mémoire de thèse vduboiscdoc.ensm-douai.fr/theses/vincentdubois.pdf · 2007. 2. 8. · m. géry...

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Mémoire de thèse intitulé Etude du comportement physico-mécanique et caractérisation environnementale des sédiments marins – Valorisation en technique routière Présenté par Vincent DUBOIS Pour l’obtention du grade de Docteur de l’Université d’Artois Spécialité : Génie Civil Directeur de thèse : Nor Edine ABRIAK Thèse préparée au Département Génie Civil de l’Ecole Nationale Supérieure des Mines de DOUAI Date de soutenance : le 31 janvier 2006 Membres du jury présidé par M. DAMIDOT M. Nor Edine ABRIAK, Professeur, ENSM de DOUAI Directeur de thèse M. Daniel LEVACHER, Professeur, Université de CAEN Rapporteur M. Jean-Pierre TROALEN, Professeur, Université de REIMS Rapporteur M. Géry DE SAXCE, Professeur, Université de LILLE (USTL) Examinateur M. Bruno DUTHOIT, Professeur, Université d’ARTOIS Examinateur M. Denis DAMIDOT, Professeur, ENSM de DOUAI Examinateur M. Rachid ZENTAR, Enseignant Chercheur, ENSM de DOUAI Invité M. Pascal GREGOIRE, Docteur, Port Autonome de DUNKERQUE Invité

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  • Mémoire de thèse

    intitulé

    Etude du comportement physico-mécanique et caractér isation

    environnementale des sédiments marins – Valorisatio n en technique routière

    Présenté par Vincent DUBOIS

    Pour l’obtention

    du grade de Docteur de l’Université d’Artois

    Spécialité : Génie Civil

    Directeur de thèse : Nor Edine ABRIAK

    Thèse préparée

    au Département Génie Civil

    de l’Ecole Nationale Supérieure des Mines de DOUAI

    Date de soutenance : le 31 janvier 2006

    Membres du jury présidé par M. DAMIDOT

    M. Nor Edine ABRIAK, Professeur, ENSM de DOUAI Directeur de thèse

    M. Daniel LEVACHER, Professeur, Université de CAEN Rapporteur

    M. Jean-Pierre TROALEN, Professeur, Université de REIMS Rapporteur

    M. Géry DE SAXCE, Professeur, Université de LILLE (USTL) Examinateur

    M. Bruno DUTHOIT, Professeur, Université d’ARTOIS Examinateur

    M. Denis DAMIDOT, Professeur, ENSM de DOUAI Examinateur

    M. Rachid ZENTAR, Enseignant Chercheur, ENSM de DOUAI Invité

    M. Pascal GREGOIRE, Docteur, Port Autonome de DUNKERQUE Invité

  • RESUME Ce travail se situe dans le contexte de l’élaboration de solutions alternatives à l’immersion des sédiments de dragage, ainsi que dans le cadre de la recherche de nouvelles sources d’approvisionnement en granulats, nécessaires au domaine du Génie Civil. En France, au moins 350 millions de tonnes de matériaux sont consommées chaque année, pendant que les ouvertures de carrières ou de ballastières sont de plus en plus réglementées. Les matériaux dragués représentent des volumes importants à gérer pour les responsables de ports (environ 50 millions de m3, en France, chaque année). L’immersion, solution traditionnelle pour les sédiments peu à non pollués, devient de plus en plus réglementée, ce qui amène les gestionnaires à trouver de nouvelles solutions de gestion. L’objectif de ce travail est, donc, de proposer une solution pour l’utilisation des sédiments marins en couche d’assise de chaussée, à travers le respect d’une méthodologie générale de valorisation, reproductible sur le plan industriel, et intéressante d’un point de vue économique. Ainsi, une étude dans les domaines physique, minéralogique, chimique, et mécanique a été réalisée, afin de mieux connaître l’influence de certains paramètres et le comportement général des sédiments. Cette étude permet de mettre en avant, premièrement, le rôle important des matières organiques sur la matrice granulaire, et deuxièmement l’utilisation du modèle Cam Clay modifié, comme première approche de loi de comportement de ces sédiments. Dans le cadre de la valorisation, un paramètre a un rôle important : la teneur en eau, qui permet d’atteindre la compacité et la portance maximales du matériau routier. En effet, les sédiments marins, après dragage, ont une teneur en eau qui, selon les procédés, peut atteindre 150 à 200 % (teneur en eau géotechnique). Il est donc nécessaire de diminuer cette teneur en eau, d’au moins 100%, pour utiliser efficacement les sédiments dans le cadre d’une formulation. Pour permettre ce changement d’état, notre choix s’est porté sur la décantation naturelle. Ce procédé est intéressant car il fait partie intégrante de l’étape de stockage, à travers la mise en dépôt des sédiments. Une étude a donc été réalisée pour mieux comprendre le phénomène de la décantation naturelle, afin d’évaluer les limites et les possibilités d’optimisation de ce procédé. L’objectif de la dernière étape a été de mettre au point des matériaux traités aux liants hydrauliques à base de sédiments marins. Les dosages en liants hydrauliques sont équivalents aux dosages habituels des chantiers. La proportion de sédiments, dans les mélanges étudiés, est volontairement minoritaire (32-33%), ce qui permet une diminution artificielle de la teneur en eau pour une utilisation plus facile à l’échelle industrielle. Une étude mécanique et environnementale a été réalisée afin d’évaluer la durabilité du matériau. Ce travail a été réalisé en collaboration avec le Port Autonome de Dunkerque et le Port Départemental de Gravelines – Grand Fort Philippe. La validation de la démarche a été testée à l’échelle semi-industrielle, grâce à une planche expérimentale, qui a permis, dans un premier temps, d’évaluer l’impact de la préparation des sédiments sur la valorisation, et la faisabilité chantier. Mots clés : sédiments marins, structure routière, matières organiques, teneur en eau, décantation naturelle, planche expérimentale.

  • ABSTRACT This research work aims to develop alternatives solutions to the traditional practice which consists in dumping at sea of dredged materials, and to provide a new granular material source for the Civil Engineering domain: in France, each year, more than 350 M tons of granular materials are used, while opening new carriers, due to environmental constraints, is more and more difficult. Dredged materials induce large volumes to manage (approximately 50 Mm3, in France, each year). Traditionally, the chosen solution to manage lightly contaminated dredged sediments consists in dumping the sediments at sea, however with the increase of environmental awareness and the progress of national and international regulation, harbours managers are concerned by developing alternative solutions to the traditional practice. The main objective of this work is to develop an alternative solution where dredged sediments are used as a road sub-base material, in the framework of a general proposed methodology, which meets technical as environmental criterions. To develop this methodology and to enhance our understanding of the general behaviour of dredged sediments: physical, chemical, mineralogical as mechanical studies were undertaken and the influence of some key parameters were explored. This study point out the role of organic matters and salts on the behaviour and puts the first stakes for modelling the mechanical behaviour of the dredged material. In the context of beneficial reuse as a road construction material, the water content reduction constitutes an important parameter to control. After dredging, generally, the water content of marine sediments is above 150 %. In this work, the natural decantation has been chosen and studied in order to evaluate the limits of this process. The last part of this study concern design of the material, treated with hydraulic binders, based on marine sediments. The durability of defined material has been evaluated through a mechanical and environmental study. This study is in the framework of collaborative research work with Dunkerque and Gravelines / Grand Fort Philippe harbours. The methodology was tested through the achievement of experimental road. In first time, this application, allowed to confront laboratory experiments with real conditions of building site. Key words: marine sediments, road structure, organic matters, water content, natural decantation, experimental road.

  • REMERCIEMENTS Mes remerciements s’adressent, d’abord, à Monsieur Nor Edine ABRIAK, Professeur à l’Ecole des Mines de DOUAI et directeur de cette thèse, pour son encadrement, ses conseils et la confiance qu’il m’a témoignés. Je remercie aussi Monsieur Rachid ZENTAR, Enseignant Chercheur à l’Ecole des Mines de DOUAI, pour m’avoir encadré, guidé, et conseillé tout au long de ce travail de recherche. Je les remercie du temps qu’ils m’ont consacré, et des nombreuses connaissances scientifiques qu’ils m’ont apportées. Je tiens à remercier aussi M. Denis DAMIDOT, Professeur et Chef du Département Génie Civil, pour m’avoir accueilli dans son laboratoire. Je remercie aussi l’ensemble des partenaires du projet PREDIS, qui a suivi et participé à ce travail de recherche. Je remercie notamment M. CARLIER (FRTP), animateur de ce projet, Messieurs GREGOIRE et TANCHON (PAD), Melle AUBRY, Madame MAGNIE (INERTEC), M. GALTIER (SITA FD), Mme BOURDON, Messieurs PRIEZ et PETIT (COLAS Nord Picardie), M. FREY (LHOIST France), Messieurs MOUDILOU et GERMANEAU (ITALCEMENTI), M. BENADDOU (EXTRACT), et Messieurs COSYNS et MARCOTTE (Conseil Général du Nord / Port Départemental de GRAVELINES GRAND FORT PHILIPPE), pour l’ensemble des actions ayant permis la bonne réalisation de ce travail. Mes remerciements s’adressent également à M. Daniel LEVACHER, Professeur à l’Université de Caen, M. Jean Pierre TROALEN, Professeur à l’Université de Reims, M. Géry DE SAXCE, Professeur à l’Université de LILLE, M. Bruno DUTHOIT, Professeur à l’Université d’Artois, M. Pascal GREGOIRE (PAD), pour l’honneur qu’ils m’ont fait de s’être intéressés à mon travail de recherche. Je remercie toutes les personnes du Département Génie Civil : les enseignants et professeurs, Melle KAMALI, Messieurs BERNARD, BULTEEL, DEGRUGILLIERS, GARCIA-DIAZ, LOUIS qui ont, eux aussi, participé à ces recherches et ont apporté leurs compétences et leurs expériences ; les techniciens, Christophe, Dominique, Guillaume, et Mickaël, pour leurs conseils et leurs participations à ce travail ; Hadjila et Mohamed, stagiaires DESS qui ont travaillé sur le sujet ; le secrétariat, Carole et Christiane, et les collègues docteurs et doctorants, Géraldine, Yann, Fred, Nicolas, Samira, Christophe, et Julien. Je remercie Florence, qui a vécu avec moi cette thèse, m’a encouragé, et m’a donné la force d’aller au bout de cette aventure. Je remercie aussi mes parents, pour m’avoir toujours encouragé à aller encore plus loin et pour m’avoir soutenu à chaque moment. Je remercie enfin tous mes amis et toute ma famille, pour leur présence et leur écoute.

