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« Est également un délit de contrefaçon toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d'une œuvre de l'esprit en violation des droits de l'auteur, tels qu'ils sont définis et réglementés par la loi. La contrefaçon en France d'ouvrages publiés en France ou à l'étranger est punie de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende. » (art. L335-2 et L335-3 du code de la propriété intellectuelle). Collection DCG Droit social UE 3 du DCG Édition 2017/2018 Auteur : Grégory Lachaise Certifié d’économie et gestion Professeur et formateur en droit BP 8 – 83560 RIANS Tél : 04 94 80 57 25 – Fax : 04 94 80 59 24 Notre site Web avec paiement sécurisé : www.editions-corroy.fr E-mail : [email protected] CORRIGÉ

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« Est également un délit de contrefaçon toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d'une œuvre de l'esprit en violation des droits de l'auteur, tels qu'ils sont définis et réglementés par la loi. La contrefaçon en France d'ouvrages publiés en France ou à l'étranger est punie de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende. » (art. L335-2 et L335-3 du code de la propriété intellectuelle).

Collection DCG

Droit social

UE 3 du DCG

Édition 2017/2018

Auteur : Grégory Lachaise

Certifié d’économie et gestion Professeur et formateur en droit

BP 8 – 83560 RIANS Tél : 04 94 80 57 25 – Fax : 04 94 80 59 24 Notre site Web avec paiement sécurisé : www.editions-corroy.fr E-mail : [email protected]

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TABLE DES MATIÈRES

I - La formation du contrat de travail

Cas 1 : LES OMBRES : Offres d’emploi, modalités de recrutement, promesse d’embauche, priorités d’embauche, discrimination

p. 5

Cas 2 : DÉCEPTION DE PRINTEMPS : Existence du contrat de travail : caractéristiques du contrat de travail, requalification, conditions de fond et de forme du contrat de travail, essai professionnel, période

d'essai et renouvellement

p. 9

Cas 3 : MÉTABOURG : clause de non concurrence, clause de mobilité, clause de dédit formation, clause d'objectif, clause de rémunération

p. 13

II – Les contrats précaires et atypiques

Cas 4 : L’ÉCOLE DES POMMES : CDD : Cas de recours, formalisme, période d’essai, durée, rupture,

indemnité de précarité, succession de contrats

p. 17

Cas 5 : SORCELLERIE : Contrat d’apprentissage, contrat de professionnalisation, contrat unique d’insertion p. 23

III – Les conditions de travail

Cas 6 : LA TABLE RONDE : La durée du travail : Temps d’habillage, temps de déplacement, heures supplémentaires, cumul d’emploi, aménagement du temps de travail, forfait, travail à temps partiel

p. 27

Cas 7 : TOUTE HEURE COMMENCÉE EST DUE : La rémunération : Stage, essai professionnel, fixation de la rémunération, égalité de rémunération, prime et usage d’entreprise, bulletin de paie, protection de la rémunération, modalités de rémunération

p. 33

Cas 8 : LES SARDINES : Les congés et repos : Droit aux congés payés, congés payés et maladie, fractionnement et prise des congés payés, repos hebdomadaire, congés pour création d’entreprise, congé paternité, PUCE

p. 37

Cas 9 : LES ÉTUDES : La formation : Formation et congés payés, plan de formation d’entreprise, VAE, DIF, rémunération et formation

p. 43

IV – L’évolution du contrat de travail

Cas 10 : LA BOÎTE À BONBONS : Modification des conditions de travail, modification du contrat de travail, conséquences pour le salarié et obligations de l’employeur, modification de la situation juridique de l’employeur, effets sur les contrats de travail, suspension du contrat pour maladie non professionnelle, contrôle de l’arrêt maladie

p. 47

V – La rupture du contrat de travail

Cas 11 : VINUM DIABOLICUM : Le licenciement pour motif personnel : vie privée et licenciement, motif disciplinaire, preuve de la faute, mise à pied conservatoire, motif non disciplinaire, salarié protégé, condamnation pénale, convocation à l’entretien préalable, déroulement de l’entretien, notification du licenciement

p. 53

Cas 12 : FINIS CORONAT OPUS : Le licenciement pour motif économique : définition, cause, difficultés économiques, réorganisation de l’entreprise, sauvegarde de la compétitivité, reclassement et autres obligations de l’employeur, procédure de licenciement

p. 61

Cas 13 : AH L'ARGENT, TOUJOURS L'ARGENT : Les conséquences de la rupture du contrat de travail : les indemnités en cas de licenciement régulier et irrégulier, l’attestation de travail, le solde de tout compte, l’attestation Pôle Emploi

p. 67

Cas 14 : MARQUIS : La démission et la prise d’acte : conditions de fond et de forme de la démission, nature de la prise d’acte, conditions, conséquences, pouvoir d’appréciation du juge

p. 71

Cas 15 : TU QUOQUE MI FILI : Mise et départ à la retraite : distinction, conditions, cumul emploi retraite p. 75

Cas 16 : SE FLUCTUAT ET MERGITUR : La transaction : principe, contenu, effet, contestation, La rupture conventionnelle

p. 77

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VI – Pouvoirs de l’employeur et libertés des salariés

Cas 17 : LES ÂMES VIVES : Le droit disciplinaire : notion de faute, délai pour agir, sanction, procédure disciplinaire

p. 81

Cas 18 : ENTREPRISE VAILLANTE : Pouvoir réglementaire : contenu, validité des dispositions, élaboration du règlement intérieur, contentieux

p. 87

Cas 19 : LES ESPRITS SAINTS : Hygiène et sécurité dans l’entreprise : obligations de l’employeur, obligations des salariés, droit de retrait

p. 91

Cas 20 : VIADUC MARES : Le contrôle de l’activité des salariés : principe, vidéosurveillance, contrôle de l’ordinateur, des appels téléphoniques, des mails et des courriers, géolocalisation

p. 95

VII – La représentation collective

Cas 21 : SINDEGAT : Les syndicats : organisation, désignation, représentativité, prérogatives p. 99

