mater1908 musee bourges
TRANSCRIPT
MÉMOIRESDE LA
SOCIÉTÉ HISTORIQUELITTÉRAIRE ET SCIENTIFIQUE
DU CHER
( 1908 )
4E SERIE— 22E VOLUME
BOURGES
RENAUD, LIBRAIRE
PARISEMILE LECHEVALIER, LIBRAIRE, 10, RUE DE SAVOIE
LE MUSÉE DE BOURGES
HOTES,DOCUMENTSET SOUVENIRS
SUR SA FONDATION ET SON HISTOIRE
DEUXIEME PARTIE
Le Musée établissement municipal
(1864-1881)
L'année 1864 avait apporté une amélioration notable
à la situation du Musée : il était désormais défini-
tivement constitué et la question de propriété qui le
concernait se trouvait également réglée. L'ère des diffi-
cultés était cependant loin d'être close, car il restait,
pour ne parler que des points les plus importants, à le
pourvoir d'une organisation simple et pratique, et à
l'installer convenablement, conditions indispensables
pour assurer son fonctionnement normal et lui permettrede se développer. Un quart de siècle allait être néces-
saire pour la solution de ces divers problèmes, tant il
est vrai que dans notre pays, tout ce qui touche au passéou à l'art, laisse indifférent la majorité du public et tropsouvent aussi, il faut le dire, les administrations qui ont
la charge de s'en occuper.
A une époque où la diffusion de l'instruction à tous
les degrés et sous toutes les formes est si fort en faveur,
on oublie trop que les musées ne sont pas uniquement
10
138 LE MUSÉE
créés pour le régal de quelques curieux, mais qu'ils
constituent le complément nécessaire de l'école pour
l'aider à former le goût de la jeunesse, en lui fournissant
cet élément d'enseignement si précieux que l'on appelle
les leçons de choses.
Une nouvelle période de l'existence du Musée va donc
commencer, époque toute de tâtonnements, d'essais,
d'organisation, d'études pour l'installation, qui se
prolongera jusque vers 1881 et formera la seconde partie
du présent ouvrage.
Cette période se divisera elle-même en trois phases
successives : de 1864 à 1867, le Musée restera sans orga-
nisation ; de 1867 à 1878, une nouvelle administration
sera constituée, qui, se mettant résolument à l'oeuvre,
s'efforcera de remplir sa mission, chapitre qu'à raison
de son étendue nous diviserons en deux parties, sépa-
rées par la guerre allemande, avant 1870 et après 1870 ;
enfin, de 1878 à 1881, l'administration du Musée, de
nouveau désorganisée par la démission du président de
la Commission, se trouvera sans direction, ne fonction-
nant pour ainsi dire plus, et cependant c'est à ce
moment que se produira inopinément un événement
capital pour son existence, l'acquisition de l'hôtel de
l'ancien jurisconsulte Cujas pour l'y installer.
DE BOURGES 139
1864 à 1867
M. Charmeil, conservateur, seul adminis-
trateur du Musée. — Un arrêté préfectoral du21 janvier 1864, ayant remis à la Ville de Bourges l'admi-
nistration du Musée, on pouvait croire que le soin de sa
réorganisation, dont la nécessité et l'urgence avaient été
si souvent proclamées serait l'objet de ses préoccupa-tions immédiates : il n'en fut rien et pendant trois années
aucune réglementation ne vint assurer son fonctionne-
ment et en déterminer les conditions. M. Charmeil, quirestait seul de l'ancienne administration, avec le titre de
conservateur, dans lequel il avait été confirmé pararrété préfectoral du 16 février 1864, fut obligé d'en
assumer la charge et d'en porter tout le poids.
Organisation financière. — Il faut dire qu'unelégère indemnité en rémunération de ses longs services,entièrement gratuits jusque-là, fut enfin accordée au
conservateur : il lui était attribué un traitement de
600 francs, chiffre qui peut paraître bien minime aprèstrente années d'exercice des fonctions de conservateur
adjoint, puis de conservateur titulaire sans la moindre
rétribution.
Au point de vue financier, la situation du Musée
s'était aussi quelque peu modifiée. Le Département,fidèle à l'engagement qu'il avait pris, continuait à mani-
fester en sa faveur le généreux intérêt qu'il lui avait
témoigné depuis sa création, et le crédit de 1.750 francs
140 LE MUSÉE
inscrit dans les budgets départementaux, y sera main-
tenu sans modification jusqu'au moment où les collec-
tions seront installées à l'Hôtel Cujas.
La part contributive de la Ville, même en tenant
compte de la subvention du Département, s'était elle-
même trouvée augmentée par le fait de la création ou de
l'accroissement de certaines dépenses, telles que le vote
d'un traitement pour le conservateur, l'élévation au
chiffre de 2.400 francs, à partir du 15 décembre 1864(1),
du montant du loyer précédemment fixé à 2.000 francs ;
enfin, l'adoption d'un crédit nouveau de 500 francs poul-
ies frais de transport et de placement des collections.
Voici du reste le texte même de l'article 93 des dépenses
du budget primitif de la Ville de Bourges concernant le
Musée pour l'exercice 1865(2) :
« Traitement du conservateur 600 »
» Salaire du concierge 300 »
» Loyer du local 2.400 »
» Frais de transport et de placement 300 »
3.600 »
En résumé, et déduction faite des 1.750 francs du
Conseil Général, la dépense annuelle de la Ville pour le
Musée devenu municipal, s'élevait à 2.050 francs, au
lieu de 1.250 francs inscrits aux budgets antérieurs pour
le même établissement, alors qu'il était départemental.La Ville eut en outre à solder un certain passif pour
le Musée, montant, rien que pour ce qui était dû aux
héritiers de M. Mater, à la somme de 5.972 fr. 25 (3), se
composant :
(1) Proces-verbaux des délibérations du Conseil municipal de Bourges,registre XXV, n° 240
(2) Ibid... . XXVI. n° 76.
(3) Ibid...., XXV, n° 244 (3 décembre 1864).
DE BOURGES 141
1° De la valeur intrinsèque des médailles d'or ou d'ar-
gent faisant partie du médaillier donné par M. Mater (1),2.177 fr. 15;
2° D'avances diverses faites au Musée par M. Mater,
de 1841 à 1856, montant à 1.199 fr. 50;
3° De ses dépenses pour former la collection de por-
traits ou Biographie iconographique (2), s'élevant, sui-
vant mémoire détaillé, à la somme de 2.595 fr. 20.
Projet d'installation du Musée à l'Hôtel Cujas.— En même temps qu'étaient payées, comme on vient
de le voir, les dettes de rétablissement artistique, dont
la Ville était reconnue seule propriétaire et qu'elle le
dotait des ressources strictement indispensables à son
fonctionnement, l'éternelle question de l'installation du
Musée était reprise à nouveau, mais celte fois, sur
l'initiative d'une Société savante du temps, la Commis-
sion historique du Cher, devenue depuis la Société
historique, qui eut le mérite de préparer la solution quiest intervenue dans la suite.
La Commission historique, préoccupée des conditions
défectueuses dans lesquelles se trouvaient le Musée et la
Bibliothèque de la Ville, chargea une sous-commission
d'examiner si l'Hôtel Cujas pourrait les recevoir l'un et
l'autre. M. Hiver de Beauvoir, président de chambre à
la Cour d'appel de Bourges, qui a marqué son rapide
passage dans notre province par de nombreux et pré-
cieux travaux sur son archéologie et son histoire (3),
(1) V. 1re partie du présent ouvrage, 220, 240-242 (Mém. Soc. historique....
du Cher, année 11)05).
(2) V. Ibid., 247.
(3) Note bibliographique sur l'oeuvre berruyère de M. Hiver de Beauvoir :
Description, d'après la teneur des Charles, du trésor donné par Jean, duc de
Berry, à la Sainte-Chapelle de Bourges, avec une introduction, des notes et deux
notices. (Comm. hist. du Cher, mémoires, T. I, 1re partie, 1857 ; 2e partie,
142 LE MUSÉE
présenta sur cette question un intéressant rapport, bien
oublié de nos jours, qui méritait cependant un meilleur
sort, à cause de la compétence incontestable de celui qui
l'écrivait, et du soin avec lequel le problème de l'instal-
lation du Musée et la solution à lui donner étaient étu-
diés sous tous les aspects. On trouve d'ailleurs dans ce
document des constatations matérielles sur l'état des
choses en 1864-1865, qui sont d'autant plus précieuses
que les lieux se sont profondément modifiés depuis (1).
M. Hiver concluait à la possibilité de loger ensemble
à Cujas le Musée et la Bibliothèque, ce qui avait l'avan-
tage de donner satisfaction à des besoins également
urgents et d'une manière très économique, mais il
n'arrivait à ce résultat, qu'en se trouvant en désaccord
avec l'un des principaux collaborateurs dont il avait
réclamé le concours pour l'étude de cette question.M. Charmeil, c'est de lui qu'il s'agit, avait comme
conservateur du Musée et de la Bibliothèque une com-
1860) — Sur le tombeau de Jean, duc de Berry, conservé à Bourges. (Annuaire
de l'Institut des provinces, des Sociétés savantes et des Congrès scientifiques,XIe vol. de la collection, seconde série, I, 1859.) — La librairie du duc Jean de
Berry au château de Mehun-sur-Yèvre, publiée en entier pour la première fois
d'après les inventaires et avec des notes. Paris, Aubry, 1860. — Notice sur les
pierres sépulcrales du cimetière (les Capucins de Bourges, (Mém. Comin. hist.
du Cher, II, 1861.) — Papiers de Pot de Rhodes (1529-1648), avec une intro-
duction et des notes. (Ibid., Il, 1861-1S6Î.) — Recherches sur les monnaies et
sur la valeur de l'argent en France jusqu'à François 1er. Paris, Aubry, 1804. —
Les hommes d'État du Berry, depuis le duc Jean jusqu'à Henri IV : Guillaume de
Boisratier, archevêque de Bourges (Mém. antiq. du Centre, I, 1867) ; Martin
Congé de Charpeigne, évêque de Chartres et de Clermont, chancelier de France
(Ibid., Il, 1868). -L'église de l'Oratoire de Bourges. (Ibid., I, 1867.) — Le
bas-relief de la chambre du Trésor de l'Hôtel Jacques-Coeur à Bourges. (Ibid., Il,
1818, et mém. lus à la Sorbonne, 1867.) — L'enseignement d'Alciat et de Duaren
à Bourges (mém. lu à la Sorbonne, 1808). — Journal de Jehan Glaumeau, Bourges,
1541-1562, avec une introduction et des notes. Bourges, Just-Bernard, 1868.
(1) Journal du Cher des 12 et 14 janvier 1865 et Courrier de Bourges du
18 janvier. V. Pièces annexes, n° I.
DE BOURGES 143
pétence indéniable, on pourrait dire supérieure à toutes
les autres par la connaissance approfondie qu'il avait
des collections qui lui étaient confiées ; or, il contestait
énergiquement les appréciations du rapport. Dans une
lettre, que l'on trouve dans le Journal du Cher du
19 janvier 1865 (1), il démontrait que M. Hiver s'était
gravement mépris dans le calcul des surfaces dont la
Bibliothèque avait besoin, que de plus il n'avait réservé
aux deux collections qu'il s'agissait de loger côte à côte,
aucun espace pour leur permettre de se développer
parallèlement dans l'avenir. Il ne croyait pas d'ailleurs
à cette extension qui lui paraissait improbable, et on
sait que le Musée, comme la Bibliothèque, se sont
depuis notablement accrus. On peut, à cet égard, comme
argument, citer un fait caractéristique : le Musée installé
à Cujas en 1891 se trouvait, à l'origine, au large dans ce
local et moins de dix-sept années après, c'est-à-dire
aujourd'hui, il y étouffe littéralement, grâce à l'encom-
brement des collections. Que serait-ce si la Bibliothèque
occupait avec lui une partie de l'Hôtel?
Quoi qu'il en soit, le rapport du président Hiver de
Beauvoir et la lettre de M. Charmeil constituent des
documents et une controverse intéressants qu'il était
utile de reproduire en entier. Les conclusions du rapport,
tendant à l'affectation de l'Hôtel Cujas au Musée et à la
Bibliothèque, furent adoptées par la Commission histo-
rique et transmises au Préfet, sous forme de voeu. Ce
magistrat les renvoya au Maire de Bourges, avec avis
favorable (2).La réalisation de ce nouveau projet impliquait la
cession de l'Hôtel Cujas par le Département à la Ville :
(1) V. Pièces annexes, n° II.
(2) Procès-verbaux.. ., XXV, n° 209, séance du 11 février 1815.
144 LE MUSÉE
le Conseil municipal, saisi de la question, se déclara,
par délibération du 11 février 1865, partisan en prin-
cipe du projet (1), sans mettre d'ailleurs beaucoup
d'empressement à profiter des bonnes dispositions du
Conseil Général. Ce n'est, en effet, qu'une année après,
le 10 mars 1866 seulement, que le Conseil municipal
nomma une Commission pour entrer en négociations
avec le Département (2), mais cette fois une prompte
solution intervint, il est vrai qu'elle était négative, car
on décida le maintien du statu quo, solution toujours
facile à adopter. En effet, le Département demandait
75,000 francs de l'Hôtel Cujas, et, dès le 22 avril 1866,
le Conseil municipal, conformément au rapport de sa
Commission, repoussait ce chiffre en se retranchant der-
rière l'insuffisance de ses ressources (3).
Préservation des débris gallo-romains aban-
donnés dans le Jardin de l'Archevêché. —
A la même époque, l'état d'abandon dans lequel on
laissait dans le Jardin de l'Archevêché, gisant sur le
sol, en plein air, exposés aux intempéries des saisons et
aux insultes des hommes, les précieux fragments des
monuments d'Avaricum, découverts lors de la démo-
lition d'une partie de l'enceinte romaine, préoccupaitvivement les personnes respectueuses des choses du
passé. La Commission historique du Cher, sur la
motion de M. Bourdaloue, avait demandé la création
d'un Musée lapidaire dans le Château-d'Eau, alors en
construction, sans que l'on ait paru prêter à cette
démarche la moindre attention (juillet 1864) (4).
(I) Procès-verbaux... XXV, n° 201, séance du 11 février 1805.
(2) Ibid..., XXVI, n° 125.
(3) Ibid..., n° 144.
(1) Journal du Cher du 30 juillet 1804.
DE BOURGES 145
En 1866, la Société historique, qui remplaçait l'an-
cienne Commission, offrit à la Ville de contribuer pourmoitié à l'établissement d'un hangar dont la dépenseétait évaluée à 800 francs. L'affaire fut renvoyée pourétude à l'architecte de la Ville et l'on n'en entendit plus
parler (1).
La Commission du Musée s'occupa également de cette
question dans la séance du 13 août 1869(2), mais il était
réservé à une autre Société nouvellement fondée, la
Société des Antiquaires du Centre, de réaliser enfin
l'oeuvre de préservation dont on ne s'explique pas le
retard et les lenteurs, étant donné surtout qu'il ne
s'agissait pour la Ville que d'une dépense presque insi-
gnifiante à l'origine, lors des premiers pourparlers, et
nulle en dernier lieu.
La Société des Antiquaires, sur le rapport de M. Henri
Fournier, alors conseiller municipal, fut enfin autorisée,le 20 février 1869, à établir à ses frais, dans le Jardin de
l'Archevêché, un hangar en fer pour abriter les pierres
gallo-romaines échappées à la destruction après cinqannées d'abandon, autorisation donnée sous la con-
dition expresse que la Ville conserverait la propriété de
ces pierres et pourrait les retirer quand bon lui sem-
blerait (3). Il y avait là une réserve importante, dont il
était bon de consigner ici les ternies, dans l'intérêt du
Musée municipal.
Dons. —Malgré l'état d'incertitude dans lequel le
Musée se trouvait toujours, les collections continuèrent
à s'augmenter, mais la marche de ces nouveaux progrèsdevient difficile à suivre. On ne continua pas, en effet, à
tenir régulièrement, comme cela se faisait auparavant,
(1) Procès-verbaux...., XXVI, n° 146, 28 avril 1866.
(2) Registre Com. du Musée, 114.
(3) Procès-verbaux...., XXV, nos 133, 151, 163 et 253.
146 LE MUSÉE
les deux registres d'entrée, dont il a été parlé dans la pre-mière partie de ce travail (1), on se borna à commu-
niquer de temps à autre aux journaux paraissant à
Bourges la liste des objets nouvellement donnés ou
acquis, listes éparses aujourd'hui dans les diverses
feuilles locales, où elles sont peu aisées à retrouver.
Cette sorte de publicité, qui présente de sérieux avan-
tages pour intéresser les détenteurs d'objets curieux au
développement des collections, flatter l'amour-propre
des donateurs et déterminer d'autres libéralités, ne peut
suppléer à l'inventaire journalier d'une collection qui
reste absolument indispensable. Il y a donc eu là une
lacune fâcheuse, contraire au règlement de 1834, qu'il
était juste de faire connaître, d'autant plus que dans la
suite, ce mode de publicité, si insuffisant déjà en lui-
même, va disparaître aussi.
Pendant le cours des années 1864, 1865 et 1866, voici,
avec le nom des donateurs, la liste des objets les plus
importants qui furent donnés au Musée :
Baudoin (Madame Agathe) : Portrait de la donatrice et
celui d'Emile Deschamps, médaillons en plâtre de Louis
Ysabeau.
Boichard père : le Retour de la vigne, peinture à
l'huile. (Cat. imprimé de 1869, n° 148.)
Boucher de Perthes : objets préhistoriques en pierre,
os et céramique découverts près d'Abbeville (2).
Bourdaloue-Martin, ingénieur et adjoint au Maire de
Bourges (3) : un onyx gravé représentant l'amour, et
(1) P. 237.
(2) Journal du Cher des 12 et 31 octobre 1865, 10 mai, 6 septembre et 22
août 1800. — Courrier de Bourges des il août, 29 octobre 1805, 10 mai,4 septembre et 10 octobre 1800.
(3) H. BOYER : Le Musée de Bourges. — M. Boucher de Perthes et l'antiquitéde la race humaine. (Journal du Cher des 12 janvier, 2, 7, 28 février et 2 avril
1807.)
DE BOURGES 147
divers autres objets antiques trouvés dans les fouilles
de l'Abattoir et du Château-d'Eeau, des antiquités
égyptiennes découvertes dans les travaux du Canal de
Suez, un paysage du peintre berruyer Eugène Desjobert.
Boyer (Hippolyte), qui fut successivement bibliothé-
caire adjoint de la ville de Bourges, archiviste-adjoint
du déparlement du Cher, bibliothécaire titulaire et
enfin archiviste titulaire : divers objets gallo-romains
en fer et en bronze, un carnet de bal en nacre du
XVIIIe siècle, plusieurs cachets en cuivre des loges franc-
maçonniques de Bourges.
Casanova : Pie IX, la Catholicité et l'Evangile, sta-
tuettes en biscuit.
Charmeil, conservateur du Musée : Poignard en
bronze trouvé près de Vasselay ; sceau royal d'Issoudun
en cuivre.
Desjobert, pharmacien à Châteauneuf - sur - Cher :
Vitrail aux armes de Jacques Coeur, provenant d'une
maison de Châteauneuf qui appartenait au célèbre
Argentier de Charles VII. (Cat. imp., n° 356.)
État (L') : le Retour des champs, tableau par Appian
(Ibid., n°170);
Combat d'avant-garde dans le Dahra, peinture par
Rigo (Ibid., n° 163) ;
Anne de Boleyn devant ses juges, tableau par Léon
Goupil (Ibid., n° 176) ;
Joseph expliquant les songes, tableau par Leyen-decker.
Guénivet, maire de Vierzon : Grand mortier de cuisine
à quatre faces tournant sur pivot, provenant de l'ancien
château de Vierzon.
Jollet : Contrat sur parchemin long de 1 mètre 60,
passé en 1498 devant le prévôt de Bourges.
Leclère, conservateur des minutes du Nivellement gé-
148 LE MUSÉE
néral : le Ravissement de Saint-Etienne, ébauche en cire
de Gois.
Lemoine, cafetier à Bourges : Médaille du maire de
Bourges, Soumard de Crosses, 1773, argent.
Loiseau, concierge de la mairie : Pancarte de civisme
en usage en 1793.
Mairie de Bourges : Portrait du général Petit par Boi-
chard (Cat. imp., n° 279), deux Drapeaux de 1848, l'un
des pompiers, l'autre des réfugiés polonais, magnifique
Cartel en bois doré, de l'époque Louis XIV, provenant
de l'ancien Hôtel de l'Intendance, Médaille de Germain
Lelarge, maire de Bourges en 1686, bronze.
Mater (Alphonse), conseiller à la Cour d'appel : Portrait
en pied et en costume de premier président de C. Denis
Mater, peint par Guignet.
Merceret : 2 Assiettes patriotiques en faïence de Nevers.
