

ACTUS TERTIUS. S C E N A V.

SOSTRATA, CHREMES, NUTRIX,

S T RU S.

SOSTRATA.

N ifi me ttnimttt fallit , hic profeBo eji anntt* lus, quemegof-fjiicor,

Is, quîcum expofita eftgnata. C HR E M E S. •

quid vottftbi, Syre , hoc oratio ?

SOSTRATA. Jjhtidejtî ifnetibividetur?

NUTRIX. , dixi equidem, ubi oftendifti , illico,

Eumèjfe. SOSTRATA.

at ut fatï contemplât a modo fis, mea nutrix ?

NUTRIX. fatis.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. iSjf C H R E M E S .

N o n , te dis-je. S Y R U S.

Comment ? je m'en étonne. C H R E M E S .

Tu le fauras tout à l'heure. Attends, attends; d 'où vient qu'on fait tant de bruit à ndve porte? ,

A C T E TROISIEME. S C E N E V. -

SOSTRATA, CHREMES, LA NOURRICE,

S Y R U S.

S O S T R A T A .

SI je ne me trompe, c'eft aflurc'ment là la bague que je ibupçqnne, c'eft celle qu'a»

voit ma fille quand elle fut eXpolëe. C H R E M E S . '

Syrus, que lignifie cedifeours? S O S T R A T A .

Qu'en dis-tu, Nourrice t crois-tu quç ce foitèlle?

L A N O U R R I C E . En vérité, Madame, vous ne me l'a vee pas

plûtoft montrée que j e l'ay reconnue. S O S T R A T A .

Mais au moins l'as-tubienconlidcrée? L A N O U R R I C E .

Apurement. F i j

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îô8 HEAUTON-TIMORUMENOS.

SOSTRATA. f Ait nuncjam intrb: atque, 'Mapjam laverie,

mihi nuntia: Hic egovirum interea opper'tbor.

ge s r R u s. * te volt : videos quid velit.

Nefcto quid triftis eft. non temere eft. metuo quid fit.

CHREMES. quidfiet ?

N* ifta hercle magnojam conatu magnas nu-gas dixerit.

SOSTRATA. Ehem, mi vir.

CHREMES, ehem, mea uxor.

SOSTRATA. te ipfum quaro.

CHREMES. Uquere quid velis.

% S O S T RATA.. la Rrimum te hoc oro, nequid credas me advor-

fum edictum tuum Tacere aufam.

CHREMES. vis tièi me ifthuc, et fi inçniibile eft,

* crederel Credo.

S Y RU S. nefeio quid peccatt portât bac purgatio. 'rr>)

SOSTRATA. Meminifttri me effe gravidam , épmïhi te

maxumo opère dicere, Si puellam parerem, nolle tollit

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LHEAtTTON-TIMORUMENOS. ion S O S T R A T A .

Va preiëntement au logis, & viens me dire £ cette âDe eft déjà hors du bain ; cependant j'artendray icy mon marr.

S Y R Û S. Ceft vous qu'elle demande, voyez ce qu'el­

le vent i je ne (ày dequoy elle eft trille ; ce-n'eft pas (ans fujet,• j'aprehcnde ce que ce peut eftre.

C H R E M E S . -Ce que ce peut eftre ? ma foy elle va faire

de grands efforts pour me dire de grandes lotti-sës.

S O S T.R A T A . Ha, monmarv.

C H R E M E S . Ha, ma femme.

S O S T R A T A . Ceft vous mcûne que je cherchois-

C H R E M E S . Dttes-moy ce que vous me voulez.

S O S T R A T A . Premieiement, je vous prie, n'allez pas

vous imaginer que j'aye rien fait contre vos ordres.

C H R E M E S , Voulez-vous que je croye ce que vous di­

tes , tout incroyable qu'il eft ? je le croy. S Y R U S.

Cette manière de fe juftiner m'eft on peu fuipcete.

S O S T R A T A . - Vous (buvcnez-vous qu'il y a quelques an­

nées que j'eftois grade, & que vous me dites fortement que 11 j'accouchais d'une fille, vous • c vouliez pas qu'elle fuit devec?

F. iij

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n o HEAUT0N-TIMORUMEN0S. CHREMES.

fit» quidfeceris; îjSuftulifti. fie eft fait umi

s r RU s. dominât ergo herus damnoauctus eft.

S O S T• R A T A. • Minime : fid erat hic Corinthia anus haud

impur a : et dedi Exponendam.

C H R E M E St b Jupiter, tantam effe inanimé in-

fiitiam 1 S O S T R A T A.

Terni quidegofecif CHREME S.

atrogitatï S O S T R A T A.

fipeccavi, mi Chrême Inftiens fici.

CHREMES. / id quidam ego, et fi tu neges, ceriefiio,

20 Te'tnfcicntem atque imprudentem dicere ac fit-cereonmia:

Tôt peccata in hac re o fendis • nom jampri-mttm, fi mettm

Imperium exequi voluijfes,. interemtam opor-tuit,

Non fimulare mortem verbis, reipfajbem vita dare.

At id omitto : thifiricordia, animas mater-nus: fino.

2f Quqm bene verb abs te projfectum eft ! quid voiuifti ? cogita :

Nempf ami illi prodita abs te filia eftplanif-finne, . .

Yel uti qmftum faceret, ver ati vaniret pa-ItUtts

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L"HEAUTON-TIMORUMENOS. n i C H R E M E S .

Je voy ce que vous avez fait > vous l'avez ••élevée, n'eft-il pas vray ?

S Y R U S. Si cela eft, Madame, c'eftà dire que voilà

augmentation de dommage pour noftre Mai-lire.

S O S T R A T A. Point du tout. D y avdit icy une vieille

femme de Corinthe, fort honnefte femme , je la luy donnayà expofer.

C H R E M E S . Oh, Jupiter ? peut-on eftre fi mal avùee î

S O S T R A T A. Je uis perdue ! qu'ay-je fait ?

C H R E M E S . Aie le demandez-vous?

S O S T R A T A . Mon cher Cavernes, fi j'ay mal fait, c'eft

fans le fa voir. C H R E M E S .

En vérité quand vous ne le diriez pas, je fiiisperfuadé que c'eft fans le lavoir Se fans y penier, que vous dites & que vous faites tou­tes choies. Dans cette feule occasion, com­bien de fautes de jugement ! Premièrement, fi vous vouliez exécuter mes ordres, il faloit luy wter la vie fans balancer ; & ne pas faire fcmhlant de luy donner la* mort, en maillant en effet en état de vivre. Cependant je pafle fur cela • lacompaflion, la rendrefle de mère; je le veux. Mais voyez que vous avez efté d'une grande prévoyance! quel effort voftre deflein ? faites-y reflexion, je vous en prie. Vous avez entièrement abandonné vôtre fil­le à cette Vieille, afin qu'il ne tinft pas à

Fi i i j

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î ï i HEAUTON-TIMORUMENOS. Credo id cogitafii, ffhtidvis fatis eft, dut» vi­

vat modo, ffhtid cum illis agas , qui nequ'e jus j neque

bonum,atque aquom jciunt, •loMelius ypejus, profit, obfit, nil vident, nift

quod lubet ? SOSTRATA.

Mi Chrême , peccavi, fateor: vincor : nurse hoc te obfecro,

' Sjuanto tuus eft animas natu gravior, ignof-tentior,

Ut meaftultitu in juftitia tua fit aliquid pra* fidi.

CHREMES.

Scilicet equidem ifthuc faBum ignofeam : ve-> rum, Softrata,

3f Mali docet te mea facilitas multa; fed ijlhue quidquid eft, •

iUjuahoc occeptumefteaufa, loquere.

S O S T R AT A.

ut ftalta & mtftri omnes fumus

Religioft : cum exponendam do illi, de digito annulum

Detraho ; & eum dico ut unà cum p»eljg^x-poneret;

* Si moreretur, ne expers partis effet de noftris. bonis.

CHREMES.

40 Ifthuc reèe : confervafti te,. atque iUatn.-

S. O S T R AT A. is hic eft annulas. " ,-

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. rit; tous qu'eHe ne fe proftituaft, ou qu'elle ne fuft vendue publiquement ; Se voicy fans doute qu'elle eftoit voftrc penfe'c, de quelque manière que ce lbit, diriez-vous , pourvu qu'elle vive, cela me fuffir. Que peut-on fai­t e avec des créatures qui neconnoiflent ni ce qui eft julle, ni ce qui efthbnnefte, ni ce qui éft raiionnable ? que les chofes foient bien ou mal, utiles ou nuifibles, elles ne voyent rien que ce qui leur plaifh

S O S T R A T A . » tort, je l'avoiie, mon cher Chrêmes, rends ; mais je vous prie que comme

vous eftes plus âgé que moy,"vous foyezaufll d'autant plus indulgent, Se que voftre bonté exeufe mon imprudence.

C H R E M E S . Eh bien voilà qui eft fait, je l'exeufe, il

faut bien en pafler par là; mais, Softrata, ma trop grande facilité vous perd. Quoy qu'il en fbit, dites-moy par quelle raifon vous liftes cette faute. *

S O S T R A T A . Comme les femmes font fortes & ridicule­

ment fuperftitieufes, lorfquejeladonnay pour eftre expofée, je tiray de mon doigt une "ba­gue que je mis entre les mains de cette bonne femme, Se je luy dis quelle la donnait à cette enfant quand elle l'expoferoit , afin que fi elle mourait, .elle ne fuit pas au moins entière­ment privée de fa part de noftre bien.

C H R E M E S . - C'eft fort bienfait par ce moyen vous l'a-vez, confervée, Se vous vous eftes fatisfake,

S O S T R A T A . La voilà cette bague.

F v '

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114 HEAUTON-TIMORUMENOS»

CHREMES. Unde haies f

SOS T R AT A.

quant Bacchis fecum adduxit adolefcerù tulam...

SY R US. hem!

CHREMES. J£>uid ea narrât ?

SOSTRATA. ea lavâtum dum it, fervandmn mihi

dfdit. Animum non advorti primum. at, poftquam

afpexi, illico Cognovi ; ad te exilii.

CHREMES. quid nunc fufpicare, aut invertis

4f De Hla t i

SOSTRATA. nefcio , nifi ex ipfa quaras, unde hune

habuerit, Si potis eft reperiri.

S Y RU S. interii ! plms fpei video, quamvohp

JHoftra eft, itafieft. CHREMES,

vivitne illa, cui tu dederds t

1

SOSTRATA.

CHREMES.

Jjïuid renuntiavit oiimfecifit t

nefcio.

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r L'HEAUTON-TIMORUMENOS. n f C H R E M E S .

D'où Pavez-vous eue ? S O S T R A T A .

Cette jeune fille que Bacchis a amenée avec die...

S Y R U S. Oh!

C H R E M E S . Que dit-elle ?

S O S T R A T A . M'a priée de la luy garder pendant qu'elle

fétpit dans le bain. D'abord je ne l'ay pas re­gardée; mais dés que j'ay eu jette les yeux de/Tus, auffi-toft je l'ay reconnue, Se je fuis accourue vous chercher.

C H R E M E S . Eh bien que croyez-vous de cette fille ? ou

qu'en avez-vous découvert i S O S T R A T A ' .

Rien autre chofe ; mais vous pouvez vous informer d'elle d'où elle a eu cette bague , afin de voir fi nous poumons retrouver noitre fille.

S Y R U S. Mes affaires vontmal ; je vcqtmille fois plus

d'apparence à cela que je ne voudrois; c'eftlà noftre fille, fi tout ce qu'elle vient de dire eft vray»

C H R E M E S . Celle à qui vous Payiez donnée vit-elle en­

core ? S O S T R A T A .

Jenefây. C H R E M E S .

Après avoir emporté cette enfant, que vous dit-elle qu'elle en avoit fait ?

F vj

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tt6 HEAUT0N-T1M0RUMEN0S. S O S TR A T A.

id, opuod juferam\ CHREMES.

Nomen mulieris cedo quodfit, ut qti&ratur. S O S T R A T A.

Rhiltere. S r R V S*

fo ïpfa eft. mi'rum ni iUafalva eft, & ego périt. CHREMES.

Softrata,, Sequere me intrbhac.

S O S T R A T A. utprater ftjem evenit \ quam t'mtù

mail, Ne nunc animo ita effet duro, ut olim in tel-

lendo, Chrême I CHREMES*

Non licet hominetn effe fepe ita ut volt fi M* nonfinit.

Nunc ita tempus eft mi T ut cupiam filiam t elim nil minus.

,i

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. n-i S O S T R A T A .

Ce que je luy avois ordonné. C H R E M E S .

Dites-moy le nom de cette femme , afin qu'on la cherche.

• S O S T R A T A . -.Philteré.

S Y R U S. C'eït elle mefme' ; c eft un. grand hazardi

fi cette fille n'eil retrouvée, & fi je ne fuis per­du.

C H R E M E S . Sofirata, fuivez-moy au logis.

S O S T R A T A . Comme les chofes ont reiiffi contre mon ef-

perance ! que j'ay appréhendé que vous ne fufi-fiez encore aufli dur que vous Perliez quand vous défendîtes d'élever cette enfant!

C H R E M E S . Les hommes ne font pas toujours ce qu'ils

voudroient, à moins que.leurs affaires ne le permettent. Prefentement les miennes font tournées de façon que je voudrois bien avoir une fille ; ce n'eftoit pas de meîme autre». fois.

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118 HEAUTON-TIMORUMENOS. n ACTUS -QUARTUS..

S C E N A I.

s r R U's.

N lfi fallit me animas , haud multum à m* aberit infort unium:

Ita herele in anguftam oppidb nunc meacogun-tur copia :

Nifi aliquid video , ne ejfe amicam hanc guet­té rtfcifcat fenex :

Nam quod fperem de argent'o, aut pojfe poftu-lem me faller e,

f Nihil eft : triumpho , fi licet me latere teBo . abfcedere.

Crucior, bolum tantum mihi ereptum tamfu-biib éfaucibus.

ffiluid agam l aut quid comminifcar î ratio deintegroineundaefimihi.

Niltam difficile eft, quinqu&rtmdomveftigari poffiet.

ffiltfid, fi hoc fie nunc incipiam t Nihil eft. Si fiel Tantundemegero.

10 ait fie opinor. noupoteft. inuoptttmi. eugeha-, beo optumam.

. Retraham herele Jepinor r ad me idem illud fugitivum argent um tamen.

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r L'HEAUTON-TIMORUMENOS. n 9

ACTE QUATRIEME. S C E N E I.

*' S Y R U S.

AUtant que je le puis comprendre, noflre défaite n'eft pas loin, car je voy mes

troupes fort preflees, 8c il n'y a point de falut pour mpy, fi je ne trouve quelque expédient pour empefcher que le bon homme ne fâche que Bacchis eft la Maiftrefle de fon fils :• car o'efperer de pouvoir luy efcroquer cet argent, ou de penfer à luy tendre quelqu'autre piège, ce leroit une folie. Ce fera un afiez grand exploit, fi je puis me tirer d'icy vie 8c ba­gues fauves. Perte ! j'enrage , qu'un fi bon morceau mefoit échapéà l'heure que je m'y au en lois le moins. Que feray-je? cm que puis-je inventer? il me faut recommencer fur nouveaux frais. Avec tout cela, il n'y arien défi difficile qu'en cherchant on ne puifle trouver. Si je m'y prenois de cette manière ? non, cela ne vaut rien. Etdecelle-cyPjen'a-vancerois pas davantage. Mais voilà pourtant le moyen. Cela ne fe peut ; au contraire, fort bien ; courage, j'ay un expédient merveil­leux , je penfe ma foy qu'à la finjeratraperay cet argent qui a fi bien pris la fuite.

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I

, t o . HEAUTON-TIMORUMENOS.

_ • -

A C T U S QUARTUS. S C E N A II.

C L I N I A, S T RU S.

C L I N I A.

N Ulla tnihi ris pofthac poteft jam intervenirer tant»,

Jj)u* tnihi tgritudinem afferat:tantahac lai. tia obortaeft.

Dedo patri me mine jam , ut frugalior fim quamvolt.

S r R U S. Nil me fefellit : cognita eftr quantum audit

hujus verba, f. Ifthuc tibi ex fententia tua obtigi/fe Ut or.

C L 1 N I A.

O mi Syre, audifiin' ob/ecro t s r RU s.

quidni, qui ufque unit a§ut\ rimt

C L I N I A.

Cui equi audifii commodiquidquamevenijfit S T R U S.

nu Ui. C L I N I A.

Atque, itameDiiament, ut ego nunt non tam meapte caufa,

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. m "

ACTE QUATRIEME. S C E N E I I .

C L I N I A, S Y R U S.

• C L I N ' I A .

DEformais il ne fauToit m'arriver aucun malheur qui puifle me donner de l'in­

quiétude , j'ay un trop grand fujet de joye. •A prefent je me livre à mon père, & je veux eftre encore meilleur ménager qu'il ne vou­dra.

S Y R U S. Je ne me fuis point trompé ; cette fille eft

reconnue, autant que je le puis comprendre, par ce qu'il dit. Moniteur, je fuis ravi que les chofes aillent commevous le fouhaitiez.

C L I N I A. Ho, mon cher Syrus; dîs-moyje te prie,

fais-tu que .. ? S Y R US.

Pourquoy ne le faurois-je pas, puîfque j'ai efté prefent à tout?

C L I N 1 A . . ,

As-tu jamais vu arriver un pareil bonheur à qui que ce foit ?

S Y R U S. Non afïurément.

C L I N I A. ' En vérité je n'en ay pas tant de joye pour

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i t i HEAUTON-T1MORUMENOS. Lit or, quam illius, quam ego fcio ejfe honore

quovù dignam. S X RU S.

10. Itacredo: fed mine, Clinia,age, datemihi •vicijfim:.

Nam amici quoqueres efi vitlenda, m-tuto ut collocetur,

Nequid de arnica nunc fenex.

C L I N I A. ô Jupiter !

S r R U S. quiefee.

C L I N I A, Antiphilamea nubetmihi\

S T R U S.

ficcineme interloquere t

C L 1 NI A.

J%uid faciam, Syremi? gaudeo: ferme.

S T R U S.

fero hercle "vero.

C L I N I A.

if. Deorum vitam adepti fumus.

s r R u s. frufira operam, opinor,fume,

C L I N I A. Loquert, studio.

s r R u s. at jam hoc non âges.

C L I N I A. agstm.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 11 j moy-mefme, que j'en ay pour elle, car il n'y a point de fortune qu'elle ne mérite.

S Y R U S. J'en fuis perfuadé. Mais àprefènt, Mon­

iteur, il faut à voftre tour que vous vous don­niez à moy, car il eu juftedepenfer à mettre auffi les affaires de voftre ami en fureté, & de faire en forte que prefentement fon père ne fâ­che rien de fa Maiftrefle.

C L I N I A. Oh, Jupiter!

S Y R U S. Oh, finiftez donc ces tranfports.

C L I N I A. J'épouferay ma chère Antiphile !

S Y R VS. M'interromprez-vous toujours ?

• C L I N I A. Que veux-tu que je fafle, mon pauvre Sy«.

rus? je fuis tranfporté de joye, àye lacom-plaifance de me fouffrir.

S Y R U S. Il faut bien que je l'aye malgré mes dents.

C L I N I A. Nous allons mener une vie auffi douce que

celle des Dieux! S Y R U 5.

Je croy que je perds ma peine. C L I N I A.

Oça-parle, j'écoute., S Y R U S.

Mais dans un moment vous n'écouterea plus.

C L I N I A . J'écouteray.

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i24 HEAUTON-TIMORUMENOS. S T R U s.

videndumeft, inquam'i Amici quoque res, Clinia, tut in tuto ut colloce-

turt Namfinunc à nobis obis, & Bacchidem hic

relmquis, Senex refcijfet illico efe tmicim hemc Cliti-

fhonis : 20. Si abduxeris, celabituritidem, utcelataad-

huceft. CLINIA.

At enhn ifihocnihil eft magis, Syre, mets nu~ ptiis advorfum :

Nam quo ore appeUabo fatum ? Unes quid di-cam ?

S T R U S. quidni !

CLINIA. f$uid dicam ? quam caufam afferam l

S T RUS. quid l nolo mtntiare :

Afertè, ita ut res /efe habet, narrâto. CLINIA.

quid aist

S r R U S. jubeo

tt Illxmteamare,&>velle uxorem, hancefeClU tifhonis.

CLINIA.

Bonam atque jufiam rem offidô imperas, rb> fallu facilem ;

Ityfcilicet, jam me hoc voles orare patrem.ut celet

Senem vofirum.

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L'HEAUTONTTIMORUMENOS. i z r

S Y R U S.

Je vous dis qu'il faut fônger à mettre les af­faires de voftre ami en fureté, car fi vous vous en allez prefentement de chez nous, & que vous y taifiiez Bacchis , noftre bon-homme verra tout aufli-toft que c'eft la Maiftrefle de Clitiphon, au lieu que fi vous l'emmenez, el­le paflera pour ce qu'elle a toujours pafië.

C L I N I A.

Mais, Svrus, cela eftentièrement contraire à mon mariage; car de quel front pourrai-jc parler à mon père? comprends-tu ce que je te dis?

S Y R U S. pourquoynon ?

C L I N I A. Que luy diray-je, & quel prétexte trou­

ver ? S Y R U S.

Au contraire, je ne veux pas que vous men­tiez, dites-luy la chofe comme elle eft.

C L I N I A. Que dis-tu là?

S Y R U S. Je vous dis que je veux que vous luy diriez

que vous eftes amoureux d'Antiphilc,. que TOUS ibuhaitez del'époufer, 8c que Bacchis eft la Maiftrefle de Clitiphon.

C L I N I A. Ce que tu me demandes-là eft tres-jufte &

tres-facilc. C'eft à dire que tu veux que je p r i e mon père de n'en rien dire à voftre bon-nomme.

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tx<S HEAUTON-TIMORUMENOS. ' s'r R u s.

imo, ut relia via rem narret ordine omnem. C L I N I A.

heml Satin' fanus es & Jobritu ? tu quidem illutn

plané perdis: 30. Nam qui illepoterit ejfe m tuto, die mihi l

S X RU S. Huic equidem conftliopalmam do: hic me ma­

gnifia effero, Qui vim tantam in me & pote fat cm habeatp

tant* aftutu, Ver a dicendo ut eos atnbos fallam, ut, cum

narret fenex Vofiernoftro, ejfe ifiamamicamgnati,non cre-

dat tamen. C L I N I A.

3|-i Atenimfpem ifthoe paUorurfum nuptiarum omntm eripis :

Nam dum amicam hanc m'eam ejfecredet, non committet filiam.

Tufortajfe, quid me fiât, parvicuras,dumi0.i confulis.

s r RU s. Quid, malum, meatatemeenfes velleidadft-

mulariert Unusefi dies, dum argentum eripio. pax ! ni-

hil amplius. C L I N I A.

40. Tantum fat habes ? quid tum, que.fo.fi hoe pater refciveritl

s r R u s, Quid.firedeo ad illos, qui aiunt, Qùidfinune

coelurn ruât ! C L I N I A.

Metuo quid agam. .

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L'HEAUTON-TIMORUhlENOS. 117 S Y R U S. ,

Nullement, je veux au contraire qu'il lui conte la chofe comme elle eft d'un bout à' l'autre.

C L I N I A. Oh, es-tu en ton bon fens ? tu le perds.

Car dy-moy, je te prie, comment pourra-t-il fetirer delà?

S Y R U S. Voilà où je triomphe, voilà où je ne faurois

aflèz me louer de trouver en moy des finenes qui ont tant de force 8c de pouvoir, qu'en di-fant la vérité je tromperay nos deux vieil­lards, de telle forte que lors que le voffre dira au noftre que Bacchis eft la Maiftreffe de fon fils, il n'en croira rien pourtant.

C L I N I A. . Encore une fois tu m'oftes toute efperance

de me marier, car pendant que Chrêmes croi­ra que j'aimeray Bacchis, il ne me donnera jamais fa fille. Mais peut-eftre que tu ne t'em-barrafles pas fort de ce que je deviendray , pourvu que tu tires Clitiphon d'intrigue.

• S Y R U S. Comment, diantre ! croyez-vous donc que je

veuille que cela dure un fiecle ? un jour me iuffit, jufqu'à ce que j'aye tiré l'argent qu'il nous faut. Boni pas un quart d'heure de plus.

C L I N I A. Te contenteras-tu de cela i maisquoyjete

p r i e ; fi fon père s'apperçpitdetoutcecy ? S Y R U S .

Ah, mais fileCieltomboitprefentement. C L I N 1 A.

Je crains fort ce que je vais faire.

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\it HEAUTON-TIMORUMENOS. s r R u s.

tnetuis ? quafi non ta pate-ftasfittua,

JjW -velis in temfore ut te exohat, rem facto* . palam.

•> C L I N I A. Age, âge, traducatur Bacchis,

S r R U S. of tume\iffa exitforas'.

'ACTUS Q^JARTUS. S C E N A III.

BACCHIS, CLINJA, STRUS,

DROMO, THRTG1A.

BACCHIS.

S An'fol froterve me Syri fromijfahuc induxe-runt,

Decem minas quas mihi dare follicitsts eji. quod fis nuncme

Tteceferit, fafe obfecransme, utveniam, frst-. ftra veniet :

Aut-, cum venturam dixero, ey> conflituero i cum is certè

y. Renuntiarit : Clitifho cuminffe ftndebitani-mï;

Decifiam, ac non veniam ; Syrus mihi tergo faenas fende t.

. . C L 1 N I A. Sati'.fcitepromittit tibi,

SYRUS.

J

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. ixf S Y R U S.

Vous craignez ! comme sfil n'eftoit pas en voftre pouvoir de vous débarrafler quand vous le voudrez. Vous n'aurez qu'à dire la chofe comme elle eft.

C L I N I A. Voilà qui eft fait, que l'on amené donc Bac-

chis. S Y R U S.

Fort biens la voilà qui fort.

ACTE QUATRIEME. S C E N E III.

feACCHÏS, C L I N I A , S Y R U S ,

D R O M O N, P H R Y G I A.

B A C C H I S.

EN bonne foy Syrus m'a fait venir ici fort impertinemment, avec les belles promenés

qu'il m'a faites de me donner trente piftoles.. Mais s'il me trompe cette fois, il viendra fou-vent en vain me prier de venir, ou fi jeluy promets, 8c que je prenne jour, je manque-ray au rendez vous. Clitiphon à qui il aura af-furé que je dois l'aller trouver, fera chagrin, s'en prendra à luy, le frottera, 8c jeferay van,-gée de fon impudence. . • -

C L I N I A .

Elle te fait là d'aflez bonnes promenés. T o m e II. . ,

' G

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^ o HEAUTON-TIMORUMENOS,

s r R u s. ut qui tu bancjocari créais ?

Raciet, nificaveo. B A C C H I S.

dormiunt : pol ego iftos commovebo. Mets Phrygia, audiftin', modo ifie homo quant

villam demonftravit to. Chatmi t

P H R T G I A. audivi.

SA C C H I S. proximam ejfe huit

fundo ad dextram t P H R T G I A.

memini. B A C C H I S.

Curriculo percurre ; qpud eum miles Dionyfia agitât.

s r R u s. 6)uid inceptat ?

B A C C H I S. die me hic oppido ejfeinvi-

tam, atque ajjervari : Verum aliquopaBo verba me hisdaturamejfef

& venturam.

s r RU s. Ftrii herclel Baccbis, mane, mane, qttb mittts

ifthanc, qu&fo ? if- J-ube mqrteat.

B A C C H I S. abi.

S T R U S. mtinparatum efi

argentum.

1

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. r j * S Y R U S.

Mais croyez-vous qu'elle raille ? elle le fe­ra ma foy comme elle le dit, fi jen'yprends garde.

B A C C H I S . Ils dorment , je les éveilleray atTurément.

Machere Phrygia, as-tu pris garde à la maifon de Garinus, que cet homme nous a tantoff, montrée ?

P H R Y G I A . Oui.

B A C C H I S . C'eft celle qui eft la plus proche de celle-^y

d u cofté droit. P H R Y G I A .

Je m'en fouviens. B A C C H I S .

Va tout d'une courfes il y a chez ce Carinus un Capitaine qui y célèbre la Feue de Bac-chus.

S Y R U S. Que veut-elle faire ?

B A C C H I S . Dy-Iuy que je fuis icy malgré moy,. & que

l'on me garde à veué; mais que de quelque manière que ce foit, je leur joiieray un tour de ma façon, 8c que j'iray le trouver.

S Y R U S. Je fuis perdu ! Bacchis, arrêtiez, arrêtiez,

où l'envoyez-voUs ? je vous prie de luy dire qu'elle demeure.

B A C C H I S . Non, marche.

S Y R U S. Mais je vous dis que voilre argent eft

prête. G ij

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. t 3 a HEAUTON-TIMORUMENOS. B A C C H I S.

qui» maneo. S T R U S.

Atquijam dabitur. B A C C H I S.

ut lubet, num ego infto ? s r il u s.

an /ci»' quid,/odes t B A C C H 1 S.

guid? s r RU s.

-0 tranfeundumnunctlbiai Menedemum, & tua pompa

Eo traducenda eft. •

B A C C H I S. quam rem agi', /celas } S T RU S.

ego argentum cudo, 3uod tibidem.

B A C C H I S. iignamne putas, quam in-

ludasi S T R U S.

non eft temerè. B A C C H I S.

ao. Etiamne tecum hic resmihieftï

S T R U S. minime: tuumtibireddo.

B A C C H I S.

Eattir. S T R US. fequerehac. heus, Drom».

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. i s jv B A C C H I S.

Et moy je te dis que je demeure donc. S Y R U S .

On vous le donnera tout à l'heure. B A C C H I S.

Comme il vous plairai eft-ce que je vous prefle ? *

i S Y R U S . Mais favez-vous ce qu'il faut que vous faf-

fiez, s'il vous plaift? . B A C C H I S.

Quoy ? S Y R U S .

Il faut que vous pâmez chez Msnedeme avec tout voftre train.

B A C C H 1 S . ». Que fais-tu là, fcelerat ?

S Y R U S . Qui moy, je fais de l'argent pour vous don­

ner. B A C C H I S.

Trouves-tu que je fois une femme qu'on doive jouer?

S Y R U S . *Ceque je vousdis-là n'eft pas raillerie.

B A C C H I S . Eft-ce que j'ay là quelque chofe à démeHer

avec toy ? S Y R U S .

Point du tout, mais je veux vous rendre ce qui vous appartient.

B A C C H I S . Soit, allons chez Menedeme.

S Y R U S . Suivez-moy par ici- Hola, Dromon.

G iij

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U4 HEAUTON-TIMORUMENOS» X» R 0 M O.

quit me volt t S T RUS.

Syrus. 1>R O M O.

quid efl rei t SY R U S.

Jbicillas omnes Bacchidiitranfduce hucadvo» prcperï.

Et R O M O. £>uum obreml

SYRUS. ne qu&rat : efferant, qua fi-

cum hue attulerunt. Sperabit fumptum fibi fenex effi harunc abittr

levatum. tp. NaMchaudfcit, hocpaulumlucriquantum

ei datnni apportet. Tu nefeit id quod feis, Dromo, fifapies.

D R O MO. mutum dices.

ACTUS QUARTUS. S C E N A IV.

C H RE M E Sy S Y R U S.

CHREMES.

I Ta me DU amabunt, ut nunc Minedemi xj» cem

Miftret me, tantum devenijfe ad eum malii lllanccme mulitiem alerecum Ma familial.

""^**w

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. itjf D R O M O N.

Qui me demande? S Y R U S.

C'eft Syrus. D R O M O N.

Qu'y a t-il? S Y R U S.

Mené bien vite toutes les EfclavesdeBacch:.-nhez vous.

D R O M O N. Pourquoy cela ?

S Y R U S . Ne t'en informe pas ; qu'elles emportent de

chez nous, tout ce qu'elles y ont apporté. Quand noftre bon-homme les verra fortir, il fe croira délivré d'une grande dépenfe. Mafoy il ne fait pas combien il payera cher ce petit gain. Au moins, Drornon, fi tu es iage, ignore tout ce que tu fais.

D R O M O N. - Tu diras que je n'ay point de langue.

ACTE QUATRIEME. SCENE IV.

C H R E M E S , S Y R U S .

C H R E M E S .

EN vérité le pauvre Mcnedeme me fait pi­tié, je le plains que cet orage foit allé fon­

dre chez luy. Nourrir cette femme avec toute fa bande 1 je fay bien qu'il ne s'apper-

G iiij

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"^IFW

Xî<S HEAUTON-TIMORUMENOS. Etfifcio, hofce alkjuot dies non fentiet:

t. Ita magno defiderio fuit eifilius. Ver uni, ubi videbit tantôt fibifumptus demi jQuotidianos ftr't, necfierimodum, Optabitrurfum ut abeat abfe filius, Syrumoptttmè, eccum.

s r R v s. cejjo hune adoriri ?

C H R É*M JE $. Syre.

s r R v s. hem ï

jo . £%uid eft ? te tnihi ipfum jam dudum optabam dari.

CHREMES.

Videre egiffe jamnefeio quid cum fene. S r R U S.

De illo, quoddudum! dictum faitumreddidi. CHREMES.

Sonan'fideî

s r RU s. bona hercle* •

CHREMES. non pojfumpatï

Shtin tibi caput demulceam. accède hue, Sy-rti

if. Eaciam boni tibi aliquid pro i(la re, ac lu-bens.

S T R U S. At fi fiias, quam feiti in mentent venerhU.

CHREMES. Vah\ gloriare evenijfe ex fenttntiaX

S X R US. -, Hon-bercU verb; verumdico*

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. tyf cevra de rien ces premiers jours, tant il avoit d'envie de revoir fon fils ; mais lors qu'il ver­ra que tous les jours de la vie il faudra faire la meirne dépenfe, 8c que cela n'aura point de fin, il fouhaitera encore que fon fils s'en ail­le. Mais voila Syrus fort à propos.

S Y R U S. Que ne vais-je l'aborder ?

C H R E M E S . Syrus.

S Y R U S . Hé ! qu'y a-t-il ? il y a long-temps que je

fouhaitois de vous trouver. C H R E M E S.

Tu me parois avoir déjà conclu je ne fay quoy avec noftre vieillard.

S Y R U S . Voulez-vous parler de ce que nous dirions

tantoft. î ho, auffi-toft dit, aufh-toit fait. C H R E M E S .

En bonne foy ? S Y R U S .

Oiy en vérité. C H R E M E S . :

Je ne faurois m'empefcher de t'embrafler ? approche, Syrus, je te feray afiurement du biçn pour cette action, 8c de tout mon cceur.

S Y R U S . Maïs fi vous faviez, Monfieur, que j'ai ima-j

ginéunjolytour. C H R E M E S .

Mais n'eft-ce point une vanitéque tu te don-nés mal à propos d'avoir bien rencontré?

S Y R U S . , Non par ma foy, ce que je vous dis elt vrayj

\ au pié ae la lettre. G v

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>j8 HEAUTON-TIMORUMENOS. CHREMES.

dic,çtuidefi i SX RU S.

Tut Clitiphonis ejft amtcam hanc Eacchideta} jo. Menedemo dixit Clinia, &eagratia

Secum adduxijfe, ne id tu perfentifeeres. CHREMES,

frobè S X R U S. die fides.

CHREMES. nimium,inquami

S' r RU S. imo fifeias.

Sed porro aufculta quodfupereftfallacu. Se/h ipft dicet tuamvidi/Jefiliam:

xp. Sibicomplacitam ejusformam,pofiquamafpeà xerit :

Banc cftpere uxerem. CHREMES.

modom qita inventa efi t S T RUS.

«ami Et quidemjubebitpofcu

CHREMES.

quamobrem-ifihuc, Syre.$. Nam prorfum nihil intellego.

S T RU S.. hui,. tardas es.

CHREMES,. * Tortajfe,

s r RU s. argentum dabitur ei ad nupth*),.

xp. Aurnm>atqucve/hem qui... tents ut i

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L'HEAUTON-tlMORUMENOS. t j » C H R E M E S .

Dy-moy ce que c'eft. S Y R U S.

Clinia a dit à fon père que Bacchis eft la MaiftreiTe de voftre fils, qu'il Ta em menée avec luy afin que vous ne vous en apperceuflîcz point.

C H R E M E S . Fort-bien.

S Y R U S. Dites-vous vray , le trouvez-vous bien ?

C H R E M E S . On ne peut pas mieux, te dis-je.

S Y R U S. Oh fi vous faviez. Mais écoutez, je vous

prie la fuitç. Clinia doit dire à ion père qu'il a vu voftre fille, & qu'il la trouve bien faite ; qu'il voudrait bien qu'on la luy donnât es mariage.

C H R E M E S . Eft-ce celle qui vient d'eftre trouvée.

S Y R U S. FJle-meime. Il priera Menedeme de vous la

demander. C H R E M E S .

Pourquoy cela ? car enfin je n'y comprends rien.

S Y R U S. Ouais, Monfieur, vous elles aujourd'hui

bien pelant. C H R E M E S .

Cela peut eftre. S Y R U S.

Son père luy donnera de l'argent pour ce* noces, afin qu'il... vous comprenez bien?

G v>

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«4° HEAUTON-TIMORUMENO&.

CHREMES.

comparet.

S X M. U S. Id ipfum.

CHREMES.

ut ego illi nec do, tue dejpondeo. S T RU S.

Non T quant ob rem ^ CHREMES,

quam ob rem ? me rogut l homïni..".

s. r RU s. ut lubet.

Non ego inperpetuumdicebam illam illi ut dores, \pVerum utftmulares.

CHREMES. .nonmea eftfimulotïo\

Ito ut ifihtc tuwmifceto, ne me opdmifceas. Egoif, eut daturui mnfum, ut ei dejfon,-

pjdeam 1 •' * "> S T RU S:

Credebam. CHREMES-.,

minime. S T EU S.

fiite poteratfierir Et ergo hoc, quia dudum tu tantoperejujferasl Ego ccepi.

CHREMES, credo.

; . - S T R U S. caterumeqfùdemifihuc, Chrême,

jfp JEqui ionique facio.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 14,"

C H R E M E S . Afin qu'il acheté les bijoux & les habits.

S Y R U S. Celamefme...

C H R E M E S . Mais pour moy je ne luy donne ni ne. luy

promets ma fille. S Y R U S.

• Non F pourquoy cela ? C H R E M E S.

Pourquoy cela ? peux-tu me le demander ? je donnerais ma fille à un homme...

S Y R U S. Comme il vous plaira. Je ne dirais pas que

vous la luy donnaffiez tout de bon, je vouiois feulement que vottBrifhez femblant.

C H R E M E S . Je ne fay point faire femblant. , Vois<-tu T

démêle tes affaires comme il te plaira, pour­vu que je n'y fois point mêlé. Moy, que je-promette ma fille à un homme à qui je ne la veux pas donner !

S Y R U S. Je le croyois.

. C H R E M E S -Tu te trompois.

S Y R U S. II me ferhble que cela fç pouvoir, & je n'ay

donné là-dedans que parce que vous m'aviez tantofl recommandé h fort cette affaire. -

C H R E M E S. Je le croy.

S Y R U S. ' A u refte, Moniteur, je fais tout pour le mieux.

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Ht HEAUTON-TIMORUMENOS.

CHREMES.

atqui curnmaxumï Volo te dure oferam ut fiât, verum alia via'.

s r R u s. Tint; attirâtur aliud. fediUudquod tibi . Dixi de argento, quodifta débet Bacchidi , Jd nunc reddendum efiilii. neque fcilicet

45* Eo nunc confugies, £htid mea t num mibi datum efl i

Numjujfil num illa offignerare filiam Meam me invite potuit} verum illud, Chre~

me, Dicunt, fus fummum, fitfe fumma efi mat»

litia. CHREMES.

Haud faciam. S r RU S.

imo aliis fi licet, tibi non licet. fo Omnts in lauta te & bene farte auSa ftti

tant. CHREMES.

i^uin egomet jamadeam deferam.

S T RU S.

imofilium J'ube fotius.

CHREMES, quamobrem t

S T RU S. quia enim in eumfufiicio efi

Tranfiata atmris.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. *4f C H R E M E S . t

Oh, je fôuhaïte fort encore que tu achevés; mais il faut trouver quelqu'autre moyen.

S Y R U S. Soit > cherchons-en un autre. Maispour cet

argent que je vous aydit quevoftre fille doit à Bacchis, il faut prefentement le luy rendre ; & pour ne la pas payer, je croy que vous n'e-lies pas homme a dire comme la pluipart des gens j Qu'ay-je affaire de cela ? eft-ce à moy qu'elle a donné cet argent ? eft ce pour moy qu'il a efté donné ? cette vieille femme pou-voit-elle donner ma fille en gage fans mon con­tentement ? car ce que l'on dît d'ordinaire eft. tres-veritable ; le droit pris à la rigueur, elfc prefque toujours une grande chicane.

C H R E M E S . Te n'ay garde.

S Y R U S. Cela pourroit eftre permis à d'autres, mai»

àvous, Moniteur, cela ne vous feroit jamais pardonné j tout le monde lait que vous eftes fort riche, & que vous avez de très-beau bien tres-legitimement acquis.

C H R E M E S . Je te dis que je veux tout à l'heure le luy

porter. > • S Y R U S.

Point du tout, s'il vous plaift, envoyez-le plûtoftpar voftre fils.

C H R E M E S . Pourquoy cela ?

S Y R U S. Parce que l'on a fait croire à Menedeme que

c'eft luy qui eft amoureux de Bacchis.

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i*4 HEAUTON-TIMORUMENOS, CHREMES,

quid tum ! S r R U S.

quia videbitur Mugit verifimile id ejfe, cum hic iUi dabit ;

ff Etfimul conficiam facilim ego ,quod voie. Ipfe adeb efi : abi, effet argentum.

CHREMES.

efferoi

A C T U S QUARTUS. S C E N A V.

CLITIEHO, S X RU S.

CL1TIÏHO. *

N Ulla efi tant faciles tes > quin difficilesfset §)uam invitas facias. velme hoc déambu­lât io,

ffituam non laboriofa, ad tanguèrent dédit: Nec quidquam ntagis nunc ntetuo, quant ne

denub . Mifer aliqui extrudar hint, ne accédant ad

Bacchident. '• Ut te qaident omnes DU, De*, quantum efi,

Syre, Cum ifihoc inventa, cuntque incepto, ptrduint\ Hujufntedi miresfentper comminifcere, Ubi me excarnufices.

S T RU S. is hint que dignusesi

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LrlEAUTON-TIMORUMENOS. 145-C H R E M E S .

Qu'eft-ce que cela fait ? S Y R U S .

C'cit que eela paroiftra plus vraifèmblable lors qu'on verra qu'il luy donnera luy-même, & parjce moyen je feray avec plus de facilité ce que je veux. Ha, voila juftemcnt Clitiphon> ajlez, 8c apportez cet argent.

C H R E M E S . Je vais l'apporter.

ACTE QUATRIEME. S C E N E V.

C L I T I P H O N , S Y R U S .

C L I T I P H O N .

I L n'y a point de chofe fi aifée qui ne de­vienne difficile lorfqu'on la fait a regret 8c à

contre-cceur. Par exemple, cette promenade que je viens de faire, quoy qu'elle ne fuft pas fort' pénible , m'a mis dans un fort grand abattement, 8c à l'heure qu'il cil je ne crains rien tant que d'eftre encore envoyé quelque part, 8c qu'on ne m'empefehe de voir Bac-ûhts. Que les Dieux 8c les Dédies te punif-fent, Syrus, pour ta belle invention, 8c pour ton maudit confèil ; tu ne manques jamais de me jouer de ces tours là pour me faire enrager.

S Y R U S . Vous en irez-vous où vous méritez d'aller?

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»4« HEAUTON-TIMORUMENOS. > o.Jjhtam peni tu» me perdidit protervita* J

-« CL1TITHO.

Telle** hercle factum; itameritu'.

S X RU S. meritu' ? que modo 1

Ne me ifthue ex te prius audiffe gaudeo, JQuam argentum haberes, quod daturus jam

fat. C L I T I T H O.

J$uid igitur dicnm tibtvis ? abiiftiy miki if Amicamadduxti, quam non licitumefi tan*

gère. . S T RUS.

Jam non fam iratue : fedfcin' ubi nunc fit tibi

Sacchis? CLITITHO.

mpud nos. SX RU S.

non. C L I T I R H O.

ubi ergo T S X RU S.

apud Cliniam. CL I T I P H O.

Terii ! S X RU S.

bono anime es. jam argentum ad tant défères,

fjhsod et es pollicitm. C L 1 TI P H O.

garris. undeî S X R US.

à pâtre.

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L'HEAUTON-TÏMORUMENOS. 147 vous qui m'avez penfé perdre entièrement par vos imprudences.

C L I T I P H O N . Je voudrais l'avoir fait, par ma foy, tu IeJ

mérites bien. S Y R U S .

Je le mérite ? & comment ? en vérité je fuïsî ravi de vous avoir entendu parler ainli avant que de vous avoir mis entre les mains l'argent que j'allois vous donner.

C L I T I P H O N . Que veux-tu aufll que je te dife ? tu t'en

es allé, tu m'as amené ma Maiftreûe, & il ne m'a pas efté permis d'en approcher.

S Y R U S . Je ne fliis plu; en colère. Mais favez-vou»

•ù eft prelentement voftre Bacchis ? C L I T I P H O N .

Chez nous. S Y R U &

Non. C L I T I P H O N .

Où donc ? S Y R U S .

Chez Clinia.

C L I T I P H O N . Je fuis mort.'

S Y R U S . Prenez courage , vous Iuy porterez tout à

l'heure l'argent que vous Iuy avez promis.

C L I T I P H O N . Tu te moques s d'où l'auras-tu ï

S Y R U S . Devoûrepere.

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148 HEAUTON-TIMOR.UMENOS.

C L I T I P H O.

xoLudis fortaffe me.

S T R U S. ipfare experibere. C L I T 1 P H O.

xTe ego fortunatus homofum. deamo te, Syre.

S T RU S.

Sed pater egreditur. cave quidquam admi­rât a' fit,

J^UA eau fa idfiat. obfecundato in loco. jffitod imperabit ,facito: loquitor paucula.

À C T U S QJLJÀRTUS. S C E N A VI,

CHREMES, CLITIPHO, SÏRUS.

CHREMES.

U Bi Clitipho nunc efi t S T R U S.

eccumme, inque. CLITIPHO.

eccum hic iibi. CHREMES.

ffHuid rei effet, dixti huic t S T RU S.

dixi phraque omnia, CHREMES.

Cape hoc argentum, ac defen

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. * 149

C L I T I P H O N . Turispeut-eftre.

S Y R U S . La chofe va vous faire voir fi je dis vray.'

C L I T I P H O N . En vérité je fuis bien heureux ! je t'aime

de tout mon coeur, mon pauvre Syrus. S Y R U S .

Mais voilà voftre père qui fort. Prenez bien garde de ne paroiftre pas furpris 5 fuivez à propos cequejediray, faites ce qu'il vous or-dpnncra, & parlez fort peu.

ACTE QUATRIEME. S C E N E V I .

CHREMES, CLITIPHON, SYRUS.

C H R E M E S .

OU eftClitiphon ? S Y R U S 6M.

Dites, Mevoicy. C L I T I P H O N .

Mevoicy, mon père. C H R E M E S .

Luy as tu dit de quoy il s'agit ? -S Y R U S .

Je luy en ay dit la plus grande partie. ' C H R E M E S .

Prenez cet argent, & le portez.

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i / a HEAUTON-TIMORUMENOS. • M E N E D EMU S. te ipfumquerebam, Chrême,

Servit, quod in te efi, filium, &me, &/*** miliam.

CHREMES. f Cedo, quid visfuciams

MENEDEMUS. invenifii hodie filium. CHREMES.

JguMtumè MENEDEMUS.

hune uxerem fibi duri volt Clinia. CHREMES,

fifai&fo, quid hominss es! MENEDEMUS. quid ?

CHREMES. jumne oblitus es,

. Internet quid fit diHum defalluciu, Ut eu via abs te urgentum uuferretur ?

MENEDEMUS. feio.

CHREMES. ao Eu res nunc ugitttr ipfu.

MENEDEMUS:^ " quid narras, Chrême t

CHREMES. Imo , .hee quidem , qu* upud me efi > Cliti-

phonis eft Arnica.

MENEDEMUS. itu uiunt.

CHREMES. Et tu crédit s

MENEDEMUS. omniu.

MENEDEME.

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•Ml'-i

L'HEAUTON-TIMORUMENOS. iy j M E N E D E M E.

Ha » Chrêmes, c'eft vous-mefme que je cherchois s iàuvez mon fils Sx moy, Sx toute ma famille : vousle pouvez.

C H R E M E S . Et je vous prie, 8c que faut-il faire?

M E N E D E M E. Vous avezaujourd'huy retrouvé une fille.

C H R E M E S . Et bien ?

M E N E D E M E. Clinia voudrait que vous la luy donnaffiez.

C H R E M E S . Mon Dieu, quel homme eftes-vous S

M E N E D E M E . Pourquoy ?

C H R E M E S . Avez-vous déjà oublié ce que nous avons dit

enfemble de la tromperie qu'on vous doit fai­re afin d'avoir de l'argent ?

M E N E D E M E . • J'entends.

C H R E M E S . - C'eft à quoyl'on travaille à l'heure qu'il eft.

M E N E D E M E . Que me dites-vous là, Chrêmes ? *

. C H R E M E S . * mVoytz.Us Mais bien plu*,cette Bacchis que vous tLvezRemar-

chez vous > c'eft la Maiftrefle de Clitiphon ,ques. n 'eft-ce pas ?

M E N E D E M E . Ils le difent.

C H R E M E S . Et vous le croyez ?

MJE N E D E M E. Je croy tout.

Tome 11. H

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•i>4 HEAUTON-TIMORUMENOS.

CHREMES.

Et ittum aiunt velle uxorem , ut cum deffon-derim,

Desquiaurum, acveftem, atquealia, qu* opus funt, comparet.

MENEDEMUS.

i f ïd eft profetto : id arnica dabitur. CHREMES.

fcilicet Daturum.

MENEDEMUS. ah ! fruftra igitur gavifu* fum mifer.

Quidiiis tamenjam malo, quam hune amit-tere.

Ghtid nunc renuntiem abs te reffonfum, Chrê­me,

Nefentiat mefenÇffe, atque agri ferait CHREMES.

20 JEgrl t nimium illi, Menedeme, indulges.

MENEDEMUS. fine,

Jnceptum eft : perfice hoc mihi perpétuant, Chrême.

CHREMES. Die cortveniffe, egiffe te de nuptiis.

MENEDEMUS.' Dicam. quid deinde t

. CHREMES. mefaiturum effe omnia :

Generum placere : pojtremo etiam , Je voles, Deffanfam queque effe dicito.

ME N E D E M W S. hem, ifthuc volueram.

1

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L'HEAUTON-THMORUMENOS. i r r C H R E M E S .

Et ils vous difent que voftre fils veut fe ma­rier, afin, que lorfque je luy auray accordé ma fille, vous luy donniez dequoy acheter des bijoux, des habits, Se tout ce qu'il faut.

M E N E D E M E . Voilà l'affaire aflurément j 8c cet argent fe

donnera à fa Maiftrefie. C H R E M E S .

SaiA doute ; quoy donc ? M E N E D E M E .

Ah, je me fuis réjoiii fans fujet! que je fuis malheureux ! avec tout cela il n'y a rien que je n'aime mieux fouffrir que de le perdre. Quelle reponfe luy diray-je que .vous m'avez faite, de peur qu'il ne s'apperçqive quejecon-noisfarufe, 8c qu'il n'en ait du chagrin?

C H R E M E S . Qu'il n'en ait du chagrin?en vérité, Me-

nedeme, vous elles trop indulgent. , M E N E D E M E .

LaifTez moy faire, la pierre en eft jettéc : je vous prie feulement de m'aider toujours comme vous m'avez promis,

C H R E M E S . Dites que vous m'eftes venu trouver, que

vous m'avez propofé fon mariage. M E N E D E M E .

Que diray-je encore ? C H R E M E S .

Que je fuis pseft à. .faire tout ce que vous voudrez ; que le gendre me plaift ; enfin vous pouvez encore luy dire, fi vous voulez, que je luy ay accordé ma fille....

M E N E D E M E . . H a , voilà ce que jevoulois.

H i j "

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\f6 HEAUTON-TIMORUMENOS CHREMES,

if Tanto ociut te ut pofiat, & tu id, quoi tu-pi*,

Quant ocijfimè ut des. MENEDEMUS.

cupio. CHREMES.

ne. tu propediem, Ut iflam rem video, iftius obfaturabere. Sed, bac ut ut funt, cautim, érpaulatrhdtt-

bit » Si/aptes.

MENEDEMUS. faciara.

CHREMES. abi intrb : vide quid pofiulet,

30 Ego demi ero, fi quid me volts. MENEDEMUS.

fane volo : Nam tt fiientem faciam, quidquid egero.

1

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r37"'

L'HEAUTON-TIMORUMENOS. iyy C H R E M E S .

Afin qu'il ait plûtoft occafion de vous de­mander de l'argent, & que vouspuifliez aufli plûtoft luy donner cé'que vous avez tant d'en­vie de perdre.

M E N E D E M E . C'eft ce que je fouhaite.

C H R E M E S . En vérité, de l'air dont je voy que vont les

chofes, je fuis fur que vous en ferez bien-toft fou. Mais puifque cela eftainfi, fi vous elles fage, vous donnerez avec précaution, & peu à peu.

M E N E D E M E . le le feray.

C H R E M E S . Aljez vous-en, & voyez ce qu'il vous de­

mandera} je feray au logis, fi vous avez be-foin de moy.

M E N E D E M E . Je vous en prie, car je ne veux rien faire

fins vous le communiquer.

Hiij

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i / 8 HEAUTON-TIMORUMENOS.

A C T U S QUINTUS. S C E N A I.

. M ENEDE M US, CHREM ES.

M EN E D E MU S.

E Go me non tam afiutum, neque ita perfiict-cem ejje ùlfcio:

Sed hic adjutor meus , & monitor , ejè pr*-monfirator Chrêmes

Nie mihiprafiat. m me quidvisharum rerum convenit, '

Jjluafimt dicta infiultum , caudex , fitpes, afinus, plumbeus:

$ In illum nil potefi : exuperat ejusfiultitia on-nia hoc.

CHREMES. Ohe, jam define deos , uxor, gratulandoob-

tundere, Tuam ejfe inventam gnatam ; nifi iUot tuo tx

ingenio judicas, Ut nil credas intellegere , nifi idem dittum

efi centies. Sed intérim quid illic gnatus ctjfat cum Syro ?

MENEDEMUS.

10 J^uos akhommes. Chrême, cefiarel

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r L'HEAUTON-TIMORUMENOS. i /o

ACTE CINQUIEME. S C E N E I.

. M E N E D E M E , C H R E M E S .

M E N E D E M E.

T E fay fort bien que je ne fuis pas le plus fin J du monde, ni le plus clairvoyant. Mais ce beau donneur de confeils que j'ay là, l'eft en­core moins que moy. J'avoue que toutes les epithétes que l'on donne d'ordinaire aux lots, me conviennent , je fuis une grofle bûche ; une grofle pierre » un afne bafté. une mafle de plomb : mais pour luy, fa fottiie eft au def-fus de toutes ces expreflions.

C H R E" M E S. Ho, enfin ma femme» ceiTez àt rompre la

tefte aux Dieux à force de leur rendre grâces de ce que vous avez retrouvé voftre fille, à moins que vous ne jugiez d'eux par vous-mê­me , & que vous ne croyiez qu'ils ne puif-lent rien entendre fi on ne le leur diteent-rois. Mais cependant d'où vient que mon fils de­meure fi long-temps avec Syrus?

M E N E D E M E . ; Qui dites-vous qui demeure longtemps, Chrêmes ?

H iiij

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. H 160 HEAUTON-TIMORUMENOS,

C H i? £ AT £ S.

hem, Menedeme, advenif t Dicmihi, Clinit, qutdixi, nuntiaftin'l

MEHEDEMUS.

«renia.

CHREMES. Jguid ait ?

MEHEDEMUS. gaudtrt adeo occepit, quaji qui copiant

nuptias. CHREMES.

Ha, ha, ht. * MEHEDEMUS. , .

quid rififti ? CHREMES.

fervi ventre in mentent Syri • Calliditates.

MEHEDEMUS. itane ?

CHREMES, vol tut quoque hominum fingit, /celui.

MEHEDEMUS. "tf Gnatui dguod fe affimulat Utum, id dkiel

CHREMES, id. MEHEDEMUS.

idem ifihuc mihi venit in mentem.

CHREMES, veterator ! M E H E D E.M U S.

magï, Ji magï norit, pute» Da rem ejfe.

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r L'HEAUTON-TÏMORUMENOS. i o t

C H R E M E S . Ha, Menedemc ! vous voilà? eh bien, di-

tes-moy, je vous prie, avez-vous dit à voftrc .fils ce que je vous avois dit?

M E N E D E M E . Ouy, d'un bout à l'autre.

C H R E M E S . Que dit-il ?

M E N E D E M E . B a paru d'abord avoir prefque autant de

joye que s'il fouhaitoit véritablement de, fe marier.

C H R E M E S . Ha, ha, ha.

M E N E D E M E . Dequoy riez-vous ?

C H R E M E S . Les iubtilitez de Syrus me viennent dans

l'efprit. ' M E N E D E M E .