  • Sommaire

    i

    Sommaire

    Sommaire i

    Liste des abréviations

    vi

    Liste des symboles

    vii

    Introduction générale 1 Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage 5

    1. Les sédiments marins 5

    1.1 Définition et origine des sédiments 5

    1.2 Composition structurale 5

    1.3 Composition organique 6

    2. Les sédiments dans le milieu naturel 7

    2.1 Interactions minéralo-organiques 7

    2.2 Origine et type de pollution 8

    2.3 Interactions polluants – sédiments marins 9

    3. Développement de la valorisation des sédiments marins 10

    3.1 Contexte législatif 10

    3.2 Impact de l’hétérogénéité 14

    3.3 Traitements 15

    3.4 Débouchés potentiels en valorisation 17

    4. Conclusions 19 Chapitre II : Problématique de valorisation des séd iments marins en technique routière

    21

    1. Intérêt du secteur de la construction 21

    1.1 Bilan granulats et cadre législatif 21

    1.2 Pourquoi le domaine routier ? 22

    1.3 Méthodologie d’utilisation 23

  • Sommaire

    ii

    2. Méthodologie de gestion globale des sédiments marins 27

    2.1 Etat initial 27

    2.2 Stockage 27

    3. Effets d’un processus de valorisation sur le comportement des sédiments marins

    29

    3.1 Ajout de ciment 29

    3.2 Ajout de chaux 30

    3.3 Modèle prévisionnel de la résistance à la compression des sols traités 31

    3.4 Interactions liants – minéraux – polluants 32

    4. Conclusions 33

    Chapitre III : Présentation de l’étude expérimental e 35

    1. Rappel des objectifs 35

    2. Méthodologie de travail 35

    3. Présentation des sites d’application 38

    3.1 Cadre de l’étude 38

    3.2 Port Autonome de Dunkerque 38

    3.3 Port de Gravelines Grand Fort Philippe 39

    3.4 Choix des zones de prélèvement 40

    4. Préparation à l’étude expérimentale 42

    4.1 Echantillonnage 42

    4.2 Critères d’homogénéité 42

    4.3 Conservation 43

    4.4 Sédiments de l’étude 43

    4.5 Autres matériaux 44

    Chapitre IV : Caractérisation environnementale et p hysique des sédiments bruts

    47

    1. Préparation des échantillons aux essais 47

    2. Impact environnemental des sédiments bruts 48

    2.1 Données antérieures 48

    2.2 Tests réalisés 51

    2.3 Résultats 52

  • Sommaire

    iii

    2.4 Etude de la sensibilité au pH 54

    3. Paramètres physiques et minéralogiques 56

    3.1 Matières organiques 56

    3.1.1 Analyses quantitatives 56

    3.1.2 Mesures complémentaires 57

    3.1.3 Analyses qualitatives 58

    3.2 Analyses granulométriques 59

    3.3 Masses volumiques absolues 62

    3.4 Minéralogie 62

    3.5 Comportement de la fraction fine 65

    3.5.1 Valeur au bleu de méthylène (NF P 94 068) 65

    3.5.2 Limites d’Atterberg (NF P 94 051) 66

    3.5.3 Effets du sel et des matières organiques sur la fraction fine 67

    3.5.3.a Traitements des échantillons 67

    3.5.3.b Limites d’Atterberg après traitements 68

    3.5.3.c Valeurs au bleu 69

    3.5.3.d Etude d’impact du traitement à l’eau oxygénée sur la granulométrie

    70

    4. Conclusions 71

    Chapitre V : Etude du comportement mécanique 75

    1. Mesures de la cohésion non drainée 75

    2. Préparation aux essais sur sédiments consolidés 79

    3. Etude de l’homogénéité des échantillons 84

    4. Comportement à l’essai oedométrique 85

    4.1 Description de l’essai 85

    4.2 Mesures du tassement 86

    4.3 Mesures de perméabilité 90

    5. Comportement en cisaillement direct 93

    5.1 Description de l’essai 93

    5.2 Déroulement des essais 94

    5.3 Résultats 95

    6. Essais triaxiaux 97

  • Sommaire

    iv

    6.1 Description de l’essai triaxial 97

    6.2 Déroulement des essais 98

    6.3 Résultats 99

    7. Application d’un modèle mécanique : le modèle Cam-Clay modifié 110

    7.1 Définition du modèle 110

    7.2 Détermination des paramètres 112

    7.3 Application du modèle 113

    8. Conclusions 115

    Chapitre VI : Préparation des sédiments marins à la valorisation 117

    1. Descriptif de l'étude 117

    1.1 Rappel des objectifs 117

    1.2 Sédimentation et consolidation 117

    1.3 Retours d'expériences 118

    2. Type de dispositif étudié 118

    2.1 Principes 118

    2.2 Bac de décantation 119

    2.3 Colonne de décantation 120

    3. Suivi du tassement 121

    3.1 Suivi d'une couche de faible épaisseur (bac de décantation) 121

    3.2 Suivi d'une couche de sédiments en colonne de décantation 124

    3.3 Etude d'un mélange sable - sédiments 130

    4. Conclusions 133

    Chapitre VII : Elaboration d’un matériau d’assise d e chaussée 135

    1. Descriptif de l'étude de formulation 135

    2. Choix des dosages 137

    2.1 Dosage en sédiment 137

    2.2 Dosages en liants hydrauliques 137

    2.3 Optimisation du squelette granulaire par recherche d'indicateur 140

    2.3.1 Optimisation de l'ajout granulaire par analyse de régression 140

    2.3.2 Critères d'uniformité et de courbure 142

  • Sommaire

    v

    2.3.3 Variabilité de la compacité et de la portance en fonction du pourcentage de sédiments

    144

    3. Etude mécanique des matériaux formulés 148

    3.1 Etude des résistances mécaniques à long terme 148

    3.2 Résistance à l'eau et au gel 154

    3.3 Etude du comportement mécanique par l'essai de cisaillement rectiligne 156

    4. Mesures de rejets polluants 161

    5. Faisabilité sur chantier 165

    5.1 Description de la planche expérimentale 165

    5.2 Préparation des sédiments 168

    5.3 Préparation du chantier 168

    5.4 Mise en place du matériau 169

    5.5 Traitements à la chaux et au ciment 170

    5.6 Protection de la couche 172

    5.7 Premières analyses 172

    6. Conclusions 173

    Conclusions générales et perspectives 175

    Bibliographie 179

    Liste des figures

    189

    Liste des tableaux

    193

    Annexes 197

  • Liste des abréviations

    vi

    Liste des abréviations CERTU : Centre d’Etudes sur les Réseaux, les Transports, l’Urbanisme et les constructions publiques CETE : Centre d’Etudes Techniques de l’Equipement CNRSSP : Centre National de Recherche sur les Sites et Sols Pollués GEODE : Groupe d’Etude et d’Observation sur le Dragage et l’Environnement GESAMP : Group of Experts on the Scientific Aspects of Marine Pollution JOCE : Journal Officiel des Communautés Européennes LCPC : Laboratoire Central des Ponts et Chaussées OSPAR : Convention d’OSlo et de PARis PAD : Port Autonome de Dunkerque PREDIS : Plan Régional d’Elimination des Déchets Industriels et Spéciaux SETRA : Service d'Etudes Techniques des Routes et Autoroutes VNF : Voies Navigables de France ANC : Acid neutralisation capacity BNC : Basic neutralisation capacity BTEX : Benzène – toluène – éthylène – xylène BTP : Bâtiment et travaux publics CO : Carbone organique COT : Carbone organique total CPA : Ciment Portland artificiel DBT : Dibutylétain DCO : Demande chimique en oxygène DIS : Déchets industriels et spéciaux EDR : Evaluation détaillée des risques ESR : Evaluation simplifiée des risques FS : Fraction soluble GTR : Guide des terrassements routiers GTS : Guide du traitement des sols HAP : Hydrocarbures aromatiques polycyliques ICP-AES : Inductively Coupled Plasma – Atomic Emission Spectrometry LMO : Lime modification optimum MBT : Monobutylétain MO : Matières organiques OM : Ordures ménagères PCB : Polychlorobiphényl PF : Plate-forme de chaussée PVC : Polychlorure de vinyle (PolyVinylChloro en anglais) TBT : Tributylétain TMS : Tonne de matières sèches

  • Liste des symboles

    vii

    Liste des symboles

    1/ Chimie

    Al : Aluminium As : Arsenic Ba : Baryum C3A : Aluminate tricalcique (3 CaO Al2O3) C2S : Silicate bicalcique (2 CaO SiO2) C3S : Silicate tricalcique (3 CaO SiO2) C4AF : Aluminoferrite tétracalcique (4 CaO Al2O3 Fe2O3) C : Carbone Ca : Calcium CaO : Chaux vive Ca(OH)2 : Chaux hydratée Cd : Cadmium Cl : Chlore Cr : Chrome Cr VI : Chrome VI Cu : Cuivre Fe : Fer Hg : Mercure Indice CH2 : Hydrocarbures K : Potassium K2SO4 : Sulfate de potassium Mg : Magnésium Mn : Manganèse Mo : Molybdène Na : Sodium Na2SO4 : Sulfate de sodium Ni : Nickel O : Oxygène P : Phosphore Pb : Plomb S : Soufre Sb : Antimoine Se : Selenium Si : Silicium Ti : Titane Zn : Zinc Zr : Zirconium V : Vanadium

  • Liste des symboles

    viii

    2/ Mécanique des sols c : Cohésion Cc : Coefficient de courbure cc : Indice de compression CD : Consolidé drainé cs : Indice de recompression Cs : Concentration solide Cu : Coefficient d’uniformité cu : Cohésion non drainée CU : Consolidé non drainé Cv : Coefficient de consolidation d10 : Diamètre de particules pour 10 % de passants cumulés d30 : Diamètre de particule pour 30 % de passants cumulés d60 : Diamètre de particule pour 60 % de passants cumulés e : Indice des vides e0 : Indice des vides initial ef : Indice des vides final

