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HEC MONTRÉAL
L’Industrie Pharmaceutique en Chine
Identification, positionnement et élaboration des relations avec les parties prenantes
Par
Anne-‐Claire POINAS
Sciences de la gestion
(Marketing)
Mémoire présenté en vue de l’obtention
du grade de maîtrise ès sciences
(M.Sc.)
Septembre 2012
© Anne-‐Claire POINAS, 2012
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Résumé
La fin de l’ère « blockbuster », l’essor des génériques, les restrictions d’accès au marché ou encore
la montée en puissance des pays émergents confrontent l’industrie pharmaceutique à d’importants
bouleversements lui imposant une révision de ses modèles d’affaires.
Désormais, l’élaboration des stratégies marketing des compagnies pharmaceutiques est guidée par
un ensemble de parties prenantes ayant le pouvoir d’influencer d’une manière ou d’une autre la
consommation finale des médicaments ("Research and Markets," 2006). Le secteur de la Santé se
complexifie pour devenir un réseau où les individus qui le caractérisent interagissent et dépendent
les uns des autres. L’évolution de certains facteurs socio-économiques a favorisé l’émergence de
plusieurs groupes d’individus intervenant sur le marché pharmaceutique et étant tous susceptibles
d’avoir une influence directe ou indirecte sur la santé du patient. En effet, l’environnement de la
tarification et du remboursement des médicaments est devenu au cours des dix dernières années
très complexe et constitue un réel défi pour les compagnies pharmaceutiques. La liste des
obstacles à franchir pour qu’un médicament accède au marché, tels que la sécurité ou la qualité, est
depuis peu complétée par la notion de “coût-efficacité”. La diminution des dépenses de santé est
une tendance omniprésente qui génère l’essor du pouvoir des payeurs et contribue à la complexité
des stratégies de mise sur le marché d’un médicament. D’autre part, les rôles du corps médical et
des patients évoluent et ce notamment avec la progression des systèmes d’information.
Dans ce contexte, le modèle traditionnel où le pouvoir décisionnel est entre les mains du
prescripteur est aujourd’hui désuet et la compréhension des besoins et intérêts de l’ensemble des
parties prenantes apparaît indispensable à l’atteinte des objectifs d’une compagnie
pharmaceutique. Un plan d’affaires à une seule dimension ne peut être pertinent actuellement.
“There is no point in trying to persuade a clinician to prescribe your product if you are not able to
persuade the people who hold the purse strings and have the ability to change a service or create
the opportunity for your product to be used” (Rosen)
Dans un contexte général, nous observons dans le monde académique mais aussi dans celui des
affaires, un changement de paradigme du marketing qui tend à adopter une approche relationnelle
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plutôt que transactionnelle (M. J. Polonsky & Scott, 2005). Les experts cherchent désormais à
établir et maintenir des relations avec l’ensemble des individus susceptibles d’avoir un impact sur
les activités de leurs compagnies. D’un individu à l’autre, le type de relation développé est
différent et ce dans l’objectif de rendre cette relation la plus bénéfique ou moins nuisible possible
pour la compagnie (Savage, Nix, Whitehead, & Blair, 1991). Plusieurs auteurs se sont alors
penchés sur la réalisation d’une matrice proposant un type de relation à développer avec les parties
prenantes selon leur profil d’influence. Dans le cadre de notre étude nous nous pencherons plus
particulièrement sur celle proposée par Freeman puis révisée par plusieurs auteurs (Freeman,
1984).
L’objectif de notre étude est de déterminer si cette matrice constitue un outil utile pour guider les
gestionnaires dans l’élaboration des relations entre une compagnie et ses parties prenantes. Par
cette étude, nous voulons comprendre comment la compagnie interagit avec les individus de son
environnement. De manière plus spécifique, nous nous pencherons sur le cas de l’industrie
pharmaceutique en Chine.
Afin de respecter la perspective exploratoire de la recherche, une méthodologie qualitative a été
employée. Nous avons ainsi procédé à la réalisation d’entrevues semi-dirigées auprès de
gestionnaires d’une compagnie pharmaceutique multinationale américaine ayant des activités en
Chine. Ceci a permis de déterminer les actions mises en place par la compagnie à l’égard des
groupes de parties prenantes étudiés. En analysant ces actions, nous avons défini le type de la
relation que la compagnie développe avec les individus de son environnement dont le profil
d’influence varie. Afin de réduire les limites de l’étude de cas, les résultats obtenus ont été croisés
avec ceux issus d’une entrevue avec un expert du domaine.
À la lumière des résultats obtenus, la recherche montre la volonté des compagnies à intégrer
l’ensemble de ses parties prenantes à son approche marketing. À la vue des profils d’influence des
groupes d’individus étudiés et des types de relation définis, nous ne constatons pas de concordance
directe avec la matrice de Freeman.
Mots clés : Industrie pharmaceutique, Chine, parties prenantes, payeurs, distributeurs, corps
médical, patients, relations.
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Table des matières
Résumé ....................................................................................................................................................... 2
Table des illustrations ........................................................................................................................... 7
Liste des abréviations ............................................................................................................................ 8
Remerciements ..................................................................................................................................... 10
Mise en contexte ................................................................................................................................... 11
Chapitre 1 – Revue de la littérature ............................................................................................... 13 I. Du marketing transactionnel au marketing relationnel ............................................................. 13 II. Le concept de parties prenantes (PP) .............................................................................................. 17 III. La gestion des relations avec l’ensemble des PP ........................................................................ 20 IV. Les PP et l’industrie pharmaceutique ............................................................................................. 24 V. Les compagnies pharmaceutiques occidentales en Chine ........................................................ 33
Chapitre 2 -‐ Propositions de recherche -‐ Cadre conceptuel .................................................. 37
Chapitre 3 – Méthodologie ................................................................................................................ 40
I. La méthode de recherche : une approche qualitative .................................................................. 40 II. La stratégie de recherche : l’étude de cas ....................................................................................... 41 III. L’échantillonnage et le choix de l’informateur clé ..................................................................... 42 1. La sélection du cas ..................................................................................................................................................... 42 2. La sélection des répondants ............................................................................................................................... 43 3. La sélection de l’informateur clé ...................................................................................................................... 43
IV. La collecte de données ......................................................................................................................... 44 1. L’instrument de collecte de données .............................................................................................................. 44 2. La collecte de données .......................................................................................................................................... 45 3. Les mesures de confidentialité et d’éthique ................................................................................................ 46 4. La présentation et l’analyse des résultats .................................................................................................... 46
Chapitre 4 -‐ Collecte de données ..................................................................................................... 48
I. Données secondaires – Étude de l’environnement ....................................................................... 48 1. « Healthcare Reform » .......................................................................................................................................... 48 2. Une demande en forte augmentation ............................................................................................................. 49 3. L’accès au marché ................................................................................................................................................... 51
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4. Enregistrement d’un produit ............................................................................................................................. 52 5. Le prix/ Remboursement .................................................................................................................................... 55 6. Le réseau de distribution des médicaments ............................................................................................... 61 7. Le corps médical ...................................................................................................................................................... 65 8. La concurrence ......................................................................................................................................................... 67
II. Données primaires issues de l’étude de cas – Étude des stratégies organisationnelles . 67 1. Actions dédiées aux payeurs .............................................................................................................................. 68 2. Actions dédiées aux distributeurs ................................................................................................................... 71 3. Actions dédiées aux médecins ........................................................................................................................... 71 4. Actions dédiées à la population ........................................................................................................................ 73
III. Bilan des données issues de l’étude de cas ................................................................................... 74
Chapitre 5 -‐ Analyse des résultats .................................................................................................. 76
I. Motivations de la relation entre les deux parties .......................................................................... 76 II. Bilan des actions mises en place à l’égard des PP et de leurs finalités ................................. 76 1. Payeurs ........................................................................................................................................................................ 76 2. Distributeurs ............................................................................................................................................................. 77 3. Corps médical ........................................................................................................................................................... 77 4. Population .................................................................................................................................................................. 78
III. Détermination du type de relation .................................................................................................. 78 1. Relations avec les payeurs .................................................................................................................................. 78 2. Relations avec les distributeurs ....................................................................................................................... 79 3. Relations avec le corps médical ........................................................................................................................ 79 4. Relations avec les patients .................................................................................................................................. 80
Chapitre 6 – Vérification des résultats du cas ............................................................................ 81
I. Données primaires issues de l’entrevue avec l’informateur clé .............................................. 81 II. Ajustement des résultats ...................................................................................................................... 83
Chapitre 7 – Discussion et limites de la recherche ................................................................... 86
I. Discussion : Principaux constats – Convergences et divergences avec la littérature ....... 86 1. Étude de la proposition 1 .................................................................................................................................... 86 2. Étude de la proposition 2 .................................................................................................................................... 88 3. Étude de la proposition 3 .................................................................................................................................... 89 4. Étude de la proposition 4 .................................................................................................................................... 90
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II. Limites de la recherche ......................................................................................................................... 94 1. Aspects méthodologiques ................................................................................................................................... 95 2. Aspects analytiques ............................................................................................................................................... 95
Chapitre 8 -‐ Conclusion ...................................................................................................................... 97
I. Avenues de recherche ............................................................................................................................. 97 II. Implications managériales .................................................................................................................. 98 1. La nécessité d’étendre l’approche marketing ............................................................................................. 98 2. Les moyens pour étendre l’approche marketing ...................................................................................... 98 3. Élaborer des relations adaptées ....................................................................................................................... 99 4. L’évolution du marché chinois et ses opportunités .............................................................................. 100
III. Le mot de la fin .................................................................................................................................... 101
Annexe ................................................................................................................................................... 103
Annexe 1 : Document de sollicitation – Présentation du sujet ...................................................... 103 Annexe 2 : Guide de discussion – Étude de cas ................................................................................... 105 Annexe 3 : Guide de discussion – Informateur clé ............................................................................. 108
Bibliographie ....................................................................................................................................... 111
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Table des illustrations
Tableau 1 : Comparaison du marketing relationnel et transactionnel
Tableau 2: Matrice théorique des parties prenantes
Figure 1: Comparaison de l’évolution des ventes dans les villes de rang 1 et rang 2 de grande et
petites tailles (2006)
Tableau 3 : Présentation des répondants
Tableau 4 : Systèmes de couvertures disponibles sur le marché chinois
Figure 2 : Procédure d’enregistrement d’un médicament (médicament importé)
Tableau 5 : Répartition des médicaments occidentaux et traditionnels au sein des listes
Tableau 6 : La contribution aux ventes des produits inscrits sur la NRDL pour les compagnies
multinationales
Tableau 7 : Classes thérapeutiques couvertes par la NRDL - MOHRSS
Tableau 8 : Organisation des établissements de santé
Tableau 9 : Distributeurs régionaux – 2010
Figure 3 : Évolution de la répartition des activités des distributeurs
Figure 4 : Bilan des actions mises en place par les compagnies à l’égard de leurs PP, leurs
finalités ainsi que les motivations qui guident leur mise en place
Figure 5 : Matrice comparative de la littérature et des résultats de notre étude concernant les types
de relations développés entre une compagnie et ses PP
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Liste des abréviations
CDE : Center for Drug Evaluation
EDL : Essential Drug List
KOL : Key opinion leader
MoH : Ministry of Health
MOHRSS : Ministry of Human Resources and Social Security
MSL : Medical science liaison
NDRC : National Development and Reform Commission
NRCMS: New Rural Cooperative Medical System
NICPBP : National Institute for the Control of Pharmaceutical and Biological Products
NRDL : National Reimbursement Drug List
OMS : organisme mondial de la santé
PP : Parties prenantes
POL : Patient opinion leader
PRDL : Provincial Reimbursement Drug List
R-D : Recherche et développement
SATCM : State Administration of Traditional Chinese Medicine
SDA : State Drug Administration
SFDA : State Food and Drug Administration
ST : Théorie des parties prenantes ou Stakeholder theory
TCM : Traditionnal chinese medicine
UEBMI Urban Employee Basic Medical Insurance
URBMI: Urban Resident Basic Medical Insurance
VIH : Virus de l’immuno déficience humaine
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WM : Western medicine
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Remerciements
Car cette étude n’aurait pu être réalisée sans les personnes ayant participées aux entrevues,
j’adresse mes remerciements les plus sincères à ces gestionnaires qui ont en plus de m’accorder du
temps ont cru en mon projet et en ont fait toute sa richesse. Ne pouvant malheureusement les
nommer par question de confidentialité, ma gratitude à leur égard est toutefois considérable.
Je remercie tout particulièrement Jacques Dessureault, pour l’intérêt porté à mon travail et sans qui
je n’aurais pu entrer dans la compagnie sujette à l’étude. Louis Hébert, directeur de ce mémoire,
qui a su partager son savoir et me donner des conseils avisés doit également être remercié.
Merci à tous les membres de mon entourage qui souvent à leur insu m’ont aidé et surtout soutenu
dans ce projet. Je pense tout particulièrement à ma famille qui malgré la distance a su me
m’encourager. Je pense aussi à mes colocataires et amis dont la présence a été un soutien
inestimable.
À toutes ces personnes qui ont su partager leurs connaissances, me conseiller ou m’encourager, je
leur exprime toute ma gratitude et leur assure que je saurais rendre la pareille à mon prochain.
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Mise en contexte
Le présent travail est né d’un questionnement personnel ; Qui sont les véritables clients de
l’industrie pharmaceutique ? Le patient, le corps médical ou les payeurs ? Et par conséquent, à qui
sont destinées les actions marketing des compagnies pharmaceutiques ?
Les compagnies se sont longtemps focalisées sur le médecin dans l’objectif de le convaincre de
prescrire leurs médicaments plutôt que les produits concurrents. Désormais, et ce depuis plusieurs
années, le nombre d’individus influençant la prise de décision de la consommation d’un
médicament est grandissant. Sobrio et Keller distinguent quatre groupes de parties prenantes au
sein du réseau de la santé : les payeurs composés par les autorités gouvernementales et les
assurances privées, les fournisseurs composés des distributeurs et fabricants, le corps médical et le
public (Sobrio & Keller, 2007). Alors que le corps médical a souvent fait l’objet de tous les efforts
marketing, les payeurs et le public bénéficient d’un pouvoir croissant dans cet environnement
(Illert & Emmerich, 2008). Ces changements imposent aux compagnies d’élaborer des stratégies
adaptées à chacun des groupes de parties prenantes afin de répondre de manière optimale à leurs
besoins. Conscientes de cette évolution, les compagnies ont encore de la difficulté à adapter leurs
modèles d’affaires et à bâtir des relations avec l’ensemble des individus ayant un pouvoir dans le
réseau de la santé (Meyer & Ines, 2006).
Le concept de parties prenantes a été largement étudié dans la littérature managériale et a fait son
apparition dans la littérature marketing avec l’émergence de la théorie du marketing relationnel
(Parmar et al., 2010). Certains auteurs ont testé l’applicabilité des concepts managériaux au
contexte marketing (Payne, Ballantyne, & Martin, 2005) mais encore peu d’études empiriques ont
été réalisées. La littérature spécifique au marché pharmaceutique contient plusieurs études mettant
en avant l’évolution de l’environnement et l’importance croissante de l’ensemble des parties
prenantes (Sobrio & Keller, 2007). Toutefois, la relation entre les compagnies pharmaceutiques et
ses parties prenantes n’a pas encore suscité l’intérêt des chercheurs.
Le marché pharmaceutique chinois connaissant une croissance majeure depuis les cinq dernières
années (Datamonitor, 2011b) a stimulé l’intérêt des compagnies occidentales. La complexité du
marché tant sur le plan réglementaire, logistique ou culturel constitue un réel défi pour les
compagnies étrangères s’implantant sur le sol chinois. Face à l’existence de ces difficultés, nous
avons choisi de consacrer notre étude au marché pharmaceutique chinois.
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Le premier chapitre de ce travail dresse une revue des connaissances académiques par
l’intermédiaire d’une revue de la littérature. Celle-ci se concentre autour des thèmes liés au sujet
de l’étude, soit le marketing relationnel, la notion de parties prenantes, et le marché de l’industrie
pharmaceutique. Par la suite, les propositions de recherche ainsi que le cadre conceptuel seront
élaborés (chapitre 2). La méthodologie employée lors de l’étude sera justifiée (chapitre 3). Les
données récoltées seront ensuite présentées (chapitre 4), analysées (chapitre 5) et vérifiées
(chapitre 6). À la vue des résultats obtenus nous élaborerons une discussion, présenterons les
limites de l’étude, les avenues de recherche et établirons les recommandations (chapitre 7 et 8).
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Chapitre 1 – Revue de la littérature
Pour bien comprendre les phénomènes reliés au sujet de ce mémoire et ainsi bâtir des propositions
pertinentes, la revue de littérature se divise en quatre grands thèmes. Nous décrirons dans un
premier temps la notion de marketing relationnel. Nous verrons ensuite le concept de parties
prenantes au sein de la littérature managériale puis marketing. Nous aborderons le concept de
parties prenantes (PP) dans le secteur faisant l’objet de notre étude : l’industrie pharmaceutique.
Enfin, nous étudierons la littérature concernant les compagnies occidentales sur le marché chinois.
I. Du marketing transactionnel au marketing relationnel
L’approche traditionnelle du marketing concentrée sur le produit et non sur le marché, ne permet
pas selon Kotler de considérer les évolutions de l’environnement tels que les changements
démographiques, économiques et technologiques (Kotler, 1994).
Le paradigme du marketing mix a pendant longtemps dominé la pensée, la recherche et la pratique
marketing. Toutefois, sa remise en question a suscité l’émergence de nouvelles approches au cours
des dernières années. De nombreux auteurs ont consacré un temps considérable à critiquer ce
modèle en le considérant comme étant trop limité (Gronroos, 1989) et ne permettant pas de
répondre aux exigences du concept marketing (Gummesson, 1994). Pour certains le succès du
marketing ne provient pas de la manipulation des éléments du mix marketing mais de
l’établissement d’une relation à long terme entre l’acheteur et le vendeur (Ford, Hakansson, &
Johanson, 1986). D’autres auteurs mettent en lumière le caractère non transférable de la théorie du
marketing mix au secteur des services, les 4P étant des outils insuffisants pour bâtir une relation à
long terme entre l’acheteur et le vendeur (Zineldin, 1995). C’est dans ce contexte que l’emphase a
été mise sur le marketing relationnel, approche faisant contraste avec les théories transactionnelles
traditionnelles (Lindgreen, Davis, Brodie, & Buchanan-Oliver, 2000). Le marketing relationnel
tend à développer une relation avec le client pour le satisfaire et le retenir alors que le marketing
transactionnel cherche à multiplier les ventes en acquérant de nouveaux clients (Vence, 2002).
Avec un avis plus modéré sur le sujet, Kotler suggère que le marketing relationnel et
transactionnel sont deux approches complémentaires et correspondent à des types de clients
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différents. Le marketing relationnel est un outil utile lorsque le client à une vision à court terme et
peut passer d’un fournisseur à l’autre sans difficulté. La nouvelle approche peut alors permettre de
faire évoluer la vision du client afin qu’il adopte une perspective à plus long terme avec son
vendeur (Lansky, 1996).
Le concept de marketing relationnel a intéressé beaucoup de chercheurs et continue à faire l’objet
de nombreuses études. Chacun des auteurs abordant le sujet avec une approche spécifique, le
concept de marketing relationnel est devenu approximatif dans la littérature (Zineldin & Philipson,
2007). Brodie va jusqu’à dire que ce concept est devenu une expression « fourre-tout » (Pels,
Coviello, & Brodie, 2000).
Berry et Parasuraman (1999) proposent que le marketing relationnel consiste à bâtir des relations
visant à attirer, développer et maintenir la clientèle ("Marketing Services: Competing Through
Quality," 1992). Gummeson quant à lui perçoit le marketing relationnel comme un ensemble de
relations et d’interactions au sein de réseaux (Gummesson, 1994). Grönroos le décrit comme un
outil ayant pour objectif d’identifier et d’établir, de maintenir et d’améliorer les relations avec les
clients et autres PP de sorte que les attentes des individus impliqués soient comblés (Gronroos,
1994). Selon Sheth et Parvatiyar le marketing relationnel vise à impliquer et intégrer les
consommateurs, les fournisseurs et autres partenaires aux activités de développement et de
marketing de la compagnie (Sheth & Parvatiyar, 1995). Pour Morgan et Hunt, il s’agit d’un
ensemble d’activités visant à établir, développer et maintenir un processus fructueux d’échanges
relationnels (Morgan & Hunt, 1994). Pour illustrer le paradigme du marketing Adel I. El-Ansary
(2005) dresse un tableau comparatif entre l’approche transactionnelle et relationnelle basé sur sept
dimensions (tableau 1) : le client, le temps, les ventes, l’engagement du client, la recherche des
besoins des clients, la définition du succès, la qualité et l’engagement pour le service (El-Ansary,
2005) . Alors que le marketing transactionnel a une vision à court terme orientée sur la vente
visant à acquérir de nouveaux clients, le marketing relationnel cherche à fidéliser le client et pour
cela se soucie de leurs besoins.
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Tableau 1 : Comparaison du marketing relationnel et transactionnel
Marketing transactionnel Marketing relationnel
Emphase mise sur le client Acquérir de nouveaux clients Conserver les clients existants
et en acquérir de nouveaux
Orientation temporaire Court terme Long terme
Objectif des ventes Une vente Ventes multiples et relations
durables
Engagement du client Limité Haut niveau d’engagement
Recherche des besoins des
clients
Utilisée pour compléter une
transaction
Continuellement utilisée pour
améliorer la relation avec le
client
Succès Faire une vente Fidélité du client,
recommandation, répétition de
l’achat, faible roulement des
clients
Qualité Aspect production Aspect employées
Engagement pour le service Limité Élevé
Source : El-Ansary, A. I. (2005). Relationship Marketing Management: A School in the History of Marketing Thought. Journal of Relationship Marketing, 4(1,2), 43-56.
Avec cette philosophie, les stratégies marketing déployées par la compagnie ont pour objectif de
conserver les clients existants plutôt que de chercher à en acquérir de nouveaux. De plus, les
compagnies cherchent à développer des relations non pas seulement avec leurs clients mais avec
l’ensemble des individus influençant leurs activités d’une manière ou d’une autre. L’ensemble des
individus connectés à l’entreprise a ses propres attentes, auxquelles il faut répondre de manière
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appropriée. Dans ce contexte, les professionnels du marketing doivent être en mesure de bâtir des
relations adaptées avec chacune de leurs parties prenantes. Le marketing relationnel vise à élaborer
les stratégies permettant de répondre à l’ensemble des PP d’une compagnie.
Stakeholder relationship marketing involves creating, maintaining, and enhancing strong
relationships with customer, employee, supplier, community, and shareholder stakeholders of a
business with the goal of delivering long-term economic, social, and environmental value to all
stakeholders in order to enhance sustainable business financial performance (Murphy, Maguiness,
Pescott, & Wislang, 2005).
C’est dans ce contexte que le marketing a pris conscience de la nécessité d’aller au delà du
consommateur et de considérer l’ensemble de son environnement (Achrol, 1997; Greenley &
Foxall, 1996; Gummesson, 1994; Kimery & Rinehart, 1998; Menon & Menon, 1997; R. Polonsky,
1995; Reidenbach & McClung, 1999; Slater, 1997).
“Marketers must continually monitor stakeholders to ensure that as stakeholder’s power and
expectations change so does organizational strategy” (R. Polonsky, 1995)
La compréhension des relations avec l’ensemble des individus reliés aux activités de la
compagnie, autrement dit avec ses parties prenantes, a longtemps été délaissée par la littérature
marketing mais a pu se développer grâce aux auteurs se penchant sur la tendance du marketing
relationnel (Christopher, Payne, Ballantyne, & Pelton, 1995) (Morgan & Hunt, 1994). Pour les
professionnels du marketing, la connaissance de ces individus vont leur permettre d’élaborer les
stratégies nécessaires au développement et au maintien de relations solides avec eux (M. J.