Ouy ? C H R E M E S . #

Il dreffe les gens à merveille, il n'y a pas jufqu'à leur vifageàquiil ne fafTe prendre tel­le forme qu'il luy plait, Iependard!

M E N E D E M E . Vous dites cela, fans doute, parce que mon

fils a fort bien contrefait l'homme joyeux. C H R E M E S .

C'eft cela mefme. M E N E D E M E .

La mefine chofe m'eft venue dans l'efprit. C H R E M E S .

Le vieux routier ! M E N E D E M E .

Plus vous le connoiftrez, plus vous luy don­nerez ce nom. H v

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1 i<Sa HEAUTON-TIMORUMENO*.

CHREMES.

ain' tu l , MENEDEMUS. I

. . qui» tuaufculta.

CHREMES.

manttpriushocfcireexpeti,, . Shtidperdideris. nom uèi defponfam nuntiafii

filio, *" Continua injecijfe verba tiii Dromontm ftiH-

cet, xo Sponfe. vefiem, aurum,atqueancillasofus efit,

argentum ut dores.

MENEDEMUS. Non.

CHREMES, quid! Son.

MENEDEMUS. non, inquam.

» CHREMES, neque ipji grlatus î .

MENEDEMUS. nilprorfus, Chrême ,

Magis unum etiam inftare, ut hodit confit' rentnuptia.

CHREMES.

Mira narras, quid Syrus meut ? ru ù quidttn quidquam l

MENEDEMUS. nihiL

CHREMES. Çpuamobrtm ?

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 167 M E N E D E M E .

Bacchis l'a fuivi dans le moment. C H R E M E S .

Toute feule f M E N E D E M E .

' Toute feule. C H R E M E S .

Je fuis mort! M E N E D E M E .

Us n'y Ont pas plûtoft efté qu'ils ont fermes h porte. '*

C H R E M E S . Ha ! Et Clinia voyoit tout ce beau ména­

ge ? M E N E D E M E.

Pourquoy non ? il le voyoit avec moy. C H R E M E S .

Ah, Menedeme, Bacchis eft la Maiftrefle de mon fils ! je fuis mort !

M E N E D E M E . Pourquoy cela? •

C H R E M E S . A peine ay-je du bienpour dix jours.

M E N E D E M E . Quoy? vous avez peur, parce qu'il fertfoa

amy. C H R E M ES.

Non, majs parce qu'il fert fon amie. M E N E D E M E .

Ho, c'eft à favoir S cela eft. C H R E M E S .

En doutez-vous ? y a-t-il un homme af-iêz patient pour fouffrir qu'on s'enferme ainu avec fa Maiftrefle ?

M E N E D E M E . Ha, ha, ha, pourquoy non? c'eft afin qu'on

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n 168 HEAUTON-TIMORUMENOS;

Ghsidnit qub verba facilius dentur mihi. ' CHREMES.

Dérides ? meritb mihi nunc egofuccenfeo. Jguot res dedere, ubi fojjem ferfenttfiere, Ni effem lapisi que.viat ! va mifero mihi ]• •

ofp. ait ne illud haud inultum, fi vivo , feront t Namjam...

MENEDEMUS. non tu te cohibesl non terefpicùt

Non tibi ego exemfli fatis fumî

CHREMES.

fra iracundia , Menedeme, nonfum apudme.

MENEDEMUS.

teneifthucloqui? Nonne id flagitium eft, te aliis confilium dartW

fo. Eorigfapere, tibi nonfoffe te auxiliarier l

CHREMES.

Jguid faciam ?

MENEDEMUS.

id', quod me feciffe ait bas parumt Tac te patrem ejfèfentiat : fac,**ut audeat Tibicredereomnia, abs tepetere j efypofcert, Ne quam aliam quarat cofiam, ac te déférât,

CHREMES.

fg. Imo abeat fotius multo quovis gentium, t Jguam hic fer flagitium ad imfiam redigat |

patrem :

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LHEAUTON-TIMORUMENOS. 169 m'en donne plus facilement à garder.

C H R E M E S . Vous vous moquez ! Que je fuis en colère

contre moy-mefine ! Combien ont-ils fait de chofes quf dévoient me faire tout foupçpn-ner, fi je n'avois pas efté cruche ? Que n'ay-je pasveu? que je luis malheureux! Mais u je vis, ils ne le porteront pas bien loin, car tout à l 'heure. . .

M E N E D E M E. Ne voulez-vous pas vous modérer ? n'au-

rez-vous aucun égard à vous-mefine ? ne vous fuis-jepas un allez bel exemple?

C H R E M E S . Menedeme, je fuis tranfporté de colère»

M E N E D E M E. Un homme comme vous, doit-il parler dj la

forte ? n'eft-ce pas une honte que vous don­niez confeil aux autres, que vous foyez fifa-ge pour les Etrangers, 8t que cettclageflè ne vous foit d'aucun fecourspour vous-mefme ?

C H R E M E S . Que puis-je faire ?

M E N E D E M E . . Ce que vous me difiez tantoft que j'avors

tort de n'avoir pas fait ; agiflez de manière qu'il fente toujours que vous elles fon père,, qu'il ofe vous faire confidence de ton» res fecrets, 8c s'adreffer à vous pour vous demander toutes les chofes dont il a befoin, *fin qu'il ne cher­che pas d'autre fecours,. 8c qu'il ne vous quitte jamais.

C H R E M E S . - Qu'il s'en aille en quelque lieu du monde que ce foit, plûtoft que de réduire icy fon pe-;

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170 HEAUTON-TIMORUMENOS. Nam fi ilii pergtfitppeditare fumtibus, Menedeme, mihi illbac veri ad rafiros tes re­

dit.

MENEDEMUS.

JUttot incommoda tibi in hoc re captes, nifica­ves !

<5o. Difficilem oftendes te ejfe, rjr- ignofces tamtn ïoft, tfii id ingratum.

CHREMES.

• ah! nefcis, qttam doleaml

MENEDEMUS. utlubet.

Jjhsid hoc, qstod volo, ittillanubatnoftroi nifi qttid eft,

. Jguod rnnlu.

CHREMES.

imoée gêner & affines placent.

MENEDEMUS.

J^uid iotit dicam te dixiffe filio f êj. JQttidobticuiftit

CHREMES, dotis s

MENEDEMUS. ita dico. s

* C HR E M E S. ah!

MENEDEMUS. Chrême,

Ne qttid vereare, fi eft mim' : ml dot nos tm-vet.

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v L"HEAUTON-TIMORUMENOS. 17» re à l'aumône par fes débauches ; car, Mene-demc, fi je continué à fournir à fes dépenfes, je n'ay ailurément qu'à me préparer à pren­dre les mefines rafteaux que vous aviez tan-toft.

M E N E D E M * E . Combien cette affaire va t-elle vous donner

de chagrin fi vous n'y prenez garde! vous vous ferez tenir à quatre, vous ne bifferez pas de pardonner après cela, ce voftre fus ne vous en îàura point de gré.

C H R E M E S . Ah ! vous ne favez pas encore quelle est ma

.douleur! M E N E D E M E.

Faites, contentez-vous donc. Mais que me répondez-vous fur le mariage que je vous pro-pofe de voftre fille avec mon fils? à moins que vous n'ayez quelqu'autre parti qui vous plane davantage.

C H R E M E S . Nullement, & le Gendre & l'Alliance, tout

me plaift. M E N E D E M E .

Curélle dot diray-jeàmonfils que vous vou­lez donner ? quoy ? vous ne dites rien ?

C H R E M E S . Quelle dot?

M E N E D E M E . Ouy.

C H R E M E S . * Ah!

M E N E D E M E . Chrêmes, ne craignez point de dire ce que

vous voulez donner, pour peu qu'il y ait, ce n'eu pas la dot qui nous tient.

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Ï7» HEAUTON-TIMORUMENOS, CHREMES.

Dm talentapro re nofir» ego ejfe decrevifatis i Sed ita diétuopu' eft, fimevit falvomefti, th}

rem, çofilium, Me mea omnia bonadotidixifte illi.

MENEDEMUS.

quant rem agit ? CHREMES,

'jo. Idmirari te finutlato, & illum hoc rogitat* fimul,

^uamobrem idfaciam. MENEDEMUS.

quin ego vero, quamobrem id fadas, nefcio. <

CHREMES. Egone! ut illius animum,quinunc luxuria',tjp

lafeivia • • Dijftuit, retundam : redigam, ut, qubfe vertat,

nefciat. MENEDEMUS.

Jjluid agis ? C H REM ES.

mit te, fine me inhac re goq rere mihi morem.

MENEDEMUS.

y g. Itane vis l ' CHREMES.

% ita. M E.N E D E MU S.

fiât.

CHREMES.

acjam, ut uxorem arceffat,paret\

- ^ ^

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r L'HEAUTON-TIMOrUJMENOS. 17»

C H R E M E S . J e trouve que pour le bien que j'ay, je fais

allez de luy donner mille écus. Mais pour mon repos & pour me conferver ce bien, 8c pour le falut de mon fils, il faut, je vous prie, que vous diriez que je donne tout à ma fille.

' M E N E D E M E .

Qu'allez-vous faire ? C H R E M E S .

Faites femblant d'en eftre étonné, & de-mandez-luy à luy-mefme d'où vient que j'en ufe ainli.

M E N E D E M E . Et en bonne foy, j'auray raifon de le luy de­

mander, car je ne voy pas pourquoy. C H R E M E S .

Pourquov? pour fauver cet efprit entière­ment noyé dans le luxe 8e dans la débauche ; je le reduiray en tel état, qu'il ne faura de quel collé fe tourner.

M E N E D E M E . Que faites-vous ?

C H R E M E S . LaifTez, fouffrez qu'en cette occafion je me

fatisfafle. Laiflez-moy faire. M E N E D E M E .

Le voulez-vous ainfi ? C H R E M E S . 0

Oui. M E N E D E M E .

Soit. C H R E M E S .

Aprefent vous n'avez qu'à dire à vofere fils qu'il fe prépare à faire aller fa femme chez

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T ^ l

174 HEAUTOft-TIMORUMENOS. Se. hicita, ut liberos efi *attom,dic~tit confuta-

bitur. • Std Syrum...

MENEDEMUS. quid eum ?

CHREMES. egene ? fi vivo, adeo exorna-

tum dabo, Adeo depexum,ut, dum vivat, meminer'ttfent-

per mei : Jjhtifibi mepro ridiculo ac deleBamentoputat.

80. Non (itameDii ament ) auderet facere hoc vidua mulieri,

Jjht* in mefecit.

ACTUS QUINTUS. S C E N A II.

CLITI2HO, ME NET) E MU S.

CHREMES, S T RU S.

C L I T I 2 H O.

-TTane tandem, quafi, efi, Mene~ JL deme, ut pater

% Tarn m brevi Jbatio omnem deme ejecerit ani-mumpatris ?

fijhtoinam ob facinus t quid ego tantumfielerit admifi mifer t

Volgofaciunt. MENEDEMUS.

fciotibi ejfe graviusmulib, net durius,

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. i75* luy. Pouf le -mien, je le traitefay'comme il faut, en paroles pourtant, comme il eftjuftc qu'on traite des enfans de condition. Mais Syrus...

M E N E D E M E . Que luy ferez-vous ?

' C H R E M E S . Ce que je luy feray ? Sijevis.jel'ajufteray

fi bien, je l'étrillerai de manière, qu'il ne fera jour de là vie qu'il ne le louvienne de moy. Un pendard qui croit que je dois luy fervirde joiiet ; je veux mourir, il n'auroit ofé traiter une femme veuve fi indignement qu'il m'a traité.

ACTE CINQUIEME. S C E N E I I .

C L I T I P H O N , M E N E D E M E ,

C H R E M E S , S Y R U S .

C L I T TP H O N.

ESt-il donc vray, Menedeme, qu'en lï peu de temps mon père ait entièrement dé­

pouillé tous les fentimens de la nature à mont égard? qu'ay-je donc fait? quel crime ay-jo commis ? tous les jeunes gens ne font-ils pas de mefme ?

M E N E D E M E . Je fay que vous devriez eftre plus tpuolié

que moy de cette dureté, parce que c'eft à

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i 7 5 HEAUTON-TIMORUMENOS. t. Cui fiK verum ego haud minus agre patior id,

qui, nefcio, IHec rationem capio, nifi quod tibi bene ex ani­

mé volo.

C L I T I P H O. Hic patrem ejfe aiebas ?

MENEDEMUS. eccum.

"' CHREMES.

quid me incufas, Clitipho ? ^uidquid ego hujusfeci, tibiprofpexi, & fiul-.. titU tua.

Vbi te vidi smimo e[fe omijfo, &,fuaviain pre-fentia

10. jQua ejfent, prima habere, neque confiaient» longitudmem ;

Cepi rationem, ut neque egeres , neque uthu pojfes perdere. " "

Vbi, cui decuit primo, tibi non licuit ptr te mihi dare, .

Abii ad proximos tibi qui erant j eis commift, ej? credidi.

Ibi tua fiultitia Jimper erit prafdium, Cliti­pho, .

ff. Vittus, veftitus, quo in teitum te receptes.

CLITIPHO.

hei mihil CHREMES.

Satius efit, quam te ipfi herede hoc pofiîdert Eacchidem.

S Y R U S. Dijperii ! fielejlus quantas turbas concivi in-

ficiens. vous

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L'HËAtiTON-TÎMORUMENOS. 177 fous qu'on l'a fait, cependant je vous aflure que je ne la refTens pas moins que vous, je ne iay pourquoy, 8c je ne connois point d'autre lailbn du deplaifir que j'en ày , que l'amitié que j'ay pour vous,

C L I T , I P H O N. Vous diriez que mon père cftoit icy.

M E N E D E M E . Le voilà. . •

C H R E M E S , Pourquoy vous plaignez-vous de moy, Cli-

tiphon ? dans tout ce que j'ay fait je n'ay eu ea vue que voftre bien, 8c que de pourvoira vos déreglemens. Lors que j 'ay reconnu que vous eftiez négligent, que les plaifirs preiens tenoient dans voftre efprit là première place, & que vous ne faifiez nulle réflexion fur l'a­venir , j'ay cherché les moyens de vous em-pefcher de tomber dans l'indigence, 8c de dif-fiper mon bien. Voyant que vous ne me per­mettiez pas vous-mefme de vous* faire mon héritier, comme cela fe devoit naturellement. j'ay eu recours à vos plus proches, je leur ay tout donné j ce fera chez eux que vous trou­verez une rèflource contre voftre mauvaifc conduite. Vous ferez toujours nourri, logé, «Cvêtu.

C L I T I P H O N , Que je fuisljrialheureux !

C H R E M E S . , (' Cela eft bien mieux ainfi que de donner tour j a Bacchis, 8c. ce ffc feroit luy donner tout que de l vous faire mon héritier. I S'Y R U S. ' ' . f Me voilà perdu ! mifèrable quels de/ordre»;

ty-je fait ici fans y penfer.' Tome I I I

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»78 HEAUTON-TIMORUMENOS. C L 1 T I P H O.

Emori cupio. CHREME S.

prises, quafo, difce, quidfit vivett. XJbi fcies ,Js dijplicebit vit a, tum ils hoc utiter.

s r R u s. io.'Hère, licet ne !

CHREMES. loquere.

s r RU s. at tutb ?

CHREMES. loquere.

S Y R U S. ; quuijtA eft prévîtes,

Qutve amentia eft, quodpeccavi ego, idobejfe huic !

CHREMES. ilicit,

Neteadmifce: nemosucufttt, Syre,te: me tu arum tibi,

Kequeprecatorempararis. s r R u s.

quid Agis ! CHREMES.

nil fuccenfeo, Uec tibi, nechuic: nec vos eft tquum, quod fA-

cio, mihi.

 C T U S QUINTUS. S C E N A III.

• SX RU S,. CLITIEHO, S Y R U S.

ïo . / t Biif, vsth ! rogajfe vellem.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 17. C L I T I P H O N .

Je voudrais eilre mort J C H R E M E S .

Apprenez auparavant ce que c'eft que de vivre, quand vous lefaurez, fila vie vous dé­plaît, vous délirerez de mourir.

S Y R U S. Moniteur, me feroit-il permis de vous di­

re., .? C H R E M E S .

Parle. S Y R U S.

Mais en toute lèureté ? C H R E M E S .

Parle. S Y R U S.

Quelle injuftice eft-ce-là, 8c quelle folie de5

vouloir qu'il pprtela peine de ce quej*ây faitf C H R E M E S .

Çeft une affaire conclue. Ne te viens point mêler en tout ceçyj perlonne ne t'accufe , 8c tu n'as que faire de chercher ny autel, ny in-tercefleurpourtoy. • S Y R U S.

Que faites-vous ? C H R Eylvrï S.

Je ne fuis en colerei^nycontretoy,nycon­tre luy j de voftre cofte', vous;ne devez pas non plus eftre fâchez contre moy de ce que j'ayfait. ''

ACTE CIÎsiQyiE'ME. SCENE III.

S Y R U S , C L I T I P H O N . S Y R U S.

IL s'en eftallé. Ah! Je voudrais bien luy avoir demandé... I ij

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1 *8o HEAUTON-TIMORtïMENOS.' I

. CLITIPHO. I 3$uid,Syref I

S T RU S. undemihipeteremci.

bumj Zfc* »<» abalienavit. tibi jam ejfe adfororm

intellego. CLITIPHO.

Adeori rem rediijfe, utpericulum etiamfame mihifît* Syret

S T RU S. Modo liteatvivere,fpesefi...

C L 1 TI P H O. qua ?

s r R u s. nos efuriturosfatisl

''••.. CLITIPHO. j . lrridtsinretanta,neque me quidquamconfilid

adjuvas r CL I T I P H O.

Imo ç* ibi nuncfum, & ufque dndum id egi,' dum loquitur pater :

Et, quantum ego intelîigerepojfum. .. CLITIPHO.

quid l S T R U S.

non abierit longîttt, CLITIPHO. ~

,...>•* 3uid id ergo t

'* s r RUS. ficeft,noneffthorumttar~

bitror. CL I T I P H O. i

quid ifthuc, Syre ? Satin'fanus es î

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 181 C L I T I P H O N .

Et quoy, Syrus? S Y R U S.

- Où il veut prefentement que j'aille chercher à manger, puis qu'il nous a châtiez. Car pour YOUS, je comprends que vous en trouverez chezvoftre fceur.

C L I T I P H O N . Faut-il que je Ibis reduif à cette extrémité','

que je me voye en danger de n'avoir pas du pain? S Y R U S .

Pourvu que nous puiflions vivre, il nous relie encore une belle efperance...

C L I T I P H O N . Quelle?

S Y R U S . Que nous aurons toujours bon appétit.

C L I T I P H O N . Tu railles dans une affaire de cette impor­

tance, Se tune m'aides d'aucun confeil? S Y R U S .

Vous vous trompez, je ne fonge à autre choJ le qu'à vous tirer de peine, Se pendant tout le temps que voftre père a parlé, je n'ay eu que cela dans l'efprit. Mais autant que je le puis comprendre... ' C L I T I P H O N .

Quoy? S Y R U S .

Les ohofes n'iront pas bien loin. C L I T I P H O N .

Comment donc ? •.. S Y R U S .

Cela efteomme je vous le dis, c'elt que je 1 croy que vous n'eftes pas leur fils.

C L I T I P H O N . Comment cela ? es-tu en ton bon fens?

I i i j

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i8» HEAUTON-TIMORUMENOS. S Y R U s.

ego dicam, quodmî in men-tem: tudijudica.

10, Dum iftis fitifti folus, dum nulla alia deleSa-tio,

Jjhu propioreffet, teindulgebant, tibidabant: nunc filin

Poftquam eft inventa ver a, inventa eft caufit, quate expelleretit.

C L I T I P H O. Ift verifimile.

s r R u s. an tu ob peccatum hocejft

illumiratumputatï * CL I T I t H O.

Non arbitrer.

s r R us. nttnc uliudfpeBa: Matres om­

îtes filiis Inpeccato adjutrices, auxilio in patenta inju­

ria ip. Soient ejje; id non fit.

C L I T I P H O.

verum. quid ergo nunc faciam, Syre ?

S Y R U S.

Sufpicionem quare ex illis iflhanc : rem profer palam.

Si non eft verum, ad mifericordtam ambos ai-duces citb, aut

ScHis cujus fis. Ç L I T I P H O.

relie fttades: faciam. '

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 18* S Y R U S.

levais vous dire ce qui m'eft venu dans l'ef-pnt , vous en jugerez. Pendant qu'ils n'ont eu que vous, que vous faiiiez feul leurs plai-firs, & qu'ils n'avoient perfonnequi leur tou­chât de plus prés, ils avoient de l'indulgence pour vous, ils vous donnoient de l'argent i prefentement qu'ils ont retrouvé leur fille, ilsr ont d'abord trouvé un prétexte pour vous chafler.

C L I T I P H O N . Cela eft.vray-femblable.

S Y R U S. Eftes-vous afiêz bon pour croire que ce foit

pour cette .petite pecadille? C L I T I P H O N .

Tu as raifon. S Y R U S.

Confiderez encore une autre chofe. Quand lej enfans ont fait quelque fottife, les mères ne manquent jamais de parler pour eux, elles

Îirennent toujours leur parti contre les pères. cy; nous ne voyons pas q ue cela fe fafle.

C L I T I P H O N . Cela eftvray, que dois-je faire à prefent,

Syrus ? S Y R U S.

Demandez-leur à eux-mefmes l'éclaircifle-merrt de ce foupçpn. Dites-leut franchement voftre penfée. Si ce que nous croyons n'eft pas, vous les attendrirez tous deux, & ils vous pardonneront fur l'heure, Scs'il eft vrav que vous nefoyezpas leur fils, vous faurez a qui vous eftes.

C L I T I P H O N . Le confcil eft bon ; je le fuiyray.

I iiij

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n 184 HEAUTON-TIMORUMENOS.

S r R U S.

fat reBi hoc mihiin. 20. Mentem-venit : namque adolefcens, quam mi­

nimum fpe fit us erit, Tarn faciUimè patris pacem ht Uges confiait

faits. Et tant haudfcio an uxorem ducat, acSyronil

gratta, fjht'd hoc auteml fenex exit foras, ego fugio.

adhuc quodfaBum eft, Miror. non jujjiflè illico me arr'tpi. Ad Menede-

mum hinc pergam : eum if. Trecatorem mihiparo: feni noftro fidei nihil

habeo.

ACTUS QUINTUS. S C E N A IV.

SOSTtXATA, CHREMES.

SOSTRATA.

P RofeBo, nifi canes tuhomo, aliquidgnatocon­fiais malt s

Jdque adeo miror, quîtam ineptumqutdqttam potuerit tibi

Venire in mentem, mivir. CHREMES,

ohjpirght'mulier effet ullamnt ego

Rem unqudm volai, quintu in eamihiadnor* fatrix fueris, Soft rata! at

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L'NEAUTON-TTMORIJMENOS. 187 S Y R U S.

Cela m'eft venu dans l'efprit bien à propos, car moins ce jeune homme aura d'efperance, plus il aura de facilité à faire fa paix à fon avantage avec fon père. Maintenant je ne iay pas s'il ne faudra point qu'il fe marie, j 'ap­préhende qu'il ne m'en veuillepasgrand bien. Que cela me fait-il, dans le fonds l mais voici-noibre bon- homme, je m'enfuy. Vu les cho-ùs qui fe font paflees, je fuis fort furpris qu'il n'ait pas commandé . qu'on m'enlevait fur-l'heure, levais chez Menedeme, c'cft luy que j'ay choiii pour mon interceueur , car quoi qu'ait dit noftre vieux Mailtre,jeneme iie pas trop à lui.

ACTE CINQUIEME. S C E N E IV.

S O S T R A T A , C H R E M E S .

S O S T R A T A.

EN vérité, mon mar i , fi vous n'y prenez garde, vous ferez caufe qu'il arrivera quel­

que malheur à noftre fils, & je fuis fort fur-prife qu'une chofe fi déraifonnable ait pu vous venir dans l'efprit.

C H R E M E S . Oh, continuerez vous d'eftre femme? ay-je

jamais voulu rien faite que vous n'ayez eftôi toujours contraire à mes deffeins ? & fi je vous demandois en quoy j'ay tort , ou par quelle

I v

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ï8<5 HEAUTON-TIMORUMENOS. Si rogitem jam, quid eft qteod peccem,aut quant-

06rem id faciam,nefcias. In qua re nune tam confidentes r eft as, fini- .

tas S O S T R A TA.

egonefeiot

CHREMES.

Imo ftispetiusy quam quidemredeatadinte-grum eadem oratio.

S O S T R A T A.

Oh, iniques es, qui me tacere de re tantapofiu-les.

CHREMES. Non poftnlo, jamioquire. nrhrio minus ego hit

faciam tamen. , S O S T R A t A.'

10. T actes \ C H R E M E S.

verum. SOSTRATA.

non vides, quantum . maliexta re exckesl

Subditum fe fufpicetur. CHREMES.

fubdituml ain'tuï SOSTRATA.

tertè fie erit t Mivir.

C H R E MU S. confit ère.

SOSTRATA. au, obfecre te, ifthue

inhnicis fiet.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 187 railbn j'en ufe de la forte. vous ne pourriez le dire. Pourquoydonc.. ibtte que vous eftes, vous oppofez-vous prefentement avec tant d'opiniâtreté à ce que je veux?

S O S T R A T A . Je ne pourrois le dire t

C H R E M E S . Je me trompe vous le pourriez, j'aime bien

mieux le croire que de recommencer & de vous entendre rebatre cent fois la rnefme cho-fe.

S O S T R A T. A. Oh ! vous eftes injufte de demander que je

me taife dans une chofe de cette importan­ce.

C H R E M E S . Je ne le demande pas, parlez j je n'en ferai

pourtant pas moins. „ S O S T R A T A .

Vous n'en ferez pas moins ? C H R E M E S .

Non. S O S T R AT A. - .-

Vous ne voyez pas les dangereufes fuites que cela'peut caufer 5 * Clitiphon croira qu'il *Voyez. n'eft pas noftre fils. lei Ri-

C H R E M E S . m»r-Qu'il n'eft pas noftre fik ! Celaeft-il poili-goer.

blc ? S O S T R A T A .

Oui aflurernent, mon mari, cela fera. ' ) C H R E M E S . '

Eh bien, dites-luy qu'il a raifos. S O S T R A T A .

O h , je vous prie, pouvez-vous parler aîn-fi ? que nos ennemis fanent une action fi dé-

I vj

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"1

iS8 HEAUTON-TIMORUMENOS. Egori confttear meum non ejje filiitm, qui pt-

meus S CHREMES.

Jguid fmetuis ne non, cum velis, çonvincat ejfeillumtuuml

SOSTRATA. ~ff Jguodftlia eft inventa ?

CHREMES. non, fed, quod magi' creden-

dum pet, J§)uod eft conpmilis moribus, Facile convinces ex te natum : nam tuiftmilis

eft probe: • Nam illi nihil vitii eft reliBum, quin & pi

idem tibi. Tum pratereatalem, nipttt, nulla pareretp-

lium. ioSed ipfe egreditur. quam (evertul rem, cum

videos, cenfeas.

A C T U S QIJINTUS. • S C E--N A V.

GLITIPHO , SOSTRATA, CHREMES,

C L I TIF HO.

S Iunquam uttumfuit temptts, mater, cum ego voluptati tibi

Futrim, JiBuspUus tuus tua voluntate, ob-fecro,

Ejus ut memsneris, atque inopis nunc te mi-ferefeatmei;

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L* HEAUTCN-TIMORUMENOS. i*> reftable ! je dirois à mon fils qu'il n'eft pas à moy ? à mon propre fils ?

Quoy ? craignez-vous de ne pouvoir quand vous voudrez faire voir qu'il eft à vous?

S O S T R A T A . Eft ce parce que ma ' fille eft retrouvée que

vous me dites cela? C H R E M E S .

Non, il y a une raifon bien plus convain­cante ; c'eft qu'il a toutes vos manières ; il vous reflemble parfaitement, vous n'aurez nul­le peine à faire voir qu'il eft à vous ; il n'a pas le moindre, défaut que vous n'ayez tout comme luy. D'ailleurs il n'y a que vous au monde qui puifliés avoir un fils comme celuy-là. Mais le voilà qui fort. -Qujila l'air grave! aie voir on connoift ce qu'il eft.

ACTE CINQUIE'MEJ S C E N E V.

CLTTIPHON , SOSTRATA, CHREMES.

Ç L I T I P H O N .

SI jamais vous avez eu quelque joyeSc quel­que plaiûr de m'entendre appcller voftre

ius, & de me donner vous-mefme ce ruim } je vous prie, ma mère, de vous en fouvenir, pX d'avoir pitié d'un miferable. Ce que j e fou-

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ipo HEAUTON-TIMORUMENOS. J>)uod feto, & vola, parentes meos ut com*

monfires mihi. SOSTRATA.

f Obficro, mi gnate, ne ifihuc in animum in-ducas tuum,

Alienum ejfe te. CLIT1EHO.

fitmi SOSTRATA.

miferam me ! hoccine qutfifti, ob/ecrot Ita mihi, atque huic fis fitpetfies, ut ex me,

atque ex hoc nattes es : Et cave fofthac, fi me amas, unquam ifihuc

verbum ex te audiam.

CHREMES.

at Ego, fi me metuis, mores cave in te ejfe iftos

fentiam. CL I T I P H Os

).o3uost CHREMES,

fifiirc vts, ego dicaen :_ gerro, mers, fraus,' helluo,

Canea, damna/us. crede ; & noftrum te ejfe crédita.

SOSTRATA. Nonfuntjam htc dicta parentes,

CHREMES.

non , fi ex capite fis mea Hat us , item , ut aiunt Mmervam ejfe est

Jove, ea caufa magis Eatiar , Clitipho , flagitiis tais me mfameta

fieri.

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L'HEAUTON-TÏMORUMENOS. tôt haite, c'eil que vous me faniez connoiftre ceux de qui je tiens le jour.

S O S T R A T A . Ah ? mon fils, je vous prie, ne vous mettez

pas dans la tefle que vous foyez à d'autres qu'à nous.

C L I T I P H O N. Cela eft aflùrément ?

S O S T R A T A . Que je fuis malheureufe! avez-vous pu me

faire cette demande ? ainfi pui (liez?-vous fur-vivre à voftre père que voilà 8c àmoy, comme vous eftes fils de l'un 8c de l'autre : donnez-vous bien garde déformais que j'entende jamait cela de voftre bouche, fi vous m'aimez.

C H R E M E S . Et moyje vousdis, donnez-vous' bien gar­

de que je m'apperobive jamais' que vous ayez ces mefmes inclinations, 11 vous me craignez,

C L I T I P H O N. Queues indirratfons i

. . C H R E M E S . . . Je vais vous les 'dire, puîfque vous le vou­lez lavoir > les inclinations d'un coquin, d'un fainéant, d'Un.ïourbe, d'un débauché, d'un prodigue. Croyez-moy, 8c ne doutez pas que vous ne loyez noftre fils.

S O S T R A T A . Ce ne font pourtant pas là les paroles d'un

père. C H R E M E S .

Non, Clitiphon, quand vous feriez fort! de ma tefle, comme on dit que Minerve eft fortiede celle de Jupiter, je nefouffriroispas pour cela que vous me deshonoraûiezparvos infâmes débauches.

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fy* HEAUTON-TIMORUMENOS. SQSTRATA.

If Di ifthtc... CHREMES,

nrfcio Deosj ego, quod pot ero, mit ut fidulo.

Quarisid, quod haies, parentes: qttodabeft, non quarts, pat ri

£>m modo oi/equare, tjfferves quod.labtrt tnvenerit.

Non mshi per fallacias adducere anteoculost pudet

-. Nictre hoc prafinte verbum turpe : at te ii nullo modo

30. lacère puduit. ... : C L I T I P H O.

eheu, qttam ego nunctotus difpliceo rrtihi!

• £&u*m pudet \ neque, quod prmçipium inti' piam ad placandum, fcio.

A C T U S QUINTUS. '< S C E N A V I . JMENEDEMUS, CHREMES, CLTIÏfHO,.

SOSTRATA. f

MENEDEMUS.

E Nimvero Chrêmes nimï graviter Ctuchtt dtdt* le fient ulum,

Nimifque inhumanè. exeo ergo, ut pacem coi*. ciliem. optumi

Jpfos video.

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L"HEAUT0N-TIM0RUMEN0S. 10* S O S T R A T A .

Q u e les Dieux fanent.... C H R E M E S .

J e ne fay point ce qu'ils feront, les Dieux ; mais pour moy je fèray tout ce qui me fera poflible pour l'empefcher. Vous cherchez ce que vous avez, un père & une mère 5 & vous ne cherchez pas ce qui vous manque, le "moyen de plaire à voftre père, & de conferver par vô­tre bonne conduite, ce qu'il a amaue par fon travail. Ne rougiflèz-vous pas d'avoir eu l'in-folence de me tromper , Se d'amener devant mes yeux 8c dans ma maifon une.... j'ay honte de dire un vilain mot en prefènee de voftre mère ; 8c vous n'en avez eu aucune de faire une action infâme.

C L I T I P H O N . Ah, que je me déplais à may-mefme, que

j'ay de confufion .' je ne fay par où commen­cer pour l'appaifer.

ACTE CINQUIEME. S C E N E VI.

MENEDEME, CHREMES, CLITIPHON,

S O S T R A T A.

• M E N E D E M E .

EN vérité Chrêmes traite ce jeune garçon avec trop de rigueur 8c d'inhumanité. Je

fors aufli tout exprés pour faire fa paix. Je les yoy fort à propos.

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ît/a HEAUTON-TIMORUMENOS. '

CHREMES.

ehem, Menedeme, cur non arcejfijubti liiiam, & <pnod dotts dixi, firmas ?

SOSTRATA. mivir, te obfeere

f Nefacias. C L I T I P H O.

fater, obfecro ut mi ignofias. MENEDEMUS.

daveniam, Chrême: Sine te exoret.

CHREMES, egori mea borne ut dem Bacchidi dont

fiiens i Non faciam.

MENEDEMUS. ut nos non finemus.

CL1TIPHO. fi me vivom vie , pattf,

Ignofee. S O S T R A T A.

, âge, Chrêmes mi. MENEDEMUS.

âge qus.fi, ne tant obfirmate, Chrême. '

CHREMES, figuid ifthuc ? video non licert, ut cœperam»

hoc pertendere t M E N E D E M U S.

lo Tacts, ut te decet. CHREMES.

ea lege hoc adtb faciam, fifacit id, £htod ego hune aquom cenfio.

CL I T I P H O. pater, omnia faciam : impera.

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UHEAUTON-TIMORUMENOS. i o r C H R E M E S .

Ha, Menedeme, d'où vient que vous ne fai­tes pas aller ma fille chez vous? 8c quert'arré-tons-nous donc5 ce que j'ay dit pour sa dot?

S O S T R A T A . Mon mar i , je vous conjure de ne le pas

faire. C L I T I P H O N.

Je Vous prie mon père, de me pardon­ner.

M E N E D E M E . Pardonnez-luy , Chrêmes, laifftz-vous flé­

chir à fes prières. C H R E M E S .

Moy, que le fâchant, le voyant, je donne mon bien a Bacchis? je n'en fcrayrien.

M E N E D E M E . Mais nous ne le foufltirons pas.

C L I T I P H O N . Mon perd, fi vous voulez que je vive, par­

donnez moy. S O S T R A T A .

Faites-le, mon cher Chrêmes. M E N E D E M E .

Allons ne vous obstinez pas il fort. C H R E M E S .

Enfin vons le voulez ; je voy bien qu'il ne trie fera pas permis d'achever ce que j'avois commencé.

M E N E D E M E . Vous faites une chofe digne de vous.

C H R E M E S . Je le feray, à, condition qu'il fera auffi ce

que je trouveray à propos. C L I T I P H O N .

Mon père je feray tout ce qu'il vous plaira, commandez.

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JJ« HEAUTON-TIMORUMENOS.

CHREMES. XJxertm M ducat.

CLITIPHO. fut et... CHREMES,

nihil audio. MENEDEMUS.

ad me récif te. taciet.

CHREMES, niletiam aùdio ipfum.

CLITIPHO. périt !

S O S T R ATA. andubitas, Clitipbo? CHREMES.

Imo utrum'vultl MENEDEMUS. faciet omnia.

S O S T R A T A. hoc, dam incipias, gravia

fmt. if Dumque ignores : ubi cognoris, facilia.

CLITIPHO. faciam, patet.

SOSTRATA. Hâte mi, ego pol tkn dabe illam lepidatm,

quam tu facile ornes. Eiliam Phanocrate, noftri.

CLITIPHO. rufamne illam Mrginem,

Csfiam , jparfo ère, adunce nafo ? non pof. • fftmipater.

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L'HEAUTON-TIMORUMENOS. 197

C H R E M E S . Je veux que vous TOUS mariez.

C L I T I P H O N . Mon père....

C H R E M E S . Je n'écoute rien.

M E N E D E M E . Je me charge de. cela} moy, il le fera.'

C H R E M E S . -Je n'entends point encore qu'il me promet-'

te rien. C L I T I P H O N .

Je fuis mort ! S O S T R A T A .

Eft-ce que vous balancez, Clitiphon ? C H R E M E S .

Sans tant barguigner, qu'aime-t-il mieux! M E N E D E M E .

Il fera tout ce que vous voudrez. S O S T R A T A .

Cela vous paroift rude d'abord, parce que TOUS ne Étvez ce que c'eft ; mais fi-toft que TOUS le faurez, vous n'y aurez aucune peine.

C L I T I P H O N . Je vous obeïray, mon père.

S O S T R A T A . Mon fils, en vérité jeté donneray une jolie

fille que tu aimeras > c'eft la fille de noftre voifin Phanocratés.

C L I T I P H O N . T Quoy, cette roufle qui a les yeux de la couleur de ceux des chats, le vifage plein de roufleurs, le nez de Perroquet j je ne le puis, mon père.

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«o8 HEAUTON-TIMORUMENOS. CHREMES.

Eia, ut thgans eft ! eredas animum ibi effet S O S T R AT A.

aiiam dabo. C L I T I P H O.

20 ffffuid ifthue t quandoquidem ductnda efi, egomet habeo propemodum

J§uam volo. SOSTRATA.

nunc laudo te, gnate. CLITIPHO.

Archonidis filiatp. SOSTRATA.

Terplacèt. CLITIPHO.

pater, hoc nunc reftat. CHREMES.

quidt CLITIPHO.

Syro ignofcus volt, J£u* mea eaufafocit.

CHREMES. fiât. Vos valete, tfi> plauditfi

ti&^H

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L'HEAUTON-TiMORTJMENOS. 199 C H R E M E S .

Voyez; un peu qu'il eft délicat en beauté ! au-roit-on crû qu'il euft eu l'eiprit tourné de ce cofté là ?

S O S T R A T A . Je t'en donneray une autre.

C L I T I ' P H O N. Ho bien, puifqu'il faut que je me marie,"

j'ay trouvé moy-mefmeàpeuprés celle que je veux.

S O S T R A T A . A prefent, mon fils, je fuis fort contente

de toy. C L I T I P H O N .

C'eft la fille d'Archonides. S O S T R A T A .

Elle eft fort à mon gré. C L I T I P H O N .

Mon père, il ne refte plus qu'une chofe. C H R E M E S .

Ouoy ? C L I T I P H O N .

Que vous pardonniez) à Syrus tout ce qu'il a fait pour l'amour de moy.

C H R E M E S . Voilà qui eft conclu. Adieu, Meilleurs, bat

tez des mains.

w •*p>

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REMARQUES s y R

LHEAUTON: TIMORUMENOS.

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l o i

REMARQUES S U R

L E T I T R E .

E Lie jut jouée la première fois avec les flûtes inigales, & en fuite avec les flûtes droites ]

Quand elle fut jouée avec les flûtes droites > ce fut pour quelque occafion fort ferieufe, ou pour quelque occafion de deuil.

Sous le Confulat de Sempronius Gracchus, & de M. Juventius ] C'eftoit l'an de Rome 90. cent foixante ans avant la naiflance dcNoftre-Seigneur.

R. E M A R QJJ E S

fur le Prologue.

1 1. f^\ Ue noflre Poète ait donné à un Vieillard \tf un rôle. J II parôift par ce paffage, que

c'eftoit"toujours de jeunes gens à qui on don-noit les Prologues.

1. fle vais vous éclaicir ce point , & enfuit e je vous diray ce qui m'amène devant vous, j Id primum dicam , deinde quod veni, eloquar. On

Tome I I K

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l o i R E M A R Q J J E S. accufe icy Terence de ne tenir pas là parole^ car il ne rend pas d'abord railbn de ce qu'il a choili un Vieillard. Cette accufation cft inju­rie, c'eft la première cholè qu'il fait ; il com­mence au dixième Vers ; ce qu'il dit aupara­vant n'eft que pour faire connoiftre la Pièce, dont il ne du que deux mots, Se c'eft une pa-renthefe.

6. Avec cette différence, que le fujet eft dou-hle, quey qu'il ne foi t que fimple dans l'original.] Duplex que. ex argumento faite eft ftmplici. Ce paflage a exercé inutilement tous ceux qui ont travaillé fur Terence ; jufques là quejule Scaliger a crû que ce Poète appelloit cette Co­médie double , parce qu'elle fût jouée à deux fois, les deux premiers Actes furent joiiez le loir , 8c les trois autres le lendemain matin ; & qu'ainfî c'eftoir comme deux Pièces au lieu d'une. Mais cette explication eft infoûtena-ble en toutes manières. Terence veut dire que n'ayant pris de Menandre qu'un fujet fimple, un Vieillard , un jeune homme amoureux , une Maiftrefle, Sec. il en a fait un fujet dou­ble, en y mettant deux Vieillards, deux jeu­nes hommes amoureux, deux Maiftreues > Sec. Ceft pourquoy il ajoute , ' nopam effe oftendi j elle peut pajfer pour nouvelle. C'eft la véritable explication ; ainlî 41 n'eft pas neceflaire de corriger Jimplex que ex argumento facta eft du-flici. Car fi Terence avoit pris ce double lu-jet de Menandre, fa Pièce n'auroit eu que ce qu'on voyoit dans celle du PoëteGrec, 8c par confequent il n'auroit pu ajouter , novae» effe oftendi, car il n'y aurait eu rien de nou­veau.

u. Et non pas pour veut faire le prologue de

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R E M A R QJU E S. 10$ f» Pièce. ] U y a dans le texte, & non pas four eftre le Prologue. Les Latins appelloient Prolo-turn celuy qui recitoit le Prologue, comme cela a déjà efté remarqué.

13. Mais cet Avocat n'aura qu'autant d'élo­quence. ] C'eft une plailànterie pour dire que Terence eft l'Auteur de ce qu'il va reciter ; 8c pour difpofer en mefme temps les fpectateurs a écouter avec plus d'attention.

Premièrementpour ce qui eft des bruits.] Natte quoi rumorts diftulerunt malevoli. Cette parti­cule Nom n'a aucun rapport avec ce qui précè­de. Les Anciens s'en fervoient fouvent au com-mencement du difcours , à l'imitation des Grecs. Rumores differre eft une façon de par­ler fort élégante, Lucilius a dit de mefme :

Gaudes eut» de me ifia foris ftrmonibus dif­fère.

Pues ravi quand tu fais courir ces bruits là d» moy. Et Varron dans fes livres de la vie du Peuple Romain, tXumores famant différant li-cebit, nofque carpant. Qu'ils faffent courir cet bruits là de nous & qu'ils nous déchirent.

jjlue noftre Poète a confondu & mêlé plufieurs Pièces Greques pour en faire peu de Latines. ] Il répond encore icy au reproche qu'on luy avoit fait avant qu'il donnait l'Andrierme. On peut voir les Remarques fur le feiziéme Vers du Prologue de cette Pièce, Contaminari non de-cere fabulas. Terence ne vouloit pas que fes ennemis pûffent croire qu'en donnant fon Heatttontimorumenos , qu'il appelle ex inté­gra Graca inteoram Comocdiam, une Pièce en­tière tirée d'une feule Pièce Greque, il avoit profité de leurs leçons, 8c qu'il avoit blâ­mé fa première couduite. Il leur déclare

Ki j

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fto4 " R E M A R Q J J E S. que s'il ne l'a pas fait dans cette Pièce ,' 3 n'y renonce pas pourtant, 8c qu'ille fera en­core.

10. Il a pour luy l'exemple de beaucoup de s\ens fort habiles. ] Habet bonorum exemplum. Il parle de Nxvius, de Plaute, & d'Ennius.

a 3 - SjfH s'eftmistout d'un coup à faire des ComediesT] Repente ad ftudiumhuncfi appltcaf-fi muficum. Mot à mot , qu il s'eft appliqué tout d'vn coup à l'étude de laMufique. Car les An­ciens appelloient Mufique ce que nous appel­ions les belles Lettres. Ariftophane en plus d'un endroit a appelle Mufique l'art de faire des Pie-ces de Théâtre.

14.. S'appuyant plûtoftfur Pefprit de fis amis. J De La-lius 8c de Scipion. On peut voir les Re­marques fur le Prologue des Adelphes.

18. Et par vos applaudiffemtns donnez, du courage. ] Date crefcendicopiam. Faites croifire, érc. Virgile a eu en vûë ce mot de Terence , quand il a écrit crefcentemtrnate Poè'tam.

zç). Jjhti travaillent à vous donner des Pièces nouvelles. ] £hti vous donnent le plaifir de voir des Pièces nouvelles. Novarum qui fpectandi fa-ciuntcopiam. Dans cette façon de parler, fpec­tandi novarum, ce Gérondif fpectandi eft pour le verbal fpectatie, vifio, comme s'il difoit, qui vobis faciunt copiamvifionis novarum. Ou bien il faut fous-entendre Y Accu&tif fpectaculum.

50. Je dis fans défauts, afin que ce méchant Auteur, &c] Il faut que ce partage foit diffi­cile, car on l'a fort mal expliqué. Ces mots , ne ille pro fi diâum exiftimet, afin que ce mé­chant Auteur, &c. dépendent de eh/fine vitiis,. rjp fans défauts. Après que Terence a dit, par vos applaudiffemens donnez du courage aux Poètes qui

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R E M A R Q J J E S. 10? travaillent à vous donner des Pièces nouvelles , il a peur que l'on ne croye que fon ennemi Lufcius ne ioit compris dans le nombre de ceux pour qui il demande des applaudifleniens ; ce qui eft fort éloigné de -fa penfée : c'eft pour-quoy il ajoute, (y fine vitiis , & fans défauts, afin qu'on ne puifle pas s'y méprendre, & que ce Lufcius ne croye pas que Terence parle pour luy : car les Pièces que ce Lufcius fatfoit, eftoient pleines de défauts. C'eft par cette rai-lbn que j'ay ajouté cette reprifc, ;'* dis fans défauts, pour le faire mieux entendre.

j . Dont toute la beauté confiftoit en un Pfclal lit qui courait. ] Il faloit que cette Pièce fuft fort méchante, puifque c'eftoit là fon plus bel endroit. Il faut bien remarquer que, Terence ne condamne pas ceux qui mettent dans leurs Pièces des Efclaves qui courent de toute leur force, & qui font écarter le peuple pour leur faire placé. Cela eft fouvent neceflaire, on en voit un exemple dans là quatrième Scène dit troifiéme Acte de l'Amphimon de Plaute, où. Mercure dit en courant,

Conced/te atque abjcedite omnes, de via du cedite.

Il blâme feulement ceux qui font de cela le ca­pital de leurs Pièces, comme ce Lufcius ; car alors il n'y a rien de plus vitieux. Le but de la Comédie eft de peindre les moeurs ; 8c l'on s'éloigne de ce but là quand on s'amufe à faire courir un Valet à qui tout le peuple fait place.

Pourquoy Terence s'amuféroit-il a parler pour un fou t 2 Cur infano ferviat ? C'eft le vérita­ble fens île ce Paflàge, que Donat a fort mal. expliqué. Il veut dire, Terence n'a garde, Meflîeurs , de comprendre ce Lufcius parmi

Kiij

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io(î R E M A R O^U E S. ceux pour qui il demande voftre faveur ; car outre qu'il en eft indigne par les Pièces qu'il fait, pourquoy rtoftre Poète voudroit-il fervir un fou, un enragélcurTerentiusmfanojirviatl Cela eft fans difficulté.

36. Cette pièce qui e fi d'un caraBere trunquil~ b & repofi 1 Tout cela eft dit en uii mot , fiu-tariam agere, que l'on n'a point du tout enten­du. Pour bien expliquer cepaflàge, il faut prendre la chofe des fa fource. Les Grecs di-vifoient les vers, des Chœurs de leurs Pièces de Théâtre en Vers ftatarios, qu'ils appelloient. çûsi/egt ut'xM, parce que le Chœur les chan-toit fans bouger d'une place, & en Vers tno-torios, qu'ils appelloient TtughiÙLuÀA», parce que le Chœur les chantoit en danfant 8c en changeant de lieu. Les Scholiaftes d'Efchyle 8c d'Ariftophane ont parfaitement éclairci ce point. De là les Latins fe font avifezde divi­ser, non pas une petite partie de leurs Pièces , mais leurs Pièces entières, en Pièces qu'ils appelloient ftat/eri»), quand le fujet eftoit tranquille & repofé • 8c en d'autres qu'ils, ap­pelloient moterias, quand le fujet eftoit fort vif, 8c qu'il demandoit beaucoup de mouve­ment. Cette Comédie eft du premier ordre , l'on n'y voit pas beaucoup d'agitation ; c'eft un père qui s'afflige d'avoir obligé fon ftls à le quitter. On a crû que Terence appel-loit icy ftatariam, non pas toute la Pièce , mais un des rôles, en fous-entendantperfi~ nam. Mais quoy que je fâche que les Anciens ont auffi nommé les Acteurs Statarios, ouAfo-torios , félon les mouvemens qu'ils fe don-•noient? il me femble que cela ne fait rien icy, où Terence parle d'une Pièce entière : car au-

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• R E M A R Q U E S . 107 trement comment expliquera t-on le Ve rsay

Sin levis ejl, ad alium mox dtfertur gregem. Il faudrait faire une trop grande violence à ce texte pour l'expliquer de quelqu'un des autres Acteurs de la meime Troupe.

4S. Le fille de cette Pièce eft pur. ] Ce n'eft pas fans raifon que Terenceloiie le ftile de cet­te Pièce, il n'y a rien au monde de plus pur, ni de mieux écrit ; ce grand Poète voyant qu'elle eftoit dénuée d'action, s'eft efforcé de reparer cela par la vivacité 8c par la pureté du iule i & c'eft à quoy il a parfaitement bien reiiffi.

47. Dans l'un ér> dans l'autre de ces deux caractères. J C'eft à dire, lorfque je jolie des Pièces ftatarias, tranquilles, & lorfque je joiie des Pièces"motcrias, pleines de mouvement.

Jfbvi donne aux jeunes gens. ] Par ces jeunes gens, il entend les Acteurs, ou peut-eftre mefrneles jeunes Poètes; car Terencen'ayoit alors que trente 8c un an.

*• ••••! •••—- . .••• •..— I.lll.*. -t.yt

R E M A R QJJ E S Sur la première Scène du premier

Ade.

4 "n T Eanmoinsou vofire vertu.~\ Tamenvel JLN virtus tua, &c. Il appelle vertu, la vie

aullere 8c pénible qu'il menoit, car c'eft par là qu'il juge de luy.

y. J>)ui , félon moy, tient le premier rang après l'amitié J Quod ego in propinqua parte amicitu puto. Je n'ay vu perfonne qui ait bien

Kiiij

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ao8 R E M A R C-JJ E S.* expliqué ce paffage. AmicitU n'eft pas un gé­nitif» c'eft un datif. Terence dit que le voi-finage vient incontinent après l'amitié, qu'il tient le fécond rang. Et le bon Chrêmes fuit en cela le fentiment d'Hefiode , qui fait ces trois degrez, ami, voifin, parent, & qui dit :

Toi SfiXiotr 'an àuXiu XUAHI , TW « t j ^ g j » tooozct,

Toi i*t futXiça xi/.Xf7i «sas trsBei ijjuB-t loués:

E*( }ap 71* Xj XfïifÂi !f%*>gaoi « /* • yfotrntt, Feiiwsç. eiPajc-oi hKio*» tfi/orcrro ai mtot'.

Appelle à ta table ton ami, fjplaiffe ton ennemi. Sur tout appelles-y-ton voifin qui demeure prés dt toy , car s'il t'arrive quelque méchante affaire, tes voifins viennent en chemift pour t'aider. , (je­tés parens veulent prendre auparavant leurs ha­bits. On voit de mefme dans le cinquième Li­vre de finibusbon. & mal. deCiceron, levoi-finagemisau premier rang après l'amitié : fer-pit enimforas cognationibus primum, tumajfini-tatibus, deindeamicitiit, poftvic'mitatibus,tunt civtbus. Il met les parentés & les alliances avant l'amitié» &• le voîfînage , parcequ'il re­garde cela félon l'ordre naturel. ,- if* ^ue je ne vous trouve bêchant, ou labou­rant , ou portant quelque pefant fardeau. ] Ce Vers eft plus important qu'on ne penfe pour l'intelligence juftede la conduite de cette Piè­ce : car il s'agit de favoîr en quel état eft Me-i Jiedeme quand Chrêmes luy parle > s'il tra­vaille dans fon champ » ou s'il en fort chargé de fes outils. Il y a eu fur cela une grande difpute entre deux Savans d'un fort grand mé­rite. Si Menedeme travailloit encore quand Chrêmes le rencontre, Terence auroit fait de

"1

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R Ë M A R.' <\XJ E S. ioa' fort grandes fautes contre la conduite du Théâ­tre; car ccktmie la Scène ne change point, Me-nedeme feroit toujours prefent, qu'eft-ce donc qui l'empefeheroit de voir8c d'eftre vu? Terence n'avoit garde de faire une fi lourde faute; il a foin de marquer non feulement l'é­tat où eft Menedeme, mais encore l'heure qu'il eft quand fa Pièce commence ; 8t il le marque par ces deux mots, aut aliquid ferre > qui décident toute la 'queftion. Menedeme ayant travaillé tout le jour , 8c ne voyant, plus, prend fes outils fur fes épaules, & s'en va chez luy. Chrêmes le trouve en cet état prés de fa maifon , où eft la Scène. Ainfi la Pièce commence manifeftement à l'entrée de la nui t , lorfque Menedeme quitte fon tra­vail. ' af. Je fuis homme, & en cette qualtti.\\ Ha-tno fum, humant nihil à me alitnum tuto. On doit s'étonner que ce Vers ait efté fi mal en­tendu après ce que Ciceron en a dit dans le premier Livré des Offices, qui peut luyfervir de Commentaire : car on voit manifeftement par là que Terence appelle icy humanum tous les maux , tous les accidens fafcheux qui ar­rivent ou qui peuvent arriver aux hommes, ou par la force de la deftinée, ou par les effets du hazard. Ma Traduction le fait affez enten­dre.

16. Vrenex. ce que je vous dis ou four des avit que je vous donne, ou four des inftruilïons que jet vous demande. ] On ne fauroit voir deux plu*

' -beaux Vers que ceux-ci. • Vel me monere hoc , vel fercontari fut a :

tXeiium eft ? ego uffaciam. non eft? teutdf terre am.

K v

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a ie R E M A R Q . U E . S. Ego utfaciam répond à. percontari i fe- ut Jeter-rcam , répond à montre. percontaffeà propre. ment s'informer pour s'inftruire, demander les railbns d'une chofe, s'en inftruire à fond, & c'eft un mot emprunté des Mariniers qui fondent les gués.

30. S'il vous eftoit arrivé quelque grandfujet de déplaifir, je ne dirois rien.~\ L'on n'a point du tout bien entendu ce Vers 5 fiquidlaboris efti nollem. Si vous aviez, quelque grand fujet de dé« flaifir. Muret & les autres l'ont avoiié franche-ment. M. Guyet a eu recours à fon expédient ordinaire ; il dit que ce Vers eft indigne de "Terence, 8c qu'il faut le retrancher. Il eft cer­tain qu'il eft très-difficile, 8c jay efté fort long-temps fans le comprendre; jenefaymê­me fi après les grands hommes qui ont defef-peré d'en trouver le fens, je puis me flaterde l'avoir bien entendu, on en jugera. Après, que Menedeme a répondu à Chrêmes qu'il trouve à propos de fe tourmenter , Chrêmes ne pouvant deviner la caufe d'un gouft fi ex­traordinaire 8c fi bizarre, luy dit, fi quid la-boris eft, nollem, il faut fous-entendre te dt-terrere ; fi vous aviez, quelque grand fujet Je chagrin qui vourobligeaft à faire ce que vous faites, je ne dirois rien, & se ne tâcherais tas. de vous en détourner. En effet il ne pouvoit y avoir qu'un très-grand déplaifir, ou plûtoft «ne efpece dedefefpoir, quipûft obliger Me­nedeme à faire ce qu'il faifo.it ; 8c il n'y avoit que cela auffi quipuft porter Chrêmes a ceflcr de le prefler, 8c de vouloir l'empefcher àex chafler ou de tromper fis ennuis par la peine 8c par le travail. Je trouve là une bienlean.ee dont je fuis charmée.

