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L’EPHE ET L’AFFAIRE DREYFUS P.7 150 ANS N° 11 JANVIER 2018 LE MAGAZINE DE L’ÉCOLE PRATIQUE DES HAUTES ÉTUDES Ah ! Doc, le journal de l’École doctorale P.16 La compassion au cours de l’évolution humaine P.21 Portrait de Jean-Christophe Attias P.28

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Page 1: N° 11 JANVIER 2018 LE MAGAZINE DE L’ÉCOLE PRATIQUE DES … · Pierre Chantraine continuait : « Je voudrais définir son rôle propre. D’une part il s’agit d’un enseignement

L’EPHE ET L’AFFAIRE DREYFUS

P.7

150 ANS

N° 11 JANVIER 2018

LE MAGAZINE DE L’ÉCOLE PRATIQUE DES HAUTES ÉTUDES

Ah ! Doc, le journal de l’École doctorale

P.16

La compassion au cours de l’évolution humaine

P.21

Portrait de Jean-Christophe Attias

P.28

Page 2: N° 11 JANVIER 2018 LE MAGAZINE DE L’ÉCOLE PRATIQUE DES … · Pierre Chantraine continuait : « Je voudrais définir son rôle propre. D’une part il s’agit d’un enseignement

Éditorial P.03 C’est officielRécompenses et nominations P.04Prix décernés aux étudiants de l’EPHE P.04Hommage à Christophe Terzian P.06Hommage à Lionel Galand P.06

Cent cinquantenaire de l’EPHEL’École Pratique des Hautes Études et l’affaire Dreyfus P.07-09

Actu des servicesLes bibliothèques du site Sainte-Barbe : de nombreux fonds et une salle de lecture accessibles en plein cœur de Paris P.10-11

Actu des sectionsUn programme archéologique franco-italien à Siris-Héraclée (Basilicate) P.12Un regroupement au service de l’étude des récifs coralliens et environnement littoraux P.12-13 Byzance virtuelle à l’EPHE : la collection de Gabriel Millet, de la plaque de verre à l’image numérique P.13François de Polignac réélu doyen de la section des Sciences religieuses P.13

Actu des institutsDes sciences religieuses à l’École nationale de la magistrature P.14Tara Pacific à Sydney : une opportunité pour renforcer la coopération entre la France et les principaux acteurs de recherche et de gestion australiens P.15

Ah ! DocLe mot du directeur de l’École doctorale P.16Parole de doctorant : Étude sociologique du développement de la recherche sur les récifs coralliens : entre internationalisation des enjeux et ancrage local P.17Focus : Approches plurielles du religieux P.18Gros plan : IVe édition de la Journée doctorale du laboratoire Saprat P.19Soutenances et habilitations à diriger des recherches P.20

RechercheLa compassion au cours de l’évolution humaine P.21-24

Paris Sciences et LettresAlain Fuchs, président de Paris Sciences & Lettres P.25 MOOC La sculpture grecque d’Alexandre à Cléopâtre (Partie II) P.25Le Centre européen des études républicaines P.26

Valeur ajoutéeLe Grand équipement documentaire du Campus Condorcet, bibliothèque délégataire de CollEx-Persée P.27

PortraitJean-Christophe Attias, historien et écrivain de la pensée juive P.28-30

Sans frontièresL’EPHE en mission en Chine P.31-32Programme doctoral EPHE-Université Normale de Shanghai-SHNU : la 1re soutenance de thèse en cotutelle à Shanghai P.32-33École d’été en Indonésie : Third International Intensive Course in Old Javanese P.33

ActualitésManifestations du cent cinquantenaire de l’EPHE P.34Manifestations étudiantes P.35Cult, Culture, and Intercommunal Relations in Roman and Late Antique Galilee P.35Publication : Les campagnes du nord-est de la Gaule, de la fin de l’âge du Fer à l’Antiquité tardive P.35Publication : Ma mémoire et les autres P.35

L’EPHE ET L’AFFAIRE DREYFUS

P.7

150 ANS

N° 11 JANVIER 2018

LE MAGAZINE DE L’ÉCOLE PRATIQUE DES HAUTES ÉTUDES

Ah ! Doc, le journal de l’École doctorale

P.16

La compassion au cours de l’évolution humaine

P.21

Portrait de Jean-Christophe Attias

P.28

SOMMAIRE

ÉPHÉMÉRIDE, le magazine de l’École Pratique des Hautes ÉtudesNuméro 11 – janvier 2018

Directeur de la publication : Hubert BostRédacteur en chef : Patricia LedouxOnt participé à ce numéro :Andrea Acri, Jeanine Almany, Fabienne Archer, Frédérick Arnaud, Jean-Christophe Attias, Hala Bayoumi, Jacques Berchon, Cécile Berthe, Marc Bui, Hélène Coqueugniot, Olivier Christin, Sylvie Demignot, Olivier Dutour, Francis Eustache, Laurence Frabolot, Philippe Gaudin, Vincent Goossaert, Arlo Griffiths, Stéphanie Groudiev, Patrick Henriet, Michel Hochmann, Pauline Lafille, Bernard Mignotte, Thibault Miguet, Sophie Nordmann, Rossella Pace, Denis Pelletier, François de Polignac, François Queyrel, Ioanna Rapti, Maxime Ratinier, Michel Reddé, Alice de Rochechouart, Gabrielle Thiry, Stéphane Verger.

Création : Agence MagamoMise en page : Frédéric MagdaImpression : Compédit Beauregard

Photo en couverture : Gabriel Monod (1844-1912), président de la IVe section de l’EPHE, et Alfred Dreyfus en 1910.

École Pratique des Hautes Études Patios Saint-Jacques – 4-14, rue Ferrus 75014 [email protected]

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Préparer un anniversaire, c’est revenir au moment fondateur – le décret du 31 juillet 1868 signé par Victor Duruy –, mais c’est aussi jeter un regard sur tout le chemin parcouru depuis : se plonger

dans les archives, faire des découvertes documentaires, prendre la mesure des continuités et des ruptures, repérer les grands jalons d’une histoire scientifique singulière dans un paysage institutionnel et politique qui s’est beaucoup renouvelé…En raison des aléas de l’histoire, l’École Pratique des Hautes Études a fêté son cinquantenaire et son centenaire de façon décalée : respectivement en décembre 1921 (en juillet 1918 la première guerre mondiale n’était pas terminée) et en avril 1969 (en mai 68 la Sorbonne était occupée…). Il est intéressant de relire aujourd’hui le discours prononcé par Louis Havet à l’occasion du cinquantenaire, et ceux de Bernard Halpern et Pierre Chantraine à l’occasion du centenaire. En 1969, le grand docteur en médecine et l’éminent helléniste célèbrent, chacun à sa façon, l’originalité et le dynamisme de l’institution dont ils représentent les deux piliers historiques. Écoutons Pierre Chantraine :

« L’École a vocation d’enseigner, à de petits groupes autour d’une table et souvent de documents, les méthodes de la recherche désintéressée. Elle ne saurait se comparer à son glorieux aîné le Collège de France avec qui elle entretient pourtant des liens étroits, plusieurs maîtres éminents enseignant dans les deux établissements, de même qu’elle entretient des liens avec l’Académie des inscriptions et belles-lettres où siègent une quinzaine de ses directeurs d’études, avec les Facultés des lettres et sciences humaines de Paris et Nanterre, l’Ecole des chartes, l’Ecole des langues orientales vivantes ».

Ce qu’exprime cette citation, c’est à la fois la revendication « pratique » du séminaire (en SVT, son corollaire est le laboratoire) et le réseau des partenaires dans lequel l’École déploie sa recherche et son enseignement. Les collaborations d’alors ont perduré, de nombreuses autres sont venues s’y ajouter, notamment à travers PSL et le Campus Condorcet. Notre réseau s’est internationalisé, voire mondialisé. PSL offre une magnifique possibilité de tisser et de retendre des liens, de développer des projets ambitieux, de sortir aussi – pourquoi le taire ? – d’une culture de la discrétion qui empêcha parfois l’École de faire bien connaître l’excellence de ses travaux. Pierre Chantraine continuait :

« Je voudrais définir son rôle propre. D’une part il s’agit d’un enseignement pratique des méthodes de l’érudition je l’ai dit, et avant moi le décret de fondation l’a prescrit. De l’autre elle a pour mission d’explorer des voies nouvelles, donc de prendre des risques. Notre recrutement est très varié. Il nous arrive grâce à la souplesse de ce recrutement de faire confiance à des jeunes qui s’engagent parfois dans des directions où personne ne s’était engagé, à qui une chance de travailler et d’enseigner librement est ainsi offerte. Nous avons cent ans, soit, mais nous nous sentons toujours jeunes et décidés à le rester ».

La fidélité à la vocation initiale ne va pas sans prise de risque. Elle l’implique même, au contraire. Et l’affirmation confiante d’il y a cinquante ans est toujours aussi vraie, il suffit d’ajouter un demi-siècle pour l’actualiser : « Nous avons cent cinquante ans, soit, mais nous nous sentons toujours jeunes et décidés à le rester. »

Bonne année 2018, bon anniversaire !

Hubert BOSTPrésident de l’EPHE

ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018 03

ÉDITO

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C’EST OFFICIEL

ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 201804

Récompenses et nominationsLégion d’honneur

M. Hubert Bost, président de l’EPHE et directeur d’études en « Protestantismes et culture dans l’Europe moderne (XVIe-XVIIIe siècles) » a reçu les insignes de Chevalier dans l’Ordre national de la Légion d’honneur le 7 septembre 2017.

Mme Valentine Zuber, directrice d’études en « Histoire de la tolérance religieuse, de la laïcité et des droits de l’homme ; les religions dans les relations internationales ; les relations Églises-États dans le monde » a reçu les insignes de Chevalier dans l’Ordre national de la Légion d’honneur le 6 octobre 2017.

M. Jean-Robert Armogathe, directeur d’études en « Histoire des idées religieuses et scientifiques dans l’Europe moderne » a été promu Officier dans l’Ordre national de la Légion d’honneur (promotion du 1er janvier 2018).

De gauche à droite, les présidents de l’EPHE : Jean-Claude Waquet, Hubert Bost, Monique Adolphe, Denis Pelletier, Gilles Pécout et Jean Baubérot. Cérémonie de remise des insignes de la Légion d’honneur d’Hubert Bost, le 7 septembre 2017 ©EPHE

Remise des insignes de la Légion d’honneur de Valentine Zuber par et Jean Baubérot lors de la cérémonie du 6 octobre 2017 ©EPHE

Prix de la Chancellerie du 5 décembre 2017, Marie Bossaert, lauréate de l’EPHE © Sylvain Lhermie, Chancellerie des universités de Paris

Prix de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres 2017

Prix Eugène Carrière : M. Michel Hochmann, doyen de la Section des Sciences historiques et philologiques (SHP), pour son ouvrage : Colorito. La technique des peintres vénitiens à la Renaissance.

Grand prix de philosophie : M. Christian Jambet, directeur d’études à la section des Sciences religieuses (SR) pour l’ensemble de son œuvre.

Prix Honoré Chavée  : M. Michel Banniard, directeur d’études (SHP) pour l’ensemble de son œuvre sur la genèse des langues romanes (Ve-IXe s.)

Prix Roman et Tania Ghirshman : Mme Samra Azarnouche, Maîtresse de conférences (SR) pour son édition et sa traduction du texte pehlevi : Husraw ī Kawādān ud Rēdag-ē. Khosrow fils de Kawād et un page.

Prix Gaston Maspero  : M. Laurent Coulon, directeur d’études (SR) pour l’ensemble de ses travaux en égyptologie. En outre, Laurent Coulon a été élu président de la Société Française d’Égyptologie le 16 octobre 2017.

Prix du cardinal Grente : M. Jean-Robert Armogathe, directeur d’études (SR) pour l’ensemble de son œuvre.

Médaille Giles  : M. Jean-Pierre Drège, directeur d’études (SHP) pour son ouvrage : Le papier dans la Chine impériale. Origines, fabrication, usages.

Médaille Brunet  : M. Carmelo Giuseppe Conticello, chercheur au CNRS, membre du LEM et directeur d’études invité de l’EPHE, pour la direction de l’ouvrage : La Théologie byzantine et sa tradition, vol. I,1.

Prix décernés aux étudiants de l’EPHEPrix de la Chancellerie 2017Prix Louis-Forest / Thiessé de Rosemont en Lettres et Sciences humaines : Marie Bossaert, pour sa thèse de doctorat « Connaître les Turcs et l’Empire ottoman en Italie. Construction et usages des savoirs sur l’Orient de l’Unité à la guerre italo-turque », sous la direction de Gilles Pécout et Danièle Menozzi.

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Hala Bayoumi reçoit le Prix Cristal du CNRS : une docteure de l’EPHE à l’honneur

C’EST OFFICIEL

05ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018

Prix de la Chancellerie du 5 décembre 2017, Hassan Chahdi, lauréat de l’EPHE © Sylvain Lhermie, Chancellerie des universités de Paris

Ont été promus au grade d’Officier dans l’ordre des Palmes académiques : Georges-Jean Pinault, Judith SchlangerOnt été nommés au grade de Chevalier dans l’ordre des Palmes académiques : Claudie Doums, Sylvio De Franceschi, Étienne Delage, Hélène Gloria, Philip Huyse

PALMES ACADÉMIQUES 2017

Hala Bayoumi est aujourd’hui ingénieure de recherche CNRS au Centre d’Études et de Documentation Économiques, Juridiques, et sociales (CEDEJ) du Caire, responsable du pôle « SIG et géosimulation » depuis 2007. Ses compétences en matière de systèmes complexes lui permettent d’aborder les objets d’études en sciences humaines et sociales sous l’angle de la complexité.

Elle a reçu le 13 novembre 2017 la médaille de Cristal du CNRS pour sa créativité, sa maîtrise technique, son sens de l’innovation et sa contribution à l›excellence de la recherche française, notamment dans le cadre de la création d’une plateforme web innovante lancée en 2015 : cedej.bibalex.org. Créé en collaboration avec la Bibliothèque d’Alexandrie, ce portail permet à tous d’accéder à une gigantesque banque de données d’archives, composée de près d’un million de coupures de presse égyptiennes. L’expertise d’Hala Bayoumi a permis de développer les algorithmes nécessaires au fonctionnement de la plateforme web et à la constitution d’une bibliothèque intelligente, accessible en trois langues en parallèle : arabe, français et anglais. Cette réalisation ouvre la porte au développement d’autres programmes documentaires, notamment ceux impliquant des documents en plusieurs langues.

Prix Schneider/Aguirre-Basualdo en Lettres et Sciences Humaines  : Hassan Chahdi, pour sa thèse de doctorat « Le mushaf dans les débuts de l’islam. Recherches sur sa construction et étude comparative de manuscrits coraniques anciens et de traités de de qira’at, rasm et fawasil », sous la direction de François Déroche. Il a également reçu le Prix de la meilleure thèse francophone 2017 sur le Moyen-Orient et les mondes musulmans décerné par la Direction régionale Maghreb de l’Agence universitaire de la francophonie.

Hala Bayoumi a réalisé son master puis soutenu sa thèse en 2010 à l’EPHE, en informatique et mathématiques appliqués aux sciences sociales dans la mention « Systèmes intégrés, environnement et biodiversité ». Elle a mené ses travaux de recherche sous la direction de Marie-Françoise Courel et Marc Bui, au sein de l’équipe « Informatique des Systèmes complexes » du laboratoire Cognition Humaine et Artificielle (CHArt).

Bourse Jean Walter-Zellidja de l’Académie française 2017Eva Zahiri-Mehrabadi et Mme Yasmine Amory ont reçu une bourse afin de leur permettre d’effectuer à l’étranger toute forme de séjour, parcours, recherche… utile à leurs travaux dans le cadre de leur thèse.

Prix des Académies pontificalesPierre Chambert-Protat, docteur de l’EPHE et associé du LabEx Hastec1, a été récompensé pour sa thèse sur « Florus de Lyon, lecteur des Pères. Documentation et travaux patristiques dans l’Église de Lyon au IXe siècle », sous la direction d’Anne-Marie Turcan-Verkerk (EPHE/IRHT) et de Paul Mattei (Lyon II/Hisoma).

Prix Zappas 2017 de l’Association des études grecques Claudio Zamagni a obtenu le prix Zappas 2017 pour son livre L’Extrait des Questions et Réponses sur les évangiles d’Eusèbe de Césarée : un commentaire, publié en 2016 chez Brepols (coll. Bibliothèque de l’Ecole des hautes études, section des sciences religieuses, n° 171).

1 – Laboratoire d’Excellence Histoire et anthropologie des savoirs, des techniques et des croyances, porté par l’EPHE. Plus d’informations sur labexhastec-psl.ephe.fr

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C’EST OFFICIEL

Hommage à Christophe Terzian« C’est avec tristesse que nous apprenions, le 18 juin 2016, la disparition de Christophe Terzian, directeur d’études à l’EPHE et directeur de l’UMR 754 (unité mixte INRA, Univ. Lyon 1, EPHE) – Infections virales et Pathologie Comparée (IVPC). Le lundi 12 juin 2017, un hommage lui a été rendu à Lyon au cours de la journée scientifique « Arth’Rhône » qui a rassemblé de nombreux collègues et amis de Christophe. Ses anciens encadrants et collaborateurs ont retracé son parcours en saluant ses grandes qualités scientifiques et humaines. Christophe était

féru de ces éléments mobiles qui se cachent dans notre génome et ses travaux furent pionniers et fondateurs dans ce domaine. Il a notamment contribué de façon très active aux travaux qui ont permis de démontrer que le rétrotransposon de Drosophile Gypsy possède des propriétés infectieuses similaires aux rétrovirus des mammifères et à caractériser le gène Flamenco qui contrôle l’expression de Gypsy.

D’une extrême gentillesse, Christophe était un exemple de générosité, avec un grand sens de l’humour, et accessible à tous. Il avait à cœur de transmettre ses connaissances et était très impliqué dans l’enseignement, mais aussi dans la vie de l’Ecole.