Polonsky & Beldona, 2002).
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II. Le concept de parties prenantes (PP)
Alors que le concept de PP occupe une place centrale dans la théorie du marketing relationnel, il
n’a été que très peu abordé dans la littérature marketing. Ce terme a tout d’abord été décrit par
Freeman en 1963 dans un memorandum de l’Institut de Recherche de Stanford de la manière
suivante:
"Those groups without whose support the organization would cease to exist"
Caroll décrit en 1991 les PP comme étant l’ensemble des individus ayant un enjeu, une requête ou
un intérêt dans les activités et les décisions de l’entreprise (Carroll, 1991). L’entreprise est alors
représentée comme étant au centre d’une roue, reliée à ses PP par des rayons. Elle doit être en
mesure de délivrer de la valeur à chacun de ces individus pour pouvoir survivre (Campbell, 1997).
Dans son livre Strategic Management : a Stakeholder Approach, Edward Freeman (1984) décrit la
Théorie des parties prenantes en 1984. Son but est d’identifier et positionner les différents groupes
de PP d’une organisation afin d’élaborer des stratégies permettant de prendre en considération
l’intérêt de l’ensemble de ses PP. L’orientation de cette théorie est donc opérationnelle et
managériale puisqu’elle consiste à mettre en avant les rapports de l'entreprise avec l’ensemble des
groupes d'acteurs qui peuvent influencer sa performance. Cet ouvrage stipule que l’organisation
doit prêter attention à l’ensemble des revendications des différentes PP légitimes (Freeman, 1984).
Les théories plus anciennes étaient basées sur le modèle « input-output », l’input provenant des
investisseurs, des employés et des fournisseurs, l’output provenant des clients. Ce premier travail
de Freeman ouvre la porte à une multitude de recherches se rattachant à différents aspects du
concept de PP (Jones, 1995).
Malgré les divergences de certains auteurs à l’égard de la hiérarchisation des PP, la Théorie des PP
partage un ensemble de propositions qui constituent son fondement :
• L'entreprise a des PP ayant des exigences à son égard
• Toutes les PP n'ont pas la même capacité d'influence sur l'entreprise
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• La prospérité de l'entreprise dépend de sa capacité à répondre aux demandes des PP
influentes
Dans cette perspective relationnelle, le processus de gestion des PP est l’application de la Théorie
des PP en entreprise. Il est composé de quatre étapes : l’identification des PP pertinentes pour
l’entreprise, la détermination des enjeux et de l’importance spécifiques à chacun des groupes de
PP, l’examen des stratégies actuelles pour répondre aux besoins et attentes des PP et la révision
des politiques et priorités de l’entreprise afin d’optimiser la prise en charge de l’intérêt des PP. La
fonction principale du management est de tenir compte et d’arbitrer entre des demandes
potentiellement contradictoires des PP (Aggeri, 2005).
La hiérarchisation de l’influence des PP est un élément qui a été étudié sous plusieurs angles.
Freeman fait la distinction entre les PP importantes et non importantes mais ne propose pas de
critères pour évaluer cette importance. Dans ce sens, Clarkson introduit la notion de PP primaires
et secondaires (Clarkson, 1995). Les premiers sont nécessaires à la survie de l’entreprise tels que
les clients et les actionnaires, les seconds quant à eux, n’ont pas un rôle vital à l’entreprise.
Mitchell, Agle et Wood proposent par la suite trois attributs permettant la hiérarchisation de
l'importance des PP pour l'entreprise : le pouvoir, la légitimité, l'urgence (Mitchell, Agle, & Wood,
1997). Selon eux, les dirigeants porteront davantage attention aux PP cumulant ces trois critères.
Phillips propose de distinguer les "PP normatives" pour lesquels l'entreprise a des obligations
morales (clients, employés) et les "PP dérivatives" (Phillips, 2003). Ces dernières ne doivent être
prises en considération uniquement si elles ont des effets potentiels sur l'entreprise ou sur ses PP
normatives.
Ces recherches ont donné naissance à divers outils permettant de cartographier les PP. Le dernier
en date est issu des travaux de Bourne : le Stakeholder Circle, basé sur le principe que chacune des
PP a un potentiel différent pour influencer l’atteinte des objectifs d’une compagnie. Cette méthode
propose de classer les PP selon trois éléments : le pouvoir, la proximité et l’urgence/ importance
(Bourne & Walker, 2005).
Bien que les théories à l’égard du concept de PP ont majoritairement été examinées dans la
littérature managériale (Rowley, 1997), leur application nécessite des démarches à tous les niveaux
de l’organisation (Parmar et al., 2010).
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En 2004, l’American Marketing Association introduit la notion de PP dans sa définition. Le
marketing est alors vu comme une fonction de l’entreprise et un ensemble de processus visant à
créer, communiquer et délivrer de la valeur aux consommateurs et visant à gérer les relations avec
les consommateurs, dans l’objectif de profiter à l’organisation et à l’ensemble de ses PP (Gundlach
& Wilkie, 2010). Selon Slater, les professionnels du marketing doivent fournir davantage de valeur
aux consommateurs en considérant les intérêts d’autres PP clés (Slater, 1997).
Lusch et Webster décrivent le marketing telle une fonction apportant de la valeur et de l’utilité à
l’entreprise par l’intermédiaire de la performance de la production, de la distribution et des ventes.
Le marketing est orienté à la fois sur le produit et les consommateurs dans le but de donner un
avantage concurrentiel à l’entreprise (Lusch & Webster, 2011). Bhattacharya souligne également
la nécessité du marketing à aller au delà du consommateur et de la théorie des 4P. Dans l’objectif
d’élargir les frontières de l’approche marketing, il initie le “Marketing Stakeholder Consortium”
rassemblant des chercheurs de l’université de Boston et de l’Institut d’affaires d’Aspen. Plusieurs
papiers sont issus de ce travail collaboratif portant notamment sur les nouvelles fonctions du
marketing, les nouveaux publics qu’il doit désormais considérer et la complexité de la gestion des
intérêts, parfois divergents, de l’ensemble des PP. À l’origine du concept de « Stakeholder
Marketing », Bhattacharya définit cette approche comme ceci :
“Stakeholder marketing represents a firm’s orientation toward its marketing activities that goes
beyond consideration of the interests of immediate targeted consumers to include others that may
be affected by the firm’s activities, including individuals, employees, institutions, groups,
communities, publics, governments, and society at large”
(Bhattacharya & Korschun, 2008)
Ce concept a pour objectifs de considérer les intérêts divers de l’ensemble des PP en élaborant, en
améliorant et en évaluant les stratégies marketing, de comprendre l’impact de toutes les PP sur le
marketing (incluant l’environnement et la société), d’étudier les relations entre les PP afin d’agir
efficacement selon les besoins et intérêts de chacun d’eux (Bhattacharya, 2010). Cette approche
orientée vers les PP permet de compléter les concepts existantes du marketing, d’établir une
20
cohérence avec les pensées actuelles du marketing et de suivre de manière logique les tendances
de notre culture et de notre économie (Gundlach & Wilkie, 2010).
Dans la littérature marketing, plusieurs auteurs ont développé des modèles segmentant les PP de
l’entreprise. Avec sa théorie des six marchés, Christopher suggère d’appliquer les principes de
marketing au delà du client. Selon lui, pour être en mesure de satisfaire leurs clients, les
compagnies doivent considérer six marchés différents: le marché des fournisseurs et
collaborateurs, le marché des clients (finaux et intermédiaires), le marché interne, le marché
influant, le marché référant et le marché du recrutement (Christopher et al., 1995). Dans ce
contexte, les compagnies sont implantées au sein d’un réseau composé de ces différents segments
ayant des besoins respectifs auxquels il faut répondre de manière adéquate. Elles doivent élaborer
des stratégies marketing propres à chacun de ces segments.
III. La gestion des relations avec l’ensemble des PP
Dans le but d’élaborer un outil définissant le type de relation à développer avec les différentes
catégories de PP, Freeman a proposé une matrice théorique à deux dimensions. Basée sur la
capacité des PP à coopérer ou à menacer aux activités de la firme, autrement dit sur le potentiel
coopératif et menaçant des PP, la matrice suggère différentes stratégies aux compagnies pour
répondre aux besoins de leurs PP (Freeman, 1984).
Le potentiel coopératif est la volonté ou la capacité de la PP concernée à coopérer avec une
compagnie. Ce potentiel est corrélé à la dépendance des PP avec la compagnie. Ainsi, plus la PP
est dépendante de la compagnie, plus sa volonté à coopérer avec elle est grande et par conséquent
plus son potentiel coopératif est élevé. Le potentiel menaçant d’une partie prenante se traduit par la
dépendance de la compagnie avec elle et par conséquent le pouvoir qu’elle peut exercer sur elle.
Plus la compagnie est dépendante, plus le pouvoir de la PP est important et plus son potentiel
menaçant est élevé (Savage et al., 1991).
D’autres auteurs, tels que Savage, Kimery et Rinehart ainsi que Polonsky ont également utilisé
cette matrice pour comprendre les intérêts des différentes PP. Cette matrice constitue un outil pour
les gestionnaires guidant l’élaboration des stratégies nécessaires pour développer et maintenir des
21
relations entre l’entreprise et ses PP (Savage et al., 1991) (Kimery & Rinehart, 1998; M. J.
Polonsky, 1996). En effet, le positionnement d’un individu ou d’un groupe d’individus au sein de
cette matrice va aider la compagnie à déterminer la stratégie la mieux adaptée pour gérer les
relations avec eux.
Selon le profil de l’influence des PP, autrement dit selon le niveau de leurs potentiels coopératif et
menaçant, les auteurs définissent différents types de relations que les compagnies développent
avec elles.
Freeman suggère que les PP ayant un potentiel coopératif et menaçant élevé à l’égard des activités
de l’entreprise sont des « Swing Stakeholders ». Ils sont à la fois capables de contribuer et
d’entraver ses activités. Les stratégies employées pour traiter avec eux devraient chercher à
changer les règles du jeu (Freeman, 1984). Savage définit ce groupe plus positivement et parle de
« Mixed-blessing Stakeholders » avec qui l’entreprise doit collaborer pour maximiser leur capacité
à coopérer et réduire leur potentiel à menacer. Ce groupe inclut notamment les clients ou les
compagnies dont l’offre est complémentaire (Savage et al., 1991). Avec une approche davantage
marketing, Kimery et Rinehart ainsi que Polonsky viennent appuyer la version de Savage et
reconnaissent que ce groupe a besoin d’engagements positifs pour obtenir une coopération
potentielle de leur part (M. J. Polonsky, 1996).
Le groupe de PP ayant un potentiel coopératif élevé et menaçant faible ont été défini comme des
« Offensive Stakeholders » par Freeman, auprès desquels l’entreprise doit déployer une stratégie
offensive pour être en mesure d’exploiter au maximum leur potentiel coopératif (Freeman, 1984).
Savage quant à lui perçoit ce groupe comme un soutien qu’il faut impliquer dans les stratégies de
la compagnie afin de développer leur capacité à coopérer. Il parle des « Supportive Stakeholders »
et montre que les entreprises ne les considèrent pas comme leurs PP et par conséquent n’élaborent
pas de stratégies leur étant spécifiquement destinées. Pourtant, afin d’accroitre ce potentiel
coopératif, les gestionnaires doivent leur accorder davantage d’attention. Ce groupe inclut
notamment les fiduciaires, le personnel et les sociétés mères (Savage et al., 1991). Kimery et
Rinehart définissent ce groupe comme un soutien mais suggèrent d’élaborer des stratégies visant à
les exploiter plutôt qu’à les impliquer (Kimery & Rinehart, 1998).
Les PP dont le potentiel coopératif est faible mais menaçant élevé, sont nommés « Defensive
Stakeholders » par Freeman et « Non-Supportive Stakeholders» par Savage. Malgré ces
22
divergences, les auteurs s’entendent pour dire que les compagnies doivent avoir une attitude
défensive envers eux et les isoler des activités de la compagnie (M. J. Polonsky, 1996). Ce groupe
devrait notamment inclure les compagnies concurrentes, les syndicats d’employés ou le
gouvernement (Savage et al., 1991). Kimery et Rinehart adoptent une orientation similaire en
suggérant que l’organisation doit se défendre des individus ne lui apportant pas de soutien.
Polonsky quant à lui propose une nouvelle alternative, selon lui, engager ces PP apparaît comme
étant la meilleure solution de gestion des relations entre eux et la firme (M. J. Polonsky, 1996).
Enfin, concernant le dernier groupe de PP dont les potentiels menaçant et coopératif sont faibles,
Freeman les définit comme des « Holding Stakeholders » auprès desquels l’organisation doit
chercher à maintenir cette position (Freeman, 1984). Savage, Kimery et Rinehart parlent quant à
eux de « Marginal Stakeholders » devant être surveillés. Ce groupe devrait inclure notamment des
groupes d’intérêt, des actionnaires ou des associations (Savage et al., 1991). Polonsky voit ce
groupe comme ayant un potentiel à influencer indirectement et de manière positive ou négative la
performance de l’organisation. Ainsi, bien que la surveillance de ces PP s’avère nécessaire, il
faudra également élaborer des stratégies visant à rendre leur influence positive (M. J. Polonsky,
1996).
En résumé, selon le niveau du potentiel menaçant ou coopératif des PP autrement dit, selon le
niveau de dépendance de la PP à l’égard de la compagnie et de la compagnie à l’égard de la PP, les
types de relations sont variables. Avec les PP dont les potentiels menaçants et coopératifs sont
élevés, les compagnies vont chercher à changer les règles du jeu ou à collaborer. À l’inverse, avec
les PP dont les potentiels sont faibles, les compagnies vont chercher à maintenir les positions
actuelles et à les surveiller. Lorsque les PP sont fortement coopératives et faiblement menaçantes,
le but de la relation sera de les exploiter ou de les impliquer. Dans le cas opposé, la relation des
compagnies avec les PP faiblement coopératives et fortement menaçantes est défensive (tableau
2).
23
Tableau 2: Matrice théorique des parties prenantes
Élevé Potentiel menaçant Faible
Potentiel
coopératif
Faible
Freeman
SWING – Changer les règles du jeu
Savage
MIXED BLESSING - Collaborer
Freeman
OFFENSIVE – Exploiter
Savage
SUPPORTIVE -Impliquer
Freeman
DEFENSIVE - Défendre
Savage
NONSUPPORTIVE - Défendre
Freeman
HOLD – Maintenir la position actuelle
Savage
MARGINAL - Surveiller
En 2005, Polonsky utilise la matrice de Freeman dans un contexte marketing et cherche à étudier
sa validité. Pour cela, il définit huit groupes de PP et treize stratégies et teste leur applicabilité
auprès de gestionnaires en marketing. L’étude révèle qu’une matrice peut fournir des directives
aux gestionnaires mais qu’ils ne les suivront pas forcément (M. J. Polonsky & Scott, 2005).
24
IV. Les PP et l’industrie pharmaceutique
L’environnement de la santé compte un nombre élevé de PP dont les rôles sont divers et ayant par
conséquent des influences variées sur la compagnie. La compréhension de l’environnement de la
santé est une étape critique pour le bon fonctionnement d’une compagnie pharmaceutique (Meyer
& Ines, 2006).
« One critical organizational requirement is the ability to develop an in-depth understanding of
the networked environment » (Sobrio & Keller, 2007)
L’environnement du secteur de la santé s’est irrévocablement complexifié de part le nombre
grandissant d’intervenants mais également de part leurs attentes. Sobrio et Keller déterminent
quatre grandes familles de PP au sein du réseau de santé :
- les fournisseurs (les distributeurs, les producteurs)
- les payeurs (autorités gouvernementales/ assureurs)
- le corps médical (médecins, pharmaciens…)
- les patients et leur entourage
Ces quatre familles ont des rôles différents au sein du réseau de santé et sont guidées par diverses
motivations (Sobrio & Keller, 2007).
Les payeurs
Ce groupe d’individus vise à créer de la valeur pour l’ensemble de ses clients, les patients, en leur
permettant d’accéder aux soins médicaux. Ils cherchent ainsi à faire un profit à la fois financier et
politique en minimisant les coûts et garantissant la qualité du service qu’il assure (PwC, 2009a).
Aujourd’hui, deux grandes tendances influencent le système de santé : les pressions économiques
et la qualité des soins. En effet, la notion de cout-efficacité est désormais prédominante dans
l’ensemble des étapes de la vie du médicament et la pression exercée au niveau des prix et de
l’accès au marché est très forte. Le renforcement des contraintes économiques et réglementaires
rend les PP non cliniques très importantes au sein du système de santé exerçant par conséquent une
influence au moment de la prescription. Les systèmes de santé sont aujourd’hui face à des
contraintes financières et doivent assurer leur rentabilité (Pesanello, Thomas, & Mason, 2010).
25
Les autorités de régulation et les organismes payeurs contrôlent davantage les prescriptions des
médecins en imposant des protocoles de traitements. Ces individus réalisent de plus en plus
d’études pour mesurer la performance pharmaco économique des différents médicaments. Ce
phénomène impose à l’industrie pharmaceutique de développer une collaboration avec ces PP et
démontrer que ses médicaments apporte une forte valeur ajoutée. Les payeurs et les compagnies
sont souvent méfiants l’un envers l’autre, pourtant l’analyse de leurs chaînes de valeur respectives
met en avant la nécessité d’un alignement de leurs approches (PwC, 2009a).
Le groupe des payeurs est constitué des autorités gouvernementales et des assureurs privés (Sobrio
& Keller, 2007). Les autorités gouvernementales sont en charge des processus d’approbation de
mise sur le marché, de la régulation du prix et des politiques de remboursement des médicaments.
Les compagnies sont donc dépendantes des autorités gouvernementales pour accéder au marché et
bénéficier des meilleures conditions pour vendre leurs produits. Le remboursement d’un
médicament peut également être pris en charge par les assureurs privés. Les compagnies
dépendent également de ces derniers pour bénéficier des meilleures conditions pour vendre leurs
produits.
Le corps médical
Dans notre étude, nous nous intéresserons aux médecins et aux pharmaciens.
Les médecins jouent plusieurs rôles. D’une part, ils influencent le patient de part la prescription et
les conseils. D’autre part, certains d’entre eux, les leaders d’opinion, influencent les membres du
corps médical et le gouvernement quant aux pratiques médicales. Les compagnies
pharmaceutiques dépendent donc des médecins pour influencer les patients et les autres membres
du corps médical. Les échanges avec les leaders d’opinion apparaissent comme étant la méthode la
plus efficace pour influencer les habitudes de prescription des médecins (Dumovic & de Vries,
2004). Ces derniers ont été pendant longtemps la cible principale des compagnies
pharmaceutiques. Les modèles d’affaires étaient en effet guidé par la force de ventes de la
compagnie (Bhalla, Evgeniou, & Lerer, 2004). Aux États-Unis, entre 1996 et 2005, le nombre de
représentants pharmaceutiques a augmenté de 50% alors que le nombre de médecins n’a connu
qu’une croissance de 26% durant cette période (PricewaterhouseCoopers). Pourtant, plusieurs
études ont montré que le recours excessif à cette méthode était contreproductive (Manchanda &
26
Chintagunta, 2004). Les représentants sont souvent perçus comme étant simplement intéressés à
vendre des « pilules » et n’ajoutant aucune valeur ajoutée à la santé du patient.
“The rep would arrive with a big whiteboard and show me a series of graphs and charts. We both
knew it wouldn’t change anything but each kept up appearances. It was cheesy and embarrassing
for everyone, including the rep” Mary-Clare Parker – UK general practitioner
Depuis 2006, le nombre de représentants pharmaceutiques a été réduit par milliers aux États-Unis,
passant de 105 000 à 70 000 en 2011. Désormais du matériel tels que des iPads et autres outils
digitaux, sont mis à la disposition des médecins pouvant poser des questions au sujet des
médicaments, ou trouver quels assureurs prennent en charge quels traitements. Ces démarches ont
pour objectifs de réduire les coûts mais également d’accéder efficacement au corps médical de
plus en plus réticent à recevoir les représentants (Whallen, 2011). Une étude réalisée par SK&A,
compagnie spécialiste des bases de données dans le domaine de la santé, montre que 23% des 680
000 médecins interrogés refusent de recevoir les représentants pharmaceutiques. Malgré la
réduction du nombre de représentants pharmaceutiques dans les pays développés, ils restent encore
le moyen de promotion principal dans les pays en voie de développement. À titre d’exemple, plus
de 75% de l’information reçue par les médecins chinois provient de réunions avec les
représentants pharmaceutiques (PwC, 2009a).
Les médecins ont également un rôle de conseillers auprès des preneurs de décisions
gouvernementaux ou médicaux (Kientop, 2010). Ce rôle de leader d’opinion est bien intégré par
l’industrie qui développe des efforts à l’échelle locale comme nationale pour promouvoir ses
produits. On parle de « Key Opinion Leaders » ou KOLs pour faire référence à des médecins
influents, appartenant souvent au milieu académique et étant très efficaces pour transmettre des
messages à leurs pairs. Les compagnies engagent des KOLs pour qu’ils donnent des conférences,
conduisent des essais cliniques ou fassent des présentations (Elliott, 2010). L’influence entre les
individus de ce groupe de PP, autrement dit le « bouche à oreille » entre les médecins est un
phénomène majeur et ne peut être négligé. Selon Bhalla, la relation entre le prescripteur et la
compagnie tend à intégrer une dimension partenariale entre les deux parties (Bhalla et al., 2004).
Parallèlement à ce moyen de communication, les activités quasi-académiques de ces KOLs telles
que des séries de conférences, des symposiums sponsorisés ou des articles dans les journaux
médicaux vont jouer un rôle dans la promotion d’un produit voir même de la compagnie. Les
27
compagnies cherchent alors à engager des médecins dont le pouvoir d’influence est fort mais étant
perçus par leurs auditeurs comme étant indépendants afin que ces derniers n’aient aucune raison de
ne pas croire en ces individus (Elliott, 2010). Selon une étude réalisée en 2004, les 15 plus grosses
compagnies pharmaceutiques dépensent près du tiers du budget marketing total pour leurs KOLs.
Les médecins perçoivent ce rôle de KOLs comme le moyen d’étendre leur expertise dans un
domaine précis et de gagner le respect de leur communauté comme ils travaillent avec des
thérapies innovantes et prometteuses (Mack, 2003). Une étude révèle cinq actions mises en place
par les compagnies à l’égard de leurs KOLs :
- Construire des relations avec les KOLs tôt dans le cycle de vie du médicament
- Établir des relations « win-win » avec le KOLs
- Établir une large sphère d’influence en engageant des KOLs locaux
- Définir une stratégie adaptée à chaque segment de KOLs (global, national, local)
- Supporter la gestion des KOLs avec un financement adéquat
Les rôles des KOLs évoluent au cours du cycle de vie d’un médicament. Durant la période de R-D
d’un produit et notamment en phases pré-cliniques, les KOLs vont identifier les manques en terme
d’informations scientifiques, informer sur les besoins du marché et contribuer au développement
du produit. Au cours du développement clinique, les KOLs participent au déroulement des essais
cliniques, communiquent les résultats des études dans la littérature scientifique et identifient le
manque de données éventuelles. Enfin, au moment de la commercialisation, les KOLs délivrent
des messages clés à leurs pairs et développent des stratégies commerciales (Mack, 2003). La
liaison entre les KOLs et les compagnies est réalisée grâce aux « Medical Science Liaison »
(MSL), personne pouvant communiquer des concepts scientifiques, des objectifs cliniques et des
opportunités d’affaires. Aujourd’hui, la plupart des MSL ont un bagage scientifique solide avec un
diplôme de médecin, pharmacien ou en sciences, qui leur offre la crédibilité et l’objectivité
nécessaires pour coordonner le flux d’informations cliniques et gérer les relations avec les KOLs
pouvant être critiques au succès d’un produit à toutes les étapes de son cycle de vie.