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R E M A R QJJ E S . a i t 56. Quittez et râteau, ne votafatiguez, fat. ]

Le ièul mot , ne labora , a trompé des gens très favans , qui ont crû que Menederhe tra-vailloit dans ion champ, 8c que Chrêmes luy diCoit, ne labora, ne travaillez pat. Maiscefens ne peut jamais s'ajufier avec la fuite. Mene-deme eftoit forti de ion champ, 8c fe retiroit chez luy ; il portoit fonrâteau furfonépaule, 8c Chrêmes le prie de quitter ce râteau pen­dant, qu'il luy fera le récit de fes malheurs. Ne labora veut dire icy, ne vous fatiguez pat, ne vous tourmentez pas, comme Moniteur l'Abbé d'Aubignac l'a fort bien fait voir.

60. Et là par mon courage j'acquis Je la gloi­re & du bien. ] D y a dans le texte, jetrouvay Je la gloire ejp du bien. Les Latins fe font fer-vis de leur verbe reperire, trouver , pour dire acquérir, gagner, remporter, comme les Grecs ont employé leurfgwpt*. . Pindaredans l'Ode v m . des Ifth.

A'f&AMi «71 Kf«T<g7- ï | l t y i . Il a trouvé la gloire des combats, pour dire, il a remporté la victoire.

77. Jjluoy tant de gens feront tmbarraffex. four moy feul ? ] Tôt mea folius filiciti funt caufa ? J'ay lu comme mon père, filicitifint. Cela eft neceifaire.

78. J'auraytantd'Efclaves quineferont occu­pées qu'à faire les étofespour mes habits t ] An-cill* tôt me vefliant. C'eft là le fensde cepafla-g e , .il parle des ETclaves que l'on avoit chez foy" • pour filer, pour coudre.Sc pour faire des étofes.

80. Ni meubles , ni étofes ] II y a, nivafi, tù habit. Mais j'ay mis meubles au lieu de vafi, car tout eft compris dans le mot de meubles ,• 8c vefiimenta iont proprement des pièces d'é*

K. vj

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a n R E M A R QTU E S. tofe dont ils fe fervoient pour couvrir les lits, pour faire des tapis. C'eft ce que Virgi­le appeUeveftes.

90. Excepté ceux qui en travaillant à la cam­pagne; pouvaient aisément gagner leur vie. } J$ui opère ruftico fachtndo facile victum exercè­rent fuum. IL n'eft pas neceflaire de Te tour­menter pour corriger ce Vers qui eft admira­ble. Tcrence a dit exercere victum , exercer fa vie, pour gagner fa vie, commeXenophon a • dit, vxsromr ta détenu., travailler fin vivre , pour gagner fa vie.

91. fe mis aujjt ma mai fan en vente. J In-fcripfi illico- «des. Il eft queftion de favoir s'il faut lire, infcripfi illico «des mercede. Ou hier* infcripfi illico codes : mercedem quafi talent a ad quindecim* J'aime mieux le dernier, car il me parait plus élégant de dire Amplement infcri-btre suies, queinfcrièere «des mercede. Plaute à> dit de mefrne.

JEdes vénales hafce infcribit literie. •Ils mettaient comme nous des écriteaux,ws»i fin à vendre, maifon à loiier, odes vendundt r «des locanda. Ceux qui ont crû queMenede-me n'avoit fait que loiier fa maifon, n'y ont pas pris garde d'aiTez pre's, la fomme feule qu'il en retire, marque afTez que fa maifon fut vendue. Il faut fe louvenir qu'il parle de Ja maifon qu'il avoit à Athènes , car la Scène eft aux champs ; on s'y eft trompé, comme nous le verrons dans la fuite. . 11.0. vous fitvex. que l'on célèbre icy la fefiedtt

Bacihus. ] Les Athéniens celebroient plu-" tieursfefles de Bacchus, mais il y en- avoit

deux principales-, l'une que l'on célébrait au Printemps, & l'autre que l'on celebroitea

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R E M A R QJJ E S. ira; Automne. Monfieur l'Abbé d'Aubignac a re­cherché avec foin toutes ces feftes , 8c après en avoir cité un grand nombre, il a pris mal-heureufement le méchant parti ; car il a crû que la fefte, dont parle icyTerence, eft la fe­fte du Printemps que l'on appelloit anthefte-rie , & où il fait auffi tomber la fefte appellée fythoigie, parce qu'on perçoit alors les ton­neaux , ce qu'il fonde fur le yo. Vers de 1* Scène du troifiéme Acte, .' Relevi omnia dolia » omnes feria*. yay ferré tous mes tonneaux, fay ouvert foute t mes cruches. Mais ce raifonnement eft bien foible, comme fi dans toutes les autres feftes de l'année on ne pouvoit pas percer des ton­neaux, 8c comme fi ce n'eftoit pas l'ordinaire dans les grandes feftes d'en percer beaucoup pour «hoifir le meilleur vin» D'ailleurs ont voit bien que ce n'eft point icy une chofe de ccmtume, 8c que Chrêmes ne le fait que par­ce qu'il y eft force"yar l'importunité de Bac-chis qui n'en trouvoit jamais craflez bon, 8t qu'il'ne le ditmefme à Menedeme, que pour luy faire voir la furieufe dépenfe à quoy il va eftre expofé. Cette faute eft plus importante qu'il ne paroit, car elle en entraîne d'autres, & elle eft caufe queM. d'Aubignac a fort mat placé la Scène de cette pièce; Je fuis fâchée d'eftre obligée de faire cette remarque, 8t de relever la faute d'un homme qui a fait un' Ouvrage aufti utile que fa pratique du Théâ­tre ', ou il' paroît tant de belle érudition, 8c tant de jugement. La fefte dont il s'agit eft-ia*. fefte qu'on celebroit en Automne, 8: qu'on appelioit Dionyfia in agris, les Dionyfiaaues des' chamfs, 8c la Scène n'eft- pas dans Athènes,

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*i4 R E M A R Q U E S . comme l'a crû M. d'Aubignac, elle eft darlS un petit hameau où Mehedeme Se Chrêmes avoient chacun une maifon. Cela paroit par toute la fuite, Scd'ailleurs Menedeme n'a-t-il pas déjà dit qu'il avoit vendu la maifon qu'il avoit a la ville. La feule difficulté qui refte, c'eft de favoir pourquoy Chrêmes dit Diony-fia hic fitnt. On celebreàcy. C'eft parce que cette fefte durant plufieurs jours, on ne la celebroit pas en mefme temps dans tous les bourgs 8c dans tous les hameaux de l'Afrique, on la celebroit aujourd'huy dans un lieu 8c demain dans l'autre, afin qu'on pût aflembler fes voifins, Se que la compagnie fût plus nom-breufe. i i ii - - i ~ ~'- i i - ~

REMARQJJES fur la troifieme Scène du premier

Ade.

I L a envoyé un petit Laquais ehenelle ] Il y a dans le Latin : 17 a envoyé un petit Laquais M

la ville, Nuncfervolui» ad eam'in urbem mifit. Ce qui marque bien certainement que la Scè­ne eft à la campagne, fi elle eftoità Athènes Terenceparleroit ridiculement. "M. Ménage dans la difpute qu'il a eue fur cette Comédie avec M. l'Abbé d'Aubignac, s'eftoit fervi de ce pafiage pour prouver que la Scène eft à la campagne. Mais M. d'Aubignactraitecelade groffier, & il dit qu'il n'y a point de Valet à Paris, ny de garçon-de boutique, quinedife tous les jours que fon Maiftre eft a la ville, qu'il n'eu pas encore revenu de la vilie^ fans

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R E M A R Q,U Ë S. ny qu'on puîné inférer de là, que l'on dit cela à la campagne ; & là defTus il fait des railleries qui ne font pas trop juftes. Mais en vérité, peut-on penler qu'on puifie régler la langue de Scipion & de Lxlius fur l'uiage des Valets & des garçons de boutique de Paris? Je n'en-treray point dans l'examen de cette façon de parler Françoile, il me fuffit d'aflurer que fi. Terence avoit voulu dire dans Rome a La> Iius , qu'il avoit envoyé un Laquais à Scipion, il n'auroit jamais dit, fervum ad Scipionem m urbem mifi, & "Moniteur d'Aubignac a beau dire qu'il n'y a pas une Comédie dans Plaute, & clans Terence, où l'on ne trouve des exem­ples de cette expreflion prife dans Ibnlens, il ne perfuadera que ceux qui ne les ont pas lues > pour moy je n'en ay jamais vu un feul, & j'oie dire qu'il eft impoflible d'en trou­ver.

a i . Il eft vray que toutes ces chofes font com­me eft (ejprit de ceux. ] Atque hoc perinde fsmt. Cette façon de parler eft remarquable, atque eft une reprife que les Grecs appellent iueueftoHStt.

a i . Mais mon père. ] Isno iïïe fuit fenex. Clitiphon répond a ce que fon père a dit au J 7. Vers mtferum ? Jjhtem minus credere eft t Malheureux ! luy ? qui trouvera-t-on qui le (oit snotris t cet isno eft ici une particule adveriati-ve pour quin.

31. j?e parle des pères qui font un peu raifon--nobles J Paulo qui eft tolerabilis, fcortari cre-bro nolunt. Ce changement de nombre eft bien remarquable, s'il y a unpere un peu rai-ftmnttble, ils ne veulent pas, il met l'un au fin-eulier, & l'autre au pluriel, & c'eft parce que.

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--WWHJ

no- R E M A R I E S ; le premier nombre marque la qualité de chaque père en particulier, & tous enfemble font un pluriel; on n'avoit pas bien expliqué ce changement. Jules Scaliger a fort bien re­marqué dans le 8. livre de fa Poétique, que le ientiment de Chrêmes eft tiré de la plus fine morale, les pères qui n'ont pasdépoiiillétou-te forte d'humanité, fouffrent quelque petite ehoie à leurs enfans, & ne les puniffent que des excès ; ils permettent qu'ils s'oublient quelque fois, mais non pas toujours. , 38. Songez, à ne vous pas éloigner à l'heure qu'il eft~] Tu, uttempus eftdiei, vide fis ne que hinc aléas longues. Comment Chrêmes peut-il dire cela à fon fils, puis qu'à la fin de la Scène précédente il a dit, egomet convivas mo-ror, c'eft moy-mefme qui fais attendre les conviez? Il femble donc qu'il ne de voit pas laiiTer aller Clitiphon , mais le mener avec hry, puis qu'on n'attendoit que luy pour fe mettre à table. Cette objection ne peut eftre faite que par ceux qui ne favent pas que dans une occafion comme celle-cy, on avoit bien des chofes à faire avant que de fe mettre à ta­ble. Car il falloit que le repas fût précédé d'un Sacrifice, d'ailleurs ces bonnes gens em-ployoient un aflez long-temps à difcourir a-vant quedp manger ; un homme comme Chrê­mes n'avoit garde de vouloir gêner fon fils en l'affujetiiTant à fe trouver à toutes ces céré­monies, Se à écouter tous leurs difcours.

REMÀ&.

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R E M A R Q J J E S. 217

R E M A R Q_U E S Sur la quatrième Scène du premier

Aâe.

3. T7 T ne point fentir toutes lespajjîons de lajcu-dneffe. ] Neque illarum adfines ejfe rerum

qu'as fert adolefcentia, mot à mot, f3» n'eftrt point participant de cet chofes au/quelles lajeu-nejfe nous porte. Quand les Anciens difoient au pluriel ces chofes , tllas res , illarum rerum , ils parloient toujours de l'amour. Le mot affines eft fort beau, les Grecs employoient leur ov[$mç. dans le mefme fèns.

4. Par les inclinations qu'ils ont aujourd'huy."] Ex fua libidint. Libido eft quelque fois prisent bonne part.

6. Car il pourra me faire confidence de toutes fes folies, & je feray toujours preft à les luypar* donner*. ] C'éft le fens de ce Vers

Nam tf* cognofcendi eff ignofcendi dabitur peccatis locus.

que l'on n'avoit pas bien expliqué. , 13. fffuoy qu'il ait affez. d'affaires chez. luy.}

Et fi. is quoquefuarum rerum fat agit. Cette ex-preffion eft remarquable. Satagtrt lignine icy-avoir des affaires, eftre en peine, mswotpay/ss-r~t. C'eft pourquoy Philoxene explique Sa-tagit ùytnia..

16. jffluand elle me demande de l'argent, je ne fais que marmoter entre les dents. ] C'eft le fens àece Vers. Tum quod eidem, recil efi.- Quand on ne ûjvoit que répondre j Se qu'on ne vou>,

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t i 8 R E M R QJJ E S. Joit dire, nyoiii, ny non, on répondoit reSi, qui ne lignifie rien. « i i . » •

R E M A R Q U E S Sur la première Scène de FA&e

deuxième.

3 - \ Klïïe chofes coneourtnt à me tourmenter. 1 L\x.J£uaanimum txangeant. Il faut bien le

donner garde de lire txaugeant. Les Anciens ont dit exango 8c exangeo, comme ainuo 8c atmueo, excello, Snexcelleo, ftrido,ftrideo,fervo, ferveo , fitlgo, fulgto, congrue, congrueo.

4. L'occa/ion, le lieu, fin âge, la mère qu'eut m. j Clinia raflemble icy les quatre chofes qui peuvent luy donner du foupçon, l'occafion, fa Maiftrefle eftoit feule, 8c n'avoit perfonnequi veillât à fa conduite. Le lieu; elle eftoit dans une ville pleine de jeunes gens fort débau­chez. Son âge, elle eftoit fort jeune, 8c par confequent peu expérimentée, 8c facile à tromper. La mère 8cc. elle avoit une mère ava­re 8c corrompue, qui aurait vendu cent fois, fa fille.

9. Quand arrivera donc ce moment ! ] Quart-io iftuc eriti II faut corriger quando iftuc jam trit t

11. Pendant qu'elles s'ajuftent e$> qu'elles fi coiffent un an fi faffe; ] Moliri eft icy pour conari, il explique parfaitement les foins 8c les peines que bien ries femmes fe donnent pour leurs ajuftemens j 8c le temps qu'elles cmployent à eflayer ce qui leur ûed bien.

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R E M A R C^U E S. l ie ,

R E M A R Q_U E S Sur la deuxième Scène du fécond

Aéle.

t-\/fE dis-tu vrayï 1 Syrusrépond ainfi à i V l D r o m o n , en s'etonnant fans doute de

ce que ce Valet luy conçoit, de tout ce que fort Maiftre avoit foufferr dans fon voyage.

a. Pendant que nous nous amufons à eau fer J Jnterea dum firmones ctdimus, Cette manière de parler eft aflea remarquable > cadere fermo-nés, fendre des difeours, pour dire, s'entretenir, tau fer. Les Latins ont inventé cela des Grecs, qui ont dit »jjn{e 8c tiimto /\iyut. Pindare a d i t , tytibi liuiïit, dire des menfonges.

xi. N'entends-tu pas quelle mené des fer' vantes t J Toutes ces femmes ne paroiflbient pas encore , puis que Dromon ne vient que d'aller au devant d'elles. Il femble donc qu'il faudroit lire audiri tu ancillat. N'entends-tu pas ce qu'ils viennent de dire ; mais cet amant jaloux parle comme s'il les voyoit déjà. Ou bien videri eft ici comme nous difons, ne voit' tu pas qu'ils difent, &c.

12. Ah, j'entends enfin. ] Il entend enfin le iujet qu'il a d'avoir peur 8c d'eftre jaloux.

il.Et lors qu'ilm'enauroit ffû quelque gré, je ne I'ay pas voulu faire. ] Tum cum gratum mihi ejfe potuit, nolui. L'on a toujours mal tra­duit ce paflage, car on a crû que gratum figni-fioit ici agréable, 8c rien n'eft moins vray. Gratum, c'eft. à dire, dont on a de l'obliga' tion.

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aie- . R E M A R Q_U E S. a y. C'efi en cette occafion ou jamais, Mon*

fieur.~\ Hic fciri oportuit, aut nufquam alibi. L'on ne peut rien voir de plus beau que ces fix Vers, c'eft une règle générale pour trou­ver les caractères, 8c c'eft aufli ce qui m'a obli­gée à mettre cela en gênerai dans ma Tradu­ction , quoy que Syrus en fafle l'application à Antiphile feulement. J'ay trouve que cela eftoit mieux ainli en noftrc Langue.

ya. La vieilleluy filoit des laines. ] Subtemen. C'eft proprement la trame, ce qui pane avec la navette entre les fils qui font attachez au métier. Subtemen de fubtexo, fubtexi, fui* temen. Je croy qu'il n'y a perfonne qui ne foit touché de la naïveté 8c du naturel du ta­bleau que Terence fait.

<Si. £)u'a-t-elle dit quand tu m'as nommé 1~\ Syrus veut faire voir deux chofes à Clinia, la première qu'Antiphile a toûjqur's mené la mefme vie pendant fon abfence, & la féconde, qu'elle l'aime toujours. Ces deux chofes font comprifes dans le 14-Vers.

Nom C7» vit a efi eadem, & animm te erg* idem ac fuit.

Il a fatisfait à là première dans tout ce qu'il vient de dire, 8cil va prefentement s'aqtuter de l'autre.

Elle a d'abord quitté fon ouvrage. ] Mulitr telam deferit. pour traduire mot à mot il au-roit fallu dire, elle a d'abord quitté le métier S car tela n'eft pas icy l'ouvrage, mais lemé? tier fur lequel on le fait. Comme Virgile i-dit licia teU addere, 8c Ovide

Licia Barbarica fufpendif licia tela. C'eft ce que Caton appelle jugalem telam.

loi. Tu as raifort, Syrus parle à moy feule*

1

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R E M A R QJLT E S. i i î Vient. ] Syre die modo, verum. Clitiphon de-voit dire naturellement verum, Syre die modo. Mais il eft fi troublé qu'il commence d'abord par rappeller Syrus, & après cela il dit a Cli-nia, verum, tuasraiibn. Ce defordre marque fort bien la pafïion , mais dans la Traduction cela n'auroit point eu de grâce. -

117. Cela s'entend, je leferay.~\ Scilicet fa-lîurum me ejfe. Cette façon de parler eft re­marquable, Lucrèce s'en eft fervi dans le 11. livre.

Scilicet ejfe globe-fa, tamen cum fqualid» - confient.

113. Et dans toutes les affaires c'eft ce qu'il y a de plus important. ] Jjjuod rerum omnium eftprimum. Ha traduit ce mot d'Hefiode.

vgugjç i'an Tsùeii àgaç©*. 117. Elle menait cet homme avec beaucoup

d'adreffe. ] Htc arte traBabat virum. Car c'eft ht une grande adrefle dé faire'à un amant un fàcrifice de fon rival, de manière que ce rival n'en foit que plus amoureux, voilà auflipour-quoy Syrus vient de dire à Clitiphon qu'il eftoit arrivé chez Bacchis dans le moment fa­vorable , puis qu'elle fongeoit à luy plaire en luy facrifiant fon rival.

Vos mots à double entente. "] Inverfa ver-ba. C'eft ce que Plaute appelle verbumper-. plexabile.

Neque ullum verbumfaciat perplexabile. Qu'elle ni dife point de mots à double entente.

131. L'agilité de vofire cou, fjr-t. ] Everfas cer~ vices. C'eft proprement un cou mobile, flexi­ble, qui tourne facilement, comme s'il eftoit démonté ; c'eft pourquoy Lucien a fort bien

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n i R E M A R Q.U E S. (

dit de la mefme manière roi*XT^n î nuxAier» itjftei. Un eau rompu.

R E M A R Q U E S Sur la Scène quatrième du fécond

Ade, l6 \T£ ne fat pas ce que font les autres. ] Nef-

J cio alias. Le caractère cPAntiphile eft ad­mirable. Il n'y a rien de contraint dans fa ver­tu, elle ne fe mêle point de ce que font les au­tres, .ainft la peur des accidens fâcheux qui ar­rivent à toutes ces créatures, n'a rien contri­bué à luy faire prendre le parti qu'elle a pris,

10. Syrus,je ne puis me retenir: ] Tous ceux qui ont travaillé fur Terence ont efté trompez en cet endroit, car ils ont fait dire cecy par Clinia, fous prétexte que Syrus a dit à Chti-phon à la fin de la Scène précédente, ambula, allez-vous-en. Mais ils dévoient bien fentir que Clitiphon étoit trop amoureux pour obéir fi facilement, 8c pour s'en aller fi volontiers, jl demeure caché en quelque coin du Théâtre pour voir, 8c pour entendre fa Bacchis, 8c de là il dit à Syfus, je ne puis plus me retenir. Ce­la fait un jeu de Théâtre fort agréable, 8c peint admirablement le caractère de Clitiphon. Cet­te remarque eft de mon père, 8c je ne doute pas que ceux qui aiment Terence ne luy en fâ­chent bon gré.

11. Il vous en fera bien avaler d'autres ] Diu etiam duras dabit. Il ne faut rien changer à ce paflage. Duras dabit, on fous-entendpi/»-

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R E M A R Q J J E S. ' i i j gas, & dare plagtts eft dit comme dan ictus , dan vulntra , dans Virgile , Ovide & Lucre-ce.

14. D'où -vient cette défaillance ? ] JJjhiidftu-fes! On avoit mal expliqué cet endroit ; ftupe. re, lignifie ici tomber en foiblejfe, 8c non pas s'étonner.

REMARQJJES Sur la première Scène dut troifiéme

Ade.

ïo .TL commence déjà à faire jour. ] Lueifcit J. hoejam. Dans cette façon de parler hoc

fe rapporte à coelum, qui eft fous-entendu, car on dit cela en regardant le Ciel. Plautedansle Curculio- 1. i n .

Nam hoc auidem adepol baud multo poft luce lucebit.

On ne peut pas douter que cette Comédie n'ait efté jouée à deux reprîtes } les deux premiers Actes furent jouez le» tbir après le coucher du Soleil, & les trois autres le matin à la pointe du jour. L'intervalle qui fepare le fécond & le troifiéme Aile, eft rempli par le louper qui fe fait chez Chrêmes dans une nuit de débauche. La Fefte que l'on celebroit alors donnoit à Menandre la liberté de parta­ger ainfifa pièce, &Terencen'eftoit pas obli­gé de rien changer à cette conduite, parce que comme fes Comédies étoient aufll jouées chez les Romains dans les Ferles folemnelles, ces

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244 R E M A R Q J J E S. Feftes pouvoient donner lieu à Terence de fuivre le mefme partage. Eugraphius quia fait des Commentaires fur cette pièce, a crû que cela eftoit fans exemple. Mais il s'eft trompé. J 'ay fait voir qu'Ariftophane avoit fait la mefme chofe, 8c que les deux premiers Actes du Plutus furent jouées le foir, 8c les trois autres le lendemain matin , 8c que l'intervalle du fécond au troifiéme Acte eft rempli par le voyage que Plutus fait au Tem­ple d'Efculape. où il paffe la nuit. Si l'on îàvoit bien precifément à quelle heure s'ou­vre le Théâtre dans Ariftopnane , on trouve-roit fans doute que la liberté qu'il aprife ne luy a pas fait parler la règle des douze heu­res qui doivent limiter l'action Théâtrale. Il eft au moins certain que Terence ne la pafle point ici, 8c qu'il eft aufli régulier en cela qu'en tout le refte. Le Théâtre s'ouvre après huit heures du foir, les deux premiers Actes ne durent tout au plus que deux heures, on loupe, 8c je veux que cet intervalle du­re iix ou fept heures. Le troifiéme Acte commence à la petite pointe du jour, com­me Terence a eu foin de le marquer, enfai-fiun • dire à Chrêmes, Lucifcit hoc jam , il commence déjà à faire jour. Ainfi les trois AéVes, qui ne fauroient durer plus de trois heures.fi-niffent avant les fept heures dur matin. Mais ce qui mérite d'eftre bien remarque icy.c'eft que ce troifiéme intervalle entre dans l'action , 8c devient une partie du fujet aufli bien que dans Ariftophane. C'eft dans cet intervalle que Chrêmes s'apperçqit des libertez que Cliti-phon prend avec Bacchis, 8c c'eft ce qui don­

ne-

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R E M A R Q J J E S. "iz'f n e lieu à tout le jeu de Théâtre du troifiéme Acte. Si les Critiques avoient bien pris garde à cela ils n'auroient jamais écrit, vajta & bians tÈfinanis Comcediaeft. Cette Comédie ejt <vuide, il y a du temps perdu. On ne fauroit fai­re ce reproche à Terence, puifque ce qu'ils appellent vuide 2c temps perdu , vaftum & bians, a une liaifon neceûaire avec le fujet, Se qu'il en efl mefme le fondement. Si Terence avoit partagé fa Pièce de manière que cet in­tervalle n'euft point fait partie de fon fujet, cela auroit efte ridicule & infuportable. Si l'on faifoit aujourd'huy joiier le commencement d'une Pièce de Molière, 8c demain la fin, il n'y a perfonne qui ne fe moquaft de ceparta-

f e, maïs Terence Se Menandre efloient trop abiles pour prendre de ces libertez, ils con-

noifioient trop bien l'art du Théâtre. Ontrou-veroit aujourd'huy dés occafions où l'on pour-roit faire avec grâce ce qu'ils ont fait, 6c où ce feroit mefme une necemté de le faire] ? mais pour cela il faut de l'adreffe Se du juge­ment.

a. Et pourquoy n'eftre pas le premier à luy ap­prendre. ] ïrimum è me utfciat. Mon père li-

. foit, primo ime utfciat, comme dansla féconde Scène de l'Acte i .

Ut banc Utitiam ntc op'manti primusei obji-cerem demi.

il. Ou je fuis né plus que tous les autres hom­mes. ] Aut ego profttto ingenio egregio ad mi-ferias : Menedeme fort de fa maifon dés la pointe du jour pour retourner à fon travail. Car il a déjà dit qu'il ne veut fe donner aucun relâche. Cela elt fort bien conduit.

4 . Car afin que vous fachiex, comme elle u Tome II. L

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Xi6 R E M A R Q^U E S. maintenant. ] Nam ut tu Jetas quant ta nunt infiruBa. Chrêmes prend Bacchis pour la Mat-trèfle du fils de Menedeme, 8c c'eft celle de ion fils. Ce jeu de Théâtre eft admirable.

ad. Chargées d'habits & de bijoux.- Onera-tas vefte atque auro. Ces Servantes portoiçnt des habits Se des bijoux pour leur Maiftreflè. J'ay expliqué cette coutume dans les Remar­ques fur la féconde Comédie. Car Terencen'a pas voulu dire que ces Servantes avoient elles-mefmesdes habits d'or8c d'argent, celaferoit ridicule j mais on n'a pas laifle de s'y trom­per.

Quand fin Amant fer oit un Satrape. ] On a crû que Menandre s'eftoit fervi du mot de £4-trape, parce qu'il eftoit du temps des Rois de Perfe ; car c'eft un mot Perfan qui lignifie

- Gouverneur de Province. Mais c'eft une fort méchante raifon. Dans iaféconde Comédie, qui eft aufli tirée de Menandre, il eft parlé de Pyrrhus ; il faut donc dire aufli que Pyrrhus eftoit du temps des Rois de Perfe. Il y avoit long-temps que Darius Codomanus, le der­nier des Rois de Perle eftoit mort, quand Me­nandre vint au monde, car ce grand Poète vi-voit du temps de Ptolomée Philadelphe.

48. En goûtant le vin. ] Pytiffando. Pytiffart eft un mot imitatif, qui exprime le bruit qu'­on fait des lèvres quand on rejette le vin qu'on a pris dans la bouche pour le goûter. Pytiffo, du Grecpytiz.e, qui vient de: ptuo, qui lignifie

fpuere, cracher. 49. Celuy-cy eft un peu dur ] Afperum, pa-l

ter, hoc eft, aliudleniusfodes. Ce font les pro­pres termes, afperum 8c une. Caton, vinum-afperum Une fieri.

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R E M A R QJJ E S. H T yo. y ay fercé tous mes tonneaux] Le Latin dit

fayeuvert tous mes tonneaux rjo toutes mes cru­ches, rélevi omnia dolia, omnes ferias. Mais ce­la n'eft pas à nos manières. J'ay percé tous mes tonneaux dit tout. Relinere, c'eft ôter la poix avec laquelle on bouchoit.

89. Allesc-vous-en, afin qu'ils ne s'apperfoi-vent pas que nous /oyons de concert. J Concède hinc do-rnurn, r$>c. Chrêmes trouve un prétexte plau-fible & neceflaire pour obliger Menedeme à rentrer chez luy, 8c à ne pas aller à ion tra­vail comme il l'a voit refolu.

98. Ils voytnt beaucoup plus clair dans les af­faires des autres que dans les leurs ] Aliéna ut imitas videant s*y dijudicent quam fua. Mene­deme ne dit cecy que pour parler deluy-mef-me, car quoy que cela foit vray aulîi par ra-port à Chrêmes, cela ne fe trouve vray à cet égard, que parce que c'eft une vérité géné­rale que l'on peut connoiftre fans rien la­voir d'un tel, ou d'un tel. Menedeme ne connoifibit pas Chrêmes , 8c dans tout ce que nous avons vu il n'y a rien qui ait pu le lui faire connoiftre, il ne pouvoit donc pas l'a­voir ici en vûë, & commej'aydit, ilnepar-le que de luy-tnefme,-autrement Terence aurait fait une faute qu'on ne pourrait ex-cufer.

Lij

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xx8 R E M A R QJJ E S.

R E M A R QJJ H S.

Sur la féconde Scène du troifiémé A&e.

10 T A vieilkffè de Vaigle. ] C'eft à dire une JLvvieilleffe verte & vigoureufe, comme

celle de l'Aigle qui ne meurt jamais de vieil­lerie» & qui fur la fin de fa vie ne peut leçon-ferver qu'en beuvant toujours.

i 3. Elle ne l'eft pas comme••les femmes de vô­tre temps. ] Ita non ut elim, fed uti nune,fime bona. Je fuis perfuadée que le fens que j'ay fuivi dans ma Traduction eft le véritable. C'eft une flaterie de Syrus, qui fe conforme ici aux manières des vieillards, qui trouvent toujours ce qu'ils ont vu dans leurs jeunes ans, & plus beau, & meilleur que ce qu'ils voyent. On peut pourtant donner un autre fens à ce paffage, ècdire, Elleneft pas fi belle qu'elle tftoit il y a quelques années h mais en vérité elle eft fort belle pour l'âge qu'elle ai Mais cela ne me plaift pas.

14. Et je ne m'étonne pas fi Clinia. ~\ Il par­le ainfi pour confirmer Chrêmes dans la croyance où il eftoit, que Bacchis eftoit la Maiftreffe de Clinia, & cfeftoit celle de lbn fils.

38. Lemenfonge n'eft pas mon vice. ] Non eft mentiri meum. Il veut dire qu'il ne ment .point, quand il dit qu'il eft Maiftre pafle, 8c qu'il ne je vante de rien qu'il nepuiffe faire.

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R E M A R QJJ E S. îïtf

R E M A R Q U E S Sur la troifiéme Scène du troifiéme

Ade.

i T T Oilà nos affaires faites. ] Syrus appre-V hende que ce que vient de faire Cliti-

phon, n'ait fait découvrir à ibn père que Bac-chis eft fa Maiftrefie, 2c non pas celle deCli-nia.

7.6. Comme s'il manquait icy de promenades.] H dit cela, parce que la Scène eft aux champs.

R E M A R Q U E S Sur la quatrième Scène du troifiéme

Ade. i l . A J||«i elle dit qu'elle avait prefté trente.

Xxjifioles ] Il y a dans le Latin mille drachmes. La drachme Attique valoit environ fix fols de noftre monnoye, comme le denier Romain ; de forte que mille drachmes font prés de cent écus.

14. Et c'eft celle qui eft prefentement dans Vappartement de veftre femme. ] Eaque eft nuna ad uxorem tuam. Antiphile devoit eftre re­connue pour la fille de Chrêmes, c'eft pourquoi Terence n'a garde de la mettre avec les au­tres, & de la faire, trouver au Feftin, où il n'y avoit que des Courtifanes qui puflent paroi-

L iij

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*io R E M A R Q,U E S. tre. Il la met dans l'appartement de la femme de Chrêmes, afin qu'on n'eût rien à Juy repro­cher , 8c qu'elle fût hors de tout foupçon.

16. Et elle dit qu'elle n'aura pas plâtoft touché cet argent, qu'elle luy donnera cette fille pour nantiffèment delafimme. } Illamilli tamen pofé daturam mille nummum bofcit. Ce paflage m'a toujours paru très-difficile, 8c je n'ay jamais elle contente de ce que l'on a dit pour l'expli­quer. J'cfpere que ma Traduction le fera af-iez bien entendre. Je mets un point après daturam.

iUam illi tamen • Pojî daturam. mille nummumpofeit. Xt Bacchis dit à Clinia qu'elle luy donnera cette fille après qu'elle aura touché cet argent. Tamen, eft pour poftea. Ces paroles mille nummum pofiit, c'eft l'explication que Syrus donne à la demande de Bacohis ; eHefaitfemblant, dit-il, de les demander à emprunter , & de vouloir donner cette fille pour gages > nuis dans la vérité, c'eft qu'elle les lui demande en pur don: Ce qui a embarrafle tous ceux qui ont voulu expliquer cet endroit, c'eft qu'ils ont crû que mâle nummum eftoit une fommefortdifferen-te de mille draehmarum ; mais ils fis sont trompez, drachme 8c numme font ici la mef-me choie, car numme nefigrtifte que pùve, Se en Latin ce mot va à toutes fortes de mon-aoye. La drachme des Grecs, comme je viens de le dire, eft la même choie que le denariut major des Romains, qui cftott une pièce d'ar­gent, argenteus nùmmus. • 11. Ah , répondez-nous plut favorablement,

fil vous plaifi, Monfieur. J Optât a loquere. Sy­rus fâché de ce quecebcrfr-homtaetrouycque

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R E M A R Q_tJ E S. ttr fon expédient n'eft pas bon , luy dit : Ah , Moniteur , répondez-nous de meilleures cho­ies, ne nous découragez pas tout d'un coup. D'autres l'ont explique de cette manière, opta-ta loqueris , vous dites ce que vous fouhaitez., vous luy faites répondre ce que vous voudriez qu'il repondît j mais ce ne peut eftre là le fins.

Mais il. n'eft fus befoin de tout cela. ] At-qui non eft opus. Chrêmes n'explique pas fa penfée, 8c ceux qui ont travaillé fur Terence ne- fe font pas mis en peine de la deviner. Mais je croy que la voici, il voit que Bacchis demande mille drachmes,-trente piftoles, 8c qu'elle offre de donner en gages Antiphile, que c'eft un marché où il ne iauroit rien per­dre, 8c que Bacchis ne fauroitletromper, puis du'il eft déjà nanti de cette fille qui eft chez fa femme, je croy donc que fa penfée eft de donner luy-meime cette tomme, & de retenir Antiphile. " 13. D'où vient qu'on fait tant de bruit à nô­

tre porte? ] Quid eft quod tamanobisgraviter crepuerunt fores t J'avois oublié d'avertir que lés portes de la rue étoient faites de manière qu'elles s'ouvroient toujours en dehors, 8c que ceux qui vouloient iortir de la maifort f aifoient dubruit à la porte, pour avertir ceux qui étoient dans la rué de s'éloigner, afin de n*eftre pas heurtez par lesbattans de la porte.

î-iig

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i i z R E M A R Q U E S .

REMARQUES Sur la cinquième Scène du troifîéme

Acte.

13. Tj" Tne pas luy donner la mort en paroles, e» a—s la laiffant en effet en état de vivre. ] J'ay

eue forcée de traduire ainfi pour faire bien entendre cç Vers ,

Non fimulare mort cm verbss, re ipfajp'emvi* ta dare,

Simulât e mort cm ver bis , faire femblant parfet paroles de luy donner la mort, cela marque l'ac­tion deSoftrata, qui n'ayant pas la cruauté do tuer elle-mefme fon enfant, l'a donné à expo-fer , car ce n'eft proprement que faire fem­blant par fes paroles de luy donner la mort, Re ipfafpem vita dates luy laiffer en effet l'efpe~ rance de la vie, Ceft à dire , luy lailTer les moyens de conferverfa vie, en ne faifant que l'expofer, car la plufpart de ces enfans expofes étoient fauvez par quelque hazard,. comme on en a mille exemples.

29. d^ae peut-on faire avec des créatures ?J ffjhtid cum illis agas l L'on n'avoit affurément rien compris à ce paflage. Cum illis n'eft pas-ici avec ces Marchands d'Efclaves , avec ces femmes qui proftituent lés autres, il veut dire Amplement, mais quepeuyent faire les maris? quelles précautions peuvent-iJs prendre quand ils ont des femmes fi foftes ? 8cc.

£t que voftre bonté exeufe. J H y a.fKt l

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. R E M A R ÇLU E S. a j j vofire juftice, mais ici juftice lignifie bonté i comme nous avons déjà vu, injuftice pour du­reté , rigueur.

39. Afin que fi elle mourait, elle ne fufi pal au moins entièrement privée Je fit part de nofire bit». ] S» moreretur ne expert partis effet deno-firts bonis. Les Anciens auraient crû avoir fait un fort grand péché, fi leurs enfans eftqient morts fans avoir eu la part qu'ils dévoient avoir de leurs biens, c'eftpourquoy quand les femmes, toujours trop fuperlfitieufes, don-noient un enfant à expofer ; elles Iuy met» toient dans fes langes ou ailleurs, quelque bi­jou, croyant que cela tiendrait lieu de légiti­me, & mettrait leur confidence à couvert. Voi­là en quoy confifte la fuperftition dont parle Soltrata, Se elle trouve bien à propos cet ex­pédient, pour ne pas donner lieu a ion mary de croire qu'elle n'avoit donné cette bague, qu'afin de pouvoir un jour reconnoiilre fa fil­le, fielleeftoitfauvée.

40. Ceft fort bienfait, parce moyen vous Va-itex. confervée, <3* vous vous efiest fittisfaite. ] Iftuc reHe: confervafti te atqut illam. Cepafia-fage eft plus difficile qu'on n'a crû. Chrêmes dit à fà femme qu'en donnant cette bague, el­le a fait deux choies au lieu d'une, elle a mis là confeience à couvert, Se elle a fauve fa fille, car on auroit afiurément laine mourir cette fille , 8c perlbnne n'aurait voulu s'en charger, fi elle n'avoit eu cette bague, qui avoit fait ef-perer à ceux qui l'a voient trouvée, qu'elle pourrait eftre un jour reconnue 8c rachetée fort cher par fés parens. Confervafti a donc ici deux lens, confervafti te, vous vous tfies con­fervée, vous vous tfies fittisfaite ,en fuivant les

L v .

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*J4 R E M A R Q U E S , mouvemens de voftre fuperftition ; 8e confer* vafti Mat», vous l'avez, confervée, enluy don­nant une bague qui a fait venir l'envie à ceux nui l'ont trouvée, de l'élever, dans I'elperance d'en tirerunjourunegroffe rançon. • 41. M'a triée Je la Tuy garder fendant qu'est-

fer oit dans te bain. ] Ealavatumdumitfervan-dut» mihi dédit. Antiphile eft la feule qui fe met au bain après le feftin, 8cTerenee a ména­gé cela fagement pour la diftinguer de toutes tés autres. Comme elle avoit pafle la nuit dans l'appartement de la femme de Chrêmes, appa­remment die n'y avoit pas fait fi grand chè­re , 8c n'avoit pas efté u long-temps à table , ainfi n'ayant fait aucun excès , elle pouvoir-bien fe baigner quelque temps après le touper, outre que depuis le louper jufqu'à l'heure qu'il eft, il s'eft parle alTez: de temps pour fai­re qu'Antiphife puiflë fe baigner, peut-eftre meftne qu'elle a dormi, car on ne voit pas-bien ce qu'elle a pu faire depuis le fouper juf­qu'à l'heure qu'elle fe baigne. Cebaind'An-«îphile eft plûtoft pour la propreté 8c pour la politeiïè, que pour la fante, car ilfautfefbu-vertir qu'elle eft venue d'Athènes chez Chrê­mes à pié, 8c il y allez loin, comme Te-rence a eu foin de nous en avertir, en fai­sant dire par Clitiphon Acte- a. Scène. 1, Nom eegitashtne languie effe. Tttnefenfis fas qu'il y m un peu loin d'wi. Et fans doute Antiphile* mieux aimé différerfon bai», afin de n'avoir après celaqu'à le coucher, 8r.de mieux dormir-H n'y avoit point d'heure preferite pour le bain* chacun le prenoit à l'heure qu'il vouloir, avant ou après le-repas 5 car il ne faut pas s'imaginer que ce fùtla coutume dajxscesfïïiteaciftfeftes: *

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R E M A R Q U E S . » î f dé fbuper 8c de fe baigner ensuite pour entrer dans le Sanctuaire. M. d'Aubignac qui l'a crû, ai efté trompé par ce partage du 39. livre de Tite-Live, Section îx. Décime die coenatum,deinde pu­re lautum, in Sacrarium deduéiuram. Si que le dixième jour, après qu'il aurait foupt, dy qu'il ji ferait en fuite purifié dans le bain, elle le mè­nerait dans le Sanctuaire. Mais M. d'Aubignac devoit prendre garde que dans ce partage de Tite-Live il s'agit d'un jeune homme qui doit eftre initié aux Bacchanales. Ceft icy toute autre choie , 8c les Bacchanales, dont parle Tite-Live, n'ont rien de commun avec cette ferle de Bacchus que Chrêmes célèbre chez ruy. Une autre faute que M. d'Aubignac à faite . c'eft qu'il a crû qu'Antiphile ne i'e bai­gne que dans le temps au quatrième Acte- Il n'avoit point du tout connu la difpofition de Cette Comédie. il eft fi peu vray qu'Atiphile ne fe baigne qu'au quatrième Acte, que Sof-trata envoyé la Nourrice avant la fin du troi-fiéme > pour lavoir fi elle n'eft pas déjafortié du bain.

jtbi nuncjam entra, atque, ittafijam lave-rit, m'ibi nuntia.

ta prefentement au logis, dy viens me dire fitcette fille eft déjà bars du bain.

4.6. Mes affaires vont mal. ] Syrus avoir, raifon de parler ainfi , car il voyoit bien qu'­Antiphile eftant reconnue pour la fille dé Chrêmes > Clinia ne manquerait pas de la de­mander en mariage , 8c que par ce moyen) Chrêmes découvrirait que Bacchis eftoit la-Maiftrefle de fon fils.

5*3. Les hommes ne peuvent pas toujours eftre te- qu'ils vaudraient. } Non licet hominem effet

L vj, .

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ajd R E M A R Cc,U E S. fepe itaut volt fi res non finit. Chrêmes dît ci? la pour excufer k dureté qu'il avoit eu d'or­donner que l'on tuaft, l'enfant dont la. femme accoucherait, fi c'eftoit une fille. Ses affaires ne luy permetroient pas alors d'élever des fil­les , qui font d'ordinaire à charge à une maiibn.

REMARQUES Sur la première Scène du quatrième

Ade.

». A XJtant que je le puis comprendre. ] %fi J\*ne animus fallit. Syrus fort de la mai-

fon , où il a entendu tout ce qu'Antiphile a dit à Chrêmes pour Iuy donner l'éckirciffe-ment de ce qu'il vouloit lavoir ; c'eit pour-quoy il voit fa ruine fort proche. Cela fait voir que ceux qui n'ont pas feulement fait icy une nouvelle Scène , n'ont pas bien connu le Théâtre, puifque ce doit eftre le commence­ment du quatrième Acte

y. Ce fera: un a/fez. grand exploit pour moj, fi je puis me tirer d'iey vie ty bagues fauves. } Triumpho, fi licet me latere tecto abfcedert. Ce mot de Syrus peut avoir donné lieu à ce beau mot qu'Horace fait dire des Romains par Aa-nibal, dans l'.Ode iv. du iv. Livre:

quos opimus Fallere ey ejfugere efl trïumphus.

Jepenfe ma foy qu'à la fin je ratraperay cet argent qui a fi bien pris la fuite. ] Retraham bercle opinor, ad me idem illud fugitivum ar-gentum. Il parle de cet argent comme d'un

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R E M A R QJJ E S. a j f xUckve fugitif; mais cette alluiîon eftott in­comparablement plus agréable dans le Grec ». car Menandre avoit amirément écrit acmçtrd/* rm Spcutnca xpvaw Le mot Chrv/is ..qui fi-gnifie or eft auflî le nom d'un Efclave , com­me en Latin Chryfis, Chryfàlm, Cbryfaits. Oa peut voir mes Remarques fur l'Ode LIV» d'A-nacreon.

R E M A R Q J J E S Sur la féconde Scène du quatrième

Aâe.

•• adfuerim ? Ce que Syrus dit icy , qu'i tfii prefent à tout, fait voir aflez clairement qu'il eftoit entré dans la maifon avec Chrêmes & Softrata, & que par confequentletroifiéme Acte a fini là , le Théâtre demeurant vuide. La feule difficulté que l'on puiflc oppofer à ce­la, c'eft ce que Syrus vient de dire au quatriè­me Vers :

NihilmefefeU.it, cognitaefi, quantum audio hujus -verba.

Je ne me fuie point trompé, cette fille eft recon­nue , autant que je puis comprendre par ce qu'il dit. Car, dira-t-on, puifque Syrus ne faitque la fille eft reconnue, que par [ce qu'il entend dire à Clinia , c'eft une marque qu'il n'a pas efté prefent à la reconnoiflance. Mais il n'eft pas difficile de répondre à cette objection. Sy­rus entre avec Chrêmes & Softrata, il entend

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*j8 R E M A R QJJ E S, ce qu'Antiphife leur dit , 8c voyant que ceH n'alfoit que trop bien pour luy, il ne le donne pas la patience de voir la fin, il fort pour pen-ler à ion malheur» 8c pour tâcher d'y trouver quelque remède.

a a. Car de quel front pourray-jt parler a mon père l ] Ham quo ore appellabo patremt Vt veut dire qu'en menant Bacchis chez luy, il n'ofera parler à ion père pour luy propofer de demander la fille de Chrêmes. Ceux qui ont crû que Clinia demande de quel front fl pour­ra parler au père d'Ântiphile, pour luy de­mander cette fille en mariage , fe font fort trompez, comme la fuite fe fait aflêz con-noiftre.

REMARQUES fur la troifiénae Scène du quatrième:

Acte.

f). A S-tu fris garde à ta- mai/on- dt Car'mue f i l Cepaflage iéulpronveroit fuffifamment

que lafefte de Bacchus, dont il eft parlé dans cette Pièce , eft Dionyjia in ttgrit, celle que l'on celebroit aux champs 5 8c par confequent la fcene n'eft pas à Athènes, mais à la campa­gne.

10. EJr-ce qutfay la quelque chofta démêler avec toy? S Y. Point du tout, mais-je veux voue rett* an et qui voue appartient. ] Etiamtte tecum hic ret mihieft? ST. Minime, tuum tibi nddo. Cepaf-fàge eftoit uns doute difficile » puifqu'on s'y ta trompé» Syrus ayant propofé à Bacchis)

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R E M A R QJCJ E S. ijç> tfatTer chezMenedeme, elle luy répond, Que Veux-tu que j'aille faire là ? eft-ce que j'y ay quelque choie à démêler avec toy? eft-ce pour l'amour de toy que j'y dois aller? Non, dit le Valet, mais pour l'amour de vous-mefme.

R E M A R QJJ E S fur la quatrième Scène du quatrième

Aère.

9. T TE qu'y a-t. Ht ah, Menfieur, il y a long-JL A temps que je fouhaitois de vous trouver."]

B m'a paru qu'on a fort mal diftribué icy les perlonnages ; car on a lu,

S Y. hem 1 C H . j£*td eft t SV. te mihi ip/um jamdudum

exoptaéam dar'u f r . Hé ! CHR. gu'y-a-t-H l Sx. Ah* Men­fieur, il y a long-temps que je Jouéaitoisdevout trouver. C'eft aflurement Syrus qui doit dire rout cela, cequ'ya-t-il t eft froidaanslaboua che de Chrêmes, 8c il me fémblê que c'eft une choie1 que fou doit ièntir.

17. Mais n'eft-ce point une vanité que tu te donnes t ] Vah ! gloriare evenifte ex jentenria-On s'eft trompé à cepaflage} gloriare evenifte ex /ententia, ne fignihe pas, tu te glorifies, tut ptit levain de ce que tu su reiiffi i car il cela, eftoit, Syrus ne pourrait pas répondre comme 3 fait, verumdkv, je dis la vérité : mais il fia. srnrfie , tu te vantes fauftèment sTavoir reuffi* tu dis cela par vanité. Ceft la force du motglo-riari-, qu'on * voulu changer eu harwlari, para

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ï 4 o R E M A R Q_TJ E S. ce que l'on ne l'a pas entendu.

36. Cette vieille femme pouvoit-eUe mettre ma fille en gage ?] Il parle de la vieille femme à qui Softrata avoit donné fa fille a expofer. Cette fille eftant née libre, nepouvoit eftre ni vendue ni engagée fans le confentement du père.

48. Le droit pris à la rigueur, eft tres-fou-vent une grande chicane. ] fus fummum fspe fitmma eft malitia. Cette maxime eft fi iure , que je ne fais pas difficulté dé dire qu'il eft impoffible qu'un homme foit homme de bien, s'il ne relâche jamais de cette rigueur du droit, & s'il n'explique fouvent contre luy la loj qui fera pour luy. Malitia lignifie proprement chicane, que les Jurifconfultes appellent fou-vent calumniam , calumnie. Menandre avoit dit:

—————è S'tptnrn% loftiltt Aise» Qixeoptunit CpufvtTai.

Celuy qui regarde à la loy de trop prit, eft un 3ycopbante,un chicaneur fieffé.

R E M A R Q_U E S Sur la fixiéme Scène du quatrième

Acte.

ff)uam malt a jufta injufta ac prava fiunt me— riius!

ce qui ne fait point de fens raifonnable, mais

il

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R E M A R Q_TJ E S. 441 il fert à me faire conjecturer que Terence avoit écrit,

@htam muha mjufta ac prava, jufist fiunt moribus ! .

Mot à mot, Combien de thofes injuftes & mau- , vaifes deviennent jufles par la coutume ) Je fuis charmée de ce îentiment, & encore plus-de l'application que ce bon-homme en fait : car effectivement il n'y a rien quipuifleparoiftre

tlus ridicule, que de voir qu'en donnant fo­lle à un homme, il faille encore luy donner

fon bien. Et une marque bien certaine que ce n'eft que la coutume qui autorife une façon de faire fi mal entendue, c'eil que les premiers-hommes en ufoient autrement, on donnoitde l'argent, ou l'on faifoit d'autres prefens aux pères quand on vouloit avoir leurs filles»

R E M A R QJJES . Sur la septième Scène du quatrième

^ Ade. a

io./~\TTe me dites-vous là, Chrêmes î §>uicl y^narras, Chrêmei Heinfius& quelques

autres om lu ces deux Vers comme ils iont imprimez dans cette édition, où c'eil Mene-deme feul qui parle ; & ainfi il auroit falu traduire, -<sA, que me dites-vous là, Chrêmes \ stu contraire, cette créature qui eft chez, moy ,. (feft lu Maiftreffe de Clitiphon, ils le difenttous* Mais je trouve plus de (fel à dillinguer ainfi les personnages :

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a4» R E M A R Q U É S . MENEDEMUS.

®)uid narras, Chrême t CHREMES.

Imo hoc quidemqu* apudteefi, Clitiphonis eft Arnica i

MENEDEMUS. Itaaiunt.

Et c'eft ce que j'ay fuivi dans ma Traduâion ; mais je ne m'eftois pas apperçeuë que dans le texte que j'ay donne aux Imprimeurs.onavoit fuivi en cet endroit l'édition de Heinfius, 8c cela eft caufe de la différence qui eft entre ma traduction, 8deLatinquieft àcofté.

R E M A R Q U E S Sur la première Scène du cinquième

Acte.

i.A/tAis ce beau donneur de confeils que' faf 1VJ./À. ] Sed hic adjutor meus, ejr monitor

Ijrpretmonftrator Chrêmes. Ces trois mots, ad­jutor , monitor, 8c pramonftrator, font des mots" de Théâtre, 8c figni fient tous celuytjui re-drefle lés Acteurs, qui fe tient derrière la ta--pitTerie, pour leur fiflerres endroits oùlame-rftoire leur manque. Mais comme noftre Lan-' eue n'a pas des mots qui puiffent exprimer ce­la, j'ay traduit Amplement8c naturellement; cela ne peut pas avoir lamefme grâce en Fran­çois qu'en Latin, car la beauté de ce paflage coftfifte particulièrement dans la figure.

- *6. Ne vouletc--veut pas iitus modérer l n'att-rex-vousaucun igat'd à vous-mefmeî ~\ Numtu-

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R E M A R Q U E S ; 14% feeohièesi non te refpkisi Une des grandes fceautezde cette Scène confifte en ce que Me­nedeme dit à Chrêmes les mefmes chofesque Chrêmes luy a dites au commencement de la Pièce.

74. Laijfez., fiuffrex. qu'en cette occafionje me fatisfajji, laijfex.-moy faire. "} Mit te, fine m bac regerere mihimorem. MEN. Sino.ltane vist CH R. Ita. MEN. fiât. Dans ce Vers on a mal placé leperfonnage de Menedeme; au Heu de fino, il fautlirejfe*. & l'ajouter à ce que dit Chrêmes, mitte: fine in hoc regerere mihi mo-rem: fine. MEN. ltanevis ? car il eft ridicule que Menedeme luy dife, fino, je vous laiffee arant que de luy avoir demandé, le voulexe-vou* ainfii Itanevisi

R E M A R Q_U E S fur la féconde Scène du cinquième

Ade.

t.TJ St-il Jonc vray, Menedeme, que mon père. J Cillant tandem quafo, Menedeme. Chrêmes

ae fait que d'achever de parler à Menedeme. Menedeme ne vient nue de le quitter, & dans le moment on voit CKtiphon déjà tout inftruk de ce que ion père avoit refont de faire à ion defavantage. Il fembte donc que Terence a manqué tcy de conduite, car ce qui fe pane entre la fin de la Scène précédente, & le com­mencement decelle-cy, fiiffiroit pour remplir f intervalle d'un Acte. Mais il n'eft pas diffi­cile de défendre Terence ot de le juûiûer.

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S44 R E M A R CfJU E S. Menedeme quitte Chrêmes pour aller parler S Clitiphon , il ne fait qu'entrer un moment dans lamaifbn, il luy dit en deux mots de quoy ils'agifloit, 3c il reffort en mefme temps avec luy i cependant Chrêmes attend fur le Théâ­tre l'effet du compliment que Menedeme va faire de fa part à Clitiphon. A infile Théâtre ne.demeure pas vuide » & l'action n'eft nulle­ment interrompue, puifque les fpecrateurs at­tendent auffi que Menedeme foit de retour. Le lieu de la Scène > qui errait devant les mai-ions de Chrêmes 8c de Menedeme, donnoit lieu à Menandre 8t à Terence de faire cette liaifon de fcenes, où il n'y a rien que de fort ordinaire Se de fort naturel.

REMARQUES. Sur la troifiéme Scène du cinquième

Acte.

8. /"""< 'Eft que je eroy que vous n'eftespas leurjils'] y*-J Non tjfe horum te arbitrer. La finefte de

Syrus eft merveilleufe, il ne cherche qu'à fai­re la paix de Clitiphon. 8c qu'à fléchir 8c at­tendrir fonpere. Il n'y avoit rien de plus pro­pre à ce deflein, que de faire en forte que Cli­tiphon feigniû de croire qu'il n'eftoit pas fils de Chrêmes; mais outre qu'il y aune grande différence entre les chofes que l'on fait tout de bon. 8ccelles dont on ne fait que femblant ; Syrus connoiffoit trop fon homme pour luy faire cette cohfidenoe, il le trompe tout le premier. Cela eft merveilleufement bien con­duit.

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R E M A R QJJ E S. '14? 10. Car moins ee jeune homme aura d'efpe-

rance > plus il aura de facilité à faire fa paix à fin avantage. ] Namque adolefcens quant minima in fpe fiius erit, ejj>c. J l veut dire que ce jeune homme craignant fout de bon de n'eftre pas fils de Chrêmes, fera les chofes

" beaucoup plus naturellement, & parlera d'une manière plus touchante que s'il éftoit averti que ce n'eft là qu'un jeu pour tâcher d'atten­drir fon père.

: REMARQUES. Sur la quatrième Scène du cinquième

Acte.