Merle (Robert), artiste peintre, avait légué au Musée
tous ses tableaux, dessins, gravures et moulages, parmi
lesquels on doit noter une bonne copie réduite des
Enfants d'Edouard, d'Eugène Delacroix (1).Moreau (Louis), de Sancergues : la Présentation au
Temple, remarquable composition de Jean Reslout, pro-
venant de l'ancienne abbaye de Fontmorigny (Cat. imp.,n° 75).
Roger, de l'Ile-d'Or : Bâton de la Confrérie de Saint-
Pierre et de Saint-Paul, bois doré.
Saunier, ancien coiffeur à Bourges, fixé à Santa-Fé de
Bogota : une collection d'objets exotiques, provenant de
la Nouvelle-Grenade, se composant de minéraux, fruits,
végétaux, insectes, coquillages, peaux de serpent et d'oi-
seaux, enfin de monnaies du pays en argent natif, etc.
(1) Ce legs, fait par testament du 12 mars 1860, fut accepté par délibération
du Conseil municipal du 30 novembre 1800. (Proces-verbaux...., XXVI, n° 213.)
DE BOURGES 149
Thouvenel, de Saint-Florent : une importante collec-
tion d'oiseaux de France, un Herbier.
Tourangîn (Gustave) : une figurine en bronze de
Mercure.
Acquisitions. — Parmi les acquisitions faites par le
Musée pendant la même période, on peut signaler :
Antiquités : une hache en bronze et un poignard de
même métal trouvés à Mehun-sur-Yèvre, — une paire de
landiers du XVe siècle. — Tableaux : l'Amour caressant
Vénus, belle peinture sur bois de l'école du Primatice,
provenant du château de Castelnau (Cat., n° 6), une tête
de Vierge, de l'école du Guide (Ibid., n° 59), le portraitde Mlle de Charolais, dame de Montrond, en costume
de récollette (Ibid., n° 39), — deux dessins originaux de
Berlier, — un ancien paravent chinois de l'époque de
Louis XIV, — une assiette en faïence italienne décorée
d'olives en relief, une daubière en terre de La Borne
signée Talbot, — divers objets de la loge franc-maçon-
nique de Bourges, consistant en son oriflamme, ses
papiers, des dessins la concernant, les colliers de ses
dignitaires avec leurs insignes, etc.
150 LE MUSÉE
§ II
1867 à 1870.
Arrêtés du 5 janvier 1867. — Le 5 janvier 1867
M. Planchat, alors maire de Bourges, prit deux arrêtés
pour constituer l'administration du Musée : l'un déter-
minait les conditions de son fonctionnement, l'autre
établissait une Commission chargée de son administra-
tion. Depuis trente-neuf années que ces arrêtés sont en
vigueur sans avoir subi aucune modification, le Musée
a progressé d'une façon constante, à peine entravé par
quelques difficultés momentanées, de telle sorte que
l'on peut dire que l'organisation qui lui fut donnée à
cette époque était heureusement adaptée à ses besoins.
Cette appréciation, basée sur l'expérience, ne saurait
être infirmée par la nécessité de certaines modifications
de détail dont la nécessité paraît être aujourd'hui dé-
montrée. Voici le texte des arrêtés du 15 janvier 1867
qui ont été la charte constitutionnelle du Musée :
Nous, Maire de la Ville de Bourges, Officier de la
Légion d'honneur,
« Considérant que le Musée, fondé en 1834 par les
» soins de feu M. le Premier Président Mater, s'est,
» depuis lors, successivement enrichi grâce à son dé-
» vouement et à son zèle persévérant et éclairé, ainsi
» que par les libéralités spontanées d'un grand nombre
» de personnes notables de ce pays ;
DE BOURGES 151
» Qu'il importe aujourd'hui que le Musée se trouve
« placé sous la gestion directe et exclusive de l'admi-
» nistration municipale, de prendre les mesures néces-
» saires pour faciliter de plus en plus le développement
» de cet établissement scientifique, pour en accroître
» ou compléter les collections, assurer leur classement
» méthodique et veiller à leur conservation ;
» ARRÊTONS :
» ARTICLE PREMIER. — Le Musée de Bourges est placé,
» comme tous les autres établissements municipaux,» sous l'administration directe du Maire.
» ARTICLE 2. — Il est pourvu aux dépenses du Musée
» au moyen des crédits alloués chaque année au budget» par le Conseil municipal.
» Les subventions accordées par l'Etat ou le Départe-» ment, les dons ou legs en argent duement acceptés
" seront versés dans la Caisse municipale.» ARTICLE 3. — Les objets d'art ou autres légués au
» Musée et acceptés par le Maire à ce autorisé, ceux con-
» cédés par l'Etat ou donnés par des particuliers, enfin
» ceux acquis sur les fonds du budget sont déposés» entre les mains du Conservateur.
» ARTICLE 4. — Il est institué près le Musée une Com-
» mission consultative et de surveillance.
» Cette Commission est composée d'un Président et
» de quinze membres titulaires. Il peut y être adjoint» des membres correspondants non résidant à Bourges.
» ARTICLE 5. — Le Président et les membres de la
» Commission sont nommés par le Maire.
» La Commission désigne à la majorité son Secrétaire.
» ARTICLE 6. — La Commission donne son avis sur
» les acquisitions et échanges d'objets d'art ou autres
» projetés par l'Administration municipale, et, elle lui
152 LE MUSÉE
» fait, au besoin, des propositions dans le même but ;
» elle provoque par chacun de ses membres, les dons et
» libéralités en faveur du Musée ; elle veille à l'inscrip-» lion sur l'inventaire des objets concédés, donnés ou
» acquis ; elle concourt, avec le Conservateur, au classe-
» ment méthodique des diverses collections et à la con-
» fection du catalogue ; enfin elle propose au Maire
» toutes les améliorations qu'elle croit utile dans l'in-
» térêt du Musée ou du public.» Pour faciliter son travail, la Commission se subdi-
» vise en sections, correspondant chacune aux diverses
» collections artistiques ou scientifiques existant dans
» le Musée.
» Cette subdivision aura lieu dans la première réunion
" de la Commission.
» ARTICLE 7. — Le Président correspond seul avec le
» Maire.
» ARTICLE 8. — La Commission se réunit, en séance
» ordinaire, sur la convocation du Président, quatre fois
» par an, dans la première dizaine des mois de février,
» mai, août et novembre.
» Elle peut se réunir extraordinairement quand besoin
» est.
» Les réunions auront lieu à l'Hôtel de Ville.
» ARTICLE 9. — Un Conservateur, rétribué par la Ville,
» est attaché au Musée et placé sous l'autorité directe
» du Maire.
» Le Conservateur assiste aux réunions de la Com-
» mission avec voix consultative.
» ARTICLE 10. — Le Conservateur a la garde et la con-
» servation des objets existant dans le Musée et il en est
» responsable.» Il est chargé de la confection du catalogue, du ran-
» gement et du classement des objets. Il doit s'aider,
DE BOURGES 153
" dans ce travail, des avis de la Commission, au con-
» cours effectif de laquelle il doit aussi recourir.
» Il tient un registre d'entrée ou inventaire, par ordre
de date, de tous les objets déposés au Musée.
» Tous les trois mois, s'il y a lieu, un extrait de ce
» registre, contenant la désignation sommaire des objets» et leur origine, est publié par ses soins dans les jour-» naux de la localité.
» Tous les ans, un récolement des objets inscrits sur
» l'inventaire est fait par le Conservateur, assisté de deux
» membres de la Commission par elle à ce désignés.» Il est dressé procès-verbal de cette opération, lequel
» est transmis au Maire par le Président de la Commis-
» sion qui y joint, s'il y a lieu, ses observations.
» ARTICLE 11. — Le concierge et les gardiens du
» Musée sont nommés par le Maire, sur l'avis du Con-
» servateur et de la Commission.
» Ces agents sont placés sous la direction immédiate
» du Conservateur.
» Ils peuvent être révoqués sur sa demande ou celle
» de la Commission.
» ARTICLE 12. — Un règlement de service intérieur,
» tant au point de vue de la conservation et de la sûreté
» des collections du Musée, qu'au point de vue du pu-» blic ou des artistes admis à les visiter, sera préparé
" par les soins de la Commission du Musée et soumis à
« notre approbation » (1).
Le même jour paraissait l'arrêté de nomination des
membres de la Commission.
« Sont nommés Président et membres de la Commis-
» sion consultative et de surveillance instituée par l'ar-
" ticle 4 de notre arrêté, savoir :
(1) Reg. Com. Musée, 51-53.
11
154 LE MUSÉE
Président :
» M. Alphonse MATER, conseiller à la Cour Impériale.
Membres titulaires :
» MM. DE BENGY-PUYVALLÉE (Charles), propriétaire.
BERRY, conseiller honoraire à la Cour lmpériale.
BORGET, artiste peintre.
BOURDALOUE, ingénieur civil, adjoint au Maire.
BOYER (Hippolyte), archiviste-adjoint.
BUSSIÈRE, architecte.
DUMOUTET (Jules), sculpteur.
FOURNIER (Henri), avocat.
DE LAPPARENT, chef de bataillon du Génie.
LOURIOU, avocat.
MÉLOIZES (Albert DES), avocat.
RAPIN (Edmond), juge suppléant au Tribunal
de première instance, adjoint au Maire.
RHODIER, greffier du Tribunal civil.
ROMAGNESI, ancien professeur.
TARLIER, architecte.
Membre correspondant :
» M. COUGNY, professeur de dessin à Paris » (1).
M. Dumoutet n'ayant pas accepté, fut remplacé le 28
janvier suivant par M. Alphonse BUHOT DE KERSERS (2).
Telle fut, à l'origine, la composition de la Commission
du Musée que les changements de résidence, les démis-
sions et surtout la mort, devaient rapidement modifier :
on trouvera aux Pièces annexes la liste complète des
membres qui en firent partie (3). Aujourd'hui, elle est
entièrement renouvelée, sauf une exception, elle n'a
(1) reg. Com. Musée, 51.
(2) Ibid., 49.
(3) N° 111.
DE BOURGES 155
plus qu'un seul membre de la première heure, le Mar-
quis Albert des Méloizes, cher à tous ses collègues, non
pas seulement à cause du titre peu enviable de doyen quilui appartient, mais aussi en raison de la sympathie
générale que lui attirent l'aménité de son commerce et
l'autorité incontestée dont il jouit comme artiste et
comme savant.
Installation de la Commission, sa division
en 3 sections. — Le 27 janvier 1867, la Commission
fut installée par le vénérable M. Planchat en personne,
qui lui souhaita la bien-venue, en remerciant chacun
de ses membres d'avoir bien voulu répondre à son
appel (1).
Le 4 février elle commença ses travaux. Son premiersoin fut de compléter son bureau en nommant un secré-
taire : M. Hippolyte Boyer, que ses habitudes labo-
rieuses, ses qualités comme archéologue et comme
érudit, désignaient au choix de ses collègues, fut chargéde remplir ces délicates fonctions.
Conformément au paragraphe 3 de l'article 5, la Com-
mission se partagea en trois sections portant les titres
de Section des Arts (Peinture, Sculpture, Gravure, Ar-
chitecture, Dessins divers), —Section des Sciences (Bota-
nique, Minéralogie, Zoologie, Mécanique), — Section
d'Histoire et d'Archéologie (Histoire, Médailles, Antiquités,
Objets divers), et composées chacune de 5 membres
recrutés d'après leurs aptitudes particulières.
A la Section des Arts appartenaient MM. de Bengy,
Borget, Bussière, Romagnesi et Tarlier ; à la Section des
Sciences, MM. Bourdaloue, de Lapparent, Louriou, des
Méloizes et Rhodier; enfin à la Section d'Histoire et d'Ar-
(1) Reg. Com. Musée, 49.
156 LE MUSÉE
chéologie, MM. Berry, Boyer, Buhot de Kersers, Four-
nier et Rapin (1).
La composition des Sections, dont chacune devait
nommer son rapporteur et choisir ses heures de travail,
se modifia peu à peu, par suite des changements que la
Commission elle-même eut à subir, sans d'ailleurs qu'il
paraisse utile d'en suivre le détail (2).
Le système des Sections se partageant le travail qu'exi-
geait le Musée, ne donna pas à Bourges les résultats
heureux qu'on était en droit d'en espérer. Le manque
d'assiduité des membres qui constituaient chacune
d'elles en est la cause principale, ce qui fit qu'au bout
de peu de temps les Sections cessèrent de se réunir.
Règlement intérieur. — La Commission s'occupa
ensuite de l'élaboration d'un règlement de service inté-
rieur dont elle chargea une Sous-commission, compo-
sée de MM. Berry, de Lapparent et des Méloizes, auxquels
le Conservateur fut adjoint. Sur le rapport de M. Berry,
la Commission, dans sa séance du 22 février 1868 (3),
adopta un projet de règlement qui, approuvé par le
maire, devint le règlement intérieur du Musée (4).
Malgré les dispositions que l'on lâchait de prendre
pour assurer le bon fonctionnement de cet établisse-
ment, il était souvent difficile de maintenir le bon accord
entre ses différents organes, d'obtenir de tous l'assi-
duité indispensable ou l'obéissance aux arrêté et règle-
(1) Reg. Com. Musée, 58.
(2) A la mort de M. de Bengy, M. de Méloizes, qui appartenait à la section des
sciences, passa à la section des arts et eut lui-même pour successeur M. Peneau
dans la section des sciences. (Ibid., 87.)
(3) Ibid., 00 et s.
(4) Ibid., 70. — Le règlement intérieur est reproduit aux Pièces annexes,
n° IV.
DE BOURGES 157
ment qui fixaient les obligations et les devoirs de chacun.
Un conflit assez vif s'éleva au cours des années 1867,
1868 et 1869, entre le concierge du Musée et le conserva-
teur sous les ordres directs duquel il était placé. Le
concierge refusait de se conformer aux instructions quelui donnait M. Charmeil et était arrivé à se mettre en
véritable rébellion contre son autorité. Pour mettre fin
à cette situation et délimiter rigoureusement les droits et
les obligations des parties en désaccord, la Commission
réglementa de la façon la plus précise les fonctions du
concierge par des dispositions qui devinrent l'arrêté du
5 mai 1868 (1), mais le conflit ne cessa véritablement
que par la mort du concierge qui survint en 1869.
Question de la sortie des oeuvres d'art. — La
nécessité de défendre les intérêts bien compris du Mu-
sée mit parfois la Commission en conflit avec M. Plan-
chat lui-même, qu'elle entourait cependant de tous ses
respects, mais que sa bonté entraînait parfois à accorder
des faveurs dangereuses pour le bien des collections.
Depuis un certain temps, on avait pris l'habitude de
laisser sortir du Musée certains objets, surtout des ta-
bleaux, dont le prêt était demandé pour pouvoir les étu-
dier ou les copier. Sans doute, la sortie de ces objetsn'était autorisée qu'à bon escient, mais leur absence
avait l'inconvénient de créer des vides dans les salles,
d'exposer les objets eux-mêmes à des accidents, enfin
de leur faire courir des dangers qui n'existaient pas au
Musée.
Ce premier abus en avait bientôt entraîné d'autres :
l'emprunteur régulièrement autorisé passait de son
propre chef à d'autres personnes les objets qui lui
avaient été confiés en propre, et cela à l'insu de l'admi-
(1) Reg. Com. Musée, 95.
158 LE MUSÉE
nistration du Musée, qui ne savait même plus où se
trouvaient les objets prêtés.
Il arriva même, la Commission l'a toujours ignoré,
que l'on confiait aux acteurs (le Musée était alors ins-
tallé en face du Théâtre) les armes dont ces derniers
avaient besoin pour jouer certains de leurs rôles. Pour
beaucoup de personnes, le Musée n'était qu'un magasin
de modèles ou d'accessoires, qui devaient être à la dis-
position du public; aussi a-t-on été très surpris quand
celui qui écrit ces lignes refusa un jour de donner mo-
mentanément pour une cavalcade costumée, les casques
et les cuirasses qu'on lui demandait.
Pour mettre lin à ces fâcheuses pratiques, la Commis-
sion, lorsqu'elle élabora l'article 5 du Règlement inté-
rieur, y avait introduit la défense absolue de laisser sor-
tir aucun objet des collections, sans l'autorisation spéciale
du maire (1), exception qui était de droit, puisque ce
dernier avait conservé l'administration directe du Mu-
sée, mais dont la Commission espérait bien qu'il n'use-
rait pas sans prendre son avis de Commission consulta-
tive et de surveillance.
Le 10 mars 1867, la Commission fut appelée à expri-mer son sentiment sur la demande du prêt d'un tableau :
elle déclara qu'elle était formellement opposée à la sor-
tie d'aucune oeuvre d'art, interdiction qui imposaitd'ailleurs l'obligation d'établir au Musée même une
salle de travail pour les amateurs (2).Le 19 novembre suivant, elle était saisie d'une autre
demande semblable à laquelle elle répondit par un nou-
veau refus, avec les mêmes conclusions pour l'ouverture
d'une salle pour les travailleurs (3).
(1) Reg. Com. Musée, 65.
(2) Ibid., 61).
(3) Ibid., 76.
DE BOURGES 159
M. Planchat parut d'abord disposé à se ranger à l'avis
de la Commission (1), mais la première demande dont
on vient de parler ayant été renouvelée à la fin de l'an-
née 1868, le maire fit connaître qu'il entendait à l'avenir
et d'une façon absolue rester seul juge de la décision à
prendre (2), les abus seuls étant à craindre. La Com-
mission crut de son devoir, dans la séance du 11 dé-
cembre de la même année, de déclarer qu'elle main-
tenait son avis antérieur sur la nécessité d'interdire
complètement la sortie des oeuvres d'art du Musée (3).
M. Planchat passa outre et autorisa le prêt du tableau
qui lui était demandé, ce qui provoqua la démission
d'un membre de la Commission, M. Rorget, qui, comme
artiste, connaissait trop bien les inconvénients de sem-
blables pratiques. On eut beaucoup de peine à le faire
revenir sur sa détermination ; il avait eu d'ailleurs l'en-
tière approbation de ses collègues, qui prirent à ce sujetune délibération proclamant qu'il avait obéi à un senti-
ment juste en appréciant la situation du Musée et de la
Commission, surtout au point de vue de la dignité (4).Il semble d'ailleurs que cet incident ait produit un
heureux résultat et que la fermeté de l'attitude de la
Commission ait fait juger au maire qu'il était préférable
de ne pas recommencer à provoquer un nouveau conflit,
car en fait, à partir de ce jour, l'article 5 du Règlement
intérieur reçut la stricte application qu'exigeait l'intérêt
bien compris du Musée.
Projet d'installation du Musée dans l'ancienne
église des Carmes. — La Commission qui s'occupait
(1) Reg. Com. Musée, 79.
(2) Ibid., 101.
(3) Ibid.
(4) Ibid., 107.
160 LE MUSÉE
avec tant de zèle de toutes les questions qui pouvaient
assurer le bon fonctionnement du Musée, ne pouvait
négliger la plus urgente et la plus importante de toutes,
celle de son installation définitive. Cet intéressant sujet
fut traité dans les séances des 9 août et 19 novembre
1867, 14 février et 1er mars 1868 et 13 août 1869 (1), mais
il régna tant d'indécision dans les discussions et même
les décisions de la Commission, que le vote qui finit par
triompher n'avait pas l'autorité nécessaire pour peser
suffisamment sur l'autorité municipale.La Commission fil appel aux lumières des architectes
qu'elle comptait dans son sein : M. Bussière, architecte
du département, voulut bien lui prêter son concours. Il
proposa de placer le Musée dans l'ancienne église des
Carmes, dont il évaluait les réparations et les travaux
d'installation à la somme de 50.000 francs ; le voisinage
de la caserne, qui était alors située à côté, offrait toutes
les facilités désirables pour effectuer les agrandisse-ments qui deviendraient nécessaires. Aussi la Commis-
sion ayant adopté, dans sa séance du 19 novembre, le
principe de l'installation du Musée dans l'église des
Carmes, chargea son Président de faire auprès du maire
les démarches indispensables pour obtenir l'approbation
de cette décision et en préparer l'exécution, en poursui-
vant auprès de l'administration militaire la restitution
de cet ancien édifice religieux occupé par l'artillerie.
Tout paraissait donc définitivement arrêté de la partde la Commission, quand à la séance suivante, le 14 fé-
vrier 1868, lorsque le Président eut rendu compte de
l'entrevue, peu décisive d'ailleurs, qu'il avait eue avec le
maire, la discussion reprit inopinément et vint remettre
en question le choix qui avait été fait. On mit en
(1) Reg. Com. Musée, 73, 70, 79, 81, 83 et 115.
DE BOURGES 161
doute la possibilité d'obtenir un bon résultat de la trans-
formation en Musée de cette ancienne église, que l'on
jugeait moins bien disposée pour une semblable desti-
nation, que ne l'était, par exemple, l'Hôtel Lallemant.
