métabolisme du fer - physiologie et pathologie

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Métabolisme du fer : physiologie et pathologie C Beaumont R Girot Résumé. Le fer est présent et nécessaire dans toutes les cellules de l’organisme. Les échanges entre les différents compartiments du fer sont très actifs ; en revanche, les échanges avec le milieu extérieur sont faibles, de l’ordre du mg/j. Le Fe 3+ est véhiculé dans le plasma associé à la transferrine et internalisé dans les cellules par interaction avec des récepteurs membranaires spécifiques. La majorité du fer plasmatique est utilisé pour la synthèse d’hémoglobine dans les précurseurs érythropoïétiques de la moelle osseuse, le fer de l’hémoglobine étant recyclé après dégradation des globules rouges sénescents par les macrophages et catabolisme de l’hème par l’hème oxygénase. Le Fe 2+ traverse les membranes grâce à des transporteurs comme « natural resistance associated macrophage protein » (Nramp)2/DMT1 au pôle apical des entérocytes ou la ferroportine au pôle basolatéral. Un certain nombre de protéines régule ces flux de fer à travers les membranes, comme HFE qui interagit avec les récepteurs à la transferrine au niveau des cellules de la crypte dans le duodénum et régule l’absorption intestinale du fer, ou la frataxine qui joue un rôle dans le passage du fer mitochondrial. Enfin, des protéines avec une activité ferroxydase cuivre-dépendante comme l’héphaestine ou la céruloplasmine, sont impliquées dans le passage du fer du milieu intracellulaire vers le plasma. Le fer intracellulaire se répartit entre le compartiment de réserve, associé à la ferritine, et la mitochondrie où il participe à la synthèse de l’hème. Le niveau d’expression des protéines de transport et de stockage du fer dépend de régulations post- transcriptionnelles fer-dépendantes. La carence en fer affecte un pourcentage important de la population mondiale et conduit, dans les formes les plus sévères, à une anémie microcytaire. Les causes les plus fréquentes de carence en fer sont l’insuffisance d’apports nutritionnels dans l’enfance. Chez l’adulte, elle est plus généralement en rapport avec des hémorragies chroniques. Les principales causes de surcharge en fer sont l’hémochromatose génétique et les surcharges martiales post-transfusionnelles. Une mutation (C282Y) du gène HFE est retrouvée à l’état homozygote chez 70 à 100 % des malades atteints d’hémochromatose génétique. Une seconde mutation (H63D) a été identifiée, mais son rôle dans le développement de la maladie est discuté. Les surcharges martiales sont responsables d’un syndrome clinique d’intoxication martiale pouvant conduire au décès des patients. Le traitement de cette complication repose sur la saignée (hémochromatose génétique) ou sur l’administration de déféroxamine (malades polytransfusés). En pratique courante, l’exploration du métabolisme du fer fait appel à la mesure du fer sérique, du coefficient de saturation de la transferrine et de la ferritine sérique. © 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : fer, cuivre, nutrition, carence, anémie, surcharge, hémochromatose, ferritine, Nramp, HFE, frataxine, hème. Introduction Le fer est indispensable à toute forme de vie, essentiellement pour assurer le transport d’oxygène ou catalyser des réactions de transfert d’électrons, de fixation d’azote ou de synthèse d’acide désoxyribonucléique (ADN). En solution, il peut exister sous deux états d’oxydation, Fe(II) et Fe(III). Au pH physiologique, Fe(II) s’oxyde facilement en Fe(III) qui précipite sous forme d’hydroxyde ferrique. De plus, le Fe(II), lorsqu’il est à l’état libre, catalyse par la réaction dite « de Fenton » la production de formes radicalaires de l’oxygène, très réactives et particulièrement dangereuses pour la Carole Beaumont : Directeur de recherche, institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) U409, faculté Xavier Bichat, 16, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France. Robert Girot : Professeur d’hématologie, chef de service, service d’hématologie biologique, hôpital Tenon, 4, rue de la Chine, 75970 Paris cedex 20, France. cellule. De ce fait, les organismes vivants ont développé un grand nombre de protéines permettant de véhiculer le fer dans les fluides biologiques ou à travers les membranes cellulaires, et pour le mettre en réserve sous une forme facilement disponible mais non toxique. L’organisme d’un être humain adulte contient environ 4 g de fer, qui se répartissent essentiellement entre l’hémoglobine (2,5 g), la ferritine (1 g) et les protéines à fer héminique (cytochrome, myoglobine) ou non héminique (ribonucléotide réductase). Le fer est continuellement recyclé entre ces différents compartiments de l’organisme (fig 1) et un même atome de fer peut participer à plusieurs cycles d’érythropoïèse. Les pertes en fer proviennent principalement de la desquamation des cellules intestinales et des cellules de la peau, et comme il n’existe aucun mécanisme actif d’excrétion du fer, seul le contrôle de l’absorption intestinale du fer permet d’éviter une surcharge de l’organisme. Encyclopédie Médico-Chirurgicale 13-000-P-20 13-000-P-20 Toute référence à cet article doit porter la mention : Beaumont C et Girot R. Métabolisme du fer : physiologie et pathologie. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Hématologie, 13-000-P-20, 2000, 14 p.

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Page 1: Métabolisme Du Fer - Physiologie Et Pathologie

Métabolisme du fer : physiologieet pathologie

C BeaumontR Girot

Résumé. – Le fer est présent et nécessaire dans toutes les cellules de l’organisme. Les échanges entre lesdifférents compartiments du fer sont très actifs ; en revanche, les échanges avec le milieu extérieur sontfaibles, de l’ordre du mg/j.Le Fe3+ est véhiculé dans le plasma associé à la transferrine et internalisé dans les cellules par interaction avecdes récepteurs membranaires spécifiques. La majorité du fer plasmatique est utilisé pour la synthèsed’hémoglobine dans les précurseurs érythropoïétiques de la moelle osseuse, le fer de l’hémoglobine étantrecyclé après dégradation des globules rouges sénescents par les macrophages et catabolisme de l’hème parl’hème oxygénase. Le Fe2+ traverse les membranes grâce à des transporteurs comme « natural resistanceassociated macrophage protein » (Nramp)2/DMT1 au pôle apical des entérocytes ou la ferroportine au pôlebasolatéral. Un certain nombre de protéines régule ces flux de fer à travers les membranes, comme HFE quiinteragit avec les récepteurs à la transferrine au niveau des cellules de la crypte dans le duodénum et régulel’absorption intestinale du fer, ou la frataxine qui joue un rôle dans le passage du fer mitochondrial. Enfin, desprotéines avec une activité ferroxydase cuivre-dépendante comme l’héphaestine ou la céruloplasmine, sontimpliquées dans le passage du fer du milieu intracellulaire vers le plasma. Le fer intracellulaire se répartit entrele compartiment de réserve, associé à la ferritine, et la mitochondrie où il participe à la synthèse de l’hème. Leniveau d’expression des protéines de transport et de stockage du fer dépend de régulations post-transcriptionnelles fer-dépendantes.La carence en fer affecte un pourcentage important de la population mondiale et conduit, dans les formes lesplus sévères, à une anémie microcytaire. Les causes les plus fréquentes de carence en fer sont l’insuffisanced’apports nutritionnels dans l’enfance. Chez l’adulte, elle est plus généralement en rapport avec deshémorragies chroniques. Les principales causes de surcharge en fer sont l’hémochromatose génétique et lessurcharges martiales post-transfusionnelles. Une mutation (C282Y) du gène HFE est retrouvée à l’étathomozygote chez 70 à 100 % des malades atteints d’hémochromatose génétique. Une seconde mutation(H63D) a été identifiée, mais son rôle dans le développement de la maladie est discuté. Les surchargesmartiales sont responsables d’un syndrome clinique d’intoxication martiale pouvant conduire au décès despatients. Le traitement de cette complication repose sur la saignée (hémochromatose génétique) ou surl’administration de déféroxamine (malades polytransfusés). En pratique courante, l’exploration dumétabolisme du fer fait appel à la mesure du fer sérique, du coefficient de saturation de la transferrine et de laferritine sérique.© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : fer, cuivre, nutrition, carence, anémie, surcharge, hémochromatose, ferritine, Nramp, HFE,frataxine, hème.

IntroductionLe fer est indispensable à toute forme de vie, essentiellement pourassurer le transport d’oxygène ou catalyser des réactions de transfertd’électrons, de fixation d’azote ou de synthèse d’acidedésoxyribonucléique (ADN). En solution, il peut exister sous deuxétats d’oxydation, Fe(II) et Fe(III). Au pH physiologique, Fe(II)s’oxyde facilement en Fe(III) qui précipite sous forme d’hydroxydeferrique. De plus, le Fe(II), lorsqu’il est à l’état libre, catalyse par laréaction dite « de Fenton » la production de formes radicalaires del’oxygène, très réactives et particulièrement dangereuses pour la

Carole Beaumont : Directeur de recherche, institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm)U409, faculté Xavier Bichat, 16, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France.Robert Girot : Professeur d’hématologie, chef de service, service d’hématologie biologique, hôpital Tenon,4, rue de la Chine, 75970 Paris cedex 20, France.

cellule. De ce fait, les organismes vivants ont développé un grandnombre de protéines permettant de véhiculer le fer dans les fluidesbiologiques ou à travers les membranes cellulaires, et pour le mettreen réserve sous une forme facilement disponible mais non toxique.

L’organisme d’un être humain adulte contient environ 4 g de fer,qui se répartissent essentiellement entre l’hémoglobine (2,5 g), laferritine (1 g) et les protéines à fer héminique (cytochrome,myoglobine) ou non héminique (ribonucléotide réductase). Le ferest continuellement recyclé entre ces différents compartiments del’organisme (fig 1) et un même atome de fer peut participer àplusieurs cycles d’érythropoïèse. Les pertes en fer proviennentprincipalement de la desquamation des cellules intestinales et descellules de la peau, et comme il n’existe aucun mécanisme actifd’excrétion du fer, seul le contrôle de l’absorption intestinale du ferpermet d’éviter une surcharge de l’organisme.

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Toute référence à cet article doit porter la mention : Beaumont C et Girot R. Métabolisme du fer : physiologie et pathologie. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Hématologie,13-000-P-20, 2000, 14 p.

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Sources alimentaires et besoins en fer

SOURCES ALIMENTAIRES

L’origine du fer de l’organisme dépend exclusivement des apportsalimentaires. Il dépend aussi (cf infra) de la biodisponibilité du ferpour son absorption digestive, qui varie selon sa forme moléculaireet les nutriments qui l’accompagnent. Le tableau I donne la teneuren fer de quelques aliments usuels [46]. Ainsi, plus que la quantité defer présent dans les apports alimentaires, c’est sa qualité de ferhéminique ou non héminique et les facteurs extrinsèques régulantson absorption qui déterminent la couverture des besoins en fer.

APPORTS ET BESOINS EN FER

Les apports nutritionnels conseillés en fer ont été estimés, poursatisfaire la couverture des besoins de la grande majorité de lapopulation française, à 16 mg/j pour les femmes contre 8 mg/j pourles hommes [23].Plusieurs enquêtes internationales ont établi qu’à travers le monde,l’apport de fer pour 1 000 calories ingérées est stable, de 4 à 12 mg/j.Dans cette fourchette d’apports, les quantités les moins importantessont susceptibles d’entraîner des carences en fer. Une étudeépidémiologique réalisée en 1988 a montré, dans la région parisienne(Val-de-Marne), que les apports médians en fer variaient de 9 à10 mg/j chez les femmes, alors qu’ils étaient de 12 à 15 mg/j chezles hommes, et que les apports chez les femmes en âge de procréerétaient inférieurs aux apports recommandés en fer, soit 16 mg/j [58].Cette même étude a chiffré la prévalence de la déplétion totale desréserves en fer à 23 % chez ces femmes.

¶ Femme enceinte et femme allaitanteChez la femme enceinte, il existe un accroissement des besoins liés àl’augmentation de la masse érythrocytaire maternelle (environ

500 mg), la constitution des réserves du fœtus (environ 300 mg) etdu placenta (environ 25 mg). Il est donc nécessaire que la femmedispose en début de grossesse de réserves en fer importantes pouréviter la constitution d’une carence. Cette éventuelle carence affecteplus la mère que l’enfant, puisque les taux d’hémoglobine et lesferritinémies des nouveau-nés des mères carencées ou non carencéessont similaires [20]. Cette priorité accordée à l’enfant est maintenueau cours de l’allaitement, comme l’atteste la faible variabilité de laconcentration en fer du lait en fonction des réserves martiales de lamère [17]. On estime à 20 mg les apports quotidiens nécessaires en ferde la femme enceinte et de la femme allaitante [23]. Ces besoins sontmajorés à 30 mg en cas de carence martiale avérée.

