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Mémoire présenté devant l’ENSAE ParisTech pour l’obtention du diplôme de la filière Actuariat et l’admission à l’Institut des Actuaires le 02/03/2017 Par : Alexis TOULLET Titre : Modélisation et couverture du risque de rachat total en Epargne Individuelle Confidentialité : NON OUI (Durée : 1 an 2 ans) Les signataires s’engagent à respecter la confidentialté indiquée ci-dessus Membres présents du jury de la filière Entreprise : CNP Asssurances Nom : Signature : Membres présents du jury de l’Institut Directeur du mémoire en entreprise : des Actuaires Nom : Fatoumata NDOYE Signature : Autorisation de publication et de mise en ligne sur un site de diffusion de documents actuariels (après expiration de éventuel délai de confidentialité) Signature du responsable entreprise Secrétariat : Signature du candidat Bibliothèque : Ecole Nationale de la Statistique et de l’Administration Economique (ENSAE) 3, Avenue Pierre Larousse - 92245, MALAKOFF CEDEX, FRANCE

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Page 1: Modélisation et couverture du risque de rachat total en ......le 02/03/2017 Par : Alexis TOULLET Titre : Modélisation et couverture du risque de rachat total en Epargne Individuelle

Mémoire présenté devant l’ENSAE ParisTechpour l’obtention du diplôme de la filière Actuariat

et l’admission à l’Institut des Actuairesle 02/03/2017

Par : Alexis TOULLET

Titre : Modélisation et couverture du risque de

rachat total en Epargne IndividuelleConfidentialité : � NON � OUI (Durée : � 1 an � 2 ans)

Les signataires s’engagent à respecter la confidentialté indiquée ci-dessusMembres présents du jury de la filière Entreprise : CNP Asssurances

Nom :Signature :

Membres présents du jury de l’Institut Directeur du mémoire en entreprise :des Actuaires

Nom : Fatoumata NDOYESignature :

Autorisation de publication et demise en ligne sur un site dediffusion de documents actuariels(après expiration de éventuel délai deconfidentialité)Signature du responsable entreprise

Secrétariat :

Signature du candidatBibliothèque :

Ecole Nationale de la Statistique et de l’Administration Economique (ENSAE)3, Avenue Pierre Larousse - 92245, MALAKOFF CEDEX, FRANCE

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Résumé

Mot-clé : rachat total, tendance, rupture, modèle de Poisson, scénario ORSA, chocLes compagnies d’assurance doivent pouvoir anticiper les risques comportementaux comme le risque derachat total afin de garantir leur solvabilité. En particulier, elles doivent anticiper les hausses de la sinistralité,causées par exemple par des crises financières, et évaluer le besoin en capital en question.Nous mettons d’abord en oeuvre une première méthode intuitive pour modéliser une loi de rachat en mon-tants en fonction de l’ancienneté, dîte globale car elle ne distingue pas les rachats conjoncturels des rachatsstructurels. Cette loi doit correspondre à un best estimate dans le cadre de la modélisation du passif dela compagnie sous Solvabilité II. Nous adoptons ensuite un point de vue mensuel pour déterminer si cetteloi modélise de manière satisfaisante la dynamique passée et observable du rachat total. Nous constatonsalors que notre estimation est biaisée. En effet elle sur-estime le scénario central sans pour autant estimercorrectement les pics de rachat observés dans le passé. Cette constatation nous conduit à modéliser d’unepart une loi correspondant à un scénario central et des chocs correspondants à différents scénarios adverses.Pour obtenir une loi centrale satisfaisante, plusieurs corrections sont apportés au modèle d’estimation de laloi globale : nous supprimons de l’historique de calibrage les ruptures passées pour éviter d’aggraver à tortle scénario central et identifions les rachats causés par le décès des assurés.Pour modéliser les scénarios adverses, nous adoptons à nouveau un point de vue mensuel et modélisons deuxgrandeurs à l’horizon 2020 :

— Une tendance mensuelle qui correspond à la composante prévue traduisant l’évolution probable durisque de rachat total et qui inclut aussi les erreurs d’estimation et de processus qui correspondent àla volatilité.

— Des dérives probables qui correspondent à des situations hors-norme pouvant survenir de manièretemporaire ou permanente et entraîner une démarcation nette entre l’observé et le prévu.

Nous estimerons la tendance à partir d’un modèle de régression linéaire après avoir nettoyé l’historiquedes dérives passées. Avant de modéliser des trajectoires adverses probables à l’avenir, nous établissons uncatalogue des ruptures de tendance observées dans le passé et disponibles dans notre bases : crise financièrede 2008, crise de la zone euro, annonce politique sur la fiscalité de l’assurance-vie en mars 2012. En plus deces ruptures passées, nous modélisons aussi une rupture fiscale non observée dans le passé mais probable àl’avenir. Ces dérives fortes sont alors ajoutées à la tendance à l’aide d’un modèle de Poisson. Nous obtenonsalors différents scénarios adverses futurs correspondants chacun à des quantiles du taux de rachat, facteurde risque étudié. Ces derniers sont ensuite annualisés afin d’obtenir des chocs dynamiques à ajouter à la loicentrale. Par exemple, le choc à 99.5% correspond à des montants rachetés 3 fois plus grands que les montantsprévus dans un contexte favorable. De telles hausses de la sinistralité pourrait menacer la solvabilité de lacompagnie ce qui nous conduit à modéliser un traité de réassurance indicielle : des indices simulés à partirde notre modèle de Poisson sont alors plus avantageux que des indices historiques.

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Abstract

Key words : total lapse, trend, drift, Poisson model, ORSA scenario, shock.Insurance companies have to anticipate behavioral risk such as risk of total lapse in order to secure solvability.In particular, they must anticipate rise in claims, caused for instance by financial crises, and quantify theircapital need.We start with a first intuitive model to calibrate a lapse distribution by age : conjonctural and structurallapse are not distinguished, that’s why this distribution is deemed global. This distribution must be a bestestimate for the company liabilities under Solvency II. Then our first distribution is carried out on a monthlybasis in order to determine if this distribution correctly models the past lapse momentum. Our estimationis finally biased : benchmark scenario is overestimated whereas observed lapse peaks are underestimated.Therefore we decide to model another benchmark distribution and shocks relating to adverse scenarii.In order to obtain a satisfactory benchmark distribution, we rectify our first intuitive model : we excludelapse during crisis for not wrongly worsening the benchmark and lapse caused by death. In order to modeladverse scenarii, we model two monthly quantities over a five years horizon :

— Trend : it is the forecast component relating to the probable evolution of lapse. It includes estimationand process error thanks to volatility.

— Drifts : they correspond to outstanding situations which can be occur temporarily or permanentlyand cause a gap between observations and anticipations.

We estimate the trend by means of linear regression after cancelling past drift from the history. Beforemodeling probable future adverse distribution, we catalogue past breakdowns available in our database :2008 financial crise, Eurozone crise, political announcement about life insurance taxation in march 2012. Inaddition to these past breakdowns, we model a tax scenario which is not historically observed but probablein the future. Then these strong upward drift are added to the trend by means of a Poisson model. We obtainseveral adverse scenarios relating to quantiles of lapse rate. We annualize these quantiles to obtain dynamicshocks which are added to benchmark distribution. For instance, the 99.5% shock involves lapse amountwhich is three times the benchmark amount. Such increase in claims could threaten company solvency :therefore we model an index-based reinsurance treaty : simulated index from our Poisson model are moreadvantageous than historical index.

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Remerciements

Je tiens à remercier M. Thomas BEHAR, directeur de la Direction Technique Groupe (DTG) de CNP As-surances, ainsi que tous les collègues de la DTG pour leur professionnalisme et leur sympathie.

Je remercie plus particulièrement Mme Fatoumata NDOYE qui a suivi mes travaux en tant que tutrice eta été très disponible tout au long de ce stage.

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Table des matières

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

1 Le risque de rachat en assurance-vie : contexte 101.1 Assurance-vie : généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101.2 Le risque de rachat dans la littérature . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121.3 Contexte réglementaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

1.3.1 Solvabilité II : généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141.3.2 Le risque de rachat dans le module vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

1.4 Évolution d’un risque et risk management . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171.5 Couverture d’un risque et réassurance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

1.5.1 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191.5.2 Réassurance indicielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

2 Analyse exploratoire du portefeuille étudié 212.1 Données disponibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 212.2 Description des assurés et des contrats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 222.3 Premières observations sur le rachat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

2.3.1 Nombres et montants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 232.3.2 Définition du facteur de risque : le taux de rachat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 242.3.3 Taux de rachat et variables explicatives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

2.4 Dynamique du phénomène de rachat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 292.4.1 Répartition mensuelle des rachats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 292.4.2 Campagne promotionnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

2.5 Synthèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

3 Loi globale : première modélisation 323.1 Modélisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32

3.1.1 Choix d’un estimateur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 323.1.2 Choix des variables explicatives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 343.1.3 Choix de l’historique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36

3.2 Loi brute et prolongement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 373.2.1 Loi brute . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

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3.2.2 Prolongement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 383.3 Synthèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

4 Dynamique du risque : insuffisance de la loi globale 414.1 Loi mensuelle observée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41

4.1.1 Méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 414.1.2 Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42

4.2 Décomposition en tendance et en saisonnalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 424.2.1 Méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 424.2.2 Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

4.3 Loi mensuelle globale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 444.3.1 Méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 444.3.2 Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45

5 Tendance et rupture 465.1 Loi mensuelle en nombres : calibrage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46

5.1.1 Méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 465.1.2 Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47

5.2 Comparaison entre nombres et montants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 475.2.1 Taux observé, tendance et saisonnalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 475.2.2 Cointégration et modèle à correction d’erreurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49

5.3 Tendance et historique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 515.3.1 Modèle général . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 515.3.2 Impact du choix de l’historique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 515.3.3 Contrainte sur la puissance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

5.4 Tendance : synthèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56

6 Dérive du risque : modèle standard 586.1 Réplication des crises : ajout d’un choc dynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

6.1.1 Méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 586.1.2 Résultats : taux mensuels de rachat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 596.1.3 Résultats : back-testing . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

6.2 Synthèse : erreur de processus et d’estimation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62

7 Dérive du risque : modèle à sauts 647.1 Calibrage : taux de base . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 647.2 Calibrage : sauts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64

7.2.1 Crise économique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 657.2.2 Calibrage d’une réforme fiscale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

7.3 Taux final : méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

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7.3.1 Saut lié à la fiscalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 707.3.2 Saut lié à une crise . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 707.3.3 Synthèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

7.4 Taux final : résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 727.4.1 Trajectoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 727.4.2 Scénarios : trajectoire particulière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 727.4.3 Scénarios et chocs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 747.4.4 Amplitude des dérives futures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74

7.5 Synthèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 767.5.1 Méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 767.5.2 Scénarios possibles de crises . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77

8 Dérive du risque : variation autour du modèle à sauts 798.1 Modèle à sauts à date fixée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 798.2 Tendance : autre historique nettoyé des crises . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81

8.2.1 Méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 818.2.2 Résultat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81

8.3 Tendance : autre modèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 838.3.1 Méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 838.3.2 Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83

8.4 Modèle à sauts à date et durée aléatoires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 858.4.1 Méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 858.4.2 Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87

8.5 Synthèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88

9 Loi globale corrigée : modèles simulés 899.1 Méthodologie : obtention des lois centrales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89

9.1.1 Loi centrale pour le modèle à sauts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 899.1.2 Loi centrale pour le modèle standard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89

9.2 Méthodologie : obtention des lois choquées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 909.2.1 Choc pour le modèle à sauts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 909.2.2 Choc pour le modèle standard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90

9.3 Résultat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 909.3.1 Chocs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 919.3.2 Montants rachetés entre 2015 et 2020 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91

9.4 Loi globale mise à jour . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 929.4.1 Loi en fonction de l’ancienneté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 929.4.2 Loi mensuelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93

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10 Stratégie indicielle de réassurance 9410.1 Méthodologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9410.2 Résultat : montant racheté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9510.3 Résultat : indice historique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9610.4 Résultat : indice simulé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9710.5 Synthèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99

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Introduction

Un contrat d’assurance vie est un contrat dont les engagements pris par l’assureur et le souscripteur sontconstruits sur la durée de vie humaine. Nous distinguons l’assurance-décès dont le capital est versé au décèset l’assurance-vie dont le capital est versé en cas de survie à l’échéance du contrat. Le marché de l’assurance-vie est principalement composé des contrats d’épargne, de retraite, de prévoyance et d’autres contrats quine représentent qu’une partie faible des encours en France.Un risque est un événement aléatoire qui réduit la capacité de l’assureur à faire face à ses engagements.Concernant l’épargne individuelle, les risques sont variés : risque viager, risque de taux, de change et enparticulier le risque de rachat qui constitue une option cachée du contrat. Par options cachées, nous entendonsles droits accordés aux assurés par la réglementation ou par des clauses contractuelles et destinés à rendrele contrat plus souple et plus attractif. Elles dépendent généralement d’une décision de l’assuré et sontune source de difficulté dans l’évaluation des risques de l’assureur. Le rachat permet au souscripteur dedisposer d’une partie (rachat dit partiel) ou de la totalité de son épargne (rachat dit total) avant l’échéancedu contrat. Ainsi une mauvaise estimation des rachats peut accroître le risque de liquidité et créer desdifficultés à la compagnie d’assurance en termes de gestion actif-passif : une hausse brutale des rachatspourrait par exemple occasionner la vente d’actifs à perte. Le rachat total met aussi fin aux contrats : lesfrais de gestion ne sont alors plus prélevés. Dans un premier temps, les pénalités de rachat ou des avantagesfiscaux moindres permettent déjà de limiter les rachats et réduisent donc le risque.Cette importance du risque de rachat pour les compagnies explique que les actuaires modélisent le rachat.Nous pouvons alors théoriquement distinguer les rachats conjoncturels, qui dépendent de la conjonctureéconomique et du rendement, des rachats structurels, qui dépendent des caractéristiques des contrats et desassurés. Généralement les raisons du rachat sont inconnues de l’assureur.L’intérêt pour les rachats en assurance-vie s’est accru avec la crise de la dette. Une hausse des taux de rachatpeut en effet impacter la solvabilité de la compagnie. C’est pourquoi le risque de rachat est aussi pris encompte par la réglementation. Le nouveau cadre réglementaire Solvabilité II fait par exemple intervenir leslois de rachat calibrées par les compagnies dans le calcul des provisions best estimate et dans le calcul decertains modules du Solvency Capital Requirement. L’évaluation du besoin de solvabilité de la compagniefait aussi intervenir l’évaluation interne des risques et de la solvabilité (ORSA). Cette évaluation nécessited’étudier l’évolution naturelle du risque (ou tendance) et les dérives qui correspondent à des situation hors-norme durant lesquels la sinistralité augmente et s’éloigne des prévisions. Les autorités de contrôle proposentchaque année des stress-tests correspondants à des scénarios déterminés, par exemple un ouragan aux Etats-Unis. Dans le cadre de l’ORSA, il peut alors être intéressant d’établir un catalogue de scénarios adversespropres au portefeuille de la compagnie et probables à l’avenir puis de mesurer leur impact sur la sinistralité.Du 1er octobre 2015 au 30 septembre 2016, au sein de la Direction Technique Grope (DTG) de CNPAssurance (Service de Recherche et Développement en Actuariat), sous la tutelle de Mme NDOYE, j’aiétudié plusieurs approches de modélisation du risque de rachat total en rapprochant la vision initiale à lavision suite à des chocs. En effet, nous observons dans notre portefeuille des dérives de la sinistralité, parexemple dues à la crise financière de 2008, que le modèle initial n’estime pas correctement. Nous décidonsalors d’estimer la tendance du risque de rachat total et de lui ajouter une composante relative à de fortesruptures de tendance, correspondant à des scénarios adverses probables que nous définissons.

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Après avoir présenté le contexte de l’étude et la base de données utilisée, nous estimons dans le troisièmechapitre une première loi de rachat total pour les hypothèses de passif. Dans le chapitre suivant, nousconstatons qu’elle ne correspond pas au scénario central et qu’il est nécessaire de modéliser les pics observésdans le passé.Il s’agit donc de modéliser une tendance prospective dans le cinquième chapitre. L’observation de rupturespassées de tendance dans le portefeuille étudié nous conduit à mettre en oeuvre un premier modèle prospectifpour estimer de fortes hausses de la sinistralité. Comme les résultats ne sont pas satisfaisants, nous mettonsen oeuvre dans le septième chapitre un second modèle construit sur des sauts de Poisson. Ce modèle permetd’obtenir des scénarios adverses adaptés au profil de risque du portefeuille. Dans le chapitre suivant, nousmettons en oeuvre des variantes de ce second modèle : elles nous permettent de mettre en lumière différentsavantages et inconvénients du modèle à sauts.Une fois les scénarios adverses modélisés, nous proposons dans le neuvième chapitre une modélisation plusfine de la loi de rachat total utilisée dans les hypothèses de passif. Cela nous permet de mesurer l’impact dechocs dynamiques sur le capital économique et de tester l’efficacité d’une solution de transfert du risque derachat via une couverture indicielle de réassurance.

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1 | Le risque de rachat en assurance-vie :contexte

1.1 Assurance-vie : généralités

Un contrat d’assurance-vie engage l’assureur à payer une rente ou un capital à un certain bénéficiaire encas de décès ou de vie, en contrepartie d’une ou de plusieurs primes versées par le souscripteur. Certainscontrats permettent le versement du capital en cas de vie et décès : nous parlons alors de contrats mixtesvie et décès. Le souscripteur est certain de ne pas verser en vain ses primes : qu’il soit en vie ou décédé àla date prévue au contrat, des capitaux seront versés par l’assureur. Ces contrats stipulent aussi une valeurde rachat : le souscripteur a la possibilité de récupérer une partie ou la totalité des capitaux versés avant ledénouement du contrat.

Contrat et supports

Il existe ensuite différents types de supports pour les contrats d’assurance vie :— Le support euros destiné aux personnes les plus averses au risque. L’assureur garantit en effet le rem-

boursement des primes versées augmentées de la capitalisation mais diminuées des frais des gestion 1.Cette garantie a une contrepartie : le rendement est plutôt faible. D’après la Fédération Françaisedes Assureurs (FFA), le rendement moyen des supports euros valait 2.3% en 2015 après déductiondes prélèvements sociaux. En outre, ces rendements ne cessent de diminuer : par exemple 3.4% en2010 puis 2.8% en 2013. La rémunération de ces supports est issue des placements financiers affectésau contrat sous forme d’un taux d’intérêt constitué d’une part du taux d’intérêt technique, plafonnépar le Code des Assurances et d’autre part d’une participation aux bénéfices que les assureurs sontobligés de verser. Ce support présente alors un effet cliquet : ces intérêts générés à chaque périodesont incorporés au montant de l’épargne et sont ensuite capitalisés. La majorité des assureurs garantitun rendement minimum annuel (intérêt technique et participation aux bénéfices) : nous parlons alorsde taux minimal garanti 2.

— Les supports en unités de compte dont la référence n’est plus l’euro mais l’unité de compte d’un actiffinancier. Un capital est donc investi sur des marchés financiers ou immobiliers, il est ainsi impactépar la variation de la valeur de l’actif sous-jacent : le capital augmente si les marchés boursiers ouimmobiliers de référence évoluent à la hausse. En contre-partie de ce risque financier, le rendementhistorique est à long terme supérieur à celui du support euros. Les actifs financiers en question peuventêtre des parts d’actions, d’obligations etc. En revanche les unités de compte présentent un inconvé-nient : si le marché s’effondre, la valeur du contrat diminue aussi. En effet l’assureur ne s’engage passur la valeur des unités de compte mais sur leur nombre.

Nous parlons alors de contrats mono-supports lorsque les primes sont investies dans une seule catégoried’actifs et de multisupports lorsque les primes sont réparties dans divers supports. Cela permet alors de

1. en moyenne entre 0.4 et 0.8%2. autour de 1.5% en 2014

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constituer un portefeuille diversifié. La plupart des contrats multisupports intègrent un fond en euros ce quipermet de réduire le risque de perte.

L’option de rachat

Les assurés peuvent retirer une partie ou la totalité du capital versé sur le contrat à tout moment avant leterme du contrat. Nous parlons alors de rachat total ou partiel. En principe un contrat peut être racheté àtout moment. Cependant deux conditions doivent être vérifiées :

— le contrat doit être rachetable ce qui n’est pas toujours le cas. La plupart des contrats commercialiséssous l’appellation d’assurance-vie le sont : contrats mixtes vie et décès, contrats en cas de vie as-sortis d’une contre-assurance en cas de décès, contrats de décès vie entière. En revanche les contratstemporaires ne sont pas rachetables avant terme.

— si le bénéficiaire en cas de décès a été désigné après le 18 décembre 2007, le rachat ne peut avoir lieusans son accord.

D’après le Code des Assurances, la provision mathématique constitue la valeur de rachat brute. D’aprèsl’article R331-3 du Code des Assurances, elle est définie comme la différence entre la valeur actuelles desengagements pris par l’assureur et celle des engagements pris par l’assuré. Elle correspond à l’épargne atteintepour des contrats classiques. En regroupant l’ensemble des contrats construits sur un même produit, nouspouvons calculer la provision mathématique d’un produit pour une année donnée.L’article L 331-2 prévoit que la valeur de rachat ou de transfert puisse être diminuée d’une indemnité. Etd’après l’article R 331-5, l’indemnité ne peut dépasser 5% de la provision mathématique du contrat et doitêtre nulle à l’issue d’une période de 10 ans à compter de la date d’effet du contrat. Ainsi il est plus avantageuxde racheter son contrat 10 années au moins après la souscription.

La fiscalité de l’assurance-vie

D’après une étude réalisée par l’Ipsos en janvier 2013 pour la Fédération française des Assureurs (FFA),si l’assurance-vie devenait plus complexe notamment sur le plan fiscal, 47% des détenteurs estiment qu’ilsépargneraient moins ou même plus du tout et 22% rachèteraient leur épargne. Si le taux d’impositionaugmentait simplement, ces pourcentages chuteraient à 42% et à 20%.C’est pourquoi nous présentons ici la fiscalité française de l’assurance-vie qui est avantageuse et qui expliquel’engouement des épargnants pour ces produits d’assurances. Avant toute chose, nous définissons le termede produit : c’est la différence entre les sommes remboursées au souscripteur ou à l’adhérent et le montantdes primes versées (frais et charges compris). En cas de rachat ou de dénouement du contrat avec sortieen capital, les produits sont taxés au titre de l’impôt sur le revenu et les pertes ne sont pas déductibles.L’imposition dépend de l’ancienneté du contrat comme nous pouvons le constater dans le tableau à la pagesuivante. La fiscalité devient avantageuse dès la quatrième ancienneté pour ensuite l’être encore plus à lahuitième. Avant la huitième ancienneté, la fiscalité pourrait désinciter un épargnant à racheter son contrat.Cela n’est plus le cas après.

Tableau 1.1 – Fiscalité de l’assurance-vie en FranceDe 0 à 4 ans De 4 à 8 ans A partir de la 8ème année

Abattement annuel de :- 4 600 epour un célibataire- 9 200 epour un couple marié ou pacsé

Soit Soit Au-delà de cet abattement, soitPrélèvement ForfaitaireLibératoire de 35%

Prélèvement ForfaitaireLibératoire de 15%

Prélèvement ForfaitaireLibératoire de 7,5%

ou ou ouIntégration des produitsdans le revenu imposable

Intégration des produitsdans le revenu imposable

Intégration des produitsdans le revenu imposable

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1.2 Le risque de rachat dans la littérature

La littérature, la réglementation et les compagnies distinguent habituellement deux types de rachat :— Le rachat conjoncturel (ou dynamique) qui est lié aux conditions économiques et financières. Géné-

ralement si la concurrence propose des taux plus avantageux, l’assuré rachète son épargne pour allerla placer chez les concurrences.

— Le rachat structurel qui est lié aux besoins financiers de l’assuré. Même si les conditions lui sontfavorables, un assuré peut avoir besoin de liquidité pour des projets personnels.

— Le rachat exceptionnel qui est une conséquence d’une perte de confiance dans les marchés financiers,par exemple après la faillite de Lehman Brothers.

Depuis les années 90, les comportements de rachats ont été étudiés en raison de la croissance de l’assurance-vie et des résultats ont été obtenus. Généralement, ces résultats doivent être restreints à un type particulierde produits d’assurance-vie ou à un marché précis. Certains résultats peuvent donc se contredire. Nousdistinguons alors quatre axes d’études principaux du risque de rachat :

— Des études probabilistes : le rachat est étudié de façon individuelle. Des probabilités de rachat sontcalculées pour l’ensemble des contrats constituant le portefeuille. C’est par exemple le cas de Kim(2005) qui met en oeuvre une régression logistique pour expliquer le rachat individuel.

— Des études micro-économiques : le rachat est étudié de façon individuelle à l’aide d’espérance d’utilité.C’est par exemple le cas du mémoire de Fauvel et le Prévédic (2007) qui utilise l’espérance d’utilitéde Von Neumann et Morgenstern pour déterminer si le souscripteur préfère contracter un empruntou racheter son contrat.

— Des études financières : le rachat est une option qu’il s’agit de valoriser. C’est par exemple le cas deShen et Huiping (2004) qui modélisent le rachat total comme une option américaine.

— Des études statistiques : le rachat est étudié de façon agrégée. Des taux de rachat sont calculés surdes portefeuilles agrégés. C’est l’approche retenue dans notre étude.

Eling et Kochanski (2012) dressent un tableau de ce qui a été étudié concernant le rachat. Ils divisent alorsla littérature empirique en deux catégories :

— Les travaux sur données agrégées construites sur des variables macro-économiques.— Les travaux sur données individuelles qui proviennent de bases d’assureurs et n’intègrent généra-

lement pas de variables macro-économiques. L’année calendaire est parfois utilisée pour capter lesconditions économiques. Cela correspond à notre approche.

Concernant les travaux sur données agrégées, les auteurs étudient généralement deux thèses concur-rentes :

— Thèse du rendement : les assurés rachètent leur contrat lorsque les taux de rendement sont plus faiblesque les taux de rendement des autres actifs du marché. Cela correspondrait à un rachat conjoncturel.

— Thèse du fond de réserve : les assurés rachètent leur contrat pour affronter un besoin d’argent im-prévu généralement dans un contexte économique et financier désavantageux. Cela correspondrait àun rachat structurel.

En raison de la diversité des produits étudiés, les conclusions tirées par les auteurs divergent. Les travaux lesplus récents qui ont généralement aussi recours à des données individuelles penchent en faveur de l’hypothèsedu fond de réserve. C’est par exemple le cas de Liebenberg et al. (2010) sur des contrats d’assurance-vieaméricains ou d’Inderst et Sirak (2014) sur des contrats d’assurance-vie mixte allemands. Ces derniersmettent en évidence l’impact du taux de chômage. A partir d’une enquête semestrielle auprès des ménagesaméricains détenteurs d’un contrat d’assurance-vie, Fier et Liebenberg (2013) estiment que les jeunes assurésqui subissent un choc de revenu ou de patrimoine ont plus tendance à racheter leur contrat.Au contraire à partir de cette même enquête, Fang et Kung jugent que les chocs sur le revenu ou la santésont plus significatifs lorsque les assurés vieillissent. En étudiant des contrats allemands, Kiesenbauer (2011)

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montrent que les hypothèses de rendement et de réserve sont valables pour les unités de compte mais paspour les contrats de type euros. Il explique alors le rachat par la croissance du PIB mais aussi par desvariables individuelles comme l’ancienneté du contrat ou le canal de distribution. Kuo et al. (2003)montre en revanche que les deux hypothèses sont vérifiées pour les contrats américains sans distinguer lefonds euros des unités de compte.Concernant les travaux sur données individuelles, il s’agit d’étudier l’impact sur le rachat de carac-téristiques du contrat ou des assurés. Ces études mettent généralement en valeur l’ancienneté. Eling etKiensenbauer (2011) qui ont étudié sept types de contrats d’un assureur allemand mettent en évidence unpic de rachat à la première ancienneté puis une baisse continue du taux de rachat. Toutefois Milhaud et al.(2011) montre qu’en présence d’un mécanisme d’incitation fiscale 3, un pic de rachat se produit après la findu dispositif.Le patrimoine des ménages permettrait aussi d’expliquer le rachat. Cependant peu d’auteurs ont accèsaux montants nets du patrimoine. C’est par exemple le cas de Fier et Liebenberg (2013). Milhaud et al.(2011) utilisent par exemple le montant versé sur le contrat d’assurance-vie pour estimer la valeur réelledu patrimoine. Ils montrent alors que les assurés aux contrats de taille intermédiaire ont plus tendance àracheter. En revanche Wylde (2009) montre que les plus petits contrats ont plus tendance à racheter à partird’un portefeuille d’assurances temporaires.D’après Milhaud et al., le genre n’a aucun impact sur le rachat. Cependant Kagraoka (2005), à partir decontrats en annuités d’un assureur japonais, et Eling et Kiesenbauer (2013) ont montré que le taux de rachatféminin est plus faible. En effet les femmes détentrices d’un contrat appartiennent à des milieux plus aiséset donc rachètent moins.L’âge de l’assuré ne fait pas non plus consensus. Nous pouvons l’expliquer par la diversité du traitementde cette variable : âge atteint ou âge à la souscription ? Variable continue ou discrétisée ? Mulholland etFinke (2014) estiment que les décisions de rachat sont prises au moment du départ en retraite. Le plud lesassurés ayant pris leur retraite longtemps auparavant ont moins tendance à racheter. Au contraire, Milhaudet al. obtiennent une corrélation positive entre le taux de rachat et l’âge des assurés. Eling et Kiesenbaueur(2013) obtiennent des résultats différents : le taux de croît jusque 26 ans puis stagne pour ensuite augmenterà partir de 40 ans et enfin à nouveau décroître. La FFSA et le GEMA ont quant à eux montré en 2013 quele taux de rachat des contrats d’assurance-vie augmente jusque 35 ans puis décroît jusque 90 ans. D’aprèsune étude d’Inderst et Sirak (2014) menée sur un panel de consommateurs allemands, l’âge de l’assuré n’apas d’impact dès lors que le revenu, le patrimoine et l’ancienneté du contrat ont été pris en compte.Finalement les différentes études effectuées autour du risque de rachat ont mis en avant différents risquespour expliquer le rachat conjoncturel :

— Environnement économique et financier : état des marchés financiers, inflation, croissance, chômage.— Environnement concurrentiel : spread de taux entre le taux servi par la compagnie et le taux servi

par la concurrence, lancement de nouveaux produits, campagne promotionnelle— Évolution de la législation, fiscale entre autre.

et le rachat structurel :— Caractéristiques de l’assuré : âge, richesse, état de santé, sexe etc.— Caractéristiques du contrat : ancienneté, fiscalité, support (euros ou unités de compte), montant et

fréquence des versements, pénalités de rachat, options et garanties proposées.— Caractéristiques de la compagnie : réputation, taille, structure juridique, réseaux de distribution.

Nous pouvons constater que les résultats des différentes études menées sont très variés et peuvent à premièrevue se contredire en raison de la diversité des produits et des marchés.