En faveur de ce dernier édifice se révélèrent tout à coupde fervents partisans, parmi lesquels se trouvaient
MM. Rapin, Louriou, Boyer et Berry. Le vote antérieur
en faveur des Carmes fut cependant confirmé une
seconde fois, le 1er mars suivant, mais on comprend
qu'un choix si hésitant et si discuté n'avait pas l'auto-
rité qu'il fallait pour s'imposer à la municipalité, alors
surtout qu'un des membres de la Commission, M. l'ad-
joint Rapin, était justement un des avocats les plus con-
vaincus de la solution contraire. D'ailleurs, la continua-
tion de l'occupation militaire de l'église des Carmes, quise prolongea encore pendant de longues années, ne per-mit pas d'envisager sérieusement la possibilité d'exami-
ner la question d'une utilisation nouvelle de cet édifice.
Catalogue du Musée : la Peinture.— MM. Char-
meil et Antoine Cougny, ce dernier ancien conservateur-
adjoint du Musée, auquel il était resté attaché comme
membre correspondant de la Commission, s'occupaient
depuis quelque temps de la confection du catalogue. La
première partie de ce travail, concernant la Peinture, se
trouvant terminée au commencement de l'année 1869,
fut soumise par la Commission à sa section des beaux-
arts, qui lui donna son entière approbation (1). La Com-
mission émit en outre le voeu que ce catalogue fût im-
primé, ce qui fut exécuté (2).Cet ouvrage se divisait en trois parties : Peinture.
— Miniatures, Gouaches, Aquarelles, Dessins, Pastels
(1) Reg. Com. Musée, 107 et 112.
(2) Catalogue du Musée de Bourges. — Peinture. — Imprimerie et litho-
graphie de A. Jollet. 1869, in-12 de 55 p. Il fut tiré à 1.000 exemplaires.
162 LE MUSÉE
et Vitraux et comprenait 392 articles. C'est un travail sé-
rieux, fait avec un véritable sens artistique, une science
indiscutable de la peinture et de son histoire, qu'aidait
une connaissance précieuse, dans la circonstance, du
passé du Berry et de la provenance d'un grand nombre
de ces objets d'art. Si on relève certaines erreurs d'attribu-
tion, il ne faut pas oublier qu'il s'agit souvent d'ouvrages
non signés et de jugements que n'appuyait encore aucune
appréciation antérieure. Tel qu'il est, ce premier essai de
catalogue sera d'une grande utilité pour ceux qui vou-
dront un jour reprendre ce travail délicat, qui sera
sans doute remis bien des fois sur le métier avant d'être
définitif.
Dans l'intention de MM. Charmeil et Cougny, le cata-
logue des collections devait être continué immédiate-
ment. Dans la séance du 13 août 1869(1), diverses expli-
cations furent échangées sur la marche à suivre, sur la
série par laquelle on continuerait et la classification des
objets à décrire. On décida que l'on s'occuperait d'abord
de l'ameublement, section dans laquelle entreraient
" les meubles et les tapisseries, les émaux, faïences et
» verreries. Les objets d'horlogerie, les armes et bijoux,» les pièces de serrurerie et ferronnerie ; enfin dans une
» section supplémentaire se placeront les objets divers
» qu'il sera impossible de ranger parmi les autres...(2)»
Malheureusement, la continuation du catalogue resta
à l'état de projet, et la Peinture est la seule partie des
collections dont la description ait été faite. On doit
regretter que M. Charmeil, si expert en matière d'art et
de curiosité, et si au courant des choses du Musée, n'ait
pas pu donner une suite au travail qu'il avait si bien
(1) Reg. Com. Musée, 114 et 115.
(2) Ibid., 115.
DE BOURGES 163
commencé : les malheureux événements de 1870-1871
arrêtèrent l'entreprise. C'était d'ailleurs au Conserva-
teur, fonctionnaire rétribué, qu'incombait, aux termes
de l'article 10 de l'arrêté constitutif du Musée, la confec-
tion du catalogue.
Réclamations du comte Jaubert. — Le comte, la
comtesse Jaubert, et même Mlle Jaubert, avaient dès le
début participé à la fondation du Musée par divers
dons, notamment par celui d'un important herbier (1) ;
comme ministre, M. Jaubert avait pu rendre de précieux
services à la création poursuivie par son collègue de la
députation du Cher. A la fin de l'année 1868, le comte
Jaubert, de passage à Bourges, visita le Musée et fut
fâcheusement impressionné par son installation si dé-
fectueuse, par l'apparence de désordre des différentes
collections et surtout par le mauvais état de certaines
d'entre elles, parmi lesquelles se trouvait justement son
herbier.
Sous l'empire du premier mouvement, il adressa à un
journal local, le Courrier de Bourges (2), un véritable
réquisitoire qui se terminait en termes comminatoires :
« Une question de droit s'est posée, disait-il, celle de
» savoir jusqu'à quel point les directeurs seraient fon-
» dés à détenir dans l'état actuel de cet établissement
» les objets qui le composent. Apparemment, les dona-
» teurs ont eu en vue autre chose qu'une sorte de ma-
» gasin de bric-à-brac, qu'on me passe l'expression ;
» du jour où il serait démontré que le Musée est cons-
» titué de telle sorte qu'il est devenu absolument impro-» pre à sa destination et qu'on a renoncé à l'améliorer,
(1) Première partie du présent ouvrage, 242.
(2) Numéro de novembre 1808.
104 LE MUSÉE
» l'intention originaire serait méconnue et chacun sem-
» blerait autorisé à reprendre ce qu'il a donné. »
Entendre qualifier notre pauvre Musée de « magasin
de bric-à-brac » était pénible pour ceux qui travaillaient
depuis si longtemps à sa formation, et cependant, pour
qui a connu l'ancienne installation de ses collections en
face du Théâtre, il est impossible de contester que celle-
ci tenait plutôt de la boutique d'un marchand de vieil-
leries que d'un Musée public. D'un autre côté, la conclu-
sion à laquelle aboutissait le comte Jaubert, le retrait
des objets donnés et la dispersion des collections qui en
était la conséquence, se comprenait parfaitement, et
puisque la ville de Bourges ne se décidait pas à faire le
nécessaire pour constituer un Musée digne de ce nom,
il fallait avoir le courage de le dire et de mettre fin à une
tentative dont la réalisation était poursuivie depuis trop
longtemps dans des conditions invraisemblables.
Il est inutile d'ajouter que l'installation défectueuse
du Musée n'était nullement imputable aux administra-
teurs de cet établissement, dont on a vu les réclama-
tions incessantes et les démarches continuelles pour
obtenir l'amélioration de cette situation. Il en est de
même du désordre des collections dont se plaignait le
comte Jaubert : elles étaient rangées comme elles
l'étaient déjà du temps de M. Mater, c'est-à-dire aussi
bien que le permettait un local très exigu et mal appro-
prié à une semblable destination; il n'y avait d'autre
changement que celui qu'avait imposé la nécessité de
serrer des objets déjà trop nombreux, pour faire place
aux nouveaux dons et aux nouvelles acquisitions, aug-
mentations incessantes qui faisaient croire à un désor-
dre récent dans ce qui n'était qu'un encombrement
chaque jour grandissant : ici encore aucune faute n'était
donc imputable aux administrateurs du Musée.
DE BOURGES 165
Un point sur lequel M. Jaubert avait plus facilement
raison, c'est quand il signalait le mauvais état d'entre-
tien des collections d'histoire naturelle, telles que les
herbiers, notamment celui qu'il avait donné, et aussi de
la collection d'oiseaux de M. Thouvenel et des insectes
de M. Mater. Des collections de ce genre exigent les
soins continuels de spécialistes, de nombreuses dé-
penses d'entretien ou de remplacement, et, par suite, ne
pouvaient être traitées comme il leur conviendrait dans
un établissement ne possédant ni local convenable, ni
budget sérieux.
Un unique Conservateur, dont la compétence artis-
tique était incontestable, mais qui était absolument
étranger aux connaissances scientifiques variées qui lui
eussent été nécessaires, était incapable d'assumer seul
une charge comme celle qui lui était imposée par la réu-
nion sous son administration de collections aussi nom-
breuses que disparates.
M. Jaubert avait bien compris la difficulté du rôle qui
était imposé au Conservateur, car dans son article il pré-conisait une réforme qui eût sans doute remédié à bien
des vices de l'organisation du Musée, vices qui existent
encore de nos jours et dont récemment encore on faisait
ressortir les inconvénients : c'était de séparer en deux
les collections du Musée et de constituer un Musée d'his-
toire naturelle et de sciences et un Musée d'antiquités et
d'art, ayant chacun une administratiou distincte, spé-cialisée et de compétence convenable. Voici ce qu'il di-
sait sur cette question restée toute d'actualité :
» Qu'y aurait-il donc à faire? Evidemment, la pre-» mière mesure à prendre serait de trier tous les objets» en deux grandes sections, l'une de l'histoire naturelle,
» l'autre des antiquités et de l'art, et d'aviser pour l'une
» d'elles à l'appropriation d'un nouveau local, en dehors
166 LE MUSÉE
» du bâtiment actuel dont la Ville est locataire, celui-ci
» simple d'apparence, et suffisamment vaste, au moins
» présentement, pour l'arrangement de nos richesses en
» histoire naturelle, y resterait exclusivement affecté,
» en se réservant d'annexer plus tard, au même titre de
» location, la maison attenante qui appartient au même
» propriétaire.» Il faudrait loger ailleurs les antiquités et les objets
» d'art. Serait-il donc si difficile de trouver à Bourges
» un édifice assorti à une pareille destination par le
» caractère même de son architecture et par les souve-
» nirs qui s'y rattachent? La maison de Cujas, aujour-
" d'hui livrée, par une bizarre inconséquence, au service,
» très respectable d'ailleurs, de la gendarmerie qui ne
» réclamait qu'une caserne, ne semble-t-elle pas désignée» tout naturellement pour l'usage que nous indiquons?» Un autre bijou d'architecture, la maison des Alle-
» mands, rue des Vieilles-Prisons , répondrait aussi
» et parfaitement à la nouvelle destination Enfin,
» l'ancienne église des Carmes, encore une propriété de
» la Ville, et qu'elle n'a fait que prêter au Ministre de la
» Guerre, en attendant l'achèvement des constructions
» de l'artillerie, peut devenir disponible d'un instant à
» l'autre.
» De telles transformations, j'en conviens, ne sont pas
» en elles-mêmes d'une exécution très facile. On sait
» aussi qu'à Bourges les affaires se traitent d'ordinaire
» avec une grande circonspection. Certes, on est loin
" d'y être indifférent aux projets d'utilité publique, mais
» il faut beaucoup de temps pour qu'une idée, dont nul
» ne conteste d'ailleurs l'opportunité, passe de la théorie
» à la pratique, témoin la translation définitive de la
» Mairie elle-même, objet de tant de discussions, et qui
» est encore a l'étude, celle de la Bibliothèque. On s'excuse
DE BOURGES 167
» sur l'exiguïté des fonds disponibles, en face des autres
» engagements que la Ville et le Département ont déjà» contractés, pour concourir avec l'Etat à la création des
» grands Etablissements militaires, comme si nos res-
» sources financières ne s'étaient pas accrues en propor-» tion même de nos sacrifices. »
M. Jaubert avait sagement apprécié la situation, et
c'est dans la spécialisation aussi complète que possibledes Musées que réside leurs chances de prospérité.
Imposer à un artiste ou à un archéologue la mission de
conserver des collections d'histoire naturelle, c'est lui
mettre un boulet au pied en l'obligeant à s'occuper de
questions qui lui sont étrangères et c'est en même temps
exposer ces collections à souffrir ainsi des fautes d'une
administration involontairement désastreuse.
M. Charmeil voulut répondre aux critiques de M. Jau-
bert et adressa au Journal du Cher une lettre à cet
effet (1). Sur la plupart des points ses observations
étaient décisives. Il montrait d'ailleurs que le véritable
coupable était l'insuffisance de l'installation, ce quirevenait à dire que la responsabilité en remontait aux
administrations publiques qui laissaient d'intéressantes
collections dans un pareil état d'abandon.
Legs et dons en faveur du Musée. — Pendant
cette période de son existence, le Musée reçut des dons
et des legs aussi importants par le nombre que par la
valeur des oeuvres d'art.
Legs du docteur Péraudin. — M. Péraudin, qui
était originaire de Bourges, vécut à Paris, où il exerça la
médecine, et se livra à son goût pour les arts. Il mourut
(1) N° du 28 novembre 1868.
168 LE MUSÉE
le 5 novembre 1865 (1), en léguant à sa ville natale ses
collections, qui se composaient de 33 tableaux, 2 dessins,
7 gravures, 3 morceaux de sculpture et 6 ouvrages ou
livres divers. Le Conseil municipal accepta ce legs avec
empressement : on trouve dans le procès-verbal de la
séance du 23 décembre 1866 l'expression de sa reconnais-
sance consignée pour rendre hommage à la mémoire
du donateur, qui, malgré sa résidence éloignée, n'a jamais
oublié sa ville natale (2).
Nous reproduisons dans son entier la liste des objets
légués par le docteur Péraudin, à cause de l'importance
exceptionnelle de cette libéralité :
TABLEAUX:
1. Jean Brueghel de Velours (attribué à) : Le Christ
au Tombeau.
2 Casanova : Paysage historique.3. Coutan, élève de Gros : Philémon et Baucis. — Thé-
mistocle demande l'hospitalité au roi Admète.
4. Coypel (d'après) : Jésus tenté par le démon.
5. Davidz de Heem : Fruits et nature morte.
6. Drolling fils : Abraham et Agar.
7. Ecole italienne : Tête de Vierge.8. Aug. Enfantin : Vue du port de Velletri.
9. Golvin : Entrée de ville.
10. Granet : Intérieur.
11. Greuze (attribué à) : Tête de jeune fille. — Tête de
Jeune homme.
12. Lépicié (attribué à) : Tête de vieille femme.
13. Jean Miel (attribué à) : Les Buveurs.
(1) Il aurait pu être question de ce legs pendant la période précédente, puisquele décès du docteur Péraudin s'était produit à cette époque, mais nous avons pré-féré attendre le moment où le Musée entra en possession du don fait en sa laveur.
(2) Procès-verbaux...., XXVI, n° 228.
DE BOURGES 169
14. Muzianus (attribué à) : Saint Jérôme.
15. Roger : 2 Figures d'italiennes.
16. Rubens (école de) : Les Sens.
17. Thomas : Les Trois Parques. — Effet de neige. —
Figure académique. — Saint-Louis recevant la cou-
ronne d'épines.18. Paul Véronèse : Jésus devant Pilate, copie d'une
esquisse.
19. W. 1594. — Une Visite.
10. Le Temps et l'Etude, plafond.21. Crucifiement de Jésus, sur cuivre.
22. Repos de la Sainte-Famille, sur cuivre.
23. La délivrance de Saint Pierre, sur cuivre.
24. Deux Paysages italiens.
25. Sainte-Famille, sur bois.
26. Vue d'un Marché de. campagne.
27. Tête de vieillard.
DESSINS :
1. L'Assomption, par Vouet.
2. La Naissance de Chloé, par Coutan.
GRAVURES :
1. Le Bannissement de Saint Paul, par Laugier.
2. La Vierge, Sainte Anne et l'Enfant Jésus.
3. Le Zéphyr, d'après Prudhon.
4. Vénus accroupie, par Laugier.
5. Pygmalion, d'après Girodet.
6. Léonidas, d'après David. — Les Thermopyles, par
Laugier.
7. Portrait de Léon X.
SCULPTURE :
1. Buste de petit enfant, marbre signé Monot.
2. Asclépiade, buste en bronze.
3 Napoléon Ier, buste en biscuit.
12
170 LE MUSÉE
LIVRES :
1. L'Iconographie Grecque et Romaine, par Visconli.
2. Daphnis et Chloé, de Paul-Louis Courier.
3. Une Année à Rome, par Thomas.
4. Le Traité de la Sagesse, par Charron, 1662.
5. Les Figures de la Bible.
6. L'Histoire de la Médecine, par Leclerc, 1727, etc.
Il convenait de faire connaître intégralement au pu-blic la bonne fortune qui advenait au Musée, en le met-
tant à même de juger du mérite de certaines des oeuvres
comprises dans le legs : c'est ce que fit, de la façon la
plus juste et avec un grand sentiment artistique, M. Cou-
gny, dans un article paru le 19 septembre suivant dans
le Journal du Cher.
Il y avait incontestablement des ouvrages assez ordi-
naires parmi ceux que laissait M. Péraudin, mais plu-sieurs autres, tels que ceux de Casanova et de Coypel,
l'esquisse de Drolling fils, les Buveurs attribués à Jean
Miel, le Crucifiement portant le n° 21 de la liste qui pré-
cède, les Fruits et nature morte attribués à Van Huysummais qu'il estimait plutôt de Davidz de Heem, enfin les
deux Têtes de Greuze ou de son école, et surtout la char-
mante vieille Femme que l'on croit être de Lépicié,
étaient des oeuvres qui eussent été accueillies partout
avec une légitime satisfaction.
Legs de M. P.-A. Bourdaloue. — Une autre libé-
ralité testamentaire allait encore enrichir le Musée pen-
dant la même période. Dans la première partie de cette
élude consacrée à l'histoire de la fondation de cet éta-
blissement artistique, il a été question de M. Bourdaloue-
Martin, ingénieur, auteur du nivellement du Canal de
Suez, puis adjoint au Maire de Bourges, qui souvent fit
don d'objets d'archéologie ou de curiosité, découverts
DE BOURGES 171
par lui au cours des travaux qu'il faisait exécuter (1).
Ce bienfaiteur du Musée, qui était membre de la Com-
mission administrative, mourut le 21 juin 1868, laissant
dans son testament une preuve nouvelle de l'intérêt qu'il
lui portait : « Je lègue .. . à la Ville de Bourges pour
» son Musée tous les tableaux, livres et objets d'art que
» deux délégués du Maire choisiront dans ma mai-
» son .... » (2).
Une partie des objets laissés par M. Bourdaloue,
comme les monnaies gauloises ou romaines, les vases
et les fragments antiques, les plans des substructions
gallo-romaines du Palais de Jean de Berry, furent remis
de suite au Conservateur, ainsi que ses nombreuses dé-
corations (3), mais le surplus n'entra dans les collec-
tions qu'après la mort de Mme Bourdaloue, au mois de
mars 1889.
Cette partie du legs se composait de tableaux, les uns
sans aucun caractère artistique, représentant des tra-
vaux qu'exécutait M. Bourdaloue ou des évènements de
sa vie, tels que la vue de la Lévade, près la Grande-
Combe (Gard), les plans et élévation des automoteurs et
bis-automoteurs de Champ-Clausen, une vue de l'Isthme
de Suez aux environs du lac Timsah, une vue de Schou-
bra (Egypte), enfin une vue de Messine; mais d'autres
constituaient de véritables oeuvres d'art, peints par Bou-
coiran, élève de Sigalon, comme le portrait de M. Bour-
daloue, et trois Nymphes avec la chèvre Amalthée, enfin
deux portraits au pastel de Sigaud de Lafond et de sa
femme (4).
(1) P., 228.
(2) Procès-verbaux...., XXVII, n° 93.
(3) Reg. Corn. Musée, 112, séance du 13 mai 1869.
(4) Inv. B, nos 230-241.
172 LE MUSÉE
Legs de M. Charles Mater. — M. Charles
Mater, architecte à Paris, neveu du fondateur du Musée,
s'était vivement intéressé à la création artistique, dont
son oncle poursuivait la réalisation ; il en avait suivi
les progrès et se réservait d'y contribuer à son heure :
dans ses dispositions testamentaires, il lui légua deux
toiles importantes qu'il possédait.
L'une était une peinture allégorique, intitulée l'Archi-
tecture, due au pinceau de François Boucher le jeune,fils du célèbre peintre de Louis XV, artiste d'un véri-
table talent, dont la légitime notoriété fut éclipsée parla réputation de son père. L'autre, représentant une
Réunion d'artistes du temps de Louis XIII, était l'oeuvre
de Camille Roqueplan, peintre distingué qui vivait dans
la première moitié du XIXe siècle. La veuve du légataire
avait le droit de conserver ces tableaux sa vie durant,
mais elle les remit de suite au Musée, ne voulant pas re-
tarder l'exécution des dernières volontés de son mari (1).
Envois de l'État. — En 1868, le Musée reçut de
l'État deux ouvrages intéressants, le Mariage in extremis,
composition dramatique de Firmin Girard, fort goûtéedu public (2), et le Semeur d'Ivraie, statue de bronze
d'une belle allure de Jean Valette, artiste berruyer, que
la fortune ne récompensa pas comme le méritait son
talent distingué (3).
Dons particuliers.— MM. Bazille (A.), fabricant de
porcelaine à Vierzon, donna un beau vase en porcelaine
rouge avec garniture de bronze, pièce d'un beau style
qui fait honneur à l'industrie vierzonnaise et valut au
(1) Journal du Cher du 2 avril 1868.
(2) Ibid., 15 août 1808
l3) Ibid., 10 fevrier 1809.
DE BOURGES 173
donateur une récompense à l'Exposition universelle
de 1867 (1).
Boyer (H.) : un arrosoir en terre cuite, signé et daté
de 1777 (2).Caumont (de) : une amphore exhumée à Prunelles (3).