Cas 22 : LE CAVALIER : Les délégués du personnel et le comité d’entreprise : désignation, durée du mandat,

contestation, nullité des élections, contrôle des heures de délégation, compétence, entrave, DUE, les différents comité d’entreprise

p. 105

VIII – La négociation collective

Cas 23 : L’ARBRE À PALABRES : Conventions et accords collectifs : distinction, application matérielle et géographique, volontaire et obligatoire

p. 111

Cas 24 : LA GABELLE : Hiérarchie des normes et accords d‘entreprise : principe et dérogation à la hiérarchie des normes, négociation avec et sans délégués syndicaux, adoption des accords, critères de représentativité, négociations obligatoires

p. 115

IX – Les conflits collectifs

Cas 25 : LA MODERNE BALEINE : La grève : définition, formes, préavis, information de l’employeur, faute

lourde, maintien de l’activité, lock out

p. 121

X – L’association des salaries aux performances de l’entreprise

Cas 26 : LE LINGOT DE PLOMB : L’association des salariés aux performances de l’entreprise : participation, mise en place, fonctionnement, intéressement, principes et mise en place, PERCO

p. 125

XI – La protection sociale

Cas 27 : MES VERTES ANNÉES : Assurance vieillesse, assurance maladie, prestations familiales, notions sur les autres régimes

p. 129

Cas 28 : KAUMA : Le chômage : ARE, conditions de perception, durée, protection sociale, auto-entrepreneur et chômage, obligations du demandeur d’emploi, chômage partiel, chômage partiel total,

indemnisation

p. 135

XII – Contrôles et contentieux social

Cas 29 : LES GRACQUES : Le conseil de Prud’hommes : organisation, compétence territoriale et géographique, bureaux de conciliation et de jugement, juge départiteur

p. 139

Cas 30 : LES NOCES AQUATIQUES : L’inspection du travail : la mission de contrôle : procédure,

prérogatives ; contestation, autres fonctions et obligations statutaires de l’inspecteur du travail.

p. 141

Cas 31 : LE DOUBLE REGISTRE : Le contrôle URSSAF : le rescrit social : objet, garantie et limite ; la charte du cotisant contrôlé, la procédure et l’issue du contrôle

p. 145

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LES OMBRES

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Recrutement du salarié : Offres d’emploi, modalités de recrutement, promesse d’embauche, priorités d’embauche, discrimination.

I – CAS PRATIQUE 1. Conformité de l’annonce aux dispositions de la loi

M. Marcel Jabe, dans le cadre de ses recherches d’emploi, répond à une annonce parue dans un journal local. Quelles sont les contraintes légales en matière d’offre d’emploi ?

Règles de droit applicables

La loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 a profondément remanié les principes du service public de l’emploi, puisque désormais concourent à cette activité, aux côtés de Pôle Emploi, des opérateurs privés (agence de travail temporaire), des opérateurs publics classiques (État, collectivités territoriales) ou nouveaux (maisons de l’emploi). En outre, la loi a modifié certains principes relatifs à la diffusion des offres et demandes d’emplois. La diffusion des offres d’emploi Le code du travail (C. Trav. art. L. 5331-1 à L. 5332- 5) autorise désormais la diffusion des offres et demandes d’emploi par voie de presse ou tout autre moyen de communication accessible au public. Soucieux de s’adapter aux nouvelles technologies, le législateur a élargi les procédés de diffusion, notamment par Internet, des offres d’emploi. Les insertions peuvent se faire à titre onéreux ou à titre gratuit. Néanmoins, la vente d’offres ou de demandes d’emploi est prohibée, de même qu’il reste interdit de faire publier une insertion de prestation de services concernant les offres d’emploi et comportant des allégations fausses ou susceptibles d’induire en erreur. La rédaction des offres d’emploi Le code du travail prescrit différentes obligations :

- L’offre d’emploi est obligatoirement datée. - L’offre d’emploi ne peut contenir de mentions discriminatoires, relatives notamment à l’âge, au sexe, ou à la

situation de famille sauf si la loi l’autorise expressément (par exemple pour les professions de mannequins, les artistes, ou la politique de l’emploi).

- L’offre d’emploi doit être rédigée en français, dés lors que l’employeur est lui-même français ou que la prestation de travail doit être exécutée sur le territoire français. En outre, les mots ou expressions étrangères doivent être traduits s’il existe un terme français pouvant le remplacer.

Les sanctions En cas de violation des dispositions des articles L 5332-1 à L 5332-4, le contrevenant est susceptible d’être sanctionné par une contravention de 3

e classe (450 euros au plus). Des peines plus lourdes (1 an d’emprisonnement et 37 500

euros d’amende) peuvent être prononcées notamment en cas de diffusion d’annonces comportant des allégations fausses. Enfin les discriminations visées aux articles L1132-1 du code du travail et 225-1 du code pénal sont passibles d’une peine d’amende de 45 000 euros et de trois ans d’emprisonnement.

Application des règles de droit aux faits

En l’espèce l’annonce parue dans Le Vendémiaire est en violation des dispositions de l’article L5331-2 du code du travail puisqu’elle précise des conditions d’âge, 30-40 ans, et de sexe (H), nécessaires à l’obtention du poste. Il en est de même pour l’indication non-fumeur. Ainsi, toute sélection fondée sur ces critères est nulle et la société peut être sanctionnée par une contravention de 3

e classe, voire par les sanctions prévues en matière de discrimination.

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2. Licéité des procédés de sélection

En écho à son courrier, Marcel obtient une réponse positive et se soumet à la procédure de recrutement organisée à cet effet. La procédure de recrutement, selon les modalités empruntées, doit-elle satisfaire à des obligations spécifiques ? Règles de droit applicables

La pertinence des méthodes L’employeur procède à la sélection des candidats à partir de critères et de méthodes définis par lui dans le respect du droit des personnes et des libertés individuelles et collectives. En principe l’analyse du curriculum vitae puis l’entretien

individuel sont les deux moyens les plus couramment utilisés. D’autres méthodes comme les tests psychologiques, l’essai professionnel, le questionnaire d’embauche peuvent aider l’employeur à choisir son futur salarié. Néanmoins, quelle que soit la méthode utilisée, les questions posées et les méthodes utilisées doivent répondre à la triple exigence suivante :

- les informations demandées, sous quelque forme que ce soit, au candidat à un emploi ne doivent avoir comme finalité que d’apprécier sa capacité à occuper l’emploi proposé ou ses aptitudes professionnelles ;

- les informations demandées doivent présenter un lien direct et nécessaire avec l’emploi proposé ou avec l’évaluation des aptitudes professionnelles » (c. trav. art. L. 1221-6) ;

- les méthodes et techniques d’aide au recrutement utilisées par l’employeur doivent être portées à la connaissance du candidat préalablement à leur mise en œuvre (de même qu’au comité d’entreprise).

De fait, toute méthode ne reposant pas sur des critères ou des moyens d’évaluation sérieux et rationnels susceptibles de répondre aux impératifs de la loi est proscrite (numérologie, astrologie…).