De leur côté, les pharmaciens ont également le pouvoir d’influencer les patients de part leurs
conseils. Les compagnies pharmaceutiques dépendent donc d’eux pour influencer les patients. Il a
en effet été évalué que suite aux conseils du pharmacien, 89% des personnes achètent le produit
conseillé (Anonymous, 2002).
28
Les patients
Les patients prennent la décision finale de consommation du médicament mais ont également le
pouvoir d’influencer la prescription du médecin. Pour des raisons réglementaires et le fait que le
prescripteur reste le preneur de décision principal, les compagnies ne se sont pas intéressées à ce
groupe de PP en priorité. Au fur et à mesure, les investissements de la promotion directement
dirigée vers le public se sont multipliés. Le nombre de publicités télévisées et en ligne a
considérablement augmenté et on a ainsi vu des sites consacrés à des médicaments ou des
pathologies arriver sur la toile (Bhalla et al., 2004). Les patients étant de mieux en mieux
renseignés sur les pathologies et les traitements, leur pouvoir est grandissant dans le processus de
prescription (White & Johnson, 2002) (Bhattacharya & Korschun, 2008). En effet l’une des
principales évolutions dans le paysage du secteur de la santé, est l’autonomisation du patient. Il a
désormais accès à une vaste quantité d’informations et devient proactif dans la gestion de ses
propres soins de santé. Le nombre de personnes utilisant Internet pour s’informer à l’égard des
maladies et thérapies est en augmentation constante avec 66% d’américains et plus de 50%
d’européens. Les sites consacrés à ce type d’informations se sont ainsi développés afin de
répondre à la demande du public (PwC, 2009a). Le patient est désormais à même d’interroger son
médecin et de faire pression sur des institutions tel que le gouvernement, pour demander
davantage d’informations sur les coûts et bénéfices de certains traitements (Baldwin, 2011) .
Certains deviennent pro-actifs dans le système de santé, on parle de « pro-patients ». Ils ne sont
pas seulement impliqués dans la démarche médicale les concernant mais vont au delà en
partageant leurs expériences, opinions et objectifs (Roberts & Phillips, 2012). Certains auteurs
vont jusqu’à parler de « patient opinion leaders » (POL) dont le pouvoir est illimité avec le
l’Internet.
« Les patients deviendront de plus en plus influents au fur et à mesure que l’accès à une
information sanitaire fiable augmentera, que l’utilisation des copaiements prolifèrera et que les
tendances à l’auto-médication progresseront » - (PwC, 2009a)
Depuis les années 2005, le marketing pharmaceutique est devenu de très compétitif et il devient de
plus en plus délicat pour les compagnies de développer des activités permettant de retenir leurs
clients. On a alors vu apparaître des services à valeur-ajoutée pour les patients tels que des
29
programmes de gestion des maladies (Bhalla et al., 2004). L’éducation et la surveillance font
désormais partie du modèle d’affaires de nombreuses compagnies pharmaceutiques (James
George, 2009). En plus de développer des produits innovants, les compagnies doivent intégrer la
sphère de gestion de la santé en mettant en place des programmes d’intervention qu’ils soient à
visée curative, diagnostique, d’observance ou à rôle de conseils. À titre d’illustration, un
programme d’intervention est un processus cyclique composé de plusieurs étapes :
- Identification des problèmes d’observance par la compagnie
- Recrutement d’un médecin
- Invitation des patients par le médecin
- Communication d’un diagnostic automatisé et personnalisé au patient
- Transmission d’informations de la part du patient au corps médical
- Mise en évidence des problèmes d’observance (PwC, 2009a)
Pionnier de ce créneau, Baxter a ouvert la voie des programmes d’intervention en mettant à
disposition un ensemble de services pour les patients atteints d’insuffisance rénale. Ils sont
constitués d’un site Internet éducatif, un réseau d’infirmières, un service de livraison à domicile et
de transport pour aider les patients. La gestion de la santé est un créneau présentant plusieurs
intérêts pour les compagnies puisqu’elle lui permet de développer une nouvelle source de revenus,
construire des marques fortes et se rapprocher des patients recourant à ses produits et
services.(PwC, 2009a).
Les fournisseurs : les distributeurs, les compagnies pharmaceutiques
Afin de fournir l’attirail thérapeutique à la population, les compagnies pharmaceutiques ont
recours à des distributeurs. Ces derniers sont en charge de livrer les médicaments aux hôpitaux et
aux pharmacies, ce sont donc des intermédiaires. Le pouvoir des compagnies pharmaceutiques est
variable selon le nombre d’alternatives thérapeutiques disponibles sur le marché (Dragan, 2011).
La chaîne d’approvisionnement permet de transférer les produits sur le marché en couvrant les
hôpitaux, les pharmacies de détail en passant par le patient. Cette chaîne est souvent complexe,
sous employée et inefficace. Plusieurs changements sont prédits pour ce secteur, à savoir une
distinction entre différents modèles selon les types de produits et segments de patients, cette
chaîne deviendra un moyen de différenciation et une source de valeur économique et enfin
fonctionnera à double sens par l’intermédiaire d’un flux d’informations ascendant pour gérer le
30
flux de produits et de services descendants (PwC, 2011). La demande croissante pour les produits
biologiques a provoqué un essor de fournisseurs spécialisés dans cette branche et offrant donc un
service spécialisé respectant des conditions de température et d’humidité. Il est donc attendu que
les distributeurs étendent leur offre de services intégrés à la chaîne d ‘approvisionnement. Les
compagnies peuvent y voir une occasion de partager leurs ressources pour réaliser des économies
d’échelle tout au long de leur chaîne de valeur (PwC, 2011).
Ces quatre groupes de PP constituent le réseau de la santé auquel les compagnies doivent
s’intégrer pour faire face aux changements de l’environnement. Cette intégration est vue comme
fructueuse si les compagnies sont capables de créer une valeur durable à chacun des groupes de
PP. Ce processus d’intégration est basé sur un processus relationnel continu, réciproque et
évoluant selon la capacité des parties à rencontrer leurs attentes respectives (Sobrio & Keller,
2007).
La nécessité d’adopter une approche différente
Les schémas décisionnels et d’influence évoluent avec la complexification du réseau de santé et
certains auteurs soulignent la nécessité d’élaborer de meilleurs moyens pour intégrer les
compagnies au sein de ce réseau. L’évolution des contextes social, démographique et économique
impose un renouvellement des manières de faire au sein des compagnies pharmaceutiques.
Désormais, un marketing agressif orienté sur le médecin est inefficace pour stimuler la demande.
La seule réduction de l’effectif des forces de vente comme nous pouvons l’observer dans
l’ensemble des pays développés, ne peut suffire à la mise en place d’une stratégie adaptée à ce
nouvel environnement. Les limites du modèle actuel de marketing et de ventes sont nombreuses et
imposent des changements majeurs (PwC, 2009b).
Alors que chacun des acteurs intervenant dans le secteur de la santé sont interdépendants, elles
continuent à se battre pour atteindre leurs objectifs respectifs générant une qualité des soins
inférieure à un coût supérieur comparativement à si leurs activités étaient davantage alignées. Elles
doivent désormais intégrer un réseau commun en faisant converger leurs chaînes de valeurs. Cette
intégration est nécessaire pour que les compagnies soient en mesure de fournir un éventail de
31
produits et de services adaptés aux besoins actuels (James George, 2009). Bien que les compagnies
semblent avoir conscience de la montée en puissance de cet ensemble de PP, leurs modèles
d’affaires restent encore souvent trop orientés sur le prescripteur.
Ce manque de compréhension systématique des relations entre tous les groupes de PP a conduit à
des activités de ventes et marketing ne parvenant pas à répondre aux problématiques qu’une
compagnie pharmaceutique rencontre (Meyer & Ines, 2006). Les PP attendent un rôle plus actif
des compagnies à l’égard de la société en partageant par exemple des connaissances et expériences
avec le corps médical ou en montrant leur implication pour maintenir la qualité des soins. Les
compagnies sont à l’inverse perçues comme étant principalement concernées par la maximisations
des coûts et des marges négligeant la création de services de valeur ajoutée autour des produits
(Sobrio & Keller, 2007). Alors que le prescripteur a pendant longtemps été perçu comme l’unique
preneur de décision dans l’environnement de la santé, les payeurs et les patients ont un rôle de plus
en plus important (Illert & Emmerich, 2008).
La stratégie marketing pharmaceutique traditionnelle vise à étendre une force de vente
essentiellement dirigée vers les médecins. Elle est généralement constituée comme une matrice de
représentants répartis sur un territoire. En ayant recours à des systèmes de Customer Relationship
Management (CRM), les compagnies capturent des informations concernant leurs clients et
optimisent leurs efforts marketing opérationnel en fonction des données (Bhalla et al., 2004). En
2004, Bhalla met en avant les balbutiements de stratégies clients en réseau : « networked
customer strategy » et réalise dans ce sens une étude utilisant un modèle développé pour
comprendre les stratégies CRM d’une industrie. Il étudie l’évolution des clients de l’industrie
pharmaceutique parmi lesquels il distingue les patients et les médecins dans un environnement en
réseau. Son analyse indique un intérêt croissant pour l’intégration de ces individus de par le
développement d’un ensemble de services pour satisfaire et aligner les deux groupes d’individus
(Bhalla et al., 2004).
Dans l’objectif de considérer l’ensemble des PP, Sobrio et Keller suggèrent un processus cyclique
comportant trois étapes : le développement de la proposition de valeur, l’implication des PP et la
mesure de la valeur. La première consiste à développer une proposition de valeur adaptée aux
besoins des groupes de PP et à la création de valeur envisagée. La seconde vise à institutionnaliser
l’implication des PP externes dans les processus internes. Elle est cruciale puisqu’elle assure que
32
les connaissances et expériences jouent leur force de levier tout au long du processus d’innovation.
Pour optimiser la qualité de ces décisions, l’intégration d’individus indépendants tels que des
médecins est requise. La dernière étape est une évaluation de l’impact de la valeur créée pour les
différents groupes de PP en terme de performance financière, d’efficacité et d’efficience médicales
(Sobrio & Keller, 2007). La réorientation des modèles d’affaires des compagnies pharmaceutiques
apparaît comme une nécessité absolue dans le monde académique comme professionnel.
« Sales models need to fundamentally change as there will be fewer and fewer blockbuster drugs,
and the current model is designed to sell blockbusters ». Jacques Bonte, Ipsen
Une étude réalisée par le cabinet de consultation Concise (James George, 2009) vient appuyer ce
constat et souligne qu’il est indispensable que les compagnies redéfinissent leur proposition de
valeur pour répondre aux besoins des clients et délivrer des résultats adaptés à la réalité du monde.
Elles doivent par ailleurs revoir l’organisation de leurs ventes pour adopter une approche basé sur
le dialogue à double sens et la connaissance du client (James George, 2009). Cette étude révèle
aussi qu’un des deux points faibles majeurs des modèles d’affaires des compagnies
pharmaceutiques multinationales est la délivrance de la proposition de valeur qui est basée sur une
approche « one-size-fits-all » ne permettant pas de prendre en considération les besoins des
différents clients.
Une série de quatre articles portant sur le réseau de la santé est parue dans Journal of Medical
Marketing. Le but des auteurs était de consacrer leurs travaux à un changement de paradigme non
négligeable pour l’industrie pharmaceutique leur imposant de passer d’un modèle à une dimension
à un modèle orienté sur l’ensemble de l’environnement. Le premier papier fait l’état des lieux de l’
obsolescence du modèle « share of voice » (Pesse, Erat, & Erat, 2006). Le second cartographie le
réseau de PP (Meyer & Ines, 2006). Le troisième fournit des idées conceptuelles sur comment les
compagnies pourraient adapter leurs organisations pour faire face aux changements de
l’environnement (Erat & Zorzi, 2007). Le dernier papier est une approche concrète pour savoir
comment les compagnies peuvent intégrer activement le réseau de PP (Sobrio & Keller, 2007).
33
« It is more accurate to say that the healthcare ecosystem is now comprised of multiple
stakeholders with a far more complex decision-making dynamic than existed just a few years
ago ». Pharmaceutical Executive
V. Les compagnies pharmaceutiques occidentales en Chine
Il est à noter que cette section ne vise pas à décrire l’environnement du marché pharmaceutique,
qui sera décrit à travers la collecte de données, mais tend à mettre en avant les stratégies des
compagnies pharmaceutiques occidentales en Chine.
Avec les défis de plus en plus nombreux au sein des pays développés, les compagnies
pharmaceutiques occidentales ont depuis plusieurs années porté un intérêt accru aux pays
émergents pour qui la situation économique est souvent plus favorable. Alors que la croissance du
marché pharmaceutique dans les pays développés ralentie, la Chine vit actuellement la situation
inverse notamment grâce à son importante population, les dépenses de santé agressives de son
gouvernement et une augmentation de la demande pour les traitements de maladies chroniques
(Beasley, 2011). Les compagnies multinationales multiplient en Chine leurs activités de R-D et de
commercialisation. Malgré l’attractivité que représente ce marché, un temps de préparation et la
mise en place de stratégies adaptées à la réalité locale sont indispensables. De nombreux joueurs et
en particulier les petites et moyennes compagnies, ne bénéficiant pas des ressources nécessaires
pour établir une stratégie d’entrée, ont échoué sur ce marché (Liu, 2007)
L’entrée sur le marché chinois ne peut généralement se faire seule et les compagnies étrangères
doivent se trouver des partenaires locaux solides. L’expertise locale est en effet le moyen pour les
joueurs occidentaux de bénéficier de leur expertise pour comprendre la complexité du marché
mais c’est également un moyen pour se rapprocher des PP influençant les activités de leurs
compagnies (EDC, 2011). La réalisation de partenariats efficaces génère la croissance de la
qualité, de l’innovation mais également de la demande (Beasley, 2011). Actuellement, l’industrie
pharmaceutique chinoise est le secteur qui bénéficie de la majorité des investissements étrangers
des multinationales. Ceci constitue le moyen pour les compagnies locales de développer leurs
compétences au niveau technologique et des processus de qualité, et permet aux compagnies
occidentales de réussir leur implantation sur le marché. En 2005, 20 des 25 compagnies
34
pharmaceutiques multinationales possédaient des activités de fabrication en Chine soit par
l’intermédiaire d’investissements dans des compagnies locales soit par la réalisation de joint-
venture (Yuanjia, Geng, Ying, & Yitao, 2007). L’innovation en Chine est désormais perçue
comme ayant un fort potentiel incitant les compagnies occidentales à externaliser leurs activités de
R-D. Elles collaborent ainsi avec le milieu académique et les compagnies locales. Le nombre de
chercheurs formés localement ou à l’étranger est grand et constitue un vaste bassin de talents à la
disposition des compagnies. En mentorant des joueurs locaux, les compagnies occidentales
génèrent des emplois et transfèrent leur technologie et leur savoir en échange de quoi elles
bénéficient de conditions de marché favorables (Yang, 2012). La formation d’alliances
stratégiques est une méthode très utilisée dans l’industrie pharmaceutique pour réussir à découvrir,
développer et commercialiser de nouveaux produits. La majorité des compagnies chinoises étant
jeunes et récemment privatisées, leurs ressources sont encore faibles, ce qui les incite à collaborer
avec les joueurs multinationaux. Pour ces derniers, la réduction du prix de leurs opérations, l’accès
à de nouvelles ressources et à la connaissance du marché sont leurs principales motivations pour la
formation de ce type d’alliances (Hsu, 2011). La détermination du prix d’un médicament et son
intégration sur une liste de remboursement sont des éléments cruciaux pour le succès de l’accès au
marché d’un produit. Dans ce contexte, le développement de relations avec le gouvernement est
une stratégie clé pour de nombreux joueurs. Les processus administratifs chinois n’étant pas
encore optimaux et à titre d’exemple, l’enregistrement d’un produit est très long, les compagnies
doivent aider le gouvernement à améliorer ces activités. De plus, avec la volonté de développer
son système de santé, le gouvernement chinois a mis en place un ensemble de réformes qui
nécessitent le soutien des compagnies tant d’un point de vue financier qu’informationnel
(Raymond Hill, 2006). Agir à tous les niveaux pour être présent auprès de ses partenaires est
nécessaire que ce soit à l’échelle centrale ou locale (Liu, 2007). Le climat actuel est en faveur du
développement d’une industrie innovante concentrée sur le développement de nouveaux produits
répondant aux besoins de la population. Paradoxalement, la très stricte régulation des prix conduit
l’industrie au développement de produits à coûts bas diminuant ainsi son potentiel innovant
(Raymond Hill, 2006).
L’amélioration de la gestion de la santé est désormais un créneau où le corps médical et
l’ensemble des payeurs attendent un soutien de la part des compagnies occidentales réputées pour
leur expertise dans certains axes thérapeutiques encore peu connus de la population chinoise. Elles
35
doivent ainsi profiter de cette situation et déployer leurs forces de ventes pour faire communiquer
les lignes directrices des schémas thérapeutiques pour instruire le corps médical mais également
les payeurs (Raymond Hill, 2006). En 2006, 80% des établissements de santé chinois pouvaient
être couverts en intervenant seulement dans 120 des 665 villes. Cette dynamique a évolué et la
croissance de la demande en terme de médicaments émane désormais des villes de rang 2 et 3
(Raymond Hill, 2006) (Figure 1).
Figure 1 : Comparaison de l’évolution des ventes dans les villes de rang 1 et rang 2 de grande et
petites tailles
Source : All Roads Lead to China. IMS Health
Le sud-est de la Chine est la partie du pays la plus attrayante pour les investissements étrangers
pour les villes comme Hangzhou, Shenyang, Jinan et Tianjin (Beasley, 2011). Les provinces de
Zhejiang, Guangdong, Shanghai, Jiangshu et Hebei ont pendant longtemps été les plus productives
reflétant un niveau de croissance important du secteur de l’industrie pharmaceutique (Yuanjia et
al., 2007). Toutefois, la volonté du gouvernement est désormais de rendre les soins accessibles
dans l’ensemble du pays, faisant de certaines régions reculées et longtemps délaissées des
compagnies, des zones à fort potentiel pour les investisseurs étrangers (Datamonitor, 2011b). De
plus, l’évolution de la demande en terme de médicaments par la population chinoise a des impacts
signifiants sur les stratégies des compagnies, la pénétration de leurs ventes, la productivité et les
investissements sont devenus les éléments principaux guidant leur croissance. En conséquent, les
compagnies doivent étendre leurs forces de vente et atteindre de nouvelles zones géographiques où
le marché n’est pas saturé et les besoins sont croissants (Beasley, 2011).
36
Par ailleurs, la volonté du gouvernement de séparer les activités de prescription et de dispensation
des médicaments invite les compagnies à inclure les pharmacies de détails et non pas seulement
les hôpitaux dans leurs stratégies promotionnelles. Même avec un plan d’action bien défini, la
difficulté provient de son exécution principalement à cause du « turnover » très important des
employés et notamment au sein de la force de vente. Pour attirer et retenir sa main d’œuvre, des
salaires compétitifs et la mise en place de programmes d’éducation et d’assurance avantageux est
nécessaire (Raymond Hill, 2006). Le choix des employés est primordial est leur connaissance du
marché local ainsi que leurs réseaux personnels sont des atouts considérables pour réussir en Chine
(Raymond Hill, 2006).
À la lumière des articles mentionnés ci-dessus, nous réalisons que pour réussir en Chine, les
compagnies pharmaceutiques occidentales ne peuvent agir seules et doivent établir des relations
fortes avec un ensemble de PP. Le présent travail vise à étudier l’interaction entre les compagnies
pharmaceutiques et leurs PP. Afin de réaliser notre étude nous nous sommes inspirés des groupes
de PP décrits par Sobrio et Keller. Au cours de notre travail, nous nous focaliserons sur les
payeurs, le corps médical, les patients et les distributeurs.
37
Chapitre 2 -‐ Propositions de recherche -‐ Cadre conceptuel
Dans un contexte où le marketing passe d’une approche transactionnelle à relationnelle (Hunt,
Arnett, & Madhavaram, 2006) il devient nécessaire de comprendre le mécanisme des relations
entre les compagnies et leurs parties prenantes. L’application de la théorie des PP au marketing
relationnel implique que chaque individu ait un enjeu l’un envers l’autre. Dans ce contexte,
chacune des parties devraient penser aux moyens permettant l’implication optimale de chacune
d’elles (M. J. Polonsky & Beldona, 2002).
Avec sa matrice des PP, Freeman suggère de distinguer ces PP selon leur niveau d’influence et
élabore un type de relation spécifique à chaque profil (Freeman, 1984). Quelques années plus tard,
Savage reprend ce concept et décrit le niveau d’influence des PP à l’aide de la notion de
dépendance. Ainsi, une PP fortement dépendante de la compagnie sera fortement coopérative alors
que si elle est faiblement dépendante, elle sera faiblement coopérative à l’égard des activités de la
compagnie. D’autre part, si la compagnie est fortement dépendante de la PP, cette PP sera
considérée comme fortement menaçante alors que si la compagnie est faiblement dépendante de la
PP, elle considérera la PP comme faiblement menaçante à l’égard de ces activités (Savage et al.,
1991). Selon le profil d’influence de chaque PP, la relation développée avec elle sera spécifique.
Nous nous pencherons spécifiquement sur le cas du marketing pharmaceutique en Chine. Dans le
cadre de notre étude, nous nous focaliserons sur les quatre familles de PP mentionnées par Sobrio
et Keller :
- les fournisseurs (les distributeurs)
- les payeurs (autorités gouvernementales/ assureurs)
- le corps médical (médecins, pharmaciens)
- les patients et leur entourage (Sobrio & Keller, 2007)
Selon leurs potentiels coopératif et menaçant respectifs, autrement dit selon leur niveau de
dépendance à la compagnie et le niveau de dépendance de la compagnie avec ces PP, nous
pouvons les placer dans la matrice de Freeman.
Nous considérons que les compagnies dépendent fortement des payeurs et du corps médical
puisqu’ils ont entre autres le pouvoir d’accès au marché, de détermination de prix et de taux de
38
remboursement ainsi que le pouvoir de prescription. Ces décisions étant critiques pour les activités
de la compagnie nous estimons sa dépendance à ces joueurs très élevée. Ils ont par conséquent un
potentiel menaçant élevé. La dépendance de la compagnie aux distributeurs et aux patients est plus
faible. En effet, bien que le patient prenne la décision finale d’achat du traitement, il ne possède ni
le pouvoir de diagnostic ni celui de prescription. Par ailleurs, les alternatives en matière de
distributeurs étant généralement multiples nous ne considérons pas la compagnie comme étant très
dépendantes d’eux. Les distributeurs et les patients ont par conséquent un potentiel menaçant
faible.
D’autre part, le corps médical bénéficiant d’avantages provenant des compagnies telle que la mise
à disposition d’outils de formation, nous estimons que leur dépendance aux compagnies est élevée.
L’activité des compagnies étant indispensable à celle des distributeurs, nous estimons également
que ces derniers sont fortement dépendants des compagnies. Par conséquent. Le potentiel
coopératif du corps médical et des distributeurs est élevé. Enfin, les payeurs et les patients étant
exposés à un nombre considérable d’alternatives thérapeutiques, nous estimons leur dépendance
aux compagnies est basse. Par conséquent leur potentiel coopératif est faible.
Nous pouvons alors positionner les quatre familles de PP dans la matrice de Freeman :
Élevé Potentiel menaçant Faible
Potentiel
coopératif
Faible
Corps médical Distributeurs
Payeurs Patients
39
Selon ce positionnement nous pouvons établir des propositions quant aux types de relations
développés par les compagnies avec chacune de ces PP et ce en nous basant sur la matrice de
Freeman puis reprise par Savage :
Proposition 1 : Les compagnies pharmaceutiques développent des relations avec les payeurs
visant à se défendre de ces PP.
Proposition 2 : Les compagnies pharmaceutiques développent des relations avec les distributeurs
visant à les impliquer.
Proposition 3 : Les compagnies pharmaceutiques développent des relations avec le corps médical
visant à collaborer avec ces PP.