Compoint : une hache en bronze trouvée à Vou-
zeron (4) :
Gibault : un mortier en pierre (5).
Lhomme (Docteur) : Jeune fille jouant au cerceau, pein-ture de Bouchard père (6).
Société historique du Cher : une collection de costumes
du Berry, dessins aquarelles de MM. Guiton et Bour-
geois, qui a figuré à l'Exposition universelle de 1867, et
« Naître esclave », buste en terre cuite de Carpeaux(7).Tribunal de Commerce de Bourges : deux grandes
tapisseries d'Aubusson et un tapis en drap orné d'écus-
sons brodés, provenant de l'ancienne salle du Tribunal
consulaire de Bourges, pour lequel ils avaient été spécia-
lement fabriqués (8).
Acquisitions. — L'administration du Musée fit
l'acquisition de deux objets antiques en bronze, une
tête de boeuf et une lampe (9), d'une cuillère ancienne en
argent (10), d'une arme garnie de plusieurs dards (11),
(1) Journal du Cher du 10 février 1869.
(2) Ibid., 21 août 1869.
(3) Ibid.
(4) Ibid.
(5) Ibid., 21 juin 1870.
(6) Ibid.
(7) Ibid.
(8) Ibid., 15 août 1868.
(9) Ibid., 21 août 1869.
(10) Ibid., 16 février 1809.
(11) Ibid., 22 août 1807.
174 LE MUSÉE
d'une daubière signée en terre de La Borne (1), de deux
dessins originaux de Berlier représentant des sujets
tirés de l'histoire ancienne (2), enfin d'un beau portrait
en pied de Napoléon Ier de grandeur naturelle et en
costume d'apparat, dont la tête et les mains sont attri-
buées à Girodet (3).
Propositions d'échange.— L'administration du
Petit Séminaire de Bourges offrit au Musée de lui
céder des médailles, des livres et des Coquillages en
échange des doubles que pouvait renfermer sa collection
ornithologique.
La Commission se livra à une discussion approfondie
sur la question de savoir si elle avait le droit de céder
des objets qui lui avaient été donnés, et si ce ne serait
pas aller contre la volonté certaine de M. Thouvenel le
donateur, et elle décida de n'entrer dans cette voie
qu'avec la plus grande circonspection.
La Section d'histoire naturelle fut chargée de recher-
cher quels étaient les doubles de la collection des
oiseaux dont on pourrait disposer et les lacunes à com-
bler dans les séries conchyologiques du Musée. Une
autre Commission, composée de six membres (4), reçut
la mission d'examiner les objets que le Séminaire pro-
posait. Ce luxe de Commissions montrait de la part des
administrateurs du Musée, un grand désir d'aboutir,
malgré cela on n'arriva à aucun résultat : peut-être les
objets du Séminaire étaient-ils sans valeur suffisante.
Mme de Sainte-Marie, chanoinesse de Saint-Augustin,
supérieure des Visitandines de Moulins, demanda la
(1) Journal du Cher du 16 février 1809.
(2) Ibid., 22 août 1867.
(3) Ibid., 15 août 1868.
(4) MM. Berry, Boyer, Louriou, des Méloizes, Peneau et Romagnesi.
DE BOURGES 175
cession d'un portrait du bienheureux Pierre Fourier de
Mataincourt (1), fondateur de l'ordre des Visitandines,
que possédait le Musée, contre la copie d'une Descente
de croix, d'Alonzo Cono. La Commission refusa, parce
que ce portrait provenait d'un couvent de Saint-Amand,
d'où il était sorti à la Révolution et avait ainsi une
origine locale (2).
Échange d'un tableau de M. Waschmutt. —
Le Musée, par erreur, paraît-il, avait reçu de l'État un
tableau important représentant un Episode de l'histoire
municipale de Mulhouse, peint par Waschmutt, artiste
mulhousien et directeur de l'Ecole de dessin de Ver-
sailles, dont l'oeuvre avait été promise à sa ville natale.
A Mulhouse on éprouvait le désir tout naturel de pos-séder une toile, dont l'envoi dans cette ville avait été
annoncé et pour laquelle elle était doublement précieuseà cause du sujet et à cause l'auteur. Le Comité de direc-
tion de l'Ecole industrielle de Mulhouse demanda donc
au Maire de Bourges de lui céder cette peinture en
échange d'un tableau d'égale valeur.
Une Sous-commission (3) fixa à 5,000 francs la valeur
du tableau que désirait la ville de Mulhouse. Le Musée
de Bourges obtint en échange une composition du
même artiste intitulée un Épisode de la guerre de Crimée,
que MM. Charmeil et Cougny estimèrent supérieur, au
point de vue de l'art, à l'épisode mulhousien ; sans
contredire cette appréciation, dont nous acceptons le
bien fondé, il sera permis de dire que la composition
dramatique du nouveau tableau du Musée, exprimée
(1) Reg. Corn. Musée, 87-89.
(2) Ibid., 104 et 105.
(3) Elle était composée de MM. de Bengy, Borget et Romagnesi.
176 LE MUSÉE
dans une tonalité appropriée à la tristesse du sujet (1),ne saurait faire oublier la scène animée et vivante,
représentée dans une gamme éclatante, qui était celle
de la peinture que le Musée céda. D'ailleurs, en donnant
un avis favorable à l'échange qui lui était demandé, la
Commission ne dissimulait pas ses regrets de perdreune toile remarquable que le Musée possédait depuis
longtemps, sentiments auxquels le Conseil municipals'associa complètement (2). Les négociations durèrent
d'ailleurs fort longtemps : commencées au mois de
mai 1867, elles ne se terminèrent qu'à la veille de la
guerre, qui allait faire sortir du territoire françaisla toile cédée à la ville de Mulhouse.
(1) Procès-verbaux...., XXV, n° 117 : « La composition de la toile offerte est
lionne, qu'elle est consciencieusement peinte et d'une facture supérieure à celle
de l'épisode de l'histoire de Mulhouse. »
(2) Ibid., ibid. - Reg. Com. Musée, 70-72, 98-99 et 115.
DE BOURGES 177
§ III
1870-1881.
Pendant toute la durée de la guerre avec l'Allemagne,l'existence du Musée fut entièrement paralysée et du
8 avril 1870 jusqu'au 10 mai 1871, c'est-à-dire pendant
plus d'une année, la Commission ne se réunit pas, et
encore la séance du 10 mai, dont il vient d'être question,ne fut à proprement parler qu'une séance de forme, à
l'ordre du jour de laquelle rien n'était porté.La nouvelle période qui s'ouvrait ne paraissait pas
favorable aux choses de l'art, la France cruellement
meurtrie avait avant tout à panser ses blessures, et
cependant jamais à Bourges le problème de l'installation
du Musée, ne fut étudié avec plus d'ardeur et de persé-vérance.
Projet d'installation du Musée proposé parM. Devoucoux. — Le 5 novembre 1871, M. Devou-
coux, alors Maire de Bourges, se rendit à la séance quetenait la Commission et lui communiqua ses vues sur
l'installation du Musée et de la Bibliothèque, que l'on ne
séparait guère à cette époque dans les projets que l'on
dressait, bien que jusque-là ils eussent toujours constitué
des établissements distincts.
Il rappela les études antérieures dont l'église des
Carmes, qui avait ses préférences, avaient été l'objet et
178 LE MUSEE
il demanda qu'elles fussent reprises, en réservant dans
l'édifice une place pour loger les pompes à incendie. Il
comptait mettre fin à l'occupation de la Guerre et évaluait
à 50,000 francs le montant des travaux d'appropriation
qu'il y aurait à faire. Pour se procurer les ressources
qu'exigeaient ces travaux, il faisait entrer en ligne de
compte une somme de 15,000 francs qu'il espérait obte-
nir de l'Etat pour l'occupation prolongée des Carmes
par l'Administration militaire, 15,000 francs comme
indemnité de la perte du local que la Bibliothèque de la
Ville occupait à l'Archevêché avant l'incendie de 1871,
enfin le surplus, s'élevant à 20,000 francs, devait être
produit par une loterie.
Sur la demande de M. Devoucoux, une Sous-commis-
sion, composée de MM. de Lapparent, Bussières, Roma-
gnesi et Charmeil, fut chargée d'étudier le plan de l'ins-
tallation projetée et d'en dresser un devis sommaire (1).Le 28 novembre suivant, M. de Lapparent donna lec-
ture du rapport de la Sous-commission, à l'appui duquel
il produisait un plan et un devis estimatif dressés parM. Bussières assisté de M. Pascault, son gendre. Dans
le projet, le rez-de-chaussée de l'édifice était réservé à la
Bibliothèque, les étages supérieurs au Musée et le chevet
au dépôt des pompes de la Ville. Le total du devis s'éle-
vait à 70,000 francs, qui, sur la demande du Maire,
furent réduits à 60,000 francs, grâce à certaines écono-
mies et à la substitution du bois au fer pour la charpente.Dans la discussion qui suivit, on vit se produire inci-
demment la proposition d'installer dans l'Hôtel Aubertôt
le Musée et la Bibliothèque, où cette dernière se trouve
maintenant, proposition qui fut rejetée à cause de l'im-
possibilité manifeste de loger dans cet hôtel les deux
(1) Reg. Com. Musée, 124 et s.
DE BOURGES 179
collections réunies. Le projet présenté fut enfin adopté
et renvoyé à l'examen du Conseil municipal (1).
Le 10 mai 1872, M. Boyer, qui aux fonctions de con-
seiller municipal joignait celles de bibliothécaire-adjoint
et de secrétaire de la Commission du Musée, fit, à l'as-
semblée communale, le rapport sur la demande de la
Commission du Musée. Après avoir exposé les données
du projet d'installation qu'avaient étudié MM. Bussières
et Pascault, il faisait connaître les critiques que M. Bour-
bon, architecte de la Ville, adressait au travail de ses con-
frères, critiques portant sur l'éclairage, l'aération et les
facilités d'accès. Il y avait d'ailleurs deux objections pé-
remptoires : l'occupation toujours existante de l'église par
l'Administration de la Guerre, occupation dont rien n'in-
diquait la fin, et l'urgence de la solution, qui, pour la
Bibliothèque, s'imposait plus encore que pour le Musée,
puisqu'elle avait perdu, par l'incendie de l'Archevêché,
les salles où elle était installée, situation qui ne lui per-
mettait pas d'attendre l'éventualité douteuse et lointaine
de la restitution de l'église des Carmes.
S appuyant sur ces diverses considérations, le rapport
proposait de placer immédiatement la Bibliothèque à
l'Hôtel Aubertot et pour le Musée de décider en principe
son transfert à l'Hôtel Lallemand, mais comme il fallait
préalablement acquérir des immeubles voisins, cons-
truire une galerie de tableaux, faire de nombreuses
dépenses d'appropriation, l'exécution de cette installation
serait remise à une époque ultérieure et indéterminée.
Les conclusions du rapport furent adoptées intégrale-
ment (2) : c'était pour le Musée le maintien de la situa-
tion déplorable dans laquelle il se trouvait ! Il gagnait
(1) Reg. Corn. Musée, 127 et s.
(2) Procès-verbaux...., XXVIII, n° 343.
180 LE MUSÉE
cependant quelque chose à la solution qui venait d'inter-
venir, c'est de n'avoir plus son sort lié à celui de la
Bibliothèque et d'avoir par conséquent plus de facilités,
le cas échéant, pour obtenir pour lui seul l'installation
qui lui était nécessaire.
Le résultat de cette nouvelle tentative était bien fait
pour décourager complètement la Commission du
Musée : sur l'initiative de la municipalité, elle avait fait
étudier une fois de plus un projet d'installation dans
l'église des Carmes, et ce projet, la même municipalité le
faisait échouer, en proposant ensuite une autre solu-
tion, qui laissait le Musée en dehors. C'était véritable-
ment traiter avec trop de sans-gêne une Commission
d'hommes notables de la ville, à laquelle on imposaitdes éludes sérieuses sur des questions difficiles d'instal-
lation, que l'on se chargeait ensuite de rendre inutiles.
Démolition de l'église des Carmes. — L'an-
cienne église du couvent des Carmes, avec son pignonen façade, orné d'un gracieux portique, la belle fenêtre
ogivale du choeur, les dix-huit fenêtres qui l'éclairaient
et l'élégante décoration intérieure de plusieurs de ses
chapelles, n'était pas sans mérite au point de vue archi-
tectural (1); les vastes dimensions de son vaisseau, quimesurait 55 mètres de longueur, 11 mètres 60 de largeursur 11 de hauteur, la rendait susceptible de rendre bien
des services. On se rappelle que l'on projeta à diverses
reprises d'y réunir le Musée, la Bibliothèque et un maga-sin municipal ; à un autre moment on voulut y loger la
Mairie; on y célébra des fêtes, des cérémonies, les foires
du Palais s'y tinrent longtemps, enfin, en 1848, un club
politique y eut ses réunions.
(1) BUHOT DE KERSERS: Histoire et statistique monumentale du Cher. II.
238 et s.
DE BOURGES 181
De précieux souvenirs historiques s'attachaient à cet
édifice, leur caractère essentiellement municipal aurait
dû lui servir de sauvegarde auprès de l'Administration
de la cité qui était appelée à décider de son sort. C'était
là en effet que se célébraient toutes les cérémonies de la
Communauté des habitants de la ville sous l'ancien ré-
gime et que s'assemblèrent en 1789 les élus des Trois
Ordres pour rédiger leurs cahiers et nommer leurs dépu-
tés aux Etats-Généraux.
A tous ces points de vue la conservation de l'église
des Carmes s'imposait donc dans l'intérêt public et il
semblait que pendant longtemps telle avait été l'intention
constante et nettement indiquée des municipalités qui
s'étaient succédées ainsi que le désir des habitants. On
n'a pas oublié qu'en 1847 (1) la Ville dépensa une somme
considérable pour réparer les Carmes, ce qui impliquait
la volonté d'assurer sa préservation, et qu'en différentes
circonstances relatées ici même, on regretta beaucoup
que l'occupation du Ministère de la Guerre empêchât de
l'utiliser et de lui donner une affectation définitive. Et
cependant, sans que l'on puisse deviner la cause de cette
évolution de l'opinion, on va voir qu'au moment où cet
édifice sera enfin rendu à la Ville, une partie importante
de cette même opinion, et la mieux placée pour l'empor-
ter, en proposera la démolition immédiate.
C'est le 1er janvier 1876 que devait cesser l'occupation
de l'armée et dès le mois d'octobre précédent, la munici-
palité demandait au Conseil municipal de faire connaître
ses intentions sur ce qu'il conviendrait de faire de l'église
des Carmes (Séance du 16 octobre 1875) (2). Le moment
était donc venu de donner satisfaction aux besoins du
(1) Journal du Cher du 23 novembre 1847.
(2) Procès-verbaux...., XXX, n° 170.
182 LE MUSÉE
Musée qui restait seul à pourvoir, et de solutionner une
question depuis longtemps pendante.Le 12 février 1876 la Commission du Conseil muni-
cipal fit connaître, par l'organe de M. Bonnault de Ville-
menard (1), son rapporteur, le résultat de ses recherches.
Du Musée et de ses besoins, pas un mot, une seule pro-
position ferme, la démolition de l'église des Carmes
pour élargir la place qui est par devant. On n'est pas fixé
sur ce que l'on fera du reste de l'emplacement, peut-êtreun marché public, peut-être des emplacements à vendre
pour construire (2), mais il faut commencer par jeterbas le vénérable édifice.
Le 15 juillet suivant l'église des Carmes est condam-
née, sa démolition est votée, il est décidé qu'on l'effec-
tuera dans le plus bref délai possible et que l'on mettra
en adjudication les matériaux à en provenir (3).Le Conseil municipal, comme on le voit, voulait une
destruction immédiate, mais la résistance inattendue
qu'il rencontra dans une partie de la population retarda
pendant près de deux années l'exécution de cet arrêt :
pour une fois le mouton berrichon s'était révolté.
L'enquête de commodo et incommodo à laquelle il
fut procédé à la fin du mois d'octobre 1876, témoigne de
la vivacité de l'intérêt que la population prit à cette
affaire : 113 personnes se présentèrent devant le
Commissaire enquêteur, dont 40 exprimèrent un avis
favorable aux projets de la municipalité et 73 se décla-
rèrent partisans de la conservation des Carmes (4).
(1) M. de Bonnault de Villemenard, ainsi que plusieurs autres membres de la
municipalité ou du Conseil municipal, faisaient partie de la Commission du Musée.
(2) Procès-verbaux XXX, n° 222.
(3) Ibid., n° 336.
(4) Journal du Cher des 2, 4 et 24 novembre 1876.
DE BOURGES 183
Les Sociétés savantes de la ville s'associèrent acti-
vement à cette campagne d'opposition : comme il était
naturel, c'est à la Commission du Musée que revint
l'initiative de ce mouvement et le 30 octobre elle déli-
béra une protestation fortement motivée (1) qui fut
transmise au Maire et communiquée à la presse (2).
Vint ensuite une protestation du Comité diocésain (3).
Les Sociétés savantes de la ville pensant que réunies
elles auraient plus de force, se syndiquèrent et rédi-
gèrent un factum intitulé : Pétition adressée à MM. les
Membres du Conseil municipal pour l'installation du
Musée dans l'ancienne église des Carmes, portant les
signatures de MM. des Méloizes, président du Syndicat,
de Laugardière et Buhot de Kersers pour la Société des
Antiquaires du Centre ; Boyer, Charmeil et Barberaud
(ce dernier secrétaire du Syndicat) pour la Société
historique du Cher; l'abbé Augonnet, Rifle et Dumoutet
pour le Comité diocésain. Cette protestation, d'abord
publiée dans les journaux, puis tirée en brochure avec
plan à l'appui (4) et répandue dans le public (5), eut le
succès qu'elle méritait, car elle traitait la question
soumise au tribunal de l'opinion publique de la façonla plus lumineuse. Une pétition dans le même sens et
émanant des habitants du quartier des Carmes fut,
en outre, adressée au Conseil le 26 mars 1877 (6).
En plus de ces manifestations collectives, il se pro-
duisit sous forme d'articles de journaux ou de lettres
(1) Reg. Com. Musée, 102 et s.
(2) Journal du Cher des 2 et 4 novembre 1876.
(3) Ibid. du 7 novembre.
(4) Ibid. des 25 janvier, 6 février et 10 mars 1877.
(5) Bourges, A. Jollet, 9 mars 1877, in-8 de 14 p.
(6) Procès-verbaux...., XXXI, n° 150, séancedu 21 avril 1877.
184 LE MUSÉE
particulières insérées dans la presse locale, une série
d'appels à l'opinion publique en faveur de l'édifice
menacé pour le sauver, s'il était possible. On peut
citer une lettre signée A.WALKER, parue dans le Journal
du Cher du 19 octobre, une note historique sur l'Eglise
des Carmes dans le numéro du 26, enfin un article qui
traitait de la conservation de ce monument et de son
appropriation pour y placer le Musée, qui se trouve dans
le même journal, n° du 16 novembre, sous la signature
de RAPHAEL MONTÉS, anagramme sous lequel on décou-
vrira facilement le nom de M. Alph. Mater, président
de la Commission du Musée (1).
Le 30 novembre suivant une étude très complète de la
question parut en brochure, résumant avec force toutes
les raisons qui militaient en faveur de la conservation
de l'église des Carmes et de son affectation en Musée.
Cet écrit, dont l'auteur était M. Charles Barberaud,
archiviste du Cher, avait pour titre : Protestation contre
la démolition de l'église des Carmes, observations soumises
au Conseil municipal avec plan (2).
L'opposition qui se manifestait avec tant d'ardeur,
eut au moins pour effet de retarder la destruction
projetée : une lettre du Ministre des Beaux-Arts du
9 avril 1877 prescrivit, en effet, au Préfet du Cher de
refuser d'autoriser les travaux de démolition, jusqu'à ce
que la Commission des Beaux-Arts eût statué sur la
valeur artistique de l'ancienne église. Le Conseil
municipal d'ailleurs restait insensible à tous ces efforts,
et le 15 mai suivant, il y répondait en volant le maintien
de sa délibération antérieure qui ordonnait la démolition
(1) Sous le mémo pseudonyme fut publié en juin 1802, chez Just-Bernard,
libraire à Bourges, un recueil de poésies sous ce titre : Simples échos, traduits
en vers, in-12 de 206 pages.
(2) Bourges, C. Patureau, 30 novembre 1870, in-8 de 14 pages.
DE BOURGES 185
des Carmes, en protestant contre l'intervention mi-
nistérielle dans une question qu'il estimait purement
municipale (1).