¶ Nourrisson [5]

Le nourrisson né à terme a un stock en fer d’environ 300 mg. Sesbesoins sont couverts par l’allaitement au sein ou artificiel pendantles 8 premières semaines de vie, en raison du ralentissement del’érythropoïèse de cette période par rapport à l’érythropoïèse fœtale.Il n’y a donc pas d’indication à supplémenter en fer l’enfant pendantles 2 premiers mois de vie. À la fin du deuxième mois de vie, enréponse à la chute du taux d’hémoglobine, l’érythropoïèse s’accroîtet majore les besoins en fer. Les besoins quotidiens sont donc del’ordre de 1 mg, cette valeur pouvant être supérieure chez les enfantsnourris au lait de vache, qui n’apporte que 0,4 à 0,5 mg/j dans laration de lait de l’enfant de cet âge, dont simplement 10 à 35 % sontabsorbés. Il importe donc de fournir une supplémentation en fer dèsl’âge de 3 à 4 mois, 10 à 15 mg/j permettant un apport réel en fer de1 mg/j. La supplémentation du lait par des sels ferreux avecl’objectif d’apporter 0,7 mg/100 mL est la méthode la plus simple etla plus efficace. Chez les prématurés, elle est effectuée dès l’âge de2 mois. Les enfants nourris au sein ou par des laits artificiels nonenrichis en fer doivent recevoir 2 à 2,5 mg/kg/j, sans dépasser15 mg/j.

¶ EnfantDes apports en fer de 10 mg/j sont recommandés chez les enfantsde 12 mois jusqu’à l’adolescence. Il n’est pas rare que ces apportsfassent défaut, notamment dans les pays en voie de développementoù le fer est surtout fourni par les céréales, sans apport conjoint deviande, volaille, poisson.

¶ AdolescentAu pic de la croissance pubertaire, la prise de poids annuellemoyenne est de 10 kg et l’augmentation du taux d’hémoglobine de

Compartiments de stockage

HépatocytesMacrophages

Érythrocytes(2 500 mg)

Moelle érythroïde(20 mg)

Autres tissus(300 mg)

Plasma(4 mg)

1 000 mg

Fer alimentaire

1-2 mg/j

1 Répartition du fer dans l’organisme humain. Le fer des érythrocytes est recycléaprès dégradation des globules rouges sénescents par les macrophages et véhiculé par leplasma entre les différents compartiments de l’organisme. Les quantités de fer dans l’or-ganisme sont reproduites d’après Beard et al 1996 [7]. (Figure reproduite avecla permission de R et D Systems Inc, 4-10 The Quadrant, Abingdon, Grande-Bretagne.)

Tableau I. – Teneur en fer (en mg) pour 100 g de produits comestiblescourants.

Aliments Teneur en fer (mg/100 g)

Pomme 0,3Orange 0,4Brocoli 1,1Lentilles 8,6Épinards 3,1Tomate 0,6Maïs (corn flakes) 1,4Nouilles 2,1Pain 0,7Chocolat à croquer 1,4Vin 0,3 à 5Beurre 0,2Œuf (1 œuf de 48 g) 1,3Lait de vache pasteurisé 0,04Lait maternel 0,05Camembert 0,5Côte de bœuf 3,1Foie de bœuf 6,5Foie de veau 15Foie de porc 19Carpe 1,0Hareng 1,1Maquereau 1,0

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0,5 à 1 g/dL. Un apport supplémentaire de 350 mg de fer environdoit être fourni pendant cette période, particulièrement chez la filleoù des apports quotidiens de l’ordre de 15 mg/j sont nécessaires ;10 mg/j chez le garçon sont suffisants.

Fer dans l’organisme

TRANSPORT PLASMATIQUE

¶ Fer lié à la transferrine

Les échanges de fer entre les sites d’absorption (duodénum), destockage (foie et rate) et d’utilisation (moelle osseuse) se font parl’intermédiaire de la transferrine, protéine plasmatique chargée devéhiculer le fer dans l’organisme. Dans certaines situationspathologiques (surcharge en fer, hémolyse) ou dans lesatransferrinémies congénitales, on peut voir apparaître du fercirculant sous une autre forme.La transferrine lie deux atomes de Fe(III) avec une haute affinité(kDa = 10–23 mol/L) et cette fixation nécessite la présence d’un ioncarbonate ou bicarbonate. La transferrine est une molécule bilobée,chaque lobe pouvant fixer un atome de fer. Les deux lobesprésentent une forte homologie interne et il est probable que le gènede la transferrine a évolué par duplication d’un gène ancestral. Dansles conditions normales, la saturation de la transferrine est de l’ordrede 30 % et quatre formes moléculaires distinctes sont présentes dansle plasma, correspondant à l’apotransferrine, à la transferrine ayantfixé deux atomes de fer et aux deux formes monoferriques avecseulement un atome de fer par molécule, à l’extrémité C-terminaleou à l’extrémité N-terminale.

La transferrine est synthétisée et sécrétée principalement par le foie,et dans une moindre mesure par les cellules de Sertoli, lesoligodendrocytes, le plexus choroïde et les cellules neuronales.L’expression du gène de la transferrine est régulée au cours dudéveloppement et de façon tissu-spécifique, principalement auniveau transcriptionnel. De nombreux éléments activateurs ourépresseurs ont été identifiés dans la région promotrice et dans lesrégions distales, en amont du gène de la transferrine. L’expressiondu gène de la transferrine est aussi activée par la carence en fer, parun mécanisme qui n’est pas encore connu.

La transferrine appartient à une famille de protéines de transportdu fer qui présentent de fortes homologies de séquence, à savoirl’ovotransferrine, présente dans le blanc de poulet, lamélanotransferrine (anciennement connue sous le nom d’antigènetumoral p97) et la lactoferrine. Cette dernière est une glycoprotéineaux multiples fonctions, dont la principale est de fixer le fer avecune affinité supérieure à celle de la transferrine et de limiter lacroissance bactérienne. La lactoferrine est présente dans le lait, leslarmes et dans les granules des polynucléaires neutrophiles.

¶ Fer non lié à la transferrine (NTBI)

On appelle généralement ainsi une forme de fer(II) faiblementassociée aux protéines plasmatiques et qui se rencontre dans desconditions pathologiques particulières. En effet, dans les fortessurcharges en fer, qu’elles soient d’origine héréditaire ou acquise,du fer peut être présent dans le plasma en excès de la capacité defixation de la transferrine. Ce fer peut pénétrer dans les cellules,particulièrement dans le foie, par diffusion passive facilitée etcontribuer à la formation de la surcharge à l’origine de dommagescellulaires potentiels importants. Ce fer non lié à la transferrine n’estpas utilisé par les précurseurs érythropoïétiques, puisque les sourishpx, qui n’ont pour ainsi dire pas de transferrine, du fait d’uneanomalie d’épissage du gène de la transferrine, ont une anémiemicrocytaire hypochrome malgré une surcharge en fer desparenchymes [65]. De même, dans les cas rares d’hypotransferrinémiegénétique chez l’homme, les malades ont un déficit del’érythropoïèse.

FER INTRACELLULAIRE

¶ Internalisation des complexes transferrine-récepteurs

Le fer lié à la transferrine plasmatique va pénétrer dans les différentstissus par l’intermédiaire de récepteurs membranaires présents à lasurface de la plupart des cellules et en particulier à la surface descellules en phase de croissance exponentielle et à la surface desprécurseurs érythropoïétiques de la moelle osseuse. Ces récepteurssont présents à la membrane sous forme de dimères de deux sous-unités identiques de poids moléculaire 95 kDa, liées par deux pontsdisulfures. Le domaine cytoplasmique d’une sous-unité correspondaux 61 premiers acides aminés, suivi d’un seul domainetransmembranaire de 28 acides aminés et d’un domaineextracellulaire de 671 acides aminés. Le nombre de récepteursprésents à la surface des cellules varie entre 104 et 106, suivant letype cellulaire, l’état de prolifération ou de différenciation, et suivantle statut en fer [66]. Ainsi, le nombre de récepteurs augmenteprogressivement au cours de la maturation des précurseursérythropoïétiques dans la moelle osseuse, pour atteindre unmaximum de l’ordre de 106 par cellule au stade érythroblaste, avantde diminuer autour de 100 000 dans le réticulocyte [55]. Lesérythrocytes matures ne contiennent pratiquement plus derécepteurs à la transferrine. La régulation transcriptionnelle du gènedu récepteur à la transferrine a été relativement peu étudiée, àl’exception de la régulation par les agents mitogènes et parl’hypoxie, la régulation par l’hypoxie pouvant avoir des implicationsdans le contrôle de la régulation de l’absorption intestinale du fer(cf infra). En revanche, le fer régule le nombre de récepteurs présentsà la surface des cellules par un mécanisme post-transcriptionnel quimodule la stabilité de l’acide ribonucléique messager (ARNm) durécepteur à la transferrine par l’intermédiaire du système ironresponsive element (IRE)/iron regulatory protein (IRP) (cf infra).Il existe une forme soluble du récepteur à la transferrine (sRTf) quiest une forme tronquée du récepteur, générée par coupureprotéolytique du domaine extracellulaire entre Arg-100 et Leu-101.Les précurseurs érythropoïétiques de la moelle osseuse constituentla source principale de sRTf. Un état ferriprive peut augmenter lenombre des récepteurs à la transferrine à la surface desérythroblastes, par stabilisation de l’ARNm par le système IRE/IRP.D’autre part, une stimulation de l’érythropoïèse augmente le nombredes cellules engagées dans la voie de différenciationérythropoïétique. Ces deux conditions entraînent une augmentationdu nombre des sRTf, et de ce fait le dosage des sRTf est proposé enclinique comme un moyen d’évaluer le fer « fonctionnel » dansl’organisme.La fixation de la transferrine sur son récepteur entraîne la formationd’une vésicule d’endocytose et l’internalisation du complexe [69]. Lamaturation de l’endosome s’accompagne d’une acidificationprogressive permettant la dissociation du fer de sa liaison à latransferrine et sa réduction à l’état de Fe2+. À pH acide, la transfer-rine reste fixée sur son récepteur et se trouve recyclée vers le plasmapar fusion de l’endosome avec la membrane plasmique. L’ion Fe2+

ainsi libéré va ensuite traverser la membrane de l’endosome etpasser dans le cytoplasme (fig 2).

¶ Transfert endosome/cytoplasme

Plusieurs études récentes suggèrent que les protéines de la famille« natural resistance associated macrophage protein » (Nramp), quiconstituent une nouvelle classe de transporteurs ou échangeurs decations divalents, pourraient transporter le fer de l’endosome versle cytoplasme.La protéine Nramp2, aussi appelée DMT1, est un transporteurmembranaire des cations divalents et plus probablement du Fe2+.Cette protéine possède 561 acides aminés et 12 domainestransmembranaires. Elle existe sous deux isoformes, codées par deuxARNm issus du même gène mais différant par leur extrémité 3’ noncodante, par suite de l’utilisation de deux sites de polyadénylationalternatifs. L’un des deux ARNm possède un motif de régulationtraductionnelle par le fer et code une protéine exprimée à la

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membrane du pôle apical des cellules polarisées. Cette protéinesemble jouer un rôle dans l’absorption intestinale du fer (cf infra).Le deuxième ARNm code une protéine présente à la fois à lamembrane des cellules et dans la membrane de l’endosome précoceet qui se colocalise avec les récepteurs à la transferrine [33]. Dans cecas, la protéine Nramp2/DMT1 permet le passage du fer del’intérieur de l’endosome vers le cytoplasme. Ce transport est facilitépar un cotransport des ions H+ aussi présents dans l’endosome suiteà son acidification. Une mutation dans le quatrième domainetransmembranaire de Nramp2/DMT1, qui affecte les deuxisoformes, est responsable, chez la souris mk/mk, d’une anémiemicrocytaire hypochrome par suite d’un défaut d’absorptionintestinale du fer et d’un défaut d’utilisation du fer lié à latransferrine par les précurseurs érythropoïétiques [27].La protéine Nramp1, autre membre de cette famille de transporteursde cations divalents, est exprimée essentiellement dans lesphagocytes et joue un rôle dans la défense antimicrobienne. Le gènecodant la protéine Nramp1 est associé au locus Bcg, qui exerce chezla souris un contrôle génétique sur la résistance aux infections parles pathogènes à développement intracellulaire tels queMycobacterium avium, Salmonella ou Cryptococcus [14]. Dans les lignéespures de souris, il existe deux formes alléliques différentes,correspondant à un polymorphisme protéique au niveau de l’acideaminé 169 (G169D) et à une perte de fonction. Chez les sourispossédant l’allèle BcgR , les macrophages ont une activitébactériostatique importante, limitant la multiplication intracellulairedes pathogènes. À l’inverse, les macrophages des souris ayantl’allèle BcgS vont permettre la prolifération microbienne, ledéveloppement de l’infection dépendant alors de la virulence del’agent pathogène et de la réponse immunitaire de l’hôte [71].Après la phagocytose d’un agent infectieux par le macrophage,Nramp1 est recruté à la membrane du phagosome [34], au cours d’unprocessus de maturation qui permet l’acquisition d’activitésbactéricides dues à la présence d’agents cytotoxiques ou àl’élimination d’éléments nutritifs essentiels à la multiplication despathogènes. La fonction exacte de Nramp1 n’est pas encore connue,mais son rôle dans le contrôle de la production du monoxyded’azote (NO) par les macrophages ou dans l’élimination des ions ferou manganèse vers l’extérieur du phagosome a été évoqué, les deuxeffets n’étant pas mutuellement exclusifs, particulièrement du faitdes liens étroits qui existent entre le NO et le métabolisme du fer [22].Des arguments indirects tirés de la comparaison avec d’autresprotéines de la famille, et en particulier avec Nramp2/DMT1, avecqui elle présente 78 % d’identité au niveau de la séquence en acides

aminés, suggèrent que Nramp1 pourrait contribuer à transporter lefer en dehors du phagosome, hors d’atteinte de l’agent infectieux.Il n’existe pas de mutation du gène Nramp1 identifiée chez l’hommeet le rôle de cette protéine dans les défenses antimicrobiennes n’estpas encore connu.