Au moment où nous lui rendions hommage à Lyon, une très belle initiative se déroulait à la Faculté de Biologie de l’Université d’État d’Erevan (YSU) en Arménie avec l’inauguration par sa mère et ses deux filles, d’un laboratoire de génétique moléculaire dédié à sa mémoire : www.ysu.am/news/en/Laboratory-of-Molecular-Genetics-after-Christophe-Terzian

Nous garderons le souvenir d’une personne de bien, d’un scientifique pointu, attentif aux personnes et bienveillant en toutes circonstances. À nous de garder vivant son souvenir en continuant de partager les valeurs qu’il nous a transmises, dans notre vie professionnelle comme personnelle. »

Frédérick Arnaud, Fabienne Archer, Maxime Ratinier et Bernard Mignotte

Hommage à Lionel GalandAncien directeur d’études de l’EPHE, l’africaniste et linguiste Lionel Galand est décédé à Roosendaal, au Pays-Bas, le 28 octobre 2017, à l’âge de 97 ans.

Normalien et ancien membre de l’École française de Rome, Lionel Galand débuta sa carrière à l’Institut des Hautes Études marocaines de Rabat (1948-1956), puis professa à l’INALCO (1956-1977) et à la IVe section de l’EPHE (1971-2006), qui lui conférèrent tous deux l’honorariat. Élu

correspondant de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres depuis 1999, spécialiste des études libyco-berbères, on lui doit des travaux fondamentaux sur la grammaire comparée des langues berbères, le déchiffrement des alphabets libyques, ainsi que plusieurs études sur les poésies touarègues recueillies par Charles de Foucauld. Il avait également contribué à l’étude du guanche, l’ancienne langue des îles Canaries. Parmi sa riche bibliographie réunissant plus de 200 articles et de nombreux ouvrages, on citera son livre Regards sur le berbère, paru en 2010, qui constitue la pierre angulaire de nos connaissances dans cette discipline.

L’École adresse ses condoléances à sa fille, Perrine Galand, directrice d’études émérite à la section des Sciences historiques et philologiques.

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Le 8 novembre 1897, l’historien Gabriel Monod publiait simultanément dans Le Temps et dans Le Journal des Débats une lettre dans laquelle il utilisait son expertise méthodologique « historique » pour examiner le fameux « bordereau » qui avait permis d’incriminer Dreyfus. Il concluait à l’innocence de celui-ci. C’était la première intervention publique d’un savant dans la célèbre « affaire ». Le 10 janvier 1898, le chimiste Émile Duclaux, considéré comme le successeur de Pasteur, publiait dans Le siècle un article où il s’exprimait « comme savant » et dans lequel, basculant du même côté que Monod, il constatait :

« Je pense tout simplement que si, dans les questions scientifiques que nous avons à résoudre, nous dirigions notre instruction comme elle semble l’avoir été dans cette affaire, ce serait bien par hasard que nous arriverions à la vérité. Nous avons des règles tout autres, qui nous viennent de Bacon et de Descartes : garder notre sang-froid, ne pas nous mettre dans une cave pour y voir plus clair, croire que les probabilités ne comptent pas, et que cent incertitudes ne valent pas une seule certitude. »

Fondateur de la Revue Historique, Gabriel Monod était alors non seulement directeur d’études mais aussi président de la IVe section. Il était sans doute l’historien le plus influent de France (Maurras avait commencé l’année précédente à décrire ce qu’il appelait « l’État-Monod »1). Émile Duclaux était quant à lui directeur de l’Institut Pasteur depuis la mort du maître (1895) et il était rattaché à l’EPHE en tant que directeur du laboratoire de chimie physiologique, où il enseigna de 1889 jusqu’à sa mort en 1904. Les deux premiers « intellectuels » intervenus dans l’affaire en revendiquant haut et fort l’utilisation de méthodes scientifiques afin d’établir la vérité sont donc deux figures de l’EPHE. Ce n’est sans doute pas un hasard. Selon un rapport de police, les étudiants de Duclaux avaient l’habitude de s’en prendre aux groupes nationalistes en criant « À bas les microbes »2 : de la « révolution pasteurienne » à l’arène politique il n’y avait qu’un pas, que de nombreux savants franchirent alors pour défendre la notion de vérité scientifiquement établie comme fondement de toute justice. Le cas de Duclaux illustre remarquablement ce choix, comme le rappela l’historien de l’Antiquité Gustave Bloch (père du médiéviste Marc Bloch) lors de son éloge funèbre à l’École Normale Supérieure (janvier 1905) :

« Ce qu’il appelait esprit scientifique, c’est une faculté, une habitude plutôt qui trouve son emploi en dehors même de la science, dans toutes les branches de notre connaissance et dans tous les actes de notre vie, l’habitude de se faire soi-même son opinion ‘avec la crainte salutaire de se tromper et la ferme volonté d’en éviter l’occasion’.»3

Quant à son épouse Mary Duclaux, une poétesse anglaise qui avait d’abord été la femme de James Darmesteter (directeur d’études à la IVe section sur une chaire de vieux persan et chantre du prophétisme républicain), elle écrivit dans la biographie d’Émile, toujours à propos de l’affaire, que les savants, « sachant le prix de la sincérité parfaite, n’ont rien voulu sacrifier à la raison d’État, à l’esprit de corps, à l’intérêt religieux, à n’importe quelle préoccupation d’unité »4.

Le rôle de grandes institutions telles que l’École des chartes (Paul Meyer, Auguste Molinier) ou l’École Normale Supérieure (Lucien Herr, Lucien Lévy-Bruhl, Charles Seignobos etc.), comme pourvoyeuses de grands intellectuels dreyfusards est désormais bien connu5. Celui de l’École Pratique des Hautes Études est moins souvent cité mais il n’apparaît pas moins important. Lorsqu’en 1898 un dreyfusard genevois et parisien, Auguste de Morsier, publia sous le pseudonyme « E. de Haime » (pour « M ») un recueil de témoignages et de déclarations favorables à Dreyfus, il le fit précéder d’un échange épistolaire avec Monod.

1 – Joly (2012).2 – Duclert (2009), 87-88.3 – Duclert (2009), 90.4 – Duclert (2009), 90. Voir Duclert (1992).5 – Joly (1989) ; Ribémont (2005) ; Duclert (2006), Duclert (2010).

L’École Pratique des Hautes Études et l’affaire Dreyfus Découvrez en avant-première un chapitre extrait du livre anniversaire : L’École Pratique des Hautes Études.

Invention, érudition, innovation (1868-2018), éd. Somogy, juin 2018

Gabriel Monod et Alfred Dreyfus en 1910

07ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018

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Suivaient divers textes d’une soixantaine de personnalités, dont des écrivains et des hommes politiques célèbres (Émile Zola, Anatole France, Octave Mirbeau, Jaurès, Clémenceau etc.)6. Or la IIe section de L’EPHE était représentée par deux chimistes (Duclaux et Édouard Grimaux), la section des Sciences religieuses l’était par Albert Réville et par Maurice Vernes, enfin la Section des sciences historiques et philologiques pouvait revendiquer pas moins de six savants : Michel Bréal, Arthur Giry, Louis Havet, Gabriel Monod, Gaston Paris et Jean Psichari. Aucune institution de « haut enseignement » ne peut prétendre à un rôle comparable. De la même façon, lorsque Paul Stapfer louait en 1898 ceux qui, courant « à la rescousse du droit outragé », « sacrifient au devoir d’écrire pour la justice l’espoir prochain de devenir directeur de l’enseignement supérieur, de l’école de Rome ou de l’école normale supérieure », il citait onze noms dont Duclaux, Havet, Bréal, Paris, Monod et Psichari7. Dans ce même contexte enfin, il convient de signaler la forte représentation des enseignants de l’EPHE lors de la création de la Ligue française pour la défense des droits de l’Homme et du citoyen (juin 1898) : l’helléniste Jean Psichari en était cofondateur avec le sénateur Ludovic Trarieux et on trouvait

6 – Haime, de (1898).7 – Cit. Duclert (2010), 227.

au comité les noms d’Émile Duclaux, d’Arthur Giry, d’Édouard Grimaux, de Louis Havet, de Léon Marillier (directeur d’études en Ve section) et de Paul Passy (fils du futur prix Nobel de la paix Frédéric Passy et lui-même phonéticien directeur d’études en IVe section)8.

L’EPHE ne s’engagea évidemment pas dans l’affaire Dreyfus en tant qu’institution et comme l’École des Chartes ou l’École Normale Supérieure, elle compta aussi quelques antidreyfusards. Le plus célèbre est certainement Jules Soury, anticlérical titulaire de la chaire d’« Histoire des doctrines contemporaines de psychologie physiologique », tenant d’un racisme biologique et antisémite forcené (« Je sais que cet homme ment parce qu’il est juif »)9. Il y a cependant un « esprit EPHE » qui explique alors le grand nombre de dreyfusard et leur importance dans le fonctionnement de l’école. À partir du déclenchement de l’affaire, les trois présidents de la IVe section qui se succédèrent jouèrent un rôle public très important en faveur de la révision puis de l’acquittement de Dreyfus (ce sont Gaston Paris, Gabriel Monod et Louis Havet10). De même les deux premiers présidents de la Ve section, Albert Réville et Maurice Vernes, publièrent des textes dreyfusards. Il n’est d’ailleurs pas indifférent de noter que Soury avait été nommé directement par le ministre Paul Bert et non choisi par ses pairs. Comment peut-on expliquer cet engagement très majoritaire, particulièrement au sein de la Section des Sciences Historiques et philologiques ? Il est certain que le concept de vérité scientifique, illustré aussi bien par les sciences exactes que par la philologie et l’histoire, joua un rôle déterminant11. Il s’agissait en effet de suivre une démarche respectueuse des sources et de juger après examen, en bannissant les hypothèses gratuites et les conclusions mal fondées. Léon Blum rapporte dans ses souvenirs sur l’affaire que dès 1894, dans une conversation privée, Michel Bréal l’avait informé ainsi de sa conviction que Dreyfus était innocent :

« Je n’ai pas à croire ou à ne pas croire à l’innocence de Dreyfus. Mais je ne crois pas à sa culpabilité, parce que la vie m’a instruit à ne croire que ce que je comprends. Or, je ne comprends pas le crime de Dreyfus. Et je ne le comprends pas parce que, jusqu’à présent, on ne m’a fourni aucun modèle intelligible. »12

Ceux qui avaient l’habitude du document ancien et se trouvaient régulièrement confrontés à des problèmes de falsification pouvaient traiter la question des « preuves » de la culpabilité de Dreyfus avec compétence et sans passion. Ainsi Arthur Giry, chartiste et directeur d’études adjoint à l’EPHE, pouvait-il écrire dans un article du journal Le siècle (6 juin 1898) :

« Tel savant qui s’applique à l’étude d’un diplôme mérovingien dont l’original est perdu et dont il ne connaît que des copies arrive à démontrer, sans conteste, d’après les formules de politesse, d’après l’emploi de certaines expressions, d’après l’agencement des phrases, que ce document n’émane pas du souverain auquel il est attribué et à déterminer l’époque

8 – Voir Le siècle, 6 juin 1898.9 – Taguieff (1998) ; Taguieff (2002).10 – Sur Louis Havet dans l’affaire Dreyfus, Naquet et Oriol (2009) et Thouard (2015).11 – Rebérioux (1976) ; Duclert (1997) ; Duclert (1999) ; Bähler (1999) ; Bähler (2004), 208-246 ; Thouard (2015).12 – Blum (1935), 38.

Photo de Jean Psichari avec une dédicace à Dreyfus. 28 juin 1902. Texte de la main de Psichari : « Pardon de cette étincelle tombée de ma cigarette, de ce petit trou dans la matière. La brûlure de l’affaire est toujours là. Rien ne l’éteindre jamais dans mon cœur. Rien, que la justice, ne guérira jamais le cœur de la France » (le trou causé par la cigarette se trouve en bas à gauche de la photographie).

08 ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018

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à laquelle il a été forgé. Ce sont là résultats rigoureux et certains, dont seuls peuvent s’étonner ceux qui ne sont pas favorisés avec les méthodes. Et l’on contesterait qu’il soit possible sans voir l’original, d’appliquer avec succès au billet en question des procédés analogues de critique ! » (le « billet en question » était un faux produit lors du procès Zola puis à nouveau en novembre 1896).

La question du statut de la science, de ses méthodes et surtout de son rôle dans la société, fut posée avec acuité à partir du 1er janvier 1895 par le critique littéraire Ferdinand Brunetière, qui se convertissait alors au catholicisme et proclamait en même temps « la faillite de la science à procurer une morale sociale »13. Parmi ses nombreux adversaires, en plein contexte de l’affaire, on peut citer Gaston Paris, qui avait été converti au dreyfusisme par son confrère Monod et qui s’exprima souvent sur cette question du statut moral et social de la science. Exemplaire est à cet égard est sa leçon inaugurale au Collège du France, dès 1866 :

13 – Compagnon (1997), 17.

« (…) en nous forçant de nous soumettre aux faits, en proscrivant toute immixtion intempestive de notre personnalité, en faisant de nous les instruments dociles d’une idée toute désintéressée, elle (la science) nous donne des habitudes d’esprit qui, transportées dans d’autres domaines, s’appelleront l’amour de la liberté et de la justice. Elle nous apprend à nous détacher de nous-mêmes, à nous isoler des préjugés qui nous entourent. »14

Écrivant à Brunetière, anti-dreyfusard déclaré, en janvier 1899, Gaston Paris exprima parfaitement une position qui était aussi celle de tous les savants engagés dans la défense du capitaine injustement accusé :

« L’esprit scientifique – c’est-à-dire la discipline imposée à l’esprit et l’habitude de rechercher la vérité sans parti pris d’avance et chaque vérité par l’ordre de preuves qui lui convient – » est « le meilleur directeur d’une nation aussi bien que d’un individu. »15

Cette profession de foi était aussi celle de la plupart des directeurs d’étude de l’EPHE, mais elle convenait aussi à beaucoup d’anciens élèves qui avaient été formées aux exigences de l’« esprit scientifique » depuis la fin des années 1860. Parmi eux se trouvaient deux des plus illustres dreyfusards, Bernard Lazare et Joseph Reinach.

14 – Bähler (2004), 224-225.15 – Bähler (1999), 129.

150 ANS DE RECHERCHE RÉUNIS EN UN RECUEIL INTELLECTUEL INÉDIT

Depuis 150 ans, l’EPHE impulse des recherches « pratiques » dans de nombreux domaines d’expertise en rapport avec notre Histoire et notre avenir. Afin d’honorer et de restituer cette richesse intellectuelle, les enseignants-chercheurs de l’École ont œuvré de concert, pour donner naissance à un livre inédit de 700 pages dirigé par Patrick Henriet.

Cet ouvrage collectif mettra en lumière un grand nombre des champs disciplinaires essentiels de l’EPHE ainsi que certaines figures qui marquèrent leur époque et ouvrirent de nouvelles voies aux chercheurs, dans un dialogue avec l’époque contemporaine.

L’École Pratique des Hautes Études. Invention, érudition, innovation (1868-2018) sera publié par l’EPHE en juin 2018 aux Éditions Somogy.

Inauguration d’un monument dédié à Émile Zola, Suresnes, le 12 avril 1908. Louis Havet lit un discours

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CONTACT : Patrick Henriet [email protected] d’études (SHP), directeur des publications de l’EPHE.

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Les bibliothèques du site Sainte-Barbe : de nombreux fonds et une salle de lecture accessibles en plein cœur de Paris

La bibliothèque de l’EPHE du site Sainte-Barbe regroupe deux entités parmi les neuf que compte le Service commun de la documentation, des bibliothèques et des archives (SCDBA) : la bibliothèque Michel Fleury et la bibliothèque des Sciences religieuses.

La bibliothèque Michel Fleury (BMF)La Bibliothèque des Sciences historiques et philologiques, fondée en 1868 en même temps que l’établissement, a reçu le nom de l’historien Michel Fleury en 2002. Elle se distingue par une vraie richesse en antiquité gréco-romaine particulièrement en épigraphie, en égyptologie, Moyen Âge européen, philologie romane, sciences auxiliaires de l’histoire, linguistique… Toutes les disciplines enseignées à l’EPHE, souvent très spécialisées, ne sont pas représentées. Par exemple, le fonds Vaudeville (SHP) relatif aux études indiennes a été mis en dépôt à la BULAC ainsi que le fonds Biardeau (sciences religieuses).

Détentrice de fonds de haute tenue scientifique (plus de 70 000 documents), la BMF conserve une part importante des imprimés patrimoniaux du service qui sont complétés par différents documents multi-supports (papier, photographies, cartes, plans, microformes, tirés à part, archives…).

Salle de lecture de la Bibliothèque EPHE à Sainte Barbe, 4 rue Valette, 75005 Paris © EPHE

ACTU DES SERVICES

La liste des fonds spécialisés illustre la richesse et l’hétérogénéité des fonds :

• Charles Graux (philologie grecque et sources gréco-romaines) • Gaston Paris (philologie romane) labellisé CollEx (2018)• Louis Robert (épigraphie grecque)• Pierre Montet (égyptologie) • Antoine Meillet (linguistique et grammaire comparée)• Jacques André (études latines)• Alexandre Delamarre (linguistique grecque)

• Celtique (civilisation et langue celtes)• Emile Châtelain (paléographie, imprimés et plaques de verre)

Papyrologie  : la BMF a déposé ses deux fonds de papyrus, essentiellement grecs, à l’Institut de papyrologie de la Sorbonne (Fonds Weill et fonds Graux).

Cunéiforme  : le fonds de tablettes cunéiformes (fonds Labat), constitué sur l’initiative de Vincent Scheil, est en cours d’inventaire et de récolement.

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Denkmäler aus Aegypten und Aethiopien, Karl Richard Lepsius. Band XI. Sinaitische Inschriften. Abth. VI. Bl. 19. Wadi Mokatteb. Gruppe B 127, 127 bis, 127 ter

La bibliothèque des Sciences religieuses (BSR) La Bibliothèque des Sciences religieuses est de fondation plus récente, 1970. Ses collections (30 000 documents) couvrent les religions antiques, le judaïsme, le christianisme et l’islam. Elles ont trait à la constitution et à l’interprétation des sources écrites des trois monothéismes, en tenant compte de leur environnement et de leurs prolongements intellectuels, religieux et philosophiques.