Dans le même sens, les informations sollicitées à l’occasion de l’entretien ne peuvent être attentatoires au droit des personnes et à leurs libertés individuelles. Ainsi les questions sur l’état de santé du candidat, ses mœurs sexuelles, ses opinions religieuses ou philosophiques ou encore son état de grossesse sont interdites et les réponses mensongères apportées ne sauraient en principe motiver une rupture du contrat de travail.

Le questionnaire d’embauche Des conditions supplémentaires sont exigées lorsque les questions sont posées par écrit dans la mesure où elles peuvent faire l’objet d’une collecte de données nominatives. Le questionnaire doit contenir certaines mentions obligatoires (destinataires des informations, droit d’accès et de rectification, conséquences du défaut de réponse…), être déclaré à la CNIL (les informations nominatives, doivent faire l’objet d’une déclaration préalable à la CNIL ; loi 78-17 du 6 janvier 1978) et porté à la connaissance préalable du candidat et des représentants du personnel. Cette obligation n’est pas impérative lorsque l’entreprise a désigné un correspondant informatique et liberté (voir notamment la délibération de la CNIL n° 02-017 du 21 mars 2002).

Application des règles de droit aux faits

En ce qui concerne la procédure d’embauche, le questionnaire auquel Marcel Jabe a répondu doit être déclaré à la CNIL dans la mesure où il peut être l’objet d’un traitement informatisé. De même, le candidat doit en être préalablement

informé et sa mise en œuvre suppose l’indication de toutes mentions obligatoires telles que le rappel du droit d’accès et de rectification aux informations recueillies, le caractère obligatoire ou facultatif des réponses, l’indication de la finalité du traitement des données et l’indication de la durée de conservation des données. Marcel peut demander le retrait des questions prohibées s’il y en a et le collecteur peut être l’objet de poursuites pénales sévères selon la nature de l’infraction (collecte illégale art. 226-18 du code pénal, absence de déclaration des fichiers art. 226-16 du code pénal, ou encore atteinte à la confidentialité des données art. 226-22 du code pénal). Par ailleurs, les questions relatives à la situation matrimoniale de Marcel, sans autre précision, peuvent être considérées comme relevant de la vie privée et sont par principe interdites.

3. Possibilité d’indemnisation suite au renoncement de l’employeur à sa promesse d’embauche

Rapidement après l’entretien, l’employeur lui fait savoir par courrier que sa candidature est retenue pour le poste de

comptable. Cependant, 10 jours avant la prise de fonction, la société renonce à son engagement. L’employeur peut-il unilatéralement renoncer à une promesse d’embauche ?

Règles de droit applicables

Il convient de distinguer ici les simples pourparlers, préalables à l’embauche, de la décision d’engagement elle-même, car les conséquences qui y sont attachées vont varier. On pourrait dire en droit du travail comme en d’autres domaines (constitution de société, transaction commerciale) que les pourparlers constituent la phase préalable à tout engagement de nature contractuelle. Il s’agit d’un rapprochement entre deux parties qui envisagent de sceller leur collaboration par les termes d’un contrat. À cette étape, la rupture n’a pas d’incidence particulière. Aucune partie n’étant engagée, aucune responsabilité ne peut être recherchée. L’employeur ou le salarié restent libres de mettre un terme à leurs discussions.

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La promesse d’embauche La cour de cassation distingue depuis déjà un certain temps les différentes étapes dans la construction de relations contractuelles (« Cass. soc. 01-12-2001 : […] que l’article L. 121-1 du Code du travail permet de délimiter les frontières entre le contrat de travail et les contrats voisins tels que la promesse d’embauche, l’offre d’embauche, l’accord de principe ou les simples pourparlers ; qu’il conduit également à distinguer les divers contrats voisins du contrat de travail… »). La promesse d’embauche peut être définie comme une offre d’emploi ferme et suffisamment précise,

adressée à une personne déterminée (le futur salarié), indiquant les éléments essentiels du contrat de travail tels que la rémunération, la qualification ou encore la date d’entrée en fonction. Les juges apprécient souverainement la nécessité et la pertinence des informations contenues dans la promesse pour pouvoir lui donner cette qualification (Cass. soc. 16 mai 2007). Ainsi une lettre qui ne mentionne ni l’emploi occupé, ni la rémunération, ni la date d’embauche, ni le temps de travail, ne constitue qu’une simple offre d’emploi et non une promesse d’embauche (Cass. soc. 12 juillet 2006). Mais l’absence d’indications relatives à la rémunération n’a pas pour effet de priver le demandeur d’une telle qualification (Cass. Soc. 30 mars 2005). À noter enfin que le contrat de travail faisant suite à une promesse d’embauche peut contenir des stipulations supplémentaires (période d’essai, clause de mobilité… - Cass. soc. 12 juin 2014).

Les effets de la rupture d’une promesse d’embauche La promesse d’embauche étant un engagement unilatéral, sa rupture, en l’absence de clause de rétractation, entraîne nécessairement un préjudice qu’il convient de réparer. La cour de cassation retient, dans un arrêt du 15 décembre 2010, que constitue une promesse d’embauche valant contrat de travail l’écrit qui précise l’emploi proposé et la date d’entrée en fonction. Dès lors, sa rupture unilatérale par l’employeur doit s’analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. De fait, il importe peu que le candidat ait ou non accepté la promesse d’embauche (sauf si l’acceptation était une condition nécessaire figurant dans la promesse – Cass. soc. 11 février 2015). Au regard de son absence d’ancienneté, l’indemnité légale de licenciement n’est pas due,

mais il a droit à une indemnité égale au préjudice subi ainsi qu’à l’indemnité de préavis. Application des règles de droit aux faits

Le courrier en date du 05 juin semble constituer une promesse d’embauche puisqu’il s’agit d’une offre ferme et précise comportant les éléments essentiels de la future relation de travail. L’acceptation (qui importe peu) dont elle a fait l’objet vaut conclusion du contrat de travail et sa rupture par courrier du 05 juillet doit produire les effets d’un licenciement ouvrant droit à indemnisation.

II – QUESTIONS DE COURS 1. Les priorités d’embauche

La loi prévoit par des dispositions éclatées dans le code du travail des priorités d’embauche pour certains salariés. Ce

sont les suivantes : - Un parent qui démissionne pour élever son enfant, bénéficie dans l’année qui suit la rupture de son contrat, d’une

priorité de réembauchage dans les emplois auxquels sa qualification lui permet de prétendre. - Le salarié à temps partiel bénéficie d’une priorité d’embauche sur tout poste vacant dans l’entreprise correspondant

à ses compétences. Il en est de même pour les salariés en congés maladie, maternité, sabbatique ou de formation. - Les salariés licenciés pour motif économique jouissent de cette priorité pendant un an à condition de faire connaître

à l’employeur leur intention d’utiliser cette prérogative.