3. Comme c’est le cas en France

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1.3 Contexte réglementaire

Les Etats et la Commission Européenne contrôle l’activité d’assurance afin de réduire la probabilité deruine des compagnies. La directive Solvabilité II qui encadre la solvabilité des compagnies d’assurance estentrée en vigueur le 1er janvier 2016. Les impacts de la directive Solvabilité II sont mesurés par l’EuropeanInsurance and Occupational Pensions Authority et l’Autorité de Contrôle Prudentielle dans les QuantitativeImpact Studies (étude QIS), la dernière disponible étant la 5. Par solvabilité, nous entendons la capacitéd’une entreprise quelconque à honorer ses engagements à tout moment.

1.3.1 Solvabilité II : généralités

En raison de l’inversion du cycle de production propre au secteur de l’assurance, les engagements desassureurs sont probables et non certains. L’assureur doit donc modéliser ses engagements et en déduire unemarge lui permettant d’assurer sa solvabilité. Sous Solvabilité I, cette marge de solvabilité était réglementaireet forfaitaire. Sous Solvabilité II, la marge de solvabilité d’une entreprise est propre aux risques qu’elle subit.Solvabilité II propose une vision particulière du bilan de la compagnie suivante que nous présentons ci-dessousde manière schématique :

Graphique 1.1 – Solvabilité II : vision schématique du bilan

La marge de solvabilité évoquée précédemment correspond aux fonds propres.La Directive Solvabilité II s’articule autour de trois piliers :

— Le Pilier I constitué d’exigences quantitatives relatives au bilan ci-dessus :— Les fonds propres doivent être supérieurs au Solvency Capital Requirement (SCR) dont les moda-

lités de calcul sont précisées. Le SCR correspond au capital nécessaire pour limiter la probabilitéde ruine de l’assureur à 0,5% pour un horizon d’un an. Il existe aussi des fonds propres auxiliairesqui sont hors-bilan et peuvent être utilisés pour absorber certaines pertes.

— Le best estimate doit prendre en compte la totalité des options et garanties proposées par lescontrats, en particulier l’option de rachat. Il repose en particulier sur la valorisation de fluxfuturs. La marge de risque correspond à un coût du capital permettant de couvrir les SCR suc-cessifs.

— Les actifs doivent être évalués en valeur de marché et non plus en valeur comptable.— Le Pilier II constitué d’exigences qualitatives : gouvernance, gestion des risques (ou Risk Manage-

ment), contrôle des modèles internes, dispositifs de reporting et d’alerte, supervision par les autoritésde tutelle. Ce pilier est à la fois qualitatif au sens où il s’agit de gérer et déclarer les risques etquantitatif au sens où il s’agit de déceler et de mesurer les risques. En particulier, les compagniesd’assurances doivent mettre en place l’évaluation interne des risques et de la solvabilité, plus cou-ramment appelée ORSA (Own Risk and Solvability Assessment). Cela regroupe l’ensemble des outilsd’analyse décisionnelle et stratégique utilisés pour évaluer le besoin de solvabilité lié au profil de

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risque spécifique à notre compagnie. En particulier cette dernière doit pouvoir identifier, mesurer etgérer les éléments pouvant modifier sa solvabilité.

— Le Pilier III concerne la publication de l’information : exigences de publication d’information (trans-parence et discipline de marché), rapport annuel sur la solvabilité et la situation financière. Il s’agitici d’harmoniser la communication vis-à-vis des assurés et des autorités de contrôle.

Nous nous intéressons ici en particulier au calcul du Solvency Capital Requirement (SCR). Le SCR finals’écrit : SCR = BSCR+Op−Adj ou :

— Le calcul du BSCR repose sur une forme modulaire qui permet de prendre en compte les différentsrisques quantifiables auxquels la compagnie est soumise. La diversification de ces derniers risquesest prise en compte par l’agrégation des SCR des différents modules (Vie, Santé etc.) à l’aide d’unematrice de corrélation.

— Op correspond au besoin de capital au titre du risque opérationnel.— Adj correspond au gain de capital permis par la participation aux bénéfices et les impôts différés.

Graphique 1.2 – Solvabilité II : calcul du SCR

Les modules sont eux-mêmes constitués de différents sous-modules. Par exemple, le module Vie contientles sous-modules mortalité, longévité et rachat. Deux approches sont possibles pour calculer le SCR d’unsous-module :

— Une approche par scénario. Des chocs instantanés sont appliqués à l’actif et au passif au niveau desprovisions best estimate. Le SCR correspondant est alors mesurée par la variation observée des fondspropres.

— Une approche par formule fermée.

1.3.2 Le risque de rachat dans le module vie

Solvabilité II définit le taux de rachat comme la somme du taux de rachat structurel et du taux de rachatconjoncturel. La modélisation du rachat structurel se fait à l’aide de lois d’expérience si les données passéespeuvent être utilisées. Cette modélisation peut dépendre de nombreuses variables comme l’ancienneté fiscaleou l’âge de souscription. Cependant aucune n’est imposée par la réglementation.Les rachats conjoncturels sont généralement modélisés dans un premier temps par une fonction en escalierqui dépend seulement de la différence entre le taux effectivement servi et un taux qui reflète l’environnementéconomique et financier, souvent dénommé taux espéré. Si le taux servi est inférieur au taux espéré, cesderniers rachèteront certainement plus l’année suivante que ce que la loi structurelle prévoit. Au contraire,si le taux servi est supérieur au taux espéré, les rachats seront plus faibles que prévus. En raison de la naturedes rachats conjoncturels, une loi d’expérience n’est pas utilisable. QIS 5 propose deux lois plafonds : la pre-mière quantifie le minimum de rachats conjoncturels, la seconde le maximum. Les assureurs ont simplementl’obligation d’utiliser une loi comprise entre ce minimum et ce maximum.

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Nous introduisons ici RC, le taux de rachat conjoncturel, TA le taux de rendement espéré par l’assuré et TRle taux réel, c’est-à-dire le taux effectivement servi. L’étude QIS5 propose alors la loi suivante :

RC = RCmax si TR − TA < α

RC = RCmax ∗ TR−TA−βα−β si α < TR − TA < β

RC = 0 si β < TR − TA < γ

RC = RCmin ∗ TR−TA−γδ−γ si γ < TR − TA < δ

RC = RCmin si δ < TR − TAoù :

— α correspond au seuil au-dessus duquel le taux conjoncturel est constant égal au taux maximal,RCmax. L’écart entre taux servi et taux espéré n’est donc plus explicatif.

— β correspond au seuil d’indifférence à la baisse du taux servi, γ à la hausse. Entre ces deux seuils, letaux conjoncturel est nul.

— δ correspond au seuil en-dessous duquel le taux conjoncturel est constant égal au taux minimal,RCmin. L’écart entre taux servi et taux espéré n’est donc plus explicatif.

Cette fonction est affine par morceaux et décroît avec l’écart entre les taux servis et espérés. Les valeursproposées pour les niveaux maximal et minimal sont présentées dans le tableau suivant. La dernière colonnecorrespond à un choix possible de paramètres, utilisé pour le graphique ci-dessous. Les plafonds minimauxet maximaux y sont aussi représentés.

Tableau 1.2 – QIS 5 : modélisation des rachats conjoncturelsParamètre Plafond maximal Plafond minimal Choix possible

α -4% -6% -4%β 0% -2% -1%γ 1% 1% 1%δ 4% 2% 3%

RCmin -4% -6% -5%RCmax 40% 20% 30%

Graphique 1.3 – Solvabilité II : loi de rachats conjoncturels

Le taux conjoncturel pouvant être négatif et la somme du taux structurel et du taux conjoncturel pouvantêtre théoriquement supérieure à 1, le taux de rachat total global est défini comme :

RT = min(max(0;RS +RC); 1) (1.1)

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Le SCR pour le risque de rachat est défini par le maximum des variations suivantes de capital, chacuncorrespondant à un choc particulier :

— Lapsedown : une baisse instantanée et permanente de 50% du taux d’exercice des options.— Lapseup : une hausse instantanée et permanente de 50% du taux d’exercice des options.— Lapsemass : un renoncement instantané de 40% à 70% des contrats et une baisse de 40% du nombre

de contrats pour lesquels une réassurance est prévue.

Les chocs à la baisse et à la hausse sont appliqués si le choc provoque une hausse des provisions bestestimate pour un contrat. Le choc massif doit être appliqué aux contrats pour lesquels la valeur de rachatest supérieure aux provisions best estimate.L’European Insurance and Occupational Pensions Authority (EIOPA) qui regroupe l’ensemble des autoritésde contrôle européenne propose chaque année des scénarios de stress tests. Une partie des scénarios sontcertes des catastrophes naturelles mais d’autres concernent le risque de rachat en assurance-vie. En 2015,l’EIOPA proposait deux vagues de rachats massifs : une première à 20% des encours, une seconde à 35%.Nous pouvons constater que les valeurs de ces différents chocs sont ad hoc : elles peuvent donc ne pas êtreadaptées au portefeuille étudié. De plus la loi conjoncturelle présentée précédemment dépend d’un tauxespéré. Ce dernier est inconnu même s’il peut être estimé à l’aide des taux servis par la concurrence. L’undes objectifs de notre étude est de déterminer des chocs plus adaptés au produit d’épargneétudié.Dans cette partie, nous avons constaté que Solvabilité II encadre la modélisation de l’actif comme du passif.En particulier le rachat total fait partie des options cachées du contrat qui doivent être modélisées aupassif. Ce risque a aussi des implications à l’actif. En effet la compagnie doit disposer d’actifs suffisammentliquides en cas de vague de rachats massifs. Les actifs pourraient alors être vendus à perte. Malgré tout,nous n’adoptons pas ce point de vue dans notre étude : l’actif de la compagnie n’est pas modélisé.

1.4 Évolution d’un risque et risk management

Le second pilier de Solvabilité II insiste sur la connaissance quantitative et qualitative des risques auxquelsla compagnie est soumise. Ces connaissances doivent avoir des implications concrètes en termes de RiskManagement.Une question fréquente que peuvent se poser les gestionnaires du risque est la suivante : sommes-nous enmesure d’anticiper les ruptures de tendance futures dans un environnement en pleine mutation et d’intégrerces mesures d’anticipation lorsque nous évaluons notre besoin en capital ?Pour répondre à cette question, il est important tout d’abord de procéder à l’identification des risques.D’où l’importance de procéder comme suit :

— construire une base qualitative et quantitative qui regroupe l’ensemble des caractéristiques des phéno-mènes de ruptures constatées dans le passé sur le portefeuille étudié. Cela nous permet de constituerun panel de scénarios passés.

— recenser les scénarios de ruptures probables à l’avenir suite à des entretiens avec des actuaires d’ho-rizon divers.

— utiliser un processus qui permet de dynamiser d’éventuelles modélisations stochastiques en combinantles scénarios passés et ceux à dires d’experts.

— évaluer des impacts de notre approche sur des indicateurs de risque et de performance.La littérature distingue généralement plusieurs types de risque : biométriques, comportementaux et finan-ciers. Le rachat total fait partie des risques comportementaux. Cependant lorsque plusieurs événements ontlieu simultanément, il peut être difficile d’identifier la part associée à chaque événement sur la déformationdu facteur de risque (ici le taux de rachat). L’étude que nous allons mener ne prend pas en compte leseffets de corrélation des scénarios : par exemple, une baisse des actions sur le marché (risque financier) peutprovoquer une hausse des rachats (risque comportemental).

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Les risques biométriques et comportementaux sont caractérisés par la combinaison de deux phénomènes :la tendance et la dérive. La tendance est elle-même constituée de trois composantes :

— La composante prévue qui traduit l’évolution estimée de la vision que la compagnie adu risque étudié.

— L’erreur d’estimation commise dans l’estimation des paramètres du modèle de prévision.— L’erreur de processus qui est liée à la variabilité des variables aléatoires composant le modèle.

Par exemple, la baisse générale des taux de mortalité liée à l’amélioration des conditions de vie est unexemple de tendance.La dérive (ou rupture) de tendance peut être définie comme une situation hors-norme pouvantsurvenir de manière temporaire ou permanente et entraîner une démarcation nette entrel’observé et le prévu. Cette situation n’est pas obligatoirement précédé d’une catastrophe mais peut êtreconsécutive à l’arrivée d’un nouvel état du monde (nouvelle réglementation par exemple). La crise bancaire etfinancière de l’automne 2008, la crise des pays du Sud de la zone euro (Grèce, Espagne, Portugal, Italie) sontdes exemples de dérives liées à une crise. Une mauvaise application des conditions générales d’un contrat,l’apparition ou la guérison d’une maladie redoutée sont des exemples de dérives que nous ne pouvons pasimputer à une crise. Nous pouvons parler de dérives lorsque nous constatons un écart important entre leconstaté et une limite de risques établie (borne d’un intervalle de confiance par exemple).Les compagnies d’assurance disposent généralement de cartographies des risques qui distinguent les risquesendogènes des risques exogènes.Concernant les risques endogènes, les analyses qualitatives et quantitatives des ruptures de tendance desfacteurs de risque nécessitent une analyse qui regroupe diverses compétences de notre compagnie : actua-riat, équipes commerciales, administrateurs de données. Malgré tout, il est possible que les phénomènes deruptures de tendance ne soient pas documentés. De plus certains événements passés et catalogués peuventmaintenant avoir une probabilité infinitésimale de se reproduire puisque les attitudes face à ces phénomènesont évolué et permis de réduire ou d’annuler les effets associés au risque. Nous sommes donc en face d’unmauvais apprentissage du risque.Les volatilités historiques des différents facteurs de risque peuvent être pro-cycliques et/ou mal adaptées aurisque réellement encouru :

— Elles peuvent être trop faibles ce qui conduit à une sous-estimation du risque.— Elles peuvent être trop élevées, principalement après un choc ou une catastrophe, ce qui conduit à

une sur-estimation.— Elles peuvent être entachées d’erreur liées aux données, aux changement de périmètres.

Par ailleurs, les modèles font généralement une hypothèse de normalité des résidus.L’évolution des risques fait également émerger une problématique d’adaptation rapide en termes de confor-mité des hypothèses du passif. En effet, il n’est pas souhaitable de conserver des méthodes d’estimationconstruites sur les x dernières années si ces dernières contiennent des périodes de stress ou si nous pensonsque la sinistralité évoluera de manière différente à court terme. Nous sommes alors en face d’un risque demauvais estimation de l’évolution future du risque impliquant une non-consistance des scénarios ORSA etune non-conformité des hypothèses centrales de passif.Concernant les risques exogènes, nous devons garder à l’esprit que les risques couverts par les com-pagnies d’assurance sont constamment soumis à des évolutions juridiques, réglementaires, contractuelles,socio-économiques ou encore fiscales. Nous sommes donc en face d’un risque de mauvais appréhension desévolutions socio-économiques et réglementaires.Afin d’améliorer le suivi du risque de rachat de la compagnie, il peut être nécessaire d’établir un cataloguede suivi des ruptures de tendance observées dans le passé et disponibles dans nos bases. Afin d’établir desscénarios ORSA pertinents, ce catalogue peut être complété par des ruptures de tendance potentielles etfutures en intégrant des scénarios à dire d’experts. Ces scénarios peuvent être de trois natures :

— les scénarios de ruptures déjà observés avec les mêmes caractéristiques,— les scénarios de ruptures déjà observés avec des caractéristiques modifiées,— les nouveaux scénarios, jamais observés durant le passé mais probables à l’avenir.

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Il est important que ces scénarios décrivant l’évolution future soient adaptés aux profils de risques duportefeuille.L’évaluation propre des risques nécessite de pouvoir distinguer la nature des ruptures de tendance et leurméthode de quantification. Lorsqu’un événement probable impacte fortement le niveau d’un facteur derisque (tendance et erreurs), nous pouvons juger nécessaire l’intégration d’un saut au quantile considéré dufacteur en question : c’est le principe du processus à sauts. Ce procédé consiste à simuler le facteur de risqueen intégrant en plus de l’erreur d’estimation et de processus un troisième type de composante relative àune dérive forte à l’aide d’un modèle de Poisson. Il est ainsi important de juger si cette dérive forte peutêtre captée par le quantile fixé du facteur de risque dans le cadre de l’ORSA. Sinon l’intégration de cettetroisième composante peut limiter le risque de non consistance du capital économique en impliquant l’ajoutd’un capital add-on.Concernant les prévisions pour les prochaines années, le contexte de taux bas actuel et l’érosion des ren-dements assurantiels pourraient impliquer un risque de rachat massif en cas de remontée brutale des taux.Ce risque pourrait être accentué par la digitalisation de l’offre bancaire et assurantielle : il est plus facilede réagir aux mouvements brusques des marchés financiers. Le consommateur est en effet hyperconnecté etpeut donc changer radicalement face à de nouvelles alternatives. La compétitivité sur les unités de comptepourrait donc s’accroître. Une élection présidentielle pourrait aussi remettre en cause l’exception fiscale del’assurance-vie. L’article 21 bis de la loi dite Sapin II 4 modifie aussi le cadre législatif relatif à l’assurance-vieet pourrait impacter les épargnants qui adapteront leur comportement en conséquence.

1.5 Couverture d’un risque et réassurance

La gestion des risques implique de déterminer des solutions pour couvrir les risques subis par la compagnie.La réassurance constitue alors une solution possible : elle peut permettre le transfert d’un risque particulierafin de diminuer la volatilité du résultat.

1.5.1 Généralités

Différentes raisons peuvent expliquer le choix de la réassurance par un assureur-vie. En effet elle permet de :— Développer de nouveaux produits. En effet le développement est coûteux et les premières années,

l’assureur a de nombreux frais à couvrir. Les investissements sont alors allégés.— Lisser le résultat. Le résultat de l’assureur est moins volatile une fois les risques les plus élevés cédés

à un réassureur.

En outre, la réassurance permet de réduire le montant de capital réglementaire à détenir. Ainsisi le coût de la réassurance est plus faible que le gain engendré par la réduction de fonds propres, il estthéoriquement préférable de se réassurer.Il existe trois modes de réassurance :

— La réassurance facultative : le traité concerne un risque précis déjà analysé par l’assureur qui transmetl’analyse aux réassureurs potentiels. L’assureur propose alors une couverture qui peut être acceptéepartiellement ou totalement par un ou plusieurs réassureurs.

— La réassurance facultative-obligatoire : il s’agit de couvrir les risques d’une catégorie donnée pendantune période donnée. Dès que l’assureur est confronté à un de ces risques, il peut en céder une partieau réassureur. Ainsi pour l’assureur, le traité reste facultatif. En revanche, le réassureur est tenud’accepter la cession.

4. Loi no 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation dela vie économique

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— La réassurance obligatoire : l’assureur s’engage à céder certains risques relevant d’une catégorie don-née durant une période donnée. Le réassureur est tenu d’accepter toutes les cessions. C’est le modede réassurance le plus utilisé.

Généralement la littérature et les compagnies d’assurance distinguent deux types de couverture de réassu-rance. En réassurance proportionnelle, l’assureur et le réassureur se répartissent primes et sinistres selon ununique ratio fixé contractuellement. C’est donc un transfert du risque. Les traités qui ne vérifient pas ceprincipe constituent la réassurance non-proportionnelle. En pratique un plan de réassurance stipule plusieurstraités : leur ordre d’application n’est alors pas neutre.

1.5.2 Réassurance indicielle

Un troisième type de traité de réassurance existe : les couvertures indicielles. Elle concerne particulièrementles risques catastrophe.La couverture indicielle Catastrophe offre la garantie d’une indemnisation en fonction de la valeur d’unindice à maturité défini à l’avance dans le contrat de réassurance, par exemple le taux de mortalité. Il s’agitd’une protection de réassurance qui repose sur le transfert du risque lié à la corrélation entre la sinistralitéd’un portefeuille d’assurance et les variations exceptionnelles de la sinistralité de la population de référence.Elle vise à offrir aux acteurs du marché de l’assurance une protection contre des évènements naturels catas-trophiques, évènements rares mais caractérisés par une grande intensité.La mise en place d’une couverture indicielle Cat s’articule autour de plusieurs grands axes :

— Le choix du type de données utilisées : internes ou externes.— La définition des modalités de calcul de l’indice et de l’indemnisation monétaire qui en découle. Il

s’agit de déterminer quelle variable permet de représenter de façon fidèle et adéquate l’occurrence etl’ampleur du péril contre lequel l’assureur souhaite se doter d’une protection de réassurance.

— La période de calcul de cet indice : annuel ou infra-annuel.

Il est possible de concevoir une grande variété de modes de construction des indices, dépendant de lacatastrophe dont on veut se couvrir. Dans le cas de la canicule, cela peut être le taux de surmortalité de lapopulation nationale ou de la population assurée même.

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2 | Analyse exploratoire du portefeuilleétudié

Dans ce chapitre, nous présentons le portefeuille utilisé pour l’étude. En particulier, nous exposons despremières observations sur le taux de rachat, facteur de risque étudié dans la suite.

2.1 Données disponibles

Nous étudions plus particulièrement un produit d’épargne individuelle multisupport et destiné au grandpublic commercialisé à partir de septembre 2001. Ce produit propose une dizaine de supports différents :

— Les supports permanents en euros et en unités de compte. Ils sont commercialisés sans limitation dedurée et le versement de primes est possible à tout moment.

— Les supports temporaires en unités de compte. Ils sont commercialisés pendant une période déterminéehors de laquelle les versements ne sont pas possibles.

Nous reprenons cette distinction entre unités de compte permanentes et unités de compte temporaires dansla suite du document.Au départ, nous disposons de trois bases différentes :

— Une base des assurés avec leur sexe, leur date de naissance, les contrats qu’ils possèdent et les produitsrattachés à ces contrats.

— Une base composée des contrats avec la date de souscription, l’état du contrat à la date d’extraction 1

(sorti ou non) et l’éventuelle cause de sortie (rachat total, décès, renonciation).— Une base avec les situations financières des fonds (euros, unités de compte permanentes, unités de

compte temporaires) de chaque contrat. Par situation financière, nous entendons la provision mathé-matique au 31 décembre de chaque année et les éventuels montants de rachat total, de rachat partiel,de versements et d’arbitrages entre 2009 et 2015. Ces données ne sont pas disponibles pour les annéesprécédentes.

La fusion de ces trois tables donne une base de données où chaque ligne est définie par un numéro decontrat et un support. Nous disposons de plusieurs millions de contrats. La provision mathématique endécembre 2015 se répartir de la manière suivante : 78.1% pour le support euro, 5.4% pour les unités decompte permanentes et 16.5% pour les unités de compte temporaires.Nous vérifions ensuite l’exhaustivité et l’exactitude de la base de données. Par exhaustivité, nous entendonsl’absence de données manquantes concernant le produit, le numéro du contrat, le fond, la date de souscription,l’état de sortie, l’éventuelle date de sortie (lorsqu’une sortie est indiquée), l’éventuelle date de décès (lorsqu’undécès est indiqué), le montant racheté (lorsqu’un rachat total est indiqué entre 2009 et 2015), l’identifiantdu souscripteur, sa date de naissance, son sexe. Nous considérons aussi le cas où une date de sortie estrenseignée alors que le contrat n’est pas sorti. Nous dénombrons alors les lignes déficientes et le rapportonsau nombre de ligne total pour obtenir le critère d’exhaustivité.

1. L’extraction a eu lieu en mars

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Nous mesurons ensuite l’exactitude des données selon quatre grands axes :— Les dates. La souscription ou le décès avant la naissance, le décès avant la souscription, la sortie avant

la naissance, la sortie avant la souscription sont considérées comme des anomalies.— Les sorties. Les mouvements financiers (rachat partiel, versement, arbitrage) renseignés les années

qui ont suivi une sortie constituent des anomalies.— Le rachat total. Un contrat non sorti à montant de rachat total renseigné constitue une anomalie.— La provision mathématique. Une provision mathématique renseignée le 31 décembre de l’année qui

précède la souscription constitue une anomalie. Nous pouvons l’expliquer par des souscriptions quiont lieu à la fin du mois de décembre : il est possible que la date de souscription renseignée soit fausse.

Nous obtenons alors les résultats suivants, tout d’abord pour l’ensemble de la base de données et ensuitepar type de fonds :

Tous supports confondus Euro UC permanentes UC temporairesExhaustivité 0,68% 0,44% 0,62% 1,73%Exactitude 0,47% 0,57% 0,34% 0,17%dont date 65,32% 65,39% 67,05% 60,80%dont sortie 35,55% 35,67% 33,22% 38,77%dont rachat 0,03% 0,03% 0,03% 0,00%dont pm 0,43% 0,39% 0,48% 0,87%

Tableau 2.1 – Critères d’exhaustivité et d’exactitude : pourcentage d’erreurs et répartition des erreursAide à la lecture : tous supports confondus, l’erreur d’exactitude représentent 0.47% des contrats. 65.32%

de cette erreur est due à des incohérences de date.

Nous remarquons alors que les dates constituent la principale source d’inexactitude. Les résultats sonttoutefois satisfaisants puisque les taux d’erreurs sont généralement inférieurs à 1%.

2.2 Description des assurés et des contrats

78% des contrats étaient encore actifs le 31 décembre 2015. Parmi les causes de sortie, CNP distingue :— le rachat total qui représente 71% des sorties.— le décès du souscripteur qui en représente 24%.— la renonciation qui en représente 5%.

Les souscripteurs ne sont pas particulièrement âgés et souscrivent généralement pendant leur vie active, entre25 et 60 ans. Beaucoup d’assurés souscrivent leur contrat pendant la cinquantaine, sans doute pour préparerleu retraite. La souscription chute à partir de 60 ans. Parmi les contrats présents le 31 décembre 2015, nousobservons une forte baisse à partir de 70 ans. Le graphique 3.2 à la page suivante présente la distribution desâges lors du rachat total ou du décès. Jusqu’à 65 ans, le rachat constitue la cause de sortie majoritaire. Latendance s’inverse ensuite. Les rachats sont moins fréquents avant 18 ans. De nombreux assurés rachètentleurs contrats entre 25 et 35 ans : nous pouvons penser que le début de la vie active nécessite d’importantsinvestissements, par exemple l’achat d’un logement. La distribution décroît ensuite jusque la soixantaine :le départ en retraite est propice au rachat. Nous avons en effet précédemment remarqué que la préparationde la retraite est l’une des causes principales de souscription d’un contrat d’assurance-vie.

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Table 3.2 Distribution d’âgesLe produit étudié étant multi-support, la provision mathématique est répartie entre les trois types de sup-ports que nous avons présentés précédemment : le support euro représente 78,1% de la provision mathéma-tique contre 5,4% pour les UC permanentes et 16,5% pour les UC temporaires. Cette répartition est valablepour toutes les anciennetés du contrat même si parmi les contrats qui ont au 5 ans au 31 décembre 2015,la part d’UC temporaire augmente jusqu’à 30% contre 68% pour le support euro. Depuis 2013, le rachattotal représente un peu plus de 0,8% de la provision mathématique en fin d’année. A partir d’une prévisionde la provision mathématique au 31 décembre d’une certaine année, nous pourrions en déduire un ordre degrandeur du rachat total.

2.3 Premières observations sur le rachat

2.3.1 Nombres et montants

Pour considérer le rachat total de manière agrégée, deux points de vue existent : considérer le nombre decontrats rachetés ou considérer les montants rachetés, c’est-à-dire la provision mathématique des contrats.Le second point de vue paraît plus juste. Cependant les montants de rachat ne sont pas toujours disponiblesce qui peut nous contraindre à une modélisation en nombres.

Graphique 2.1 – Distribution du nombre de rachats en fonction du montant racheté

Le graphique précédent présente la distribution du nombres de rachats en fonction des montants rachetés.Nous constatons qu’il n’est pas équivalent de considérer les rachats totaux en nombre et en montant. Le

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montant racheté de la moitié des contrats est inférieur à 1000 e : nous ne pouvons donc pas considérer quetous les rachats se valent en termes de montants. Il ne s’agit donc pas simplement de prévoir l’occurrencedu rachat total mais aussi le montant. Prévoir que 1 000 rachats auront lieu donnent peu d’indicationssur les montants en jeu pour la compagnie. Ce graphique montre aussi que les assurés dont l’épargne estrelativement faible ont plus tendance à racheter leur contrat. Cette remarque est en adéquation avec lerésultat de l’étude de Wylde (2009) exposé précédemment selon laquelle les plus petits contrats sont le plusrachetés.

2.3.2 Définition du facteur de risque : le taux de rachat

Dans la suite, nous cherchons à identifier des variables discriminantes pour notre facteur de risque. Avant dedétailler les différents variables explicatives, nous définissons ici notre facteur de risque : le taux de rachat.Nous cherchons à estimer le taux de rachat pour une année particulière N de l’historique, soit entre 2010 et2015. Il est naturellement défini par :

Taux_rachatN = RachatNExpositionN

(2.1)

où :— RachatN est le montant racheté au cours de l’année N .— ExpositionN est l’exposition au risque de rachat au cours de l’année N , c’est-à-dire la valeur soumise

au risque de rachat pendant l’année.

Pour calculer l’exposition, nous considérons l’ensemble des contrats présents durant l’année N , c’est-à-direles contrats souscrits avant le 01/01/N et non sortis à cette date et les contrats souscrits durant l’année N .Ces contrats sont soumis au risque de rachat durant l’année N . En particulier, pour les contrats souscritsdurant l’année, nous considérons qu’ils ont été exposés pendant la moitié de l’année ce qui constitue uneapproximation. L’exposition s’écrit comme une approximation de l’exposition réelle au milieu de l’année N :

ExpositionN = 12(PM31/12/N−1 + PM31/12/N +RachatN ) (2.2)

Ce calcul d’exposition a quelques implications :— L’exposition pour l’année 2009 n’est pas calculable puisque nous ne disposons pas de la provision

mathématique au 31 décembre 2008. Nous pourrions tenter de l’estimer à partir des opérations ayantlieu durant l’année 2009 mais cela ajouterait un aléa.

— Le calcul de l’exposition n’est pas exact. Nous illustrons ce fait par quelques exemples :— Soit un contrat dont la provision mathématique vaut 100 le 31/12/N − 1. Un versement de 100

est effectué le 2 mars. En simplifiant, la provision mathématique au 31/12/N vaut alors 200.Au 30 juin, l’exposition réelle vaut alors 200 alors que l’exposition estimée vaut 150. D’où unesous-estimation.

— Soit un contrat dont la provision mathématique vaut 100 le 31/12/N − 1. Un rachat partiel de 50est effectué le 2 mars. La provision mathématique au 31/12/N vaut alors 50, l’exposition réelle50, l’exposition estimée 75. D’où une sur-estimation.

— Considérons un portefeuille constitué de deux contrats : leur provision mathématique au 31/12/N−1 vaut 100. Le 1er mars, un versement de 20 est effectué sur le premier contrat et un autre de60 sur le second. Le premier contrat est racheté le 1er septembre. L’exposition vaut alors 280alors que notre estimation nous donne une exposition valant 240. D’où une sous-estimation del’exposition et donc une sur-estimation du taux de rachat.

— Soit un contrat dont la provision mathématique vaut 100 le 31/12/N−1. D’après les informationscontenues dans notre base de données, le contrat n’est pas sorti le 31/12/N mais la PM n’est pasrenseignée. L’exposition vaut alors 50 : elle est très certainement biaisée.

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Ces exemples permettent de constater que notre estimateur ne gère pas optimalement les censures et tronca-tures. D’autres estimateurs les prennent plus efficacement en compte. Par exemple, l’estimateur de Kaplan-Meier. Cependant, il nécessite de connaître la provision mathématique à tout instant : nous ne pouvons doncpas l’utiliser.