¶ Pool de fer libreL’existence dans le cytoplasme des cellules d’un pool de fer libre,faiblement lié à des composés de bas poids moléculaire, facilementaccessible à des agents chélateurs, a fait l’objet de nombreusescontroverses. Cependant, par sa capacité à catalyser la productionde formes réactives de l’oxygène et par son rôle dans la régulationpost-transcriptionnelle de l’expression d’un certain nombre de gènes(cf infra), il est permis de croire à la réalité de ce fer libre. De plus,une méthode de dosage sur cellules vivantes a récemment étédéveloppée qui a permis de confirmer son existence [24].Ce pool de fer libre est l’objet de nombreux échanges entre lescompartiments cellulaires. Il est alimenté d’une part par le fer quipénètre dans les cellules par la voie de l’endocytose des complexesfer-transferrine, et d’autre part par le fer libéré de la dégradation del’hème ou de la ferritine ou encore par le fer mobilisé par le radicalsuperoxyde à partir du noyau ferrique de la molécule de ferritine.Ce fer peut être recyclé vers le plasma ou être redistribué entre lesdifférents compartiments subcellulaires, comme la mitochondrie oule compartiment de stockage associé à la ferritine.À côté de son rôle bénéfique, le fer peut aussi représenter un dangerréel pour la cellule puisqu’il est capable, en participant à des chaînesde transfert d’électrons, de générer des radicaux libres [49]. C’est cequi se produit au cours de la réaction de Fenton qui, à partir de feret d’eau oxygénée, est à l’origine de la production du radicalhydroxyle : H2O2 + Fe2 + → OH– + OH· + Fe3 +.Les radicaux libres sont des espèces chimiquement très réactivespossédant un électron célibataire qui leur confère une grandeinstabilité énergétique. Ils sont toxiques pour la cellule et ont unrôle carcinogène [52]. Ainsi, la capacité du fer à produire des radicauxoxygénés le rend potentiellement délétère pour un grand nombrede composants cellulaires qui sont directement à proximité de sonlieu de production. Le fer peut être à l’origine de la peroxydationdes acides gras polyinsaturés constituant les membranes cellulaires.Ce phénomène touche aussi bien les lipides de la membraneplasmique que ceux des organelles (mitochondrie, lysosomes,microsomes). Après peroxydation, les acides gras sont dégradés,induisant la disruption des membranes et le mauvaisfonctionnement des composants cellulaires.

Fe3+-Transferrine-Fe3+

Fe2+

Récepteurs à la transferrine

Apo-Tf

endosome

Apo-IRP [4Fe-4S]-IRP

Nramp

Répression de la traduction des ARNm ferritine

Stabilisation des ARNm du récepteur à la transferrineDégradation des ARNm

du récepteur à la transferrine

Traduction des ARNm ferritine

IREribosomes

Hétéropolymères de ferritine

Pool de ferlibre

2 Rôle du fer dans la régulation post-transcriptionelle dela synthèse de ferritine et des récepteurs à la transferrine. Lefer, qui pénètre dans les cellules par endocytose du complexede la transferrine et de son récepteur, est transporté dans lecytoplasme par les protéines de la famille Nramp avantd’être capté par les polymères de ferritine, plus ou moins ra-pidement suivant leur composition en sous-unités H et L.Une augmentation, même transitoire, du fer libre entraîneun changement de conformation de la molécule « iron regu-latory protein » (IRP), par formation d’un noyau fer-soufreet une perte de l’affinité pour l’« iron responsive element »(IRE). Il en résulte une synthèse de ferritine et une dégra-dation des ARNm du récepteur à la transferrine.(Reproduit de Hématologie, n° 2, volume 5, Beaumont C,« Aspects génétiques et moléculaires du métabolisme dufer ». 1999 : 122-132 avec la permission de John LibbeyEurotext Limited, 127 avenue de la République, Mon-trouge, France.)

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Page 5: Métabolisme Du Fer - Physiologie Et Pathologie

Le fer peut être aussi la cause de lésions sur l’ADN. Il a été en effetmontré que les radicaux libres peuvent réagir avec l’ADN et ainsiprovoquer des cassures de la chaîne qui peuvent être double ousimple brin, ou des modifications de certaines bases de l’ADN.

¶ Fer mitochondrial

Le fer doit être adressé dans la mitochondrie pour permettre d’unepart la synthèse de l’hème et d’autre part la constitution des centresfer-soufre nécessaires à l’activité d’un certain nombre d’enzymesmitochondriales ou cytosoliques. Les trois dernières enzymes de lachaîne de biosynthèse de l’hème sont localisées dans lamitochondrie, en association avec la membrane interne, et cetarrangement a permis de proposer l’existence d’un complexemultienzymatique permettant le transfert de substrat d’une enzymeà l’autre à travers les membranes de la mitochondrie. La dernièreétape, qui réalise l’insertion de l’ion Fe2+ dans la molécule de proto-porphyrine, est catalysée par la ferrochélatase. Cette enzyme, qui adonc deux substrats, le fer et la protoporphyrine, est ancrée dans lamembrane interne de la mitochondrie et possède un centre 2Fe-2S àson site actif. Les mécanismes qui régulent l’adressage du fer vers lamitochondrie, sa réduction de Fe3+ en Fe2+ et son passage à traversla membrane externe puis la membrane interne, sont encoreinconnus. Certains auteurs ont proposé un passage direct du Fe2+

de l’endosome vers la mitochondrie, sans transition par lecytoplasme. Ce mécanisme serait particulièrement important dansles cellules de la lignée rouge où l’activité de synthèse d’hème esttrès élevée [55]. D’autres études suggèrent un transport du Fe3+ suivid’une réduction grâce à des équivalents réducteurs apportés par lachaîne respiratoire. Les dépôts de fer observés dans lesmitochondries dans certains cas d’anémies sidéroblastiques acquisesseraient la conséquence d’un défaut de la chaîne respiratoire quiempêcherait la réduction du fer et son incorporation dans laprotoporphyrine IX. En revanche, dans les formes héréditairesd’anémie sidéroblastique, un déficit de synthèse de protoporphyrineIX dû à la présence de mutations dans le gène codant pour l’acideaminolévulinique synthétase érythroïde (eALA-S), est à l’origined’une accumulation de fer dans la mitochondrie [15]. Ces dépôts defer ne sont pas associés à la molécule de ferritine, et seul l’ajustementdu taux de formation de la protoporphyrine et du flux de fermitochondrial permet d’éviter que le fer ne s’accumule dans lamitochondrie. Des dépôts de fer dans la mitochondrie s’observentaussi dans des tissus non érythropoïétiques chez les malades atteintsde l’ataxie de Friedreich. L’identification du gène responsable decette pathologie a permis de découvrir une nouvelle protéine quipourrait jouer un rôle dans le contrôle du flux de fer mitochondrial :la frataxine. L’expansion d’un triplet GAA dans le premier introndu gène codant pour la frataxine est responsable de l’ataxie deFriedreich, une maladie autosomique récessive s’accompagnantd’une ataxie progressive et d’une cardiomyopathie. Des mutants delevure déficitaires dans yfh1p, l’homologue de la frataxine chezSaccharomyces cerevisiae, présentent une accumulation en fer dans lamitochondrie dix fois supérieure à des souches sauvages [6]. Chezles malades atteints d’ataxie de Friedreich, des dépôts de fer ont étéobservés dans les mitochondries des cardiomyocytes. Chezl’homme, comme chez la levure, il existe un stress oxydatif de lamitochondrie, mis en évidence par une inhibition de laphosphorylation oxydative dans les mutants de levure ou un déficitdes enzymes à noyau fer-soufre dans le myocarde des malades [60].Des auteurs ont suggéré que la frataxine puisse jouer le rôle deréservoir mitochondrial de fer, mais ces travaux doivent encore êtreconfirmés.Enfin, le fer mitochondrial permet aussi l’assemblage des centres fer-soufre nécessaires à l’activité enzymatiques de certaines enzymes àfer non héminique (cf infra).

¶ Enzymes à fer héminique et non héminique

Parmi les enzymes à fer non héminique se trouvent les enzymes ànoyau fer-soufre qui sont impliquées dans de nombreux processusmétaboliques tels que des réactions d’isomérisation ou de

déshydratation, et qui servent de transporteurs d’électrons dans deschaînes d’oxydoréduction. Chez les eucaryotes, la plupart desenzymes à noyau fer-soufre sont localisées dans la mitochondrie àl’exception de quelques-unes, comme la protéine IRP (cf infra). Destravaux récents suggèrent que l’assemblage fonctionnel des noyauxFe-S de ces enzymes se fasse dans la matrice mitochondriale, aussibien pour les enzymes qui résident dans la mitochondrie que pourcelles dont la localisation est cytosolique [43]. Une protéineappartenant à la famille des ABC-transporteurs, la protéine hABC7chez l’homme, serait chargée d’exporter vers le cytoplasme desconstituants du cluster fer-soufre après leur assemblage dans lamitochondrie. Cette protéine hABC7 est très homologue de yATM1,une protéine de levure appartenant à la famille des ABCtransporteurs localisée dans la membrane interne de lamitochondrie. Le gène codant hABC7 est localisé sur le chromosomeXq13.1-q13.3 et pourrait être le gène impliqué dans une formeparticulière d’anémie sidéroblastique associée à une ataxiecérébelleuse [63]. Une mutation dans un segment transmembranairede hABC7 a été identifiée dans une famille où cinq individus desexe masculin d’une même fratrie étaient atteints de cette formed’anémie sidéroblastique. La mutation ségrégeait avec l’expressionclinique de la maladie et n’a pas été retrouvée dans la populationnormale.Parmi les enzymes possédant un atome de fer au site catalytique, oncompte la ribonucléotide réductase qui catalyse la réduction desribonucléotides en nucléotides pour permettre la synthèse d’ADN.Le fer est associé à la sous-unité M2 de la protéine et permetl’activation d’un radical tyrosyl en présence d’oxygène,indispensable à l’activité catalytique de l’enzyme. Cette sous-unitéM2 a une demi-vie d’environ 3 heures et sa synthèse augmente detrois à sept fois lors de la transition G1/S du cycle cellulaire. Tousles biologistes cellulaires savent que le fer est un constituantindispensable du milieu de culture des lignées continues, sonpremier rôle étant de permettre la synthèse de la sous-unité M2 dela ribonucléotide réductase. De même, les chélateurs du fer tels ladéféroxamine bloquent la prolifération des cellules en culture et, parvoie de conséquence, inhibent la synthèse de l’ADN (blocage enphase G1/S) [28].