2. La discrimination à l’embauche

La discrimination au travail consiste à traiter différemment des personnes à raison de critères dont la liste est précisée aux articles 1132-1 et suivants du code du travail (origine, sexe, mœurs, orientation sexuelle, identité de genre, âge, situation de famille ou grossesse, caractéristiques génétiques, particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, appartenance ou non-appartenance, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, opinions politiques, activités syndicales ou mutualistes, convictions religieuses, apparence physique, nom de famille, lieu de résidence ou de domiciliation bancaire, état de santé, perte d'autonomie ou handicap, capacité à s'exprimer dans une langue autre que le

français). Le code du travail érige donc un principe de non-discrimination dont le périmètre d’application s’étend de l’embauche à la rupture du contrat de travail. Par ailleurs, le législateur impose dans les entreprises spécialisées dans le recrutement

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et employant au moins trois cents salariés, une formation à la non-discrimination aux employés chargés d’une mission de recrutement. La discrimination peut être directe, c’est-à-dire le fait d’opérer un traitement différent de la personne à raison d’un motif visé ci-dessus, ou indirecte, c’est-à-dire en faisant usage d’une condition ou d’un critère a priori neutre mais qui par sa finalité se trouve en violation des dispositions de l’article 1132-1. Par exemple, à l’embauche, le fait d’exiger d’une personne qu’elle dispose de sa carte d’électeur sous-entend une jouissance de la nationalité française ou encore l’exigence de la maîtrise d’une langue non justifiée par la nature du poste.

La personne qui estime être victime d’une discrimination peut engager une action en justice et doit présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte. Il appartient alors à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le traitement judicaire de la discrimination peut résulter d’une action au civil et au pénal. En matière civile, la sanction sera la nullité de la mesure discriminatoire sans exclure le versement de dommages-intérêts. En matière pénale, la discrimination au travail est un délit puni d’une peine de 3 ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende (art. 225-3 CP).

III – ÉTUDE DE DOCUMENT 1. Rappel des faits

M. X a été embauché le 2 mai 2011 en qualité de directeur régional des ventes par la société Acme Packet Uk aux droits de laquelle est venue la société Oracle, après acquisition. Il est licencié pour faute grave le 18 novembre 2011 au motif de s’être faussement présenté dans son CV comme « strategic account manager » de la société CISCO. 2. Problème de droit

Le mensonge dans le CV est-il de nature à justifier un licenciement pour faute grave ?

3. Explication de la solution de la cour

La question soumise à la cour de cassation et plus largement celle de savoir s’il est possible de mentir dans son CV n’est pas nouvelle. Doit-on distinguer selon la nature des mensonges ? Certains sont-ils admis et d’autres non ? Quelles peuvent en être les conséquences ? Deux points paraissent essentiels. D’une part, le principe de loyauté, qui irradie le droit commun et donc le droit du travail, impose aux parties de fournir des informations sincères. Le salarié doit répondre de bonne foi aux questions qui lui sont posées, ce qui comprend l’exactitude des renseignements fournis. Ce principe est apprécié d’autant plus

sévèrement que le contrat de travail est conclu intuitu personae. D’autre part, la cour de cassation a depuis longtemps distingué le dolus bonus du dolus malus. Le premier, toléré, correspond à une manière avantageuse de présenter des informations, le second, sanctionné, constitue une manœuvre, un mensonge, par omission ou commission, dont la finalité est de tromper. Ainsi, les imprécisions sur une expérience professionnelle, une formation, peuvent être tolérés alors que l’attribution d’un diplôme, d’un titre ou d’un emploi précis sont sanctionnés. Dans l’affaire soumise à la cour, le salarié demandeur au pourvoi a délibérément fait figurer dans son CV un poste qu’il n’avait pas occupé. Il développe deux arguments à l’appui de sa demande :

- Reprenant une décision de la cour de cassation en date du 30 mars 1999, il fait valoir que seule la compétence

doit être appréciée, peu importe la des diplômes ou de l’expérience antérieure ; - La faute susceptible de justifier un licenciement doit être commise à l’occasion de la relation de travail. Tel n’est

pas le cas en l’espèce, puisque le mensonge reproché était antérieur à la conclusion du contrat de travail. La cour de cassation rejette les arguments en s’appuyant sur les motifs suivants :

- d’une part le manquement à l’obligation de bonne foi, dont la violation réitérée semble avoir été essentielle ; - d’autre part, le mensonge constitue une manœuvre dolosive de nature à être sanctionnée, dans la mesure où

l’expérience alléguée avait été déterminante dans la décision d’embauche de l’employeur.

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DÉCEPTION DE PRINTEMPS

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Existence du contrat de travail : caractéristiques du contrat de travail, requalification, conditions de fond et de forme du contrat de travail, essai professionnel, période d’essai et renouvellement.

I – ÉTUDE DE DOCUMENT

1. Caractéristiques du contrat de travail

Le contrat de travail n’est pas défini par la loi. Ce sont les tribunaux qui ont très tôt posé les éléments distinctifs du contrat de travail par rapport aux autres relations contractuelles. Si en effet jusqu’au début du XX

e la relation de travail est

juridiquement organisée autour du contrat de louage, ce dernier est apparu comme étant insuffisant pour faire apparaître la singularité du rapport entre employeur et salarié. Dans les deux arrêts, il est aisé de retrouver les 3 caractéristiques du

contrat de travail : - une prestation de travail qu’elle qu’en soit sa forme : physique, intellectuelle…Dans les deux arrêts il s’agit de

mettre au service soit d’une société (commercialisation de produits d’assurance), soit d’un GIE (médecin conseil), sa force de travail ;

- une rémunération, considérée comme la contrepartie de la prestation de travail ; - un lien de subordination. Les deux arrêts en donnent la définition : le lien de subordination est caractérisé par

l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements.

2. Pouvoir de requalification du juge en matière de contrat de travail

L’intérêt de ces deux arrêts est de montrer que le juge n’est pas tenu par la qualification que les parties ont donné au contrat. Déjà, dans un arrêt célèbre (arrêt Labanne), la cour de cassation avait requalifié un contrat de location de véhicule équipé taxi en contrat de travail. Dans le prolongement de cette décision, les deux arrêts proposés mettent en évidence le pouvoir de requalification du juge en matière contractuelle. La cour apprécie souverainement, au cas par cas, à raison des conditions dans lesquelles s’exécute la relation contractuelle, l’existence ou non d’un contrat de travail.

