methodologie de la recherche.réduit
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LICENCE PRO / COURS DE METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE PAR Dr Y. SONGUE
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INTRODUCTION A LA METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE EN SCIENCE DEGESTION (Mmoire et thse)
PLAN DU COURS
Chapitre introductif : Dmocrite et les atomes.
Chapitre 1 : Finalit, difficult et dmarche de la recherche en sciences de Gestion
Chapitre 2 : La question de dpart
Chapitre 3 : Lexploration
Chapitre 4 : La problmatique
Chapitre 5 : La construction dun modle danalyse
Chapitre 6 :Lobservation
BIBLIOGRAPHIE
Chalmers A. F. (1987) : Quest-ce que la science ? Editions La Dcouverte, Paris.
Gaston Bachelard (2003) : Le nouvel esprit scientifique, PUF, 7 dition.
Isaac Asimov (1972) : Grandes dcouvertes de la Science, Editions France-Empire.
Karl Popper (1991) : La connaissance objective.
Michel Beaud (1998) : Lart de la thse, Editions la Dcouverte.
Mintzberg Henri (2000): Le manager au quotidien : les dix rles du cadre, Edition dorganisation,
Paolo Rossi (1999) : Aux origines de la science moderne, Editions du Seuil.
Raymond Quivy & Luc Van Campenhoudt (1995) : Manuel de recherche en Sciences Sociales ;
Dunod, 2 dition.
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EN GUISE DINTRODUCTIONLa recherche en sciences humaines (ou sociales) suit une dmarche analogue celle du chercheur
de ptrole. Ce nest pas en forant nimporte o que celui-ci trouvera ce quil cherche. Au contraire,le succs dun programme de recherche ptrolire dpend de la dmarche suivie. Etude de terrain
dabord, forage ensuite.
Cette dmarche ncessite le concours de nombreuses comptences diffrentes. Des gologues
dtermineront les zones gographiques o la probabilit de trouver du ptrole est la plus grande ;
des ingnieurs concevront des techniques de forage appropris que des techniciens mettront en
uvre.
On ne peut attendre du responsable de projet quil matrise dans les dtails toutes les techniques
requises. Son rle spcifique sera de concevoir lensemble du projet et de coordonner les oprations
avec un maximum de cohrence et defficacit. Cest lui quincombera la responsabilit de mener
bien le dispositif global dinvestigation.
Le processus est comparable en matire de recherche en sciences sociales. Il importe avant tout que
le chercheur soit capable de concevoir et de mettre en uvre un dispositif dlucidation du rel,
cest dire, dans son sens le plus large, une mthode de travail. Celle-ci ne se prsentera jamais
comme une simple addition de techniques quil sagit dappliquer telles quelles mais bien comme
une dmarche global de lesprit qui demande tre rinvente pour chaque travail.
Lorsquau cours dun travail de recherche sociale, son auteur rencontre des problmes majeurs qui
compromettent la poursuite du projet, ce nest pratiquement jamais pour des raisons dordre
techniques. De nombreuses techniques peuvent sapprendre assez rapidement et, en tout tat de
cause, il est toujours possible de solliciter la collaboration ou au moins les conseils dun spcialiste.
Lorsquun chercheur professionnel ou dbutant prouve de grandes difficults dans son travail,
cest presque toujours pour des raisons dordre mthodologique.
Lobjet de ce cours est de vous donner une ide globale mais sommaire de la dmarche en matire
de recherche en sciences sociales. Il dbute par un chapitre introductif : Dmocrite et les atomes,
extrait de Isaac Asimov (1972) :Grandes dcouvertes de la Science, Editions France-Empire.Ltude de ce texte permet davoir une vue globale de la dmarche en matire de recherche.
Ensuite, la spcificit des sciences de gestion est prsente (Chapitre 1). Les tapes de la dmarche
seront reprises dans les autres chapitres. Leur comprhension permet de concevoir et de mener
bien un projet de recherche.
Les tapes de la collectes des donnes et leur traitements et analyses ne sont pas abordes pour la
simple raison quil nous est difficile de donner une dmarche standard. Pour chaque travail,
ltudiant doit pouvoir construire son dispositif de collecte des donnes et choisir la mthode
danalyse la mieux approprie. Les logiciels de traitement de donnes pouvant sapprendre
rapidement avec laide dun spcialiste.
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Chapitre introductif : Dmocrite et les atomes1
1Extrait de Isaac Asimov (1972) :Grandes dcouvertes de la Science, Editions France-Empire.
CHAPITRE INTRODUCTIF :DEMOCRITE ET LES ATOMES
On lappelait le philosophe qui-rit , Car ilparaissait toujours se moquer amrement des
folies du genre humain.
Son nom tait Dmocrite, et il tait n vers
470 av. J.-C. dans la ville grecque dAbdre.
(.)
Certes, Dmocrite paraissait avoir des ides
bizarres. Par exemple, il se proccupait de
savoir dans quelle limite on pouvait diviser
une goutte deau. On obtenait des gouttesdeau de plus en plus petites, jusqu ce
quon ne puisse plus les voir, mais y avait-il
une limite absolue ? Parvenait-on rellement
une goutte deau si petite quelle ne pouvait
plus se diviser ?
LIMITE DE LA DIVISION
Leucipe, matre de Dmocrite, avait dj
souponn lexistence dune limite la
division. Dmocrite a continu penser en ce
sens pour annoncer enfin quil taitconvaincu que toutes les substances se
divisaient seulement dans une certaine limite
et pas au-dl. La plus petite fraction, ou
particule, de toute substance tait indivisible.
Il dsigna cette particule infinie du mot grec
atomos, qui signifie indivisible . Il ny
avait rien dautre dans lunivers que des
particules et lespace vide entre elles. ().
La plupart des philosophes grecs se
moquaient de Dmocrite. Comment pouvait-il y avoir quoi que ce soit dindivisible ? Une
particule tenait ou ne tenait pas de place. Si
elle tenait de la place, elle tait divisible en
deux nouvelles particules, dont chacune
tenait moins de place que la particule divise.
Si elle ne prenait pas de place, elle tait
indivisible.
Mais une particule qui ne tiendrait pas de place
ne serait rien, et comment des substances
pourraient-elles se composer de rien ?
Dans un cas comme dans lautre, dcidrent les
philosophes, la notion datomos tait absurde.
Rien dtonnant ds lors ce que les gens se
soient mfis de Dmocrite et se soient demand
sil tait sain desprit. Ils nont mme pas jug
utile de multiplier les copies de ses ouvrages.
Dmocrite a crit plus de soixante-dix livres,
mais aucun na subsist.
Certes, quelques philosophes ont repris plus tard
la notion des particules indivisibles. En 306 av.J.C., prs dun sicle aprs la mort de
Dmocrite, un philosophe nomm Epicure fonda
une cole Athnes. Ctait un matre fort
connu qui avait de nombreux lves. Sa
philosophie a t appel picurisme et a
conserv son influence durant plusieurs sicles.
Une partie de cette doctrine englobait les
thories de Dmocrite sur les particules.
Nanmoins, Epicure lui-mme na pas pu
convaincre ses contemporains, et ses adeptes se
sont trouvs en minorit. Comme pour les livresde Dmocrite, aucun des crits dEpicure na
subsist.
Vers lan 60 av. J.C., un vnement heureux
survint. Un pote romain nomm Lucrce
sintressa la philosophie picurienne. Il
composa un long pome, De natura rerum (De
la nature des choses), o il a dcrit un univers
compos des particules indivisibles de
Dmocrite. Louvrage eut un grand succs, et
lon en a fait assez de copies pour quil ait
survcu lAntiquit et au moyen Age. Ce futuniquement grce ce livre que le monde a
appris en dtail les thories de Dmocrite. ().
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DE GASSENDI A BOYLE
Ainsi, mme les plus pauvres rudits du
dbut de lpoque moderne ont pu connatre
par la lecture les thories de Dmocrite.
Certains savants qui le firent en gardrent une
impression profonde. Pierre Gassendi,
philosophe franais du dix-septime sicle,
devint un picurien confirm. Il a dfendu
avec acharnement la thorie des infimes
particules indivisibles.
Un des lves de Gassendi fut un Anglais
nomm Robert Boyle. En 1660, ce dernier
tudiait lair et se demandait pour quelle
raison il est compressible, de sorte quon peut
le rduire un volume de plus en plus faible.Il supposa que lair tait form particules
infimes, comportant beaucoup despace
autour delles. Comprimer lair reviendrait
pousser plus prs les particules les unes
contres les autres. Il y aurait moins despace
vide entre elles. Ctait logiquement
concevable.
