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Nelly CARON, née à Dieppe, fut l'élève de Marguerite Long pour le piano et de Mau- rice Martenot pour les Ondes Martenot dont elle fit son instrument professionnel après avoir obtenu ses diplômes à l'unanimité au Conservatoire National Supérieur de Mu- sique de Paris.

Très attirée vers les traditions musicales de l'Orient, elle séjourna en Inde afin de s'ini- tier à la musique du Sud et à la vîna (grand luth indien). Puis elle étudie la musique iranienne et la pratique de différents instru- ments iraniens avec Dariouche Safvate et Djamchid Chemirâni.

En 1960, Nelly CARON créa à Paris, sous l'égide de l'Institut de Musicologie de l'Uni- versité, le Centre d'Etudes de Musique Orientale dont le but est de permettre en France l'étude théorique et instrumentale des disciplines musicales de l'Orient, sous la direction de professeurs orientaux.

Dariouche SAFVATE est né à Téhéran. Il mena de front études de droit et études de musique et travailla le santur avec Somâi, puis avec Sabâ, qui lui apprit également le setâr.

Dariouche SAFVATE est aujourd'hui l'un des meilleurs joueurs de setâr de l'Iran. Il professe au Conservatoire Supérieur de Mu- sique Nationale de Téhéran et fut, en 1961, détaché par son Gouvernement à Paris, afin d'y enseigner au Centre d'Etudes de Mu- sique Orientale et de préparer une thèse.

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I R A N

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Collection publiée sous la direction d'Alain Daniélou

OUVRAGES DE LA MÊME COLLECTION :

INDE DU NORD, par Alain Daniélou. VIET-NAM, par Tran Van Khé.

Ouvrages en préparation :

JAPON, par Detlef Foljanty. TURQUIE, par Kurt et Ursula Reinhard. JUIFS D'ORIENT, par Édith Gerson-Kiwi.

Institut International d'Études Comparatives de la Musique

20 Winklerstrasse I Berlin 33

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L E S T R A D I T I O N S M U S I C A L E S

Nelly CARON Secrétaire Générale du Centre d 'Études

de Musique Orientale (Paris)

et Dariouche SAFVATE Professeur au Conservatoire de Musique Nationale

de Téhéran et au Centre d 'études de Musique Orientale (Paris)

I R A N

Collection de l'Institut International d'Etudes Comparatives de la Musique

publiée sous le patronage du Conseil international de la Musique

BUCHET/CHASTEL

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Tous droits de reproduction, de traduction et d'adaptation réservés pour tous pays y compris l'U.R.S.S.

© Éditions BUCHET/CHASTEL-Corrêa 1966.

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" L e s T r a d i t i o n s M u s i c a l e s : I R A N "

E R R A T A

- Page 13, quatrième ligne, lire : " O n ne relève dans le Coran que des interdictions telles que : "etc".

et à la fin de la neuvième ligne : "e tc" .

- Page 14, treizième ligne, l ire: "...et don t la p lupar t pér i rent dramat iquement . (Le douzième...)"

- Page 35 (Tableau A). Entre "Segâh" et " H o m â y u n " , lire : "Tchahârgâh" .

- Pages 36 et 37 (Tableau B). La première échelle est celle de Shur et de ses premiers dérivés ;

La deuxième échelle est celle de Tork (quatrième dérivé de Shur) ;

La troisième échelle est celle de Segâh ;

La quatr ième » » » » Tchahârgâh ;

La cinquième » » » » la modulat ion Hêsar (en Tchahârgâh) ;

La sixième échelle est celle de Homâyun ;

La septième » » » » Esfahân (ancien);

La hui t ième » » » » Mâhur .

Page 203, renvoi 1 et page 243, neuvième ligne, lire : "Browne".

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T R A N S C R I P T I O N

Nous avons adopté, pour les mots persans, l'orthographe qui se rapproche le plus possible de la prononciation originale.

Précisons que :

Q ou gh est une gutturale proche du r français ordinaire.