Les attendus des deux arrêts sont sans équivoques : « l’existence d’une relation de travail salariée ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs ». Dans l’arrêt du 18 janvier 2012, c’est un contrat de franchise qui se trouve requalifié en contrat de travail, et dans celui du 29 septembre 2009, une convention de mission.

II – CAS PRATIQUE

1. L’essai professionnel

Les faits supposent de définir l’essai professionnel et par-là même de le distinguer de la période d’essai. Règle de droit applicable

L’essai professionnel se situe avant la conclusion du contrat de travail et consiste en une mise en situation professionnelle de courte durée permettant d’apprécier les qualités du candidat au poste à pourvoir. C’est une méthode de sélection des candidats. La période d’essai, par contre, se situe après la conclusion du contrat de travail, le salarié étant déjà choisi. L’essai professionnel n’étant pas encadré par des dispositions légales, il appartient à l’employeur d’en définir les modalités d’exécution, sauf dispositions conventionnelles particulières (notamment en matière de rémunération, de durée, etc.). Les résultats obtenus font l’objet d’une obligation de confidentialité pesant sur l’employeur et ouvre un droit d’accès et de rectification au candidat les ayant fourni.

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Application de la règle aux faits

Selon les faits, il ne semble pas y avoir d’ambiguïté quant à la nature des deux jours de test professionnel que l’employeur exige de M

lle Merci. Le contrat n’est donc pas formé et aucune demande d’indemnisation liée à la rupture

d’un contrat inexistant ne peut être formulée. 2. Délai de préavis pendant la période d’essai et motif de rupture

Deux salariés dont il est mis fin à la période d’essai se demandent si le préavis d’une semaine est légal et s’ils peuvent contester la rupture du contrat de travail.

Règle de droit applicable

Le préavis Lorsqu’il est mis fin, par l’employeur, au contrat en cours ou au terme de la période d’essai, le salarié est prévenu dans un délai qui ne peut être inférieur à :

1° Vingt-quatre heures en deçà de huit jours de présence ; 2° Quarante-huit heures entre huit jours et un mois de présence ; 3° Deux semaines après un mois de présence ; 4° Un mois après trois mois de présence.

Le préavis doit être effectué avant la fin de la période d’essai, c’est-à-dire que cette dernière ne peut être prolongée du fait de la durée du délai de prévenance. Si la rupture est intervenue avant la fin de la période d’essai mais que la réalisation du préavis a pour effet de dépasser le terme de l’essai, il y a lieu à requalification du contrat en CDI (Cass. soc. 5 novembre 2014). En revanche, si la rupture intervient durant la période d’essai, sans respecter le délai de prévenance, il n’y a pas lieu à requalification mais le salarié doit être indemnisé (Cass. soc. 23 janvier 2013, Cass. soc. 16 septembre 2015). Les motifs de rupture La période d’essai est un temps au début du contrat de travail (qui court à compter de l’entrée en fonction du salarié) pendant lequel chaque partie dispose du droit de mettre un terme à la relation de travail, sans motif ni indemnités. Elle permet à l’employeur d’apprécier les qualités professionnelles du salarié nouvellement recruté et à ce dernier d’évaluer l’intérêt des fonctions et tâches auxquelles il va être occupé. L’absence de motif permettant de mettre fin au contrat de travail ne justifie pas pour autant que l’employeur abuse de son droit (Cass. soc. 5 mars 1987 « si en principe chaque partie au contrat de travail est libre de le rompre, sans donner de motif, au cours de la période d’essai, il n’en résulte pas que cette rupture ne puisse être fautive »).

Les tribunaux vérifient, en cas de litige, du juste usage par l’employeur de la possibilité de mettre un terme unilatéralement à la relation de travail. L’abus, dont la charge de la preuve pèse sur le salarié, est constitué dans les hypothèses suivantes :

- le motif de la rupture est non inhérent à la personne du salarié. Tel est le cas lorsqu’il procède de la suppression d’un poste (Cass. soc. 20 novembre 2007) ;

- l’employeur fait preuve d’une légèreté blâmable en rompant la relation de travail. C’est l’hypothèse notamment où l’employeur ne permet pas au salarié de démontrer sa compétence en l’affectant à un poste différent de celui pour lequel il a été recruté (Cass. soc. 20 février 2007,Cass. soc. 15 janvier 2014). De même, est abusif le fait pour un

employeur de mettre fin au contrat de travail d’un salarié au motif qu’il ne présentait pas les qualités professionnelles requises alors même qu’il l’avait jugé apte à un emploi de qualification supérieure (Cass. soc. 17juillet 1996). Il en est encore ainsi lorsque la rupture intervient au bout de deux jours (Cass. soc. 11 janv.2012).

- la rupture est inspirée par la volonté de nuire au salarié. Dans ces hypothèses, la rupture est abusive et ouvre droit à une indemnisation du salarié en fonction du préjudice subi. Si, comme nous l’avons vu, l’employeur n’a pas à motiver la rupture (à condition que l’objet de la période d’essai soit respecté), il n’a pas non plus l’obligation de respecter une procédure spécifique, sauf dispositions conventionnelles contraires. La liberté gouverne aux modalités de rupture. Qu’en est-il cependant lorsque l’employeur invoque une faute à l’appui de la rupture ?

La cour de cassation, dans un arrêt en date 10 mars 2004, rappelle que la procédure disciplinaire doit être suivie dès lors qu’une faute justifie la fin de la relation de travail. Peut importe que la rupture intervienne à l’occasion de la période d’essai ou non. En définitive, les juges suprêmes rattachent le principe de la procédure disciplinaire à la rupture du contrat, quelle que soit la manière dont il prend fin.

Application de la règle aux faits

M. LERU est présent dans l’entreprise depuis deux mois (embauche au 21 janvier et fin de la période d’essai au 21 mars), le délai de préavis ne peut donc être inférieur à deux semaines. La durée légale du préavis à appliquer fera

nécessairement dépasser la durée initiale de la période d’essai. Il en sera de même en appliquant le préavis d’une semaine accordé au salarié. M. LERU peut donc demander la requalification de son contrat en CDI. De surcroît, M. LERU n’a pas été mis en mesure de faire la preuve de ses compétences puisque qu’il a été affecté à un poste autre que celui pour lequel il a été recruté. La rupture peut être considérée comme abusive et justifie un recours devant le conseil de prud’hommes aux fins d’indemnisation.