Dautre part, leau est peut-tre faite de
particules plus rapproches les unes des
autres, au point quelles se touchent. Cest
pourquoi, pensait Boyle, on ne peut pas lacomprimer davantage. Cependant, si lon
loigne ses particules les unes des autres,
leau se change en vapeur, substance tnue
semblable lair. Ainsi Boyle devint, lui
aussi, disciple de Dmocrite. Donc, pendant
deux mille ans, il y a eu une chaine
ininterrompue dadeptes de la thorie des
particules indivisibles : Dmocrite, Epicure,
Lucrce, Gassendi et Boyle. Nanmoins la
majorit naccepta jamais leurs opinions :
Quoi ? Une particule quon ne peut pasdiviser en fragments plus petits ? Cest
absurde !
SURVEILLER LE POIDS
Cependant, au dix-huitime sicle, les
chimistes ont commenc revoir la faon
dont se forment les composs chimiques. Ils
savaient que dautres substances entrent en
combinaison pour les former.
Par exemple, le cuivre, loxygne et le
carbone se combinent pour donner un
compos, carbonate de cuivre. Pour la
premire fois, les chimistes ont commenc
toutefois mesurer le poids relatifs dessubstances qui entrent dans les combinaisons
de ce genre.
Vers la fin de ce sicle, un chimiste franais,
Joseph Louis Proust a effectu des mesures
trs dtailles. Il a constat ainsi que chaque
fois que le cuivre, loxygne et le carbonate
forment le carbonate de cuivre, ils se
combinent toujours dans les mmes
proportions en poids. Ces proportions sont de
cinq parties de cuivre et quatre partiesdoxygne pour une partie de carbone. En
dautres termes, lorsque Proust utilisait cinq
onces de cuivre pour former le compos, il
devait employer galement quatre onces
doxygne et une once de carbone.
Ce ntait pas comme sil avait cherch
prparer un gteau, dans lequel il aurait pu
volont forcer un peu sur la dose de farine,
ou diminuer celle du lait. Il ny avait aucune
possibilit de modifier la recette du
carbonate de cuivre. Quoi quil fasse, Proustdevait toujours respecter la proportion de 5, 4
et 1 sans jamais sen carter.
Il rpta lessai sur dautres substances et
finit par constater le mme effet il ny avait
quune seule recette. En 1799, il annona ses
rsultats. Et ils ont servi de base ce que
nous connaissons aujourdhui sous le nom de
loi de Proust ou loi des proportions
dfinies .
Cest singulier ! pensait le chimiste anglais
John Dalton lorsque Proust publia ses
rsultats ; quelle peut en tre la raison ?
Dalton songea lexistence possible des
particules indivisibles. Peut-tre la particule
doxygne pse-t-elle toujours quatre fois et
la particule de cuivre cinq fois plus que celle
de carbone ? Alors, en prparant le carbonate
de cuivre par combinaison dune particule de
cuivre, dune particule doxygne et dune
particule de carbone, on aboutit bien la
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5Pour modifier lgrement la proportion du
carbonate de cuivre, il aurait fallu enlever un
fragment lune des trois particules. Puisque
Proust et dautres chimistes avaient dmontr
quon ne peut pas changer la proportion dune
combinaison, il en rsulte quon ne peut pas
enlever de fragment des particules. Dalton
dcida donc quelles taient indivisibles,
comme lavaient pens Dmocrite.Dalton chercha dautres indices. Il trouva des
composs diffrents qui taient forms des
mmes substances. Toutefois leur proportion
variait dans chacun deux. Par exemple, le gaz
carbonique est compos de carbone et
doxygne dans un rapport de trois parties de
carbone pour huit parties doxygne en poids.
Loxyde de carbone se compose galement de
carbone et doxygne, mais dans un rapport de3 4.
Ctait intressant. Le nombre des units de
poids de carbone tait le mme dans les deux
rapports : trois units dans loxyde de carbone
comme dans le gaz carbonique. Donc il pouvait
y avoir une particule de carbone pesant trois
units dans chaque compos.
En mme temps, les huit units doxygne dans
le gaz carbonique reprsentaient exactement le
double des quatre units correspondant au
rapport de loxyde de carbone. Si une particule
doxygne pse quatre units, pensa Dalton,alors peut-tre loxyde de carbone se compose-
t-il en partie dune particule doxygne et le gaz
carbonique de deux.
Alors Dalton sest peut-tre souvenu du
carbonate de cuivre. Le rapport des poids du
carbone et de loxygne tait de 1 4 (ce qui
quivalait un rapport de 3 12). On pouvait
expliquer ce rapport en supposant que le
carbonate de cuivre se composait dune
particule de carbone et de trois particules
doxygne. On pouvait combiner un systmecomportant toujours des nombres entiers de
particules, et jamais des fractions.
En 1803 Dalton a annonc sa thorie des
particules indivisibles. Cette fois cependant,
lnonc diffrait de ceux quon avait publis
auparavant. La thorie ntait plus une simple
opinion. Pour la confirmer, Dalton avait
derrire lui tout un sicle dexpriences
chimiques.
ATOMES BASES SUR LEXPERIENCE
Le changement introduit dans la science
par Galile se justifiait donc. Le
raisonnement lui seul navait jamais
convaincu le genre humain de lexistence
des particules indivisibles, mais tay par
des rsultats exprimentaux, il la fait
presque immdiatement.
Dalton reconnaissait que sa conception
remontait au philosophe qui-rit , et il a
repris par modestie le mot de Dmocrite
atomos pour marquer ce quil devait
celui-ci. En franais, ce mot est devenu
atome . Ainsi, Dalton avait fini par faire
accepter le thorie atomique.
Il en rsultat une rvolution dans toute la
chimie. En 1900, des physiciens
employrent des mthodes dont personne
navait rv jusqualors pour dcouvrir que
latome se compose de particule encore
plus petites, et ce fut une rvolution
scientifique en physique. Puis, lorsquon
parvint tirer de latome son nergie
interne pour crer lnergie atomique, ce
fut le dbut dune rvolution dans lhistoire
de lhumanit.
QUESTIONS1. Par quoi Dmocrite, Boyle, Daltondbutent leur rflexion ?
2. Sur quoi sappuient Boyle, Daltonpour mener leur rflexion ?
3. Pourquoi Dmocrite, Epicure,Gassendi, Boyle nont pas pu
convaincre leurs concitoyens ?
4. Sur quoi taient fondes leursthories ?
5. Quelle est la mthode de lascience ?
6. Comment une thorie (uneconnaissance) est-elle valide ?
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CHAPITRE 1 : Finalit, difficult et dmarche de la recherche en sciences de Gestion
I. Finalit de la recherche en sciences de GestionLa recherche en gestion se situe, tout dabord, dans le domaine des sciences. En ce sens, le
chercheur est anim par un souci primordial : accumuler des connaissances nouvelles en
dcouvrant des rgularits dans les relations qui unissent les faits qui lentourent et cela, pour mieuxcomprendre les causes comme les consquences de ces faits.
Ensuite, comme son champ de proccupations est, lentreprise ou plus gnralement, les
organisations , le chercheur ne sintresse pas nimporte quelles rgularits mais celles qui
caractrisent lentreprise (ou lorganisation et son environnement. Autrement dit, il tudie :
- les interactions internes (interactions entre les hommes, entre les groupes dhommes, entreles hommes et les autres ressources (financires, matrielles, technologiques,
informationnelles) mises en uvre dans lentreprise) ;
- les interactions externes entre lentreprise et ses marchs (fournisseurs ou clients).Enfin, le domaine des sciences de gestion, est celui des sciences appliques.
En consquence, les connaissances cres par la dmarche scientifique doivent pouvoir tre utiles
aux dcideurs, cest dire aux responsables des entreprises ou des organisations.
Cela exige de la part du chercheur de savoir parfois recevoir des suggestions des non
chercheurs quant lorientation de ses recherches ; en dautres termes, le choix des thmatiques
utiles peut parfois tre influenc par des hommes de terrain , par des professionnels du
monde conomique.
Finalement, le chercheur en gestion, poursuit deux buts :
- comprendre la ralit des organisations et de leur environnement,- facilit la prise de dcision (prvoir des vnements, des ractions, des rsultats, ).
II. Difficults de la recherche en GestionLes difficults de la recherche en Gestion sont, comme dans toutes les sciences humaines, trs
nombreuses.
