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Note d'orientation sur le mode d'organisation des soins de santé primaires Version 4, du 10 octobre 2013

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Note d'orientation sur le mode d'organisation des soins de santé primaires

Version 4, du 10 octobre 2013

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Note d'orientationsur le mode d'organisationdes soins de santé primaires

Document de travail destiné aux autorités de la Région Wallonneet de la Région Bruxelloise

Ce document a été réalisé suite à une collaboration entre:

FAG - Forum des Associations de Généralistes

Le Forum des Associations de médecins Généralistes (FAG) rassemble les associations et Cercles de médecins généralistes des parties francophone et germanophone de Belgique.

SSMG - Société Scientifique de Médecine Générale

La SSMG poursuit plusieurs buts dont l'amélioration du rôle scientifique du médecin généraliste et la promotion de la médecine générale.

autres organisations (à spécifier)

Rédaction: Thierry Van EeckhoutPermanent FAGTél.: 0478 88 29 [email protected] ou [email protected]

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RÉSUMÉ DES LIGNES DE FORCE.................................................................................................. 4

INTRODUCTION............................................................................................................................... 6

1. LES SOINS DE SANTÉ PRIMAIRES : DÉFINITION................................................................6

2. QUELLE LOGIQUE DE MÉTIERS?............................................................................................. 7

A. La démographie médicale.......................................................................................................................... 7

B. Le défi pour la force de travail: équilibre entre les besoins de la population et l'offre de la médecine générale........................................................................................................................................................ 8

i. Evolution du profil démographique et épidémiologique de la population......................................................8ii. La démographie médicale..............................................................................................................................9iii. Note sur l'attractivité de la profession de médecin de famille....................................................................10

C. De nouveaux modèles de coopération.....................................................................................................11i. L'organisation de la pratique.........................................................................................................................12ii. Les collaborateurs à la pratique des médecins généralistes.........................................................................13iii. Le patient présentant une multi-morbidité, dit "le patient complexe".......................................................13iv. L'amélioration de la qualité.........................................................................................................................14v. La prévention et la promotion de la santé...................................................................................................16vi. Les jeunes médecins....................................................................................................................................17

D. La continuité des soins............................................................................................................................. 19i. La médecine générale au centre de l'axe vertical des soins de santé............................................................19ii. La médecine générale au centre de l'axe horizontal des soins de santé......................................................20iii. Structures organisationnelles: le Cercle de Médecins Généralistes............................................................22iv. Autres structures organisationnelles de soins primaires.............................................................................23v. Organisations représentatives......................................................................................................................23

E. Les technologies d'information................................................................................................................. 23i. Les logiciels...................................................................................................................................................24ii. Le DMG - Dossier Médical Global.................................................................................................................25iii. Réseau informatique...................................................................................................................................25

3. CONCLUSION.............................................................................................................................. 26

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Note d'orientationsur le mode d'organisationdes soins de santé primaires

Résumé des lignes de force

Le paradigme du médecin isolé qui prend en charge l'ensemble des problématiques de santé de ses patients, est en train de se modifier pour évoluer vers un modèle de pratique transdisciplinaire où chaque soignant intervient avec son expertise professionnelle spécifique au bénéfice du patient. La pratique de la médecine générale en solo a encore de beaux jours devant elle. Le travail en équipe est cependant appelé à se développer car il attire les jeunes générations de médecins généralistes. Il doit donc être encouragé.

Deux défis importants se dessinent pour l'avenir: le vieillissement de la population et la démographie de la médecine générale. Le vieillissement de la population avec son corollaire d’augmentation des maladies chroniques, couplé avec le le vieillissement des médecins, entraînera une charge de travail beaucoup plus grande. Le modèle de soins de santé de première ligne devra s’adapter. Dans ce modèle, le médecin de famille reste le seul à pouvoir gérer la complexité, en collaboration avec les autres professions de 1ère ligne.

Actuellement, de nombreuses institutions et organismes prennent des initiatives en terme de prévention et de promotion de la santé, initiatives qui sont dans la majorité des cas tout à fait louables et justifiées: des actions sont mises en place par l'ONE, la médecine scolaire, la médecine du travail, les provinces, les CPAS, les communes… Néanmoins, on observe une absence quasi-totale de coordination et une fragmentation importante des initiatives. Pour être performant et afin d'éviter la répétition d'actes inutiles et coûteux, mais surtout dans le but de maintenir une vue d'ensemble et de garder un historique de tout acte médical préventif, il est indispensable que toutes ces initiatives soient au minimum répertoriées dans le DMG (Dossier Médical Global) tenu par le médecin traitant, librement choisi par la personne.

La bonne tenue du dossier est un préalable indispensable pour disposer de données nécessaires à l’évaluation qualitative des soins dont l'amélioration doit être un objectif prioritaire. Idéalement, l'interconnectivité sur le plan informatique doit être envisagé. En région wallonne et bruxelloise, le Réseau Santé Wallon (RSW) est un élément qui mérite le soutien des autorités pour un développement encore plus poussé. À Bruxelles, ABruMeT remplit les mêmes fonctions. Les deux systèmes sont reconnus par la profession comme systèmes fiables, respectant les notions de confidentialité évoquées dans le Code de déontologie de l'Orde des médecins (Art. 39: Le médecin qui a établi et complété à lui seul le dossier médical est responsable de sa conservation. Il décide de la transmission de tout ou partie de ses éléments, en tenant compte du respect du secret médical.), car gérés par la profession. Les deux systèmes sont d'ailleurs considérés par le SPF Santé Publique comme faisant partie intégrante du Plan d’action e SANTE 2013-2018. ‐ Les études européennes ont démontré que ce type de projet apporte des bénéfices substantiels tant aux patients qu'aux professionnels de la santé, ainsi qu'à la société en général. La prise en charge et la continuité des soins des patients inscrits sont facilitées, plus rapides et plus aisées grâce à l'accès instantané aux documents médicaux référencés.

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Le Cercle de médecins généralistes doit être l’unité fonctionnelle et l’interlocuteur local au niveau du bassin de soins; le FAG, les sociétés scientifiques, les universités et les syndicats (tout regroupement représentatif) selon leur sphère de compétence doivent être les interlocuteurs des instances décisionnelles au niveau fédéral, des entités fédérées, des régions et des communautés. Le financement des cercles de médecins généralistes est dès lors une priorité qui doit permettre le maintien et le développement d'une organisation efficace des soins de santé primaires.

Les rapports KCE mentionnent clairement que les entretiens avec les parties prenantes ("stakeholders") et les étudiants ont mis en exergue le rôle essentiel que les MG devraient jouer dans le système de soins de santé belge. Il est dès lors urgent de mettre en place des politiques visant à améliorer l'attraction, le recrutement et la rétention des MG dans la profession afin d'inverser la tendance actuelle de manque d'intérêt pour cette spécialité. Des initiatives devraient être mises en œuvre tout au long du cursus et de la carrière des MG. Depuis quelques années, plusieurs éditorialistes scientifiques ainsi que l'Organisation Mondiale de la Santé attirent l’attention des autorités sanitaires sur l’absolue nécessité d’un changement d’orientation dans la politique de formation adoptées par les facultés de médecine en faveur de la médecine générale.

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Introduction

Dans l'Accord Institutionnel du 11 octobre 20111, il a été décidé ce qui suit:

"3.2. Soins de santé et d’aide aux personnes3.2.3. Le transfert de compétences aux entités fédérées

f. Organisation des soins de santé de première ligneLe soutien aux métiers de la santé de première ligne et l’organisation des soins de première ligne (fonds Impulseo, cercles de médecins généralistes, Réseaux Locaux Multidisciplinaires (RLM), Services Intégrés de Soins à Domicile (SISD), actions de prévention menées par les dentistes...) seront transférés aux entités fédérées."

Dans le but d'aider les entités fédérées à l'organisation des soins de santé de 1ère ligne (ou soins de santé primaires), différentes associations et organisations ont établi ce document, qui reflète la vision actuelle sur la position de la médecine générale ainsi que la qualité des soins administrés par elle.

Le texte fait référence à la littérature et à des rapports belges et internationaux, et a fait l'objet d'une réflexion poussée au travers des différents acteurs cités.

