mercredi 2 mai 2018 radiographie de 43 lignes sncfpresse.actuca.com/fichiers/2018_05/194004_le monde...

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0123 MERCREDI 2 MAI 2018 économie & entreprise | 3 Rail : une France à deux vitesses « Le Monde » s’est penché sur les temps de trajet en train entre deux villes et leur évolution dans le temps. Constat : la priorité à la construction de nouvelles lignes a fait prendre un retard néfaste à la régénération du réseau I l y a comme une ironie dans la carte de France que nous publions ici. De toutes les destinations que nous avons étudiées statistiquement afin d’évaluer, sur la durée, le service pu- blic ferroviaire en France, une seule ligne affiche un temps de trajet qui s’est ral- longé aujourd’hui par rapport à… 1963. Et c’est Paris-Amiens, soit la liaison entre la capitale et la ville de naissance et de jeu- nesse d’Emmanuel Macron. Nul ne sait si ce constat aura influencé les choix du président de la République de faire mener par son gouvernement une réforme majeure de la SNCF et du système ferroviaire français. Il est en tout cas certain que le pre- mier ministre, Edouard Philippe, dans sa pré- sentation du « nouveau pacte ferroviaire », le 26 février, avançait l’argument de la piètre qualité de service pour justifier son action. « Les Français, qu’ils prennent ou non le train, payent de plus en plus cher pour un ser- vice public qui marche de moins en moins bien », expliquait M. Philippe, clouant au pi- lori des lignes où « la vitesse frôle parfois le surplace en jouant avec les nerfs des usa- gers ». Un agacement qui n’est peut-être pas étranger au fait que l’on met aujourd’hui vingt minutes de plus qu’en 1973 pour aller de Paris au Havre, la ville dont Edouard Phi- lippe fut le maire de 2010 à 2017. Ces propos avaient vexé les salariés de la SNCF, jusqu’aux plus hauts cadres, et proba- blement joué leur rôle d’aiguillon dans la mobilisation des cheminots contre la ré- forme. Mais ces critiques étaient-elles, ou non, dénuées de fondement ? Qu’en est-il réellement de cette qualité de service et de son évolution dans le temps ? Pour répondre à cette interrogation, nous avons choisi de nous pencher en détail, en quatre pages de carte et d’infographies, sur les temps de trajet des trains entre deux vil- les et leur évolution dans le temps. Pour ce faire, nous sommes allés chercher dans la plate-forme de données ouvertes de la SNCF. La compagnie nationale fournit ces statistiques année par année sur les 43 principales lignes françaises, TGV et trains classiques (appelés Intercités). L’his- torique des données remonte jusqu’à 1963 pour la plupart des liaisons. L’EFFET TGV JOUE MASSIVEMENT On notera bien qu’il s’agit des meilleurs temps de trajet théoriques, c’est-à-dire ins- crits dans le tableau officiel des horaires, que nous avons étudiés ici, et non des temps de trajet réels, qui incluraient donc les retards. Malheureusement, cette dernière statisti- que n’est pas fournie par la SNCF. Mais l’ana- lyse des simples horaires permet tout de même d’embrasser dans une perspective de long terme l’amélioration ou la dégradation du service public ferroviaire. Alors, que nous disent ces chiffres ? Tout d’abord, une bonne nouvelle. Depuis cin- quante-cinq ans, pour la totalité des lignes étudiées (à l’exception, on l’a vu, de Paris- Amiens), les temps de trajet se sont amélio- rés. Et souvent fortement. Par rapport à 1963, on met ainsi quatre heures de moins pour aller de Paris à Brest ou Montpellier en train, trois heures de moins pour rallier Marseille depuis Bordeaux, deux heures de moins pour faire Paris-Saint-Etienne, une heure de moins pour rejoindre Paris depuis Lille. Evidemment, l’effet TGV joue massive- ment. Son effet de rupture est visible sur les graphiques des lignes TGV. Mais il se réper- cute aussi en creux en dessinant une France ferroviaire à deux vitesses, celle des trajets à 300 kilomètres/heure et celle des bons vieux trains Intercités. D’un