Proposition 4 : Les compagnies pharmaceutiques développent des relations avec les patients
visant à les surveiller.
Ce travail cherche donc à examiner si la matrice de Freeman et révisée par Savage fournit un outil
utile pour les gestionnaires en charge des relations avec les PP.
40
Chapitre 3 – Méthodologie
Le cadre de l’étude et les propositions étant posés, il importe à présent d’exposer la méthodologie
sur laquelle s’appuie la recherche. Une étude de nature qualitative exploratoire semble davantage
appropriée pour aborder le sujet de l’étude. Ce type de recherche constitue un point de départ idéal
lorsque la connaissance du phénomène analysé est limitée (Rupp, 1994) comme il en est le cas
pour cette étude. Ce chapitre vise à expliquer et justifier la pertinence des choix méthodologiques.
I. La méthode de recherche : une approche qualitative
Lorsque le but de la recherche est de comprendre et d’approfondir un phénomène dans un contexte
précis, la recherche de type qualitative s’avère être la méthode de choix (Rupp, 1994) (Engle,
1999). Elle se base sur un nombre limité de répondants et de cas générant une information riche et
détaillée liée au sujet de l’étude. Cela a pour effet de permettre une compréhension en profondeur
du phénomène concerné. Ceci constitue d’ailleurs une distinction importante entre l’approche
qualitative et quantitative. Cette dernière permet de mesurer les réactions d’un grand nombre de
répondants et par conséquent de produire des résultats qui sont davantage généralisables à une
population (Rupp, 1994).
Comme l’objectif de notre étude est d’étudier les relations développées par les compagnies
pharmaceutiques à l’égard de leurs PP, nous jugeons pertinent de recourir à une approche
qualitative. De plus, la quantité limitée d’études sur le sujet justifie également notre choix (Rupp,
1994). En effet, un nombre élevé d’études portant sur le marketing relationnel et la notion des PP
existent mais peu sont adressées à l’industrie pharmaceutique.
Par ailleurs, des stratégies de recherche comme les sondages sont moins adéquates lorsque le
phénomène étudié prend place dans un environnement complexe (Shaban, 2009). La méthode de
recherche qualitative offre donc la souplesse permettant d’étudier un phénomène précis tout en
tenant compte du contexte dans lequel il prend place.
41
II. La stratégie de recherche : l’étude de cas
Le choix de l’approche étant justifié, il importe désormais de préciser la stratégie de recherche
utilisée dans notre étude. Selon Yin, le choix de la stratégie de recherche se fait en fonction de
trois critères : le type de question de recherche posé, le degré de contrôle du chercheur sur le
comportement des participants, et le degré d’importance des événements contemporains par
opposition à des événements historiques (Shaban, 2009). En positionnant notre recherche en
fonction de ces trois critères, l’étude de cas apparaît comme étant la stratégie adéquate.
En effet, elle compte parmi les méthodes appropriées lorsque la question de recherche se concentre
plus particulièrement sur le « comment » du phénomène concerné (Shaban, 2009). Comme
l’objectif de notre étude est d’étudier les relations des compagnies pharmaceutiques avec leurs PP
et comment elles sont élaborées, nous jugeons pertinent de recourir à l’étude de cas.
Le faible degré de contrôle du chercheur sur le comportement des participants, supporte également
l’emploi de l’étude de cas. En effet, dans le cadre de notre étude, nous visons à recueillir les
connaissances de gestionnaires au sein des services marketing ou services associés de compagnies
pharmaceutiques implantées en Chine. Par conséquent, le contexte de notre recherche ne nous
permet pas d’exercer un contrôle sur les comportements des participants.
Enfin la contemporanéité du phénomène étudié représente également un élément ayant favorisé le
choix de l’étude de cas. En effet, l’intérêt des multinationales pour la Chine est relativement récent
tout comme la montée en puissance des PP de ce marché.
Ces trois éléments réunis justifient le choix de l’étude de cas comme stratégie de recherche. Il
importe également de mentionner que cette stratégie de recherche est particulièrement applicable
lorsqu’il s’agit d’une avenue de recherche encore peu étudiée (Ravenswood, 2011). De ce fait, le
but n’est donc pas de tester des hypothèses et de conclure une étude, mais bien d’approfondir la
compréhension d’un phénomène précis et de développer de nouvelles avenues de recherche
(Shaban, 2009). L’étude de cas peut être composée d’un cas unique ou de plusieurs cas et peut être
effectuée à plusieurs niveaux d’analyse. Le cas unique s’applique davantage applicable aux
situations où l’on s’adresse à des cas critiques extrêmes ou révélateurs. Les cas multiples sont
quant à eux utilisés lorsqu’il n’y a pas d’intérêt particulier envers un cas précis de la part des
chercheurs et que ces derniers visent une meilleure compréhension d’un phénomène, d’une
42
situation ou d’une population (Shaban, 2009). Dans notre cas, la confrontation de données
provenant de plusieurs organisations nous apparaissant difficilement comparable, nous avons opté
pour la réalisation d’un cas unique. Toutefois, nous avons choisi de tester la robustesse de nos
résultats en procédant à une entrevue semi-dirigée avec un expert du secteur étudié. En croisant les
résultats issus de ces deux modes de collectes de données, nous réduisons les limites que présente
l’étude de cas.
III. L’échantillonnage et le choix de l’informateur clé
L’échantillonnage s’est effectué sur deux niveaux, c’est à dire au niveau de la sélection du cas
ainsi qu’au niveau de la sélection des répondants à l’intérieur du cas. Les deux prochaines sections
présentent la démarche adoptée lors de la phase d’échantillonnage de notre étude.
1. La sélection du cas
Le potentiel d’apprentissage constitue un élément essentiel dans le choix du cas. Nous avons
réalisé notre sélection selon les principes de l’échantillonnage intentionnel (purposeful sampling).
De ce fait, tel que proposé par Patton (Patton & Patton, 2002) :
« Cases for study (e.g., people, organizations, communities, cultures, events, critical incidences)
are selected because they are « information rich » and illuminative, that is, they offer useful
manifestations of the phenomenon of interest, sampling then, is aimed at insight about the
phenomenon, not empirical generalization from a sample to a population. »
Bien que la balance et la variété ne doivent pas être négligées lors de la sélection du cas, le
potentiel d’apprentissage constitue l’élément essentiel. Dans le cadre de notre recherche,
l’industrie pharmaceutique a été choisie comme milieu d’étude. Ceci est justifié par le nombre
élevé et le rôle majeur des PP dans ce secteur. Conséquemment, cette industrie offrait un potentiel
d’apprentissage considérable pour notre étude.
Comme la recherche s’intéresse aux relations des compagnies pharmaceutiques avec les payeurs,
les distributeurs, le corps médical et les patients sur le marché chinois, une attention particulière a
été prêtée à ces critères :
43
- Être une compagnie pharmaceutique multinationale occidentale
- Vendre plusieurs médicaments sous prescription sur le marché chinois
Préalablement à la collecte de données, une liste de compagnies répondant à ces critères a été
réalisée.
2. La sélection des répondants
Tout comme la sélection du cas, la sélection des répondants a été effectuée intentionnellement. Ils
ont été choisi en fonction de leur potentiel à fournir des réponses riches en information et ayant
ainsi un fort potentiel d’apprentissage. De fait, les personnes approchées devaient être impliquées
dans les activités marketing de la compagnie. Dans une compagnie pharmaceutique, les activités
marketing ne se réduisent pas simplement au département de marketing. Les départements de
« market access » et des affaires médicales ont également des rôles majeurs notamment auprès des
autorités gouvernementales et des leaders d’opinion. Nous avons choisi d’interroger deux
gestionnaires appartenant au département de marketing, une de « market access », une des affaires
médicales et une à la planification stratégique et développement de portefeuille. Afin d’augmenter
la qualité de nos réponses, nous avons choisi des répondants d’un niveau de séniorité élevé. Les
postes de nos répondants vont de cadre supérieur à directeur et ont une expérience dans l’industrie
pharmaceutique allant de sept à 20 ans.
3. La sélection de l’informateur clé
Afin de vérifier les résultats obtenus suite à l’analyse de nos entrevues, nous avons choisi de
passer par un informateur clé, autrement dit par une personne ayant une connaissance approfondie
des rouages de l’industrie pharmaceutique en Chine. Nous nous sommes donc tournés vers les
cabinets de conseils offrant leurs services aux compagnies comparables à celle constituant notre
cas. La sélection du cabinet s’est faite selon le nombre de publications ayant un lien avec notre
étude à son actif. L’auteur de la publication, un associé du cabinet, a ensuite été approché.
44
IV. La collecte de données
1. L’instrument de collecte de données
La collecte de données qualitatives peut-être effectuée de trois façons : des entrevues en
profondeur, des observations directes ainsi que de la consultation de documents (Patton & Patton,
2002). Dans le cadre de notre recherche, les entrevues individuelles en profondeur et la
consultation de documents constitueront les sources d’informations. Conséquemment, le guide
d’entrevue agira comme principale source de collecte de données dans le cadre notre étude. Celui-
ci a été élaboré en utilisant le cadre conceptuel comme référence, tout en étant suffisamment
flexible pour permettre l’émergence de nouveaux thèmes. Tel que mentionné par Yin, l’étude de
cas est une méthode de collecte de données pouvant présenter des failles (Yin, 2009), d’où la
recherche d’informations complémentaires parmi des données secondaires. Cette méthode dite de
triangulation, consistant à recourir à d’autres sources d’information, est le moyen de clarifier
certains points et de s’assurer de l’exactitude de certaines données (Stake, 2005).
Le guide d’entrevue (Annexe 3) comprend quatre parties. La première permet de mieux connaître
le répondant, sa fonction et ses responsabilités dans la compagnie. La deuxième vise à connaître en
détails les activités de la compagnie en Chine. Ces deux premières parties du guide d’entrevue ont
un rôle davantage introductif permettant de mettre le répondant à l’aise et de relever des
informations descriptives. La troisième partie porte sur les actions de la compagnie mises en place
à l’égard des PP. Cette section a été construite à partir des rôles des PP définis dans la revue de
littérature. Les questions posées visent à déterminer les activités de la compagnie avec ses PP afin
de définir le type de relation bâti entre les parties. Cette section contient plusieurs sous-sections
représentatives de chacune des PP et des propositions de recherche. Enfin, la dernière portion du
guide d’entrevue marque la fin de l’entrevue. Afin de terminer la rencontre sur une note positive,
celle-ci porte sur le futur de l’industrie pharmaceutique en Chine selon la perspective du
répondant. Cela permet également d’en savoir plus sur les intentions de la compagnie sur ces
activités en Chine.
Le guide d’entrevue (Annexe 4) destiné à l’informateur clé a été construit à partir des résultats
issus du cas. Nous l’avons donc développé au cours de notre étude et plus précisément suite à
l’analyse des données obtenues après nos cinq premières entrevues. Composé de trois sections, il
45
est bâti de manière similaire à celui destiné à l’étude de cas mais ne comporte pas de sections
concernant les activités de la compagnie employant l’informateur clé.
2. La collecte de données
À l’aide de contacts personnels et notamment de Jacques Dessureault, professeur de marketing à
HEC Montréal et Vice-Président marketing au sein de la compagnie étudiée, nous avons bénéficié
d’un accès privilégié au personnel de cette dernière. Nous avons ainsi recueilli le témoignage de
cinq personnes occupant des postes à haute personnalité dans la compagnie (Tableau 3).
Tableau 3 : Présentation des répondants
Département Poste Durée de l’entrevue
Market access Directeur 70 minutes
Planification stratégique et
développement de portefeuille
Cardiovasculaire et
métabolique
Senior manager 90 minutes
Affaires médicales - Virologie Directeur 60 minutes
Marketing Chef de produit 45 minutes
Marketing Chef de produit 55 minutes
L’approche des personnes interrogées s’est faite par l’intermédiaire des ressources humaines à qui
avait été préalablement transmise la présentation de notre étude. Les personnes désireuses sont
ensuite rentrées en contact avec moi même et les date et horaire ont fixées à leur convenance. La
collecte s’est effectuée par l’entremise d’entrevues semi-dirigées téléphoniques entre le 12 et 29
46
juin 2012. Au total cinq entrevues ont été réalisées en anglais, avec une durée allant de 45 minutes
à 90 minutes.
L’entrevue de l’informateur clé s’est déroulée par téléphone le 16 aout 2012 et a duré 60 minutes.
3. Les mesures de confidentialité et d’éthique
Afin d’éviter au maximum les réponses biaisées de nos répondants, certaines mesures de
confidentialité et d’éthique ont été définies. En effet, en sachant qu’ils peuvent être identifiés lors
de la diffusion des résultats, les répondants risquent de s’autocensurer, d’être sur la défensive voir
embellir leurs réponses (Miles & Hubermann, 1986).
Dans le cadre de notre étude, les individus ont été prévenus à l’avance des mesures de
confidentialité et d’éthique respectées pour la recherche. Un formulaire de consentement
d’entrevue accompagné de toutes les mesures prises pour respecter l’anonymat des répondants et
des compagnies a d’ailleurs été envoyé, lu et discuté avec les participants avant les entrevues. De
plus, tous les participants ont été avisés que les informations recueillies seraient tenues
confidentielles et qu’une attention particulière serait portée sur la conservation de l’anonymat de la
compagnie, du cabinet de conseils ainsi que des répondants lors de la diffusion des résultats. Les
répondants disposaient de plusieurs niveaux de protection de leur anonymat (fonction, terme
générique ou anonymat complet).
4. La présentation et l’analyse des résultats
Miles et Huberman (Miles & Hubermann, 1986) suggèrent qu’une analyse soit effectuée au cours
de la collecte de données. Suivant cette recommandation, nous avons effectué au cours de la
collecte de données une réflexion sur les données recueillies afin de déterminer les éléments
pouvant être approfondis au cours des entrevues subséquentes.
Les entrevues ont été retranscrites les jours suivants leur réalisation dans l’objectif de reconstituer
le plus fidèlement possible les entretiens. Le fait de réaliser soi-même la retranscription des
entrevues comporte certains avantages notables pour l’analyse des données. En effet, la
retranscription des entrevues représente un point de transition entre la collecte et l’analyse des
47
données, qui permet de s’immerger dans les données recueillies et de se préparer à l’analyse
(Patton & Patton, 2002).
L’ensemble des données a ensuite été réparti en fonction de thèmes précis et basés sur le cadre
conceptuel afin de faciliter la rédaction du cas. Après une description de l’environnement du
marché pharmaceutique chinois grâce à la collecte de données secondaires, le cas a ensuite été
rédigé en fonction du cadre conceptuel. Les actions élaborées par la compagnie à l’égard de
chacun des groupes de PP étudiés ont été mises en avant conformément aux objectifs de l’étude.
Le premier groupe étudié est celui des payeurs, le second, celui des distributeurs, le troisième,
celui du corps médical et enfin, le dernier est représenté par le public. Par l’intermédiaire de ces
actions, le type de relation existant entre les compagnies et leurs PP est défini. Afin de compléter
et valider les informations issues du cas, les données recueillies issues de l’entrevue avec
l’informateur clé sont ensuite présentées. Une analyse de l’ensemble des données récoltées est
ensuite proposée afin de valider ou non les hypothèses établies. Enfin, la mise en parallèle de cette
analyse avec les données présentes dans la littérature nous a permis de dresser un ensemble de
recommandations.
48
Chapitre 4 -‐ Collecte de données
Deux types de données ont été recueillies: les données secondaires par l’intermédiaire notamment
de documents fournis par la compagnie faisant l’objet de notre étude et les données primaires
issues des entrevues semi dirigées. Les données secondaires nous permettent d’étudier
l’environnement du marché pharmaceutique chinois et ainsi d’en comprendre les différents
rouages. Cette étape s’avère indispensable pour être en mesure d’interpréter les activités des
compagnies sur ce marché. Les données primaires quant à elles sont propres aux actions des
compagnies dirigées à l’égard PP. Grâce à l’analyse de ces informations nous pourrons valider ou
non les propositions mentionnées précédemment.
I. Données secondaires – Étude de l’environnement
La croissance économique fulgurante de la Chine a été à l’origine de diverses évolutions à
l’échelle politique comme démographique. Dans ce contexte, une des priorités du gouvernement a
été de développer le système de santé et a dans ce sens établi un ensemble de réformes.
Conjointement à ceci, la volonté, le besoin et la capacité de la population à accéder aux soins sont
venus soutenir une croissance de la demande en terme de médicaments. Alors que la moitié des
compagnies pharmaceutiques implantées en Chine sont des multinationales, aucune d’elles ne
contrôle plus de 2,5% du marché. Leur approche du marché chinois varie d’une compagnie à
l’autre mais un point commun est constatable : elles ont toutes investi largement en Chine au cours
des dernières années et compte fortement sur ce pays pour la croissance de leurs activités. La
population chinoise a davantage confiance en les produits provenant des multinationales toutefois,
la visibilité de ces compagnies est encore minime (KPMG, 2011).
1. « Healthcare Reform »
Le plan de réforme de santé de 2009 est un élément majeur de l’évolution de l’environnement du
marché pharmaceutique chinois. Avec un investissement de 124$US milliards sur trois ans,
l’ensemble des réformes mises en place veut étendre l’accès aux services de santé en Chine en
améliorant la qualité des soins et en encourageant la délivrance de traitements ayant un meilleur
ratio coût-efficacité. Un des objectifs primordial est d’assurer l’accessibilité à une couverture
49
sociale à l’ensemble de la population. Le plan vise aussi à mettre en place un réseau
d’établissements de santé optimal en renforçant les infrastructures actuelles et en construisant de
nouvelles, à transformer la chaîne d’approvisionnement des médicaments et à optimiser les
activités de recherche et de délivrance pour rendre les soins de santé accessibles à tous (Wang,
2010)
2. Une demande en forte augmentation
L’accroissement du vieillissement de la population est devenu considérable au cours des dernières
années. Selon le bureau national des statistiques en Chine, 9.1% de la population chinoise était
âgée de plus de 65 ans en 2011, alors que ce chiffre était de 7.9% en 20061. La population âgée
ayant davantage besoin de médicaments, ceci constitue une opportunité considérable pour les
compagnies pharmaceutiques. D’autre part, l’occidentalisation des modes de vie des Chinois a
conduit à une croissance rapide de différentes maladies principalement non transmissibles. En
effet, l’obésité et le diabète sont désormais courants en Chine. On estime à 200 millions le nombre
de chinois souffrant d’hypertension et à 43 millions le nombre de diabétiques. De plus, la pollution
est à l’origine d’une augmentation du nombre de maladies pulmonaires. La prévalence du cancer,
notamment de l’estomac et des ovaires, ainsi que des maladies du système nerveux central sont
également en croissance en Chine. D’autre part, les maladies transmissibles telles que l’hépatite ou
la tuberculose restent des fléaux majeurs et la Chine est menacée par une expansion très rapide de
l’épidémie causée par le VIH (BusinessMonitorInternational, 2011).
L’intensification de l’urbanisation de la population est considérable, il est estimé que d’ici 2020 la
population rurale sera inférieure à la population urbaine. L’accès aux soins étant plus aisé en ville,
il est attendu à ce qu’un nombre élevé de personnes devienne utilisateurs du système de santé
(Yates, 2010).
Un des défis les plus ambitieux de la Chine est d’offrir à sa population un système de couverture
universelle. En 2006, seulement 45% de la population avait accès à une couverture médicale tandis
1 China's Total Population and Structural Changes in 2011 National Bureau of Statistics of China 2012.01.20 13:57:15
50
qu’en 2009, ce taux s’élevait à 90%2. Trois systèmes de couvertures existent dont deux sont
destinés à la population ayant de faibles revenus (tableau 4) :
• Urban Resident Basic Medical Insurance (URBMI)
• New Rural Cooperative Medical System (NRCMS)
• Urban Employee Basic Medical Insurance (UEBMI)
Tableau 4 : Systèmes de couvertures disponibles sur le marché chinois
UEBMI URBMI NRCMS
Éligibilité Obligatoire pour les
employés des compagnies
privées ou publiques
Financé par les
employeurs et employés
Prime annuelle : $100-250
Destiné à la population
citadine non éligible à
l’UEBMI (étudiants,
seniors, sans-emplois…)
Financé par le
gouvernement
Prime annuelle : $20 - 100
Destiné à la population
rurale
Financé par le
gouvernement
Prime annuelle : $20 - 50
Population
couverte
(million)
2006 2009 2006 2009 2006 2009
160 220 10 181 410 833
Source : Market Access Tracker: China - 2012
Néanmoins, les soins de santé restent une dépense majeure pour la population chinoise.
Bien que le système d’assurance privé joue encore un rôle mineur en Chine, il est attendu que ce
marché se développe et atteigne une valeur de $90 milliards d’ici 2020. Ce secteur a connu une
croissance annuelle de 27% au cours des dernières années et sert désormais 7% de la population.
2 Ministry of Human Ressources and Social Security, Ministry of Health
51
Le nombre de programmes d’assurances maladies a également considérablement augmenté,
passant de 300 en 2008 à plus de 1000 aujourd’hui (Lin, 2012).
"Increasingly, individuals and employer groups are supplementing these government social
medical programs with the purchase of supplemental health insurance products and services.
Commercial health care insurers are written into the government reform document, and are
encouraged to develop health care products to meet different needs (Anonymous, 2010)".
Leurs services restent encore peu développés puisque la majorité de ces assureurs privés ne font
que rembourser à un meilleur taux les médicaments remboursés par le gouvernement (Resources,
2012).
Avec un système de soins ayant des similitudes avec le système américain où le consommateur
reste le principal payeur, l’enrichissement de la population joue un rôle majeur sur la demande
(Datamonitor, 2011b). En effet, l’augmentation du niveau de vie de la population chinoise fait
d’elle une population plus demandeuse en terme de soins et de qualité de soins. Les dépenses de
santé sont donc croissantes (Yuanjia et al., 2007).
3. L’accès au marché
Pour vendre un produit sur le marché chinois, les compagnies pharmaceutiques doivent au
préalable faire enregistrer ce produit auprès des autorités gouvernementales, obtenir un prix et un
taux de remboursement. L’accès au marché est contrôlé par un ensemble d’entités aux niveaux
national et provincial. Les cinq joueurs clés sont :
- Ministry of Health (MoH)
- State Food and Drug Administration (SFDA)
- Ministry of Human Resources and Social Security (MOHRSS)
- National Development and Reform Commission (NDRC)
- State Administration of Traditional Chinese Medicine (SATCM)
52
La principale agence réglementaire est la State Food and Drug Administration (SFDA) créée en
2003 pour remplacer la State Drug Administration (SDA). Suite aux multiples scandales de
corruption au sein de cette agence réglementaire, de nombreuses réformes ont été mises en place
en 2007. De nouvelles mesures concernant l’enregistrement des médicaments ont été élaborés afin
d’assurer un plus haut niveau de transparence et d’élever les standards de ce processus
d’enregistrement. Désormais, l’inspection des études précliniques, cliniques et la fabrication des
médicaments seront obligatoirement soumises à l’inspection des autorités réglementaires. Le statut
de « nouveau médicament » ne pourra être obtenu que pour les produits issus d’une technologie
nouvelle et présentant les niveaux de qualité et sécurité requis. Les reformulations, seront quant à
elles enregistrées en tant que produits génériques.
4. Enregistrement d’un produit
La procédure d’enregistrement des médicaments importés est longue et peut durer plus de cinq
ans. On distingue trois étapes : la soumission du dossier à la SFDA durant cinq à six mois, la
réalisation des essais cliniques durant un à quatre ans et l’étude des résultats par le centre
d’évaluation des médicaments durant quatre à six mois (Center for Drug Evaluation – CDE)
(Resources, 2012) (figure 2).
Auparavant, les approbations nécessaires à la mise sur le marché des médicaments étaient
délivrées très facilement par les autorités ce qui conduit à l’enregistrement de milliers de produits
par an présentant que de très faibles différences avec ceux déjà présents sur le marché.