Kh est semblable au ch allemand d'achtung.

Sh est semblable au ch français de charité.

A, sans accent circonflexe, ressemble à l'a anglais de sad.

A' équivaut à un a prolongé (aa).

S est toujours dur. Ex. Hesâr (se prononce Hessâr).

Les nasales sont prononcées comme s'il y avait deux n :

Ex. Mansuri (se prononce Mannsouri) ;

Koron ( — Koronn).

U correspond à ou. Ex. santur (se prononce sanntour).

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I

L ' H I S T O I R E

Les origines de la musique iranienne se perdent dans la plus lointaine antiquité et il n'est pas possible, dans l'état actuel de nos connaissances, de suivre à travers les siècles l'histoire de cette musique, où beaucoup de légendes se sont glissées. Une étude systématique est très difficile du fait de la disparition des bibliothèques de l'antique Iran au cours des pillages et des destructions qu'ont valu à ce pays les grandes invasions grecque (300 av. J.-C.), arabe (milieu du VII s.), mongoles ( X I I I s.) et afghane (XVIII s.), sans parler des influences plus récentes.

De grands théoriciens et musiciens comme Fârâbî (X s.), Avicenne (XI s.) et Safioddin (XIII s.), tous trois Persans bien que d'expression arabe, nous ont laissé d'importants ouvrages théoriques, mais aucun document digne de foi, antérieur à Fârâbî, n'a été découvert jusqu'ici. En particulier, on ne peut encore affirmer si oui ou non les anciens Perses avaient une notation musicale, et malgré une longue chaîne de tradition orale, il est difficile d'imaginer quelles mélodies charmaient les Achéménides (559-331 av. J.-C.), qui don- naient à la musique une place importante dans leur vie quo- tidienne.

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L'iconographie des Sassanides (226 à 641) nous révèle que la musique était également très en faveur à cette époque, et l'on sait que sous Chosroès II (590-628) les musiciens jouis- saient d'une grande considération.

Des hymnes religieux — comme les Gathâ-s de l'Avesta, dont des manuscrits nous ont conservé les textes 1 et des chants exaltant la grandeur des monarques et les hauts faits des héros, dépeignant les fêtes saisonnières et la beauté de la nature ou traduisant les sentiments du cœur humain, semblent avoir été les formes d'expression favorites de la période pré-islamique durant laquelle la musique instru- mentale paraît aussi jouer un rôle important.

Les rapports de la musique grecque avec l'art musical iranien sont mal connus, mais c'est une musique beaucoup plus raffinée et des instruments bien plus perfectionnés que les leurs que les envahisseurs arabes trouvèrent en Iran et s'empressèrent d'adopter. Si bien que la musique que les Arabes répandirent jusqu'en Espagne est, en fait, pour la plus grande partie, de la musique persane.

On confond souvent Arabisme et Islamisme. Pourtant il

s'agit de deux choses distinctes. L'Islam balaya une société corrompue, où l'oppression

du faible atteignait d'effrayantes proportions et apporta ce principe d'égalité qui lui valut en grande partie son rapide succès. La civilisation islamique a façonné de grands hommes,

I. On chante encore ces hymnes dans les temples zoroastriens qui subsistent en Inde, selon J.W. Draper (The origin of Rhyme, Rev. Litt. Comp. XXI, 1957).

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engendré de grands saints, en Iran et ailleurs, et fait éclore une floraison artistique et littéraire encore très vivante.

On dit souvent que l'Islam a prohibé la musique. Or, on ne relève dans le Coran que les trois interdictions suivantes :

1° les contes frivoles (Sourate 31, verset 5);

2° se nourrir d'animaux morts d'eux-mêmes; de sang; de porc... (Sourate 5, verset 4);

30 le vin, les jeux de hasard, l'idolâtrie (Sourate 5, verset 92).