point de vue géographique, deux espaces moins bien lo- tis en matière de vitesse ferroviaire appa- raissent : le centre français – de la Loire au sud du Massif central – et une large frange nord-ouest bordant la Manche, grosso modo de Boulogne à Cherbourg, ayant peut- être le « défaut » d’être trop proche de Paris. Mais il y a plus étonnant. Et préoccupant. On constate, depuis la double décennie 1990-2000-2010, un allongement des temps de trajet sur la majorité des lignes, y compris sur les lignes à grande vitesse. Un accroisse- ment masqué par les spectaculaires gains récents réalisés sur Paris-Bordeaux ou Paris- Rennes. Mais le constat est sans appel : pour les deux tiers des lignes étudiées, le temps de trajet, en 2017, est moins bon qu’il y a cinq, dix ou quinze ans. Etrange paradoxe : au moment où la France étoffait par des efforts d’investissement considérables (et une nouvelle hausse de la dette de la SNCF) son réseau à grande vitesse, la majorité des trains des grandes lignes se sont mis à devenir plus lents. Ce décrochage a des causes diverses. On connaît la critique de fond adressée à la poli- tique du tout-TGV, relancée par le Grenelle de l’environnement il y a dix ans. La priorité donnée à la construction de nouvelles lignes a fait prendre un retard dramatique à la ré- génération du réseau existant. Cela explique une grande partie des ralentissements pour raisons de sécurité instaurés sur les voies ferrées du pays. « L’Etat est depuis longtemps dans une logi- que de repli en matière ferroviaire, explique Yves Crozet, professeur à l’université Lyon-II et spécialiste de l’économie des transports. La France est passée d’un réseau de 40 000 ki- lomètres dans les années 1950 à 30 000 aujourd’hui. Dans ce contexte, le seul avenir a été le TGV. Il y avait une stratégie pour la grande vitesse, une stratégie pour les TER, mais pas de réflexion entre les deux. Les Inter- cités, en particulier, ont pâti de ce manque. » Du côté des usagers, on critique vertement ce ralentissement continu de la circulation en train, vécu comme une dérive, voire comme un laxisme de la part de la SNCF. Jean Lenoir, vice-président de la Fédération nationale des associations d’usagers des transports, s’en indigne : « Allonger les temps de trajet revient à institutionnaliser des re- tards chroniques que personne ne se donne les moyens de vraiment combattre. » p éric béziat ON OBSERVE UN ALLONGEMENT DES TEMPS DE TRAJET SUR LA MAJORITÉ DES LIGNES, Y COMPRIS SUR LES LIGNES À GRANDE VITESSE Lille Rouen Caen Le Havre Cherbourg QUIMPER BREST Boulogne-sur-Mer Amiens STRASBOURG Nancy Metz DIJON Mulhouse Reims Le Mans ANGERS Tours Limoges POITIERS Clermont-Ferrand Saint-Etienne BAYONNE LA ROCHELLE NARBONNE Arras Orléans Montpellier Grenoble Grenoble Lyon Marseille BORDEAUX NANTES RENNES TOULOUSE Nice PARIS A M I N S E R O U N E L Y O N N I C E C A E N T O U S R B O U O L G N E - S U - M R E R C H E B R O U R G L E A H V R E O R A É L N S L I G O M E S C L E M R O N T - F E R A D N R S A I T N - É T I E N E N M O N P T E L L I E R M A R E S I L L E G R E O N B L E M U L O H U S E L E A M N S R E S M I M E Z T N A Y C N A R S A R L I E L L DES GAINS DE TEMPS SUR LES TRAJETS DEPUIS 1963*... Meilleurs temps au départ de Paris (TGV et Intercités) INFOGRAPHIE LE MONDE ... MAIS DES PERTES DE TEMPS RÉCENTES Entre 50 et 60 % Comparaison de temps non disponible sur les autres lignes Entre 25 et 49 % Gare de plus de 1 million de voyageurs annuels en 2016, hors réseau Transilien (cercles proportionnels de 1 à 6 millions de voyageurs) Moins de 25 % Ligne à grande vitesse Temps de trajet actuel supérieur à celui de 1963 Perte de temps supérieure ou égale à 10 % Evolution du temps de trajet entre le meilleur temps observé depuis 1963 et le temps de trajet en 2017 *1985 pour Le Mans, Tours, Lille, Arras et Angers Moins de 10 % Moyenne du nombre de trains circulant par jour en 2013 (hors TER et trains de nuit) 150 250 90 40 20 10 X X X X X X ▶▶▶