Le but final est de suggérer aux autorités un "Modèle d'organisation des soins de santé primaires". Il va de soi qu'une répartition pertinente des rôles des différents intervenants en 1ère et 2ème ligne garde toute son importance, comme il sera développé plus loin dans ce document.

"I am convinced that we will not be able to reach the health-related Millennium Development Goals unless we return to the values, principles, and approaches of primary health care. To steer health systems towards better performance, the report calls for a return to primary health care."

(traduction libre:) "Je suis convaincue que nous ne pourrons atteindre les buts en matière de soins de santé pour ce millénaire, si nous ne retournons pas vers les valeurs, les principes et les approches des soins primaires. Pour diriger les systèmes de soins de santé vers une meilleure performance, notre rapport appelle à un retour vers les soins de santé primaires."

Dr Margaret Chan, Directeur-Général de l'Organisation Mondiale de la Santé, 2008.2

1. Les soins de santé primaires : définition

Par soins de santé primaires, nous entendons les soins de premier niveau, c'est-à-dire le niveau qui est la porte d'entrée dans le système de soins, qui offre des soins généralistes, globaux, continus, intégrés, accessibles à toute la population, et qui coordonne et intègre des services nécessaires à d'autres niveaux de soins.3

1 Accord Institutionnel pour la sixième réforme de l'État. Un État Fédéral plus efficace et des entités plus autonomes. Le 11 octobre 2011. Pages 31-34.2 http://www.who.int/dg/speeches/2008/20081103/en/index.html 3 Macinko J. et al., The contribution of primary care systems to health outcomes within Organization for Economic Cooperation and Development (OECD) countries, 1970-1998, Health Serv Res. 2003 Jun;38(3):831-65

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Le rôle des soins de santé primaires ne doit pas être défini isolément mais en relation avec les autres constituants du système de santé, selon le principe de la subsidiarité et avec une répartition équitable des tâches en fonction des différentes compétences. Les soins primaires et secondaires, généralistes et spécialisés, ont tous des rôles importants. Ils ne sont pas mutuellement exclusifs mais nécessaires au système. Toutefois, les avancées technologiques, l'amélioration de l'éducation et de la formation, les changements de besoins liés à la transition épidémiologique, les changements sociaux et de mode de vie accroissent les besoins en soins de santé primaires, et appellent à une organisation telle que ces soins primaires soient dans la plus grande majorité des cas la première ligne -tout en s'articulant en harmonie avec la seconde ligne- dans l'intérêt du patient et en faveur d'une plus grande qualité des soins. Cela sous-entend également un soutien ferme de la part des pouvoirs publics aux organisations paramédicales qui permettent le maintien à domicile.

2. Quelle logique de métiers?

A. La démographie médicale

L’offre en médecine générale est habituellement exprimée sur base de la densité des MG (MG actifs/10.000 habitants). L’offre en médecins généralistes a longtemps été surévaluée. En effet, un grand nombre de médecins généralistes agréés (minimum 500 contacts/an) ne travaillent pas ou très peu comme médecin généraliste accrédités (minimum 1.250 contacts par an). La prise en compte de critères réalistes (équivalents temps plein [ETP] ou 1.250 contacts par an) ramène la densité en MG à 9,5 par 10.000 habitants alors qu’elle était estimée à 21,1 dans les rapports internationaux (OCDE) au début des années 2000.

Il y a donc un médecin généraliste actif en médecine générale par 1.100 habitants en Belgique. Cette densité semble être restée constante de 2000 à 2010. En 2010, elle est homogène sur l’ensemble du territoire.4

En termes de ressources humaines, la médecine générale est actuellement, en théorie du moins, suffisamment dotée mais atteint peu à peu un seuil critique, surtout en Wallonie :

La capacité de la médecine générale va se réduire rapidement, sans pouvoir être L’offre en médecine générale va se réduire rapidement vu la forte proportion des MG arrivant à l’âge de la retraite, sans pouvoir être immédiatement renouvelée, ce qui va modifier fondamentalement la manière d’exercer la médecine générale et peut-être poser des problèmes d’accès aux soins. En effet, les médecins généralistes accepteront-ils encore aussi facilement de nouveaux patients ?

La spécialisation en médecine générale n’est toujours pas rendue suffisamment attractive durant les curricula de formation au sein des facultés de médecine.

Des incitatifs importants ont permis de revaloriser la profession, mais les généralistes francophones accusent un retard dans l’utilisation de ces nouvelles ressources.5

Il y a une impérieuse nécessité d’avoir un cadastre des forces actives médicales sur le terrain, dont seuls les cercles sont capables d’établir un cadastre réaliste, qui doit être mis à jour en permanence; il faut donc leur en donner mission ainsi que les moyens nécessaires.

4 Meeus P, Van Aubel X. Performance de la médecine générale, bilan de santé. Health Services Research (HSR). Bruxelles : Institut national d’assurance maladie-invalidité (INAMI), Date de publication Février 2013, Dépot légal D/2013/0401/6, page 455 id., page 44

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B. Le défi pour la force de travail: équilibre entre les besoins de la population et l'offre de la médecine générale

i. Evolution du profil démographique et épidémiologique de la population

La diminution des taux de fécondité et l’allongement de l’espérance de vie modifient le profil démographique, ce qui nous oblige non seulement à repenser le mode de financement des soins mais aussi à revoir notre attitude vis-à-vis du vieillissement. Quels que soient le dynamisme et l’état de santé des gens après 60 ans, à un moment donné ils deviennent fragiles et perdent leur autonomie. Il faut donc mettre en place un système de prise en charge et le financer, afin de permettre à la population de 'bien vieillir'.

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Les maladies chroniques prennent une place de plus en plus importante dans notre société: l’augmentation de l’espérance de vie va de pair avec une augmentation de la prévalence des affections chroniques, définies par l’OMS comme “affections de longue durée qui en règle générale, évoluent lentement”. En Europe, les maladies cardio-vasculaires représentent la première cause des décès (33%) suivies par les cancers (27%). En Belgique, plus d’un quart de la population (27,2%) déclare souffrir d’une maladie chronique. Par ailleurs, un quart de notre population déclare souffrir d’un problème lié à la santé mentale. Malheureusement, une maladie chronique est rarement isolée. Les personnes qui en souffrent combinent souvent plusieurs problèmes: 50 à 70% des personnes au-delà de 70 ans cumulent au moins deux affections.7

Le vieillissement de la population avec son corollaire d’augmentation des maladies chroniques, couplé avec le le vieillissement des médecins, entraînera une charge de travail beaucoup plus grande. Le modèle de soins de santé de première ligne devra s’adapter. Dans ce modèle, le médecin de famille reste le seul à pouvoir gérer la complexité, en collaboration avec les autres professions de 1ère ligne. Le spécialiste fonctionne dans une dimension verticale. Si on réfère à un spécialiste, on a 6 Le vieillissement démographique : comment mesurer la qualité de notre avenir ?P.-O. Lang a , <img alt="Corresponding author contact information" src="http://origin-cdn.els-cdn.com/sd/entities/REcor.gif">, b, <img src="http://origin-cdn.els-cdn.com/sd/entities/REemail.gif" alt="E-mail the corresponding author">,7 Paulus D , Van den Heede K, Mertens R. Organisation des soins pour les malades chroniques en Belgique : développement d’un position paper. Health Services Research (HSR). Bruxelles : Centre Fédéral d’Expertise des Soins de Santé (KCE). 2012. KCE Reports 190B. D/2012/10.273/80, page ii.

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une réponse ponctuelle. Dans la réalité du quotidien le médecin généraliste est souvent celui qui récupère la situation quand elle devient complexe. Dans la promotion de la santé et la prévention aussi, les logiques sont décomposées entre différents services. Seul le médecin généraliste peut intégrer dans sa pratique ces différentes logiques.

Il faut dans ce contexte remarquer que la prise en charge du patient chronique et complexe est chronophage. Dans la situation actuelle où la rémunération se fait uniquement à l'acte (en dehors des pratiques au forfait), le revenu du médecin généraliste risque donc de diminuer: cela implique qu'il faudra réfléchir à des systèmes de rémunération qui garantissent un revenu plausible au médecin généraliste, en regard du travail réel que la société lui demande d'effectuer.