Mais de la musique, il n'est point question. L'extension à celle-ci de l'interdit qui frappa également toute peinture ou sculpture figurative doit être attribuée à l'interprétation exotérique des concepts « contes frivoles » et « idolâtrie » par les mollâ-s 1 de l'époque.

A cette interdiction, les exégètes musulmans firent quelques exceptions. Ils ne pouvaient priver le peuple — et se priver eux-mêmes — de la musique, dont le besoin est inné chez l'homme, chez l'Iranien en particulier. Aussi la musique resta-t-elle admise pour les mariages et autres fêtes de famille, pour certaines cérémonies et processions, pour la récitation modulée et rythmée du Coran et pour l'Azân, l'appel à la prière, chanté par le muezzin du haut du minaret, cinq fois entre le lever et le coucher du soleil.

Par ailleurs, malgré les prescriptions religieuses, la plupart des souverains avaient des musiciens attachés à leur Cour, dont certains étaient à la fois poètes, compositeurs, chanteurs et instrumentistes.

D'autres musiciens continuaient de jouer et d'enseigner en secret, ce qui peut être l'une des raisons qui firent aimer

I. Prêtres musulmans.

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les instruments à la sonorité confidentielle, tels que le setâr . La musique iranienne n'en semblait pas moins vouée à

une lente asphyxie. Mais la musique est comme l'eau : si on lui barre la route,

elle trouve son chemin ailleurs. Elle emporte l'obstacle, ou même, elle l'utilise. Menacée par la religion, c'est par la religion que la musique iranienne allait survivre.

A l'origine, l'opéra occidental réunissait des musiciens pour chanter par plaisir. En Iran, ce véritable opéra religieux qu'est le Ta'zié groupait au début des fidèles pour pleurer.

La secte shiite fondée par Ali, gendre et successeur préféré de Mahomet, reconnaissait les douze Imâms qui succédèrent au Prophète, et dont onze furent massacrés. (Le douzième, dit-on, disparut mystérieusement.)

Les Shiites avaient coutume de se rassembler pour pleurer le martyre des Imâms, et lors de ces cérémonies, des « pleu- reurs » professionnels encourageaient les sanglots de l'assis- tance.

Peu à peu, les prêtres en vinrent à tolérer des évocations visuelles de la mort des héros. Étant donné, d'une part, le caractère religieux de ces représentations et, d'autre part, la rareté des divertissements populaires, les Ta'zié-s se développèrent et prirent une importance considérable, en particulier sous la dynastie des Kadjars, qui précéda celle, actuelle, des Pahlavis.

Le public devint de plus en plus exigeant quant à la qua- lité des Ta'zié-Khân-s, qui mimaient et chantaient les textes, et les meilleurs parmi ces artistes étudiaient avec de grands

I. Voir chapitre XII.

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musiciens qui leur transmettaient non seulement la technique vocale, mais aussi la musique telle qu'eux-mêmes l'avaient apprise de leurs maîtres. Ils enseignaient d'habitude avec le târ ou le kamantché

Ainsi la musique classique traditionnelle fut-elle conservée, grâce, pour une large part, au Ta'zié.

La musique connut un nouvel essor et la documentation musicale devint plus précise vers la fin du XIX siècle. Nâse- reddin Shâh (1831-1896) règnait alors. Ce monarque avait des goûts très raffinés et, comme plus tard son fils, Mozaf- fareddin Shâh, il encouragea les arts, en particulier la musi- que.

On dit qu'il faisait souvent venir ses musiciens dans le jardin du palais et ordonnait au joueur de santur 2 de recou- vrir d'une étoffe les cordes de son instrument : l'artiste jouait ainsi « pianissimo » et devait continuer jusqu'à ce que son royal auditeur s'endormît dans son extase.

A cette époque, deux familles de musiciens officiels de la Cour demeuraient à peu près les seules dépositaires de la musique traditionnelle : celle de Mohammad Sâdeq Khân, chef des musiciens du Roi, et celle d'Aqâ Ali Akbar Farâhâni.