CONTRÔLE POST-TRANSCRIPTIONNEL PAR LE FERLIBRE (IRE/IRP)

La synthèse d’un certain nombre de protéines clé du métabolismedu fer est régulée par le fer libre intracellulaire (fig 2). Cetterégulation dépend d’interactions spécifiques ARN-protéines dans lecytoplasme [37]. Une protéine appelée IRP, dont on connaît deuxformes moléculaires distinctes (IRP1 et IRP2), présente à l’état natifune forte affinité de liaison pour un motif ARN d’environ30 nucléotides, appelé IRE [44]. Ce motif, qui adopte une structuretige-boucle, a d’abord été identifié dans l’extrémité 5’ non codantedes ARNm H- et L-ferritine et s’est avéré être impliqué dans la miseen réserve sous une forme non traduite des ARNm ferritine et larépression de la synthèse de ferritine dans des conditions de faibleapport en fer [37]. Un motif IRE a aussi été identifié dans la partie 5’non codante de l’ARNm codant l’eALA-S, première enzyme de lachaîne de biosynthèse de l’hème. Ce motif permet d’ajuster le tauxde la synthèse de protoporphyrine IX à la disponibilité du fer dansles cellules érythropoïétiques [51]. Des motifs IRE ont aussi étéidentifiés dans les ARNm codant des protéines impliquées dans letransport du fer mais, dans ce cas, les IRE sont présents dans larégion 3’ non codante. En particulier, l’ARNm codant le récepteur àla transferrine possède cinq IRE dans les 2,7 kb de l’extrémité 3’ del’ARNm, alors qu’un seul motif est retrouvé dans l’ARNmNramp2/DMT1. La reconnaissance d’un motif IRE par une moléculed’IRP a des conséquences fonctionnelles différentes selon la positionde l’IRE dans l’ARNm, entraînant soit une répression de la synthèsede ferritine et de l’eALA-S, par inhibition de la formation ducomplexe d’initiation de la traduction, soit une stabilisation desARNm du récepteur à la transferrine en le protégeant d’unedestruction par les endonucléases. Ces différents motifs IRE sontremarquablement conservés. Ils adoptent une structure tige-boucle

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avec une tige double brin de longueur variable et une boucle decinq nucléotides de séquence consensus 5’-CAGUGN-3’ [67]. Lemilieu de la tige est interrompu par un renflement qui possède enparticulier une cytosine non appariée complètement conservée danstous les motifs IRE et qui joue un rôle dans l’interaction avec l’IRP.Les rôles respectifs des deux formes IRP1 et IRP2 sont encore malconnus. Une augmentation du pool de fer dans les cellules entraîneun changement de conformation de l’IRP1 par suite de la formationd’un noyau fer-soufre (4Fe-4S), caractéristique des protéines de lafamille des aconitases. La protéine IRP1 est donc une aconitasecytoplasmique, codée par un gène différent de celui de l’aconitasemitochondriale. L’activité enzymatique aconitase de l’IRP1 est doncmutuellement exclusive avec l’activité de liaison aux IRE et lafonction de cette activité enzymatique cytoplasmique n’est pasconnue. Ce changement de conformation entraîne une perted’affinité pour l’IRE, permettant une synthèse rapide de ferritine,une synthèse d’eALA-S dans les cellules érythropoïétiques, et unedégradation des ARNm du récepteur à la transferrine. Le rôle decette régulation dans la stabilisation de l’ARNm Nramp2/DCT1n’est pas encore démontré. À l’inverse, les formes radicalaires del’oxygène, et en particulier le NO produit par la forme inductible dela NO synthétase, sont capables aussi de moduler l’activité de l’IRPen détruisant le noyau Fe-S [22]. Ainsi, la stimulation desmacrophages murins par l’interféron-c et les lipopolysaccharidesinduit la synthèse de NO et active la fixation de IRP1 et IRP2 sur lesIRE. La protéine IRP2 ne forme pas de noyau fer-soufre maispossède un site de fixation de Fe2+ à l’extérieur de la molécule quientraîne une oxydation, suivie d’une ubiquitination et destructionde la protéine par le protéasome [41]. Il existe sans doute une certaineredondance fonctionnelle entre ces deux protéines dans la mesureoù des souris déficitaires en IRP1 ne présentent pas de phénotypeanormal. Cependant, l’inactivation du gène IRP2 chez la sourisentraîne des dépôts de fer dans les cellules de la muqueuseduodénale et l’apparition progressive de signes de dégénérescenceneuronale.Ce mécanisme de régulation traductionnelle par le fer permet à lacellule d’adapter sa capacité d’acquisition et de stockage du fer àses besoins immédiats et en particulier à la synthèse de l’hème dansles cellules érythropoïétiques ou à la progression du cycle cellulaireen réponse à des facteurs de croissance inducteurs de laprolifération. La stimulation rapide de la synthèse de ferritine enréponse à une augmentation du fer libre, qui peut résulter d’unepénétration du fer par la voie d’endocytose ou d’une productionendogène de fer libre par destruction de la molécule d’hème, offreplusieurs avantages pour la cellule. En facilitant la séquestration dufer au sein de la molécule de ferritine, ce mécanisme offre uneprotection contre l’effet toxique du fer libre et limite la productionde formes radicalaires de l’oxygène. Dans certaines cellulesspécialisées, la synthèse de ferritine permet la constitution deréserves en fer disponibles pour le métabolisme cellulaire au niveaude l’organisme.

ABSORPTION INTESTINALE DU FER

L’entérocyte mature au sommet de la villosité duodénale assure untransport vectoriel du fer et exprime un certain nombre de protéinesnécessaires à l’absorption du fer au pôle apical de la cellule, et à sontransfert vers la transferrine plasmatique au pôle basolatéral (fig 3).Le fer non héminique présent dans l’alimentation doit d’abord êtreréduit sous l’action d’une réductase membranaire ou d’agentsréducteurs présents dans l’alimentation comme l’acide ascorbique.Le Fe2+ est ensuite transporté à travers les membranes par laprotéine Nramp2/DMT1, qui assure un cotransport des ions H+. Cetransport est facilité par le pH acide de la lumière duodénale. Laprotéine Nramp2 existe sous deux isoformes codées par deuxARNm qui diffèrent par leur extrémité 3’ terminale du fait del’utilisation de deux sites de polyadénylation alternatifs. L’ARNmavec IRE code l’isoforme exprimée au pôle apical des entérocytes,dont l’expression est fortement induite par la carence en fer [13]. Lefer alimentaire présent sous forme héminique est aussi absorbé aupôle apical des cellules, avec une meilleure efficacité que le fer non

héminique, mais par un mécanisme encore mal connu [70]. Letransport vectoriel du fer vers le pôle basolatéral nécessiteprobablement des protéines chaperos qui présentent le fer à untransporteur basolatéral. La ferroportine décrite récemment est unexcellent candidat pour exercer cette fonction. Cette protéine, quipossède dix passages transmembranaires, est exprimée dans leplacenta et dans le duodénum, ainsi que dans le foie, le rein et larate [21]. Une mutation de la ferroportine chez le poisson-zèbre estresponsable du phénotype weh associé à une anémie hypochromesévère. L’expression de cette protéine dans les œufs de xénopeaugmente l’export du fer du cytoplasme vers le milieu extracellulaireet tout laisse à penser que la ferroportine pourrait être letransporteur du fer au pôle basolatéral des entérocytes.Le transfert plasmatique du fer est couplé à son oxydation de Fe2+

en Fe3+, oxydation probablement catalysée par l’héphaestine. Cetteprotéine présente 50 % d’identité avec la céruloplasmine et

Pôle apical

Pool de ferlibre

Pool de ferlibre

Cellule de la villosité

Migrationet

différenciation

Cellule de la crypte

HFE

Expression des protéinesde transport

Autres signaux ?

Pôle basolatéral

Ferroportine

Hème oxygénase

Nramp2/DMT1

HèmeHème

Réductase

Hétéropolymères de ferritine

Héphaestine

Fe3+-Tf

Fe3+-Tf

Fe3+

Fe3+

Fe2+Fe2+

3 Représentation schématique des protéines impliquées dans l’absorption intestinaledu fer au niveau de la villosité duodénale. Les cellules indifférenciées de la crypte reçoi-vent des signaux émis par l’organisme en cas d’augmentation des besoins en fer suiteà une hémolyse, à une activité érythropoïétique accrue ou à une diminution des réser-ves en fer. La protéine HFE, qui interagit avec les récepteurs à la transferrine du pôlebasolatéral des cellules de la crypte, joue un rôle dans l’amplification du signal. Lorsde la migration et de la différenciation des cellules le long de la villosité, les protéinesimpliquées dans la captation du fer alimentaire au pôle apical de l’entérocyte et sontransfert vers le plasma au pôle basolatéral seront exprimées en fonction des signaux re-çus.

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appartient à la famille des oxydases cuivre-dépendantes. Cependant,à l’inverse de la céruloplasmine qui est une protéine plasmatique,l’héphaestine possède un domaine d’ancrage membranaire [72]. Unedélétion partielle du gène codant l’héphaestine présent sur lechromosome X a été trouvée chez les souris sla (sex linked anemia).Les souris sla hémizygotes ont une anémie microcytaire hypochromedue à un déficit d’absorption intestinale du fer et une surcharge enfer des entérocytes duodénaux.Plusieurs signaux émis par l’organisme sont capables d’augmenterl’absorption intestinale du fer, à savoir une érythropoïèse élevée, undéficit des réserves en fer et l’hypoxie. La modulation del’absorption intestinale en fonction du taux d’érythropoïèse dépendprobablement d’un facteur soluble transporté de la moelle vers lecytoplasme. Il est intéressant de noter qu’un certain nombred’anémies telles les thalassémies, les anémies dysérythropoïétiquescongénitales et les anémies sidéroblastiques stimulent l’absorptionintestinale du fer alors que d’autres anémies hémolytiques commeles sphérocytoses ou les anémies hémolytiques auto-immunes n’ontpas cet effet. Les anémies qui stimulent l’absorption intestinale onten commun le fait que l’hémolyse est intramédullaire et concerneles précurseurs érythropoïétiques immatures. Les anémies qui nestimulent pas l’absorption intestinale du fer résultent d’unedestruction des hématies périphériques [2].La modulation de l’absorption en fonction de l’état des réserves enfer tissulaires pourrait dépendre de la transferrine ou, plusexactement, de son taux de saturation. Un taux de saturation élevéde la transferrine plasmatique est probablement un signal dediminution de l’absorption intestinale. En effet, les cellules de lacrypte possèdent des récepteurs à la transferrine au pôle basolatéral.L’internalisation de la transferrine chargée en fer entraînerait uneaugmentation du pool de fer libre, aboutissant à la répression del’expression de la protéine Nramp2. La protéine HFE, de par sacapacité à interagir avec le récepteur à la transferrine, amplifierait lesignal d’arrêt de l’absorption intestinale transmis par la saturationde la transferrine [73]. L’existence d’une protéine mutée chez lesmalades atteints d’hémochromatose génétique serait responsabled’un défaut dans la transduction du signal et d’une hyperabsorptionintestinale du fer (cf infra). Chez les souris hpx/hpx, qui sont presquetotalement dépourvues de transferrine, le taux d’absorptionintestinal du fer est élevé, malgré une surcharge en fer hépatocytaireimportante. Cependant, la transfusion d’érythrocytes n’entraîne pasde diminution de l’absorption alors que l’injection intraveineuse detransferrine permet une réduction notable de l’absorption intestinaledu fer.À l’inverse, une stabilisation du messager Nramp2 dans desconditions de déficit en fer (faible charge en fer de la transferrine),d’activité érythropoïétique élevée (clairance rapide du fer sérique[FS]) ou d’hypoxie (effet direct sur l’IRP ?), permettrait l’expressionde la protéine Nramp2 au cours de la maturation et de la migrationdes cellules le long de la villosité intestinale (fig 3). Nramp2, inséréedans la membrane au pôle apical des cellules au sommet de lavillosité, permettrait l’absorption du fer alimentaire non héminique,après sa réduction en Fe2+.