Histoire, théologie, philosophie, anthropologie religieuse (religions antiques, judaïsme, christianisme et islam) sont ses domaines d’excellence. Elle conserve un fonds chiite unique en France (1 150 volumes) composé de deux collections faisant système :

• Le Fonds Henry Corbin et le Fonds Shaykhî. Ce dernier est en cours de signalement avec le concours du Campus Condorcet et de l’ABES. Ces fonds viennent d’être labellisés CollEX (2018)

• Les fonds de sciences religieuses : ○ Jules Leroy (christianismes orientaux : dogmes, art et archéologie, monachisme, littérature des domaines syriaques et éthiopiens)

○ Christine Thouzellier (catharisme et hérésies médiévales) ○ Daniel Gimaret (théologie musulmane) ○ Jean-Marie Paupert (catholicisme moderne et contemporain)

○ Antoine Guillaumont (christianismes orientaux) ○ Pierre Geoltrain (christianisme ancien) ○ Jean-Jacques et Renaud Nattiez (catholicisme contemporain)

La photothèque Gabriel Millet, Collection chrétienne et byzantine Constitué à partir du legs de Gabriel Millet à l’EPHE, la collection chrétienne et byzantine connue sous le nom de son fondateur est un fonds patrimonial de ressources documentaires du début du XXe siècle. Il comporte environ 40 000 plaques de verre, autant de supports souples et plus de 100 000 tirages papier mais aussi des relevés d’architecture, des aquarelles et des moulages d’ivoires. S’y ajoutent des maquettes d’ouvrages, des lettres et une collection de publications.

Le SCDBA continue d’accueillir régulièrement des fonds, qui sont légués ou confiés à l’EPHE, par exemple récemment les archives Pierre Bourdieu et la bibliothèque de Lionel Galand (fonds berbère).

INFORMATIONS PRATIQUES

Bibliothèques et Centres de Documentation du Site Sainte-Barbe : 4 rue Valette, 75005 Paris – salle de lecture EPHE (RDC haut du bâtiment)

Bibliothèque Michel FleuryTél. : 01 56 81 76 [email protected]

Bibliothèque des Sciences religieusesTél. : 01 56 81 76 [email protected]

Mission des ArchivesTél. : 01 56 81 76 [email protected]

Centre Gabriel Millet - PhotothèqueTél. : 01 56 81 76 [email protected]

Plus d’information sur les différents fonds et centres de documentation sur : www.ephe.fr/bibliotheques/presentation-generale

Les archives de l’EPHE accessibles au publicLes archives historiques de l’EPHE (institutionnelles ou personnelles, scientifiques ou administratives) constituent une source riche sur l’histoire de l’établissement et témoignent de l’activité intellectuelle de la fin du XIXe siècle à nos jours. Actuellement en cours de classement, leur consultation sur rendez-vous est d’ores et déjà possible. Les inventaires seront disponibles progressivement sur le catalogue en ligne des archives et manuscrits de l’enseignement supérieur www.calames.abes.fr/pub/#details?id=FileId-1636 et prochainement sur la bibliothèque numérique de l’École (en cours de construction).

Partenariats et servicesLes deux bibliothèques dont les ouvrages sont consultables dans une salle unique du collège Sainte-Barbe, sont accessibles aux professeurs, étudiants et auditeurs inscrits à l’EPHE. Des lecteurs extérieurs sont acceptés sur accréditation.

Les thèses en version papier des sections SHP et SR sont consultables sur rendez-vous.

Une gamme de services est proposée (accès aux catalogues, prêts, ressources électroniques, numérisation, copies, réservation pour séminaire…).

Pour approfondir la découverte de ces bibliothèques, vous pouvez vous reporter au site internet, rubrique Bibliothèques et mieux encore, venir sur place, avant notre départ pour le Campus Condorcet en 2020.

CONTACT : Jacques Berchon, directeur du Service commun de la documentation, des bibliothèques et des archives [email protected]

ACTU DES SERVICES

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Sciences de la vie et de la terre

Sciences religieuses

Sciences historiques et philologiques

SCIENCES HISTORIQUES ET PHILOLOGIQUES

SCIENCES RELIGIEUSESSCIENCES DE LA VIE ET DE LA TERRE

ACTU DES SECTIONS

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Un programme archéologique franco-italien à Siris-Héraclée (Basilicate)Depuis 2014, l’EPHE et l’université de la Basilicate organisent un chantier-école à Policoro, où se sont succédé deux cités grecques : la « colonie » ionienne de Siris, fondée dans la première moitié du VIIe s. av. J.-C. et détruite un siècle plus tard ; puis la colonie tarentine d’Héraclée de Lucanie, fondée en 433, qui devient municipe romain vers 89. L’exploration archéologique du site a été commencée dans les années 1960, sous l’impulsion du grand archéologue Dinu Adamesteanu.

Les travaux menés depuis les années 2000 ont remis le site au cœur des débats sur les modalités changeantes de la « colonisation » grecque en Occident et sur la complexité des transferts culturels et idéologiques entre les communautés grecques et les sociétés indigènes protohistoriques. Renouveler la documentation sur ces thèmes est l’objectif principal du programme de recherche CHORA – Laboratori di archeologia in Basilicata (Université de la Basilicate, EPHE, Université de Rome Tor Vergata) dont Policoro est un des sites d’application.

Les premières campagnes ont porté sur trois secteurs. Sur le rebord sud de la ville haute, on a, pour la première fois, obtenu une stratigraphie complète des occupations jusqu’au IIe siècle. On a notamment découvert une importante fréquentation de la fin de l’époque archaïque (vers 510-480), c’est-à-dire, étrangement, à une époque où l’ancienne Siris était déjà détruite et Héraclée pas encore fondée. Au centre de la

ville haute, la fouille d’un grand édifice hellénistique a permis de retrouver les traces du passage de l’armée d’Hannibal pendant la deuxième guerre punique (en 212) et les vestiges d’un atelier monétaire grec du IIe siècle. Dans la ville basse, une nouvelle exploration d’un temple a précisé les formes de permanence du culte entre la phase archaïque de Siris et celle, classique, d’Héraclée.

D’autres activités sont associées à la fouille : le programme Legecartas (CNRS), qui a pour but de restituer les paysages anciens du littoral de la Siritide ; une série d’analyses de céramiques par activation neutronique (avec le LabEx TransferS) permettant de distinguer les importations de la mer Egée des productions locales ; des analyses chromatographiques sus-ceptibles d’identifier la composition du contenu des vases à parfum.

Chaque année, le chantier accueille des étudiants et doctorants de l’université de la Basilicate et de PSL ainsi que d’autres institutions universitaires françaises (comme l’École du Louvre) et étrangères. Deux thèses de doctorat en cotutelle et huit thèses de spécialisation ont été soutenues ou sont en préparation.

Pour en savoir plus : www.archeo.ens.fr/spip.php?article1066

CONTACTS : Stéphane Verger (EPHE, AOrOc) [email protected] et Rossella Pace (CNRS, AOrOc) [email protected]

Antéfixe hellénistique représentant une forme locale de la divinité d’origine thrace Artémis Bendis (fouille de 2017).

Le parc archéologique de Siris-Héraclée avec la ville haute, à droite, la vallée médiane, au centre, et la ville basse, à gauche. Les points indiquent les zones de la fouille. De gauche à droite : temple archaïque et classique ; sondage stratigraphique sur le rebord sud de la ville haute ; édifice hellénistique (atelier monétaire).

Le groupement de recherche et d’enseignement thématiques (GRET) « Récifs coralliens et environnement littoraux » constitue un réseau pluri-disciplinaire qui aborde des questions scientifiques liées à la compréhension du fonctionnement des socio-écosys-tèmes récifaux et littoraux. L’étude de plusieurs composantes du système (physique, biologique et leur inte-raction avec les sociétés humaines) représente le cœur du GRET. Les collaborations entre ses membres sont nombreuses et offrent une réelle dynamique au groupement de recherche.

Génétique des Populations, une avancée remarquable Des travaux publiés en 2016 et 2017 sont issus de la collaboration scienti-fique entre Stefano Mona et Michel Veuille (UMR 7205 Institut de SYsté-

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SCIENCES HISTORIQUES ET PHILOLOGIQUES

SCIENCES RELIGIEUSESSCIENCES DE LA VIE ET DE LA TERRE

Un regroupement au service de l’étude des Récifs coralliens et environnement littoraux 

Requin pointe noire Carcharhinus melanopterus – Moorea. © L. Thiault

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ACTU DES SECTIONS

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matique, Évolution, Biodiversité – ISYEB à Paris) et de Serge Planes (USR 3278 Centre de Recherches Insulaires et Observatoire de l’En-vironnement – CRIOBE, implanté à Perpignan et à Moorea en Poly-nésie française). Grâce à l’intégra-tion de données de l’ensemble du génome du requin pointe noire dans l’étude de génétique de population, les chercheurs ont pu démontrer pour la première fois que son origine se situe dans l’archipel Indo-Australien. Cette nouvelle piste permettra la véri-fication des hypothèses actuelles sur le centre d’origine et le centre de chevauchement des espèces. Cette découverte est remarquable car seules ces données, dites « génomiques », permettent aux chercheurs de tester des hypo-thèses aussi complexes.

Géomorphologie et complexité corallienneDes travaux sur le rôle des coraux dans la protection côtière sont actuellement en cours. Valeriano Parravicini, écologue EPHE à l›USR 3278-CRIOBE à Perpignan, a col-laboré avec Antoine Collin (EPHE, UMR 6554 Littoral, Environne-ment, Télédétection et Géoma-tique – LETG à Dinard) et Alessio Rovere (Leibniz-Zentrum für Marine Tropenforschung), tous deux spé-cialistes de l’action des vagues sur la côte, pour étudier l’interaction entre les communautés de coraux et la géomorphologie côtière. Les résultats ont montré l’importance de la complexité du récif, due aux communautés de coraux, sur la capacité d’un récif à absorber les forces des vagues. Si le récif est en bonne santé, avec une diver-sité dans ses communautés coral-liennes, l’absorption des vagues reste optimum et donc la protec-tion des côtes également.

CONTACT : Cécile Berthe (CRIOBE, Labex Corail) [email protected]

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Byzance virtuelle à l’EPHE : la collection de Gabriel Millet, de la plaque de verre à l’image numérique

Gabriel Millet (1867-1953), helléniste de formation, est le fondateur de l’archéo-logie et de l’histoire de l’art byzantin en France. Membre de l’École française d’Athènes (1891-1895), il entreprend la documentation des monuments les plus insignes, fait réaliser des relevés et s’inves-tit dans la photographie, technique alors nouvelle et onéreuse. Dès sa nomination à l’EPHE en 1899, il rassemble une véritable « collection chrétienne et byzantine », avec l’ambition de constituer un « petit mu-sée » dans les salles des conférences en Sorbonne. Sa collection, léguée à l’EPHE en 1938, constitue un joyau patrimonial et une ressource scientifique majeure. Elle se compose d’aquarelles, de dessins d’architecture et d’objets archéologiques, et se signale notamment par l’importance des photographies réalisées. Conscient de la valeur documentaire du matériau et soucieux d’élaborer une vision holistique du cheminement des traditions iconogra-phiques, Millet a su représenter toute l’aire du rayonnement de l’art byzantin. Aux cli-chés de savants, tels Jean Clédat (Baouît) et Guillaume de Jerphanion (Cappadoce), et de photographes comme Dmitri Ivano-vitch Ermakov (Caucase) qu’il a acquis, se sont ajoutés ceux fournis grâce aux efforts de ses disciples et de ses dignes succes-seurs.

Témoin infaillible du temps qui passe, l’ob-jectif photographique n’en est pas moins ancré dans son époque et conditionné par des facteurs techniques et esthétiques. Les empreintes de monuments et de paysages historiques résolument disparus, reflets de regards d’antan sur un patrimoine pré-

cieux, constituent un objet d’étude et de conservation exceptionnel. L’intérêt docu-mentaire et artistique du fonds lui a valu récemment une attention croissante dont témoignent des expositions et des publi-cations.

La numérisation de près de 30 000 plaques de verre – seulement une partie du fonds – entreprise grâce au programme SUSES piloté par PSL et cofinancé par la région Île-de-France, aboutira à la mise en ligne de ce corpus dûment indexé en 2018 sur la bibliothèque numérique portée par PSL. Cette opération a nécessité le récolement et le reconditionnement de l’intégralité du fonds ainsi que la mise en place d’un protocole de conservation préventive et de restauration. Elle a été rendue pos-sible grâce au Service commun de la do-cumentation, des bibliothèques et des ar-chives de l’EPHE1, aidé par une équipe de contractuels, de doctorants et d’étudiants (vacataires ou stagiaires), dans le cadre d’une coopération fructueuse entre la di-rection Ressources et Savoirs de PSL et le Centre Gabriel Millet. Ce chantier est un projet pilote prometteur pour la connais-sance et la valorisation de cette collection exceptionnelle, une fenêtre sur l’Orient chrétien.

CONTACTS : Ioanna Rapti [email protected] Jacques Berchon [email protected]

1 – Voir aussi page 7 : Les bibliothèques du site Sainte-Barbe : de nombreux fonds et une salle de lecture accessibles en plein cœur de Paris

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François de Polignac réélu doyen de la section des Sciences religieusesL’assemblée de la section des Sciences religieuses réunie le 6 novembre 2017 a réélu François de Polignac doyen de section. Directeur d’études sur la chaire « Religion et institutions dans le monde grec » depuis 2005, il a dirigé le Centre Louis Gernet de 2006 à 2009, puis le Centre « Anthropologie et Histoire des Mondes Antiques » (ANHIMA) de 2010 à 2014.François de Polignac est donc renouvelé dans son mandat de doyen de la section, qu’il occupe depuis décembre 2013.

CONTACT : François de Polignac, [email protected]

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Des sciences religieuses à l’École nationale de la magistrature

Au début du mois d’octobre 2017, environ 80 stagiaires ont suivi une semaine de formation intitulée « Les trois monothéismes », organisée par l’IESR à la demande du service de la formation continue de l’École nationale de la magistrature (ENM). Ce service veille à la mise à jour constante des connaissances des magistrats sur l’actualité juridique et judiciaire, et garde toujours le souci de l’« environnement judiciaire » pour reprendre leurs termes techniques. Cela signifie que, si le rôle du juge est toujours d’appliquer la loi, l’acte de juger, au civil comme au pénal, a toujours lieu dans un contexte social et historique complexe. La « culture générale » n’est donc pas un luxe, mais bien une exigence pour mieux comprendre ce que l’on juge et qui l’on juge.

Ainsi, le religieux peut être directement impliqué dans les affaires où il s’agit de déterminer les limites de la liberté d’expression des convictions religieuses, voire, au pire, quand il s’agit d’actes de terrorisme se donnant des justifications religieuses. D’une manière générale, c’est toute l’actualité et la vie sociale qui demandent une certaine intelligence du phénomène religieux.

Depuis plusieurs années, des spécialistes éclairent les stagiaires de l’ENM sur les fondements de ces traditions religieuses, toujours remises en perspective, en tenant compte de leur complexité et de leur pluralité dans l’espace et dans le temps. Des thématiques transversales aux différentes religions sont également présentées : textes fondateurs et rites, pluralité interne, relation au politique, à la violence, aux images. Des sujets en résonnance avec l’actualité sont aussi abordés au cours de ces journées de formation. Enfin, depuis 2016 à la demande de l’ENM, la session de formation est conclue par une table ronde d’« acteurs », c’est-à-dire de religieux

ou de personnes représentant tel ou tel culte. L’actualité y est commentée et la question de la place des religions dans une société sécularisée ayant un régime politique de République laïque abordée.

L’ENM ne réserve pas ces formations aux seuls magistrats. Des fonctionnaires de l’administration pénitentiaire ou de la Protection judiciaire de la Jeunesse sont également présents. Ces sessions offrent ainsi l’occasion d’échanges

fructueux avec les intervenants, grâce à un public attentif sachant toujours poser de bonnes questions. Preuve, s’il en était encore besoin, de l’utilité des savoirs et de la recherche pour la société et réciproquement.

CONTACT : Philippe Gaudin directeur adjoint de l’IESR [email protected]

École nationale de la magistrature de Paris © ENM

La formation occupe une place capitale parmi les missions de l’Institut européen en sciences des religions. Elle se traduit par le pilotage du master « Religions et laïcité dans la vie professionnelle et associative », mais également par des actions de formation auprès des professionnels des secteurs public, privé et associatif.

ACTU DES INSTITUTS

14 ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018

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En août dernier, la goélette de l’expédition TARA PACIFIC a fait escale à Sydney, en Australie, l’occasion d’organiser une conférence Grand Public et de lancer la deuxième année de l’expédition. Cette escale représentait également une opportunité de renforcer les relations scientifiques et diplomatiques entre la France et l’Australie en termes de recherche et de protection des récifs coralliens.

Tara Pacific à Sydney : une opportunité pour renforcer la coopération entre la France et les principaux acteurs de recherche et de gestion australiens

Pour Serge Planes, directeur scientifique de l’expédition Tara Pacific et directeur du CRIOBE (USR 3278 EPHE-CNRS-UPVD), la conférence grand public du 20 août 2017 « était l’occasion de faire connaître l’écosystème corallien et surtout de montrer que c’est actuellement l’un des écosystèmes les plus perturbés de la planète et qu’il est en situation de stress extrême ».

Le 22 août, un workshop organisé par l’ambassade de France en Australie à l’occasion du passage de la goélette Tara a réuni les principaux acteurs de recherche australiens sur les récifs coralliens et les organisations impliquées dans leur gestion (scientifiques et diplomates australiens). L’équipe de Tara Pacific a pu présenter à l’Australian National Maritime Museum ses observations

effectuées depuis le départ de la mission en mai 2016. Aujourd’hui, Tara a parcouru la moitié des 100 000 km prévus par l’expédition Tara Pacific 2016-2018. Déjà 15 000 échantillons ont été prélevés sur les 35 000 prélèvements prévus, destinés à mieux comprendre la biodiversité corallienne face aux changements environnementaux. Il faudra du temps avant d’obtenir les premiers résultats, mais les observations de Serge Planes et des scientifiques de Tara Pacific permettent déjà d’avoir un « état des lieux » des récifs du Pacifique, qui « souffrent du réchauffement de la planète, engendrant un blanchissement massif des coraux sur l’ensemble du Pacifique avec très peu sites épargnés. Aujourd’hui, nous sommes en présence d’un réchauffement global de l’océan auquel s’ajoutent des périodes estivales très chaudes, de moins en moins espacées d’année en année » (S. Planes)

Les échanges lors de ce workshop ont appelé à une intensification de la coopération scientifique et diplomatique entre la France et l’Australie sur la protection des récifs coralliens, afin de mieux servir les objectifs de l’Initiative Internationale sur les récifs coralliens (ICRI) dès 2018, 3e année mondiale des récifs coralliens.