2.3.3 Taux de rachat et variables explicatives

Après avoir défini le facteur de risque, nous le calculons en fonction de modalités prises par certaines variablesdisponibles, par exemple le genre. Nous ne prenons pas en compte les renonciations mais seulement ce quela compagnie a authentifié comme un rachat total lors de fermeture du contrat. Nous ne disposons pas decertaines variables qui, d’après la revue de littérature, pourraient être discriminantes comme le revenu ou lepatrimoine du souscripteur.

Code-support

Le graphique suivant montre que le taux de rachat annuel varie avec le type de support. Nous représentonsaussi le taux global de revalorisation (ou TGR) qui prend en compte le taux minimal garanti, la participationaux bénéfices et les frais de gestion :

Graphique 2.2 – Taux de rachat en fonction du support

Nous remarquons que le taux global de revalorisation a brusquement chuté en 2012 pour ensuite stagner.Nous constatons que le taux de rachat du support euro a augmenté en 2012 alors qu’il stagne ensuite. LeTGR et le taux de rachat du support euro varient en sens inverse ce qui paraît intuitif : un rendement plusfaible incite les assurés à racheter leur contrat.Pour les unités de compte temporaires, le taux de rachat a diminué depuis 2010. Depuis 2013, les taux derachat des unités de compte permanentes stagnent après avoir augmenté entre 2010 et 2012. Nous pourrionsimaginer que les taux de rachat des UC permanents seraient plus élevés en raison de l’incertitude sur lerendement de tels supports. Les taux de rachat des unités de compte temporaires sont cependant bien plusfaibles : en effet puisqu’ils ne durent qu’un temps, nous pouvons penser que les assurés sont plus indulgentsavec leur rendement.

Genre

Tout d’abord, les hommes détiennent 39,85% de la provision mathématique au 31/12/2015. Ensuite, nouspouvons constater que le genre du souscripteur a peu d’impact sur l’évolution annuelle des taux de rachat :

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les deux courbes représentées sur le graphique suivant sont parallèles. Les hommes rachèteraient donc plusque les femmes ce qui correspond aux résultats de Kagroka (2005) et Ching & Kiesenbauer (2013).

Graphique 2.3 – Taux de rachat en fonction du genre

Ancienneté

Précédemment, nous avons constaté que les mécanismes d’incitation fiscale peuvent avoir un impact sur lerachat pour certains portefeuilles. Or en France, la fiscalité de l’assurance-vie dépend de l’ancienneté. Nouspouvons donc nous attendre à une variation du facteur de risque avec cette variable. Au 31 décembre 2015,l’ancienneté moyenne (pondérée par la PM) s’élève à 9,2 ans. Sur tout l’historique, cette ancienneté moyenneaugmente linéairement : aucune rupture n’est observable. De même l’ancienneté moyenne pondérée par lesmontants rachetés augmente linéairement : de 5 ans en 2010 à 9 ans en 2015. Le graphique 2.4 présentel’évolution du taux de rachat en fonction de l’ancienneté du contrat.

Graphique 2.4 – Taux de rachat en fonction de l’ancienneté

Nous constatons que le taux de rachat diminue de façon importante jusque la huitième ancienneté où nousobservons un pic de rachat que nous pouvons attribuer à la fiscalité. Nous avons précédemment vu que lerégime fiscal devient certes plus avantageux à la huitième ancienneté mais une première remise est accordée

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dès la quatrième année. Cette dernière ne semble pas impacter le rachat. Cela correspond au résultat obtenupar Milhaud et al (2013).Nous observons à nouveau un pic de rachat à la dixième ancienneté. En effet le produit étudié est ouvert pour10 ans. 10 après la souscription, lorsque la question de l’avenir du contrat est posée, certains souscripteursdoivent racheter totalement leur épargne. Cela correspond aussi à la fin des pénalités de rachat.Notre produit a été commercialisé en septembre 2001. Ainsi en chaque 31 décembre, la dernière anciennetéobservée (la onzième par exemple en 2012) n’est pas totalement observée. Elle capte alors peut-être autant uneffet saisonnier (l’automne en l’occurrence) qu’un effet dû à l’ancienneté. D’ailleurs, si nous nous intéressonsgraphiquement aux années 2010, 2012 et 2014, nous remarquons à chaque fois une hausse des taux de rachaten la dernière ancienneté (respectivement 9, 10 et 13) contredite les années suivantes. Nous pouvons doncmettre en doute la fiabilité de l’estimation pour la dernière ancienneté.

Age à la souscription et âge au rachat

Le risque de rachat fait partie des risques comportementaux, d’où l’intérêt de l’âge : nous avons précédem-ment constaté que cette variable a souvent été prise en compte dans les études menées sur ce risque. L’âgeà la souscription moyen pondéré par la provision mathématique au 31/12/2015 vaut 56 ans. En 2015, l’âgemoyen au rachat total s’élève à 58 ans : les assurés rachèteraient en moyenne peu avant leur retraite. Nousnous intéressons maintenant à la variation du taux de rachat en fonction de l’âge à la souscription et del’âge atteint en l’année considérée. Pour cela, nous avons effectué des regroupements : avant 30 ans, entre30 et 50 ans, entre 50 et 65 ans et au-delà. Nous pouvons considérer que ces âges représentent des étapesimportantes pour la population : à 30 ans, installation dans la vie active et dans la vie de famille ; à 50 ans,les enfants deviennent adultes et 65 ans correspond au départ en retraite.

Table 3.2 Taux de rachat en fonction de l’âge à la souscription et de l’âge atteintConcernant l’âge à la souscription et dans une moindre mesure l’âge atteint, les 50-65 ans et les plus de 65 ansont des comportements semblables. Nous remarquons aussi que ces deux tranches d’âges sont responsablesdu pic de rachat en 2012 : ce pic est bien moins visible pour les deux autres tranches d’âges. Concernant l’âgeatteint, nous pourrions dire que le taux de rachat stagne depuis 2010 pour les 30-50 ans et pour les moinsde 30 ans. Cela n’est plus le cas si nous considérons l’âge à la souscription : pour les 30-50 ans, le taux derachat diminue depuis 2010 tandis qu’il oscille pour les moins de 30 ans. Concernant l’âge à la souscription,le comportement des 50-65 ans et des plus de 65 ans est semblable.Dans les deux cas, nous pourrions affirmer que les taux de rachat diminuent avec l’âge. Cette dernièreremarque s’oppose à la corrélation positive exposée par Milhaud et al (2013). En revanche, elle rejoint laconclusion de la FFA selon laquelle les taux de rachat diminuent à partir de 35 ans.

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Composition du portefeuille

L’aversion au risque des assurés est une grandeur difficilement mesurable. Cependant nous pouvons penserqu’un assuré possédant un support euro et des unités de compte est moins averse au risque qu’un individupossédant simplement le support euro. C’est pourquoi nous étudions dans ce paragraphe le rachat en fonctionde la composition du portefeuille. Nous regroupons maintenant les contrats en fonction des supports possédés,7 combinaisons sont alors possibles : uniquement support euro, uniquement unités de compte permanentes,mélange d’un support euro et d’unités de compte temporaires etc. Le tableau suivant présente la répartitionde l’exposition en 2015 en fonction de la composition du portefeuille :

Euros Unités de compte Unités de compte Part de l’expositionpermanentes temporaires en 2015

x 28,98%x 0,52%

x 0,92%x x 13,33%x x 30,16%

x x 0,18%x x x 25,91%

Tableau 2.2 – Répartition de l’exposition en 2015

Nous constatons que moins de 2% des souscripteurs ne possèdent pas de support euro. Un quart des sous-cripteurs a totalement diversifié son portefeuille en investissant dans les trois types de fonds. Parmi lessouscripteurs qui investissent dans un fonds euro et dans un type d’unités de compte, nous remarquons unenette prédominance du temporaire sur le permanent. Cela peut correspondre à la gestion profilée.

Graphique 2.5 – Taux de rachat en fonction de l’année et de la composition du portefeuille

Nous constatons au niveau du graphique ci-dessus que les deux types de portefeuille (courbes verte etviolette) contenant un support euro et des unités de compte temporaires sont semblables en terme derachat. En revanche un portefeuille euro est plus proche d’un portefeuille contenant à la fois un portefeuilleeuro et des UC permanentes : leur taux de rachat a baissé après 2013. Nous pourrions donc penser quela présence d’unités de compte temporaires préserve de la hausse des rachats en 2012. Les trois autresportefeuilles possibles étant moins importants en terme d’exposition, il est possible que nous observions unaléa dû à l’échantillonnage. Le taux de rachat des UC temporaires a constamment diminué. Le pic de rachatde 2012 est nettement visible pour pour les UC temporaires. En revanche lorsqu’elles sont mélangées à desUC temporaires, ce pic disparaît.

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Événement financier

Comme nous l’avons dit précédemment, notre base contient en plus de la provision mathématique en find’année et des montants de rachats totaux, les montants des éventuels versements, rachats partiels et arbi-trages. Nous pouvons donc décompter le nombre de versements annuels effectués entre le 1er janvier 2009 etle 31 décembre 2014 et calculer un taux de rachat pour l’année 2015 en fonction de ce nombre. Il faut noterque nous ne disposons que du montant annuel : 12 versements périodiques mensuelles comptent ici pour ununique versement annuel.

Graphique 2.6 – Taux de rachat en fonction du nombre d’événements

Nous avons considéré deux populations différentes :— L’ensemble des contrats souscrits avant le 1er janvier 2009 et encore présents le 31 décembre 2014.

Dans ce cas, tous les contrats ont la même possibilité d’effectuer jusqu’à 6 versements annuels etc.— L’ensemble des contrats présents le 31 décembre 2014 quelle que soit leur date de souscription. Ainsi

certains contrats (par exemple ceux souscrits en 2013) ne peuvent pas atteindre les six versementsannuels.

Nous remarquons cependant que les taux de rachat sont semblables pour les deux populations que nous avonsdistinguées. Avoir effectué un ou deux rachats partiels augmenterait le risque de rachat. En revanche le risquede rachat diminue fortement entre un et trois versements. Les personnes qui ont effectué un arbitrage chaqueannée sont particulièrement à risques.

2.4 Dynamique du phénomène de rachat

Dans la partie précédente, nous avons observé l’évolution du facteur de risque années après années. Ce typed’étude ne permet pas de mettre en évidence une éventuelle saisonnalité. Par exemple, pour le risque demortalité, nous pouvons nous attendre à une hausse des décès en hiver. Nous tentons ici de mettre en lumièrece type d’intuition pour le risque de rachat total.

2.4.1 Répartition mensuelle des rachats

Nous nous intéressons d’abord à la répartition mensuelle des montants rachetés années après années, repré-sentée à la page suivante. Nous constatons que la majorité des rachats totaux ont lieu en mars. En effet, lesrendements des contrats pour l’année passée sont généralement communiqués aux assurés en janvier. D’oùune vague de rachats en mars lorsque les rendements sont décevants. Relativement peu de rachats ont lieuen août ce qui paraît intuitif au regard de l’ambiance estivale. Nous observons qu’il y a un peu moins de

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rachat au dernier trimestre qu’au premier. Ainsi les personnes souhaitant racheter leur contrat le feraientdès le début d’années. Le risque de rachat comporterait donc une part de saisonnalité.

Graphique 2.7 – Évolution mensuelle des montants totalement rachetés entre 2009 et 2015 et répartitionmensuelle relative des montants annuels

En terme de montants, nous constatons une hausse significative des rachats en mars 2012. C’est aussi unevague de rachats en termes de nombre de contrats rachetés. En novembre 2013, la dynamique est atypique :une hausse des rachats remplace la traditionnelle baisse.Le phénomène de rachat est certes un risque comportemental mais il est influencé par l’environnementfinancier. Certains auteurs ont en effet mis en évidence l’impact de la croissance du PIB, du taux de chômagesur le rachat total. C’est pourquoi nous détaillons dans la suite des événements qui pourraient entraîner unedérive de risque.Concernant l’environnement financier, après la crise de 2008, la Grèce demande officiellement l’activation duplan d’aide prévu par les traités européens en Avril 2010, c’est le début de ce qu’y est couramment appelécrise de la zone euro. Le 1er août 2010, une loi plafonne les taux garantis. En novembre 2011, le PremierMinistre, François Fillon, présente un "plan d’équilibre des finances publiques", très vite surnommé "plan derigueur" ou "plan d’austérité". En particulier, l’impôt sur le revenu augmente.En janvier 2012, la France (ainsi que huit pays européens) est dégradée par l’agence de notation Standard& Poor’s et perd son AAA pour un AA+. L’événement a un fort impact médiatique en raison de la cam-pagne présidentielle. Début mars 2012, François Hollande déclare qu’il souhaiterait réformer la fiscalité del’assurance-vie : "L’assurance-vie sera soumise au barème de l’impôt sur le revenu.". Cette déclarations a pueffrayer les épargnants qui auraient alors racheté leur contrat dès mars 2012 puisque l’élection de FrançoisHollande, annoncée par les instituts de sondage, paraissait très probable.La réforme de l’assurance-vie est annoncée en septembre 2013 et présentée en janvier 2014 : aucune mesurene concerne la fiscalité de l’assurance-vie. Entre temps, les épargnants ont pu racheter leur contrat en jugeantque la réforme annoncée serait la copie de ce qui avait été annoncé en mars 2012. Cela pourrait expliquer lahausse relative des rachats en novembre 2013.

2.4.2 Campagne promotionnelle

Pour favoriser la collecte de l’épargne et ralentir la décollecte (et donc en particulier diminuer le rachattotal), les assureurs mettent en place des campagnes promotionnelles sur les contrats déjà existants.Lescampagnes promotionnelles durent généralement trois mois et accordent des avantages aux assurés souscertaines conditions, par exemple des versements. Le tableau suivant donne la variation relative du taux de

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rachat annuel causée par la survenance d’une campagne. Au préalable, nous estimons l’exposition moyennependant les périodes de campagne (et d’absence de campagne).

Année Variation relative2010 12%2011 1%2012 54%2013 22%2014 34%2015 29%

2010-2015 26%

Tableau 2.3 – Impact des campagnes : variation relative du taux de rachat

Tout d’abord, le taux de rachat hors campagne stagne de 2012 à 2015 : cela peut constituer un ordre degrandeur pour les années suivantes. En revanche, cela n’est pas le cas pendant les périodes de campagnepuisque la variation relative varie entre 2012 et 2015. Nous constatons que contrairement aux effets souhaités,les taux de rachat sont plus élevés pendant les campagnes. Cette remarque doit cependant être nuancée enraison de la saisonnalité et du contexte financier : par exemple, une campagne commerciale avait lieu dejanvier à avril 2012. Sans la campagne, le pic de mars 2012 aurait pu être encore plus élevé.

2.5 Synthèse

Ce chapitre nous a permis de constater que la base de données dont nous disposons est fiable. Les critèresd’exhaustivité et d’exactitude sont facilement calculables et peuvent être généralisables lors d’autres étudesce qui constitue un avantage.Nous disposons aussi de variables explicatives utilisées par les auteurs présentés dans la revue de littéra-ture. Nos résultats s’opposent parfois à ceux d’autres auteurs. En revanche d’autres variables explicativesmises en lumière précédemment ne sont pas disponibles, par exemple le patrimoine ou la catégorie socio-professionnelle des assurés.A première vue, le rachat total contient aussi une composante temporelle, influencée par exemple par l’en-vironnement financier ou la stratégie commerciale de la compagnie d’assurance.Dans la suite de cette étude, nous allons estimer une loi de rachat total best estimate destinée à modéliserle passif de la compagnie dans un cadre Solvabilité II. Il ne s’agit donc pas de modéliser la probabilitéde rachat d’un contrat en fonction des modalités prises par les variables explicatives. Les rachats partielspeuvent aussi impacter la solvabilité de la compagnie mais nous ne les conservons pas dans notre étude.Dans un premier temps, cette loi ne distinguera pas les rachats conjoncturels des rachats structurels, c’estpourquoi nous parlerons de loi globale. Pour savoir si notre estimation est correcte ou non, nous allonscomparer la dynamique observée dans le passé et la dynamique prévue par notre première estimation 2. Sinotre premier modèle ne permet pas d’estimer correctement la dynamique passée, nous le modifierons 3.

2. Au chapitre 43. A partir du chapitre 5

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3 | Loi globale : première modélisation

Dans ce chapitre, nous tentons de modéliser de façon agrégée le risque de rachat total : la loi obtenue doitcorrespond à un scénario central best estimate pour les hypothèses de passif. Nous n’adoptons pas ici unpoint de vue probabiliste à la maille contrat : nous ne tentons pas d’estimer la probabilité de rachat d’uncontrat particulier mais souhaitons obtenir une loi pour la totalité du portefeuille. Dans ce chapitre, nousadoptons une méthodologie intuitive dont les limites apparaîtront dès le chapitre suivant.

3.1 Modélisation

Dans cette partie, nous présentons la modélisation de la loi globale en trois temps à partir de notre base dedonnées :

— Choix d’un estimateur : précédemment nous avons estimé les taux de rachat années après années.Nous cherchons maintenant un estimateur suffisamment robuste sur plusieurs années.

— Choix des variables explicatives : une fois l’estimateur déterminé, nous cherchons une combinaisonoptimale (selon un critère à définir) de variables en fonction de laquelle les taux de rachat serontestimés.

— Choix d’un historique : une fois l’estimateur et les variables explicatives déterminés, nous cherchonsune période de plusieurs années optimale (selon un critère à définir). En effet, les taux de rachat nesont pas calculés sur la dernière année disponible dans la base de données (ici 2015) mais sur plusieursannées pour gagner en profondeur et en robustesse.

3.1.1 Choix d’un estimateur

Dans un premier temps, nous présentons l’estimateur retenu pour le taux de rachat puis l’intervalle deconfiance.

Taux annuel sur plusieurs années

Nous considérons ici que nous avons déterminé l’historique d’études, disons du 01/01/D au 31/12/F , et quenous avons sélectionné des variables explicatives qualitatives. Comme précédemment, nous pouvons calculerle montant racheté et l’exposition au rachat pour chaque année et chaque modalité des variables explicatives.Nous calculons alors le montant racheté et l’exposition pour l’historique considéré comme moyenne desmontants et des expositions annuelles :

RachatD−F =∑Fi=D RachatiF −D + 1 (3.1)

ExpositionD−F =∑Fi=D ExpositioniF −D + 1 (3.2)

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Le taux de rachat est alors calculé comme

TauxD−F = RachatD−FExpositionD−F

(3.3)

Ainsi il est égal au quotient de la moyenne des montants totalement rachetés chaque année par la moyennedes expositions annuelles : dans ce paragraphe 1 nous parlons de taux périodique moyen.Il aurait aussi été possible de prendre comme exposition la grandeur suivante :

12(PM31/12/D−1 + PM31/12/F +

F∑

i=DRachati) (3.4)

Cette formule adapte l’exposition pour une année à une période de plusieurs années. Dans ce paragraphe,nous parlons alors simplement de taux périodique. Le graphique ci-dessous montre l’impact d’un tel choixpour les unités de compte.

Graphique 3.1 – Comparaison des méthodes d’estimation

L’impact du choix de l’exposition pour les UC temporaires est faibles 2. Cela n’est cependant pas le cas pourles unités de compte permanentes. Le taux périodique avec la seconde exposition est plus faible et mêmeplus faible que l’ensemble des taux de rachat annuels sur la période 2010-2015. La provision mathématiquedes UC permanentes est effectivement équivalente les 31 décembre 2009 et 2015. Entre temps, elle a enrevanche diminué. Ainsi la seconde méthode sur-estime l’exposition périodique : l’exposition moyenne estplus faible puisqu’elle prend en compte des provisions mathématiques (entre 2010 et 2014) plus faibles. Cetteconstatation nous pousse à préférer l’exposition moyenne comme exposition périodique.

Intervalle de confiance

Il s’agit maintenant de déterminer un intervalle de confiance. Soit p le taux de rachat que nous cherchonsà estimer. Soit X1...Xn des variables aléatoires indépendants et identiquement distribuées, indicatrices durachat. Alors Xi ∼ Bernouilli(p). Et donc E(X) = p et V(X) = p(1− p). Un estimateur p de p est alors lamoyenne empirique, c’est-à-dire :

p = 1n

n∑

i=1Xi (3.5)

1. et seulement dans ce paragraphe2. C’est aussi le cas pour le support euro

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n correspond ici à l’exposition et ∑ni=1Xi au nombre de rachats. En utilisant le caractère indépendant et

identiquement distribué des indicatrices, nous obtenons :

σ2(p) = 1n2

n∑

i=1σ2(Xi) = 1

n2nσ2(X1) = p(1− p)

n(3.6)

Un estimateur naturel est alors : σ2(p) = p(1−p)n Le théorème central-limite donne alors comme intervalle de

confiance asymptotique au niveau 1 − α en notant φ1−α2le quantile de niveau α de la loi normale centrée

réduite : [p− φ1−α

2σ(p); p+ φ1−α

2σ(p)

](3.7)

En pratique, nous ne pouvons pas utiliser cet intervalle de confiance. Il est a priori valable pour des tauxcalibrés en nombres. En revanche, pour des montants, nous pouvons mettre en doute l’indépendance. Eneffet le montant racheté de la moitié des contrats est inférieur à 1000 e : nous ne pouvons donc pas considérerque tous les rachats se valent en termes de montants. Il ne s’agit donc pas simplement de prévoir l’occurrencedu rachat total mais aussi le montant. Prévoir que 1 000 rachats auront lieu donnent peu d’indications surles montants en jeu pour la compagnie. Nous allons donc laisser de côté l’intervalle explicité précédemmentet plutôt utiliser le bootstrap.

Le bootstrap est une méthode d’inférence statistique qui repose sur des simulations. Soit X1, ..., Xn, unéchantillon de n observations indépendantes et identiquement distribuées. Soit θ le paramètre à estimer,ici le vecteur contenant les taux de rachat aux différentes anciennetés. Soit S le nombre de simulationseffectuer. Pour s variant de 1 à S, nous tirons avec remise un échantillon Xs

1 , ..., Xsn de l’échantillon initial.

Nous calculons alors l’estimateur θs. A terme, nous obtenons une distribution θ1...θS . Nous calculons alors :— sa moyenne

θ = 1S

S∑

s=1θs (3.8)

— sa variance

σ2 = 1S − 1

S∑

s=1(θs − θ)2 (3.9)

Si le nombre de simulations est suffisamment grand, typiquement supérieur à 1000, nous pouvons obtenirun intervalle de confiance asymptotique :

[θ − φ1−α

2σ; θ + φ1−α

](3.10)

3.1.2 Choix des variables explicatives

Généralités

Dans cette partie, nous justifions le choix des variables explicatives utilisées pour calibrer les lois de rachat.Précédemment, nous avons observé des taux des rachats annuels en fonction de variables connues dès lasouscription du contrat : c’est le cas du genre, de l’âge à la souscription ou même de l’ancienneté.La typographie de notre base de données nous permet une modélisation à trois niveaux :

— Support : pour un contrat donné, la provision mathématique et les montants rachetés sont répartisentre le fond euro, les unités de compte permanentes et les unités de compte temporaires.

— Fond : pour un contrat donné, la PM et les montants rachetés sont répartis entre le fond euro et lesunités de compte. La distinction permanent/temporaire n’est plus prise en compte.

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— Produit : pour un contrat donné, la PM et les montants rachetés sont considérés sans distinction desdifférents fonds.

En effet nous rappelons que dans notre base de données, une ligne correspond à la combinaison contrat xsupport. Le rachat total concerne la totalité du contrat (et donc l’ensemble des supports présents) et nonun type de support à défaut des autres : si le souscripteur rachète la totalité de ses UC temporaires maisnon son support euro, il y a rachat partiel d’un fonds et non rachat total. Nous conservons cette définitiondu rachat total : si un souscripteur détient au moins deux fonds, un fond est considéré comme totalementracheté si le contrat prend fin, c’est-à-dire si tous les supports détenus sont rachetés. De plus, l’anciennetéd’un fonds est égale à l’ancienneté du contrat. Concrètement soit un assuré qui souscrit un contrat le 1erjanvier 2010. Il effectue des versements seulement sur le fond euro. Le 1er janvier 2012, il effectue un premierversement sur les UC temporaires. Alors l’ancienneté des UC temporaires au 1er janvier 2016 vaut 6 et non4. L’ancienneté de chaque support est en fait son ancienneté fiscale.Dans le chapitre précédent, nous avions aussi étudié l’impact des autres mouvements financiers (rachatpartiel, arbitrage et versement) sur le rachat total. Nous ne retenons pas ces variables dans notre modélisationpuisqu’elles ne sont pas connues. En effet, en décembre 2015, nous ne connaissons par exemple pas lafréquence des rachats partiels sur nos contrats pour les années à venir.Un modèle contrat par contrat devraitêtre implémenté pour estimer les valeurs prises par ces variables explicatives. Ce sous-modèle ajouteraitaussi de l’aléa au premier puisque notre estimation des mouvements financiers ayant lieu sur chaque contratpourrait être biaisée.

Méthode

Nous allons maintenant comparer les 24 combinaisons possibles de choix de variables : support 3, ancienneté,âge, sexe. Pour l’âge à la souscription, nous avons sollicité l’avis d’experts du portefeuille et avons sélectionnéles tranches suivantes : avant 30 ans, entre 30 et 50 ans, entre 50 et 65 ans, après 65 ans. Les comparaisonsdoivent être effectuées années après années puisque l’historique optimal n’a pas encore été déterminé.Donnons-nous une année N de l’historique entre 2010 et 2014. Deux méthodes sont alors légitimes poursélectionner la meilleure combinaison de variables :

— Comparer les prévisions pour l’année N + 1 des différentes combinaisons.— Constituer une base test et une base d’apprentissage, estimer les différentes lois sur la base d’appren-

tissage à l’aide de 1000 simulations et comparer les prévisions pour l’année N sur la base test.La première méthode est problématique pour l’ancienneté. En effet, les anciennetés disponibles augmententavec les années. C’est pourquoi nous préférons la seconde.Après le tirage aléatoire sans remise de la base test (30% de la base totale) et de la base d’apprentissage, laméthodologie est alors la suivante :

— Nous estimons pour chacune des combinaisons possibles de variables c une loi qc,N pour chaque annéeN entre 2010 et 2015 sur la base d’apprentissage.

— Pour chaque annéeN , nous calculons le montant prévu sur la base test : Montantc,N = qc,NExpotest,c,Npuis 4 la dérive :

δc,N =Montantc,N

Montantc,N− 1. (3.11)

— Pour chaque combinaisons, nous synthétisons les dérives calculées précédemment par années en unedérive δc pour la période de 2010 à 2015. Cette grandeur est égale à la moyenne des dérives annuellespondérées par les expositions annuelles. Commes les dérives annuelles peuvent être positives ou né-gatives, pour éviter d’éventuelles compensations, nous calculons aussi une dérive absolue δc commemoyenne pondérée des valeurs absolues des dérives.

— La combinaison de variables retenues est théoriquement la variable qui minimise δc.3. C’est-à-dire produit, fond ou support4. Ce produit est en fait un produit scalaire. Par exemple, pour la combinaison de variables constitué du produit et du sexe,

nous obtenons : MontantN = qH,NExpoH,N + qF,NExpoF,N

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Résultat

Comme nous pouvons le voir dans le tableau suivant, il faudrait retenir la combinaison de variables consti-tuées du support et de l’ancienneté. Nous constatons que notre méthode de sélection privilégie les modèlesavec peu de variables explicatives. De plus, la dérive δ et δ ne donnent pas les même résultats en raison descompensations possibles des sous-estimations et des sur-estimations.

Niveau Sexe Anc Age δ Rang δ RangSupport x 1,24% 1 0,71% 14Support 1,25% 2 0,73% 16Support x 1,26% 3 0,73% 15Produit x 1,27% 4 0,66% 13Fond x x 1,28% 5 0,65% 12

Produit x x 1,30% 6 0,76% 17Produit x x 1,31% 7 0,63% 11Produit x x x 1,31% 8 0,63% 10Fond 1,32% 9 0,62% 9

Produit x 1,33% 10 0,57% 7Fond x 1,33% 11 0,57% 6

Support x 1,37% 12 0,60% 8Support x x 1,37% 13 0,54% 5Fond x x 1,43% 14 0,86% 18Fond x x 1,45% 15 0,51% 3

Support x x x 1,47% 16 0,90% 19Produit 1,47% 17 0,52% 4Fond x 1,48% 18 0,46% 2Fond x 1,56% 19 0,98% 20

Produit x 1,56% 20 0,40% 1Produit x x 1,61% 21 1,09% 21Support x x 1,86% 22 1,32% 22Fond x x 2,25% 23 1,69% 23Fond x x x 3,60% 24 3,07% 24

Tableau 3.1 – Choix d’une combinaison de variables : résultat

3.1.3 Choix de l’historique

L’historique ne doit pas être trop reculé pour éviter de modéliser des comportements dépassés mais doit êtresuffisant pour pouvoir mettre en lumière des tendances dans le comportement des assurés.Pour rappel, le produit étudié a certes été commercialisé en 2001 mais nous ne disposons pas des montantsavant l’année 2009. En revanche, les expositions peuvent seulement être calculées à partir de 2010, annéeque nous ne considérons pas trop reculée : les tendance observées à cette époque ne nous paraissent pasdépassées. Pour assurer une volumétrie suffisante, nous estimons que la longueur de l’historique doit dépasser3 ans. Nous considérons alors tous les historiques possibles : 2010-2012, 2010-2013, 2010-2014, 2010-2015,2011-2013 etc.Donnons-nous un certain historique, disons du 01/01/D au 31/12/F et considérons l’ensemble des contratsprésents au début de celui-ci ou souscrits pendant celui-ci. Cette base est ensuite divisée en une based’apprentissage (70%) et une base test (30%) par tirage aléatoire sans remise.Les étapes suivantes sont alors mises en oeuvre :

— Etape 1 : estimation du taux de rachat et de l’intervalle de confiance à 95% pour chaque anciennetésur la base d’apprentissage à l’aide de 1 000 simulations bootstrap

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— Etape 2 : calcul du montant racheté réel (Rachat_réelTest,A) et de l’exposition (ExpositionTest,A)pour chaque ancienneté A disponible sur la base de test

— Etape 3 : calcul du taux de rachat pour la base test TauxTest,A = Rachat_réelTest,AExpositionTest,A

— Etape 4 : dénombrement du nombre d’anciennetés tel que le taux test appartient à l’intervalle deconfiance asymptotique d’apprentissage au niveau 95%. Puis calcul du ratio d’estimation correcte.

— Etape 5 : calcul d’un ratio d’estimation correcte pondérée. Plus précisément, une estimation correctevaut un point, une incorrecte zéro. Nous calculons alors la moyenne des points pondérés par lesexpositions. Nous donnons ainsi plus d’importance aux anciennetés les plus importantes en termesd’exposition.