De la tradition de la première famille, il ne subsiste que des vestiges. Seule survit la tradition de Farâhâni, transmise par ses fils, Aqâ Hosein Qoli et Mirzâ Abdollâh, dont les élèves formèrent à leur tour les musiciens traditionnels de notre génération.

1. Voir chapitre XII. 2. idem

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Toujours sous Nâsereddin Shâh furent fondées l'École Polytechnique et l'École militaire, et bientôt s'ouvrit une section musicale commune aux deux établissements où l'on

enseigna la musique militaire — qui échappait aux inter- dictions religieuses — en s'inspirant de la musique occiden- tale.

L'enseignement était dispensé entre autres par des Fran- çais, en particulier par M. Lemaire, sous-chef de musique du I régiment des Voltigeurs de la Garde impériale, que le maréchal Niel envoya en Perse en 1868 à la demande du Shâh.

C'est M. Lemaire qui écrivit un Hymne national persan en une nuit, Nâsereddin ayant un soir manifesté le désir qu'un hymne national fût créé sur l'heure et exécuté le lendemain matin par l'orchestre!

Mais la musique n'était encore officiellement admise que sous certaines formes, et les instruments utilisés pour le Ta'zié étaient en majorité des trompettes et des tambours militaires.

Ce fut seulement à partir de la Constitution (1906) que la musique redevint libre, après treize siècles de brimades.

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II

L E S C A R A C T É R I S T I Q U E S

Comme la plupart des pays de langues indo-européennes, l'Iran appartient au monde de la musique modale.

Sa musique compte douze systèmes modaux essentiels, les douze Avâz, répartis en sept systèmes principaux, les Dastgâh-s (qui comprennent les cinq échelles de base) et cinq systèmes dérivés, qui gardent le seul nom d'Avâz.

Un Avâz — ou un Dastgâh — se compose d'un nombre variable de séquences mélodiques plus ou moins brèves, les Gushé-s, qui se succèdent dans un certain ordre appelé le Radif.

Les Gushé-s qui constituent un Avâz ne demeurent pas immuablement dans l'échelle fondamentale de cet Avâz :

ils peuvent s'en évader à plusieurs reprises, mais y reviennent, en particulier pour conclure.

Passer insensiblement d'un Gushé à un autre est un art difficile.

Quant au développement de l' Avâz, c'est un jeu subtil qui consiste à mettre successivement en valeur certains degrés de l'échelle.

Notons que le terme Avâz 1 tel qu'on l'entend ici est un complexe de trois éléments :

I. Ce mot a des significations très nuancées. Voir chapitre IV, remar- que A.

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— gamme; — succession de courtes mélodies (Gushé-s); — caractère expressif.

La musique iranienne est monodique, autrement dit, elle ne fait pas entendre plusieurs notes à la fois.

Les peintures et les poèmes anciens montrent et mention- nent souvent plusieurs musiciens réunis et jouant d'instru- ments variés. Mais jouaient-ils à l'unisson, ou utilisaient-ils la polyphonie ? Il est certain, en tout cas, que depuis l'Islam, la musique persane est monodique (avec parfois l'adjonction d'une pédale) et riche des finesses d'exécution et d'expression auxquelles seule la ligne mélodique isolée peut atteindre 1

La dignité de l'authentique musique classique exclut les éclats : le niveau sonore moyen, relativement constant, est le « mezza voce », et les nuances, très discrètes, sont toujours très graduelles.

La tradition implique aussi la stabilité du tempo : accele- randi et rallentandi ne sont pas acceptés.

On ne trouve pas dans la tradition de notion de tonique telle qu'on l'entend en Occident. En revanche, certains degrés sont prédominants, en particulier la très importante note- Témoin, dont nous parlerons plus loin.