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Concernant M. JAPIN, il est dans l’entreprise depuis trois semaines, le délai légal de préavis est de 48 heures. Sa période d’essai n’étant pas terminée et bénéficiant d’un préavis plus favorable, il n’y a pas de difficultés en l’espèce. Néanmoins, la faute professionnelle invoquée par l’employeur impose à ce dernier de suivre la procédure disciplinaire. À défaut, il s’expose à une condamnation au paiement de dommages-intérêts.

3. Durée de la période d’essai

M. Mossin a été embauché avec une période d’essai de 6 mois. À son terme, l’employeur lui notifie un renouvellement de 4 mois. Règle de droit applicable

La période d’essai est un temps au début du contrat de travail qui permet à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié et au salarié d’apprécier si les fonctions occupées lui conviennent. La période d’essai et son renouvellement ne se présument pas et doivent être prévues au contrat de travail (Cass. soc. 25 novembre 2009 ; Cass. soc.13 juin 2012) et par un accord de branche étendu. Les durées sont impératives sous réserve de durées plus longues prévues par des accords de branche conclus avant la loi du 25 juin 2008 (sous réserve qu’elles soient raisonnables – 1 an ne l’est pas, en ce sens Cass. soc. 11 janvier 2012) ou de durée plus courtes prévues au contrat ou dans un accord de branche postérieur à la même loi. La durée maximale de la période d’essai est de :

- deux mois pour les ouvriers et les employés ; - trois mois pour les agents de maîtrise et les techniciens ; - quatre mois pour les cadres.

La durée maximale de la période d’essai renouvellement compris est de : - quatre mois pour les ouvriers et employés ; - six mois pour les agents de maîtrise et techniciens ; - huit mois pour les cadres.

D’autre part, le principe d’une période d’essai est sans pertinence lorsque le salarié nouvellement embauché en contrat à durée indéterminée occupe le poste à pourvoir. En effet, l’employeur ne peut en exiger la réalisation dans la mesure où il a eu l’occasion d’apprécier la compétence du salarié (Cass. soc. 13 juin 2012 ; Cass. soc. 21 janvier 2015).

Application de la règle aux faits

Quelle que soit la catégorie de salarié à laquelle M. Mossin appartient, la durée contractuelle dépasse celle prévue par la loi. D’autre part, le renouvellement n’est pas prévu au contrat et ne peut donc avoir vocation à s’appliquer, même en présence d’un accord d’entreprise. Par conséquent, toute rupture du contrat hors des délais légaux devra s’analyser en un licenciement. Au surplus, l’existence même de la période d’essai doit être remise en cause du fait que M. Mossin occupait déjà sous contrat à durée déterminée le poste à pourvoir.

III – QUESTION DE COURS 1. Le CDI doit-il être obligatoirement écrit ?

Le contrat de travail de droit commun à temps plein (CDI) n’est soumis à aucune condition de forme. Manifestation du caractère consensuel du contrat, l’écrit n’est pas une condition de validité. Néanmoins, la directive européenne du 14 octobre 1991 impose à l’employeur de remettre au salarié un écrit comportant les éléments essentiels du contrat de travail dans les deux mois de l’embauche (parties au contrat, emploi, rémunération, durée du travail…). Cette obligation est satisfaite par la déclaration préalable à l’embauche et la remise du bulletin de paie. Cette absence d’écrit n’est pas sans conséquences lorsqu’il s’agit de prouver l’existence de la relation de travail. C’est la raison pour laquelle il est

vivement conseiller de s’y contraindre pour se réserver la preuve de son existence et des modalités de son exécution. D’autre part, l’employeur doit remettre au salarié, au moment de l’embauche, une notice d’information relative aux textes conventionnels en vigueur dans l’entreprise. Par contre, les autres contrats de travail (contrat à durée déterminée, contrat de travail temporaire, contrats d’insertion professionnelle…) font l’objet de conditions de forme qu’il est impératif de respecter sous peine de sanctions civiles et/ou pénales.

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2. Conditions de fond de validité du contrat de travail

Valable pour l’ensemble des contrats, les conditions de l’article 1108 du code civil s’appliquent au contrat de travail. Le consentement. Il doit être personnel et réciproque, compte tenu notamment du caractère intuitu personnae du

contrat de travail. Les vices du consentement (erreur, dol, violence) trouvent aussi à s’appliquer et peuvent justifier l’annulation du contrat dans certaines hypothèses. Par exemple, l’erreur sur la personne ou le dol si l’erreur est déterminante.

La capacité. L’employeur, personne physique ou morale, doit avoir la qualité pour embaucher. Le salarié, nécessairement personne physique, peut être contraint d’obtenir l’accord de ses représentants légaux lorsqu’il est mineur non émancipé.

L’objet. Il doit être possible, déterminé ou déterminable et licite. La cause. Elle doit être licite, conforme aux bonnes mœurs et à l’ordre public.

3. Période d’essai et période probatoire

Ces périodes portent sur des moments différents du contrat de travail et produisent des effets distincts. La période d’essai se situe au début de l’exécution du contrat de travail, et sa rupture, sans l’obligation d’être motivée, met fin à la relation de travail. La période probatoire, à la différence, se situe en cours d’exécution du contrat de travail. Elle ne peut donc pas constituer une nouvelle période d’essai. Pratiquement, il s’agit de la situation dans laquelle l’employeur propose à un salarié un poste différent de celui précédemment occupé au cours de la relation de travail. La fin de la période probatoire, en cas d’insatisfaction de l’employeur, exige la réintégration du salarié sur son ancien poste et ne saurait justifier en soi la rupture du contrat de travail (Cass. soc 17 juillet 2007).

Dans un arrêt en date du 20 octobre 2010, la cour de cassation a précisé les éléments de la distinction en considérant qu’une période probatoire réalisée au cours de la période d’essai mettait naturellement fin à cette dernière. Dès lors, la rupture du contrat de travail doit être considérée comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

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MÉTABOURG

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Clause de non-concurrence, clause de mobilité, clause de dédit formation, clause d’objectif, clause de rémunération

I – CAS PRATIQUE 1. Clause de non-concurrence

Au terme de cette clause, Mme

Édith Lucs se voit dans l’impossibilité de postuler à tout emploi en relation avec

l’imprimerie, de même que lui est interdit de créer une entreprise se rapportant à la même activité. Cette interdiction constitue une clause de non-concurrence. Quelles sont les conditions de validité d’une clause de non concurrence ?