Comparativement, le nombre annuel d’approbations aux États-Unis est inférieur à 100. Afin de
stimuler le développement de nouveaux produits, la SFDA a mis en place un processus
d’approbation accéléré pour les principes actifs non commercialisés en Chine et destinés à certains
champs thérapeutiques. Dans ce cadre, l’approbation peut-être délivrée en 120 jours alors qu’elle
le sera en 150 ou 160 jours pour les produits classiques et génériques. En faisant de la sécurité et
de l’efficacité des conditions non négociables pour vendre un médicament, le gouvernement a
établi des barrières importantes à l’entrée de son marché (Anonymous, 2011c).
Le processus d’approbation des médicaments est ainsi devenu plus stricte et par conséquent plus
long. Le manque de personnel au sein des autorités réglementaires et notamment au niveau de
centre du CDE est également une cause majeure de la lenteur du processus. Avec seulement une
53
centaine d’employés au CDE devant faire face à des milliers de demandes d’enregistrement, la
SFDA est loin derrière les 2000 employés de la FDA (Anonymous, 2011c). En plus de garantir la
sécurité et l’efficacité des traitements mis sur le marché, ces changements visent également à
réduire le guanxi, phénomène très présent dans ce processus d’approbation. On a ainsi vu en
Février 2011, deux compagnies pharmaceutiques recevoir des peines d’emprisonnement de six
mois suite à la distribution de pots de vin pour accélérer le processus
(BusinessMonitorInternational, 2011).
54
Figure 2 : Procédure d’enregistrement d’un médicament (médicament importé)
Source : Market Access Tracker: China - 2012
Soumission du dossier à la SFDA
Approbation de la soumission
Évaluation technique
par le CDE
Vérification par
NICPBP*
Soumission du design des essais
cliniques à la SFDA
Approbation du design
Réalisation des essais cliniques
Soumission des résultats à la
SFDA
Évaluation technique par le CDE
Approbation et finalisation de
l’enregistrement
Étape 1 :
5 – 6 mois
Étape 2 :
1 – 4 ans
Étape 3 :
4 – 6 mois
55
* NICPBP : National Institute for the Control of Pharmaceutical and Biological Products
5. Le prix/ Remboursement
Depuis 1996, le gouvernement chinois a procédé à la réduction du prix des médicaments à 24
reprises avec un taux moyen de 20%. Ceci a eu un impact significatif sur l’industrie
pharmaceutique. Pourtant, le prix élevé des médicaments en Chine n’est pas du aux fabricants
mais aux hôpitaux pour qui la revente est la principale source de profits. En effet, le gouvernement
subventionne très peu les dépenses des hôpitaux. Ces derniers appliquent donc une marge élevée
sur le prix initial des médicaments afin d’en tirer le maximum de bénéfices
(BusinessMonitorInternational, 2012).
“The problem is not the pharmaceutical manufacturers’ prices, but the prices charged by
hospitals” 3
En 2009, une baisse de 45% du prix des médicaments essentiels4 a été imposée. Dans ce contexte,
le prix d’un gramme de l’antibiotique ceftriaxome commercialisé par Shanghai Roche
Pharmaceuticals est passé de US$10.25 à US$1.03. En Mars 2011, 162 médicaments ont à
nouveau vu leur prix baisser de 21% ce qui devrait générer une économie de 1.5 $USbn à l’échelle
des consommateurs5. Il est à noter que l’ensemble des revendeurs de médicaments (grossistes,
hôpitaux et pharmacies) peuvent fixer le prix des médicaments à condition de ne pas excéder le
prix maximum fixé par le gouvernement.
Il est attendu que le contrôle du prix des médicaments soit de plus en plus contraignant au cours
des prochaines années. En effet, le gouvernement chinois a pour objectif d’offrir un système de
couverture social universel et cherche à maitriser les dépenses de santé.
3 Stephen Potts, regional director for healthcare, Asia Pacific, the Middle East, and Africa, TNS Healthcare
4 Les médicaments essentiels sont définis par l’OMS comme étant les médicaments qui répondent aux besoins de santé
prioritaires d’une population.
5 http://news.xinhuanet.com/english2010/china/2011-03/07/c_13765223.htm
56
Pour les compagnies mettant sur le marché de nouveaux produits, elles sont libres de déterminer le
prix auquel elles souhaitent les vendre dans la mesure du raisonnable.
« On the principles of fairness, rationality, good faith, and commensuration of price with quality
in order to provide the users with drugs of reasonable prices ».
Les compagnies doivent informer la NDRC du prix des nouveaux médicaments. Il existe trois
listes principales de médicaments remboursés:
- Essential Drug List (EDL)
- National Reimbursement Drug List (NRDL)
- Provincial Reimbursement Drug List (PRDL)
Le gouvernement décide d’intégrer ou non un médicament sur les listes de remboursement en
fonction des besoins, de la sécurité, de l’efficacité et du caractère décent du prix. Les médicaments
appartenant à ces listes sont donc susceptibles d’être vendus dans des quantités importantes,
toutefois le contrôle de leur prix est strict.
EDL - Essential Drug List
Cette liste contient les médicaments dits essentiels. Selon l’organisme mondial de la santé (OMS),
les médicaments essentiels sont ceux satisfaisant les besoins de la santé de la majorité de la
population et devant être disponible à tout moment en quantité et aux dosages appropriés. Les
établissements de santé publics sont obligés de stocker et d’utiliser ces médicaments comme
traitements de base. Les départements de santé des gouvernements sont contraints de développer
des listes officielles et des lignes de conduite d’utilisation de ces médicaments. La liste publiée en
2009 contient 307 médicaments dont un tiers appartient à la médecine traditionnelle chinoise. Il
s’agit essentiellement de médicament génériques et très peu chers. Il est prévu que son contenu
soit révisé tous les trois ans. En février 2012, année de la révision de la liste, le ministre de la santé
57
Chen Zhu a annoncé la volonté d’étendre la liste à 800 médicaments couvrant ainsi des maladies
telles que le cancer.
NRDL - National Reimbursement Drug List
Après un an sur le marché, les nouveaux médicaments deviennent éligibles pour intégrer cette
liste. Ils doivent faire preuve d’une efficacité supérieure que les médicaments appartenant à l’EDL.
Il est à noter que de nombreux médicaments appartenant à cette liste sont toujours protégés par un
brevet. On distingue deux sous – catégories : la liste A et la liste B. Les médicaments de la liste A
sont totalement remboursés et sont principalement ceux de l’EDL. Leur prix maximum de vente au
détail est fixé par le NDRC. Les médicaments de la liste B sont en moyenne remboursés autour de
50 – 90%. Le NDRC suggère un prix de vente au détail mais les autorités provinciales peuvent
l’ajuster de 5% à la hausse ou à la baisse.
Cette liste est mise à jour afin de prendre en considération les avancées technologiques et
l’évolution des besoins. La première version a été éditée en 2004 et a été mise à jour en 2009,
version actuellement utilisée. Elle contient 2127 médicaments dont 1140 appartiennent à la
médecine occidentale et 987 à la médecine traditionnelle. Une nouvelle version est attendue pour
2013 ou 2014 (Tableau 5).
Tableau 5 : Répartition des médicaments occidentaux et traditionnels au sein des listes
Liste A Liste B Total
WM* 349 791 1140
TCM** 154 833 987
Total 503 1624 2127
Source : KPMG – China’s pharmaceutical market : poised for the giant leap
*western medicines
** Traditionnal chinese medicine
58
Si le médicament fait preuve d’une sécurité et efficacité remarquables et appuyées par des
publications dans des revues de renom, un prix avantageux peut lui être accordé. De plus,
l’excellence de la qualité du processus d’enregistrement et du système de surveillance pour la
gestion des effets indésirables sont requis.
Pour les compagnies multinationales, la majorité des ventes proviennent des médicaments inscrits
sur cette liste.
Tableau 6 : La contribution aux ventes des produits inscrits sur la NRDL pour les compagnies
multinationales
Compagnies
multinationales
NRDL 2009
Nombre de
médicaments
inscrits
Contribution aux
ventes
AstraZeneca 22 93%
Bayer 25 92%
GSK 41 86%
J&J 32 82%
MSD 15 99%
Novartis 46 89%
Novo Nordisk 15 98%
Pfizer 44 95%
59
Sanofi-Aventis 39 98%
Roche 20 74%
Source : BusinessMonitorInternational. (2011). China Pharmaceuticals & Healthcare
La dernière version de la liste couvre 23 classes thérapeutiques : les agents anti microbiens, anti-
parasitiques, antipyrétiques/ analgésiques et AINS, anesthésiques, vitamines, compléments
alimentaires, hormonaux, régulateurs de la fonction immunitaires, anti-néoplasiques, anti-
allergiques, du système nerveux central et périphérique, anti-psychotique, du système respiratoire/
digestif/ circulatoire/ urinaire et sanguin, de l’équilibre électrolytique, antidotes, diagnostics et
biologiques. Chacune des catégories n’est pas proportionnellement représentée (Tableau 7).
Tableau 7 : Classes thérapeutiques couvertes par la NRDL - MOHRSS
Classes thérapeutiques Nombre de molécules
Anti-microbiens 183
Anti-parasitiques 32
Anti-pyrétiques, analgésiques, AINS 39
Analgésiques 27
Anesthésiques 32
Vitamines 30
Compléments alimentaires 19
Hormones 106
Traitements du système immunitaire 20
60
Anti-néoplasiques 96
Anti-allergiques 18
Système nerveux central et périphérique 98
Antipsychotiques 73
Système respiratoire 50
Système digestif 118
Système circulatoire 123
Système urinaire 28
Système sanguin 68
Équilibre acido-basique/ électrolytique 24
Médicaments de spécialité 208
Antidotes 29
Agents diagnostics 26
Biologiques 22
Source : BusinessMonitorInternational. (2011). China Pharmaceuticals & Healthcare
PRDL - Provincial Reimbursement Drug List
Pour les médicaments n’ayant pas été intégrés à la NRDL, les compagnies ont la possibilité de
négocier avec les autorités provinciales pour obtenir une place sur les PRDL. De plus, l’inclusion
dans cette liste multiplie fortement les chances d’un médicament d’intégrer la NRDL.
61
6. Le réseau de distribution des médicaments
Actuellement, 85% des médicaments sont vendus à l’hôpital et moins de 10% des pharmaciens
qualifiés travaillent dans une des 120 000 pharmacies en Chine (Resources, 2012). Actuellement,
l’acteur le plus important est Nepstar Chain Drugstores avec 2500 magasins sur le sol chinois. Sur
le plan économique, ce marché est mature pour la consolidation de part les nouvelles politiques
visant à le rendre plus attractif pour les investisseurs. En effet, avec la volonté du gouvernement de
changer le système de financement des hôpitaux, et donc de séparer les activités de prescription et
de délivrance, les pharmacies devraient gagner en importance au cours des prochaines années.
80% des établissements de santé en Chine sont des établissements publiques et donc gérés par
l’État, toutefois les initiatives gouvernementales devraient permettre au marché privé de s’étendre.
Constituant un concurrent majeur pour les établissements publics, ce dernier a un rôle important à
jouer dans la qualité et l’efficacité des soins. Le financement des hôpitaux publics a depuis
toujours été complexe. Les subventions du gouvernement sont faibles et plus de 40% des profits
proviennent des marges réalisées sur les médicaments. Ce système fait preuve de nombreuses
critiques puisqu’il entraine souvent des conflits d’intérêts à l’origine d’un phénomène de sur-
prescription. En imposant aux hôpitaux la réduction des marges sur la vente des médicaments mais
sans les financer davantage, ils tentent désormais de compenser en prescrivant et donc en vendant
plus de médicaments. On compte autour de 900000 établissements de santé répartis sur trois
niveaux. En zone urbaine, les centres communautaires (community health centers) de soins
délivrent les soins primaires. Les hôpitaux de district (district hospitals) sont plutôt bien équipés et
délivrent un large éventail de services médicaux. Les hôpitaux universitaires (university hospitals)
sont quant à eux les mieux équipés et détiennent les professionnels de santé les plus performants.
En zone rurale, les postes de soins (village health posts) délivrent les soins de base mais la qualité
est très médiocre. Les centres de soins municipaux (township healthcenters) délivrent des soins
plus poussés mais manquent considérablement de personnels et de matériel moderne. Les hôpitaux
de comté (county hospitals) sont les meilleures infrastructures en zone rurale, ils offrent un large
éventail de services mais les coûts sont élevés (Resources, 2012). Les ventes de médicaments en
zone rurale ont augmenté de 27% en 2011 (Xinhua, 2012).
62
Tableau 8 : Organisation des établissements de santé
Niveau Zone urbaine Zone rurale
1 Centres communautaires
(Community health centers)
Postes de santé de village
(Village health posts)
2 Hôpitaux de quartier
(District hospitals)
Centres de santé de canton
(Township health centers)
3 Hôpitaux universitaires
(University hospitals)
Hôpitaux du comté
(County hospitals)
Source : Market Access Tracker: China - 2012
Le marché de la distribution des médicaments représentait près de 150 $USbn en Chine en 2011,
soit une croissance de 23% par rapport à l’année précédente (Xinhua, 2012). Ce secteur fait face à
de nombreux défis. La vaste population dont près de 700 millions habitent dans les campagnes,
combinée à l’immensité du pays ne facilite pas cette activité. De plus, les carences en
infrastructures et en expertise logistique ne permettent d’assurer la sécurité, les couts et les délais
de livraison des médicaments. Le réseau est actuellement composé de plusieurs milliers de
distributeurs locaux ce qui rend difficile pour les autorités de veiller à sa fiabilité. De plus, cette
structure archaïque est favorable à l’entrée des contrefaçons et rend quasi impossible le suivi des
livraisons (Tse, 2012).
Le secteur de la distribution a également été révolutionné par la mise en vigueur des bonnes
pratiques de distribution (Good supply practice –GSP) qui a résulté en la cessation d’activité d’un
grand nombre de firmes ne répondant pas aux critères imposés. En 2011, le gouvernement a révisé
les standards des GSP afin de restructurer et optimiser le processus de distribution. La mise à jour
des GSP va au delà du réseau de distribution en lui même et impose désormais des standards au
63
niveau de la commande, de la livraison ou du service après vente (Anonymous, 2011b).
Actuellement, seulement 50 distributeurs répondent à ces nouvelles régulations. Une particularité
forte du secteur de la distribution en Chine est son nombre colossal de joueurs. Les trois
principaux joueurs se partagent seulement 22% des parts de ce marché alors qu’aux États-Unis, ils
bénéficient de 85% du marché. Ce marché fragmenté et complexe fait souvent intervenir deux à
trois intermédiaires pour livrer un médicament du fabricant au dispensateur (Tse, 2012). La
majorité des distributeurs sont des joueurs locaux, hormis Sinopharm, Shanghai Pharma et
Jointown (Tableau 9). Ils adoptent différentes stratégies pour développer leurs activités. À titre
d’exemple, Sinopharm a développé de bonnes relations avec les compagnies pharmaceutiques et
les hôpitaux les plus importants. Ce distributeur a également multiplié ses acquisitions depuis qu’il
est devenu public en 2009 et a ainsi développé son réseau dans un ensemble de villes et de
municipalités. Shanghai Pharma quant à lui couvre plus de 3350 hôpitaux dans l’Est de la Chine. Il
est présent dans 100% des hôpitaux de grade 3 et dans la plupart des hôpitaux de grade 2.
Jointown Pharmaceutical Group est totalement privé et procède à de multiples acquisitions de
petits et moyens joueurs pour se construire une forte présence sur l’ensemble du marché (Tse,
2012). Un des objectifs est de conserver entre un et trois distributeurs à l’échelle nationale et une
vingtaine à l’échelle locale (BusinessMonitorInternational, 2011). Le secteur de la distribution des
médicaments, actuellement fragmenté autour de 9500 entités est amené à se consolider au cours
des prochaines années. En 2003, la Chine a partiellement ouvert ses frontières aux compagnies
étrangères qui pouvaient alors détenir 50% des parts dans une joint-venture. La première entité
sino-étrangère a été formé en décembre quand le suisse Zuellig Pharma a décidé de collaborer
avec China Xinxing Group pour former China Zuellig Xinxing Pharmaceutical qui a par la suite
acquis une firme locale Liaoning Zhongjian New Pharmaceuticals Agent
(BusinessMonitorInternational, 2012).
Depuis 2010, le secteur de la distribution est entré dans une période d’intense consolidation et il
est attendu que les fusions, acquisitions et/ou alliances de compagnies contribuent à son
développement. Désormais, pour approvisionner les établissements publics, les compagnies sont
soumises à des appels d’offre par les autorités provinciales, basées sur la qualité, le prix et la
notoriété (Resources, 2012).
64
Tableau 9 : Distributeurs régionaux – 2010
Région Part du marché Principaux distributeurs
Est 44% Shanghai Pharma, Sinopharm, Nanjing Pharma, Huadong
Medicine, Anhui Huayuan
Nord 20% Beijing Pharma (China Resources Medication Group),
Sinopharm, Pacific Group, Tianjin Pharma
Centre
Sud
20% Accord Pharmaceutical (Sinopharm), Guangzhou Pharma,
Sinopharm, Jointown Pharma,
Changsha Double-Crane Medicine
Sud-
Ouest
8% Chongqing Medicines, Chongqing TongJunGe, Yunnan
Pharma
Nord-
Est
5% Sinopharm, Harbin Pharma
Nord-
Ouest
3% Xinjiang Pharma, Lanzhou Pharma, Qinghai Pharma
Source : Market Access Tracker: China - 2012
Certains distributeurs se focalisent sur la vente aux hôpitaux les plus importants mais on observe
actuellement un changement de cible car certains se concentrent sur les hôpitaux moins importants
et retirés en zone rurale (Figure 3). Le marché des médicaments essentiels est un marché où les
marges sont faibles mais les volumes sont conséquents. Le marché des médicaments
biopharmaceutiques est un créneau soulevant l’intérêt des distributeurs puisqu’il nécessite le
recours à des conditions de distributions spéciales et qu’il est attendu que les ventes de ces
produits atteignent 13% de la vente totales des médicaments en 2015 contre 7% en 2006.
65
Figure 3: Évolution de la répartition des activités des distributeurs
Source : Market Access Tracker: China - 2012
Les distributeurs doivent répondre à des exigences logistiques de plus en plus contraignantes
comme le respect de la chaîne du froid, le développement des centres de distribution pour s’aligner
avec l’extension du système de distribution, la mise en place de système d’inventaires et de gestion
de livraison adaptés aux différents types de produits, le développement d’une offre de services
plus compréhensive (Tse, 2012).
7. Le corps médical
La corruption au sein du corps médical est depuis longtemps un problème majeur en Chine. En
Novembre 2010, le ministre de la Santé a déployé des efforts afin d’éliminer la collaboration entre
les médecins et les visiteurs médicaux des compagnies. Les médecins sont incités à prescrire les
médicaments des compagnies multinationales car ils reçoivent une commission à la vente. Dans
l’objectif d’éviter les pots de vin et la divulgation d’informations médicales utilisées à des fins
commerciales, les médecins risquent désormais une interdiction d’exercice de deux ans dans leurs
hôpitaux (BusinessMonitorInternational, 2012). Toutefois, la promotion des médicaments est
15% 22% 24%
26% 27% 27%
59% 51% 49%
2005 2010 2015
Petits hôpitaux/ centres de soins Pharmacies de détail Gros hôpitaux
66
essentiellement ciblée sur les médecins dont l’influence est importante. Contrairement aux États-
Unis, mais comme dans la majorité des pays du monde, la promotion des médicaments sous
prescription est interdite auprès du grand public (Datamonitor, 2011b).
Avec moins de deux médecins pour 1000 habitants (Datamonitor, 2012), l’offre de soins en Chine
est encore peu développée. La Chine compte approximativement 2.3 millions de médecins dont
90% est formé en médecine occidentale. Toutefois, l’éducation qu’ils reçoivent est variable et la
majorité d’entre eux n’ont suivi qu’un cursus post secondaire de trois ans dans lequel ils se
spécialisent très rapidement d’ou la pénurie de médecins généralistes. Seulement deux universités
proposent un programme de huit ans semblable aux programmes occidentaux.
Pendant longtemps, le pays comptait peu d’établissements destinés aux soins primaires ainsi,
obligeant les patients à se tourner vers les hôpitaux majeurs des grandes villes. Ces derniers étaient
alors bondés et ce problème s’exacerbait avec la croissance de la demande en terme de soins de
santé. Le gouvernement a alors pris l’initiative de développer des centres communautaires de santé
(CHC) en zones urbaines et des hôpitaux de plus petite taille avec des standards élevés en zones
rurales. Ceci implique la formation du corps médical nécessaire, des médecins généralistes
notamment, à la dispensation des soins. Afin de rendre les CHC plus attirants, les gouvernements
ont investi largement pour l’amélioration de ces infrastructures. Par ailleurs, le prix des
médicaments est subventionné et le taux de remboursement des soins est augmenté. Pourtant, le
manque de médecins formés pour pratiquer dans ces CHCs constitue un frein majeur à leur bon
fonctionnement. On a ainsi vu le nombre d’hôpitaux passer de 1362 à 3437 entre 1990 et 2008
(BusinessMonitorInternational, 2012).
Avec une croissance considérable des réseaux sociaux et de l’utilisation de l’Internet en général,
c’est sans surprise que la population se tourne de plus en plus vers ces nouveaux outils pour
obtenir de l’information concernant la santé. Le corps médical a également recours à ces outils
pour répondre aux besoins de la population. On a ainsi « Dxn.cn » une communauté en ligne ayant
rassemblé trois millions d’individus débattant sur des cas médicaux et échangeant des idées en
ligne (Healthcareengagementstrategy, 2012). L’accès aux informations avec le développement de
l’internet commence à conscientiser les patients à l’égard des traitements et des alternatives
existantes.
67
8. La concurrence
Il existe sur le marché chinois un ensemble d’alternatives thérapeutiques dont l’efficacité, la
sécurité et le rapport cout - efficacité peut varier. Plus le nombre d’alternatives thérapeutiques est
élevé, moins le pouvoir des compagnies est élevé (Datamonitor, 2011b).
La médecine traditionnelle a une place prépondérante dans la culture chinoise depuis des
millénaires. Bien que la sécurité et l’efficacité de cette médecine alternative soient incertaines,
elle reste très utilisée (Datamonitor, 2012). Il est estimé que 40% du marché des traitements
thérapeutiques est attribué à la médecine traditionnelle chinoise (Anonymous, 2011a).
Avec une croissance de 16.4% entre 2006 et 2010, le marché des génériques a atteint une valeur de
$19, 645.3 millions en Chine représentant 95.3% du marché pharmaceutique. Il est estimé que ce
marché atteigne une valeur de $32, 742.7 millions soit une croissance de 66.7% par rapport à 2010
(Datamonitor, 2011a). Le marché est saturé de compagnies vendant des médicaments génériques
offrant un large choix aux acheteurs. Les compagnies occidentales sont insignifiantes dans ce
marché largement dominé par les compagnies locales (Datamonitor, 2011a). Dans l’objectif
d’optimiser les dépenses destinées au domaine de la santé, le gouvernement soutient le recours aux
alternatives les moins chères.
La concurrence peut également provenir de contrefaçons de médicaments génériques ou non qui
parviennent à s’immiscer dans la chaîne de distributions (Datamonitor, 2011b). Selon les
compagnies les pertes engendrées par les contrefaçons sur les revenus annuels sont estimées entre
10% et 15% du marché (BusinessMonitorInternational, 2011).
II. Données primaires issues de l’étude de cas – Étude des stratégies
organisationnelles
Cette partie rassemble les informations recueillies lors des entrevues semi-dirigées réalisées auprès
des gestionnaires de la compagnie faisant l’objet de notre étude. Les informations visent à dresser
le portrait de l’ensemble des actions de la compagnie à l’égard des quatre groupes de PP étudiées.