Elles tiennent dabord la complexit du domaine. Les faits qui caractrisent lentreprise ou
lorganisation sont multidimensionnels. Pour les expliquer, il faut faire appel des connaissances
psychologiques, sociologiques ; juridiques, conomiques, etc.
A cette pluridisciplinarit (ncessaire), il convient dajouter lacceptation de la volatilit des lois
que lon pose. Ce qui est vrai aujourdhui et ici, ne le sera sans doute pas ailleurs ou demain !
Ce qui est considr comme tabli, ne lest que dans un contexte ou dans des circonstances
particulires. La variabilit caractrise tous les comportements : ceux des consommateurs, des
travailleurs, des dirigeants dentreprise.
La mise jour des rgularits , qui est le propre de la dmarche scientifique, relve, donc, en
quelque sorte du pari impossible ! En consquence, dans les sciences humaines les lois ne peuvent
tre que molles , incertaines, relatives et non universelles.
Les difficults de la recherche en Gestion viennent galement du fait que lexprimentation estparticulirement dlicate (elle est coteuse : elle ne peut pas tre ralise en laboratoire do des
cots de dplacement, il faut recourir des chantillons de grande taille).
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III. La dmarche de la recherche en sciences de Gestion
Le chaos originelAu dpart dune recherche ou dun travail, le scnario est pratiquement toujours identique. On sait
vaguement que lon veut tudier tel ou tel problme, par exemple le systme fiscal, le mode de
financement des PME, le fonctionnement dune entreprise, mais on ne voit pas trs bien commentaborder la question. On a le sentiment de sy perdre avant mme de lavoir rellement entam.
Cest un chaos originel qui ne doit pas inquiter, bien au contraire. Il est la marque dun esprit qui
ne salimente pas de simplismes et de certitudes toutes faites. Le problme est den sortir sans trop
tarder.
Les tapes de la dmarcheUne dmarche est une manire de progresser vers un but. Explorer la dmarche scientifique consiste
dcrire les principes fondamentaux mettre en uvre dans tout travail de recherche. Ces principes
fondamentaux sont :
- la ruptureEn sciences sociales, une grande part de nos ides sinspire des apparences immdiates ou de partis
pris. Elles ne sont souvent quillusions et prjugs. Construire sur de telles prmisses revient
construire sur du sable. Do limportance de la rupture qui consiste prcisment rompre avec les
prjugs et les fausses vidences qui nous donnent seulement lillusion de comprendre les choses.
La rupture est donc le premier acte constitutif de la dmarche scientifique ;
- la constructionCette rupture ne peut tre effectu quen se rfrent un systme conceptuel organis, susceptible
dexprimer la logique que le chercheur suppose tre la base du phnomne. Cest grce cette
thorie quil peut construire des propositions explicatives du phnomnes ltude et quil peut
prvoir le plan de recherche installer, les oprations mettre en uvre et les consquences
auxquelles il faut logiquement sattendre au terme de lobservation. Sans cette construction
thorique, il ny aurait pas dexprimentation valable. Il ne peut y avoir, en sciences sociales, de
constatation fructueuse sans construction dun cadre thorique de rfrence. On ne soumet pas
nimporte quelle proposition lpreuve des faits. Les propositions explicatives doivent tre le
produit dun travail rationnel fond sur la logique et sur un systme conceptuel valablement
constitu ;
- la constatationUne proposition na droit au statut scientifique que dans la mesure o elle est susceptible dtrevrifie par des informations sur la ralit concrte. Cette mise lpreuve des faits est appele
constatation ou exprimentation. Elle correspond au troisime acte de la dmarche.
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Le schma suivant permet de mieux comprendre le processus.
Inductions
Dductions
On part des faits, des observations (on a limpression quon les comprend, on a des prjugs, des
ides toutes faites). Pour sortir des ces prjugs, il faut chercher des explications (lois, thories) ou
cadre explicatif du phnomne quon veut tudier partir de la question de dpart. Cest partir de
ce cadre explicatif quon peut construire un dispositif de recherche, un dispositif dexprimentation
(questionnaire, entretien.).
Les trois tapes de la dmarche scientifique ne sont pas indpendants les uns des autres. Ils se
construisent au contraire mutuellement. Ainsi, par exemple, la rupture ne se ralise pas uniquement
en dbut de recherche ; elle sachve dans et par la construction. En revanche, celle-ci ne peut se
passer des tapes initiales principalement consacres la rupture. Tandis que la constatation puise
sa valeur dans la qualit de la construction.
Ce qui implique que lon ne doit jamais sengager dans un travail important sans rflchir
auparavant ce que lon cherche savoir et la manire de sy prendre .
On ne peut choisir une technique dinvestigation que si lon a une ide de la nature des donnes recueillir. Il faudra lire en profondeur peu de textes soigneusement choisis et interprter
judicieusement quelques donnes statistiques particulirement parlantes. Cela implique que lon
commence par bien dfinir son projet.
Faits tablis
par lobservation
Prdictions et
explications
Lois
et thories
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CHAPITRE 2 : LA QUESTION DE DEPARTLa recherche part dun questionnement sur une phnomne mal connu, mal expliqu que nous
voulons mieux comprendre, mieux connatre. Elle part donc dune question quon se pose et dont la
rponse nest pas vidente. Une recherche est par dfinition quelque chose qui se cherche. Elle est
un cheminement vers une meilleure connaissance avec tout ce que cela implique dhsitations,
derrements et dincertitudes.
Ds lors, le chercheur doit sobliger choisir rapidement un premier fil conducteur aussi clair que
possible, sous la forme dune question de dpart, de sorte que son travail puisse dbuter sans
retarder et se structurer avec cohrence. Peu importe si ce point de dpart semble banal et la
rflexion pas encore tout fait mre ; peu importe sil change de perspective en cours de route.
Traduire un projet de recherche sous la forme dune question de dpart nest utile que si cette
question est correctement formule. Cela nest pas toujours facile car une bonne question de dpart
doit remplir plusieurs conditions.
I. Les qualits de clart
Les qualits de clart concernent essentiellement la prcision et la concision de la formulation de laquestion de dpart.
Il existe un moyen fort simple pour sassurer quune question est bien prcise. Il consiste la
formuler devant un petit groupe de personne en se gardant bien de la commenter ou den exposer le
sens. Chaque personne du groupe est ensuite invite expliquer la manire dont elle a compris la
question. La question est prcise si les interprtations convergent et correspondent lintention de
son auteur.
II.Les qualits de faisabilitLes qualits de faisabilit portent essentiellement sur le caractre raliste ou non du travail que la
question laisse entrevoir. Lorsquil formule une question de dpart, un chercheur doit sassurer que
ses connaissances, mais aussi ses ressources en temps, en argent et en moyens logistiques lui
permettront dy apporter des lments de rponse valables. Ce qui est concevable pour un centre de
recherche bien quip et pour des chercheurs aguerris ne lest pas forcment pour celui qui ne
dispose pas de ressources comparables.
III. Les qualits de pertinenceLes qualits de pertinence concernent le registre (descriptif, explicatif, normatif, prdictif) dont
relve la question de dpart.
Le chercheur doit sefforcer dviter les confusions entre les registres et, au cur de son travail de
recherche, aborder le rel en termes danalyse et non de jugement moral. Une bonne question de
dpart cherchera non juger mais comprendre.
EXERCICE DAPPLICATIONFormuler un projet de question de dpart pour votre recherche ;
Tester cette question de dpart auprs de votre entourage, de manire vous assurer quelle est
claire et prcise, et donc comprise de la mme manire par tout le monde ;
Vrifier si elle possde galement les autres qualits ;
Reformulez-l le cas chant et recommencer lensemble de la dmarche.
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CHAPITRE 3 : LEXPLORATIONLorsque la question de dpart est claire, faisable et pertinent, ltape suivante consiste en
lexploration. Lexploration comprend les oprations de lecture, les entretiens exploratoires et
quelques mthodes dexploration complmentaires. Les oprations de lecture visent essentiellement
assurer la qualit du questionnement, tandis que les entretiens et mthodes exploratoires aident le
chercheur avoir un contact avec la ralit vcue par les acteurs sociaux. Elle visent runir une
certaine qualit dinformation et explorer le terrain pour concevoir une problmatique derecherche partir de la question de dpart dj formuler et approprie.