Depuis le 25 août 2017, Tara a repris sa route, pour se rendre en Nouvelle-Calédonie, aux îles Salomon, en Papouasie-Nouvelle Guinée, en Indonésie, aux Philippines, à Palau, en Chine, à Taiwan, à Hawaïi… avant de s’achever en octobre 2018 à Lorient.

CONTACT : Jeanine Almany (CRIOBE, Labex Corail) [email protected]

Tara-devant l’Opéra de Sydney © CRIOBE

Serge Planes à la conférence du 20 août 2017 à Sydney © Vincent Hilaire

ACTU DES INSTITUTS

15ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018

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ah!doc

L a rentrée de l’École doctorale (ED) de l’EPHE a connu, à la fin de l’année 2017, une actualité récurrente : les comités de suivi de thèse se sont tenus, permettant les

réinscriptions ; la réunion de rentrée du 29 novembre a permis d’accueillir les nouveaux doctorants (environ 90, soit presque autant que l’an passé) ; les nouveaux doctorants contractuels commencent leur contrat. Le conseil de l’École doctorale a attribué début juillet dix contrats (dont trois PSL) au terme d’un concours particulièrement passionnant et ardu.

C’est cependant sur une nouveauté que je souhaite attirer l’attention des membres de notre École, doctorants comme encadrants : les actes de la journée transversale de l’ED du 7 avril 2016 « La lumière », édités par les quatre organisatrices/teurs, ont été publiés par l’École doctorale en édition électronique en libre accès sur notre site : www.ephe.fr/journees_transversales/actes_2016_la_lumiere.pdf. Je voudrais ici saluer le travail de ces quatre doctorant.e.s et inviter tous nos lecteurs à découvrir ce beau volume.

Depuis une dizaine d’année, l’ED organise chaque année au printemps une journée d’étude transversale : elle est préparée et présentée par les doctorants contractuels de première et deuxième année, et ouverte aux communications de tous les doctorant.e.s de l’EPHE. Le thème choisi par les organisateurs, appuyé par un argumentaire distribué lors de l’appel à communications, doit illustrer la nature multidisciplinaire de notre École et permettre un dialogue entre des disciplines aussi diverses que l’histoire, la biologie, la philologie, les sciences cognitives, l’histoire de l’art et de très nombreuses autres encore. Les thèmes des années précédentes – « La pérennité. Survivre, persévérer, évoluer » (2017), « La lumière » (2016),

Le mot du directeur de l’École doctorale

16 ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018

AGENDALe 4 avril 2018 : « Ordre et Chaos », la journée transversale 2018 des doctorants de l’EPHEPlus d’informations sur : www.ephe.fr/actualites

Le 12 avril 2018 en Sorbonne : Cérémonie de remise des diplômes de doctorat de l’EPHEContact : [email protected]

« Le progrès, entre croyance et fait de science » (2015), « De l’imaginaire à l’image : les enjeux de la représentation » (2014), « Héritages, transmissions, évolutions » (2013), « Origine(s) » (2012), « Histoire : cycles, rythmes, périodes » (2011), « La mémoire » (2010), « Médecine et santé » (2009) ont tous permis un tel dialogue, sur les objets, les théories ou les méthodes. L’appel à communication pour la journée du 4 avril 2018 vient d’être lancé, sur le beau thème « Ordre et chaos ».

La publication en ligne des actes est un nouveau développement de nos journées transversales, et nous espérons très vivement qu’elle deviendra régulière. Outre la visibilité qu’elle donne à des recherches en train de se faire parmi nos doctorant.e.s, elle leur offre aussi une expérience précieuse d’organisation de colloque puis d’édition scientifique. Ces deux savoir-faire sont essentiels aux métiers scientifiques auxquelles elles/ils se destinent pour la plupart, et il est donc important que la formation doctorale proposée dans notre ED les inclue pleinement. Nous nous réjouissons de cette expérience formatrice, comme de celle acquise par d’autres de nos doctorant.e.s qui organisent des journées ou colloques – pensons notamment à celle organisée chaque année conjointement avec les doctorants de l’École nationale des chartes et du Centre Jean-Mabillon ou aux journées doctorales au sein des diverses équipes de recherche rattachées à notre ED et que nous sommes toujours désireux de soutenir et d’encourager.

Vincent GOOSSAERTDirecteur de l’École [email protected]

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ah!docPAROLE DE DOCTORANT

Gabrielle Thiry, « La recherche sur les récifs coralliens, entre internationalisation des enjeux et ancrage local : étude comparée de deux communautés de chercheurs en France et aux Fidji », sous la direction de Philippe Portier (GSRL) et de David Lecchini (CRIOBE) dans les mentions « Religions et systèmes de pensée » (RSP) et « Systèmes intégrés, environnement et biodiversité » (SIEB).

Étude sociologique du développement de la recherche sur les récifs coralliens : entre internationalisation des enjeux et ancrage local

Les récifs coralliens sont objet de science et se retrouvent aussi au cœur d’enjeux sociaux, économiques et politiques majeurs. Cités comme premières victimes des changements globaux (hausse des températures, montée du niveau de la mer, acidification des océans), ils sont essentiels aux nombreux pays bénéficiant de leur protection côtière et dépendant du tourisme ou de la pêche.

Issue d’un parcours pluridisciplinaire (licence de biologie et master de sociologie), je suis aujourd’hui en première année de doctorat à l’EPHE entre la mention SIEB et RSP, et je m’intéresse à la recherche scientifique sur les récifs coralliens avec un regard de sociologue.

Ma thèse porte sur l’étude de deux communautés de chercheurs travaillant autour du corail, la première en France, et la seconde à Fidji. L’objectif est d’analyser comment ce domaine s’est construit, a évolué et est actuellement reconfiguré par l’affirmation des coraux comme objet scientifique international, s’imposant dans un monde marqué par le « régime climatique » et la question de la biodiversité. Il s’agit d’observer comment les scientifiques poursuivent et adaptent leur travail face à des contraintes et à des opportunités nouvelles. Comment ces groupes de chercheurs sont-ils à la fois acteurs de et influencés par l’internationalisation et la politisation de leur objet d’étude ? Pour analyser ce domaine scientifique, sa dynamique historique et sa variabilité géographique, je mobilise les outils et concepts des STS (Science and Technology Studies), de l’anthropologie, de la sociologie et de la socio-histoire.

Concrètement, mon travail consiste avant tout en une description détaillée et contextualisée du domaine. Cela passe

d’abord par une enquête au sein des laboratoires : j’observe, j’écoute, je m’immerge dans leur quotidien en suivant réunions, échanges informels, travail de labo ou de terrain ; je réalise aussi de nombreux entretiens avec les chercheurs et avec une sélection d’individus qui leur sont liés ; j’analyse les productions scientifiques et exploite la « littérature grise » et archives du laboratoire, ainsi que certaines archives privées de chercheurs. Outre ce travail d’anthropologie de laboratoire, je conduis aussi une analyse historicisée de l’objet « corail » : comment il s’est cristallisé à l’issue de bien des tâtonnements, s’est stabilisé en un objet naturel, puis en un objet scientifique et politique problématisé. Enfin, je fais l’étude du domaine des sciences coralliennes : organisation de la communauté, analyse des réseaux et flux à différentes échelles, évolution des pratiques et thèmes de recherche, recompositions institutionnelles, etc.

Je suis actuellement sur mon premier terrain d’étude. Pour la suite de ma thèse, je vais réaliser une comparaison avec un autre laboratoire travaillant autour des récifs coralliens dans un autre pays. Je pourrai voir comment l’affirmation des questions d’environnement global a un impact sur l’activité scientifique, et comment celui-ci est différencié selon les lieux et systèmes scientifiques. En décrivant les interactions dynamiques entre la science et son contexte, je contribuerai ainsi à montrer que la science est comme « une rivière qui creuse son propre lit » (L. Fleck) et à documenter les évolutions actuelles des formes « d’être et de faire » du savant en société.

CONTACT : Gabrielle Thiry [email protected]

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ah!docFOCUS

Approches plurielles du Religieux

Le 18 mai 2017 a eu lieu la première édition de la Journée Scientifique des Sciences Religieuses de l’EPHE. Organisée par quatre doctorants de l’École (Petru-Lucian Cirlan, Sandro Passavanti, Alice de Rochechouart et Eva Zahiri), avec le soutien du doyen de la section des Sciences Religieuses, François de Polignac.

Cette journée d’études a réuni dans l’amphithéâtre Louis Liard de la Sorbonne, 16 intervenants (cinq directeurs d’études et 11 doctorants et post-doctorants) et près de 90 participants qui ont ainsi pu découvrir un large panorama des recherches de la section, à travers des présentations succinctes et des temps fructueux de discussions croisées entre les intervenants et le public.

De l’Antiquité à nos jours, de l’Orient à l’Occident, de l’étude des textes à l’étude des pratiques, cette journée avait pour vocation de mettre en valeur le dynamisme intellectuel et humain de la section des Sciences Religieuses, aussi bien auprès d’un public extérieur à l’école, qu’auprès des chercheurs et étudiants de l’EPHE. Sociologie, histoire, anthropologie et philosophie des religions étaient à l’honneur, autour de grandes thématiques comme « Religion et politique », « Religion et structuration de l’espace », « Le statut du texte dans la religion » et « Transformations des pratiques religieuses ».

Devant l’engouement certain suscité par cette première édition, la journée sera probablement reconduite en 2018 – en espérant que de nouveaux doctorants de l’École se porteront volontaires pour organiser cette manifestation. En attendant cette réédition 2018, les plus impatients pourront profiter des enregistrements des différentes contributions, qui seront bientôt disponibles sur le site de l’École et de la publication prochaine de certaines des interventions dans le Bulletin de la Société des Amis des Sciences Religieuses.

Le comité d’organisation tient encore à remercier chaleu-reusement les intervenants et les participants, ainsi que la Section des Sciences Religieuses, pour leur implication dans cette journée, et vous donne à tous rendez-vous en mai 2018 – dans le public, ou, peut-être, en tant qu’interve-nant – pour perpétuer ce qui pourrait devenir une tradition nouvelle au sein de l’EPHE.

CONTACT : Alice de Rochechouart [email protected]

Approches plurielles du Religieux

Section des Sciences Religieuses de l’EPHE

La journée scientifique aura lieu en Sorbonne – 17 rue de la Sorbonne75005 Paris – Amphithéâtre Louis Liard

Métro : Cluny - La Sorbonne (ligne 10)

JOURNÉE SCIENTIFIQUE

Jeudi 18 mai 2017 de 9h à 18h, en Sorbonne, amphithéâtre Louis Liard

JOURNÉE SCIENTIFIQUE DES SCIENCES RELIGIEUSES

18 ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018

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IVe édition de la Journée doctorale du laboratoire Saprat

Les journées d’études doctorales de l’équipe d’accueil 4116, Savoirs et pratiques du Moyen Âge au XIXe s. (Saprat), rassemblent depuis 2012 doctorants, anciens doctorants et directeurs d’études de cet important laboratoire autour d’une thématique commune permettant à de jeunes chercheurs d’exposer leurs recherches en cours, les avancées mais aussi les problèmes auxquels ils sont confrontés.

ah!docGROS PLAN

La IVe édition de cette journée, dont l’initiative revient aux doctorants de Saprat, s’est déroulée cette année le 15 juin, dans la salle Delisle en Sorbonne. Après un mot d’introduction par la directrice de Saprat, Brigitte Mondrain (directeur d’études en philologie grecque), la journée a vu se succéder pas moins de 15 interventions regroupées dans cinq sessions, chacune modérée par un directeur d’études du laboratoire. La thématique retenue cette année, « Supports, instruments, pratiques. La fabrique des savoirs du Moyen Âge au XIXe s. », permettait de rassembler des jeunes chercheurs, doctorants et aussi jeunes docteurs de Saprat, spécialistes d’époques, d’aires géographiques et de supports différents : cet objectif a été atteint puisque les nombreuses communications ont mis à l’honneur aussi bien manuscrits, correspondances, monnaies, éditions imprimées, que rapports de séjour d’étudiants, cartulaires ou encore presse de théâtre.

Les cinq sessions ont permis d’aborder plusieurs aspects fondamentaux des savoirs et des pratiques savantes : la matinée a été consacrée à des figures d’acteurs de savoirs et des méthodes de transmission (en particulier scolaires) ; les interventions de l’après-midi ont abordé quant à elles la question de l’image sur différents supports et de ses interprétations, les approches locales des pratiques savantes et enfin les transferts de connaissance ou d’acteurs du savoir (d’une langue à l’autre, d’un pays à l’autre).

À la fin de chaque session, les questions soulevées par les interventions ont la plupart du temps donné lieu à une véritable discussion, riche et fournie, invitant à de nouvelles perspectives de recherche. Le public nombreux et les retours enthousiastes sur la journée ont encouragé les jeunes chercheurs dans leurs travaux et ont prouvé l’intérêt de l’organisation de telles rencontres.

On trouvera sur le site internet du laboratoire le programme de la journée d’études. Les organisateurs réfléchissent à une publication des interventions.

IVe journée d’études doctorales du laboratoire Saprat

JOURNÉE DOCTORALE SUPPORTS, INSTRUMENTS ET PRATIQUESLa fabrique des savoirs du Moyen Âge au XIXe siècle

Pour tout renseignement s’adresser à : [email protected] ou [email protected]

La journée se déroulera en Sorbonne, 17 rue de la Sorbonne, 75005 Paris

Galerie Claude Bernard, esc. U, 4e étage, salle Delisle (H-627)

Métro : Cluny - La Sorbonne (ligne 10)

Savoirs et Pratiques du Moyen Âge au XIXe siècle – EA 4116 de l’EPHE

Jeudi 15 juin 2017 de 9h à 18h30 en Sorbonne, salle Delisle (H-627)

(Hans Holbein le Jeune, Les Ambassadeurs. 1533. 207 x 209 cm. National Gallery, Londres. NG1314)

CONTACTS : Pauline Lafille [email protected] et Thibault Miguet [email protected]

Plus d’informations sur : www.saprat.ephe.sorbonne.fr

19ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018

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ah!docSOUTENANCES

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Thèses soutenues du 15 avril au 31 décembre 2017Mention « Systèmes intégrés, environnement et biodiversité »Carole Blay, Déterminisme génétique des caractères d’intérêts perlicole de l’huître per-lière Pinctada margaritifera, sous la dir. de Serge Planes ; Raphael Fauches, Transfert des hydrocarbures aromatiques polycycliques à l’échelle d’un bassin versant : caractérisation de sources par l’isotopie moléculaire, sous la dir. de Marc Chevreuil ; Maxime Barbier, Histoire évolutive et propagation de la tuberculose à échelle planétaire : vers une ap-proche intégrée combinant la génomique des populations et le typage multi-locus, sous la dir. de Thierry Wirth ; Marc Besson, Importance de la métamorphose dans le recru-tement larvaire des poissons coralliens face aux pressions d’origine anthropique, sous la dir. de David Lecchini ; Guillaume Croville, Séquençage et PCR à haut débit : applica-tion à la détection et la caractérisation d’agents pathogènes respiratoires aviaires et au contrôle de pureté microbiologique des vaccins, sous la dir. de Thierry Dupressoir ; Odile Domergue, Diversité fonctionnelle des rhizobia associés à la féverole en agro-écosys-tème Sud de France, sous la dir. de Thierry Dupressoir ; Salomé Dupont, Développement d’un modèle préclinique de leucémogénèse expérimentale chez la souris humanisée, sous la dir. de Bruno Canque ; Jeanne El Hage, Caractérisation génétique et implication des rétrovirus endogènes « enJSRV » dans l’évolution de la race ovine « Awassi » du Liban, sous la dir. de Frédérick Arnaud ; Sandra Guerin, Étude et modélisation de la dynamique de population du triton marbre (triturus marmoratus), sous la dir. d’Aurélien Besnard ; Herehia Helme, Biodiversité anguillicole en milieu tropical insulaire (Tahiti) face aux aménagements hydroélectriques, sous la dir. de Serge Planes ; Nina Joffard, Diver-sification des orchidées méditerranéennes : niches de pollinisation, évolution des traits floraux et taxonomie intégrative, sous la dir. de Claudine Montgelard ; Alice Moussy, Caractérisation des premières étapes de différenciation des cellules hématopoïétiques à l’échelle de la cellule unique, sous la dir. d’Andràs Paldi ; Pierre Schweitzer, Vie quoti-dienne et risque cognitif chez les personnes âgées, sous la dir. de Joel Swendsen.