On avait eu un moment d'espoir en apprenant l'arrêt
que la lettre du Ministre avait imposé au projet de
destruction immédiate, mais cet espoir fut de courte
durée, et bientôt on eut la conviction que tout était
perdu, quand on vit, à la suite d'élections nouvelles (2),
M. Eugène Brisson remplacer M. Rapin comme Maire
de Bourges (3). Les sentiments personnels du nouveau
magistrat, en ce qui touchait cette question particulière,
étaient connus, il avait manifesté, dans toutes les cir-
constances qui s'étaient présentées, son désir de voir
disparaître les Carmes, et ce que l'on savait de la
ténacité de son caractère autoritaire faisait prévoir qu'il
s'efforcerait de précipiter l'exécution de la condamnation
prononcée à diverses reprises par le Conseil. D'un autre
côté, on pouvait croire que le Gouvernement de l'époquene persisterait pas dans sa résistance vis-à-vis d'un
Maire qui, à ce moment, était pour lui personna
grata.
L'église des Carmes tomba donc sous la pioche des
démolisseurs à la fin de l'été de l'année 1878. On eut
l'excellente pensée de réserver tous les fragmentsarchitecturaux et sculptés de l'église, et leur nombre
était si grand, qu'au jardin de l'Archevêché, où ils
furent déposés provisoirement sur le sol, ils couvraient
tout l'espace compris entre la grande allée et le mur de
la Direction du Génie et de la Manutention militaire, ce
qui indique, qu'il soit permis de le dire, l'importance de
(1) Procès-verbaux...., XXXI, n° 173.
(2) Elections du 6 janvier 1878 pour le renouvellement des conseils municipaux.
(3) Décret du 23 janvier 1878.
13
186 LE MUSÉE
la décoration artistique dans ce monument, pour lequelles édiles du temps professaient un si grand dédain.
Le dépôt, à titre provisoire, de ces fragments sur la
terre, exposés à toutes les intempéries, devait, comme
autrefois pour les débris de l'enceinte gallo-romaine,se prolonger pendant plusieurs années. Ce n'est que
postérieurement à la nomination de M. Daniel Mater en
qualité de Président de la Commission, c'est-à-dire aprèsle mois d'avril 1881, que l'on commença à se préoccuper
des dangers que leur faisait courir une pareille
situation. Un agent de la Mairie vint un jour demander
au nouveau Président, s'il voulait bien recevoir dans le
Musée les pierres de l'église des Carmes, démarche qui
surprit vivement celui qui en était l'objet et qui paraîtra
incroyable à toute personne qui a connu le local où les
collections étaient entassées avant leur transfert à
l'Hôtel Cujas et l'encombrement qui y régnait.
On se décida alors à déposer ces fragments dans de
vieilles casernes inoccupées qui existaient sur l'ancien
champ de foire, au bas de Séraucourt. C'eût été le salut,
si la fatalité, qui s'était acharnée après l'église des
Carmes, n'avait pas continué à en poursuivre les
débris. En effet, quelques années après, on mit en
adjudication, pour les démolir, les casernes où se
trouvaient les fragments des Carmes, sans avoir la
précaution de réserver ces derniers, de telle sorte que
l'acquéreur put en disposer comme des autres matériaux
de construction provenant des bâtiments détruits. De
l'église des Carmes, il ne reste plus aujourd'hui que les
pinacles et les niches qui accompagnaient la porte mo-
numentale d'entrée : ils ont été placés dans la cour du
fond de l'Hôtel Cujas, où ils rappellent un édifice qui a
disparu sans nécessité, victime d'une rage de vandalisme
trop fréquente de nos jours.
DE BOURGES 187
La destruction dont on vient de lire le récit décida
M. Mater à se démettre de ses fonctions de Président de
la Commission du Musée. Il s'était habitué à considérer
l'église des Carmes comme le futur asile des collections
réunies par son père, et les fréquentes études que la
Commission avait été appelée à faire, sur l'invitation
même de la municipalité, l'avait confirmé dans cette
conviction. Le sans-façon avec lequel une semblable
tradition et une espérance en quelque sorte autorisée
avaient été méconnues, était bien fait pour blesser le
fils du fondateur du Musée et le décourager d'une façon
définitive. M. Alphonse Mater adressa donc à M. Brisson
sa démission de membre et de Président de la Commis-
sion, estimant que mieux valait se retirer que d'accepter
plus longtemps un semblable traitement.
La disparition de l'église des Carmes n'apportait natu-
rellement aucune solution à la question, depuis si long-
temps pendante, de l'installation du Musée, et les admi-
nistrateurs de la ville, si mal disposés qu'ils fussent à
cet égard, étaient toujours forcés de s'en occuper.MM. Rouzé et Chédin, conseillers municipaux, propo-
sèrent d'élever pour le Musée, derrière la Banque de
France, sur des terrains appartenant alors à la Ville,
une construction neuve qui devait être entourée d'un
square.
Cette proposition avait contre elle l'élévation du chiffre
de la dépense qu'elle nécessitait et la situation peu cen-
trale de l'emplacement : elle fut donc repoussée (1).
M. Brisson s'arrêta bientôt à un autre projet qui fai-
sait entrer le Musée dans une combinaison avec diverses
créations d'ordre artistique qu'il se proposait d'entre-
prendre. Il s'agissait de faire construire un édifice qui
(1) Procès-verbaux...., XXXI, n° 86, séance du 12 mai 1877.
188 LE MUSÉE
renfermerait à la fois une Ecole des Beaux-Arts appli-
qués à l'industrie et un Musée. Il résolut de soumettre
cette nouvelle conception à la Commission du Musée et
il la réunit sous sa présidence personnelle le 11 février
1878. L'ordre du jour de la séance portait : 1° Étude de
la construction d'un Musée et choix de son emplace-
ment; 2° Création d'une École des Beaux-Arts appliqués
à l'Industrie devant réunir les écoles municipales de
dessin déjà existantes ; 3° Création d'un cours de dessin
et peinture sur porcelaine.
Dans la discussion qui s'engagea, deux membres se
firent les avocats d'installations différentes, M. Daniel
Mater à l'Hôtel Cujas, M. Buhot de Kersers à l'Hôtel
Lallemant, en faisant remarquer que, grâce aux cons-
tructions anciennes déjà existantes, celles qu'il faudrait
ajouter seraient moins considérables; enfin, M. Boyer
proposa de revenir à l'emplacement de l'ancienne église
des Carmes.
La Sous-commission nommée pour étudier les di-
verses questions qui étaient posées (1) présenta son rap-
port dans la séance du 4 mars suivant. Elle estimait que
les divers édifices dont il avait été question étaient tous
inutilisables, qu'il fallait recourir à une construction
neuve établie sur l'emplacement de l'ancienne Église des
Carmes, dont la dépense pourrait atteindre 120.000 francs
et dont le projet devrait être mis au concours.
Les conclusions du rapport de la Sous-commission
furent adoptées dans leur entier, d'abord par la Com-
mission du Musée (2), puis par les Commissions muni-
cipales des bâtiments et de la voirie (3). On les trouve
(1) Elle était composée de MM. Bussières, Charmeil, de Lapparent, des Mé-
loizes et Tarlier, ce dernier fit le rapport.
(2) Reg. Com. Musée, 174 et s.
(3) Ibid., 177.
DE BOURGES 189
relatées dans l'Exposé du nouveau programme de travaux
que M. Brisson fit à cette époque aux Commissions
compétentes du Conseil municipal.« Vous êtes appelés également, disait-il, à examiner
» le projet de création d'une École des Beaux-Arts ap-» pliqués à l'Industrie. Je rattache à cette question la
» construction du Musée. Quelque précieuses que» soient nos collections artistiques, elles ne motiveraient
» pas actuellement, à elles seules, la dépense considé-
» rable et tout à fait somptuaire qu'entraînerait la cons-
» truction d'un monument pour les recevoir.
» Dans tous les cas, elles exigent peu d'espace, puis-
" que, d'après le rapport d'un membre de la Commis-
» sion du Musée, 425 mètres suffiraient pour les instal-
» ler convenablement.
» Je dépose sur votre bureau le programme du con-
» cours rédigé par les soins de M. l'Architecte, pour la
» construction de cette École des Beaux-Arts qui serait
» établie sur l'emplacement de l'Église des Carmes, sui-
» vant le voeu émis par la Commission du Musée (1). »
Il est inutile d'examiner si les surfaces indiquées
comme nécessaires pour l'installation du Musée étaient
suffisantes, si l'établissement de salles d'étude et de tra-
vail pour des jeunes gens, dans les pièces mêmes où
étaient exposées des collections d'art et de curiosité, était
chose pratique et prudente, puisqu'il semble que l'on
ait fini par oublier dans la suite, lors de l'exécution des
travaux, qu'il eût jamais été question du Musée.
On sait d'ailleurs que le lourd et disgracieux édifice
qui porte le nom d'École des Beaux-Arts a si mal satis-
(1) Ville de Bourges. — Travaux d'utilité publique.—
Rapport ru Conseil mu
nicipal. - Bourges, Imp. Commerciale, 1878, p. 9 et 10.
190 LE MUSÉE
fait aux conditions qu'il devait remplir, qu'il s'est révélé
insuffisant pour loger tous les services scolaires qu'il
devait recevoir et que, dès le début, il a fallu construire
plusieurs annexes. Comment, dans cette situation, trou-
ver en outre la place nécessaire pour installer les nom-
breuses collections du Musée, leur assurer non seule-
ment des surfaces murales, mais aussi les placer, sans
qu'il y ait confusion et gêne, entre les objets d'art ou de
curiosité et les modèles ou les moulages destinés aux
élèves?
C'est véritablement à se demander s'il y avait quelque
chose de sérieux dans ce projet de Musée-Ecole des
Beaux-Arts et si la réunion des deux établissements,
dans le projet primitif, n'était pas destinée à assurer
avant tout le vote de l'affaire, avec l'arrière-pensée de se
borner ensuite à construire l'École des Beaux-Arts à la-
quelle on tenait principalement.
Acquisition de l'Hôtel Cujas pour y établir le
Musée. — Pendant que s'élaboraient les projets de
grands travaux qui allaient modifier si profondément la
physionomie de Bourges et dont on vient de rappeler ce
qui peut se rattacher à l'histoire du Musée, une longue
négociation se poursuivait entre le Département et la
Ville pour la cession à celte dernière de l'Hôtel Cujas,
d'abord par un échange, puis par une vente, négociation
qui à plusieurs reprises parut rompue, mais qui devait
enfin trancher, en principe tout au moins, la question
de l'installation définitive du Musée. On pourrait même
se demander si les décisions de la municipalité, qui
tenaient si peu compte des demandes de la Commission,
ne s'expliqueraient pas par l'existence de cette négocia-
tion qui se poursuivait à côté.
Une proposition de M. Louis Aubineau, avocat distin-
DE BOURGES 191
gué et conseiller municipal, semble avoir été le point de
départ de la nouvelle tentative destinée cette fois à une
solution favorable. L'Assemblée communale, comme on
peut s'en souvenir, avait été invitée par la municipalité
à rechercher la destination qui pourrait être donnée à
l'église des Carmes : M. Aubineau, intervenant à ce mo-
ment, demanda que l'on poursuivît l'échange de l'église
et de la caserne des Carmes contre l'Hôtel Cujas; la gen-
darmerie, alors placée à Cujas, aurait été transférée aux
Carmes et l'Hôtel Cujas, devenu disponible, aurait pu
recevoir le Musée (1).
Celte proposition ayant été votée par le Conseil
municipal et favorablement accueillie par l'Administra-
tion départementale, M. Albert Pascault, architecte du
département, fut chargé par le Préfet de procéder à
l'évaluation des immeubles à échanger, et M. Bourbon,
architecte de la Ville, reçut semblable mission pour
l'autre partie (2).
M. Pascault évalua à 85.000 francs la valeur de Cujas
et à 80.000 francs celle des Carmes, ce qui aurait fait
une soulte de 5.000 francs en faveur du Département.M. Bourbon, de son côté, estima les Carmes à 110.000 fr.
et Cujas à 60.000, ce qui aurait fait un retour de 50.000 fr.
en faveur de la Ville. Le Conseil municipal résolut
d'accepter les chiffres de son mandataire, malgré les
observations de plusieurs conseillers municipaux, qui
exprimèrent l'avis que cette question de soulte rendrait
l'échange impossible (3).
En effet, le Conseil Général déclara se refuser à payer
(1) Procès-verbaux...., XXX, p. 170.
(2) Ibid., ibid., n° 222, séance du 12 février 1876.
(3) Ibid., n° 365, séance du 5 août 1870.
192 LE MUSÉE
aucune soulte (Délibération du 9 septembre 1876) (1).
En vain le Conseil municipal consentit-il à réduire à
30.0000 francs la soulte demandée (Délibération du 24
mars 1877) (2), l'Assemblée départementale persista
dans son refus (Délibération du 11 avril 1877) (3).
Il devenait évident que l'on n'aboutirait à aucun
résultat tant que l'on persisterait à vouloir traiter parvoie d'échange, d'autant plus que la prochaine démo-
lition de l'ancienne église des Carmes allait modifier
notablement les bases des estimations faites, et peut-être
mettre à la charge de la Ville une soulte qu'elle ne consen-
tirait pas davantage à supporter : il fallait donc recourir
à un autre mode d'accord, à une vente, par exemple, ou
renoncer à l'espoir de s'entendre.
Autorisé enfin par délibération du Conseil municipaldu 20 juillet 1878 à reprendre, sur les bases nouvelles
d'une vente, les pourparlers avec le Préfet, le Maire se
mit rapidement d'accord avec ce dernier : le prix de
cession fut fixé à 80.000 francs, moyennant lequel le
Département consentit à céder à la Ville l'Hôtel Cujas,
à la condition expresse, acceptée sans difficulté, que le
Musée y serait installé.
M. le Marquis de Vogué présenta, le 24 août 1878, le
rapport sur cette affaire au Conseil Général, et jamais
question intéressant les Beaux-Arts ne trouva un inter-
prète plus digne de la faire triompher.« Votre deuxième Commission, dit-il, a été saisie
» d'une proposition émanant du Conseil municipal de
» la Ville de Bourges et tendant à l'acquisition par la
» Ville, au prix de 80.000 francs, de l'immeuble affecté
(1) Procès-verbaux...., XXX, n° 1.
(2) Ibid., n° 154.
(3) Ibid., n° 173.
DE BOURGES 193
» à la gendarmerie et connu sous le nom d'Hôtel Cujas.
» Je n'ai pas à faire ici l'histoire des négociations
» tour à tour reprises et abandonnées, dont l'aliénation
» de ce monument a été l'objet. Depuis fort longtemps» les esprits qui ont le culte des souvenirs historiques
" et le goût dés oeuvres d'art, faisaient des voeux pour
» que l'Hôtel Cujas, soustrait à son affectation actuelle,
» fût rendu à son propriétaire naturel, la Ville de Bourges,» et affecté à sa destination normale, le Musée. Tous les
» efforts tentés dans ce but n'avaient pû aboutir. Je ne
» saurais vous en raconter toutes les péripéties
» La question se présente aujourd'hui sous une
» nouvelle forme. La Ville de Bourges offre purement et
» simplement de se rendre acquéreur de l'Hôtel Cujas» moyennant un prix ferme de 80.000 francs ; elle fait
» observer que le moment d'une décision définitive est
» arrivé : obligée de pourvoir au logement de ses
» collections, la Ville doit s'assurer la possession d'un
» local convenable ; l'Hôtel Cujas est celui qu'elle préfère
" à tous les points de vue : si elle ne peut l'acquérir, elle
» devra chercher une autre combinaison, soit qu'elle» revienne au projet d'installer le Musée dans la caserne
» des Carmes, soit qu'elle approprie ou bâtisse un autre
» local; le système auquel elle s'arrêtera, sous l'empire
» de circonstances supérieures, sera définitif et tout
» espoir de consacrer l'Hôtel Cujas au Musée devra
» être abandonné.
» Elle recommande sa proposition à votre plus
» sérieuse attention.
« Votre deuxième Commission, Messieurs, ne pouvait
» qu'accueillir favorablement ces ouvertures, elle était
» certaine de répondre aux sentiments du Conseil tout
» entier en recherchant les moyens de réaliser un voeu
194 LE MUSÉE
» qui lui est cher, en s'efforçant de hâter le jour où
» l'antique demeure du célèbre légiste qui a illustré
» notre ville, rendue à une destination digne de son
» passé, remise en valeur par une restauration in-
» telligente et discrète, offrirait à l'étude des artistes,» à côté des collections qu'elle abriterait, ses charmantes
» sculptures et ses ingénieuses dispositions archi-
» tecturales » (1)Le Conseil Général ne pouvait refuser d'accueillir favo-
rablement une plaidoirie aussi pressante et il approuvale projet de cession qui lui était soumis : c'était d'ailleurs
rester fidèle à la promesse qu'il avait faite au Musée en
1864, de lui continuer la sympathie et le bienveillant
appui qu'il lui accordait depuis l'époque de sa fonda-
tion.
L'acte de vente fut passé le 29 mars 1879, avec entrée en
jouissance fixée au 24 juin 1882 seulement, pour donner
le temps au Département de faire construire une gendar-merie nouvelle. Le Musée semblait donc en droit de
compter enfin sur une installation prochaine et incom-
parable, légitime compensation des incertitudes et des
retards sans fin qu'il avait dû subir ; mais il n'en était
rien, et l'ère des difficultés était loin d'être close pourlui. Ce n'est qu'en 1891 qu'il lui sera donné de pouvoir
prendre possession de l'Hôtel Cujas, qui, pendant ce
temps, laissé sans toiture, exposé durant plusieurs an-
nées à toutes les causes de destruction, grâce au conflit
qui s'éleva entre la Ville et les Monuments historiques,avait failli périr. Plus tard, l'affectation à l'usage du
Musée, condition essentielle de la vente consentie par le
Département, n'empêcha pas l'un des Maires qui succé-
dèrent à M. Brisson, de vouloir substituer une destina-
(1) Procès-verbaux Conseil général, séance du 24 août 1878.
DE BOURGES 195
tion nouvelle à celle qui était imposée par le contrat.
Cette prétention remit un instant en question les droits
du Musée et provoquèrent dans le sein du Conseil muni-
cipal un vif débat qui se termina par l'exécution com-
plète des stipulations de l'acte d'acquisition.
Démission de M. Boyer, son remplacement
comme secrétaire par M. Mornet. — Deux chan-
gements importants dans le personnel du Musée se
produisirent pendant la période que nous étudions.
M. Boyer, qui remplissait, à la satisfaction de tous, les
ingrates fonctions de secrétaire de la Commission depuis
la constitution de celle-ci, donna, par lettre du 2 mars
1874, sa démission de membre de la Commission et par
suite celle de secrétaire. M. Albert Mornet fut appelé à
le remplacer au double titre de membre titulaire de la
Commission et de secrétaire (1).
Démission de M. Alphonse Mater, président
de la Commission ; cette dernière cesse de se
réunir. — On a déjà vu que M. Mater avait au com-
mencement de l'année 1878, donné sa démission de Pré-
sident. On ne le remplaça pas de suite et les réunions de
la Commission eurent lieu sur la convocation et sous la
présidence directe du Maire. Ainsi furent tenues les
séances des 11 février, 4 mars et 3 juillet 1878 pour étu-
dier le projet de construction d'un Musée-Ecole des
Beaux-Arts sur l'emplacement de l'église des Carmes.
Mais après la dernière réunion, dont il vient d'être parlé,
la Commission ne fut plus convoquée pendant près de
trois années. On comprend quel pouvait être le fonc-
tionnement d'une administration dans de semblables
conditions et les progrès qu'elle pouvait imprimer à
l'oeuvre confiée à ses soins.
(1) Reg. Com. Musée, séance du 10 février 1875, p. 170.
196 LE MUSÉE
Une conséquence plus grave encore de la désorganisa-tion de la Commission et de l'impossibilité où elle se
trouvait de continuer à se réunir, c'est l'abandon dans
lequel se trouvait le patrimoine du Musée, livré sans
défense à des entreprises que rien ne pouvait arrêter.
On le vit bien à la fin de l'année 1879, où 49 volumes
d'ouvrages (1) en général rares et précieux, parmi les-
quels étaient 10 volumes de manuscrits, furent transférés
à la Bibliothèque, sans que la Commission ait été con-
sultée et mise ainsi à même de justifier son titre.
On objectera que la place des livres est plutôt dans
une Bibliothèque que dans un Musée, cela peut être
vrai, mais on doit remarquer que ces livres avaient été
donnés au Musée et non à la Bibliothèque qui, cepen-
dant, existait déjà aussi bien que le Musée; il y avait
donc là, quant au choix de l'établissement, une option,une destination intentionnelle qui devaient être respec-
tées, une volonté formelle qu'il était interdit de modi-
fier, sans l'assentiment du donateur ou de ses héritiers.
On peut ajouter qu'un certain nombre de ces ouvragesétaient au moins aussi bien à leur place dans les vitrines
d'un Musée que sur les rayons d'une Bibliothèque. Il en
était ainsi du Sacramentaire de l'abbaye de Pise, des
Heures de Bourges et principalement des bymbola heroïca
dédiés à l'Archevêque de Bourges, Michel Phelippeauxde la Vrillière, où se retrouvaient des spécimens d'un
art délicat qui est représenté dans presque toutes les
collections de curiosités. Un autre livre d'un haut inté-
rêt historique, surtout à Bourges, était la thèse soutenue
dans cette ville même par Louis de Bourbon, duc d'En-
ghien, qui depuis fut le Grand Condé, car elle rappelait
que la jeunesse et l'éducation du vainqueur de Rocroy
(1) V. la liste de ces ouvrages aux Pièces annexes, n° V.