ÉRYTHROPOÏÈSE

¶ Biosynthèse de l’hème

La biosynthèse de l’hémoglobine est coordonnée à celle de l’hème,qui s’effectue d’une part dans les mitochondries, d’autre part dansle cytosol. Les diverses réactions enzymatiques de cette chaînemétabolique sont résumées dans la figure 4. La première réaction,qui conduit à la formation du d-ALA à partir d’acide succinique etde glycocolle, se déroule à l’intérieur de la mitochondrie. L’enzymequi la catalyse, le d-ALA-S, dont le coenzyme est le phosphate depyridoxal, dérivé de la vitamine B6, occupe une position clé danscette séquence réactionnelle. Dans le foie, la synthèse et l’activité decette enzyme sont soumises à un rétrocontrôle par l’hème, produitfinal de la chaîne métabolique. Une forme spécifique de cellulesérythropoïétiques (eALA-S ou ALA-S2) est codée par un gène

présent sur le chromosome X, différent de celui codant la formeubiquitaire. Cette isoforme érythroïde présente une régulationparticulière, adaptée au taux de synthèse d’hème élevé dans cescellules. L’ARNm-eALA-S possède, dans sa région 5’ non codante,un motif de type IRE qui régule la synthèse de l’enzyme en fonctiondes apports en fer [51]. C’est ensuite dans le cytosol que s’effectuentles autres réactions conduisant au porphobilinogène, àl’uroporphyrinogène et au coproporphyrinogène. Les réactionssuivantes sont à nouveau intramitochondriales : transformation enprotoporphyrinogène, puis en protoporphyrine IX sur laquelles’accroche l’atome de fer. L’hème quitte alors la mitochondrie pourse fixer à la chaîne de globine en croissance. Les déficitsenzymatiques de cette voie métabolique conduisent à desporphyries, dont certaines peuvent avoir des traductionshématologiques (cf infra). L’hème stimule activement la synthèse deschaînes de globine. Dans les troubles de synthèse de l’hème, que cesoit par carence en fer ou par déficit enzymatique, un déséquilibrede synthèse entre les chaînes de globine alpha- et non-alphaglobinesest observé, le rapport alphaglobine/bêtaglobine, au lieu d’êtrevoisin de 1, peut être abaissé jusqu’à des valeurs de 0,7 à 0,6,simulant une alphathalassémie.

¶ Érythropoïèse médullaire : sidéroblastesLes sidéroblastes sont des érythroblastes médullaires contenant desgranules de fer non héminiques, visibles en microscopie optiqueaprès coloration de Perls au bleu de Prusse [10]. La dimension, lenombre et la disposition des grains de fer dans le cytoplasmepermettent de reconnaître trois types de sidéroblastes :

– type I, à granules peu nombreux, à la limite de la visibilité ;

MITOCHONDRIESuccinyl CoA

CYTOPLASME

ALA-synthase ALA-déhydratase

CoASH CO2

COO–

CH2

CH2

C

H

H C

COO–

COO–

CH2

CH2

COO–

CH2COO–

CH2 CH2

C

C

H

H NH2

NH2 CH2

H

HN

O

Glycine Acideδ-aminolévulinique

Porphobilinogène

Hydroxyméthylbilane

Uroporphyrinogène III

Coproporphyrinogène III

PBG-déaminase

Uro'gène III Synthase

Uro'gène III décarboxylase

NH2

OCoAS

VI

N N

NN

N N

NN

N N

NN

H

H

H H

H

H

Pr Pr

Pr

Pr

Pr

Pr Pr

Pr

Pr

Pr

PrPr

Pr

Pr

Ac

Ac

Ac

Ac

Ac

Ac

Ac

Ac

HOH H

H

H

HH

H

H

N N

NN

N

HN

N

NN

HH

HN

NN

PrPr

Pr Pr

HÈME

Ferrochélatase Fe2+

Copro'gène IIIoxydase

Protoporphyrine IX

Protoporphyrinogène III

Fe

VI

VI

VI

VI

VI

CH3

CH3CH3

2H+

2H+2 CO2

6H Proto'gèneoxydase

CH3

CH3

CH3

CH3

CH3

CH3CH3

CH3

CH3

CH3

CH3

CH3

CH3

4NH3

H3O

4H+

4CO2

Fe (?)

4 Schéma de la voie de biosynthèse de l’hème. Les différentes étapes de la voiede biosynthèse de l’hème sont représentées, avec la localisation mitochondrialeou cytoplasmique des différentes enzymes.

Hématologie Métabolisme du fer : physiologie et pathologie 13-000-P-20

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Page 8: Métabolisme Du Fer - Physiologie Et Pathologie

– type II, à granules bien visibles répartis dans le cytoplasme ;

– type III, à granules nombreux, volumineux, disposés en« couronne » autour du noyau.Les sidéroblastes de type I ne sont jamais pathologiques. Ceux detype III, à l’inverse, le sont toujours. Les sidéroblastes de type IIsont observés de façon non spécifique dans de multiples anomalieshématologiques (mégaloblastoses, hémoglobinopathies, etc). Dansune moelle normale, 20 à 30 % des érythroblastes sont dessidéroblastes de type I. La microscopie électronique montre que lefer des sidéroblastes de type I est incorporé dans des agrégats deferritine parfois entourés d’une membrane ; ces agrégats sontextramitochondriaux. Dans le type III, l’ultrastructure des granulesmontre qu’ils sont composés de dépôts intramitochondriaux de ferinsoluble, distincts des molécules de ferritine. En outre, leur nombreet leur volume sont augmentés.

RECYCLAGE DU FER HÉMINIQUE PAR LESMACROPHAGES

Chez l’homme, environ 80 % du fer plasmatique est transporté versla moelle pour participer à la synthèse d’hémoglobine dans lesprécurseurs érythropoïétiques. À la fin de la durée de vie desérythrocytes, le fer est recyclé après phagocytose des érythrocytessénescents par les macrophages de la rate, de la moelle osseuse et,dans une moindre mesure, par les cellules de Kupffer. Lecatabolisme intracellulaire de l’hème libère du monoxyde de carbone(CO), du fer et de la bilirubine, sous l’action d’un complexeenzymatique ancré dans la membrane du réticulum endoplasmiqueet constitué d’une nicotinamide-adénosine-dinucléotide-phosphate(NADPH)-cytochrome c-réductase, de l’hème oxygénase et de labiliverdine réductase [1]. La majeure partie de la productionjournalière de bilirubine (80 %) provient du catabolisme de l’hèmedans les macrophages par suite de la destruction des globules rougessénescents, le reste provenant de la destruction des hémoprotéinesdans les hépatocytes, et en particulier des cytochromes qui ont unedemi-vie courte.L’hème oxygénase existe sous deux formes, HO-1 et HO-2, codéespar deux gènes différents. L’isoforme HO-1 est inductible dans denombreuses conditions de stress oxydatif, alors que l’expression deHO-2 est constitutive. L’inactivation du gène HO-1 parrecombinaison homologue chez la souris entraîne une accumulationde fer dans le foie et dans les tubules du cortex rénal, et une anémiesévère [57]. Ces résultats suggèrent que seul le catabolisme de l’hèmepar HO-1 permet une réutilisation efficace du fer pourl’érythropoïèse, alors que l’hème détruit par une autre voie entraîneune rétention de fer dans les tissus. Le mécanisme permettant au ferlibéré par le catabolisme des globules rouges sénescents dans lesmacrophages d’être recyclé vers le plasma n’est pas encore élucidé,mais certains auteurs ont proposé que la ferritine puisse contribuerà cette redistribution.La ferritine existe à l’état de traces dans le sérum des mammifères àdes concentrations comprises entre 20 et 200 µg/L, et elle diffère dela ferritine tissulaire dans la mesure où elle contient peu de fer et oùelle est partiellement glycosylée. Cependant, un échange demolécules de ferritine chargées en fer pourrait se faire entre lesmacrophages et les érythrocytes ou les hépatocytes, parl’intermédiaire de récepteurs spécifiques qui semblent présents à lasurface de ces cellules chez l’homme. Ce recyclage direct du fer seferait localement dans le microenvironnement de la moelle osseuseou du foie, respectivement.En cas d’hémolyse, il se forme des complexes circulantshémoglobine-haptoglobine qui sont rapidement éliminés par leshépatocytes par l’intermédiaire de récepteurs spécifiques. L’hèmelibre est aussi éliminé par les hépatocytes, sous forme d’un complexeavec l’hémopexine. Il existe un polymorphisme génétique del’haptoglobine du fait de l’existence de deux allèles Hp1 et Hp2,l’allèle Hp2 résultant d’une duplication partielle ancestrale du gènehaptoglobine. Ce polymorphisme se traduit par trois phénotypesdistincts, Hp1-1, Hp2-1 et Hp2-2. La molécule Hp 1-1 est une petitemolécule de poids moléculaire 86 kDa et de structure bien définie,

alors que Hp2-1 forme des hétéropolymères de 86 à 300 kDa etHp2-2 des complexes macromoléculaires de poids moléculairecompris entre 170 et 1 000 kDa. L’haptoglobine Hp2-2 a une affinitéde liaison à l’hémoglobine plus faible et sa nature macromoléculairefait que les complexes Hb-Hp2-2 sont captés préférentiellement parles macrophages. Des travaux récents montrent que le phénotypeHp 2-2 est associé avec une légère augmentation des réserves en ferdu système réticuloendothélial qui semble avoir des conséquencesnéfastes sur l’évolution de la charge virale et la mortalité chez lesmalades atteints du syndrome de l’immunodéficience humaineacquise (sida) [19]. Les taux d’haptoglobine sérique varient aussi enfonction du phénotype et sont de l’ordre de 1,2 g/L pour Hp1-1 et0,74 g/L pour Hp2-2.Plusieurs travaux récents ont mis en évidence la relation étroite quiexiste entre le métabolisme du cuivre et celui du fer et ont montrél’importance de la céruloplasmine dans le recyclage du fer par lesmacrophages. Les premières indications d’un lien entre le transportdu fer et la disponibilité du cuivre ont été obtenues chez la levure etconfirmées chez l’homme par la caractérisation moléculaire desacéruloplasminémies. Chez la levure, le fer est mobilisé à partir descomplexes ferriques du milieu extracellulaire, par réduction duFe(III) en Fe(II) catalysée par des réductases membranaires. Le fertraverse ensuite la membrane par la protéine FTR1, un transporteurde haute affinité du fer ferrique. Cette étape nécessite l’oxydationdu Fe(II) en Fe(III) catalysée par FET3, une oxydase dont l’activitécatalytique est cuivre-dépendante et qui appartient à la famille des« multi-copper » oxydase, au même titre que la céruloplasmine etl’héphaestine des mammifères [18]. La céruloplasmine est uneglycoprotéine plasmatique synthétisée par le foie et sécrétée commeune holoprotéine après incorporation de six atomes de cuivre durantsa biosynthèse. Comme la protéine FET3 de levure, lacéruloplasmine a une activité ferroxydase qui semble nécessaire à lamobilisation du fer hépatocytaire et macrophagique. L’inactivationdu gène de la céruloplasmine chez la souris entraîne uneaccumulation excessive du fer dans les hépatocytes et lesmacrophages [35]. Cependant, l’absorption intestinale du fer etl’érythropoïèse restent normales chez ces souris, suggérant que lacéruloplasmine n’est pas impliquée dans la mobilisation du fer auniveau intestinal, ce rôle étant plutôt assuré par l’héphaestine,comme cela a été évoqué dans le chapitre sur l’absorption intestinaledu fer.

STOCKAGE DU FER

Le fer étant peu soluble au pH physiologique et chimiquement trèsréactif en présence d’oxygène, il est nécessaire pour les cellules de leséquestrer rapidement sous une forme non toxique mais disponibleen cas de besoin. La ferritine est la protéine chargée d’assurer cettefonction dans les cellules. Cette protéine hautement spécialisée esttrès conservée dans le monde du vivant, puisque des formesanalogues de ferritine existent dans les bactéries, les champignons,les plantes, les vertébrés et les invertébrés. Seule la levure semblepouvoir se passer de ferritine en stockant le fer dans la vacuole.Chez les mammifères, les principales réserves en fer se trouventdans le foie et dans la rate. Le fer absorbé au niveau duodénal etvéhiculé par la transferrine est stocké principalement par le foie,alors que le recyclage du fer héminique contribue à la constitutiondes réserves en fer dans les macrophages de la rate, du foie ou de lamoelle osseuse. De ce fait, le développement d’une surcharge en ferpeut se faire dans différents tissus, suivant le mécanisme à l’originede la surcharge. Ainsi, les hémochromatoses génétiques étant dues àune hyperabsorption du fer au niveau duodénal, la surchargeapparaît dans un premier temps dans les hépatocytes. Ce n’est quedans un deuxième temps, lorsque la surcharge est plus importante,qu’une redistribution s’opère entre les différents tissus et que lasurcharge se développe dans les macrophages. Dans les anémieshémolytiques et en cas de transfusions répétées, la surcharge estprincipalement associée aux macrophages. Curieusement, unedélocalisation du site de destruction de l’hème, qui apparaît chezles souris dont le gène de l’HO-1 a été inactivé par recombinaisonhomologue, entraîne une surcharge en fer des tissus