Bien entendu, la pratique de la médecine générale ne se limite pas à la prise en charge du patient complexe et/ou chronique dans une phase plus avancée de sa vie. Le fait de gérer les problèmes aigus du patient à un plus jeune âge, forme la base de la relation qui s'installe au fil du temps entre le 'médecin de famille' et son patient. Cette relation est indispensable afin de pouvoir bénéficier de la confiance du patient lorsque celui-ci serait confronté à des situations plus complexes de pathologie dans une phase ultérieure de sa vie. Le fait de gérer au même niveau les pathologies aigues et chroniques, correspond à la vision d'une approche du patient dans sa globalité, dans toutes les phases de sa vie, par le médecin généraliste. Cette approche constitue également un signal fort à la population quant à l'accessibilité du médecin généraliste (le jour même) -un aspect pour lequel la Belgique arrive en tête dans les comparaisons internationales- contrairement à la situation qui règne dans certains autres pays: au Royaume Uni par exemple, la The Patients Association a récemment observé qu'il devient de plus en plus difficile de contacter un médecin généraliste 8. Mais si rien n’est fait pour pallier la pénurie relative en Belgique, notre pays pourrait bien rejoindre les pays les moins performants quant à l’accès aux MG.

Le traitement de pathologies aigues continue donc à faire part entière de la pratique de médecine générale. Cet aspect forme d'ailleurs un pole d'attractivité de la médecine générale pour les jeunes médecins, qui désirent mettre en pratique leurs connaissances.

ii. La démographie médicale

La profession médicale vieillit (en 2005, la proportion de médecins de plus de 50 ans était de 47.7% pour les généralistes), se féminise (30.1% des effectifs médicaux actuels sont des femmes, tandis que chez les jeunes diplômés cette proportion atteint 59.5%), et les nouvelles générations -femmes et hommes- recherchent de plus en plus un équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Ce changement démographique et de culture professionnelle aura un impact sur l’ensemble de la force de travail. On constate une pénurie également dans d'autres professions, telle que le personnel infirmier. L’ampleur et l’évolution de cet impact dans le futur restent encore méconnus.9

Il y a d'ailleurs aussi moins de médecins actifs que de médecins enregistrés, et parmi les médecins actifs, seulement 4/5 à 2/3 pratiquent dans le secteur curatif. En 2005, selon le registre national (SPF Santé Publique), 42 176 médecins étaient enregistrés en Belgique, soit une densité médicale globale de 41 pour 10 000 habitants. Seule une partie de ceux-ci délivrent des soins remboursés dans le cadre de l’Assurance Maladie-Invalidité et sont considérés comme « praticiens »; parmi les médecins généralistes, il s'agit de 53.3% (11 626/21 804).10

8 The Patients Association, Primary Care: Access Denied?, Primary Care Review Vol. II, March 20139 Roberfroid D, Stordeur S, Camberlin C, Van de Voorde C, Vrijens F, Léonard C. L’offre de médecins en Belgique : situation actuelle et défis. Health Services Research (HSR). Bruxelles: Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE); 2008. KCE reports 72B D/2008/10.273/08, page 10.10 id., page iii

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L’évolution de la cohorte des médecins actifs approche très rapidement de l’âge de la retraite, comme le montrent les courbes superposées des années 2000, 2004 et 2009 des médecins ayant plus de 1.250 contacts (voir page suivante). Un âge moyen en croissance signifie que la cohorte des nouveaux venus est insuffisante pour remplacer les médecins qui cessent leur activité.11 L’équation au final qu’il faudra appliquer est : nombre de contacts x durée moyenne du contact / force de travail sur le terrain x temps de travail souhaité.

Pour conclure, en terme de pérennité de l'offre en MG, il convient donc de prendre conscience que la médecine générale va devoir faire face très rapidement à la réduction prévisible de l’activité de la génération des médecins qui ont actuellement 55 à 64 ans qui produit un tiers de l’activité actuelle. Or, les effectifs des générations plus récentes ne seront pas suffisants pour remplacer cette perte d’activité, ce qui pourrait considérablement modifier la manière de pratiquer la médecine de première ligne. Des mesures d’encouragement à ne pas abandonner la profession sont un premier pas qui doit être rapidement suivi de mesures d’encouragement fortes pour que les médecins actuellement en formation s’orientent en premier choix vers la médecine générale.12 Les universités et les Centres Académiques de Médecine Générale (CAMG) ont un rôle majeur à jouer en la matière.

iii. Note sur l'attractivité de la profession de médecin de famille

(Voir également le paragraphe 2.C.vi Les jeunes médecins)

L'évolution de la démographie médicale actuelle fait poser des questions sur l'attractivité de la profession. Les mesures d’attractivité sont encore insuffisantes, pas seulement au point de vue financier, mais aussi en tant qu’image de marque du MG et de qualité du rôle à jouer. Dans cette problématique, les syndicats sont institutionnellement concernés et agissent dans les préoccupations communes mises en évidence par leurs membres. Les débats communs et la coordination entre les Cercles et les syndicats sont essentiels dans cet esprit.

11 Meeus P, Van Aubel X. Performance de la médecine générale, bilan de santé. Health Services Research (HSR). Bruxelles : Institut national d’assurance maladie-invalidité (INAMI), Date de publication Février 2013, Dépot légal D/2013/0401/6, page 49.12 id., page 59.

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Plusieurs aspects entrent en compte et méritent de réfléchir à des propositions et suggestions. Sans être exhaustif ni limitatif, citons entre autre:

- l'aménagement de la fin de carrière: comment diminuer ses activités sans pour autant avoir la volonté de s'arrêter totalement ou brusquement? Comment impliquer des jeunes médecins en fin de sa carrière? Des pistes doivent être trouvées. On devrait auusi pouvoir rencontrer les approches de cumul entre la pension et une activité, en tenant compte d’une carrière qui ne peut atteindre 42 ans et permettrait de garder un agrément complémentaire de soutien.

- comment assurer une sécurité financière, si le modèle de soins primaire pourrait changer dans le futur (voir 2.C. De nouveaux modèles de coopération)? Des modèles alternatifs de rémunération et de sécurité financière doivent être envisagés. Certains défendent une rémunération mixte, seule à même de donner à la médecine générale un revenu satisfaisant pour toutes les missions qui lui sont imparties, sans grever une accessibilité aux soins.

- ne doit-on pas réfléchir à la possibilité pour un médecin généraliste de faire des mouvements de carrière, p.ex. d'une pratique de médecin généraliste à part entière à la médecine scolaire ou l'ONE, pour revenir lors d'une autre période de sa vie vers la pratique de médecine générale? Il faut pouvoir garantir de manière flexible ce genre de 'mutations', sans que les médecins perdent leur prérogatives. Des mouvements entre une « spécialisation de gardiste » et la médecine générale par exemple et l’assouplissement des conditions d’agréation doivent être envisagées, en vue de son maintien et de réagrément dans ce contexte.

- un changement de paradigme au sein des facultés de médecine qui devraient beaucoup plus valoriser la profession de médecin généraliste versus médecin spécialiste. Les universités ne prennent pas assez en considération la nécessité de sélectionner les meilleurs pour la MG, ceux qui vont devoir embrasser en permanence tout le champ de la médecine, apprendre à gérer les décisions en situation complexe, et être les plus adaptables au vu de toutes les facettes à appréhender, où le savoir-être est aussi important que le savoir-faire.

- …

À titre de conclusion, on doit donc être conscient du fait que suite aux différents éléments cités plus haut, l'équilibre entre les besoins de la population et l'offre de la médecine générale est loin d'être garanti pour le futur. Cela constitue au contraire un défi pour la force de travail, pour lequel des solutions devront être trouvées.

C. De nouveaux modèles de coopération

La Ministre fédérale de la santé Mme Onkelinx, a évoqué, déjà lors d'un symposium sur l'organisation des soins de santé qui a eu lieu le 25 avril 200913, que nous risquons de manquer de médecins généralistes. Comme ils privilégient un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée (cela se voit surtout chez les médecins plus jeunes; ce n'est pas seulement une conséquence de la féminisation de la profession) et que l'afflux de nouveaux effectifs a été faible ces dix dernières années, le nombre de patients par généraliste est en hausse. Autrement dit, il existe un risque de déséquilibre entre la demande des patients et le volume de la force de travail (ou de la capcité de prise en charge). La ministre affirme qu'il y a actuellement trop peu de médecins généralistes en cours de formation pour assurer à la population des soins de première ligne de bonne qualité dans un avenir proche. Mais est-ce bien le cas?