Année de Année Estimation Estimation correctedébut de fin correcte avec exposition2010 2012 64% 57%2010 2013 50% 58%2010 2014 69% 63%2010 2015 50% 54%2011 2013 67% 71%2011 2014 62% 52%2011 2015 57% 59%2012 2014 62% 55%2012 2015 57% 58%2013 2015 36% 33%

Tableau 3.2 – Choix d’un historique : résultat

D’après le tableau précédent, il est préférable de sélectionner la période 2011-2013 ou encore 2010-2014.Ces deux historiques ont deux avantages : ils nous permettent de faciliter le back-testing. Nous pouvonsen effet mesurer la validité de nos lois sur les années qui suivent la fin de l’historique. La pondération parles expositions conduirait à sélectionner 2011-2013. Cependant nous préférons conserver 2010-2014 pour lavolumétrie de données plus importante qu’il permet. De plus l’historique 2011-2013 accorde relativementplus d’importance à l’année 2012 qui est particulière en raison du pic de rachat que nous avons constatéprécédemment. Cette étude statistique nous conduit à considérer l’historique 2010-2014. Nous avons souhaitécorroborer ce choix à l’aide d’avis d’experts : il est donc possible que cet historique ne soit pas optimalqualitativement.

3.2 Loi brute et prolongement

Nous calibrons ici une loi globale brute, c’est-à-dire la loi obtenue à partir de nos données et de la métho-dologie en trois temps présentée dans la partie précédente. Cependant cette loi brute ne suffit pas car lesengagements de CNP Assurances sont projetés sur 50 ans. Or nous n’avons pas 50 anciennetés disponibles :la loi brute doit donc être prolongée.

3.2.1 Loi brute

Pour rappel, les intervalles de confiance à 95% présentés sur les différents graphiques sont obtenus en effec-tuant 1000 simulations de bootstrap comme dit précédemment. Le graphique 3.2 à la page suivante présenteles lois en fonction de l’ancienneté que nous obtenons pour chacun des trois supports. Nous constatons quele taux de rachat diminue de façon importante jusque la huitième ancienneté où nous observons un pic derachat que nous pouvons attribuer à la fiscalité. Nous avons précédemment vu que le régime fiscal devient

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plus avantageux à la huitième ancienneté. Nous observons à nouveau un pic de rachat à la dixième ancien-neté. En effet la durée de vie du contrat est fixée à 10 ans lors de la souscription. Ainsi, lorsque la questionde l’avenir du contrat est posée 10 après la souscription, certains souscripteurs peuvent racheter totalementleur épargne. Cela correspond aussi à la fin des pénalités de rachat. Comme nous l’avons vu précédemment,le souscripteur a la possibilité de renoncer à son contrat. Notre compagnie distingue cette cause de sortie durachat total même si à première vue les effets sont semblables. L’effet est alors seulement significatif pourla première ancienneté.

Graphique 3.2 – Loi brute en fonction de l’ancienneté et intervalle de confiance à 95%

Le produit a été commercialisé en septembre 2001. Ainsi chaque 31 décembre, la dernière ancienneté observée(la 13ème par exemple en 2014) n’est pas totalement observée. Nous pouvons donc mettre en doute la fiabilitéde l’estimation pour la dernière ancienneté. Notre base ayant été extraite au début de l’année 2016, il estpossible que des rachats qui ont eu lieu à la fin de l’année 2015 n’aient pas intégré notre base de données :l’avant-dernière ancienneté n’est donc pas jugée fiable.Nous comparons maintenant les montants prévus par nos lois pour l’année 2015 et les lois montants réel-lement observés pour les douze premières anciennetés. Ainsi en 2015, nous ne prévoyons pas les montantsrachetés pour les anciennetés 13 et 14. Les résultats sont donc certes tronqués mais demeurent intéressants.Nous constatons dans le tableau suivant que le montant prévu pour le fonds euro est certes plus faible quele montant réel mais cela n’est pas le cas pour les unités de compte. Si nous prenons la borne supérieure del’intervalle de confiance à 95% pour le fonds euro, nous sur-estimons le montant réel.

Type de fonds Erreur relativeFonds euros -1,50%

UC permanentes 23,98%UC temporaires 19,61%

Tous 2,17%

Tableau 3.3 – Comparaison pour l’année 2015 des montants observés et des montants estimés : erreur relative

3.2.2 Prolongement

Le prolongement des lois de rachat est nécessaire puisque dans le cadre de la modélisation best estimate dupassif de la compagnie, la projection des flux futurs est réalisée sur les 50 prochaines années. Or nous nedisposons pas de cinquante anciennetés dans notre base de données.D’avis d’experts, les lois de rachat doivent décroître à partir d’une certaine ancienneté. Il est fréquentd’utiliser un modèle auto-régressif à partir de la dernière ancienneté brute disponible, c’est-à-dire ici la

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11ème 5. Plus précisément pour n entre 12 et 50, nous pourrions poser :

qn+1 = αqn (3.12)

où α est un nombre positif inférieur à 1 qui constitue le taux d’évolution. Généralement, il n’est pas choisiarbitrairement mais calculé à partir des taux bruts estimés. Par exemple, il peut-être égal à la moyenne destrois derniers taux d’évolution bruts. Cette méthode paraît correcte dès lors que nous avons suffisammentd’anciennetés disponibles et que la décroissance attendue est observée. Cela n’est pas notre cas en raisondes pics de rachat dus à la fiscalité et à la durée du contrat (10 ans).Nous décidons d’utiliser la loi de rachat total d’un produit d’épargne grand public (comme le produit étudié),commercialisé dans le même réseau, ayant des caractéristiques semblables et commercialisé dans le mêmeréseau. Ce produit a été commercialisé il y a 30 ans. Nous disposons donc de 30 taux bruts : la loi brute estalors prolongée en utilisant le modèle auto-régressif présenté ci-dessus. La loi prolongée obtenue est dite deréférence. Lorsque nous classons les produits en fonction de leur taux de rachat bruts en utilisant à nouveaudes simulations bootstrap, notre produit et ce produit de référence sont classés ensemble dans plus de 95%des cas. Puisque les produits sont semblables commercialement et statistiquement, nous allons prolonger noslois brutes homothétiquement par rapport à la loi de référence. Plus précisément, à partir de l’ancienneté 12et jusqu’à l’ancienneté 50, nous appliquons les taux d’évolution de la loi de référence à notre loi de référence.Ainsi pour n entre 12 et 50, nous obtenons :

qn+1 =qrefn+1

qrefn

qn (3.13)

Il est usuel de lisser les lois pour atténuer les erreurs d’échantillonage. Cependant nous n’effectuonspas de lissage afin de ne pas atténuer les pics de rachat que nous pouvons expliquer par lafiscalité et les pénalités de rachat. Sur le graphique ci-dessous, nous constatons que les lois de référenceont tendance à être supérieures à nos lois finales même si le prolongement par homothétie réduit cet écart.Pour les unités de compte temporaires, notre loi et la loi de référence n’évoluent pas de la même façon : leprolongement pourrait s’avérer abusif.

Graphique 3.3 – Loi de référence et loi en montants prolongée par homothétie

Nous avons calibré une loi globale sur une période donnée. Dans le chapitre suivant, nous observons si cetteloi est ajustée à la dynamique du phénomène de rachat.

5. Comme dit précédemment, les deux derniers taux bruts ne paraissent pas fiables.

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3.3 Synthèse

Le tableau ci-dessous dresse un premier bilan de l’étude menée jusqu’ici. Il récapitule le périmètre d’étude,des critères liés aux données, comme celui d’exactitude, des critères liés aux variables explicatives, commecelles que nous avons retenues, et enfin des critères liés à l’estimation, comme l’estimateur que nous avonschoisi. Concernant la variation des prévisions pour 2015, nous avons simplement comparé les montantsestimés par notre modèle pour l’année 2015 aux montants estimés en ajoutant la variable en question (âgeou sexe). Parmi les variables qui pourraient être utiles pour modéliser le rachat total, nous distinguons lacatégorie socio-professionnelle et le patrimoine des souscripteurs comme la revue de littérature l’a souligné.

Graphique 3.4 – Estimation d’une loi globale : synthèse

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4 | Dynamique du risque : insuffisance dela loi globale

Dans le chapitre précédent, nous avons obtenu une première loi globale qui est censée constituer un scénariocentral. Dans ce chapitre, nous souhaitons constater dans quelle mesure cette loi explique la dynamiquepassée du risque étudié et correspond à un scénario central best estimate. Pour cela nous allons commencerpar modéliser des taux mensuels de rachat.

4.1 Loi mensuelle observée

Nous estimons ici la loi mensuelle observée à partir de la base de données.

4.1.1 Méthodologie

Comme nous disposons des dates de rachat exactes, nous pouvons déterminer les montants rachetés moispar mois. Notre méthode de calcul de l’exposition nécessite la connaissance de la provision mathématiqueau début et à la fin de chaque mois. Les données n’étant pas disponibles, nous allons linéariser la provisionmathématique : à partir de la provision mathématique en début d’année et celle en fin d’année, nous endéduisons les provisions mois par mois. Soit le mois m de l’année N , la provision mathématique au dernierjour du mois m/N est estimée de la manière suivante :

PMfin,m,N = PM31/12/N−1 + m

12(PM31/12/N − PM31/12/N−1) (4.1)

La provision mathématique au début du mois est par convention égale à la provision mathématique à la findu mois précédent. Nous constatons que nous ne pouvons pas calculer de taux mensuel en 2009 puisque nousne disposons pas de la provision mathématique au 31 décembre 2008. L’exposition est alors définie par :

Expom,N = 12(Rachatm,N + PMdébut,m,N + PMfin,m,N ) (4.2)

et le taux de rachat par :Tauxm,N = Rachatm,N

Expom,N(4.3)

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4.1.2 Résultats

Nous obtenons alors les résultats suivants 1 :

Graphique 4.1 – Loi mensuelle : taux central et intervalle de confiance à 95%

Nous constatons à nouveau que la majorité des rachats totaux a lieu en mars. De même, nous observonsqu’il y a un peu moins de rachat au dernier trimestre qu’au premier. Ainsi les personnes souhaitant racheterleur contrat le feraient dès le début d’année.

4.2 Décomposition en tendance et en saisonnalité

Précédemment, nous avons mis en évidence la saisonnalité du risque de rachat en constatant que les montantsrachetés sont relativement plus élevés en mars qu’au dernier trimestre. Nous pourrions donc utiliser la théoriedes séries temporelles pour mettre en évidence la composante du taux de rachat mensuel due à la saisonnalitéet celle due à l’évolution tendancielle du risque.

4.2.1 Méthodologie

Il est usuel de décomposer une série mensuelle Xt sous la forme suivante : Xt = Tt + St + εt où :— Tt représente la tendance.— St est une série de période 12 qui capture la saisonnalité.— εt représente le bruit.

Nous commençons par désaisonnaliser la série brute Xt en utilisant une moyenne mobile d’ordre 12 pourobtenir la série Tt. Nous perdons en tout 12 taux mensuels : le premier semestre de 2010 et le dernier semestre

1. Pour obtenir un intervalle de confiance, nous effectuons à nouveau 1000 simulations bootstrap.

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de 2015. Nous fixons l’origine des temps au 31 décembre 2009, l’échelle étant mensuelle 2. Pour t ≤ 7, nousposons :

Tt = 124(Xt−6 + 2Xt−5 + ...+ 2Xt + ...+ 2Xt+5 +Xt+6) (4.4)

Ensuite nous calculons la composante saisonnière s à l’aide de la série désaisonnalisée MXt = Xt− Tt. Pourun mois m, s(m) est égale à la moyenne des valeurs de MX pour le mois correspondant. Nous normalisonsensuite cette série pour qu’elle somme à 0 :

Sm = sm −112

12∑

i=1si (4.5)

Enfin, le bruit est naturellement défini par : εt = Xt − Tt − St.Cette méthode présente le désavantage d’être non-paramétrique : elle ne permet pas de prolonger la tendancedès lors que les données ne sont plus disponibles.

4.2.2 Résultats

Nous obtenons alors les résultats suivants :

Graphique 4.2 – Taux observé, tendance et saisonnalité

Nous remarquons que la forme de la saisonnalité ne dépend pas du fonds considéré : pic de rachat en mars,creux en août et en septembre. La saisonnalité est moins marquée pour les unités de compte temporaires.L’année 2012 impacte fortement la tendance des unités de compte permanentes et dans une moindre mesurecelle du fond euros. A première vue, nous pourrions donc considérer que l’estimation de la tendance estbiaisée : elle inclurait en effet une partie des ruptures observées dans le passé. Cette tendance ne corresponddonc plus à un scénario central mais déjà à un scénario adverse. Les taux de rachat des unités de comptetemporaires ont tendance à diminuer : la crise de mars 2012, due à l’annonce d’une potentielle réforme dela fiscalité de l’assurance-vie, n’est pas visible pour les unités de compte temporaires.

2. t = 1 correspond donc à janvier 2010.

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4.3 Loi mensuelle globale

Nous souhaitons maintenant calibrer une loi globale mensuelle 3 pour mesurer si nous pouvons expliquerl’évolution de la tendance à l’aide de la loi globale calibrée au précédent chapitre et donc à l’aide d’argumentsreposant sur l’ancienneté. Par exemple, de nombreuses souscriptions au début de l’année 2004 pourraientexpliquer la hausse des rachats en mars 2012 puisque les contrats auraient alors 8 ans 4 et bénéficieraientd’une baisse de la fiscalité.Notre loi globale ne dépend que de l’ancienneté : il s’agit alors de la transformer en taux mensuels quine dépendent plus de l’ancienneté. En effet nous ne souhaitons pas obtenir autant de lois mensuelles qued’anciennetés.

4.3.1 Méthodologie

L’intuition est alors la suivante : si en janvier 2010, l’exposition se répartit en une première moitié pourla première ancienneté et en une seconde moitié pour la seconde ancienneté, le taux global mensuel pourjanvier 2010 sera égal à la demi-somme du taux global pour la première ancienneté et du taux global pourla seconde ancienneté.Plus précisément, calculer une exposition mensuelle nécessite d’abord le calcul de la provision mathématique.A nouveau, nous procédons par linéarisation. Pour un support particulier, pour une ancienneté a, pour lemois m de l’année N , nous procédons par linéarisation en posant comme provision mathématique à la findu mois :

PMa,fin,m/N = PMa−1,31/12/N−1 + m

12(PMa,31/12/N − PMa−1,31/12/N−1) (4.6)

Par convention, lorsque a = 0 nous posons PMa−1,31/12/N−1 = 0. La provision mathématique en début dumois, PMa,debut,m/N , est égale à la provision mathématique à la fin du mois qu’il précède. L’exposition estalors calculée comme :

Expoa,m/N = 12(PMa,debut,m/N + PMa,fin,m/N +Rachata,m/N ) (4.7)

Et enfin le taux de rachat :Tauxa,m/N = Rachata,m,N

Expoa,m/N(4.8)

Nous allons maintenant calculer les expositions mensuelles Expoa,m/N pour chaque ancienneté jusqu’à l’an-cienneté maximale disponible (Anc_max) :

ea,m/N =Expoa,m/N∑Anc_max

a=0 Expoa,m/N(4.9)

la part de l’ancienneté a dans l’exposition totale durant le mois m de l’année N . Le taux global en prenanten compte l’exposition s’écrit alors :

qstruct,expom/N = Sm +Anc_max∑

a=0ea,m/Nq

structa (4.10)

où Sm est la composante de saisonnalité estimée précédemment. Ainsi le taux global mensuel s’écrit commela somme d’une composante mensuelle et de la moyenne des taux globaux pondérés par les expositions desdifférentes anciennetés qui fait donc office de tendance. Cette tendance pourrait être prolongée à partir d’uneprévision des expositions par anciennetés durant les années à venir.

3. Comme précédemment, le terme "global" sous entend que nous ne distinguons pas les rachats structurels des rachatsconjoncturels.

4. Pour rappel nous avons précédemment constaté un pic de rachat en cette ancienneté.

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Cette méthode permet donc de prendre en compte l’évolution de la répartition des différente anciennetés ausein du portefeuille et éventuellement de constater que cela explique l’évolution du risque sur une périodedonnée.

4.3.2 Résultats

Le graphique suivant présente les lois mensuelles brutes présentées précédemment et les lois mensuellesglobales :

Graphique 4.3 – Comparaison entre taux bruts et taux globaux

Pour le fond euro, la loi théorique est proche de la loi observée. Pour les unités de compte temporaires, àpartir de 2014, la loi structurelle surestime les taux observés : la tendance à la baisse n’est pas estimée. C’estaussi le cas pour les unités de compte permanentes. Les pics de rachats sont mal estimés par cette méthode :mars 2012 pour le fond euro et les UC permanentes, juin 2012 pour les UC temporaires.Notre méthode d’estimation nous conduit très certainement à surestimer la loi théorique mensuelle. En effet,la saisonnalité a été calibrée sur la période allant de 2010 à 2015 : la composante mensuelle estimée pourmars prend donc en compte le pic conjoncturel de mars 2012. De plus l’année 2012 appartient à la périodede calibrage de la loi globale par anciennetés du précédent chapitre : elle doit donc être surestimée. Cettesurestimation n’a en revanche aucune conséquence sur notre principale conclusion : les pics conjoncturelsqui constituent des dérives temporaires demeurent mal estimés.

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5 | Tendance et rupture

Nous avons constaté que la loi globale ne nous permet pas d’expliquer la dynamique du rachat total : latendance est sur-estimée et les ruptures observées dans le passé sont largement sous-estimées. Ni l’ancienneténi le support ne permettent donc d’expliquer l’évolution passée du risque de rachat total. Nous pouvonsdonc estimer que l’ancienneté n’est pas suffisante pour modéliser des scénarios adverses probables.L’étude en montants réalisée jusqu’alors présente un désavantage important : elle réduit considérablementl’historique d’études de la loi mensuelle. En effet, le produit a été commercialisé en septembre 2001 maisles provisions mathématiques ne sont disponibles qu’à partir du 31 décembre 2009. Elle ne permet doncpas l’étude d’événements majeurs comme la crise financière de 2008. C’est pourquoi nous nous intéressonsmaintenant à la loi mensuelle calibrée en nombres depuis janvier 2002.Nous allons maintenant modéliser les trois composantes de la tendance présentées précédemment : compo-sante prévue, erreur d’estimation et erreur de processus. Après avoir identifié la tendance sur l’historiquedisponible, nous souhaitons estimer son évolution jusqu’en 2020.

5.1 Loi mensuelle en nombres : calibrage

5.1.1 Méthodologie

Nous utilisons à nouveau l’estimateur actuariel pour calibrer les taux de rachat mensuels. Contrairementaux taux en montants, ces taux en nombres ne reposent plus sur une approximation linéaire de l’exposition :l’exposition en nombre est donc plus fine. En effet, nous pouvons dénombrer les contrats présents à n’importequel moment de l’historique.Plus précisément, soit un mois m et une année N . Le taux de rachat total pour le mois m de l’année N estalors défini par :

Tauxm/N =Nb_Rachatm/N

Expom/N(5.1)

sachant que :Expom/N = 1

2(Nb_Debutm/N +Nb_Finm/N +Nb_Rachatm/N ) (5.2)

où :— Nb_Rachatm/N désigne le nombre de rachats qui ont eu lieu pendant le mois m de l’année N .— Nb_Debutm/N désigne le nombre de contrats présents la veille du 1er jour du mois m de l’année N .— Nb_Finm/N désigne le nombre de contrats présents le dernier jour du mois m de l’année N .

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5.1.2 Résultats

Nous obtenons alors les lois suivantes :

Graphique 5.1 – Loi mensuelle calibrée en nombre : taux centraux et intervalle de confiance à 95%

Nous constatons avant tout que les effets de la crise de 2008 sont bien visibles sur les taux de rachat. Pourles unités de compte temporaires, les effets de la crise se font même sentir dès le premier semestre de l’année2008 alors que la faillite de Lehman Brothers a lieu le 15 septembre 2008, cet événement marquant en généralpour l’opinion publique le début de la crise financière mondiale de 2008. La valeur liquidative des unités decompte temporaires avait commencé à chuter dès la fin de l’année 2007 en raison de la crise des subprimesde 2007 aux Etats-Unis. Nous pouvons constater qu’avant 2008, les taux de rachat fluctuent moins. De 2009à 2012, les taux de rachat des UC permanentes et ceux du fonds euro sont proches. Depuis 2013, cela n’estplus le cas : les taux de rachat des UC ont diminué tandis que ceux du fonds euro demeurent à un niveauélevé. Finalement, dans notre portefeuille, nous constatons des ruptures passées qui peuventconstituer des scénarios probables (dans le cadre d’une démarche ORSA) à l’avenir et déformerla tendance évaluée sur l’ensemble de l’historique.

5.2 Comparaison entre nombres et montants

5.2.1 Taux observé, tendance et saisonnalité

Le graphique à la page suivante compare les taux observés en nombres et en montants entre janvier 2010et décembre 2015. Pour le support euro, nombres et montants évoluent plutôt parallèlement même si lesruptures paraissent plus marquées en nombres. Une rupture en nombres mais non en montants indique certesune hausse des rachats mais plutôt des rachats de contrats à faibles encours. De même les ruptures sontplus visibles en nombres qu’en montants pour les unités de compte. Nous remarquons aussi une certaineproximité en nombres entre le support et les UC permanentes avant 2012. Cela n’est pas le cas pour enmontants : les encours sur les UC sont donc plus élevés.

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Graphique 5.2 – Taux en montants et en nombres : comparaison des taux observés

Le graphique suivant permet de comparer la tendance et la saisonnalité obtenues à l’aide de la décompositionexposée au chapitre précédent :

Graphique 5.3 – Taux en montants et en nombres : comparaison de la tendance et de la saisonnalité

Pour les unités de compte temporaires, la saisonnalité était très peu marquée en montants contrairementaux deux supports étudiés. Cela n’est plus le cas en nombres : la saisonnalité des UC temporaires est dumême ordre que celle des deux autres, sauf peut-être en mars.Les deux tendances pour le support euro sont semblables, la déformation due à la rupture de mars 2012 estlégèrement visible. Pour les unités de compte permanentes, la déformation de la tendance en raison de larupture de mars 2012 est aussi observable en nombres. Cette rupture est intuitivement suivie d’une baissede la tendance en nombres comme en montants. Cependant à partir du second semestre 2014, les rachats ennombre ont tendance à augmenter contrairement aux rachats en tendance. Ce phénomène est encore accrupour les temporaires puisque sur la majeure partie de l’historique, les tendances évoluent en sens contraire :des contrats à encours relativement faibles sont donc de plus en plus rachetés. En utilisant les nombres à

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la place des montants dans la suite de cette étude, nous risquons de sur-estimer le risque de rachat pourles UC temporaires en montants. Les montants estimés de capitaux nécessaires pour assurer lasolvabilité de l’entreprise en cas de rupture du risque risque donc d’être sur-estimés pour lesUC temporaires.

5.2.2 Cointégration et modèle à correction d’erreurs

Méthodologie

La notion de cointégration, introduite par Engle et Newbod en 1974, permet de mettre en évidence unerelation entre deux séries temporelles. Tout d’abord, une série temporelle Mt est dit intégrée d’ordre d s’ilest nécessaire de la différencier d fois avant d’obtenir une série stationnaire au sens faible. Deux séries Mt

et Nt sont alors dîtes cointégrées si :— Mt et Nt sont intégrées d’ordre d— Il existe une combinaison linéaire des deux séries intégrées d’ordre strictement inférieur à d

Nous nous donnons un fonds particulier et considérons la loi mensuelle en nombres (Nt) et la loi mensuellemt en montants entre 2010 et 2014. L’année 2015 est conservée pour le backtesting. Nous procédons de lamanière suivante :

— Désaisonnalisation des séries pour obtenir la série en montants Mt et la série en nombres Nt1.

— Test de Perron-Phillips 2 pour la stationnarité de Mt et de Nt. L’hypothèse nulle se formule ainsi :"La série temporelle n’est pas stationnaire". Si l’hypothèse nulle n’est pas rejetée, nous différencionsles séries.

— Estimation du modèle linéaire suivant par les moindres-carrés

Mt = α+ βNt + εt (5.3)

— Test de Perron-Philiips pour la stationnarité de εt.Si cette stationnarité n’est pas rejetée, le modèle est valable et la régression linéaire correspond alors à larelation de long-terme.Engle et Granger ont prouvé en 1987 3 que deux séries cointégrées peuvent être représentées par un modèleà correction d’erreur. Supposons Xt et Yt intégrées une fois. Le modèle à correction d’erreur s’écrit alors :

∆Mt = λ∆Nt + µεt−1 + ηt (5.4)

En pratique, le modèle suivant est estimé par les moindres-carrés :

∆Mt = λ∆Nt + µεt−1 + ηt (5.5)

Si le coefficient estimé µ n’est pas significativement négatif, le modèle à correction d’erreurs n’est pas valide.Sinon, nous parlons de relation de court-terme.

Estimation

Le test de Perron-Phillips nous conduit à rejeter l’hypothèse nulle de non-stationnarité au seuil de confiancede 10%. Ce seuil relativement élevé demeure usuel : nous décidons donc de ne pas différencier les séries. Letableau 5.1 à la page suivante présente les résultats de l’estimation de la relation (5.3).

1. Dans la suite de cette partie afin d’alléger les notations nous continuons de désigner par Nt etMt les séries désaisonnalisées.2. Le test de Dickey-Fuller est généralement utilisé, le test de Perron-Phillips constitue une variante non-paramétrique.3. Engle, R.E & Granger, C.W.J (1987) "Cointegration and error-correction : representation, estimation and testing." Eco-

nometrica.

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Support Valeurs Intercept (α) N(t) (β) R2

Euro Coefficient -0,0035 0,523 0,6857Ecart-type 0,0013 0,046

UCP Coefficient -0,0009 0,717 0,5682Ecart-type 0,0022 0,082

UCT Coefficient 0,0045 0,132 0,0669Ecart-type 0,0011 0,065

Tableau 5.1 – Régression de long terme : résultats de l’estimation

Puisque pour le support euro et les UC permanentes, le coefficient ˆbeta est significatif au seuil de 5% : letaux calibré en montants croît donc avec le taux en nombres. Cela n’est pas le cas pour les UC temporaires.Les coefficients de détermination R2 sont relativement éloignés de 1 : le pouvoir prédictif du modèle demeurefaible, en particulier pour les UC temporaires.Comme le test de Perron-Phillips nous conduit à rejeter la non-stationnarité de la série des résidus au seuilde confiance de 5%, la relation estimée correspond à une relation de long terme. Nous pouvons alors estimerle modèle à correction d’erreur (5.5) :

Support Valeurs ∆Nt (λ) Résidu (µ) R2

Euro Coefficient 0,467 -0,704 0,7845Ecart-type 0,033 0,127

UCP Coefficient 0,625 -0,481 0,6718Ecart-type 0,065 0,108

UCT Coefficient 0,325 -0,540 0,5717Ecart-type 0,053 0,116

Tableau 5.2 – Régression de court terme : résultats de l’estimation

Les trois coefficients µ sont significativement négatifs : la relation estimée correspond donc à une relationde court-terme. Les coefficients de détermination sont plus élevés mais demeurent éloignés de 1. Les troiscoefficients λ sont significativement positifs (au seuil de confiance de 5%) : les "dérivés" (au sens discret duterme) des deux lois varient donc dans le même sens.

Backtesting pour l’année 2015

A partir de la relation de long terme, nous pouvons estimer les taux en montants à partir de taux en nombrespour l’année 2015 et comparer les montants prévus aux montants réels :

Support Euro UCP UCTDérive 3,96% 2,26% 40,65%

Tableau 5.3 – Backtesting pour l’année 2015

Les résultats sont plutôt satisfaisants pour le fond euro et les UC permanentes : nous sur-estimons légèrementles montants rachetés en 2015. En revanche pour les UC temporaires, nous sur-estimons très largement lesmontants. Dans la suite de l’étude, pour deux des trois supports , il serait donc possible d’utiliser cetterelation de long terme pour transformer des trajectoires en nombres en trajectoires en montants. Cependantnous ne retenons pas cette méthode. En effet, le seuil de 10% pour l’hypothèse de stationnarité nous apparaîtrelativement élevé pour effectuer des prévisions. De plus les coefficients de déterminationR2 sont relativementfaibles. En outre, en 2015, les tendances varient en sens contraire en nombres et en montants ce qui n’estpas prévu par ce modèle. Enfin, dans la suite de l’étude, nous serons amenés à utiliser des trajectoires ennombres non stationnaires pour lesquelles le modèle n’est donc plus valable.

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5.3 Tendance et historique

Précédemment, nous avons déterminé des tendances et une saisonnalité à l’aide des moyennes mobiles.Cependant cette tendance n’est pas paramétrique ce qui la rend difficile à prolonger jusqu’en 2020.

5.3.1 Modèle général

Nous souhaitons maintenant calibrer une tendance paramétrique jusqu’en 2020. Nous ne souhaitons pas quele calibrage prenne en compte les dérives du risque observées entre 2008 et 2012 : en effet si nous prenons encompte les dérives, qui correspondant à des scénarios adverses, pour calibrer une tendance, qui correspondà un scénario central, nous risquons de sur-estimer la tendance et donc d’aggraver à tort le scénario central.C’est pourquoi, nous exclurons la période allant de 2008 à 2012 du calibrage de la tendance.La forme des courbes précédentes évoque directement la forme des fonctions puissances comprises entre 0 et1, par exemple la racine carrée. Nous avons à estimer le modèle suivant construit sur une régression linéaire :

qt = α+ βtγ + ∑12i=1(mi ∗ 1mois(t)=i) + εt

0 = ∑12i=1mi

εt ∼ N (0, σ2)

où :— qt correspond au taux de rachat mensuel.— Pour le temps t, l’origine est placé en décembre 2001 : t = 1 correspond donc à janvier 2001.— Le terme α+ βtγ correspond à la tendance.— Pour le mois i, le coefficient mi correspond à la composante saisonnière mensuelle.— εt correspond aux résidus distribués normalement. Ce terme englobe les erreurs d’estimation et de

processus évoquées précédemment.L’estimation des paramètres est réalisée par le pseudo maximum de vraisemblance. La normalité des résidusest testée à l’aide du test de Shapiro-Wilk dont l’hypothèse nulle H0 se formule comme "L’échantillon desrésidus est normalement distribué". Le coefficient de régression R2 augmente avec le nombre de variables.C’est pourquoi, un coefficient ajusté a été introduit :

R2ajusté = 1− (n− 1)(1−R2)

n− k − 1 (5.6)

où k est le nombre de variables explicatives et n le nombre d’observations.

5.3.2 Impact du choix de l’historique

L’estimation des coefficients, en particulier de la puissance γ, dépend a priori du choix de l’historique.Nous pouvons donc mesurer l’évolution de la forme de la tendance en fonction de l’historique. Différentshistoriques de calibrage sont alors possibles :

— L’historique qui précède la période de crise : de janvier 2002 à décembre 2007. Il correspond àl’évolution naturelle du risque à partir de la commercialisation du produit.

— L’historique qui inclut la période de crise : de janvier 2002 à décembre 2012. Comme nous l’avonsdit précédemment, notre estimation est alors biaisée. En le comparant au précédent, il permet demesurer l’impact de la crise sur la tendance.

— L’historique complet : de janvier 2002 à décembre 2015. L’estimation est à nouveau biaisée. En lescomparant au deux précédents, nous pourrons constater si oui ou non, la crise a un impact durablesur la tendance. En effet en plus des ruptures temporaires qui correspondent concrètement aux pics derachat nous pouvons observer une dérive permanente appliquée à la tendance. La tendance post-crisene correspond plus alors à la tendance d’origine.

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— L’historique nettoyé de la période de crise : de janvier 2002 à décembre 2007 puis de janvier 2013 àdécembre 2015.