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parenchymateux. Cette observation suggère que le fer héminiquen’est pas efficacement recyclé dans ces tissus.Le fer dans les tissus s’accumule associé à la ferritine, qui a unecapacité de stockage pouvant aller jusqu’à 4 500 atomes de fer parmolécule. La ferritine est une protéine hétérogène, constituée d’unecoquille protéique creuse de diamètre extérieur 12-13 nm et d’unnoyau ferrique qui s’accumule au sein de la cavité centrale. Lacoquille protéique est un hétéropolymère de 24 sous-unités, réaliséepar l’assemblage en proportions variables de deux sous-unitésdifférentes, appelées H et L [36]. Ces deux sous-unités sont codéespar des gènes distincts, présents sur le chromosome 11q23 pour legène H et 19q 13-qter pour le gène L. Les deux sous-unitésprésentent 50 % d’identité au niveau de leur séquence en acidesaminés, mais leur structure tridimensionnelle très conservée leurpermet de se coassembler dans un même polymère de ferritine.L’étude des sous-unités recombinantes in vitro a permis de mettreen évidence des propriétés physiochimiques différentes pour cesdeux sous-unités. La sous-unité H présente une activité catalytiqueferroxydase qui oxyde le Fe2+ en Fe3+ et qui est nécessaire à lacaptation du fer par la molécule de ferritine [47], alors que la sous-unité L catalyse la formation du noyau ferrique. La ferritine desplantes et des bactéries est un homopolymère d’un seul type desous-unité qui combine les résidus carboxyliques spécifiques del’activité de la sous-unité L et le centre ferroxydase de la sous-unitéH [3]. Les gènes H- et L-ferritine sont exprimés dans tous les tissusmais la transcription du gène L est peu régulée, à l’inverse de celledu gène H qui est activée dans de très nombreuses circonstances.L’étude du gène H-ferritine de souris a permis de mettre en évidencedes éléments de régulation situés très à distance du gène, quipermettent l’activation de la transcription au cours de ladifférenciation érythropoïétique ou en réponse à de nombreuxagents, tels le tumor necrosis factor (TNF)-a, certaines hormones ouproto-oncogènes [56]. L’augmentation de la proportion de sous-unitésde type H dans ces différentes circonstances semble être unmécanisme de défense devant toute situation susceptibled’augmenter le fer libre intracellulaire [68]. Cette hypothèse estrenforcée par l’observation que l’inactivation des deux allèles dugène H-ferritine chez la souris conduit à une létalité embryonnaireprécoce, entre 3 et 9 jours de développement [26].Dans les conditions normales, la saturation de la ferritine estrarement atteinte et ne dépasse pas 30 %. Dans les tissus surchargésen fer, la ferritine peut se dégrader partiellement pour formerl’hémosidérine. En microscopie électronique, l’hémosidérine se voitsous forme d’agrégats irréguliers, denses aux électrons etgénéralement entourés de membrane. Il y a sans doute plusieursmécanismes aboutissant à la formation d’hémosidérine mais, danstous les cas, le fer associé à l’hémosidérine est difficilementmobilisable et persiste dans les tissus malgré des traitementsdéplétifs de type saignées itératives ou chélation. Dans certains casparticuliers, le fer peut s’accumuler dans les cellules sous une formenon liée à la ferritine. Dans les maladies neurodégénératives, desdépôts importants de fer s’observent, associés aux zones dedégénérescence sous une forme inerte dépourvue de ferritine. Demême, le fer qui s’accumule dans la mitochondrie, dans lesérythrocytes de malades atteints d’anémie sidéroblastique, n’est pasassocié à la ferritine.

PERTES EN FER

Les mouvements très actifs du fer dans l’organisme se font selondes voies qui ont peu d’échanges avec le milieu extérieur. Alors quele stock martial de l’adulte normal est d’environ 3 à 4 g, seuls 1 à2 mg sont absorbés et excrétés chaque jour (fig 1). Les pertes sontpour deux tiers liées à la desquamation des cellules du tractusgastro-intestinal, pour le reste à la desquamation des cellules del’épiderme. L’élimination urinaire est très faible ; l’éliminationsudorale est négligeable. Chez l’homme, les pertes sont estimées à1 mg/j ; chez la femme, elles sont plus élevées du fait deshémorragies menstruelles : 50 % des femmes ont des pertes en fersupérieures à 1,5 mg/j, 10 % supérieures à 2 mg/j. La grossesse est

également un élément de perte en fer chez la femme, un nouveau-néà terme ayant un stock de fer de 75 à 100 mg/kg. Tout saignementchronique majore les pertes en fer, puisque 1 mL de sang totalcontient 0,5 mg de fer. Chez l’adulte, dans notre pays, la principalecause des anémies hypochromes et hyposidérémiques microcytairesest un saignement chronique.

Pathologie

CARENCE EN FER

Hercberg, en 1985, a proposé de distinguer trois stades selonl’importance de la déficience en fer :

– la simple déplétion des réserves tissulaires, caractérisée par unebaisse isolée de la ferritinémie, inférieure à 12 µg/L, sans déficit del’érythropoïèse ;– la déplétion des réserves s’accompagnant d’une déficience del’érythropoïèse [39]. À l’hypoferritinémie s’associe une baisse de lasidérémie et de la saturation de la transferrine. À ce stade, plusieursparamètres érythrocytaires sont anormaux : une diminution duvolume globulaire moyen (VGM) et de la concentrationcorpusculaire moyenne en hémoglobine (CCHM), avec uneaugmentation du taux de protoporphyrine érythrocytaire et unediminution du taux de ferritine érythrocytaire ;– l’anémie ferriprive stricto sensu, caractérisée par une diminutiondu taux d’hémoglobine.La carence martiale est de loin la cause la plus fréquente d’anémiemicrocytaire hypochrome sidéropénique. La sidéropénie peut releverd’une insuffisance d’apport, d’une malabsorption digestive ou depertes excessives, notamment hémorragiques, le plus souventrépétées et distillantes. L’insuffisance d’apport en fer est rencontréefréquemment chez le nourrisson recevant une alimentationexclusivement lactée ne couvrant pas les besoins en fer d’un enfantde moins de 1 an. Chez l’enfant de plus de 1 an, une alimentationpauvre en fer conduit progressivement à l’installation d’une anémiemicrocytaire, d’autant plus que la croissance est rapide. La grossessemultiplie par trois les besoins en fer chez la femme, puisque le fœtusen prend lui-même 300 mg. De même, la lactation demande desupplémenter l’alimentation. La carence d’apport est rarissime chezl’homme adulte sous nos climats, mais elle est possible chez levieillard isolé et socialement démuni. Les carences en fer dues à unemalabsorption digestive sont souvent mixtes (par exemple : fer,protéines, vitamine B12 et/ou folates). Elles sont d’origine gastriqueou intestinale. La géophagie, encore appelée « pica », est uneperversion des habitudes alimentaires, rencontrée dans certainesethnies (par exemple Afrique du Nord, Égypte, Iran, Turquie, etc).Les régimes alimentaires trop riches en phytates (par exemple larhubarbe), en phosphates (par exemple l’alimentation lactée) ou entanins (par exemple le thé) ont à un degré moindre un effet similaire,en chélatant le fer. À côté des hémorragies cliniquement évidentes,source de perte importante de fer, des hémorragies minimeschroniques, distillantes, de l’ordre de 10 à 20 mL/j de sang, peuventfacilement passer inaperçues du malade. Elles s’accompagnentnéanmoins à long terme d’un épuisement des réserves martiales.Les hémorragies génitales chez la femme sont parmi les causesmajeures d’anémie hypochrome, qu’il s’agisse de ménorragies oude métrorragies. Les causes les plus fréquentes de saignementsdigestifs sont les hémorroïdes, les hernies hiatales, les gastriteshémorragiques, les ulcères gastroduodénaux, les varicesœsophagiennes, la rectocolite hémorragique, les angiodysplasiesintestinales, les polypes coliques et les cancers gastro-intestinaux.Dans les pays chauds, l’ankylostomiase doit être évoquée devantune anémie microcytaire. Les épistaxis récidivantes sont une causeclassique d’anémie microcytaire, notamment au cours de la maladiede Rendu-Osler ou télangiectasie héréditaire hémorragique. Leshémorragies intra-alvéolaires dans le cadre d’une hémosidérosepulmonaire idiopathique s’observent essentiellement chez l’enfant.La perte de fer est également observée dans les hémolyseschroniques intravasculaires par hémosidérinurie et/ouhémoglobinurie.

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Les signes cliniques d’une anémie microcytaire hypochrome sont enrapport d’une part avec son origine, d’autre part avec son degré etsa vitesse d’installation. Une fatigabilité anormale avec une dyspnéed’effort est généralement le premier signe fonctionnel, et la pâleur lepremier signe physique objectif amenant le patient à consulter.Lozoff et al ont signalé une altération modérée des fonctionscognitives supérieures chez les enfants carencés en fer pendant leurtrès jeune âge, mais ces travaux sur le retentissement du déficit enfer dans la petite enfance sur les acquisitions intellectuelles et lecomportement demandent confirmation [48].L’hémogramme montre une diminution du taux d’hémoglobine endessous de 12 g/dL chez la femme et 13 g/dL chez l’homme. Lenombre de globules rouges n’est pas toujours diminué, du moinsdans les premiers temps de la carence. La microcytose peutdescendre jusqu’à des valeurs de VGM de 50 fl. L’hypochromie(TCMH < 25 pg et CCMH < 28 g/dL) est toujours présente. Ledosage du FS est l’examen de première intention. Les valeursnormales sont de 18 ± 6 µmol/L, légèrement plus élevées chezl’homme que chez la femme et l’enfant. Le FS est abaissé (< 12) encas de carence en fer. La capacité totale de fixation de la transferrine(CTF) est mesurée en additionnant au taux de FS celui de la capacitélatente de fixation (CLF) en fer de la transferrine (CTF = FS + CLF).Le coefficient de saturation de la transferrine (rapport FS/CTF) estnettement abaissé. Les valeurs normales sont de 55 ± 10 µmol/Lpour la capacité totale de fixation et de 15 à 40 % pour le coefficientde saturation. La capacité totale de fixation varie en sens inverse dela sidérémie, d’autant plus qu’une hyposidérémie stimule lasynthèse hépatique de transferrine. Elle est donc à la fois augmentée(> 65 µmol/L) et désaturée (< 15 %) en cas de carence martiale. Laferritine plasmatique est dosée par des méthodes radio-immunologiques ou enzymo-immunométriques. Les valeursnormales sont plus élevées chez l’homme (40 à 280 µg/L) que chezla femme (20 à 80 µg/L). Son taux est abaissé dans les anémiessidéropéniques par carence martiale.Le traitement a deux objectifs : réparer la carence martiale et traitersa cause chaque fois que possible. Le traitement substitutif consisteà apporter des sels ferreux, mieux absorbés que les sels ferriques,par voie orale (par exemple : ascorbate, citrate, fumarate, gluconate,etc) à la dose de 150 à 200 mg/j de fer métal chez le grand enfant etl’adulte, et sera adapté à l’âge et au poids chez le nourrisson et lepetit enfant (10 mg/kg). La forme injectable (intramusculaire ouintraveineuse) doit rester exceptionnelle en raison du risque decollapsus décrit avec cette voie d’administration, et n’est doncprescrite qu’en cas d’intolérance digestive absolue et sous strictcontrôle médical. Le traitement doit être poursuivi au-delà de lacorrection de l’anémie, afin de restaurer pleinement les réserves enfer de l’organisme.