13 SPF Santé publique, Symposium 25 avril 2009, Towards an evidence-based Workforce Planningin Health Care?

12

La Belgique compte actuellement environ 1 généraliste pour 1100 habitants (avec des différences régionales et sous régionales). Dans les pays scandinaves, un généraliste a entre 1500 et 2000 patients et aux Pays-Bas, environ 2300 patients. Cette tendance s'observe également dans les pays du sud comme l'Espagne et le Portugal (globalement il n'existe que quelques exceptions en Europe: la Belgique, la France et la Suisse). Sans oublier le nombre de MG nécessaire (en rappelant l'équation citée plus haut: nombre de contacts x durée moyenne du contact / force de travail sur le terrain x temps de travail souhaité), c'est aussi l'organisation des soins primaires et la répartition des tâches qui se révèlent importantes pour obtenir une qualité des soins. Certes, le vieillissement de la population médicale, comme nous l'avons vu, constitue un risque. Il faut en outre arriver à une organisation où le généraliste tient une place claire au sein du système de soins et où il peut se concentrer sur ses tâches essentielles grâce à une bonne coopération avec d'autres disciplines.

Il faut davantage d'efforts pour rendre le système de santé performant et accessible à tous. S'ajoute à cela l'évolution vers une médecine de plus en plus complexe. La promotion de la santé et la prévention prennent une ampleur croissante, ainsi que le suivi d'un nombre accru de patients qui sont plus âgés et souffrent de plusieurs affections chroniques. Le généraliste ne doit-il pas se concentrer sur le diagnostic, l'écoute de la demande d'aide des patients, la découverte précoce d'affections à risque de chronicité? Le suivi et les tâches exécutives ne peuvent-ils pas être effectués par d'autres personnes ? Ce qu'il nous faut, c'est une redéfinition du rôle du médecin généraliste afin qu'il puisse mieux effectuer son travail en concertation avec les professionnels et institutions concernées.

Outre la dispensation des soins, les généralistes doivent occuper un rôle de coordination des soins, autant pour les nouveaux problèmes de santé que pour les patients chroniques qui présentent une multi-morbidité. Seule une équipe qui réunit des généralistes et d'autres intervenants de première ligne (infirmier, diététicien,…) peut réaliser cela avec un souci pour la qualité et le coût. C'est également le modèle préconisé par l'Organisation Mondiale de la Santé. La première ligne de soins est la seule qui ait le privilège unique de pouvoir observer les patients dans le contexte général de leur situation de vie, d'habitat, de travail et de famille. Dans notre culture, le contact privilégié entre le patient et son médecin traitant (le "médecin de famille") est largement reconnu, et devra être maintenu dans son rôle de coordinateur de soins.

i. L'organisation de la pratique

Le paradigme du médecin isolé qui prend en charge l'ensemble des problématiques de santé de ses patients, est en train de se modifier pour évoluer vers un modèle de pratique transdisciplinaire où chaque soignant intervient avec son expertise professionnelle spécifique au bénéfice du patient. Est-ce pour autant la fin des pratiques solo ? Si la réponse à cette question est négative, la réalité du terrain montre que celles-ci auront cependant de plus en plus de difficultés à gérer les contraintes et attentes de la société. En effet, on se rend compte que la prévalence (le nombre actuellement existant) des pratiques est en faveur du ‘soliste’, là où l’incidence (les nouvelles pratiques) 14 est clairement en faveur des pratiques de groupes.

La pratique de la médecine générale en solo a encore de beaux jours devant elle. Le travail en équipe est cependant appelé à se développer car il attire les jeunes générations de médecins généralistes. Il doit être encouragé, que ce soit sous la forme de réseaux (plusieurs médecins généralistes collaborent étroitement mais chacun conserve son cabinet) ou sous la forme de groupes (les médecins généralistes travaillent sous un même toit).14 Un récent sondage auprès d’ assistant en MG de l’ULG donne comme choix futur 45% de pratiques pluridisciplinaires, 45% de pratique de groupe monodisciplinaire et 10% de pratiques solistes. (Belche & Drielsma)

13

En réalité on définit trois types de pratiques : Pratique solo (par définition monodisciplinaire) Pratique de groupe monodisciplinaire

o en réseauo sous le même toit

Pratique de groupe pluridisciplinaireo en réseauo sous le même toit

Le travail, qu'il soit en réseau ou en groupe, nécessite des moyens informatiques bien développés, tels que l'accès au DMG-I pour les médecins généralistes qui collaborent, et le partage d'un dossier résumé de type Sumehr (Sumerized Electronic Health Record - Dossier médical électronique résumé) via un réseau informatique comme le Réseau Santé Wallon et ABruMeT pour tous les autres professionnels de la santé qui ont une relation thérapeutique avec le patient (voir plus loin).

ii. Les collaborateurs à la pratique des médecins généralistes

Les médecins généralistes accomplissent actuellement toutes sortes de tâches qu'ils pourraient déléguer sans le moindre problème, par exemple l'éducation à la santé, la prévention, certains aspects du suivi de patients chroniques, la prise de la tension artérielle, la prise de sang, les soins de plaies… Ce type de tâches peut être sujet d'une meilleure organisation du travail entre médecins et le personnel infirmier. Bien entendu, l'interprétation d'examens et la pose du diagnostic restent réservées aux médecins. C'est là leur tâche principale en tant que médecin. 15 Il est dans ce contexte toutefois important de mentionner que certains actes techniques pourraient être revalorisés pour les médecins généralistes: par exemple ECG, infiltrations, dopplers, plâtres… Une concertation avec la nouvelle génération de médecins généralistes est souhaitée.

En cas d'instauration d'une tel modèle organisationnel, il est important de réfléchir à un système de rémunération adéquat, puisque des délégations d’activité ne peuvent en effet se faire que dans le cadre d’une augmentation correspondante des honoraires, indexés en fonction des indexations de rémunérations salariées et qui reviennent au généraliste qui accomplit et supervise ces tâches.

iii. Le patient présentant une multi-morbidité, dit "le patient complexe"

La personne atteinte d’une ou plusieurs affections chroniques a en premier lieu un projet de vie. C’est sur ce projet que se greffera un plan de prise en charge, établi en concertation avec son médecin traitant et d’autres intervenants de première ligne. Prodiguer des soins chroniques est en effet une affaire d’équipe, orientée vers le patient. La complexité et la nature différente des besoins, couplées à la disponibilité décroissante des médecins généralistes, rend nécessaire un travail en équipe multidisciplinaire, qui partage un plan de soins commun. Le lien personnel propre à la médecine de famille et facteur d’humanisation des soins doit néanmoins être mis en exergue, y compris les rôles de défenseur du malade, de relais avec les autres praticiens, sans perdre de vue l’aspect de confiance. Par conséquent la personnalisation du contact reste un objectif, quelle que soit l’organisation adoptée.

Ce partage implique un accès des professionnels de santé au dossier médical informatisé qui contiendra un module spécifique « soins chroniques » avec les informations indispensables (plan et

15 Interview avec le Pr Paul Van Royen, département de médecine générale université d'Anvers, Amonis Magazine.

14

suivi des soins, évaluation des besoins du patient sur base d’instruments standardisés). Les questions de respect de la vie privée et des droits d’accès sélectifs (y compris ceux du patient) revêtent la plus haute importance dans ce contexte.