    1σe : Indice des vides de référence à la contrainte σ1

    2σe : Indice des vides de référence à la contrainte σ2 ex : Indice des vides à la contrainte étudiée du sol non traité E : Module élastique E360 : Module élastique à 360 jours Eoed : Module oedométrique epi : Epaisseur initiale G : Module de cisaillement Gv : Gonflement volumique H0 : Hauteur initiale Hi : Hauteur i IC.B.R. : Indice CBR IC.B.R. immersion : Indice C.B.R. mesuré après quatre jours d’immersion IP : Indice de plasticité IPI : Indice portant immédiat I’vn : Indice des vides normalisé k : Perméabilité K0 : Coefficient de poussée des terres au repos L/S : Rapport liquide sur solide M : Pente de la droite d’état critique Ms : Masse sèche de l’échantillon mth : Masse totale humide Mw : Masse d’eau N : Newtons OPM : Optimum proctor modifié

  • Liste des symboles

    ix

    p : Contrainte moyenne totale p’ : Contrainte moyenne effective p’0 : Contrainte moyenne effective initiale p’c : Contrainte effective de préconsolidation q : Déviateur q0 : Déviateur initial Rc : Résistance à la compression simple Refc : Refus cumulés Rt : Résistance à la traction directe Rtb : Résistance à la compression diamétrale (traction indirecte) Rtb 360 : Résistance à la compression diamétrale à 360 jours Sc : Surface de la colonne u : Pression interstitielle uc : Contre pression U : Degré de consolidation VBS : Valeur au bleu du sol Vs : Volume des grains solides Vw : Volume d’eau Vt : Volume total de l’échantillon w : Teneur en eau géotechnique (Mw/Ms*100) wi : Teneur en eau initiale wL : Limite de liquidité wP : Limite de plasticité εa : Déformation axiale εd : Déformation déviatorique εr : Déformation radiale εv : Déformation volumique φ : Diamètre ϕ : Angle de frottement interne κ : Pente de la courbe de déchargement - rechargement dans le plan (e, ln p’) λ : Pente de la courbe de consolidation vierge dans le plan (e, ln p’) ν : Coefficient de Poisson ρd : Masse volumique sèche ρs : Masse volumique absolue ρw : Masse volumique de l'eau σ1 : Contrainte axiale σ'1 : Contrainte axiale effective σ3 : Contrainte radiale ou pression de confinement σ'3 : Contrainte radiale effective σ’p : Contrainte de préconsolidation σ’v : Contrainte verticale

  • Introduction générale

    1

    Introduction générale Les sédiments sont des particules fines (argiles, limons) à grossières (sables), déplacées et transportées grâce, notamment, aux actions climatiques (vent, marées, …) et humaines (travaux d’aménagement, exploitation du sol, …). Dans les ports, les chenaux d’accès, les estuaires, les canaux, les fleuves, et les rivières, leur accumulation gêne voire empêche la circulation des navires, des petits bateaux de plaisance aux supertankers. Les conséquences sur les activités économiques (industrielles, commerciales, de loisirs…) ne sont pas négligeables. Les gestionnaires doivent entreprendre des opérations de dragage pour rétablir un tirant d’eau minimal, en curant le fond à l’aide de dragues, le plus souvent hydrauliques ou mécaniques. Dans le port, les matériaux récupérés sont traditionnellement immergés en mer, à quelques kilomètres des côtes, dans des zones de clapage réglementées et contrôlées. Cette solution d’élimination des sédiments est soumise à une législation nationale (arrêté du 14 juin 2000, autorisation préfectorale pour le permis d’immersion, …) et internationale (convention OSPAR, …) de plus en plus sévère, basée sur la vérification du potentiel polluant des sédiments, par rapport à des valeurs seuils de polluants organiques et inorganiques, permettant de classer les sédiments en fonction du risque sur le milieu. Pollués ou non, les sédiments sont considérés comme des déchets (décret n°2002-540 du 18 avril 2002, rubriques 17 05 05 et 17 05 06). Dans le cas d’une présence importante de polluants, les sédiments, après dragage, peuvent être traités afin d’extraire la part ultime, à évacuer en site de confinement, et intégrer la part valorisable dans un process de réutilisation. Pour le moment, la plupart des ports évitent, tant que cela est possible, de draguer les zones polluées et étudient différents scénarii de traitement et de valorisation en fonction de leurs contraintes. De nombreuses études sont menées afin de répondre aux problématiques de gestion des sédiments de dragage, dont le but est :

    - de gérer le problème de la pollution en évaluant et en suivant la pollution, présente soit dans le milieu naturel par des systèmes de traceurs [Malherbe, 2002], soit à terre, sur le site de stockage [CNRSSP, 2004], [Marot, 1997],

    - de proposer des filières complètes d’utilisation des sédiments marins fortement pollués, telle que la fabrication de briques, qui permet la destruction de certains polluants organiques et inorganiques [Ulbricht, 2002].

    L’enjeu est important car les volumes de sédiments dragués (pollués et non pollués) sont, chaque année, considérables : environ 600 Mm3 dans le monde [Boutin, 1999], 50 Mm3 en France [Alzieu et al, 1999]. Ainsi, ces grands volumes de matériaux peuvent représenter une source de matières premières très intéressante, notamment pour un secteur consommateur de granulats tel que le Génie Civil.

  • Introduction générale

    2

    En France, chaque année, plus de 365 millions de tonnes de granulats sont consommées dans le domaine de la construction, alors que des problèmes d’approvisionnement en ressources naturelles peuvent survenir : certaines carrières ou ballastières en cours d’exploitation sont en fin de vie, et les permis d’exploitation très limités sont soumis à une législation plus sévère. Pollués ou non pollués, les sédiments pourraient alimenter un secteur essentiel d’activité, à travers un processus intégrant l’opération de dragage, la préparation des sédiments (stockage et éventuellement traitement) et l’utilisation dans le domaine de la construction. Parmi les différents secteurs du Génie Civil, le domaine routier sollicite le plus grand besoin en matériaux, avec, en France, 50.7% d’utilisation de granulats [Michel, 1997], par rapport au bâtiment qui n’en consomme que 22.4%. L’étude présentée souhaite proposer une nouvelle source d’approvisionnement en granulats pour le domaine routier, par l’utilisation de sédiments fins maritimes. Il est donc nécessaire de mieux connaître les sédiments étudiés à travers leurs propriétés intrinsèques et leur comportement, afin de mieux les utiliser en tant que matériau. Pour cela, seuls les sédiments marins, peu ou non pollués, ont été utilisés dans l’étude de formulation de matériaux routiers, afin d’éviter l’impact sur l’environnement, ainsi que les interactions entre les polluants, et les matrices granulaires et cimentaires. Cependant l’approche environnementale reste nécessaire pour évaluer tout rejet d’éléments préjudiciables, pour un milieu naturel quelconque, tels que les chlorures, les huiles… Les sédiments étudiés sont d’origine marine, et de granulométrie fine (particules majoritairement inférieures à 63 µm). Avec cette granulométrie, le domaine routier semble un domaine intéressant pour développer une voie de valorisation, car l’utilisation de matériaux fins y est maîtrisée et ne demande pas de résistances mécaniques très élevées. Mais, de part le manque de connaissance sur ce type de granulats, et la présence de matières organiques et de sel, il est nécessaire de considérer les vases comme un type de matériau à part. L’objectif de cette étude est de proposer une solution de valorisation associant une préparation des sédiments par décantation naturelle, et un traitement aux liants avec des dosages similaires aux dosages habituellement utilisés en technique routière (un pourcentage en ciment de 4 à 8%, et un pourcentage en chaux maximal de 2%). L’étude du comportement mécanique des sédiments et des matériaux obtenus après formulation va permettre, en perspective de cette étude, d’élaborer un modèle de comportement hiérarchique prenant en compte le comportement mécanique des sédiments bruts et capable de prédire le comportement du matériau formulé. Le modèle de comportement étudié pour les sédiments bruts est le modèle Cam Clay modifié. L’étude de caractérisation et de valorisation des sédiments s’inscrit dans une étude globale de gestion des sédiments marins de dragage, réalisée au Département Génie Civil de l’Ecole des Mines de Douai, comprenant :

    - l’élaboration d’un outil d’aide à la décision permettant aux acteurs d’une opération de dragage de choisir de manière optimale, la technique de dragage et la voie d’élimination des matériaux dragués selon les critères demandés par chaque acteur [Grégoire, 2004],

  • Introduction générale

    3

    - l’étude d’une méthodologie générale de zonage permettant de subdiviser un port en zones homogènes (nature des sédiments, type et niveau de pollution), ce qui permet une meilleure gestion des opérations [Mac Farlane, 2004].

    Ce travail vient donc compléter la base de données de l’outil d’aide à la décision, en fournissant une solution alternative à la gestion des sédiments. L’étude de zonage va permettre d’adapter les solutions de valorisation développées en fonction du matériau rencontré. L’étude de la valorisation des sédiments marins, en technique routière, est complexe car leur comportement mécanique à court et à long terme, reflétant leurs capacités d’utilisation, est encore mal connu, et leur état initial (fluide), après dragage, nécessite la gestion et la préparation des sédiments avant utilisation. De part des volumes de sédiments importants, la méthodologie de valorisation, sur laquelle s’appuie ce travail, comprend une phase de stockage. Pendant cette phase, une décantation naturelle des sédiments se réalise, entraînant un essorage, c'est-à-dire un transfert de l’eau libre en excès, en dehors de la matrice principale, ce qui permet de diminuer la teneur en eau. Cependant, ce phénomène est considérée, par retours d’expériences, assez peu efficace. Une partie du travail expérimental a donc été consacré au suivi de la consolidation des sédiments, afin de pouvoir optimiser la diminution de teneur en eau, et à la recherche d’indicateurs bénéfiques. La valorisation des vases, considérées comme non polluées, en technique routière est étudiée depuis quelques années [Boutouil, 1998], [Colin, 2003], par incorporation de liants hydrauliques (ciment, chaux, cendres volantes). Pour une valorisation des sédiments marins seuls, les dosages en liants hydrauliques peuvent être très conséquents par rapport aux dosages habituellement rencontrés en technique routière (par exemple 15%). A ce stade des travaux, la démarche de valorisation, nous semblant la plus intéressante, a pour but de limiter les dosages en liants hydrauliques dans des gammes d’utilisation courantes (4-8 % pour le ciment, jusqu’à 2-3% pour la chaux) et d’utiliser un complément granulaire. Le complément granulaire va, alors, permettre de renforcer le squelette granulaire et de réduire, artificiellement, la teneur en eau importante des sédiments. L’objectif principal de ce travail est d’établir une méthodologie générale de valorisation des sédiments marins. Afin d’atteindre cet objectif, il est nécessaire :

    - de mieux connaître les propriétés intrinsèques des sédiments, et les paramètres susceptibles d’influencer leur comportement à l’état brut, et leur réutilisation,

    - de diminuer voire de supprimer les effets négatifs que pourraient avoir les sédiments dans le cadre d’une utilisation routière, grâce à une préparation efficace et aux ajouts,

    - d’élaborer une procédure basée sur la capitalisation des connaissances acquises des deux points précédents, pour élaborer une formulation de matériaux routiers,

    - d’évaluer la durabilité environnementale et mécanique du mélange, - de trouver des paramètres de référence pour une procédure de valorisation

    générale, puisque les caractéristiques des ajouts granulaires, comme des sédiments marins, sont différentes selon la zone géographique étudiée.