SURCHARGES EN FER

¶ Syndrome clinique de la surcharge en fer

Le syndrome clinique de la surcharge en fer intéresse le cœur, lefoie, les glandes endocrines, les os et les articulations. Lescomplications sont potentiellement graves puisqu’elles peuventprovoquer le décès des patients. Les complications cardiaquess’expriment à un stade tardif de la surcharge en fer. Il s’agitd’hypertrophie ventriculaire gauche, d’épanchement péricardique,de troubles du rythme ou de la conduction et d’insuffisancecardiaque congestive. La surcharge martiale du cœur rend compteaujourd’hui de 60 à 70 % des décès dans la thalassémie [75]. L’excèsde fer hépatocytaire induit des lésions de fibrose qui peuventévoluer vers une cirrhose dans les formes les plus avancées, voirede cancers, en particulier lorsqu’une contamination par un virus del’hépatite est survenue lors de transfusions sanguines ultérieures.La cirrhose de l’intoxication martiale n’engage pas le pronostic vitalà court terme, mais contribue à alourdir la morbidité chez lespatients surchargés et participe aux principales causes de décès dansl’hémochromatose génétique comme dans la thalassémie. Leretentissement endocrinien dépend de l’âge [54]. Chez la femme, il

s’agit d’une ménopause précoce et chez l’homme, d’une diminutionde la libido associée à une impuissance et une atrophie testiculaire.Chez les adolescents, la puberté est souvent retardée, voire absente ;les signes pubertaires progressent lentement et demeurent souventincomplets. Parfois, une régression est constatée après undéveloppement pubertaire complet ; ainsi, les aménorrhéessecondaires chez la femme. Le fréquent retard statural, majoré parle retard pubertaire, paraît secondaire à une insuffisance dessomatomédines puisque la sécrétion d’hormones de croissance estnormale chez la plupart des malades. Les signes d’hypothyroïdiemanifestes ou compensés sont fréquents chez les malades surchargésen fer, de même que l’hypoparathryroïdie dont la symptomatologiepeut être sévère. Le diabète insulinodépendant peut compliquer lasurcharge en fer. Il s’agit d’une complication tardive del’hémochromatose génétique, très souvent associée à une cirrhose,dans 80 % des cas. Chez les malades thalassémiques polytransfusésdepuis l’enfance, ce diabète, insulinodépendant, constitue une causede mortalité par coma acidocétosique. Enfin, l’atteinteostéoarticulaire se caractérise par une ostéoporose, le plus souventasymptomatique, et une arthropathie, parfois révélatrice. L’atteintecaractéristique est une arthrite chronique intéressant les articulationsmétacarpophalangiennes dans l’hémochromatose génétique. Chezles malades thalassémiques polytransfusés, l’atteinte ostéoarticulaireintéresse plus volontiers le rachis et les têtes fémorales à l’origine defractures pathologiques et de nécroses de hanche. Enfin, la surchargeen fer serait un facteur favorisant le développement de certainesinfections, notamment la tuberculose au cours de l’hémochromatoseafricaine [31]. De la même façon, les patients contaminés par le virusde l’immunodéficience humaine (VIH) semblent évoluer d’autantplus rapidement vers le stade sida de la maladie que leur degré desurcharge en fer est important [62].

¶ Étiologies des surcharges en fer

Outre l’hémochromatose génétique, maladie héréditaire récessivefréquente dans les pays occidentaux, la surcharge en fer survientprincipalement chez les malades recevant des transfusions répétéesde concentrés érythrocytaires pour le traitement d’une anémiechronique. Elle est aussi observée dans des circonstances plus rarestelles l’acéruloplasminémie et l’atransferrinémie.

Hémochromatose génétique

L’hémochromatose est une maladie héréditaire, de transmissionautosomique récessive. On estime la fréquence des porteurshétérozygotes du gène muté à environ 10 % de la population. Laliaison entre le gène de l’hémochromatose et le complexe majeurd’histocompatibilité du chromosome 6p21.3 a été mise en évidencepar Simon et al en 1976 [64], mais il a fallu attendre encore 20 anspour que soit enfin identifié le gène responsable. Des étudesfamiliales, réalisées particulièrement en Bretagne et dans d’autrespopulations d’origine celte, ont mis en évidence un fort déséquilibrede liaison entre le gène de l’hémochromatose et l’allèle HLA-A3,suggérant l’effet fondateur d’un chromosome ancestral et latransmission d’une mutation unique. La stratégie utilisée par Federet al pour cloner le gène de l’hémochromatose (gène HFE) a consistéà reconstituer les marqueurs présents sur l’allèle ancestral,permettant ainsi de réduire l’intervalle susceptible de contenir legène de l’hémochromatose à 250 kb. Une combinaison de plusieurstechniques, de type recherche de gènes exprimés, exon trapping etséquençage, a finalement conduit à la découverte d’un gènecandidat [ 2 5 ] . Le produit de ce gène est une protéinetransmembranaire de 343 résidus, correspondant à une nouvellemolécule HLA de classe I (fig 5) et une mutation entraînant leremplacement d’une cystéine par une tyrosine à la position 282(C282Y) a été retrouvée à l’état homozygote chez 70 à 100 % desmalades atteints d’hémochromatose. Cette mutation empêche laformation d’un pont disulfure dont l’intégrité est nécessaire à lastructure secondaire et tertiaire du domaine d’interaction avec la b-2-microglobuline et ne permet pas l’adressage de la protéine à lamembrane plasmique. Une deuxième mutation ponctuelleentraînant le remplacement d’une histidine par un acide aspartique

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en position 63 (H63D) a aussi été identifiée, avec une fréquencerelativement importante chez des sujets normaux (17 %). Le rôle decette mutation dans le développement de la maladie, etparticulièrement chez des hétérozygotes composites, n’est pas encoreclair [16]. La mutation H63D n’a pas de retentissement surl’interaction avec la b-2-microglobuline. Des études decristallographie de la protéine HFE ont montré qu’elle diffère d’unemolécule HLA de classe I par le fait que le sillon qui sert de domainede présentation des peptides dans les molécules de classe I estparticulièrement étroit et non fonctionnel. Il existe aussi des formesjuvéniles d’hémochromatose, de pronostic plus sévère, qui ne sontpas liées au chromosome 6 et dont on ne connaît pas la cause.

Localisation et fonction de la protéine HFE

Bien que le rôle de la protéine HFE dans le contrôle de l’absorptionintestinale du fer ne soit pas encore parfaitement élucidé, il estintéressant de constater que des souris ayant une inactivation desgènes de la b-2-microglobuline par recombinaison homologue ontune accumulation progressive de fer dans les hépatocytes et ontperdu la capacité de réduire l’absorption intestinale du fer lorsqueles réserves en fer sont augmentées. Ces travaux confirmentl’implication des molécules HLA de classe I non classiques dans lecontrôle de l’absorption intestinale du fer, mais n’apportent que peude renseignements sur la fonction de la protéine HFE. Les premièresindications sont venues de travaux récents montrant une interactionde haute affinité entre la protéine HFE et le récepteur à latransferrine, et la formation d’un complexe ternaire entre latransferrine, son récepteur et la molécule HFE [45]. Cette interactionpourrait soit diminuer l’affinité de la transferrine pour son récepteur,soit réguler le nombre des récepteurs qui sont adressés à lamembrane plasmique, soit enfin réguler l’internalisation ducomplexe de la transferrine et de son récepteur [32].Le traitement de l’hémochromatose génétique repose sur la pratiquede saignées régulières, dont le rythme et l’abondance sontdéterminés par l’état général du patient, la tolérance aux saignées etl’importance de la surcharge en fer, corrélée au taux de ferritinesérique. Le traitement initial comporte des saignées hebdomadaires.La fréquence des saignées dépend de la vitesse de normalisation dela ferritinémie, du FS et de la saturation de la transferrine. Lorsquela déplétion ferrique a été obtenue, le traitement d’entretien estdéterminé par l’état clinique et l’évolution des paramètresbiologiques (FS et ferritine sérique).

Hémochromatose néonatale et hémochromatose juvénile

Il s’agit de formes rares d’hémochromatose, qui ne sont pas liées augène HFE. L’hémochromatose néonatale se caractérise par unesurcharge en fer massive du foie et du muscle cardiaque et lepronostic est généralement rapidement fatal. Il s’agit probablementd’une anomalie du transport placentaire du fer.

Les symptômes de l’hémochromatose juvénile sont très comparablesà ceux de l’hémochromatose génétique liée à HFE, mais l’évolutionclinique est beaucoup plus sévère. Elle se caractérise par uneapparition plus précoce, avant l’âge de 30 ans, et s’accompagned’hypogonadisme et de troubles cardiaques sévères. En l’absence detraitement, les malades meurent le plus souvent d’insuffisancecardiaque. Le locus de l’hémochromatose juvénile est localisé sur lechromosome 1q21, mais le gène n’a pas encore été identifié [59].

Surcharges post-transfusionnelles

Tous les malades atteints d’affections hématologiques traités par latransfusion sanguine régulière de concentrés érythrocytaires sontexposés aux risques de la surcharge martiale transfusionnelle. Ils’agit principalement de la thalassémie majeure et de certainesformes de myélodysplasies (ex-anémies réfractaires), en particulierles anémies sidéroblastiques acquises idiopathiques et les anémiesréfractaires simples. Les formes d’érythroblastopéniesconstitutionnelles corticorésistantes ou acquises, certaines formes dedysérythropoïèse congénitale et d’anémie sidéroblastiquecongénitale reçoivent des transfusions régulières qui provoquent unesurcharge en fer. Il en est de même chez les malades atteintsd’affections hématologiques, transfusés abondamment avant etpendant la réalisation d’une transplantation médullaire allogénique.Chez ces derniers patients, lorsque la transplantation permetd’obtenir un taux d’hémoglobine suffisant, il est recommandé defaire des saignées régulières pour réduire la surcharge en fer [4].Tous les patients polytransfusés doivent recevoir un traitementchélateur du fer. Actuellement, le seul médicament actif qui peut etdoit être utilisé est la déféroxamine (Desféralt). La chélation du ferest commencée lorsque la ferritine sérique s’élève aux alentours de1 000 µg/L. La voie sous-cutanée est la voie élective del’administration du Desféralt à l’aide de perfusion de 8 à10 heures/j. La posologie est de 40 à 50 mg/kg/j. La fréquence desinjections et la posologie sont à adapter en fonction de la ferritinesérique, avec pour objectif son maintien entre 500 et 1000 µg/L.La déferriprone (L1) est un chélateur du fer actif par voie orale dontles premiers essais ont été faits dès 1987 chez les malades atteints demyélodysplasie et de thalassémie majeure. Les conclusions actuellesde ces essais font ressortir les points suivants [40] :

– la compliance est bonne chez la moitié seulement des patientssoumis au traitement ;

– la posologie doit atteindre 75 mg/kg/j, à l’origine d’intolérancesdigestives fréquentes ;

– les complications à type d’agranulocytose, de neutropénie etd’arthralgies ont été observées dans un nombre de cas nonnégligeable ;

– il est possible que le L1 soit responsable du développement defibroses hépatiques chez certains patients. En l’état actuel desconnaissances concernant l’efficacité et la toxicité du L1, il estconseillé de réserver la déferriprone aux patients intolérants ou nonobservants au Desféralt.

Dysérythropoïèses

Les anémies sidéroblastiques sont caractérisées par uneaccumulation de fer intramitochondrial, révélée par la coloration dePerls dans les érythroblastes, et une synthèse de l’hémoglobineabaissée. Les anémies sidéroblastiques congénitales répondent àplusieurs modes de transmission génétique ; différentes mutationsont été identifiées dans le gène érythroïde spécifique de l’eALA-Sresponsable de l’anémie sidéroblastique liée à l’X [15]. Une forme rared’anémie sidéroblastique associée à une ataxie cérébrospinale estdue à une mutation de ABC7, un transporteur des centres fer-soufre(cf supra). Les anémies sidéroblastiques acquises sont secondaires àdes intoxications (plomb, antituberculeux, éthanol) ou primitiveschroniques chez l’adulte, s’inscrivant dans le cadre desmyélodysplasies. Toutes les thalassémies s’accompagnent dedysérythropoïèse, y compris celles qui permettent un taux desynthèse d’hémoglobine atteignant ou dépassant 8 à 9 g

Chaîne lourde α

Extracellulaire

Membrane plasmique

Cytoplasme HOOC

HOOC TyrCys282

NH2

NH2

His63 Asp

α3

α1

β2-microglobuline

α2

5 Schéma de la protéine HFE. La protéine HFE forme un dimère avecla b-2-microglobuline par l’intermédiaire du domaine a3. La mutation Cys282Tyr, pré-sente à l’état homozygote chez la majorité des malades atteints d’hémochromatose gé-nétique, détruit ce domaine de dimérisation.

Hématologie Métabolisme du fer : physiologie et pathologie 13-000-P-20

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(thalassémies intermédiaires) et qui ne nécessitent pas detransfusions régulières. Dans toutes ces maladies hématologiquescorrespondant à des dysérythropoïèses, on observe unehyperabsorption digestive du fer qui peut induire une surchargemartiale importante. Le messager métabolique provenant du tissuérythroblastique médullaire vers les cellules épithéliales de l’intestinn’est pas identifié (cf supra). Dans les formes sévères de surchargeen fer, un traitement chélateur du fer est indiqué selon les modalitésdécrites ci-dessus.