Règles de droit applicables

I - Principe Afin de se protéger de la concurrence d’anciens salariés ou pour se prémunir de l’utilisation qu’ils pourraient faire d’informations et de connaissances spécifiques acquises dans l’entreprise, les employeurs intègrent régulièrement dans

le contrat de travail une clause de non-concurrence. La clause de non-concurrence interdit au salarié, à l’issue de son contrat de travail, (quelle que soit la manière dont il prend fin, sauf disposition contractuelle contraire) de travailler pour une entreprise concurrente ou d’avoir une activité concurrente. Ignorée par la loi, les tribunaux, sans en condamner l’existence, ont de manière empirique conditionné sa validité en se fondant sur deux principes :

- le principe constitutionnel de la liberté du travail ; - le principe érigé par l’article L. 1121-1 du code du travail que : « nul ne peut apporter aux droits des personnes et

aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à

accomplir ni proportionnées au but recherché ».

Partant, la chambre sociale de la cour de cassation a établi les conditions suivantes, nécessaires à la validité d’une clause de non-concurrence. II - Conditions de validité Elle doit être limitée dans le temps et dans l’espace Les dispositions du contrat doivent indiquer clairement le champ d’application territoriale de la clause ainsi que la durée pendant laquelle elle sera effective. En outre, les contraintes de temps et d’espace doivent être proportionnées aux

intérêts de l’entreprise et permettre au salarié de retrouver un emploi correspondant à ses compétences.

Elle doit être nécessaire à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise Affirmée par l’arrêt Godissart du 14 février 1992, la clause de non-concurrence doit être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise. Ceux-ci sont appréciés au regard :

- de la concurrence existant dans le secteur d’activité (activité de travail temporaire, secteur de la construction et du bâtiment…) ;

- du risque concurrentiel que le salarié peut faire peser sur l’entreprise (clientèle, réseaux, connaissance d’informations…).

Elle doit indiquer les activités visées par l’interdiction En effet, la présence d’une clause de non-concurrence ne doit pas avoir pour effet d’empêcher le salarié de toute possibilité de retrouver un emploi dans son domaine de formation. Les tribunaux apprécient cette condition au cas par cas en fonction de la palette de compétence du salarié et de la durée d’activité dans le secteur concerné. Ainsi le juge est fondé à limiter l’application d’une clause de non-concurrence qui ne permet pas au salarié de trouver un emploi compatible avec sa formation (Cass. soc. 18 sept.2002).

Elle doit faire l’objet d’une contrepartie pécuniaire La cour de cassation, par un arrêt en date du 10 juillet 2002, a fait de la contrepartie financière une condition de validité de la clause de non-concurrence. En outre, la contrepartie doit être versée à l’issue de la relation de travail et ne doit pas être dérisoire (Cass. soc. 15 novembre 2006) ni fonction de la durée du contrat (Cass. soc. 7 mars 2007). Le versement

de l’indemnité en cours de contrat entraîne la nullité de la clause et les sommes versées ne doivent pas être restituées par le salarié dans la mesure où elles constituent alors un complément de salaire (Cass. soc. 15 janvier 2014). Enfin, la

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disposition prévoyant une minoration de l’indemnité en cas de licenciement pour faute doit être réputée non écrite, mais n’entache pas la clause elle même de nullité (Cass. soc. 8 avril 2010).

Les conditions sont cumulatives et l’absence de l’une d’entre elles conduit à la nullité de la clause. Il en est de même si l’une d’elle, bien que présente, est abusive (par exemple une disproportion entre le champ d’application géographique et les intérêts légitimes de l’entreprise). À noter enfin que seul le salarié peut se prévaloir de la nullité de la clause de non concurrence (Cass soc. 3 juin 2015), mais la nullité n’emporte plus indemnisation systématique. Il convient désormais au salarié d’apporter la preuve de son préjudice (cass. Soc. 25 mai 2016). Si elle est valide, le salarié est tenu de l’observer. À défaut il peut être condamné au versement de dommages-intérêts à

raison du préjudice subi par l’entreprise.

La renonciation à la clause de non-concurrence L’employeur peut renoncer à l’application de la clause de non-concurrence selon les modalités (forme et délai) prévues par le contrat de travail ou la convention collective (à condition qu’il y ait un renvoi explicite à cette dernière). À défaut de dispositions conventionnelles ou contractuelles, l’accord du salarié est nécessaire et l’employeur ne peut y mettre fin unilatéralement (Cass. soc. 11 mars 2015). En toute hypothèse, le renoncement de l’employeur doit se faire au plus tard à la date du départ effectif du salarié de l’entreprise (Cass. Soc. 21 janvier 2015) et les stipulations prévues au contrat autorisant la levée de la clause à tout

moment ne sont pas valables (Cass. soc. 2 décembre 2015).

Application des règles de droit aux faits

Il convient, au regard des faits de l’espèce, de vérifier la licéité des dispositions contractuelles. L’interdiction s’applique dans le Rhône pour une durée de 2 ans. Elle ne paraît pas abusive. La condition de temps et d’espace est validée. La clause vise précisément les activités d’imprimerie. Cela est a priori valide. La protection des intérêts légitimes de l’entreprise sera à apprécier au regard de la concurrence dans ce secteur d’activité et des risques que le salarié pourrait faire courir à la société BRENTAL. Enfin, elle prévoit une contrepartie pécuniaire dont il conviendra de vérifier le montant afin qu’elle ne soit pas considérée

comme dérisoire. Cette rémunération sera versée mensuellement à la salariée, ce qui est contraire à la jurisprudence de la cour de cassation. La clause doit donc être considérée comme nulle. Quant à la minoration de la contrepartie financière, elle doit être réputée non écrite. Concernant la renonciation à l’application de la clause, la rédaction de cette stipulation contractuelle laisse supposer que l’employeur peut y renoncer à tout moment ce qui n’est pas valable. Au surplus, le délai de deux mois serait inefficace si le départ du salarié n’était accompagné d’aucun préavis.

2. Application de la clause en cas de rupture au cours de la période d’essai

Règle de droit applicable

Une clause de non-concurrence a vocation à s’appliquer quels que soient le moment ou les raisons pour lesquels le contrat prend fin (démission, licenciement). Si une clause du contrat de travail prévoit sans autre précision qu’elle aura vocation à s’appliquer quelle que soit l’époque de la cessation du contrat, il faut en déduire que l’intention des parties est d’appliquer la clause en cas de rupture du contrat pendant la période d’essai (Cass. soc. 24 mars 2010).

Application de la règle aux faits

L’application de la clause ne peut être écartée en l’espèce. Par contre, il est envisageable d’estimer que les contraintes de la clause soient abusives si le salarié n’a réalisé qu’un temps réduit en entreprise.