Si./^Litiphon croira qu'il n'eft pas noftrefils,} V^H y a dans le texte, Clitiphon fiupconne

qu'il n'eft pas noftrefils, Subditum fi fufpicatur. Mais, comme mon père l'a remarqué, c'eft une faute tres-confiderable, StqueTerencenepeut avoir faite, car il eft merveilleux pour la con­duite Se pour l'eeconomie de fes Pièces ; .& c'eft particulièrement ce que les Anciens ont vante Se admiré en luy. Il n'y a qu'un moment qtte Syrus a donne à Clitiphon ce ioupçon, qu'il n'eft pas fils de Chrêmes ; depuis que ce jeune homme l'a quitté, iln'apaseule temps d'aller trouver fa mère, 8c de luy communi­quer ce ioupçon, pour luy en demander l'é-ciairciflement ; car à mefure qu'il fe retire.on .voitparoiftre Chrêmes Se Softrata qui conti­nuent la difpute qu'ils avoient eue enfembleà himaifon. Cet endroit eft fort important Se

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140 R E M A R Q.U'E S. quoy qu'il n'y ait qu'une lettre à changer, on ne laiflera pas de pouvoir juger par là avec quelle exactitude 8c avec quelle application il faut lire les ^uvrages des Anciens. Il eft cer­tain que Terenceavoit écrit fufpicetur, 8c non pas fufpicatur; ce fujpicetur change k choie entièrement, ce n'eft plus qu'une conjecture, au lieu que c'eftoit auparavant une affirmation. Softrata appréhende que les rigueurs-qué Chrê­mes a pour Clitiphon, ne luy faflentfoupçon.» ner enfin qu'il n'eft pas leur fils ; 8c cette ap-prehenfion eft fort naturelle à une mère, fur tout dans ce temps là où l'on trouvoit tous les jours des enfans expofez. Mais fans aller cher­cher des preuves plus loin, ce qui fuit dans ce mefme Veré, confirme entièrement cette cor* rection ; car Softrata dit certe fie erit, mi vir ; cela fera apurement, mots mary. Si elle avoit cWtfufpicatur, elle aurait continué par le pre-fent , fie eft; 8cpuifqu'elle amisicyle futur, c'eft une marque fûre qu'elle n'a parlé que par conjecture.

16. Eft-ce parce que ma fille eft retrouvée, que vous me dites celai J Ôhtodfilia eft inven­tai Ce pafiage m'a paru difficile, Je ne fuis pas contente de ce qu'on a dit pefur l'expli­quer. Je croy que Softrata veut dire que Chrê­mes prétend qu'il luy fera aifé de faire voir que Clitiphon eft fon fils, puifque fa fille eft retrouvée, parce que le frère reffemble à la feeur. La fuite fait voir que cela eft fondé fur cette refiemblance ; car Chrêmes luy répond , non, mais c'eft parce qu'il vous reffemble. En effet, la première marque n'eftoit pas fort fù—, rc , Antiphile avoit efte expofée, on ne ve-noit que de la retrouver, par coruequent on/

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R E M A R QJL7 E S. i 4 r pouvoit toujours douter que ce fuft ta verita-

. ble fille de Softrata ; & amfi cette raifon, que Clitiphon reflembloit à Antiphile, au lieu d'eftre unpréjugéfavorable pour luy, en des-venoit un très defavantageuxpourelle.

21. Jjhfil a Pair grave] à te voir m connoifi ce qu'il eft. ] Sjhçam feverus ! rem cum videas, cenfeas. Onaauffimal expliqué ce Vers que s'il euft efté fort difficile. Terence imite icy uni Vers de Plaute, Cafina Acte 5. Scène i .

Sed eccum incedit, ut quom afpicias triftem, frugi cenfeas. <

Car triftis dans ce Vers de Plaute, eftlamefrne chou; (que feverus dans celuy de Terence. Mais le voilà qui fort, à voir fin air grave, on le prendrait pour un honnefte homme. Cum vide As, cenfeas rem ita efte :, nempe eum elfe fiverum. C'eft ce que les Grecs difoient, t» xjëHja U\m

REMARQJJES Sur la cinquième Scène du cinquième

Aète. n.f^E ne font pourtant pas là Us paroles d'un

y^spere. J No» y«»* jamhac parentisdicta. On avoit fait dire cela à Clitiphon. J'ay re­rois le perfonnage de Softrata, car c'eft elle qui doit dire , ce ne, font pourtant pas , é*. Ces paroles font ridicules & fades dans la bou­che de Clitiphon.

•'Non , Clitiphon , quand vous feriez, forti de ma tefte, comme on dit que Minerve eft fortuits

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148 R E M A R Q J J E S. celle de Jupiter. ] Honfsex capitefssmeonatuss. item ut aiuntMinervamexJove. Voici un ftile plus relevé que le ftile ordinaire de la Comé­die j mais cela vient de la pafïion , qui en é-chauffant l'efprit, luy fait trouver des ex* prenions & des penfées plus nobles que celles que l'on a d'ordinaire quand on eu de fang froid, 8c c'eftpourquoy Horace dit dans l'Art Poétique :

Interdum tttmen eV vocem Comcedia tollit, , Iratufque Chrêmes tumido delitigat ore. La Comédie élevé pourtant quelquefois la voix , *jf> Chrêmes en colère parle d'une manière em-poulée.

if. Jjhte les Dieux faffent. } D»7 ifthec... Softrata, comme une femme fort religieufè, a toujours recours aux Dieux. Icy elle louhai-te qu'ils changent en bien tout le defordre qui eft entre le père 8c le fils, DU ifthtc in melius venant -, mais Chrêmes ne luy -donne pas le temps d'achever. t Je ne fay point ce qu'ils feront, les Dieux. ] Nefcio Deos. Onavoit expliqué ce paflage d'u­ne manière qui faifoit grand tort a Tercnce s car on avoit crû qu'il faifoit dire à Chrêmes, je ne me foucie point des Dieux. Lambin, dans la belle Lettre qu'il écrivit à Charles ÎX. accufe Terence d'impiété ; mais il s'eft fort trompé, 8c a trompé totis ceux qui l'ont fui-vi. Quand mefme Terence auroit efté impie, il n'auroit eu garde de mettre un mot fi odieux dans une Pièce que les. Magiftrats faifbient joiier. Deos nefcio ne fignifie pas aufli/e ne me foucie point des Dieux . mais feulement, je ne fay pas ce que les Dieux feront ; 8c en voicy tin exemple bien fenfible dans la Scène 4. de l'A­

cte a.

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R E M A R Q J J E S. 149 fte 1. de cette mefme Pièce : Antiphile répond à ce queBacchis luydifbit des autres femmes:

Nejcio altos , me quidem femper fcio focijfe fedulo,

Ut ex illius commodo meum cbmpararem corn' modum.

Dans cet endroit nefcio alias ne lignifie pas je ne me foucie pas des autres, Antiphile eft trop modefte pour parler ainfi ; mais il fignifie, je nejaypas ce que font les autres, &c.

jay honte de dire un vilain mot en prefence de voftre mère. ] Pudet dicere hac prtfente ver-bum turpe. Les Grecs & les Romains avoient un fi grand refpect pour leurs femmes, que pour rien du monde ils n'auroient voulu dire. en leur prefence un mot deshonnefte 1 la reli­gion & la politique les objigeoient également a cette bienféance.

REMARQUES Sur la fîxiéme Scène du- cinquième

Ade.

13. T JE K''entends point encore qu'il me promette J rien. ] On ne fauroit douter que ce ne

foit le véritable fens de ces mots, nihil audio etiam ipfum, il faut fous-entendre n»lupa//irm. On l'avoitmal expliqué.

Sans tant barguigner, qu'aime-t-il mieux? ] Imo utrum volt. C'eft à dire : il n'a qu'à voir ce qu'il'aime mieux, ou fe marier, ou que je donne tout à fa fceur.

Le vifage plein de touffeurs. Sparfo ore. ] Tome IL M

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%fà R E M A R Q U E S . Sparfum os ne lignifie pas une bouche fendue

jufqu'aux oreilles, comme beaucoup de gens l'ont crû ; mais un vifage marqueté , plein de roufleurs, comme les Anciens l'ont fort bien expliqué.

19. J&u'il eft difficile & délient en beauté'. J ^Matneïêgans ! comme Terence a dit ailleurs, quant elegansfor ntarum fiectator fient.

ai. C'eft la fille de noftrevoifin Archonides.~\ Archonidis filiam. J Mon père a remarqué

3u'il faut dire Archonidi hitjus filiam, comme ans les bons manuferitst-/?«;'«r, c'eft à dire

noftrevoifin, car c'eftainfique parloientles Anciens. Archonidi pour Archonidis, comme Achilli your Ackillis, Perfi pour Perfis.

S f f S • f f

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P U B L I I

TERENTII A D E L P H E

L E S

ADELPHES D E

T E R E N C E

Mij

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T I T U L U S , feu DIDASCALIA.

ACTA LUDIS FUNEBRIBUS L. MMILII EAVLI, £K EABIOMA-XIMO, P. CORNELIO A E R IC A-NO MDIL. CURUL. EGERE L. ATTILIUS P RJENESTI NUS, MINUTIUS PROTIMUS. MO­DO S F EC IT F LA CCUS CLAU-P / J . % % % * TIBIIS SARRANIS. FACTA E GRJECA M E N A N-DRU. L. A NI CIO, M. CORNELIO COSS.

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•PI"

LE TITRE. C E T T E PIECE F U T J O U E ' E POUR LES J E U X FUNEBRES^ DE L. Ai M I L I U S P A U L U S . **^J£* SOUS LES E D I L E S C U R U L E S ^ ^ Q. F A B I U S M A X I M U S ET P; C O R N E L I U S A F R I C A N U S , P A R L A T R O U P E D E L . ATTI-L I U S . D E P R E N E S T E , E T D E M I N U T I U S PROTIMUS. FLAC-CUS A F F R A N C H I DE CLAU" DIUS F I T LA M U S I QJD" E. * ON* Vtytz

LA J O U A AVEC LES FLUTESlw Re-T Y R I E N E S. ELLE EST P R I S E ^ l * " ' . DU G R E C DE MENANDRE. E L L E F U T REPRESENTEE POUR LA PREMIERE F O I S S O U S LE C O N S U L A T DE L. ANICIUS*-ET DE M. CORNELIUS.

M iij

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*J4

P E R S O N N E D R A M A T I S .

PROLOGUS. MIC 10, Smex, pater adoptivtu Mfchsni. DE ME A, Smex, frater Micionis, pater Mf-

chini tjp Ctefiphenù. MSCHINUS, aieUfeens , filins Demie-,

adeptione, Micionis. CTESIPHO, frater Mfchtni. SOSTRATA, mater Pamphila. PAMPHILA, filia SoftraU, arnica Mf-. chini. CANTHARA, Nutrix Pamphila. HEGIO, Senex, propinquutPamphil*. G E TA, fervus SoftraU. SAN NI O, Leno. DROMO, fervus Micionis. STRUS, fervus Mfchini.

PERSONNE MUTiE. TISICINA. PARME NO, fervus.

Scenatft Athtmtt.

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*fjr

PERSONNAGESDE LA PIECE.

LE PROLOGUE. MICIO N, père adoptif d*Efchinus. DEMEA, frère de Micion, & père de Cte­

fiphon 8c d'Efchinus. ESCHINUS, fils de Demea, 8c adopté-

par Micion. CTESIPHON, frère d'Efchinus. SOSTRATA, mère de Pamphila. PAMPHILA, fille de Soilrata, & Maif

trèfle d'Efchinus. CANTHARA, Nourrice de Pamphila. HEGION, parent de Pamphila. G ET A, Valet de Soilrata. S A N NIO N, Marchand d'Efclaves. DR O M ON, Valet de Micion. SYRUS, Valet d'Efchinus.

PERSONNAGES MVETS.

Une Joiieufe d'inftrumens , dont Ctefiphon cft amoureux.

PARMENON, Valet.

La Scène eft à Athènes.

M iiij

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tr6

PROLOGUS-P Oftquam Poe la fenfit fcripturam fuam

Ab iniquis obfervari, & adverfarios Rapere in pejorem partem, çuam acturi fu~

mus r Indicio defè ipfe erit : vos eritis judics,

f. Laudine anvitio ducs faftumid oporteat. Synapothnefcontes Diphili Commosdia eji : Ram Comorientes Plautus ficit fabulam. In Graca adolefcens eft, qui lenoni eripit

Meretricem, in prima fabula- eum Plautus locum

1 0 . Reliquitintegrum : eumhic locumfumfitfibi

In Adelphos: verbum de verbo expreffum ex-tulit.

Ram nos acturi fumus novam. pernofcite •

Purtumne faclum exiftùmetis, an locum

Rjcprehenfum, qui prateritus ntglegentia eft.

îp. Namquod iftidicunt malevofi, hommes no~ biles

Rumadjutare, ajftdueque unà fcribtre ,

J§>uod illi maledictum vehemens ejfe exifta-mant,

Ram laudem hic ducit maxumam, cum iàss flacet,

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PROLOGUE-NOftre Poëte s'eftant apperçû que fes enne­

mis obfervent fes ouvrages pour les criti­quer, 8c qu'ils tâchent de décrier la Pièce que nous allons jouer devant vous, s'eft crû obli­gé , Meflieurs, de vous rendre icy compte de fa conduite: vous jugerez fi ce qu'on luy re­proche eft digne de louange, ou de blâme.

Diphilus a fait une Comédie qui a pour ti­tre ', * Les Mour/tns enfemble. Plaute l'a tra­duite en Latin., 8c luy a laifla le mefme nom-Dans celle de Diphilus, il y a'unjeunehom- ^ me qui dés le commencement de la Pièce, en- ^ levé une fille àun Marchand d'Efclaves. Plaute Qomm._ a lailTé cet endroit là tout entier fans le mettre • ( en œuvre, 8c Terence l'a traduit mot à mot,8c l'a misdansfaCornWie-dnsAdelphcs, quieft une Pièce toute nouvelle que nous allons repre-fenter.Voyez,je vous prie.fi c'eft un vol.ou fi ce n'eft pas plûtoft un ufage honneftéqu'il a fait d'un endroit dont Plaute avoit négligé de fe fer-vir,8c dont noftre Poëte a voulu profiter. Pour ce que difentccs envieux, que des premiers de la Republique luy aident à faire fes Pièces, 8c travaillent tous les jours avec luy , bien loin d'en eftre offenfé, comme ils fe l'imaginent, 11 trouve qu'on ne luy fauroit donner une plus grande loiiange,puifque c'eft une marque qu'il

M v

* Gra;-cè, Sy-nafoth-nefcon-

Lat.

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2jr8 P R O L O G XX S. j$fti vobU univerfis, & populo placent ;

26. Jjhtorum opéra i» bello, inotio, innegotio^ ; Suo qui/que tempore ufu' eftfine fuperbia. Dehinc ne expettetis argumentant fabula : Senes qui primé ventent ; hipartem aperiem ; In agendo partem oftendent, lacite, aquani-

mitas %f. Veftra Poe'tt ad fcr'tbendum augeat mduf

triam.

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L E P R O L O G U E . . ard a l'honneur de plaire à des perfonnes qui vous plailenr, à vous, Menteurs, 8c à tout le peu* pie Romain, & qui en paix, en guerre, 8c en toutes fortes d'affaires, ont rendu à la Répu­blique en gênerai, 8cà chacun en particulier, des fervicesconfiderables, fans en cftre pour cela plus fiers, ni plus orgueilleux. Au relie n'attendez pas que je dtfe icy le fujet de cette Pièce ; les deux Vieillards qui paroiftront les premiers fur la fcene, vous en feront connoî-tre une partie, 8c vous apprendrez le relie dans la fuite. Faites, s'il vous plaid, Meffieurs, que la difpofition que nollre Poète peut avoir à faire des Comédies, foit augmentée 8c for­tifiée aujourd'huy par la "favorable attention que vous donnerez a celle-cy.

M vj

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^^Wj z6o

P U B L I I

TERENTII A D E L P H L

A C T U S P R I M U S . S C E N A I.

M I C I O.

S 'Torax... non redhthacnoHe a ccenaJEfcbinxs, Neque fervulorum quifquam, qtri advor-

fum tirant. Erofe&o hocveri tlicunt: fi abfisujfiam, •Aut ubi ficejfes, tvenhe eafatiu'eft,

f. 6>U4 in teuxor dich, tiquai» anima cogi­tât

Irata, quant iUa, qua parentes propitH. Uxer, flcejjet, aut te amure cogitât,. Aut tett amari, aut pot are, aut anima obfi-

qui, Et tiSi béni ejje foli, cum [ibi fit mail.

10. Ego, quia nonrtdiit filius, qua cogitoi

1

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l o i

L E S

ADELPHE^ D E

TERENCE. a •

A C T E PREMIER. S C E N E I.

M I C I O N.

STorax...Eichinus n'eft pas revenu cette nuit du lieu où il fôupa hier, ni aucun des Valets qui allèrent au devant de luy. En

vérité rien n'eft plus vray que ce qu'on dit d'ordinaire, fi vous elles abfent, & fi vous vous arreftez trop long-tems quelque part, il vaut mieux qu'il vous arrive ce que voftre femme en colère dit de vous, que ce quepen-fent des parens" qui vous aiment avec tendref-fe. Si vous tardez trop à revenir, voftre fem­me s'imagine que vous faites l'amour, ou que vous elles quelque part à boire 8c à vous diver­t ir , & que vous vous donnez du bon temps pendant qu'elle n'a que de la peine. Mais moy, fur ce que mon fils n'eft pas encore revenu.

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2<t A D E L P H I. ! 6)uibu'nuttc folicitor reins', ne aut iUe alfe-

rit, | Aut ujhiam ceciderit, aut perfrtgerit j Aliquid. vah , quemquamne hominem in ani-

mum inftituere, aut tarare, quoi fit carias, qttam ipfe eftfibit

tf Atque ex me hic natta non eft, fed exfratre, is adeo

Dijfimili fiudie eft. jam inde ai adolefcen-tia

Ego hanc clémenttm vitam urbanam atque otium •

StcHtttt fum : & , quod fortunatum ifii pu-tant,

Vxorem nunquam bahut. iUe contra, hoc ont-nia:

20 Ruri agere vitam , femper parci , ac duri-ter f

Se habere. uxorem duxit : natifilii Duo. inde ego hune majorem adoptavi mihi ; Eduxi à parvulo, bahut, amavipromeo; In eo me oblecto : folumid eft carum mihi.

2/ IUe ut item contra me habeat , facio fedu-iï:

Do, pratermitto , non neceffe habeo enrnia Tro meo jure agere : poftremb , alii clancu-

lum

Tatres quefac'mnt, que fert'adolefcentia , Ea ne me celet, confuefeci filium :

30 Nam qui ment tri aut faller einfueritpatreme aut

Aadebit, tanto magie audebit esteras. Rudore , ejr> liberalitate libéras Retinere, fatius effe credo, quant mette.

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L E S A D E L P H E S . st6j tjuelles penfées n'ay-je point î & de quelles inquiétudes ne fuis-je point agité ? je crains toujours qu'iln'ait eu froid, qu'il ne foit tom­bé en quelque lieu, ou qu'il ne fe foit rom­pu quelque bras ou quelque jambe» Ah! eft-îl poflîble qu'un homme ait la folie de placer dans fon coeur, ou de prendre chez foy quel­qu'un qui luy foit plus cher que luy-mefme ! Ce garçon qui me donne aujourd'huy tant de chagrin n'eft pas mon fils, il eft à mon frère; 8c ce frère dés fon enfance a toujours efté d'u­ne humeur entièrement oppofee à la mienne. Toute ma vie j'ay vécu à la Ville d'une maniè­re douce & tranquille ; 8c j'ay pris le parti des gens du monde, qui aiment le repos 8c qui font confiner le bonheur à ne fe point marier, je n'ai jamais eu de femme. Luy au contraire a tou­jours vécu à la campagne, épargnant 8c travail­lant inceflamment,ils'eftmarie, 8cil a eu deux enfans : j'ay adopté l'aifné, que j'ay élevédés fa plus tendre jeunefle : je l'ay regardé 8c aimé comme mon propre fils, il fait feul toute ma joye, rien ne m'eft cher comme luy, 8c je fais fout ce que je puis pour l'obliger à me rendre ta pareille. Je luy donne dcquoy le divertir, je paflè fur mille chofes, 8c je ne croy pas qu'il foit neceffaire de me fervir de toute mon autorité : enfin je l'ay accoutumé à me faire confidence de toutes ces petites chofes que là jeunefle infpire, 8c que les enfans ont grand ibin de cacher à leurs pères ; car celui qui eft accoutumé à mentir, 8c qui ofe tromper ion père , entreprendra bien plus aifé-mentde tromperies autres. Je fuis perfuadé qu'il eft beaucoup mieux -de retenir les enfans par l'honneur 8c par la pudeur, que par la

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»*4 A D E L P H I. Hecfratri mecum non convemunt, nequt pla­

cent. Venit ad mtfepe clamant, Quidagis, Micioî-Cur perdis adole/centem nobis l cur amat i

Cur potat ? cur tu bis rébus fumptum fugge-rist

Vejlitu nimium indulgis : nimium ineptus es.

Hhnium ipfe efi duras, prêter equomque, & bonum,

40. Et errât longe, mea quidemfententia,

Jjhti imperium credat gravius ejfe aut fiabi-lius,

Vt quodfit, quamillud, quod amicitia adjun-gitur.

Mea fie efi ratio, eyfic animum induco mtum.

Malo coactus quifuum officiumfacit,

4f. Dur» idrefeitumiricrédit, tantifiercavet:

Si fierat fore clam , rurfum ad ingenium re­dit.

£$uembeneficio adjuneas, Ole ex animo facit :

Studetpar referre, prefens abfenfque idem erit i

Hocpatrium efi, potius confuefacere filium

fo. Sua fionte recte facere, quam alieno metu.

Hoc pater su Dominas interefi. hoc quinequit,

Eateatur nefeire imper art liberté.

Sed eftne hic ipfits, de que agtbam ? & certe it efi. •

Nefcio quidtrifttm video, credo jam, ut filet, • Jargabit. ,

n

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L E S A D E L P H E S. x6f crainte ; mon frère 8c moy ne fommes pas fur cela de mefme fentiment, cette éducation luy dépiaift. 11 vient fbuvent chez nous crier 8c me.dire, que voulez-vous donc faire ? pour­quoy nous "perdez-vous noftre fils? pourquoy louffrez-vous qu'il ait des MaiftrefTes, 8c qu'il aille au Cabaret? pourquoy luy donnez-vous de- l'argent pour cela ? vous l'habillez trop proprement, 8c vous elles trop facile. Et luy, il eft trop dur, il pafleles bornes de la juftice 8c de l'équité, 8c il fe trompe extrêmement, de croire qu'une autorité établie par la force, est plus folide 8c plus durable, que celle qui a pour fondement l'amitié. Au moins je le croy ainfi, c'eft làmonfentiment, 8c voici comme je raifonne : Celuy qui eft contraint de faire ion devoir par la peur qu'il a du chaftiment, prend garde à luy pendant qu'il appréhende d'eftre découvert j mais qu'on luy ofte cette crainte, d'abord il retourne à fon naturel. Au lieu que celuy que vous gagnez par vô­tre douceur 8c par vos bien-faits, s'aquite toujours de fon devoir fans aucune contrain­te , 8c cherche à vous donner des marques de fon affection. Prefent 8c abfent il fera toujours le mefme. C'eft là le devoir d'un père d'ac­coutumer fes enfans à faire le bien par leur propre mouvement, plûtoft que par ces mo­tifs de crainte ; 8c r?eft en cela qu'un père eft fort différent d'un Maiftre. Tous ceux qui ne favent pas en ufer ainfi, doivent avouer qu'ils ne font pas propres à élever dès enfans. Mais n'eft-ce pas là noftre homme ? c'eft luy aflu-rément. Il meparoift trifte.je nefaydequoy.

Je m'imagine qu'il va me quereler félon fa orme coutume.

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%66 -A D E L P H I .

A C T U S PROMUS. S C E N A I I .

Ml C I O, D E M E ut. .

M I C I O. ,

S Alv ont te advenir e, Demea, Gaudemue.

DEMEA. Ehem, opportun} ; te ipfim

querito. Ml CIO.

J$uid trifiis es t DEMEA.

rogaeme, uiinotkJEfchi-nue

Siet, quid triflie ego fim t M I C I O.

dixin' hoc foret Ghtid feciti

DEMEA. quid ille feceritt quemne-

quepudet f. Quidautim : nec metutt quenquam : nequt

legemputat Tenere fe ullam. namilla, que antehac faâa

fient, > Omitto. mode quid defignavitt

M I C 1 O. li

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L E S A D E L P H E S. x6j

A C T E P R E M I E R .

S C E N E II .

D E M E A , M I C I O N .

M I C I O N.

AH, mon frère, je fuis ravi de vous voir ici en bonne fanté.

D E M E A . Ha, je vous trouve fort àproposic'cfl vous-

mefmeque je cherche. M I C I O N .

Qujavez-vousàeflre trifte ?

D E M E A . Ce que j'ay à eftre trifte ? pouvez-vous ms

faire cette demande, vous chez qui eitEichi-nus?

M I C I O N bas. Ne l'ay-je pas bien dit ? haut. Qu'a-t-it

fait ?

D E M E A . Ce qu'il a fait ? un garçon qui n'a honte de

rien, qui ne craint perionne, Se qui croit que les Loix ne font pas faites pour luy. Je ne veux pas parler de tout ce qu'il a fait a-vant ce jour j quelle action ne vient-il pas de commettre ?

M I C I O N . Çnielle action donc fi terrible ?

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168 ; A D E L P H I ;

D E M E A.

Tores ejfregit, atque in odes irruit Aliénas : ipfum dominum atque omnemfa-

miliam • Mulcavït ufque ad mortem : eripuit mulie-

rem, Jguam amabat. clamant omnes indignifftt-

me TaSum effe. Hoc advenienti quot mihi, Mi-

cio, Tiixere ! in ore eft omni populo, denique, Si conferendum exemplumeft, nonfratremvi-

det *f. Rei dareoperam, rurielfeparcum acfobrium ?

Hullum hujus fimile faclum. Hoc cum itti, Mic'tQ,

Dico,' tibidico, tuillum corrumpi finis. M I C I O.

Homine imperito nunquam quicquam inju-ftius y

Jgui nifi quod ipfefacit, nihil rectum putat.

D T. M T. A. xo.flffuorfum ifthucl

MICIO. quia tu, Demea, hoc ma­

té judicsts. Hon eft flagitium , mihi crede , adolefcentu-

lum ! Scortari, neque pot are ; non eft, neque fores

Tffringere. hac fi neque ego, neque tu, feci-mus,

Honfivit egeftas faterenos. tununc tibi if. Idlaudiducis, quod tumfecifti inopia.

Injurium eft. nam fi effet unde idfieret, -

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r ' L E S A D E L P H E S. 169

D E M E A. . 11 a enfoncé une porte, il eft entré par force

dans une maifon, il a donné mille coups au Maiftre Se à tous les Domeftiques, il les a laififé prefque morts fur la place, il a enlevé une femme qu'il aimoit, tout le Monde crie que c'eft ' l'action la plus indigne qu'on ait jamais faite ; ah, Micion, en venant ici com­bien ay-je trouvé de gens qui me l'ont dit ! Le peuple ne parle d'autre chofe. Enfin s'il hiy faut un exemple, n'a-t-il pas fon frère, ne le voit-il pas appliqué à fes affaires, fe tenir à la campagne, épargner 8c vivre avec frugali­té ? On ne luy a jamais rien vu faire de tem-blable. Quand je dis cela contre Efchinus, je prétends le dire contre vous, Micion , c'eft vous qui fouffrez qu'il fe débauche. ,

M I C I O N . Je ne trouve rien de fi injufte qu'un hom­

me qui n'a nulle expérience du monde, il s'i-magine toujours qu'il n'y a rien de bien-fait que ce qu'il fait luy-mefine.

D E M E A. Qu'eft-ce que-cela veut dire ?

M I C I O N . • Ceft que vous prenez cela de travers ,

Demea : croyez-moy, ce n'eftpasun fi grand crime à un jeune homme d'avoir des Mai-ftrefles , ny d'aller au Cabaret ; ce n'en eft pas un, vous dis-je, ny d'enfoncer une por­te". Si nous n'en avons pas fait autant, vous 8c moy, c'eft que noftre peu de bien ne nous l'a pas permis, 8c aujourd'hui- vous vou­lez vous faire un grand mérite d'une chofe que vous n'avez faite que malgré vous. Cela eft injufte j car fi nous avions eu de quoy,

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i 7 o A D E L P H I. Tasertmus : epr tu illum tuum, fi efieshomft

Sineres nuncfacere, dum peratatem lictt,

Totius quam, ubi te expectatum ejtcijfet fi­nis,

30. Alienioreetatepofi fiteeret tamen.

D E M E A.

Tro Jupittr, tu me home udigit adinfanim.

Non efi fiagitium fiuere hic adolefcentulum t

M I C I O. )

ah, Aufculttt, ne me obtundas de hae re fa>

fius, Tuumfilium dedifii adoptandum mihi,

3J-. Ismeus efifoetus:fi quidpeccat, Demi»',

Mihi peccat, ego Mi mastumam part m fi-ram.

Opfonat t potat ? oletungutnta t de meo.

Amat t dabitur àmeargentum, ubi eritcçtn-modum ;

Ubi non erit, fort a fie exdudetur foras.

40. Tores efiregit t refiituentur. difeidit

Veftem ! refarcietur. efi, Diisgratia,

Et unie kee fiant, éradhuc non moleftafunt.

Fofiremb aut défini, aut cedo quemvis arb\-trum :

Teplura in banc rem peccare ofiendam.

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L E S A D E L P H E S . i7i nous aurions fait comme les autres, & fi vous citiez un homme raifonnable, vous fouffri-riez que ce fik qui eft chez vous, & dont vous dites tant de merveilles, fe divertit aufli pendant que l'âge où il eft le luy permet, plûtoft que de l'obliger d'attendre qu'il vous ait enfin fait porter à voftre dernier gifte, après avoir long-temps fouhaité ce moment. Alors tous ces plaifirs feront pour luy beau­coup plus hors de taiion, 2c il ne lailfcra pas de les prendre.

D E M E A. Oh, Jupiter», vous me feriez"devenir fou!

ce n'eft pas un crime à un jeune homme de faire toutes ces chofes?

M I C I O N.

Ah ! écoutezj ne me rompez pas davanta­ge la tefte ; vous m'avez donné voftre fils à adopter, il eft donc à moy ; s'il fait quelque fonde, c'eft fur mon compte, c'eft moy qui en porteray la plus grande partie. Il fait de la dépente, il va au Cabaret, ilfeparfume, c'eft de mon bien. Il a des Maiftrefles, je luy don­nerai de l'argent pendant que je le pourrai, & lors que je ne le pourrai plus, peut-eftre qu'elles- le chafleront. Il a brife' une porte, on la fera refaire ; il a déchiré des habits, on lesracommodera. Nous avons, grâces aux Dieux , dequoy fournir à cette dépenfe , & jufqu'ici tout cela ne m'a pas chagriné. En­fin], ou ceflez toutes ces plaintes, ou pre­nons tel arbitre que vous voudrez, 8c je vous feray voir que vous prenez tout à fait mal cet­te affaire.

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i7t A D E L P H I.

D E M E A.

hei miki. 4f. Tater ejfedifceabillis, quivtrefciunt.

M 1 C 1 O. • Katura tu illipateres, confiliis ego.

D E M E A. luri confulis quidquam t

M I C 1 O. ah ,,fipergis, abiero,

D E M E A. Siccine agis î

M I C I O. an ego tôt tes de eadem rt

audiam t D E M E A.

Cure, efi mihi. MIC I O.

ek> mihi cura efi ; verum i Demea, ' ,

j-o. Curemus tquasn uterque partem : tu iilte? rum,

Ego item alterum > nam ambos curare , prope-modum

Repofcere illum eft, quem dedifti.

DEMEA. ah, Micio.

M I C I O. Mihi fie videtur.

DEMEA. quid iftbuc ? tibifiifihuc

{lacet, DE-

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r L E S A D E L P H E S. iy»j

D E M E A. Mon Dieu, apprenez à eftre père, de ceux

qui le font véritablement. M I C I O N.

Vous eftes fon père par la nai fiance. Maïs moy je le fuis par l'éducation & par las con-feils que je luy donne.

D E M E A. . Vous, des confeils ? vous luy en donnez de

bons vrayment. M I C I O N-

Ah, fi vous continuez, je m'en vais. D E M F. A.

Eft-ce ainfi que vous en ufez ? M I C I O N.

'Faut-il donc aufll vous entendre toujours dire la mefme chofe ?

D E M E A. . C'efc qu'il me tient fort au coeur.

M I C I O N.

Et à moy aufll il me tient fort au coeur. Mais enfin, mon frère, je vous prie que nous partagions vous & moy l'éducation de nos enfans, ayez foin de l'un, j'auray foin de l'au­tre. Car de vouloir les conduire tous deux , o'eftàpeu prés me redemander celuy que vous m'avez donné.

D E M E A. Ah, Micion ! *

M I C I O N. Ceft-là mon fontiment.

D E M Ê A. Eh bien, vous le voulez donc ainfi ? qu'il

dépenfe, qu'il perde tout, qu'il perifle, cela Tome 11. N

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»74 A D E L P H I. Profuniat, perdat, pereat, nihil ai meatti-

net. Jamfiverbumunumpofthac..,

M I C I O.

rutfiem, Demea. Irafctret

DEMEA.

an non crédit ? repeton' auem eleiii

JEgretft. alientes nonfitm. fiobfto... hem.itft-no.

Vnum "vit eurent : euro : tjr eft Diit gratit, Quorn ita, utvolo, eft. ifte tuus ipfefentiet

<S'o. Eofteriui...noio inillumgravius dictrt.

A C T U S PRIMUS. S C E N A III.

M I C I O.

N Ec nihil, nequeomnia hacfunt, qutiieit, tamen

Htnnihil mole/la hoc fient mihi : fei oftenit-« , *

Me agrè pati, iïïi nolui. nam ita eft homo: Cumplaco, avorforfedulo, &deterreo,

g. Tamen humant vix patitur : verumft au-geam,

Aut ettam aijutor fim ejut iracundu,

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L E S A D E L P H E S. i 7 f ne me regarde point. Si j'en dis jamais un fculmot...

M I C I O N. Vous mettez-vous encore en colère ?

D E M E A. En doutez-vous ? Quoy c'eft vous re­

demander celuy que je vous ay donné ? Ce­la m'eft fort ienfible ; je ne fuis pas un Ecran-fer i cependant fi je m'y oppofe plus, que je...

lais je n'en veux plus parler. Vous voulez que je ne me mêle que de la conduite d'un feul, je le feray, 8t je rends grâces aux Dieux de ce qu'il eft comme je le demande. Voftre bon fils fentira à quelque heure ce q u j . . .

Je ne veux rien dire de plus fort contre uy.

A C T E PREMIER.

S C Ë N E III.

• M I C I O N.

CE qu'il vient de dire n'eft pas vray en tout, il en eft pourtant quelque chofe, & cela

me chagrine en quelque façon j mais je n'ay pas voulu luy en faire rien connoiftre, car c'eft un homme bafti de manière que fi je veux l'appaifer, il faut que je luy refifte de toute ma force, 8c que je crie plus haut que luy ; encore a-t-il bien de la peine à fe rete­nir ; mais Ci j'aidois à le mettre en colère, 8c fi je l'échaufois tant foit peu, il y aurait en

N ij

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*7<5 A D E L P H I. Infaniamprofeéiocum.fUo. etfiJEfchinus Hennullam in bac re nobu fait injuriât». fiHuum hic non amavitmeretricem, autcuioon

dédit \fi. Aliquid î. Eoftremi nufer ( credo jam om­

nium Tedebat ) dixit vette uxoretn ducere. Sferabam jam defervijje adolefientiam * Gnudebam. eue nutem de integro : ni fi, quid-

quidefi, Volofiire , atqut hominem convenir t fi afui

for urne fi.

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r L E S A D E L P H E S. irf

vérité dequoy nous faire devenir fous l'un 8t l'autre. Il eft pourtant certain qu'Ëfcbinus me fait uneeipece d'injure en cette occaubns quels attachemens n'a-t-il point eus icy ? à quelle femme n'a-t-il point fait des preièns ) Enfin il y a quelques jours qu'il me dit qu'il fe vouloit marier, je crûs d'abord qu'ilcom-mençoit à fe lafTer de toutes ces créatures, 8c j'efperois que tout le grand feudefa jeunefle eftoit pafle ; j'eftois ravi, 8c voici encore une nouvelle équipée. Mais je veux favoir ce que c'en, 8c aller à la place chercher mou hom­me.

Nii)

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i 7 8 A D E L P H I. :i ACTUS SECUNDUS.

S C E N A I.

S A N N I O, M S C H I N U S,

TIB1CIKA, PARMENO.

S A N N I O.

O Bfecro, populares, forte mifero, atque inné-centi (tuxilium:

Suèvenite inopi. . JE S C H I X U S.

otiofi nuncjttm illico hic confifte.

@>uid rejhetTïu ? nihil pericli efi Munquam, dumegoadero, hic te

1/mget. .S A N ET I O:

ego iftam invit? omnibus. M S C H I N U S.

K. Jguanquameft fcelefius, non committet hodur unquttm iterum ut vapulet.

S A N N I O. Audi, Ai/chine, ne ignarumfuijjfe te dictes mtx~

rum meûm, Egolenofum.

Ai S C H I N U S. feie*

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L E S A D E L P H E S. 176

ACTE SECOND. SCENE I.

S A N N I O N , E S C H I N U S ,

LA JOUEUSE D'INSTRUMENS,

P A R M E N O N.

S A N N I O N .

AL'aide, mes Concitoyens, fecourez je vous prie un miferable qu'on outrage injufte-

ment , donnez main-forte à un mal-heureux qui n'a nul appuy.

E S C H I N U S à la fille qu'il a enlevée

Prefentement tiens-toy là fans crainte ; que regardes-tu ? tu n'as rien à appréhender , pendant que je feray icy il ne te touchera pas, fur ma parole-

S A N N I O N . Moy ? malgré tout le monde je vais la...'

E S C H I N U S . Quelque méchant qu'il. foit, il y fingera

plus a'unefiis., Se il.nes'expofera pas davantage à élire batu.

S A N N I O N . Ecoutez, je vous prie, afin que vous n'en

prétendiez caufe d'ignorance, je fuis Mar­chand d'Efclaves, au moins.

E S C H I N U S . Je lefay.

N iiij

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a*« A D EX P H I . S A N N I O.

atita, ut ufquamfuit fide quifquam optuma.

Tu quod te pofierites purges, nolle hanc injuriant rnihi

Eacram.effs, hujus ndnfaciam. credehoc, ege mtum jus ftrfequar :

10. Nequetuvtrbisfolvesunquam, quodrernihi malefeceris.

Novi ego veftra hoc : NoUemfabtum : Dabi-tur jusjurandum, efje te

Indignum injuria hoc ; indignis eut» tgomtt fit» acceptas modk.

JE S C H I N U S. Abi prafirenul, ac fores aperi.

S A N N I O. c&terum hoc nihilfacis.

JE S C H I NU S. I intrb nunc jam-

S A N N I O. at enim nonfinam.

JE S C H I NU S. accède illuc, Parmenoj

if. Nimium abiifti ifthoc, hicpropterhunaaffifte. hem, jicvolo.

Cave nunc jam oculos a mets oculis quoquam demoveas tuos,

• Nemorajît, fiinnuerim, quinpugnuf continua in mala hareat.

S A N N I O. • Jfihucvoloergoipfumexperiri. m

JE S C H I N U S. hem ferva- omitte mulit-

rit».

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L E S . A D E L P H E S. »8i S A M N I O N.

Et homme de parole, s'il en fut jamais. Ne TOUS imaginez-pas que je prenne pour argent comptant, quand après que vous m'aurez mal­traité, vous viendrez vous excufer, & me dire que vous en elles fâché ; je ne m'en foucie-ray non plus que de rien, ibyez-en bien allu­re. - Je vous pourfuivray en Juftice, & vous ne reparerez point par des paroles une injure que vous m'aurez faite effectivement. Jecon-nois toutes vos défaites ; je fuis tres-marrî que cela foit arrivé, je fuis preft à jurer que vous ne méritiez pas ce mauvais traitement. Cependant j'auray elle traité de la manière du monde la plus indigne.

E S C H I N U S. Parmenon, cours devant & ouvre la porte.

S A N N I O N. Tout cela eft inutile , je ne le fouffriray

pas. E S C H I N U S khfiUt.

Entre prefentement. S A N N I OsjN, \ .

Mais je ne le fouffriray pas*eous dis-}*. \ \ E S C H I N U S .

Approche un peu de ce cofté-là, Parmenon, je vois bien que tu t'es trop éloigné de ce co­quin , mets-toy prés deluy ; bon, te voilà bien. Prefentement prends garde de ne pas détour­ner tes yeux de delTus les miens, afin que tu ibis toujours preft à luy enfoncer les mâchoi­res au premier ligne quejeteferay.

S A N N I O N. Je voudrois bien le voir, vrayment.

E S C H I N U S . Hola, Parmenon , prends garde. Far-

N v

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xtx A D E L P H E

ùfaeinn' indignum '.. JE s a H i m v s.

geminubit,. nifi cuves. S AN NI O.

heimifiro mihii-M S C HI N U S.

>o. Non innueram, verum in iftam purtem pe~-tiuspeccato tamen :.

Inuncjam. S A N N L O»

quià hoc rei efi t regnur» ne, JEfchine, hictupojjides ?

MSCBINUS. Si pojjiderem, ornât us ejfes ex mit virtutibusi

S A N N 1 O. ®)uid tibi rei mecumeft t

JESÇBINUS. nihil.

S A N N I O. quid i noftin' qui Jim l

M S C H 1' N U S. non dtjfdtrtl

S A N N I O, Tetigin'tuiquidquaml

M SC H I N US. Ji attigiffes, ferres infortui

uium. S A N N I O.

xf. fjhtîtibi mugis licet tneum haltère, pro eut, ego urgentum dedi l

RejJonJe.

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L E S A D E L P H E S. z8j mtnon donne en mefme temps unfouflet à San­ction fans rien dire, rj> Efchinus continue. Laifle cette fille , Faquin.

S A N N I O N . Oh, quelle indignité!

E S C H I N U S . U redoublera, fi tu continues.

S A N N I O N. Que je fuis malheureux !

E S C H I N U S à Varmenon, Je ne t'avois^pas fait ligne de le batre, mai*

3 vaut mieux pécher de ce cofté-là. Va-t-ea prefentement avec ton fouflet, Sannion. *

S A N N I O N. Qu|èft-cedonc.quecela, Efchinus, eftes-vous

icy le Roy ? E S C H I N U S .

Si je l'eftois, tu ferois traité félon tes me, rîtes.

S A N N I O N . Qu'avez-vous a démefler avec moy ?

E S C H I N U S . Rien du tout.

S A N N I O N . Comment ? me connoifiez-vous ?

E S C H I N U S . Je n'ay nulle envie de te connoiftfe;.

S A N N I O N . Ay-je quelque ehofe du voftre ?

E S C H I N U S . Si cela eftoit, tu n'en ferois pas quitte à fi

bon marché. S A N N I O N .

Pourquoy vous eft-il plus permis de m'en-iever mon Efclave qui me coûte mon bonar-, gent ? répondez.

N. vj

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a8+ A D E L P H E .

JE S C H I S U S.

ante odes nonfecijfe erit meliu' hic «»•' vicium :

Nam fi moleftus ptrgis ejfe, jam mtrb abri' piere.-atqueibi

' Vfqae ad ntctm oferiere loris.

S A N N I O. loris liber 4

' # JE S C H I N U S. fie erit.

S A N N I O. O hominem impurum ! hiccine libertatetH

niant aquamejfe omnibus s

JE S C H I N U S. 30. Sifatisjam Jebacchattts es, leno, audi fi

vis nunc jam. ^ S A H N 1 O.

Xgon' iebacchatus fitm autem, an tu in rat t

Aï C H I N U S. mit te ifta,atqueadrem redi.

S A N N I O. Sjanm rem ! qui redeam ?

JE S C H I N U S. jamne me vis dicere quoi ai

te attinet ? S A N N I O.

Cupio, aqui modb aliquid. JE S C H I N U S.

vah-, leno iraqien mette» vbltloqui.

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L E S A D E L P H E S. t 8 /

E S C H I N U S. • Il te fera plus avantageux de ne faire point

tant de vacarme devant cette maifon, car fi tu continues à me chagriner, je vais tout à l'heu­re te faire emporter au logis, où je te feray donner mille coups d'eftrivieres.

S A N N I O N. Des coups d'eftrivieres à un homme libre ?

E S C H I N U S. Cela fera comme je te le dis.

S A N N I O N. Oh le méchant homme ! Eft-ce donc là ce

qu'on dit, qu'icy les loix font faites pour tout le monde ?

E S C H I N U S. Oça, il tu as aflez fait l'enragé, écoute fi tu

veux prefentement. S A N N I O N.

Eft-ce donc moy qui ay fait l'enragé ? n'eft-ce pas plûtoft vous qui l'avez fait a mes dé­pens?

E S C H I N U S. Ne parle plus de tout cela, & viens au fait,

S A N N I O N . A quel fait?

E S C H I N U S. Veux-tu donc me laifler parler pour tes af­

faires ? " S A N N I O N .

Je ne demande pas mieux i pourvu que ce que vous direz foit jufte.

E S C H I N U S. Oh , vraiment nous y voicy , un faquin de

Marchand d'Efclaves ne veut pas que je dife rien qui ne foit jufte 1

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\S6 A D E L P H t

S A H N 1 O. Lena fitm > fateor, pernicies communts ado-

lefcentium , ZfPerjurus, pefiit : tamen tibi à nu nuU» ejt

»rta injuria. 'M SC H l NU S»

fbam hercle ttiam hoc refiat. S A N JH I O.

Mue, quafo, redi, quoeoepifii, JEfchint.

AïSCHlNUS. Idinit viginti tu iUam «mifii, mut res tibi

vortat maie: jlrgenti tantum dabitur.

S A N D7 I O. quid, fi ego iUam noie venant*

Coget m* 1 M S C H I HU &.

minime. S A n. NX O»

atque id metui. MSCH11HVS.

ntqu* vendundam cenfio ,-\*o Jf>«<e libéra efi : nam ego illam libérait affera

caufa manu. Hune -vide utrumvii, argtntum accipere, a»

caufam médit ari tuam. Délibéra hoc, dum ego redeo, Une.

%\

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L E S A DELPHES, i3>

S A N N I O N. Te l'avoue» je fuis Marchand d'Efclaves, la

niuie commune des jeunes gens» un parjure, làue pefte publique s avec tout cela je ne vous ayfait aucun tort.

E S C H I N U S . D netemanqueroitque cela.

S A N N I O N. Revenons, je vous prie, à ce que vous aviez

commencé. E S C H I N U S . + • » *

Tu as acheté cette fille * foixahte piftoles, vm& ce qui puifle te porter malheur! On te rendra'*"'***' ton argent.

S A N N I ON. » Quoy ? & fi je ne veux pas la vendre» moy»

m'y contraindrez-vous? E S C H I N U S .

Ho, point du tout. S A N N I O N.

C'eft pourtant ce quej'apprehendois. E S C H I N U S .

Je t'apprens mefine qu'elle ne peut eftre ven» due, car elle eft libre, Se jelafoûtiens telle. Tu n'as donc qu'à voir fi tu veux de l'argent,. ou fi tu aimes mieux fonger à denendre ta cauic. Penfes-y pendant que je vais là-dedans.

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iSS A D E L P H I.

ACTUS S E C U N D U S . S C E N A I I .

S A N N I O.

X Ro/ufreme Jupiter ! Minime mirer, qui infanire» occipiunt ex ht'

juria. Homo me eripuit, verberavit: meinvïtoab-

duxit meam : Homini mifero plus quingentos colafbos infre-

git mihi. Oè malefatta bac ttmtiiem emtam poftulat

fibitradier. j , Verum enim, qutmdo bent fromeruit, pat:

fuum jus poftulat. Agejam cupio, mode fi argentumreddat. fed

ego bac barioler. Vbi me dixero dore t/mti, teftesfaciet illico, Vendidijfe me, de argent o/omnium: Mox,cras

redi. " Id quoquepojfumferre, fi modo reddat : quart'

quaminjuriumeft. 10. Verum cogito id, quoi res eft. quando eum

qutftum occeperis, Accipienda & mujfitanda injuria adolefcen*

tium eft. Sed nemo iabit : fruftra egomet mecum bas

rationes futo.

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L E S A D E L P H i S . *8$

ACTE S E C O N D . S C E N E II.

S A N N I O N.,

GRand Jupiter! je ne m'étonne plus qu'il' y ait des gens que les injuftices faflent

devenir fous ! fi m'a fait iprtir par force de" mamaifon, il m'a batu, il m!a donné plus de cinq cens coups de poing dans les mâ­choires i il a emmené mon Efclave malgré moy i & pour tous ces outrages , il de­mande que je luy donne cette fille pour ce qu'elle m'a coûté. En vérité je luy aytrop d'o­bligation pour luy rienrefufers il a raiibn, Se il ne demande que ce qui eft juftev A- la bonne heure, je veux bien le fàtisfaire i pour­vu qu'il me rende mon argent ; mais je me re­pais icy de fumée, fi-toft que je luyauray dit que je veux bien luy donner cette Efclave pour ce qu'elle me courte, d'abord il prendra des témoins comme je la luy ay vendue, 8ç pour ce qui eft de l'argent, bagatelles, Une s'en parlera plus ; on vous payera tantoft ; re­venez demain. Encore prendroit-on patience, •pourvu qu'à la fin on fuft payé, quoy que ce foit là une fort grande injuftice. Mais voicy une chofe qui eft très-véritable, c'eft que lors qu'une fois on a commencé à faire le meftier que je fais, on doit fe refoudre à tout fouffrir des jeunes gens fans rien dire. Perforine ne me payera, je compte icy fans mon hofte.

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»po A D E L P H I .

ACTUS SECUNDUS. S C E N A* III.

S Y RU S, S A N N I O.

S Y RU S.

T Act, tgomtt cetrveniamjam ipfum. Cupide accipiat jam faxo: at que et tour

Ben* dicat fecum èjfe altum. JQuid ifihue Sannio, eft, qttodtt audio

Cm» her* nejcio quid conctrtajfe t

SANNIO. nunquam vidimiquiut- •

ConcertAtiontm comparatam, quant ht* hod'm mter nos fuit.

f. Ego vapulando, Ole verèerando, ufqueamb* dtfejfifumus.

S Y RU S. Tua culpa»

SANNIO. quid agerem i •

S Y RU S. adolefcentimoremgeftum op*r~

tuit. SANNIO.

Jjhtipotui melius ? qui hodit ufqtltos prtbuh

... 'S Y RU S. agt >.fc'ïs quid loquart

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L E S A D E L P H E S . 10»

A C T E S E C O N D . S C E N E III.

S Y R U S , S A N N I O N .

S Y R U S . * VJ^r'

TAifez-vous, je vais moy-mefme tout à r l'heure le trouver, 8cjeferay fi bien qu'il J. ,"

recevra cet argent avec bien de la joye, 8c , • qu'il dira qu'on en a fort bien ufé avec luy. * Qu'eft ce donc que eecy, Sannion , & qu'en-tens-je dire/de je ne lày quel combat entre mon Maifire 8c toy ?

S A N N I O N . Te n'ay de ma vie vu un combat plus inéV

gai, nous nous lommes tariez tous deux à n'en pouvoir plus, luy de mebatre, &t moy d'é­lire batu.

S , Y R U*S. C'eft ta faute.

S A N N I O N . Qu'aurois-je pu faire ?

S Y R U S . Il faloit avoir de la complaifance pour un

jeune homme. S A N N I O N .

Que pouvois-je mieux faire que de luy ten­dre la joue tant qu'il luy a plût '

S Y R U S . Oça , iàis-tu bien ce que j'ay à te dire?

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nçp. . A D E L P H E Recuniam in loco neglegert, maxumumjnttr»

dum eft lucrum. S A N N I O.

huil S Y R U S.

Metuifti, finunc de tue jure concefpjfts pau* lulum, __

10. Atqueadolefcenti ejfes morigeratus, hominum homo ftultiffime,

lie non tibi ifthuc fotneraret, t

S A N N : e.

ego fpem prêtio non tmo.-

s r RU s. * Nunquam rem faciès, obi. nefeit intfcare ht»

mines, Sannio. S A U N I 0.

Credo ifthuc: melimejft:. verum ego nunquam adeb-a/lutus fui,-

Jgjsin, quidquidpojfem, maUem auferre pc tins m prlftntia.

SiC R US.

if. Agt, novi tuum animum. quafi quidquam tibifint viginti min*,

Dum buic obfequare: prêterez autem te aiunt froficifci Cyprum.

SANNIO. • ' • • • H , h e m !

S-Y RU S. Co'èmifjthinc, qu* illuc veheres, multa : ha»

vem conduclam : hoc fcio, Animustibi pendet: ubi ittinc, fpero rtdierki

attamen hoc âges.

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L E S A D E L P H E S. aoj •C'eft fouvent un grand gain que de lavoir me-priferlegain à propos.

S A N N I O N. Ho . ho!

S Y R U S. As-tu eu peur, impertinent que tues, que

fi tu curies relâché un peu de tes droits, Se que tueufïesfaitplaifir à ce jeune homme, ce-lame t'eufi pas elle rendu au double ?

S A N N I O N. Je n'acheté pas l'efperance à deniers comp-

tans. Î Y R U S .

Tu ne feras jamais rien; va, tu ne fais pas enjôler les gens, Sarrnion.

S A N N I O N. Je croy qu'il feroitmieux d'en ufer comme

tu dis, mais je n'y ay jamais entendu tant de finefle, que je n'aye toujours mieux aimé eftre payé fur le champ & perdre, que d'at­tendre 8c gagner beaucoup. •

S Y R U S. Va, va, Sannion, je connois tagenerofitéj

comme fi * foixantepiftolest'eftoient quelque * vingt chofe pour obliger mon Maiftre. D'ailleurs mines. on dit que tu es fur le point de partir pour Cypre.

S A N N I O N . Ohl

S Y R U S. Et que tu as acheté icy bien des chofes pou*

y porter i que tu as loiie un Vaifleau.- cela te tientl'efprit en fufpens, je le voy bien, mais à ton retour, s il plaift aux Dieux* nous ter­minerons cette affaire.

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*94 A D E L Î H L 5 A N N I O.

« Nufquam pedem. périt hercle! hoc iliifpe hoc

incepermt. S r RUS.

timet: 10. Injeci fcrupulum homini.

S A N N I O. _ ,

o ficeler a! illudvide, Utinipfio articula opprefipt ! emumulicres

' Complûtes, & item Une alia, que porto Cj-prum.

Ni eb ad mercatum venio, damnum maxi­mum eft.

Nunc fi hoc omitto, ubi illinc rtditro, attum agam.

zc. Nihileft, refrixeritres. Nunc demum vents i Cttr pajjtts l ubi eras ! ut fit fatiusperdere, fifiheam àut hic nunc manere tam diu , aut

tumperfequi. S T RU S.

Jamne enumerafti id quod ad te rediturunt putesî *•

S A N N I O. Hoccine illo dignum eft ? hoccine incipere JEfi-

chinum t jo. ter opprejftonem ut hanc mi eriperepçftultt t

S Y R U S.

Labaficit. untem hoc habeo, vide fi fatis• pla­cée

Totius, quant venias in periemm » Sanrtio » Serve/ne, an perdat totum, dividuum fiact*

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L E S A D E L P H E S. ao* S A N N I O N .

Mov ? je ne bouge d'icy. Me voilà perdu! c'cft fur cette elperance qu'ils ont tramé cette friponeric.

S Y R U S-Il a peur, je luy ay mis la puce à l'oreille.

S A N N I O N . Oh, les méchantes gens ! voyez comme il

s'eft bien fervi de l'occafîon ! 11 eft vray.j'ay acheté plufieurs Femmes, & beaucoup d'au­tres chofes pour porter en Cypre , fi je man­que la Foire, je Feray une très-grande perte ; & fi je4aifîe icy cette dette, quand je feray revenu, le temps fera pafte, il n'y aura plus de remède, la chofe fera trop vieille. Quoy, vous vous-avifez prefentemcnt de venir, me dira-t-on ? pourquoy avez vous-fbuffert qu'on vous deuft fi long-temps ? où eftiez-vous ? De forte que tout bien compté, il m'eft plus avan­tageux de perdre cette fomme que de demeu­rer icy davantage pour me faire payer, ou que d'attendre mefme à pourfuivre ce paye­ment quand je feray de retour.

S Y R U S. As-tu enfin fupputé le gain qui te reviendra

de toutes tes marchandifes ? S A N N I O N .

Eft-ce là une action digne d'Efchinus ? un. homme comme luy devroit-il entreprendre de m'enlever ainfi par force cette fille ?

S- Y R U S. Le voilà bien ébranlé. Je n'ay qu'une chofe

à te dire, voy fi elle te plaift. Mon pauvre Sannion, plûtoft que d'eftre dans l'incertitu­de fi tu retireras ton argent, ou fi tu per­dras tout , contente-«oy de la moitié , il

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ttyS A D E L P H I . Minas decemcorradet alicunde.

S A N N l O. hei mihi,

3J*. Etiamde forte nunc vente in dubium mifir. Pudet nihil: omnes dentés labefecit mihi. Pratereà solaphis tuber *ft tetum caput. Etiam infupet defraudet! nu/quant abeo.

S X RUS. ut lubtt.

Nunquid vis, quinabeamt S A N N I O. .

• imo hercle hoc quafo, Syre ~, 40. Utut bac funt fait a, potius quamlitet fi-

quar, Meum mihi reddat, faltem quanti tmt a eft.

Syre , Scio te non ufum antehac amicitia mea : Memorem me dises effe, & gratum.

S r R U S. feduU

Saciam.fed Cttjphonem video, htm tft t\y. De arnica.

S A N N I O. quid quedteorot

S X R U S. paulifper marte.

tirera

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L E S A D E L P H ' E S . i91 tirera trente pifloles de quelque endroit.