Autres types d’hémochromatoses

L’hémochromatose africaine est fréquente dans certaines populationsbantoues d’Afrique du Sud et n’est pas liée au gène HFE. Ellepourrait être favorisée par un facteur de prédisposition génétique etpar des apports de fer excessifs chez les buveurs de bière. Lesatteintes organiques de cette surcharge en fer sont rares ; enrevanche, les complications infectieuses et, notamment latuberculose, sont plus fréquentes [31].L’atransferrinémie est une maladie autosomique récessiveexceptionnelle caractérisée par un défaut de synthèse de transferrine,à l’origine d’une anémie microcytaire hypochrome nécessitant destransfusions itératives qui aggravent la surcharge en fer tissulaire.L’acéruloplasminémie est une maladie autosomique récessiveexceptionnelle liée à une mutation du gène de la céruloplasmine.Cette protéine, principalement impliquée dans le métabolisme ducuivre, permet, par son activité ferroxydasique, la sortie du fer descellules. En son absence, le fer s’accumule dans différents tissus, oùil participe aux lésions responsables de la présentation clinique :diabète, surcharge hépatique en particulier [30].

PATHOLOGIES ASSOCIÉES À UNE RÉPARTITIONANORMALE DU FER

¶ États inflammatoires

Les états inflammatoires chroniques s’accompagnent de désordresdu métabolisme du fer qui ont des similitudes avec la carence enfer. L’anémie de l’inflammation, appelée également « anémie desmaladies chroniques » par les auteurs anglo-saxons, survient chezles patients atteints de maladies infectieuses, inflammatoires et decancers

[42, 50]. L’anémie est normocytaire ou microcytaire, souvent

modérée. Elle s’accompagne d’une diminution du FS et de latransferrine circulante et d’une augmentation de la ferritine sérique.L’anémie est la résultante de plusieurs mécanismes : une insuffisancede l’érythropoïèse secondaire à une diminution de la croissance desprécurseurs érythroïdes, une production inadéquated’érythropoïétine ; un raccourcissement de la durée de vie desglobules rouges ; une rétention du fer dans le systèmeréticuloendothélial [74]. Ce dernier mécanisme est illustré par laprésence de fer dans les macrophages médullaires accompagnantune diminution du fer intraérythroblastique. La réduction dutransfert du fer macrophagique à la transferrine produit unediminution de la livraison du fer à l’érythroblaste nécessaire à lasynthèse de l’hème. Ces désordres sont secondaires à uneaugmentation de la production de cytokines intervenant dans laréponse inflammatoire comme le TNFa, l’interleukine 1 et lesinterférons. Le seul traitement efficace contre l’anémie inflammatoireest de supprimer la cause de l’inflammation ; la prescription de ferest inutile et sans effet.

¶ Porphyries

Les porphyries sont des maladies métaboliques dues à un déficit dela chaîne de synthèse d’hème. Chaque porphyrie correspond à uneréduction de l’activité enzymatique d’une des enzymes et lephénotype clinique dépend des précurseurs de l’hème quis’accumulent et de l’organe où a lieu l’excès de production. Lesporphyries sont transmises sur le mode autosomique dominant, àl’exception de la porphyrie érythropoïétique ou maladie de Günther,qui est une forme récessive. Les porphyries hépatiques se

manifestent le plus souvent sous forme de crises aiguës avec dessymptômes neurologiques plus ou moins graves, à l’exception de laporphyrie cutanée symptomatique, dont le symptôme principal estune photosensibilité cutanée [53]. La porphyrie cutanée, qui est laforme la plus fréquente de porphyrie, représente un groupehétérogène, incluant des formes sporadiques de survenuegénéralement tardive (40-50 ans) et des formes familiales qui sedéveloppent plus tôt, souvent autour ou même avant la puberté.Dans les formes sporadiques, l’activité de l’uroporphyrinogènedécarboxylase est déficitaire seulement dans le foie, alors que dansla forme familiale un déficit à 50 % s’observe dans tous les tissus.L’expression de la forme sporadique dépend de facteursdéclenchants dont les œstrogènes, l’alcool et le fer. Une sidérosehépatique modérée a été trouvée chez environ 80 % des patients etune augmentation de la fréquence de la mutation C282Y du gèneHFE a été décrite dans les porphyries cutanées sporadiques. Untraitement par saignées entraîne toujours une amélioration clinique,même en l’absence de surcharge en fer initiale. L’inhibition del’uroporphyrinogène décarboxylase pourrait être due à des formesradicalaires de l’oxygène dont la production est catalysée par le ferlibre intracellulaire.

¶ Syndrome héréditaire cataracte-hyperferritinémieLe syndrome héréditaire cataracte-hyperferritinémie a été identifiépour la première fois en 1995, simultanément en France [9] et enItalie [29], par la découverte fortuite de deux familles présentant, surplusieurs générations, des individus associant une cataracte dedéveloppement précoce et une élévation persistante du taux deferritine sérique, en l’absence de surcharge en fer. Dans ces deuxfamilles, la cataracte et l’hyperferritinémie étaient transmises defaçon autosomique dominante et, dans chaque cas, une mutation aété identifiée dans le motif IRE présent dans la partie 5’ non codantede l’ARNm de la sous-unité L-ferritine. Une vingtaine d’autre casont été décrits depuis, presque toujours à la suite de la découverte,lors d’un bilan de santé ou d’une hospitalisation, d’une ferritinémieélevée, associée à un FS et un coefficient de saturation de latransferrine normaux. Plusieurs mutations ponctuelles ont étéidentifiées chez les patients atteints du syndrome cataracte-hyperferritinémie, portant essentiellement sur la boucle et lerenflement au milieu de la tige [8]. La structure particulière de cetterégion semble aussi favoriser les délétions dans la mesure où deuxdélétions importantes, l’une de 29 pb (C10-A38) et l’autre de 16 pb(U42-G57), ont été retrouvées dans des familles, emportant à chaquefois l’une ou l’autre moitié de l’IRE. Une délétion interstitielle dedeux bases A38-C39 a été décrite récemment, chez un seul membred’une fratrie de sept enfants, et correspondant probablement à unenéodélétion.La présence d’un IRE muté dans l’ARNm L-ferritine à l’étathétérozygote entraîne une synthèse de ferritine constitutive dans lestissus. Des taux de L-ferritine élevés ont été trouvés dans des lignéeslymphoblastoïdes établies à partir de lymphocytes de maladesporteurs d’une mutation, ainsi que dans des monocytes ou dans desglobules rouges de malades. Des dosages de ferritine réalisés sur uncristallin obtenu lors d’une opération de la cataracte ont montré quela synthèse de ferritine est aussi augmentée dans ce tissu, mais lemécanisme qui conduit à l’opacification du cristallin n’est pas encoreconnu.L’augmentation de ferritine tissulaire se traduit par une élévationdes taux de ferritine sérique. L’origine de la ferritine sérique a faitl’objet de nombreuses controverses et certains auteurs ont proposéque cette ferritine soit synthétisée à partir d’un gène différent decelui codant la sous-unité L. Cependant, dans le cas du syndromecataracte-hyperferritinémie, il ne fait pas de doute que la ferritinesérique et la sous-unité L -ferritine tissulaire sont issues d’un seul etmême gène. Il ne semble pas y avoir de corrélation directe entre unemutation donnée et l’élévation de la ferritine sérique ni chez lesindividus porteurs d’une même mutation au sein d’une famille nientre des individus non apparentés porteurs d’une même mutationIl ne faut donc pas confondre le syndrome héréditaire cataracte-hyperferritinémie avec une hémochromatose génétique, dans la

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mesure où les malades n’ont pas de surcharge en fer et donc nedoivent pas subir de thérapie par phlébotomie. En effet, il estintéressant de noter que les malades porteurs de mutations IREdéveloppent invariablement une anémie microcytaire après deux outrois saignées, suggérant que leur réserve en fer est inférieure à lanormale.D’ailleurs, lors des phlébotomies, le FS diminue rapidement du faitde la déplétion des réserves en fer de l’organisme mais les taux deferritine sérique restent élevés, cette observation représentant unélément important permettant de faire un diagnostic différentielentre un syndrome cataracte-hyperferritinémie et une surcharge enfer, qu’elle soit d’origine génétique ou acquise.Ce nouveau syndrome est intéressant à plus d’un titre dans lamesure où il représente la première implication d’une anomalie dela régulation traductionnelle par le fer dans une pathologie humaineet où il a permis d’identifier un gène responsable d’une formehéréditaire de cataracte.

Méthodes d’explorationdu métabolisme du fer

MÉTHODES D’ÉVALUATION DU STOCK MARTIAL

¶ Méthodes biochimiques [11]

Les méthodes courantes font appel à la mesure du FS, de la capacitétotale de la fixation de la transferrine, du coefficient de saturation dela transferrine et de la ferritine sérique. Les valeurs normales du FSsont de 18 ± 6 µmol/L. La capacité totale de fixation de latransferrine est un dosage fonctionnel de la transferrine ; sa valeurnormale est de 55 ± 10 µmol/L. Le coefficient de saturation de latransferrine correspond au rapport du FS sur la capacité totale defixation de la transferrine ; ses valeurs normales sont de 15 à 40 % etdes taux dépassant 50 % chez la femme et 55 % chez l’homme sontde bons indicateurs d’une surcharge en fer. La mesure de la ferritinesérique par dosage immunoenzymatique a des valeurs normales de20 à 280 µg/L, les chiffres étant un peu plus bas chez la femme quechez l’homme. Cependant, la ferritine sérique est modifiée par lesétats d’inflammation et la cytolyse hépatique qui augmentent sontaux circulant et rendent parfois son interprétation difficile. Le test àla déféroxamine (40 mg/kg de déféroxamine perfusés en 12 heurespar voie sous-cutanée) provoque l’élimination urinaire de 3 à 5 mgde fer dans les 24 heures suivant le début de la perfusion chezl’adulte normal. Il s’agit d’un test peu utilisé en pratique qui peutêtre cependant intéressant pour évaluer les surcharges en fer, dontl’importance est fonction de la quantité de fer éliminée par voieurinaire. La protoporphyrine érythrocytaire s’accumule dans lesglobules rouges lorsque la synthèse de l’hème est réduite en raisond’une carence en fer. Ce test n’est pas de pratique courante, mais il

peut être effectué pour dépister certains états de carence en fer,notamment lorsqu’une inflammation ou une cytolyse hépatiquemodifient les taux de FS et/ou de ferritine.Les paramètres biochimiques utilisés pour évaluer le bilan martialne permettent pas toujours de distinguer entre une anémie parcarence en fer et une anémie associée à un état inflammatoire ouinfectieux. Le dosage de la sRTf a donc été proposé comme outildiagnostique permettant d’identifier une carence en fer« fonctionnel », reflétant une diminution des réserves en fer ou unerétention anormale du fer dans le système réticuloendothélial associéà une érythropoïèse accrue. L’association d’une élévation des tauxde sRTf et d’un hématocrite inférieur à 40 % reflète un véritabledéficit en fer, même en présence de taux de ferritine sérique élevés.Les valeurs normales du sRTf varient suivant les troussescommerciales mais sont de l’ordre de 5 à 25 µM.

¶ Méthodes biophysiques

Des méthodes de mesure directes non invasives sont actuellementl’objet d’évaluation. Il s’agit de techniques utilisant la résonancemagnétique nucléaire, de techniques tomodensitométriques [61] et debiomagnétométrie (Squidt method) [12]. Le coefficient d’atténuationhépatique fourni par tomodensitométrie ou résonance magnétiquenucléaire du foie peut apprécier de façon spécifique l’importance dela surcharge en fer. Cependant, la mise au point de ces techniquesest délicate et l’appareillage coûteux, ce qui rend la réalisation deces méthodes peu utilisée en pratique clinique.

¶ Méthodes histologiques

La biopsie hépatique permet de déterminer la quantité de fer pargramme de tissu sec. Ce test est volontiers utilisé en hépatologiepour affirmer le diagnostic d’hémosidérose génétique.

ÉTUDE ISOTOPIQUE DE L’ÉRYTHROPOÏÈSE

L’utilisation du fer pour étudier l’érythropoïèse et les mouvementsdu fer vers les réserves est bien explorée par le fer 59. L’étude de lacinétique au fer 59 dure 14 jours et nécessite un laboratoire entraîné,mais donne des renseignements précieux en cas d’anomaliescomplexes de l’érythropoïèse. Trois données sont fournies par cetteépreuve :

– le taux de renouvellement du fer plasmatique qui mesure lacapacité de la moelle, et donc des érythroblastes, à fixer le fer ;

– la courbe d’incorporation du fer 59 dans les globules rougescirculants qui donne une idée quantitative de l’érythropoïèse dansle pourcentage maximum retrouvé dans les globules rouges et uneidée qualitative (dysérythropoïèse étudiée par la forme de la courbed’incorporation) ;

– le siège de l’érythropoïèse et la mise en réserve par les comptagesexternes.

Références ➤

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13-000-P-20 Métabolisme du fer : physiologie et pathologie Hématologie

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