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0123MERCREDI 2 MAI 2018 économie & entreprise | 3

Rail : une France à deux vitesses« Le Monde » s’est penché sur les temps de trajet en train entre deux villes et leur évolution dans le temps. Constat : la priorité à la construction de nouvelles lignes a fait prendre un retard néfaste à la régénération du réseau

Il y a comme une ironie dans la cartede France que nous publions ici. Detoutes les destinations que nousavons étudiées statistiquement afind’évaluer, sur la durée, le service pu-blic ferroviaire en France, une seule

ligne affiche un temps de trajet qui s’est ral-longé aujourd’hui par rapport à… 1963. Etc’est Paris-Amiens, soit la liaison entre la capitale et la ville de naissance et de jeu-nesse d’Emmanuel Macron.

Nul ne sait si ce constat aura influencé leschoix du président de la République de faire mener par son gouvernement une réforme majeure de la SNCF et du système ferroviaire français. Il est en tout cas certain que le pre-mier ministre, Edouard Philippe, dans sa pré-sentation du « nouveau pacte ferroviaire », le 26 février, avançait l’argument de la piètrequalité de service pour justifier son action.

« Les Français, qu’ils prennent ou non letrain, payent de plus en plus cher pour un ser-vice public qui marche de moins en moins bien », expliquait M. Philippe, clouant au pi-lori des lignes où « la vitesse frôle parfois le surplace en jouant avec les nerfs des usa-gers ». Un agacement qui n’est peut-être pas étranger au fait que l’on met aujourd’huivingt minutes de plus qu’en 1973 pour allerde Paris au Havre, la ville dont Edouard Phi-lippe fut le maire de 2010 à 2017.

Ces propos avaient vexé les salariés de laSNCF, jusqu’aux plus hauts cadres, et proba-blement joué leur rôle d’aiguillon dans lamobilisation des cheminots contre la ré-forme. Mais ces critiques étaient-elles, ou non, dénuées de fondement ? Qu’en est-ilréellement de cette qualité de service et deson évolution dans le temps ?

Pour répondre à cette interrogation, nous

avons choisi de nous pencher en détail, en quatre pages de carte et d’infographies, sur les temps de trajet des trains entre deux vil-les et leur évolution dans le temps. Pour ce faire, nous sommes allés chercher dans laplate-forme de données ouvertes de laSNCF. La compagnie nationale fournit ces statistiques année par année sur les 43 principales lignes françaises, TGV et trains classiques (appelés Intercités). L’his-torique des données remonte jusqu’à 1963pour la plupart des liaisons.

L’EFFET TGV JOUE MASSIVEMENT

On notera bien qu’il s’agit des meilleurs temps de trajet théoriques, c’est-à-dire ins-crits dans le tableau officiel des horaires, quenous avons étudiés ici, et non des temps de trajet réels, qui incluraient donc les retards. Malheureusement, cette dernière statisti-que n’est pas fournie par la SNCF. Mais l’ana-lyse des simples horaires permet tout de même d’embrasser dans une perspective de long terme l’amélioration ou la dégradation du service public ferroviaire.

Alors, que nous disent ces chiffres ? Toutd’abord, une bonne nouvelle. Depuis cin-quante-cinq ans, pour la totalité des lignesétudiées (à l’exception, on l’a vu, de Paris-Amiens), les temps de trajet se sont amélio-

rés. Et souvent fortement. Par rapport à 1963,on met ainsi quatre heures de moins pour aller de Paris à Brest ou Montpellier en train,trois heures de moins pour rallier Marseille depuis Bordeaux, deux heures de moinspour faire Paris-Saint-Etienne, une heure de moins pour rejoindre Paris depuis Lille.

Evidemment, l’effet TGV joue massive-ment. Son effet de rupture est visible sur les graphiques des lignes TGV. Mais il se réper-cute aussi en creux en dessinant une France ferroviaire à deux vitesses, celle des trajets à 300 kilomètres/heure et celle des bons vieux trains Intercités. D’un point de vuegéographique, deux espaces moins bien lo-tis en matière de vitesse ferroviaire appa-raissent : le centre français – de la Loire au sud du Massif central – et une large frange nord-ouest bordant la Manche, grosso modo de Boulogne à Cherbourg, ayant peut-être le « défaut » d’être trop proche de Paris.

Mais il y a plus étonnant. Et préoccupant.On constate, depuis la double décennie1990-2000-2010, un allongement des temps de trajet sur la majorité des lignes, y comprissur les lignes à grande vitesse. Un accroisse-ment masqué par les spectaculaires gains récents réalisés sur Paris-Bordeaux ou Paris-Rennes. Mais le constat est sans appel : pour les deux tiers des lignes étudiées, le temps

de trajet, en 2017, est moins bon qu’il y a cinq, dix ou quinze ans. Etrange paradoxe :au moment où la France étoffait par desefforts d’investissement considérables (et une nouvelle hausse de la dette de la SNCF)son réseau à grande vitesse, la majorité destrains des grandes lignes se sont mis àdevenir plus lents.