68
1. Actions dédiées aux payeurs
Des échanges directs avec les autorités gouvernementales
Le département de gestionnaires de comptes clés ou « Key Account Manager » de la compagnie
assure sa visibilité auprès des autorités gouvernementales en travaillant avec un large éventail de
leaders d’opinion à l’échelle nationale et provinciale. Ces derniers sont en charge de donner un
avis objectif et des recommandations aux autorités afin qu’elles déterminent les conditions de mise
sur le marché d’un médicament. À l’échelle provinciale et centrale, les KOLs sont distincts et leurs
actions n’ont pas le même objectif. Au niveau provincial, les KOLs travaillent pour inscrire leurs
produits sur la PRDL (Provincial Reimbursement Drug List) et sur les formulaires de directives
des hôpitaux. Au niveau central, le travail des KOLs tend à inscrire les produits sur la NRDL
(National Reimbursement Drug List) et a également un rôle éducatif auprès des autorités
puisqu’elle leur apporte des informations de qualité d’ordre pharmaco-économique notamment.
Les médecins KOLs en charge de cet exercice sont régulièrement tenus au courant sur les
avantages que présentent les produits de la compagnie. Le défi de la compagnie est de leur faire
passer le bon message afin qu’à leur tour ils le transmettent aux autorités gouvernementales. À
cette étape la transmission d’une information claire, précise et de qualité est indispensable. Dans
ce contexte et au niveau central, sont organisés des séminaires rassemblant trois parties :
l’industrie, le monde académique et le gouvernement. Il s’agit d’une plateforme devenant de plus
en plus importante pour les échanges entre ces trois groupes d’individus. Dans un futur proche, ce
type de séminaires pourrait également être organisé au niveau provincial. La compagnie est
également sollicitée pour mener des ateliers auprès du gouvernement et présenter un sujet portant
généralement sur des études pharmaco-économiques. La compagnie cherche donc à faire
comprendre un ensemble de données cliniques et pharmaco-économiques aux autorités
gouvernementales ceci étant un facteur décisif dans la détermination des conditions de vente du
médicament.
Une présence en Chine qui continue à se renforcer
La compagnie faisant l’objet de notre étude est née en 1982 à l’issue d’une joint-venture entre le
joueur américain et le gouvernement chinois et est confiante de maintenir une croissance de ses
ventes à deux chiffres grâce à l’introduction de nouveaux médicaments. Elle a fêté cette année ses
69
30 ans, compte désormais plus de 2000 employés et a son siège social à Shanghai. Ce marché est
le cinquième plus gros en terme de revenue au niveau mondial pour la compagnie. Elle espère
doubler cette année la croissance de ses ventes pour atteindre les 27% grâce à la forte demande de
ses produits phares sur le marché de l’hépatite et du diabète. Elle réalise un ensemble d’activités
en Chine allant de la recherche à la commercialisation. Elle possède un centre de production et de
distribution dans le parc technologique de Shanghai Minhang et a récemment investi $US20
millions en Chine pour développer cette capacité. Elle tend également à renforcer ses activités de
R-D par davantage de partenariats avec des joueurs locaux. Actuellement, 400 personnes
travaillent sur ce site pour la production des médicaments pour traiter l’hépatite. À la suite du
nouvel investissement, les antidiabétiques seront rajoutés à la capacité. La production locale est le
moyen pour la compagnie de réduire ses coûts de fabrication et ainsi de faire face à la baisse des
prix imposée par le gouvernement.
Avec la volonté d’étendre ses activités de R-D, la compagnie planifie de doubler ses effectifs au
cours des deux prochaines années pour mettre l’emphase sur l’hépatologie, l’oncologie et les
troubles métaboliques et cardiovasculaires. Elle a tout récemment réalisé un partenariat stratégique
avec l’université de Tsinghua pour intensifier ses activités de recherche en oncologie,
immunologie et biologie structurelle.
“This is XXX’s first discovery collaboration in China and is an example of the company’s
deepening commitment to the country”
Au cours des cinq dernières années, la compagnie a investi $48 millions pour établir des
arrangements de coopération en R-D avec des joueurs locaux tels que Wuxi AppTec, Simcere
Pharmaceutical Co ou Simcare pour le développement de thérapies anti-cancéreuses.
Ce type de coopération est le moyen pour la compagnie de développer des produits sur mesure aux
besoins locaux et leur faciliter le processus d’enregistrement et d’approbation. La réalisation des
essais cliniques localement est également un accélérateur du processus d’enregistrement non
négligeable. En effet, les médicaments importés sont soumis à des démarches plus complexes et
par conséquents plus longues. Depuis 2010, la compagnie a réalisé 37 essais cliniques pour 15
70
produits différents. Cinquante pourcents des produits commercialisés par la compagnie faisant
l’objet de notre étude sont importés, l’autre moitié est fabriquée localement.
Le développement de produits innovants et de qualité
La compagnie a donné à son portefeuille de produits, une orientation innovante et de qualité. Avec
des médicaments à forte valeur ajoutée, la compagnie cherche à intégrer au maximum les listes de
remboursement. Poursuivant un robuste développement sur ce marché, pour la compagnie, se
concentrer sur la qualité et l’innovation plutôt que sur le prix est primordial. Elle estime que 90%
de ses ventes en Chine au cours des six dernières années proviennent des thérapies innovantes.
Ainsi, elle a choisi d’ajouter la Chine à la liste des pays dans lesquels elle procède au lancement
global de ces nouveaux produits. Il est à noter que pendant très longtemps, les produits mis sur le
marché des pays développés n’étaient commercialisés que plusieurs années après en Chine. Les
axes thérapeutiques dans lesquels la compagnie investit majoritairement sont l’oncologie, la
virologie, le cardiovasculaire et le métabolique. Elle envisage de lancer au moins trois nouveaux
traitements sur le marché chinois d’ici 2016 dont deux antidiabétiques, des antiviraux et des anti-
néoplasiques. Avec la qualité et l’innovation comme caractéristiques de la valeur de ses produits,
la compagnie espère intégrer plusieurs médicaments au moment de la mise à jour de la NDRL en
2013 ou 2014. La majorité des produits vendus par la compagnie sont listés mais les derniers à
avoir été mis sur le marché n’ont pas encore eu cette opportunité puisqu’ils doivent avoir un à
deux ans d’ancienneté avant d’être potentiellement intégrés. La compagnie vend toutefois des
produits OTC mais ses médicaments majeurs sont sous prescriptions. Les produits phares de la
compagnie sont indiqués dans le traitement de l’hépatite B, le diabète de type 2 et la leucémie
myéloïde chronique. À titre d’illustration, un antidiabétique de type 2 dont il existe une centaine
de génériques est vendu sous son nom de marque par la compagnie étudiée, et possède 60% des
parts du marché de la metformine en terme de valeur. En terme de nombre de patients, le chiffre
est inférieur car c’est le prix élevé qui fait augmenter les parts de marché en valeur. Ce
médicament appartient depuis plusieurs années à la NDRL et a été listé sur EDL l’année dernière.
Il a ainsi obtenu l’autorisation d’être vendu dans les hôpitaux communautaires. Bien que ce type
de produits se positionne dans un marché de pointe et est par conséquent couteux, la compagnie
tend à faire son maximum pour baisser les prix et les rendre accessible au grand public et
remporter les appels d’offre lancés par les hôpitaux.
71
L’aide au développement du secteur de l’assurance privée
Ce secteur est encore à un stade très préliminaire mais tend à se développer. La compagnie ayant
fait l’objet de notre étude encourage cet essor afin de pouvoir travailler avec ces joueurs. Elle
travaille en collaboration avec les autres multinationales pour supporter le développement de ce
secteur car elle voit le moyen d’augmenter l’accessibilité des soins aux patients.
2. Actions dédiées aux distributeurs
Les distributeurs représentent une porte d’entrée dans les hôpitaux considérable pour les
compagnies. Afin de bénéficier de cet accès privilégié, la compagnie étudiée a décidé d’établir des
relations « win-win » avec ses distributeurs. Elle cherche ainsi à établir une synergie avec ses
distributeurs qu’elle choisit essentiellement à l’échelle provinciale et parmi les plus qualifiés et
mieux réputés. Elle a alors pour objectif d’établir des relations à long terme avec ses joueurs et va
favoriser leur loyauté en contribuant au développement de leurs compétences ainsi les aider à
accroitre leurs activités. Ainsi, la compagnie supporte ses distributeurs à renoncer à ses systèmes
traditionnels de distribution pour en développer de plus modernes. Elle les encourage ainsi à
aligner leurs services avec les exigences logistiques actuelles et de tirer profit des technologies
existantes et disponibles. De leur côté, les distributeurs perçoivent la compagnie comme un leader
de son domaine de par son pipeline et son engagement avec la Chine. Ceci vient soutenir cette
volonté de bâtir une relation à long terme. Les distributeurs avec qui la compagnie travaille,
interviennent essentiellement en zone urbaine et dans les hôpitaux principaux du pays.
3. Actions dédiées aux médecins
On distingue différents types de médecins dont les rôles sont variables : les médecins à l’échelle
nationale, provinciale et à l’échelle de l’hôpital. Les deux premiers ont principalement des rôles de
leaders d’opinion respectivement à l’échelle nationale et provinciale alors que le dernier joue un
rôle de prescripteur. Le département des affaires médicales intervient au niveau des leaders
d’opinion alors que les départements de marketing et ventes sont au niveau du prescripteur. Le défi
de la compagnie est de leur transmettre les informations nécessaires pour les convaincre que son
produit est le traitement de choix. Les informations apportées proviennent d’études cliniques telles
que des essais randomisés en double aveugle, des méta-analyses, des études transversales ou de
72
suivi bien construites. On parle d’« Evidence-Based Medicine » ou de médecine basée sur les faits.
L’information transmise aux médecins est donc basée sur des résultats. Cette communication est
assurée par différents types d’activités : pour les médecins prescripteurs, une force de vente
effectue des visites médicales pour présenter les produits de la compagnie. Actuellement, cette
force de vente intervient principalement en zone urbaine et dans les hôpitaux les plus importants.
C’est dans ces lieux que la majorité des médecins susceptibles de prescrire les produits de la
compagnie se trouvent. Des outils de formation sont également délivrés aux médecins afin de leur
permettre d’acquérir les connaissances nécessaires concernant à la fois la pathologie et le
traitement. Pour approfondir certains apprentissages, des conférences portant sur un thème précis
sont régulièrement organisées. Ceci a pour objectif de les familiariser avec les produits et les
conscientiser quant aux avantages de chacun d’eux. Les médecins perçoivent la compagnie comme
un moyen d’accéder à une formation de pointe dans un domaine précis et d’en devenir ainsi
spécialiste. Pour les médecins KOLs, la compagnie organise des événements à échelles nationale
et provinciale sous forme de tables rondes et les implique au maximum dans la réalisation des
essais cliniques. La compagnie possède ainsi des panels de leaders d’opinions intervenant dans
différents axes thérapeutiques.
À titre d’illustration, pour un des produits phares de la compagnie, un antidiabétique de type 2, il
existe trois séries de promotion annuelles se concentrant sur les villes de rang 1. Cette année, le
marketing central a mis en place six séries de conférences de niveau supérieur basées davantage
sur l’échange d’expérience entre les médecins. Il existe également des événements ponctuels et de
plus grande ampleur. Le marketing local quant à lui, organise des meetings qui se déroulent sous
forme de tables de discussion avec cinq ou six médecins échangeant leurs expériences. Il est à
noter que la promotion de ce médicament est uniquement réalisée dans les hôpitaux.
La compagnie faisant l’objet de notre étude n’a que peu de relations avec les pharmaciens. Les
seules interventions qu’elle réalise consistent en la promotion des médicaments OTC. Considérant
que les ventes de médicaments prescrits proviennent en grande majorité de l’hôpital, les actions
dirigées vers les pharmacies sont donc mineures. Ces activités proviennent du département de
marketing et ventes.
73
4. Actions dédiées à la population
La population chinoise est encore peu sensibilisée à l’existence de certaines maladies et aux
traitements disponibles. Les produits thérapeutiques occidentaux font face à la concurrence sévère
de la médecine traditionnelle et des génériques locaux. À titre d’exemple, vingt pourcents des
diabétiques sont traités par médecine traditionnelle chinoise (TCM). La compagnie doit à la fois
conscientiser le patient à l’égard des maladies mais également le convaincre que le produit qu’elle
vend est le traitement de choix. Tout comme dans les pays développés, la promotion des
médicaments auprès du public fait l’objet de nombreuses réglementations. La promotion passe
alors principalement par les agences d’éducation de la santé contractées par la compagnie pour
créer des programmes d’intervention. En vue d’optimiser la prise en charge de la population, la
compagnie développe ou participe au développement de ces programmes d’intervention en lien
avec les produits qu’elle vend sur le marché chinois. Par l’intermédiaire de sa Fondation, elle se
concentre sur plusieurs domaines d’intervention. Ses programmes phares sont « Delivering hope »
et « Together on Diabetes ». Le premier vise à conscientiser les patients autour des maladies du
foie. Grâce à ceci, près de 90% des parents sont désormais documentés sur l’hépatite B. Pour
cela, la compagnie a travaillé en collaboration avec la fondation chinoise pour la prévention et le
contrôle de l’hépatite B.
Parmi les professionnels de santé, le taux de conscientisation de l‘hépatite B est presque de 100%.
"The XXX Foundation's mission is to create meaningful and sustainable improvements for patients
living with chronic diseases such as hepatitis B, and as far as possible help prevent further
infection"
Fin 2011, la compagnie annonçait une collaboration avec la fondation chinoise pour la prévention
et le contrôle de l’hépatite dans le but de lutter contre l’expansion de ce fléau. Le projet « China
Rural Area Hepatitis B » a ainsi vu le jour et a permis l’éducation de 2,37 millions de personnes au
sujet de l’hépatite B. Depuis la naissance du programme en 2002, 4351 professionnels de santé ont
été formés à la vaccination de l’hépatite B et ainsi 23 000 nouveaux nés ont été vaccinés.
74
La Fondation a récemment annoncé l’expansion de son initiative “Together on Diabetes initiative
to China and India” en investissant $US15 millions sur cinq ans pour aider ces pays à faire face à
la croissance du nombre de personnes touchées par cette maladie. En effet, près de 10% de la
population chinoise était touchée par le diabète de type 2 en 2011 et il est attendu que ce chiffre
atteigne les 12,1% d’ici 2030. Dans le cadre de son programme, la Fondation a adressé $US522
797 à la Fondation de charité de Shanghai pour mettre en place une approche pour la gestion du
diabète de type 2 dans une ville de 23 millions d’habitants.
Par l’intermédiaire de sa Fondation, la compagnie a supporté le ministère de la santé avec un
financement de $US1 million en 1997 pour trois projets orientés sur la nutrition, la formation en
gestion de la santé et l’éducation concernant les maladies cardiovasculaires. En 2002, $US510 000
ont été donné à la fondation chinoise pour la prévention et le contrôle de l’hépatite B.
Afin d’aider les populations les plus en difficultés, la compagnie réalise un ensemble de dons de
médicaments ou d’argent. Elle contribue par ailleurs à la réalisation de divers projets ayant une
importance majeure à l’égard de la population. Dans ce registre, la compagnie a fait une donation
pour l’adoption d’un tigre, une des espèces les plus en danger du pays.
L’ensemble de ces actions contribue à l’image positive de la compagnie qui a ainsi reçu à plusieurs
reprises les honneurs du gouvernement :
• High Technology Enterprise • Model Enterprise • Best Image Enterprises in Shanghai • Top 10 Pharmaceutical Joint-Ventures in China
III. Bilan des données issues de l’étude de cas
Les entrevues semi-dirigées nous ont permis de déterminer les actions mises en place par la
compagnie étudiée à l’égard des payeurs, des distributeurs, du corps médical et de la population.
La compagnie présente aux autorités gouvernementales les études de ses produits ainsi que celles
susceptibles de les aider dans l’élaboration de leurs directives et leurs prises de décisions. La
compagnie possède des activités de recherche en Chine et a pour objectif de délivrer des produits
de qualité et innovants. Elle emploie une main d’œuvre locale et procède à la création de
partenariats ou d’acquisitions de joueurs locaux. Elle contribue au développement des capacités de
75
ses distributeurs. À l’égard des médecins susceptibles les médicaments qu’elle vend, elle assure un
système de formation continue par l’intermédiaire d’une force de vente et l’organisation
d’événements divers. Elle en intègre par ailleurs certains dans ces activités de recherche. Par
l’intermédiaire de programmes à visée diagnostique, curative ou préventive, la compagnie cherche
atteindre sa population cible. La compagnie réalise un ensemble d’investissements divers
contribuant à son image à travers le pays.
76
Chapitre 5 -‐ Analyse des résultats
La finalité de l’analyse des résultats est de définir le type de relation établi entre une compagnie
pharmaceutique occidentale multinationale et chacun des quatre groupes de PP étudié. Pour faire
cette étude, nous procédons au bilan des actions mises en place et à leurs objectifs escomptés. Au
préalable, nous rappelons les motivations guidant ces actions constituant le but ultime de la
relation entre les deux parties.
I. Motivations de la relation entre les deux parties
Les relations d’une compagnie avec chacun des groupes de PP sont motivées par des raisons
précises. Les actions mises en place par les compagnies et leurs finalités sont donc guidées par ces
motivations.
La motivation de la relation entre la compagnie et les payeurs est l’obtention de conditions
optimales d’accès au marché. La relation avec les distributeurs est motivée par l’obtention d’un
accès privilégié aux preneurs de décision. La relation avec le corps médical est quant à elle
motivée par le pouvoir de prescription et d’influence de ces individus. Enfin, la relation avec les
patients est motivée par l’accroissement de la demande de la population cible
II. Bilan des actions mises en place à l’égard des PP et de leurs finalités
La collecte de données primaires effectuée par l’entremise d’entrevues semi-dirigées a permis de
déterminer un ensemble d’actions que les compagnies pharmaceutiques occidentales
multinationales mettent en place à l’égard des quatre groupes de PP. La finalité de ces actions est
aussi décrite dans cette section.
1. Payeurs
Les compagnies partagent des informations claires, précises et de qualité avec le gouvernement.
Ces données peuvent concerner leurs produits, leurs activités ou des études utiles à la prise de
décision et l’élaboration de directives par le gouvernement. Par l’intermédiaire de leaders
77
d’opinion et d’un ensemble d’événements, les compagnies favorisent la transmission de leurs
messages. Ces actions vont permettre de promouvoir les produits et faciliter la prise de décision
des autorités gouvernementales.
Certaines actions de la compagnie ne sont pas directement dirigées vers le groupe de payeurs mais
ont toutefois des répercussions sur leur attitude. Dans ce registre, on pense à la contribution à
l’économie locale, par la création de nombreux emplois ou par la collaboration avec des acteurs
locaux. Il s’agit également de l’appui des initiatives gouvernementales traduit par les vastes
investissements favorisant la recherche et l’innovation. Le soutien apporté par les compagnies au
secteur de l’assureur privé va également dans ce sens. Ces actions témoignent l’engagement des
compagnies à l’égard de la Chine.
2. Distributeurs
Les besoins des compagnies pharmaceutiques en terme de distribution sont de plus en plus élevés.
Elles veulent notamment transporter des produits de façon sécuritaire dans des zones plus reculées
et ceci dans des délais les plus courts possibles. C’est dans ce contexte que certaines compagnies
prennent l’initiative de participer à l’optimisation des capacités de leurs distributeurs par la
réalisation de partenariats ou d’acquisitions afin de créer un effet levier sur les ressources dont ils
bénéficient.
3. Corps médical
Les compagnies ont recours à différents types d’outils pour atteindre le corps médical. Une force
de ventes, constituée par un ensemble de visiteurs médicaux cible essentiellement les médecins,
d’autant plus quand le produit concerné est un produit sous prescription. Certains médecins sont
sollicités pour participer aux activités de recherche des compagnies et sont ainsi impliqués dans les
études cliniques de la compagnie. Par l’entremise de ces actions, les compagnies souhaitent
favoriser l’échange d’informations et développer la maîtrise du produit et de la pathologie
concernée par les médecins.
78
4. Population
Comme partout, des publicités ciblant la population sont mises en place par les compagnies qui
créent par ailleurs des programmes d’intervention généralement spécifiques à une pathologie dont
elles possèdent le traitement. Ces deux actions ont pour vocation de faire connaître les pathologies
et les traitements disponibles à la population. Par ailleurs, en réalisant des actes de charité, les
compagnies apportent leur soutien aux populations en besoin favorisant ainsi leur image de
marque.
III. Détermination du type de relation
À partir des actions mises en place par les compagnies à l’égard de leurs PP combinée à leurs
retombées souhaitées et aux motivations guidant leur élaboration, nous allons définir le type de
relation qu’une compagnie cherche à établir avec les payeurs, les distributeurs, le corps médical et
la population.
1. Relations avec les payeurs
Les attentes des compagnies pharmaceutiques à l’égard des payeurs sont cruciales pour leurs
activités. Elles sont tributaires de ces individus pour accéder au marché et bénéficier des
meilleures conditions. Plus concrètement, ce groupe de PP représenté par les autorités
gouvernementales et les assureurs privés est responsable de l’enregistrement des médicaments
ainsi que de la détermination des leurs prix et taux de remboursement. Les compagnies cherchent
donc à avoir une relation privilégiée avec ces PP afin d’accroitre leurs chances de bénéficier des
meilleurs conditions d’accès au marché pour leurs produits.
Les actions des compagnies visent d’une part à promouvoir ses activités et produits et faciliter la
prise de décision par la mise à disposition d’informations claires, précises et de qualité aux
autorités gouvernementales. D’autres part, par l’entremise d’une contribution à l’économie locale
et d’appui aux initiatives gouvernementales, les compagnies témoignent leur engagement à l’égard
de la Chine.
79
Nous constatons que les compagnies cherchent par un ensemble d’actions à soutenir ce groupe de
PP.
À l’égard des assureurs privés, en collaboration avec le gouvernement, les compagnies appuient
l’essor de ce secteur qui en est encore à ses balbutiements.
ð Relation visant à soutenir
2. Relations avec les distributeurs
Les compagnies perçoivent les distributeurs comme étant une porte d’entrée dans les hôpitaux et
donc auprès des preneurs de décision. Pour vendre un médicament à l’hôpital, ce dernier doit faire
parti de formulaires de directives élaborés par les dirigeants de l’établissement suite à la réalisation
d’appels d’offres. Les distributeurs et plus particulièrement les derniers acteurs de la chaîne de
distribution sont des compagnies locales généralement de petite taille ayant des relations
privilégiées avec les personnes influentes. Les compagnies cherchent donc à optimiser le potentiel
de ces ressources en collaborant avec eux par l’intermédiaire de partenariats ou d’acquisitions.
Nous constatons dans ce contexte que les compagnies établissent donc une relation visant à
collaborer avec ce groupe de PP.
ð Relation visant à collaborer
3. Relations avec le corps médical
Les compagnies ont besoin des médecins à la fois pour bénéficier de leurs rôles de leaders
d’opinion auprès des autorités gouvernementales provinciales et centrales ainsi que pour bénéficier
de leur pouvoir de prescription. Qu’ils soient leaders d’opinions ou prescripteurs, un ensemble
d’outils de formation est mis à la disposition des médecins, sous différentes formes. Ceci à pour
objectif de développer une maîtrise des produits et pathologies concernés mais également de
favoriser la circulation des informations. Certains d’entre eux sont par ailleurs engagés dans les
activités de recherche des compagnies. Les compagnies cherchent donc à impliquer les médecins
dans leurs activités.
ð Relation visant à impliquer
80
4. Relations avec les patients
La prévalence de certaines maladies et par conséquent les besoins en médicaments, sont
malheureusement considérablement croissants en Chine. Connaissant mal les pathologies et peu
consciente des traitements existants, la population chinoise n’accède pas toujours aux thérapies
dont elle a besoin. Les compagnies mettent donc en place des actions à visée éducative et
promotionnelle. Par ailleurs, la participation des compagnies à des actes de charité favorise son
image auprès du public. Les compagnies cherchent donc à sensibiliser la population.