DE BOURGES 197
s'étaient écoulées dans la capitale du Berry. Le public
aurait pu voir ainsi ces ouvrages aujourd'hui complète-ment cachés à sa vue sur les rayons de la Bibliothèque.
Nomination de M. Daniel Mater à la prési-
dence de la Commission. — Le moment approchaitoù l'Hôtel Cujas allait être remis à la Ville et où il fau-
drait s'occuper des questions multiples et variées quel'installation du Musée était de nature à soulever. Le
concours d'une Commission composée d'hommes com-
pétents et dévoués pouvait être alors d'une grandeutilité et par suite la réorganisation de celle du Musée
et la nomination d'un Président était une mesure qu'il
était impossible de retarder davantage.
La Commission renfermait d'ailleurs plusieurs mem-
bres, MM. Boyer, Buhot de Kersers, de Laugardière et
des Méloizes, que leur notoriété archéologique ou artis-
tique désignait tout naturellement pour la présidence,
et on pouvait hésiter entre ces différentes personnes
également dignes d'un pareil honneur ; mais ce fut sur
un membre plus jeune, et à ce moment entièrement
dépourvu de titres, que se porta le choix de M. Brisson.
M. Daniel Mater, entré dans la Commission en 1872,
avait sans doute montré son zèle en s'occupant de suite
de l'inventaire et du classement des collections numis-
matiques, mais le travail auquel il s'était livré dans la
circonstance n'était pas suffisant pour justifier son élé-
vation à la tête d'une Compagnie qui comptait des
savants et des artistes si distingués. Le véritable titre du
nouveau Président, tout le monde et lui-même l'avaient
bien compris, c'était d'être le petit-fils du fondateur du
Musée et le fils du précédent Président, ce qui faisait
espérer que le dévouement et le zèle déployés pour doter
la Ville de Bourges de collections dignes de son passé
198 LE MUSÉE
se retrouveraient une troisième fois, par une sorte
d'héritage, chez un membre de la même famille.
M. Eugène Brisson, dans une lettre qu'il écrivait le
14 avril 1881 à M. Daniel Mater, pour lui notifier son
arrêté du même jour l'élevant aux fonctions de Prési-
dent, lui rappelait l'intérêt qu'il avait toujours porté à ce
Musée auquel le rattachaient « les traditions de famille
les plus respectables » (1).
Le nouveau Président fut installé le 7 mai 1881. Dans
la même séance, il fut donné lecture d'un arrêté, portant
également la date 14 avril, qui nommait Président hono-
raire M. Alphonse Mater, dont la démission a été
racontée en son temps (2).
Proposition d'échange avec le Lycée des
doubles de la collection conchyologique.— Le
Lycée de Bourges avait reçu de M. Rouxel, l'un de ses
professeurs, une collection de coquillages, qui renfer-
mait un certain nombre de doubles dont l'échange
pouvait permettre d'augmenter sans frais les séries exis-
tantes. M. le Proviseur demanda si le Musée consen-
tirait à échanger ses doubles contre ceux du Lycée.La Commission était disposée à accepter cette propo-
sition, mais il fallait préalablement procéder à l'inven-
taire des séries conchyologiques du Musée, pour savoir
quels étaient les doubles dont on pouvait disposer, ce
qui était l'affaire de la Section des sciences (3). On se
souvient de ce qui a déjà été dit de l'impossibilitéoù l'on s'était trouvé dans une autre circonstance
d'obtenir un résultat utile du travail des Sections, il en
fut de même cette fois encore : on n'arriva pas à faire
(1) Mes archives personnelles.
(2) Reg. Com. Musée, 178, séance du 7 mai 1881.
(3) Ibid., 130, séance du 0 février 1872.
DE BOURGES 199
l'inventaire nécessaire et l'échange proposé ne put avoir
lieu (1).
Demande de création d'une place de conserva-
teur-adjoint des collections scientifiques. — M.
Beaudoin, ancien capitaine d'infanterie de marine, s'était
obligeamment employé à remettre en bon état quelques-
unes des collections d'histoire naturelle du Musée, dont le
comte Jaubert avait signalé la fâcheuse situation. Il se
crut autorisé par les services rendus à cette occasion à
demander la création en sa faveur d'un poste de Conser-
vateur-adjoint appointé, avec la promesse d'être nommé
Conservateur, quand cette place se trouverait vacante.
Il s'engageait à donner aux collections tous les soins
dont elles avaient besoin, et à les compléter avec ses
collections personnelles.
Cette demande répondait à un véritable besoin et elle
aurait dû être appuyée par la Commission, dont le rôle
se bornait d'ailleurs à émettre un avis, sauf à l'adminis-
tration municipale à prendre telle décision qui lui
conviendrait. Au lieu de cela, la Commission combattit,
comme inutile, la proposition de M. Beaudoin et lui
offrit, à titre de compensation, une place de membre
de la Commission quand une vacance se produirait,
compensation que l'on peut qualifier d'ironique pour
une personne qui recherchait visiblement une place
rétribuée.
Dans la discussion qui eut lieu à ce sujet, dans le sein
de la Commission, on entendit les mêmes dénégations
non conformes à la vérité, on l'a déjà fait remarquer,
qui s'étaient produites lors des plaintes du comte Jau-
bert sur le mauvais état de son herbier et de la collec-
(I) Reg. Com. Musée, 133, séance du 18 juin 1872.
200 LE MUSÉE
tion ornithologique de M. Thouvenel. On affirmait queces collections étaient en assez bon état, que leurs dété-
riorations peu importantes provenaient d'un défaut de
préparation remontant à l'origine, qu'enfin, la posses-sion de collections d'histoire naturelle, leur entretien, le
renouvellement des articles détériorés, étaient incompa-
tibles avec les faibles ressources d'un Musée de province.
Sans s'arrêter davantage à ces affirmations contradic-
toires, il est hors de doute que l'on aurait dû saisir avec
empressement l'occasion qui se présentait de confier
aux soins d'un spécialiste les collections scientifiques
qui en avaient un si grand besoin, l'événement ne l'a
que trop démontré (1).
Inventaire général des richesses d'art de la
France. — Invités avec tous les Musées et les collec-
tions publiques de la France, à participer à l'inventaire
général des richesses d'art de notre pays, les adminis-
trateurs du Musée de Bourges s'empressèrent de répondre
à cet appel, en faisant connaître ses principales ri-
chesses (2).
A cette occasion, il fut de nouveau question du Cata-
logue du Musée qui s'était borné à la description de la
peinture. On fut unanime à reconnaître combien avait
été fâcheux un arrêt si prématuré et combien les collec-
tions seraient mieux appréciées, si les visiteurs trouvaient
sur chaque objet les indications essentielles les concer-
nant. Dans le feu de la discussion on prit de courageuses
résolutions, malheureusement aussitôt oubliées (3).
Seules les collections numismatiques furent classées
(1) Reg. Coin. Musée, 137, séance du 11 janvier 1873.
(2) Ibid., 149, séance du 17 novembre 1874.
(3) Ibid.
DE BOURGES 201
et leur inventaire descriptif commencé par M. Daniel
Mater, comme il a déjà été dit (1).
Fouilles faites sur l'emplacement de la Fon-
derie de Canons et de l'Arsenal. — La Commis-
sion s'efforçait de faire entrer au Musée les objets quilui étaient naturellement destinés et dont beaucoup
s'égarèrent en route. C'est ainsi qu'en 1870 M. Dumoutet
aurait fait, avec des subsides fournis par la Mairie, des
fouilles sur l'emplacement actuellement occupé par la
Fonderie, fouilles qui auraient amené des découvertes
archéologiques intéressantes. Plus tard, d'autres objets
antiques auraient été trouvés à l'Arsenal. La Commission
insista, sans résultat d'ailleurs, pour que des démarches
fussent faites pour retrouver les objets découverts et les
faire déposer au Musée (Séance du 17 novembre 1874) (2).
Concession du droit exclusif de faire des pho-
tographies des objets du Musée. — Ce droit,
demandé par MM. Poupat et Pellotier, alors photo-
graphes à Bourges, fut concédé au premier. Entre autres
conditions, le bénéficiaire de la concession devait re-
mettre à la Commission 25 exemplaires de toutes les
photographies faites (3).On offrit à tous les membres de la Commission une
collection complète des diverses photographies, jetons de
présence d'une nature particulière, et assurément bien
mérités par ceux qui les recevaient.
Une collection fut déposée à la Bibliothèque munici-
pale, une autre aux archives du Département et le reste
fut conservé pour être offert aux visiteurs de marque du
Musée (4).
(1) Reg. Corn. Musée, 149, même séance.
(2) Ibid.
(3) Ibid., 153 et 160, séances des 20 mars 1875 et 19 juillet 1876.
(4) Ibid., 176, séance du 4 mars 1878.
13*
202 LE MUSÉE
Participation du Musée aux Expositions uni-
verselles de 1867 et 1878. — Le Musée de Bourges
a figuré comme exposant aux diverses Expositions qui
se sont tenues à Paris en 1867, 1878, 1889 et 1900. Nous
ferons connaître ici sa participation aux deux pre-
mières.
En 1867, M. de Nieuwerkerke, président de la Com-
mission de l'Histoire du travail à l'Exposition, demanda
l'envoi des statuettes des pleurants du tombeau de Jean
de Berry et de tels autres objets que l'on croirait devoir
lui proposer.
Dans la discussion qui suivit cette communication,
M. Edmond Rapin fit observer que la demande dont la
Commission était saisie, était une de celles que l'on ne
pouvait refuser à cause de la haute autorité de celui qui
la formulait et que, par suite, il était préférable de don-
ner son consentement de bonne grâce.
Une Sous-commission fut alors nommée pour choisir
les objets qui pourraient être proposés en outre de ceux
désignés (1) et on décida d'offrir l'horloge gothique de
Nançay, le vase italien trouvé dans les fossés du château
de Mehun et les émaux représentant les douze Césars (2).
La contribution du Musée à l'Exposition de 1878 se
composa encore de l'envoi des pleurants du tombeau de
Jean de Berry, auxquels il faut ajouter un tableau d'Eu-
gène Thirion intitulé : Saint Paul premier ermite et Saint
Antoine. Ce dernier ouvrage, qui fut attribué au Musée
en 1877, resta longtemps absent de Bourges, et figura à
l'Exposition de Vienne puis à celle de Paris en 1878.
Envois de l'Etat. — Jamais les envois de l'Etat ne
furent plus importants, grâce d'abord à l'influence dé-
(1) Reg. Corn.Musée,60, séancedu 25 février 1807.
(2) Ibid., 68, séance du 10 mars 1867.
DE BOURGES 203
vouée des députés du Cher, principalement de M. Henri
Fournier, ancien membre de la Commission, qui s'inté-
ressait toujours aux progrès des collections en digne
petit-fils par alliance du fondateur du Musée. A partir
de 1878, M. Eugène Brisson, lorsqu'il fut devenu Maire
de Bourges, s'employa avec son ardeur habituelle pour
augmenter nos richesses en mettant en jeu les relations
qu'il possédait à Paris. Voici la liste de ces envois.
1871. — Buisson : Après la pluie (Vendômois).Patrois : La bonne aventure, jeunes filles russes.
1872. — L'Etat répartit entre les Musées de province
un certain nombre d'oeuvres d'art qui étaient déposées
dans les réserves du Louvre. Pour sa part, le Musée de
Bourges reçut les 11 peintures suivantes :
Le Guide (d'après) : La Folie et la Raison.
Schalcken : Cérès avec un flambeau.
Bon Boulongne : Les Titans foudroyés.
Champmartin : Jésus et les Enfants.
Michel Rigo : L'ange El Mahadi.
Surée : Cornélie, mère des Gracques.
Terburg : Portrait d'homme.
Largilière (attribué à) : Portrait d'homme.
Hubert Robert : Ruines du Temple d'Antonin.
Ecole d'Italie (XIVe s.) : La Vierge entre quatre saints.
Callet : Vénus blessée par Diomède.
1873. — Mgr Latour d'Auvergne-Lauraguais, Arche-
vêque de Bourges, fit attribuer au Musée un beau fusain
de Boichard fils, représentant la Mise au Tombeau.
Les souvenirs artistiques, qui avaient donné à Boichard
le père une sorte de droit de cité à Bourges, rendaient
cette acquisition intéressante.
1874. — Guenest : Mazeppa.
204 LE MUSÉE
Palrois : Jacques-Coeur (1).
Moulages en plâtre d'après l'antique (2).
1876. — Le Musée reçut les oeuvres suivantes, prove-nant encore des réserves du Louvre :
Fra Angelico (Ecole de) : Mort d'un religieux.
Guerchin (Ecole du) : Une Sibylle.
1877. — Thirion (Eugène) : Saint Paul premier ermite
et Saint Antoine.
1878. — Lehoux : Martyre de Saint Etienne.
1879. — Jacquot : L'Odalisque, statue en marbre.
1880. — Mouillion : Pommiers en mai, Bretagne.
Daux : Femme jouant avec des colombes, peinture un
peu nue d'abord placée à la Mairie dans la salle des
mariages, où sa présence souleva des critiques assez
vives.
Le 25 juin 1874, un certain nombre de produits artis-
tiques de la Manufacture nationale de Sèvres furent
attribués au Musée :
Un grand vase à fond bleu marbré, pied en bronze
doré ;
Deux vases décorés d'amours voltigeant, garniture en
bronze doré ;
Un vase décoré de fleurs en relief, avec garniture en
bronze doré ;
Un vase décoré d'attributs champêtres, garnituresemblable ;
Coupe ajourée ;
Vase à fond bleu, sujet : le repos de Vénus ;
(1) Reg. Com. Musée, 144 et 145. La Commission avait prié le Maire de faire
des démarches à Paris pour obtenir ce tableau. (Séances des 8 novembre 1873 et
23 janvier 1874.)
(2) Journal du Cher du 30 janvier 1877.
DE BOURGES 205
Vase à fond vert à anses à enroulements serpentinsdécorés de têtes de chimères ;
Vase à fond gris violacé, décoré de fleurs blanches.
En 1879, à l'occasion du Concours régional qui se
tenait à Bourges, on organisa, sur la promenade de
Séraucourt, une exposition artistique, industrielle et
rétrospective.L'Etat acheta, parmi les oeuvres exposées, trois tableaux
qui furent déposés au Musée :
Mohler : Un chien griffon (1).
Bourgeois (Narcisse) : Une fin d'Été (2), et un Inté-
rieur de cour (3).
Dons de la Ville. — En 1871, lors de la plantationnouvelle de la promenade Séraucourt, dévastée par le
temps et le campement des troupes pendant la guerre,un concours fut ouvert pour l'exécution de ce travail et
des médailles furent décernées aux lauréats. La Ville
déposa au Musée 4 exemplaires des diverses médailles
frappées pour la circonstance (4).
Dépôt au Musée du trésor numismatique de
Méreau-Massay. — En 1873, dans les fouilles exécu-
tées pour la construction d'un pont sur la rivière de
l'Arnon, au passage d'un chemin vicinal allant de Mé-
reau à Massay, on découvrit un trésor considérable de
monnaies des XIe et XIIe siècles, dont M. Prévost, agent
voyer départemental, parvint à sauver la plus grande
partie.L'étude de ce dépôt fut confiée à une Commission pré-
(1) Catalogue de la section des Beaux-Arts et Arts appliqués à l'Industrie, n° 1.
(2) Ibid., n°s110 et
(3) Ibid.
(4) Reg. Com. Musée, 132, séance du 6 février 1872.
206 LE MUSÉE
sidée par M.Vallois, Secrétaire général de la Préfecture,
et composée de six membres (1) nommés par arrêté
préfectoral du 12 novembre 1873.
Le résultat de l'examen auquel procéda cette Commis-
sion fut consigné dans un rapport rédigé par M. Buhot
de Kersers. Il fut constaté que la partie du trésor de
Méreau, recueillie par l'administration vicinale, attei-
gnait le chiffre de 3,780 monnaies, deniers et oboles, dont
61 royales, 3,702 seigneuriales et 17 étrangères. Le plus
grand nombre était de fabrication berruyère : les ateliers
royaux ou féodaux de la province étaient représentés
par 3,114 pièces, et beaucoup constituaient auparavantdes raretés numismatiques. On comprend donc l'intérêt
qu'il y avait à conserver dans le pays un trésor moné-
taire, dont la découverte constituait pour la numisma-
tique locale un événement important.
Le rapport de M. Buhot de Kersers demandait la
remise, au Musée de Bourges, de la trouvaille de Méreau,
comme étant le meilleur moyen d'assurer sa conserva-
tion (2) : le Conseil Général se rangeant à cet avis,
ordonna le dépôt demandé, à la condition toutefois que
l'exposition en serait faite sous une étiquette spéciale.
(Séance du 22 avril 1874.)Par une mesure, dont on ne saurait trop applaudir la
sagesse et la largeur de vue, le Conseil Général décida,
en outre, que l'administration du Musée pourrait faire
des échanges avec les doubles les plus nombreux et par
(1) MM. Berry, conseiller à la Cour d'appel, Buhot de Kersers, secrétaire de
la Société des Antiquaires du Centre, Louis Jacquemot, Charles de Laugardière,substitut du procureur général, qui faisaient également partie do la Société
des Antiquaires du Centre, Louriou, président, et D. Mater, membre de la Société
historique.
(2) Archives du Musée et 5e Bulletin numismatique de M. B. de Kersers (Mém
Antiq. Centre, V, p. 320 et s.).
DE BOURGES 207
ce moyen accroître les collections numismatiques dont
elle avait la garde. M. Daniel Mater, quand il fut devenu
Président de la Commission, mit à profit cette faculté
libéralement accordée. Il se fit spécialement autoriser
par le Conseil municipal (1) à entrer dans la voie des
échanges, et parvint ainsi à augmenter notablement le
médailler du Musée, en s'attachant presqu'exclusivement
à acquérir des monuments métalliques d'intérêt local.
Dons particuliers. — M. Dumoutet fit don au Musée
d'un portrait de jeune Berrichonne, buste en terre cuite,
d'une facture gracieuse.
Après la mort de cet artiste, survenue à Paris, le 24 oc-
tobre 1880, ses enfants remirent au Musée un projet de
statue en plâtre représentant Jacques Coeur, qu'il avait
étudié pour être élevé sur une des places de sa ville
natale.
Champgrand (Abbé) : Portrait de Philibert Charpi-
gnon, prieur des Frères prêcheurs de Bourges.
Martin : Modèle en plâtre de la fontaine Bourdaloue.
Société chorale de Bourges (2) : Sa bannière.
Valette : La Gauloise du monument funéraire de Ju-
ranville, reproduction en plâtre, grandeur naturelle.
Acquisitions.— La Ville fit diverses acquisitions
pour le Musée, parmi lesquelles nous citerons : un très
beau portrait du mathématicien Callet, l'auteur des loga-
rithmes, peint par son frère Callet ; — la mort de Lucrèce,
esquisse de David; — une cotte de maille du XIVe s. (3);—
l'enseigne de la rue des Trois-Pommes (4) ; — des fers
de relieur en cuivre aux armes du cardinal Dupont (5) ;
(1) Séance du 7 avril 1883.
(2) Dissoute en 1877.
(3) Reg. Corn. Musée, 133, séance du 18 juin 1872. (Prix 200 fr.)
(4) Ibid., 147, séance du 23 janvier 1874.
(5) Ibid., 154, séance du 20 mars 1875.
208 LE MUSÉE
— une Assomption, bas-relief en albâtre du XVIe siècle ;— une tête d'ange et un fragment de sculpture en
marbre blanc provenant de la Sainte-Chapelle ; — 103
portraits de personnages des XVIIIe et XIXe siècles pour
faire suite à la collection iconographique de M. Mater ;— une cuvette de bidet en vieux Nevers ; — un clairin
du xve siècle.
Enfin, sur l'avis de la Commission du Musée (1), le
Conseil municipal fit l'acquisition, moyennant la somme
de 800 francs (2), de deux intéressants spécimens de l'in-
dustrie céramique de Vierzon : un guéridon en porce-
laine, véritable chef-d'oeuvre d'habileté technique, et
une fontaine en biscuit décorée d'animaux et de feuil-
lages aquatiques, pièces faites pour l'Exposition univer-
selle de 1867. En achetant à M. Bazile ces deux objets,
la Ville s'acquittait d'une véritable dette envers un com-
patriote qui, antérieurement, avait lait don au Musée,
alors que la fortune lui souriait davantage, d'un beau
vase qui avait figuré à la même Exposition.Le Musée possède donc aujourd'hui trois belles pièces,
d'un grand intérêt à des titres divers, qui donnent une
idée avantageuse d'une fabrique vierzonnaise aujour-
d'hui disparue depuis 40 années.