Mention « Histoire, textes et documents »Hiba Abid, Les Dalâ’il al-Khayrât d’al-Jazûlî (m. 869/1465). La tradition manuscrite d’un livre de prières soufi au Maghreb du Xe/XVIe au XIIIe/XIXe s, sous la dir. de François Dé-roche ; Anna Baydova, Le rôle des peintres dans l’illustration des livres imprimés à Pa-ris, 1530-1580, sous la dir. de Guy-Michel Leproux ; Arnaud Bertrand, Aux origines de la formation de la commanderie impériale de Dunhuang aux frontières occidentales de l’empire des Han occidentaux (IIe et Ier s. av. J.-C.) : une approche topologique, sous la dir. d’Éric Trombert ; Valentina Burgassi, Architecture et espace de pouvoir dans l’Ordre de Saint Jean de Jérusalem (1530-1798), sous la dir. de Sabine Frommel (thèse en cotutelle internationale avec l’Université de Turin) ; Cecilia Cantalupi, Une nouvelle édition critique du troubadour Guilhem Figueira, sous la dir. de Fabio Zinelli et Anna-Maria Babbi (thèse en cotutelle internationale avec l’Université de Vérone) ; Vérène Chalendar, Quand l’ani-mal soigne. Les utilisations thérapeutiques de l’animal dans le corpus médical cunéiforme assyro-babylonien, sous la dir. de Dominique Charpin ; Antonella Ciotola, Production et circulation de la céramique commune des Champs Phlégréens à l’époque romaine: l’échantillon du Forum de Cumes, sous la dir. de Jean-Pierre Brun (thèse en cotutelle internationale avec l’Université de Naples Federico II) ; Alice Colantuoni, La Chronique de Moree. Édition de la version française, sous la dir. de Fabio Zinelli et Laura Minervini (thèse en cotutelle internationale avec l’Université de Naples Federico II) ; Nicole Des-landes, La flore et le paysage imaginaire dans les images médiévales à l’époque des Valois. Une écriture analogique, sous la dir. de Michel Pastoureau ; Pierre-Adrien de Fouchier, Le manuscrit arabe-chrétien au XIIIe s. : considérations à partir du fonds de la Vaticane, sous la dir. de François Déroche ; Melinda Fodor, Contribution à l’étude du genre dramatique des sat.t.aka, pièces en langue prakrite : la Karpūramañjarī et ses successeurs, sous la dir. de Nalini Balbir ; Candela Gaitan-Salinas, Principes vitruviens dans l’architecture italienne et espagnole entre les années 1540 et 1575. Deux exemples de l’architecture périphérique dans le contexte du plan impérial : Jaén et Gênes, sous la dir. de Sabine Frommel et Rosario Camacho Martinez (thèse en cotutelle internatio-nale avec l’Université de Malaga) ; Zinaida Geylikman, Étude sémantique de baron et chevalier (XIIe-XVe s.) : essai de méthode pour les dénominations féodales, sous la dir. de Joëlle Ducos ; Audrey Gouy, La danse étrusque (VIIIe-Ve s. avant J.-C.). Étude anthro-po-iconologique des représentations du corps en mouvement dans l’Italie préromaine, sous la dir. de Stéphane Verger et Adriano Maggiani (thèse en cotutelle internationale avec l’Université Ca’Foscari de Venise) ; Donatien Grau, La mémoire numismatique de l’Empire romain, sous la dir. de Michel Amandry ; Yves Le Guillou, Topographie d’une bibliothèque. Les livres de Julien Brodeau, avocat au Parlement de Paris (1583-1653), sous la dir. de Frédéric Barbier ; Carine Juvin, Recherches sur la calligraphie sous les derniers Mamlouks : inscriptions monumentales et mobilières, sous la dir. de François Déroche ; Marie-Hélène Kervran, Il Ballarino (1581) de Fabritio Caroso. Traduction, commentaire et édition critique, sous la dir. de Cécile Reynaud ; Pauline Lafille, Composizioni delle guerre e battaglie : enquête sur la scène de bataille dans la peinture italienne du XVIe s., sous la dir. de Michel Hochmann ; Pauline Leplongeon, Histoire culturelle de la noix et du noyer en Occident de l’Antiquité romaine au XVIIIe s., sous la dir. de Michel Pastou-reau ; Michel Litwinowicz, Rome et Naples, deux écoles de nature morte au XVIIe s. et leurs échanges, sous la dir. de Michel Hochmann ; Gavin Mcdowell, L’histoire sainte dans l’Antiquité tardive : les Pirqé de-Rabbi Eliézer et leur relation avec le Livre des Jubilés et la Caverne des Trésors, sous la dir. de Daniel Stoëkl Ben Ezra ; Pierre Michon, Mon roi, ma patrie et mon département. Le corps préfectoral de la Restauration (1814-1830), sous la dir. de François Monnier ; Idris Omar, Les légions romaines de la province de Syrie sous le Haut-Empire d’après les inscriptions latines et grecques, sous la dir. de François

Bérard ; Guillaume Ouader, la pseudo-histoire du mythe des invasions d’Irlande, sous la dir. de Pierre-Yves Lambert ; Hayri Goksin Ozkoray, L’esclavage dans l’Empire ottoman (XVIe-XVIIe s.). Fondements juridiques, réalités socio-économiques, représentations, sous la dir. de Nicolas Vatin ; Jelena Puskaric, Lumières françaises et culture croate à la fin du XVIIIe s. La réception du Bélisaire de Marmontel, sous la dir. de Jean-Louis Quantin ; Sar-kis Sarkissian, Le substrat préchrétien et la réception arménienne du christianisme, sous la dir. de Jean-Pierre Mahé ; Anastasiia Syreishchikova, Les voyages d’Hector Berlioz en Russie : histoire d’un dialogue musical franco-russe (1833-1869), sous la dir. de Cécile Reynaud et de Marina Raku (thèse en cotutelle internationale avec l’Académie russe de musique Gnessine) ; Diane Zhang, Les vestiges funéraires Xixia et leur interprétation : art, rites et croyances dans l’au-delà au royaume des Tangoutes, sous la dir. d’Alain Thote ; Motia Zouihal, Le pouvoir et les soufis en Syrie et en Egypte sous Nūr al-Dīn, Saladin et les premiers Ayyoubides de 549/1154 à 596/1200, sous la dir. de Jean-Michel Mouton.

Mention « Religion et systèmes de pensée »Habib Akhrouf, La théorie politique d’Abu Ya’la (m. 458/1066) à travers ses Ahkam al-sul-taniyya, sous la dir. de Hocine Benkheira ; Ludovic-Pierre Bertina, La « conversion » écologiste de l’Église catholique en France : sociologie politique de l’appropriation du référent écologiste par une institution religieuse, sous la dir. de Philippe Portier ; Lydie Brunetti, La représentation iconographique des bénédictines et cisterciennes en France aux XVIe, XVIIe et XVIIIe s. Fondatrices, supérieures et religieuses, sous la dir. de Da-niel-Odon Hurel ; Nicolas Cane, Cempiyan--Mahādevī, reine et dévote: un “personnage épigraphique” du Xe s., sous la dir. de Charlotte Schmid ; Ghislain Casas, La dépoliti-sation du monde. Angélologie cosmique et politique de l’Antiquité tardive au Moyen Âge, sous la dir. de Philippe Hoffmann ; Jean-Noël Delaporte, École et enseignement spécialisé : de la séparation à la reconnaissance, sous la dir. de Philippe Portier ; Icir Di Muro, Le « pouvoir » des femmes (étude du monde féminin Bassari à Ethiolo), sous la dir. d’Odile Journet-Diallo ; Cécile Ducher, Un lignage à l’épreuve du temps: les vicissitudes des rNgog pa bka’ brgyud du XIe au XIXe s., sous la dir. de Matthew Kapstein ; Fârès Gillon, L’ismaélisme en formation. Traduction commentée du Kitāb al-Kašf («Livre du Dé-voilement»), attribué à Ğa'far b. Mans.ūr al-Yaman (m.957), sous la dir. de Mohammad Ali Amir Moezzi ; Guanqiao Huang, Rédemption et délivrance : présence du bouddhisme dans le théâtre de Paul Claudel, sous la dir. de Denis Pelletier et Yunhua Liu (thèse en cotutelle internationale avec l’Université normale de Shanghai - SHNU) ; Clément Jac-quemoud, Diversité religieuse en République de l’Altaï : concurrences et convergences. Enquête sur le renouveau religieux des Altaïens de la République de l’Altaï (Fédération de Russie), sous la dir. de Michael Houseman ; Damien Labadie, L’invention du proto-martyr Étienne : sainteté, pouvoir et controverse dans l’Antiquité (Ier-VIe s.), sous la dir. de Muriel Debié ; Marc Lebranchu, Les fabriques du daoïsme en Occident. Quatre siècles de réception du daoïsme en Europe, sous la dir. de Vincent Goossaert ; Qinghua Liu, Missions et chrétientés en transition : La paroisse urbaine de Pékin au XVIIIe s., sous la dir. de Jean-Robert Armogathe ; arta Miatto, Costruzione e percezione dello spazio rituale nel contatto tra culture nel Mediterraneo Antico. L’esempio della provincia Africa, sous la dir. de John Scheid et Sabina Crippa (thèse en cotutelle internationale avec l’Université Ca’Foscari de Venise) ; Kabira Naït Raïss, Les premiers ascètes en Islam d’après la H. ilyat al-awliyā’ de Abū Nu'aym. Entre zuhd et tas.awwuf, l’émergence du saint, sous la dir. de Pierre Lory ; Zeynep Oktay, L’Homme Parfait dans le Beletachisme et l’Alévisme : Le kitab-1 Maglata de Kaygusuz Abdal, sous la dir. de Mohammad Ali Amir Moezzi ; Juliana Pereira Lima Caruso, De l´autre côté de l´île. Parenté et identité dans sept communautés caiçaras du Sud-Est brésilien, sous la dir. de Michael Houseman ; Helena Rochard, Les peintures murales des « chapelles » de Baouît (VIe-IXe s.). Images d’une communauté monastique en Égypte byzantine et arabe, sous la dir. de Catherine Jolivet-Levy ; Pierre de Salis, Autorité et mémoire. Pragmatique et réception de l’autorité épistolaire de Paul de Tarse, sous la dir. de Simon Mimouni et Régis Burnet (thèse en cotutelle internationale avec l’Université catholique de Louvain).

Habilitation à diriger les recherches du 15 avril au 31 décembre 2017Mention « Systèmes intégrés, environnement et biodiversité »Nicolas Gauvrit, Complexité algorithmique et cognition, sous la dir. de Fabien Mathy ; Maggy Nugues, The ecology of coral reef algae and their negative and positive interac-tions with corals, sous la dir. de Serge Planes ; Guillaume Andeol, Vers une exploration de la variabilité inter-individuelle en audition chez le normo-entendant, sous la dir. de François Jouen.

Mention « Histoire, textes et documents »Julien Fournier, Thasos dans l’Empire romain, sous la dir. de Denis Rousset ; Julien Lu-gand, La confrérie des doreurs de Barcelone (1599-1834), sous la dir. de Michel Hoch-mann ; Antoine Pietrobelli, Philologia medicans : histoire de la médecine et histoire des textes, sous la dir. de Brigitte Mondrain ; Judith Rozen-Kogel, Étudier la bible hébraïque au Moyen Âge et à la Renaissance : exégèse et grammaire, manuscrits et imprimés, sous la dir. de Jean-Pierre Rothschild.

Mention « Religion et systèmes de pensée »Fabienne Gauthier, Les représentations chinoises du Tibet aux époques moderne et contemporaine, sous la dir. de Matthew Kapstein ; Jacopo Costa, Liberté. Nature, sous la dir. d’Olivier Boulnois

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LA COMPASSION AU COURS DE L’ÉVOLUTION HUMAINE

En 1866, Paul Broca, fondateur du premier laboratoire d’anthropologie biologique au monde, s’interroge sur le sujet de la compassion en tant que caractère distinctif du genre humain. Deux siècles après lui, l’équipe anthropologie biologique de la Section SVT de l’EPHE propose une synthèse de cette question de la compassion aux temps paléolithiques en réévaluant les principales données paléoanthropologiques disponibles et en mettant en perspective les divergences d’interprétation au sein de la communauté des paléoanthropologues.

RECHERCHE

© Frédéric Magda, EPHE

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LA PITIÉ : UN CARACTÈRE DISTINCTIF DU GENRE HUMAIN ?

« La pitié est certainement un des plus beaux sentiments, mais est-ce un caractère distinctif du genre humain ? L’homme seul est-il capable de compassion ? »Paul Broca. Discours sur l’homme et les animaux. Bulletins de la Société d’anthropologie de Paris, II° Série. Tome 1, 1866. pp. 53-79.

Le 18 janvier 1866, Paul Broca interroge l’auditoire de la séance de la Société d’anthropologie de Paris sur la spécificité des comportements humains. Son discours vient en réponse à une lecture précédemment donnée par Franz Pruner-Bey, président de la Société, dans laquelle ce dernier défendait la notion d’un « règne humain », thèse que réfutait Broca, fondateur de l’anthropologie biologique, partisan de l’appartenance de l’homme au règne animal. L’argumentation de Broca dans sa réponse est de ne reconnaître entre l’animal et l’homme que des différences de degré et non de nature. Il terminait son discours par une citation de Montaigne : « Il y a des ordres et des degrez, mais c’est soubs le visage d’une mesme nature ».

Plus d’un siècle après, le célèbre évolutionniste américain Stephen Jay Gould s’interroge sur le sujet de la compassion dans la préhistoire dans une chronique de la revue Natural History intitulée “Honorable men and women” : « que pouvons-nous alors apprendre de la compassion par l’étude des os et des artéfacts ? »1

Un siècle et demi après Broca et trente ans après Gould, le débat est toujours animé, voire polémique, au sein de la communauté des paléoanthropologues et des préhistoriens sur cette question de la compassion humaine et de son évolution. La « Préhistoire de la compassion », selon l’expression du paléoanthropologue Jean-Jacques Hublin2 (Max Plank Institute – Collège de France) est débattue à chaque analyse ou découverte de nouveaux témoignages fossiles porteurs de signes évoquant une possible assistance aux sujets invalides. Ce lien fait entre les observations paléopathologiques et les inférences de comportements de compassion au Paléolithique est vivement contesté par certains auteurs, dont l’anthropologue américaine Katherine Dettwyler3 (Université du Delaware) qui soutient qu’une trop forte subjectivité interfère dans la reconstruction que les paléoanthropologues font des comportements humains au sein des sociétés préhistoriques. Ces reconstructions dépendent en fait des représentations sociales actuelles de l’Homme préhistorique, avec des stéréotypes variant de l’image de la

1 – « What, then, can we learn of compassion from a study of bones and artifacts? » S. J. Gould, (1988), « Honorable men and women », Natural History, 97 (3), p. 16-20.2 – J.-J. Hublin (2009), « The Prehistory of compassion », Proceedings of the National Academy of Sciences, USA 106, p. 6429-6430.3 – K. A. Dettwyler (1991), « Can paleopathology provide evidence for “compassion”? », American Journal of Physical Anthropology, 84(4), p. 375-384.

brute arriérée à celle du « Bon sauvage » de Rousseau. Ainsi, Dettwyler considère que la réponse à la question de Gould est : « rien ou presque rien ». Mais cette position est tout aussi vivement rejetée par d’autres auteurs, dont l’archéologue britannique Nick Thorpe4 (Université de Winchester), qui considère l’argumentation de Katherine Dettwyler comme une « excuse scientifique » trop facile et souligne le risque d’écarter du champ d’étude de la paléoanthropologie cette question des origines des comportements compassionnels.

La divergence des points de vue s’explique par le fait qu’à travers le simple recensement des preuves matérielles montrant que des individus invalides pouvaient survivre aux périodes préhistoriques, en nécessitant éventuellement l’assistance d’autrui, ce sont les questions complexes de l’évolution de l’humanité, dans les deux acceptions de ce terme, biologique et comportementale, ainsi que des représentations que s’en font les sociétés modernes, qui sont posées.

Deux siècles après l’interrogation de Broca, un travail récent5 mené au sein du groupement de recherche et d’enseignement thématiques (GRET) « Évolution » de la Section SVT de l’EPHE, dans l’équipe anthropologie biologique (ex. laboratoire Broca) propose une synthèse de cette question de la compassion aux temps paléolithiques, en réévaluant les principales données paléoanthropologiques disponibles et en mettant en perspective les divergences d’interprétation au sein de la communauté des paléoanthropologues.

DES OSSEMENTS PRÉHISTORIQUES PEUVENT-ILS FOURNIR DES PREUVES DE SOINS OU D’ASSISTANCE ?L’enjeu du débat est de savoir si les ossements préhistoriques peuvent réellement fournir des preuves de soins ou d’assistance, suffisantes pour invoquer des comportements de compassion au cours de l’évolution humaine et dans l’affirmative, déterminer à quelle période de notre évolution il est possible de faire remonter ces comportements altruistes.

Pour reconnaître des signes d’invalidité sur des restes humains paléolithiques, le paléoanthropologue doit faire appel d’une part aux méthodes de la paléopathologie et d’autre part aux connaissances cliniques contemporaines. La difficulté de l’exercice est d’interpréter à un niveau de vraisemblance acceptable le degré de conséquence fonctionnelle des marques osseuses observées, liées à des maladies de diverses origines. Il est nécessaire de bien cerner dans ce propos la définition du handicap, en tant que limitation de l’activité et de la participation à la vie sociale du fait d’une altération invalidante des fonctions physiques, sensorielles ou psycho-cognitives.

Pour les périodes paléolithiques, il faut supposer que ces altérations impactant la vie sociale d’un individu aient été reconnues comme telles pour qu’elles aient pu faire l’objet d’une prise en charge par ses congénères, mobilisant ainsi un comportement compassionnel. Il faut aussi demeurer conscient du fait que cette analyse repose sur des projections

4 – N. Thorpe (2016), « Chapter 6: The Palaeolithic compassion debate – Alternative projections of modern-day disability into the distant past », in: Powell L., Southwell-Wright W., Gowland R. (eds), Care in the past: archaeological and interdisciplinary perspectives, Oxbow books, p. 93-109.5 – H. Coqueugniot (sous presse) - Handicap et compassion au Paléolithique. Points de vue paléoanthropologiques. Actes du colloque de l’INRAP - Archéologie de la santé - Anthropologie du soin.

Paul Broca. Tiré de S. Pozzi, Revue d’anthropologie,1880

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de fonctionnement de nos sociétés modernes sur celui des sociétés préhistoriques.

La bonne interprétation de ces traces fossiles doit passer par trois étapes successives :

• La pathologie ou l’anomalie observée a-t-elle limité ou restreint l’autonomie de l’individu au sein de son groupe social ?

• Ce défaut, qu’il soit temporaire ou définitif, était-il suffisant pour requérir obligatoirement l’assistance du groupe ?

• Le cas échéant, peut-on relever également des marques de soins prodigués ?

IDENTIFIER SUR LES FOSSILES DES HANDICAPS DÉMONTRANT UN BESOIN RÉEL D’ASSISTANCE L’étude a porté sur six exemples pris parmi les fossiles des sites paléolithiques de Dmanisi en Géorgie (1,8 Ma), d’Atapuerca en Espagne (530 ka), du Bau de l’Aubesier en France (191 ka), de Qafzeh en Israël (100 ka), de Shanidar en Irak (45 ka) et de Romito en Italie (11 ka). Ces sites qui représentent une chronologie étendue du Paléolithique inférieur au Paléolithique supérieur final représentent les (paléo)espèces erectus, heidelbergensis, neanderthalensis et sapiens du genre Homo. Ces fossiles, dont la liste n’est pas exhaustive, ont tous été présentés par différents auteurs comme porteurs de signes d’invalidité et pouvant témoigner de l’existence de comportements compassionnels.

Les handicaps décrits ont été classés (figure 1) selon leur cause congénitale, traumatique ou dégénérative et selon leur nature fonctionnelle, cognitive ou sensorielle.