  • Introduction générale

    4

    Le travail s’inscrit dans une logique d’application industrielle facile et économique, en prenant en compte les contraintes industrielles, de la phase de stockage à la phase d’utilisation. Dans ce cadre, le travail mené cherche à connaître l’évolution à apporter au comportement des sédiments, en se basant sur leurs propriétés initiales afin d’obtenir le matériau routier souhaité. Afin de confronter les résultats et la méthodologie, une planche expérimentale est nécessaire et permet l’application en conditions réelles de chantier. L’élaboration d’une loi de comportement mécanique des sédiments bruts, et les essais mécaniques sur du matériau formulé, à base de sédiments, rentrent dans le cadre d’un travail à long terme, de modélisation du comportement mécanique des sédiments et des mélanges à base de sédiments. Le but est de prévoir l’effet d’un ajout de sédiment dans un mélange ou, d’un apport de granulats ou de liants aux sédiments. Des lois de comportement rhéologiques des vases existent mais, à notre connaissance, peu d’éléments existent sur le comportement des vases à l’état consolidé. Dans un premier temps, un état des connaissances sur les caractéristiques des sédiments et des sols fins, et sur leur réutilisation en tant que matériau de construction est présenté. Après avoir décrit les objectifs et la méthodologie élaborée, l’étude expérimentale est présentée. Elle se compose : - d’une caractérisation environnementale et physique des sédiments marins à l’état brut, issus des ports de Dunkerque et de Gravelines - Grand Fort Philippe, en vue de la valorisation en technique routière, - d’une étude mécanique des sédiments marins afin de connaître leur comportement sous poids propre et sous chargements, amenant ainsi à l’application d’un modèle mécanique (modèle Cam Clay modifié), - d’une étude d’optimisation de la préparation des sédiments en vue de leur valorisation en technique routière, - de l’élaboration d’un matériau de couche d’assise de chaussée, avec la vérification de la durabilité mécanique et environnementale du matériau routier obtenu, en laboratoire. Ce chapitre aboutit à la présentation d’une planche expérimentale, réalisée pour évaluer le potentiel de faisabilité en conditions de chantier. Cette planche sera suivie, en perspective de cette étude, sur le plan mécanique et environnemental.

  • Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage

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    Chapitre I Gestion des sédiments de dragage Ce chapitre a pour but de définir et de décrire les différents constituants des sédiments et les phénomènes d’interactions, afin de mieux comprendre leur comportement et leurs incidences à travers le processus de valorisation. La problématique et la méthodologie de valorisation des sédiments de dragage sont présentées, dans lesquelles on retrouve les moyens de traitements et les voies de valorisations existantes. 1. Les sédiments marins 1.1 Définition et origine des sédiments Appelés communément vases, les sédiments marins sont constitués de phases minérale, organique et liquide. Dans le dictionnaire de géologie [Foucault et Raoult, 1980], les sédiments sont définis comme "un ensemble constitué par la réunion de particules plus ou moins grosses ou de matières précipitées ayant, séparément, subi un certain transport". Ces particules proviennent de l’érosion des roches et des sols, de l’activité organique (accumulation de coquilles, …) ainsi que des rejets locaux dus à l’activité humaine [LIFE, 2002], [Foucault et Raoult, 1980].

    Les matières organiques, détaillées dans le paragraphe 1.3, engendrent la formation de gaz, lors de leur processus de décomposition. 1.2 Composition structurale La distribution granulométrique d’un sol, ou d’un matériau, peut s’étendre des cailloux (d > 20 mm) aux argiles (d < 2µm), (Tableau I.1). La fraction fine, relative aux particules inférieures à 80 µm, est la fraction caractéristique de toute vase. Cette fraction engendre généralement des comportements complexes provoqués par les interactions entre les particules minérales, les interactions de ces particules avec l’eau contenue dans le milieu, les ions présents dans le milieu, et aussi les éléments organiques. Dans la fraction fine, sur le plan granulométrique, on trouve les limons et les argiles. Dans toute étude géotechnique, les argiles sont considérées comme des éléments influençant le comportement d’un sol, par le caractère plastique et les échanges cationiques avec le milieu. En effet, les particules argileuses sont majoritairement chargées négativement et vont capter les cations du milieu. Selon les dispositions et les liaisons entre les feuillets d’argile, les ions peuvent s’insérer plus ou moins facilement. L’intensité de la fixation entre les cations et les feuillets dépend de la valence des cations et de l’état d’hydratation du milieu [Mustin, 1987]. En effet, certains cations s’entourent d’une

  • Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage

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    couche d’eau plus ou moins importante lorsque l’état hydrique le permet. Ainsi, l’ion sodium permet une floculation des particules la moins stable car cet ion s’entoure d’une couche d’eau importante qui ne lui permet pas de se lier facilement avec les particules. A l’opposé, les cations bivalents ont les fixations les plus énergiques et donc les plus stables [Mustin, 1987]. La taille des cations va aussi jouer son rôle, car plus ils seront de grosse taille, plus ils auront de difficultés à s’insérer entre les feuillets, et donc à jouer un rôle dans le comportement des matériaux fins. Tableau I.1 : Classement granulométrique [Costet et Sanglerat, 1981]

    Cailloux Graviers Sables Limons Argiles

    d > 20 mm 2 mm < d < 20 mm 63 µm < d < 2 mm 2 µm < d < 63 µm d < 2 µm

    1.3 Composition organique Les sols organiques sont très compressibles, et ont une couleur sombre ainsi qu’une odeur caractéristique [Schlosser, 1988]. La fraction organique est faiblement représentée dans un sol, en comparaison à la fraction minérale. C’est aussi une fraction très variable au cours du temps, [Mustin, 1987]. Pour caractériser quantitativement la fraction organique, des méthodes chimiques ou thermiques sont employées : l’oxydation sulfochromique et la perte au feu. Sur le plan qualitatif, un couplage pyrolyse flash - chromatographie en phase gazeuse - spectrométrie de masse permet d’évaluer la nature des différents éléments. Les matières organiques du sol, en général, sont réparties en quatre classes [Mustin, 1987] (figure I.1) : - la matière organique vivante (biomasse active), - la matière organique fraîche (débris végétaux, cadavres, excréments, …), - les composés en cours d’évolution dits transitoires, - les composés organiques stabilisés, appelés communément humus. L’humus se divise en trois groupes : la fraction humine, les acides humiques, et les acides fulviques.

    80 µm Vases

  • Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage

    7

    Figure I.1 : Processus d’évolution des matières organiques [Mustin, 1987]

    2. Les sédiments dans le milieu naturel Dans le milieu naturel, les sédiments vont évoluer, de part les apports permanents de nouvelles matières minérales ou organiques, et les activités externes du milieu dans lequel ils se trouvent. Le cas particulier des ports va induire, de part la présence d’industries et les activités urbaines et agricoles, des sources de rejets polluants, qui peuvent interagir avec les sédiments. Pour une bonne compréhension du comportement des sédiments, il est donc important de bien connaître les interactions entre les phases composant le sédiment, et dans le cas d’une zone polluée, le type et le comportement des polluants présents. 2.1 Interactions minéralo-organiques Les composés organiques s’associent facilement avec les particules fines des sols et en particulier, les argiles. Cette association va augmenter la capacité de fixation des cations [Mustin, 1987]. Ces interactions sont provoquées par le phénomène d’adsorption entre les éléments, les ponts d’eau, et les cations de liaison, tels que l’aluminium et le fer qui ont tendance à se lier étroitement avec les particules de sol et les éléments organiques [Mustin, 1987]. Ce sont ces liaisons qui vont permettre à l’humus, chargé négativement, de s’associer aux particules argileuses, la capacité d’absorption se trouvant augmentée. L’arrangement du complexe argilo-humique est basé sur l’hypothèse d’une présence d’un noyau argileux entouré par les composés organiques répartis en couches selon leur nature (l’humine proche de l’argile, puis les acides humiques, puis les molécules à caractère aliphatique tels que les acides fulviques, les polysaccharides et les protéines), qui va donc permettre de créer des liens entre les particules minérales [Mustin, 1987] (figure I.2).

    MATIERES ORGANIQUES VIVANTES

    MATIERES ORGANIQUES FRAICHES

    COMPOSES TRANSITOIRES

    MINERAUX HUMUS CO2 atmosphérique

    HUMINE ACIDES FULVIQUES

    ACIDES HUMIQUES

  • Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage

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    Figure I.2 : Représentation schématique du complexe argilo-humique [Wouters et Lorent, 2002]

    La présence de sels dans le milieu va jouer un rôle important. En effet, l’ion sodium est un floculant peu stable, car il s’entoure d’une grande couche d’eau, et va aussi entraîner l’inhibition de l’humification et de la minéralisation de la matière organique. Le sol aura, alors, une stabilité structurale moins stable. A ces différents phénomènes, vont venir s’ajouter, les interactions liant les sédiments aux polluants. 2.2 Origine et type de pollution Bien que l’objectif de l’étude ne soit pas la valorisation des sédiments pollués, il est nécessaire de connaître les différents éléments potentiellement présents afin de pouvoir les mesurer et vérifier la propreté des sédiments étudiés. Les polluants présents dans les sédiments sont essentiellement issus des activités humaines : industrielles, urbaines, agricoles. Les polluants peuvent être de nature inorganiques ou organiques. Les polluants, de nature inorganique, dans les sédiments, sont [Le Hecho, 1998] :

    - les métaux, - certains sels (sulfates, phosphates, nitrates, chlorures et ammonium), - ainsi que les cyanures.