I. Lire à ce sujet la préface d'Inde du Nord, d'Alain Daniélou, dans la même série : Les Traditions Musicales.

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Si la forme de la mélodie est en général assez simple, l'art réside dans la manière de la jouer, en la parant d'ornements qui peuvent lui conférer une rare complexité, et répondent à « cette philosophie de l'arabesque », à « ce retour et ce recommencement au même point de départ qui est la pensée mystique rapportant tout à l'Unité Divine 1 »

Comme la musique de presque tous les pays d'Orient, celle de l'Iran fait une large place à l'improvisation, mais dans le cadre de règles strictes, et un musicien iranien digne de ce nom doit réunir les qualités d'un habile exécutant, d'un savant théoricien et d'un créateur.

La musique iranienne n'est pas tempérée, et elle comporte des intervalles plus petits que le demi-ton et que le ton et plus grands que le ton. Bien qu'aujourd'hui on parle par commo- dité de « quarts de ton » et de « trois-quarts de ton », ces dési- gnations sont très approximatives, comme nous le verrons.

En pratique, on joue rarement deux notes consécutives séparées par un intervalle d'un « quart de ton », mais en revanche, le « trois-quarts de ton » est fréquent, et si, à la première audition, l'Occidental non préparé peut se sentir quelque peu dérouté par ces intervalles, il ne tarde pas à se familiariser avec leur subtilité et à en apprécier le charme.

1. D Z. Hacobian : Quelques aspects esthétiques de la musique persane, Journal de Téhéran, n° 8017.

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Il sera sensible aussi à la sérénité qui se dégage des répéti- tions — presque toujours imperceptiblement modifiées — de certaines phrases musicales. La répétition fait partie de l'esthétique iranienne, qu'il s'agisse de poésie, de prose ou de musique.

Une grande partie de la musique iranienne est d'ailleurs liée à la poésie et la plupart des Gushé-s proviennent de poèmes chantés. C'est ainsi que ce qui semble à l'auditeur européen une simple ligne musicale peut évoquer, pour l'Iranien, un vers ou un poème entier. Pour cette raison, on désigne n'importe quelle pièce musicale par le mot Avâz (chant) même lorsque l'éxécution est purement instrumentale.

Il est intéressant de remarquer que les dessins mélodiques présentent un équilibre, une symétrie, qui se retrouvent dans les motifs des arts plastiques, des tissus, des tapis de l'Iran, et que les courbes chères à l'esthétique persane se manifes- tent autant dans la musique que dans le langage et l'écriture où elles assouplissent les caractères arabes 1

L'enseignement de la musique est oral, autrement dit, transmis de bouche à oreille, et, en ce qui concerne la musique traditionnelle, la notation européenne, introduite en Iran à la fin du siècle dernier, ne peut servir que d'aide-mémoire.

L ' é l é m e n t d o m i n a n t de la m u s i q u e i r a n i e n n e es t t ou t e fo i s

le c a r a c t è r e express i f .

I. Les Persans ont adouci la prononciation des mots arabes, à tel point que les personnes accoutumées à la prononciation arabe les reconnaissent parfois malaisément.

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« Peu importe le support : échelle, mode, mélodie... l'es- sentiel, c'est ce que nous transmettons. La théorie même nous semble secondaire, et l'expression prime t o u t »

Or, cette expression est souvent celle de la mélancolie, voire de la tristesse, qui confèrent à la musique persane un charme étrangement captivant. Sans doute le douloureux passé de l'Iran explique-t-il ce caractère et justifie-t-il les noms de certains Gushé-s : Gham-anguiz (désolant) ; Shékasté (cœur brisé); Hazin (triste); Muyé (gémissements), etc...

On dit parfois que la musique iranienne est plus faite pour être jouée que pour être entendue. C'est précisément parce qu'elle est avant tout un moyen de favoriser et d'expri- mer un état intérieur — qui n'exclut pas l'état de joie.

Aussi n'est-elle pas une « musique » au sens où l'on conçoit d'habitude ce mot en Occident, et ne doit-on pas l'écouter comme on écouterait une œuvre symphonique ou un brillant concerto. Musique d'intimité, de « mouvements d'âme », d'une intériorité et d'un raffinement extrêmes, elle requiert un auditoire restreint et réceptif plutôt qu'une assemblée nombreuse et inégalement attentive.