Ce décrochage a des causes diverses. Onconnaît la critique de fond adressée à la poli-tique du tout-TGV, relancée par le Grenelle de l’environnement il y a dix ans. La priorité donnée à la construction de nouvelles lignesa fait prendre un retard dramatique à la ré-génération du réseau existant. Cela expliqueune grande partie des ralentissements pour raisons de sécurité instaurés sur les voies ferrées du pays.

« L’Etat est depuis longtemps dans une logi-que de repli en matière ferroviaire, explique Yves Crozet, professeur à l’université Lyon-II et spécialiste de l’économie des transports. La France est passée d’un réseau de 40 000 ki-lomètres dans les années 1950 à 30 000 aujourd’hui. Dans ce contexte, le seul avenir aété le TGV. Il y avait une stratégie pour la grande vitesse, une stratégie pour les TER, mais pas de réflexion entre les deux. Les Inter-cités, en particulier, ont pâti de ce manque. »

Du côté des usagers, on critique vertementce ralentissement continu de la circulationen train, vécu comme une dérive, voire comme un laxisme de la part de la SNCF. Jean Lenoir, vice-président de la Fédérationnationale des associations d’usagers des transports, s’en indigne : « Allonger les tempsde trajet revient à institutionnaliser des re-tards chroniques que personne ne se donneles moyens de vraiment combattre. » p

éric béziat

ON OBSERVEUN ALLONGEMENT

DES TEMPS DE TRAJET

SUR LA MAJORITÉ DES LIGNES, Y COMPRIS

SUR LES LIGNES À GRANDE VITESSE

Lille

Rouen

Caen

Le Havre

Cherbourg

Q U I M P E R

B R E S T

Boulogne-sur-Mer

Amiens

S T R A S B O U R GNancy

Metz

D I J O N

Mulhouse

Reims

Le Mans

A N G E R S

Tours

Limoges

P O I T I E R S

Clermont-Ferrand

Saint-Etienne

B A Y O N N E

L A R O C H E L L E

N A R B O N N E

Arras

Orléans

Montpellier

GrenobleGrenoble

Lyon

Marseille

B O R D E A U X

N A N T E S

R E N N E S

T O U L O U S ENice

PARIS

A M I N SE

R O U NE

L Y O N

N I C E

C A E N

T O U SR

B O U OL G N E - S U - M RER

C H E BR O U R G

L E AH V R E

O R AÉL N S

L I GOM E SC L E MR O N T - F E R A DNR

S A I TN - É T I E N EN

M O N PT E L L I E R

M A R ES I L L E

G R E ON B L E

M U L OH U S E

L E AM N S

R E SMI

M E ZT

N A YCN

A R SAR

L I ELL

D E S G A I N S D E T E M P S S U R L E S T R A J E T S D E P U I S 1 9 6 3 *. . .Meilleurs temps au départ de Paris (TGV et Intercités)

INFOGRAPHIE LE MONDE

. . . M A I S D E S P E R T E S D E T E M P S R É C E N T E S

Entre 50 et 60 %

Comparaison de temps non disponible

sur les autres lignes

Entre 25 et 49 %

Gare de plus de 1 million de voyageurs annuels

en 2016, hors réseau Transilien

(cercles proportionnels de 1 à 6 millions de voyageurs)

Moins de 25 %

Ligne à grande vitesse

Temps de trajet actuel supérieur à celui de 1963

Perte de temps supérieure ou égale à 10 %

Evolution du temps de trajet entre le meilleur temps observé

depuis 1963 et le temps de trajet en 2017

*1985 pour Le Mans, Tours, Lille, Arras et Angers

Moins de 10 %

Moyenne du nombre

de trains circulant

par jour en 2013

(hors TER et trains de nuit)

150

250

90

40

20

10

X X X

X X X

▶▶▶

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4 | économie & entreprise MERCREDI 2 MAI 2018