Le tableau suivant donne les estimations des différents coefficients (hors composante saisonnière) en fonctionde l’historique choisi et du support :

Support Calibrage 2002-2007 2002-2012 2002-2015 2002-2007/2013-2015Euro Intercept (α) -0,65% 0,00% -1,84% -0,85%

Tendance (β) 0,96% 0,37% 1,90% 1,11%Puissance (γ) 0,25 0,43 0,18 0,23Volatilité (σ) 0,19% 0,33% 0,36% 0,28%

UCP Intercept (α) -175,39% 0,88% -3,89% 0,12%Tendance (β) 176,18% 0,07% 4,33% 0,73%Puissance (γ) 0,001 0,70 0,08 0,21Volatilité (σ) 0,22% 0,48% 0,51% 0,27%

UCT Intercept (α) -258,42% -5,88% -11,18% -3,75%Tendance (β) 258,15% 5,63% 10,86% 3,45%Puissance (γ) 0,001 0,06 0,03 0,09Volatilité (σ) 0,15% 0,40% 0,38% 0,25%

Tableau 5.4 – Impact de l’historique de calibrage sur les estimations

Si nous nous intéressons aux historiques qui n’incluent pas la crise, nous pouvons constater que la volatilitéd’un support augmente systématiquement lorsque nous passons de 2002-2007 à 2002-2007/2013-2015. Ainsimême la crise passée, la volatilité n’est pas totalement revenue à son niveau initial : la dérive n’est donc passimplement temporaire. Lorsque nous incluons la période de crise, la volatilité peut doubler : par exemplepour les UC permanents, la volatilité augmente de 0.22% (2002-2007) à 0.48% (2002-2012). De plus pour lesunités de compte, les puissances estimées entre 2002-2007 sont très faible : 0.001. A 5%, nous pouvons mêmene pas rejeter la nullité du coefficient d’après la statistique de Student. Cette puissance nulle impliqueraitque le niveau du risque de rachat stagne sans augmenter avec le temps. Cela n’est plus le cas pour les autreshistoriques de calibrage : la tendance est à la hausse.

Tendance et historique

Les graphiques à la page suivante présentent supports la tendance estimée en fonction de l’historique decalibrage.Plaçons-nous en janvier 2013. La tendance que nous aurions estimée pour les trois années à venir,c’est-à-dire jusqu’en 2015, en considérant la totalité de l’historique disponible, c’est-à-dire jusqu’en décembre2012 4, nous aurait conduit à sur-estimer ce qui allait être observé. En revanche le modèle estimé sur 2002-2007 ne permet certes pas de prévoir la dynamique entre 2013 et 2015 (taux élevé en mars et plus faible enfin d’année) mais donne une approximation correcte de la tendance. Revenons en 2016 : ajouter les années2013-2015 donne une tendance proche de celle estimée sur 2002-2007. La saisonnalité est cependant plusmarquée.Pour les unités de compte permanentes, la remarque concernant le calibrage sur l’historique 2002-2012est toujours valable : il conduit à largement sur-estimer la tendance entre 2013 et 2015. En revanche, lesdifférences entre les trois autres tendances sont plus marquées : la tendance estimée sur l’historique nettoyédes crises (2002-2007/2013-2015) est nettement supérieure à la tendance estimée sur 2002-2007. Même unefois terminée, la crise a donc impacté à la hausse le niveau des rachats des unités de compte permanentes.Pour les unités de compte temporaires, inclure la période de crise ou non n’a pas d’impact sur la tendance :la tendance estimée entre 2002 et 2007 est systématiquement inférieure. Toutes les autres sont très proches.

4. Cette remarque ne prend pas en compte l’éventualité de rachats tardifs qui ont eu lieu en 2012 mais qui n’ont pas étéintégrés à la base de données en janvier 2013.

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Concernant la normalité des résidus, dès que l’historique inclut la période de crise (de 2008 à 2012), nouspouvons la rejeter au seuil de confiance usuel de 5%. Cela n’est pas le cas pour les deux autres historiques(2007-2007 et 2002-2007/2013-2015).

Graphique 5.4 – Fond euro : tendance en fonction de l’historique de calibrage

Graphique 5.5 – UCP : tendance en fonction de l’historique de calibrage

Backtesting

Puisque nous ne prenons pas en compte la totalité de l’historique, nous pouvons aussi comparer les montantsobservés et les montants prévus sur les périodes ne faisant pas partie de l’historique de calibrage. Pour celanous introduisant, la notion de dérive (qui est en fait une variation relative) :

Derive = EstiméObservé − 1 (5.7)

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Cette grandeur nous permet de mesurer la qualité de la prévision de notre modèle sur des périodes qui nefont pas partie du calibrage et qui n’ont donc pas influencé l’estimation des différents coefficients. Par périodede backtesting, nous entendons la période sur laquelle nous comparons les montants estimés et observés :

Backtesting Estimation Euro UCP UCT

08-12 02-07 -13,6% -30,6% -12,7%02-07/13-15 -12,2% -25,3% -6,0%

13-15 02-07 -2,0% -10,9% -10,3%02-12 16,6% 40,3% 1,0%

Tableau 5.5 – Dérive en fonction de l’historique de calibrage et de backtestingAide à la lecture : la tendance estimée sur l’historique 2002-2007 conduit à sous-estimer de 13.6% le

nombre de contrats rachetés entre 2008 et 2012.

Comme nous pouvions nous y attendre, les nombres de contrats rachetés entre 2008 et 2012 sont sous-estiméspar les deux modèles possibles. Par exemple pour les unités de compte temporaires, si en décembre 2007 lacompagnie d’assurance s’était fiée sur 5 ans à l’estimation de la tendance, elle aurait sous-estimé de 30.6%les contrats rachetés. De telles sous-estimations peuvent menacer la solvabilité de l’entreprise.Ce backtesting permet aussi de remarquer qu’après la période de crise le nombres de contrats rachetés n’estpas revenu aux niveaux d’avant la crise : par exemple pour les UC (temporaires et permanentes), la tendanceestimée entre 2002 et 2007 conduit à sous-estimer de 10% le nombres de contrats rachetés entre 2013 et2015. Pour les unités de compte temporaires, inclure la période de crise permet une estimation correcte dunombre des rachats entre 2013 et 2015 puisque la sur-estimation ne s’élève qu’à 1%.

5.3.3 Contrainte sur la puissance

Nous nous intéressons ici au choix de la puissance γ sur les résultats précédents. En effet, nous pouvonsconsidérer que ne pas estimer ce coefficient permettra de réduire l’erreur d’estimation. De plus si la puissanceest imposée, nous pouvons simplement avoir recours aux moindres carrés, modèle qui constitue une référenceclassique. De plus, la forme des courbes peut permettre d’avoir une idée de la puissance à imposer : parexemple 1

2 . Plus précisément, nous estimons le modèle suivant sur l’historique nettoyé des crises :

qt = α+ βtγ + ∑12i=1mi ∗ 1mois(t)=i + εt

0 = ∑12i=1mi

εt ∼ N (0, σ2)

En revanche, cette fois, γ n’est plus estimé : c’est un paramètre déterminé à l’avance. En l’occurrence, nousprenons les valeurs estimées pour les trois autres historiques présentés précédemment : de 2002 à 2007, ou2012, ou 2015. Le choix de la puissance correspondant en fait au choix d’un historique 5.En fonction de la puissance choisie, nous obtenons alors les estimations des différents coefficients 6 présentéesdans le tableau 5.6 à la page suivante. Nous constatons que les volatilités varient peu en fonction de lapuissance choisie. Pour le fond euro et les UC permanentes, la puissance estimée sur 2002-2012 paraîtcependant légèrement moins adaptée puisque les volatilités augmentent de 0.27% à 0.28%.

5. Cette remarque est importante pour l’interprétation des tableaux et des graphiques6. L’intercept correspond à α, la tendance β, la volatilité sigma.

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Tableau 5.6 – Estimation sur l’historique nettoyé des crises : impact du choix de la puissanceSupport Calibrage 2002-2007 2002-2012 2002-2015

Euro

Puissance (γ) 0,25 0,43 0,18Intercept (α) -0,68% 0,38% -1,53%Tendance (β) 1,01% 0,28% 1,72%Volatilité (σ) 0,27% 0,28% 0,27%

UCP

Puissance (γ) 0,001 0,70 0,08Intercept (α) -1,84% 1,29% -2,38%Tendance (β) 1,90% 0,03% 3,12%Volatilité(σ) 0,27% 0,28% 0,27%

UCT

Puissance (γ) 0,001 0,06 0,03Intercept (α) -316,48% -5,79% -10,97%Tendance (β) 316,10% 5,53% 10,66%Volatilité (σ) 0,25% 0,25% 0,25%

Les graphiques suivants présentent l’estimation de la tendance qui résulte du choix de la puissance. Nousremarquons à nouveau que le choix de la puissance a peu d’impact même si la puissance estimée sur 2002-2012 conduit à augmenter la tendance. Cette remarque s’applique aussi aux unités de compte permanentes.En revanche pour les unités de compte temporaires, le modèle donne une tendance semblable quelle que soitla puissance imposée.

Graphique 5.6 – Fond euro : tendance estimée sur l’historique nettoyé des crises en fonction de la puissancechosie

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Graphique 5.7 – UCP : tendance estimée sur l’historique nettoyé des crises en fonction de la puissance chosie

5.4 Tendance : synthèse

Si nous voulons obtenir un scénario central de 2016 à 2020 dans le cadre de l’ORSA, il paraît logique de nepas inclure les crises observées entre 2008 et 2012 dans l’historique de calibrage pour ne pas sur-estimer latendance.Le tableau suivant donne l’estimation et l’écart-type des différents coefficients du modèle pour un calibragesur l’historique nettoyé des crises. La volatilité correspond aux erreurs d’estimation et de processus. Lesautres coefficients permettent d’estimer la composante prévue de la tendance qui correspond au scénariocentral, les scénarios adverses étant calibrés dans la suite de l’étude.

Support Fond euro UCP UCTGrandeur Est Std Est Std Est StdIntercept -0,85% 0,74% 0,12% 0,85% -3,75% 4,00%Temps 1,11% 0,59% 0,73% 0,70% 3,45% 3,86%

Puissance 0,23 0,07 0,21 0,11 0,09 0,08Janvier -0,01% 0,13% -0,07% 0,13% 0,06% 0,12%Février 0,03% 0,13% 0,05% 0,13% 0,12% 0,12%Mars 0,43% 0,13% 0,38% 0,13% 0,28% 0,12%Avril 0,20% 0,13% 0,13% 0,13% 0,16% 0,12%Mai -0,04% 0,13% -0,07% 0,13% -0,08% 0,12%Juin 0,00% 0,13% -0,05% 0,13% -0,01% 0,12%Juillet -0,07% 0,13% -0,03% 0,13% -0,09% 0,12%Août -0,25% 0,13% -0,17% 0,13% -0,23% 0,12%

Septembre -0,12% 0,13% -0,07% 0,13% -0,12% 0,12%Octobre 0,07% 0,13% 0,12% 0,13% 0,01% 0,12%Novembre -0,09% 0,13% -0,08% 0,13% 0,03% 0,12%Décembre -0,17% 0,13% -0,14% 0,13% -0,12% 0,12%Volatilité 0,28% 0,27% 0,25%R2 ajusté 0,8498 0,6563 0,7711

Tableau 5.7 – Estimation de la tendance sur l’historique nettoyé des crises

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Le graphique donne pour chaque support les taux observés entre 2002 et 2015 et la composante prévue dela tendance jusqu’en 2020.

Graphique 5.8 – Fond euro, UC permanentes et temporaires : tendance estimée sur l’historique nettoyé descrises et taux observés

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6 | Dérive du risque : modèle standard

Précédemment nous avons calibré la tendance à partir d’un modèle de régression linéaire. En particulier, lesrésidus sont gaussiens : leur écart-type qui correspond en fait à une mesure de volatilité a été estimée. Nousallons utiliser cette dernière grandeur pour tenter de définir les dérives du risque probables dans le futur.Ce premier modèle va échouer. En effet les dérives passées du risque ne correspondent pas à des quantilesusuels de la prévision du taux de rachat : ces événements auraient donc une probabilité infinitésimale ce quine paraît pas juste.Même si notre tendance est issue d’un calibrage sur l’historique nettoyé des crises, il nous paraît aussiintéressant de nous intéresser aux trois autres histoques possibles présentés précédemment.

6.1 Réplication des crises : ajout d’un choc dynamique

6.1.1 Méthodologie

Nous calibrons d’abord la tendance sur un certain historique. En particulier, nous estimons l’écart-type desrésidus σ. De janvier 2016 à décembre 2020, nous allons tirer S séries de résidus εs,01/16...εs,12/20 indépendantset identiquement distribués selon une N (0, σ2). Pour un mois m et une année N , le taux simulé au titre dela simulation numéro s s’écrit alors :

qs,m/N = qm/N + εs,m/N (6.1)

Ces résidus constituent donc les chocs qui viennent perturber la tendance du risque à laquelle nous pouvionsnous attendre avec les données à notre disposition.Pour chaque mois m et chaque année N , nous pourrons alors calculer le quantile de niveau x (qx%

m,N ) dela série statistique constituée des S taux qs,m/N . Ces simulations sont réalisées pour les quatre périodesd’estimation du modèle, déjà utilisées auparavant :

— Pré-crise : de janvier 2002 à décembre 2007.— Pré-crise et crise : de janvier 2002 à décembre 2012.— Pré-crise et post-crise : de janvier 2002 à décembre 2007 puis de janvier 2013 à décembre 2015.— Historique entier : de janvier 2002 à décembre 2015.

Nombres de simulations à effectuer

Pour déterminer le nombre de simulations à effectuer, nous allons calculer les quantiles q75% et q99.5% pourdifférentes valeurs de S : 50, 1000, 10000 etc. Nous nous attendons à ce que ces quantiles ne varient plusconsidérablement à partir d’un certain S. Pour synthétiser l’information, nous n’étudions pas les quantilesmois par mois mais années après années entre 2016 et 2020. Plus précisément, pour l’année N , le quantileqx%N est défini comme :

qx%N = 1−

12∏

m=1(1− qx%

m/N ) (6.2)

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Le modèle est estimé sur la période 2002-2007/2013-2015 puisque cette dernière sera la plus utilisée dansla suite. A partir de 20 000 simulations, l’estimation converge comme nous le voyons par exemple sur legraphique suivant. Les quantiles augmentent en effet pour des valeurs de S inférieurs à 15 000 pour ensuiteconverger vers leur asymptote à partir de 20 000. Dans la suite de l’étude, nous effectuerons donc 20000 simulations à chaque fois qu’il sera question de simulation.

Graphique 6.1 – Etude de la convergence du quantile à 99.5% en fonction de l’année et du nombre desimulations effectuées

6.1.2 Résultats : taux mensuels de rachat

Nous présentons ici les résultats pour un seul support : le fond euro. Dans la partie suivante, les résultatspour ce fond et pour les unités de compte seront résumés à l’aide du backtesting.

Calibrage : de 2002 à 2007

Graphique 6.2 – Support euro : modèle standard calibré de 2002 à 2007

Si nous nous plaçons en décembre 2007, nous pourrions affirmer que les dérives observées dans les années àvenir (entre 2008 et 2012) avaient une probabilité de survenance inférieure à 0.5% puisque les pics dépassentles bornes de l’intervalle de confiance à 99.5%. En revanche même des événements qui d’après nous sontliés à la saisonnalité (mars 2013, 2014 et 2015) correspondraient à des scénarios adverses ce qui n’est passatisfaisant.

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Calibrage : de 2002 à 2012

Graphique 6.3 – Support euro : modèle standard calibré de 2002 à 2013

Même si la tendance est largement sur-estimée, nous constatons que la probabilité de survenance des dérivespassées augmente. De plus, les hausses de rachat observées en mars 2013, 2014 et 2015 que nous n’imputonspas à une crise mais à la saisonnalité ne correspondent plus à des scénarios adverses puisqu’ils sont prochesdu quantile à 75% et non plus supérieurs au quantile à 99.5%.

Calibrage : de 2002 à 2015

Graphique 6.4 – Support euro : modèle standard calibré sur l’historique complet

Par rapport au graphique précédent, la tendance et les quantiles ont diminué ce qui rend moins probablesles dérives passées 1.

1. Nous gardons en tête que le tirage selon une gaussienne n’est pas idéal pour ces deux derniers historiques (2002-2012 et2002-2015) puisque la normalité des résidus a été rejeté par le test de Shapiro-Wilk.

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Calibrage : historique nettoyé des crises

Graphique 6.5 – Support euro : modèle standard calibré sur l’historique nettoyé des crises

Le pic observé en 2010 constitue maintenant un événement dont la probabilité de survenance vaut environ0.5%. En revanche les autres pics observés entre 2008 et 2012 demeurent des événements dont la probabilitéde survenance est infinitésimale ce qui d’après les experts n’est pas satisfaisant. Ce modèle est certes pluscorrect que les précédents mais ne convient pas totalement.

6.1.3 Résultats : back-testing

Précédemment, nous avons réalisé des back-testing en comparant les montants observés et les montantsestimés par les différentes tendances sur des périodes ne faisant pas partie de l’historique de calibrage. Nouspouvons faire de même en ne considérant plus les tendances mais les différents quantiles :

Support Calibrage Backtesting Tendance Saut 75% Saut 90% Saut 95% Saut 99,5%

Euro02-07 08-12 -14% -9% -5% -2% 4%

13-15 -2% 3% 7% 9% 16%02-12 13-15 17% 25% 32% 36% 47%

02-07/13-15 08-12 -12% -6% 1% 4% 13%

UCP02-07 08-12 -31% -25% -21% -18% -11%

13-15 -11% -5% 1% 5% 13%02-12 13-15 40% 54% 67% 74% 93%

02-07/13-15 08-12 -25% -19% -13% -10% -1%

UCT02-07 08-12 -13% -7% -1% 2% 11%

13-15 -10% -4% 1% 4% 12%02-12 13-15 1% 16% 30% 39% 60%

02-07/13-15 08-12 -6% 4% 14% 19% 34%

Tableau 6.1 – Quantile du modèle standard : backtestingAide à l’interprétation : la tendance estimée sur l’historique 2002-2007 conduit à sous-estimer de 14% le

nombre de contrats rachetés entre 2008 et 2012.

La tendance estimée entre 2002 et 2007 fait de la période 2008-2012 une période dont la probabilité desurvenance est relativement faible : entre 5% et 10% pour les UC temporaires, entre 0.5 et 5% pour le

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support euro et moins de 0.5% pour les UC permanentes. Ce back-testing ne prend pas simplement encompte les ruptures mais la période dans sa totalité : les ruptures à la hausse sont en partie compensées pardes baisses par rapport à la tendance.Pour le fond euro, la période 2013-2015 correspond quasiment à la tendance : considérer la tendance conduità sous-estimer le réel de 2% et considérer le quantile à 75% à sur-estimer de 3%. En revanche, cela n’estpas le cas pour les unités de compte (temporaires ou permanentes) : considérer le saut à 90% nous conduità sur-estimer le réel de 1%. Ainsi les observations entre 2013 et 2015 sont assez éloignées des prévisions àpartir de données entre 2002 et 2007.Si nous considérons la tendance estimée entre 2002-2012, nous constatons qu’elle conduit à largement sur-estimer l’observé pour le fond euro (17%) et les UC permanentes (40%). En revanche, elle constitue uneestimation satisfaisante pour les UC temporaires puisque la sur-estimation ne s’élève qu’à 1%. Ainsi pour cesUC, ajouter la période 2008-2012 à la période 2002-2007 pour l’estimation à la tendance donne de meilleursestimations pour la période 2013-2015.Si nous considérons maintenant la tendance estimée sur l’historique nettoyé des crises, nous constatons quela période 2008-2012 dans sa totalité est proche de la tendance (-6%) et du saut à 75% (4%) pour les UCtemporaires. En revanche pour le support euro, cette période ne peut pas être considéré comme un scénariocentral mais plutôt comme un scénario dont la probabilité de survenance vaut 10%. En effet, le quantile à90% conduit à sur-estimer de 1% l’observé entre 2008 et 2012. Pour les UC permanentes, la période constitueun scénario dont la probabilité de survenance est inférieure à 0.5%. En effet même le saut à 99.5% conduità sous-estimer de 1% le réel.

6.2 Synthèse : erreur de processus et d’estimation

Les dynamiques passées du fond euro et des unités de compte permanentes sont relativement semblables. Lapériode allant de 2008 à 2012 constitue une rupture vis-à-vis des années précédentes. La période suivante (de2013 à 2015) correspond à un retour à la tendance même si cette dernière ne correspond pas totalement à latendance d’origine : les crises observées entre 2008 et 2012 l’ont impactée à la hausse et de façon permanente.La dynamique des unités de compte temporaires est sensiblement différente puisque les pics observés entre2008 et 2012 sont ensuite compensés par une baisse par rapport à la tendance. Ainsi malgré des rupturestemporaires, nous n’observons pas d’impact permanent sur la tendance.Les graphiques à la page suivante présentent à nouveau pour les différents supports les taux observés entre2002 et 2015, les tendances prévues entre 2016 et 2020 mais aussi les quantiles à 99.5%.Ce chapitre montre que des simulations à partir de la tendance prévue par l’historique nettoyé des crises etde la volatilité des erreurs de processus et d’estimation permettent difficilement de répliquer les scénarios deruptures observés dans le passé. En particulier, les quantiles à 99.5% ne permettent pas de capter les fortesdérives passées. L’utilisation d’un processus à sauts de Poisson constitue une solution, implémentée dans lasuite de l’étude. Toutefois, le modèle exposé dans ce chapitre n’est pas caduque : nous le conservons pourestimer la tendance.

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Graphique 6.6 – Synthèse pour chaque support étudié : taux observés, tendance et quantile à 99.5%

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7 | Dérive du risque : modèle à sauts

Après avoir modélisé la tendance et les erreurs de processus et d’estimation, nous modélisons ici les scénariosadverses probables à l’avenir et les sauts correspondants. En particulier, nous cherchons à répliquer lesscénarios adverses observés entre 2008 et 2012 et probables à l’avenir.Dans une optique d’évaluation propre des risques, nous souhaitons ajouter à la tendance (accompagnée deserreurs de prévision et de processus) une composante relative à de fortes ruptures de tendance. Ces rupturespeuvent correspondre aux pics de rachat observés précédemment ou à des scénarios possibles non observés.A nouveau, nous allons effectuer des simulations. En notant s une simulation particulière, le modèle s’écritde manière simplifiée :

{qbase,s,m/N = qm/N + εs,m/Nqsaut,s,m/N = qbase,s,m/N + sauts,m/N

7.1 Calibrage : taux de base

Le taux de base est tiré du modèle précédent : il est égal à la somme d’une tendance qm/N calibrée sur lapériode 2002-2007/2013-2015 et des résidus tirés εm/N .

qt = α+ βtγ + ∑12i=1mi ∗ 1mois(t)=i + εt

0 = ∑12i=1mi

εt ∼ N (0, σ2hors−crise)

Nous notons qt le taux de rachat mensuel estimé par ce modèle. Les prévisions sont effectuées jusqu’endécembre 2020. Nous définissons comme précédemment la volatilité σ2

hors−crise. Nous parlons de volatilité"hors-crise" puisque les crises observées entre 2008 et 2012 sont exclues du calibrage. Ces grandeurs nedépendent pas de la simulation s. Comme précédemment, nous tirons 60 résidus εm/N (un pour chaque moisentre 2016 et 2020) selon une loi normale N (0, σ2

hors−crise).Le taux de base de ce nouveau modèle correspond donc au modèle standard. Il capture donc l’erreur d’esti-mation et de processus.

7.2 Calibrage : sauts

Dans cette partie, nous détaillons le calibrage des sauts qui vont être ajoutés à la tendance. Une premièrecatégorie de sauts concerne les pics de rachat dus au contexte économique et financier. Précédemment, nousavons constaté que la fiscalité avantageuse des produits d’assurance-vie explique leur popularité aux yeuxdes épargnants. Nous allons donc aussi calibrer un saut pour modéliser une éventuelle réforme de la fiscalité.

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7.2.1 Crise économique

Méthodologie

Nous cherchons dans un premier temps à identifier et à mesurer l’ampleur des différentes crises ayantprovoqué des ruptures de tendance. Pour cela nous nous intéressons aux erreurs de prévision pour la période2008-2012, c’est-à-dire pour N entre 2008 et 2012 :

εm/N = qobservé,m/N − qm/N (7.1)

Ils ne dépendent pas de la simulation s puisque l’estimation de qm/N ne dépend pas des simulations. Cene sont pas des résidus puisque cette période ne fait pas partie de l’historique de calibrage de la tendanceqm/N . A priori, ils ne sont pas centrés. En effet, les taux observés sont généralement bien supérieurs à latendance : les erreurs de prévision sont donc positifs. Les pics de ces erreurs constituent les crises que nousallons modéliser. L’amplitude de la crise est alors égale à la valeur de cette erreur. Par exemple, l’amplitudede la crise d’octobre 2008 est définie comme ε10/2008. La volatilité "crise" σcrise est alors définie commel’écart-type de ces erreurs εm/N pour N entre 2008 et 2012.

Résultat

Le graphique suivant présente la tendance et le taux observé entre janvier 2008 et décembre 2012 en fonctiondu support. L’écart entre ces deux courbes constituent les erreurs de prévision. :

Graphique 7.1 – Taux observés et tendance entre janvier 2008 et décembre 2012 en fonction du support

Nous constatons une nette dé-corrélation entre l’observé et la tendance pour les périodes suivantes :— De février à mai 2008, en particulier pour les UC temporaires.— Septembre et octobre 2008.— Mars et avril 2009, en particulier pour les UC permanentes mais pas pour les UC temporaires— Mars et juin 2010.— Mars et mai 2011.— Mars 2012.

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Ces périodes constituent les dérives du risque passées et probables à l’avenir. Nous pouvons constater queces ruptures dépendent du support : en mars 2010, le taux de rachat des UC temporaires ne subit aucunchoc contrairement aux deux autres supports. Nous en déduisons les amplitudes des crises suivantes :

Année Mois Fond euro UCP UCT

2008

Fév 0,60% 0,56% 0,90%Mars 0,08% 0,14% 0,75%Avr 0,55% 0,51% 1,39%Mai 0,29% 0,37% 1,06%

2008 Sept 1,48% 2,34% 1,68%Oct 2,19% 2,97% 2,57%

2009 Mars 0,49% 1,97% -0,03%Avr 0,34% 1,27% -0,12%

2010 Mars 0,60% 0,88% -0,13%Juin 0,52% 1,08% 0,11%

2011 Mars 0,90% 1,29% 0,50%Mai 0,73% 0,92% 0,39%

2012 Mars 1,27% 1,89% 0,70%

Tableau 7.1 – Amplitude mensuelle absolue des crises

Les dérives des erreurs de prévision peuvent durer plusieurs mois :— La crise de 2008 peut être associée à la crise financière qui a suivi la faillite de Lehman’s Brothers. Elle

impacte les UC temporaires dès le début de l’année 2008 avant d’impacter les deux autres supportsà l’automne. Elle constitue le scénario passé le plus adverse.

— Les crises de 2010 et 2011 peuvent être associées à la crise dîte de la zone euro, c’est-à-dire à la crisede la dette dans les pays du Sud (Grèce, Italie, Espagne, Portugal). En 2010, la crise ne touche pasles unités de compte temporaires.

— La crise de 2012 peut être causée par l’annonce politique du candidat François Hollande sur la fiscalitéde l’assurance-vie.

Les crises peuvent perturber les taux de rachat pendant plus de deux mois : nous ne pouvons plus alorsproprement parler de pic de rachats mais plutôt d’une hausse temporaire. Typiquement, en terme d’ordrede grandeurs : +0.25% en novembre et en décembre 2008 pour le support euro. Or ces hausses temporairesappartiennent à l’intervalle de confiance à 95% autour de la tendance comme nous pouvons le constater auniveau de la figure 6.3 : ces hausses temporaires sont en effet situées entre la tendance et le quantile à 95%.Nous pouvons donc considérer qu’elles sont prises en compte par les erreurs de processus et de prévisions.

Volatilité Fond euro UCP UCThors-crise (02-07/13-15) 0,27% 0,27% 0,27%

crise (08-12) 0,39% 0,55% 0,51%Augmentation relative 44,5% 103,7% 88,8%

Tableau 7.2 – Volatilité en fonction de la période et du support

Comme nous pouvions nous y attendre, la volatilité en période de crise est plus élevée qu’en scénario central.L’impact des crises financières est plus élevé pour les unités de compte.

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Récapitulatif

Le tableau ci-dessous récapitule les dérives observées dans le passé et présentes dans notre historique dedonnées. Pour l’utilisation de la compagnie d’assurance, il est souhaitable d’ajouter les amplitudes absolueset relatives des différentes ruptures ainsi qu’une remarque sur la méthode de calcul des amplitudes. Dansnotre cas, nous comparions la sinistralité de la période de rupture à la sinistralité tendancielle. Une rupturepassée dont nous jugerions qu’elle ne peut pas se répliquer à l’avenir (suite à une modification de la législationpar exemple) ne serait pas ajoutée aux scénarii de dérives futures utilisés pour les sauts.

Graphique 7.2 – Dérives passées probables à l’avenir

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7.2.2 Calibrage d’une réforme fiscale

Précédemment nous avons constaté que la fiscalité de l’assurance-vie explique la popularité de ce produitau sein des épargnants. De plus comme la fiscalité des produits d’assurance-vie dépend de leur ancienneté,nous pouvons mesurer l’impact d’une réforme fiscale en modifiant les lois globales.

Méthodologie

Nous constations un léger pic de rachat en la 4ème ancienneté que nous pouvons expliquer par la baissedu prélèvement forfaitaire obligatoire 1 (PFL) de 35% à 15%. Ce pic ne s’étalait pas sur les anciennetésqui suivent : 5ème, 6ème, 7ème. En revanche en la 8ème ancienneté, nous observons la mise en place d’unabattement annuel (4 600 e pour un célibataire, le double pour un couple) en plus de la seconde baisse duPFL (de 15% à 7.5%) : cette fois, le pic observé en la 8ème ancienneté s’étale sur la 9ème. Nous pouvonsdonc associer :

— un pic en une unique ancienneté à une baisse du PFL en cette ancienneté.— un pic qui s’étale sur plusieurs anciennetés lorsque la baisse du PFL est associée à la mise en place

d’un abattement annuel.

Tout d’abord, nous calibrons une loi dite sans fiscalité (notée qcorrigé) avantageuse : cela correspondrait à lasuppression des abattements annuels et à un taux de prélèvement forfaitaire libératoire constant. Pour cela,nous supprimons les pic de rachat aux anciennetés 4 et 8. De même, le taux en l’ancienneté 9 est modifié.Nous ne modifions pas les taux suivants considérant que c’est maintenant la fin des pénalités de rachat quiexplique ces taux de rachat relativement élevés. Plus précisément :

— qcorrigé4 = 1

2(qref3 + qref5 )

— qcorrigé8 = βqsans_fisc7

— qcorrigé9 = β2qsans_fisc7

où β est la moyenne des taux d’évolution inférieurs à 1 pour les anciennetés inférieures à 7 :

Graphique 7.3 – Loi de référence et loi corrigée de la fiscalité

Nous pouvons alors introduire :— Le pic de rachat en l’ancienneté 8 : pic8 = qref8 − qcorrigé

8— L’impact de l’introduction de l’abattement en l’ancienneté 8 sur les anciennetés qui suivent, ici la 9 :

Abat = qref9 − qcorrigé9

1. Le lecteur peut se référé au tableau 1.1 à la page 7 de ce document.

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La loi corrigée va être modifiée selon quatre scénarios :— Scenario 1 : aucune modification. Pour rappel, l’abattement annuel serait alors supprimé et le prélè-

vement forfaitaire libératoire (PFL) ne varierait plus avec l’ancienneté : il resterait par exemple égalà 35% au-delà de la 4ème ancienneté.