    On les retrouve la plupart du temps, dans la plupart des activités industrielles et agricoles. Les critères principaux, permettant de caractériser efficacement les polluants inorganiques, sont leur spéciation, la solubilisation, et la capacité d’adsorption aux interfaces [Le Hecho, 1998]. Dans les milieux réducteurs soufrés, les métaux s’associent aisément avec le soufre, (comportement chalcophile). Ils apparaissent sous forme de sulfures (Fe, Cu, Pb, Zn). En milieux oxydants, ils se combinent avec l’oxygène : ils deviennent lithophiles.

  • Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage

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    Ils se combinent facilement dans les silicates (Zn, Cr), ou les oxydes (Cr, Ni, Fe, Al, V, Co) [Piantone et al, 2002]. Les polluants, de nature organique, dans les sédiments, sont principalement [Alzieu et al, 1999] :

    - les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), issus de la biosynthèse, de la pyrolyse de matières organiques. On les retrouve dans les carburants fossiles,

    - les polychlorobiphényles (PCB), utilisés avant la fin des années 90 (car interdits depuis), comme additifs dans les peintures, les encres, les apprêts destinés aux revêtements muraux,

    - le tributylétain (TBT), matière active des anciennes peintures antisalissures, permettant la protection des navires.

    Les molécules organiques toxiques se composent entre autres de carbone, d’hydrogène, d’oxygène, d’azote et sont issus des produits fabriqués par l’homme. Par exemple, sur 2.690.000 tonnes d’hydrocarbures déversés dans les mers tous les ans, les premières sources sont les rejets des villes, les déballastages et les rejets "machines" avec 26 % pour les premiers et 19.5 % pour les seconds [GESAMP, 2000]. L’adsorption des composés organiques dépend, selon Visser et al cité par Tremblay, [1998], des facteurs suivants:

    - le carbone organique : en sa présence, l’adsorption des contaminants organiques, dont les molécules organiques ne sont pas dissociées, est possible,

    - la température : lorsque ce paramètre augmente, l’adsorption diminue, - l’acidité : le pH affecte légèrement les composés organiques non associés, - la salinité : on peut constater une légère augmentation de l’adsorption avec

    l’augmentation de la concentration en sel, - la texture : le pourcentage de matières organiques influence la variation de

    l’adsorption en fonction de la granulométrie, - la contamination par l’huile : l’adsorption des contaminants hydrophobes peut

    se faire préférentiellement dans la fraction huileuse. 2.3 Interactions polluants – sédiments marins Les études menées sur les interactions entre les polluants et les matériaux, en général, montrent que les polluants vont préférentiellement se fixer sur la fraction fine, de part les propriétés électro-statiques des argiles, et de manière moindre, des limons. Ainsi, selon le type et les caractéristiques des particules fines, le potentiel de fixation des métaux sera différent. On note comme paramètres importants de ce comportement [Marot, 1997] :

    - la mobilité des cations compensateurs entre les feuillets d’argiles, - le pH, qui selon sa valeur va permettre un relargage de certains métaux dans

    une certaine proportion,

  • Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage

    10

    - le type d’argile. En effet, les argiles gonflantes, telle que la smectite, auront un potentiel de fixation des métaux plus important car les distances entre réticules sont plus grandes que pour l’illite ou la kaolinite.

    Avec la présence de composés organiques, les métaux peuvent changer de caractéristiques car les métaux forment des complexes avec la substance humique (en particulier l’acide fulvique) alors qu’elle-même, est sujet à des processus d’oxydoréduction, de part son oxydation, avec l’ion minéral [Marot, 1997]. Ces comportements peuvent permettre d’agir sur la fixation des métaux par les matières organiques [Marot, 1997]. Les polluants sont étroitement liés avec les particules fines minérales et les molécules organiques, ce qui entraîne, dans le cadre d’un process de valorisation, l’utilisation de traitements complexes et coûteux, pour altérer voire détruire les polluants, et permettre d’obtenir un matériau valorisable et sans risque pour l’environnement. 3. Développement de la valorisation des sédiments m arins La valorisation des sédiments devient une phase importante dans la méthodologie de gestion des ports. Cette phase doit permettre d’aider les ports à évacuer ces matériaux, tout en prenant en compte des critères économiques et environnementaux, fixés par les gestionnaires et les décideurs (Etat, région …). 3.1 Contexte législatif Les conventions d’Oslo en 1972 et de Paris en 1974 ont été mises en place pour traiter les pollutions d’origines marine et tellurique de l’Atlantique du Nord Est. Les objectifs sont de limiter les rejets polluants dans le milieu marin. En 1992, ces deux conventions ont été réunies pour former un instrument plus global, afin de proposer des programmes et des mesures pour la prévention et l’élimination de la pollution : la convention OSPAR [Alzieu, 1999]. En France, la réalisation d’une opération de dragage est soumise au décret n°93-742 du 29 mars 1993 dépendant de la loi sur l’eau de 1992 [Castillon, 2002]. Les valeurs de référence prises en compte pour autoriser l’immersion sont issues de l’Arrêté du 14 juin 2000 (Tableau I.2). De nombreux pays ont mis en place des grilles de qualité des sédiments. En France, on s’appuie sur les mesures de huit métaux lourds et sept polychlorobiphényles. Ces études sont souvent complétées par des tests écotoxicologiques permettant d’évaluer l’impact du matériau sur des organismes vivants.

  • Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage

    11

    Tableau I.2 : Arrêté du 14 juin 2000 (FRANCE) (valeurs en mg/kg de matériaux secs sur la fraction inférieure à 2 mm) Niveau 1 (N1) Niveau 2 (N2) Arsenic 25 50 Cadmium 1,2 2,4 Chrome 90 180 Cuivre 45 90 Mercure 0,4 0,8 Nickel 37 74 Plomb 100 200 Zinc 276 552 PCB totaux 0,5 1 PCB congénère 28 0,025 0,05 PCB congénère 52 0,025 0,05 PCB congénère 101 0,05 0,1 PCB congénère 118 0,025 0,05 PCB congénère 138 0,05 0,1 PCB congénère 153 0,05 0,1 PCB congénère 180 0,025 0,05

    En dessous du niveau 1, l’immersion est acceptée. Au dessus du niveau 2, le stockage à terre est demandé, l’immersion est refusée, sauf si cette solution représente la solution la moins préjudiciable. Entre les deux niveaux, des tests complémentaires d’impact sont réalisés. Dans d’autres pays, le système de classification s’appuie sur des références différentes. Le nombre de niveaux et les valeurs des seuils peuvent alors être différentes de ceux présentées dans le tableau I.2, [Boutouil, 1998]. Si l’immersion n’est pas possible, il faut placer les sédiments dans des sites de stockage, de manière permanente pour la part ultime, et/ou de manière temporaire dans le cadre d’un process industriel d’utilisation des sédiments. Le stockage à terre semble une étape à maîtriser. En France, en terme de stockage de déchets, existent des centres de stockage dont l’ancienne terminologie est le centre d’enfouissement technique. On trouve trois classes différentes (tableau I.3) :

    - classe I, pour les déchets industriels spéciaux ultimes ainsi que les résidus ultimes stabilisés,

    - classe II, les ordures ménagères ultimes, les sables de fonderie et les mâchefers,

    - classe III, les déblais, les gravats de nature inerte.

  • Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage

    12

    Tableau I.3 : Classes de stockage des déchets [Billard, 2001]

    Classe Déchets Nature dominante

    des déchets Fonction du

    stockage

    Dispositions pour la protection de

    l’environnement Durée

    I DIS ultimes

    Résidus ultimes stabilisés (seuils d’admission)

    Minéraux solubles (métaux, sels)

    Stockage Isolement de la

    pluie Besoins

    régionaux

    Couverture, toit mobile Stabilisation, drainage,

    géologie k > 10-9 m/s (ep = 5m)

    Réversible Permanent à long terme

    Autosurveillance sur 30 ans

    OM brutes avant 2002 OM ultimes après 2002 Organiques

    Evolution Minéralisation

    biologique II

    Mâchefers Sables de fonderies

    Minéraux évolutifs Maturation

    Besoins départementaux

    Drainage Isolement du sous sol : ep = 1m, k = 10-9 m/s

    ou ep = 5m, k = 10-6 m/s

    Moyen terme (20 à 30 ans)

    Site convertible réutilisable ou

    "abandon"

    III Déblais Gravats

    Démolition Inertes

    Gestion Espace

    géographique

    Eviter les dépôts sauvages

    Permanent si non

    récupération

    A partir d’essais de lixiviation, et d’analyses sur éluats (liquide obtenu après filtration) et sur solides, exprimés en mg/kg de matières sèches, les déchets peuvent être classés parmi les déchets inertes, non dangereux, ou dangereux (tableau I.4). Tableau I.4 : Seuils d’acceptation dans les centres de stockage (Décision européenne 2003/33/CE) PARAMETRES Classe III

    Stockage de

    déchets inertes

    Valeurs seuils

    (en mg/kg de ms)

    Classe II

    Stockage de déchets

    non dangereux

    Valeurs seuils (en

    mg/kg de ms)

    Classe I

    Stockage de déchets dangereux

    Valeurs seuils (en mg/kg de

    ms)

    Traitements des déchets dangereux

    avant stockage

    SUR ELUAT (L/S = 10)

    pH 4 - 13 Fraction < 4000 < - < 60000 < - < 100000 < Antimoine (Sb) < 0,06 < - < 0,7 < - < 5 < Arsenic (As) < 0,5 < - < 2 < - < 25 < Baryum (Ba) < 20 < - < 100 < - < 300 < Cadmium (Cd) < 0,04 < - < 1 < - < 5 < Chrome Total < 0,5 < - < 10 < - < 70 < Chrome VI 5 < Cuivre (Cu) < 2 < - < 50 < - < 100 < Mercure (Hg) < 0,01 < - < 0,2 < - < 2 < Molybdène < 0,5 < - < 10 < - < 30 < Nickel (Ni) < 0,4 < - < 10 < - < 40 < Plomb (Pb) < 0,5 < - < 10 < - < 50 < Selénium (Se) < 0,1 < - < 0,5 < - < 7 < Zinc (Zn) < 4 < - < 50 < - < 200 < Cyanures < < - < < - < 5 < Chlorures < 800 < - < 15000 < - < 25000 < Sulfates < 1000 < - < 20000 < - < 50000 < Fluorures < 10 < - < 150 < - < 500 < Indice phénol < 1 < - < 50 < - < 100 < COT < 500 < - < 800 < - < 1000 <

  • Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage

    13

    PARAMETRES Classe III

    stockage de

    déchets inertes

    Valeurs seuils

    (en mg/kg de ms)

    Classe II

    stockage de déchets

    non dangereux

    Valeurs seuils

    (en mg/kg de ms)

    Classe I

    stockage de déchets dangereux

    Valeurs seuils (en mg/kg de

    ms)

    Traitements des déchets dangereux

    avant stockage

    SUR DECHET BRUT

    COT < 30000 - < 60000 BTEX < 6 PCB (7 congénères)

    < 1

    Hydrocarbures < 500 HAP < 50

    Ces valeurs seuils sont données par la décision du conseil de l’Union Européenne 2003/33/CE, parue dans le Journal Officiel des Communautés Européennes du 16 janvier 2003. Si certains éléments mesurés sont présents dans des proportions dépassant les valeurs seuils maximales, pour l’acceptation des déchets dangereux, le déchet doit être traité avant stockage, pour diminuer voire supprimer son caractère polluant (tableau I-4). Les sédiments, répertoriés comme déchet aux rubriques 17 05 05 et 17 05 06 du décret n°2002-540 du 18 avril 200 2, peuvent donc suivre la même classification. Même si certains sédiments ne sont pas considérés pollués vis-à-vis des seuils pour l’immersion (Arrêté du 14 juin 2000), ils peuvent contenir des éléments, présents naturellement dans le milieu marin, pouvant être préjudiciables pour un autre milieu, tels que les chlorures ou les sulfates. Le caractère polluant des sédiments choisis pour l’étude est évalué, dans un premier temps, en comparant les résultats d’analyses des années précédentes aux seuils fixés pour la demande d’immersion, par l’Arrêté du 14 juin 2000. Il est ensuite nécessaire de réaliser de nouvelles analyses sur les échantillons prélevés, afin de vérifier le niveau de pollution. Vis-à-vis de l’application en technique routière, il est aussi possible de s’appuyer sur des référentiels de qualité environnementale propres à certaines catégories de matériaux. Ainsi, on peut aussi s’appuyer sur la circulaire du 9 mai 1994 (tableau I.5), sur l’utilisation de mâchefers d’incinération d’ordures ménagères (considérés comme déchets de classe II, tableau I.3). Tableau I.5 : Catégories des mâchefers – Circulaire du 9 mai 1994

    Mâchefers à faible fraction lixiviable

    Catégorie V

    Valeurs seuils

    Mâchefers intermédiaires Catégorie M

    Valeurs seuils

    Mâchefers à forte fraction lixiviable

    Catégorie S Taux d’imbrûlés

    < < 5 % <

    Fraction soluble

    < 5 % < 10 % <

    Hg < 0,2 mg/kg < 0,4 mg/kg < Pb < 10 mg/kg < 50 mg/kg < Cd < 1 mg/kg < 2 mg/kg < As < 2 mg/kg < 4 mg/kg < Cr VI < 1,5 mg/kg < 3 mg/kg < SO4

    2- < 10 000 mg/kg < 15 000 mg/kg < COT < 1 500 mg/kg < 2 000 mg/kg <

  • Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage

    14

    Les références V, M, et S sont employés, respectivement, par analogie aux termes valorisation, maturation, et stockage permanent. 3.2 Impact de l’hétérogénéité En fonction de la qualité environnementale des matériaux, évaluée à partir des grilles de l’Arrêté du 14 juin 2000, ainsi qu’en fonction des résultats des tests écotoxicologiques, la gestion des sédiments marins peut être différente, et aura un impact économique d’autant plus important, avec des sédiments considérés fortement pollués, qui demanderont des traitements efficaces, et de manière plus globale, une méthodologie de gestion adaptée. Lorsque l’on réalise une étude de dragage portuaire, on se retrouve avec des vases de nature et de teneur en polluants variables, cette hétérogénéité augmentant avec l’importance du port et de ses activités. Ainsi, il devient difficile de mettre en place un process adapté au moment où se réalise l’opération de dragage. Il est donc intéressant de délimiter les endroits où se situe une certaine stabilité des paramètres étudiés : c’est le zonage, [Mac Farlane, 2004]. Les différentes zones, ainsi détectées, se différencient par le type de sédiments (granulométrie, …) et les pollutions (charge de pollution, pollution aux hydrocarbures, aux métaux lourds, …). L’hétérogénéité évoquée ci-dessus est un facteur important, évoquant la disparité des valeurs d’un ou plusieurs paramètres du même site étudié. On peut diviser cette notion en deux groupes [Gy, 1998] :

    - l’hétérogénéité de constitution, correspondant aux propriétés intrinsèques variables du lot et en particulier, des éléments le constituant. On ne peut pas la réduire avec l’homogénéisation et le mélange,

    - l’hétérogénéité de distribution, fonction de la répartition non aléatoire, dans l’espace ou dans le temps, des particules ou des groupes formés dans le lot.

    "Une matière de constitution homogène ne montrera jamais de distribution hétérogène et plus la constitution est hétérogène, plus la distribution le sera aussi" [Wavrer, 2003]. Dans le cadre d’une méthodologie d’étude en laboratoire, des paramètres et propriétés représentatifs du matériau, il est donc nécessaire de procéder à un échantillonnage. L’échantillonnage, d’après Gy [1998], est « la réduction non restrictive de la masse. Cette réduction ne peut résulter que de la sélection d’un sous ensemble d’éléments constitutifs (fragments, molécules, ions) destiné à représenter l’ensemble formé par le lot ». C’est le but du zonage de pouvoir cibler à une échelle relativement importante, une zone dans laquelle les matériaux sont considérés homogènes, pour les paramètres choisis. Une étude ciblée sur la pollution, à partir d’échantillons prélevés, devra aussi prendre en compte un moyen de conservation stable des matériaux dans le temps. Les conditions et objectifs de l’étude servent donc à établir le choix de conservation. Dans une étude portant sur le comportement et la capacité de mobilisation des

  • Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage

    15

    métaux dans des sédiments et boues de Barcelone, les échantillons ont été congelés à -20°C, placés dans des sacs en plastique [Lopez S anchez et al, 1995]. Une fiche décrivant l’emplacement du prélèvement, la date, la profondeur, le matériel de prélèvement, la composition de l’échantillon, les conditions hydrologiques, une description macroscopique (type de sédiment, couleur, odeur…) accompagne les différents récipients remplis de sédiment [LIFE, 2002]. 3.3 Traitements Le traitement est l’action de détruire, d’altérer, ou d’encapsuler la part polluée d’un matériau, et éventuellement de modifier les caractéristiques de ce matériau pour lui permettre de respecter les critères de valorisation choisie. Les traitements ou prétraitements existants peuvent être regroupés en six classes [Marot, 1997] :

    - les prétraitements ou traitements physiques (hydrocyclone, …), qui s’appuient sur les différences de densité entre les éléments du matériau, et les forces d’attraction des particules fines,

    - les prétraitements ou traitements mécaniques (filtre presse, …), qui agissent par accélération de la consolidation du matériau,

    - les traitements physico-chimiques (phosphatation, …), qui permettent par le mélange avec des agents chimiques ou l’envoi d’un courant électrique, d’attirer et séparer les particules polluées,

    - les traitements biologiques (phytoremédiation, …), qui altèrent voire détruisent les polluants organiques grâce aux champignons, bactéries, enzymes introduits [Dubourguier et al, 2001],

    - les traitements thermiques (calcination, …), qui permettent de détruire à une température et un temps fixés les éléments polluants,

    - la stabilisation solidification par ajout de liants hydrauliques, …, qui encapsulent les polluants à l’intérieur d’une matrice.

    A l’échelle industrielle, certains de ces traitements sont associés dans une chaîne de traitements, afin de pouvoir cumuler les dégradations ou destructions de l’ensemble des éléments visés (voir le procédé de la société EXTRACT en annexe 1, p.190). L’Agence de l’Eau Artois-Picardie a estimé le coût et l’efficacité de ces principaux traitements, en collaboration avec le Pôle de Compétences sur les Sites et Sols pollués, ainsi que d’autres organismes belges et néerlandais dans le cadre d’un projet d’étude européen (tableau I.6), [LIFE, 2002]. Olin Estes et Palermo [2001], à travers leurs recherches, énoncent eux aussi un état de l’art technique sur l’efficacité des traitements les plus courants :

    - en ce qui concerne les prétraitements, les séparations par densité peuvent être employées lorsque les différences de densité entre les parties contaminées et non contaminées du matériau sont conséquentes,

    - la réduction de la quantité d’eau par un procédé mécanique peut fournir de bons résultats et une meilleure manipulation des matériaux,

    - les additifs chimiques pour améliorer la floculation et faciliter le séchage peuvent entraîner des coûts significatifs,

  • Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage

    16

    - les filtres à bande et les filtres à presse sont communément rencontrés pour le procédé de séchage des matériaux fins,

    - les centrifugeuses sont parfois utilisées mais sont assez coûteuses et leur efficacité ne dépasse pas celle des presses sur la réduction de l’eau.