I. La lectureLorsquun chercheur entame un travail, il est peu probable que ce sujet nait jamais t abord par
quelquun dautre auparavant, au moins en partie ou indirectement. On a souvent limpression quil
n y a rien sur le sujet mais cette opinion rsulte gnralement dune mauvaise information. Tout
travail de recherche sinscrit dans un continuum et peut tre situ dans ou par rapport des courants
de pense qui le prcdent et linfluencent. Il est donc normal quun chercheur prenne connaissance
des travaux antrieurs et quil soit explicite sur ce qui rapproche et sur ce qui distingue son
propre travail de ces courants de pense. Cest important de situer clairement son travail par
rapport des cadres conceptuels reconnus. Il serait la fois absurde et prsomptueux de croireque nous pouvons nous passer purement et simplement de ces apports, comme si nous tions en
mesure de tout rinventer par nous-mmes.
Le choix et lorganisation des lecturesRien nest plus dsesprant que de constater, aprs plusieurs semaines de lecture, que lon nest
gure beaucoup plus avanc quau dpart. Pour cela, il faut slectionner trs soigneusement un petit
nombre de lectures et de sorganiser pour en tirer le bnfice maximum. On peut saider de ces
quelques principes.
Premier principe : partir de la question de dpart. Sans doute vous serez amen la modifier au
terme de votre travail exploratoire et vous serez tent de la reformuler dune manire plus
judicieuse mais, pour linstant, cest delle quil faut partir.
Deuxime principe : on sorientera davantage vers les ouvrages qui prsentent une rflexion desynthse ou vers des articles de quelques dizaines de pages. Il est, en effet, prfrable de lire de
manire approfondie et critique quelques textes bien choisis que de lire superficiellement des
milliers de pages.
Troisime principe : rechercher dans la mesure du possible des documents dont les auteurs ne secontentent pas de prsenter des donnes, mais qui comportent des lments danalyse et
dinterprtation. Il sagit de textes qui portent rflchir et qui ne se prsentent pas simplementcomme de fades descriptions prtendument objectives du phnomne tudi.
Quatrime principe : non seulement il ne sert rien de lire dix fois la mme chose mais, en outre,le souci daborder lobjet dtude sous un angle clairant implique que lon puisse confronter des
perspectives diffrentes. Ce souci doit inclure, du moins pour les recherches dun certain niveau, la
prise en compte de textes plus thoriques qui, sans porter forcment de manire directe sur le
phnomne tudi, prsentent des modles danalyse susceptibles dinspirer des hypothses
particulirement intressantes.
Cinquime principe : se mnager intervalles rguliers des plages de temps consacres la
rflexion personnelle et aux changes de vues avec des collgues ou avec des personnesdexprience. Un esprit encombr nest jamais cratif.
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II.Les entretiens exploratoires
Les entretiens exploratoires ont donc pour fonction principale de mettre en lumire des aspects
du phnomne tudi auxquels le chercheur naurait pas pens spontanment lui-mme et
complter ainsi les pistes de travail que ses lectures auront mises en vidence. Pour cette raison,
il est essentiel que lentretien se droule dune manire trs ouverte et trs souple et que le
chercheur vite de poser des questions trop nombreuses et trop prcises.
Le motif en est trs simple : les entretiens exploratoires servent trouver des pistes de rflexion,
des ides et des hypothses de travail, non vrifier des hypothses prtablies. Il sagit
douvrir lesprit, dcouter et non de poser des questions prcises, de dcouvrir de nouvelles
manires de poser le problme et non de tester la validit de nos propres schmas.
Lectures et entretiens exploratoires doivent aider constituer la problmatique de recherche.
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CHAPITRE 4 : LA PROBLEMATIQUEDans le chapitre prcdent, nous avons vu sommairement comment procder lexploration. Il
sagit prsent de prendre du recul ou de la hauteur par rapport aux informations recueillies et de
matriser les ides rassembles afin de prciser les grandes orientations de la recherche et de dfinir
une problmatique en rapport avec la question de dpart.
La problmatique est lapproche ou la perspective thorique quon dcide dadopter pour traiter leproblme pos par la question de dpart. Elle est une manire dinterroger les phnomnes tudis.
Elle constitue une tape charnire de la recherche, entre la rupture et la construction et peut
slaborer souvent en deux temps.
Le premier temps de llaboration dune problmatique consiste faire le point des diffrentesproblmatiques possibles (mises en vidence dans les lectures et les entretiens), lucider leurs
prsupposs, les comparer et rflchir leurs implications mthodologiques. Pour saisir la
porte de son propre choix de problmatique, il faut aussi savoir quelles autres perspectives on
renonce et pourquoi. Le champ des possibilits thoriques dune discipline est trs tendu et aucun
chercheur ne peut le matriser dans son entiret. Mais on peut demander tous ceux qui sengagent
dans un travail danalyse de savoir situer les limites de leur propre approche.
Dans un deuxime temps, on choisit et on construit sa propre problmatique. Choisir, cestadopter un cadre thorique qui convient bien au problme. Construire sa problmatique revient la
question : comment vais-je aborder ce phnomne ? Pour expliciter sa problmatique, on redfinit
le mieux lobjet de sa recherche en prcisant langle sous lequel on dcide de laborder.
La formulation de la question de dpart, lectures et entretiens exploratoires, et enfin explication de
sa problmatique sont en troite interaction. Linteraction qui se manifeste entre ces trois tapes se
retrouve aussi dans les tapes suivantes. Ainsi, en aval, la problmatique narrive rellement terme
quavec la construction du modle danalyse. La construction se distingue de la problmatisation
par son caractre oprationnel car la construction doit servir de guide lobservation.
Pour tayer la notion de problmatique partons du concept dentreprise. Lentreprise est un concept
qui peut tre abord sur plusieurs angles : conomiques (lentreprise est une unit conomique),
social (cellule sociale) dcisionnel (centre de dcision), organisationnel. Chaque angle constitue une
problmatique. Celui qui aborde cette notion doit dabord passer en revue ces diffrents aspects
(angles) prciser leurs soubassements et les outils thoriques qui sont lis. Ensuite, il choisit un
aspect quil juge opportun dtudier, parce non suffisamment aborder, en prcisant lorientation
thorique retenue.
Exemple de Problmatique et de revue de Littrature ; extrait Mintzberg Henri (2000):Lemanager au quotidien, Edition dorganisation, Chaptire 2 : Conceptions contemporaines sur le
travail du cadre.
PROBLEMATIQUEBien que le travail du cadre ait fait lobjet dune abondante littrature, nous continuons den
savoir trs peu sur ce sujet. La plus grande partie de la littrature est dune utilit faible, se
limitant une rptition sans fin des mmes propositions vagues. Un scientifique crivait
rcemment : il faut admettre que la plupart des cadres grent et agissent la fois, mais aussi
que lorsquils sont en train dagir ils ne sont pas en train de grer (Goodman, 1968,p.31).
Des descriptions comme celle-ci des gnralits abstraites dconnectes des donnes solidesde la recherche empirique persistent malgr des avertissements rpts indiquant que lon ne
sait presque rien de ce que font les cadres. Presque tous ceux qui ont essay de passer en revue
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une partie de la littrature ou dtudier srieusement le travail des cadres ont insist sur ce
problme. Dans lintroduction sa clbre tude sur la rpartition du temps de travail de neuf
cadres sudois, Sunne Carlson crivait, en 1951, cette littrature sattache plus des
spculations gnrales sur les fonctions des cadres qu une description de la ralit de leur
travail (p.23). Cette remarque fut reprise plus tard, en 1959, par Mason Haire : la plus
grande partie de lattention est encore consacre au comportement et aux motivations des
ouvriers et des employs dans lorganisation il ny a pratiquement aucune tude consacre ce que lencadrement fait en ralit (p.15). Et lorsque Campbell et ses collaborateurs publient
en 1970 leur importante tude sur lefficacit des cadres, ils trouvent une situation inchang
dans ce domaine : Le problme, bien sr, rside dans notre incapacit actuelle dfinir et
mesurer les exigences des tches dencadrement. La description du travail des cadres est
encore un niveau totalement primitif. Le domaine du comportement des cadres demeure pour
lessentiel une masse indiffrencie (1970, p.470).
Une autre difficult mme quand la recherche est fonde sur des tudes systmatiques est sa
tendance ce focaliser sur un lment du travail du cadre lexclusion de tous les autres. En
particulier, on a une littrature abondante sur deux aspects du travail du cadre : cest un leader et
un dcideur ; mais ces deux aspects sont rarement intgrs dans une perspective cohrentedensemble. La tche laquelle je mattelle dans ce livre est dextraire linformation utile de la
littrature existante et de la confronter mes propres dcouvertes pour aboutir une description
densemble du travail du cadre.