— Scenario 2 : le pic pic8 est reporté en la quatrième ancienneté et les anciennetés qui suivent ne sont pasmodifiées. D’après la remarque précédente, cela correspond à l’application du prélèvement libératoirede 7.5% dès la 4ème ancienneté et à la suppression des abattements.

— Scenario 3 : le pic pic8 est reporté à la quatrième ancienneté et Abat est reporté pro rata temporisde l’ancienneté 5 à la 9, c’est-à-dire que Abat/5 (5 comme le nombre d’anciennetés entre 5 et 9) estajouté à la loi corrigée.

— Scenario 4 : le pic pic8 est reporté à la quatrième ancienneté et Abat est reporté de l’ancienneté 5 àla 9. A nouveau, les abattements annuels seraient donc appliqués dès la 4ème ancienneté et le PFLresterait égal à 15% au-delà de la 8ème ancienneté. La différence entre ce scénario et le précédentn’est pas de nature mais d’intensité : ce scénario accroît l’impact de l’abattement.

Une fois la loi corrigée modifiée ancienneté par ancienneté, nous calculons le taux de rachat du scénario isans distinguer les anciennetés, Anc_max désignant l’ancienneté maximale :

qcorrigéi =

∑Anc_maxa=0 qcorrigé

i,a Expoa∑Anc_maxa=0 Expoa

(7.2)

De même, nous calculons le taux de référence qref toutes anciennetés confondues. L’amplitude du saut fiscalpour le scenario i est alors définie par :

Sautfisc,i = qcorrigéi − qref (7.3)

Résultat

Le graphique suivant présente les lois correspondantes aux différents scénarios pour le support euro :

Graphique 7.4 – Support euro : lois correspondantes aux différents scénarios

Le tableau suivant donne l’amplitude des sauts correspondants aux différents scénarios.

Scenario fiscal Fond euro UCP UCT1 -0,12% -0,23% -0,01%2 -0,06% -0,18% -0,01%3 0,00% -0,03% -0,04%4 0,23% 0,48% 0,05%

Tableau 7.3 – Saut fiscal en fonction du scenario et du support

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Nous constatons que le quatrième scénario est particulièrement adverse pour le fond euro et les unités decompte permanentes. Les trois autres scénarios sont favorables puisqu’ils entraînent une baisse des taux derachat. Les scénarios fiscaux ont un impact relativement faible sur les unités de compte temporaires.

7.3 Taux final : méthodologie

Le taux final s’écrit comme la somme du taux de base et des différents sauts dus à la fiscalité (sautfisc) ouaux différentes crises (saut2008 etc.) :

qsaut,s,m/N = qbase,s,m/N + sautfisc,s101/18≤m/N +2012∑

N=2007sautN,s1crise en m/N (7.4)

Les paragraphes suivants présentent les modalités de simulation des sauts.

7.3.1 Saut lié à la fiscalité

Pour chaque simulation s, nous tirons :— La survenance d’une réforme fiscale selon une Bernouilli Be(0.5).— Si réforme il y a, c’est-à-dire si la réalisation de la Bernouilli vaut 1, un des quatre scénarios est tiré

de manière équiprobable.

Le saut lié à la fiscalité est appliqué uniformément à partir de janvier 2018. En effet la prochaine électionprésidentielle ayant lieu en mai 2017, il nous paraît plus probable qu’une éventuelle réforme fiscale soitappliquée dès le premier budget de la mandature.

7.3.2 Saut lié à une crise

Pour chaque simulation s et pour chaque crise, nous tirons :— L’intensité selon une Poisson(1). Elle est donc éventuellement nulle : la crise ne se produit alors pas.— L’amplitude de la crise est perturbée par un résidu εm/N tiré selon une loi normale N (0, σ2

crise).— La date de début de crise. Nous tirons ensuite les dates des crises uniformément entre janvier 2016

et novembre 2020 2 de telle sorte qu’elles ne puissent être simultanées. Plus précisément les datestirées ne sont pas remises. De plus, puisque certaines crises (2008, 2010, 2012) durent plusieurs mois,le mois qui précède une date tirée est aussi exclu : le début d’une crise ne peut avoir lieu en mêmetemps que la fin d’une autre.

Pour chaque crise, nous pouvons alors définir :

sautcrise = Intcrise(Ampcrise + εcrise) (7.5)

7.3.3 Synthèse

Lors de la simulation s, il faut donc tirer :— Les résidus εs,m/N et εs,m/N .— La survenance d’une réforme fiscale selon une Be(0.5) et si une réforme a lieu, le scénario fiscal (SF ).— Les intensités des crises (Intcrise) selon une Poisson(1) et le début éventuel de la crise.

2. Décembre 2020 est exclu car les crises peuvent durer plusieurs mois.

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Le tableau suivant récapitule alors les scénarii de dérives futures utilisées :

Graphique 7.5 – Scénarii de dérives futures

Une simulation s peut donc être associée à un septuplet

Scenarios = (SF, Intprintemps,2008, Intautomne,2008, Int2009, Int2010, Int2011, Int2012) (7.6)

qui a pu être tiré à plusieurs reprises.Pour chaque simulation s, nous obtenons une série de taux qsaut,s,01/16...qsaut,s,12/20. Une fois les S simulationseffectuées, nous pouvons définir qsaut,m/N comme la moyenne des S taux simulés : il correspond au tauxcentral. Nous pouvons aussi calculer les quantiles pour un niveau x, notés qxm,N .Les quantiles calculés ne correspondent à aucune simulation et, en particulier, à aucune combinaison descénario fiscal et d’intensités de crise. Cependant, nous aimerions disposer de scénario déterminés afin desimuler des événements qui ont une certaine probabilité de survenir. Pour cela, nous cherchons les simulationsles plus proches des quantiles au sens de la distance euclidienne. Pour une simulation s et pour un quantilex, nous définissons la distance de la loi s à la loi quantile x :

ex,s =∑

euro,UCP,UCT

12/2020∑

01/2016(qsaut,m/N,support − qx%

m,N,support)2 (7.7)

Les simulations peuvent alors être classées en fonction de la valeur de la distance ex,s : un rang rx,s peut leurêtre associé. Par convention, le rang 1 est associé à l’écart le plus faible. Le meilleur scénario pour obtenirun choc à 75% serait alors la simulation s75% telle que r75%,s75% = 1, c’est-à-dire la loi simulée la plus prochedu quantile au sens de la distance euclidienne.En particulier, cette simulation est associée au quintuplet précédent composé d’un scénario fiscal SF75% etdes intensités de crise Intcrise,75%. Ces dernières grandeurs calibrent la survenance des sauts.D’autres simulations peuvent correspondre au même scénario : c’est pourquoi après avoir associé à chaquesimulation s son rang rx,s, nous pouvons calculer un rang moyen pour chaque septuplet. La combinaison quiminimise le rang moyen rx pourra être retenue pour simuler des chocs de niveau x.

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7.4 Taux final : résultats

7.4.1 Trajectoire

Le graphique suivant donnent les résultats pour le fond euro. Les résultats sont semblables pour les deuxautres supports.

Graphique 7.6 – Modèle à sauts : support euro

Puisque les dates sont tirées aléatoirement, il est normal de ne pas observer de pics de rachat : ces dernierssont en quelque sorte dilués sur toute la période allant de janvier 2016 à décembre 2020.Nous pouvons constater que le saut central et le quantile à 75% sont encore très proches de la tendance.La trajectoire à 90% permet d’obtenir une rupture dont l’amplitude est supérieure à celle de la crise de lazone euro de 2010. Nous pouvons aussi constater que le scénario à 90% correspond aussi au niveau de rachatobservé en mars 2013, 2014 et 2015 : cette fois, ils ne sont plus observés seulement en mars mais chaquemois. Le scénario à 95% permet d’obtenir des ruptures du même ordre de grandeur que la crise finanière de2008. La baisse observée à la fin de l’année 2020 peut s’expliquer par le tirage aléatoire des dates de crise.Le scénario à 99.5% fait apparaître des niveaux de rachat particulièrement élevés.

7.4.2 Scénarios : trajectoire particulière

Pour différents niveaux de chocs x , nous avons déterminé la simulation sx qui permet d’obtenir la loi laplus proche de la loi quantile correspondante. Par exemple pour les unités de compte permanentes à 99.5%sur la figure 7.7 de la page suivante.Nous observons logiquement des pics de rachat correspondant aux tirages des différentes crises observés dansle passé. Nous pouvons constater que les taux de la simulation sont généralement inférieurs à la loi quantile :globalement considérer le quantile permet de sur-estimer l’intensité future de la survenance d’événementsproches de ceux déjà observés. En revanche pour une période particulière, ici le début de l’année 2020, nousconstatons que la loi simulée dépasse la loi quantile : la dérive observée en 2008 a été répliquée avec uneintensité de 3. Ainsi sur une durée plus courte, la loi quantile peut conduire à sous-estimer le phénomènede crise. Nous constatons aussi que sur certaines périodes, par exemple l’année 2016, la loi simulée peutmême être inférieure à la tendance. Nous pouvons aussi l’expliquer d’une part par les résidus tirés selon unegaussienne. D’autre part, pour les unités de compte temporaires et contrairement aux deux autres supports,les crise des printemps 2009 et 2010 conduisent à des baisses des rachats.

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Graphique 7.7 – Unités de compte permanentes : quantile à 99.5% et loi simulée la plus proche

Le graphique ci-dessous donne pour les unités de compte permanentes les lois simulées correspondant auxdifférents niveaux de chocs. Nous constatons qu’à partir de 95% plusieurs pics de rachat dus au tirage decrises passées sont observables. A 90%, nous constatons un pic de rachat au printemps 2017 qui correspondà la réplication de la crise de 2011 avec une intensité valant 1. Les autres crises n’ont pas été répliquées parcette simulation puisque les autres intensités sont nulles. A 75%, aucun pic n’est observable puisque toutesles intensités sont nulles. En revanche, le scénario fiscal tiré est le plus adverse. Ainsi, ce modèle conduit àfaire d’un changement de la législation un scénario de crise à 75%.

Graphique 7.8 – Unités de compte permanentes : lois simulées correspondants aux différents niveaux dechocs

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7.4.3 Scénarios et chocs

Nous nous intéressons maintenant non plus à la meilleure simulation mais aux meilleurs scénarios poursimuler un choc d’un certain niveau x. Le tableau suivant donne alors les trois meilleurs scénarios pourles niveaux usuels (75%, 90%, 95%, 99.5%). En particulier nous constatons que les résultats précédents(concernant l’importance de la réforme et celle des crises pour les différents chocs) ne sont pas tout à faitun hasard dû à une simulation particulière. Le tableau suivant donne les trois meilleurs combinaisons devariables pour simuler des chocs d’un certain niveau. A nouveau, nous constatons que le scénario fiscal no 4définit à lui seul des événements extrêmes :

Tableau 7.4 – Combinaison des variables pour simuler un certain chocChoc Rang Fiscalité Crise financière Crise zone euro Annonce politique

Print 2008 Aut 2008 2009 2010 2011 2012

75%

1 4 0 0 0 0 0 02 4 0 0 0 1 0 03 3 1 0 0 2 1 04 4 0 0 1 0 0 05 4 0 0 0 0 0 1

90%

1 4 0 0 0 0 4 12 4 0 0 0 1 1 03 4 1 0 0 1 0 04 4 1 0 0 0 0 05 4 0 0 0 1 0 0

95%

1 4 1 0 0 3 2 12 4 2 1 0 0 2 13 4 2 1 1 0 3 14 4 2 0 1 0 2 15 4 1 1 1 0 3 1

100%

1 4 3 3 1 1 3 22 4 3 2 1 1 1 13 4 3 3 4 0 2 14 4 4 2 1 2 1 05 4 2 1 1 2 3 3

Pour les chocs à 75%, un événement comme la crise de l’automne 2008 paraît encore être trop adversepuisque l’intensité est nulle pour les cinq meilleures combinaisons. En revanche, les crises dues à l’instabilitéde la zone euro ou à une annonce politique sont des phénomènes qui ont une forte probabilité de survenanceà ce niveau de quantile. A 90%, la crise de l’automne 2008 n’est toujours pas répliquée. A partir de 95%, laplupart des crises dont la crise de l’automne 2008 sont répliquées et parfois avec des intensités plus élevéesque dans le passé.

7.4.4 Amplitude des dérives futures

Les lois simulées sont mensuelles. D’une part pour synthétiser les résultats et d’autre part pour calibrer unchoc de niveau x à appliquer à des lois globales annuelles, nous allons déterminer le taux annuel découlantdes 12 taux mensuels de l’année N comme nous l’avons fait pour étudier la convergence des simulations :

qx%saut,N = 1−

12∏

m=1(1− qx%

saut,m/N ) (7.8)

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Nous pouvons procéder de la même manière pour la tendance calibrée à l’aide du modèle de régressionlinéaire :

qtrend,N = 1−12∏

m=1(1− qm/N ) (7.9)

Ces taux qN représentent les taux annuels que nous pourrions attendre dans les prochaines années si aucunecrise ne se produit. Il prend simplement en compte l’évolution naturelle du risque. Le choc conjoncturelabsolu de niveau x% pour l’année N est alors défini par :

chocx%N = qx%

saut,N − qN (7.10)

Comme nous disposons d’autant de chocs que d’années, nous pouvons considérer que le choc chocx%2016

correspond à un choc à 1 an et ainsi de suite jusqu’au choc à 5 ans chocx%2020.

Nous obtenons alors les résultats suivants :

Support Choc à 1 an 2 ans 3 ans 4 ans 5 ans

Euro

75% 0,24% 0,25% 0,27% 0,29% 0,29%90% 0,54% 0,54% 0,57% 0,67% 0,71%95% 1,11% 1,18% 1,20% 1,41% 1,44%

99,50% 3,79% 4,18% 4,32% 4,33% 4,38%

UCP

75% 0,24% 0,25% 0,30% 0,33% 0,34%90% 0,62% 0,58% 0,74% 0,97% 1,07%95% 1,73% 1,85% 1,90% 2,39% 2,38%

99,50% 5,98% 6,34% 6,44% 6,85% 6,85%

UCT

75% 0,21% 0,22% 0,22% 0,23% 0,23%90% 0,47% 0,49% 0,49% 0,53% 0,55%95% 1,08% 1,31% 1,35% 1,42% 1,37%

99,50% 4,39% 4,95% 5,08% 5,06% 5,03%

Tableau 7.5 – Amplitude absolue des chocs annuels en fonction du support et du niveau de quantile

Nous pouvons constater que le niveau des chocs augmente avec le niveau x choisi ce qui constitue un motifde satisfaction.

75

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7.5 Synthèse

7.5.1 Méthodologie

Le tableau suivant résume les étapes 3 du processus de simulation pour le modèle à sauts. Ce processus permetd’obtenir des chocs à appliquer au facteur de risque étudié. Ces derniers correspondent à des niveaux derisque donnés et sont propres au portefeuille étudié.

Le processus à sauts peut poser quelques difficultés. Il faut notamment chercher à chaque fois une corres-pondance entre les quantiles obtenus et les scénarios historiques possibles. Le graphique à la page suivante(figure 7.9) superpose trois trajectoires que nous estimons :

— le taux central estimé qui correspond à la tendance.— le quantile à 75% obtenu à partir de la volatilité historique qui capture les erreurs de processus et

d’estimation.— le quantile à 75% avec saut obtenu après intégration des dérives futures probables.

3. La septième étape fait l’objet des chapitres 9 et 10.

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Graphique 7.9 – Simulation stochastique du facteur de risque

7.5.2 Scénarios possibles de crises

Le tableau suivant présente les scénarios adverses correspondants aux lois simulées optimales. Un tel tableaupermet de rendre les scénarios intelligibles et de faciliter les simulations de trajectoires :

Graphique 7.10 – Scénarios adverses correspondant à un certain niveau de risque

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Le graphique suivant présente les lois simulées optimales à 99.5% que nous pouvons en partie obtenir àpartir du tableau précédent. Le choix des dates et la simulation des volatilité sont en revanche laissés à ladiscrétion de l’utilisateur du tableau :

Graphique 7.11 – Support euro, UC permanentes et temporaires : trajectoire possible à 99.5%

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8 | Dérive du risque : variation autourdu modèle à sauts

Dans le chapitre précédent, nous avons déterminé un processus à sauts permettant de simuler des scénarios deruptures probables à l’avenir. Ce modèle constitue une référence. Cependant des variations sont possibles.Par exemple, ne plus tirer aléatoirement la date des crises permet de ne plus diluer les dérives sur toutl’historique. Nous pouvons aussi imposer une durée aléatoire aux ruptures simulées.

8.1 Modèle à sauts à date fixée

Dans le chapitre précédent, comme nous tirions aléatoirement les dates de début de crise, les lois quantilesne faisaient donc pas apparaître de pics correspondant à une crise passé en particulier. Nous souhaitonsvérifier qu’imposer les dates de survenance future des crises passées permet effectivement de les répliquer.Les crises ne sont plus simulées entre 2016 et 2020 mais entre 2008 et 2012.La méthodologie est semblable à la méthodologie précédente. En particulier, l’intensité des crises est toujourstirée selon une loi de Poisson de paramètre 1. La tendance et la volatilité ne sont pas modifiées. Commela réplication a lieu entre 2008 et 2012, le scénario d’une éventuelle réforme fiscale n’entre plus en jeu. Lesdates imposées sont exactement les dates de survenance des crises. Nous pouvons donc comparerles sauts observés et les sauts simulés.Le graphique suivant donne les taux observés, la tendance et les sauts pour les trois supports :

Graphique 8.1 – Modèle à date déterminée

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Nous pouvons constater que les différentes crises observés sont effectivement répliqués par notre modèle.En revanche le saut central ne prend pas en compte la volatilité puisque les résidus sont centrés. Ainsi lespics sont certes répliquées mais le retour à la tendance est immédiat : la hausse des taux de rachat observéeentre novembre 2008 et février 2009 n’est pas répliquée. Imposer les dates de survenance des crises permetdonc de modéliser des crises brusques et temporaires mais non une déformation de la tendance à la haussesur une période de plusieurs années.Le graphique suivant présente à nouveau pour le support les taux observés, la tendance et le saut centralmais aussi les différents quantiles. Ces quantiles permettent de déformer la tendance à la hausse entre lesdifférents chocs ce qui est avantageux :

Graphique 8.2 – Support euro : résultats

Pour les chocs temporaires, considérer le taux central est satisfaisant. En revanche, le reste du temps,le quantile à 75% suffit à peine à modéliser la rupture durable de la tendance. Le quantile à 90% est plussatisfaisant même si les taux observés sont parfois supérieurs ; Cette intuition est confirmé par le backtestingsuivant. Pour la période allant de 2008 à 2012, nous comparons le nombre de contrats effectivement rachetésaux nombres prévus par les différents lois (saut central et quantile) :

Support Saut central Saut 75% Saut 90% Saut 95% Saut 99,5%Euro -6,96% 1,53% 12,15% 19,27% 40,13%UCP -16,55% -6,74% 7,20% 16,41% 44,79%UCT 3,59% 18,31% 38,00% 51,55% 93,67%

Tableau 8.1 – Quantile du modèle à sauts : backtestingAide à l’interprétation : Pour le fond euro, considérer le quantile à 90% conduit à sur-estimer de 12.15%

le nombre de contrats rachetés entre 2008 et 2012.

Pour le fond euro et les unités de compte permanentes, considérer le saut central conduit à sous-estimerle nombre de rachats sur la totalité de la période de crise. Pour le fond euro, le saut à 75% donne uneapproximation satisfaisante tandis qu’il conduit à nouveau à une sous-estimation pour les unités de comptepermanentes. Pour les unités de compte temporaires, le saut central conduit à surestimer ce qui a été observé.Le quantile à 99.5% correspond à des taux deux fois plus élevés que les taux observés.Nous constatons donc à nouveau qu’en plus des brusques ruptures temporaires correspondant à des pics derachat, une dérive à la hausse plus faible mais plus longue impacte le fond euro et les UC permanents. Ce

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n’est pas le cas pour les UC temporaires : seules les ruptures brèves sont observables.

8.2 Tendance : autre historique nettoyé des crises

Précédemment nous avons modélisé la tendance en excluant la totalité des mois de janvier 2008 à décembre2012. La comparaison de la tendance et des observations nous a ensuite permis de mettre en évidence desmois précis où des chocs temporaires et de forte amplitude ont eu lieu, par exemple mars 2012. Les autresmois sont certes pris en compte pour mesurer la volatilité des taux de rachat en période de crise mais ne sontpas utilisés pour définir l’amplitude des crises. Nous avons constaté qu’en imposant la date de survenancedes crises, nous modélisions certes les sauts mais pas la déviation de la tendance à la hausse. C’est pourquoinous allons maintenant calibrer la tendance en n’excluant que les mois où des chocs brusques et temporairesont lieu et non une période de plusieurs années.

8.2.1 Méthodologie

Nous reprenons le modèle de régression linéaire utilisée pour le calibrage de la précédente tendance 1 enexcluant non plus la totalité des années 2008-2012 mais seulement les mois utilisés pour définir les amplitudesdes crises : de février à mai 2008 ; septembre et octobre 2008 ; mars et avril 2009 ; mars et juin 2010 ; marset mai 2011 ; mars 2012. L’historique nettoyé des crises est donc plus étendu que précédemment puisqu’ilcomporte des périodes précédemment exclues.

8.2.2 Résultat

Autant la volatilité du support euro reste égale à 0.27%, autant elle augmente sensiblement pour les unitésde compte permanentes, s’élevant maintenant à 0.35%. Pour les unités de compte temporaires, la volatilitédiminue légèrement jusqu’à 0.24%. De même, la puissance estimée varie significativement seulement pourles UC permanentes : elle diminue de 0.21 à 0.11%. Nous pouvons alors comparer les tendances d’origine etles nouvelles tendances :

Graphique 8.3 – Portefeuille étudié : comparaison des tendances

1. Dans les tableaux et les graphiques, cette tendance d’origine est dîte "tendance (1)". La tendance issue de la nouvelleméthodologie est dîte ’tendance (2)".

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Nous constatons que pour les unités de compte temporaires l’impact de la modification de l’historique decalibrage est faible. En revanche pour les unités de compte permanentes nous pouvons observer une haussesignificative de la tendance. Pour le support euro, la tendance augmente aussi mais de manière si importante.Cette nouvelle tendance permet de mieux appréhender la hausse diffuse des rachats observés entre 2008 et2012. Pour le fond euro et les UC permanentes, nous pouvons rejeter l’hypothèse de normalité des résidusau seuil de confiance de 10% mais pas à 5% : la présomption contre le modèle est relativement faible.Précédemment l’amplitude des crises utilisée comme paramètre du modèle à sauts était définie en comparantles taux observés et la tendance calibrée à l’aide de l’historique nettoyé. Une modification de la tendancemodifie donc ce paramètre du modèle : puisque la tendance a augmenté, nous pouvons nous attendre à desamplitudes plus faibles. Le tableau suivant indique la variation relative entre les amplitudes de référence etles nouvelles amplitudes :

Année Mois Euro UCP UCT

2008

Fév -21% -50% 2%Mars -27% -43% 1%Avr -10% -32% 1%Mai -20% -58% 0%

2008 Sept -7% -9% 1%Oct -2% -4% 3%

2009 Mars -6% -4% -35%Avr -17% -14% -16%

2010 Mars -5% -9% -8%Juin -17% -24% -7%

2011 Mars -4% -7% 2%Mai -10% -26% 1%

2012 Mars -3% -5% 2%

Tableau 8.2 – Variation relative des amplitudes

Nous constatons que pour le fond euro et les unités de compte permanentes les amplitudes des crisesdiminuent systématiquement. Ainsi pour le modèle d’origine, nous pourrions nous attendre à une baissesignificative des quantiles. La diminuation des amplitudes varient cependant avec les crises : par exemple,elle est assez faible pour le pic de mars 2012 (-3% et -5%) et bien plus élevée pour les perturbations audébut de l’année 2008 (-27% et -58%). Pour les unités de compte temporaires, à part en 2010, l’impact duchangement d’historique demeure très faible.Nous pouvons comparer les performances des deux modèles à l’aide d’un backtesting :

Support Euro UCP UCTPériode (1) (2) (1) (2) (1) (2)02-07 0,43% 3,44% 1,38% 9,28% 2,55% 0,66%08-12 -12,24% -9,06% -25,26% -17,63% -6,00% -7,74%13-15 -0,28% 3,43% -1,08% 9,40% -1,38% -3,10%

Tableau 8.3 – Backtesting en fonction du support et de la tendance

Pour le fond euro et les UC permanentes, les performances du modèle sont meilleures entre 2008 et 2012. Eneffet pour la nouvelle tendance, la période 2002-2012 ne constitue plus un véritable backtesting puisqu’unepartie de cette période est utilisée pour le calibrage. Nous pouvons alors être étonnés par le fait que lesperformances de la nouvelle tendance ne soient pas encore meilleures : par exemple, elle conduit à sous-estimer le nombre de rachats de 17.63% pour les UC. Pour les deux autres périodes, les performances sontmoins bonne : la prise en compte d’une partie de la période de crise provoque une hausse des prévisions.

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Pour les unités de compte temporaires, les prévisions sont simplement meilleures pour la période allant de2002 à 2007.Finalement, cette correction de l’historique de calibrage permet d’augmenter la tendance ce qui constitueune bonne façon de mesurer l’augmentation diffuse des rachats sur plusieurs années non prise en comptepar le saut central dès que les dates de rachat sont imposées.

8.3 Tendance : autre modèle

8.3.1 Méthodologie

Nous souhaitons définir un nouveau modèle, noté (3), où nous ne supprimons plus une partie de l’historiquemais allons estimer différents coefficients en fonction de la période :

qt = α+ αcrise12008≤an(t)≤2012 + (β + βcrise12008≤an(t)≤2012)tγ+γcrise12008≤an(t)≤2012 + ∑12i=1(mi ∗ 1mois(t)=i) + εt

0 = ∑12i=1mi

εt ∼ N (0, σ2)

où :— qt correspond au taux de rachat mensuel.— Pour le temps t, l’origine est placé en décembre 2001 : t = 1 correspond donc à janvier 2001.— Le terme α+ βtγ correspond à la tendance.— Les coefficients αcrise, βcrise et γcrise permettent de mesurer la déformation de la tendance pendant

la crise.— Pour le mois i, le coefficient mi correspond à la composante saisonnière mensuelle. Ce modèle permet

de ne plus définir la saisonnalité en fonction de la conjoncture : que ce soit en période de crise ounon, l’effet saisonnier est le même.

— εt correspond aux résidus distribués normalement.

Le modèle dit (4) est obtenu en imposant γcrise = 0 et le modèle dit (5) en imposant βcrise = 0. Le modèle(1) impose en fait αcrise = βcrise = γcrise = 0. Lorsque nous prolongeons la tendance de janvier 2016 à2020, nous avons maintenant deux possibilités en fonction du régime choisi (crise ou pas). Pour t tel que2016 ≤ an(t) ≤ 2020 :

{qcrise,t = α+ αcrise + (β + βcrise)tγ+γcrise + ∑12

i=1(mi ∗ 1mois(t)=i)qnon−crise,t = α+ βtγ + ∑12

i=1(mi ∗ 1mois(t)=i)

8.3.2 Résultats

Les différents coefficients estimés sont présentés dans le tableau 8.4 à la page suivante. Nous rappelons quele R2 ajusté n’augmente pas systématiquement avec le nombres de variables explicatives. C’est pourquoinous préférons le retenir.Pour le support euro, nous pouvons noter que les sommes β + βcrise et γ + γcrise sont toujours positives :la tendance demeure donc croissante ce qui nous paraît satisfaisant. En revanche pour les UC permanentes,le modèle (5) estime une tendance décroissante puisque γ + γcrise < 0. C’est aussi le cas du modèle (4)puisque β + βcrise < 0. Le modèle (3) donne des résultats légèrement plus satisfaisants puisque la tendanceest constante puisque γ + γcrise = 0. Pour ces deux derniers supports, la volatilité est la même pour lesmodèles (3), (4) et (5).Pour les UC temporaires et le modèle (5), la tendance est constante en scénario centrale puisque la puissanceest nulle et décroissante en régime de crise. Le modèle (3) conduit aussi à une tendance décroissante. Lavolatilité du modèle (4) est relativement élevée : les erreurs d’estimation doivent être importantes. Cesnouvelles modélisations de la tendance ne constituent donc pas une amélioration pour les unités de compte.

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Support Coefficient (1) (3) (4) (5)

Euro

α -0,85% -0,83% -0,83% -0,83%αcrise 0,79% 1,99% 1,28%β 1,11% 1,08% 1,08% 1,08%

βcrise 0,42% -0,55%γ 0,23 0,24 0,24 0,24

γcrise -0,10 -0,07σ 0,28% 0,32% 0,32% 0,32%

R2 ajusté 0,85 0,81 0,81 0,81

UCP

α 0,12% 0,04% 0,08% -3,62%αcrise -45,49% 4,70% 4,69%β 0,73% 0,78% 0,75% 4,24%

βcrise 49,39% -1,50%γ 0,21 0,21 0,21 0,06

γcrise -0,21 -0,26σ 0,28% 0,38% 0,38% 0,38%

R2 ajusté 0,85 0,70 0,70 0,70

UCT

α -3,75% -3,16% 1,19% -1677,77%αcrise 4,76% 0,28% 1679,01%β 3,45% 2,94% -1,07% 1677,37%

βcrise 11,49% 1,20%γ 0,09 0,10 -9,75 0,00

γcrise -264,17 -1,84σ 0,25% 0,37% 0,51% 0,36%

R2 ajusté 0,77 0,56 0,17 0,58

Tableau 8.4 – Estimation des différents coefficients en fonction du modèle et du support

Le backtesting présenté dans le tableau suivant montre qu’en terme de prévision les modèles (3), (4) et (5)diffèrent très peu pour le support euro. Sur l’historique nettoyé, leur performance est semblable à celle dumodèle (1). Le modèle (4) est inadapté aux UC temporaires :

Support Période (1) (3) (4) (5)Euro 02-07 0,43% 0,41% 0,41% 0,41%

08-12 -12,24% -0,02% -0,02% -0,03%13-15 -0,28% -0,26% -0,26% -0,26%

UCP 02-07 1,38% 1,36% 1,31% 2,57%08-12 -25,26% -0,13% -0,12% -0,10%13-15 -1,08% -1,08% -1,05% -2,18%

UCT 02-07 2,55% 2,34% 12,40% 4,33%08-12 -6,00% 0,09% -0,22% -0,15%13-15 -1,38% -1,26% -29,02% -2,82%

Tableau 8.5 – Backtesting en fonction de la période, du modèle et du support

Ces dernières remarques sont confirmées par le graphique à la page suivante qui donnent les différentestrajectoires pour les UC permanentes. Pour les unités de compte permanentes, nous remarquons que lestrois modèles sont semblables en terme de prévision. De plus à partir de 2018, nous distinguons à peinela tendance en régime de crise et celle en régime central : l’écart entre les deux n’est pas significatif. Nousremarquons aussi que les trois modèles prennent bien en compte la hausse quasi-permanente des rachatsentre 2008 et 2012. En revanche, ce modèle de régression linéaire ne permet pas d’estimer les rupturestemporaires les plus importantes : en 2008, 2009 et 2012.