(1) Reg. Corn. Musée, 117 et 155, séances des 23 janvier 1874 et 7 mai 1876.
(2) Procès-verbaux...., XXIX, n° 260, séance du 17 janvier 1871, et XXX,
n° 85, séance du 5 juin 1875.
DE BOURGES 209
Ici s'arrêtera l'Histoire de la fondation du Musée de.
Bourges, que nous avons entrepris d'écrire. Nous l'avons
conduite jusqu'à l'époque décisive où le problème si
souvent agité de son installation s'est enfin trouvé résolu,
tout au moins en principe, par l'acquisition de l'Hôtel
Cujas et où l'administration du Musée reconstituée, et
on pourrait dire rajeunie, fut mise en situation de
pourvoir aux questions si complexes et si variées qu'al-
lait soulever le transfert des collections dans un nouveau
local.
La restauration de l'Hôtel Cujas, son appropriation à
la destination qu'il allait recevoir et qui lui convenait si
bien, puis le lamentable conflit qui s'éleva entre
le service des Monuments historiques et l'Administra-
tion municipale de la Ville de Bourges, l'essort si grand
que les collections prirent dès qu'elles furent placéesdans le cadre charmant qui allait les mettre en
valeur, ne serait pas moins intéressant à raconter
que ce qui s'est passé dans la période antérieure,
mais des raisons personnelles de convenance, faciles à
comprendre, nous interdisent de parler des faits quisuivirent et qui d'ailleurs sont encore bien récents.
Il était déjà fort difficile et bien délicat d'avoir à
raconter l'oeuvre de son aïeul et de son père, mais que
serait-ce, si le récit entrepris avait été poursuivi jusqu'à
l'époque où celui qui écrit ces lignes étant devenu à son
tour Président de la Commission, aurait à raconter
des faits et des événements auxquels il a pris une part
personnelle importante : la notice historique de la fon-
dation du Musée tournerait alors aux mémoires parti-culiers et constituerait à beaucoup d'égards une sorte
d'autobiographie, dont rien ne démontre l'intérêt et dont
celui qui en serait l'objet n'éprouve nullement le besoin.
PIEGESANNEXESDE LA DEUXIÈMEPARTIE
I
L'Hôtel Cujas. — Musée et Bibliothèque.
« Quant à l'étude sur l'Hôtel Cujas, la Commission his-
torique se rappelle ce que M. le Préfet a bien voulu dire à
la dernière séance : son intention si bienveillante pour la
Ville de Bourges, et témoignant d'un intérêt sérieux et
pour les arts, et pour la conservation de ces inimitables
monuments qui sont pour les villes ce que les ancêtres
sont pour les familles (1), était depuis longtemps de
proposer au Conseil Général de céder l'Hôtel Cujas à la
Ville, aux conditions les plus favorables, à l'effet d'y
installer sa Bibliothèque et son Musée ou l'une ou
l'autre de ces collections ; et c'était pour préparer les
voies à ce projet, en rédiger le programme, et permettre
dès lors à la Commission historique un voeu motivé et
de nature à faire autorité quant à sa réalisation, que
l'étude de l'édifice avait été demandée.
(1) La conservation de l'Hôtel Cujas comme monument historique préoccupe
depuis longtemps les Préfets du Cher ; on lit dans le rapport fait par le Préfet
au Conseil Général en 1856 : « L'année dernière, vous avez rejeté le projet de
reconstruction de l'ancien Hôtel Cujas Je n'ai pas cru devoir vous proposer
d'effectuer cette restauration l'année prochaine ; il m'eût répugné d'ailleurs de
vous présenter un projet dont la réalisation aurait pour conséquence de faire
perdre à un monument historique son cachet, son style et les souvenirs que mon
administration s'attachera, au contraire, à faire revivre et honorer. » [Note du
rapport.].
212 LE MUSÉE
« Le rapporteur ne pouvait y procéder seul ; il a
réclamé le concours de plusieurs des membres de la
Commission: M. Rapin, adjoint; M. Bussière, architecte
du Département et de la Ville; M. Charmeil, bibliothé-
caire de la Ville et Conservateur de son Musée, et
M. Boyer, bibliothécaire adjoint ; et c'est de concert
avec eux que ce rapport est présenté.« Pour bien juger l'Hôtel Cujas, il faut se défendre du
dégoût qu'inspire à première vue son état actuel ; il
faut dégager, par la pensée, l'intérieur de l'édifice des
cloisons qui défigurent ses salles, qui font que ce n'est
qu'avec de la patience et du temps qu'on arrivera à s'yreconnaître et à démêler la distribution primitive.
« Description de l'intérieur de l'Hôtel. — Suivant la
distribution primitive, le rez-de-chaussée comprenddeux grandes salles ayant conservé leurs plafonds en
bois à caissons, et la première, sa belle cheminée, toutes
deux parfaitement éclairées sur la cour d'entrée et la
seconde cour mesurant 126m42 superficiels; à la suite de
la seconde pièce se trouvent en outre trois pièces, l'une
en retour sur la seconde cour, les deux autres donnant
sur la cour dite du Manège ; ces trois pièces mesurant
ensemble 60 mètres (1) ; ce rez-de-chaussée, dont la
hauteur sous plafond est de 4m 20, avait une double
entrée, celle principale au pied du grand escalier et
une autre sous la galerie en retour formant l'aile gauche
de l'Hôtel.
« Le premier étage est desservi non seulement par le
grand escalier-vis d'une proportion inusitée et beaucoup
plus belle que celle de Jacques-Coeur, mais encore par
(1) Toutes les mesures données dans ce rapport ont été relevées d'après les
cotes des deux feuilles de dessin remises par M. Bussière et qui y demeureront
annexées.
DE BOURGES 213
deux autres vis en pierre, construites, l'une à l'extré-
mité de l'aile gauche à la suite de la galerie couverte, et
la seconde, au bout du bâtiment en retour donnant sur
la seconde cour.
« On mentionne de suite que l'aile droite de l'Hôtel
ne pourrait être utilisée que pour le logement du biblio-
thécaire et du concierge, car on ne peut arriver au
pavillon Renaissance donnant sur la rue des Arènes,
pavillon construit après coup, que par ce qui était
affecté aux communs dans la distribution primitive,
cuisine, chambres de domestiques, pièces toutes très
basses et d'un niveau différent, cette aile ayant été
coupée en trois étages.« Au premier, qui a 4 mètres de hauteur sous solives,
se trouvent deux salles qui seront également fort belles,
lorsque leurs plafonds à solives et à moulures, suppor-
tées par des poutres élégamment évidées, en pointe,
comme celles de Meillant, construction contemporaine,
auront été dégagées du plâtre qui les couvre ; à la suite
on rencontre deux pièces et deux grands cabinets
desservis par les petits escaliers.
« Le grenier au-dessus du corps de logis principal
est également desservi par le grand escalier et par celui
de l'aile gauche, sa belle charpente à chevron portant
ferme, permet d'y établir deux travées de galerie de
5 mètres de hauteur éclairées sur la cour d'honneur par
de magnifiques lucarnes et qui pourraient l'être supplé-mentairement du côté opposé par des jours pris dans
le toit.
« Enfin, au fond de la seconde cour, se trouve un
dernier bâtiment dont le premier donnerait une salle de
44 mètres superficiels, et le beau grenier, une galerie de
5 mètres de hauteur, 6 mètres de largeur et 16 mètres de
longueur. Ce bâtiment est desservi par la vis de la
214 LE MUSÉE
seconde cour, laquelle le met d'ailleurs en communi-
cation avec le corps principal de l'Hôtel.
« Ceci est ce qui comporte ce que nous appellerons
l'ancien Cujas; après une étude attentive on estime et
on va démontrer que la Bibliothèque de la Ville et son
Musée, eu égard à leur importance actuelle, y trouve-
raient facilement place.
« Musée. — Le Musée, dans son local actuel, occupe
sept salles mesurant 234m 86 superficiels.
« Sept pièces mesurant ensemble 326m42, soit 92 mètres
de plus, lui seraient affectées également dans l'ancien
Cujas, savoir : les cinq pièces du rez-de-chaussée, la
salle de 44 mètres du bâtiment du fond et la galerie à
établir dans le grenier au-dessus.
« Les deux belles salles nos 1 et 2 et celle en retour
n° 3 recevraient le Musée Moyen-Age et Renaissance,
sculptures fines, meubles, armes, faïences, émaux et
portraits de cette époque; cette collection est la plus
importante, celle qui fait l'honneur du Musée ; en l'ydistribuant avec goût, elle s'harmoniserait merveilleu-
sement avec ces belles salles appartenant à la même
époque et au même style, et on n'hésite pas à dire que,
comme aspect d'ensemble, l'Hôtel Cluny n'aurait rien
de mieux.
« La pièce n° 4 formerait le salon Louis XV et des
chinoiseries ; enfin celle n° 5, quoique petite, serait suffi-
sante pour recevoir ce que le Musée possède en anti-
quités égyptiennes, étrusques, grecques, romaines et
gallo-romaines.
« Les morceaux de sculpture ancienne, figures, stèles,
décoreraient la galerie ouverte de l'aile gauche, une
autre existant en prolongement dans la cour d'entrée
et, en outre, le grand escalier qui serait remarquable,
DE BOURGES 215
si cette décoration donnait du mouvement à ses baies
et à ses parois trop nues.
« Enfin, quant aux médailles, estampes et livres à
figures et au meuble destiné par M. Bourdaloue à
recevoir la minute du nivellement du Cher, ils seraient
réintégrés à la Bibliothèque à laquelle ils appartiennent.
(Courrier de Bourges du 18 janvier 1865.)
« Bibliothèque. — La Bibliothèque occuperait les
pièces du premier et deux travées de galerie dans le
grand grenier au-dessus.
« Les pièces du premier présentent en pourtours uti-
lisables en rayons 367 mètres carrés.
« Les deux travées du comble
donneraient 240 id.
607 id.« Les rayons occupés par les
livres dans la Bibliothèque
actuelle ne développent que 500 id.
Différence 107 id.
« Soit un emplacement supérieur d'un quart à rem-
placement actuel, indépendamment des pièces acces-
soires dont on ne parle pas et qui pourraient recevoir
beaucoup de livres.
« La distribution des lieux semblait d'ailleurs faite
exprès pour la commodité du service ; si l'entrée
d'honneur de la Bibliothèque à ses deux étages devait
être par le grand escalier, les lecteurs y accéderaient
habituellement par l'escalier de l'aile gauche, au haut
duquel ils trouveraient la salle de lecture chaude et
très claire ; à la suite il y avait une petite pièce quiserait le cabinet du bibliothécaire, et à côté l'entrée des
grandes salles du premier, au fond desquelles était
encore un autre cabinet pour les manuscrits. Enfin le
216 LE MUSÉE
même escalier de l'aile gauche mettait en communi-
cation directe la salle de lecture avec la galerie des
combles.
« Musée lapidaire. — Il faut qu'on en dise un mot.
Est-ce que si le projet caressé par le généreux ano-
nyme dont M. Bourdaloue est l'organe, de placer ce
Musée au Château d'Eau, ne recevait pas finalement son
exécution, est-ce que, dans ce cas, on ne lui trouverait
point place dans les dépendances de Cujas ? Pour cela
il suffirait, indépendamment des galeries ouvertes dont
on a parlé, et d'autres locaux dont on ne parle pas,
d'élever de légers hangars autour de la cour dite du
Manège ; et si l'on convertissait celle-ci en square, en la
prolongeant jusqu'à la rue des Arènes au moyen de la
démolition des deux maisons annexes, n'obtiendrait-on
pas encore, sans grands frais, quelque chose dans le
style harmonieux du jardin qui entoure l'Hôtel Cluny ?
Et qui sait si alors le généreux anonyme ne reporterait
pas sa libéralité sur un projet qui aurait le résultat de
concentrer toutes les richesses artistiques de la Ville
dans un hôtel artistique.
« Dépenses d'appropriation et d'ornementation. — A cet
égard il faut également se défier de l'impression que
donne l'aspect actuel des bâtiments.
« Et il y a lieu de distinguer entre la grosse oeuvre et
l'ornementation.
« La grosse oeuvre, qui doit être menée et parachevée
en même temps dans l'ensemble du vieux Cujas, consiste
dans l'enlèvement des cloisons et plafonds, dans la
plâtrerie, dans le remplacement des trois poutres du
premier qui sont cassées, dans des planches à établir
partout ou presque partout, sauf dans la galerie du fond
et enfin dans la restauration des fenêtres.
DE BOURGES 217
« Quant à l'ornementation, l'économie s'allie parfai-tement avec le goût.
« Des peintures à la colle, parce qu'elles sont plusharmonieuses, point de vernis, des teintes bien éteintes
et combinées en vue du jour et des objets à faire valoir;les plafonds à caissons des deux salles de cérémonie,azur et bois, ou grenat et bois ; au premier, le plafondà solives apparentes, azur et bois parce qu'il serait
dispendieux de refaire les arabesques.« Enfin, quant aux rayons de la Bibliothèque, peu de
choses à prendre dans l'ancienne, où beaucoup de livres
magnifiques sont entassés sur des ais à peine rabotés;ces rayons il les faut, ou très simples en bois blanc
peint, ou en très belles boiseries de chêne ciré ; prendrele premier parti.
« D'ailleurs l'installation des collections, et dès lors
l'ornementation des salles, peuvent être espacées en
plusieurs années.
" D'abord l'appropriation des salles du Musée et son
installation pour échapper au plus vite au loyer de
2.400 francs qui grève la Ville, somme d'ailleurs qui ne
sera pas beaucoup inférieure à l'intérêt du prix, proba-blement assigné à Cujas, de sorte qu'étant exonérée de
cette charge, la Ville n'aurait guère à payer, en intérêts,
beaucoup plus que ce qu'elle payait de loyer.« Et ensuite, et à l'heure qu'on voudra, l'ornemen-
tation des salles de la Bibliothèque et son report de
l'Archevêché à Cujas.
« Développement des collections. — C'est une éven-
tualité trop certaine pour qu'elle ne soit pas prévue.a Quant à la Bibliothèque, avec un local un quart
plus grand que celui actuel, et diverses pièces acces-
soires, elle est logée pour un long temps.« Mais on ne peut dissimuler que la galerie dont on
14
218 LE MUSÉE DE BOURGES
peut disposer pour les tableaux ne soit un peu exiguë
dans ses proportions et qu'il ne faille voir là qu'une ins-
tallation pour quelques années.
« A cet égard, qu'on jette les yeux sur le plan des
annexes de Cujas; ne pourra-t-on pas y bâtir tant
qu'on voudra ; n'y trouve-ton pas tout marqué l'empla-
cement d'une galerie en façade sur la place déjà appelée
Place Cujas, galerie construite en cédant à cette place
le terrain nécessaire pour la régulariser autant que
possible, et surtout pour faire disparaître l'angle dis-
gracieux que présentent à leur rencontre les rues des
Arènes et Saint-Médard.
« Et quant à la galerie que nous appellerons provi-
soire, elle serait alors affectée à l'histoire naturelle
où à la Bibliothèque, selon le développement qu'auraient
pris ces collections.
" En résumé, donc possibilité, non seulement dans le
présent, mais pour un long avenir, au moyen de
quelques constructions que d'ailleurs les besoins de
l'édifice réclament, de réunir toutes les richesses artis-
tiques de la Ville dans l'Hôtel Cujas et ses annexes, et
merveilleuse convenance à l'adoption de ce plan, dont
les intentions libérales de M. le Préfet rendraient la
réalisation relativement économique. »
(Journal du Cher des 12 et 14 janvier 1865 et Courrier
de Bourges du 16 janvier.)
II
L'Hôtel Cujas. — Musée de Bourges.
A Monsieur le Directeur du Journal du Cher.
« MONSIEUR LE DIRECTEUR,
« Vous avez reproduit dans vos nos du 12 et du 14 jan-vier un rapport étudié de M. le Président Hiver sur l'af-
fectation de l'Hôtel Cujas à l'emplacement de la Biblio-
thèque publique et du Musée de Bourges.« Ce qui donne à ce projet un vif intérêt, c'est la
double perspective d'y trouver à la fois l'utilisation d'un
monument précieux à tous égards, et la possibilité d'y
placer des collections jusqu'à ce jour mal abritées.
« Il y a un point cependant sur lequel il importe
qu'on soit bien renseigné, c'est en ce qui concerne l'opi-
nion que les Conservateurs des collections pour lesquelles
on propose le nouvel emménagement, conçoivent de la
proposition. Or, il est impossible de dissimuler que
celte opinion est formellement contraire à celle que
développe le rapport en question, au moins quant à la
réunion des deux collections sous le même toit.
« Ce qui est incontestable, c'est que le Musée ne peut
rester plus longtemps où il est, il y a urgence pour qu'il
trouve ailleurs un abri plus convenable et plus sûr.
L'Hôtel Cujas s'offre, on ne peut plus à propos, pour le
recevoir. Dans les conditions où l'affaire semble pouvoir
220 LE MUSÉE
se négocier, le transport du Musée dans le local qu'on
lui destine n'imposerait pour ainsi dire à la Ville aucun
nouveau sacrifice, puisqu'il n'y aurait à compter qu'avec
les nécessités de l'appropriation, qui paraissent devoir
être fort modérées, et qui le seront d'autant plus qu'on
multipliera moins les services dans l'Hôtel.
« Les conditions défavorables où se trouve actuelle-
ment notre Musée ne pèsent pas d'un poids égal sur la
Bibliothèque. Les trois défauts que présente rétablisse-
ment de cette dernière dans le Palais de l'Archevêché,
sont sa position excentrique, l'humidité et surtout l'in-
suffisance du local. Assurément la Bibliothèque ne peut
rester où elle est, car, indépendamment des autres mo-
tifs, on en est arrivé à ne savoir où placer les livres, si
rares soient-ils, dont elle s'enrichit de temps à autre ; et
l'on n'a pas besoin d'ajouter que, pour cette collection
aussi bien que pour l'autre, il y a un obstacle radical et
déplorable à tout accroissement.
« Toutefois, on le comprend, le service d'une Biblio-
thèque ne ressemble en rien à celui d'un Musée. Dans
l'un, le public doit tout voir à l'aise et sans intermé-
diaire; dans l'autre, il ne communique avec les collec-
tions que par le Conservateur, d'où suit que, tant que le
Musée n'est pas installé convenablement, il est plus no-
minal que réel. Qu'est-ce donc quand on réfléchit que,
faute d'espace, le nôtre se voit privé du bénéfice de col-
lections tout entières (tableaux, moulages, statues, etc.),
(lui viendraient certainement l'enrichir, sans qu'il en
coûtât rien à personne, pourvu seulement qu'on les pût
placer?« Tout se réunit donc pour faire ressortir la nécessité
d'un déplacement aussi prompt que possible du Musée,
tandis que, à certains égards, la Bibliothèque peut du
moins attendre un certain temps encore.
DE BOURGES 221
« Les circonstances favorables offrent l'Hôtel Cujas
pour recevoir les collections du Musée, et cela dans les
conditions les plus pratiques; qu'on l'y transporte et
qu'on l'y transporte dès qu'on pourra, mais qu'on n'y
transporte que lui.
« Nous n'examinons pas ici si, suivant l'avis de plu-
sieurs personnes, il n'y a dans l'Hôtel Cujas, tel qu'il
est, que trop justement la place nécessaire au Musée
seul ; ce que nous voulons constater et ce qu'il nous im-
porte de démontrer, c'est qu'il n'y a pas assez de place
pour le Musée et la Bibliothèque ensemble et que celte
dernière y serait aussi peu convenablement placée que
possible, si elle devait s'y resserrer pour faire place au
locataire qu'on veut lui donner.
« Deux services sont toujours mal à l'aise dans le
même local : qu'est-ce donc quand il y a enchevêtre-
ment, comme dans le projet en question, qui propose de
placer les livres, moitié au premier étage et moitié dans
les autres collections du Musée? Il est douteux que
l'usage d'une Bibliothèque ainsi établie fût commode et
au public et au Conservateur.
« Il y a plus : l'espace que l'on y accorde aux livres et
qui ne l'est peut-être qu'au détriment du reste, se trouve
tout-à-fait insuffisant pour le but qu'on se propose. Ici,
les calculs auxquels l'honorable rapporteur s'est livré
l'ont complétement induit en erreur. Il pense pouvoir
affecter à la collection qu'il appelle en cet endroit un
développement en parois de 600 mètres carrés, en chiffres
ronds. (Nous laissons de côté les annexes qui seront
nécessaires pour le service de l'établissement, mais qui
ne pourront recevoir de livres.) En face de ce chiffre,
M. Hiver pose celui que présente le développement des
rayons de la Bibliothèque actuelle et qu'il évalue à
500 mètres carrés, soit un bénéfice de 100 mètres au
222 LE MUSÉE
moins dans le nouvel édifice, ce qu'il considère comme
devant suffire à tous les besoins de l'avenir.