S A N N I O N. Ah , malheureux que je fuis ! quoy , me

voilà en danger de perdre mefine le principal? n'a-t-il point de honte? il m'a cafte les dents, il m'a fait de grofles boues à la telle à force de eoups, & fur tout cela il veut encore avoir mon bien. Je ne vais nulle part^

S Y R U S . •Comme il te plaira. N'as-tu rien davantage

à me dire ? Je m'en vais. S A N N I O N.

Eh, mon. pauvre Syrus, de quelque ma­nière que la chofe fe foit pafiee, plutoft que d'avoir un procez, je tepr ie , qu'ilmerende au moins ce que j'ay débourfé pour cette E t çlave. Jefay bien que jufqu'icy tu n'as point eu de preuves de monamitié; maisàl'avenir tu avoueras aflurément que je n'oublie pas les fervices qu'on me rend, 8c que je ne manque pas de reconnoifiance.'

S Y R U S . J'y travailleray tout dé bon. Mais je voy

Ctefiphon, il eft fort gay d'avoir fa Maîtrefie. S A N N I O N .

Eh bien, feras-tu ce que je te demande ? S Y R U S .

Attends icy un moment.

Tome II.

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a98 A D E L P H I.

A C U S SECUNDUS. S C E K A IV.

CTESIPqp, STRUS, SANXIO.

C T E S I P H O.

ABs auivls homme, cum efi opus, beneficium accipere gauieas :

Verum enimvtro id demumjuyat, fi, qu'.m &auom efi facere, isbenefacit.

Ofrater, frater, tjuid ego nutte te tandem ! fatis cerio fcio,

Nunquam itq magnifiée auUauctm dicam , id virtus ttuïn fuperet tua ;

f. Itaaue unqm hanc rem me h abere protêt altos pr&cïpuam arbitrer,

Eratrem homini nttnini tffe primarum artium magi'principem.

STRUS. O Cttfipho.

CTESIEHO. S Syre, JEfchinus , ubi efi t

STRUS. ellum, ttexpettatdomi.

CTESIEHO. hem!

STRUS. Jguideft?

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L E S A D E L P H E S. * Q »

A C T E S E C O N D . S C E N E IV.

C T E S I P H O N , SYRUS, S A N N I O N .

C T E S I P H O N .

DE quelque part que vienne un bienfait dans une occafion prenante, cela fait tou­

jours plaifir j mais en vérité le plaifireft dou­ble, lors qu'on le reçoit de ceux de qui. on de-voit l'attendre raisonnablement. Oh, mon frè­r e , mon cher frère! de quelle manièrepuis-je méprendre à vous loiier? je fay tres-biea que tout ce que je pourrois dire de vous, feroit toujours fort au deûbus de ce que vous méri­t e z ; 8c je fuis perfuadé que le feul avantage que j 'ay fur tous les autres hommes, c'eft cravoir un frère comme vous qui pofledez au plus haut degré toutes les quantez euentielles a un honneite homme-

S Y R U S . H o , Monfieur.

C T E S I P H O N . Ha, Syrus, où eft mon frère ?

S Y R U S . Le voilà qui vous attend au logis.

C T E S I P H O N . Ah!

S Y R U S . Qu'y a-t-il?

O ij

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~n 300 A D E L P H I.

CTESIEHO. quii fit ? illius opéra, Syre, nunc vive.

S X R V S. feftivum eaput !

CTESIPHO.

Omniafibi qui poftputarit effe pra met corn-modo,

10. Malediira, famam, meumamorem, &pec-catum infe tranftulit.

Nihil potefapra. Jed quidnam forts crêpait ï S X R U S.

mont, mane, ipfe exit foras.

ACTUS SECUNDUS. S C E N A V.

JESCHINUS, SJîNMO , CTESIEHO,

S * RU S.

JESCHINUS.

T T î i iUe eft facrihgus ? S A N N I O.

meri quant ? nunquidnam offert î occidi :

IJilvideo. &SCHINUS.

ebem, opportune, te ipfum quarito ; quii fit , Ctefipbol

In tuto eft omnk rts, omit te vero triftitiem tuam-

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L E S A D E L P H E S. 301 C T E S I P H O N .

Cequ'ilya, mon cher Syrus! c'eftparfon moyen que je visprefentement.

S Y R U S . C'efl un galand homme*, en vérité!

C T E S I P H O N . Il n'a compté pour rien tous lès interdis

quand il a elle quelHon de me lèrvir; il s'eft expofé aux emportemens de mon père, il a pris fur luy tout ce qu'on dira de cette action, les fuites fâcheufès de mon amour, mon cri­me ,- enfin on ne peut rien voir au monde de plus généreux. Mais qu'efl-ce? on fait du bruit à la porte.

S Y R U S . Demeurez, c'efl luy qui fort.

A ^ C T E S E C O N D . SCENE V.

ESCHINUS, SANNION, CTESIPHON,"

S Y R U S . E S C H I N U &

OU ell ce coquin ? S A N N I O N . .

Mecherche-t-il? apporte t-il quelque choie ? Jefuis mort! jenevoy rien.

E S C H I N U S . Ha , je vous trouve icy bien à propos, je

vous cherchois. Que dites-vous, mou frère î tout ell en feureté, ceffez donc d'eflre trille.

O iij -

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3o4 A D E L P H I.

C T E S I V H O.

Ego illamvero omitto , tmi te fratrem habeam qtùdem, ô mi'JEfchinel

f. O mi germane l akvtreor coran\in os te lau-dareamplius,

Die id ajjentandi mages, quant qui) habeam gratum, facereixifiumes.

JE S C Hl NU S. Age, inepte, quafs nunc mr meus tustntet•nés,

Cteftpbo ! Sed hoc mihi dolet, nos p&nejérb fiifîe, <J» p*-

neineumlocum Redijfe , ut, fi onenes cuptrent, nihU tibi pc-f-

fent auxiliarier.

C t E S I P H O. 10. Pudebnt.

JESCHINUS, ah, fiultitia eft ifthu, non pudor i tan* oi parvoiam

Hem fent tpatria! turpe dicru, Deosque/eut ijlhsscprohibeant.

C TE S IE H O. Teccavi.

JE StC H I N U S, quid ait tandem nobis Samuo i

S E R U S. jammhiseft.

JESCHINUS. Ego ad forum ibo, ut hune abfolvam* tu m~

tro-ad Hlons, Ctrftpho. S A îi H l O.

Syre, infia.

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L E S A D E L P H E S. 10* C T E S I P H O N .

Je cefle de l'errre aûflî, puiiquej'ay un frè­r e comme vous. Oh, mon cher Efchinus, oh. mon frère ? Mais je n'ofe vous loiier davanta­g e en voftre prefence, de peur que vous ne croyiez que mes louanges ne viennent plûtoft d'un efprit flateur que d'un elpritreconnoif-iânt.

E S C H I N U S. Allez, badin, comme û nous nenouscon-

noiftions que d'aUjourd'huy. Ce qui me fâche , c/eflr qu'il ne s'en eft prelque rien falu que nous n'ayons fçû voftre paûjoa trop tard,& que les chofes ne Ibient allées de manière que

Sand tout le monde auroit fouhaité de vous vir, on ne Tauroit pu pourtant.

C T E S I P H O N . î'avois honte de vous découvrir mon amour.

E S C H I N U S. Ah, cela s'appelle lottile,& non pas honte.

Quoy , pour fi peu de choie avoir penfé quit­ter Ion pais! celaefthonteux, & je prie les Dieux d'empefcher un tel malheur.

C T E S I P H O N . J'ayeutort.

E S C H I N U S. Eh bien, Syrus, que dit donc enfin San»

nion? S Y R U S .

Il n'y a rien de phisdouxprefentement. E S C H I N U S .

Je m'en vais à la place pour le payer} pour vous, mon frère, entrez & allez voir voftre Maiftrefte.

S A N N I O N. Syrus, prefie-le,jet'en prie.

O iiij

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304 A D E L P H L

S T R U S.

eamus : namque hic proférât in Cyprum*

S.A x x 1 a. netamquidem*

« j \ Quamvts etiam maneo otiofstshîc.

s r RU s. reddetur, ne tins*.

S A X X I O. At ut amne reddat.

s r R u s. • omne reddet, tacemod\,M[eque-

rehac. S A.X X I 6.

fequor. Ç T E. S I r H (X '

• Sens, heus, Sjre.

s r R u &r. hem, quid efif

CTESITHO. obfecro hercle, hominem iftum

impurijjpmum '- Suam frimum abfilvitate,, ne,fi magis irri-

tatus fiet, Aliqua. ad patrem hoc fermantt, atque eg»

tum perpétua perieraa.

S T RU S. 10. Xonfiet: bono anima es. tucumiUatemtut

obleifa intérim, Et leBulos jubé' fierni nabis , & far art co­

tera. '

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L E S A D E L P H É S . 30?

S Y R U S.

Allons , Monfieur," depefchons, car San* nion eft fort preffé de partir pour Cypre.

S A N N I O N.

Pas fi preflë, je n'ay rien à faire, j'atten-clray tant qu'on voudra.

S Y R U S.

Ne crains point , il te rendra ton argent.

S A N N I O N.

Mais au moins qu'il me le rende tout.

S Y R U S . H te le rendra fout, tay-toyfeulement, 2c

nousfuy. S A N N I O N.

Allons. C T E S P P H O N.

Hola, hola, Syrus. S Y R U S.

Ehbien, qu'ya-t-îl? " :iv

C T E S I P H O N .

Je vous prie au nom de Dieu de dépêcher au plus vite de payer ce coquin, de peur que s'il fe met encore a faire l'enragé, cela ne vienne aux oreilles de mon père, ce qui me perdroit pour jamais.

S Y R U S .

N'appréhendez rien , cela n'arrivera pas : cependant entrez au logis, 8t allez un peu en­tretenir cette belle fille. Sur tout faites mettre le couvert , 2c ayez foin que tout foit prefl j

O v

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qoê A D E L f B I . Xgpjam, tran/aiiare, convortammtàomm

cum opfonio.

CT B S I P H O.

Ita qutfo t quanio htc bimtfuccejpt > hikrm kuncfumamui diem.

1

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r* L E S A D E L P H E S. 307

fi toft que cette affaire fera terminée, je m'en reviendray bien vifte avec tout ce qu'il faut pour faire bonne chère.

C T E S I P H O N .

Je t'en prie , -Svrus j puifque tout nous a fi bien reuffi , il faut que nous parlions toute cette journée dans la jç-ye Se danslepkifir.

«

*J

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A D E L ? H L

ACTUS TERTIUS. S C E N A I.

SOSTR AT A> C A NT H A R'A.

SOS TR.A TA.

O Rfecro : mta tu nutrix, qiùd nunc fitt l CANTHARA.

quidfiet, rogatl Reite tdepol fiero. modo dolores, mta tu, et.

cipiunt primulum : Jam tune times, quafi nunquam adfiuris^

nunquam tute pepertris.

SO S TR AT A. Mifiram me, neminem habeo , fil* fumait Geta autem hic non adeft ;

f Nec quem ad obftetricem mittam , nec qui ar-cejfat Mfthinum.

CANTHARA. m Toi is quidem jam hic aderit. nam nunquam

unumintermittit diem . ^uinfemperveniat.

disait.

S O STRAT A.

film mcarum tniforiarum eftremù

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L E S A D E L P H E S. «o?

I ACTE TROISIE'ME.

S C E N E I.

S O S T R A T A, C A N T H A R A;

S O S T R A T A .

MA chère nourrice, je te prie, qu'arri-vera-t-il de ce mal ?

C A N . T H A R-A. Ce qu'U en arrivera? J'efpereen vérité que

tout ira bien. Mais les douleurs ne fontenco-, re que commencer 8c vous appréhendez com­

me fi vous ne vous eftiez jamais trouvée à au­cun accouchement, 8c que vous neuffiez ja­mais accouché vora-mefrne.

S O S T R A T A . - Malheureufè que je fuis ! je n'ay performej nous ne fommes que nous deux, Géra même n'eft pas icy, 8c je a'ay qui que ce foit pour envoyer quérir.la Sage-femme, ni pour faire avertir Eichinus.

C A N T H A R A. Pour Efchinus, il fera affurément bien-tore

icy r car il ne laifle jamais pafter un feul jour fans vous venir voir.

S O S T R A T A . t II ett ma feule confolation dans tous mes chagrins;

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3«x * A D E L P H I. H

CANTHARA. E re nota mtlius fitri haud fotuit, quam foc*

tumeft, hera: OUatum quand» vittum , quod ad ittum atti-

net fotijjîmum,' ' 10 Talem , tait génère , tait anime , natttm ex

tant a familia. SOSTRATA.

-Jta fol eft, ut dicis. falvus mets , deos qtu.fi utfiet.

A C T U S T Ê R T I U S . S C E N A IL

GETA, SOSTRATA, CANTHARA.

G E TA.

N XJnc illudeft, quod, fiomnesemniafua ami fût aconférant,

Ai que bute malt falutem qutrant, auxilii ni. bilafferant,

J^mdmibique, btraque, filiaquebtrUi eft. vu tniferemihi !

Tôt res refente circumvallant, tmde emergi non f et eft.

j Vis, egeftas, mjuftitia, filitudo, mptmia. Hoccine feclmn ! ê fcelera ! ô gênera facril

légal b hominemimfium! SOSTRATA.

Me mifiram ,' quidnqm eft , quod fie vultt timidum & froferantem Getam i

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L E S A D E L P H E S. 311 C A N T H A R A .

En vérité puifque cet accident devoit-arri­ver à voftre fille, elle ne pouvoit pas tomber en meilleures mains. Efchinus eft un jeune homme fi bien fait, fi noble, fi généreux , ta d'une famille fi riche 8c fi confiderable.

S O S T R A T A . Cela eft tres-vray, 8c je prie les Dieux de

nous le conferver.

ACTE TROISIEME.

S C E N E II. C E T A , S O S T R A T A , C A N T H A R A :

G E T A.

C 'Eft prefentement que nous fbmmesdans un état, que quand toute la terre s'afiem-

bleroit pour confulter & pour chercher du remède au malheur qui nous eft arrivé, à ma MaiftrefTe, à là fille, 8c à moy, tout cela ne nous ferait d'aucun fccours : que je fuis mifèra-ble ! mille maux font venus nous affieger tout d'un coup . fans qu'il nous refte un feul moyen de les éviter. La violence, la pauvreté, Tinjuftice, l'abaadcemement, l'infamie. Eft-il pofïible que le fiecle fbit fi corrompu ! Ah, fceleratsvah les maudites gens!ah le per-

- ' aide.. . . S O S T R A T A .

Malheureufe que je fuis ! qu'y a-t-il îd'où. vient que Geta eîr, fi troublé?8c pourquoy vieot-il avec tant dehafte?

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JI» A D E L P H I. G JE TA.

Quemnequefides, neque jusjurandum, neque ulla mifericordia

Reprejjit, neque reflexit, neque quoi part ne in-ftabatprope,

10. Cui mijera indigne per -vint vitium obtule-rat.

SOSTRATA. nonintelUg»

Satie, qualoquatur.

CANTHARA.

•propius obfecro, accedamusl Sofirata.

G ET A. ah,

Me mi ferum, vix fumcomposanimi, itaarie» iracundia.

Nihileft, quodmalim, quam totamfamiliam dari mini obviant,

Ut tram hanc in eos evomam omnem , dum egritudo hoc efl recens;

if. Satie mihiid habeamfupplicii, dum iHosul-tifcarmodo.

Seni animant primum extmgueremipfi, qui iU lud produxitfcelue :

Tum autem Syrum impulforem, vah, quitus illum lacer orem modie !

Sublimem médium arriperem, capite primum in terramftatuerem,

Ut cerebro dijfergat viam : * ao. Adolefcenti ipfi ocuios triperem, pofflhacprai

cipitem darem : Caterosruerem,agerem,raperem, tunderem,tjp

profiernerem. Sed cejfo hoc malo heram impertiriproperè î

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L E S A D E L P H E S. J ï » G E T A.

Qui n'a pu efîre retenu, ny par lafoyqu'il luy a donnée, ny par les fermens qu'il a faits , nYparlacompaflion,nypour voir fur fon ter­me cette pauvre malheureufe qu'il a désho­norée !

S O S T R A T A . Je n'entends pas allez clairement ce qu'il

dit. C A N T H A R A .

Te vous prie, approchons-nous plus pré* de luy.

G E T A. Ah, que je fuis malheureux!je ne fauroîs

me polTeder, tant je fuis tranfporté décolère! Ma plus grande pafiion feroit de rencontrer preièntement fur mon chemin tous ceux de cette maifon, pour décharger fur eux toutei ma colère, pendant qu'elle eft encore récen­te. Il n'y a rien que je ne vouluflè fouffrir , pourvu qu'il me fût permis de me vanger comme je voudrais. Premièrement j'arrache­rais le cœur au vieillard qui a donné le jour à ce monftre ; 6c pour le Scélérat de Syrusquil'a pouffe à faire cette perfidie: Ah de quelle ma­nière le mettrois-je en pièces, je le prendrais d'abord par le milieu du corps , je battrais de fa telle les pavez, afin que toute fa cervelle fût répandue dans la rué. J'arracherais le* yeux a Efchinus, après quoy je le poufferais dans quelque précipice. Pour les autres, je les jetterais par terre, je les pourfurvrois, je les traînerais, je les affbmmerois, je les foulerais aux pieds. Mais pourquoy tarder davantage à aller faire part de cette méchante nouvelle à ma Maiûreflc?

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henù

314 A D E L P H I. SOSTRATA.

revocemut. Gtta. G E T A.

fj>uifquis ts, fine me. . SOSTRATA.

. ego fum Sofirata. G E T A.

ubi eu efi! te ipfamqutritt: if. TeexpeSo. opp'tdo opportune te obtulifii mi eb-

•viam. Sera.

SOSTRATA. quid eft t quid trépidât t

G E TA. htimibi.

SOSTRATA. quid fefiinat, mi Gtt a t

Ammam reoipe. G E T A.

prorfu. SOSTRATA

quid ifihucErtrfittergoefti G ET A.

periimut, Aftum efi.

SOSTRATA. obftcro te, quid fit.

G E T A. jam.

SOSTRATA. quid jam, Getai

G E T A. JEfcb'mut.

SOSTRATA. quidergoift

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L E S A D E L P H E S . Vf S O S T R A T A .

Rappellons-le. Géta. G E T A.

He, qui que vous foyez, ne m'arreftez point.

S O S T R A T A . Ceft Softrata.

G E T A . Où eft-elle ? C'eft vous mefme que je cher-

chois, & que je Ibuhaitois tant de rencontrer} en vérité je ne pouvois vous trouver plus i proposi

S O S T R A T A . Qu'y a-t-il ? pourquoy es-tu fi troublé?

G E T A . Ah, mon Dieu!-

S O S T R A T A . Pourquoy es-tu fi fort hors d'haleine ? mon

pauvre Geta? reprends tes efprits. G E T A .

Nous fommes entièrement. S O S T R A T A .

Eh bien, entièrement quoy ? G E T A .

Entièrement perdus, c'en eftfait. S O S T R A T A .

Dy-moy, je te prie, ce qu'il y a. G E T A . •

Prefeutesnent... S O S T R A T A .

Eh bien, Geta, présentement ? G E T A .

Efchinus...

S O S T R A T A . Qu_'a fait Efchinus?

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"°-H 316 A D E L P H I.

G E T A. alienu eft ab noflra familiaZ

S O S T R A T A. htm ,'

Terii! quart? G E T A.

amare ocetpit aliam. S O S T R A T A.

va miferamihi! G E T A.

30. Neque id occulte fert. à lenone ipfus tripuit palam. • \

SOSTRATA. Satin' hoc certum ?

G ET A.

certum. hifce oculis egomtt • vidi, Sofirata.

SOSTRATA.

ah. Me miferam ! quid credas jam ? aut cui cré­

dits ? noftrumne Mfchinum, Noftramvitam omnium, inquonoftrafpes opefi

que omnesfit aérant, d^ui fine hac fur abatfi unum nunquam vi-

cturum diem, zr. JH>ui in fui gremio pofiturum puerum dicebat

patris.ita Obfecraturum, ut liceret httnc uxortm duct-

rtl

G E TA.

Sera, lacrumas mitte, ac potins quod ad haut rem opu', porroprofpice.

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L E S A D E L P H E S. 317 G E T A.

Ne fe foucie plus de nous. S O S T R A T A.

Ah, je fuis morte ! Se comment cela? G E T A.

•Depuis peu il eft devenu amoureux d'une autre.

S O S T R A T A . Quel malheur eft le mien !

G E T A. Et il ne s'en cache pas ; il l'a luy-mefme

enlevée en plein jour à un Marchand d'Efcla-ves.

S O S T R A T A . Cela eft-il bien vray ?

G E T A. Tres-vray, je l'ay vu moy-mefrne de ces

deux yeux. S O S T R A T A .

Malheureufe que je fuis ! que croire prefèn-tement, Se à qui fefier? quoy noftre Efcmnus, noftre unique reflburce , noftre vie Se noftre conlblation, fur qui nous fondions toutes nos efperances, qui eftoittout noftre bien 8t noftre feulappuy, quijuroit qu'il ne pourroit jamais vivre un feul jour fans ma fille, qui difoit que fitoft qu'elle ferait accouchée , il porterait l'enfant dans le giron de fon père, Se qu'il le conjurerait en fuite d'agréer fon mariage! Ah!

G E T A. Ma Maiftrefle, ne vous am'ufez pas à pleurer,

fongez plûtoft à ce que nous devons faire dans cette rencontre. Souffrirons-nous cet affront?

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318 A D E L P H I . • latiamurne, an narrerons cuipiam ?

CANTHARA.

au, au mi homo, fanun' es ! . An hoc proferendum tibi ufquam effe vide-

turl G BTA.

mihi quidem tsmpJacet. 40. Jamprimum, illum alieno animo ànobu ejfe,

restpfaindicat. JSunc fi hoc palam proferimus, Ole inficias ibit,

fatfcio j Tua fama, & gnata vita in dub'tum verùet.

tum, fimaxume Tateatur, cum amet aliatn, non utile banc élis

dari. Jjlnapropttn , quc-quo patio tatito efi opus.

SOSTRATA. ah, minimegentiuml

47. Nmfaciam. G E T A. quid agit !

SOSTRATA, proféram.

G JE T A. . hem; meaSofiratt,

vide qtsam rem agas. SOSTRATA.

Rejore tes loto non potit efi ejfe, qtsam in hoc, quo nuncfita efi.

Rrimum indotata efi : tum praterea , qui fi-cunda ei dos efat >

Reriit : pro virgine dari rtuptutn non pottt% hocreliquotnefi i

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L E S A D E L P H E S. ; i 9 Ou nous découvrirons-nous à quelqu'un?

C A N T H A R A . Oh ! mon'pauvre garçon, es-tu en ton boa

{èns?àquoy penfes-tu ? eft-ce que tu voudrais ifie nous allaitions publier une chofe comme celle-là?

G E T A. Je n'en fuis pas trop d'avis ; car première­

ment rien n'eft plus vray qu'il ne fe foucie plus de nous, la chofe parle d'elle-mefme , fi nous publions ce qu'il nous a fait, Une man-*-querapasdelenier, j'enfuisfûr, 8cc'eftcom-mettre voftre réputation, 8c l'honneur 8c le repos de voftrefille. De plus, quand mefme il tomheroir d'accord de tout, puifqu'il aime ailleurs, ce feroit fort mal fait de luy donner voftre fille ; c'eft pourquoy, de quelque ma­nière que la chofe tourne, il faut garder le fe-cret.

S O S T R A T A . Ah,' point du tout, je n'en feray rien.

G E T A. Que prétendez vous donc faire ?

S O S T R A T A . Je veux le dire.

G E T A. Ah.rrutbcmneMaiftrefie, &ngez-y plus d'u­

ne fois ! S O S T R A T A .

L'affaire ne peut eflre dans un état plus fâ­cheux que celuy où elle eft. Premièrement ma fille n'a point de bien, 8c elle a perdu la feule chofe qui pouvoir hjy tenir lieu de tous les biens du monde ; elle ne peut plus eftre mariée comme fille. S'il nie ce qu'il a fait , j 'ay unereflburce, l'anneau, que ma fille à de

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?io A D E L P H I. Siinficias ibit, tefiis mtcum eft annulas, quem

amiferat. go. Poftremb, quando ego confcia mîfum, à mt

culpamhancprocitlejfe, née Pretium, neque rerA ullam mterceffe Ma tout

me indignam, experiar, Geta.

G E T A.

Jîjuid iflhicî accedo,utmeliusdicas. SOSTRATA.

tu, quantum potejl, aèi, Atque Hegioni tognato hujus rem omnem nar-

ratoordine. Nam is noftro Simulo fuit fummus> & nos ce­

lait maxumi.

GETA. S g. Nambercle alius ntmo rejpicit nos.

SOSTRATA. properatu,meaCantbara;

Curre.obftetricemarcejje, ut cumopusfit,nein mora nobisfiet.

ACTUS TERTIUS. S C E N A I I I .

D E ME A , S PRUS.

T> EME A.

D Ifperii, Ctejiphonem audi-vifihum Unà ndfuijjeinraptiont cum JEfihino,

l u j

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L E S A D E L P H E S. 311 luy fera un bon témoin. Enfin, puifque je n'ay rien à me reprocher, 8c que nous ne nous fommes attiré ce malheur, ny par avarice, ny par aucun autre motif indigne d'elle ou, de moy, je veux voir ce qui en arrivera, je veuxlcpourfuivre.

G E T A. Ah, qu'allez-vous faire? je vous en prie

changez de fentiment. S O S T R A T A .

Geta, va le plus vifte que tu pourras chez Hegion, le parent de ma fille, 8c luy conte bien toute l'affaire, car il eftoit amy intime demoftre pauvre Simulus, 8c il. a toujours eu de l'afFeéfion pour nous.

G E T A . Ma foy, il n'y a que luy qui nous confé­

déré.-

S O S T R A T A . Hafte-toy ; 8c toy, ma chère Canthara.cours

chezla Sage-femme, afin qu'elle ne nous faf-fe pas attendre quand nous en aurons be-foin.

ACTE TROISIEME. S C E N E I I I .

D E M E A . S Y R U S .

S Y R U S.

J E fuis perdu ? j'ay oui dire que mon fils Ctefiphon eftoit avec Efchinus à l'enleve-

•TomcII. P

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"H J i * A D E L P H I.

Id mifero reftat mihi mali.fi illumpoteft, Jjhti alicui rei eft, ttiam eum ad nequitiem

abducere. p. Ubi ego illum quaram f credo abduBum inga-

neum Aliqub. perfitafit ille impurus, fat fcio. Sed eccum ire Syrum video, hinc fcibojam ubi

fitt. Atque hercle hic degrege illo eft:fi me fenfe~

rit Êum qutritare, nunquam dicet carnufex.

10. Nonoftendamid me veïïe. • .

ACTUS T E R T I U S. S C E N A IV.

SÏRUS.DEMEA.

S T R U S.

O Mnem rem modo Jeni, £%uo paBo haberet, tnarramu*

ordine. Kilquidquam viâi lut tus.

D E M E A. proJupiter,

Hom'misftultitiam !

s r R u s. collaudavitfilium :

p. Mihi, qui id dedijfem ccnfilium, egit gra­ttas.

D E M E A. - Difrumpor.

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L E S A D E L P H E S . : 3 i j ment de cette fille. Miferable que je fuis ! il ne me manque plus que de voir ccluy qui s'occupe à quelque choie de bon, fe laitier suf­fi entraifner à la débauche. Où le cherche-ray-je ? aflurément fon frère l'aura mené avec luy dans quelque vilain lieu. Ce perdu l'aura enfin entraîné malgré luy, j'en fuis feur. Mais voilà Syrus, je vais tout à l'heure favoir où il peut eftre. Cependant ce Maraud eft de la ban-ce , s'il s'apperçoit que je le cherche, le pen-i dard ne me le dira jamais, je ne feray fem-blant de rien.

A C T E TROISIEME.

S C I N E IV.

S Y R U S, D E M EA.

S Y R U S .

NOus avons tantoff conté à noftre bon­homme toute l'affaire d'un bout à l'au­

t r e , & de quelle manière elle s'éft paflêe/ je n'ay de ma vie rien vûdeplusgay.

D E M E A. . Oh, Iupiter ! voyez l'extravagance du per-

fonnage ? S Y R U S .

- 11 a loué fon fils , Se il m'a remercié de luy avoir donné ceconfeil.

D E M E A. •J'enrage !

P i j

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^ 4 A D E L P H I. S T R U S.

argentum adnumeravit illico : Dédit praterta in fumptum dimidium mi-

ru: îd diftributumfane eft exfintentia.

D E M E H. hem,

\ Huic mandes, fi quid reéle curâtum vtlis.

s r R u s. •% o. Hem > Demea, kaud qjpexeram te : quidagi-

turl D E M E ai.

Jëguid agatur ? voftram nequeo mirarifatk Rntionem.

S T R U S. ._•' efi hercle ineptà, ne dicam

dolo, atque Abfurda. lifiescateros purga, Dromo: Congrum iftum maxumum in aqud finito litr

dere if. Tantjjper.ubiegorediere, exoffabiturj

Prias nolo. DEMEA.

haccineflagitia ! - ' . . , * r É\U S.

mihi quidem non placent i Etclamofitpe: S al fument a hac, Stephanio. Foc macèrentur pulcrc. .

DEMEA

dti voftram fidem ! Utrum fiudione- idfibi habet, an lundi putat

io . Fore , fi perdiderit gnatum l va mtfiro mi­hi,

Vider e videorjam diem ittum, cumhinc tgens Profugiet alique militât um.

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L E S A D E L P H E S. j * f S Y R U S .

Sur l'heure mefme il nous a compté cet ar-

f ent, 8c nous a de plus donné une#piftole8c emie pour nous réjoiiir. Elle a eftébien-toft * Une

employée, ma foy, & fort à mon gré. demie D E M F. » . 'mate.

Hovrayment, fi l'on veut que quelque cho-fe fbitbien faite, on'n'a qu'à en donner le foin à cet honnefte homme-là.

5 Y R U S . • Ha, Monfieur, je ne vous a vois pas apper-

çû. Que fait-on ? D E M E A.

Ce que l'on fait? Je ne puis aflez admirer voftre manière de vivre.

S Y R U S . A n'en point mentir, elle eft fort imperti­

nente, & fort extraordinaire. Dromon, vui-de-moy tous ces poiflbns, mais pour ce Congre là, laifle-le un peu dégorger dans Peau , quand je fèray de retour on T'apprcftera j je ne •eux pas qu'on y touche plûtoft.

D E M E A. Peut-on fbufirircesdereglemens!

S Y R U S . Je ne les approuve pas non plus, 8c je crie

fouvent contre. Hola, Stephanion, ayefbin de faire bien deiTàlercespoiÛons.

D E M E A. Grands Dieux ! prend-il donc à tâche de

perdre ce fils? ou croit-il qu'il recevra de grandes louanges quand il l'aura perdu ? Que je fuis malheureux ! il me fcmble que je vois déjà le jour que ce garçon fera contraint P»r la pauvreté de s'en aller quelque part à la guerre.

P iij

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fpA- A D E L P-RI.

s r R u s. t Detnen,

jfiuc efi fapere, non quod antipodes modo efi, Viderc, fed etiam illa, qunfuturafunt,

xt. Erofpicere. D E M E AU

qu'td, ifihtcjam pênes vos p fait r ta efi t S T RU S.

Ellam intm. D E M E A.

eho, an domi efi hakiturm î S T R US.

.credo-, ut efi Dément ta.

D E M E A. hnccine fieri !

s r RU S. ineptalenitsus

fatr'ts, & facilitas pratta ! D E M É A.

fratris mequidtm Eudes, pigetque.

SX RU S. nimium inter vos, Demea ( ne

30. Non, quia ades prafens, dico hoc) pernU • mium intereft.

Tu, quantus quantus, nihïl ni fi fstpttntiaes: jL'efomnium, fiheres iiero. illumtu tuum Eacere hoc l

DEMEA.

Çnerem iUum? aut non ftxtotis men-fibus

Etius o'fecijfent, quam ille quidquam ccept-ret t

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L E S A D E L P H E S. 317

S Y R U S . Ho. Monfîeur, c'eft lace quis'appelle élire

fagc, de ne voir pas feulement ce qu'on a de­vant les yeux, mais de prévoir encore de loin ce qui doit arriver. .

D E M E A. Eh bien, cette Joueufe d'inllrumens eft

prefentementàvous? S Y R U S.

La voilà là-dedans. D E M E A .

Ho > ho, eft-ce qu'il veut l'avoir chez luy ? S Y R . U S ,

Jelecroy, tant il eft fou. D E M E A .

Cela fe peut-il? S Y R U S.

C'eft une fotte bonté de père. & une facili­té pernicieufe.

D E M E A . En vérité j'ay bien du chagrin & bien de la

honte de la conduite de mon frère. S Y R U S.

Monfîeur , il y a une grande différence de vous à luy ; ce n'eft pas parce que vous elles prefent que je le dis j vous . depuis la telle jufqu'aux pieds vous n'eftes que fagefle , & luy, rien que miferc & que pauvreté. Ceferoit vous, vraiment, qui laiflericz faire ces équi­pées à voftre fils!

D E M E A . Moy, luy laifTer faire ? & je n'aurois pas

découvert tous fes defiêins fix mois tout en­tiers avant qu'il euft oie entreprendre la moin­dre chofe ?

P iiij

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3 i8 A D E L P H E .

sr RU s. jf. Vi%i!antiam tuant tu mihi narras T

D E M E A.

ficfitt Modo y utnunceft.

S X R US. ut qui/que fuum volt ejfe > ita tft.

D E M E A. JjhiiJ eumi vidijtin'hodie t

S X R U S. tuumntfiliumt

(Abigam hune rus) jam dudum aliquid rare agere arbitrer.

D E M E A. Sati'tfcù ibi ejje ?

S X RU S. eh, quemegometproduxi.

T> E M E A. o^tumt eft.

4o- Metui, ne hareret hic. S X R US.

atque iratum admodun*. I> E M E A.

6>uid autem t SX RU S.

adortusjurgiofratrem afud forum T>e ffaltria iflhac.

D É M E A. airi verbt

S X R US. vah, nilreticuitt

Nam , ut numerabatur farte argentum > in­tervenu

~}

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L E S A D E L P H E S. 319 S Y R U S.

A qui le dites-vous ? eft-ce que je ne coa-nois pas vos foins 8c voflTe prévoyance ?

D E M E A. Pourvu qu'il fbit toujours comme il eft pre-

fentement, je n'auraypas fujet de m'en plain­dre.

S Y R U S. Ma foy, Monfieur, les en fans font ce qu'on

Veut qu'ils foient-D E M E A.

Mais à propos l'as-tu vu aujourtfhuy?" S Y R U S.

Qui, voftre fils?éAj. Je vais le chafler bien vifte. haut. Ilya long-temps qu'il eft à voftre? maiibn de campagne à faire quelque chofe.

D E M EA. Es-tu bien fur qu'il y eft?

S Y R U S. Si j'en fuis fur ? j'ay efté avec luy jufqu'à

moitié chemin. D E M E A.

Cela va le mieux du monde, je craignofc qu'il ne fuft retenu icy.

S Y R U S. Et il eftoft mefmeforten colère,

D E M E A, Comment d»nc ?

S Y R U S. Il venoit de quereller fon frère à la place ?

lur le fujet de cette Chanteufe. D E M E A,

. Dis-tu vray ? S Y R U S .

Allez, il ne luy a rien celé. Mon homme eft arrivé tout d'un coup comme on comptoit

P v

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3jo A D E L P H I . Homo de improvifo : coepit clamare, Mfchinti

tfy Htccme fiagitia facere te ? hoc te admittere Indigna génère mftro i

XXE M EA. oh, lacrumogaudio.

S Y RU S. Non tu hoc argentum perdit, fed •vitam tuant.

XX E M E A.

Salves fit ifpçro » eft fimilis major um faim -

S YR US. hùi!

D E M E A. Syre, pracepterumplenus iftorum ille.

S Y RU S.

f o Xxotmhabuit, .unde difeeret. M

XX E M E A. fit feduTor

Ndpretermitto : confitefacio : denique Injpicere , tanqunm in fpeculum > in "esta ' omnium Jubeo, atque ex aliis fument, exemplftm fin. Hoc facito..

S Y RU S. tettijan*.

• XX X ME A. hoc fugito.

tYRU S. caUidi

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L E S A D E L P H E S . i j i l'argent, il a commence' à crier : Eft-il dfjnc poflible, Efchinus, que vous fafliez de chofes fi indignes de noftre maifon ?

D E M E A. Oh .' je pleure de joye.

S Y R U S. Cen'eft pas feulement cet argent que vous

perdez , c'cft voftre repos , c'eft voftre répu­tation.

D E M E A. Que les Dieux le confervent ; j'efpere qu'il

reflèmblera à fes ayeux. S Y R U S.

Qui en doute? D E M E A.

Syrus , il eft tout plein de ces beaux précep­tes que tu luy as vu donner à fon frère.

S Y R U S. Bon, comment pourroit-il eftre autrement?

n'a-t-il pas toujours eu chez luy de qui ap­prendre ?

D E M E A.

Je fais àflurément tout ce que je puis pour le rendre honnefte homme ; je ne luy laifle rien pafler j je l'accoutume à la vertu ; en un mot je l'exhorte à confiderer la vie de chacun, à s'y regarder comme dans un miroir , & à prendre de là des exemples pour fa conduite , Faites cecy , luy dis-je..".

S Y R U S . Fort bien en vérité..

D E M E A. Evitez cela.

S Y R U S . Parfaitement.

P v j '

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3 j i A D E L P H E .

D E M E A. JIoc lundi eft.

S r RUS. ifthac reseft.

D E M E A.

S T RU S. Frobijfumi.

T) EUE A.

hoc vitio dater

porro autem... SX RU S.

non hercleotium ejf Nunc mihi aufcultandi. Fi/ces ex fententi» Naâusfum : ht mihi ne cerrumpantur cau-

tio eft. Nom id rubis tam fldgitium eft quam Ma,

Demea, tio Non fttcerevobis,, au* moda dixti:fk>x quoi

queo y Confervis ad eundem ifthunc prtcipio modum. Hocfalfum eft, hoc aduftum, hoclautum eft

parum : ïllud recrè, iterum ftc mémento. Sedulè Moneo, quapojfumpro mea fapientia.

tff Foftrema, tanquamin fpectdum, in patinasx Infpkere• jubeo, & moneo quid facto ufii fit. lnepta h*c ejfe, nos quafacimus, fentio. Yerum, quid.facias lut home eft,. ita mortm

géras. Nunquid vis I

DEMEA: menton vobis meliorem daté

S r R U S* 2© Tu rut hincaèis l

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L E S A D E L P H E S. 33* D E M E A. Q

Une telle chofe eft louable. S Y R U S.

Voilà le poinct. D E M E A.

Cette autre eft blâmée de tout le monde» S Y R U S.

Cela eft parfaitement bien pris» D E M E A»

Enfuite je.... - S Y R U S.

Ha pour l'heure, Monfieur, je n'ay pas lé temps de vous.entendre, jiay le plus beau poifion du monde, il faut que je fonge à ne lelaifierpas gafter, car c'eft une auffi grande honte pour nous de faire une faute comme celle-là, que pour vous autres de ne pas faire tout ce que vous venez de dire : & tant que je le puis, je donne ces mefines leçons a mes camarades. Cela eft trop falé. cela eft brûlé , cela n'a pas aflez trempé > voilà qui eft bien, cela, fou venez-vous de le faire de meftneune autre fois- Je leur donne tous les meilleurs avis que je puis félon ma petite capacité Si le peudegouftquefay. Enfin, Monfieur,. je les exhorte à fe mirer dans leur vaiflélle comme dans un miroir; 8c je les avertis de ce qu'ils doivent faire. Je vois fort bien que tout ce que nous faifbns eft ridicule 5 mais quel moyen ? il faut 1ervir les gens à leur mode. Nemç voulez-vous plus rien?

D E M E A. Que vous deveniezplus fages.

S Y R U S. * Pour vous, fans doute que vous vous en al­

lez aux champs tout de ce pas ?.

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JJ4 A D E L P H I . ' B E M E A;

recià. s r R u s.

nam quid tu hic agas ", XJbi, fi quidbenefractfias, netno obtemferet t

B E ME A. Egovero hinc abeo, quandois, quamobrem

hue veneram, Rus abiit. illum euro unutn, illeadmeatti-

net, Quttndo ita volt frater, de ifihoc if fi vide'

rit. ff Sedquisillicefi, quem video froculi efinehk

Hegio i Tribulis nofter ? fi fatis cerno, hercleis «/?.'•

vah, Homo amicu nobisjamindeàpuero. Bu boni, Na illiufmodi jam magna nobis civium Tenuriaefi, antiquahomovirtuteaefide.

So Haud cttomali quid ortum ex hoc fit fublici. JShtamgaudto, ubi etiam hujus generis reli'

quias Reftare video, vah! vivere etiamnunc lubet. Offeriar homimm hic, utfalutem, & ****

loquar.

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L E S A D E L P H E S . »je D E M E A.

Tout droit. S Y R U S.

Car que feriez-vous dans un lieu où , fi TOUS donnez de bons avis , perfonne ne les écoute?

D E M E A. Je m'en vais aflure'ment.pui&ueccluypour

qui j'eftois venu s'en eft retourne. Jen'ayfoii» que de celuy-là, il n'y a que luy qui me tou­che ,- puifque mon frère le veut ainfi ; qu'il fafle de l'autre comme il l'entendra. Mais qui eft cet homme que je vois là-bas ? Eft-ce là Hegion de noftre Tribu? fi j'ay de bons yeux

•' c'eft luy aflurément. Ah c'eft un de mes meil­leurs amis depuis l'enfance j grands Dieux , quelle diiètte nous avons prefentement de tels citoyens ! c'eft un homme de la vieille roche ; perfonne ne fauroit dire qu'il ait ja­mais fait la moindre chofe qui aitpûfcandali-fer le public. Que j'ay de joye quand je voy qu'il refte encore de ces bonnes gens du fiecle d'or! ah! il y encore du plaifir à vivre ; j e vais l'attendre pour le falucr, & pour m'entre-i tenir, avec luy.

<mm lOP

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x75 A D E L P H I .

ACTUS TERTIUS. S C E N A V.

BEG10, GETA, BEATE A, FAMFHILA.

H E G I O.

P tXoh Dit hnmortales , fatinus indignum i Geta, '

®uid narr/u t-GETA.

fie efi failum. H E G I O.

ex illan'familia Tarn illiber aie faeinus effe ortumlb Mfchine l Fol haud faternum ifthuc dedifti.

D EUE A.

videlicet '•f De Tfaltria hac audivit, id Mi nuncdolet

Aliéna;faterisnihilifendit, hei ntlhil Utinam hic profe adejjet alicubi, atque audi*

rethac. H E G I O.

Ni facient qua illos aquom efi, haud fie au* firent. '

GETA. In te (fes omnis, Hegio nabis fita efi:

10 Te folum habemus : tu esfatronus, tu fa* rens:

Ille tibi moriens nos comrnendavit finex. Si deferis tu, ferumus.

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L E S A D E L P H E S. 337

A C T E TROISIEME. S C E N E V.

HEGION, GETA, DEMEA, PAMPHILA.'

H E G I O N .

GRands Dieux ! voilà une action bien in-digne! Geta, que me dis-tu!

G E T A . Cela eft comme je vous le dis, Monfieur.

H E G I O N .

Que dans une famille comme celle-là on ait fait une chofe fi honteufe ! oh , Efchinus , vous n'avez pas appris cela de voftre père.

D E M E A . H a fans doute oui parler de cette Chan-

teufe , & cela le fâche quoy qu'il ne nous fait rien , & ce brave père n'en eftpoint tou­ché; ha, mon Dieu ! je voudrois bien qu'il fuft en quelque heu prés d'icy,& qu'il enten-diftcequ'onydit.

H E G I O N . S'ils ne font leur devoir en cette affaire »

ils ne s'en trouveront pas bien afiurément. G E T A .

Monfieur , nous n'avons d'efperance qu'en vous, vous eftes noftrefeulappuy, noftre dé­fendeur, noftre père; le pauvre défunt nous recommanda à vous en mourant; fi vous nous abandonnez, nous fbmmes perdus.

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« 8 A D E L P H I . H E G I O.

cave dixeris : Necfaciam, ntque me fa tu fie fojfe arbitrer.

V E M E A. Adibo. falvere Hegionemflurimum

\f. Jubto. H E G I O.

oh, te querebam iffitm : falve, Demea «. D E M E A.

6)uid autem ? H E G 1 O.

major filins tune Mfchirme, 6)uem fratri adaftandum dedifii, ntque boni,

Heque liberaliejunctue officium viri efi.

D E M E A. Qaidiftuci

H E G I O. noftrum amicum noras Simulum ; atcme

20. JEqualemî D E M E A.

quidni t H E G I O.

filiam tjus virginem Vitiavit.

D E M E A. hem!

H E G I O. marte, nondumaudifti, Dcmea,

Jjhtod eft gravifftmum. D E M E A. an quid eft etiam amfliue ! H E G I O.

Vtrb amfliue: namkocquidemferundum ali. quo modo eft :

J

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L E S A D E L P R E S . i i o H E G I O N .

Ah, ne me parle pas de cela, jeneleferay pas, 8c je ne faurois le faire en confcience.

. D E M E A. Je vais l'aborder. Je donne le bon jour à

Hegion. H E G I O N.

C'eft vous-mefme que je cherchais} bonjour, Demea.

D E M E A. Que dites-vous donc ?

H E G I O N . Voftre filsaifné, voftre Efchinus. que vous

avez donné àadopteràvoftrefrcre, a fait une action qui n'eft ni'd'un honneftehomme, ni d'un homme de condition.

D E M E A . Qu'a-t-ilfait?

H E G I O N . Connoiflez vous.Simulus, noftre ami, qui

eftoit denoftre âge? D E M E A .

Oiiy d'à. H E G I O N .

Efchinus a deshonnoré fa fille. D E M E A .

Oh, bons Dieux ! H E G I O N .

Attendez, vous n'avez pas encore entendu ce qu'il y a de plus horrible.

D E M E A . Eft-ce qu'il y a quelque chofe de plus horri­

ble que ce que vous me dites ? H E G I O N .

Oiiy aflurémenti car quelque méchante que foit cette action, elle eft pourtant excuiàble

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34» A D E L P H I. Perfuafit nox, amor, vihum, adolefcentia :

xp. Humanumeft. ubi fcit factum , admsttrtm virginis

Venit if fus ultra, lacrumans, oram ,obfecrans, il idem dans, jurans fe illam dutturum do-

mum. Jgnotum efi, tacitum eft, redit um eft. virgxt

txeo Comfrejfu gravida facta eft. menh? hic deci-

mustft: 30. Itte bonus -vir nobis pfaltriam, fidiisplacée,

Paravit, quicum vivat, illam deferit,

T> E M E A, Procertori tuifthac dieu 1

H E G I O. mater virginis

Inmedioeft, ipfa vir go, resipfa: hic Cet a Praterea, utcaptus eft fèrvorum, non malus',

2f. Nequeiriers, alit itttu,folus omnemfami-liam

Suftenfat. hune abduce, vinci: quare rem,

G E TA.

Imo hercle extorque nifi ita faBum efi ,* Tremea.

Poftremb non negabit, coramipfum cedo.

D E M E A.

Pudet : nec, quidagam, nequequid huk rt~ fpondeam,

fo. Scio. P A M P H I L A.

miferam me, dtjferor dolorsbus. Juno, Lucina, fer opem, fervame,obfecrt.

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L E S A D E L P H E S. 34* en quelque manière, la nuit, l'amour, le vin, la jeunette l'ont porté à cela, il n'y a rien là d'extraordinaire : mais djés qu'il fe fut apperçû de fa faute, il alla de luy-mefmc trouver la mère de cette fille, pleurant, fuppliant, con­jurant, promettant, jurant qu'ill'efpouferoit. On luy a pardonné, on n'a rien dit, on s'eft fié à luy. La fille fe trouve grofle, elle eft dans le neuvième mois, 8c cet bonnette hom­me eft allé acheter une Chanteufe, pour vivre avec elle, 8c il abandonne celle-cy. •

D E M E A. Eneftes-vousbienfûr? . -

H E G I O N. La mère 8c la fille font à voftre porte, 8e

la chofe parle aflez d'elle-même. De plus voilà Geta qui n'eft ni un fainéant, ni un fripon , comme l'ordinaire des Valets ; il nourrit ces pauvres femmes de fon travail, 8c il eft feul fe foûtien de toute cette famille, emmenez-le, faites-le lier, 8c tirez de luy la vérité.

G E T A . Ouyaflurément, Monfieur.faites-moyfouf-

frir toutes fortes de tourmens, fi ce qu'on vient de vous dire n'eft véritable , •Efchinus luy-mê­me n'en difconviendra pas ? faites-le venir en ma prefence.

D E M E A.

J'ay grand' honte, 8c je ne fçay, ni que faire, ni que luy répondre.

P A M P H I L A. Ah, malhéureufe que je fuis ! je n'en puis

plus. Junon, Lûcine, fecourez-moy, ayez pi­tié de moy, je vous en prie. » >

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~ !

341 A D E L P H I. H E G l O.

hem! Numnamilla, que.fi, parturit!

G ET A. cène, Hegiô.

H E G 10. hem !

Jttu fidemnunc vofiram implorât, Demea. J§)uod vos jus cogit, idvoluntate impetret.

s\g. Hec primum ut fiant, Deosquafo,ut vobùs défit:

Sin aliter animât vofier eft, ego, Demea, Summa vi defendam hanc, atque illum mor-

tuum. Cognât us mihi erat : unà à pueris parvoli Sumus educti: unàfimper militi* ey domi

go. Fuimus: paupertatenf unà pertulimusgra-vem.

Jjhtapropter nitar, fiuiam, experiar . deni-que

Animam rtlinquam potius quam iUas defi-ram :

Jjjuid mihi refponies ! DEMEA. fratrem conveniam, Hegio.

H E G I O. Sed, Demea , hoc tu facito cum animo ccgi-

tes> gg. ^uam vos facillimi agitis, quam efiis mtt-

xumè Fottntes , dit es, fortunati, nobiles , Tarn maxume vas equo animo equa nofiere Oportet, fi vos voltis perhiberiprobos.

. DEMEA.

Redho, fient, quafieriaquomeft, omnia.

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L E S A D E L P H E S . 345 H E G I O N.

H o , je te prie, eft ce qu'elle accouche ? G E T A.

Ouy, Moniteur. . H E G I O N.

Ha> Demea, cette pauvre créature implore prefentement voftre bonne foy, accordez-luy de bonne grâce ce que les loixvous forceront enfin de luy accorder. Au nom des Dieux, fai­tes de vous-mefme ce que doivent faire des gens d'honneur comme vous. Mais fi vous efles en d'autres fentimens, je vous avertis que j'entreprendray hautement la défence de cette pauvre malheureufe, & que je vengeray l'affront qu'on voudra faire à la mémoire de mon ami. Ceftoit mon parent, nous avons toujours efté élevez enfemble, nous ne nous fommes jamais quittez, ni en paix, ni en guer­re j nous avons ibuffert enfemble une grande pauvreté; c'eft pburquoy je ne negfigeray rien, j'agiray, jeferay, je tenteray toutes for­tes de voyes ; enfin j'abandonneray plûtoft la vie que leurs interefts. Que me répondez-vous ? •

D E M E A . * Tout ce que je puis faire , Hegion, c'eft

d'aller trouver mon frère. H E G I G N.

Au refte , Demea, fouvenez-vous que plus vous eftes riches, puiflàns, heureux, & de bonne naiflfance , plus vous eftes obligez à eftre juftes & raifonnables, fi vous voulez pdf-fer pourgensdebien.

D E M E A . Allez, on fera tout ce qu'on doit.

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±44 A D E L P H I. H E G I O.

<So. Ttecet te facere. Geta, ducmeintro ad SoJZ tratanu

ACTUS T E R T I U S . S C E N A VI.

D E M E A.

N On me indicente hoc fiant: utinam hoc fit modo

DefunBum. verum nimiaiUtcUcentia FrofecTo evadet in aliquod magnum malum. Ibo , requiram fratrem, ut ineùm hoc evo-

mam.

A C TUS TERTIUS. S C E N A VIL

H E G I O.

B Ono animo fac fis, Softrata, &ifiamquam potes,

Fac confier e. ego Micionem, fi apudforum efi, Conveniam, atque, ut res gefta efi, narrabo

ordine. ' Si efi ut faSurus officiumfiet fuum,

g. Faciat : fin aliter de hacre ejusfententia efi ,' Refpondeatmî, ut, quidagam,quamprimum.

Jciam. HEGION

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L E S ADELPHES. 34*/ H E G I O N.

Cela eft digne de vous. Geta, mene-moy à ta Maiitrefle.

A C T E TROISIEME* S C E N E VI.

D E. M E A.

JE Pavois bien dit, qu'il arriveroît quelque chofe de lemblable, & pluft à Dieu que

nous en muions quittes pour cela j mais cette licence- effrénée aboutria aflurément 3 quelque chofe de funefte. Je m'en vais chercher mon frère pour luy dire tout ce que j'ay fut; le cœur. '

A C T E TROISIEME. S C E N E VII.

H E G I C\N.

NE vous affligez point, Softrata, & con-folez autant qu'il vous fera poffible cette

pauvre fille. Je m'en vais voir ûje trouveray Micion à la Place, & je luyconteray comme toute la chofe s'eft pafiee : s'il veut faire fon devoir, qu'il le fane, à la bonne heure, ûnon qu'il meledife , afin que jevoyele parti que j'ay à prendre.

Tome II. Q

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34<î A D E L P H I .

ACTUS QJJARTUS. S C E N A I.

CTE'SIPHO, STRUS.

CT E S II HO.

Ain' patrem hinc abiifie rusî S J R US. jam dudum.

C T E S I P H O. die/odes.

S r R U S. apud

ViUctm eft. nunc cummaxurnè operù aliquid facere credo.

C TE S I P H O. utinam quidem,

Ghtod cum falute eju'fiat, ita/e defatigarit velim ,'

Uttriduo hocperpetuoè leBo pror/ut nequeat furgere.

S T RU S. g. Itafiat, érifthoc, fiquid potbs eft, rettins.

CTESIPHO.

ita : nanphunc diem Miferè nimis perpétuant, ut ccepi, cupio in Uti-

tia de gère:

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A C T E QUATRIEME. S C E N E I .

C T E S I P H O N , S Y R U S .

C T E S I P H O N .

Dis-tu que mon père s'en eft allé à la cam­pagne F

S Y R U S . Il y a déjà long-temps.

C T E S I P H O N . Dy-le moy, je t'en prie.

S Y R U S . Je vous dis qji'à l'heure que je parle il eft

arrivé, Se je fuis perfuade qu'il travaille déjà de toute fa force.

C T E S I P H O N . PluftàDieu! & qu'il fe fatiguait fi fort ,

pourvu néanmoins que cela ne prejudïciaft point à fa fanté, que de trois jours il nepuft quitter le lit.

S Y R .U S.

Je le voudrais , & quelque chofe de mieux ," s'ileftoitpouible.

C T E S I P H O N . Ouy, car je fouhaite extrêmement de paf-

fer tout ce jour dans le plailir, comme j'ay

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j 4 8 A D E L P H I. Et iUud rus nuUa alia caufa tam maie odi l

mfi quiaprope eft. jShtodji abeffet longius, Prtus nox oppreffijjet illic, quant hue revorti

poffet iterum. xo. Hune, ubi me illic non videbicjamhucre-

curret, fat fcio: Rogitabit me, ubifutrim: quemegohodie totp

nonvidi die, 3uid dicton ?

s r RU s. nihilne in mentem ?

CTES1PHO. nunquam quidquam,

S T R U S. tantb nequior.

Client, amicus, ho/pet, nemoefivobitt C T E S 1 P H O.

font, quidpofient S T RU S.

Hifce opéra ut data fit. C T E S I P H O.

qut non datafit ? non potefi fieri.

S X RU S. pottft.

C T E S I P H O. Xj\ Interdiu : fed fi hic pernoBo, caufa quiddi-

cam, Syre ? S r R U S.

Vah, quam vellem etiam noBu amicit opérant mot effet dari !

Jjluin tu otiofut et : ego illiut fenfitm pukrï callec.

Cum fervit maxumi, tant placidum quam ovem reddo.

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L E S A D E L P H E S. 34s) (Commencé ; 8c ce qui me fait plus haïr cette roaifon de campagne, c'eft qu'elle efttrop prés d'icy : car fi elle eftoit plus éloignée, la nuit l'y fiirprendroit avant qu'il puft eftre revenu. Prefentement qu'il ne m'y aura pas trouvé, je fuis fur qu'il reviendra icy au plusvifte; 3c comme je ne l'ay point vu detoutlejour.i l me demandera où j'ay efté ; que luy diray-je ?

S Y R U S . Ne vous vient-il rien dansl'éfprit?

C T E S I P H O N . Rien du tout. . •

S Y R U S .

Tant pis, vous eftes un pauvre homme. Mais eft-ce que vous n'avez icy ni client, ni ami, ni hofte ?

C T E S I P H O N .

Nous y en avons aflèz, que cela fait-il? S Y R U S . .

Il faut luy dire que vous avez efté obligé d'en fervir quelqu'un en quelque affaire.