Cette manière de travailler (multidisciplinaire, centrée sur les besoins du patient) peut être perçue comme révolutionnaire par de nombreux professionnels de la santé, vu que leur formation ne les y a pas (ou peu) préparés. Des modules de formation axés sur le travail multidisciplinaire en équipe centré sur le patient, sont dès lors à prévoir dans les curricula de base et les formations continues du personnel médical et paramédical.16

Il s'agira de mettre en place un système professionnel: 17

un réseau de ressources humaines, capable de répondre à l’étendue des besoins des prises en charge chroniques (d'une assistance personnelle minimale à une prise en charge totale quotidienne), est indispensable pour s'assurer que le patient bénéficie de soins adéquats au moment opportun. Ce type de réseau implique de nombreux professionnels et spécialistes différents, travaillant en équipe;

des soins dispensés dans un environnement le moins complexe possible et qui soit cliniquement approprié: si possible (pour les soins moins complexes), la préférence doit être donnée aux soins à domicile ou aux soins ambulatoires à la place de soins en institution, plus coûteux. Plus concrètement, il faut entre autres trouver des solutions structurelles pour les personnes malades ou très âgées, lors de problèmes nocturnes;

capable de gérer au départ du DMG-I les hospitalisations à domicile ; celles-ci étant prévues en étroite collaboration avec les autres institutions de soins.

iv. L'amélioration de la qualité

La médecine générale est concernée au premier plan puisque plus de 90% des plaintes de santé de la population peuvent être prises en charge par les médecins généralistes. Nous faisons référence ici au fameux "Carré de White": ce diagramme confirme la nécessité de former les futurs généralistes, mais aussi les étudiants des autres spécialités, à l’ensemble des problèmes de santé des patients, y compris les plus courants, et à la symptomatologie non différenciée. Cette approche permettrait d’éviter "d’importer" les démarches diagnostiques et les stratégies thérapeutiques de soins secondaires ou tertiaires en soins primaires, avec les conséquences en termes d’utilisation d’examens et de traitements disproportionnés.18

16 Paulus D , Van den Heede K, Mertens R. Organisation des soins pour les malades chroniques en Belgique : développement d’un position paper. Health Services Research (HSR). Bruxelles : Centre Fédéral d’Expertise des Soins de Santé (KCE). 2012. KCE Reports 190B. D/2012/10.273/80, page iv.17 id., page 14.18 Giet D. Ecologie des soins médicaux, Carré de White, soins primaires et médecine générale. Rev Med Liege. 2006 May-Jun;61(5-6):277-84.

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De nombreux pays européens ont mis en place des systèmes pour mesurer et améliorer la qualité des soins. La Belgique a également mis en place des initiatives, telles que le développement de recommandations de bonnes pratiques à l’attention des médecins généralistes et des feedbacks relatifs à leurs prescriptions.

Le KCE recommande dans une première phase de susciter un forum rassemblant les différentes parties concernées, afin de mettre en commun et de confronter toutes les initiatives. La présence des associations professionnelles de médecins généralistes est ici importante. Ils peuvent proposer des indicateurs de qualité et des instruments efficients. Le rôle du monde académique et des associations scientifiques est aussi de première importance. Ils doivent promouvoir le concept d’amélioration de la qualité auprès des médecins généralistes.19

Le groupe professionnel des médecins généralistes est important pour développer une culture d’amélioration de la qualité en Belgique. Les organes de médecine générale (y compris les départements universitaires) ont une responsabilité dans la formation relative à la qualité et dans le développement de groupes équilibrés d'indicateurs valides et pertinents.20 C’est à la profession d’organiser la récolte et le traitement de l’information contenue dans le DMI (dossier médical informatisé). Les autorités doivent apporter un soutien, tant financier que de type organisationnel en définissant et en posant des jalons pour une politique d’amélioration de la qualité. De manière générale, il doit

19 Communiqué de presse KCE à l'occasion de la publication du rapport: Remmen R, Seuntjens L, Pestiaux D, Leysen P, Knops K, Lafontaine J-B, et al. Promotion de la qualité de la médecine générale en Belgique : status quo ou quo vadis ? Good Clinical Practice (GCP). Bruxelles: Centre fédéral d'expertise des soins de santé (KCE); 2008. KCE Reports 76B (D/2008/10.273/19)20 Remmen R, Seuntjens L, Pestiaux D, Leysen P, Knops K, Lafontaine J-B, et al. Promotion de la qualité de la médecine générale en Belgique : status quo ou quo vadis ? Good Clinical Practice (GCP). Bruxelles: Centre fédéral d'expertise des soins de santé (KCE); 2008. KCE Reports 76B (D/2008/10.273/19), page v.

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être question d'une assurance de la qualité grâce à une organisation des soins de santé adéquate, basée sur des systèmes non répressifs vis-à-vis des professionnels. On n’est en d'autres termes pas partisan d’un système rigide obligatoire de contrôle externe et interne sur des manuels et formules, mais plutôt de la nécessité de soutien par les Glems (Groupes locaux d'évaluation médicale, instaurés par l'INAMI) dont cela serait la préoccupation majeure: les Glems ont en effet été une avancée intéressante dans l'évaluation de la qualité, qui méritent actuellement d'être développés. On propose donc plus de formation continue et de délégations de missions aux Glems sur cette problématique, ainsi qu'un financement adéquat.

Le KCE distingue 10 éléments qui contribuent au développement de la qualité:21

La nécessité d'une culture de médecine générale orientée vers la qualité; Le rôle majeure des autorités de santé, en particulier pour le développement d'une politique

de qualité, la définition d'objectifs de santé, la législation, la création et le support d'une instance indépendante et digne de confiance, la standardisation des systèmes informatiques et le financement nécessaire;

L'implication de toutes les parties ("stakeholders"); La contribution scientifique de sociétés scientifiques de médecins généralistes et des

départements universitaires de médecine générale, p.ex. pour la définition des initiatives de qualité et le développement d'un ensemble d'indicateurs;

Le développement d'indicateurs cliniques et non cliniques permettant de couvrir la large perspective de la médecine générale;

La définition d'un équilibre optimal entre incitants internes et externes pour les médecins généralistes, dans le but de les encourager à développer des initiatives de qualité dans leur pratique;

Mettre l'accent sur la pratique de la médecine générale; L'amélioration de l'organisation de la pratique de médecine générale en termes de personnel

et d'infrastructure informatique, (ajout:) avec des logiciels performants et conviviaux; L'importance d'une instance indépendante et digne de confiance qui sera l'interlocuteur

principal pour l'analyse et le feedback des données aux médecins généralistes et les autres parties impliquées ("stakeholders");

Les moyens financiers permettant de mettre en place la structure nécessaire pour la collecte de données, la production d'outils destinés au développement de la qualité et des incitants pour les médecins généralistes.

v. La prévention et la promotion de la santé

Actuellement, de nombreuses institutions et organismes prennent des initiatives en terme de prévention et de promotion de la santé, initiatives qui sont dans la majorité des cas tout à fait louables et justifiées: des actions sont mises en place par l'ONE, la médecine scolaire, la médecine du travail, les provinces, les CPAS, les communes… Néanmoins, on observe une absence quasi-totale de coordination et une fragmentation importante des initiatives.

Pour être performant et afin d'éviter la répétition d'actes inutiles et coûteux, mais surtout dans le but de maintenir une vue d'ensemble et de garder un historique de tout acte médical préventif, il est indispensable que toutes ces initiatives soient au minimum répertoriées dans le DMG (Dossier Médical Global) tenu par le médecin traitant, librement choisi par la personne.

21 Remmen R, Seuntjens L, Pestiaux D, Leysen P, Knops K, Lafontaine J-B, et al. Promotion de la qualité de la médecine générale en Belgique : status quo ou quo vadis ? Good Clinical Practice (GCP). Bruxelles: Centre fédéral d'expertise des soins de santé (KCE); 2008. KCE Reports 76B (D/2008/10.273/19), page 61.

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Grâce à la transmission d'informations adéquates et régulièrement actualisées, le médecin de famille peut non seulement garder une vue d'ensemble, mais également coordonner les soins préventifs. Il s’agit donc de mettre en pratique l’intégration des soins qui a pour définition la dispensation, au départ d’un même lieu, de l’approche et curative et préventive. Nous remarquerons ici également que le mode de financement est en partie inadapté à l’heure actuelle.

vi. Les jeunes médecins

A l’heure où le chœur des institutions internationales place le médecin généraliste au centre des systèmes de santé, force est de constater que les étudiants en médecine ne partagent pas cet enthousiasme pour la première ligne. Nous insistons donc sur une meilleure représentation de la médecine générale dans l'enseignement (p.ex. en développant des formules de co-enseignement pour généralistes et spécialistes).