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Graphique 8.4 – UCP : comparaison des tendances en fonction du modèle et du type de prolongement

Pour les unités de compte temporaires, les deux régimes sont nettement différents. En revanche les tendancesen régime de crise sont inférieures à notre tendance de référence.Pour le support euro, quel que soit le régime choisi, les modèles (3), (4) et (5) donnent des trajectoires trèsproches. Ces modèles seraient donc équivalents. Les prolongements en fonction du régime choisi ne sont enoutre pas distinguables à partir de juillet 2017. A long terme, le seul impact notable des modèles (3), (4) et(5) seriat donc une hausse de la volatilité de 0.28% à 0.32%. Or cette hausse de la volatilité n’était pas leprincipal effet recherché. Nous préférons donc le modèle (1) pour le support euro.

8.4 Modèle à sauts à date et durée aléatoires

Précédemment, nous avons répliqué des crises passées dans le futur sans modifier leur durée. Cependant ilparaît utile de gagner un degré de liberté : la durée, distribuée à nouveau selon une loi de Poisson. Cependant,nous ne souhaitons pas que les crises soient simultanées : le tirage des dates est donc ensuite contraint.

8.4.1 Méthodologie

Deux points diffèrent par rapport à la méthodologie de base :— L’amplitude des crises était définie mois par mois. Puisque la durée est maintenant aléatoire, nous

définissons une amplitude moyenne pour la crise.— La durée des crises est tirée selon une loi de Poisson.

Amplitude

Pour l’unique crise qui n’a duré qu’un mois (celle de 2012), l’amplitude reste la même que précédemment :elle est définie comme la différence entre l’observé et la tendance prévue sur l’historique nettoyé des crises.Pour les autres crises, nous souhaitons calibrer une amplitude mensuelle moyenne. Prenons l’exemple de lacrise du printemps 2008 qui dure 4 mois : de février à mai. L’amplitude de la crise pour le mois de févrierétait définie comme la différence entre l’observé et la tendance. Pour cette crise, nous définissons alors le

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taux observé comme 2 :

qcrise2008 =Rachat02/2008 +Rachat03/2008 +Rachat04/2008 +Rachat05/2008

Expo02/2008 + Expo03/2008 + Expo04/2008 + Expo05/2008(8.1)

Pour un mois particulier, par exemple février 2008, nous définissons le nombre de rachats correspondant àla tendance par :

Rachat02/08 = q02/08Expo02/08 (8.2)D’où nous déduisons :

qcrise2008 =Rachat02/2008 + Rachat03/2008 + Rachat04/2008 + Rachat05/2008

Expo02/2008 + Expo03/2008 + Expo04/2008 + Expo05/2008(8.3)

Ainsi la tendance correspondant à une période de plusieurs mois est égale à la moyenne des tendancesmensuelles pondérées par les expositions observés. L’amplitude mensuelle moyenne pour la crise du printemps2008 est alors définie comme précédemment par :

Ampcrise2008 = qcrise2008 − qcrise2008 (8.4)La réplication de cette crise à l’avenir pourrait par exemple durer six mois, par exemple de janvier à juin 2018.L’amplitude moyenne ne sera pas alors appliquée uniformément : pour chaque mois, l’amplitude moyenneest tirée selon une N (Ampcrise2008, σ

2crise).

Durée puis date

Ici, nous présentons le cas où la durée des crises est tirée avant les dates. L’autre cas est présenté dans leparagraphe suivant. La durée pourrait être tirée selon une loi de Poisson de paramètre la durée observée de lacrise. Par exemple, une Poisson de paramètre 4 pour la crise du printemps 2008. Il est alors que possible quela durée soit nulle. Or nous ne souhaitons pas que la réplication soit à la fois gérée par l’intensité (qui peutêtre nulle) et la durée qui ne doit pas se comporter comme une deuxième intensité. De plus, nous souhaitonsque l’historique de 5 années soit suffisant pour répliquer toutes les crises passées. Ainsi, lorsque la durée dela première crise a été tirée, la durée de la seconde admet une borne supérieure. Plus précisément, les duréesdes crises sont tirées dans l’ordre chronologique :

— Comme la crise du printemps 2008 a duré 4 mois, sa durée Durée2007 est tirée selon une min(1 +Poi(4); 56). L’ajout du 1 permet d’éviter une durée nulle. La moyenne de la variable aléatoire 1 +Poi(4) vaut 5 et non plus 4 : la réplication aura donc tendance à durer plus longtemps que la criseréelle. La durée de la crise doit être inférieure à 56 afin que la durée totale des cinq crises n’excèdentpas 60 mois.

— Comme la crise de l’automne 2008 a duré 2 mois, sa durée Durée2008 est tirée selon une min(1 +Poi(2); 57−Durée2007) etc.

Ce procédé permet d’éviter les crises de durées nulles et d’obtenir une durée totale des crises inférieure à ladurée de l’historique. Le tableau suivant récapitule la durée des crises observées utilisées comme paramètresdes lois de Poisson :

Tableau 8.6 – Durée des crises : paramètre des lois de PoissonAnnée Durée

Printemps 2008 4Automne 2008 2

2009 22010 22011 22012 1

2. Cet estimateur présente des analogies avec l’estimateur actuariel retenu au chapitre 3. Le taux s’écrit ici en effet comme lequotient d’un nombre moyen de rachats par une exposition moyenne. La moyenne n’est cependant plus effectuée sur des annéesmais sur des mois.

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Une fois les durées tirées, nous pouvons tirer uniformément les dates de début des crises de telle sorte queles crises ne soient pas simultanées.Dans le tirage des durées des crises, nous ne prenons pas en compte l’intensité des crises : même si l’intensitétirée est nulle, une durée est tirée. Cela constitue une piste d’amélioration du modèle.

8.4.2 Résultats

Ci-dessous les amplitudes mensuelles moyennes et la durée moyenne des crises :

Année Euro UCP UCT Durée2007 0,38% 0,39% 1,03% 4.02008 1,84% 2,66% 2,12% 2.12009 0,42% 1,62% -0,07% 2.12010 0,56% 0,98% -0,01% 2.12011 0,81% 1,11% 0,45% 2.12012 1,27% 1,89% 0,70% 1.3

Tableau 8.7 – Modèle à durée aléatoire : amplitude et durée des crises

Nous constatons qu’en moyenne les durées simulées sont égales aux durées observées ce qui constitue unpoint positif.En termes de trajectoires, comme nous pouvons le voir ci-dessous, les sauts centraux, par exemple pour lesUC permanentes, sont atténués par cette nouvelle méthode ce qui constitue un désavantage. En effet, celaconduirait à adoucir les scénarios adverses dans le cadre de l’ORSA. Par exemple, un scénario à 95% pourle modèle à sauts de référence deviendrait un scénario à 99.5% pour le modèle à durée aléatoire.

Graphique 8.5 – UCP : tendance et saut central en fonction du modèle

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8.5 Synthèse

Dans la première partie de ce chapitre, en imposant la date de réplication des crises observées dans le passé,nous avons pu vérifier que notre modèle réplique effectivement ces ruptures passées ce qui constitue un motifde satisfaction.Nous avons en revanche constaté que notre modélisation des dérives par des sauts ne permet pas de prendreen compte la dérive temporaire qui affecte la tendance. Une solution a été exposée dans la seconde partie : ilne s’agit plus d’exclure du calibrage de la tendance la période entière, de janvier 2008 à décembre 2012, maisseulement les crises. La nouvelle tendance est alors supérieure à celle d’origine. En revanche, cela impacteaussi l’amplitude des sauts. Il faut donc effectuer un arbitrage entre tendance et saut.Dans la troisième partie, nous ne modifions plus l’historique nettoyé des crises mais estimons maintenant lemodèle sur chacune des périodes. Cette méthode permet de capturer la hausse de la tendance observée entre2008 et 2012. En revanche, en terme de prévision entre 2016 et 2020, les résultats sont moins satisfaisants :la tendance en période de crise finit par décroître. La tendance correspondant au scénario central est trèsproche de celle de référence. Ces remarques nous poussent à ne pas sélectionner ce nouveau modèle.Enfin, dans la quatrième partie, nous avons mis en oeuvre une variation du modèle à sauts : les durées descrises sont maintenant tirées de manière aléatoire à partir d’une loi de Poisson. Les quantiles sont alorsinférieurs à ceux obtenus en imposant la durée des crises. Le modèle de référence paraît donc préférable.

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9 | Loi globale corrigée : modèles simulés

Nous avons simulé des lois mensuelles et avons obtenu des quantiles. Nous souhaitons maintenant transposerses résultats pour les appliquer aux lois globales calibrées en fonction de l’ancienneté. Un modèle de projectioninterne permet alors de calculer les montants rachetés chaque année pendant 50 ans.Nous allons d’abord calibrer une loi globale en fonction du support et de l’ancienneté (comme au troisièmechapitre) puis calibrer des chocs conjoncturels à ajouter à cette loi. Ces derniers ne dépendent pas del’ancienneté. La loi globale calibrée correspond donc à un scénario central que des chocs peuvent venirperturber : dans la suite du chapitre, nous parlons de loi centrale. Nous étudions certes le modèle à sautsmais reprenons aussi le modèle standard pour établir une comparaison.

9.1 Méthodologie : obtention des lois centrales

9.1.1 Loi centrale pour le modèle à sauts

Comme précédemment, nous avons recours au taux actuariel pour calibrer la loi centrale. Cependant elleest cette fois calibrée en nombres. Les crises observées entre 2008 et 2012 sont cependant exclues : lenombre de contrats rachetés et l’exposition au rachat sont calculés pour les seules années de l’historique2002-2007/2013-2013. L’exposition pour l’année N et l’ancienneté A est maintenant définie par :

ExpoA,N = 12(Nb_presentA,31/12/N−1 +Nb_rachatA,N +Nb_presentA,31/12/N ) (9.1)

où— Nb_present31/12/N−1 représente le nombre de contrats présents le 31 décembre de l’année N − 1— Nb_rachatN représente le nombre de contrats rachetés pendant l’année N.

Le taux de rachat est ensuite calculé comme le ratio du nombre rachats moyens par l’exposition moyenne.A nouveau, les taux des deux dernières anciennetés ne sont pas jugés fiables et sont supprimés 1. les La loiest à nouveau prolongée par homothétie à partir de la loi de référence. Cette loi est notée qcentral,saut.

9.1.2 Loi centrale pour le modèle standard

La loi centrale est cette fois calibrée sur l’historique complet, c’est-à-dire de 2002 à 2015. En effet puisqueles quantiles étaient relativement faibles, les chocs conjoncturels à ajouter à la loi centrale vont être faibles.Nous conservons donc les années 2008-2012 pour compenser ces chocs faibles par une loi centrale un peuplus élevée. Cette loi est notée qcentral,standard.

1. Pour rappel, comme nous l’avons vu aux chapitres 3, la dernière ancienneté n’est pas complète et l’avant-dernière ne prendpas en compte les éventuels rachats tardifs.

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9.2 Méthodologie : obtention des lois choquées

9.2.1 Choc pour le modèle à sauts

Les lois simulées sont mensuelles. Pour calibrer un choc de niveau x à appliquer à notre loi de base, nousallons déterminer le taux annuel découlant des 12 taux mensuels de l’année N comme nous l’avons fait pourétudier la convergence des simulations :

qx%saut,N = 1−

12∏

m=1(1− qx%

saut,m/N ) (9.2)

Nous pouvons procéder de la même manière pour la tendance calibrée à l’aide du modèle de régressionlinéaire :

qN = 1−12∏

m=1(1− qm/N ) (9.3)

Ces taux qN représentent les taux annuels que nous pourrions attendre dans les prochains années si aucunecrise ne se produit. Il prend simplement en compte l’évolution naturelle du risque. Le choc conjoncturelabsolu de niveau x% pour l’année N est alors défini par :

chocx%N = qx%

saut,N − qN (9.4)

La loi choquée au niveau x% (qx%struct,saut) est alors une translation de la loi globale :

qx%choc,saut = qcentral,saut + chocx%

2016 (9.5)

Comme nous disposons d’autant de chocs que d’années, nous devions en choisir un. 2016 présente l’avantagede ne pas être trop reculée dans l’historique : les prévisions du modèle linéaire sont certainement moinsvalables en 2020.

9.2.2 Choc pour le modèle standard

Nous prenons les quantiles du modèle standard calibré sur 2002-2015. Les quantiles annuels, les chocs et leslois structurelles choquées sont obtenus de la même façon.Ici les chocs conjoncturels ont été calibrés en nombres. Nous disposons d’une méthode pour passer desnombres aux montants : précédemment, les lois en nombres, dite qNombre ont été appliquées à des exposi-tions d’une année N de l’historique exprimée en montants ExpoN,Montant. Le produit des deux grandeurscorrespond à une estimation d’un montant racheté. Intuitivement, si ce dernier est deux fois supérieur aumontant réel, un coefficient égal à 1

2 est appliqué aux lois (ou aux chocs) en nombres pour les convertir enmontants. Nous effectuons donc un changement d’échelle.

9.3 Résultat

Loi centrale

A la page suivante, les lois centrales pour le modèle standard et le modèle à sauts sont représentées (figure9.1). Comme attendu, les lois standard sont supérieures aux lois à sauts puisque les années de 2008 à 2012n’ont pas été exclues du calibrage. Nous remarquons que cet écart ne concerne pas toutes les anciennetés :par exemple, pour les unités de compte temporaires, la crise de 2008-2012 aurait par exemple concerné lescontrats d’ancienneté 4 à 7. La fiscalité qui n’est pas avantageuse avant la quatrième ancienneté aurait doncdissuadé les épargnants de racheter leur contrat malgré le contexte économique et financier défavorable.

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Pour le fonds euro et les unités de compte permanentes, le pic de rachat à la huitième ancienneté n’est pasimpacté par l’historique de calibrage. Les prolongements sont identiques : en effet, ils sont réalisés à partirde l’ancienneté 11 qui apparaît dans l’historique de calibrage à partir de l’année 2013 : exclure ou non lescrises observées entre 2008 et 2012 de l’historique de calibrage n’a donc aucun impact sur l’estimation de cetaux et donc sur le prolongement par homothétie.

Graphique 9.1 – Lois centrales en fonction du modèle et du support

9.3.1 Chocs

Le tableau suivant présente les chocs conjoncturels relatifs en fonction du modèle et du quantile :

Modèle à sauts Modèle standardChoc Fond e UCP UCT Fond e UCP UCT75% 8% 10% 11% 8% 12% 14%90% 17% 21% 23% 15% 23% 26%95% 39% 59% 37% 19% 30% 33%99,5% 150% 244% 221% 29% 46% 52%

Tableau 9.1 – Choc conjoncturel relatif en fonction du modèle et du quantile

A 75% et à 90%, les deux modèles sont équivalents : les sauts modélisés n’ont donc pas d’impact sur leschocs conjoncturels. En revanche, à partir de 95%, les chocs ne sont plus du même ordre de grandeur. Parexemple, pour les unités de compte permanentes, le choc à 99.5% pour le modèle à sauts est environ 3,5 foisplus élevé que la tendance q2016 (versus 1,46 pour le modèle standard.).

9.3.2 Montants rachetés entre 2015 et 2020

Quel que soit le modèle considéré (standard ou à sauts), un modèle de projection interne nous permetd’obtenir les montants rachetés de 2015 à 2020 pour les lois centrales. Nous les comparons alors aux montantsrachetés prévus par les différentes lois choquées dans le tableau 9.2 à la page suivante.Par exemple, pour le modèle à sauts, la loi structurelle choquée à 99.5% prévoit des montants rachetés en2015 1.81 plus grands que ceux prévus par la loi structurelle centrale. Ce scénario à 99.5% pourrait menacerla solvabilité de la compagnie. Par exemple, en 2020, les montants effectivement à verser peuvent être 3 foisplus grands que les montants prévus par le scénario central.

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Modèle Choc 2015 2016 2017 2018 2019 2020

Standard

75% 10% 10% 11% 12% 10% 8%90% 19% 19% 20% 23% 20% 15%95% 24% 25% 26% 29% 25% 20%

99,50% 38% 39% 40% 47% 40% 31%

A saut

75% 8% 9% 10% 22% 37% 73%90% 19% 20% 22% 37% 52% 87%95% 46% 47% 51% 74% 88% 123%

99,50% 181% 181% 190% 277% 287% 300%

Tableau 9.2 – Montants rachetés : variation relative entre le scénario central et les chocs

Précédemment, nous avons constaté que les chocs à 75% et à 90% donnés par le modèle standard et lemodèle à sauts sont relativement proches. Malgré tout, l’impact s’accroît avec les années. En 2020, lesvariation relatives pour des chocs à 75% ne sont en effet plus du même ordre de grandeur : 8% pour lemodèle standard contre 73% pour le modèle à sauts.

9.4 Loi globale mise à jour

9.4.1 Loi en fonction de l’ancienneté

Ce modèle à sauts nous a permis de calibrer des chocs conjoncturels pour différents niveaux de risque. Ils ontcertes été calibrés en nombres mais en utilisant l’ajustement d’échelle évoqué précédemment, nous pouvonsles convertir en montants. Il nous reste maintenant à mettre à jour la loi globale.

Graphique 9.2 – Loi globale d’origine et loi globale mise à jour

Dans le chapitre 2, l’historique de calibrage de la loi globale (dîte d’origine) commençait en janvier 2010 etse terminait en décembre 2014. En particulier, mars et avril 2010, mars et mai 2011 et mars 2012 faisaientpartie de l’historique de calibrage. Notre loi globale surestime donc les montants rachetés lorsqu’aucunerupture n’a lieu. Nous l’estimons donc à nouveau en excluant les montants rachetés durant ces mois de crise.A nouveau, le prolongement n’est pas affecté par la réduction du périmètre d’études.

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Certains rachats totaux ne sont pas une conséquence d’une décision de l’assuré mais vraisemblablementde son décès : l’évolution de la mortalité pourrait donc impacter l’évolution du risque de rachat total. Eneffet pour un nombre non négligeable d’assurés, le décès et le rachat total ont lieu en l’espace de 2 mois.Nous estimons alors que cela conduit à une sur-estimation des montants rachetés puisque les capitaux versésà l’assuré constituent plutôt un capital-décès. En pratique, les montants à soustraire sont négligeables enordre de grandeur devant les montants totaux : l’impact sur les taux de rachat est de l’ordre du millième.Si l’impact des décès avait été plus grand, il aurait pû être nécessaire d’ajouter des scénarios de hausse dela mortalité dans notre catalogue en étudiant par exemple l’impact de la canicule de 2003.Finalement, nous ne pouvons toujours pas différencier systématiquement les rachats structurels des rachatsconjoncturels. Cependant en excluant certaines périodes de crises, propices aux rachats conjoncturels, oudes sorties, comme le décès, considérées à tort comme des rachats totaux, nous pourrions considérer que laloi globale alors modélisée est une meilleure estimation de la loi structurelle réelle.

9.4.2 Loi mensuelle

Au chapitre 4, nous avons comparé la loi mensuelle observée à une déclinaison mensuelle de notre loi globaleen fonction de l’ancienneté. Cette comparaison nous a permis de réaliser que notre première estimationn’était pas satisfaisante. Nous reprenons ici le même procédé à partir de notre la loi globale mise à jour.Concernant l’estimation de la saisonnalité par moyenne mobile, nous supprimons les mois où une rupture aeu lieu : mars et avril 2010, mars et mai 2011 et mars 2012.

Graphique 9.3 – Lois mensuelles observées, globales d’origine et globales mises à jour

Nous observons maintenant un net écart entre l’observé et le prévu au printemps 2011 ce qui n’était pas lecas avant la mise à jour. Alors que précédemment, la loi globale mensuelle était en moyenne supérieure à laloi observée (+0,05% pour le support euro et pour les UC temporaires, +0,02% pour les UC permanentes),ce n’est plus le cas après la mise à jour. La loi mensuelle mise à jour sous-estime la loi observée en moyenne :-0.05% pour le support euro et les UC temporaires et -0,18% pour les UC permanentes. La loi globale miseà jour est plus satisfaisante que celle d’origine.

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10 | Stratégie indicielle de réassurance

Nous avons mis en place dans les chapitres précédents un modèle permettant de simuler des scénariosadverses probables pour la compagnie ce qui évoque directement la simulation de scénarios de catastrophesnaturelles, pratique courante en Risk Management. Ces risques sont particulièrement propices à la mise enplace d’une stratégie indicielle de réassurance. L’analogie possible entre notre modèle et ces modèles derisque de catastrophe nous pousse à étudier une stratégie indicielle pour le risque de rachat total. Nousmettons en oeuvre un traité facultatif : nous étudions une couverture particulière, proposée ensuite à un ouplusieurs réassureurs.

10.1 Méthodologie

Comme nous l’avons vu précédemment, cette stratégie consiste à fixer un indice au-dessus duquel le traitéde réassurance est mis en oeuvre. Ce traité concerne le produit d’assurance et non l’un des trois supports :les montants rachetés sont regroupés pour le produit entier. Donnons-nous un indice Ind égal à un taux derachat particulier. Pour chaque simulation s, le montant cédé au réassureur est égal à :

Cédés =12/20∑

m/N=01/16(Montants,m/N − IndExpom/N )+ (10.1)

où x+ = max(x; 0). Ainsi en fonction de l’exposition mensuelle, l’indice donne chaque mois un montantau-dessus duquel le réassureur intervient. Ces expositions ne sont pas connues pour les cinq années à venir.Des experts nous ont donné une estimation de l’exposition annuelle jusqu’en 2020. Nous l’avons ensuitelinéarisée pour obtenir une exposition mensuelle. Le montant conservé par l’assureur est alors égal à :

Conservés =12/20∑

m/N=01/16min(Montants,m/N ; IndExpom/N ) (10.2)

Nous pouvons préférer adopter un point de vue annuel pour les montants conservés et plutôt calculer pourchaque simulation s, Conservés(2016), Conservés(2017) etc. Nous introduisons alors le taux de conservationpour l’année N et pour la simulation s :

qcons,s,N = Conserves,N (euro) + Conserves,N (UCP ) + Conserves,N (UCT )Montants,N (euro) +Montants,N (UCP ) +Montants,N (UCT ) (10.3)

L’enjeu est alors de définir un indice issu de données internes. Il peut par exemple être égal à un tauxobservé, le dernier disponible étant décembre 2015. Par expérience, nous savons que les taux observés endécembre sont généralement faibles par rapport au reste de l’année. Nous pouvons donc préférer le tauxobservé en mars 2015, taux le plus élevé de l’année. Comme il est relativement élevé, le traité risque d’êtrepeu mis en oeuvre. Un juge de paix entre des taux trop élevés (mars) ou trop faibles (décembre) peut être letaux pour l’année 2015. Comme les rachats tardifs n’ont pas été pris en compte dans notre base de données,le taux pour l’année 2014 peut paraître plus judicieux. Ces derniers indices dépendent simplement de notre

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modèle d’estimation des taux de rachat. Cependant ils ne dépendent pas de notre modèle de simulation. Nouspouvons aussi définir comme indice les lois quantiles d’un certain niveau x entre janvier 2016 et décembre2020.Une fois l’indice défini, pour différents niveaux α du risque et pour chaque année N , nous pouvons calculerles V ar(α,N) et TV ar(α,N) de la série qcons,s,N .

La Value at Risk et la Tail Value at Risk sont des mesures risques. Elles sont apparues dans les années 90.Soit une variable aléatoire X correspondant à un montant de perte et un niveau de risque alpha donné, laVaR est définie de la façon suivante :

V aR(X;α) = inf(x; P(X ≤ x) ≥ α) (10.4)

Elle est en fait égale au quantile de niveau α. La TVaR correspond à la moyenne des VaR aux niveaux derisque supérieurs à α.

TV aR(X;α) = 11− α

∫ 1

αV aR(X; t) dt (10.5)

Si la fonction de répartition de X est continue, nous pouvons écrire :

TV aR(X;α) = E(X|X > V aR(X;α)) (10.6)

La TVaR est alors la perte moyenne sachant que la V aR(α) est dépassée, c’est donc la perte moyenne dansles 1− α% pires cas.

10.2 Résultat : montant racheté

Nous présentons ici le résultat de nos simulations concernant les montants totalement rachetés. Pour rappel,les expositions annuelles prospectives nous ont été données par des experts. Les montants rachetés ici nedistinguent plus les trois supports : les montants rachetés sur chacun des supports ont été sommés. Legraphique suivant présente Var et TVar pour les montants rachetés annuels et pour différents niveaux derisque, de 50% à 99.5%.

Graphique 10.1 – VaR et TVaR annuels pour les montants rachetés

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Nous retrouvons bien ici la tendance croissante du risque : chaque année, les montants rachetés augmentent.Entre 2016 et 2020, la VaR à 50% a par exemple augmenté de 30%. L’écart entre la VaR et la TVaR seréduit avec le niveau de risque.

10.3 Résultat : indice historique

Ici nous nous intéressons aux indices issus de l’historique du portefeuille, en l’occurrence les taux observésen 2014 ou 2015. Ces taux ne prennent donc pas en compte l’évolution naturelle du risque. Puisque dansnotre modèle, nous supposons une évolution croissante du risque, ces indices pourraient être désavantageuxpour le réassureur.Le graphique ci-dessous présente l’évolution des V aR et TV aR annuelles en fonction du niveau de risquelorsque nous choisissons comme indice le taux de rachat en 2014. Nous constatons que le taux de conservationdiminue avec le niveau de risque. En effet, plus le niveau de risque augmente, plus les montants rachetés etdonc cédés augmentent. De plus, les taux de conservation diminuent avec les années ce qui est explicable :en effet, notre tendance du risque croît avec le temps alors que l’indice choisi est constant dans le temps. En2020, dans 0.5% des cas, nous pourrions être amenés à devoir céder 25% des montants rachetés annuels cequi est conséquent. L’indice choisi conduit systématiquement à la mise en oeuvre du traité de réassurancepuisque dès 2016 un peu moins de 10% sont cédés pour un niveau de risque de 50% ce qui est relativementfaible.

Graphique 10.2 – VaR et TVaR annuels pour le taux de conservation en fonction du risque. Indice choisi :taux moyen observé en 2014.

Cela n’est pas toujours le cas. Par exemple, si nous choisissons comme indice le taux de rachat observé enmars 2015, quels que soient l’année ou le niveau de risque choisis, la V aR et la TV aR sont supérieures à99% : moins d’1% des montants rachetés sont alors à la charge du réassureur. Choisir comme indice le tauxobservé en 2015 conduit à des résultats semblables aux précédents mais légèrement plus élevés (d’1 à 3 %).Choisir décembre 2015 conduit en revanche à des résultats plus faibles. Ces remarques sont résumées dansle graphique à la page suivante (figure 10.3) qui permet de comparer les VaR et TVaR en 2020 en fonctionde l’indice choisi. Nous constatons que pour des niveaux de risque relativement faibles (inférieur à 90%), laTVaR pour "l’indice 2015" est proche de la VaR pour "l’indice 2014".

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Graphique 10.3 – VaR et TVaR annuels pour le taux de conservation en fonction du risque et de l’indicehistorique choisi

10.4 Résultat : indice simulé

Précédemment, nous avons défini des lois quantiles. Ces dernières dépendent du modèle de simulation etprennent en compte l’évolution tendancielle (et croissante) du risque ce qui constitue un avantage par rapportaux indices historiques. De plus elles prennent en compte la saisonnalité ce qui peut avoir son importance :choisir le taux de décembre 2015 comme indice conduisait à céder une large part des montants rachetéstandis que choisir mars 2015 conduisait à quasiment tout conserver. Nous reprenons ici comme indices lesquatre lois quantiles évoquées précédemment : 75%, 90%, 95% et 99.5%. Le graphique suivant présente lesVaR et TVaR annuelles lorsque la loi quantile à 75% est choisie comme indice :

Graphique 10.4 – VaR et TVaR annuels pour le taux de conservation en fonction du risque. Indice choisi :loi quantile à 75%

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Nous pouvons constater que les niveaux de conservation sont légèrement plus élevés que précédemment sansêtre égaux à 100%. Le pire des cas constitue une cession d’environ 10% des montants rachetés (TVaR à99.5% en 2020). Dans les cas les plus favorables, 1% des montants rachetés sont toutefois cédés (VaR à 50%en 2016). Le traité est donc susceptible d’être mis en oeuvre dans tous les cas.De même que précédemment, nous comparons les VaR et TVaR en 2020 en fonction de la loi quantile choisie :

Graphique 10.5 – VaR et TVaR annuels pour le taux de conservation en fonction du risque et de l’indicesimulé choisi

Le traité ne sera pas mis en oeuvre lorsque nous choisissons comme indice la loi quantile à 99.5% ou à 95%.Cela n’est en revanche pas le cas pour les deux autres quantiles.

10.5 Synthèse

Au chapitre précédent, nous avons constaté que les scénarios adverses à 99.5% peuvent conduire à tripler lesmontants rachetés à l’horizon un an et à les quadrupler à 5 ans. Nous avons aussi constaté dans la premièrepartie du huitième chapitre que ces quantiles à 99.5% peuvent conduire à des taux de rachat deux fois plusélevés que ceux observés entre 2008 et 2012. Une couverture de réassurance paraît donc nécessaire pour faireface à de telles ruptures qui pourraient menacer la solvabilité de la compagnie.La réassurance indicielle constitue alors une solution de transfert de risque. Le choix d’un indice historiques’avère délicat : il ne faudrait par exemple pas choisir un indice qui conduit à ne jamais mettre en oeuvrele traité. C’est par exemple le cas du taux observé en mars 2015. Choisir un taux annuel permet alorsd’éviter ces aléas dus à la saisonnalité. Nous pouvons en revanche douter de sa validité sur plusieurs années.Un événement exogène, comme une évolution juridique, qui impacterait de manière permanente le risquede rachat rendrait en effet caduque le taux historique utilisé puisque ce dernier correspondrait alors à unenvironnement juridique dépassé.C’est pourquoi nous préférons utiliser un indice simulé. En effet, à travers la mise à jour du catalogue desscénarios adverses probables, il permet de prendre en compte des déformations temporaires ou permanentesde la tendance du risque de rachat. Le choix d’un quantile constitue alors l’enjeu. Des quantiles trop élevésconduisent à ne jamais mettre en oeuvre le traité. Le quantile à 75% peut alors être un bon compromis.