C T E S I P H O N . Quoy , fans l'avoir fait ? cela ne fe peut.

S Y R U S . Cela fe peut fort bien.

C T E S I P H O N . Bon pendant le jour; mais fi je pafleicyla

nuit, quelle excufe luy donneray-je , mon pauvre Syrus?

S Y R U S . Ha que je voudrois bien quecefuft la coû"

tume d'aller devant Tes Juges la nuit ! mais foyez en repos, je le iay prendre parfaite­ment , 8c lors qu'il eft le plus en colère , je le rends auifi doux qu'un agneau.

QJi j

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3fo A D E L P H L C TE S I P H O.

S r R U S. Laudarier te audit libenter. fado te , apud

illum, deum: 10. Virtutes narra.

CTES1PHO. meas ? S T R U S.

tuas, homini illico lacruma cadunt, f$uafi puero,. gaudio. hem tibi auttm.

C T E S I P H O. quidnam efi l

S T R U S. lupus in fabula.

CTESIPHO. Pater ad efi l

ipfn'fi. s r R u s.

TE S I P H O. Syrt, quid agimu* t S T R U S.

fuge modo mtrb : ego videra] C T E S I P H a.

Si quidrogabity nufquam tu me: audifi'tri ! S T R U S.

potin* ut definas l

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1 L E S A D E L P H E S. 37t.

C T E S I P H O N . Et comment fais-tu ?

S Y R U S. Il écoute volontiers lors qu'on vous Joue j

devant luy je vous fais un Dieu» je conte vos grandes qualitez.

C T E S I P H O N . Mes grandes qualitez?

S Y R U S. Ouy > vos grandes qualitez. On voit d'a­

bord mon homme pleurerdejoye comme un enfant. Ho» ho, en voicy d'un autre, prenez garde à vous.

C T E S I P H O N . Qu'ya-t-il?

S Y R U S. Quand on parle du Loup, on en voit la

queue. C T E S I P H O N .

Mon père vient? S Y R U S.

Luy-mefme. C T E S I P H O N .

Syrus, qu'allons-nous faire? S Y R U S.

Fuyez-vous-en feulement au logis, & je Verray.

C T E S I P H O N . S'il te parle.de moy, dy que tu ne m'as vu

nulle part, entends-tu? S Y R U S .

Y a-t-il moyen que vous vous taillez?

Ser*

Q-iiij

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if* A D E L P H T.

A C T U S QUARTUS, S C E N A II.

D E M E A, CTESIPHO, STRUS.

D E M E A.

N M egohomo fummfelixl primiim fratreta • ' tut/quam irtvenio gentium:

Prtterest autem, dam ilium qutro, * villa mercenarium

yidi: isfilium negstt ejje rure: nec, quii *g*m, feio.

CTESIPHO. Syre,

STRUS. quid aist

CTESIPHO. meif. qiuarit t

STRUS. veram.

C T E S I P H O. périt !

STRUS.

quintuanimobonoes. D E M E A.

fl^uidhoe, malum, mfeluituth! nequeojàtit decernere: .

Hifi me credo huic ejje natum rei , ferundis miferiU.

Primas fentio malts noftra: primas re/cijco omnia;

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f L E S A D E L P H E S. j r j

ACTE QUATRIEME. S C E N E II .

D E M E A , C T E S I P H O N , S Y R U S .

D E M E A.

EN vérité je fuis bien malheureux! Pre­mièrement je ne trouve point mon frère,

& pour comble de chagrin, comme je le cherchois, j'ay trouvé un Ouvrier qui reve-noit de ma maifon de campagne, Se qui m'a dit que mon fils n'y eft pas. Je ne fay Ce que je dois faire.

C T E S I P H O N . Syrus.

S Y R U S . Que voulez-vous ?

C T E S I P H O N . Me cherche-t-il?

S Y R U S . Ouy.

C T E S I P H O N . » Je fuis perdu?

S Y R U S . Mon Dieu, ne vous allarmez point.

D E M E A . Quel malheur eft le mien ! je ne faurois le

comprendre, je vois feulement que je ne fuis né que pour eftre malheureux ; tout ce qu'il y a de mal, c'eft moy qui le fens toujours le premier, c'eftmoy qui le fay toujours le pre-

Q v

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35-4 A D E L P H L Erimut porro obnuntio. agrèfolus, fi quid fit',

fero. S T RU S.

Rideo hune i primum aitfefcire: isfolus nefch omnia.

D E M EA. îo.Nunc redto: fi forte frater redierit, vifo.

C X E S I P H O. S)re»

Obficto ,. vide ne Ole hue prorfusfe irruat.

S T R V S. etiam tacesî

Ego caveio. CTESJTHO.

nunquam hercle hodie ego ifthue corn-mettant ttbi:

Nam mejam in cellam aliquam cum illa con* éludant, id tutijjimum eft.

s r RU s. Age, tamen ego hune amovebo.

D E M E A,

fed eccum fceleratumSyruml >

s r R u s. if.Non herclehic quidem dur are quijquam.fific

fit,poteft. Scire equidemvolo, quot mihifint domini; qui

hoc eft miferia i D E M E A*

quid lUe garnit? quid volt? quid ois, bone viri

hem, eft frater demi?

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L E S A D E L P H E S. 317 mier, c'eft moy qui en porte la nouvelle aux autres, 8c je fuis le feul qui en ay du chagrin.

S Y R U S. Cet homme me fait rire", il dit qu'il eft le*

premier qui fait tout, 8c il eft le feul qui ne fait rien.

, D E M E A. . , Je reviens prelèntement pour voir fi par

hazard mon frère ne ferait point revenu. C T E S I P H O N .

Syrus, prends'bien garde, je te.prie, qu'il ne fe jette tout d'un coup dans cette maifon.

S Y R U S. Vous tairez-vous , vous dis-je ? j 'y pren-

dray garde. C T E S I P H O N .

Je ne faurois me fier aujourd'huy à toutes tes belles promefles, & je vais tout à l'heure rn'enfermçr avec elle dans quelque petit coin, c'eft le plus iur.

S Y R U S . Faites j je l'empelcheray pourtant bien

d'entrer-D E M E A.

Mais voilà ce fcelerat de Syrus. S Y R U S .

Par ma foy, fi les choies vont toujours de mefnte, il n'y a' pas moyen que qui que ce foit puifle durer dans cette maifon : je veux favoir combien j'ày de Maiftres 5 quelle mifere eft-ce donc que cecy ?

D E M E A. Qu'a-t-il à crier? que veut-il dire? Que

dis-tu, l'honnefte homme, qu'eft-ce que c'eft ? mon frère eft-ilchezluy?

Qjrj

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3fd A D E L P H I . • '

D £ Af E -4. ^ « i i , malum , Bone vir , mihi narras?

equidem périt. D E M E A.

quid tibi efi t

s r RU s. Rogitas f Ctefipho me pttgnis miferum ejoifiam

pfaltriam %a UJque occidit

D E M E A. hem y quid narras i

S T R U S. htm, vide Ut difciditlabrum.

X* E M E A. Gfuamobremi'

S X RU S. me impttlfore banc emtamtjfe aie.

Z> E M E A.' non ttetum rtts bine mode

Troduxe aiebas ? S Tt R U S.

factttm. verumppft venit infanitns : Nil pepercit. non pttdttiffe verberare hominem • fanemT

• jffhtemego modoftttrum tantiUttm in manibus geflavi meis i

D E M E A. xtr.Lattdo, Ctefipho , patriffiu : obi, virum te

juduo. s r RU s.

Laudas i n& illi continebit poflhac, fi fapiet mantu.

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L E S A D E L P H E S. srr S Y R U S .

Que diable me voulez-vous chanter avec yoftre bonnette homme ? je n'en puis plus.

D E M E A. Qu'as-tu ?

S Y R U S . Ce que j'ay ? Ctefiphon nous a rotiez de

coups; cette Chanteufe&moy. D E M E A.

Que me dis-tu là ? S Y R U S .

Tenez, voyez comme il m'a fendu la lé-' vre.

D E M E A. Pourquoy cela?

S Y R U S . Il dit que c"eft par mon confeil qu'on à

acheté cette créature. D E M E A.

Ne m'as-tu pas dit taatoft qu'il s'en eftoit retourné à la campagne, 8c que tu avois efté avec luy jufqu'à moitié chemin?

S Y R U S . Cela eft vray aufli ; mais il eft revenu fur

fes pas tout furieux, & il ne nous a pas épar-

f nez. N'a-t-il point de honte de battre an omme de mon âge, moyqui le portoisdans

mer bras il n'y a que trois jours ?il n'eftoit pas plus grand que cela.

D E M E A. O Ctefiphon, que je te fay bon gré de

cette action ! tu tiens de ton père; va, tu as déjà toute la fagefie d'un homme fait.

S Y R U S . Vous le louez? par mafoy, s'il eft fagev

à l'avenir il retiendra fes mains.

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1 SfS A D E L P H L ' D E M E A. Eortiter.

S Y R U S. perquam ! qui mi/eram mulierem & mer

fervolum, Qui referire no» audebam,. vicit. but, fer*

fortiterl D- E M E A.

Non potuit melms. idem quod ego fenfit, te ejfe huic rei cifut.

jo.Sed efinefrater in tus l . : . s r R v s*

non eft. D E M E A.

ubi illum queram cogite* S X R U S.

Scie ubi fit, verum bodknunquammonfirabom D E M E A.

hem, quittais?

s YRUS* ita~

Xt E M E A. Ttiminuetur tibi quidemjam cerebrumi-

S X RIT S. ut nome» nefcio

lUius hominis ,fed locum novi ubi fit. Et E M E A,

die ergo locum* S T RU S.

Noftin' porticum àpud mactllum banc deord fitml

D E M E A. quidni noverim?

s r RU S. tf^Praterito bac rectà plate» furfitm. ubi eb

veneris,

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L E S A D E L P H E S . jr» D E M E A.

11 a fait l'action d'un homme de coeur. S Y R U S.

Ho tout à fait ! ilabattuunemiftrablefem» me Se un malheureux valet qui nia oie fe re» vancheri la belle action!

D E M E A. Il ne pouvoit pas mieux faire j il croit com­

me moy que tu es l'autheur de cette belle équipée. Mais mon frère efb-il au logis ?

S Y R U S. Non, iln'yeftpas.

D E M E A. Je fongeoù je dois l'aller chercher.

S Y R U S. Je fay bien où il eft , mais d'aujourcPhuy

je ne vous l'enièigneray. D E M E A.

'He, qu'eft-ce que tu dis? S Y R U S-

Jediscequejedis. D E M E A.

Je vais te cafler la tefte tout à l'heure.' S Y R U S.

Mais je ne fay pas le nom de l'homme chez qui il eft, je fay feulement le lieu.

D E M E A-Hc bien dy-le moy donc, le lieu.

S Y R U S. Savez-vous ce Portique qui eft prés de la

Boucherie, en defeendant? D E M E A.

Ouy. S Y R U S. "Hfait

Panez tout droit par cette Place en montant ,fgne de & torique vous y ferez , vous prouverez * Ha main.

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360 A D E L P H I. Clives ieerfum ver fus efi, hacpracipitate. po~

fie» Efi ad hanc mtmum faceUum : ibi angipor.

tum prepter efi. D E M E A.

! ®uonam ?

s r RUS. illic, stbietiamcaprifuu' ma.

pus efi. DE M E A.

novi.

s r RU s. bac pergito.

D E M E A. li quidem angipertum mm eftpervium.

S T R US. verum bercle. vah,

tfO.Cenfen' hominemmeeffe ? erravi, in portkum rurfum redi:

Sane bac multopropiusibis, ruminer efi erra. tio. Sein' Cratini bujsts ditis odes ?

D E M E A. feie.

S T RU S. ubi eas praterieris,

Ad finifiram bac reSaplatea, ubi ad Diana veneris,

ïto ad dextram: prius quam ad portant vt-nias, apud ipfum lacum

4/f-Eft piftriÛa, o> exadvorfum efifabrka: ibi efi.

D E M E A. quid ibifaeiti

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L E S A D E L P H E S. ecTi cette main là une petite defcente, jettez-vous-y. Après quoy il y a une petite Chapelle, 8c tout auprès une petite ruelle.'

D E M E A. En quel endroit?

S Y R U S. Dans cet endroit où il y a un grand figuier

fauvage. Entendez-vous ? D E M E A.

Fort bien. S Y R U S. '

Continuez voftre chemin par là. D E M E A.

Mais on ne fauroit pafier par cette petite ruelle, c'eft un eu de lac.

S Y R U S. Cela eft vrai, par ma foy. Oh qu'elle im­

pertinence, le gros animal que je fuis.1 je me trompois. Retournez à ce portique dont je vous ay parlé, je m'en vais vous donner un chemin bien plus court, & qui neft pas fi. em-barafie. Savez-vous la maifon de Cratinus, de cet homme qui a tant de bien?

D JE M E A. Oiii.

S Y R U S.

Quand vous l'aurez paflee, tournez à gau­che dans cette mefine rue, & quand vous ferez au Temple de Diane, prenez à droit avant que de venir à la porte delà ville. Tout auprès de l'Abreuvoir il y a un Boulanger , & vis-à-vis . de ce' Boulanger vous verrez une Boutique de Menuifier, c'eft là qu'il eft.

D E M E A. #

Qu'y fait-il?

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H 35* A D E L P H I.

S X R U S. Lectttlos in foie ilignis pedibus faciundos de-

dit. D E ME A.

Vbi potetis vos i bene fane, fed cejfo ad eum pergere t

S Y R UmS.

Ifane. egotetxercebo.hodie, utdignmes, fil't- . cernium.

JEfchinus idiote ceffat : prandium corrumpi-tur:

$•0. Ctefipho autem in amofe eft Mus. ego jam projpiciam mihi,

Namjamadibo, atque unumqmdque , quoâ quidemerit beUifjtmum,

Carpam, ér-cyathasforbillans, paulatimhunt producam diem.

ACTUS QUARTUS.

S C E N A III.

M I C I O, H E G I O.

M I C I O.

E Goin hoc re nihil reperioi quant ob rem lau-der tantopere, Hegio.

Meum officium facto, quod peceatum à nobis ortum eft corrige.

Nijiji in illotne; credidifti ejfe hominum numé­ro, qui itaputant

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L E S A D E L P H E S. 565 S Y R U S.

H fait faire des lits de table, aveclespiezde chefhe vert pour manger au Soleil.

D E M E A. Pour vous faire boire agréablement, vous

antres ;c'eft fort bien fait en vérité. Mais pourquoy ne l'y aller pas trouver?

S Y R U S. Vous ne finiriez mieux faire. J'exerceray

aujourd'huy tes jambes comme il faut, vieux radoteur. Mais Efchinus eft bien haùTable d'eflre fi long-temps à revenir , cependant le dîné fe gâte, 8t Ctefiphon de Ton côté nepen-fe qu'à ion amour. Pour moy, je fauraifort bien mettre ordre a mes affaires, car tout pre-fentement je vais me garnir de ce qu'il y aura de plus beau & de meilleur, &en vuidantpeu à peu les pots je pafleray doucement la jour» née.

ACTE QUATRIEME. S C E N E III.

M I C I O N , H E G I O'N.

M I C I O N .

NOn, Hegion, je ne vois rien là qui meri-te*les louanges que vous me donnez j je

fais ce que je dois, je repare le mal que nous avons fait. Mais peut-eftre que vous avez crû que j'eftois de ces gens qui s'imaginent toujours qu'on leur fait tort, quand on leur

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3<S+ A D E L P H I . Sibifieri injuriant, ultrb, fi quant fecere ipfi,

expoftuîant, f. Et ultrb accufant. id quia non eft à me fait un*

agi' grattas ? H E G I O.

Ah, minime, nunquam te aliter, atque es, in animum induximeum.

Sed quafo, ut una mecum ad matrem v'trginis eus , Micie,

Atque ifthac eadem, qua mihi dixti, tute die as mulieri:

Su/picionem hanc propter fratrem ejus ejfe, & ilsam pfaltriam.

M I C I O. 10. Si ita aquom cenfes, aut, fiitaopuseftfqBo,

eamus. H E G I O.

bene facis : Nam & illi animum jam rettevabis , qtu de—

1ère, ac miferia Tabefcit j & tuofficio fueris funttus, fed fiali-

ter put as, Egomet narrabo qua mihi dixti.

M I C I O. imo ego ibe.

H E G I O. bentfacis:

Omnes,quibu' resfient m'tnu'fecundt, magt'fient » nefeio que modo

Suppiciofi: ad contumeliam omnia aeçipiunt magis :

Eropter fuam impotentiam fe femper credunt cahier.

JQuapropter te ipfum pur gare ipfi coram, pla-cabiliuseft.

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I" L E S A D E L P H E S. 36> demande raifon du tort qu'ils ont fait aux au­tres, & qui font les premiers à fè plaindre j parce que je n'en ule pas ainfi, vous me remer­ciez?

H E G I O N. . Ha point du tout, je ne vous ay jamais crû autres que vous n'elles. Mais je vous prie de venir avec moy chez la mère de cette fuie, & de luy. dire ce que vous m'avez dit, que le foupçqn qu'on a contre Eirhinus eft mal fon­dé, & qu'il a enlevé cette joiieufe d'inilfu-mens pour ion frère.

M I C I O N. Si vous jugez que cela Ibit neceûaire, al­

lons.

H E G I O N. Vous me faites plaifir jcar vous remettrez

l'efprit de cette pauvre fille, que la douleur & le chagrin ont mife dans un état pitoyable, & vous aurez la latisfaâion de vous eftre acquit é de voftre devoir. Si pourtant cela vous fai-lbit de la peine, j'irois feul luy dire ce que vous venez de m'apprendre.

M I C I O N. Point du tout, j'iray moy mefine.

H E G I O N.

Je vous en feray bien obligé j car les per-lbnnes à qui la fortune n eft pas trop favora­ble, font je ne fa y comment plus foupçonneu-fes que les autres, & prennent tout en mauvai-fe part, croyant toujours qu'on les méprife pour leur pauvreté. C'eft pourquoy je penfe que le meilleur moyen de I'appaifer, c'eft d'aller vous-mefme juftifier Efcmnus.

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*66 A D E L P H I. M 1 C I O.

Et rectè é1 verum dicis. H E GJO.

fequere mi trgo hac intrb. M I C I O.

tnaxumï.

ACTUS QUARTUS. S C E N A I V .

AiSCHINUS.

D lfcrucior animi. hoccine de improvifo mais mihi objici

Tantum, tu neque quid de mefaciam, neque qttïdagam, certumfieti

Membra meta debiliafunt: animas timoré obf. tapait : ptctore

Confiftere nihil confilii quicqaam poteft. Vah! qao modo

c. Me ex hac tarba expediaml tant a nuncfufpi-cio de me incidit,

Neque ea immérité. Softrata crédit, mihi me emijjfe hanc pfaltriam:

Anus indicium ïdfecitmihi. Nam ut hinc forte ea ad objletricem mijfa

erat, abi eam-vidi, illico Accedo, rogito, Eamphilaquidagat, jampar­

ties adfiet: Zone objletricem arcejfat. illa exclamât, Abi,

abi, jam Mfchine, 10. Satis dia dedifti "jerba, fat adhuc tua nos

fruftrata efi fides.

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L E S A D E P L H E S. 567 M I C I O N .

C e û bien dit", & rien n'eftplus vray. H E G I O N.

Suivez-moy donc par icy. • M I C I O N .

Je le veux.

ACTE QUATRIEME. SCENE IV.

E S C H I N U S . '

IE fuis au defèfpoir ! faut-il qu'un fi grand malheur me fbit arrivé tout d'un coup, fans

que je fâche, ni ce que je dois faire, ni ce que je puis devenir ? La crainte & le defèfpoir m'accablent le corps & Pefprit, je fuis incapa­ble de prendre aucune refolution 5 ah comment me tirer d'un embarras fi horrible ? Soupçonné de la plus noire de toutes les trahifons, & avec quelque efpecede juftice ? Softrata croit que c'eft pour moy que j'ay acheté cette joiieufè d'infiniment. La vieille fervante me l'a fait comprendre, cartantoft comme on l'avoit en­voyée chercher la Sage-femme, je l'ay rencon­trée par hazard, je me fuis approché d'elle, & je lui ay demandé des nouvelles de Pamphila,|fi elle eftoit déjà en travail, & fî c'eftoit pour cela qu'elle alloit faire venir la Sage-femme , elle s'efl: mife à crier, Allez, allez Efchinus, il y a aflèz long-temps que vous vous moquez de nous, & que vous nous amufez par vos bel­les promeûes. Ho, luy ay-jedit, qu'eft cecy,

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a<ï8 A D E L P H I. Hem, quid ifihuc, obfecro, inquam, efl ? va­

lets , habeas illam qna placet. Sert fi illico id illas fufpicari : fed me reprejfi ta-

menq Ne quid de fratre garruU illi dicerem > acfie-

ret palam. Hune quidfaciam ? dicamne fratris ejfe banc ?

quod minime ejt opus '?• Vfluam tffirri. âge, mitto, fieri potis efi, uti

ne qua exeat. Ipfum id metuo uti credant : tôt concurrunt

•veriftmilia. Hgomet rapui : ipfe egomet folvi argentum:

ad me addutta efi domum. Hoc adeo mea culpa fatetr fieri. non me banc

rem patri, ut ut lZratgefia, indicajfel exorajfem ut eam duce-

rem domum. 20. CeJfâtumefiufqueadhuc.nuncporre, Mfcbi-

nt, expergifiere. Nunc hoc primumefi, adiUasibo, utpurgem

me, accedam ad fores. Ferii, horrefeo femper, ubi fores pultare hafee

occipio mifer. HettSyheus, Mfchinusegofum; aperitealiquis

aHutum oftium: . ïrodit nefeio quis. concedambuc.——

je vous

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L E S A D E L P H E S . î<So je vous prie? elle a continué, allez vous pro­mener, allez j prenez celle dont vous eftes li charmé. Tout auffi-toft j'ay connu leur peu-fée, mais je me fuis retenu, & je n'ay rien voulu dire à cette caufeufe, de peur qu'elle ne fallait divulguer. Que dois-je donc faire prefentement ? Diray-je que cette Chanteufe eft pour mon ffere? C'eft la chofe du monde qui demande le plus 4e fecret. Mais je pafle fur cet­te confideration, je veux qu'rl foitpofllbleque quandje leur aurai tout dit,cela ne faiTe aucun é-clat. Je crains qu'elles ne croyent pas mefme la choie comme elle eft, tant les apparences font contre moy ! C'eft moy-mefme qui ai enlevé cet­te fdle, c'eft moy-mefme qui ay donné l'ar­gent, c'eft chez moi qu'elle a efté menée. J'a­voue que ce malheur m'eft bien arrivé par ma faute, de quelque manière que la chofe fefuft paflee, ne devois-je pas la déclarer à mon pè­re? je l'aurois fléchi, 8c j'aurois obtenu de lui la permiflîon d'époufer Pamphila, mais je me fuis endormi jufqu'à prefent ; Eveillons-nous donc enfin à cette heure ; le meilleur parti que je puifle prendre, c'eft d'aller de ce pas chez elles me juftifier ; je vais donc heur­ter à leur porte. Je fuis perdu ! je fens un friiTon me courir par tout le corps dés que je commence à heurter. Hola, hola, quelqu'un, c'eft Efchinus. Mais je ne fài qui fort. Je m'en vais me retirer ici.

Tome II.

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v° A D E L P H I.

A C T U S QUARTUS S C E N A V.

MICIO, JE S C H i m u s.

M I C I O.

I Ta'utidixi, Softrata, Facile : ego JE/chinum convt-

niam, ut, quo modo actahtefunt,fciat.

Sed quis ojiium hoc fultavit ! MSCHINUS.

pater hercle eft ferii. MICIO.

JEfthine', JE S C H I N U S.

£$uid huic hic negotî eft i MICIO.

tune has fefuliftifores ? tacet.

f. Cur hune aliquantifper non ludo ? melius eft: Ghtandoquidem hocnunquam mihi ipfe voluit

credere. Flil mihi refpondes ?

JESCHINUS. non equidem tftas quod

feiam. MICIO.

Ita l nam mirabar quid hic negotî ejfet ti~ bi.

Erubuitifalva res eft.

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L E S A D E L P H E S. 371

T " ' 1 1 . . . — . . . . 11 — .i . — » i 1 —

ACTE QUATRIEME. S C E N E V.

M I C I O N , E S C H I N U S .

M I C I O N.

SOftrata, faites, comme je viens de vous di­re ,. pour moy je vais trouver Efcbinus,

afin qu'il fâche de quelle manière cette affai­re s'eft paflëe. Mais qui eft-ce qui heurte ?

E S C H I N U S . •Ho, ho, voilà mon père, je fuis audefef-

poir! M I C I O N .

Efchinus. E S C H I N U S .

Quelles affaires peut-il avoir là dedans? M I C I O N .

Àvez-vous heurte' à cette porte ? il ne ré­pond point i pourquoy ncme donnerois-je pas le plaifir de le jouer un peu ? je ne fau-rois mieux faire, pour le punir de ce qu'il n'a jamais Voulu me confier ce fecret. Vous ne me répondez pas?

E S C H I N U S . Moy? je n'ay pas heurté, quejefache.

M I C I O N . Je le croy ; je m'étonnois bien aufli que

vous eufliez affaire dans cette maifon, &jene pouvois comprendre ce que ce pouvoit eftre. D rougit, c'eft bon ligne.

! R i j

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37* A D E L P H I. JE S C H I N U S.

die/odes, pater, îo.Tibivero quid ifthic eft reil

M I C I O. nihil mibiquidem.

Amicus quidam me aforo abduxit modo Hue advocatum Çibi'.

JESCHINUS. quid ?

M I C I O. ego dicamtibi.

Habitant hic qtudam mulieres paupereula. Opinor eat non nojfe te, & certéfcio;

le. Nequeenim diu hue eommigrarunt.

JE S C H I N U S. quid tum pofiea ?•

M 1 C I 0. Virgoeft cum matrt.

JE S C H I N U S. perge.

M I C I O. haevirgoorba eft pâtre;

Hic meus amicus iUi génère eft proxumus ; Huic leges cogunt nubere banc. '

JE, S C H I N U S. pérît !

M I C I O. quid eft ?

JESCHINUS. Nil, relié, perge.

M I C I O. isvenit, ut fecum avehati

Nam habitat Mileti.

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L E S A D E L P H E S. 37* E S C H I N U S.

Mais vous, mon père, dites-moy, s'il vous plaift quelle affaire vous y avez ?

• M I C I O N. Je n'y en ay nulle pour moy, en vérité,

c'eft un de mes amis qui m'a pris tantoft à la place, & qui m'a prie de venir icy pour quel­que chofe quile regarde.

E S C H I N U S . Et quelle chofe ?

M l . C I O N. Je vais vous la dire. Dans cette maifon de­

meurent certaines femmes qui n'ont pas de bien, 8c que vous ne connoiflez pas apparem­ment, j'en fuis mefme fur , car il n'y a pas long-temps qu'elles font venues dans ce quar­tier.

E S C H I N U S. Eh bien, mon père, après cela?

M I C I O N. Il y a une jeune fille avec fa mère.

E S C H I N U S. Continuez, je vous prie.

M I C I O N. Cette fille n'a plus fonpere. L'ami dont je

viens de vous parler eft fon plus proche pa­rent ; les Loix l'obligent de l'épeufer.

E S C H I N U S. Je fuis mort !

M I C I O N. Qu'eft-ce que c'eft ?

E S C H I N U S . Rien, rien du»tout, continuez , s'il vous

plaift. M I C I O N. Il èft venu pour l'emmener , car il demeure

à Milet. R iij

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374 A D E L P H I. JESCHINUS.

hem, virginem Htfecum atithatl

MICI O. Sic efi.

JESCHINUS. Miletum a/que, obftcro T M 1 C I O.

ita. JESCHINUS.

anime mole efi. ©»*V if fit ! quid aiunt T

M I C I O. quid illascen/es t nihUL

tnim. Commenta mater efi, effe exalio-vir»

, Nefiio qtto fuerum natum, neque eum nomi-nat,

xe. Triorem effeillum, nonofortere huit darL

JESCHINUS. Eho, nonne hoc jufta tibi vident ter pofiea t

MIC I O. Non.

JESCHINUS. obfecro, Non î an ittam hinc

abducet, patert M I C I O.

fijhtidni illam abducat f JESCHINUS.

faéium à vobie duriter. Immifericorditerque , atqueetiam, fi efi, fa.

ter, 30. Hicendummagis aperte, inuberaliter.

M I C I O. Jff>uam ob rem i

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f L E S A D E L P H E S. s j f E S C H I N U S .

Oh.' Quoy pour emmener cette fille ? M I C I O N.

Oui. E S C H I N U S .

Comment, je vous prie, jufqu'à Milet? M I C I O N .

Oiii. E S C H I N U S .

Je n'en puis plus ! Et ces femmes, que di-iènt-elles?

M I C I O N .

Que penfez-vous qu'elles difent ? elles ne difent rien. La mère s'eft avifée feulement de dire que fa fille avoit un enfant de je ne fai quel autre homme qu'elle ne nomme point, que cet homme l'a aimée le premier, 8c qu'ainfi fa fille ne peut-eirre à ce parent.

E S C H I N U S . Ho, ho ! eft-ce que cela ne vous poroit pas

julle enfin? M I C I O N .

Non. E S C H I N U S .

Comment, je vous prie, non ? Efl-ce que cet homme l'emmènera, mon père ?

M I C I O N . Pourquoy ne l'emmeneroit-ilpas?

E S C H I N U S . Vous avez fait la chofe du monde la plus du-"

re , la plus cruelle , & fi je l'ofe dire plus olairement , la plus indigne de gens d'honneur comme vous.

M I C I O N . Pourquoy cela ?

R iiij

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37<S A D E L P H I. AiSCHlKU?.

rogas me l quid iUi tandem creditis

fore animi mifero, qui ilii eonfuevit prises, ( Jjhti infelix, haudfcio, an ilûm miferè nuttc

amatf) Cum banc fibi videbît prtfens prafenti eri-

Pi> -3f. Abduei ab oculis ? fMinus indignum, pa-."' ter!

M I C I O. ff)ua rations iftbuc t quis dtfpondit! quis de-

dit l I Cui, quando nupfit l auSor hk rebut quit

efil Cur duxitalienaml

JE S C H l N U S. an fédère oportuit.

JDotni virginem tam grandem, dum cognatus bine

40. Iltinc veairet expeBantem ! bac, mi pater, Te dicere aquom fuit, & id defendere.

M I C I O. Ridicule, advorfumne illum caufam dicerem, Cui veneram advocatus.l Sed quid» Mfchi-

ne» Nofira ? aut quid mbis cum tilts i abeamus*

quid eft ? 4f • JQuid lacrumm ?

A\ S C H I N U S. pater, obfecro ? aùfculta.

U I C I O, Asfcbine, audfai

omnia, Rtfcio : nam tmo te : .qui magis, qui agi*,

cura funt mibi. '

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L E S A D E L P H E S. 377 E S C H I N U S.

Pouvez-vous me faire cette demande ? En quel eftat enfin penfez-vous que fera ce pau­vre homme, qui a vefcu jufqu'à prefentavec elle, & qui fans doute en eft encore pafiionné-ment amoureux? que deviendra ce malheu­reux quand il fe verra enlever cette fille à fes yeux ? C'eft aiTurément là une action tres-in-digne, mon père.

M I C I O N. Par quelle raifon ? Qui luy a promis cette

fille ? Qui la lui a donnée ? Comment s'eft fait ce mariage ? Quand s'eft-il fait ? Qui s'en eft mêlé? Pourquoy va-t-il époufer une fille qui doit eftre à un autre ?

E S C H I N U S. Eltoit-il julle qu'une fille de fon âge de-

meurât-là en attendant qu'un parent de je ne fay où vint la demander en mariage ? Voilà, mon père, ce que la juftice vooloitque vous reprefentaflîez, & ce que vous deviez faire valoir.

M I C I O N. Que vous elles piaffant! arrreis-je elle par­

ler contre un homme qui m'avok; mené là pour foûtenir fes interells ? Mais, Efchinus, que- tout cela nous importe -t-il ? qu'avons-nous à voir dans tout ce qui les regarde ? al­lons-nous en. Qu'y a-t-il ?pourquoy pleurez-vous?

E S C H I N U S. Mon père, je vous prie d'efcouter.

M I C I O N. Mon fils, j'ay tout entendu, &je faytoutj

car je vous aime tendrement, 8cjem'interefle en tout ce que vous faites.

R v

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378 A D E L P H I.

JESCHINUS.

Ita velim me promerentem âmes , dum vivat» mi pater ,

Ut me hoc deliBum admifijfe in me id mihi vehementer dolet,

Et me tut pudet.

M I C 1 O.

credo hercle : mm ingénias» novi tuum

j-o. Libérale : fed vereor ne indiligtns nimiums fies.

In qua civitatetandem te arbitrare viverel Virginem vitiafti, quam te jus non fsserat ran­

ger e. Jam id peccatum primùm magnum,magnum,

at kumanum tamen : Eecere alii ftpe, item boni, atpofiquamevtnit,

cedo, ff. Numquid circumfbextï î aut numquid tut*

projpexti tibi , Ghtidfieret, quafseretî fiteipfummihipuduit

dicere, 6hta refcijferem ? hoc dum dubitas ; rnenfes

abierunt decem. Trodidifti & te, & illam miferam, ér-gnatum,

quod quidem in te fuit. J>)uid! credebas, dermienti hoc tibi confeBu-

ros deos ! 60. Et fine tua opéra illam incubiculum iri dedu-

Bum domum ? Nolim cattrarum rerum te focordem codent

modo. Sono animo es, duces uxorem banc.

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L E S A D E L P H E S. 370/ E S C H I N U S.

Mon père, puiffiez-vous m'aimertoûjours, & me trouver toujours digne de voftre ten-dreflè, comme il eft vray que j'ay une tres-fenûble douleur d'avoir fait cette faute, 8c que je fuis confus de paroiftre devant vous.

M I C I O N. Je n'en doute pas, car je connois voftre bon

naturel : Mais je crains que vous ne foyez un peu trop négligent. En quelle ville enfin croyez-vous eftre ? vous avez deshonoré une fille, dont les loix ne vous permettoient pas d'approcher. Voilà déjà une grande faute, je dis fort grande, cependant pardonnable, car c*eft un malheur qui eft arrivé à d'autres, 8c mefme à de fort honneftes gens. Mais, je vous prie, après la chofe faite, avez-vous pris quel­ques précautions ? avez-vous prévu ce qui pouvoit arriver? avez-vous longé aux moyens de faire reiiflîr l'affaire comme vous le fouhai-tiez ? 8c fi vous aviez honte de vous ouvrir à moy, ne deviez-vous pas, au moins, me le fai­re lavoir par d'autres? pendant que vous elles dans ces irrefolutions, neuf mois felbntpaf-fés s vous vous eftes trahi vous-mefme, vous avez trahi cette pauvre malheureufe 8c voftre propre fils, au moins il n'a pas tenu à vous que vous ne l'ayez fait. Que penliez vous donc ? croyïez-vous que pendant que vous dormiriez les Dieux prendraient foin de vos affaires , qu'ils les feraient reulur félon vos defirs ? 8c que fans que vous vousdonnaftîez la moindre peine, on vous mènerait cette fille chez vous ? En vérité, je ferais bien fâché que dans les au­tres choies qui vous regardent, vous fuflïez auffi peu foigneiix. Mais ne vous affligez pas, vouslépoiuerez. R vj

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tJSo A D E L P H E JESCHINUSr

hem! • M I C I O.

bono anime es , inquarru M S C H I N U S.

pater, Ob/ecro, num ludis tu nunc me ?

M I C I O. ego te! quamobrem ?

M S C H I N U S. nefiie:

Nijii quia tammifer. hoc ejfe cupto vtrum, ei vereor magis.

M I C 1 O. Ab\ domum, ac Deos comprecare, ut uxortm

arceffas: abi. Ai S C H I N U &

Jjhsid! jamne uxortm! M I C I Or

jam. A-SCHINUS-

jam. M I C 1 Or

jam quantum potefi. AiSCHINUS.

Dî me, pater, Omnes oderint, ni magis te quam oculos num

amo meos. M I C I O.

Jjhtid. quam illam! Ai S C H I N U &.

aqui. M I C I Or

perbenigni. JE S C H l N XTS.

quidi Ule ubi ejiMilejîus?

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L E S A D E L P H E S. ag* E S C H I N U S.

Ah! M I C I O N.

Ne vous affligez pas, vousdis-je.

E S C H I N U f . Mon père, ne vous moquez-vous point ?

M I C I O N. Moy me moquer! Scpourquoy?

E S C H I N U S. Je ne lày , fi cen'eft que plus je defirecela

avec paflion, plus il me femble que j'ay fujet de craindre.

M I C I O N. Allez vous-en au logis, & priez les Dieux,

afin que vous pui fiiez Faire venir voftre fem­me chez vous. Allez.

E S C H I N U S. Quoy ? je l'épouferay tout à l'heure ?

M 1 C I O N. Tout à l'heure.

E S C H I N U S. Dés à preient?

M I C I O N . ' Dos à preient, le plûtoft qu'il fe pourra.

E S C H 1 N U S. Mon père, que tous les Dieux me haifient»

fi je ne vous aime plus que mes yeux. M I C I O N .

Quoy plus qu'elle? E S C H I N U S.

Tout autant. M I C I O N .

Ceft beaucoup. E S C H I N U S.

Mais qu'eit devenu cet homme de Milet?

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38t A D E L P H I. M I C I o.

jtbiit, ptrlit, navem afeendit. fedcurceffkst JESCHINUS.

obi y pater: 70. Tu potius Deos compreeare : nam tibi eos certi

fiio, Jghto vir melior multb es quam ego fum , ob~

températures magis. M I C I O.

Ego eo intrbyut, quaopu'funt, parentur.fae. tu, utdixi,fifapis.

JE S C H I NU S. <5)uid hocnegotiï hoc eft pat rem ejfe, authoc

eft filiumejjeï Sifrater aut fidalis effet, qui mag? tnorem

gereret ? jr. Hicnon amandusï hiccint nongtftandus in

finuefi? html Itaque adtb magnum mi injecit fuacommodi-

tate curam, Ne forte imprudent faciam, quod mlit, ti-

mens cwvebo. Sed ceffo ire intro, ne mord mtisnuptiis tgo-

met Jirnî

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L E S A D E L P H E S. 3-8* M I C I O N .

H s'en eft allé, il s'eft embarqué, il a fait naufrage. Mais pourquoytardez-vous?

E S C H I N U S . Mais vous, mon père , allez plûtoft vous-

mefme prier les Dieux, car je fuis fur que comme vous elles beaucoup meilleur que moy, ils vous exauceront aulfi plus facilement.

M I C I O N. Je vais entrer pour donner ordre qu'on pré­

pare tout ce qu'il faut ; vous, fi vous elles fa­ce, faites ce que je vous dis.

E S C H I N U S . Quelles manières charmantes fbnt-ce là!

diroit-on qu'il eft mon père. 8c que je fuis fon fils! s'il eftoit mon frère ou mon ami , pourroit-il entrer dans toutes mes pallions avec plus de bonté 8c de complaifànce ! ne dois-je pas l'aimer ? ne dois-je pas avoir pour luy toute la tendrefle 8c tout Pempreflèment imaginables ? ha, je puis dire aufli que par cette complaifànce il me jette dans un foin con­tinuel de ne rien faire par mégarde qui luy puifle déplaire : car pour le faire exprés, je luis fur que cela ne m'arrivera de ma vie. Mais pourquoy n'entrer pas tout prelèntement, afin que je ne fois pas caufë moy-mefme que mon mariage toit différé ?

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§84 A D E L P H I. !

ACTUS Q U A R T U S . S C É N A V I .

X» E M E A.

D EfeJfu* fut» ambulando. ut, Syre, te cura tua

Mxmfiratione magnus ptrdat Jupiter. Etrreptavi ufque omne oppidum, ad portant,

ad lacum, Ghfononï neque fabrkaullaerat, neque fra-

trem homo f. Vtdijfe aiebat quifquam. Nunc veto, demi

Certum obfidere eft ufque donec rediertt.

ACTUS QUARTUS.

S C E N A VII.

M I C I O, V E M E A.

M 1 C I O.

I Eo, iOit dicam nullam ejfe in nobis moram. D E M E A.

k Sedeccum ipfum. te jamdudum quart, Micio.

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L E S A D E L P H E S. 385-

A _ _

ACTE QUATRIEME. S C E N E VI.

D E M E A.

JE me fuis laflê à n'en, pouvoir phis à force de marcher. Que le grand Jupiter te puiflê

perdre, pendard de Syrus, avec ta belle ma­nière d'enfeigner le chemin : J'ay couru toute la Ville > j'ay efté à laPorte, à l'Abreuvoir ; où n'ay-je point efte' ? 8c par tout là je n'ay trou­vé ni boutique de Menuifier , nrpcrfonne qui euft vu mon frère. Mais prefèntement j'ay re-lolu d'attendre chezluy de pied ferme jufqu'à ce qu'il vienne.

ACTE QUATRIEME. S C E N E VIL

M I C I O N , D E M E A .

M I C I O N .

J E m'en vais chez elles pour leur dire que de noftre cofté il n'y aura point de retarde­

ment. D E M E A . Mais le voilà. Il y a long-temps que je vous

cherche.

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j8d A D E L P H I.

M I C I O. Jguidnam t

D E M E A.

fero alla flagiti» ad te ingentiu Sont illius adolefcentis.

M 1 C I O. ecce autem.

D E M E A.

f. Capitalia. nova,

M I C I O. ohejam.

D E M E A. ah, nefc'uctuivirjtet.

M I C I O. fc'io.

D E M E A. O ftulte, tu de pfaltria me fomnias Agere. hoc peccatuminvirginem eftcivem*

MI C I O. fcio,

D E M E A. Ohe, Jets, &patere l

M I C I O. auidnipatiari

Z> E ME A. dicmihi^

Non clamas t non infants ? • M I C I O. '

• non. malim quidem. •• D E ME A.

10. Puer natus eft.

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L E S A D E L P H E S. j87r

M I C I O N. Qu'ya-t-il?

D E M E A. J'ay à vous apprendre d'autres defôrdres de

ce brave garçon, mais des defôrdres épouvan-' tables.

M I C I O N . Voilà-t-il pas.'

D E M E A. Nouveaux, horribles, abominables!

M I C I O N . Ah c'eft aflez.

D E M E A. Ho vous ne lavez pas quel homme c'eft.

M I C I O N . Jelefay fort bien.

' D E M E A. Pauvre homme que vous elles, vous vous

imaginez que c'eft de cette Clrantevrie- que je veux parler : il y a bien autre chofê, 8c ce que j'ay à vous dire eft un crime capital, 8c contre une fille qui eft citoyenne.

M I C I O N . Je le fay.

D E M E A. Ho, ho! vouslefavez, 8c vous le foufffez?

M I C I O N . Pourquoy non ?

D E M E A. Eft-ce donc que vous ne criez point? cft-cé

que vous n'eftes pas hors de vous ? M I C I O N .

Non, j'aimerois mieux à la vérité... D E M E A.

Il y a un enfant.

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j88 A D E L P H I.

M I C I O.

DU bem vortant.

D E M E A. virgo nihilhabet.

M I C I O. Audivi.

D E M E A. & ducenda indotata eft ?

M î C I O. Jcilicet.

D E M E A. f$uid nunc futurum eft ?

M I C I O. id enim quod res if fit fert :

lUinc hue transferetur virgo. D E M E A.

ô Jupiter! Jfthoccine facto ofôriet l

M I C I O. quidfaciam amfliust

D E M E A. if. ^uid facitu t fi non if fit re tibi dolet,

Simulait cette eft hominis. M I C I O.

quinjamvirginem De/fondi : res comporta eft : fiunt nuftU : Demfi meturn omnem. h&cmagisfunthominit.

D E M E A. ctterum ,

Tlacet tibi foctum, Miciot M I C I O.

non, fi queam io. Mutare: nunc, cum non quto, aquomim*

ftro.

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L E S A D E L P H E S. 383

M I C I O N.

Les Dieux le beniflent. D E M E A.

La fille n'a rien. M I C I O N.

On me l'a dit. D E M E A.

Et il faudra qu'il l'époufe fans dot? M I C I O N.

Qui en doute? D E M E A.

Eh que faut-il donc faire prefentement ? M I C I O N.

Ce que la chofe demande : il faut faire ve­nir cette fille dans noftremaifon.

D £ M E A. Oh Jupiter ! eft-ce là ce qu'il faut faire ?

M I C I O N. Que pourrois-je faire de plus ?

D E M E A. Ce que vous pourriez? Si la chofe ne

TOUS touche pas effectivement, au moins fe-roit-iï du devoir d'un homme d'en faire quel­que femblant.

M I C I O N. Mais j'ay déjà donné ma parole, la chofe eft

conclue, l'on prépare les noces, jeleurayofté tout fujet de crainte, & voilà ce qui eft bien plûtoft du devoir d'un homme.

D E M E A. . Mais enfin eftes-vous fort content de cette

avanture ? M I C I O N.

Non, fi je pouvois la changeri mais com­me je ne le puis > je la fuppprte patiemment.

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3po A D E L P H I. Ita vit a eft hominum, quaft cum ludas tef.

feris; Si iliud, quod maxumè opus eft jaclu, non

cadit, IUud, quod cecidit forte, id arte ut corrigas.

D E M E A. Correct" or! nempe tua arte vigintimine

lf. Vro ffaltria porter e : que, quantum pot eft, Aliquo abjicienda eft ; finonpretio, gratiis,

1 M I C I O.

Ueque eft, neque illamfanèftudeovendere,

D E M E A. 6)uid igitur faciès !

M I C I O. domi erit.

D E M E A. , pro divùm fient,

lieretrix, & mater familias una indomo'.

M I C I O. 30. Curnoni

D E M E A. fatturi te crédit ejfe !

M I C I O. equidem arbitrer,

D E ME A.

Ita me Ttii ament, ut video ego tuam inep-tiam,

Eaiturum credo, ut habeasquicumcantitet, M 1 CI O.

Cur non f D E M E A.

& nova nupta eadem bec diftet !

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L E S ' A D E L P H E S . 391 Voyez-vous, dans la vieil faut tenir là même conduite que dans le jeu de dez ; s'il ar­rive que vous n'ameniez pas le point qu'il vous faut, c'eft à vous à corriger par voitre adrefie celuy que le hazard vous a envoyé.

D E M E A. L'habile homme ! c'eft par cette belle

adrefie que l'on a jette dans l'eau lesfoixante

Î(idoles qu'on a données pour cette Chanteu-é. Il faut fe défaire au plûtoftde cette créa­

ture à quelque, prix que ce foit, fi on ne la peut vendre, il faut la donner!

M I C I O N. Je ne veux ni la donner, ni la vendre.

D E M E A. Qu'en ferez-vous donc ?

M I C I O N . Elle fera chez moy.

D E M E A. Grands Dieux! une Courtifane avec une

femme dans une mefme rnaifon ! M I C I O N .

Qui en empefche? D E M E A.

Et vous croyez eftre en voftre bon fens ? M I C I O N .

Ouy en vérité je le croy. D E M E A.

Que je meure, à voir la folie dont -vous eftes, fi je ne penfe que vous la voulez gar­der pour avoir toujours avec qui chanter.

M I C I O N . Pourquoy non ?

D E M E A. Et la nouvelle mariée apprendra aufli oes

belles chanfons ?

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i c i A D E L P H l M I C I O.

fcilicet. D E M E A;

Tu inter tas reftim ducrans faltabis. M I C I O.

probe. J> E M E A.

probe ? M I C I O.

3 f. "Et tu nobifcum unà, fi ofus fit. D E M E A.

heimihi! Non te hoc p'udent.

t M 1 C 1 O. jamvero omitte, Demea, ,

Tustm ifthanc iracundiam, atque ita, uti decet ,

Hilarum ne lubenttmfac te gnati in nuptiis. Ego hos conveniam , pofthuc redto.

DEMEA. è Jupiter!

40. Hanccine vitam ! hofeine mores ! hanedemen-tiam !

Uxor.fine dote veniet: intus pfaltriatft: Domu' fumtuofa: adokfcens luxu perdit us: Senex délirons: Ipfa, ficupiatSalus Servart prorfus nonpoteft hanc.familiam.

o

M1CI0N.

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ps**—. L E S A D E L P H E S. lo i

M I C I O N . Sans doute. -

D E M E A. Vous danferez avec elles, & ce fera voua

qui mènerez le branle. M I C I O N .

Fort bien. . D E M E A.

Fort bien? M I C I O N .

Ouy, & s'il le faut, vous ferez de la par­tie.

D E M E A. - Ha, mon Dieu 1 n'avez-vous point de

honte ? M I C I O N .

Oh enfin, mon frère, défaites-vous de cet­te humeur bilieufe, 8c ibyez gai 8c content comme Vous devez, pendant les noces de voftre fils } je m'en vais les trouver, après quoyje-reviens icy.

D E M E A. Grands Dieux, quelle vie 1 quelles mœurs !

cmépw extravagance ! une femme fans bien, une Chanteufe chez Iuy, une maifon de dépen-fe 8c de bruit, un jeune homme perdu de lu­xe , un vieillard qui radote ! En vérité quand la Déefle Salus fc mettroit en tefte de fauver cette famille, elle ne pourroit jamais en ve­nir à bout. . " "

Tome II.

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JP4 A D E L P H I.

À C T U S QUARTUS. S C E N ' A VIII.

STRÛS, ï> E M E A.

S r R US.

7TJ1 Depol, Syrifce, te curafli molli ter, AJ-JLautequemuntes isdminiftraftituum.

Abi. fed poftquttm intus fum omnium rttum fatur,

Erodenmbulttre hue libitum eft. D E M E A.

illud fis vide y. Exemflumdifciflint.

S T RU S.

tcoê autem hicadefi . Senexnofter. Jshtidfitl quidtues triftisî

D E M E A.

oh, feelusî /S -T R U S.

Ohe, jam tu verba fundés hîc fkpientia t

D E M E A. Tun' ? fi meus ejfes.

S T RU S.

dis quidem ejfes, Démets i Ae tuam rem conftabilijfes.

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LES ADELPHES. 397

ACTE QUATRIEME. S C E N E VIII.

S Y R U S , D E M E A.

S Y R U S.

EN vérité, mon cher petit Syrus, tu t'es afiez bien traité, &tu ne t'es pas mal ac­

quitté de ton devoir j va, tues un brave gar-fon ! mais après m'eftre bien repu de tout ce qu'il y «voit de bon au logis, j'ay trouvé à propos de venir me promener icy.

D E M E A. Voyez, je vous prie, le beau modèle pour

l'éducation des enfans. S Y R U S .

. Ah, voicy encore noftre bon-homme. Eh bien, Monfieur, que dit-on? d'où vient que vous eftestrifte?

D E M Ê A. Ha, pendard.

S Y R U S . Ho, ho, voftre fagefle vient-elle déjà nous

chanter Tes belles maximes ?

D E M E A. Si tu eftois à moy !

S Y R U S . Vous feriez bien riche ,& ce ferait le moyen

de mettrevos affaires en bon état. S i ;

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3j>i5 A D E L P H I . '

D E M E A.

exemplum omnibut io . Curaremut ejfes.

STRUS. qustmobreml quidficit

DE ME A. rogsut

In ipfa turbtt,. sttque inpeccatà mstxumo, Jâhtod i/ix fedatum fatis eft, potaftis ,{celus t ùhtafi rt benegefla.

s r RU s. fané nollem bue exitum.

A C T U S QUARTUS.

S C E N A IX.

DROMO, STRUS, D E M E A.

D RO M O.

A l Eus , Syre, rogat te Ctefipho ut redeas.

'• STRUS. ait.

D E M E A. JQuid Ctefiphonem hic narrât t

STRUS. nihil.

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L E S A D E L P H E S . &f

D E M E A. Je ferois aflurément que tu fervirois d'e-

Jtemple à tous les autres. S Y R U S.

;Pourquoy cela? qu'ay-je fait? D E M E A.

' Ce que tu as fait ? dans le fort d'un delbr-dre horrible, au moment que vous venez de commettre un crime epouventable. & dont vous ne lavez pas encore bien les fuites, vous vous elles tous mis à yvrogner, comme fi vous aviez fait la meilleure affaire du monde.

S Y R a S. Par ma foy je voudrais bien n'élire pas ve­

nu icy.

ACTE QUATRIEME. S C E N E IX.

D R O M O Î l , S Y R U S , D E M E A.'

D R O M O N.

HOla, Syrus, Ctefiphon te prie de ren­trer.

S Y R U S . Va-t-en.

D E M E A. Qu'eft-ce que celuy-là dit de Ctefiphon?

S Y R U S . Rien.

S iij

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398 A D E L P H L D E M È A.

tho, carnufix, Ifi Ctefipho mus }

s r RUS. non tfi.

. un MU A. cm hicnWhutï

srRU s. Efi Mus quidam parafitafter parvelus;

f. Noftin'i D E M E A.

jam fcibo. ' S T RU S.

qu'td agis ? quiabis ? D £ M E A.

mitte me. • S T RU S.

Noli, inquam. 'D E M E A.

non manum abfiines, mafiigia ? An tibi jam mavis cerebrum di/bergamhiti

S Y R U S. abit.

JEdepol comijfatotemhaud fini commodum, Prafertim Ctefiphoni. quid egonunc agam ?

»o. Nifi, damna filefcuntturf*, intereainsnt-gulum

Aiiqià abeam, atque edormifcam hoc villi. fie agams

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L E S A D E L P H E S. 304 D E M E A.

H o , ho , pendard, cft-ceque Ctefiphon eft là-dedans ?

S Y R U S. Non, Moniteur.

D E M E A. Pourquoy le nomme-t-il donc?

S Y R U S. Ce n'eft pas de voftre fils qu'il parle, r/eft

d'un autre qui a le mcfmenom, c'eftd'uurno* chant petit Parafite 5 entendez-vous ?

D E M E A. Je le fauray tout à l'heure.

S Y R Ù S. Que voulez-vous faire? où allez-vous?

D E M E A. Laifle-moy.

S Y R U S. N'entrez pas, vous dis-je.

D E M E A. Veux-tu ofter tes mains, maraud ? je m'en

vais te cafter la tefte. S Y R U S-

Le voilà entré ; je jurerois bien que ce compagnon de débauche ne ièra pas fort agréa­ble à toute cette bonne compagnie" 8c fur

-tout à Ctefiphon : mais moy prefcntement que dois-je faire ? fi ce n'eft pendant que tout cecy fe calmera, de m'en aller en quelque coin cuver le vin que je viens de boire, c'eft là le meilleur parti.

S iiij

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4oo A D E L P H I.

**l-9 9 If If * I f ACTUS QUINTUS.

S C E N A I.

M I C IO, D E M E A.

M I C I O.

P Arata à nobis fitnt, ut dixi, Softrata, Ubi vis. quifiiam à me fepulit tant graviter

fores t D E M E A.

Uei mihi , quidfaciam t quid agam 1 quiet ciamemï dut querart

O cœlum, S terra , o maria Neptuni t

M 1 CI O.

henitibi, f. tXefcitvit omnemremt id nune clamât t fciliett,

Parafa Vîtes i fuccurrendum eft.

D E M E A.

eccum adeft Communis corruptela nofirûm libérât».

M I C.I O.

Tandem réprime iracundiam , atque ai t» tetti.

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L E S - A D E L P H E S. 4ot

A C T E CINQUIEME-S C E N E I .

M I C I O N , D E M E A.

M I C I O N.

DE noftre cofté, Softrata» tout eft preft, comme je viens de vous le dire, le ma­

riage fe fera quand vous voudrez. Mais qui fait tant de bruit à noftre porte? 8c quieft-ce qui fort de chez nous ?

D E M E A. Ha que feray-je? que deviendray-je ? com­

ment me prendray-je à crier ? quelles plaintes feray-je? oh Ciel) oh Terre! oh Mers du grand Neptune !

M I C I O N . Voilà noftre homme, il a découvert tout

le myftere, c'eft fans doute ce qui le fait crier fi haut. C'eft cela mefme, il nous en va donner tout du long. N'importe il faut aller au devant.

D E M E A. Ho le voicy, le commun corrupteur de nos

enfans. M I C I O N .

Enfin retenez un peu voftre colère, 8c re­venez à vous.

S v

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4ot A D E L P H I .

D E M E A.

Reprefp, redit, mitto maUdiela omnia: i o. Rem ipfam putemus. dictum hoc mttr nos

fuit, Ex te adeb eft ortum, ne tu curares meum, Neve ego tuum ? refponde.

M I C l O.

falium eft, nonnego.

D E M E A, Cur nunc apud tepotat ? cur recipis meum ? Cur émis amieam, Mhiol nam qui minus

i j . Mihi idem jus tiquons eft effe, quod mecum eft tibi?

' ' ffjuando ego'tuum non euro, ne cura meum.

M I C I O.

Non tquom dicis, non : nam vêtus verbum hoc quidem eft,

Communia effe amiïorum interfe omnia.

D E M E A.

Eacete. nunc demumifthaenatavratio eft.

M I C I O.

zo. Aufculta paucis, nifi moleftum eft, Ttemen'. Erincipio, fi id te mordit, fttmtumftlii f>)uemfaciunt; qu&fo, facitohoc tecumcogi­

tes: Tu illos duo olim prore tolerabas tua, fjhtodfatis putabastuabona ambobus fore,

tf. Et me tum uxorem credidifi fciiicet

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L E S A D E L P H E S. 40J • D E M E A.