Une étude du KCE22 a analysé la profession de MG selon différentes perspectives mais tous les résultats convergent. Ils mettent en lumière de nombreux facteurs qui influencent négativement l'attraction, le recrutement et la rétention des MG en Belgique et à l'étranger :

la culture des facultés de médecine et la qualité de l'enseignement et des stages en MG; les conditions financières dissuadent des candidats potentiels pour la médecine générale ; la perception négative des conditions de travail du MG qui créent un déséquilibre entre vie

professionnelle et vie privée.

Pour résoudre ces problèmes, les parties prenantes ("stakeholders"), les étudiants et les MG qui ont quitté la profession proposent de multiples solutions réparties en un continuum homogène. D'abord, ils proposent des initiatives au sein des facultés de médecine (enseignement et stages). Ils poursuivent ensuite avec des initiatives visant à accroître la rétention des MG dans la profession en introduisant des améliorations, essentiellement dans l'organisation du système de santé et dans une moindre mesure, dans les conditions financières et de travail. Une telle révolution demande la mobilisation des parties prenantes de différents horizons (enseignement, politique) et une cohérence entre les politiques émanant des différents niveaux de décision.

La perception négative de la médecine générale ne pourra être contrebattue qu’en rendant sur le plan social au généraliste la reconnaissance et le respect dus à sa tâche et sa formation. Par conséquent, cette reconnaissance peut se faire à tous les niveaux, entre autres :

une formation incluant des approches scientifiques plus contraignantes (publications d’études), l’examen de l’opportunité d’un tronc commun avec la médecine interne ;

un exercice facilité notamment, sur le plan pratique, par une instruction légale aux autorités communales pour donner des facilités de parking aux prestataires en visite.

L’amélioration des conditions de travail passe inéluctablement par une diminution de la charge administrative et bureaucratique

Recommandations (d'après KCE22)

Les entretiens avec les parties prenantes ("stakeholders") et les étudiants ont mis en exergue le rôle essentiel que les MG devraient jouer dans le système de soins de santé belge. Il est dès lors urgent de mettre en place des politiques visant à améliorer l'attraction, le recrutement et la rétention des MG dans la profession afin d'inverser la tendance actuelle de manque d'intérêt pour cette spécialité. Des initiatives devraient être mises en œuvre tout au long du cursus et de la carrière des MG.22 Lorant V, Geerts C, D'Hoore W, Sauwens D, Remmen R, Peremans L, et al. Médecine générale: comment promouvoir l’attraction et la rétention dans la profession? Health Services Research (HSR). Bruxelles: Centre fédéral d'expertise des soins de santé (KCE); 2008. KCE reports 90B (D/2008/10.273/64)

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Initiatives au niveau des facultés de médecine : La sélection initiale des étudiants devrait cibler ceux qui présentent les meilleures qualités

humaines et le profil le mieux adapté à chaque spécialité, en particulier pour la médecine générale. En effet, le test d’aptitude a, en 2013, obtenu un taux de réussite d’à peine 25% et sur base de critères exclusivement scientifiques. La place relative des différentes matières doit être revue. Cela suppose par exemple des contacts cliniques précoces et répétés dans le cursus;

La médecine générale devrait être positionnée en tant que discipline à part entière dans les facultés de médecine;

Les étudiants de toutes les universités devraient bénéficier, tôt dans leur cursus, d'une information précise à propos de cette discipline de même que de cours incluant une perspective de médecine générale;

Il faudrait en outre décupler le nombre de postes dédiés à la MG au sein des facultés et donner les moyens aux départements de cellules de recherche très renforcées. En effet, à l’heure actuelle, malgré la possibilité de donner des cours en binômes avec des spécialistes (Louvain), la MG n’y arrive pas par manque d’effectifs.

Des cours spécifiques en médecine générale devraient aborder les solutions pour surmonter les difficultés éventuelles que les futurs MG rencontreront sur le terrain, par exemple: l'organisation d'un cabinet de médecine générale, les facteurs de stress potentiels de la profession, la formation au travail en équipe et à l'interdisciplinarité;

Des stages de bonne qualité en médecine générale devraient être encouragés pour tous les étudiants en médecine: d'une part pour favoriser l'attraction, d'autre part pour améliorer la connaissance des soins en milieu ambulatoire chez tous les spécialistes. Ces stages devraient être organisés dans différents types de pratiques pour en montrer la diversité de même que la variété des activités quotidiennes en médecine générale.

Depuis quelques années, plusieurs éditorialistes scientifiques attirent l’attention des autorités sanitaires sur l’absolue nécessité d’un changement d’orientation dans la politique de formation adoptées par les facultés de médecine23,24. Le focus doit probablement être donné à l’avenir sur la formation de médecins rôdés à l’approche globale et à la gestion de la multi-morbidité, et nettement moins sur la formation de spécialistes pointus. Cette tendance trouve son expression au niveau international par la publication d’un "Consensus mondial sur la responsabilité sociale des facultés de médecine", publié en 2010.25

Initiatives pour améliorer les conditions de travail :• Favoriser le travail en équipe ou en réseau afin de diminuer la perception d'isolement et de conditions de travail difficiles chez les MG qui travaillent seuls dans leur pratique;• Encourager la pratique de groupe qui peut constituer une solution pour certains MG, notamment pour leur permettre de profiter d'un soutien administratif, de déléguer certaines tâches et de profiter d'un travail pluridisciplinaire;• Concevoir et mettre en place des services de garde bien organisés afin de soulager les MG du stress des gardes individuelles tout en garantissant la continuité des soins en milieu ambulatoire;• Prendre des initiatives telles que les interruptions de carrière (y compris les congés de maternité), le travail à temps partiel et la promotion de la formation médicale continue durant les heures de

23 Boelen C. À quand une université socialement responsable ? Le cas de la faculté de médecine. Presse Med. 2012 Dec;41(12 Pt 1):1165-7.24 Gibbon W. Medical schools for the health-care needs of the 21st century. Lancet. 2007 Jun30;369(9580):2211-3.25 http://healthsocialaccountability.sites.olt.ubc.ca/files/2011/06/11-06-03-gcsa-french-pdf-style.pdf

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travail. Ces mesures sont de nature à favoriser un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée;• L'amélioration de l'image de la profession du MG devrait inclure de nouvelles perspectives de carrière (par exemple: des activités de recherche et d’expertise en santé publique pour l’état et les collectivités locales, et des initiatives de qualité).

Initiatives pour améliorer les conditions financières :• Poursuivre et améliorer les initiatives des autorités belges en matière d’encouragement du travail en équipe et d’installation dans des zones sous-desservies;• Objectiver les différences de revenus entre les médecins généralistes et les médecins d'autres spécialités et tendre vers une atténuation de ces différences;• Une information correcte à propos de la rémunération des MG et la diversification des mécanismes de paiement afin de compléter le système actuel d'honoraires à l'acte pourrait inverser l'image négative qu'ont les étudiants à propos des conditions financières de la profession.

Les recommandations précitées impliquent l'intégration de différents niveaux de décision pour garantir que les politiques mises en place au niveau des Communautés pour l'attraction (en matière de formation) seront conformes aux décisions prises par le niveau fédéral à propos des médecins généralistes qui sont en formation et de ceux qui exercent déjà.

D. La continuité des soins

Dans le modèle de coopération proposé, les principes de réseau, de multidisciplinarité et d'autres types de collaboration ont été évoqués. La médecine générale se trouve au cœur de la prise en charge du patient, tant sur le plan horizontal que vertical.

Le concept de subsidiarité constitue la base de ce modèle: il revient au professionnel de la santé le plus adéquat d'administrer le type de soins nécessité à un moment donné par le patient, tout en maintenant une coordination par le médecin généraliste.

i. La médecine générale au centre de l'axe vertical des soins de santé

La population semble satisfaite de son médecin généraliste (95% de la population est satisfaite) et privilégie le contact avec le médecin généraliste. 95% des patients qui ont un contact ambulatoire avec un médecin, ont un contact avec un médecin généraliste (en consultation ou en visite). Rares sont les patients qui consultent uniquement le spécialiste, quels que soient la catégorie de bénéficiaires, le sexe, l’âge, la région ou la province.26

26 Meeus P, Van Aubel X. Performance de la médecine générale, bilan de santé. Health Services Research (HSR). Bruxelles : Institut national d’assurance maladie-invalidité (INAMI), Date de publication Février 2013, Dépot légal D/2013/0401/6, page 6.