ð Relation visant à sensibiliser
81
Chapitre 6 – Vérification des résultats du cas
Pour assurer la robustesse des informations issues de l’étude de cas, nous avons procédé à une
entrevue semi-dirigée avec un informateur clé. Ce dernier étant consultant pour l’industrie
pharmaceutique en Chine, a pu illustrer ses propos avec plusieurs cas réels comparables à la
compagnie ayant fait l’objet de notre étude.
I. Données primaires issues de l’entrevue avec l’informateur clé
Les données récoltées lors de l’entrevue semi-dirigée avec l’informateur clé sont présentées ci-
dessous. Afin d’éviter les redits, les données convergentes sont succinctement mentionnées tandis
que les éléments nouveaux, apportant des détails ou illustrant les données précédemment obtenues
sont davantage développés.
Dans le cadre de sa réforme de santé de 2009, un des objectifs du gouvernement chinois est
d’encourager les activités de R-D et l’innovation de son industrie pharmaceutique. Soutenant cette
initiative, les compagnies investissent massivement et développent leurs activités de R-D en
collaborant avec des universités locales, en acquérant des joueurs ou en créant des infrastructures à
la pointe de la technologie. À titre d’exemple, Johnson&Johnson a collaboré avec Tsinghua
University pour le développement de nouvelles thérapies destinées au traitement de l’hépatite B et
de la tuberculose. Pfizer a mis sur pied une plateforme contribuant aux collaborations de recherche
pour la Chine et l’ensemble de l’Asie : le China Research and Development Center. Coopérant
avec les chercheurs chinois les plus renommés ainsi que les meilleures universités et instituts de
recherche, ce centre fait l’objet de beaucoup d’admiration et contribue ainsi à l’image de marque
positive de Pfizer. Eli Lilly a quant à elle était une compagnie pionnière dans la création d’un fond
d’investissements consacré à l’industrie pharmaceutique en Chine : Lilly Asian Ventures.
Conscientes des avantages d’investir en recherche en Chine, l’ensemble des compagnies
occidentales multinationales construisent ou louent des infrastructures destinées à ces activités.
Depuis 2009, ces compagnies ont investi des milliards de dollars pour réussir à combler les
besoins de la demande locale.
82
Par l’intermédiaire de son unité d’affaires de produits biopharmaceutiques, Pfizer a mis sur le
marché de nombreux produits innovants. Intervenant dans différentes classes thérapeutiques, les
compagnies occidentales se positionnent principalement en cardiovasculaire, respiratoire,
oncologie, diabète et système nerveux. De plus, les compagnies développent leurs activités de
recherche en Chine en se focalisant sur les besoins de la population locale. GlaxoSmithKline
possède de nombreux projets de recherche à son actif dont beaucoup se concentrent sur le
développement de médicaments pour les maladies du foie, les troubles respiratoires ou de la
glycémie, dont la prévalence est très élevée en Chine.
Alors que les activités des compagnies occidentales ralentissent dans les pays développés, leurs
investissements se multiplient en Chine. Sanofi réduit son nombre d’employés en Amérique du
Nord et en Europe mais étend sa force de vente en Chine et planifie de recruter plusieurs milliers
de visiteurs médicaux pour couvrir l’ensemble du pays. Pfizer a mis à pied plus de 1000 de ses
employés en R-D aux États-Unis et planifie de fermer des centres de recherche en Europe. La
compagnie envisage cependant d’augmenter son effectif de force de vente de 40%. Aucune des
compagnies multinationales occidentales n’échappe à cette tendance. Leur arrivée massive en
Chine ne se réduit pas au déploiement de leur force de vente. Elle se traduit aussi par des
investissements massifs et par conséquent la création d’un nombre d’emplois aussi bien en R-D
qu’en production ou marketing et la mise en place d’importantes infrastructures. Pfizer,
GlaxoSmithKline et Sanofi comptent entre 5000 et 10000 employés et possèdent plusieurs usines
de fabrication dans le pays. GlaxoSmithKline envisage de recruter davantage de chercheurs locaux
pour bénéficier d’ici 2017, du savoir faire d’un millier de personnes dans son nouveau centre de
recherche de Shanghai.
À l’égard des distributeurs, les compagnies pharmaceutiques opèrent avec des approches
différentes. Le réseau de distribution en Chine, encore très complexe, est composé de joueurs
intervenant à l’échelle nationale et d’autres au niveau provincial puis local. Certaines choisissent
de passer par l’ensemble des intermédiaires en confiant la distribution de leurs produits au joueur
national qui se charge de la répartition à plus petite échelle. Les compagnies reprochent souvent le
manque de visibilité et de transparence à cette longue chaîne de distribution. De plus, chacun des
intermédiaires réalisant une marge sur le produit vendu, son prix en est forcément augmenté. Dans
83
ce contexte, de nouveaux modèles de distribution se sont développés. Certaines compagnies,
comme GlaxoSmithKline, obtiennent des licences de distribution (GSP licences) pour éviter les
agences d’importation. D’autres comme Sanofi choisissent d’intervenir directement avec les
distributeurs provinciaux en contournant ceux à l’échelle nationale. Enfin, certaines compagnies
décident de créer des partenariats avec les distributeurs, comme Pfizer avec Shanghai
Pharmaceutical, ou de procéder à leur acquisition, comme Novartis avec Zheijiang Tianyuan Bio-
Pharmaceutical.
Pour la plupart implantées en Chine depuis une vingtaine d’années, les compagnies choisissent
désormais d’étendre leurs activités à l’ensemble du territoire y compris les zones les plus reculées.
Les compagnies interviennent auprès des médecins par l’intermédiaire de visiteurs médicaux se
concentrant essentiellement sur les zones urbaines et les hôpitaux les plus importants. Les
pharmaciens ne sont que peu ciblés et ce d’autant plus lorsqu’il s’agit de produits sous
prescription.
À l’égard de la population, les compagnies mettent en place un ensemble de programmes. Certains
d’entre eux font intervenir un différents groupes d’acteurs du réseau de la santé. Novo Nordisk,
leader du marché de l’insuline en Chine a conduit un programme incluant la formation des
médecins, la sensibilisation des patients et de l’ensemble de la population. En collaborant avec le
Ministère de la santé, la compagnie danoise assure la gestion de l’ensemble de la gestion du cycle
de vie du produit (l’insuline). Il existe également du matériel promotionnel comme il en existe
dans tous les pays et qui est soumis à de strictes réglementations.
II. Ajustement des résultats
Les données issues de la rencontre avec l’informateur clé, viennent d’une part appuyer les résultats
issus du cas et d’autre part apportent une nouvelle dimension concernant les distributeurs.
Auprès des distributeurs, plusieurs modes d’actions sont observables. Les compagnies peuvent
intervenir à l’échelle nationale et dans ce cas leurs produits suivront la totalité de la chaîne de
distribution. Elles peuvent aussi contourner certains acteurs de la chaîne en intervenant
directement à échelle provinciale ou acquérant des licences de distribution. Ceci va permettre de
raccourcir la chaîne de distribution et ainsi en assurer la transparence et limiter les coûts
excédentaires. Avant d’être distribués dans les différents établissements de santé, les médicaments
84
passent par de nombreux intermédiaires engendrant une chaîne de distribution complexe avec un
manque de transparence et une augmentation du prix du produit final. Par conséquent, les
compagnies cherchent à raccourcir cette chaîne de distribution en évitant certains acteurs et en
agissant par elles mêmes. Par conséquent, nous constatons que cette relation vise à s’autonomiser.
ð Relation visant à s’autonomiser
Pour ce groupe de PP, deux types de relation sont observables dépendamment du distributeur. En
effet, pour les distributeurs en bout de ligne proches des preneurs de décision, les compagnies vont
chercher à collaborer. Pour les distributeurs intervenant à grande échelle, les compagnies vont
chercher à s’en détacher et donc à s’autonomiser.
85
La figure ci dessous (Figure 4) dresse le bilan des actions mises en place par les compagnies à
l’égard de leurs PP, leurs finalités ainsi que les motivations guidant l’élaboration de différents
types de relations
Figure 4 : Bilan des actions mises en place par les compagnies à l’égard de leurs PP, leurs
finalités ainsi que les motivations qui guidant l’élaboration d’un type de relation
86
Chapitre 7 – Discussion et limites de la recherche
I. Discussion : Principaux constats – Convergences et divergences avec la
littérature
L’analyse des actions mises en place par les compagnies nous a permis de définir le type de
relation qu’elles développent avec les quatre groupes de PP étudiés. Nous pouvons alors constater
les divergences et convergences avec la matrice de Freeman.
Notre revue de littérature nous a permis de déterminer le profil d’influence des quatre groupes de
PP étudiés et ainsi de les positionner dans la matrice de Freeman. Nous avons alors émis les
hypothèses suivantes :
Proposition 1 : Les compagnies pharmaceutiques développent des relations avec les payeurs
visant à se défendre de ces PP.
Proposition 2 : Les compagnies pharmaceutiques développent des relations avec les distributeurs
visant à les impliquer.
Proposition 3 : Les compagnies pharmaceutiques développent des relations avec le corps médical
visant à collaborer avec ces PP.
Proposition 4 : Les compagnies pharmaceutiques développent des relations avec les patients
visant à les surveiller.
Afin de tester la validité de la matrice de Freeman dans le contexte de notre étude, cette partie se
penche sur les convergences et divergences des résultats obtenus avec les propositions formulées.
1. Étude de la proposition 1
Nous constatons que l’ensemble des actions de la compagnie envers les payeurs consiste à
apporter de l’information à ces individus et à montrer l’engagement de la compagnie à l’égard de
la Chine. Ceci se fait dans l’objectif de faciliter et optimiser l’accès au marché de ses produits. La
87
compagnie développe une relation qui vise à soutenir les payeurs, dont le potentiel coopératif est
faible et le potentiel menaçant est élevé. Ceci est donc en opposition avec les propos de la
littérature puisque Freeman et Savage s’entendaient pour dire que les relations avec les PP ayant
ce profil d’influence visent à se défendre et s’isoler de ces individus (M. J. Polonsky & Scott,
2005). Une attitude défensive, telle que proposée par Freeman (Freeman, 1984) et Savage (Savage
et al., 1991) apparaît inappropriée dans ce contexte et non constructive, ne permettant pas à la
compagnie d’obtenir ce qu’elle veut ni de répondre aux attentes de ce groupe d’individus. Les
payeurs étant de mieux en mieux équipés pour savoir qu’elles sont les retombées de leurs
investissements, le développement de produits à forte valeur ajoutée est aujourd’hui un impératif.
Ils exercent un contrôle sur les compagnies de plus en plus strict qui doivent alors bâtir des
relations solides avec eux (PwC, 2009b). Faire preuve d’un maximum de transparence à l’égard
des payeurs, en leur apportant une information solide concernant les activités de la compagnie,
contribue à établir une relation de confiance avec ce groupe de PP (Kirby, 2012). Les relations
entre les compagnies et les payeurs étant traditionnellement méfiantes (PwC, 2009a), la mise en
place d’actions témoignant un engagement à l’égard de la Chine, favorise le rapport entre les deux
parties. En montrant leur soutien aux payeurs, les compagnies ne peuvent qu’améliorer leur image
auprès d’eux. Dans le contexte de l’implantation des réformes de santé, le gouvernement a
d’autant plus besoin de bénéficier de l’expertise des compagnies (Raymond Hill, 2006). La santé
devient une priorité politique et impose aux compagnies de participer au débat concernant le
financement de la santé et leur apport social et économique (PwC, 2009a). La tenue d’actions au
niveau central comme provincial, démarche fortement recommandée pour favoriser ses conditions
d’accès au marché (IMSHealth, 2009). Ce soutien implique une collaboration étroite de la
compagnie avec un large éventail de joueurs, du monde académique aux fournisseurs de matières
premières locaux, situation indispensable pour les compagnies pharmaceutiques qui ne peuvent
désormais plus agir seules (PwC, 2009b). Travailler en collaboration avec des partenaires locaux
apporte à la compagnie une aide considérable puisqu’elle bénéficie ainsi de leur expérience et de
leur connaissance du marché local. L’acquisition d’un joueur local dont les activités sont
complémentaires constitue souvent un investissement très intéressant pour une multinationale
(Deu, 2008) qui pourra ainsi faire face à un système réglementaire complexe mais connu et
maitrisé par les investigateurs (DiCarlo & Zhang, 2009). Les compagnies chinoises, qui possèdent
bien souvent de minimes ressources perçoivent cette coopération comme une opportunité pour le
88
développement de leurs activités (Yang, 2012). En développant des médicaments de qualité et
innovants, les compagnies font d’une part face à la concurrence locale en intervenant dans des
domaines thérapeutiques où la demande est en augmentation. D’autre part, elles s’alignent avec les
initiatives gouvernementales visant à développer ce créneau. Bien que la tendance soit à la baisse
du prix des médicaments, il existe une réelle volonté de la part de la population et des autorités de
favoriser une industrie innovante concentrée sur le développement de nouveaux produits adaptés
aux besoins actuels (Raymond Hill, 2006).
ð La proposition 1 n’est pas vérifiée car nos résultats montrent que la relation
développée par la compagnie avec les payeurs vise à soutenir ce groupe plutôt que
de s’en défendre.
2. Étude de la proposition 2
Nous avons observé deux types de relation établis entre les compagnies et leurs distributeurs dont
le potentiel coopératif est élevé et le potentiel menaçant est faible. Les compagnies visent à
collaborer avec les distributeurs en fin de chaîne de distribution en contact avec les preneurs de
décision. Par contre, elles visent à s’autonomiser des distributeurs opérant à grande échelle. Ceci
est en désaccord avec les thèses de Freeman et Savage qui suggèrent respectivement d’établir une
stratégie offensive afin d’exploiter au maximum leur potentiel coopératif (Freeman, 1984) et une
stratégie visant à les impliquer afin de développer leur capacité à coopérer (Savage et al., 1991).
Les distributeurs devant répondre à des exigences logistiques de plus en plus strictes et mettre en
place des services adaptés aux contraintes des nouveaux types de médicaments (PwC, 2011), il est
nécessaire que les compagnies les aident à se développer pour qu’ils soient en mesure de répondre
à leurs attentes. De plus, cette collaboration va pouvoir les aider à étendre leurs activités
géographiquement par l’intermédiaire d’acquisitions, ce qui peut s’avérer très intéressant pour les
compagnies visant à vendre leurs produits également en zone rurale, marché non négligeable (Tse,
2012). Afin de servir la Chine efficacement, les compagnies pharmaceutiques doivent élargir leur
vision et mettre davantage de ressources pour développer la distribution de leurs médicaments au
delà des zones urbaines (Deu, 2008). Plus un distributeur est en mesure de développer ses
stratégies logistiques, d’étendre ses services dans le pays et ce dans le respect des standards
89
internationaux, plus il sera compétitif (Zhou, 2007). La complexité de la chaîne de distribution liée
à sa fragmentation et à son nombre élevé d’intermédiaires conduit à son manque de transparence et
à de coûts excédentaires. En évitant les premiers distributeurs de la chaîne, les compagnies
cherchent à s’autonomiser pour bénéficier d’un meilleur contrôle sur la livraison et le prix de leurs
produits (Gan, 2012).
ð La proposition 2 n’est pas vérifiée car nos résultats montrent que la relation
développée par la compagnie vise à collaborer avec certains distributeurs ou à
s’autonomiser plutôt que de les impliquer.
3. Étude de la proposition 3
Concernant le corps médical, dont les potentiels coopératif et menaçant sont tous les deux élevés,
la compagnie développe des relations visant à les impliquer. Elle a en effet recours aux médecins
comme leaders d’opinions et les intègre dans la réalisation des essais cliniques. De plus, ils
reçoivent une formation et de l’information de qualité leur permettant de développer leurs
connaissances. Ce type de relation apparaît nécessaire pour convaincre les médecins de remplir
leurs rôles d’influenceurs et de prescripteurs ainsi que pour favoriser leur loyauté. Ceci ne diverge
pas totalement de l’idée de Savage (1991) pour qui il faut coopérer avec ce type de PP afin de
maximiser leur capacité à coopérer et réduire leur potentiel menaçant (Savage et al., 1991).
Freeman quant à lui suggérait d’élaborer des stratégies visant à changer ou influencer les règles
guidant les interactions avec ce groupe d’individus (Freeman, 1984). Une relation impliquant le
corps médical tend à changer le rôle d’unique vendeur des visiteurs médicaux. Ce type de relation
génère une situation d’échange entre le corps médical et la compagnie or nous savons que cette
situation est indispensable pour que la relation soit fructueuse (PwC, 2009a). Par l’intermédiaire
de ce type de relation, les médecins perçoivent un moyen de développer leur expertise et de
bénéficier du respect de leur communauté. Ceci est d’autant plus primordial pour le corps médical
chinois que la formation qu’il reçoit est dans la majorité des cas peu élaborée et mérite d’être
complétée. Il a été montré que les médecins chinois sont plus à même de prescrire les nouveaux
produits d’une compagnie si cette dernière a su fournir une information riche et développer une
relation (Deu, 2008). Par ailleurs, les rôles des KOLs évoluant au cours du cycle de vie d’un
90
médicament, cette relation est le moyen de mettre en place un ensemble d’actions adapté aux
différentes étapes (Mack, 2003). En effet, au cours du développement clinique, ils participent au
déroulement des essais cliniques, à la communication des résultats et à l’identification des données
éventuelles. Il est à noter, que faire intervenir les médecins dans la réalisation des essais cliniques
donne l’opportunité à la compagnie de former ses investigateurs et leur fournir le matériel optimal
(DiCarlo & Zhang, 2009). Au moment de la commercialisation, ils délivrent les messages clés à
leurs pairs. Contrairement à la tendance générale dans les pays occidentaux, les compagnies ne
diminuent pas leur force de ventes et ce mode de communication reste encore très ancrée (PwC,
2009a). Ceci apparaît normal dans un pays comme la Chine où la gestion de la santé est en plein
essor et où l’expertise des compagnies occidentales est souvent mise à contribution par
l’intermédiaire de ses représentants (Raymond Hill, 2006).
ð La proposition 3 n’est pas vérifiée car nos résultats montrent que la relation
développée par la compagnie avec le corps médical vise à les impliquer plutôt que
de collaborer avec ce groupe.
4. Étude de la proposition 4
Conscientes du développement de l’accessibilité aux soins, de l’urbanisation, du vieillissement et
de l’enrichissement de la population ainsi que l’augmentation de la prévalence de certaines
maladies, les compagnies perçoivent la potentialité du marché chinois. L’augmentation de la
demande, ne peut toutefois se faire que si la population a connaissance des maladies et des
traitements existants. Les compagnies mettent en place des actions à visée éducative et participent
à des actes de charité, afin de faire connaître leurs produits et les pathologies ainsi que pour se
bâtir une image de marque. Il s’agit donc d’une relation dynamique visant à créer un besoin chez
l’individu et ainsi acquérir de nouveaux clients. À l’égard de la population, dont les potentiels
coopératif et menaçant sont élevés, la compagnie développe donc une relation visant à sensibiliser
ces PP. En opposition à ceci, Freeman et Savage suggéraient : le maintien de la position actuelle
ou la surveillance de ce groupe de PP (M. J. Polonsky & Scott, 2005). Dans notre contexte, ce type
de relation passive ne permettrait pas d’atteindre les patients potentiels. De plus, une telle relation
permet de valoriser le produit de la compagnie en offrant non pas un simple produit mais un
91
produit associé à un service (Bhalla et al., 2004; PwC, 2009a). La gestion de la santé encadrée par
l’industrie pharmaceutique permet d’assurer un meilleur suivi du patient et d’augmenter
l’observance de son traitement (PwC, 2009a). Ceci est d’autant plus nécessaire dans le contexte
chinois où la population n’a souvent pas la connaissance ni des pathologies ni des traitements
existants et mérite d’y être sensibilisée.
ð La proposition 4 n’est pas vérifiée car nos résultats montrent que la relation
développée par la compagnie avec la population vise à sensibiliser ce groupe
plutôt que de les surveiller.
Notre étude révèle de nombreuses divergences (figure 5) avec la matrice de Freeman et reprise par
Savage. En effet, lorsqu’ils proposent respectivement de changer les règles du jeu et collaborer
avec les PP dont les potentiels coopératif et menaçant sont élevés, notre étude révèle l’élaboration
d’une relation visant à impliquer ces individus qui sont dans notre cas représentés par le corps
médical. Lorsque Freeman et Savage s’entendent pour dire que les compagnies doivent développer
une relation visant à se défendre des PP dont le potentiel coopératif est faible et menaçant élevé,
notre étude révèle l’élaboration d’une relation visant à soutenir ces individus qui sont dans notre
cas les payeurs. Lorsque Freeman et Savage suggèrent respectivement d’exploiter et d’impliquer
les PP dont le potentiel coopératif est élevé et menaçant faible, notre étude révèle l’élaboration
d’une relation visant à collaborer avec ces individus ou visant à s’autonomiser de ces individus qui
sont dans notre cas les distributeurs. Enfin, lorsque Freeman et Savage suggèrent respectivement
de maintenir la position actuelle et de surveiller les PP dont les potentiels coopératif et menaçants
sont faibles, notre étude révèle l’élaboration d’une relation visant à sensibiliser ces individus qui
dans notre cas sont la population.
92
Figure 5 : Matrice comparative de la littérature et des résultats de notre étude concernant les types
de relations développés entre une compagnie et ses PP
Élevé Potentiel menaçant Faible
Potentiel
coopératif
Faible
Littérature : Changer les règles du jeu/
collaborer
Cas : Impliquer
Littérature : Exploiter/ Impliquer
Cas : Collaborer ou s’autonomiser
Littérature : Défendre
Cas : Soutenir
Littérature : Maintenir la position actuelle/
surveiller
Cas : Sensibiliser
L’ensemble des actions présentées dans notre étude à l’égard des payeurs, des distributeurs, du
corps médical et de la population montre une réelle volonté de la part des compagnies d’aller au
delà du client principal et d’inclure dans l’élaboration de ses stratégies marketing l’ensemble des
individus de son environnement. Ceci vient confirmer l’importance de ces quatre groupes de PP
dans l’environnement de la santé comme le suggéraient Sobrio et Keller (Sobrio & Keller, 2007).
L’approche de la compagnie ne consiste pas à se focaliser sur le consommateur mais sur
l’ensemble des individus susceptibles d’intervenir d’une manière ou d’une autre dans le réseau de
la santé. Dans l’objectif de bâtir des relations à long terme avec eux, la compagnie cherche à
combler leurs attentes et besoins respectifs en élaborant des actions propres à chacun des
segments. Cette approche va dans le sens du concept de marketing relationnel dont l’objectif n’est
pas de satisfaire une fois un client mais qui tend à considérer l’ensemble des PP de
93
l’environnement de la compagnie (Achrol, 1997). Selon la définition de Bhattachary (2008), il
s’agit donc d’une approche de « stakeholder marketing » puisqu’il y a un élargissement de la
vision à un ensemble de PP.