Autrefois, la musique iranienne se divisait en trois caté- gories :

1° la musique classique, au caractère mystique et très raffiné ;

2° la musique de divertissement; 3° la musique populaire.

Aujourd'hui, les exigences de la musique moderne, multi- pliées par la radio, la télévision, le disque, le cinéma, ont

I. F. Pâyvar.

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déjà provoqué des mélanges de ces trois catégories, avec adjonction d'éléments européens, pas toujours les meilleurs.

Dans la musique classique, on distingue :

a) La musique rythmique, née souvent d'accompagnements de danses anciennes ou de chansons populaires, que les maîtres ont jugés dignes d'être introduits dans le Radif ;

b) La musique « libre », sans rythme sensible, qu'on ne peut enfermer entre des barres de mesure. Si l'on ne distingue pas de prime abord ses rythmes très assouplis, en fait l'élar- gissement de certaines valeurs, les points d'orgue réitérés, sont régis par une pulsation qui, pour volontairement celée qu'elle soit, n'en assure pas moins une trame cohérente à la fluidité mélodique.

Cette musique libre constitue la partie la plus importante, la plus subtile de la musique classique. Elle présente « un caractère de méditation, de recueillement et d'exaltation

mystique chère à l'âme persane 1 ». Or, l'Iranien authentique, quel que puisse être son intérêt

pour d'autres cultures musicales, revient toujours à sa musique ancestrale, où le fond mystique de sa nature peut trouver son climat.

Un célèbre écrivain contemporain raconte que lorsqu'il était enfant, un bruit étrange l'éveillait parfois au cours des longues nuits de l'hiver iranien. Il finit par s'apercevoir que c'était son père qui, en dépit de ses opinions et de son rang religieux 2 se mettait involontairement à danser après la lecture de poèmes d'Hâfez.

Les musiciens iraniens rapportent aussi qu'à l'époque des

1. D Z. Hacobian. Article précédemment cité. 2. Les religieux orthodoxes étaient opposés à la danse, parfois même

à la p o é s i e .

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Sassanides, au cours d'une réunion musicale, les auditeurs furent si émus en entendant le célèbre Nakisa jouer sur sa harpe une mélodie de sa composition, qu'ils déchirèrent leur robe et perdirent conscience. Cette mélodie fut appelée Djâmeh Darân (ce qui fait déchirer l'habit).

La plupart des maîtres de la grande musique classique étaient des derviches. Par ailleurs, les grands maîtres Soufis considèrent la musique comme un support puissant de la méditation. Ils y avaient recours naguère, en particulier lors des Samâ-s et elle tient encore une place importante dans les assemblées des Ahl-e Haq (Fidèles de la Vérité).

L a m u s i q u e m y s t i q u e e u t s e s m a r t y r s , c o m m e M o s h t â q 2

et elle demeure la base noble et aristocratique de la musique traditionnelle d'un pays où une intense spiritualité a marqué tous les domaines de l'Art.

I. Voir chapitre XV. 2. Moshtâq, grand maître Soufi, fut massacré par les prêtres musulmans

orthodoxes. Voir aussi chapitre xv.

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Les « Traditions Musicales » sont une série de courtes études destinées à servir d'intro- duction aux différentes cultures musicales du

monde, leur histoire, leur technique, leurs instruments. Ecrites par des spécialistes, ces études ont pour but d'aider le musicien, l'amateur de musique et le voyageur cultivé à mieux comprendre les structures, l'esthé- tique et la signification de formes musicales que l'on ne peut plus considérer comme exo- tiques car, après la littérature et les arts plastiques, nous commençons aujourd'hui à découvrir les chefs-d'œuvre de l'art musical

des civilisations autres que la nôtre.

Les exemples musicaux correspondant aux divers volumes des « Traditions Musiciales »

sont publiés dans l' « Anthologie Musicale de l'Orient » (Collection Unesco).

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