Le caractère fonctionnel de l’invalidité, reconnu sur les fossiles d’Homo erectus, neanderthalensis et sapiens, concerne l’éden-tement total, les séquelles de polytraumatisme, l’infirmité d’ori-gine congénitale. Même si l’édentement total est actuellement inclus par l’OMS dans la liste des handicaps, l’argumentation développée pour Homo erectus et Néandertal ne permet pas d’atteindre le niveau de la première étape, la perte d’autonomie alimentaire étant peu convaincante. Pour le polytraumatisme du Néandertalien de Shanidar, qui est l’hominidé le plus sévè-rement traumatisé connu au Pléistocène, notamment porteur

d’une paralysie et atrophie du bras droit et une maladie arti-culaire dégénérative du genou et de la cheville, consécutives au traumatisme, l’étape de l’assistance au moins temporaire est très probablement validée, mais il n’existe pas suffisamment d’éléments pour affirmer l’étape suivante (preuve de soins). Le sujet 2 de la grotte de Romito (Paléolithique supérieur final) est porteur d’importantes anomalies congénitales : nanisme avec stature d’environ un mètre, déformation crânienne à type de brachycrânie avec bosses frontales saillantes, forte dispropor-tion des membres avec avant-bras très courts, ce syndrome malformatif particulier ayant abouti à un diagnostic d’une (os-téochondro)dysplasie acromésomélique. Actuellement relative-ment rare (1/2000 naissances) cette pathologie génétique est responsable d’un degré d’invalidité variable, allant d’une auto-nomie presque totale à un besoin quotidien d’assistance pour la vie courante, liée à la faible stature, la petite taille des membres et le degré d’habileté manuelle, une des caractéristiques étant l’extrême raccourcissement des mains et des doigts, respon-sable chez certains sujets de capacités de manipulation extrê-mement réduites. La notion d’une assistance est validée pour cet exemple, et les auteurs de l’étude princeps6 estiment que la survie au Paléolithique d’un individu aussi sévèrement déformé est la preuve de tolérance, d’attention et d’aide particulières de la part du groupe, considérant le fait que le traitement funéraire témoignait également d’un statut social particulier. Le compor-tement de compassion est dans ce cas considéré comme cer-tain par Gould (op. cit.).

La question du handicap sensoriel tel que la surdité, la cécité, voire la myopie, est d’un abord difficile sur les restes fossiles, dans la mesure où les témoignages squelettiques de cette catégorie de handicap sont rarement exprimés. Ainsi ils passent majoritairement inaperçus dans le passé et peu d’indices permettent de les détecter. Une perte de vision monoculaire a été proposée pour le Néandertalien de Shanidar 1, comme conséquence du traumatisme craniofacial qui a touché l’orbite gauche. Ainsi ce handicap sensoriel s’est rajouté au handicap fonctionnel, renforçant la conviction de son état de dépendance partielle : un néandertalien « manchot partiellement aveugle et estropié » ne pouvait pas participer aux activités de chasse et de cueillette pour subvenir seul à ses besoins vitaux… De façon objective le besoin d’une assistance partielle est validée, plus subjectivement pour les auteurs de l’étude la survie prolongée de ce sujet témoigne de l’humanité et des qualités compassionnelles de l’Homme de Néandertal7.

UNE PRISE EN CHARGE DES HANDICAPÉS COGNITIFS PAR LEUR COMMUNAUTÉ ?La question du handicap cognitif au Paléolithique est également sujette à caution en raison de l’absence de témoignages directs. Deux exemples paléolithiques peuvent cependant être évoqués. Le plus ancien est celui du site de Sima de los Huesos d’Atapuerca (Espagne), daté de plus de 500 000 ans. Le spécimen SH14 est représenté par un crâne immature attribué à une fillette âgée d’une dizaine d’années porteur d’une craniosynostose lambdoïde gauche isolée. Cette fermeture prématurée d’une suture crânienne chez le jeune enfant, perturbe la croissance du crâne (qui devient asymétrique) mais aussi celle du cerveau sous-jacent et peut être responsable d’un déficit cognitif léger. La survie au-delà de la prime enfance de ce

6 – D.W Frayer., W.A Horton., R. Macchiarelli, M. Mussi (1987), « Dwarfism in an adolescent from the Italian late Upper Palaeolithic », Nature, 330, p.60-62.7 – E. Trinkaus, P. Shipman (1992), The Neanderthals: Changing the image of mankind, Alfred A. Knopf, New York.

Figure 1. Position chronologique et phylétique des Hominines paléolithiques pour lesquels un comportement de compassion a été évoqué dans la littérature © H. Coqueugniot

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pathologies n’impactant pas significativement l’autonomie du sujet, ont certainement alimenté la controverse et le refus de reconnaissance possible de ces comportements dans les socié-tés préhistoriques. Cependant, les signes paléopathologiques de handicap fonctionnel ou cognitif sont bien réels, voire fré-quents dans les périodes paléolithiques, relativement à la rareté du matériel fossile.

En dehors de la paléopathologie, l’étude de l’évolution des comportements d’assistance au cours de l’hominisation doit mobiliser d’autres disciplines, parmi lesquelles l’éthologie et la psychologie comparative. Des travaux dans ces domaines ont en effet permis de démontrer l’existence de comportements purement altruistes chez les chimpanzés, envers leurs congénères ou des représentants d’autres espèces, dont la nôtre. Dès lors, il est difficile de considérer que les premiers Hominines auraient été moins « humains » en termes d’altruisme, de soins et de compassion que ne le sont les chimpanzés actuels. Ce repère dans la phylogenèse des comportements peut ainsi témoigner de l’ancestralité d’une forme de compassion chez les Hominines datant au moins de la divergence des genres Homo et Pan. Sur cette base ancienne, les comportements compassionnels humains ont pu se développer chez nos ancêtres, au fil des quelques 6 millions d’années de notre histoire évolutive.

sujet nommée Benjamina a fait supposer aux auteurs de l’étude8 que son groupe d’appartenance ne l’avait pas rejetée, et qu’au contraire elle constituait la preuve de prise en charge sociale chez ces hominidés anciens, ancêtres des Néandertaliens. Le second exemple plus récent et concerne les premiers hommes d’anatomie moderne du site de Qafzeh (Israël) datés d’environ 100 000 ans. Parmi ceux-ci le spécimen Qafzeh 11, âgé d’une douzaine d’années à son décès, avait été victime d’un grave traumatisme cranio-cérébral, probablement survenu à l’âge de 6 ans qui a été responsable d’un retard du développement cérébral, attesté par sa faible capacité crânienne relativement à son âge9. La vie de ce sujet immature entre 6 et 12-13 ans a dû être très probablement encadrée par les membres de son groupe au vu de l’importance supposée de son handicap neurocognitif. La particularité de sa sépulture, premier témoignage d’une sépulture à offrande pour le Paléolithique moyen, avec le dépôt sur le corps de bois de cervidés (figure 2) souligne, sinon la « compassion », du moins la considération et le soin particulier apportés à cet adolescent au moment de son décès par sa communauté d’appartenance.

DES ÉTUDES TRANSDISCIPLINAIRES PERMETTANT D’ÉCHAPPER AUX STÉRÉOTYPES DE LA PRÉHISTOIRELe risque de projeter inconsciemment ses propres représenta-tions de l’humanité doit rester bien présent à l’esprit de tous les paléoanthropologues, pour échapper aux stéréotypes de la Préhistoire (mythe des origines). Les excès d’interprétations paléopathologiques, mobilisant trop facilement le concept de compassion sociale pour justifier de la prise en charge de

8 – A.Gracia, J.F. Martínez-Lage, J.L. Arsuaga, Martínez I., C. Lorenzo, M.A. Pérez-Espejo (2010), « The earliest evidence of true lambdoid craniosynostosis: the case of «Benjamina», a Homo heidelbergensis child », Child’s Nervous System, 26, p. 723-727.9 – H. Coqueugniot, O. Dutour, B. Arensburg, H. Duday, B. Vandermeersch, A.-M. Tillier (2014), « Earliest cranio-encephalic trauma from the Levantine middle Palaeolithic: 3D reappraisal of the Qafzeh 11 skull, consequences of pediatric brain damage on individual life condition and social care ». PLoS one, 9(7), p. e102822.

Figure 2. Sépulture de l’adolescent de Qafzeh 11 avec son offrande funéraire (bois de cervidé). © Anne-Marie Tillier, UMR 5199

Figure 3. Vue supérieure du crâne (transparence) et de l’endocrâne virtuel (rose) en haut.Vue de détail en bas montrant :1 : l’enfoncement antérieur de l’os frontal fracturé (embarrure)2 : dommages cérébraux visibles sous la forme d’irrégularités de surface de l’endocrâne3 : désengrènement de la suture fronto-pariétale (diastasis). Reconstructions 3D © Hélène Coqueugniot

Figure 4. Vue de face et vue supérieure du crâne de l’adolescent de Qafzeh 11 montrant la localisation du traumatisme crânien. ©Anne-Marie Tillier

CONTACTS : Hélène Coqueugniot [email protected] et Olivier Dutour [email protected]

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Alain Fuchs, président de Paris Sciences & Lettres

MOOC LA SCULPTURE GRECQUE D’ALEXANDRE À CLÉOPÂTRE (PARTIE II)

Après le succès de la partie I diffusée en septembre (plus de 7 500 inscrits), le MOOC de l’EPHE a repris en janvier.

« La sculpture grecque d’Alexandre à Cléopâtre » est le premier MOOC de l’EPHE, réalisé en partenariat avec PSL, le Musée du Louvre et la plateforme Fun Mooc. François Queyrel, qui a dirigé le projet, est directeur d’études à l’EPHE, où il enseigne l’Archéologie grecque.

Diffusé en deux parties, ce cours s’adresse à tous ceux qui ont un intérêt pour la culture antique et la création artistique, aussi bien aux étudiants désirant se spécialiser dans l’étude de l’Antiquité qu’à un public plus large qui souhaite acquérir des connaissances de base utiles pour visiter des sites antiques ou des musées. Il est donc dédié aux passionnés de culture et de création artistique.

La partie II mène aux nouvelles terres où s’épanouit l’hellénisme, de l’« Extrême-Orient » grec aux frontières de l’Inde, jusqu’à Rome, qui conquiert la vieille Grèce. Il n’est pas nécessaire d’avoir suivi la partie I pour suivre ce MOOC.

Inscriptions sur : www.fun-mooc.fr/courses/course-v1:EPHE+126002+session01/about CONTACT : François Queyrel, [email protected]

Les administrateurs de la ComUE ont validé la proposition qui leur a été faite par le conseil des membres et ont élu à l’unanimité Alain Fuchs président de l’établissement public, avec 28 voix « pour », 0 « contre » et 0 abstention.

Alain Fuchs était Président du CNRS depuis janvier 2010. Professeur à l’Université Pierre et Marie Curie, ancien directeur de recherche au CNRS, il avait été Directeur de Chimie ParisTech depuis le 1er janvier 2006. Fondateur du laboratoire de chimie physique d’Orsay, qu’il a dirigé jusqu’en 2006, Alain Fuchs a consacré ses travaux de recherche à la modélisation et la simulation moléculaire des fluides confinés. Il a également été président de la section 13 (Physicochimie : molécules, milieux) du Comité national de la recherche scientifique de 2004 à 2007 ainsi que de la division de chimie-physique des Sociétés françaises de chimie et de physique de 2002 à 2005. Chevalier dans l’ordre national de la Légion d’honneur et dans l’ordre des Palmes académiques, Officier dans l’Ordre national du Mérite, Officier de l’ordre national du Québec, Fellow of the Royal Society of Chemistry, membre de l’Academia Europaea, Docteur Honoris Causa de l’université du Québec à Montréal, lauréat du Alumni Award 2011 de l’Ecole Polytechnique fédérale de Lausanne et Lew Kuan Yew Distinguished visitor, Singapore 2015.

Alain Fuchs, qui était président du CNRS, a été élu Président de l’Université PSL à l’unanimité le 5 octobre 2017. Il a pris ses fonctions le 24 octobre dernier.

Alain Fuchs © Francis Vernhet CNRS Photothèque 2017

Invitation d’Alain Fuchs au Conseil d’administration de l’EPHE, le 22 novembre 2017. © EPHE

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PARIS SCIENCES ET LETTRES

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nationaux : avec des enseignants de l’académie de Lyon, il a organisé des ateliers – sous forme de serious game – avec des lycées de Lyon et de Givors sur les pratiques électives et le fonctionnement de la démocratie, et animé une conférence publique avec des lycéens.

Pour contribuer au débat public, le CEDRE lance des entretiens mensuels, Les savants et les politiques. Ont-ils encore quelque chose à se dire ou campent-ils sur des continents trop éloignés en raison même de la professionnalisation accrue de leurs activités respectives depuis la description qu’en avait donnée Max Weber ? Et si oui, de quoi peuvent-ils parler et pour quoi faire ? Ces entretiens prendront acte du fait qu’au-delà des positions professionnelles et des appartenances, responsables politiques et chercheurs partagent un certain nombre d’objets, d’intérêts et de questionnements communs et qu’ils sont confrontés aux mêmes difficultés de description des transformations du monde social et des manières de les interpréter. Le CEDRE veut favoriser ces convergences et ces confrontations pour construire un espace commun de réflexion et de travail, dans une perspective européenne.

CONTACT : Olivier Christin (EPHE, CEDRE, PSL), [email protected]

Plus d’informations sur  : www.univ-psl.fr/centre-europeen-des-etudes-republicaines-cedre

Animer la rechercheFort de partenariats européens (Universités de Turin, Lausanne et Neuchâtel, Institut historique allemand de Paris, Casa de Velázquez), le CEDRE organise des colloques internationaux, des conférences et des séminaires en France et à l’étranger : Modernités Républicaines, en novembre 2016, sous le haut patronage du Président de la République ; L’État de la République le 28 septembre 2017, à Paris, en collaboration avec l’Association du Corps Préfectoral et l’association Claude Erignac ; Engagement, dévotion et dévouement : servir la Cité avec l’Université de Lyon 2 les 16-18 novembre 2017 ou encore Dire la République à Madrid les 16-18 février 2018 avec Noemí Goldman (Université de Buenos Aires) et Georges Lomné (Université de Paris-Est Marne-la-Vallée, UPEM).

Le CEDRE travaille à constituer une nouvelle bibliothèque républicaine qui mettra à la disposition de tous des recherches récentes, des travaux majeurs encore inédits en français, des ouvrages de large diffusion, des classiques disponibles en ligne mais difficiles d’accès qui feront l’objet d’une présentation étoffée et d’une introduction. Après un Que-sais-je ? paru sur les Cent Mots de la République (près de 60 contributeurs), doivent sortir les actes du colloque Modernités Républicaines et des introductions à la lecture de Josias Simler et de Gasparo Contarini.

Hébergé sur le campus Jourdan de l’ENS Paris, le CEDRE a organisé dès cette rentrée universitaire un séminaire mensuel interdisciplinaire sur la pensée et la théorie républicaine qui portera en 2018 sur la démagogie et les démagogues : y sont associés chercheurs français, collègues étrangers (Antoine Chollet, Irène Herrmann, Egon Flaig) et doctorants.

Une dimension citoyenne : contribuer au débat public et à la réflexion pédagogiqueLe CEDRE entend également être un centre de ressources et de formation, en collaborant avec des enseignants du secondaire et des formateurs d’ESPE et en travaillant avec le réseau Canopé, sans exclure la possibilité d’y développer d’autres types de formations spécifiques. En 2016-2017, le CEDRE a pris part au cycle « Démocratie. Rêver, penser, agir ensemble », organisé par la BM de Lyon avec de nombreux partenariats locaux et

Le Centre européen des études républicaines Crée en novembre 2016 au sein de l’Université PSL, le Centre européen des études républicaines (CEDRE)

a pour vocation de conduire, de soutenir et de coordonner les recherches ayant pour objet les théories de la République, l’histoire des idées et des doctrines républicaines, les pratiques politiques spécifiques à l’œuvre dans les systèmes républicains, l’histoire des expériences politiques républicaines, sur la longue durée et dans une perspective transnationale en Europe et hors de celle-ci. Il associe philosophes, historiens, économistes, sociologues, politistes et même artistes avec l’ambition de surmonter les cloisonnements disciplinaires et les partages académiques qui entravent la recherche en contribuant à perpétuer des confusions théoriques, des biais méthodologiques et les illusions des récits nationaux enchantés.

Signature des conventions lors de la cérémonie d’inauguration du 16 novembre 2016. De gauche à droite : Manuela Albertone (Université de Turin), Najat Vallaud-Belkacem (Ministre de l’Enseignement supérieur), Thierry Coulhon (PSL), Olivier Christin (CEDRE) et Thomas Maissen (Institut Historique allemand de Paris) © ENS

PARIS SCIENCES ET LETTRES

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Le Gis Collex-Persée a pour objectif de rapprocher les chercheurs des gisements documentaires scientifiques, en fédérant les acteurs de l’information scientifique et technique. En s’appuyant sur les structures documentaires nationales et en articulation avec les programmes de recherche, le Gis s’attachera à accroître la collecte, le signalement, l’accès, la conservation, et à faciliter les usages des collections à destination des chercheurs. Il soutiendra la collecte et la production de matériaux de la recherche et développera des services associés performants.

Un domaine d’excellence pour le GED : sociétés et populationsEn tant que bibliothèque délégataire en démographie, sociologie et histoire sociale, le GED bénéficiera dès 2018 d’une dotation annuelle, afin de renforcer les collections dans ces domaines et d’animer le réseau documentaire Sociétés et populations. Le Gis apportera également une aide financière au développement de services de soutien à la recherche, via des appels à projets.

L’axe disciplinaire retenu, élaboré en concertation avec l’ensemble des membres fondateurs, s’inscrit pleinement dans la dynamique scientifique portée au sein du Campus. Autour de cette thématique convergent à la fois des fonds documentaires uniques, dont la réunion sur le site du Campus Condorcet formera un ensemble exceptionnellement riche, mais aussi des axes de recherche en plein essor. Ce projet s’inscrit dans une logique forte de pluridisciplinarité entre les humanités et les sciences sociales.

Une reconnaissance de la richesse des collections du GEDSi l’axe disciplinaire retenu n’épuise pas la richesse documentaire du GED, la participation au Gis lui permet de

s’inscrire pleinement dans le paysage documentaire national, en complémentarité d’autres bibliothèques de référence. Le projet du GED réunit depuis 2010 une cinquantaine de bibliothèques, centres de documentation et services d’archives. CollEx est ainsi une reconnaissance de la richesse de ses collections, dont la constitution s’est toujours faite pour, et surtout avec les chercheurs.