REVUE DE LITTERATURE
Lcole classiqueLa premire conception du travail du cadre, celle qui domine en fait, nous vient dauteurs que
lon rangera ici dans lcole classique . Ils dcrivent ce travail laide dun ensemble de
fonctions composites. Le pre de cette cole, Henri Fayol, prsenta en 1916 les cinq fonctions
de base de lencadrement : planifier, organiser, coordonner, commander et contrler. Son travail
fut repris dans les annes trente par Luther Gulick qui donna aux cadres un de leurs premiers
acronymes : POPDCORB.
POPDCORB est form des initiales des diffrentes activits : Planification (dfinir dans les
grandes lignes les choses faire et la mthode suivre pour les faire), Organisation,
Personnel, Direction, Coordination, Rapport, Budget. ()
Quelle est lutilit de POPDCORB ? Pour sen rendre compte rapidement, il suffit dobserver un
cadre au travail, puis dessayer de relier les activits quil a aux fonctions de POPDCORB.
Considrons par exemple un directeur gnral qui est approch par un groupe de salaris
mcontents menaant de dmissionner si lun des vice-prsidents de lentreprise nest paslicenci, et qui doit passer les quelques jours qui suivent rassembler des informations et
trouver une solution ce problme. Ou bien considrons un cadre qui remet la mdaille du
travail un de ses subordonns qui prend sa retraite. Ou encore un PDG qui transmet lun de
ses subordonns une information utile quil a obtenue lors dune runion de conseil
dadministration.
Lesquelles de ces activits peut-on ranger dans la catgorie planification , dans les catgories
organisation , coordination , contrle ? De fait, quelles relations existent entre ces
quatre mots et les activits du cadre ? Ces quatre mots, en fait, ne dcrivent pas le travail que
fait le cadre. Ils qualifient certains objectifs vagues de son travail : ces mots ne sont que des
moyens pour indiquer ce quil nous faut expliquer (Braybrooke, 1963,p.537). De fait, les
critiques les plus lucides que nous possdons sur POPDCORB nous viennent des auteurs qui onttudi de faon systmatique le travail des cadres : Sunne Carlson, R.T. Davis.
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Ainsi, les crits de lcole classique sont de peu dutilit. Ils ont servi mettre des noms sur des
zones dignorance, et indiquer chaque cadre ce quil devrait faire (mais pas ce quil fait en
ralit). Et lcole classique a, pendant trop longtemps, bloqu la recherche dune
comprhension plus profonde du travail du cadre.
Lcole du Grand Homme
Le lecteur qui cherche approfondir cette voie peut tudier les livres consacrs aux grandsleaders de lhistoire de lhistoire industriels, militaires et politiques. Il y apprendra des choses
sur llite gouvernante : celle qui dirige et contrle les rseaux de relations tablies des
activits organises les plus importantes de notre socits (Collins, More et Unwalla, 1964,
p.3).
Ce volumineux corps de littrature peut tre divis en deux parties. La premire analyse les
cadres au sein de groupes : leurs familles, leur ducation, leurs affiliations sociales, leur
carrires, leur personnalit. Comme exemples particulirement intressants on peut citer le
cadre dirigeant de la grande entreprise de Michael Newcomer (1955) et Le patron de Roy
Lewis et Rosemary Stwart (1958). Ces livres nous donnent de nombreuses vues trs utiles, le
premier sur les cadres dirigeants amricains, le second sur leurs collgues britanniques. Quel
que soit lintrt de cette littrature, elle nous servira peu ici car elle nest pas centre sur letravail de ces cadres. .
Ces livres sont plutt centrs sur les styles et les stratgies de ces hommes, ils construisent leurs
descriptions sur des anecdotes. Souvent ils ne permettent pas la gnralisation. Elle est riche
danecdotes, mais pauvre en thorie gnrale.
LEcole de lentrepreneurDans cette partie, en nous tournant vers les crits des conomistes.
.
Joseph Schumpeter, lconomiste le plus connu pour ses considrations sur lentrepreneur et son
rle crucial dans linnovation, crivait : chacun est entrepreneur lorsquil met en uvre de
nouvelles combinaisons, et uniquement ce moment ; il perd ce caractre ds que lentreprise
est construite (cit par Collins et Moore, 1970, p.10). Dautres conomistes ont trait du
comportement face au risque, et cette question a suscit divers dbats dans la littrature.
Lentrepreneur est-il simplement linnovateur ? est-il celui qui apporte le capital ? ou est-il un
intermdiaire qui sait marier largent et les ides ? Il ne parat pas y avoir dans ce domaine
aucune conclusion dfinitive, non seulement parce que les thoriciens ne parviennent pas se
mettre daccord sur la terminologie, mais aussi parce ce quaucun de ces auteurs ne parat se
soucier de la signification oprationnelle de la fonction dentrepreneur.
On peut en conclure que lcole de lentrepreneur contribue notre comprhension en montrant
que linnovation est une composante importante du travail du cadre.
LEcole de la thorie de la dcisionCest Herbert Simon que cette cole de pense doit son origine et beaucoup de son
dveloppement. En sappuyant sur les premiers travaux de Chester Barnard (1938), Simon a
publi Administrative Behavior en 1947. Puis il rassembla un groupe de chercheur autour de
lui, au Carnegie Institute of Technology (qui sappelle actuellement lUniversit Carnegie
Mellon). Les plus importants de ces chercheurs furent James G. March, avec qui il publia
Organisations en 1958, et Richard M. Cyert qui publia avec March en 1963 louvrage
intitul A behavioral theory of the firm , louvrage peut tre le plus important jamais publi
sur le thme de la prise de dcision.
A la base, ces chercheurs ont considrs la prise de dcision, non pas comme un choix rationnel
entre alternatives connues la manire des conomistes, mais dans des termes qui, daprs eux,rendaient compte de faon plus exacte des limites relles des cadres. Ils soutiennent que les
cadres nont ni systmes dobjectifs explicites, ni fonction prfre ; quune des tapes les plus
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importantes et les plus ngliges de la prise de dcision est la dfinition du problme ; que les
alternatives et leurs consquences sont rarement connues avec clart ; et pas de faon
maximiser des objectifs (dans leur langage les cadres dcident en utilisant non pas le principe
de maximisation mais le principe de satisfaction ). Comme leur monde est complexe, les
cadres ont gnralement un comportement ractif, cherchant avant tout viter lincertitude. De
plus, lorganisation est soumise une varit de pressions quexerce sur elle une coalition de
groupes qui ont des objectifs diffrents. Maximiser est tout simplement impossible ; le cadre nepeut pas faire mieux dviter le conflit. Il y parvient par lattention squentielle aux
objectifs .
Ce qui prcde, comme la recherche de Martin cite plus haut, suggre que le travail du cadre
est pour lessentiel non programm. Aux niveaux les plus bas de lorganisation, le travail est la
fois routinier et programm : un stimulus familier (une commande client par exemple)
correspond une rponse organise et prvisible. Le travail dencadrement est plus complexe : le
stimulus est souvent ambigu et la rponse consiste essentiellement ttonner la recherche
dune solution. Il n y a pas de mthode claire et nette pour traiter le problme parce quon ne
la jamais rencontr auparavant, ou encore parce que sa nature et sa structure prcise sont floues
et complexes, ou encore parce quil a une importance telle quil justifie un traitement faon (Simon, 1965, p.59).
Pour conclure, les chercheurs de Carnegie ont dcrit le cadre comme un dcideur non
programm qui programme le travail des autres. Ils ont aussi mis lide intressante selon
laquelle le travail du cadre, qui peut au premier coup dil apparatre comme totalement non
structur, est peut tre en fait susceptible dtre dcrit avec prcision ; cest dire, quil peut
tre programm.
Une autre contribution, trs intressante, de cette cole de pense est celle de Charles Lindblom,
conomiste de Yale. Sa vision du cadre comme dcideur se combine celle du groupe de
Carnegie. Lindblom commence par attaquer lapproche de lconomiste, rationnelle et
synoptique . selon lui, cette approche ne marche pas parce quelle ne reconnat pas
lincapacit de lhomme traiter les problmes complexes, le manque habituel dinformation, le
cot de lanalyse, le problme de la programmation dans le temps, et les difficults quil y a
formuler des objectifs ralistes.
.
La pense de Lindblom, bien quelle ne soit pas corrobore par des rsultats de recherches
systmatiques, nen est pas moins importante comme source de rflexion. Cest particulirement
vrai quand on considre la popularit toujours forte de lhomme rationnel dveloppe par les
conomistes. Cette conception du cade rationnel qui maximise le profit est ancre dans lesprit
de nombreux technocrates. il est clair que ceci doit changer, et quil faut marier la conception du
cadre entrepreneur celle du cadre spcialiste pour que puisse merger une image raliste du
dcideur.