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Conclusion

Les compagnies d’assurance ne connaissent pas les motivations de l’assuré lorsque ce dernier effectue unrachat. Il est donc impossible de classer les rachats en rachats structurels et rachats conjoncturels. Ainsimodéliser une loi structurelle à proprement parler est difficile : en considérant l’ensemble des rachats observésdans la base de données disponibles, nous comptabilisons certainement rachats conjoncturels et structurels.Ainsi nous devrions plutôt parler de loi de rachat total même si le choix des variables explicatives comme lesupport ou l’ancienneté correspondent plutôt à des grandeurs caractéristiques du contrat et de l’assuré etdonc se rapportent à la dimension structurelle du rachat.Malgré tout, notre étude a montré qu’il est possible de mettre en évidence des hausses de la sinistralitédues à des causes conjoncturelles comme la crise financière de 2008, la crise de la zone euro en 2010 et 2011mais aussi une annonce politique en mars 2012. Pour cela, il ne s’agit pas de calibrer une loi de rachat enfonction de grandeurs économiques et financières exogènes mais de mettre en évidence une tendance propreau portefeuille à l’aide des données disponibles dont il faut pouvoir garantir l’exhaustivité et l’exactitude.Cependant, la modélisation de la tendance ne suffit pas. En effet la réglementation Solvabilité II impose auxcompagnies d’assurance d’évaluer leur risque et leur solvabilité dans le cadre de l’ORSA. En particulier, ils’agit d’anticiper les ruptures probables (temporaires ou permanentes) qui pourraient affecter le portefeuilleet d’identifier les scénarios adverses qui en seraient à l’origine. Ajouter à la tendance d’une part les erreursde prévision et de processus et d’autre part des sauts estimés à partir de nos données et de l’expertise métierest alors une solution possible. A travers le modèle propre à la compagnie, la loi structurelle nous permetd’obtenir la situation économique et financière de la compagnie en régime de croisière. A l’aide des chocscalibrés, nous pouvons alors mesurer la dégradation des indicateurs financiers lorsqu’un scénario adversesurvient.Ce modèle est construit sur l’estimation actuariel du taux de rachat. Cette estimation ne prend pas en comptede manière optimale les phénomènes de censure et de troncature. Dans un second temps, des estimateursplus précis comme celui de Kaplan-Meier auraient pu être utilisés mais cela aurait impliqué de connaîtrel’évolution journalière de la provision mathématique. Concernant les simulations stochastiques effectuéespour mesurer l’évolution future du risque, les résidus ont été tirés de manière indépendante selon unegaussienne. D’autres modèles de séries temporelles comme les modèles autorégressifs et moyenne mobile(plus couramment appelés ARMA) ou les modèles generalized autoregressive conditional heteroskedasticity(GARCH) pourraient constituer une amélioration du modèle. La détection des ruptures de tendance en tempsréel constitue aussi un enjeu de notre modélisation afin de mettre à jour de manière continue les cataloguesde dérives passées et des scénarios futurs probables. La modélisation des campagnes promotionnelles etd’autres décisions commerciales constituent aussi une piste d’amélioration du modèle.Nous avons constaté que certains phénomènes économiques et financiers peuvent conduire à des rachatstotaux trois plus grands que les montants prévus dans un contexte plus favorable. Une telle dérive pourraitmenacer la solvabilité de la compagnie. Cette modélisation des dérives dynamiques nous a permis d’anticiperen étudiant l’efficacité d’une solutions de transfert du risque parmi d’autres : la réassurance indicielle. Unindice prospectif qui prenant en compte les ruptures probables futurs, comme nous en avons modélisé dansle cadre de notre étude, constitue un progrès par rapport à des indices historiques potentiellement caduquesaprès plusieurs années.

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Liste des graphiques

1.1 Solvabilité II : vision schématique du bilan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141.2 Solvabilité II : calcul du SCR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151.3 Solvabilité II : loi de rachats conjoncturels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

2.1 Distribution du nombre de rachats en fonction du montant racheté . . . . . . . . . . . . . . . 232.2 Taux de rachat en fonction du support . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 252.3 Taux de rachat en fonction du genre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262.4 Taux de rachat en fonction de l’ancienneté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262.5 Taux de rachat en fonction de l’année et de la composition du portefeuille . . . . . . . . . . . 282.6 Taux de rachat en fonction du nombre d’événements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 292.7 Évolution mensuelle des montants totalement rachetés entre 2009 et 2015 et répartition men-

suelle relative des montants annuels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

3.1 Comparaison des méthodes d’estimation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 333.2 Loi brute en fonction de l’ancienneté et intervalle de confiance à 95% . . . . . . . . . . . . . . 383.3 Loi de référence et loi en montants prolongée par homothétie . . . . . . . . . . . . . . . . . . 393.4 Estimation d’une loi globale : synthèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

4.1 Loi mensuelle : taux central et intervalle de confiance à 95% . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 424.2 Taux observé, tendance et saisonnalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 434.3 Comparaison entre taux bruts et taux globaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45

5.1 Loi mensuelle calibrée en nombre : taux centraux et intervalle de confiance à 95% . . . . . . 475.2 Taux en montants et en nombres : comparaison des taux observés . . . . . . . . . . . . . . . 485.3 Taux en montants et en nombres : comparaison de la tendance et de la saisonnalité . . . . . . 485.4 Fond euro : tendance en fonction de l’historique de calibrage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 535.5 UCP : tendance en fonction de l’historique de calibrage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 535.6 Fond euro : tendance estimée sur l’historique nettoyé des crises en fonction de la puissance

chosie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 555.7 UCP : tendance estimée sur l’historique nettoyé des crises en fonction de la puissance chosie . 565.8 Fond euro, UC permanentes et temporaires : tendance estimée sur l’historique nettoyé des

crises et taux observés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57

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6.1 Etude de la convergence du quantile à 99.5% en fonction de l’année et du nombre de simula-tions effectuées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59

6.2 Support euro : modèle standard calibré de 2002 à 2007 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 596.3 Support euro : modèle standard calibré de 2002 à 2013 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 606.4 Support euro : modèle standard calibré sur l’historique complet . . . . . . . . . . . . . . . . 606.5 Support euro : modèle standard calibré sur l’historique nettoyé des crises . . . . . . . . . . . 616.6 Synthèse pour chaque support étudié : taux observés, tendance et quantile à 99.5% . . . . . . 63

7.1 Taux observés et tendance entre janvier 2008 et décembre 2012 en fonction du support . . . . 657.2 Dérives passées probables à l’avenir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 677.3 Loi de référence et loi corrigée de la fiscalité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 687.4 Support euro : lois correspondantes aux différents scénarios . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 697.5 Scénarii de dérives futures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 717.6 Modèle à sauts : support euro . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 727.7 Unités de compte permanentes : quantile à 99.5% et loi simulée la plus proche . . . . . . . . . 737.8 Unités de compte permanentes : lois simulées correspondants aux différents niveaux de chocs 737.9 Simulation stochastique du facteur de risque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 777.10 Scénarios adverses correspondant à un certain niveau de risque . . . . . . . . . . . . . . . . . 777.11 Support euro, UC permanentes et temporaires : trajectoire possible à 99.5% . . . . . . . . . . 78

8.1 Modèle à date déterminée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 798.2 Support euro : résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 808.3 Portefeuille étudié : comparaison des tendances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 818.4 UCP : comparaison des tendances en fonction du modèle et du type de prolongement . . . . . 858.5 UCP : tendance et saut central en fonction du modèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87

9.1 Lois centrales en fonction du modèle et du support . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 919.2 Loi globale d’origine et loi globale mise à jour . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 929.3 Lois mensuelles observées, globales d’origine et globales mises à jour . . . . . . . . . . . . . . 93

10.1 VaR et TVaR annuels pour les montants rachetés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9510.2 VaR et TVaR annuels pour le taux de conservation en fonction du risque. Indice choisi : taux

moyen observé en 2014. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9610.3 VaR et TVaR annuels pour le taux de conservation en fonction du risque et de l’indice

historique choisi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9710.4 VaR et TVaR annuels pour le taux de conservation en fonction du risque. Indice choisi : loi

quantile à 75% . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9710.5 VaR et TVaR annuels pour le taux de conservation en fonction du risque et de l’indice simulé

choisi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98

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Liste des tableaux

1.1 Fiscalité de l’assurance-vie en France . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111.2 QIS 5 : modélisation des rachats conjoncturels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

2.1 Critères d’exhaustivité et d’exactitude : pourcentage d’erreurs et répartition des erreurs . . . 222.2 Répartition de l’exposition en 2015 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 282.3 Impact des campagnes : variation relative du taux de rachat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

3.1 Choix d’une combinaison de variables : résultat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 363.2 Choix d’un historique : résultat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 373.3 Comparaison pour l’année 2015 des montants observés et des montants estimés : erreur relative 38

5.1 Régression de long terme : résultats de l’estimation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 505.2 Régression de court terme : résultats de l’estimation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 505.3 Backtesting pour l’année 2015 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 505.4 Impact de l’historique de calibrage sur les estimations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 525.5 Dérive en fonction de l’historique de calibrage et de backtesting . . . . . . . . . . . . . . . . . 545.6 Estimation sur l’historique nettoyé des crises : impact du choix de la puissance . . . . . . . . 555.7 Estimation de la tendance sur l’historique nettoyé des crises . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56

6.1 Quantile du modèle standard : backtesting . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

7.1 Amplitude mensuelle absolue des crises . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 667.2 Volatilité en fonction de la période et du support . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 667.3 Saut fiscal en fonction du scenario et du support . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 697.4 Combinaison des variables pour simuler un certain choc . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 747.5 Amplitude absolue des chocs annuels en fonction du support et du niveau de quantile . . . . 75

8.1 Quantile du modèle à sauts : backtesting . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 808.2 Variation relative des amplitudes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 828.3 Backtesting en fonction du support et de la tendance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 828.4 Estimation des différents coefficients en fonction du modèle et du support . . . . . . . . . . . 848.5 Backtesting en fonction de la période, du modèle et du support . . . . . . . . . . . . . . . . . 848.6 Durée des crises : paramètre des lois de Poisson . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86

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8.7 Modèle à durée aléatoire : amplitude et durée des crises . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87

9.1 Choc conjoncturel relatif en fonction du modèle et du quantile . . . . . . . . . . . . . . . . . 919.2 Montants rachetés : variation relative entre le scénario central et les chocs . . . . . . . . . . . 92

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Note de synthèse

Du 1er octobre 2015 au 30 septembre 2016, j’ai effectué mon stage de fin d’études au sein de la DirectionTechniques Groupe de CNP Assurances (Service Recherche et Développement Actuariel) sous la tutelle deMadame NDOYE. Ma mission consistait à mettre à jour la méthodologie de calibrage des lois derachat total, à calibrer des chocs dynamiques et à étudier une couverture de ce risque.Pour un compagnie d’assurance, un risque est un événement aléatoire qui réduit sa capacité à faire face àses engagements. Concernant l’épargne individuelle, les risques sont variés : risque viager, risque de taux,et en particulier le risque de rachat qui constitue une option cachée du contrat. Par options cachées, nousentendons les droits accordés aux assurés par la réglementation ou par des clauses contractuelles et destinésà rendre le contrat plus souple et plus attractif. Elles dépendent généralement d’une décision de l’assuréet sont une source de difficulté dans l’évaluation des risques financiers de l’assureur. Le rachat permet ausouscripteur de disposer d’une partie (rachat dit partiel) ou de la totalité (rachat dit total) de son épargneavant l’échéance du contrat. Une vague de rachats totaux simultanés pourrait être une source de difficultéspour la compagnie tant à l’actif qu’au passif. En effet pour faire face à la demande de liquidité de la partdes épargnants, la compagnie pourrait être obligée de vendre ses actifs à perte. De plus, le rachat total metfin au contrat : la compagnie ne peut alors plus prélever de frais.Comme de nombreuses compagnies d’assurance, CNP estime chaque année sa MCEV (Market ConsistentEmbedded Value) selon les principes du CFO Forum, organisme créé en 2002 et regroupant les directeursfinanciers des principales compagnies d’assurance européennes. Ces principes constituent un cadre globald’évaluation : les compagnies sont libres de fixer certaines hypothèses, comme les lois de rachat qui peuventainsi être calibrées sur des données d’expérience. C’est pourquoi CNP Assurances calibre des lois de rachaten fonction de variables explicatives qui permettent de prendre en compte les caractéristiques commercialeset financières des différents produits et l’impact de la fiscalité. Cette loi est construite sur un historiquedéfini suivant des tests statistiques ou par expertise métier.Les compagnies d’assurance, les autorités prudentielles et la littérature distinguent généralement deux typesde rachat :

— Le rachat conjoncturel (ou dynamique) lié aux conditions économiques et financières. Généralementsi la concurrence propose des taux plus avantageux, l’assuré rachètera son épargne pour aller la placerchez cette concurrence.

— Le rachat structurel lié aux besoins financiers de l’assuré. Même si les conditions lui sont favorables,un assuré peut avoir besoin de liquidité pour des projets personnels. Ce type de rachat dépend descaractéristiques du produit d’épargne et de l’assuré. Il n’est pas censé être impacté par la conjonctureéconomique.

Généralement les raisons du rachat ne sont pas connues de l’assureur : il est donc difficile de calibrer une loistructurelle et une loi conjoncturelle à partir de données d’expérience.Nous étudions en particulier un produit d’épargne grand public et multi-support. La base de données dontnous disposons contient des informations sur les assurés (sexe, date de naissance), leur contrat (date de sous-cription, éventuelles causes et date de sortie) et les situations financières des différents supports disponibles(euro, unités de compte permanentes et temporaires). Avant tout chose, il nous a paru important de mesurerà l’aide d’un critère numérique l’exhaustivité et l’exactitude de la base de données. Par exhaustivité, nous

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entendons l’absence de données manquantes. Par exactitude, l’absence d’incohérences. Les résultats sonttrès satisfaisants puisque le critère d’exhaustivité s’élève à 99.32% et celui d’exactitude à 99.53%.Nous avons donc commencé par calibrer une loi de rachat en montants en fonction de l’ancienneté. Cette loiest dite globale au sens où tous les rachats observés sont pris en compte, structurels comme conjoncturels :

— Etape 1 : choix de l’estimateur actuariel pour le calibrage des taux de rachat. En effet, la provisionmathématique de chaque contrat n’est disponible qu’au moment du rachat.

— Etape 2 : choix des variables explicatives. Nous comparons les prévisions des différentes combinaisonsde variables possibles (genre, ancienneté, âge à la souscription, support) et retenons alors le supportet l’ancienneté.

— Etape 3 : choix de l’historique. Nous comparons les prévisions des différents historiques à l’aide d’unebase d’apprentissage et d’une base de test et sélectionnons le meilleur historique.

— Etape 4 : estimation de la loi brute de chaque support. Le produit étudié est en effet composé detrois supports : fond euro, unités de compte permanentes et unités de compte temporaires.

— Etape 5 : prolongement des lois brutes jusque la 50ème ancienneté puisque les engagements de lacompagnie sont projetés sur 50 ans.

Le tableau suivant constitue une synthèse de l’estimation de cette première loi globale :

Estimation d’un loi globale : synthèse

Nous nous intéressons maintenant à la capacité de cette loi globale à prévoir les dérives conjoncturelles durisque observées dans le passé et probables dans le futur : en effet nous souhaitons calculer le capitaléconomique pouvant être nécessaire pour assurer la solvabilité de la compagnie en cas descénarios défavorables. Pour étudier l’impact de la conjoncture économique, financière et politique surle risque de rachat, nous adoptons un point de vue mensuel, c’est-à-dire que nous calibrons maintenant destaux de rachat mensuels, toujours en montants, entre le début et la fin de l’historique :

— Etape 1 : linéarisation de la provision mathématique. Puisque la provision mensuelle exacte n’est pascalculable, nous linéarisons donc la provision mathématique entre chaque début et fin d’année.

— Etape 2 : calcul des taux mensuels bruts. Au contraire de la provision mathématique, nous disposonsdes montants rachetés mois par mois.

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— Etape 3 : mise en évidence de la saisonnalité. Nous avons en effet remarqué que les montants rachetéssont plus élevés en début d’année (effet probable lié à l’insatisfaction).

— Etape 4 : calibrage d’une loi globale mensuelle.Nous pouvons donc comparer pour chaque support le taux mensuel brut et le taux mensuel global. Nousconstatons alors que certains pics de rachat ne sont pas estimés par le modèle global. Par exemple, en mars2012 les taux globaux sont bien inférieurs aux taux bruts. Cette constatation nous pousse à calibrer des chocsdynamiques à appliquer aux lois estimées précédemment pour prendre en compte un contexte économiqueet financier défavorable.

Lois mensuelles brute et globale en fonction du support

La crise financière de 2008 qui suit la crise des subprimes et la faillite de la banque d’investissement multi-nationale Lehman Brothers est un exemple de crise conjoncturelle que nous jugeons probable à l’avenir. Lesdonnées étant indisponibles en montants, nous adoptons maintenant des lois mensuelles en nombres. Nousavons mis en oeuvre un première modèle de calibrage des ruptures, dit modèle standard, qui s’est avéré sanssuccès :

— Etape 1 : choix d’une tendance par support. Nous utilisons un modèle de régression linéaire. Lavariable expliquée est le taux mensuel (en nombres), les variables explicatives sont une fonctionpuissance du temps et les différents mois de l’année.

— Etape 2 : calibrage et prolongement d’une tendance. Le modèle linéaire sélectionné à l’étape 1 estmaintenant estimé sur l’historique nettoyé des crises observées entre 2008 et 2012. En particulier nousestimons la volatilité des résidus, σ. La tendance est prolongée jusqu’à décembre 2020.

— Etape 3 : simulation stochastique. Pour chaque simulation, nous tirons 60 résidus indépendants etidentiquement distribués selon une N (0;σ), un pour chaque mois entre janvier 2016 et décembre2020. Ils sont ensuite ajoutés à la tendance.

— Etape 4 : calcul des quantiles. Pour chaque mois entre janvier 2016 et décembre 2020, nous pouvonsalors calculer le quantile de niveau x% de la série des taux simulés. Finalement, nous obtenons deslois quantiles de 2016 à 2020.

Modèle standard : support euro

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Nous pouvons alors constater sur le graphique précédent que les quantiles, même les plus élevés (par exemple99.5%), sont parfois inférieurs à certaines ruptures observées dans le passé. C’est pourquoi nous mettons enoeuvre un second modèle dérivé du premier. Malgré tout, ce premier modèle permet de modéliser l’erreur deprocessus et d’estimation à travers la volatilité des résidus ce qui constitue un avantage que nous souhaitonsconserver dans la suite.Dans une optique d’évaluation propre des risques, nous souhaitons ajouter à la tendance (accompagnéedes erreurs de prévision et de processus) une composante relative à de fortes ruptures de tendance. Cesruptures peuvent correspondre aux pics de rachat observés entre 2008 et 2012 ou à des scénarios possiblesnon observés, par exemple une réforme de la fiscalité de l’assurance-vie :

— Etape 1 : calibrage et prolongement de la tendance. Cette étape est identique à la seconde étape dumodèle précédent. En particulier, nous conservons la volatilité des résidus, σhors−crise.

— Etape 2 : calibrage des phénomènes de rupture observés entre 2008 et 2012. Il s’agit d’estimer l’am-plitude des crises (Ampcrise) et la volatilité (σcrise) pour les périodes suivantes : automne 2008,printemps 2010, printemps 2011, mars 2012. Les crises de 2010 et 2011 correspondent à la crise dela dette souveraine dans la zone euro. La crise de mars 2012 correspond à une annonce politique ducandidat François Hollande à propos de la fiscalité de l’assurance-vie : il laissait entendre que lesconditions fiscales avantageuses seraient supprimées.

— Etape 3 : calibrage de différents scénarios probables de réforme de la fiscalité de l’assurance-vie àl’aide d’avis d’experts et de l’estimation précédente de la loi globale.

— Etape 4 : simulation. Pour chaque simulation :— Etape 4.A : Comme pour le précédent modèle, nous tirons 60 résidus selon une N (0;σhors−crise)

que nous ajoutons à la tendance.— Etape 4.B : calibrage du saut fiscal.— Etape 4.C : calibrage des sauts correspondants à chacune des quatre crises. Pour chaque crise,

l’intensité est tirée selon une loi de Poisson de paramètre 1. L’amplitude est tirée selon uneN (Ampcrise;σcrise).

— Etape 4.D : obtention du taux final comme somme de la tendance, des résidus tirés à l’étape 4.A,du saut fiscal et des sauts de crise.

— Etape 5 : calcul des quantiles pour un certain niveau x des taux simulés.

Le tableau suivant dresse un catalogue des dérives observées dans notre portefeuille et constituant desscénarios adverses probables à l’avenir :

Catalogue des dérives observées dans le portefeuille étudié

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En plus de ces ruptures déjà observées dans le passé, nous avons calibré des scénarios fiscaux. Le tableausuivant récapitule alors les différents scénarios adverses probables à l’avenir :

Catalogue des scénarios adverses probables à l’avenir

Nous constatons alors que les lois quantiles à partir de 90% permettent d’obtenir des ruptures dont lesamplitudes sont supérieures à celles observées dans le passé. Ce modèle nous paraît donc satisfaisant.

Modèle à sauts : support euro

En étudiant la distance entre les lois quantiles et les trajectoires simulées, nous pouvons aussi déduire desscénarios de crise ayant une certaine probabilité de survenance :

Scénario adverse probable pour un niveau de risque donné

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Le choc dynamique de niveau x% pour l’année 2016 est alors définie comme la différence entre le quantile(annualisé) de niveau x et la tendance (annualisée). Ces chocs dynamiques ont été calibrés en nombres maisen effectuant un changement d’échelle, ils sont convertis en montants.Lors du calibrage de la loi globale en montants, l’historique de calibrage incluait des périodes considéréescomme des crises par notre modèle à sauts. Ainsi cette loi qui correspond en fait à un scénario centralcapture en fait des dérives passées du risque : le scénario central est donc aggravé à tort. C’est pourquoi ilest nécessaire de calibrer une loi globale en excluant les montants rachetés pendant les périodes de crise.Nous avons aussi décidé d’exclure les rachats ayant lieu après le décès de l’assureur : ces sorties ne devraientpas être comptabilisés en rachats totaux. Les chocs de niveau x calibrés précédemment permettent de définirdes scénarios adverses qui ont une probabilité de survenance donnée et donc de calculer des montants decapital économique : par exemple, le choc à 99.5% correspond à des montants rachetés 3 fois plus grandsque les montants prévus dans un contexte favorable.Ce dernier constat nous conduit à mettre en oeuvre un traité indiciel de réassurance : les montants derachat sont cédés dès que le taux de rachat simulé dépasse un indice prédéterminé. Il peut s’agir d’un indicehistorique, par exemple le taux de rachat observé en 2015, ou un indice simulé, par exemple le quantileà 75%. Nous pouvons calculer des montants annuels cédés par années et par trajectoire simulée : nousdisposons donc d’une distribution des taux de montants conservés par années. La comparaison des résultatsen fonction des indices choisis nous conduit à préférer un indice simulé. En effet notre catalogue de scénariosadverses probables permet alors de prendre en compte une dérive temporaire ou permanente de la tendancequi rendrait alors caduque un indice historique. Comme indice simulé, nous avons étudié les différentes loisquantiles déterminées précédemment : des quantiles trop élevés (95% ou 99.5%) conduisent à ne jamaismettre en oeuvre le traité de réassurance. C’est pourquoi nous préconisons des quantiles plus faibles, parexemple 75%.Finalement, notre étude a permis non pas de calibrer une loi conjoncturelle en fonction de grandeurs écono-miques ou financières exogènes mais de mettre en évidence une tendance propre au portefeuille étudié à l’aidedes données disponibles dont l’exhaustivité et l’exactitude ont été garanties. Dans le cadre de l’évaluationinterne des risques et de la solvabilité (ORSA), il nous a aussi paru important d’anticiper les ruptures pro-bables qui pourraient affecter le portefeuille et d’identifier les scénarios adverses qui en seraient à l’origine.La détection des ruptures de tendance en temps réel constitue alors un nouvel enjeu afin de mettre à jourde manière continue le catalogue des scénarios adverses.

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Concept note

From 1st October to 30th September, I carried out my internship within Risks Management Services (Ac-tuarial Service Research and Development) under the supervision of Mrs NDOYE. My mission consistedin updating the methodology used to calibrate the probability distribution of total lapse andto estimate dynamic shocks in order to disturb it.For an insurance, a risk is a random event which reduces the abality to honour its commitments, for exemplelapse risk : policyholders can recover all (total lapse) or a part (partial lapse) of their initial contract value.If a lot of policyholders surrendered their Life Insurance contract all the same time, insurance could be putin difficult financial position. Each year, CNP publishes its MCEV (Market Consistent Embedded Value)calculated according to the principles of the CFO Forum, organisation created in 2002 which is gathering thefinance directors of principal European insurance companies. These principles constitute a comprehensiveframework of evaluation : the companies may fix some assumptions. That’s why we estimate a distributionof total lapse. This distribution is based on some available variables. To select some contracts and excludeothers, CNP fixes the history which is determined thanks to statistical tests or expert’s opinion.Two types of lapse are generally distinguised :

— Conjonctural lapse can be explained by economic and financial situation. If competitor businnessproposes a best rate of return, policyholders can surrender they contract to place their savings in thiscompany.

— Structural lapse can be explained by individual characteristics of policyholders or by characteristicsof the contract. Policyholders can need their savings to fund their projects, for instance housing.Theoretically, it should not be impacted by economic circumstances.

When a policyholder surrenders his contract, insurance does not know if this lapse is structural or conjonc-tural : consequently structural or conjonctural distribution can not be estimated.We study a mainstream multisupport saving product. In our database, we have information about savers(gender, date of birth), contract (subscription date, potentiel exit date and cause) and financial situation ofavailable supports (euro, permanents unit-linked, temporary unit-linked). Before mining data, we quantifydata exhaustivenness and accuracy. Exhaustivenness means the absence of missing data and accuracy theabsence of inconsistancy. Outputs are satisfactory since exhaustiveness criterion is equal to 99.32% andaccuracy criterion 99.53%.That’s why, we start with calibration of a global distribution by age. This distribution is global since allobserved surrender are used for estimation :

— Step 1 : database is extracted and controlled— Step 2 : actuarial estimator is chosen. We can not use more precise estimators since exact mathema-

tical provision is not available.— Step 3 : a record is chosen by comparing prevision with learning and test base.— Step 4 : a distribution is estimated for each saving count : euro, permanent and temporary units of

account,— Step 5 : distributions are prolonged since financial liabilities are calculated within 50 years.

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The following table summarizes qualitative items about the calibration of this global distribution :

Calibration of global distribution : overview

We wonder whether if these distributions can forecast consequences of likely financial shock. We wish indeedto calculate the necessary economic capital to ensure solvency in case of adverse scenario. For this purposewe use monthly distribution :

— Step 1 : Financial reserve is linearized since exact mathematical provision can not be monthly calcu-lated.

— Step 2 : Gross monthly distribution is calculated. Exact redeemed amount is available.— Step 3 : Seasonnality effect is estimated. Policyholders surrendered they contract more frequently at

the beginning of the year.— Step 4 : Global monthly distribution is estimated using the previous global distribution.

We can compare the untreated and the global distribution : we note on the figure below that lapse peaksare not estimated by the global model. Then we have to calibrate dynamic shocks that we add to previousglobal distribution to take into account likely unfavourable financial situation.

Gross and global monthly distribution

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For example we would like to estimate the impact of 2008 crisis on lapse. Mathematical provision andredeemed amount are not available before 2009. To take into account the 2008 crisis, we use the number ofcontrats from now on. Our first statistical model is unsucessful :

— Step 1 : trend is chosen with linear regression. Explanatory variables are time power function andmonths.

— Step 2 : trend is estimated and prolonged until 2020. We eliminated the financial crisis (from 2008 to2012) from the estimation record. In particular we estimate the residual volatility, σ.

— Step 3 : simulation. For each simulation, we draw 60 residues with a gaussian distribution. They areadded to the trend.

— Step 4 : x percent quantiles are estimated for each month between 2016 and 2020.We note on the figure below that the quantiles are lower, even 99.5% quantiles, than real lapse rates. That’swhy a second model is set up. However we keep the estimated trend and the residual volatily since theyenable to estimate process and estimation error.

Standard model : euro

In order to evaluate correctly risk, we would like to add to the trend a component relating to strongbreakdown. These breakdowns can be observed (between 2008 and 2012) lapse peaks or possible unobservedscenario, for example a reform of life insurance taxation :

— Step 1 : trend is estimated and prolonged. In particularly we keep the residual volatility (σhors−crise).This step is identical to the second step of the previous model.

— Step 2 : lapse peak between 2008 and 2012 are estimated : we quantify amplitude and volatility forthe followin periode : autumn 2008, spring 2010, spring 2011, March 2012. In the springs of 2010and 2011, peaks are due to the crisis in euro zone. In March 2012, François Hollande announced areform concerning insurance taxation if he was elected two months after : attractive taxation wouldbe perhaps cancelled after his election.

— Step 3 : Likely scenario of taxation reform are estimated using views of experts.— Step 4 : simulation. For each simulation :

— Step 4.A : For each simulation, we draw again 60 residues with a gaussian distributionN (0;σhors−crise).They are added to the trend.

— Step 4.B : Tax jump is estimated— Step 4.C : Jump for each crisis between 2008 and 2012 is estimated. Intensity is drawn according

to a Poisson distribution, amplitude according to N (Ampcrise;σcrise).— To obtain final lapse rate, we sum the trend, redidues, tax jump and crisis jumps.

— Step 5 : quantiles are calculated.

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The following table summarizes observed breakdown in our portfolio which constitue probable future adversescenario :

Observed breakdown in our portfolio

In addition to these observed breakdowns in the past, we have calibrated tax scenario from our globalestimation. The following table summarizes the probable future adverse scenariis :

Probable adverse scenarii in the future

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We note on the figure below that quantile distribution from 90% enable to obtain breakdown whose rangeare equate to past breakdowns. This model is alose satisfactory.

Jump model : euro

Finally we can deduce adverse scenarii with quite a few probality of occurence :

Probable adverse scenario for a given risk level

The x% dynamic shock is defined as the difference between the x% quantile (annualized) and the trend(annualized). These dynamic shocks have been estimated using number of surrender and not amount ofsurrender but we have a method to transform them into amount shocks. This method is not detailed here.When we estimated the global distribution amount, the record included crisis which are modeled by thejump model. Then this distribution which is supposed to be a central scenario, actually captured formerrisk drift : central scenario is wrongly worsened. That’s why it is necessary to estimate a global distribu-tion after excluding amount which were surrended during crisis. Previously estimated x% shocks enable todefine adverse scenarii with given occurence probability and consequantly to calculate economic capital :for exemple, 99.5% shock corresponds to surrended amount three times as much as expected amount in afavorable environment.Consequently we decide to model a index-based reinsurance treaty : lapse are transferred as soon as simulatedlaspe rate exceeds a given index. It can be an historical index, for instance 2015 laspe rate, or a simulatedinde, for instance 75% quantile. For each year and each simulated distribution, we can measure transferredlapse : we obtain a retention rate distribution by years. We prefer simulated index than historcial indexsince our probable adverse scenario reviex enables us to take into account a permanent or temporary driftwhich could make the historical index obsolete. We take our quantile distribution as simulated index : if thequantile is too high, the reinsurance treaty is never applied. That’s why we advice lower quantiles, such as75% quantile.Finally, we do not estimate a conjonctural distribution which would depend on exogenous economic andfinancial variables but prefer to estimate an inherent trend from data whose accuracy and exhaustiveness hae

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been guaranteed. As part of the Own Risk and Solvency Assesment (ORSA), we have anticipated probabledrift which could disrupt our portfolio and identified averse scenarii. Thus it is important to detect drift inreal time in order to update our adverse scenario review continuously.

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