0123

Infographies : Sylvie Gittus-Pourrias et Audrey Lagadec

années

Durée du trajet

Entre 50 et 60 %

Entre 25 et 49 %

Evolution du temps de trajet sur 43 lignes de train en France

Gain de temps sur les trajets entre 1963 et 2017

Nombre de minutes perdues en 2017 depuis le meilleur temps observé entre 1963 et 2017

xx minTemps gagné entre 1963 et 2017

heures

PARIS - CAEN

50

1963 1996 2017

1 h 502 h 24 1 h 44

34 min

0,15

54 min

PARIS - CHERBOURG

1963 20171996

3 h 56 2 h 42 3 h 02

0,14

PARIS - BOULOGNE

1963 20172000

1 h 562 h422 h 08

34 min

0,15

PARIS - CLERMONT-FERRAND

50 min

1963 20172008

4 h 00

3 h 102 h 59

0,15

PARIS - ROUEN

14 min

1963 1972 2017

1 h 22 1 h 081 h 03

0,17

PARIS - BAYONNE

2 h 32

1963 2017

6 h 27

3 h 55

0,16

PARIS - LA ROCHELLE

1 h 45

1963 2017

4 h 28

2 h 43

0,19

PARIS - MULHOUSE

1 h 44

1963 20172013

4 h 24

2 h 40

2 h 38

0,19

LYON - NANTES

2 h 53

1963 20172005

7 h 17

4 h 10

4 h 24

0,17

LYON - STRASBOURG

1963 20172015

5 h 41

3 h 09

3 h 19

2 h 22

0,19

4 h 30

PARIS - NARBONNE

1963 2017

8 h47

4 h 17

0,13

3 h 10

PARIS - GRENOBLE

1963 2002 2017

6 h 11

3 h 012 h 53

0,17

PARIS - REIMS

1963 20172007

1 h310 h 46

0 h45

45 min

0,26

2 h 03

PARIS - NANTES

1963 2017

3 h 59

1 h 56

0,22

2 h 03

PARIS - LYON

1963 2005 2017

1 h 571 h 53

4 h 00

0,19

Meilleur temps observéentre 1963 et 2017

185

PARIS - RENNES

2 h 01

1963 2017

3 h 26

1 h 25

0,28

PARIS - STRASBOURG

2 h 25

1963 2017

1 h 46

4 h 11

0,21

PARIS - MARSEILLE

4 h 05

+ 5 min

1963 20172001

7 h 10

3 h 3 h 05

(2001-2017)

+ 4 min

(2005-2017)

+ 2 min

(2013-2017)

+ 8 min

(2004-2016)

+ 5 min

(1972-2017)

+ 6 min

(1996-2017)

+ 8 min

(2002-2017)+ 1 min

(2007-2017)

+ 10 min

(2015-2017)

+ 38 min

(1995-2017)

+ 20 min

(1996-2017)+ 12 min

(2000-2016)

+ 11 min

(2008-2017)

+ 14 min

(2005-2017)

0,13

PARIS - BORDEAUX

2 h 39

1963 2017

4 h 43

2 h 04

0,17

PARIS - QUIMPER

4 h 28

1963 2017

8 h 00

3 h 32

0,17

BORDEAUX - MARSEILLE

3 h 02

1963 1995 2017

8 h 55

5 h 535 h 15

0,16

LYON - BORDEAUX

2 h 24

1963 20162004

8 h 37

6 h 05

6 h 13

0,10

L ’ E F F E T T G V D : E S G A I N S C O N S I D É R A B L E S S U R L E S S SG R A N D E D I S T A N C E

L E S L I G EN S N I T E CR I T É S D É L A I S S É E S

Il fallait 3 h 26 pour e�ectuer

un Paris-Rennes en 1963 contre 1 h

25 en 2017, soit un gain de 2 h 01.

Moins de 25 %

Temps de trajet actuel supérieur à celui de 1963

Radiographie de 43 lignes SNCFLes voyageurs longue distance bénéficient de l’effet TGV, mais pâtissent de l’état des liaisons intercités

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0123MERCREDI 2 MAI 2018 économie & entreprise | 5