LEcole du commandement efficaceLes deux coles de penses que nous venons de dcrire se focalisent sur le cadre considrs comme
dcideur lexclusion de toute autre activit dencadrement ; les trois coles de pense que nous
allons abordons maintenant se focalisent, elles, sur le commandement lexclusion des autres
activits.
Les chercheurs de lcole du commandement efficace (beaucoup dentre eux sont des psychologues
sociaux) centrent moins leur approche sur le travail dencadrement que sur lhomme qui fait le
travail. Ils cherchent dcouvrir quels traits de personnalit ou quel style de direction amnent un
cadre tre efficace.
..Pour conclure, lcole du commandement efficace nen est qu ses dbuts. Elle ne fait que
commercer nous apporter des lments sur les facteurs defficacit ; mais lattention excessive
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quelle a accorde deux styles de direction (lautocrate et le participatif) ainsi quun certain
manque de comprhension des comportements interpersonnels des leaders, ont ralenti les progrs de
cette approche.
LEcole du pouvoir du leaderDiffrente de celle que nous venons de voir, lcole du pouvoir du leader se focalise sur le pouvoir
et linfluence, sur les prrogatives manipulatrices du leader. Les chercheurs de cette cole posent laquestion suivante : quel point le leader contrle-t-il son environnement ? pour rpondre, ils
tudient la capacit du leader utiliser son pouvoir pour obtenir les rponses dsires de la part de
ses subordonns et de ses pairs. Quelques-unes de ces recherches se focalisent sur la position et sur
la latitude daction quelle permet celui qui la dtient ; dautre sont centrs sur des individus
particuliers et sur la faon dont ils utilisent cette latitude daction.
Il existe aussi une thorie gnrale intressante sur le pouvoir du leader : la plus grande partie en est
expose dans un article intitul Influence, leadership et contrle crit par Darwin Cartwright en
1965 dans le Trait des organisations de James G. March. Larticle expose les moyens par
lesquels une personne (O) influence une autre personne (P). le thme rcurrent est celui de la
classification des diffrents types de pouvoir. Celle de French et Raven, cite par Cartwight,apparat comme plus complte
LEcole du comportement du leaderLEcole de lactivit du leaderCette dernire cole de pense sur le travail du cadre est situe loppos des recherches de
lcole classique ; il sagit ici de recherches inductives dans lesquelles les activits
professionnelles des cadres sont analyses de faon systmatique ; des conclusions ne sont tires
que lorsquelles sont corrobores par des donnes. De plus, la diffrence des recherches de
lcole du comportement du cadre , ces tudes sont trs lies les unes des autres. Les
mthodes utilises sont trs similaires et dans la plupart des cas, des efforts explicites sont faits
pour tenter dincorporer les dcouvertes des recherches prcdentes dans le dveloppement des
conclusions nouvelles.
La mthode de recherche la plus utilise dans le cadre de cette cole de pense a t la
mthode de lagenda : les cadres notaient eux-mmes divers aspects de leurs activits sur une
grille prtablie (dure, localisation, participants). Les deux tudes les plus remarquables de ce
type ont t celle de Sunne Carlson (portant sur 9 directeurs gnraux sudoid) et celle de
Rosemary Stewart (concernant 160 cadres moyens britaniques) : cette dernires est certainement
la plus importante et la plus utile ; un exemplaire de la grille de Carlson est prsent la page
35. Un autre groupe de recherche a utilis deux techniques dobservation : lobservation dun
chantillon dactivits, dans laquelle le chercheur note quelle est la nature de lactivit du cadre
des moments alatoires ; et lobservation structure, dans laquelle les donnes de lagenda(ainsi parfois que dautres donnes) sont notes par le chercheur et non par le cadre. Ces autres
mthodes aboutissent aux mmes conclusions que celles des recherches utilisant la mthode de
lagenda.
Le tableau 1 de la page 36 fournit une liste de recherches effectues dans le cadre de cette cole
de pense.
En discutant des rsultats de ces recherches, nous devons, la base, oprer une distinction entre
le contenu du travail du cadre et les caractristiques de ce travail. () Si on opre cette
distinction, il devient clair ds le dpart que les tudes ralises par cette cole de pense dite
de lactivit du cadre nous apportent des conclusions significatives sur les caractristiques
du travail du cadre, mais presque rien sur le contenu de ce travail.
Nombre de chercheurs, et parmi eux Sunne Carlson, ont tent de recueillir des donnes sur lecontenu du travail. Leurs grilles de recueil dinformations comportaient des sections o les
cadres notaient leurs activits en suivant une grille prtablie comportant des catgories comme
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obtenir une information et rguler . les conclusions obtenues par ces moyens sont en fait
si maigre que Rosemary Stewart ngligea volontairement de noter le contenu du travail
lorsquelle conduisit sa grande tude fonde sur la mthode de lagenda. ()
La difficult parat rsider dans la mthode elle-mme : elle exige que le chercheur dfinisse,
avant mme de mener sa recherche, un nombre limit de catgories dactivits que les cadres
pourront cocher ().
Lobservation de cinq directeurs gnraux que jai moi-mme ralise (Mintzberg, 1968), entreaussi dans cette catgorie de lcole de lactivit du cadre. Jai cependant utilis une mthode
diffrente : mon objectif tait en fait de dcrire le contenu du travail, ce que les tudes par
agenda navaient pas pu faire. Jai donc eu recours lobservation structure en dveloppant
mes catgories non a priori, mais pendant et aprs lobservation : aprs chaque vnement que
jai pu observer, jai essay den dcrire la raison , lobjectif (en plus dautres donnes
comme le lieu, la dure, lidentit des participants) dans les termes qui semblaient tre les plus
appropries au moment mme de lobservation
Quatre aspects du travail dencadrementNous avons pass en revue huit coles de pense sur le travail du cadre. Elles sont fondes sur
une varit dapproches et de mthodes de recherche et parviennent une varit de conclusions. Laplupart dentre elles nous disent peu de choses du travail dencadrement, mais en les considrant
dans leur ensemble, on peut parvenir une description raisonnable.
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CHAPITRE 5 : La construction dun modle danalyse
Le modle danalyse est compos de concepts et dhypothses qui sont troitement articuls pour
former un cadre danalyse cohrent. Sans ce effort de cohrence, la recherche sparpillerait dans
diverses directions.
La qualit du travail exploratoire a, dans ce sens, une importance capitale. Si les diffrents textes
tudis ont fait lobjet de lectures approfondies et de synthses soignes, si celles-ci ont t
confrontes les unes aux autres avec attention, si les entretiens et les observations exploratoires ont
t exploits comme il se doit, alors le chercheur dispose normalement de nombreuses notes de
travail qui laideront considrablement dans llaboration du modle danalyse. Au fur et mesure
de lavancement du travail exploratoire, des concepts cls et des hypothses majeures sortiront
progressivement du lot, ainsi que les liens quil serait intressant dtablir entre eux.
I. La construction de concepts (conceptualisation)La conceptualisation nest pas une simple dfinition ou convention terminologique. Elle constitue
un construction abstraite qui vise rendre compte du rel. A cet effet, elle ne retient pas toujours les
aspects de la ralit concerne mais seulement ce qui en exprime lessentiel du point de vue duchercheur.
Construire un concept consiste dabord dterminer les dimensions de cet concept ; ensuite
prciser les indicateurs grce auxquels les dimensions pourront tre mesures. Les indicateurs sont
des manifestations objectivement reprables et mesurables des dimensions du concept.
II. La construction des hypothsesLhypothse se prsente comme une rponse provisoire la question de dpart de la recherche
(progressivement revue et corrige au cours du travail exploratoire et de llaboration de la
problmatique). Pour connatre la valeur de cette rponse, il est ncessaire de la confronter des
donnes dobservation. Il faut, en quelques sortes, la soumettre lpreuve des faits.
Dans sa formulation, lhypothse doit donc tre exprime sous une forme observable. Cela signifie
quelle doit indiquer, directement ou indirectement, le type dobservation rassembler ainsi que les
relations constater entre ces observations afin de vrifier dans quelle mesure cette hypothse est
confirme ou infirme par les faits. Cette phase de confrontation de lhypothse et de donnes
dobservation se nomme vrification empirique. Cest par la construction des concepts et de leurs
indicateurs que lhypothse devient observable.
On distingue deux types de variables : les variables explicatives ou indpendantes et
lesvariables dpendantes ou expliques.