Outre une abondante documentation imprimée publiée dans de multiples langues, les institutions rejoignant le GED ont collecté un ensemble exceptionnel de matériaux de recherche sur tous supports, auxquels il faut ajouter 4,5 km linéaires d’archives scientifiques : archives de chercheurs, notamment en histoire, mais aussi archives de laboratoires, devenant elles-mêmes matériaux de recherche et sources de données pour de nouveaux travaux ou pour l’histoire de la recherche en sciences humaines et sociales.

Le succès de cette candidature est également un encouragement pour la qualité du travail collectif d’une cinquantaine de services documentaires, dont les fonds sont amenés à rejoindre le GED en 2019. Les fonds des neuf centres de documentation, des bibliothèques et des archives de l’EPHE rejoindront également le GED en 20201. Véritable réseau de bibliothèques de recherche, le GED permet déjà de multiplier les situations de mutualisation, de partage d’expertise et de coordination pour le développement de collections et services.

1 – Voir également page 7 : Les bibliothèques du site Sainte Barbe : de nombreux fonds et une salle de lecture accessibles en plein cœur de Paris

Le Grand équipement documentaire du Campus Condorcet, bibliothèque délégataire de CollEx-Persée

Au printemps dernier, le Grand équipement documentaire (GED) a été sélectionné pour faire partie des neuf bibliothèques délégataires du groupement d’intérêt scientifique (Gis) CollEx-Persée, initié par le Ministère, sur la thématique Sociétés et populations : démographie, sociologie et histoire sociale.

© Elizabeth de Portzamparc, Conseil régional d’Île-de-France

VALEUR AJOUTÉE

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En savoir plus : www.campus-condorcet.fr/Projet/La-bibliotheque/Le-Grand-equipement-documentaire-selectionne-comme-bibliotheque-delegataire-de-CollEx-Persee

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PORTRAIT

Jean-Christophe Attias, historien et écrivain de la pensée juive

Entretien avec Jean-Christophe Attias, directeur d’études à l’EPHE en « Pensée juive médiévale », à la section des Sciences religieuses.

Vous êtes titulaire d’une chaire de «  pensée juive médiévale  ». Que mettez-vous sous cet intitulé ? Quelles méthodes mettez-vous en œuvre  ? Pour quel résultat ?

En fait, je ne suis pas entré à l’EPHE sous cet intitulé. Mais sous un autre, « Judaïsme rabbinique », qu’au bout de dix ans j’ai décidé de changer.

D’abord pour me débarrasser du mot « judaïsme », un concept idéologiquement chargé, qui ne s’est imposé que relativement récemment et n’ayant en tout cas guère de sens pour ce long Moyen Âge juif que je fais courir (un peu arbitrairement) de la clôture du Talmud de Babylone (fin Ve siècle) à, disons, la publication du Traité théologico-politique de Spinoza (1670), laquelle peut être entendue comme l’un des premiers moments du basculement dans une « modernité » juive.

Changement d’intitulé, aussi, pour me débarrasser de l’adjectif « rabbinique », qui réduisait le champ à son volet « orthodoxe ». Or je me suis beaucoup intéressé au karaïsme, courant scripturaliste « déviant », qui n’en est pas moins juif pour autant.

Je me suis arrêté à « pensée », mais si j’en avais eu le courage, j’aurais peut-être opté pour « culture », et tant qu’à faire au pluriel. J’étudie certes, de manière spécifique, depuis des décennies, la littérature exégétique produite par les Juifs médiévaux. Mais je n’hésite jamais à bousculer un peu les frontières, et je peux faire lire à mes auditeurs, autour d’un thème d’abord abordé philosophiquement, juridiquement ou « théologiquement », des textes relevant du genre narratif, ou de la poésie. Par

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Traduction hébraïque de Le commentaire biblique. Mordekhai Komtino ou l’herméneutique du dialogue, Jean-Christophe Attias, 1991

Pouvez-vous nous présenter votre parcours ?

Je suis d’abord un provincial. Né en Normandie, j’ai grandi dans le Pas-de-Calais, dans la Marne, en Charente, au gré des mutations de mes parents, tous deux enseignants du secondaire. Le bac en poche, j’ai commis ma première erreur : j’ai décidé de ne pas intégrer la khâgne de Louis-le-Grand, où j’avais pourtant été accepté, et je me suis ainsi fermé définitivement les portes de l’École normale supérieure, sans même essayer de les ouvrir. Je me suis bêtement inscrit à Langues’O en hébreu, et à Paris-I en philosophie.

J’ai passé le concours des IPES (Instituts de préparation aux enseignements de second degré), qui m’a permis de poursuivre mes études en étant rémunéré par l’État, puis celui du CAPES (Certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré). Je suis ainsi devenu professeur d’hébreu moderne dans le secondaire public, dans divers établissements de la banlieue parisienne. Cela pendant une décennie – que j’ai fini par trouver un peu longue.

Je n’ai tenté l’agrégation que sept ans après le CAPES, en 1987. Et j’ai commencé à envisager la possibilité d’une carrière dans la recherche ou dans le supérieur. J’ai profité d’une année passée à l’Université hébraïque de Jérusalem, comme Lady Davis Doctoral Fellow, pour avancer et bientôt soutenir une thèse, en 1990, à Paris-VIII, sur un commentateur judéo-byzantin du XVe siècle (publiée au Cerf en 1991). Entré au CNRS en 1991 comme chargé de recherche, et affecté au Centre d’études des religions du Livre (implanté à l’EPHE), j’ai finalement intégré la Section des Sciences religieuses en 1998, au terme d’un parcours du combattant que je raconte dans mon dernier livre : quatre années de lutte, ou au moins de résistance, et trois élections, seule la troisième ayant été validée par l’Institut.

Mon parcours a la forme d’une spirale, je me rapproche du centre, sans jamais l’atteindre. Langue exotique et mino-

ritaire : l’hébreu. Objet d’étude margi-nal : le judaïsme. Discipline suspecte : la science des religions. Et deux institutions qui, quoi qu’on en dise, ne sont pas vrai-ment au cœur du « système » : le CNRS, puis l’EPHE. Cela ne me gêne pas, au contraire.

Je n’ai d’ailleurs jamais été seul, et j’ai participé, le plus souvent au côté de ma collègue et épouse, Esther Benbassa, à plus d’une aventure collective : celle, par exemple, du Centre Alberto-Benveniste d’études sépharades et d’histoire socioculturelle des Juifs, et celle, aussi, du Pari(s) du Vivre-Ensemble, une structure dévouée à la lutte contre le racisme et les discriminations.

Cela dit, comme Juif, comme intellectuel et… comme provincial, j’ai l’habitude d’une relative « marginalité ». J’essaie d’en tirer le meilleur parti. Et j’y vois la garantie, peut-être illusoire, de ma liberté. La possibilité, au moins, de transgresser quelques codes.

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ailleurs, je n’ai jamais pu isoler l’étude du champ médiéval de questionnements très contemporains.

Si j’ai produit des travaux « pointus » (Isaac Abravanel, la mémoire et l’espérance, 1992, par exemple), des essais relativement « spécialisés » (Les Juifs et la Bible, 2012), j’ai aussi tenté – en collaboration avec Ester Benbassa, parce que j’aime travailler en tandem et que je ne suis pas omni-compétent – des fresques couvrant toute la durée historique du « judaïsme » (Israël imaginaire, 1998), mais aussi des « manuels » (Dictionnaire des mondes juifs, rééd., 2008), sans oublier des prises de parole plus « polémiques » (Les Juifs ont-ils un avenir ?, 2001).

Le Moyen Âge m’est un peu une tour d’ivoire où il me plaît de reprendre de temps en temps mon souffle. Mais je ne m’y enferme jamais longtemps, par crainte, peut-être, d’y étouffer un peu… Je suis au fond un historien de la culture, plutôt transversal, et parfois « engagé ». Mais je suis avant tout un littéraire.

Vous avez reçu le Prix Goncourt de la biographie en 2015 avec Moïse fragile (éd. Alma). Est-ce précisément une illustration «  littéraire  » de vos travaux ?

Peut-être. Cette récompense, je ne sais pas si je la méritais. Ce que je peux dire, en revanche, c’est ce qu’elle a représenté pour moi : une sortie du ghetto… Elle

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29ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018

Traduction américaine de Les Juifs et la Bible, Jean-Christophe Attias, 2012

Moïse fragile, Jean-Christophe Attias, éd. Alma, 2015

bilan doctrinal personnel, qui aurait figé les choses, qui n’aurait été que le reflet inévitablement auto-satisfait et un peu vain d’un moment précis – et forcément éphémère – de mon itinéraire (le moment présent), et qui aurait été périmé sitôt publié.

M’appuyant sur l’expérience acquise avec Moïse fragile, j’ai donc fait un pas de côté de plus, au risque de trébucher. J’ai choisi de faire, de mon enfance à aujourd’hui, le récit d’un parcours tortueux, complexe, parfois contradictoire, et bien sûr, fort heureusement, encore inachevé… Comment, né d’un couple mixte, j’ai, à l’âge de vingt ans, opté résolument pour le judaïsme orthodoxe, et comment je m’en suis ensuite éloigné sans vivre cet éloignement comme un reniement, au contraire, mais comme l’assomption pleine et entière d’une certaine liberté, à la fois juive et universelle.

Ce récit qui, à sa façon, précise le rapport à son objet du savant que je suis, je ne l’ai pas écrit comme un chercheur. Je n’ai pas consulté d’archives, ni interrogé de témoins, ni confronté les sources. J’ai fait exactement le contraire de ce que je fais d’habitude et que j’enseigne à mes étudiants de faire. Je me suis laissé porter par ma mémoire, et lorsqu’elle me faisait défaut, je l’avoue, par mon imagination.

manifestait publiquement – et d’abord à mes propres yeux – quelque chose d’essentiel, peut-être le sens ultime de tous mes travaux passés et présents : la rencontre heureuse du « judaïsme », des sciences religieuses et des lettres françaises.

Moïse fragile est certes un ouvrage nourri de science, qui doit beaucoup aux séminaires que j’ai donnés à l’EPHE pendant plus de deux ans. Il est aussi, en un sens, un ouvrage de « vulgarisation ». Mais il est – j’ai du moins voulu qu’il soit – plus que cela. J’y ai assumé de m’y exprimer – un peu – à la première personne. Et de brosser un portrait inédit de Moïse, qui me parle, et qui parle, si possible, à tous mes contemporains, juifs ou non, savants ou non, croyants ou non. Ce portrait puise beaucoup de sa matière et certaines de ses couleurs dans les strates anciennes et médiévales de la culture juive, mais le trait, si je puis dire, est délibérément contemporain, et j’ai voulu en un sens et un peu immodestement que ce portrait me ressemble.

« Fragilité » en est le mot-clé. Pleinement assumé, il résonne d’une façon singulière, je crois, dans un monde de violence politique, nationale et religieuse dévastatrice. Alors, « littéraire », oui, peut-être. Presque un récit. Mais aussi un appel clair à une prise de distance critique, que seuls garantissent une ironie sagement maniée et un apparent manque de gravité. Au fond, juste convaincre en séduisant, faire réfléchir en faisant plaisir. Cela semble avoir touché le jury du Goncourt, et j’en ai été honoré. Ce prix, en tout cas, m’a permis d’atteindre un public qui, autrement, serait sans doute resté hors de ma portée.

Vous venez de publier le récit autobiographique Un juif de mauvaise foi (éd. Jean-Claude Lattès), qui évoque votre parcours et votre choix du judaïsme orthodoxe. Comment appréhendez-vous votre position de chercheur étudiant sa propre religion, une position d’« observateur observé » ?

Il y avait longtemps que je nourrissais le projet de clarifier mes liens avec le judaïsme, qui n’a pas été seulement mon objet d’étude pendant trois ou quatre décennies, mais qui, nolens volens, a imprégné, de mille façons, le tissu même de ma vie. J’ai hésité, balancé entre diverses options.

Une a été très vite écartée : je n’allais pas écrire un « Ce que je crois » (ou un « Ce que je ne crois plus »), sorte de

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Peu de vies ordinaires, comme l’est inéluctablement la mienne, ont le parfum, le goût, la profondeur d’un roman. Ce n’est qu’en la racontant, avec un peu de ruse et même un peu de « mauvaise foi », justement, qu’on peut donner à une vie ordinaire un peu de ce sel qui a pu sembler parfois lui manquer. Je ne sais pas si j’ai gagné mon pari. Je ne sais qu’une chose : je ne demande pas à mes lecteurs s’ils sont sortis de ce livre plus savants qu’ils ne l’étaient avant de le lire. J’espère seulement les avoir fait rire et les avoir émus.

Ce qui, je le concède, n’est pas vraiment sérieux…

Quels sont vos projets de recherche en cours et à venir ?

Ils ne sont pas sans rapport, finalement, avec tout ce que je viens de vous raconter. Après deux années de séminaire sur « Le judaïsme et la Nature », j’en suis venu à resserrer et à infléchir, en la prolongeant, la réflexion que j’avais engagée. Je me suis ainsi intéressé à la nature transformée par l’homme, notamment via la « création » d’espèces nouvelles par hybridation, et de là, au rapport ambigu du judaïsme à

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30 ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018

l’hybridité et au mélange – à la confusion par l’homme des genres créés par Dieu et/ou institués par la Torah. J’ai ainsi travaillé sur la question de l’hybridation animale et végétale ainsi que sur l’interdit du shaatnez, le tissage ensemble de la laine et du lin (voir par exemple Lévitique 19, 19 et Deutéronome 22, 9-11). Et c’est tout naturellement que l’année qui commence sera placée sous le signe d’un nouveau sujet d’étude, de fait contigu au précédent : « Judaïsme et hybridité ».

J’imagine bien, dans le sillage de ces développements, la parution prochaine d’un ouvrage sur ce thème, le concept d’« hybridité » y étant vraisemblablement entendu en un sens large, et développé selon plusieurs modalités possibles. On peut penser qu’une telle enquête ne pourra faire qu’écho, quoique à sa façon, à l’obsession contemporaine – et assez universelle – de l’identité (et, accessoirement, de l’authenticité). À vrai dire, je n’en sais encore rien. On verra bien. Je ne m’interdis aucune digression…

Un juif de mauvaise foi, Jean-Christophe Attias, éd. Jean-Claude Lattès, 2017

DÉCOUVREZ LES PERSONNALITÉS

DE L’EPHE DANS LE DICTIONNAIRE

PROSOPOGRAPHIQUE

ANS

1868

I 201

8

L’EPHE existe grâce aux femmes et aux hommes qui contribuent à son rayonnement en France et dans le monde : ses enseignants-chercheurs, son personnel administratif, ses étudiants et auditeurs... Le Dictionnaire prosopographique présente de manière concise les personnels scientifiques de l’EPHE de 1868 à aujourd’hui, à travers un ensemble de notices enrichi au fil du temps par les contributions des enseignants-chercheurs de l’École. Créé à l’occasion des 150 ans de l’EPHE, il a vocation à offrir au public un outil fiable et passionnant pour découvrir l’histoire de l’École.

À consulter sur prosopo.ephe.fr

Patios Saint-Jacques - 4-14, rue Ferrus - 75014 Paris Tél. : +33 (0)1 53 63 61 20

www.ephe.fr

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Pour plus d’informations : centrealbertobenveniste.orgwww.jeanchristopheattias.net

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Cette délégation s’inscrivait dans le prolongement de précédentes missions institutionnelles de l’École (2011) et de celles de PSL auxquelles l’EPHE avait été associée (2015, 2016 et 2017). Hubert Bost était accompagné d’enseignants-chercheurs des 3 sections : François Jouen (directeur d’études en neurosciences, informatique et traitement d’image) pour les SVT, Olivier Venture (sinologue) et Stéphane Verger (archéologue) pour les SHP, Laurent Coulon (égyptologue) pour les SR, et de Laurence Frabolot, vice-présidente chargée des relations internationales et de la recherche.

PékinLes liens ont été consolidés avec l’Académie des Sciences, grâce aux discussions menées avec le Département d’archéologie et d’anthropologie (dont les scientifiques s’ouvrent à l’analyse des matériaux et des artefacts) et à l’Académie des Sciences sociales, où un accord a été signé avec son École doctorale, avant une fructueuse réunion de travail dans les locaux de son Institut d’archéologie, considéré comme le meilleur en Chine, dont l’actuel directeur est un ancien directeur d’études invité de l’EPHE.

Une visite d’amitié à l’Université de Pékin (avec laquelle l’EPHE a signé en 2009 un accord aujourd’hui très actif) s’est conclue par l’invitation officielle adressée à Hubert Bost par la Vice-Chairman d’assister à la célébration en 2018 du 120e anniversaire de Beida, tandis que les discussions avec son Collège des Sciences de l’Environnement puis son Institut des Humanités ouvraient de belles perspectives ; à l’université Tsinghua, les collègues d’Olivier Venture ont présenté la prestigieuse collection de lattes de bambous du IVe s. du Centre de Recherche et de Protection des Documents exhumés.

31ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018

L’Institut d’Archéologie de l’Académie des Sciences sociales à Pékin. Son président, le Prof. Chan Xingcan, se tient à la gauche d’Hubert Bost.

Université de Pékin (Beida). A la droite d’H. Bost, Mme la Prof. Ye Jingyi, vice-Chairman de l’université, accompagnée des représentantes des Affaires internationales (Drs Pang Yaran et LI Yun au premier rang) et, au second rang, des Doyens du Collège des Sciences de l’Environnement, le Prof. Zhu Tong, et de l’Institut des Humanités et des Sciences sociales, le Prof. Qu Jingdong (à ses côtés, le vice-doyen, le Prof. Han Xiao).

SANS FRONTIÈRES

L’EPHE en mission en Chine

Une délégation de l’EPHE, conduite par son président, s’est rendue en Chine (République populaire et République de Chine) du 4 au 14 novembre 2017.

Un entretien au Musée du Palais (Cité Interdite) avec sa directrice adjointe, le Prof. SONG Jirong, a permis d’envisager l’élargissement de l’accord déjà signé avec son Département du Patrimoine bouddhique tibétain à l’ensemble des domaines couverts par ses 5 Départements.

Une visite de l’École Française d’Extrême-Orient (EFEO) et une rencontre avec l’Ambassadeur de France et son Conseiller Culturel et de Coopération ont ouvert d’intéressantes pistes de réflexion et de collaboration.