Nouveau tronçon de ligne à grande vistesse (LGV) mis en service

Prix du billet plein tarif 2de classe, en euros au kilomètre0,10 0,28

prix

BORDEAUX - LILLE

1998 2017

5 h 014 h 31

30 min

0,16

PARIS - ORLÉANS

1963 20171985

1 h 12 0 h 54 1 h 05

7 min

0,18

PARIS - LE HAVRE

18 min

1963 1972 2017

2 h 222 h 04 1 h 45

0,15

PARIS - LIMOGES

1963 20172001

3 h 17 2 h 46 3 h 02

15 min + 2 min

0,15

LYON - ROUEN

1986 2006 2017

3 h 463 h 49 3 h 38

0 h 03

0,13

PARIS - AMIENS

1963 20171973

1 h 05 1 h 070 h 59

0,18

4 h 46

PARIS - NICE

1963 2006 2017

5 h 33

10 h 19

5 h 25

0,12

1 h 18

PARIS - NANCY

1963 2013 2017

2 h 49

1 h 31

1 h 28

0,22

PARIS - LE MANS

1985 2017

1 h 37

1992

0 h 530 h 54

43 min

0,28

PARIS - ARRAS

37 min

1985 1993 2017

1 h 260 h 49

0 h 48

0,25

2 h 02

PARIS - SAINT-ÉTIENNE

1963 20172001

4 h 52

2 h 502 h 41

0,18

1963 20172007

2 h 57

1 h 241 h 23

PARIS - METZ

1 h 33

0,22

+ 8 min

(2006-2017)

+ 8 min

(1973-2017)

+ 9 min

(2002-2017)

+ 8 min

(2006-2017)

+ 3 min

(2013-2017)

+ 1 min

(1992-2017)+ 1 min

(1993-2017)

+ 9 min

(2001-2017)

+ 19 min

(1972-2017)

+ 11 min

(1985-2017)

+ 16 min

(2001-2017)

+ 15 min

(1998-2017)

+ 5 min

(2002-2017)

+ 3 min

(1996-2017)

+ 1 min

(2007-2017)

PARIS - MONTPELLIER

4 h 02

1963 20172002

7 h 21

3 h 193 h 14

0,14

PARIS - BREST

4 h 02

1963 2017

7 h 27

3 h 25

0,16

PARIS - LILLE1963 1996 2017

1 h 01

2 h 100 h 58

1 h 09

0,27

PARIS - POITIERS

1 h 28

1963 2017

1 h 18

2 h 46

0,23

PARIS - DIJON

53 min

1963 2017

2 h 241 h 31

0,21

PARIS - ANGERS

49 min

1985 2017

2 h 13 1 h 24

0,24

LYON - LILLE

1 h 48

1985 2002 2017

2 h 57

4 h 45

2 h 48

0,15

PARIS - TOULOUSE

2 h 40

1963 2017

4 h 17

6 h 57

0,14

PARIS - TOURS

1985 20171998

1 h 431 h 100 h 55

33 min

0,28

D E S G A I SN M N I O É R S P A D E S A L L O N G E M E N T S R É C E N T SR

Les données présentées ici sont issues

de la plate-forme de données ouvertes

de la SNCF (data.sncf.com). Les meilleurs

temps de parcours observés annuellement

sont mis à disposition pour seulement

43 lignes du réseau, principalement

entre 1963 et 2017, à l’exception de 5 lignes

à partir de 1985, 1 à partir de 1986

et 1 à partir de 1998. Les tarifs (prix d’appel,

plein tarif 2de et 1re classe)

et les distances moyennes de gare à gare

pour chacune de ces lignes proviennent

également des données ouvertes de la SNCF.

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Page 4: MERCREDI 2 MAI 2018 Radiographie de 43 lignes SNCFpresse.actuca.com/fichiers/2018_05/194004_le monde eco et... · 2018. 5. 2. · été le TGV. Il y avait une stratégie pour la grande

6 | économie & entreprise MERCREDI 2 MAI 2018

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Saturation des métropoles, travaux… Les causes du surplaceIl arrive que les temps de parcours s’allongent, pour diverses raisons, qui vont de la nécessité d’aménagements à l’évolution des trains

Mettons deux chif-fres en parallèle.Le premier : depuis1993 et la mise en

service de cinq lignes à grande vitesse majeures (Paris-Lille, Lyon-Marseille, Paris-Strasbourg, Tours-Bordeaux, Le Mans-Rennes), les gains de temps de parcours cumu-lés pour leurs utilisateurs avoisi-nent les sept heures. Le second : sur la même période, les meilleurstemps de parcours sur 29 des 43 principales grandes lignes se sont rallongés de plus de quatre heures si on les additionne tous.

Voilà qui entache quelque peu lebilan ferroviaire de la France, pré-sentée comme la championne de la grande vitesse. Mais pourquoi diable la SNCF a-t-elle procédé à ces « détentes de temps de par-cours » pour reprendre son lan-gage pittoresque ?