Elle eft toute retenue s je fuis revenu à moy, je laifle là toutes les injures : exami­nons un peu la chofe de fens raffis. Il me fem-ble que nous eftions convenus ( 8c cela eftoit mefme. venu de vous ) que vous ne vous mê­leriez point du tout de mon fils, 8c que je m> me mêlerais pas non plus du voftre. Répon­dez.

M I C I O N. Cela eft vray, j'en tombe d'accord.

D E M E A. Pourquoy donc aujourd'buy eft-il chez vous

à faire la débauche ? pourquoy le recevez-vous dans voftre maifon ? pourquoy luy avez-vous acheté une MaiftreiTe? pourquoy les chofes ne font elles pas égales entre vous 8c moy ? puif-que je ne me méfie pas d'Efchinus, ne vous mêlez pas de Ctefiphon.

M I C I O N. Ha ce que vous dites n'eft pasjufte, en vé­

rité non. Vous favez cet ancien proverbe qui dit, qu'entre Amis tous biens font communs.

• D E M E A.

Qjie cela eft bien dit ï vous vous avifez bien tard de tenir ce langage.

M I C I O N. Oça, mon frère, écoutez, s'il vous plaift,

ce que j'ay à vous dire. Premièrement, fi la dépenfe que font nos enfans vous chagrine, fou venez-vous, je vous prie • qu'autrefois vous les éleviez tous deux félon vos petits moyens, 8c que vous ne doutiez pas que vô­tre bien ne leur dûft fuffire ; car alors vous me regardiez comme un homme qui devoit

Svj

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404 A D E L P H I . Ducturum. eandem iliam rat ton tm antiquam

obtint : Conferva , autre , parce , fac quampluri-

mum Illis relinquas. gloriam tu ifiam obtint: Med, que. prater fpem evenere, utantur fine.

30 De fitmma nihil decedet : quod hinc accefi ferit,

Id de lucro putato ejfe. cmnia 'fi hue voles In animo vert cogitare, Demea, Et mihi, ejo tibi, & illis dtmftris molef-., t'tam.

DEMEA.

Mitto rem : confuetudmem ipforum.~

M I C I O-mane.

if Scio: iflhuc team, multa in homme, De­mea ,

Signa infunt, ex quibu' conjectura facile fit,

Duo cum idem faciitnt , fape us pojjis di-cere,

Hoc licet impane facere huit, iïïi non licet: Kon quod dijpmilis rts fit, fed quod » qui

facit: 40 JOus, ego ejje in illis video : ut confidam fort

ita Ut volumus. Video fapere, inteUegere, in

loco Vercri» inter fe amure, faire eft liberum lngenium, atque antmum : quovts illos tu

die Reducas. Ai enim metuas, ne ab re fint ta-

tnen

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L E S " A D E L P H E S. 4©y fc marier. Faites donc encore voftre com­pte fur cela ; confervez, aquerez , épargnez, travaillez à leur laiflèr le plus de bien qu'il vous ferapoflible ; ayez cette gloire vous feul, mais laifièz-les joiiir de mon bien , puifque c'eft une chofe qui leur vient contre voftre ef-perance? voftre fonds ne diminuera point j 8c tout ce qui- vous viendra de mon cofté, pre­nez-le pour un gain tout clair, 8c pour une bonne fortune qui vous arrive. Si vous vous mettez bien cela dansl'efprif, mon frère, vous nous épargnerez beaucoup d'inquiétudes, a vous, a moy, 8c à nos enfans. /

D E M E A. Mon Dieu, je laiflc là le bien, 8c je ne me

.plains que des mauvaifes habitudes qu'ils pren­nent.

M I C I O N. Arreftez, je vous entends, c'eft là que f en

voulois venir. Voyez-vous, dans l'homme il y plufieurs marques par lefquelles il eft fa­cile'de connoiftre de deux peribnnes qui fe­ront une mefme choie, celuy à qui on peut la laiflèr faire fans aucun danger, 8c celuy à qui on ne le peut pas : non que la chofe foit dif-

iferente en elle-mefme, mais c'eft que ceux qui la font font fort differens. Je voy dans.nos deux enfans des chofes qui me perfuadent qu'ils feront comme nous les pouvons fou-haiter. Je leur voy du bon fens, de l'intelli­gence, de la pudeur quand il faut , 8cilss'ai-ment tous deux. Tout cela fait aflèz voir qu'ils font de bon naturel, 8c qu'ils ont l'efpritbien faft -, vous les réduirez quand vous voudrez sans aucune peine : mais vous me direz peut-

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loi A D E L P H I . êfC. Omiffiores pauU. ô nofier Demea,

Ad omnia alia atate fapimut reSius .* Solum unum hoc vitium adfert ftnectus homi-

nibut, Attentions fumus ad rem emnes, qttam fat

eft: 6)uod Mot fat atas acuet.

DEMEA.

* - ne nimiummodi yo. Bon* ttu ifia nos rationes, Micio,

Et tuus ifle animas aquus fubvortat.

MICIO.

tace". Non fiet. mitte jam ifihac : da te hodie mi-

hi. Hxporge frontem.

DEMEA.

fciliçft ita, tempusfert'. Taciendum eft : caterum rus crascumfilio

!ff. Comprime lucu. MICIO.

imo de noJie cenfeo : Hodie modo hilarum te face.

DEMEA.

& iftam pfaltriam XJna Mue mecum hinc abftraham.

' MICIO. pugnaveris,

Eoprorfuspaito illi aïïigaris filium. Modbfacito ut illamferves.

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' L E S A D E L P f i E S . 407 effre que vous craignez qu'ils ne foient un peu negligens pour leurs affaires, ô noftre cher Demea , l'âge nous rend plus fages en toutes les autres chofes, le feul défaut que la vieillefle apporte aux hommes, c'eft qu'elle fait que tous tant que nous fommes, nousa-vons plus d'attachement au bien qu'il ne fau­drait. Ne craignez rien, l'âge ne les rendra que trop foigneux.

. . D E M E A . Cela eft fort bien, pourvu que toutes ces

belles raifbns, '& cet efprit tranquille qui prend tout en bonne part n'aillent pas les gâ­ter entièrement.

M I C I O N. - Ne vous inquiétez point, cela n'arrivera pas. Déformais ne fongez plus au pafle; don­nez vousàmoy pour aujourd'hui, Stibyez de belle humeur.

D E M E A . Je vois bien qu'il faut que je le fafle , le

temps le veut ainii. Mais demain dés la peti­te pointe du jour» je m'en retournerai aux champs avec mon fils.

M I C I O N.

Dés minuit fi vous voulez ; foyez feule* ment de bonne humeur aujourd'hui.

D E M E A .

J'y entraînerai auflï cette Chanteufe. M I C I O N.

Vous ne fauriez mieux faire, car par là vous y attacherez abfolument voftre fils. Songez feulement à la bien conferver.

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4o8 A D E L P H I.

D E M E A.

ego ifihucvidero: atque 60. ÏUi favilkplena ,fumi, ac pollinis

Coquendo fit faxo, & mohnio : protêt hac, Meridie ipfi, faciam, utftipulam colligat. Tarn excoliam reddam atque atram , quart*

carbo efi. ,

M I C I O. plaeet:

Hune mihi videre fapere. atque equidem fi-lium

Tum etiam fi nolit, cegas cum Ma un» cu-bet.

D E M E A. •

Dérides f fortunatus > qui sfto animo fies. Egofentio.

M I C I O. th, pergifhet

D E M E A. jam defino.

M I C I O. lergointro, e$>, cuireitfi, eireihilaremhunt

fumamue diem.

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L E S A D E L P H E S. 409, D E M E.A.

• -J'y donnerai bon ordre ; j'auray foin de la mettre à la boulangerie, afin qu'en cuifant le pain elle foit toujours enfumée, & pleine de cendre Se de farine. Ce ne fera pas encore l f tout ; car en plein midi je l'envoirai couper du chaume.; de forte que je la rendrai aufii brûlée Se aufii noire qu'un charbon.

• M I C I O N .

- Cela me plaift ; 8c c'eftprefentementque je' vous trouve raifonnable. Mais quand vous, l'aurez rendu fi jolie , je fuis d'avis que vous contraigniez voftre fils d'en eilre amoureux.

D E M E A.

Vous raillez encore ? vous eues bien heu­reux d'eftre de cette humeur > mais pour moy je refiens...

M I C I O N. Ah!continuerez-vous toujours?

D E M E A. Non, voilà qui eft fait.

M I C I O N. • Entrez donc au logis, 8c puis que ce jour eft deftiné à la joye, ne fongeons qu'à nous divertir.

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410 A D E L P H I .

A C T U S QUINTUS. S C E N A IL

D E M E A. .

N UnquAm ita quifquAm bene fubdutta ratio-ne Ad vit Am fuit,

fguin ret, *tAt, ufus femfer uliquid apporttt novi,

Aliquid montât: ut illa , qu* tefcire credtu, ne feins,

- Ht, qu* tibi puturis prima, in experiuado ut répudies,

f.^uod mi evenit nunc. Nam ego vitâm dut ram, quam vixi ufque adh'uc,

îrope jamdecurfo (patiomitto. id quAmebremt re ipf* repperi,

Eacilitate nihil ejfe homini melius, teeque de-ment'tA. id

• Efeverum,exme, Atqueex fratrecuivisfaci­le eftnofcere.

Vitam ille fuam femper egit in otio, in convi-viis ;

1 o. Clément, placidut, nulli Udtre os, arridere ont' nibus :

Sibi vixit : fibi fumtum fecit. omnes benedi-cunt, amant.

Ego ille agreftis, ftvttt, triftis , par eue, trucU' lent us, tenax,

Buxi uxorem. quam ibi miferiam vidil nati filii,

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L E S A D E L P H E S. 411

ACTE CINQUIEME.

S C E N E II .

D E M E A.

T Amais perfonne n'a fi bien réglé & fupputé tout ce qui regarde la conduite de fa vie ,•

que les affaires , l'âge . l'expérience, ne luy ayent encore appris quelque chofe de nou­veau , & ne luy ayent fait connoiftre qu'il ne fàvoit rien de ce qu'il croyoit le mieux l'avoir, de manière que dans la pratique on fe voit fouvent oblige de rejetter le parti qu'on avoit regardé d'abord comme le plus avantageux. C'eft ce que j'éprouve aujourd'hui, car fur le point que ma courfe eft prefque finie, je re­nonce à la vie dure ot pénible que j'ay menée? iufques ici. Et ' cela pourquoy ? parce que l'expérience m'a fait voir , qu'il n'y a rien de fi avantageux aux hommes que d'avoir de la complaifance 8c de la douceur. Il ne faut que nous voir mon frère 8c moy pour eftre con­vaincu de cette vérité. Il a pafle toute fa vie dans l'oifiveté 8c dans la bonne chère j tou­jours doux, complaifant, ne choquant jamais perfonne, careffant tout le monde, il a vécu pour lui, il a dépenfé pour lui ; chacun en dit du bien, chacun l'aime. Et moy bon campa­gnard, rude, trille, épargnant, rébarbatif, avare, je me fuis marié ; quelle mifere ! il

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jpix A D E L P H I. Alla cura, ti» autem , illis dum Jtudeo ut

quant plurimum if. Eacerem, contrivi in quarundo vit/un, sttqut

atattm mtam : ' Hune exact a atate hoc fruiti pro labort ai iif

fera, jOdium. iSe aller fine labort patria potitur

commoda. Illum amant, mefugitant: itti credunt ctnjt-

lia omnia : lUum diligunt : apud iïïum funt ambb ; ego

defertu' fum. xo. Illum, ut vivat, optant, mtam autemmor-

ttm txptctant feilictt. Ita tes mto labort tductos maxurno, hic fecit

Juos ïaulo fumptu. mifiriamomnem ego tapit, hk

potitur gaudia. •4g* âge, jam experiamur porto contra, tequid

ego poffiem Mande dictrt, oui btm'gnifactre, quandobuc

provocat. xf. Ego que-que à mis me amari & magni pendi

poftulo. i Si id fit dandoatqueobfequendo, nonpofttritres

feram. • Décrit! id mta minime refert, quifumnatu

maxumus.

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L E S - A D E L P H E S. 4a j m'eft venu des enfans, autres foins ; en tra­vaillant à leur amafler le plus de bien qu'il m'a efté poffible, j'ay ufe ma jeuneflè & ma vie. Prefentement, que j'ay un pied dans la fofle, toute la recompenfe que je reçois de

\ mon travail,, c'eft la haine de ceux pour qui je me fuis facrihe. Et luy, fans nulle peine, il joiiit de .tous les plaints qu'on peut trouver à eftre père. Ils me fuyent, ils luy font con­fidence de tous leurs iècrèts, ils le cherilfent, ils font toujours chez luy j 8c on me laifle ièul. Ils fouhaitent qu'il vive long-temps, & ils attendent ma mort avec-impatience ; En un mot après que j'ay bien pris de la peine à les élever, il les a rendu liens à peu de frais ; toute la peine eft pour moy, -Se tout le plaifir pour lui. Oça voyons donc à noftre tour fi nous lie faurions pas auffi dire des choies obligean­tes, 8c faire le libéral, puis qu'il me perfecu-te'fi fort. Je veux eftre aimé 8c eftimé des miens aufli bien que luy. Si cela fe peut fai­re à force de prefens 8c de complailarrce, je fuis fur qu'il n'aura pas le demis. Le bien manquera, que m'importe ? je fuis le plus vieux.

* $ . *

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4t4 . A D E L P H L

ACTUS Q J J I N T U S . S C E N A III.

SERUS.DEMEA.

s'r RU s.

HE»», Demex , rogst frster, ne siens Ion-gins.

D E M E A. Jguis homo ? ô Syre nofter, falve, quïdfit ? quid

agitur ? S T RU S.

ReSi. D E M E A.

optumi eft.jam nunchsc tris primum addidi

Ersternaturam, O nofter, 6)uidfit\ Jguid agitur ?

Servom haud inliberalem,probes te,, & tiéi Lubens benefaxim.

S T R U S. gratiam habeo.

D E M E A. atque, Syre,

Hoc verum eft, rjp ipftt re experiere prope-diem.

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L E S A D E L P H E S. 416

ACTE CINQUIEME. SCENE III.

S Y R U S, D E M E A.'

S Y R U S.

HOla, Monfieur, voftre frère vous prie de ne vous pas éloigner.

D E M E A. Qui m'appelle? ô noftre cher Syrus, bon

Jour, que fait-on ? corrlment vont les choies ? S Y R U S .

Fort bien. D E M E A tas.

Bon, nous commençons le mieux du monde, voilà déjà trois mots que j'ay dits contre mon naturel. O noftre cher, que fait-on ? comment vont Us chofes ? * Il me paroifr. que tu es un * A„._ brave garçon, & que tu fers avec honneur? je' t'aflure que je ferai ravi de trouver les occa-fions de te faire du bien.

S Y R U S . Je vous fuis fort obligé, Monfieur.

D E M E A. Mais, Syrus, c'eft qu'il n'y a rien de plus

yray, 8c tu en verras les effets au premier jour.

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' • ~ 1 4,6 A D E L P H I .

ACTUS QUINTUS. .

S C E N A I V .

G E T A, D E ME A.

G ET A.

H Era, ego bucad kosprovijb, quammoxvir' ginem

Arceftant. fed eccum Bemeam. falvosfies. D E M E A.

Oh, qui vocare t G ET A.

'Geta. D E M E A.

Geta, hom'mim maxum't

Tretii ejfe te hodie judicavi animo meo: f. Nom is mihi efi profettb fervue fpettatus fi'

"t, Cui dominas cura eft, ita uti tibifenfi, Ge-

ta: Et tibi ob eam rem, fi quid ufus venerit, Lubens benefaxim. méditer ejje affabilis,

. Et btne prpeedit. GETA.

bonus es, cum hacexiftu' mas.

'D E ME A. 10. Paulatim pîebem primulum facio meam.

ACTE

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L E S A D E L P H E S. 4 I 7

ACTE CINQUIEME.

S C E N E IV.

G E T A , D E M E A .

G E T A.

MAdame,-je m'en vais les trouver, afin qu'au plûtoft ils faflent porter là nou­

velle mariée chez eux j Mais voici Deme» ! Bon jour Monfieur.

D E M E A . Comment t'appelles tu?

G E T A . Je m'appelle Geta.

D E M E A . Geta, aujourd'hui j'ay longé en raoy-mef-

me que tu es un garçon qui vaux beaucoup ; car leloft moy, un valet cft aflèz éprouvé quand on voit qu'il prend les interefts de fon Maiftre avec autant d'affection que je vois que tu fais, mon pauvre Geta ; aufli pour cette' bonne qualité, fi l'occafion s'en prefente, ie fe- , , . ray ravi de te faire plaifir. « J'ay defleind'é- **'' tre affable, & cela ne me réuflit pas mal.

G E T A . Vous eftestrop bon, Monfieur, d'avoir ces

ientimens-la pour moy.. D E M E A .

Je commence par les petites gens, & je tâ­che de les gagner peu a peu.

Tome I I . T

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4>8 A D E L P H I.

ACTUS Q U I N T U S . S C E N A V.

JE SC H I NU S. DE ME A. SE RUS.

G ET A.

JESCHINUS.

O Cadunt me eemidem ,dumnimi' fimHtunup* titu .

Studtnt facere, in affttrando confitmttnt diem.

D E M E A.

®htid agitur, JEfihinei JE S C H I N U S.

hem . fnter mi tu hit erns ?

D E M E A.

Tuus horde vero(Ranime, &nieturttpater, f. j>)ui te fîtes ateum octelos hejie. fed curnon do-

mttm Uxorem artejjèsl

JESCHINUS. eufio. verum hoc mihimo-

rs. eft, Ttbicinet, &hymen&ttm auicetntent.

D E M E A.

Vm' tuhtiicfeni tmftulteirei

JESCHINUS. auidi

thoy

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L E S A D E L P H E S . 419

ACTE CINQUIEME.

S C E N E V. E S C H I N U S . D E M E À; S Y RUS.

G E T A.

E S C fil N U S.

EN vérité ils me font mourir, en voulant faite mes noces avec trop de cérémonies

H de formalitez, ils employent tout le jour en préparatifs !

D E M E A . Hé bien; Efchinus, que fait-on?

E S C f i l N U S . Ha ! vous eftiez-là, mon père ?

D E M E A . Oiii auurément, je fuis voftre père autant

par la tendrefle que par la nature, car je vous aime plus que mes yeux. Mais d'où vient que vous ne faites pas aller voftre femme chez vous ?

E S C H I N U S. Je le voudrois bien j mais la joiieufe de

fluté 8c ceux qui doivent chanter l'hymenée nous font attendre.

ET E M E A. Ecoutez, voulez-vous croire ce bon hom­

me ? E S C H I N U S .

Quoy, mon père? T y

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A2o A D E L P H I. D E M £ A.

miffa hae face ', Hymenaum, turbot, lampadas, tibicinsu}

10. Atque hanc in horto maceriamjube dirai • Quantum poteft : hanc transfsr, unamfacdo-

mum: Transduce (je matrem rjrfamiliam omnem ad

nos. JESCHINUS.

plat et, "Pater kfidijjîme.

D E M E A,

euge, jam lefidus vocor. Eratri odes fient fervia: turbam domum

if.Adducet ; fumtum admitset j malt a: août meai

Ego lepidus ineo gratiam. jubé nunc jam Dinumeret illi Babylo viginti minas. Syre, cejfas ir.e, acfacerei

S r R US. quidergo ?

D E M E A. diras:

Tu, illas, abi ,& transduce.

G ET A.

diitibi, Demea, 20, Benefaxiht, cum te video noftra familia

Tarn ex animo factum velle.

DEMEA.

dignes arbitrer. Tu quid ait ?

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L E S A D E L P H Ë*S. Ait D E M E A.

Envoyez -moy promener ces chanteurs d'hymenée,ces joiieufes de flûtes, ces flam­beaux 8c toute cette foule de gens; faites aba­tte au plus vite ce méchant mur qui eft dans le jardin ? qu'on porte par là la nouvelle ma­riée, que les deux maùons n'en foient plus qu'une, 8c que la mère Se tous fes domefti-ques panent aufli chez nous.

E S C H I N U S. ' L'on ne fauroit donner un meilleur con-

feil, mon père ; en vérité vous elles un hom­me charmant.

D E M E A bas. Courage, on dit déjà que je fuis charmant, la

maiion de mon frère vaeftrc percée, toute la foule fe jetter a là dedans, cela icra à r fes cof» lires, 8c bien d'autres chofes ; que m'importe? je fuis un homme charmant 8c l'on m'a de l'o­bligation. * Mais à propos, Efchinus, faites en *t -„ . forte que cet homme tout coufu d'or fafle un prefent de foixante piftoles à ces bons gar­çons. Syrus, eft-ce que tu ne vas pas taire ce que j'ay dit ?

S Y R U S . Quoy donc?

D E M E A. Abattre ce mur. Et toy, Geta, cours les fai->

re venir par là. G E T A .

Que les Dieux vous comblent de biens, Monfîeur, puis que vous nous rendez de fi bons offices ?

D E M E A! Vous le méritez bien. Que dites-vous de cet

expédient, mon fils? T iij

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Atx A D E L P H I. JE S C H I N V S.

Jîç opiner. £> £ M E A.

mulù rediù/ef, j*htam ïllam puerpéraux mnc duci hue pif

viar» JEgrotam.

M: S C H 1 tfy s. nibil c.nimvidi melius, rm)

pater.

D E M E A.

if. Sicfileo. fesleccum, Mich egreditur forai.

A C T U S QUINTUS, S C E N A VI.

Ml CIO, I> E ME A, JE&CHINUbX

M l Ol O.

J Ubetfraterî ubiefit tu jubés hoc, ZHmsent D E M É A.

Egoverojtebeo , dp bac re, & abis omnibus Jguam maxumi unam facere nos banc fan**'

liam > Colère, adjuvare, aijungert.

JE S C H I N U S. ita qu&fi, pater.

M l C I O. p Haud aliter cenfea.

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L E S A D E L P H E S . +a$ E S C H I N U S.

Je le trouve fort bon. D E M E A.

Cela eu beaucoup mieux, que de porter par la rue une pauvre femme malade Se nouvelle­ment accouchée.

E S C H I N U S . En vérité, mon père, il ne fe peut rien de

mieux imaginé. D E M E A.

Ccft ainfi que j*ay accoutumé de faire ; Mais voilà Micion qui fort.

ACTE CINQUIEME. SCENE VI.

M I C I O N , D E M E A , E S C H I N U S .

M I C I O N .

C 'Eil mon frère qui l'a ordonné? 8c où eft-ce qu'il eif. ? ha, mon frère, eu-il vrai,

l'avez-vous ordonné? D E M E A .

Oiii aflurément. Et en cela, comme en tou­tes les autres choies, je fbuhaite pamonnément d'obliger ces peribnnes, de lesiervir, de nous les attacher, 8c de ne faire qu'une mefmemai-ibn de la noftre 8c de la leur.

E S C H I N U S Hliicim. Je vous en prie, mon père.

M I C I O N . Je ne m'y oppeuepas.

T iiij

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414 A D E L P H I .

D E M E A. imo htrcleitanobisdecet,

Trimum hujus uxoris eft mater. M I C l O.

qttid fofteai D E M E A.

Troba (? modefta. M I C I O.

ita aiunt. D E M E A.

natu grandior. MI CIO.

Scie. D E M E A.

parèrejam d'tu hoc fer an-nos non poteft :

Nec, qui eam refpieiat, quifquam eft : fol» 'fi- m

MI C I O.

quam hic rem agit?

( D E M E A. 10. Hancteaquom eft dueere, & te operam, Ht

fiât, dare. MI CIO.

Me dueere autem ?

te.

D E M E A.

M I C I O.

me l D E M E A.

te, inquam. M I C 10.

ineptie,

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L E S 'A D E L P H E S . 41? D E M E A.

Et bien plus, je vous dis quenousyfommes obligez. Premièrement c'eft la mcre de la femme de voftre fils.

M I C I O N . " Et bien après cela ?

D E M E A. C'eft une brave femme, fort modefteît fort

fàge. M I C I O N .

On le dit. D E M E A.

Elle a déjà quelques années. M I C I O N .

Je le fky. D E M E A.

H y a long-temps qu'elle n'eft plus en âge d'avoir des enfans ; elle eft feule, elle n'a per­sonne qui ait foin d'elle.

M I C I O N . Que veut-il faire?

D E M E A. Il eft jufte que vous l'époufiez. Et vous Ef-

chinus, vous devez faire tout ce que vous pourrez pour l'obliger à le faire.

M I C I O N . Moy l'epoufer, dites-vous !

D E M E A. 1 Oui vous.

M I C I O N -Moy !

D E M E A. Vous-mefme vous dis-je.

M I C I O N . Vous radotez.

T T

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4»* À D E L P H I.

D E M E A.

fi tu fis homo^ Btcfaciat.

M S C H I NUS. mi pater. MlCIO.

quidî tu autemhuic, afi-ne, ttnfcu.ltml .

D £ M E A. nihil agit,

Eieri aliter nonpoteft. MICI O.

délirât. JE S C H I N U S.

fine te exorem , mi pater, M I Ç I O.

Infants î au fer. DE ME A.

âge, davemam-filio.

Mî C l O.

fati" fanas es ? if. Ego novas maritus. amto demum quinte tft»

fixagtfimo Eiam , atque anum decrepitam ducaml idntt

eftis auSores mihi l

• JE S C H I N US. lac, premifi ego Mis.

MI CI O. promifti autemt de t»

largitor, puer. D E M E A.

Age, qtUd, fiquid te majus orett

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L E S A D E L P H E S. 417 D E M E A.

Efchinus, fi vous avez de l'efprit, il le fe­ra.

E S C H I N U S. Mon père.

M I C I O N. Quoy donc, grand beneft , eft-ce que tu

prends garde à ce qu'il dit? D E M E A.

Vous ne gagnez rien: cela-ne peut eftre au­trement.

M I C I O N. Vous extravaguez.

E S C H I N U S. Souffrez que j'obtienne cela de vous» mon

père. M I C I O N.

Es-tu fou ? ôte-toy de là. D.E M E A.

Allons, mon frère, faites ce plaifir là à votre fils.

M I C î O N. Eftes-vous en voftre bon Sens ? moy nou­

veau marié à foixante 8c cinq ans ! 8c époufer une vieille décrépite ? me le confeilîeriez-vous?

• E S C H I N U S, Fakes-le, je vous prie , je leur ay pro­

mis. M I C I O N .

Oui ? vous leur avez promis? difpofez de vous, mon petit mignon.

D E M È A. Allons, faites, ce qu'il vous demande ; que

féroit-ce donc s'il vous demandoit quelque chofe de plus grande confequence ?

T vj

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4 i f A D E L P B L

M I C I O*

quafi non hoc fit maxumutni

2> E M E A.

Du veniam.

AÎSCHINITS* ne gravère.

I>E M E A. . fisc, promitte.

Ml CIO. nonomtttist

MSCHINUS. Uifi te exorem.

M I C J.O. vishéte quidemeft.

D EM E A. âge-, prolixe Micio*

M I C I O. Et fihocpravom, ineptnm, abfurdum, atqut

alienum à -vit» me» Videtur i fi vos tantopere ifthuc voltis, fiât*

JESCHINUS* benefacis:

Mérita te amo. D E M E A.

verum quidt quid ego dicaml bot confit quod volo.

J$uid nmtc quod reftat ? Hcg'to cognatus bit eft proxumus.

i.f. Affinis nobis, paufer : bent nos aliquid facert iUi dectt.

M I C 1 O* JZ»idfac.rei

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L E S A D E L P H E S. *ae>

M I C I O N . Comme s'il y avoit rien de plus grande con-

fequence que cela. D E M E A.

Accordez luy cette grâce. E S C H I N U S .

Eh , mon père > ceflez d'avoir de la répu­gnance à nous faire ce plaifir.

D E M E A. Depefchez, promettez le nous.

M I C I O N . Ne me laifleras-ru point ?

E S C H I N U S . Nvn, que je n'aye obtenu cela de vous;.

M I C I O N . En vérité «refila une violence.

D E M E A. Allons, mon frère, obligez-nous jufques au

bout. ' M I C I O N .

Quoy que cela me paroifle impertinent, lot,' ridicule, & entièrement oppofe à la vie que j'ay toujours menée, fi vous lefouhaitezavec tant d'ardeur, je le veux.

E S C H I N U S . Je vous fuis bien obligé, mon père ; que j'ay

de raifons de vous aimer ! D E M E A.

Mais quoy ? que diray-je encore ?puifqu'on fait tout ce que je veux ; qu'y a-t-il encore ? Hegion eft leur proche parent & noftre allié j ' il eft pauvre, nous devons luy faire quelque bien.

M I C I O N . Eh quel bien?

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430 A D E L P H E D EM E A.

agelli eft btc fttb urée paulum, quoi loch tu foras :

Huicdemus, qui fruatur. M I C 1 O.

# paulum id autem I D E M E A.

fi multumfiet, Xaciundum eft : propâtre buse tft, bonus eftt

nofter eft, rtffi datur. Eoftremb, nmmeumillud verbumfacto,quoi

tu, Micio, Vs.Xtnt dfapienter dixti dudum: Vttium com­

mune omnium tft, " Jpjtodnimium ad rem infentefa notenti fu-

mus : banc maculam nos decet Xffugere : diSum tft vert, d rt tpfafieri

oporfet, Micio. MICIO.

J^uidifthic! dabitur, quandoquidem hicvolt. JE S C H I N U S.

mi fater. D E M E A.

. Hune tu mihi germantes esparittr cerpmtjf» anime.

MICIO. gaudeo..

S E M E A. Suo fibi gladio hune jugulo. < •

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L E S . A D E L P H E S. 45» D E M E A.

-Vous avez icy prés dans le fauxbourg un méchant petit coin de terre que vous affer­mez à je ne fày qui, donnez-fuy-en la joiiif-lance.

M I C I O N. Un méchant petit coin dé terre 1

D E M E A. S'il eft grand, tant mieux, il ne faut pas

laiffer de le lùy donner ; il tient lieu de père à Pamphila, ifefthonneftehomm», &noftre al­lié , on ne fauroit mieux faire. Enfin, mon frère, ne croyez pas que je veuille m'attri-buer le beau mot que vous avez tantoft dit fi, fagement, c'eft vous qui en eftes l'auteur ; le défaut le plus ordinaire de tous les hommes, c'efi d'e fit e trop attachez, au bien quand ils font vieux» Nous devons éviter cette tache, rien n'eft plus vray que ce beau mot, nous devous en pro­fiter.

M I C I O N. •Que faire? il n'y a pas moyen de s'en def-.

fendre, puifqu'illeveut. E S C H I N U S.

Mon cher père... D E M E A.

C'eft prefentement que nousfommes vérita­blement frères par la naifiance 2t par les lén-timens.

M I C I O N. J'en fuis ravi.

D E M E A. Je le tuë de fes propres armes.

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4 } i A D E L P H I.

ACT.US QJJINTUS. S C E N A VII.

STRUS, DEMI A, MICIO,

JE S C H I N U S,

•STRUS.

X/Atrumeft, quodjufti, Dont». D E M E A.

Trugi homo et. ego ddepol hodie me* quidem fintentia,

Judtco Symmfieri dquom liberum.

MICIO. ifthunc liberum î

Ghtodwun obfa&um ? D E M E A.

multa, STRUS.

i nofter'Démets, ttdepolvbr bonu' es :

f. Ego iftos vobis u/que à pueris curtmi tstnbos fe~ dulb,

Docui, monui, bene prtcepi femper qui, potui omnia.

D E ME A. Res apparet, & quidem porro, opfimre mm

fide, Scortum adduccre , ttpparare de die convi-

vium :

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L E S A D E L P H E S. 433

ACTE CINQUIEME. S C E N E VII.

S Y R U S , D E M E A , M I C I O N .

E S C H I N U S.

S Y R U S .

MOntieur, j'ay fait ce que vous m'aviez commandé.

D E M E A . Tu es un brave homme. Pour moy en veri- "

té je fuis d'avis , Se je trouve qu'il eft jufte qu'aujourd'huy on mette Syrus en liberté.

M I C I O N. Luy en liberté? £> pour quelle action r

D E M E A . Pour plusieurs.

S Y R U S. Oh, noftre cher Demea, ma foy vous elles

un bon homme ! vous favez bien aufli avec quel foin je vous ay élevé vos deux enfans dés le béguin j je les ay enfeignez, je leur ay donné des confeils, des préceptes, j'ay fait tout du mieux qu'il m'a efté poifible.

D E M E A . On le voit bien > tu leur as rendu mefme

d'autres fervices 5 tu n'as jamais ferré la mule •dur ce que tu asachetépour eux, tulesafcû-jours fort bien fervis dans leurs amours , Se tu as eu foin de leur tenirtoujours le fefiin tout

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434 A D E L P H I. Non mediocrishominishec funt officia.

s r R 17 s. S lepidum caput !

D E M Z A. 10. Toftrtmb btdie m pfaltria ifia tmunda hic

adjutor fuit, flic curavit: prodefft «quom tfi : alii meliortt

erunt: Deniqut hic volt fieri.

M I C I O. vint tu hoc fierit

JE S C H l NU S. cupio.

M I C I 0. fiquidem

T* vit, Syrt, ehe accède htec ad ta*, liber eftol S X RU S.

benefacis : Omnibtt' grattât» babet, ejefeorfutn tibi $r«»

terea, Dtmea. D E M E A.

i j \ Gaudto. JE S C H I NU S.'

& ego. S Y RU S.

credo, utinam hoc perpétuât» fiât gau-diut», ut

thrygiam uxorem mettm unk mecum videam libtram.

DE M S A. cftumam

atulitrem quidem. » S r R U S.

ér quidem nepoti tut hujmfike Hedit primammammam dédit hoc.

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L E S A D E L P H E S. 435-preft dés le matin , ce ne font pas là affurs-ment les actions d'un homme médiocre.

S Y R U S. Ho le galant homme que vous elles !

D E M E A. De plus , il a aujourd'hui aidé à faire le

marché de cette Chanteufe , c'eil luy qui a pris foin de tout, il eft jufte qu'on l'en re-compenfe . les autres en feront mieux leur de­voir, & d'ailleurs je fuis fur qu'Efchinus lo veut.

M I C I O N. Eit-ilvray, mon fils? le voulez-vous?

E S C H I N U S. Je le fouhaite fort.

M I C I O N. P^îfauççela eJt ainfi , hola, Svrus, appro­

che, jetemetseniioerte. S Y R U S.

Vous avez bien de la bonté, Monfieur. Je* « 23» vous remercie tous en gênerai, * 8c vous en me* particulier, Monfieur.

D E M E H. J*ay bien delà joye de te voir libre.

E S C H I N U S . Etmoyauffi.

S Y R U S. Penfuisr^rfuadé. Pluft à Dieu que ma joye

fuit entière, 8cque je ville Phrygia ma pau­vre femme mile en liberté aufit bien que moy.

D E M E A. Ha, en vérité c'eil une fort brave femme.

S Y R U S.

C'eil elle oui a donné la première àteter à voure petit fils.

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V

43$ A D E L P H L

D E M E A.

hercleverb fer'ib, Si attidem primam dedii, haud dub'mm qui»

ttnitti aauom fiet.

Mic 10:

±o. Obeamremi D E M E A.

ob eam: pofirembàme argentum, quanti ejl, fumito.

S T R U S. DU tibi, Demea, omnes femper omnia optutu

adfcrant. M I C 1 O.

Syrt, procejjifiihodit pulcre.

DEMEAf Jkjuidem porro , Micio,

Tu tuum offiàum fades, atau* huic aliquii paulum pra manu

Dederis, undmtutatur. reddet tibi cite, MICIO.

ijihoc vilius. MSCHINUS.

tg. Frugi homo eft. s r R u s.

reddam hercle. damode. \ MSCHINUS.

\ âge., pater. MI-CIO.

poft confulam. DEMEA.

Fadet.

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L E S A D E L P H E S . 437

D E M E A.

Ho, en bonne foy , fi cela eft , il eft jufte de l'affranchir.

M I C I O N. Comment ? l'affranchir pour cela !

D E M E A. Ouy fins doute , pour geh. Enfin fi vous

voulez je vous donnerayce qu'elle vaut. S Y R U S.

Que les Dieux accompiiflent toujours tous vosibuhaits» Monfieur.

M I C I O N. Tu n'as pas mal fait tes affaires aujourd'huy,

Syrus. D E M E A.

Cela eft vray, mon frère, ppurvû que vous Pliiez voftredpvoir, & que vous luy mettiez un peu d'argent entre les mains, afin qu'il le fafle valoir , 8c qu'il ait le moyen de vivre ; il vous le rendra bien-toft.

M I C I O N. Je ne luy donneraypasunfeftu.

E S C H I N U S . Il eft honnefte homme. je vous en répons.

S Y R U S . Sur ma parole , Monfieur, je vous le ren-

dray, donnez feulement. E S C H I N U &

Allons, mon père. M I C I O N.

J'y penleray. D E M ÇA.

Il le fera, »e vous mettez pas en peine. .

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438 . A D E L P H I.

S t &.U S.

i vit «ptimt !

JESOHINVS.

épater mi fèftivijfitnê !

M I C 1 O. •

JQuid ifthtut autres tant repente morts mtt-tavit tuos ?

Quod prolubium ! qua ifihtc fitbita eft lar­guas !

D E M E A.

dicam tibi, Vt id oftenderem, quod ti ifii facilem érfifii-

vumputant, ' 30. Id non fiers ex ver a vi ta, neque adeb ex tquo

ry b/no, Sed ex, afientando, iridulglndo, & largiendo ,

Micio. 1 Uunc adeo, fi ob eath rem vobis mea vit a in-

vifiteft, JEJchine, Quia non jufia injufia prorfus omnia omnint

obfeqttor: Miffa facio, efftendit e, emiie, facite quod vo-

bklubet. 37. Sed, fi id voltis potius, qutvospropterado-

lefcentiant, Minu' videtis, mugis imptnfi cupitis, confit-

litis parum, Htc reprehendere, ejecorrigeretne, objecunda-

re in loco j .. Eue me, qui id faciam vobis. *

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L E S A D E L P H E S. 4J4>

S Y R U S.

Ah, que vous avez de bonté !

E S C H l N U S .

Ah, mon père, vous efies le plus galant homme du monde.

M I C I O N.

Qu'eft-ce donc que cécy, mon frère ? & qui a pu fi promptemehtcmatigervoftre humeur? quelle profufion! quelle prodigalité fi fubitel

D E M E A.

Je vais vous le dire ; c'eft que j'ây voulu s faire connoiftre que fi nos enfans vous

trouvent #fi doux & fi aimable , ce n'eft pas que vous viviez comme vous devriez vivre , ni que vous agiflicz félon l'équité 8c le bon lens ; mais c'eft que vous elles indulgent, que vous leur fouffrez tout, 8c que vous leur donnez tout ce qu'ils demandent. Prefente-ment donc , Efchinus, fi ma manière de vie vous eft odieuiê, parce que je ne fuis pas d'hu­meur de vous accorder tout oe que vous vou­lez, jufte ou injufté; je né mamefle plus de voftre conduite ; dépêtriez .achetez, faites tout ce qui vous viendra dans l'efprit, je ne vous en parleray de ma vie : mais fi au contraire vous voulez que je vous reprenne dans les chofes dont vôtre âge 8c la pafiîon avec laquelle vous les délirez vous empefehent de voir les con-iequences 8c les fuites.fi vous voulez que je vous corrige, 8c que je n'ayepour vous qu'une com-plaifance de véritable père ; mevoicy, je fuis preft à votts-denner tous mes foins.

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440 A D E L P H I.

JESCHINUS.

tibi, pater, permittimus; ' Flusfcis auidfaBo opustjt. fedde fratrequii

fitti DE M E A.

Jîno, 40. Habeat. finem in ifthae faciat.

JE S C H I S U S. • ifthucrefte. Elaudite.

ESCHINUS.

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L E S A D E L P H E S. 44.5-

E S C H I N U S. Nous nous mettons entre vos mains, mon

λere, vous eftes plus fage quç nous, & vous avez mieux comment il faut fe conduire.

Mais que deviendra mon frère ;

. D E M E A. Qu'il ait cette Chanteufe , & que ce foit

là la dernière de fes folies. E S C H I N U S.

Cela efttrcs-raifbnnable. Adieu, Meflieurs, battez des mains.

Tome II,

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REMARQUES S U R

LES ADELPHES-

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REMARQUES

L E S UR.

T I T R E .

L Es Adelphe* ] C'eft un mot Grec qui li­gnifie les frères. Donat remarque qu'on

écrivoit Adelphoe, cznon pas Adelphi} comme les Latins difoient olot pour illi, Clerumenoe pour Clerumenoi.

foliée pour les jeux funèbres de L. Mmilitw Voulus. J C'eft L. Atmilius Paulus cjuifut ap­pelle Macédoniens, parce qu'il avoit vaincu Perfes Roy de Macédoine. Il mourut l'an de Rome 703. cent cinquante-huit ans avant la naiifance de Noftre-Seigneur j 8c il mourut fi pauvre, qu'il fallut vendre fon bien pour payer ta dot de fa femme.

Sous les Ediles jgj. Fabius Mttximus, & P. Cornélius Africanue. J Ce titre eft corrompu, comme Scaliger 8c beaucoup d'autres l'ont re­marqué ; car ce n'eftoit pas les. Ediles qui a-voient foin des Jeux funèbres, mais les en-fans ou les parens du mort. D'ailleurs il eft certain que P. Cornélius Scipio Africanus, fils de Paulus Atmilius, ne fut jamais Edile, puif-que lamefme année qu'il demanda l'Edilité , il fut fait Conful avant l'âge, Aurclius Victor

V i j

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448 R E M A R QJLJ E S. dans le petit Traité qu'il a fait des hommes IHuftres : Cum Mdilitatem peteret, Conful an-teannos ultrofaBus. Et cela n'arriva que douze ahsaprés la mort du père, 8clarcprefentation de cette Pièce, ce Scipion n'ayant alors que vingt-frxans. Muret a corrigé ce titre fur un ancien Manufcrit qu'il avoit vu à Venife. ABa Itidis funebribus L. Mmilii Pauli, quos fecere J^ Fabius Maximus, & P. Cornélius Afrèca-nus. Elle fut reprefentée aux Jeux funèbres de L. ALmiliut Paulus, qui furent faits par J§K Fabius Maximus., rh> Pub. Cornélius Scipio Afri-canus. C'eftoit les deux enfans de Paulus ALmi-lius. Le premier fut appelle Q^Fabius Maxi­mus ; parce qu'il avoit efté adopté par Fabius Maximus ; 8c l'autre P. Cornélius- Scipio Afri-canus, parce qu'il avoit efté adopté par le fils de Scipion l'Africain.

Avec lesfiutesTyrienes. ] Tybiis Sarranis. Tyr eftoit appelle anciennement Sor par les

Phéniciens. Les Carthaginois , qui eftoieht une colonie de ces peuples, difoient Sur pour Sor. De Sar on a dit Sarra. Sarranusefi donc Tyrius de Tyr ; comme dans Virgile Sarrano dormiat ofiro. J£tf il dorme fur la pourpre de Tyr. SarranisTibiis, c'eftàdire, avec les flûtes égales gauches. Mais \oicy une tres-grandc difficulté. Ces flûtes Tyrienes avoicnt le fon aigu, c'é­tait celles qu'on cmployoit toujours dans les occafions.de joye; comment donc eft-il pofli-ble que les enfans de Paulus /Kmilius ayent employé une Mufîque enjoiiée à la reprefenta-tion d'une Pièce qu'ils faifoient joiier aux fu­nérailles de leur père ? cela ne peut eftre. Ce titre n'eft pas feulement corrompu, il a été tronqué, comme il eftaifé de le faire voir. Il

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-R E M A R QJJ E S. 449 faut lire, ACIA PRIMUM TIBIIS LTDIIS, DEINDE TIBIIS SARRANIS. ElUfut jouée avec Us flûtes Lydiennes, f3* en fuite avec Us flûtes de Tyr. Avec Us flûtes Lydiennes, c'eftà dire avec les deux flûtes droites qui avoient le fon grave ; & que l'on emplovoit par confequent dans les occalions de deiiil. Apres la première reprefentation on la joiia avec les flûtes gauches, parce que ce fut fans doute dans des occalions moins trilles quecel-le-cv. Et afin que l'on ne m'accufe pas de faire cette correction fans quelque fondement, voi-cj ce que Donat en éerit dans la Préface de cette Pièce. Modulât a eft autemtibiis desttris, id eft Lydiis ob feriath gravitatem, &c.ftpe tamen mutatis fer fcenam modes, cantica mu-tavit, attod fignificuj titulus fient httbens fub-jtdas ferfonts Uttersu M. M. C. ElU fut jouée d'abord avec les flûtes droites, tfefl à dire Ly­diennes , à caufi de lagrtsvité du fujet. Terence y changea pourtant tnfuite la Mufiquf, comme nous l'apprenons par U titre, au bas duquel, après Us Performages» on voit ces trois Ut très, Id. M. C. c'eA à dire, mutatis tnodis cantici. Ces trois lettres que Donat avoit vues dans les titres de fon temps, ne font pas dans celuy-cyj ce qui prouve encore que le titre n'eftpas en­tier.

y "i

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4fo R E M A R QJJ E S.

R E M A R Q U E S fur le Prologue.

7. Ty haute l'a traduite en Latin. ] Comme-X. rientts, Mourant enfemble, elr, l'expli­

cation du titre Grec Synapothnefcorites, Varron foutenoit dans un de fes ouvrages, que cette Comédie des Mourans enfemble n'eûoit pas de Piaute ; mais il faut ou qu'il parlait de quel-qu'autre Pièce qui avoit le mcfme titre, ou que de fon temps les ièntimens fuflent parta-

f ez fur ce fujet, que les uns la donnaûent à Iaute, 8c les autres à Aquilius. 9. J§ui dés le commencement de la Pièce. ] In

frima fabula. 11 faut remarquer cette façon de parler, in frima fabula, dans la première Co­médie, pour in frima partefabula, dant.lt com­mencement de ta Comédie. Cela eit ordinaire dans cette Langue. • 14. Dont Piaute avoit négligé de fi ftrvir. ] J^ui prétérit us négligentia efi : Jgbti avoit efié latjpi par la négligence de Piaute. Terence n'a garde d'accufer icy Piaute d'eftre négligent j négligence eft mis en bonne part, commedans le Prologue de l'Andrienne ; 8c il lignifie pro­prement quand on néglige quelque chofe dont on n'a pas befoin.

if. Des premiers delà République. ] Le jeu­ne Scipion, le jeune Lcelius, 8c Furius Publius, non feulement des premiers, mais des plus honneltes gens de la République. Il en a elle aiTez parlé, dans la vie de Terence.

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R E M A R Q,U E S. 45-1 18. Il trouve qu'on nefauroit luy donner une

plus grande louange, put/que défi une marque qu'il a l'honneur de plaire. ] Terencenefedef-rcnd pas du reproche qu'on luy faiibit que ces grands hommes luy aydoient à faire ces Co­médies i ce reproche luy faifoit trop d'hon­neur.

Pour moy je fuis perfuadée que la modeftie de Terence en cette occaiion. ne vient ni de fbn bonnefleté, ni de l'envie qu'il avoit de faire plaifir à fes amis 8e à fes bienfaiteurs i mais de la force de" la vérité. Il y a beaucoup d'apparence que des gens auflî polis que Sci-pion Se Lcelius avoient beaucoup de part à ces Pièces ; car comment un Carthaginois auroit-il pu en fi peu de temps attraper toutes les beautez 8c toutes les grâces d'une Langue auflî difficile que la Langue Latine?

ao. En paix, en guerre, ©• en toutes firtet faffaires. In belle, in otio, m negotio. j On Veut que enpaix, m otio, regarde FuriusPu-blius, qui eftoit grand Politique ; en guerre, in belle, regarde Scipion qui eftoit grand Ca­pitaine; 8c enfin que dans toutes fortes d'affai­res , %i negotio, regarde Lcelius, qui eftoit un des plus fages hommes de la Republique, 8c du meilleur confeil.

Et à vous, Mejpeurs, f$» h tout le peuple J à vous, cela s'adrefle aux fpectateurs, à tous ceux qui eftoient au Théâtre : & à tout le peu­ple, c'efl pour ceux qui nettoient pas prefens.

Viiij

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4f* R E M A R QJI E S.

REMARQUES Sur la première Scène du premier

A<fte.

M Mon. ] Muret 8c beaucoup d'autres ont toujours écrit le nom de ce Peribnnage

par un t, Mitio, Mitions 8c ils ont crû qu' i l avoit eflé formé du mot Latin tnilis, doux, af­fable: mais ils fe font trompez, Terence au-roit fait une faute trop groffiere, û dans une Pièce Grecque .(car la Scène eft à Athènes) il avoit mis un nom tiré d'un mot Latin. Micio eft un nom purement Grec , MLKION, com­me on le voit dans Dtodore, Plutarque, Lu­cien ; 8c il vient de uttuaii, petits. 8c de là o n tirait aufli des noms de femme, comme Micca. Plutarque dans le Traité de la vertu des fem­mes. Dans Ariftophane il y a une Mica , la, première fyllabe longue, parce que c*eftpour Micca.

Storax! Efchinus n'e/l pas revenu cette nuit."] Storax ! non rediit à cœna hac nocte JEfchinus. On a fait à ce premier Vers une faute tres-con-fiderable en le traduifant, comme fi c'eftoit une-demande que Mkion fift à Storax de cette manière , Storax , Efchinus eft-il revenu cette nuitl Mais ce n'eft pas une interrogation. Mi-cion fortant de fon logis à la pointe du jour , appelle Storax, un des Valets quieftoientallez fe foir chercher Efchinus > 8c voyant qu'il ne répondoit point, il juge \ ar là que perfonne a'cû encore revenu,, ni le Maifire, nifesYar

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R E M A R QJJ E S. 4fJ letsjtrcit pourquoy il dit en luy-meune, non rediit , e*yc. Efchinus ri'efi fat revenu, ej>c. Cela eft important pour le Théâtre. Donat ne s'y eitoit pas trompé.

1. j^ui allèrent au devant de luy. ] ^uiad-verfum ierant. C'en1 le propre terme, adver-

fum ire ; &les Valetsqui alloient audevantde leurs Mailtres, eftoient appeliez Adverfitores.

13. De placer dans fin cœur, ou de prendre dans fa mai fin. ] j-shtempiamnt hominem in ani-mum inftituere aut parare. Cette disjoncrivc aut marque aflurément que Terence dit icy deux choies ; m anijnum inftituere, placer dans ibn cœur ; parare, prendre dans ia maiibn ; c'efi.un mot de commerce, qui convient fort bien à l'adoption.

17. D'une manière douce thy tranquille. J Ego hanc clément cm vitam urbanam. Cette façon de parler me paroiit remarquable, lit a dé­mens, une vie clémente, pour ce que nous di­rons une vie douce 5c tranquille. Plaute s'eil fervi de mefme du mot clementer dans le Sti-chusa.. 1.

Hodiene exoneramus navem , frater ? PA. cle­menter volo.

Déchargeons-nous aujourd'huy le vaiffiau, mont frère ? PA. Doucement, je vous prie.

18. Et j'ay pris le parti des gens du monde , qui aiment le repos, çt> qui font confifter le bon­heur à ne fi point marier, fe riay jamais eu da femme. 3 Et quod fortunatum ifti putant, uxo-rem nunquam habui. Ce partage paroutéqui­voque dans le texte, mais je ne laiflepas d'e-flre perfuadée qu'on s'eil trompé quand on a traduit, ejy au l'tu qu'ils eftiment que le maria­ge fiit un grand bonheur, je ne me fuis pâmait

Vv

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4f* R E M A R Q U E S . marié. C'cft aflurement tout le contraire, c a r c'eft à n'eftre point marié que les gens dont parle Micion, font confiftcr le fouverain bien . & il n'eft pas difficile de le faire voir. Micion fait icy le portrait d'une vie douce & tranquil­le , éloignée de toutes fortes d'affaires & de chagrins ; il n'eft donc pas poffible qu'il finif-fe ce portrait par une chofe qui eft tres-fou-vent contraire au bonheur de la vie : déplus il faut que l'oppofition foit pleine 8c entière en­tre la vie douce que menoit Micion, 8c la vie dure 8c pénible deDemea. Cette oppofi-tion n'y fera plus, fi Micion a dans fa vie un endroit par lequel on le puifle juger malheu­reux. D'ailleurs le mot ifli montre aflez quel' eftoit lefentiment de.Micion ; 8c c'eft ce m o t que Pon n'a pas aflez confideré, car il a un rapport mamfefte avec urbanam vitam ; iftt c'eft à dire iftt urbani, ces gens de ville, ces gens qui comme moy vivent à la ville. En ef­fet les gens du monde font moins portez au mariage que les gens qui vivent feuls à la campagne ; 8c l'on doit mefme avouer que les femmes font plus neceflaires à ces derniers qu'aux autres. qui peuvent plus facilement s'en pafler, à caufe de la focieté qu'ils peu­vent avoir dans les villes. Terence nous ap­prend ailleurs ce qu'il penfoit du mariage , quand il fait dire par Demea, Acte y. Scène 4 . Duxi uxorem, quam ibi miferiam vidi ! Je me

fuis marié, quelle mifere n'ay*ie point vue'. Donat a efté de ce fentiment, mais ce qu'il ajoute, que Terence s'adrefle là aux Romains, qui naturellement n'eftoient pas trop portez au mariage, eft ittfoutenable. Il n'eft pas quef- • tien des Romains dans une Pièce toute Grec-

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R E M A R QJ17 E S. 45-5-que. Menandre penfoit-il aufli aux Romains quand il écrivit, il /4çcHs*e*" f' èV«« jwW i **u,Ç*'tù>. Eten quoyje fuis trop heureux, ien'ay jamais eu de femme. Et ailleurs» ocu $iéu%ioc, fiétoTOf S» iàfUi , E'iigm yxçbi-mt, curtic, eixt-%urfti pauiur. Celuy qui veut vivre heureux, doit ïaiffer marier les autres, <&> ne fe marier ja­mais. Donat devoit fe fouvenir que les Athé­niens n'eftoient pas plus pour le mariage que les Romains. Cela fuffit pour faire voir fi M. Guyet a efté bien fondé de vouloir corriger & quod infortunatum ifti putant.

48. Prefent ou abftnt, il fera toujours le mi­me. ] Prefent ou abftnt. Ce n'eft pas pour par­ler d'un changement de lieu ; car on eft par tout le meime, les lieux ne changent pas les inclinations; mais r/eft pour dire, devantveut comme hors de voftreprefence, &c.

R E M A R QJJ E S Sur la féconde Scène du premier

Acte.

1. T TA. je vous trouve fort à propos. J Dés le JLl.premier mot que prononce Demea, ri

faitfentiriagroffierete & fon incivilité ; car il eft plus prompt à quereller ion frère, qu'à luy rendre fon lalut.

Ofez vous me faire cette demande, vous chez, qui eft Efchinus ? ] Rogas, ubi nobis JEfchinus fiet ? On s'eft trompé à ce paflàgc, car on a crû que Demea difoit: Ofez-vous me faire cet­te demande à moy qui ay un fils comme Efchinusî

y VÀ

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4*« R E M A R Q U E S . Vbi, c'eftàdire apud quem, vous chez, qui; & c'efï une fort bonne raifan, quoy vous avez. chez vous Efchinut, & vous me demandez ce quej'ayà offre triffel Les Anciens fè fervoient de ces adverbes de lieu pour marquer les per-ibnnes, comme is undepetitur,. pour à quo, ce-luy a qui on demande ; unde hue (ufeepta effb,

f our ex qua j amorem hue tranffulit, pour in anc puellam, & mille autres exemples.

i l . II. adonne mille coups au Maiftre.jMul-tavit~ Quand ce mot doit lignifier donner des coups, aflommer , battre, meurtrir, il faut toujours écrire mulcare , 8c non pas multarr;. j 'en ay fait une. remarque ailleurs. Il faut bien remarquer ici que Demea ne dit pas ici leno-tiem, mais d'ominum ;. il îupprime là profèf-fion de l'homme, parce qu'elle auroit dimi­nué le crime d'Efchinus.

17 a enlevé une femme qu'il airnoit. ] ' Eripuii mulierem quam amabat. Voilà cet incident que Terence a pris de la Comédie de Diphi-lus, comme il le dit luy-mefme dans le dixiè­me Vers du Prologue.

no» Je ne trouve riende fi injufte qu'un hom­me qui n'a, &c.} Hommeimperitonunquam quiet-quam injuftius. Imperïtus, ignorant, fignifie icy proprement un, homme fans expérience., 8c qui ne eonnoift point du .tout le monde..

' 31 . Oh Jupiter J -Donat remarque icy. que-cette exclamation, oh Jupiter ! eit'de la Tra-, gedie, & non pas de là Comédie ; c'eft pour-quoy Terence ne la fait jamais faire qu'on ne voye en mefme temps que ceux qui la font ont l'efprit agité de- quelque paffion- violentey comme ici Demea qui ajoute, vous me ferexs. devenir fous

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R E M A R Q.U E S. 4x7 n.Ceftmoy qui en portera? la plus grande-

partie. J Ego illi maximum partent fcram. illi n'eft pas le datif du pronom elle, <feff, Tadver-be illi pour Mie, ibi.