« Telle n'est pas notre opinion, fondée sur ce que,d'une part, ces besoins peuvent être plus grands queM. le Rapporteur l'a pensé, et, d'autre part, sur ce queson calcul est incomplet. En effet, dans l'évaluation en
mètres carrés qu'il a faite de l'ancienne Bibliothèque, il
n'a pas tenu compte de ce fait, que les rayons régnantdu haut en bas dans des pièces de plus de 4 mètres de
hauteur et sans galeries de pourtour, il fallait dédoubler
la totalité de cette hauteur et doubler par conséquentl'étendue du nouvel emplacement. Ce ne serait donc plus600 mètres, mais 1,200 mètres carrés qu'il faudrait, pour
que les calculs de M. le Rapporteur soient exacts. Ce
n'est pas tout; vu l'entassement si préjudiciable de nos
livres, et la nécessité où l'on s'est trouvé quelquefois de
les doubler sur les rayons, mesure qui contribue à
rendre le service difficile, il y aura peut-être lieu de
demander un supplément de 200 mètres, soit 1,400 mè-
tres carrés.
« Ajoutons enfin qu'il n'a pas été tenu compte des
développements que nos collections peuvent éprouver.Il résulte du fait même de la composition de ce dépôt,
que des spécialités tout entières, et des plus impor-
tantes, y sont très pauvrement représentées. La littéra-
ture et la science modernes sont dans ce cas. Est-il donc
si téméraire d'admettre que, poussée par le désir de
mettre sa Bibliothèque à la hauteur des besoins de
l'époque, et rencontrant quelque occasion bonne à saisir,
la Ville un jour ne puisse faire l'acquisition en bloc
d'une collection de plusieurs milliers de volumes? Dans
cette éventualité très réalisable, où trouvera-t-on à placerles nouvelles acquisitions? Ira-t-on demander au Musée
un peu de place, quand il se plaindra peut-être de son
DE BOURGES 223
côté qu'on lui prend celle qui lui était nécessaire pour
se développer ? Aura-t-on recours à de nouvelles cons-
tructions ? Il faudrait alors en arrêter le devis à l'avance
pour savoir à quoi l'on s'engagerait et prévenir des ma-
noeuvres coûteuses et des déplacements préjudi-
ciables.
« Ce serait donc une économie, d'autant plus fausse
que la nécessité ne le commanderait pas absolument,
que celle qui réunirait même provisoirement les deux
collections, laissant à l'avenir la charge de les installer
définitivement. Bourges n'est pas, Dieu merci, dans la
condition des villes qui, faute d'édifices à approprier, ont
toujours à compter, quand il s'agit d'une nouvelle ins-
tallation, avec les dépenses excessives d'une construc-
tion à neuf. Chez elle, les monuments abondent, monu-
ments d'élite, chefs-d'oeuvre d'art mal utilisés et qui ne
demandent qu'à l'être mieux. L'occasion s'offre aujour-
d'hui de sauver l'Hôtel Cujas en sauvant notre riche
Musée : qu'on ne la laisse pas échapper, quand la retrou-
verait-on? Qu'on y installe le Musée, c'est un besoin
pressant auquel il faut pourvoir avant tout autre, exclu-
sivement à tout autre, parce qu'on peut le faire à peu de
frais aujourd'hui et qu'il ne peut y avoir que des incon-
vénients à prolonger davantage l'état actuel des
choses.
« Le Musée installé, on songera alors à la Biblio-
thèque, ce qui ne sera pas non plus bien dispendieux,
pour peu que l'on sache s'y prendre. Il y a encore en
ville des édifices comme l'Hôtel Lallemant, l'église des
Carmes, etc., qui tout naturellement se présentent pour
une destination de cette nature : le jour où on le voudra,
on y trouvera de quoi placer à l'aise et Bibliothèque et
Musée lapidaire.« Mais avant tout il faut, croyons-nous, asseoir le pré-
224 LE MUSÉE DE BOURGES
sent sans léguer d'embarras à l'avenir. Assigner à chaque
jour son oeuvre et l'accomplir, c'est le dernier mot de la
sagesse pratique ; l'oeuvre du jour nous semble être l'af-
fectation de l'Hôlel Cujas au Musée.
« Le Conservateur de la Bibliothèque et du Musée,
» CHARMEIL. »
III
Commission consultative et de surveillance
du Musée.
LISTE DES MEMBRES TITULAIRES
PRÉSIDENTS :
Mater (Alphonse), conseiller à la Cour d'appel,
démissionnaire le 1er février 1877, nommé
Président honoraire le 14 avril 1881, f 1er jan-
vier 1897.
Mater (Daniel), avocat, membre de la Commission
du Musée, nommé Président le 14 avril 1881.
MEMBRES DE LA COMMISSION :
A. — Bengy-Puyvallée (Charles de), propriétaire, f le
17 septembre 1867.
Peneau (Eugène), pharmacien, nommé le 14 dé-
cembre 1867.
B. —Berry, conseiller honoraire à la Cour d'appel de
Bourges, démissionnaire le 19 juin 1872,
f le 30 mars 1876.
Laugardière (Vicomte Charles Ribaud de), substitut
du Procureur Général près la Cour d'appel de
Bourges, nommé le 10 janvier 1873.
C. — Borget (Auguste), artiste peintre, -]-le 29 octobre 1877.
Ratier (Victor), ancien professeur et bibliothécaire
226 LE MUSÉE
de la Ville, nommé le 6 février 1878, -|- le 6 août
1898.
Lelong (Abbé), vicaire général de l'Archevêque de
Bourges, nommé le 3 novembre 1898, démis-
sionnaire le 25 mars 1908.
Jossant (Henri), statuaire, professeur à l'École des
Arts appliqués à l'industrie de Bourges,
nommé le 31 mars 1908.
D. — Bourdaloue (Paul-Adrien), ingénieur civil, adjoint
au Maire de Bourges, f le 23 juin 1868.
Bonnault de Villemenard (Antoine de), adjoint au
Maire de Bourges, nommé le 4 novembre 1868,
démissionnaire le 3 juin 1887, j le 18 avril 1889.
Le Grand (Antoine), agent voyer en chef du dépar-
tement du Cher, nommé le 14 janvier 1889,
f le 13 mars 1905.
Cougny (Gaston), directeur de l'Ecole des Arts
appliqués à l'industrie de Bourges, nommé le
22 mars 1905.
E. — Boyer (Hippolyte), archiviste-adjoint des Archives
du Cher, démissionnaire le 2 mars 1874.
Mornet (Albert), banquier, nommé le 9 février 1875.
F. — Bussière (Emile), architecte départemental, -j- le
20 décembre 1902.
Pascault (Albert), architecte du département du
Cher, nommé le 25 mai 1904.
G. — Dumoutet (Jules), statuaire, non acceptant.
Buhot de Kersers (Alphonse), nommé le 28 janvier
1867, -j- le 11 décembre 1897.
Ponroy (Henri), membre correspondant de la
Commission, nommé membre titulaire le 1er
janvier 1898.
H. — Fournier (Henri), avocat, démissionnaire le 4 no-
vembre 1871.
DE BOURGES 227
Mater (Daniel), avocat, nommé le 21 février 1872,
Président le 14 avril 1881.
Labrosse (Armand), greffier du Tribunal de Com-
merce, nommé le 15 avril 1881.
I. — Lapparent (de), chef de bataillon du Génie, f le
23 juin 1881.
Lecat (Ludovic-Joseph), professeur de physique au
Lycée, nommé le 20 juillet 1881, démission-
naire pour cause de départ en 1881.
Pêtre (Charles), statuaire, directeur de l'École
Nationale des Arts appliqués à l'industrie de
Bourges, nommé le 30 mars 1882 et démission-
naire en raison de sa nomination comme
Conservateur du Musée le 5 août 1883.
Deballe (Alfred), professeur de dessin au Lycée,nommé le 17 janvier 1885, f le 8 avril 1903.
Salle de Chou (Baron François), artiste peintre,membre correspondant de la Commission,
nommé le 25 mai 1904.
J. — Louriou (Jean-Félix-Auguste), avocat, parti de
Bourges vers 1876, f le 10 janvier 1879.
Leclerc (Ernest), architecte, nommé le 8 août 1878,
f le 27 février 1900.
Magdelaine (Francis), avocat, nommé le 2 mars
1900, démissionnaire pour cause de départ le
24mars 1904 et nommé membre correspondant.
Gauchery (Paul), architecte à Vierzon, membre
correspondant de la Commission, nommé le
25 mai 1904.
K. — Méloizes (Marquis Albert des), avocat, président de
la Société des Antiquaires du Centre.
L. —Rapin (Edmond), juge suppléant au Tribunal
civil, adjoint au Maire de Bourges, démis-
sionnaire le 6 mai 1881.
228 LE MUSÉE
Benet (L.), conservateur des Hypothèques, nommé
le 17 janvier 1885, démissionnaire pour cause
de départ le 27 avril 1889.
Artigaud (Alexis), syndic de faillite, nommé le 21
mai 1889, f le 2 juin 1899.
Grossouvre (Albert Durand de), ingénieur en chef
des Mines, nommé le 12 juin 1899.
M. — Rhodier (Paul), greffier du Tribunal civil, j- le
24 avril 1894.
Roger (Octave), ancien magistrat, membre corres-
pondant de la Commission, nommé le 5 mai
1894.
N. — Romagnesi (Pierre-Narcisse), ancien professeur de
dessin à l'École Navale, f le 20 janvier 1882.
Vallois (Georges), ancien secrétaire général de la
Préfecture du Cher, nommé le 30 mars 1882,
non acceptant.
Boyer (Hippolyte), ancien membre de la Commis-
sion, nommé le 6 février 1878 (1), -j- le 26 mars
1897.
Goy (Pierre de), membre correspondant de la Com-
mission, nommé le 1er janvier 1898.
O. — Tarlier (Emile), architecte des édifices diocésains,
t le 2 mars 1902.
Tarlier (Henri), architecte des édifices diocésains,
nommé le 1er janvier 1878.
LISTE DES MEMBRES CORRESPONDANTS
Cougny (Antoine), ancien Conservateur-adjoint du
Musée, inspecteur principal de l'Enseignement
(1) M. Boyer, dans l'arrêté, est indiqué comme nommé en remplacement de
M. Mater (Alphonse), ce qui était une erreur, puisque celui-ci, en sa qualité de
Président, ne comptait pas parmi les 15 membres de la Commission. C'est pour
régulariser la situation qu'il prit postérieurement la place de M. Romagnesi.
DE BOURGES 229
du dessin dans les Écoles de la Ville de Paris,
f le 9 juin 1896.
Bourdinat, entrepreneur de travaux publics et
conseiller municipal à Nouméa (Nouvelle-
Calédonie), nommé le 15 décembre 1883.
Benet, conservateur des Hypothèques à Lyon,
nommé le 21 mai 1889.
Bengy de Puyvallée (Pierre de), artiste peintre à
Paris, nommé le 22 juin 1892, f le 8 août 1900.
Ganchery (Paul), architecte à Vierzon, nommé le
22 juin 1892, devenu membre titulaire le 25
mai 1904.
Guère (Comte Raymond de la), propriétaire à
Sainte-Montaine, nommé le 22 juin 1892, f le
21 mars 1897.
Guillot, agent voyer à Lignières, nommé le 22 juin
1892.
Goy (Pierre de), propriétaire à Osmery, nommé le
22 juin 1892, devenu membre titulaire le 1erjan-
janvier 1898.
Ponroy (Henri), maire de Cerbois, nommé le 22
juin 1892, devenu membre titulaire le 1er jan-
vier 1898.
Roger (Octave), propriétaire à Brinay, nommé le
22 juin 1892, devenu membre titulaire le 5
mai 1894.
Salle de Chou (François), artiste peintre à Paris,
nommé le 22 juin 1892, devenu membre titu-
laire le 25 mai 1904.
Bengy de Puyvallée (Georges de), artiste peintre à
Paris, nommé le 19 novembre 1893.
Auclair, conducteur des Ponts et Chaussées en
retraite à Saint-Amand-Montrond, nommé le
20 juin 1894.
230 LE MUSÉE DE BOURGES
Chénon (Emile), professeur à la Faculté de droit
de Paris, nommé le 17 octobre 1896.
Brateau (Jules), ciseleur-sculpteur, nommé le 21
juillet 1897.
Mallard (Gustave), avocat à Saint-Amand, nommé
le 23 avril 1900.
Magdelaine (Francis), ancien membre titulaire,
nommé membre correspondant le 25 mai 1904.
Saint-Venant (Julien Barré de), inspecteur des
Eaux et Forêts à Nevers, nommé le 4 juin 1904.
Breuil (Abbé), professeur à l'Université de Fri-
bourg, nommé le 15 décembre 1904.
Robert (Emile), ferronnier d'art à Paris, nommé
le 27 décembre 1905.
Planchon (Mathieu), horloger-constructeur à Paris,
nommé le 2 mai 1907.
Thabaud des Houlières (François), inspecteur dé-
partemental de la Société française d'Archéo-
logie, nommé le 11 février 1908.
Thomas-Soyer (Mme Mathilde), statuaire à Sainte-
Claire, par Isdes (Loiret), nommée le 31 mars
1908.
Massé (Joseph), artiste peintre à Lyon, nommé le
31 mars 1908.
Penat (Lucien), graveur à Paris, nommé le 31 mars
1908.
IV
Règlement intérieur du Musée.
ARTICLE 1er. — Le Musée municipal de Bourges sera
ouvert au public le dimanche de chaque semaine, de
midi à quatre heures du soir, sous la surveillance des
gardiens de l'Etablissement, sauf à M. le Maire d'en
autoriser la publicité pendant plusieurs jours de suite
et dans des circonstances données.
ARTICLE 2. — Les jours où il serait possible quel'affluence du public rendit insuffisante la surveillance
ordinaire, des mesures de police intérieure seront prises
pour augmenter cette surveillance, faciliter la circula-
tion et éviter tout encombrement.
Il pourra, suivant le besoin, être ouvert une porte de
sortie spéciale.
ARTICLE 3. — Tous les autres jours de la semaine, le
Musée sera accessible aux visiteurs particuliers et de
passage, de 10 heures du matin à quatre heures du soir.
Les gardiens de l'Etablissement se mettront à leur dis-
position, et nul ne pourra s'introduire dans le Musée
sans être accompagné par eux.
ARTICLE 4. — Les artistes et amateurs pourront, en
s'entendant à cet effet avec M. le Conservateur du
Musée, venir, de 10 heures du matin à 4 heures du soir,
travailler tous les jours qui ne sont pas spécialementaffectés au public, excepté le lundi.
ARTICLE 5. — Aucun objet faisant partie du Musée ne
232 LE MUSÉE DE BOURGES
pourra, sous aucun prétexte, sortir de l'établissement
sans une autorisation spéciale de M. le Maire.
ARTICLE 6. — Les visiteurs ne pourront en déplacer
aucun et les artistes ou amateurs devront copier sur
place les tableaux, dessins et autres objets dont ils
auront à s'occuper; ceux qui seront désireux de visiter,
en détail, les collections, devront s'entendre à cet effet
avec M. le Conservateur, pour la facilité du travail.
ARTICLE 7. — Par mesure d'ordre, les cannes,
ombrelles et parapluies seront déposés par les visiteurs
à la porte d'entrée.
ARTICLE 8. — Le présent Règlement ne sera exécutoire
qu'après l'approbation de M. le Maire.
(Registre des délibérations de la Commission du Mu-
sée, 65.)
V
Liste des ouvrages enlevés du Musée et trans-
portés à la Bibliothèque, suivant récépissé
signé Boyer et daté du 9 décembre 1879.
MANUSCRITS :
Consolation de Boece.
Sacramentaire de l'Abbaye de Pise.
Heures de Bourges.
OEuvres de droit de M. Dumont, 4 volumes.
Cours de droit latin, 2 volumes.
Symbola héroïca, recueil d'emblèmes figurés.
IMPRIMÉS :
SCHENCZER : Herbarium diluviarum.
MARTIAL : Epigrammata, avec traduction envers françaisde René Catherinot.
Histoire abrégée des Pays-Bas.
RADERUS : Bavaria Sancta.
OEuvres de Pic de la Mirandole.
Edits et Ordonnances de Rebuffe.
URSINO : Familise Romanoe.
Philosophia Ludovici Borbonii.
Life of Jesus-Christ.
Oratio dominica CL linguis versa.
Notitia dignitatum.
NECKER : Compte rendu.
15
234 LE MUSÉE DE BOURGES
DESCARTES : Principia Philosophiae.
Sacres de Louis XVI et Napoléon, 2 volumes.
LAVALLÉE : Histoire de Fiance.
BOSCOVICH : Voyage dans l'Etat de l'Eglise.
NADAUD DE BUFFON : Irrigations en Italie, t. I, avec atlas.
GIRAULT DE SAINT-FARGEAU : Dictionnaire géographique.
CHALLAMEL : Les Français sous la Révolution.
MULLIÉ : Les Fastes de la France.
Le Bon jardinier, 1829.
STAHL : Traité des sels.
Culture des Fleurs.
HERMANT : Histoire des Ordres militaires.
PLATINE : L'Honnête volupté.
Coutume de Bourges.
Coutume de Bourges, 1579.
S. DUFOUR : Commentaire de la Coutume de Berry.
GORREE : Formulae remediorum.
LEMAITRE : Mémoires sur Vierzon.
KUNTZLI : Etat de la Médecine.
Vie d'Oberlin.
Mme BAUDOUIN : Referies sur les bords du Cher.
Ibid. La Conversation française.
(Archives du Musée.)
TABLE
Volumes Pages
Ire PARTIE : Le Musée établissement départemental
(1834-1864) XX 189
I
Le Muséum de Bourges (1791-1802) » 191
II
Création du Musée en 1834 » 204
§ 1. — Le Musée de 1834 à 1862. — Administration de
M. Mater. — Formation des collections » 217
§ 2. — Ressources financières du Musée. — Questionsrelatives à son installation » 266
§ 8. — Situation juridique du Musée. — A qui appar-tient-il ? » 284
III
Réorganisation de l'administration du Musée : il est
appelé MUSÉE MATER et cesse d'être départe-mental » 293
Pièce annexe de la 1re Partie.
Inventaire des tableaux et gravures ou cadres et autres
effets d'art ou sciences déposés au district de Bourges. » 316
IIe PARTIE : Le Musée établissement municipal
(1864-1881) XXII 137
§ 1. — 1864 à 1867 » 139
M. Charmeil, Conservateur, administre seul le Musée. » 139
Organisation financière » 139
Projet d'installation du Musée à l'Hôtel Cujas » 141
Préservation des débris gallo-romains du Jardin de
l'Archevêché » 144
Dons » 145
Acquisitions » 149
236 LE MUSEE
Volumes Pages
§ 2. — 1867 à 1870 XXII 150
Arrêtés du 5 janvier 1867 » 150
Installation de la Commission, sa division en
3 sections » 155
Règlement intérieur » 156
Question de la sortie des oeuvres d'art » 157
Projet d'installation du Musée dans l'ancienne
église des Carmes " 159
Catalogue de la peinture » 161
Réclamations du comte Jaubert » 163
Legs et dons en faveur du Musée » 167
1° Legs du Dr Péraudin » 167
2° Legs de M. Bourdaloue » 170
3° Legs de M. Charles Mater » 172
4° Envois de l'Etat » 172
5° Dons particuliers » 172
Acquisitions » 173
Propositions d'échange » 174
Echange de tableaux de M. Waschmutt » 175
§ 3. — 1870-1881 » 177
Projet d'installation du Musée proposé par M. De-
voucoux » 177
Démolition de l'église des Carmes » 180
Acquisition de l'Hôtel Cujas pour y établir le Musée. » 190
Démission de M. Boyer, Secrétaire de la Commis-
sion ; son remplacement par M. Mornet » 195
Démission de M. Alphonse Mater, Président de la
Commission ; cette dernière cesse de se réunir .. » 195
Nomination de M. Daniel Mater, Président de la
Commission » 197
Proposition d'échange avec le Lycée des doubles de
la collection conchyologique » 198
Demande de création d'une place de Conservateur-
adjoint des collections scientifiques » 199
Inventaire général des richesses d'art de la France. » 200
Fouilles faites sur l'emplacement de la Fonderie de
canons et de l'Arsenal » 201
Concession du droit exclusif de faire des photogra-
phies des objets du Musée » 201
Participation du Musée aux Expositions univer-
selles de 1867 et de 1878 » 202
Envois de l'État » 202
DE BOURGES 237
Volumes Pages
Dons de la Ville XXII 205
Dépôt au Musée du trésor numismatique de Méreau. » 205
Dons particuliers » 207
Acquisitions » 207
Pièces annexes de la 2e Partie.
I. — L'Hôtel Cujas Musée et Bibliothèque, par le pré-
sident Hiver » 210
II. — L'Hôtel Cujas Musée de Bourges, lettre de M.
Charmeil » 218
III. — Commission consultative et de surveillance du
Musée de Bourges.— Liste des membres titu-
laires » 224
Liste des membres correspondants » 227
IV. — Règlement intérieur du Musée » 230
V. — Liste des ouvrages enlevés au Musée et trans-
portés à la Bibliothèque en 1879 » 232