ShanghaiL’étape de Shanghai a été principalement consacrée à la jour-née organisée à l’Université Normale de Shanghai, où est ins-tallée depuis 2011 l’École doctorale conjointe EPHE-SHNU / Shanghai Normal University, rattachée à son Centre d’excel-lence en Littérature comparée et littérature mondiale. Hubert Bost et Stéphane Verger ont pu donner deux conférences (La Réforme protestante et la « modernité » pour l’un, Archéologie autour de la Méditerranée : nouvelles tendances en France et

Université Normale de Shanghai. Au centre, la vice-présidente Éducation, Mme la Prof. Ke Qinfei, entre Hubert Bost à sa gauche et Ivan Ruviditch sur sa droite au second rang. À sa droite au premier rang : le Prof. Liu Yun Hua, directeur du Centre National de Recherche en Littérature, le Prof. Yu Gang, directeur de l’École doctorale, et à l’extrême-gauche le Prof. Fang Guangchang, philosophe, spécialiste en études bouddhiques.

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Le 9 juin 2017 s’est tenue à Shanghai la soutenance de la thèse de Huang Guanqiao, Rédemption et délivrance : présence du bouddhisme dans le théâtre de Paul Claudel, dirigée à l’EPHE par Denis Pelletier et à la SHNU par le professeur Liu Yunhua. Pierre Marsone, de l’EPHE, était membre du jury, qui était présidé par Mme Huang Bei, professeure à l’université de Fudan et spécialiste de Victor Segalen, Paul Claudel et Henri Michaux.

La thèse était consacrée à trois pièces de Claudel, Tête d’Or, Le repos du septième jour et Le soulier de satin. Huang Guanqiao s’est attaché à montrer comment Claudel invente un bouddhisme largement imaginaire, à la rencontre entre orientalisme littéraire et théologie catholique. Il se saisit de la tradition orientale pour rendre à la littérature moderne son rapport au sacré. En dépit de son conservatisme politique, Claudel s’inscrit dans le courant de la modernité littéraire qui, de Baudelaire au Nouveau Roman

en passant par Proust, fait de la langue un outil de subversion du récit de fiction et de déconstruction du sujet.

La thèse a été préparée dans le cadre du programme doctoral conjoint EPHE-SNU. L’accord créant ce programme a été signé en novembre 2011, lors d’une mission EPHE conduite par Denis Pelletier, alors président, accompagné de Philippe Hoffmann, doyen de la section des sciences religieuses, de Laurence Frabolot, directrice DRRI, et de Christophe Valia-Kollery. Il répondait à la double volonté de l’EPHE de structurer sa présence institutionnelle dans le pays – prioritairement à Pékin et à Shanghai –, et de créer des parcours internationaux au niveau du doctorat. Chaque doctorant doit passer deux années dans chacun des établissements, être inscrit en cotutelle de thèse, avant de recevoir deux diplômes à l’issue de sa soutenance.

en Europe pour le second). À l’université Fudan, la délégation a été accueillie par un collègue d’Olivier Venture au Centre de re-cherche sur les écritures anciennes et les documents exhumés. Il s’avère encore extrêmement difficile de passer un accord global avec Fudan, qui faciliterait pourtant les cotutelles de thèse et une mobilité réciproque.

Taipei (Taïwan) L’EPHE a signé un accord avec l’Academia Sinica, destiné à consolider les nombreuses collaborations existantes, à l’issue d’une journée de visites auprès des Instituts de Littérature et Philosophie chinoises, d’Histoire et de Philologie (avec son musée), des Humanités et Sciences sociales, et du Centre de recherche sur les Changements environnementaux.

François Jouen a pu développer des coopérations engagées avec le Taiwan Textile Research Institute – TTRI autour des textiles intelligents et innovants.

La délégation a également été accueillie par la National Taiwan University – NTU (classée 1re à Taïwan), par le Centre d’Études françaises sur la Chine Contemporaine – CEFC installé à l’Academia Sinica, par le Musée National du Palais et par le Bureau Français de Taipei.

CONTACT : Laurence Frabolot Vice-présidente aux relations internationales [email protected]

32 ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018

SANS FRONTIÈRES

De gauche à droite : Li Jianying (SHNU), Jin Wen (ECNU), Huan Bei (université Fudan), Pierre Marsone (EPHE), Denis Pelletier (EPHE), Ivan Ruviditch (SHNU), Liu Yunhua (SHNU), Huang Guanqiao. © EPHE

Programme doctoral EPHE-Université Normale de Shanghai-SHNU : la 1re soutenance de thèse en cotutelle à Shanghai

Visites institutionnelles auprès des principaux partenaires de l’EPHE (Académies, universités, musées), conclusions d’accords, rencontres scientifiques appuyées sur les collaborations scientifiques des membres de la délégation, contacts avec les représentations françaises, les démarches furent identiques dans les trois étapes de Pékin, Shanghai et Taipei, dont on peut retenir :

• L’excellente résonance autour d’intérêts communs : ○ dans le domaine de l’environnement ; ○ en archéologie, désormais globale dans sa méthodologie (les sciences associées aux SHS) et dans ses champs d’étude : ○ dans une approche renouvelée d’un monde unique et en mouvement, de l’Occident méditerranéen à l’Orient en passant par l’Asie Centrale ;

• La signature de conventions importantes (Académie des Sciences sociales à Pékin, Academia Sinica à Taipei) ;• La consolidation de la présence en Chine de l’EPHE, parallèlement à sa parfaite intégration dans l’action de PSL dans le pays.

EN RÉSUMÉ

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Ce programme doit beaucoup à l’appui de Claude Imbert, professeur de philosophie à l’ENS, et d’Ivan Ruviditch, sinologue, docteur de l’EPHE, en poste à Shanghai, tous deux proches du Prof. SUN Jingyao, historien, comparatiste, qui dirigea longtemps le National Key Research Center for Comparative Literature and World Literature accueilli à la SNU. C’est aujourd’hui le Prof. LIU Yunhua qui lui a succédé.

La délégation EPHE emmenée en Chine du 4 au 14 novembre 2017 sous la conduite d’Hubert Bost a consacré à la SHNU une journée de visite (après Pékin et Taipei), saluant ainsi la réussite de ce programme.

CONTACT : Denis Pelletier [email protected]

33ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018

SANS FRONTIÈRES

École d’été en Indonésie : Third International Intensive Course in Old JavaneseLe vieux javanais est la langue vernaculaire la plus prestigieuse de l’Indonésie prémoderne. Dotée d’une riche tradition littéraire indianisée ainsi que d’un large corpus épigraphique couvrant la période de 800 à 1500 de n. è., cette langue continue de jouer un rôle primordial dans la vie religieuse, rituelle et intellectuelle de l’île de Bali jusqu’à l’époque contemporaine. Constatant que cette langue n’est actuellement enseignée dans aucune université occidentale et que son enseignement ne repose même pas sur une base solide en Indonésie, l’École française d’Extrême-Orient (EFEO), l’UMR 8170 Centre Asie du Sud-Est (CASE), et la Bibliothèque nationale d’Indonésie (BNI) se sont concertés pour la première fois en 2014 pour organiser un International Intensive Course in Old Javanese. La troisième session de cette école d’été, co-organisée par l’EPHE et bénéficiant d’un important financement de l’IRIS « Études globales » de PSL, vient d’avoir lieu en Indonésie en juillet.

Le Third International Intensive Course in Old Javanese a réuni du 14 au 25 juillet à Trawas un groupe de vingt-deux étudiants français (dont trois de l’EPHE), étrangers et indonésiens – parmi lesquels des chercheurs en philologie et en archéologie, des enseignants-chercheurs et des étudiants en master ou en thèse. La formule était de proposer une semaine de formation intensive en grammaire, suivie d’une semaine de séances quotidiennes de lecture de trois genres de textes pour les débutants, ou dix jours de lecture de textes plus complexes pour les confirmés. En tout, les participants ont bénéficié d’environ 70 heures de cours, soit bien au-delà de l’équivalent de deux semestres de cours extensifs en France.

L’École d’été avait lieu dans un endroit idyllique et bien adapté à l’étude intensive, le campus extérieur de l’Université de

Surabaya (Ubaya Training Center) situé face au majestueux mont Penanggungan, dans la province de Java Est, au milieu de plusieurs sites archéologiques impressionnants, contemporains des textes vieux-javanais étudiés. Des excursions pour visiter ces vestiges archéologiques – les structures énigmatiques sur le mont Penanggungan et les temples monumentaux de Jago et Singhasari près de Malang – faisaient partie du programme.

L’École d’été a permis de réunir des étudiants et des chercheurs de tous horizons autour de l’étude du vieux javanais et de son corpus littéraire et épigraphique. Elle a également créé des rencontres scientifiques entre étudiants indonésiens et étrangers (de l’Occident et d’autres pays d’Asie), jetant ainsi les bases pour des coopérations scientifiques internationales dans un avenir proche.

Les cours de lecture de textes vieux-javanais figurent désormais au programme des enseignements de l’EPHE.

CONTACTS : Andrea Acri [email protected] et Arlo Griffiths [email protected], responsables du projet

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ACTUALITÉS

Manifestations du cent cinquantenaire de l’EPHE• Lundi 15 janvier 2018 à la Maison des Sciences de

l’Homme Paris-Nord : Cérémonie des vœux et lancement du cent cinquantenaire de l’EPHE, en présence de Frédérique Vidal, Ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (événement organisé en partenariat avec Campus Condorcet et l’Orchestre symphonique et chœur PSL).

• Jeudi 18 janvier à l’Institut d’études avancées de Paris (IEA) : Conférence de Serges Planes : « Les récifs coralliens face aux défis des changements de la planète »

• Jeudi 15 février à l’Institut d’études avancées de Paris : Conférence de Michel Pastoureau : « L‘historien face à la couleur : l‘exemple du bleu, de la Grèce antique au siècle des Lumières »

• Jeudi 15 mars à l’IEA : Conférence de Philippe Portier : « Controverses contempo-raines autour de la laïcité »

• Jeudi 5 avril à l’IEA : Conférence d’Andreas Stauder : « La naissance de l’écriture en Égypte ancienne : pouvoir et économie du signe »

• Jeudi 17 mai à l’IEA : Conférence d’Isabelle Saint-Martin : « Art et religion dans un monde sécularisé : quelles rencontres ? »

• Jeudi 24 mai à la Maison des Sciences de l’Homme : « Autour de la création de la VIe section de l’EPHE (Sciences économiques et sociales, 1947) et de la création de l’EHESS (1975) », table ronde organisée en partenariat avec l’École des Hautes Études en Sciences Sociales

• Jeudi 7 juin à l’IEA : Conférence de François Jouen : « Cognition et technologie »

• Lundi 11 juin à l’Institut de France : « De l’érudition à l’opinion » : matinée de travail et séance ordinaire de l’Académie des Sciences morales et politiques consacrée à l’EPHE

• Jeudi 21 juin en Sorbonne : Cérémonie des doctorats honoris causa, accompagnée d’un concert de l’Orchestre et chœur PSL

SÉMINAIRE « 150 ANS D’HISTOIRE DE L’EPHE » EPHE, Maison des Sciences de l’homme, 54 boulevard Raspail, 75006 Paris, niveau -1, salle S01

CONTACT : Denis Pelletier, [email protected]

Lancé en 2016 sous l’égide de Denis Pelletier, le séminaire « 150 ans d’histoire de l’EPHE » continue en 2018. Il est ouvert à toutes et tous. C’est un espace de discussion autour de l’histoire de la recherche à l’EPHE, de sa place dans le champ des savoirs en France et dans le monde, de son actualité présente. Chaque séance thématique donne lieu à trois ou quatre interventions suivies de débats.

Prochaines séances :• Le 19 mars 2018 à 17h : Le christianisme à l’EPHE (Michel-Yves Perrin, dir.)• Le 9 avril 2018 à 17h : L’EPHE et la question du vieillissement (Jean-Michel Verdier, dir.)• Le 28 mai 2018 à 17h : L’histoire de l’art à l’EPHE (Jean-Michel Leniaud, dir.)

34 ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018

Discours de Frédérique Vidal, Ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, lors de la cérémonie des vœux de l’EPHE, le 15 janvier 2018 © EPHE

ANS

www.lhistoire.fr

PROGRAMME DU CENT CINQUANTENAIRE DE L’EPHE

Retrouvez le programme détaillé des manifestations du cent cinquantenaire de l’EPHE sur www.ephe.fr/ecole/150ans

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MANIFESTATIONS ÉTUDIANTES

ACTUALITÉS

• Samedi 24 mars 2018 à la Maison des Sciences de l’Homme : Journée portes ouvertes de l’EPHE

• Jeudi 12 avril 2018 à la Sorbonne : Cérémonie de remise des diplômes de doctorat de l’EPHE

Plus d’informations sur www.ephe.fr/actualites

35ÉPHÉMÉRIDE N°11 / JANVIER 2018

SCIENCES HISTORIQUES ET PHILOLOGIQUES

Publication : Les campagnes du nord-est de la Gaule, de la fin de l’âge du Fer à l’Antiquité tardive

Cet ouvrage collectif, diri-gé par Michel Reddé (direc-teur d’études en Histoire et archéologie de la Gaule romaine), est consacré aux campagnes du nord-est de la Gaule, de la Tène finale à l’An-tiquité tardive, entre le bassin de la Seine et le limes de Ger-manie. Il constitue le premier tome de la publication finale du projet « Rurland »1 finan-cé par l’European Research

Council (ERC). L’objectif était d’intégrer des infor-mations rarement étudiées ensemble et le plus souvent inédites : fouilles archéologiques, notam-ment celles qui sont issues de l’archéologie pré-ventive la plus récente, restes botaniques, matériel osseux, nature et qualité des sols, photographies aériennes, données LIDAR, de manière à promou-voir une approche interdisciplinaire et multiscalaire de l’ensemble géographique considéré, depuis les sites proprement dits jusqu’aux territoires. Il s’agit, in fine, de comprendre les dynamiques spatiales et historiques du monde rural de cette époque ancienne ainsi que leur diversité régionale. Dans cette perspective ont été privilégiées des fenêtres d’études à des échelles différentes, en fonction de la qualité, l’abondance et la nature de l’informa-tion qu’elles fournissent.

Deux volumes seront publiés successivement : celui-ci est consacré aux études régionales effec-tuées dans le cadre du programme Rurland ; la synthèse générale suivra dans un second temps.

Références  : Gallia rustica 1. Les campagnes du nord-est de la Gaule, de la fin de l’âge du Fer à l’Antiquité tardive, Michel Reddé (dir.), Bordeaux, Ausonius Éditions, 2017, 868 p.

CONTACT : Michel Reddé, [email protected]

1 – Voir Éphéméride n°9, janvier 2017

Publication : Ma mémoire et les autresDe quoi parle-t-on lorsque l’on évoque la mémoire ? Longtemps, pour les scientifiques ou les philosophes, il s’agissait de la mémoire individuelle. À l’inverse, les historiens et les sociologues appréhendaient la mémoire collective. Aujourd’hui, ce clivage est dépassé : l’homme est (re)devenu un être social, complexe. Il n’est plus possible d’étudier la mémoire sans prendre en compte son évolution, ses pathologies, à petite et à grande échelle.

Dans notre monde hyperconnecté, où des « événements-monde » bouleversent les devenirs individuels, une réflexion pluridisciplinaire s’impose. Les neurosciences et la médecine croisent ici la philosophie, la science informatique et l’histoire, pour mettre en lumière toute la complexité de nos mémoires – individuelle, collective et partagée.

Cet ouvrage est dirigé par Francis Eustache, directeur d’études en neuropsychologie et neurosciences, qui dirige à l’université de Caen-Normandie, une unité de l’Inserm dédiée à l’étude de la mémoire humaine et de ses maladies. Il est également Président du conseil scientifique de l’Observatoire B2V des mémoires.

Références  : Ma mémoire et les autres, Coll. « Essais & docu-ments », Éditions Le Pommier, 2017, 176 p.

CONTACT : Francis Eustache, [email protected]

Sciences de la vie et de la terre

Sciences religieuses

Sciences historiques et philologiques

SCIENCES HISTORIQUES ET PHILOLOGIQUES

SCIENCES RELIGIEUSESSCIENCES DE LA VIE ET DE LA TERRE

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ANS

LES CONFÉRENCES DE L’EPHE

18 OCTOBRE 2017 DROITS DE DIEU ET DROITS HUMAINS : LE CHRISTIANISME ET LES LIBERTÉS MODERNES

UNE CONFÉRENCE DE VALENTINE ZUBER16 NOVEMBRE 2017LES MÉMOIRES TRAUMATIQUES : APRÈS LES ATTENTATS DU 13 NOVEMBRE 2015

UNE CONFÉRENCE DE FRANCIS EUSTACHE7 DÉCEMBRE 2017 LES ENGAGEMENTS DE L’EPHE DANS LA CONSERVATION DU PATRIMOINE

UNE CONFÉRENCE DE JEAN-MICHEL LENIAUD

18 JANVIER 2018LES RÉCIFS CORALLIENS FACE AUX DÉFIS DES CHANGEMENTS DE LA PLANÈTE

UNE CONFÉRENCE DE SERGE PLANES 15 FÉVRIER 2018L’HISTORIEN FACE À LA COULEUR : LE BLEU, DE LA GRÈCE ANTIQUE AU SIÈCLE DES LUMIÈRES

UNE CONFÉRENCE DE MICHEL PASTOUREAU15 MARS 2018CONTROVERSES CONTEMPORAINES AUTOUR DE LA LAÏCITÉ

UNE CONFÉRENCE DE PHILIPPE PORTIER5 AVRIL 2018LA NAISSANCE DE L’ÉCRITURE EN ÉGYPTE ANCIENNE : POUVOIR ET ÉCONOMIE DU SIGNE

UNE CONFÉRENCE D’ANDREAS STAUDER17 MAI 2018ART ET RELIGION DANS UN MONDE SÉCULARISÉ : QUELLES RENCONTRES ?

UNE CONFÉRENCE D’ISABELLE SAINT-MARTIN7 JUIN 2018 COGNITION ET TECHNOLOGIE

UNE CONFÉRENCE DE FRANÇOIS JOUEN

POUR PLUS D’INFORMATIONS RENDEZ-VOUS SUR

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Les conférences ont lieu à l’Hôtel de Lauzun de l’Institut d’études avancées (IEA) 17 Quai d’Anjou, 75004 Paris

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