Les variables indpendantes sont les variables dont on veut mesurer les effets : ce sont donc des
variables que lon observe (= variables explicative). Elles peuvent tre assimiles aux causes du
phnomne que lon veut tudier.
Si lon prend, par exemple, lhypothse selon laquelle le risque daccidents de la circulation (Y)
augmente avec la consommation dalcool (X), la variable indpendante est la consommation
dalcool.
Les variables dpendantes sont les effets attendus, compte tenu des causes. Elles se situent
habituellement laboutissement du processus causal et sont toujours dfinies dans lhypothse (=
variable explique). Dans lexemple prcdent, le risque daccident de la circulation correspond la
variable dpendante.Le risque daccident de la circulation (var. DEP = explique) augmente avec la consommation (var.
INDEP = explicative).
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Lorsquune tude comporte plus dune hypothse, plusieurs variables dpendantes peuvent tre
ainsi dfinies. Elles peuvent tre indpendantes les unes des autres, ou constituer un ordre
hirarchique dans lequel certaines variables dpendantes peuvent avoir un effet sur dautres
variables dpendantes.
Ainsi, les 2 hypothses suivantes :
H1 : la consommation dalcool abaisse le degr de vigilance.Consommation dalcool = var. indp ; degr de vigilance = var. dp. intermdiaire
H2 : le risque daccident de la circulation augment lorsque le degr de vigilance diminue.
Le risque daccid de la cir. = var. principale = var. dp ; degr de vigilance = var. dp.
intermdiaire.
Ces hypothses permettent de dfinir un rseau de relations entre la consommation dalcool et le
risque daccidents. Dans ce rseau, le risque daccident est toujours laboutissement du processus (=
var. explique = var. dp.). Cependant, lajout du degr de vigilance comme mcanisme
intermdiaire apporte des prcisions sur la faon dont le processus se droule.
Dans cet exemple, on peut distinguer 2 types de variables dpendantes. La variable dpendanteprincipale (le risque daccidents) est le phnomne que lon veut expliquer dans la recherche. La
variable dpendante intermdiaire (le degr de vigilance) reprsente le mcanisme qui prcise la
relation entre la variable indpendante et la variable dpendante principale.
III. Hypothses et modlesConstruire une hypothse ne consiste pas simplement imaginer une relation entre deux variables.
Il est rare dailleurs que lon sen tienne une hypothse. Cest, le plus souvent, un corps
dhypothses que lon construit. Ces hypothses doivent donc sarticuler les unes aux autres et
sintgrer logiquement la problmatique. Il est donc difficile de parler dhypothse sans traiter en
mme temps du modle impliqu par la problmatique.
Problmatique, modle, concepts et hypothses sont indissociables. Le modle est un systme
dhypothses logiquement articules entre elles.
Quil soit complexe et ambitieux, ou limit des relations simples entre quelques concepts, la
construction du modle doit rpondre deux conditions : constituer un systme de relations et tre
rationnellement ou logiquement construit.
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CHAPITRE 6 : LobservationLobservation comprend lensemble des oprations par lesquelles le modle danalyse est soumis
lpreuve des faits, confront des donnes observables.
Pour mener bien ce travail , il faut pouvoir rpondre aux trois questions suivantes :
- observer quoi ?- sur qui ?- comment ?
I. Observer quoi ? La dfinition des donnes pertinentes.Pour saider dans cette tche, il dispose de guides, les hypothses, et de points de repre, les
indicateurs. Le meilleur et le seul- moyen de dfinir aussi justement que possible les donnes
pertinentes utiles au travail empirique consiste donc laborer un modle danalyse aussi clair,
prcis et explicite que possible.
II. Observer sur qui ? Le champ danalyse et la slection des units dobservation
2.1. Le champ danalysePour viter les malentendus et travailler sans se disperser, il est ncessaire de prciser explicitement
les limites du champ danalyse, mme si elles semblent videntes : priode de temps prise en
compte, zone gographique considre, organisations et acteurs sur lesquels laccent sera mis, etc.
2.2. LchantillonLes informations utiles ne peuvent souvent tre obtenues quauprs des lments qui constituent
lensemble. La totalit de ces lments, ou des units constitutives de lensemble considr est
appele population ; ce terme pouvant dsigner aussi bien un ensemble de personnes,
dorganisations ou dobjets de quelque nature que ce soit.
Lorsquil a circonscrit son champ danalyse, trois possibilits soffrent au chercheur : il peut soit
recueillir des donnes et faire finalement porter ses analyses sur la totalit de la population couverte
par le champ, soit se limiter un chantillon reprsentatif de cette population, soit ntudier quecertaines composantes trs typiques, bien que non strictement reprsentatives, de cette population.
Le choix est en fait assez thorique car, le plus souvent, lune des solutions simpose naturellement,
compte tenu des objectifs de la recherche.
La deuxime possibilit ( tudier un chantillon reprsentatif de la population) simpose lorsque
deux conditions sont rassembles :
- lorsque la population est trs importante et quil faut rcolter beaucoup de donnes pourchaque individu ou unit ;
- lorsque, sur les points qui intressent le chercheur, il est important de recueillir une imageglobalement conforme celle qui serait obtenue en interrogeant lensemble de la population,
bref lorsque se pose un problme de reprsentativit.
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La troisime possibilit : tudier des composantes non strictement reprsentatives mais
caractristiques de la population.
Cette formule est sans doute la plus courante. Lorsquun chercheur souhaite par exemple tudier la
manire diffrencie dont plusieurs journaux rendent compte de lactualit conomique, la
meilleure solution consiste analyser dans le dtail quelque articles de ces diffrents journaux qui
portent sur les mmes vnements, de manire procder des comparaisons significatives.
Vouloir tudier tous les articles publis est impossible et vouloir constituer un chantillonreprsentatif de lensemble des articles de chaque journal na gure de sens car les critres de
reprsentativit serait forcment trs partiels et arbitraires.
III. Observer comment ? Les instruments dobservation et la collecte des donnes3.1. Llaboration des instruments dobservationCette phase du travail dobservation consiste construire linstrument capable de recueillir ou de
produire linformation prescrite par les indicateurs. Cette opration ne se prsente pas de la mme
faon selon quil sagit dune observation directe ou indirecte.
a. Lobservation directe et lobservation indirecte
Lobservation directe est celle o le chercheur procde directement lui-mme au recueil desinformations, sans sadresser aux sujets concerns. Elle fait directement appel son sens de
lobservation. Par exemple, pour comparer le public du thtre celui du cinma, un chercheur peut
compter les gens la sortie, observer sils sont jeunes ou vieux, comment ils sont habills, etc. Dans
ce cas lobservation porte sur tous les indicateurs pertinents prvus. Elle a comme support un guide
dobservation qui est construit partir de ces indicateurs et qui dsigne les comportements
observer ; mais le chercheur enregistre directement les informations. Les sujets observs
ninterviennent pas dans la production de linformation recherche. Celle-ci est manifeste et
prleve directement sur eux par lobservateur.
Dans le cas de lobservation indirecte, le chercheur sadresse au sujet pour obtenir linformation
recherche. En rpondant aux questions, le sujet intervient dans la production de linformation.
Celle-ci nest pas prleve directement et est donc moins objective. En fait, il y a ici deux
intermdiaires entre linformation recherche et linformation obtenue : le sujet qui le chercheur
demande de rpondre et linstrument constitu des questions poser. Ce sont l deux sources de
dformations et derreurs quil faudra contrler pour que linformation apporte ne soit pas fausse,
volontairement ou non.
Dans lobservation indirecte, linstrument dobservation est soit un questionnaire soit un guide
dinterview. Lun et lautre ont comme fonction de produire ou denregistrer les informations
requises par les hypothses et prescrites par les indicateurs.
3.2. Les trois oprations de lobservation
a. Concevoir linstrument dobservationLa premire opration de la phase dobservation consiste concevoir un instrument capables de
produire toutes les informations adquates et ncessaires afin de tester les hypothses. Cet
instrument sera souvent, mais pas obligatoirement, un questionnaire ou un guide dinterview. Dans
ces deux cas, leur mise au point requiert parfois une pr-enqute en complment de la phase
exploratoire.
Pour que cet instrument soit capable de produire linformation adquate, il devra contenir des
questions portant sur chacun des indicateurs retenus pralablement et atteindre le meilleur degr de
prcision dans la formulation des questions.