Pour comprendre cette méca-nique du ralentissement ho-raire, rien de tel qu’un exemple concret. Prenons Paris-Cher-bourg, 370 kilomètres d’une voie qui dessert Caen, Carentan et Va-lognes et qui a vu son meilleur temps de parcours augmenté de vingt minutes en vingt ans. En 1996, il fallait deux heures etquarante-deux minutes pour

relier la capitale de la France auchef-lieu de la Manche, aujour-d’hui on a dépassé la barre sym-bolique des trois heures…

L’approche des grandes villes Lasaturation ferroviaire des métro-poles est la raison majeure de ces allongements de temps de par-cours. L’augmentation de la circu-lation des trains de banlieue et autres RER à l’approche des gares parisiennes conduit à un embou-teillage. La cause profonde en est la démographie : la population urbaine et périurbaine augmente,pour des voies ferrées qui restent les mêmes. A Paris-Saint-Lazare,le terminus des Paris-Cherbourg, une rame entre ou sort toutes les vingt-sept secondes. Or, la tran-chée ferroviaire reste la même qu’au temps de Claude Monet.

Toujours dans notre exemple, lefait de passer en plusieurs décen-nies de deux à six trains de ban-lieue entre Paris et Mantes-la-Jo-lie (à une cinquantaine de kilomè-tres de la capitale) a eu des effets négatifs sur les temps de parcoursles plus rapides. Les trains Interci-tés comme le Paris-Cherbourg,qui sont par nature des trains al-lant vite, doivent s’insérer dans un trafic de trains plus lents à

arrêts fréquents. Les ingénieurs du ferroviaire appellent cela « la domestication des sillons ». Tous les trains alignent leur vitesse sur le plus traînard.

L’engorgement des nœuds fer-roviaires autour des grandes villes ne concerne pas la seule ré-gion parisienne. Le problème est criant autour de Lyon, dans les métropoles du Sud-Ouest et sur tout le littoral méditerranéen. La perte de trente-huit minutes entre Bordeaux et Marseille doit beaucoup aux embouteilla-ges ferroviaires à Toulouse, Montpellier, Nîmes et aux abords de la cité phocéenne.

Les travaux La deuxième grandecause des ralentissements de cir-culation, ce sont les travaux. Le

besoin global de régénération du réseau ferroviaire français – qui a trente ans d’âge en moyenne,mais souvent davantage, en parti-culier en région parisienne – est connu. Il nécessite un effort co-lossal d’environ 3,5 milliards d’euros d’investissement par an.

Les travaux de renouvellementou liés à des grands projets ajou-tent des minutes supplémentai-res, la vitesse étant limitée à 100, 60, voire 40 km/h sur les zones detravaux en question. Pour repren-dre le fil rouge du Paris-Cher-bourg, les travaux du prolonge-ment ouest du RER E entre Pariset Mantes-la-Jolie impliquent un allongement de deux à trois minutes. Ces chantiers, connus deux à trois ans à l’avance, sont intégrés aux plans de circulation et entraînent logiquement une « détente » horaire.

Compte tenu de l’ampleur deschantiers des dix prochaines années, de nouveaux allonge-ments sont à envisager dans les années à venir. « Entre 2017 et2020, 114 millions d’euros detravaux sont prévus pour Paris-Cherbourg, explique Eric Succab,directeur pour des trains Inter-cités de Normandie. On pré-voit en particulier, vers Evreux, des

renouvellements de rail et ballast et une réfection de tunnel. »

Le nombre d’arrêts en gare Lesélus locaux ne sont pas les derniers à réclamer des arrêts en gare, qui intercalent quelques minutes de délai par-ci, par-là. Sur Paris-Cherbourg, la plupart des trains font cinq arrêts inter-médiaires alors que les « boli-des » du passé faisaient trois ar-rêts au maximum et parfoismême un seul.

Autre exemple avec le Paris-Amiens (seule ligne étudiée icidont le temps de parcours estmoins bon aujourd’hui qu’en 1963) : un arrêt a été ajouté à Lon-gueau, dans la banlieue de lacapitale picarde, afin de ne pas concentrer tous les rabattements sur la seule gare du centre-ville.« Il suffit de constater la saturationdu parking de Longueau pour ex-pliquer l’utilité de cet arrêt qui, ef-fectivement, coûte trois minutesenviron », souligne la SNCF.

L’évolution des trains Dernierélément important, la moderni-sation des trains peut parfoisjouer contre l’amélioration dutemps de parcours. Sur Paris-Cherbourg, dans les années 1970,

la ligne voyait passer les turbo-trains, rapides et légers. Mais leur propulsion par turbines à gaz était coûteuse en énergie et leur capacité de transport trop faiblepar rapport aux besoins. Les ra-mes classiques qui les ont rem-placés, capables d’emporter da-vantage de voyageurs, étaient aussi plus lourdes, donc plus lon-gues à faire freiner.