39- J$uu»dje le pourra? ] Ubï commodum. Afconius & Taubmam s'eftoicnt trompez à ce mot qu'ils expliquoient, quaniiu libuerit , tant qu'il me plaira.

40. ' Peût-eftre que fes Maijlrejfes le chafii~ ront, Fortaffe excludeturforas.] Voicy unautre fèns qu'on peut donner à cepaf&gevpeut-eftre que je l'enverray promentr, & j'avoue quej'ay crû long-temps que c'eftoit le bon, mais en­fin je trouve que l'explication que j'ay fuivie eft beaucoup plus du caractère de Micion ; & Ton doit prendre garde à la tendrefTe de ce fentiment, il ne dit pas abfblument, /es Mat. trejjerle chajferont, txeludetur foras ; maïs peu t-eftre que /es Maifirefies le chajferont. . Il aime tant ce fils, Se il en a fi bonne opinion r qu'il croit qu'il peut fe faire aimer fans rien don­ner. Il y a dans ce mot, peut-eftre, une grâ­ce mervcilleufe, Donat Pavoit bien vûë, voi­cy fa remarquer Et mire fortafle dicit ut pater indulgent & credens adolefcentem poffi etiam gratis amari àb arnica , non enim ajfirmavit ut diceret, excludeturforas.

46. De ceux qui le font véritablement. ]«§>«» vere fiiunt. On a eu raifbn de corriger qui verefient, comme s'il luydifoit, Vous n'e-ftes père que par adoption, & moy je le fuis par la nature;.vous devez donc apprendre de moy à Tertre, car il y a bien de la différence entre les fentimens que ces deux états doi­vent kifpirer.

«7. je ne fuis pas un Etranger : Attentes non.

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4f8 R E M A R Q J J E S. fum. ] Il ne veut pas dire, je fuis pourtant fin père, de peur de déplaire à Micion, qui a adopté fon fils ; mais il dit je ne fuis pas un étranger, comme s'il difoit, vous ne voulez, pas que je me mêle de fa conduite, c/pendant je ne fuis pas un étranger.

R E M A R Q U É S

fur la troilléme Scène du premier Aâe.

i. àf~^ E qu'il vient de, dire rieft pas vrayen tout, V J il eneftpourtant, &C.] Necnthilneque

omnia hacfunt. Donat explique autrement ce partage, mais fi la remarque eft de luy, aftu-rément il s'eft trompé. Au refte Terencefait parler ainfi Micion, pour fatisfaire les Spec­tateurs , qui eu fient trouvé mauvais qu'il euft dit des chofes qui pouvoient faire un tres-mé-chant effet dans l'efprit des jeunes gens, s'il n'euft ajouté ce correctif.

Et cela me chagrine en quelque façon ] No» nihil molefta hac funt mihi. Le caractère de Mi­cion eft fort bien ménagé ? Terence fait qu'il eft chagrin de ce queDemea luy a dit ;& pour fatisfaire les fpectateurs, comme je viens de di­r e , & parce que s'il eftoit infenfibleàtoutce que fait Efchinus, ce neferoitplus une indul­gence , mais un abandon entier. Dans cette grande modération il ne laifle pas de conier-ver tous'les fentimens d'un véritable père, & cela .eft fort bien conduit.

i l . Jj>u'il vouloitfe marier. ] Efchinus luy

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R E M A R Q U E S . apej avoit bien dit qu'il vouloit fe marier, mais il n'avoit oie luy dire avec qui ; ainfi Micion , uns le lavoir , explique une partie du fujet de cette Pièce.

11. Jjhte le fin de la jeune fit eftoit pafsé. } Micion attribue tout au feu de la jeunette, ce rien à Efchinus ; il ne fe peut rien de mieux luivi que ce caraâere.

^ R*E M A R Q rJ ES

Sur la première Scène de l'Acte deuxième.

6. TE fuis Marchand ePEjclaves au moins J] Il " J luy déclare cela, parce que les Marchands d'Efclaves eftoient fort privilégiez à Athènes, à caulê du grand profit que la Republique en tiroit ; & ifeftoitdeffendu.de les maltraiter , fur peine d'exheredation : c'eft pourquoy dans Lucien un jeune homme qui fe plaint d'eftre déshérité à tort par fbn père, dit, nssvpr«êo-QtcivSeArm, T a-t- H un Marchand d'Efela-•ues quife plaigne que je Paye maltraité ?

a j . Comment? me connoiffez.-vous 1 ^uidî nofttri qui fim ? ] Donat a fait une remarque fur ce Vers , qui mérite d'eftre expliquée : proprie fie tnim dicit qui nihil quidquam débet, num me no vit ? non quodf ignorttur fed quod injure non cerna tur. Samùon parle icy propre­ment, car c'eft ce que répond d'ordinaire un hom­me-qui ne doit rien, Me connoift il? Ce n'eft pas qu'il fait inconr.u d celuyà qui il parle, mais c'eft qu'en Jujiict on n'a point d'action contre

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46o R E M A R Q.U E S. iuy. C'eft à dire que ces termes, nofii me ? nofii qui fim ? font tirez des coutumes Se des formalitez du Barreau ; pour dire qu'on ne devoit rien à quelqu'un, on luy diloit, mt connoiffez-vous ? car-il n'y a rien qu'un créan­cier connoiflë fi Bien que fon débiteur ; & ce que répond Efchinus, qu'il n'a nulle envie de le connoiftre, eft prefque la mefine chofe que s'il difoit , je n'ay nulle envie de te rien demander. Ainfi toute la plaifanterie decepaf-fage confifte dans l'équivoque des termes s mais cette équivoque ne fubfifte plus dans la traduction, quoy qu'elle foit à la lettre.

a6. De ne faire point icy tant de vacarme. J Convicium, proprement, un bruit de gens qui parlent tous en mefine temps,- c'eft pouran-vocium.

Ha, vraiment il ne te manqueroit plut que ce­la. ] Nam hercle etiam hoc refiat. On avoit tra­duit ce Vers, Eft-ce là tout ce que tu avoit à nous dire ? mais ce n'eft point du toutlefens, & l'on s'eftoit fort éloigné de la penfée d'Ef-chinus comme on le peut voir par ma tra­duction. Id hercle refiat, lignifie en Latin, il ne manque plut que cela. On en trouve des exemples dans Ciceron.

40. Et je la foutiens telle. ] II y a dans le Latin, & je mets la mai» fur elle, pour foû te­nir publiquement fa liberté. Nam ego libérait iïïatn adfero cauffa manu. Ce font des termes de droit, adferere aliquem manu, porter la main fur quelqu'u»pour le mettre en liberté, pour foûtenir qu'il eft libre : cauffa liberali ; pour une caufe de liberté, pour foûtenir fa liber té devant les Juges-

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R RM.A R QJJ E S. 46r

REMARQJJES Sur la troifiémé Scène du fécond

Aâe.

3. "TV E je ne fay quel combat entre mon Mai-xJ trt cV toy. ] Cum hero nefiio quid cancer-.

taffe. La beauté de ce panage confifte daps le choix du mot concerta/je, qui eft un terme qui met l'égalité entre Elchinus 8c le Marchand d'Efclaves ; & c'eft ce qui fonde ta reponfè que ce Marchand fait à Syrus.

4. Je riay de ma vie vu un combat plus iné­gal. J Nunquam vidi miquius ctrtationtm com­parât am. Ce comparatam eft un mot emprun­té des combats de Gladiateurs, dont on choi-fiflbit les plus égaux pour les faire combattre eniemble.

ai. Il eft vray, fay acheté plufteurs Eftlaves, é> beaucoup d'autres chofes pour portera Cypre. J Empta matières complûtes, ry> item hincaliaqu* porto Cyprum, M. Guyet ne veut pas que ce Marchand euft acheté des femmes à Athènes pour les porter à Cypre ; il veut au contraire qu'il les euft achetées à Cypre pour les porter à Athènes : 8c fur cela il change 8c corrompt le texte comme il luy plaift. Mais il de voit fe iouvenir que les Marchands couroient toute la Greoe, 8c y achefoient des femmes pour les aller vendre à une Foire célèbre qui fe tenoit à Cypre ; 8c que le profit que les Grecs, par­ticulièrement les Athéniens , - tiraient de ce commerce, eftoit caufe de tous les privilèges

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4.6i R E M A R O^U E S . qu'ils avoient donnez aux Marchands- d'Efcla-ves.

18. As-tu enfin fupputé le gain qui te revien­dra de toutes tes marehandifes ? ] jamne enume-rafti id quoi ad te rediturum put as ? On a fort mal compris le fens de ce paflage, en l'expli­quant comme fi Syrus parloit encore de cette fille que fon Maiftre avoit enlevée. Ce n'eft point cela, ce Valet veut détourner le dis­cours , & parler d'autre chofe, afin que cela {bit fini : il demande donc au Marchand s'il a bien fupputé le gain qu'il prétend faire dans fon voyage, & cela efl: tres-fin.

R E M A R Q U E S Sur la cinquième Scène du fécond

Acte.

i . \ Ksi cherche-t-ilt'2 Mené qu&ritt Le ca-IVlractere du Marchand d'Efclaves efl

très-bien fuivi? il compte pour rien les coups & les injures , pourvu qu'on luy donne fon argent. Il dit ces mots, me cherche t-ilt en treflaillant de joye ; & lors qu'il voit qu'on n'apporte rien, il efl tout confterné.

11. Avoir pensé quitter fon pais. ] . Fene ex patria. Donat nous avertit que Menandre avoit fait que ce jeune homme avoit voulu fe tuer de defefpoir: mais comme cela eftoit trop tra-

Êique, Terence l'a corrigé avec raifon; &ce-, fait voir de quelle manière ce Poète tradui-

foit les Pièces des Grecs. 14. Allons, Monfieur, dépêchons-nous, car

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R E M A R Q.U E S. q6q Sannim eft fort prtfeé de partir pour Cypre. 1 Syrus dit cela pour épouvanter le Marchand, qui appréhende d'abord qu'Efchinus ne veuil­le profiter de la neceflîté où il le voit de par­tir , & qu'il ne luy donne point d'argent : c'eft pourquoy il repond qu'il n'eft pas fi prefle.

17. Je vous prie , au nom de Dieu, de vous défaire. ] Ctefiphon eftoit rentré, mais la peur qu'il a que le Marchand ne fafle du bruit, le fait forttr pour prier fon frère de payer prom-ptement cet homme.

18. De peur que s'il Je met encore à faire l'enragé. ] Ne fi magis irritatus fiet. Irritari fe dit proprement des Chiens, comme Donat l'a fort bien remarqué. Lucilius, irritata canis.

ai. fe m'en reviendrai bien vite avec tout ce qu'il faut. ] Ego jam tranfaBa re convortam me domumeum ebfonio, Donat fait ici cette ju-dicieufë remarque. Convertere magnifiée di-Bum. Verbum eft enim magm molimmis ty ag-minis mgentis, nam convertere fe dic'nur quem pompa prteedit, ty Imperator proprie conver­tit exercitum, Convertere eft- dit magnifique­ment. Car ?efi un met de grand attirail ty de grande fuite, ty il fe dit proprement de ceux qui reviennent comme en triomphe, ty des Généraux qui ramènent leur armée. Mais noftre Langue n'a point de terme propre qui puifle exprimer cela.

Il faut que nous paffions toute cette journée,~\ Hilarem hune fumanus diem. On peut remar­quer ici fumere prendre, pour confumtre ngn» ettJuQaa..

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+($4 R E M A R QJLI E S.

REMARQJJES Sur la première Scène du troifiéme

Acte.

CE qu'il en arrivera ? jejpere en vérité que tout ira bien. ] On a mal diftribué les per-

fonnages en cet endroit» car voici comme ils font en tous les Tercnces.

. CAN. Shfidfiet rogasi Reêie aiepolfpero. SOS. mododolores,tneatui

occipiunt primulum. CAN. Jam nunc tintes, eprc.

Il eft certain que c'eft la Nourrice qui parle toujours, comme jel'ay mis dans ma Tradu­ction, le refte fait un fens ridicule. Donat l'auroit bienfenti. Softrata dit à fa Nourrice meatunutrix, & la Nourrice lui répond avec la mefme tendrefle meatu. Cela meparoîtin. conteftable.

R E M A R QJLT E S Sur la deuxième Scène du troifiéme

Acte.

i f .TE n'y a rien que je ne voulu fie foufrir. ] XSatis mihi id habeam fupplicii, dum illos

ulcifiar modo. Jufqu'ici on a expliqué cepaf-fage de cette manière. Je les tiendrais ajjex. bien punis, pourvu qu'on me permit de me van~

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R, E M A R QJJ E S . 46j gtr d'eux, tf?c. En vérité ce feroit là une chofe bien furprenante que Syrus crût ces gens-là aflez punis, s'il a voit arraché le cœur a l'un, & ecrafé la telle à l'autre. Je m'é­tonne que l'on n'ait fenti que cela fait un très-mauvais fens. Ce paflàge .eft plus difficile qu'on n'a crû. Satis haberem idfupplicii, li­gnifie Je fouffrirois tel fupplicequt l'en voudrait. M. Guyet trouve à propos de retrancher ce Vers.

16. Au vieillard qui a donné le jour à et monfire. ] C'eft Demea j car quoy qu'il fuft tres-éloigné d'approuver ce que failoit fon fils, Geta eft fi tranfporté décolère qu'U trou­ve que ce bon-homme en donnant le jour à Ef-chinus, a fait un allez grand mal pour mériter qu'on luyofte la vie.

19. Afin que tout s fa cervelle fuft répandue dans la rue. ] Ut ctrebro difpergat viam- Te-rence avoit écrit apurement difpergeret, com­me mon père l'a corrige, car on ne peut pas dire illum invaderem ut interficiam, mais ut interficerem, autrement ce feroit un folecifme. Illum arriptrem ut difpergeret, afin que les temps fe repondent.

a i . Je les renverferois, je les poufferais. ] Tous ces termes font pris de la guerre.

13. Hé, qui que vous foytz., ne m'arrefiez, point. ] Hem, quifquis es ,fine me. Cette répon-fe . de Geta eft fondée fur ce qu'en Grèce le peuple prenoit plaifir à arrefter les Efclaves dans les rues Se à les amufer, afin qu'ils fufTcnt battus quand ils feroient de retour chez leuis Maiftres.

13. Que croire prefentementl & à qui fi fier?} Quidcredas jam, aut eut credo* t Qui

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i.66 R E M A R QJTJ E S. croirei C'eft pour les chofes. A qui fi fier ? C'eft pour les perfbnnes, car la bonne foy ne vient que de ces deux chofes, ou de la qualité des perfonnes qui promettent, ou de la nature des chofes qu'ils promettent.

je. Il porterait l'enfant dans le giron de fin père ] In fui gftmio pofiturum puerum dicebat patris. C'eftoit la coutume des Grecs, les en-fans nouveaux nez eftoient mis par les pères dans le giron des grands pères. Il y en a une

{>reuve bien remarquable dans le 9. livre de 'Iliade Vers Aff. oùPhœnix dit que fonpere

fit plufieurs imprécations contre lui, & qu'il invoqua les Furies, pour les conjurer de fai­re en forte que jamais aucun entant né de lui ne fût mis fur lès genoux, c'eft à dire, qu'il n'eût jamais d'enfans. Et quoy que cette cou­tume ne fût pas à Rome, Terence n'avoit farde en traduifânt une Comédie Grecque ,

e rien changer à un paftage qui marquoit une coutume. Ce font des chofes qu'il faut tou­jours conferver. • 36. Et qu'il le conjurer oit en fuite d'agréer

fin mariage. } Ita obficraturum. Ce mot ita a unufage bien remarquable, car il ne fignifie pas toujours ainfi comme on, le croit, mais après, en fuite, pofihac, il vient du Grec /me.

fj. De noftre pauvre Simulus."] Donat a eu tort de croire que Simulus eftoit un nom La­tin dérivé de Simon. Simulus eft purement Grec nutci mu>v/Cc,. Ce mot fe trouve dans Lucien..

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R E M A R Q_U E S. 467

REMARQUES Sur la troifiéme Scène du quatrième

Afte.

J E ne puis affex. admirer vofire manière de vi­vre. 1 Voftram nequeo mirari fittis rationem.

Ratio fignifie en cet endroit manière,procédé, comme dans la III.Ecene du V.Acle.

Eandem illam rationem antiquam obtineo. Donat s'y eft trompé, s'il eft vray que la Re­marque qu'on trouve fur ce paflage foit de lui, ce que j'ay peine à croire ?

Prend-il donc à tâche de perdre ce fils. ] Si perdiderit gnatum. 11 a fallu traduire ce fils pour conferver la beauté de ce paflage, qui confifte en ce que Demea ne dit point, Jfihtand il au­ra perdu Efchinus, ou mon fils, ou/onfils; .mais Gnatum feulement ce fils. Et c*eft ce que Do­nat a bien vu, car il dit, Magno affectu, non dixit JEfchinum, & mire, non addidit cujus Gna­tum.

31. Ceft là ce qui s'appelle eftrefage, de ne voir pas feulement ce qu'on a devant les yeux. ] Ifthuc eft fapere nonquod antepedes modo vide-re. J'ai mis et qu'on a devant les yeux, au lieu de ce qu'on a devant les pieds. Cela revient à la mefrne chofe. Donat dit que Terence a imi­té ici le mot qu'une fervante dit de fon Maî­tre , qui en regardant dans les Aftres pour y lire l'avenir tomba dans un puits j Jjhtod ante pedes eft, non vides ; Coeli fcrutaturplagas. Il ne voit pas ce qui eft à fies pieds, & il veut voir

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468 R E M A R O J J E S. te qui Je pajfe dans la vafte étendue' du Ciel.

j8. jTay bien du chagrin & bien de la honte. } Tratris me quidempudetpigetque. Pudere fe dit des chofes nonteuies, pigere des chofes nuifi-bles.

6i. A s'y regarder comme dans un miroir. ] Comme onfefert du miroir pour corriger les défauts que la nature ou. l'habitude peuvent avoir donnez, 8c. pour prendre un meilleur' air & des manières plus convenables ; ainfi en regardant la vie de chacun en particulier, on peut changer ce qu'on a de vicieux, 8c choifir des exemples pour la conduite de fa vie. Car d'ailleurs la vie des autres ne nous reprefente pas la noftre comme un miroir reprefente le mefme objet.

6j . faites ceci, évitez, cela, une telle chofe eft louable. ] Hocfacito, hocfugito, hoc laudi eft, hoc vitio datur. Ce caractère de Demea eft fort naturel 8c fort bienfuivi. Un homme comme luy ne peut pas inftruire fon fils en Philofb-phe, qui rend raifon des chofes 8c qui ditpour-.quoy elles font bonnes ou mauvaifes 5 II ne peut 8c "ne doit l'inftruire que comme un Am­ple Bourgeois inftruit fon fils, en.luy di-fant,faites ceci, évitez, cela, une' telle chofe eft louable ; cette autre eft blâmée de tout le monde. Pour bien connoiftre la beauté de ce pailàge, on n'a qu'à le comparer avec ce qu'Horace dit de fon père dans la 4. Sat. du livre 1. Ce père en donnant à fon fils les mefmes leçons que Demea donné ici au fien, ajoute

Sapiens vitatu, quidqtttpttitu Sit melius, caujfas reddet tibi. mt fatis eft, fi Traditum ab antiquis moremfervare, tuamque Dum 'euftodis 'eges, vitam famamque tu tri m-columem pojftm. las

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R E M A R QJLT É S. 4)87. - Les Thilifophes te diront pourquoy une chofe eft.

bonne ou mauvaife. C'eft ajfex. pour un homme comme moy de garder les coutumes qui viennent de nos premiers pères, & pendant que tu as be* foin de gouverneur, de conferver fans aucune ta­che ta vie f3> ta réputation. Sur cela Donat a fort bien remarqué : «0» philofophice fed civi-Uter monet, non ehim dixit, hoc bonum, fedt hoc laudi eft, • nec, hocmalum, fed, vitio da­teur. Lrge ut idiota ée comicus, non ut fapiens ty praceptor.

6y. Ha, pour theure, Monfieur, je riay pat le temps. ] Non hercle otium eft, Cette réponfe de Syrus eft fondée fur ce que le vieillard vient de dire porro autem, qui font deux ter­mes qui menaçoient d'un long dilcours. . 75. Selon ma petite capacité &> le peu de gouft

quej'ay. ] Le Latin dit feulement, pro me* fapientia, mais pour fairefêntir la grâce de ce partage il a falu traduire félon ma petite capa­cité tylepeu de gouft que j'ay, car Syrus fait ici une équivoque fur le mot defapientia , en le prenant auflt pour un terme de cuifine, 8c c'eft ce que Donat a bien fenti, car il dit é\*rvpvxô( fapientia dixit , quia condimentum guftu ac fa-pore tempérant coqui. Il dit fapientia en fe mo­quant , parte que les Cuifiniers affaifonnent les Jauffes par le gouft & par la faveur.

81. Il n'y a que luy qui me touche. ] IUe ad me attinet. Cette parole auroit paru dure pour un père qui ne doit jamais oublier fon-fils, c'eft pourquoy il ajoute, puis que mon frè­re le veut aiufi. ^fuando ita voltfrater.

87. Denoftre tribu. ] Les Athénienscftoient divifez en douze Tribus, peut-eftre à l'imita­tion des Juifs.

Tome II . X

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4«S R E M A R Q U E S .

REMARQJJES fur la quatrième Scène du troifième

Aéte.

13. T? T je ne faureis le faire en confcienct ] Ci Nequeene fatis pie pojfe arbitrer. Je ne

puis le faire dans les maximes delà pieté. H parle de la pieté, parce que Geta lui a dit vous elles noftre père, car pieté en Latin eft des pères aux enfans, auflî bien que des en-fans aux pères. Hegion repond parfaitement à la bonne opinion que Demea a témoigné avoir de luy à la fin de la précédente Scène.

30. S'il plaifi aux,Dieux ] Si Diis placet. On fe fervoit de ces termes s'il plaifi aux Dieux, quand on vouloit aggraver une action & la rendre plus odieufe.

C3. Tout ce que je puis faire, Hegion , c'efi, d'aller trouver mon frère. "] On a aj oûté un Vers à ce paflàge.

Vratrem convenions, Hegio, Jd quod mihi de hoc re dederit confilium, id

fiequar, Hegion, firay trouver mon frère, ryjefuivrai le

confetl qu'il me donnera fur cette affaire. Mais, comme Muret l'a fort bien remarqué, c'eft un Vers qu'on a pris de la 4. Scène du 1. Acte du Phormion, & que l'on a tranfporté ici fort mal à propos. Micion eftoit le maiftre abfo-lu d'Efchinus, ainfî tout ce que Demea pou-voit faire, c'étoit de donner fon avis, & de reprefenter à Micion ce qui luy paroifloit Ju­lie Scranonnablc.

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R E M A . R QJJ E S. 4.69 f 6. Plus vous efiesjufte J Jfjuam vos facilit­

ent agites. Il faut tous - entendre vitam ou stvum agere faciUime , vivre facilement, pour dire eftre à ton aife , ne manquer de rien. Et les Latins ont emprunté cette façon de parler des Grecs qui appelaient leurs Dieux t'tU ÇoVroç, facile viventes.

f8. Plus vous eftts obligez à eftre juftes&rai-fonnables J Tarn maxime vos aquo animé equa nofeere. Mqua nofeere c'eft une manière de par». 1er Grecque, hnttxa fimut , eftre juftè , eftre raifonnable , avoir les fentimens d'un nomme droit.

R E M A R QJJ E S Sur la cinquième Scène du troiGcme

Aète.

T E Pavots bien dit. J H y a dans le Latin non me indicente hoc fiunt, & fur cela Donat re­

marque fort bien que cette compoiition indi­ens pour non dicens eft dure, mais qu'elle eft bonne pour un homme en colère ; En efFct je ne croy pas qu'on ait vu ailleurs indicere pour non dicere : M. Guyet vouloit corriger non me inticente comme fi inticente eftoit plus fuppor-table Se plus ordinaire cru'indicente, 8c s'a n'é-toit pas mille fois plus dur. Ce que Demea dit ici qu'il a voit bien dit, eft à la fin de la a. Scène du .1. Acte. Vofire bon fils ftntira à quel­que heure ce que...

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4 7 o R E M A R Q_U E S.

REMARQUES Sur la première Scène du quatrième

Acte.

t\.f~\Uand on parle du loup on en voit ht V ^ queue'. ] lupus in fabula. Servius a

expliqué ce proverbe fur ce Vers de la *p, Eclogue de Virgile.

vox quoque Motrim Jamfugit ipfa : Lupi Moerim videre priores.

Les Phyficiens, dit-il, affurent que ceux que le loup voit le premier perdent tout d'un coup la parole, tfr de la eft venu ce proverbe, Lupus in fabula , dont on fe fert toutes les fou que celuy dont on parle arrive fans eftr'e attendu, r$r que par fa prefenci il nous ofte la liberté de parler. Pline confirme cela dans le chapitre a i . du li­vre 8. vocemque homini , quem prières contem-plentur, adimere adprefens. Mais n'en déplaife a Pline & au* Phyficiens, je penfe qu'on peut douter de .la vérité de leur obfervation, ce je fuis perfuadée que le proverbe eft venu des contes du loup que les femmes des champs fai-foicnt à leurs enfans s car comme il arrivoit fouvent qu'en parlant du loup elles le voyoient

.tout d'un coup, la peur leur faiibit perdre la parole ou changer de difeours. Ceft pour-quoy l'on a dit lupus in fabula , pour faire entendre que celuy dont on parle furvient, quoy que l'on continue à parler , & que l'on parle mefme avec lui. Ce que Tcrence dit

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R E M A R Q.TJ E S . 471, lupus in fabula, Plaute le dit lupus m fermone. dans le Stick IY. 1.

Sedtccumtibilupum in fermone prtfens

Efuriens adefi. Tabula Scfermo font deux lynonymes qui li­gnifient difcours.

REMARQUES Sur la deuxième Scène du quatrième

Afte.

8 /"* 'Efl moy qui en porte la nouvelle aux atu \^J très. ~\ Primus porroobnuntio.Obnuntia-

re, elt proprement annoncer une mauvaife nouvelle , il efl toujours pris en mauvaife part. Cela efl remarquable.

20. Voyez, comme il m'a fendu la lèvre. ] Vide ut difcidit labrum. Il prend là lèvre, & en fe la prenant entre les doigts, il y-fait paroiftre une fente.

40. Le gros animal que je, fuis, je me trom­pais. ] Cenfen' hominem me effet errav'u En avouant fi ingeniièment là faute, il s'attire d'autant mieux la confiance de ce vieillard par la bonne opinion qu'il lui donne de fa fim-plicité, & Donata fort bien remarqué, Calli-dttas eft maxima deprehenfum snendacium non defendere , fed fateri ut opinionem fimplicitaiis aequtrat.

44. Tout auprès de P abreuvoir. ] • Varron nous apprend qu'auprès des portes des villes il y avoit toujours de grands rcfenroirs l'eau, où

X iij

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47* R E M A R QJJ E 8. l'on abreuvoit les chevaux, & où en temps de guerre on prenoit de l'eau pour éteindre le feu que les ennemis tâchoient de mettre aux portes.

4f. Des lits pour manger au Soleil. 3 X*. 'Ritlos in Soie , c'eft pour leetulos Solares, car dans le beau temps ils fbupoient à l'air.

4p. Le diner Je gâte. ] Prandium corrumpi-tur. ] Les Grecs & les Romains ne faiibient ordinairement qu'un repas qui eftoit le fbu-pcr, mais ici ce diner eft pour de jeunes gens débauche* qui n'obièrvent aucune règle, c'eft pourquoy dans la dernière1 Scène de cette Comédie Demea reproche à Syrus qu'il avoit foin de leur tenir le feftinpreft dés le matin , apparare de die convivium.

fx. Je pajferqi doucement cette journée. "] Hune producam diem. Pour rendre ce paflàge mot à mot, il falloit traduire, j'enterrerai cette journée; car preduccre eft un terme de funé­railles, Ikproducere diem, eft-ce que Virgile a dit conderefoies.

R E M A R QJJ E S fur la troifiéme Scène du quatrième

Aâe.

Q Ui s'imaginent toujours qu'on leur fait tort 3 Ce paflàge eft affez difficile, & je croy

qu'on l'a mal expliqué. qui ita putant

Siiifseriinjuriam, utero, fi, quantftctreipfi expoflulant

Et ultro accufmt —

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R E M A R QJJ E S. 47* En voicy kconftrutUon : jjj«* putattt fibifieri injuriant ; fi aliqui expoftulant tant injuriant quant if fi ultrofeeere , & ultro aecufant. Ghfi ? imaginent toujours qu'on leur fait tort, fi-on leur demande raifon du tort qu'ils ont fait eux* tnefmes, t&> qui s'enplaignent les premiers. Ainfi il n'eft.pas neceflaire de lire exfoftults.

Croyant toujours qu'on les ntéprife pour leur pauvreté. ] Propter fitam impotentiam fe femper tredunt caluitr. Il y a deux chofes remarqua­bles dans ce Vers : impotentia pour paupertas. Je ne Cty fi l'on en troùveroit ailleurs des exemples. Et le mot de caluier paflîf, pour aalui, qui eftoit un terme fort en ufage du temps de Scipion & de Lcelius, pour direiwe-prifer, tromper. Ceux qui ne l'avoient pas en­tendu avoiènt mis en fâ place negligi. Voicy les deux Vers de Mcnaudre , que Terence a traduits:

rlgèj amtrm ttitat, • mi* 'Ut oteàfuanu. Kttf omrruç eivrS tfsfTUpçyh ^stnsuutt'ourit

te pauvre eft timide en t outes xhofes, .rjrilcroit toujours que tout le monde le ntéprife.

R E M A R Q U E S . Sur la cinquième Scène du quameme : .Acre. 9.T L rougit. c'eft ion figne. ] Il y a dans le

1 Latin, erubuit, falva res eft. Et fur cela Donat remarque qu'il y a dans cette expref-fion une grande tendrefle : car Micion ne dit pas, erubuit, falvus eft, il a rougi, il eft fan*-

X iiij • '

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474 R E M A R Q U E S . vi ; mais erubuit, fialva ris efl 5 comme s'il di­foit, «7 a rougi, tout mon bien eft fauve. En quoy il fait voirqu'Efchinus luy tient lieu de tout, 8c qu'il n'a rien de ficher que luy. Mais cela n'auroit pu élire ibuffert en noftre Lan-

re •; c'eft pourquoy j'ay efté obligée de dire chofe plus Amplement, 8c comme nous là

dirions en pareille rencontre. 19. Rien, rien du tout, continuez.] Nihil,

reéte, perge. Ce recre e& la mefme choie que nihil, on difoit reBe quand on ne favoit que dire, comme: jel 'ay déjà remarquéi on s'y eft trcunpé.

ad. f>hiiluy* promis cette fille i qui la luy* •donnée•! comment s'efi fiait cl mariage! ] Il dit cela, parce qu'il n'y avoit point eu de parole • donnée, que c'eftoit un rapt, qu'il n'y avoit eu aucune cérémonie, 8c que le peren'y avoit point efté appelle, 8cc. Et Micion rafiemble en peu de mots toutes les nullitez de ce pré­tendu mariage. Dans le 37. Vers au lieu de xsiinupfit, qui ne fait.aucun lens raiibnnable, je croy qu'il faut lire qui, quando nupfit ; ce qui marque les cérémonies qui dévoient eftre obfervées. ,

yo. Mais je crains que vous nefioytz un peu trop négligent. ) Sedvéreor ne indiligens niniium fies. Il ne le,gronde pas d'avoir fait cette ac* tion, mais il le gronde de n'avoirpas fçû pren­dre les mefures qu'il falloit^our la faire tour­ner à bien , 8c pour s'épargner les chagrins

u^elle luyacaufez. On ne fauroit rien voir e plus tendre que tous ces reproches, il n'y

a pas un feul mot qui ne mérite d'eftre bien confideré;8t l'on ne perdra pas fon temps de lire les Remarques de Dônat fur cette Scc«

d,

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R E M A R Q J J E S. 47f h e , elles font tres-judicieufes, 8c marquent un efprit bien fait.

63.. Moy me moquer de vous ? eh pourquoy ? 3 Ego tel quamobreml Ces deux pronoms de fuite, moy, vous, font admirables pour mar­quer la tendrefle que ce père a pour fon fils. Mais on demandera pourquoy Micion dit à fon fils, avec tant de confiance, Moy me mo­quer de voust eh pourquoy l puifqu'il s'cft dé­jà moqué de luy en luy faifànt le conte de cet homme qui devoit époufer fa Maiftrefle.Voi-cy une reponfedeDonat, qui me paroift une maxime fure dans la Morale. Il dit qu'on peut joiier les perfonnes que l'on aime, en leur donnant de faunes craintes, quand on peut dans le moment difliper ces craintes par des joyes folides 8c véritables ; mais que c'eft l'action d'un ennemi, de jetter les gens dans de fauf-fes joyes qui ne peuvent eftre fuivies que de iujets de trifteffe 8c de douleur.

69. Il s'en ejl allé, il s'efl embarqué, il a fait naufrage. ] Abiit, periit, navemafcendit. Pour ne pas dire crûment, fay menti, c'eftun conte, il finit ce conte comme les Nourrices finiffent ceux qu'elles font à leurs enfans quand elles les voyent trop épouvantez : car elles leur di-fent alors que le Loup s'en eft allé, que les Chiens l'ont mangé, Sec.

70. Allez plûtoft vous-mefmeprier les Dieux ] Tu potiùs Deos comprecare. C'eft une chofe dés­agréable qu'un fils lotie fon père en fa prefen-ce i c'eft pourquoy il eft bon de remarquer icy avec quelle delicatefle Terence fait qu'Efchi-nus loue Micion ; c'eft la Religion qui luy fournit cette louange, 8c ce n'en qu'en s'ex-eufant de prier les Dieux luy mefme, qu'il

X.v

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47« R E M A R QJJ E S. trouve une occaiîon naturelle de donner et» deux mots à fon père la plus grande louange qu'il pourrait luy donner. Ceft ainfi que dans Virgile Enée dit à Anchife:

Tu, genitor, cape/ocra manu patriofque Pe-natts.

Vous, mon pore, prenez les chofts facrées , fjj» Us Dieux Pénates. Il veut porter ion père, mais il veut que fon père porte les Dieux. Terence a peut-élire eu en vue en cet endroit ce que dit Heliode, que c'ert aux jeunes gens à agir* nul hommes en âge parfait à donner des con-

, feils, Se aux vieillards à prier les Dieux. ttppa t'a», fixtaj H tuiovm, boxai, $ >**

terme. f6. Par cette complaifante il erse jette dans

un foin continuel. ] Itoque ttdeo magnat» mwi injecit fua commoditate curam. Terence a grand loin de marquer les bons effets que la com-plaifancc des pères peut produire. Celan'em-peiche pas que cette complaifance ne foit fou-vent tres-dangereuië quand elle eft aveugle. Mais quand eue aurait toujours elle bonne Se utile dans ces temps où. les ténèbres de l'er­reur couvraient preique toute la terre * elle ferait très mauvaifeaujoura'huy.

REMARQUES Sur la fixiéme Scène du quatrième

A&e.

"|^\ E l'attendre chez, luy de pied ferme. J X-J Domi certstm obftdere eft. Obftdere ne

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R E M A R Q U E S . 477. lignifie pas fcyaffieger, comme Donat l'a crû Tereace aurait dit demum , fie non pas demi. Obfidere eft pour perpétue fédère , fe tenir quel­que part de pied ferme, opiniâtrement.

R E M A R Q U E S Sur la feptiémc Scène du quatrième

Acte. .

tf.'E N voicy d'une autre ~\ Eue autenu Cette Jt-j particule tect, veiey, fert toujours à

marquer quelque accident fâcheux 2c non at­tendu.

18. Et voilà ce qui eft bien plût eft du devoir d'un homme. ] Hoc mugit funt heminis. Micioû ne pouvoit pas mieux répondre à ce que Dc-mea luy avoir dit, qu'il étroit du devoir d'un homme de témoiger eftre en colère : car un homme doit plûtoft entrer dans les foibleftes des autres hommes, y compatir, leu» donner tous les fbulagemens dont il eft capable, 8c fe iouvenir toujours de ces mots de t'Heautonti-morumenos : Homo fum , humant nihii à me aiienum pute.

ai. Voyez.-vous , dans la vie il faut tenir ht tnefine conduite que dans le jeu de Desn ] Ita, vit a efthominum» quafi cum ludsu tefferis. Me-Tiandre pouvoit avoir pris cette maxime dans Platon, qui dit dans le dixième livre de fa Re­publique : Tuf thsXtmojX, eéèi -si « W K , n) e/rrttf tt T/«ou xmm etftt ru Tmrmesru w-êiùX ru dvrS oieufuttcru irr» i ACJJç îfi plxlie, î'xi'' Qu'il faut prendre confeil des accidens

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47» R E M A R QJJ E S. .rnefmes , & comme dans le jeu de Dez , re2 gler nos affaires fur ce que le hazard nous a envoyé, en nous fèrvant de toutes ies lumiè­res de noAre raifon, & comme il nous fem-blera mieux eftre. Ces maximes de Morale reuffiflent fort bien dans la Comédie , qui tveA qu'un tableau de la vie humaine.

34. Et ce fera, vous qui mènerez, le Branle. J Tu inter êtes reftim ductans faltabis. Mot à mot. vous danferez. au milieu d'elles en menant la cor­de. 11 faut donc expliquer ce que c'efl que-mener la corde, Reftim ducere. Cette expref-lion njene naturellement à croire que dans ces temps là quand beaucoup de perfonnes dan-ibient enfemble , elles prenoient un cordon •qu'elles tenoient, & qu'on difoit de celle qui cAoit au bout 8c qui marchoit la première, qu'elle menoit le cordon, reftim ducere. Mais cela ne me paroiA point du tout vraifembla-ble; car à qtroy bon ce cordon? nepouvoit-on pas fe tenir par les mains ? Je fuis perfuadée qu'on n'employoit aucun cordon à ces danfes, & que les mains ont donné ce nom à cette lon­gue fuite de gens qui danfoient enfemble en ie tenant comme liées par les mains : car les mains ainii liées enfemble , font comme une efpece de cordon , 8c voicy une autorité qui -me' paroiA inconteftable. Tite-Live en décri­vant la marche de vingt-fept jeunes filles qui alloîent en procefuon au Temple de Junon, en danfaut', ditdanskxxvii . fivre, chapitre 37. Inforo pompa conftitit, ejr ter manus. refte duc-ta virgules fonum voçis pulfu pedum modulantes mcefferunt. En cet endroit, per manus refte ne fignifie pas en fe mettant un cordon aux mains, mais , enfefaifant un cardon de Leurs

J

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R E M A R Q J J E S. 470 trains, c'eft à dire en fe prenant pour danfer toutes enfemble. C'eft ce qu'Horace a dit Am­plement, darebrachia, dans l'Ode x 11. du Li­vre 11. Ce cordon de mains ent relances eftoit suffi appelle mdtu, nœud ; c'eft pourquoy Ho­race a dit des Grâces,

Segnefque. nodum fil-vert Gratie. Les Grâces qui ne rompent jamais leur nœud,

c'eft' à dire qui ne fe quittent jamais, 8t qu£ fe tiennent toujours par la main. Mais voicy encore une autre autorité plus forte que la première. Lucrèce en parlant de la danfe des Preftres de Cybele .«appelle chôme ce que Te-rence appelle reftinfTcordon, Voky Iepaflage entier que je rapporte , parce qu'il a befoin d'eftre corrigé & expliqué , car il me femble qu'il a toujours efté mal entendu.

Hic armât» manus {Curetas nommeGraii Sluos memorant Phrygios ) inter fe forte ca-

tenas Ludunt, in numerumque exultant fanguint

loti. Je fay que ludunt lignifie, danfent; mais

j'avoue que je ne fay point ce que peut ligni­fier ludunt catenas ; 8* c'eft ce qu'on devoit expliquer. 11 me femble qu'il n'y a pas grand' chofe à changer pour trouver le véritable fensj au lieu de forte il ne faut que lire forte; catenas eft un ancien génitif pour catena , 8c forte catenas c'eft à dire félon qu'ils fe trouvent lie? enfemble, chacun en fonrang. Là cette troupe de gens armez. ( que les Grecs appellent les Cu­retés de Phrygie ) danfent enfemble comme ils fe trouvent en fe tenant liez,, par les mains, & fau­tent en cadence, ravis de voir lefang qui coule de leurs blejfures. Pour moy je trouve qu'il

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4«.o R E M A R OJU" E"S. lêroit ridicule de s'imaginer que ces gens af-y mez danfaûent enfemble en le tenant tous à une corde.

R E M A R QJJ E S Sur la huitième Scène du quatrième

Afte.

ON avoit fait de cette Scène la première du cinquième' Acte^nwnais cela eft ridicu­

le , puifqueDemea eft fiaTie Théâtre; afluré-ment cette Scène & la fui vante font du qua­trième Acte.

f. Le beat* modèle pour Véducation des en-faut!] Exemplum difiiplina ! Car Demea re­garde Syrus comme le Gouverneur &le Maî­tre du fils qu'il avoit donné à adopter à fon frère.

7. Ho, ho, voftre Sagejfe vient icy nous chan­ter fts maximes. ] J'ay afnfi traduit cepaflage: Ohe.jamtuvtrbafundis hecfapientia. En pre­nant Sapientia au vocatif, il appelle Demea la Sagefle, comme il luy a dit au commence­ment , Tu quantus, quantus es , nihil nifi fa-pientia es. Vous depuis la tefiejufques aux pieds vous rieftes rien que fagejfe. Ce vers eft fort beau, M. Guyet le condamne pourtant.

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R E M AR QJJ-E-S." 481 1 - — i ^

R E M A R Q U E S Sur la neuvième Scène du quatrième

Aéte.

JE jm• trots bien que ce compagnon de dibauche, &C. [ JEdepol eomijfaterem haudfane cent'

tnodum. Toute la grâce de ce paflàge ne peut jamais paroiftre dans la traduction. Comîjjator eft proprement un homme qui après avoir dé­jà bû, va en maique faire encore la débauche chez quelqu'un, où il arrive tout d'un coup *n faifant beaucoup de bruit. Ceftpourquoy cela convient très-bien à Demea qui entre chez Micion où l'on eft en débauche, où l'on ne l'attend point, & où il va faire un vacarme horrible. Ces fortes d'ironies font un très-bon effet fur le Théâtre, & divertiffent estré-mement les fpeétateurs.

REMARQJJES *Sur la première Scène du cinquième

Ade. 3. A H, quefiray-jef quedeviendrayjel cW\J

XXDemea fort de chez Micion, où il a trouvé Ctefiphon à table avec Efchinus, & où il a appris la vérité de tout ce qui s'eftoit paf-fé ; c'eft pourquoy il fort dans une colère fu-ricufe. Mais u faut bien remarquer icy l'a-

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'*JSi R E M A R C^U E S. drefle de Terence, qui fart monter la cole-re qu'a Demea des deibrdres de fon fils Ctefiphon , autant au deftus de celle qu'il avoit des débauches d'Efchinus, que la ten-drefle qu'il a pour celuy-là , eft au def-fus de celle qu'il a pour celuy - cy. Quand il a fçû les débauches d'Efchinus, il en a efté trifte, Rogas me quid triftis pem ? Mais fur le moindre foupçon qu'on luy veut donner que Ctefiphon eftoit avec Efchinus à I'en-levement de la Chahteufe, il dit . Difperii, ne ego fum infcelix* Je fuis perdu , il faut avouer que je fuis bien malheureux ! Et icy voyant la vérité de ce qu'on luy avoit dit, 8c qu'il n'avoit pas crû > il entre dans une fureur qu'il ne peut exprimer : c'eft pourquoy il commence par cette interjection, Heimihi, ah, quid faciam l ffhte feray-je ! Quand il a efté queftion d'Efchinus, il a fçû ce qu'il de-voit faire, il a querellé, il a grondé, il a erié, ilaaccuféMicion. Et quand il-s'agit de Ctefiphon, il ne trouve rien qui puifle expri­mer fa douleur, tout ce qu'il a fait luy paroift trop foible, .8c il accufe les Cieux, la Terre Scia Mer, c'eft à dire tous les Elemens, 8c les Dieux mefmes. Cette conduite eft merveil-leufe, 8c ce font là de ces coups de Maiftres qu'on ne fauroit fe lafter d'admirer.

17. Ah, ce que vous dites ri eft pas jufie, en vérité non. ] Non&quumdicis. non. Ce fécond non fait voir que Micion ne fait où il en eft: j il le prononce en rêvant 8c en cherchant quel-

. que excufe ;8c comme il ne trouve rien qui luy plaife, il a recours à un proverbe qui eft plus contre luy que pour luy.

Jp. Vous vous avtfex, bien tard de tenir et

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R E M A R Q.U E S. 48*; langage ] Nunc demum ifthac nota «ratio eft. Il luy reproche avec raifon qu'il n'a pas tou­jours efté de ce fentiment, puifou'il luy avoit dit le matin que c'eftoit luy redemander Efchinus, que de vouloir en prendre quelque foin:

• NamambotjCurare,propemodum RepofcereiUumeftquem dtdifti. 3 y. Voyez-vous , mon frère, dans V homme il

y a plufieurs marques. ] Mal)a in homine , Demea, Jigna infunt, tjr- Le pauvre Micion ne fait pas trop bien comment fe tirer d'afv -faire ; car il s'en: engagé là à exeufer des cho-.fes qu'il n'eft pas trop aile d'exeufer ; il en

• fort comme il peut : c'eft pourquoy il parle avec aflez d'obururité 8c d'embaras, aulli ne cherche-t-il pas tant à convaincre 8c à perfua-der Demea. qu'à l'étourdir par un galimatias où il paroifle quelque efoecedeiaifon. Il luy •veut faire entendre qu'il n'a fouffert les déV bauches.de fes deux enfans, que parce qu'il a connu que cela ne pouvoit pas les gâter, 8c qu'on leur feroit toujours changer de vie quand on voudrait.

REMARQUES ; Sur la féconde Scène du cinquième

Acte

1. TAmais performe ri a fi bien règle tfr fupputé j tout ce qui regarde la conduite de fa vie~\

Nunquam ita quifquam bent fubducta ratione advitam fuit. C'cÂune figure empruntée des

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484 R E M A R O U I S. livres de compte, car fubaucere rationem eft proprement marquer au bas d'un compte à combien monte toute la ibmme. Demea dit donc que perfonne n'a jamais fi bien régléfes comptes pour ce qui regarde fà vie , qu'avec le temps u ne trouve bien des chofesàychan-

fer, 8c qu'il ne fe voye obligé de prendre 'autres mefures. C'eft un fort bel endroit.

10. Ne choquant jamais perfonne ] Nulli U-dere os. Cette façon de parler eft remarqua­ble , Udtre os alicui, blejftr le vifage à quel­qu'un, pour, lu y dire deschofesli dures Se fi choquantes, qu'elles l'obligent à faire des gri­maces pour témoigner ou ta fùrprife ou ion TeiTentiment. Saint Auguftin avoit ce paiTàge en vûë quand il a dit dans le premier Livre de la Cité de Dieu, en parlant de ceux qui crai­gnent d'avertir leur prochain de leurs péchez. Vil cum Morts piget, -vei os eorttm verecunda-trtur offendere. Soit que nous fuyions le travail, tu que nous appréhendions deletojfencer.

n . Quelles miftres ! ] Jjhtum ibi miferiant midi! mot à-«101, attelle mifere n'ay je point vûë! Les Latins difoient videre > ..voir, pour pati , fouffrir à l'imitation des Grecs, qui a-voient pris cela des Orientaux, comme je l'ay remarqué fur l'Epigramme i8<de Callirnaque pag. 117.- .

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R E M A R Q_U E S. s\Sf

R E M A R Q J J E S Sur la troifième Scène du cinquième

Aète.

a. /^Kltofire cher Syrus. j Toutes les douceur» V-/que dit Demea font ridicules 8c imper­

tinentes, 8c Terence l'a fait ajnli pour faire roir qu'on ne réunit jamais lors qu'on force ion naturel.

R E M A R QJJ E S Sur la cinquième Scène du cinquième

Aète.

«. Tj1 Nvoyex.-moy promener ces chanteurs tPhy, Cimente, ces joittujes de flûte , ces fiam-

beaux, ér toute cette foule. J Mijfa hoc face, eoymenaum, turbas, lampadas, tibicines. Tout cela accompagnoit la nouvelle mariée dans la maifon de fonmari. Lucien a parlé de tout cet -attirail, 8c je croy qu'il a pris ce paffage de Menandre, quand il dit , ii^ùvijsre/icuur^tlee-ioi, Kj v/iiûatu cthrrat mus, & les joùeufes de flûtes, la foule de gens, les chanteurs a'hyme-nie.

x j . Mais à propos, JEfchinus, faites en forte que cet h.mme tout coufu d'ordonné à ces bons gar* cens, &c. ] Jubé nunc jam dinumeret illi Baby-•io vigintiminas. Ce paffage nemeparoit pas

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'485 R E M A R Q_U E S. corrompu. & la conjecture de Donat eft fort vray-femblable. Il croit que Demea appelle Micion . Babylo, le Babylonien, pour mar­quer fes richeffes & fa prodigalité en fè moc-ruiant de lui, carBabylone eitoit en ce temps la ville capitale de Perle, & tout ce qu'il y a-voit degrand 8c de magnifique on l'appeUoit Babylonien 8c Perfan, Horace Ferficos odi puer spparatus. Babylo eft donc icy pour le Roy de Babylone, comme on a dit Macedo pour A-lexandre. La.difEculté n'eft donc pas fur ce mot, elle eft fur illi, car on ne voit pas bien à qui il veut que Micion donne cet argent. Ce­lui qui avoit traduit cette pièce avant moy ,

Sivoit bien vu que Muret s'cft trompé, quand il a crû que illi eftoità Sannion 8cqueSannion a efté payé. Je croy qu'il faut lire illu, c'eft â dire à Syrue'Sç à Cet a, Demea leur a déjà té­moigné tant de bonne volonté, qu'il y a beau­coup d'apparence qu'il cherche ici à leur faire voir les effets des promenés qu'il leur a faites dans les deux Scènes précédentes ; c'eft pour-quoy il dit à Efchinus de porter Micion a fai­re cette petite libéralité. Ce bon homme veut que tout le monde foit content, pourvu qu'il nelui encoûterien.

R E M A R QJJ E S ».

Sur la iixiéme Scène du cinquième Afte.

i.4,.~EAitet ee plai/îrà voftrefils. ] D» veniam ' xfilio, Cette façon de parler eft ieœar-

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R E M A. R O U E S. t#f tiuable, dure veniam, pourfaire unplaifir,faire une grâce.

xo. Obligez, nous jufques au bout~\ Age pro­lixe, Micio. Donats'eft trompé à l'explication de cet adverbe prolixe , qui lignine d'un bout à l'autre, Se comme j'ai traduit, jufques au bout.

xi. Si vous le foubaitez, avec tant d'ardeur, jt le veux. ] Si vos tantopere iftuc voltis,fiat. Il paroift ridicule . que Terence fafle confentir ainfi Micion à fe marier àfoixante&cinqans, Se l'on ne peut pas dire que cela ne foit au moins fort outré. Mais ce Poète a voulu faire voir parla le défaut de cesbonteafottes&ex-ceflives, elles portent toujours ceux qui les ont à faire des fottifès dont il faut qu'ils fe repentent neceflairement.

Enfin, mon frère, ne croyez, pas que je veuille m'attribuer le beau mot que vous m'avez, tan-tell dit fi purement.] Poftremo non meumillum verbum facto, tjec. On a donné à ce paflige un autre fens que celui que j'ay fuivi dans ma Traduction, car on a crû que Demea difoit : Enfin je ne veux pas qu'on puijfe m'appliquer le moi que vous difiez, tantoft. le ne veux pas que ce mot puijfe me convenir. Mais ce fens-là eft dé­truit par la fuite.

R E M A R Q U E S Sur la feptiéme Scène du cinquième

A<fte. 4. T Ui en liberté i & pour quelle action { ] Car

JL>felonla formule des affranchiilemens, il

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488 # R E M A R QJJ E S. falloir marquer les raiibns pour lefquelles 6a mettoit un Eiclave en liberté.

6. Tu n'As jamais ferré la mule. ] Obfinare cumfide, acheter fidèlement. C'eft une contre-vérité. On s"eft trompé à cepaflage, enfepa-rant cumfide du verbe obfinare, 8c en le joi­gnant avec la fuite,

De leur tenir toujours lefefiinprefi dés le ma­tin. ] Apparare de die convivium : De die, c'eft à dire des le matin, avant midi.

Vos convivia fumptuofa laute de die faei-tis.

Vous faites des ftfiins magnifiques enpleinjour. Ce quieftoit,comme j'ay déjà dit, une véri­table débauche, Demea dit cela parce qu'il les avoittrouvez à table le matin, & Syrus mef-me a dit dans la a. Scène de l'Acte 4. Pran-dium corrumpitur, le dinerfegafte.

11. Les autres en feront mieux leur devoir. J Aliimeliores erunt, C'eft une maxime de Ca-ton, qui dans le chapitre des devoirs d'un Fer­mier dit, Pro bénéficia gratiam référât, ut aliit relie facere libeat. Il faut qu'il recompenfe fit valets quand ils ont bien fait, afin que cela donné envie aux autres de bien faire.

a 8. Jgfoelle profufion, quelle prodigalité fi fit-bite l Jghsod prolubium, que. ifthac fitbita largi-tas l Ce paflage eft pris d'une Comédie de Ca> cilius

Jj)ued prolubium, qu* voluptas, qua telaSat largitas ?

Mais dans l'un il y a prolubium, qui fignifie caprice, fantaifie, & dans l'autre proluvium , qui fignifie profufion, Je croy pourtant, que Terence avoit mis prolubium, je trouvece fens-là meilleur, 8cc'eft celui que j'ay fuivi dans

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R E M A R Q U E S . 48^ ma Traduction. Il me femble melme que j'ai obfervé que prolubium fe dit plus ordinaire­ment des femmes. Accius dans l'Andromè­de.

Muliebre ingenium, prolubium, occafio. Vefprit d'uni femme, la fantaifie, foccafioni & dans Laberius > pr. litbium meretricis.

Jguelle prodigalité fi fubite t J$u* ifttc fit-bit a eft largitas. ] Largitas 8c largitio font deux termes difrerens. Largitio marque l'action de celui qui donne > 8c largitas defigne l'inclina­tion, le penchant qui porte à donner.

32. Trefentement donc, JEfihinus fi ma maniè­re de vit vous efi odieufi. ] Nunc adeofi obeam rem vobitvita mea invifaeft, JEfchine. Voilà Demeaqui revient àfon caractère, 8c Terence a fort bien conduit cela, pour faire voir que s'il s'eftoit fi fort radouci contre fon natu­rel, il ne l'avoit fait que pour faire connoifire à fon frère que la complaifance aveugle qu'il avoit pour les enfans, efioit la feule caufe de l'amour qu'ils avoient pour lui, 8c qu'il n'eft

1>as difficile d'en eftre aimé, quand on veuts'é-oigner en leur faveur des règles de la mora­

le 8c de la véritable honnefteté. Les caractères oppofez de ces deux frères, 8c les. inconve-niens qui en arrivent, montrent parfaitement aux pères le milieu qu'ils doivent tenir pour l'éducation de leurs - enfans , entre la trop

f rande feverité de l'un, 8c la trop grande ouceur de l'autre. C'eft le parti que prend

enfin Demea, en prenant chez lui cettechan-teufe, dont fon fils eftoitamoureux. Cette com­plaifance que nous trouverions aujourd'hui fort criminelle, h'avoit rien de condamnable chez les Romains, qui n'ctoient pas allez éclai-

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49» R E.M A'R Q J J E S. rez pour en connoiftre le défaut.

40. Cela eft très raifonnaèle.] iftkttc relie. J'ai fuivi ceux qui font dire cela par Efchinus. Donat n'eft pourtant pas de cet avis, car il le fait dire à Micion, 8c il l'explique d'une maniè­re fort ingenieufe. 11 fuppofe queMicion voyant la facilite qu'a Demea à permettre que fon fils Ctefiphon garde cette sjtfjpanteuie, dit tftucrttte en fe moquant de Demea 5 comme s'il di» ioit, voilà mon homme qui vient de me re­procher, que j'ai eu trop decomplaifancepour ces jeunesgens» que je n'ai pas ve'cu comme un honnefte homme, 8cque je n'ay pas fuivi les règles du bon fens 5c de l'équité, qui fait ici le Cenfeur, 8c qui dit à les enfans qu'il n'a pour eux qu'une complaifance de vérita­ble père, cependant il foufFre une Maiftrefie à fon fils dans fa maifon.

Cela eft bien fin. Dans ce fens-là il faudrait traduire, cela n'eft pas mal, vrayment. Et ce qui pourrait rendre ce fentiment plus vray. lëmblable, c'efl; qu'apparemment Mtcion de-voit élire en colère de ce qu'Efchinus dit à Demea, tièipaterpermittimus, Nous nous met­tons entre vos mains, nous nous abandonnons à vous, &c. En effet cela devoitl'ofteuccr.

Tin dit fécond Volume.

& 3$