“Stakeholder marketing represents a firm’s orientation toward its marketing activities that goes
beyond consideration of the interests of immediate targeted consumers to include others that may
be affected by the firm’s activities, including individuals, employees, institutions, groups,
communities, publics, governments, and society at large” (Bhattacharya & Korschun, 2008)
Une telle approche permet aux compagnies de s’adapter aux évolutions de l’environnement et de
répondre adéquatement aux attentes respectives des différents individus (Gundlach & Wilkie,
2010). En Chine, établir un réseau solide de contacts est une étape importante pour l’investisseur
étranger qui lui permettra de faire preuve de crédibilité auprès des acteurs de son secteur (EDC,
2011). Il est important de noter qu’une telle approche est d’autant plus adaptée au contexte d’une
compagnie occidentale s’implantant en Chine où intervenir sans partenaire est voué à l’échec. Que
ce soit pour faire face à la complexité du système réglementaire, de la chaîne d’approvisionnement
ou pour accéder à de nouvelles ressources, se trouver des partenaires solides est indispensable pour
réussir sur le marché chinois (DiCarlo & Zhang, 2009). Que ce soit à l’échelle des payeurs, du
corps médical ou des patients, chacun a sa propre conception de la valeur qu’une compagnie
pharmaceutique est susceptible de délivrer. En intégrant l’ensemble de ces individus dans son
approche, la compagnie se donne les moyens de mieux répondre à leurs besoins respectifs mais
également de bénéficier davantage des ressources qu’elles représentent (IBM, 2006). L’ensemble
des actions des compagnies aboutit à des relations visant à intégrer tous les joueurs au sein d’un
même réseau. Comme le mentionnait Sobrio et Keller, cette intégration est nécessaire pour faire
face aux changements de paradigmes dans ce secteur (Sobrio & Keller, 2007). L’interdépendance
de chacun des joueurs fait que leur intégration au sein d’un même réseau favorise et optimise le
développement de la valeur que la compagnie leur fournit (PwC, 2009b).
Ainsi, en étant alignées avec leurs PP par un ensemble d’actions, les compagnies augmentent leurs
chances de bénéficier de conditions d’accès au marché favorable, d’avoir un accès privilégié
auprès des preneurs de décisions, de profiter du pouvoir d’influence et de prescription des
médecins et de voir la demande pour leurs produits augmenter. Au delà d’accroître la vente de ses
94
produits, les compagnies vont par l’intermédiaire de cette approche accéder à diverses sources
source d’informations contribuant tant à leurs activités de R-D que de commercialisation.
En somme, nos résultats ne supportent pas les propositions dérivées des travaux de Freeman
(Freeman, 1984) et Savage (Savage et al., 1991). Plusieurs raisons peuvent être à l’origine de
l’absence de support empirique. Tout d’abord les limites de l’étude peuvent être mise en cause. En
effet, l’interprétation des données et la définition de certains termes ont pu mener à des erreurs
susceptibles de fausser nos résultats. Par ailleurs, la non validité peut provenir de la spécificité du
contexte étudié. Le cas étant représentatif d’une industrie, il est envisageable que le milieu
pharmaceutique soit un motif de la non validité de nos propositions qui pourraient être validées
dans un autre milieu. En effet, ce secteur possède un cadre particulier avec une importance forte du
réglementaire (Meyer & Ines, 2006). Enfin, le cas étant étudié uniquement sur le marché chinois, il
est également envisageable que les résultats diffèrent dans un autre pays. En effet, les particularités
du cadre institutionnel et sociétal chinois peuvent donner aux relations avec les PP une dimension
caractéristique (Raymond Hill, 2006). La non transparence du fonctionnement de l’ensemble des
acteurs étudiés ou encore certaines spécificités de la culture locale sont possiblement à l’origine du
caractère non applicable de la matrice de Freeman dans notre contexte. Polonsky 2005, montre que
la matrice peut guider les professionnels du marketing à gérer les relations avec leurs parties
prenantes. Toutefois, il constate que les stratégies développées par les compagnies divergent de
celles proposées par Freeman. Il suggère que cette divergence provienne du fait que les
gestionnaires des compagnies n’ont pas une approche orientée sur leurs parties prenantes et
élaborent des stratégies sans tenir compte de leurs profils d’influence respectifs (M. J. Polonsky &
Scott, 2005). Cette justification pourrait également être une explication de nos résultats.
II. Limites de la recherche
Bien que la recherche ait permis d’en apprendre davantage sur les relations établies entre les
compagnies pharmaceutiques et leurs PP sur le marché chinois, il n’en demeure pas moins que
certaines limites peuvent être attribuées à notre étude. Elles concernent d’une part la méthodologie
mais également l’analyse des résultats.
95
1. Aspects méthodologiques
Bien que l’utilisation d’une méthodologie de nature qualitative exploratoire soit parfaitement
adaptée au contexte de la recherche, ce type de méthode n’est pas sans faille. La validité externe
ainsi que le caractère généralisable sont souvent deux aspects critiqués dans ce type de recherche
(Verschuren, 2003). Dans le cadre de notre étude, cela se traduit par le fait que les résultats ne
peuvent pas être appliqués à un autre type d’industrie puisque les groupes de PP seraient
différents.
L’échantillon de notre étude est composé de cinq individus. Bien que ce nombre soit relativement
faible il nous a permis de recueillir le témoignage d’individus à la tête de différents départements
et par conséquent ayant des relations de différents types avec les quatre groupes de PP étudiés.
Nous avons ainsi pu englober les différents aspects des interactions entre la compagnie et les
individus de son environnement. Toutefois, nous convenons qu’il est envisageable que certaines
actions aient été amplifiées ou omises dans l’entrevue et que si le nombre de personnes interrogées
avait été supérieur, ce risque aurait été diminué. L’entrevue avec l’informateur clé avait pour
objectif de limiter ce risque là est de s’assurer du caractère généralisable des informations
obtenues aux compagnies comparables (compagnies pharmaceutiques multinationales
occidentales).
Nous constatons que les quatre groupes de PP étudiés peuvent représenter une certaine
hétérogénéité et par conséquent, qu’un seul type de relation ne peut s’appliquer à l’ensemble des
individus d’un groupe.
Nous constatons par ailleurs que certains groupes de PP ont été omis de notre étude. Il aurait pu
être intéressant d’étudier des groupes de PP représentant la concurrence ou les fournisseurs de
matières première ou services.
2. Aspects analytiques
Notre étude passe par l’interprétation de résultats pouvant être estimée comme subjective. En effet,
nous avons dans un premier temps déterminé le profil d’influence des quatre groupes de PP
étudiés. Suite à la revue de littérature, il nous est apparu logique de placer le corps médical et les
patients comme étant les groupes de PP dont les potentiels coopératif et menaçant sont
96
respectivement élevés et faibles. Les payeurs ont quant à eux été positionnés en tant que PP dont le
potentiel coopératif est faible et menaçant élevé. Enfin, les distributeurs se sont vus attribuer le
profil de PP dont le potentiel coopératif est élevé et menaçant est faible. Il est légitime d’envisager
qu’un autre chercheur aurait pu effectuer sa répartition d’une manière différente.
Les résultats obtenus suite aux entrevues téléphoniques ont mené à l’interprétation de l’ensemble
des actions de la compagnie à l’égard des quatre groupes de PP. Nous avons ainsi pu déterminer le
type de relation qu’elle élabore avec ses PP. Nous envisageons qu’un autre chercheur aurait pu
mettre l’emphase sur certaines actions l’amenant ainsi à une interprétation différente.
97
Chapitre 8 -‐ Conclusion
La réalisation de ce travail nous a permis de mettre en lumière un vide important dans la littérature
portant sur les relations entre une compagnie et ses PP, ce vide étant d’autant plus marqué dans la
littérature marketing et spécifique à l’industrie pharmaceutique. De multiples avenues de recherche
existent et seront proposées dans la partie suivante.
Malgré les limites de notre étude, plusieurs implications managériales ont été relevées et détaillées
ci-après.
I. Avenues de recherche
Avec la tendance du marketing relationnel, les stratégies marketing ne visent plus seulement le
client mais un ensemble d’individus connectés à l’entreprise et ayant des attentes spécifiques
(Gronroos, 1994). Dans ce contexte, les gestionnaires en marketing doivent interagir avec ces
individus et donc élaborer des relations adaptées (M. J. Polonsky, 1996). Alors que cette nécessité
d’interaction est très présente à l’esprit des gestionnaires et dans la littérature académique, peu
d’études se penchent sur le type de relation à développer entre la compagnie et ses PP en fonction
du profil de la PP. En appliquant les notions initialement décrites par Freeman au contexte
marketing, plusieurs auteurs ont commencé à orienter leurs travaux au concept des PP (M. J.
Polonsky & Beldona, 2002). Dans le contexte de notre étude qui se consacre à l’industrie
pharmaceutique, de nombreuses études provenant de firmes privées soulignent la nécessité d’un
changement de modèle d’affaires où le prescripteur n’est plus au centre mais peu d’études
académiques s’intéressent à ce phénomène. Sobrio et Keller soulignent toutefois les rôles majeurs
de quatre groupes de parties prenantes, cruciaux pour les activités marketing d’une compagnie
pharmaceutique (Sobrio & Keller, 2007). Notre étude nous a donc permis de constater un vide
important dans la littérature autour de ces notions et notamment appliquées au secteur de
l’industrie pharmaceutique. Des travaux portant sur le profil d’influence des PP basé sur leurs
rôles et leurs attentes auprès des compagnies pharmaceutiques pourraient certainement fournir un
outil utile pour positionner l’ensemble des individus de l’environnement des compagnies. Des
travaux concernant la détermination du type de relation à développer entre ces joueurs mais à plus
98
grande échelle, autrement dit, intégrer un ensemble de joueurs permettrait de valider ou d’infirmer
nos résultats ainsi que d’ouvrir d’autres pistes de réflexion. Il serait intéressant de tester les
résultats entre deux industries différentes afin de savoir si ils ne sont pas spécifiques au contexte
étudié. Il est envisageable que les profils d’influence des PP soient différents d’un pays à l’autre et
il serait donc intéressant de réaliser des études comparatives entre pays. Enfin, la liste de PP
étudiée est exhaustive et mériterait d’être sujette à réflexion. En effet, il est envisageable d’intégrer
un groupe représentant les compétiteurs ou encore d’intégrer des sous groupes dans les groupes
existants. Les PP internes aux compagnies pourraient également faire l’objet d’une réflexion.
II. Implications managériales
Malgré les limites de notre étude, nous pouvons lui attribuer plusieurs implications managériales.
Les implications décrites ci-après font office de recommandations destinées aux compagnies
pharmaceutiques occidentales implantées en Chine et plus particulièrement à leurs départements
de marketing et départements affiliés.
1. La nécessité d’étendre l’approche marketing
Tout d’abord, l’analyse des données secondaires a permis de dresser un tableau de
l’environnement pharmaceutique chinois et d’en comprendre ses rouages. Ceci nous a permis
d’appuyer la thèse de l’importance des PP gravitant autour d’une compagnie pharmaceutique et de
démontrer le caractère obsolète des modèles d’affaires s’orientant uniquement sur le prescripteur
et la nécessité d’intégrer l’ensemble des acteurs de son environnement dans son approche
marketing. Avec cette vision multidimensionnelle, la compagnie doit aborder chacun des groupes
de PP avec une méthode adaptée.
2. Les moyens pour étendre l’approche marketing
Bien que notre étude montre des divergences importantes avec la matrice proposée dans la
littérature, cet outil peut être perçu comme un cadre posant les bases d’une réflexion pouvant être
modulé à l’échelle d’un secteur ou d’une compagnie. Il devient indispensable pour les compagnies
99
de créer un nouveau modèle de marketing adapté aux changements de paradigme auquel fait face
le secteur de l’industrie pharmaceutique. Pour cela, les compagnies doivent mettre en place un
ensemble d’actions leur permettant de bâtir des relations avec leurs PP et ce dans l’objectif de les
intégrer à une stratégie globale. La mise en place de ces actions passe par la compréhension et la
définition des attentes et besoins respectifs des PP et de la compagnie. Un travail d’analyse
approfondi est donc la clé pour réussir à réaliser cette intégration avec succès. Le recours à un outil
telle que la matrice proposée par Freeman passe forcément par cet exercice d’exploration
puisqu’elle nécessite au préalable l’identification et le positionnement des PP imposant à la
compagnie de s’interroger sur qui sont ses PP, quelles sont leurs attentes et comment elles
influencent les activités de la compagnie.
3. Élaborer des relations adaptées
L’intégration de l’ensemble des joueurs à l’approche marketing globale d’une compagnie nécessite
l’élaboration d’un type de relation spécifique à chacun d’eux. La mise en place d’actions précises
va permettre le développement de cette relation entre les deux parties.
Le soutien des payeurs à l’échelle nationale comme provinciale est nécessaire pour bénéficier des
conditions optimales d’accès au marché. Afin d’aller dans ce sens, les compagnies doivent faire
preuve de transparence en partageant un maximum d’informations et continuer leurs
investissements en Chine appuyant les initiatives gouvernementales.
En fonction de la compagnie, plusieurs approches sont envisageables avec leurs distributeurs. Pour
les compagnies présentes en Chine depuis longtemps et dont la connaissance du marché et de ses
rouages ne fait aucun doute, il est recommandé de raccourcir la chaîne de distribution. Elles
peuvent ainsi limiter les intermédiaires favorisant la transparence du processus et évitant des coûts
excédentaires. Ceci peut se faire en acquérant des licences de distribution ou en intervenant
directement au niveau provincial. Pour les compagnies plus novices, le recours à un distributeur
national semble être une approche moins risquée. Avant de prendre une décision quant à sa
stratégie de distribution, la compagnie doit tout d’abord faire le point sur son niveau de
connaissance du marché. Les distributeurs en fin de chaîne de distribution jouissent d’un accès
privilégié aux preneurs de décision et au corps médical. En collaborant avec eux, les compagnies
100
vont mettre à leur disposition des moyens pour les rendre plus efficients et bénéficier davantage de
leur position privilégiée. Intervenant auprès des autorités gouvernementales, d’autres membres du
corps médical et des patients, les médecins doivent impérativement avoir une connaissance
pointue des produits de la compagnie afin de transmettre les bons messages. La mise à disposition
d’outils de formation, l’organisation d’événements ou leur inclusion dans les activités de recherche
de la compagnie va appuyer cette démarche. La sensibilisation de la population chinoise à l’égard
des pathologies et des traitements existants est nécessaire pour répondre aux besoins existants et
accroitre la demande. De plus, une bonne image de marque assure la visibilité positive de la
compagnie.
4. L’évolution du marché chinois et ses opportunités
Cette étude et plus particulièrement les données secondaires nous ont permis de prendre
conscience des récentes et nombreuses évolutions du marché pharmaceutique chinois. En effet, la
mise en place de réformes de santé depuis 2009, génère de nombreuses opportunités pour le
secteur de l’industrie pharmaceutique local et multinational. De plus, l’explosion de l’incidence
des maladies chroniques, la régulation des prescriptions par les payeurs, la croissance du nombre
d’études pharmaco économiques, l’intérêt grandissant pour les solutions diagnostiques plutôt que
thérapeutiques, la perte des brevets, le ralentissement de l’innovation font partie des éléments
majeurs générant un changement de paradigme important. Avec l’apparition de nouveaux joueurs
dans le paysage, les compagnies doivent envisager une révision de leur stratégie et des relations
qu’elles ont avec certaines PP. En effet, un des objectifs de la réforme de santé est de rendre
accessibles les soins à l’ensemble de la population. Cette tendance devrait amener les compagnies
à repositionner leurs activités. En effet, en réalisant notre étude, nous avons constaté que la
majorité des activités de promotion et de distribution des compagnies se concentrent au niveau des
villes les plus importantes et des hôpitaux majeurs. La formation des médecins, la distribution des
médicaments et la sensibilisation de la population en zones rurales constituent les nouveaux défis
pour les compagnies. Toutefois, il est important que les compagnies aient à l’esprit que cette
expansion de l’accessibilité des soins concerne les médicaments essentiels. Selon leurs
portefeuilles de produits, il leur faudra donc déterminer l’intérêt potentiel d’étendre leurs activités.
101
Par ailleurs, la réforme de santé tend à séparer les activités de prescription et de délivrance afin de
limiter la vente de médicaments dans les hôpitaux. Dans ce contexte, il est attendu que le rôle des
pharmaciens change et devienne plus important. À l’heure actuelle, les compagnies n’adressent
qu’une minorité de leurs activités de promotion et distribution à cette cible, d’autant plus quand il
s’agit de produits sous prescription. Les compagnies doivent avoir conscience de l’évolution
probable du rôle du pharmacien afin de se préparer à une éventuelle adaptation de sa stratégie.
Enfin, le secteur de l’assurance privée qui vit ses premiers balbutiements doit également être
présent à l’esprit des compagnies avec qui elles pourraient envisager d’éventuelles collaborations.
III. Le mot de la fin
Dans les pays développés, principaux contributeurs du marché pharmaceutique, les compagnies
pharmaceutiques font face à un environnement en mouvement où le recours à leurs modèles
d’affaires originels est désormais inadapté à leur réussite. Leurs stratégies initiales les ont mené à
un ralentissement de leur innovation, à la réticence des payeurs à l’égard du financement de leurs
produits mais également à l’essor d’une importante méfiance des patients et du corps médical. Le
déploiement d’une approche permettant à l’industrie de considérer l’ensemble de son
environnement et de faire preuve davantage de transparence (Kirby, 2012) s’avère être une
nécessité absolue d’une part pour leur croissance mais également pour apporter une réelle valeur à
l’ensemble des acteurs du domaine de la santé.
Dans ce contexte et avec la montée en puissance des pays émergents, les compagnies témoignent
un fort intérêt pour les « Pharmemerging markets6 ». À l’image des pays développés il y a
quelques années, ces nouveaux marchés investissent massivement pour le développement de leur
système de santé. Toutefois, les compagnies pharmaceutiques ne peuvent se contenter de
reproduire ce qui marchait autrefois dans les pays développés. En effet, cette vision aujourd’hui
6 Expression inventée par IMSHealth pour définir les pays dont le marché pharmaceutique possède un fort potentiel.
Il s’agit de brésil, de l’Inde, la Turquie, le Mexique, la Russie, la Corée du Sud et de la Chine.
102
désuète ne permet qu’une croissance sur le court terme. Les compagnies doivent désormais
développer une approche considérant l’ensemble des individus de l’environnement.
You may have a destiny, and that final destiny, may be very bright, but the road that leads there is
inevitably windy and full of challenges. Proverbe chinois
103
Annexe
Annexe 1 : Document de sollicitation – Présentation du sujet
Anne-Claire Poinas
PharmD – M.Sc. Marketing student
HEC Montreal
+1 514 250 1526
Thesis: Chinese pharmaceutical market Developing good relationships with the key stakeholders
104
China has become a must destination on all levels for pharmaceuticals companies. Increasingly, global
pharmaceutical companies are either expanding their own operations within China or choosing to partner
with China based companies. This country is expected to become the second largest prescription-drug
market by 2020. During the past few years, numerous growth drivers have been responsible for China’s
emergence as a top pharmaceutical destination including favorable government policies to increase
healthcare spending and reimbursement coverage, as well as accessible healthcare services, increasing
private reimbursement and middle-class affordability. A growing number of stakeholders are gaining
decision-making power in the health-care market. The standard practice in the pharmaceutical industry
today of allocating most resources to one stakeholder group, prescribers, does not accurately reflect the
increasingly networked market reality. In this context, who is the true decision maker in today’s Chinese
health-care environment?
I decided to study the increasing roles of the payers (governmental bodies, health insurers), the health
providers (physicians, pharmacist), the suppliers and the patients in the Chinese pharmaceutical market.
The ultimate goal of my thesis is to define the influence profile of these stakeholders to better understand
which kind of relationship a pharmaceutical company should develop with them.
To do so, I will interview five people working in an occidental pharmaceutical company having operations
in China. In order to considerate every side of my subject, the participants will be having different activities
in the company: two of them from the marketing department, one focusing on market access activities, one
having a medical concern and the last one working in strategic planning and portfolio development.
105
Annexe 2 : Guide de discussion – Étude de cas
Interview Guide
Introduction
First, thank you very much for accepting to contribute to my thesis. As I told you, I am a master
student at HEC Montreal and I have a PharmD from France. So, I am really interested by the
pharmaceutical industry. As you know, the topic of my thesis concerns the roles of the
stakeholders in the Chinese pharmaceutical market. These stakeholders are the payers
(governmental bodies, private health insurer), the distributors, the healthcare providers (doctors,
pharmacists) and the patients. I am really interested by the complex and challenging Chinese
market. So, that’s why I have chosen this topic. My thesis aims at defining which kind of relationship a
company should develop with them.
As soon as I will have finished my thesis, I will communicate you my analysis with my
recommendations. As I am writing my thesis in French, I don’t think that you are interested to
have the document, so I will do a synthesis version in English.
Before to begin, I would like to clarify the concern of confidentiality, your name and the name of
your company wont appear in my thesis. All information obtained will only be used for this work.
Le research ethic comity of HEC Montreal has approved the data collect for the present survey is
valid. For any further question, do not hesitate to contact them at +1 514 250 1526.
Thank you again for your collaboration; I am convinced that this discussion will strongly
contribute to my work.
Anne-Claire Poinas M.Sc Marketing student
HEC Montreal +1 514 250 1526
106
1st part: respondent profile
Can you tell me more about your position and your background?
How many years have you been working for this company?
Have you ever work in China before?
How many years have you been working in the pharmaceutical industry?
2nd part: activities of the company in China
What are the activities of your company in China?
When did it begin its activities in China?
Which products of the company are sold in this market?
3rd part: activities of the company toward the stakeholders
- Payers
What are they expect from you? What do you expect from them?
How do you work with them?
What kind of activities do you do to favour this relationship?
What kind of tools do you use to reach them?
- Distributors
What are they expect from you? What do you expect from them?
How do you work with them?
What kind of activities do you do to favour this relationship?
What kind of tools do you use to reach them?
107
- Healthcare providers
What are they expect from you? What do you expect from them?
How do you work with them?
What kind of activities do you do to favour this relationship?
What kind of tools do you use to reach them?
- Patients
What are they expect from you? What do you expect from them?
How do you work with them?
What kind of activities do you do to favour this relationship?
What kind of tools do you use to reach them?
4th part : Conclusion
How do you imagine the future of your company in the Chinese market?
What do you think about the future of the pharmaceutical market in China?
Would you like to add something?
108
Annexe 3 : Guide de discussion – Informateur clé
Interview Guide
Introduction
First, thank you very much for accepting to contribute to my thesis. As I told you, I am a master
student at HEC Montreal and I have a PharmD from France. So, I am really interested by the
pharmaceutical industry. As you know, the topic of my thesis concerns the roles of the
stakeholders in the Chinese pharmaceutical market. These stakeholders are the payers
(governmental bodies, private health insurer), the distributors, the healthcare providers (doctors,
pharmacists) and the patients. I am really interested by the complex and challenging Chinese
market. So, that’s why I have chosen this topic. My thesis aims at defining which kind of relationship a
company should develop with them.
As soon as I will have finished my thesis, I will communicate you my analysis with my
recommendations. As I am writing my thesis in French, I don’t think that you are interested to
have the document, so I will do a synthesis version in English.
Before to begin, I would like to clarify the concern of confidentiality, your name and the name of
your company wont appear in my thesis. All information obtained will only be used for this work.
Le research ethic comity of HEC Montreal has approved the data collect for the present survey is
valid. For any further question, do not hesitate to contact them at +1 514 250 1526.
Thank you again for your collaboration; I am convinced that this discussion will strongly
contribute to my work.
Anne-Claire Poinas
M.Sc Marketing student HEC Montreal
+1 514 250 1526 [email protected]
109
1st part: respondent profile
Can you tell me more about your position and your background?
How many years have you been working for this company?
Have you ever work in China before?
How many years have you been working in the pharmaceutical industry?
2nd part: activities of the company toward the stakeholders
- Payers
How occidental companies work with them?
What kind of activities do they do to favour this relationship?
What kind of tools do they use to reach them? Which kind of data to they bring to them and how?
Which kind of investments do they realize in China?
- Distributors
How occidental companies work with them?
What kind of activities do they do to favour this relationship?
Do companies collaborate with their distributors aiming at developing their capabilities?
Are they doing anything to face with the complexity of the Chinese supply chain?
- Healthcare providers
How occidental companies work with them?
What kind of activities do they do to favour this relationship?
What kind of tools do they use to reach them?
110
- Patients
How occidental companies work with them?
What kind of activities do they do to favour this relationship?
What kind of tools do they use to reach them?
4th part : Conclusion
What do you think about the future of the pharmaceutical market in China?
Would you like to add something?
111
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