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On peut donc conclure que le premier point de contact pour le patient en matière de soins de santé est et doit rester le médecin généraliste. Il semble donc logique que ce soit le MG qui détienne toutes les données santé des patients dans ses dossiers, de préférence informatisés (DMI - Dossier Médical Informatisé), afin de pouvoir les partager avec la seconde ligne de soins.

AXE VERTICAL:

ii. La médecine générale au centre de l'axe horizontal des soins de santé

Il est clair que les patients, certainement lorsqu'il s'agit de patients à problèmes complexes, peuvent nécessiter une multitude de soins, administrés par d'autres professionnels de la santé: pharmacien,

Méd. Spéc

Méd. Gén.

PATIENT

21

soins à domicile (soins infirmiers), kinésithérapeutes, diététiciens, agents de prévention, psychologues, équipes de soins palliatifs…

Dans ces cas également, le médecin généraliste est le mieux placé pour garder la vue d'ensemble sur les données santé du patient, grâce au dossier médical du patient qui est centralisé chez lui, et dont certaines données peuvent être partagées avec les autres professionnels de la santé.

AXE HORIZONTAL:

En résumé, dans la multitude de soins de santé pouvant être administrés au patient, la médecine générale occupe la place centrale, de coordination, en gardant une vue d'ensemble et en rendant possible une bonne communication entre tous les professionnels de la santé. Le modèle du groupe international d'études sur les soins primaires "Bellagio" 27 l'illustre de cette façon:

Suite à la "fragmentation" observée dans les systèmes de soins de santé ouverts et le nombre croissant de personnes fragilisées ou nécessitant des soins chroniques, le groupe, constitué de 24 experts de 9 pays28, met l'accent sur le fait que chaque système de soins a besoin d'un point d'ancrage. Ce point d'ancrage est indispensable pour assurer la coordination et l'assistance avant, pendant et après les épisodes de maladie. Le "Bellagio Model" consiste de 10 éléments clés permettant une approche synergétique (ces 10 éléments sont en grandes lignes comparables à ceux cités plus haut par le KCE). En anglais: "These elements are Shared Leadership, Public Trust,

27 Schlette S, Lisac M, Wagner E, Gensichen J, The Bellagio Model: an evidence-informed, international framework for population-oriented primary care. First experiences, Z Evid Fortbild Qual Gesundhwes. 2009;103(7):467-7428 http://www.hpm.org/en/Events/Bellagio_Primary_Care_Conference.html

Prof. de la santé 2 (p.ex. diététicienne)

PATIENT

Prof. de la santé 1(p.ex. infirmière à domicile)

Méd. Gén.

22

Horizontal and Vertical Integration, Networking of Professionals, Standardized Measurement, Research and Development, Payment Mix, Infrastructure, Programs for Practice Improvement, and Population-oriented Management." Tous ces éléments, ayant été identifiés comme de même importance, ont d'ailleurs comme conséquence qu'ils impliquent tous ceux qui sont responsables pour les soins de santé: professionnels de la santé, managers, politiques.

iii. Structures organisationnelles: le Cercle de Médecins Généralistes

Si nous voyons le médecin généraliste au cœur de la coordination des soins administrés à la population, la structure centrale la plus évidente au niveau local est le Cercle de Médecins Généralistes. Le législateur a d'ailleurs clairement défini les missions des cercles par l'Arrêté Royal du 8 juillet 200229:

La 1ère est une "mission de représentation" : (art. 3) le cercle de médecins généralistes agit en tant que représentant de la zone de médecins généralistes et est le point local de contact pour les médecins généralistes et pour la politique locale en vue de la mise en œuvre d’une politique de santé locale.

Pour remplir cette mission, les cercles: peuvent prendre des initiatives destinées à promouvoir les soins de santé de première

ligne en général et le travail des médecins généralistes en particulier; se doivent d’optimaliser une collaboration multidisciplinaire entre les prestataires de soins

de première ligne; doivent participer à mettre en place une coopération avec l’hôpital (ou les hôpitaux), en vue

de garantir la continuité des soins au patient; le cercle de médecins généralistes optimalise l’accessibilité à la médecine générale pour

tous les patients de la zone de médecins généralistes.

Pour toutes ces questions débattues au niveau fédéral, régional et communautaire, les syndicats sont compétents pour relayer et défendre les initiatives.

La 2ème concerne "l'organisation de la garde de médecine générale". Vu le fait que ce sujet a fait et fait actuellement l'objet d'études approfondies au sein du SPF Santé, du KCE, de l'INAMI et des organisations de médecine générale, nous ne développeront pas ce point ici. Mais le fait que cette tâche est confiée aux cercles, confirme le rôle prépondérant de cette structure organisationnelle au niveau local.

Le fait également que dans l'article 3 déjà cité de l'A.R. il est énoncé que le cercle "est le point local de contact pour les médecins généralistes et pour la politique locale en vue de la mise en œuvre d’une politique de santé locale", suggère d'autres rôles possibles: point de contact en cas de catastrophes (p.ex. information de la population en cas de risque nucléaire; l'AFCN a dans le passé déjà pris des initiatives à ce sujet, via le FAG), vaccinations urgentes (le rôle des cercles a clairement été établi lors de la crise de la grippe aviaire)…

Toutes ces missions, définies dans l'A.R. en question, répondent donc parfaitement au modèle d'organisation de soins primaires au niveau local proposé ci-dessus.

Afin d'être efficaces du point de vue organisationnel, les cercles doivent atteindre une masse critique de représentation des médecins généralistes et du nombre d'habitants, sinon il est matériellement 29 8 JUILLET 2002. — Arrêté royal fixant les missions confiées aux cercles de médecins généralistes,Moniteur belge 05-10-2002, pages 45235-6.

23

impossible d'assurer les différentes tâches et missions, faute de moyens. Cela laisse entrevoir la possibilité de fusion ou de collaboration étroite de cercles de trop petite dimension.

Les moyens financiers nécessaires à l'implémentation des missions des cercles doivent être prévus.

iv. Autres structures organisationnelles de soins primaires

D'autres structures organisationnelles de soins primaires existent: le médecin généraliste fait partie d'un Cercle local, mais également, le cas échéant:

- d'un groupe de garde, où lorsque les circonstances le demandent, des collaborations pourraient être envisagées entre différents Cercles et/ou la 1ère et 2de ligne;

- d'un Réseau Multidisciplinaire Local, qui est chargé de la promotion de l'interdisciplinarité;- d'un réseau Psy 107, visant l'intégration des ressources des institutions hospitalières et des

services développés dans la communauté sur le plan de la santé mentale;- d'un Centre de coordination de soins et de services à domicile (CCSSD) , ayant pour mission

d'assister tout bénéficiaire souhaitant rester dans son lieu de vie ou réintégrer celui-ci, avec pour objectifs la continuité et la qualité du maintien au sein du lieu de vie;

- d'un SISD (Service intégré de soins à domicile), assurant la coordination franche de toutes les structures d'aides à domicile,

- etc.

Nous considérons que ces différentes structures doivent faire office de structures aidant les médecins généralistes à assumer leurs différentes tâches en collaboration avec les Cercles. Il ne s'agit pas d'un lien hiérarchique, mais nous considérons les autres structures comme un appui à la mise en pratique du rôle central du médecin généraliste à une prise en charge optimale du patient.

La motivation de cette vision est le fait, déjà évoqué, que le médecin généraliste est le seul professionnel de la santé qui dispose du DMG - Dossier Médical Global du patient.

v. Organisations représentatives

Les organisations représentatives et en particulier leur représentation locale doivent structurellement être en concertation avec les Cercles de Médecins Généralistes en tant que concernés en même temps par l’organisation des soins primaires et tous les autres niveaux, p.ex. entre garde MG et urgences des hôpitaux, les transmissions de dossiers et de suivi, la négociation des financements, la défense du patient vis-à-vis de la bureaucratie.