    L’efficacité de ces traitements est un critère essentiel dans le choix des techniques. Il n’existe pas de traitement permettant de dépolluer totalement des sédiments. Tableau I.6 : Coûts et efficacités de quelques (pré)traitements [LIFE, 2002] Pré traitements Coût (Euros / Tonne

    de Matières Sèches) Objectif Efficacité (%)

    Attrition 10 € / TMS Désagréger les matières organiques

    et nettoyer les surfaces minérales

    70 %

    Hydrocyclone 5 à 20 € / TMS Séparer les particules fines

    90 %

    Bassin de décantation, consolidation sous vide, décanteur lamellaire

    3 à 12 € / TMS Diminuer la teneur en eau

    90 à 99 %

    Coagulation et floculation

    25 à 60 € / TMS Diminuer la teneur en eau

    90 % pour les fines

    Filtre à bande ou filtre presse

    25 à 50 € / TMS Diminuer la teneur en eau

    85 à 95 %

    Pressoir 10 à 20 € / TMS Diminuer la teneur en eau

    Réduction du volume de 5 à 10 fois, taux de siccité = 75%

    Traitements Coût (Euros / Tonne de Matières Sèches)

    Objectif Efficacité (%)

    Bioremédiation 15 à 30 € / m3 Enlever les contaminants organiques

    50 à 80%

    Lessivage 50 à 120 € / TMS Enlever les contaminants organiques

    90 %

    Complexant 50 à 130 € / TMS Enlever les contaminants inorganiques

    70 à 90 %

    Désorption thermique

    100 à 200 € / TMS Enlever les contaminants

    organiques volatils et quelques métaux

    HAP et PCB = 99 %

    Stabilisation / Solidification

    92 à 184 € / TMS Encapsuler les métaux lourds et les

    hydrocarbures

    99 %

  • Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage

    17

    Dans le cas d’étude des sédiments peu ou non pollués, pour leur valorisation, l’objectif sera de choisir un moyen efficace et peu coûteux, permettant la diminution de la teneur en eau de 150-200 % (après dragage) à une valeur permettant leur utilisation en construction routière (de l’ordre de 10 à 30%). Les dispositifs fréquemment rencontrés dans la littérature sont la décantation, la floculation - coagulation, le séchage, et les moyens mécaniques tels que le filtre presse. Le choix d’une solution est un compromis technique et économique. 3.4 Débouchés potentiels en valorisation Les débouchés potentiels en valorisation sont généralement classés parmi trois domaines, [LIFE, 2002] :

    - le génie civil et les travaux publics, - l’agriculture par l’amendement des sols, - la réhabilitation de sites naturels (habitats aquatiques et terrestres de la

    faune). Plus précisément, les sédiments trouvent une utilisation possible [LIFE, 2002] :

    - en remblaiement pour un aménagement ou le comblement d’anciennes carrières, ou de réseaux inutilisés,

    - en tant que composant de produits manufacturés, telles que les briques. Dans ce cas, la teneur en eau doit être basse afin de limiter les gonflements. On peut aussi les retrouver sous forme d’agrégats synthétiques après incinération à 1200°C, ou dans la composition de ci ments par exemple. Ces derniers choix sont fonction de la proximité d’usine aux environs des zones de dragage. D’autres solutions concernent la fabrication de carreaux de verre, de laines de verre et autres composés à l’aide de torches à plasma,

    - en génie littoral, pour la remise en état de digues, par exemple ; méthode peu coûteuse qui demande l’emploi de matériaux non contaminés.

    Le Génie Civil utilise une quantité de matériaux importante, en particulier en ce qui concerne les sables et graviers. L’industrie routière, quant à elle, grande consommatrice de matériaux, a recours à une fraction granulométrique plus large : comme les limons en remblai ou couche de forme, et au-dessus de la couche de forme, la mise en place de graves/sables, traités ou non traités. Dans ce cadre, les études se sont orientées sur le traitement des sédiments fins aux liants hydrauliques. Les études convergent vers l’utilisation d’un dosage en ciment élevé (plus de 12% de CPA/CEM I pour [Colin, 2003]). Mais on retrouve dans les travaux de Colin [2003], des dosages plus faibles avec un correcteur granulométrique : la formulation obtenue est composée de 64,4 % de sédiments, 27,6 % de quartzite, 1% de CaO, et 7% de CPA/CEM I, qui permet d’obtenir de bonnes résistances mécaniques nécessaires pour l’utilisation en couche de forme. Dans notre cas d’étude, les dosages en sédiments, ajout(s) granulaire(s), et liants hydrauliques ont été choisis en vue d’une application à l’échelle industrielle facile, efficace, et peu coûteuse, le matériau obtenu étant destiné aux couches de fondation et de base. Ainsi, la proportion de sédiments est voulue minoritaire afin de réduire l’effet de la teneur en eau sur le comportement du matériau à élaborer. Les dosages en chaux et en ciment sont limités à ceux déjà employés sur chantier.

  • Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage

    18

    Dans un contexte d’épuisement des sources d’approvisionnement en granulats, les sédiments de dragage peuvent être considérés comme une nouvelle source de matériaux. D’autres voies de valorisations, comme le coulis de remblaiement de tranchées, sont en cours d’études, dans le cadre d’un programme plus vaste mené par les équipes de l’Ecole des Mines de Douai, l’Université d’Artois, et l’Université de Sherbrooke. Ces matériaux, faiblement dosés en ciment ne nécessitent pas de compactage ni de vibration, et peuvent être essorables ou non essorables. Les produits essorables atteignent leur capacité portante par l’évacuation d’une grande partie de l’eau dans l’encaissant (sol en place ou structure de chaussée existante) et par la prise du liant [CERTU, 1998]. Une autre application intéressante a pour but d’élaborer des granulats, qui seront utilisés pour lutter contre l’érosion côtière (Ecole des Mines de Douai). Ces blocs, en formant un cordon à quelques centaines de mètres du bord de mer, vont permettre de limiter les pertes de matériaux sur les plages, entraînées par la dynamique des vagues. La filière agricole peut être intéressante pour la gestion des matériaux pollués par des composés organiques, dans le respect des seuils d’impact environnemental (tableau I.7). En effet, de part l’activité biologique, ces polluants sont dégradés. C’est une solution naturelle mais qui demande une surface et un temps d’attente importants, pour la réduction des composés. L’épandage agricole se fait sur une base de 20 m3 à l’hectare. Les seuils du tableau I.6 indiquent des valeurs seuils plus importantes que celles relatives à l’immersion en mer. Tableaux I.7 : Exemples de seuils (mg/kg) pour les épandages de boues sur les sols agricoles [Bliefert et Perraud, 2001]

    Cd Cr Cu Hg Ni Pb Zn Boues d’épandage agricole en France

    Valeurs limites

    15 1000 1000 10 200 800 3000

    Total des 7 principaux PCB

    Fluoranthène Benzo(a)pyrène

    Boues d’épandage agricole en France

    Valeurs limites 0,8

    5 (4 pour les pâturages)

    2 (1,5 pour les pâturages)

    En comparant les seuils des tableaux I.2 et I.4, on remarque que les seuils fixés pour le domaine agricole sont largement supérieurs aux seuils d’impact environnemental des matériaux de dragage. Enfin, il est aussi possible d’utiliser les sédiments pour la réhabilitation de zones sensibles tels que les habitats aquatiques ou terrestres de la faune ou, de part leur faible perméabilité, dans la mise en place de barrières ou de couvertures étanches des centres de stockage de déchets. Les matériaux ne doivent pas être contaminés pour permettre ce type de solution.

  • Chapitre I : Gestion des sédiments de dragage

    19

    4. Conclusions Les sédiments sont complexes. Cette complexité naît de l’origine de ces différents constituants, et des mécanismes d’interactions entre les phases minérales, organiques, et éventuellement les polluants. La matière organique a tendance à se fixer avec les particules minérales fines, provoquant des capacités de rétention d’eau importantes. La matière organique, complexée avec les argiles et les limons, interagit aussi avec les polluants, en dissociant, par exemple, les ions métalliques des particules minérales. Une oxydation des matières organiques peut, alors, engendrer un changement de caractéristiques des métaux, qui seront difficilement altérés par un traitement. Les polluants organiques, quant à eux, ont des comportements différents selon leur nature, qui se caractérisent comme les ions métalliques par leurs propriétés physico-chimiques. Dans un contexte législatif de plus en plus sévère, la gestion des sédiments est complexe, et au stade de la recherche, de nombreuses voies restent à explorer, que ce soit dans la dépollution des sédiments ou dans la gestion des quantités importantes de matières, afin que les solutions restent réalistes sur le plan de l’application industrielle, en respectant des critères techniques, économiques, et environnementaux. La complexité du matériau nécessite une caractérisation systématique des sédiments pour mieux appréhender leurs comportements physico-chimique, environnemental et mécanique. La valorisation des sédiments à l’échelle industrielle est donc problématique : - les dragages portuaires engendrent des quantités énormes de matériaux, - ces matériaux sont, après dragage, à l’état fluide ou pâteux, et n’ont donc aucune résistance initiale, - les traitements, utilisés pour réduire / détruire la pollution, ou pour améliorer la valorisation des sédiments (réduction de la teneur en eau pour des domaines d’applications comme la technique routière, par exemple) ont un coût et une efficacité variables. Notre étude se place dans une démarche de gestion globale des sédiments, en améliorant la connaissance du comportement des matériaux peu à non pollués, pour les valoriser efficacement et facilement, dans le secteur routier, en utilisant des techniques permettant un équilibre entre coût et efficacité.

  • Chapitre II : Problématique de valorisation des sédiments en technique routière

    21

    Roches calcaires23%

    Roches éruptives26%

    Sols alluviaux47%

    Matériaux recyclés

    3%

    Sols marins1%

    Chapitre II Problématique de valorisation des sédiments en technique routière L’objectif de ce chapitre est de décrire les critères permettant l’utilisation de matériaux en technique routière d’un matériau, et de présenter les paramètres influençant cette utilisation. L’influence des procédés de préparation est aussi discutée afin d’évaluer les améliorations possibles à apporter aux caractéristiques et au comportement des sédiments marins, pour leur permettre d’intégrer un processus de valorisation. 1. Intérêt du secteur de la construction 1.1 Bilan granulats et cadre législatif En France, chaque année, plus de 365 millions de tonnes de granulats sont consommés (figure II.1). Dans le domaine routier, 188 millions de tonnes sont consommées pour la réparation ou la création de chaussées, soit plus de la moitié de la quantité totale de granulats consommée.

    Figure II.1 : Répartition des approvisionnements

    en granulats en France [Michel, 1997] Les réserves de granulats, issus des carrières et des ballastières, ne sont pas en voie d’épuisement, mais leur exploitation est soumise à une législation stricte et dépend de la situation géographique, du coût et de critères environnementaux.