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b. Tester linstrument dobservationLexigence de prcision varie selon quil sagit dun questionnaire ou dun guide dinterview. Le
guide dinterview est le support de lentretien. Mme lorsquil est trs structur, il reste dans les
mains de lenquteur. Par contre, le questionnaire est souvent destin la personne interroge ; il est
lu et rempli par elle. Il est donc important que les questions soient claires et prcises, cest dire :
formules de telle sorte que tous les sujets interrogs les interprtent de la mme manire.
Dans un questionnaire adress des jeunes et portant sur la pratique du sport, se trouvait la question
suivante : Vos parents font ils du sport ? Oui ou non . Cette question parat simple et claire et,
pourtant, elle est mal formule et conduit des rponses inutilisables. Tout dabord, le mot
parents est imprcis. Sagit il du pre et de la mre ou dun ensemble familial plus large ?
Ensuite, que rpondre si seulement lun des deux fait du sport ? les uns rpondront oui , pensant
quil suffit que lun des deux soit sportif ; les autres diront non , estimant que la question porte
sur les deux la fois. Ainsi, pour dsigner le mme tat des choses, on obtiendra des oui chez
les uns et des non chez les autres. Ces rponses taient inutilisables et toute la partie de la
recherche qui tournait autour de cette question a d tre abandonne.
Outre lexigence de prcision, il faut encore que le sujet interrog soit en tat de donner la rponse,
quil la connaisse et ne soit pas contraint ou enclin la cacher.
Pour sassurer que les questions seront bien comprises et que les rponses correspondent bien aux
informations recherches, il est impratif de tester les questions. Cette opration consiste les
soumettre un petit nombre de sujets appartenant aux diffrentes catgories dindividus composant
lchantillon.
c. La collecte des donnesLa troisime opration de la phase dobservation est la collecte des donnes. Celle-ci constitue la
mise en uvre de linstrument dobservation. Cette opration consiste recueillir ou rassembler
concrtement les informations prescrites auprs des personnes ou units dobservation retenues
dans lchantillon.
On procdera par observation directe lorsque linformation recherche est directement disponible.
Le guide dobservation est alors destin lobservateur lui-mme, non un ventuel rpondant. Ds
lors, sa rdaction ne rpond pas des contraintes aussi prcises que celles du questionnaire par
exemple.
Par contre, lobservation indirecte, par questionnaire ou guide dinterview, doit vaincre la rsistance
naturelle ou linertie des individus. Il ne suffit pas de concevoir un bon instrument, il faut encore lemettre en uvre de manire obtenir un taux de rponses suffisant pour que lanalyse soit valable.
Le choix des mthodes de recueil des donnes influence les rsultats du travail : les mthodes de
recueil et les mthodes danalyse des donnes sont le plus souvent complmentaires et doivent donc
tre choisies ensemble en fonction des objectifs et des hypothses de travail. Si les enqutes par
questionnaire saccompagnent de mthodes danalyse quantitative, les mthodes dentretien
appellent habituellement des mthodes danalyse de contenu qui sont souvent qualitatives. Bref, il
importe que le chercheur ait une vision globale de son travail et ne prvoie les modalits daucune
de ces tapes sans sinterroger constamment sur ses implications ultrieures.
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IV. Des mthodes de recueil des informationsa. Lenqute par questionnaireLenqute par questionnaire vise la vrification dhypothse thoriques et lexamen de corrlation
que ces hypothses suggrent. Compte tenu du grand nombre de personnes gnralement
interroges et du traitement quantitatif des informations qui devra suivre, les rponses la plupart
des questions sont normalement pr-codes de sorte que les rpondants doivent obligatoirement
choisir leurs rponses parmi celles qui leur sont formellement proposes.
VariantesLe questionnaire est dit d administration indirecte lorsquun enquteur le complte lui-mme
partir des rponses qui lui sont fournies par le rpondant. Il est dit d administration directe
lorsque le rpondant le remplit lui-mme. Le questionnaire lui est alors remis en main propre par un
enquteur charg de donner toutes les explications utiles.
b. LentretienSous leurs diffrentes formes, les mthodes dentretien se distinguent par la mise en uvre des
processus fondamentaux de communication et dinteraction humaine. Correctement mis en valeur,
ces processus permettent au chercheur de retirer de ses entretiens des informations et des lmentsde rflexion trs riches et nuancs. A linverses de lenqute par questionnaire, les mthodes
dentretien se caractrisent par un contact direct entre le chercheur et ses interlocuteurs et par une
faible directivit de sa part.
Ainsi, sinstaure en principe un vritable change au cours duquel linterlocuteur du chercheur
exprime ses perceptions dun vnement ou dune situation, ses interprtations ou ses expriences,
tandis que, par ses questions ouvertes et ses ractions, le chercheur facilite cette expression, vite
quelle sloigne des objectifs de la recherche et permet daccder un degr maximum
dauthenticit et de profondeur.
Par rapport lentretien exploratoire, le chercheur concentrera davantage lchange autour de ses
hypothses de travail sans exclure pour autant les dveloppements parallles susceptibles de les
nuancer ou de les corriger. En outre, et cest la diffrence essentielle, le contenu de lentretien fera
lobjet dune analyse de contenu systmatique, destine tester les hypothses de travail.
VariantesLentretien semi-directif, ou semi-dirig, est certainement le plus utilis. Il est semi-directif en cesens quil nest ni entirement ouvert, ni canalis par un grand nombre de questions prcises.
Gnralement, le chercheur dispose dune srie de questions-guides, relativement ouvertes, propos
desquels il est impratif quil reoive une information de la part de linterview. Mais il ne posera
pas forcment toutes les questions dans lordre o il les a notes et sous la formulation prvue.Autant que possible, il laissera venir linterview afin que celui-ci puisse parler ouvertement,
dans les mots quil souhaite et dans lordre qui lui convient. Le chercheur sefforcera simplement de
recentrer lentretien sur les objectifs chaque fois quil sen carte et de poser les questions auxquels
linterview ne vient pas par lui-mme, au moment le plus appropri et de manire aussi naturelle
que possible.
Lentretien centr a pour objectif danalyser limpact dun vnement ou dune exprience prcise
sur ceux qui y ont assist ou particip ; do son nom. Lenquteur ne dispose pas de questions
prtablies, comme dans lenqute par questionnaire, mais bien dune liste de points prcis relatifs
au thme tudi. Au cours de lentretien, il abordera imprativement ces points mais sous une forme
quil est libre de choisir chaud selon le droulement de la conversation. Dans ce cadrerelativement souple, il posera nanmoins de nombreuses questions son interlocuteur.
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c. Le recueil des donnes secondaires et donnes documentairesIl est courant que le travail dun chercheur ncessite des donnes macro-sociales que seuls des
organismes officiels tels que les instituts nationaux de statistiques sont en mesure de rcolter. Si ces
organismes existent, cest dailleurs principalement pour offrir aux responsables et aux chercheurs
des donnes nombreuses et fiables quils ne pourraient recueillir par eux-mmes. Dautre part, les
bibliothques, les archives et les banques de donnes, sous toutes leurs formes, abondent de
donnes qui nattendent que lattention des chercheurs. Il est ds lors inutile de consacrerdimportantes ressources rcolter ce qui existe dj par ailleurs, quitte ce que la prsentation des
donnes ne convienne pas directement et doive subir quelques adaptations.
VariantesElles sont nombreuses et dpendent de la nature des sources et des informations considres. Du
point de vue de la source, il peut sagir aussi bien de document manuscrits, imprims ou audio-
visuels, officiels ou prive, personnels ou manant dun organisme, contenant des colonnes de
chiffres ou de textes. Les deux variantes couramment utilises dans la recherche sociale sont : le
recueil de donnes statistiques dune part et le recueil de documents de forme littraire manant
dinstitutions et dorganismes publics et privs (lois, statuts et rglements, procs-verbaux,
publications) ou de particuliers (rcits, mmoires, correspondance ) dautre part.TABLE DES MATIERES
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Chap 0 : Etude de texte : Dmocrite et les atomes
Chap 1 : Finalit, difficults et dmarche de la recherche en science de Gestion
Finalit de la recherche en science de gestion Difficult de la recherche en science de gestion Dmarche de la recherche en science de gestion
Chap 2 : la question de dpart
Les qualits de clart Les qualits de faisabilit Les qualits de pertinence
Chap 3 : Lexploration
La lecture Les entretiens exploratoires
Chap 4 : la problmatique
Chap 5 : La construction dun modle danalyse
La construction de concept La construction des hypothses Hypothses et modles
Chap 6 : Lobservation
Observer quoi ? la question de donnes pertinentes Observer sur qui ? le champ danalyse et la slection des units dobservation Observer comment ? les instruments dobservation et la collectes des donnes Des mthodes de recueil des informations