E. Les technologies d'information

La nécessité d'une informatique médicale bien développée a été évoquée à plusieurs reprises. Pour le dire avec George Halvorson, CEO de Kaiser Permanente30, et cité par le Pr Lieven Annemans, économiste de la santé, lors de sa leçon inaugurale à la Chaire Franqui, UCL, 5 février 2013 :

"If you do not have all information for all the patients , all the time, you are wasting your money".

i. Les logiciels

30 interview: http://vimeo.com/4039344

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La qualité des soins est appréciée classiquement suivant un certain nombre de critères : acceptabilité, accessibilité, caractère approprié, continuité, délivrance au bon moment, efficacité, efficience, sécurité.

Étroitement liée à la qualité des soins, la tenue du dossier influence certaines de ces critères et plus particulièrement la continuité, la sécurité et l’efficacité : continuité : la coordination entre les différents professionnels intervenant auprès du patient

suppose le partage des informations dans un support accessible ; sécurité : la présence d'informations spécifiques facilement identifiables et accessibles permet

la prévention des risques pour le patient ; efficacité : la prise de décision médicale est facilitée par la structuration du dossier et les

informations qui y sont consignées.

Par ailleurs, la bonne tenue du dossier est un préalable indispensable pour disposer de données nécessaires à l’évaluation qualitative des soins dont l'amélioration doit être un objectif prioritaire.

Idéalement, l'interconnectivité sur le plan informatique de tous les logiciels utilisés doit être envisagé. En ce qui concerne les caractéristiques des logiciels, nous suggérons:

• Logiciel déployé sur le web• Hybride : connecté et non connecté. Possibilité de travailler chez le patient même s’il n’y a ni

wifi, ni 3G;• Convivialité : codage transparent et intuitif pour l'utilisateur "lambda";• Logiciel d’aide à la prescription tel que proposé par la HAS

(http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_590233/les-logiciels-d-aide-a-la-prescription-questions-reponses);

• Logiciel d'aide à la décision et accès instantané aux guidelines;• Permettant l'extraction et l'interprétation des données pour la pratique et aussi pour la

profession (rôle des sociétés scientifiques et des universités ?);• Utilisable sur de multiples supports, tels que PC, portables, Smartphones et tablettes;• Dossier médical et de soins partagés avec des protocoles de collaboration multidisciplinaire,

utilisable par tous les acteurs et capable de s’adapter (TDS…);• Tourné vers le patient avec possibilité de prendre rendez-vous, outils de télémédecine, et

support à l’éducation thérapeutique;• Quelle place pour le pharmacien et accès au dossier pharmaceutique partagé ?• Utilisable partout et dans toutes les circonstances.• Indépendant des firmes pharmaceutiques.

Le principe de précaution prévoit que le logiciel ne soit pas développé par des organismes qui auraient un quelconque avantage financier dans l'exploitation de données de santé. La suite de cette réflexion induit que le développement soit contrôlé par une association sans but lucratif, dont le PO est contrôlé par les professionnels et les usagers (surtout), et les pouvoirs publics (aussi). Cela n'empêche pas de travailler avec des organisations commerciales qui offrent des services de développement informatique, comme sous-traitants mais sous contrôle public et de la profession.

Le principe de continuité, ajouté à celui de globalité, prévoit la pluridisciplinarité. Il s'agit de construire un dossier santé du patient, dans lequel ont accès divers professionnels (dont le médecin spécialiste, le pharmacien, l'infirmier, le kiné, l'assistant de pratique, le psy, …), selon des clés d'accès

25

prédéfinies (modulables selon les pratiques et l'accord des usagers), chaque professionnel à partir d'un interface et d'une structuration qui lui sont adaptés.

ii. Le DMG - Dossier Médical Global

Comme déjà mentionné, le médecin généraliste est le seul à pouvoir assumer une vue d'ensemble sur la santé du patient. Il est le seul à suivre le patient de sa naissance jusqu'à son décès et ce sur tous les plans de la santé: prévention, périodes de maladie… La détention du Dossier Médical Global lui revient donc. En ce qui concerne le DMG, il est temps de le diffuser de manière plus ferme, dès qu'une personne entre en contact avec la première ligne de soins. Selon la littérature scientifique cela ne fait pas l'ombre d'un doute: les patients avec inscription fixe chez un médecin généraliste comptent moins d'admissions aux urgences, moins d'examens inutiles et d'interventions chirurgicales, moins de réadmissions, etc. De manière générale on observe également plus d'attention pour la prévention et pour un renforcement plus important de capacitation, du pouvoir d’agir, d’autonomisation et d’émancipation (notion d’empowerment) du patient.31

iii. Réseau informatique

Au vu du développement des technologies, une vaste concertation a eu lieu sur la poursuite du développement de l’informatisation des soins de santé en Belgique, avec la participation de quasi tous les acteurs concernés (du 22 octobre au 20 décembre 2012), et un plan d'action 2013-2018 a été établi suite à cette table ronde.32

En Wallonie, le Réseau Santé Wallon (RSW) est en plein développement et est considéré comme un élément qui mérite le soutien des autorités pour un développement encore plus poussé. À Bruxelles, ABruMeT remplit les mêmes fonctions.

Le Réseau Santé Wallon et ABruMeT permettent un échange de documents médicaux informatisés (résultats d'examens, rapports médicaux, courriers, etc.) entre les médecins intervenant pour un même patient.  Quelques exemples :

le patient rentre chez lui après une hospitalisation; le patient est victime d'un accident; le patient consulte différents médecins.

Tous les médecins qui interviennent dans ces situations peuvent avoir accès aux informations qui le concernent. Inévitablement, ce nouvel échange d'informations entre les prestataires de soins facilite sa prise en charge. Pour qu'un médecin ait accès aux données médicales du patient, un lien thérapeutique doit être établi.

Les études européennes ont démontré que ce type de projet apporte des bénéfices substantiels tant aux patients qu'aux professionnels de la santé, ainsi qu'à la société en général. La prise en charge et la continuité des soins des patients inscrits sont facilitées, plus rapides et plus aisées grâce à l'accès instantané aux documents médicaux référencés sur le Réseau Santé Wallon. Les échanges de documents médicaux avec d'autres professionnels sont accélérés grâce à la dématérialisation des documents.

31 Réforme de la médecine générale pour un meilleur système de soins (Billet du Prof. Annemans sur www.mediquality.net, le 13.03.2013)32 http://www.rtreh.be

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Tout comme pour les logiciels et le DMG, on peut prévoir l'accès pour divers professionnels, selon des clés d'accès prédéfinies.

3. Conclusion

Le médecin généraliste et les Cercles de Médecins Généralistes doivent occuper la place centrale dans l'organisation locale des soins primaires. La littérature internationale33 et l'Organisation Mondiale de la Santé dans son rapport sur les soins de santé en Europe de 2009 34, préconisent cette position privilégiée pour aboutir à un système de soins de santé efficac et efficient, incluant des avantages budgétaires évidents.

Si le cercle doit être l’unité fonctionnelle et l’interlocuteur local au niveau du bassin de soins, le FAG, les sociétés scientifiques, les universités et les syndicats (tout regroupement représentatif) selon leur sphère de compétence doivent être les interlocuteurs des instances décisionnelles au niveau fédéral, des entités fédérées, des régions et des communautés.

Les éléments clés de politique de santé sont: couverture financière universelle sous le contrôle de-ou la régulation- par les autorités, distribution équitable des ressources, services basés sur une vision à long terme, de faibles tickets modérateurs pour les soins primaires afin d'éviter les problèmes d'accès. La combinaison de tous ces facteurs engendre de meilleurs soins primaires: accessibilité et premier contact facilité, soins concentrés sur la personne et sur le long terme, un plus grand éventail de services à disposition mais administrés quand nécessaire, et la coordination des soins.

33 p.ex.: Barbara Starfield, Primary care: an increasingly important contributor to effectiveness, equity, and efficiency of health services. SESPAS report 2012, Gac Sanit. 2012;26(S):20–2634 "Ce rapport encourage vivement les pays à prendre des mesures sur la base des données disponibles prouvant que l’accès aux soins primaires constitue le cœur d’un système de santé efficace", dans: OMS, Rapport sur la santé en Europe 2009. Santé et systèmes de santé, page 137.