  • Chapitre II : Problématique de valorisation des sédiments en technique routière

    22

    En effet, les carrières sont soumises au décret n°9 4-484 du 9 juin 1994 modifiant le décret no 77-1133 du 21 septembre 1977 pris pour l'application de la loi de 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), ainsi que de la loi de 1964 relative au régime et à la répartition des eaux, et à la lutte contre leur pollution. L’autorisation d’ouverture est alors fonction de l’engagement de l’exploitant à respecter l’environnement et à proposer des solutions de réaménagement du site après son exploitation. Dans ce contexte législatif, les matériaux recyclés, considérés comme des déchets, paraissent être une ressource très intéressante : déchets de bâtiment, mâchefers d’incinération d’ordures ménagères, … et les sédiments marins à présent (catalogue européen des déchets). 1.2 Pourquoi le domaine routier ? En plus d’une consommation importante, le domaine routier permet d’exploiter des matériaux de nature très variée et répondant à des caractéristiques mécaniques peu élevées, de quelques MPa, en fonction de la position du matériau dans la structure routière. A partir de la plate forme de terrassement, c'est-à-dire le fond de route, la structure routière se compose d’une partie "terrassement" et d’une partie "chaussée". La partie terrassement comprend la plate forme support, et éventuellement un remblai de complément selon le profil en long recherché, ainsi qu’une couche de forme. La couche de forme a pour rôle de protéger le sous sol contre la pluie et les effets de cycle gel-dégel, de permettre le bon déroulement du chantier à travers le passage des engins, et de séparer le sol récepteur et les couches de chaussée pour éviter tout transfert de matière et permettre le maintien des propriétés des couches de chaussée [Venuat, 1980]. Parmi les familles de structure de chaussées rencontrées, on trouve les chaussées en béton de ciment, dites rigides, constituées :

    - d’une couche de fondation, en matériaux traités aux liants hydrauliques, ou du béton maigre,

    - et d’une couche de roulement constituée d’une dalle en béton. Les autres principales structures de chaussées rencontrées sont constituées [Venuat, 1980] (figure II.2) :

    - d’une couche de fondation, - d’une couche de base, - et d’une couche de roulement.

    Les deux premières couches reprennent les efforts verticaux statiques et permettent la distribution de ces charges sur le sol. La troisième couche reprend les efforts dynamiques et horizontaux. Ce type de structure est le cas le plus courant. La différence entre ces deux types de chaussée se situe au niveau structural, car dans le premier cas, la dalle ne se déforme pas et tous les efforts sont répartis sur la

  • Chapitre II : Problématique de valorisation des sédiments en technique routière

    23

    Couche de fondation

    Couche de base

    Couche de roulement Accotement

    Couche de formePartie supérieure des terrassements (PST)

    Couche de fondation

    Couche de base

    Couche de roulement Accotement

    Couche de formePartie supérieure des terrassements (PST)

    plate forme dans la limite de déformation de la fondation. Dans le deuxième cas, les efforts sont répartis entre les différentes couches jusqu’au sol.

    Figure II.2 : Exemple de structure routière fortement sollicitée Selon le type de route (autoroute, voies communales, …) et le type de trafic, classé de T5 à T0 par rapport au nombre de poids lourds circulant par jour (tableau II.1), toutes les couches de la figure II.2 ne sont pas présentes. Tableau II.1 : Classes de trafic [LCPC, 1994] Classe T5 T4 T3 T2 T1 T0

    Trafic (PL/j) 0 < - < 25 < - < 50 < - < 150 < - < 300 < - < 750 < - < 2000

    Pour une couche de forme, le potentiel d’utilisation du matériau est lié à l’indice portant immédiat (IPI), alors que pour les couches de fondation et de base, la connaissance du comportement mécanique en traction, associé à sa capacité à se déformer sous les chargements (module élastique) est aussi nécessaire. Les résistances en traction demandées à 360 jours sont de l’ordre de quelques MPa, pour un module élastique de 2 à 40 GPa, ce qui par rapport à d’autres matériaux utilisés dans les domaines du Génie Civil (ouvrages d’art par exemple), est faible. La résistance en compression est utilisée comme un indicateur de traficabilité, puisqu’il est admis qu’avec des matériaux traités aux liants hydrauliques, l’ouverture au trafic se fait à une résistance à la compression supérieure à 1MPa. La durabilité de ces matériaux doit être contrôlée aussi sur le plan mécanique, vis-à-vis de leur sensibilité à l’eau et au gel. 1.3 Méthodologie d’utilisation Pour utiliser un matériau en technique routière, il est nécessaire de bien connaître ses propriétés physiques, afin de le classer parmi les différents matériaux-types déjà répertoriés et de connaître le protocole d’utilisation de ce matériau (figure II.3) [GTR, 1992]. Les matériaux sont classés selon (figure II.4) [GTR, 1992] :

    - leur granulométrie (graviers à éléments fins), - leur fraction argileuse (pour les éléments fins), la dégradabilité (pour les

    éléments grossiers), - leur teneur en eau, - et éventuellement certaines caractéristiques spéciales (présence d’éléments

    organiques, éléments issus du recyclage,…).

  • Chapitre II : Problématique de valorisation des sédiments en technique routière

    24

    En fonction de ces critères, des procédures d’utilisation sont proposées. Si le matériau ne remplit pas certains de ces critères, il peut être envisagé une étude spécifique permettant d’établir des protocoles de mise en place.

    Matériaux particuliers

    Sols organiques et sous-produits industriels F

    Figure II.3 : Classification des matériaux [GTR, 1992]

    100 % 12 25 40

    A1 A2 A3 A4

    35 %

    12%

    B5

    B6 Passant à 2 mm 100 %

    D1 B1 B2 70 %

    Sols Dmax ≤ 50 mm

    0 % D2 B3 B4

    0 %

    0 0,1 0,2 1,5 2,5 6 8

    12 %

    Sols Dmax > 50 mm

    D3

    C1 ou C2

    C1 : matériaux roulés et matériaux anguleux peu charpentés (0/50 > 60 à 80 %) C2 : matériaux anguleux très charpentés (0/50 ≤ 60 à 80 %)

    0 0,1

    Craies R1

    Roches carbonatées Calcaires R2

    Roches argileuses Marnes, argilites, pélites … R3

    Roches siliceuses Grès, poudingues, brèches … R4

    Roches sédimentaires

    Roches salines Sel gemme, gypse R5

    Matériaux rocheux

    Roches magmatiques et métamorphiques

    Granites, basaltes, andésites, gneiss, schistes métamorphiques et ardoisiers… R6

    Passant à 80 µm

    IP

    VBS

    Passant à 80 µm

    VBS

  • Chapitre II : Problématique de valorisation des sédiments en technique routière

    25

    CLASSEMENT SELON LA NATURE

    Paramètres de nature

    Premier niveau de

    classification

    Classe Paramètres de nature

    Deuxième niveau de classification

    Sous classe fonction de la

    nature

    Caractères principaux

    CLASSEMENT SELON LA NATURE

    Paramètres de nature

    Premier niveau de

    classification

    Classe Paramètres de nature

    Deuxième niveau de classification

    Sous classe fonction de la

    nature

    Caractères principaux

    CLASSEMENT SELON L’ETATHYDRIQUE

    Paramètres et valeurs de seuils

    retenus

    Sous-classe

    CLASSEMENT SELON L’ETATHYDRIQUE

    Paramètres et valeurs de seuils

    retenus

    Sous-classe

    CLASSEMENT SELON LE COMPORTEMENT

    Paramètres et valeurs de seuils

    retenus

    Sous-classe

    CLASSEMENT SELON LE COMPORTEMENT

    Paramètres et valeurs de seuils

    retenus

    Sous-classe

    Figure II.4 : Méthodologie de classification des matériaux du domaine routier [GTR, 1992]

    La détermination d’une teneur en eau optimale, propre au matériau, est nécessaire et reste le paramètre de référence lors de l’évaluation du critère de portance. Cette teneur en eau est obtenue par l’essai Proctor, qui permet d’obtenir la masse volumique sèche optimale correspondante, donc le meilleur arrangement des particules pour un volume de matériau donné. Pour les couches d’assise (couche de fondation et couche de base), il est nécessaire de connaître le comportement du matériau sous les sollicitations du trafic. Ainsi, les résistances à la compression diamétrale (Rtb) et les modules d’élasticité (E) sont mesurés sur des éprouvettes de matériau dont la dimension est fonction de la dimension du plus gros granulat (éprouvettes 16×32 cm pour les sables grossiers, et 5×10 cm pour les sables fins et moyens) (NF P 98 114 2). En effet, le passage d’un véhicule sur les couches de matériaux entraînent une sollicitation de type charge - décharge. Le matériau doit donc avoir une résistance minimale en traction, et être capable de se déformer sans se casser. Traditionnellement, les essais en laboratoire sont réalisés à des échéances réduites de 28, 60, 90 jours selon le type de liant utilisé. On affecte alors aux résultats, un coefficient de corrélation permettant d’estimer les résistances mécaniques à 360 jours (tableau II.2), qui est la base du dimensionnement de chaussée.

  • Chapitre II : Problématique de valorisation des sédiments en technique routière

    26

    0,1

    1

    10

    1 10 100

    Résistance à la traction en MPa

    Module élastique en GPa à 360 j

    S5

    S4

    S3

    S1

    S2

    S0

    0,1

    1

    10

    1 10 100

    Résistance à la traction en MPa

    Module élastique en GPa à 360 j

    S5

    S4

    S3

    S1

    S2

    S0

    Tableau II.2 : Echéances et coefficients de corrélation pour l’estimation des performances à 360j (NF P 98-113) Age (jours) Rt/Rt360 E/E360 Laitier vitrifié brut ou prébroyé activé (seul) 90 0,70 0,75 Ciment normalisé (seul) 28 0,60 0,65 Liant spécial (routier (seul) 60 0,65 0,70 Cendres volantes-chaux (seules) 90 0,65 0,75 Mélange de liants 90 0,70 0,75

    Les résultats recalculés pour estimer le comportement à 360 jours, permettent de classer le matériau selon la norme NF P 98 114 (figure II.5). Cette norme comprend trois partie : l’une pour les graves, la deuxième pour les sables, et la dernière pour les sols.

    Figure II.5 : Classes de matériaux (NF P 98 114 2) Afin de valider une solution obtenue, une étude plus élaborée sur des séries d’éprouvettes permet de connaître la variation des résistances mécaniques en fonction de la variation des paramètres principaux :

    - 95%, 100%, 102% de la masse volumique apparente, - 0.8, 1, 1.2 de la teneur en liant, - wopt-1%, wopt, wopt+0.5%, avec wopt la teneu