L’électrification, au milieu desannées 1990, accompagnée d’un relèvement de la vitesse maxi-male à 200 km/h sur moins de cent kilomètres a amélioré cette situation. Mais finalement, les problèmes de saturation après Mantes ont eu raison de cette bonification, d’autant plus que des difficultés se sont sura-joutées, liées cette fois à la puis-sance du réseau électrique face àl’augmentation du nombre de trains à faire rouler.

Il y a toutefois une lueur d’es-poir pour Paris-Cherbourg. En2020, elle bénéficiera, comme toutes les lignes normandes, desnouvelles rames automotricesOmneo aux qualités d’accéléra-tion accrues. La SNCF compte aussi dessus pour inverser la ten-dance du rallongement. p

éric béziat

POUR FAIRE PARIS-CHERBOURG, IL FALLAIT

DEUX HEURES ET QUARANTE-DEUX MINUTES

EN 1996. AUJOURD’HUI, IL FAUT PLUS

DE TROIS HEURES

0 50 100 150 200 250 300

Paris-Reims

Paris-Tours

Paris-Le Mans

Lyon-Rouen

Paris-Nice

Lyon-Bordeaux

COMMENT EST COMPOSÉ LE PRIX DU BILLET

Paris-Strasbourg

Paris-Bordeaux

Paris-Marseille

Paris-Rennes

Paris-Lyon

Paris-Poitiers

Paris-Lille

Paris-Montpellier

Paris-Arras*

Paris-Le Mans*

Paris-Nancy

Paris-Mulhouse

Paris-Reims

Paris-Angers*

Paris-Grenoble

Paris-Dijon

Paris-Nantes

Paris-Saint-Etienne

Paris-Narbonne

Bordeaux-Lille**

Paris-Tours*

Paris-Bayonne

Lyon-Rouen***

Paris-Nice

Paris-Toulouse

Paris-Brest

Paris-La Rochelle

Paris-Quimper

Lyon-Bordeaux (2016)

Lyon-Nantes

Lyon-Strasbourg

Paris-Clermont-Ferrand

Paris-Limoges

Paris-Caen

Paris-Cherbourg

Paris-Boulogne

Paris-Rouen

Paris-Amiens

Paris-Orléans

Bordeaux-Marseille

Paris-Le Havre

Lyon-Lille*

Paris-Metz

En 2017, 14 lignes seulement font le meilleur temps

de parcours de leur histoire

Des prix de trajet allant du simple au triple

DISTANCE MOYENNE PARCOURUE PAR HEURE, EN KILOMÈTRETARIF MOYEN AU KILOMÈTRE, EN EUROS, EN 2017

POUR LES TROIS LIGNES LES PLUS CHÈRES ET LES TROIS LIGNES LES MOINS CHÈRES

80 % des circulations de trains de voyageurs concentrées sur 27 % du réseau ferré

RÉPARTITION DES VOYAGEURS PAR TYPES DE TRAINS EN 2016, EN POURCENTAGE

LE TER LE TGVLES TRAINS INTERCITÉS

En 1963 En 2017 Meilleure distance moyenne parcourue par heure entre 1963 et 2017

0,02

0,02

0,03

0,14

0,17

0,18

0,10

0,12

0,13

0,28

0,28

0,26

0,07

0,06

0,09

0,38

0,38

0,35

Prix d’appel en 2de classe Plein tarif en 2de classe

PéagesServices aux clients(distribution, services à bord, services en gare...)

Maintenance Impôts dont TVA

Plein tarif en 1re classe

31 % 29 %

14 %

de sièges disponiblespar jour

1,7 million

circulations par jour en moyenne

des circulations quotidiennesde trains de voyageurs*

5 600

villes desservies

2 348

50 %

temps de parcours moyen par ligne

59 mintemps de parcours moyen par ligne

2 h 46

sièges disponiblespar jour

436 000

circulations par jour en moyenne

800

des circulations quotidiennesde trains de voyageurs*

6 %des circulations quotidiennesde trains de voyageurs*

2 %

villes desservies

225

temps de parcours moyen par ligne

2 h 52

villes desservies

340

sièges disponiblespar jour

149 000

circulations par jour en moyenne

280

Sources : SNCF, ARAFER, LE MONDE

* sur le réseau ferré national.

Près de 40 % des circulations quotidiennes sont réalisées par les Transilien. * 1985 **1998 ***1986

Transilien

70,1TER

17,7TGV

7,4Intercité

3,1Autre

1,7

26 %