3. Clause de mobilité

Mme

Lucs, en signant le contrat qui lui est proposé, s’engage par avance à accepter toute mutation, c’est-à-dire toute modification de son lieu de travail. Cette disposition contractuelle est une clause de mobilité. Quelles sont les conditions de validité d’une clause de mobilité ?

Règles de droit applicables

Principe Une entreprise comportant différents sites ou qui envisage le développement de son activité en différents lieux, peut légitimement supposer que l’évolution souhaitée aura pour conséquences de modifier le lieu de travail de certains salariés. La mobilité peut s’effectuer librement dans un même secteur géographique dans la mesure où la mention du lieu de travail dans le

contrat n’a qu’une valeur indicative (Cass. soc. 3 juin 2003), sauf à faire mentionner le caractère exclusif du lieu d’exécution de la prestation de travail.

Par contre, si la mutation doit s’opérer au-delà du secteur géographique considéré, celle-ci constitue une modification du contrat pour laquelle l’employeur doit recueillir l’accord du salarié. Dès lors l’employeur peut anticiper cette situation en prévoyant une clause de mobilité dans le contrat de travail. Cette clause prévoit la possibilité pour l’employeur de modifier unilatéralement le lieu de travail du salarié sans que ce dernier ne puisse bénéficier des règles protectrices liées aux modifications du contrat de travail. Le refus par le salarié d’accepter la mutation constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement.

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Mise en œuvre L’existence d’une clause de mobilité ne permet pas pour autant à l’employeur d’en faire un usage abusif. En cas de contestation, le juge vérifiera les éléments suivants :

- elle doit être motivée par l’intérêt de l’entreprise ; - elle doit être délimitée géographiquement (Cass. soc. 24 janvier 2008). L’employeur ne peut ainsi en étendre

unilatéralement la portée. (Cass. soc. 13 mai 2015). L’absence de définition de la zone géographique applicable emporte la nullité de la clause (Cass. soc. 28 avril 2011). Cependant, la cour de cassation a pu valider l’étendue de la clause à l’ensemble du territoire français dans la mesure où le salarié ne pouvait ignorer, en raison de son emploi, une telle mobilité (Cass. 13 mars 2013). Cette décision, contre toute attente, reste néanmoins circonscrite à

des fonctions la justifiant ; - elle doit faire l’objet d’un préavis (les juges apprécient ce critère notamment au regard de la bonne foi dans

l’exécution du contrat pour censurer des départs précipités sans tenir compte des impératifs familiaux du salarié) ; - enfin elle doit respecter le principe de proportionnalité, dès lors qu’elle met en cause le libre choix du domicile. La

clause ne doit pas porter atteinte au droit à une vie personnelle et familiale du salarié (Cass. soc. 21 janvier 2015). En outre, l’application de la clause ne doit pas avoir pour effet de modifier un autre élément du contrat de travail comme la rémunération.

Dès lors que l’employeur en fait un usage régulier, le salarié est tenu de respecter sa décision. À défaut, le refus du salarié constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement (mais ne caractérise pas à lui seul une faute grave : Cass. soc.23 février 2005, Cass. soc. 23 janvier 2008). Application des règles de droit aux faits

La clause de mobilité de Mme

Lucs prévoit de conditionner la mise en œuvre de la clause de mobilité à des impératifs dictés par le bon fonctionnement de l’entreprise. Restera le cas échéant à en vérifier la teneur. Par contre elle ne

comprend ni de limite géographique ni de préavis. Ce qui ouvre la voie à une légitime contestation de sa validité. Par ailleurs, elle indique que toute mutation refusée par la salariée entraînera la rupture automatique de son contrat de travail. Cette disposition est pleinement contraire à une jurisprudence régulière qui interdit à l’employeur de se substituer au juge dans l’appréciation des faits qu’il invoque à l’appui d’un licenciement (Cass. soc. 5 juin 2002 ; Cass. soc. 19 mai 2004 ; Cass. soc. 5 mai 2010). 4. Clause de dédit formation

Mme

Lucs s’engage à rembourser à son employeur, la société BRENTAL, le coût de la formation financée par celle-ci en cas de rupture de la relation de travail dans les 10 mois suivant l’action de formation. Cette disposition est une clause de dédit formation. Quelles sont les conditions de validité d’une clause de dédit formation ? Règles de droit applicables

Principe Cette clause oblige le salarié à rester au service de son employeur pendant une certaine durée en contrepartie d’une

formation professionnelle que l’entreprise lui finance. En cas de rupture anticipée, le salarié s’oblige au paiement d’une indemnité en fonction du préjudice subit, voire au remboursement d’une partie des frais de formation. Cependant cette disposition contractuelle ne doit pas avoir pour effet de mettre à la charge du salarié le coût d’une formation découlant des obligations légales, conventionnelles ou contractuelles de l’employeur. Conditions Sa validité est soumise aux conditions suivantes :

- elle doit faire l’objet d’une convention particulière précisant la date, la nature, la durée de la formation et son coût réel pour l’employeur, ainsi que le montant et les modalités du remboursement à la charge de la salariée (Cass. soc. 9 février 2010) ;

- la formation prévue suppose des frais réels supérieurs aux dépenses imposées par la loi ou par les accords ou conventions collectives ;

- le salarié doit conserver la possibilité de démissionner ; - le montant du dédit est proportionné aux frais de formation engagés au-delà des obligations que la loi impose. À

noter que la clause de dédit formation doit indiquer le coût réel de formation que l’employeur va engager. À défaut,

le juge peut considérer que cette condition n’est pas remplie (Cass. soc.16 mai 2007). Application des règles de droit aux faits

Si les éléments donnés ne permettent d’apprécier en totalité la pertinence de la clause (coût de la formation, possibilité de démissionner), il n’est pas possible de prévoir une indemnisation égale au montant total de la formation dans la mesure où seul le coût supplémentaire au regard des dispositions légales ou conventionnelles peut être mis à la charge du salarié.

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II – QUESTIONS DE COURS

1. La mobilité issue de la loi du 14 juin 2013

Principe La loi du 14 juin 2013 autorise les entreprises à organiser la mobilité interne des salariés par voie d’accord collectif. La négociation d’un tel accord doit se faire en dehors de tout projet de réduction d’effectif et porter également sur l’évolution des

emplois et des compétences ainsi que sur les dispositifs d’accompagnement. A titre principal, cet accord doit définir : - la zone géographique au sein de laquelle la modification du lieu de travail constitue une simple modification des

conditions de travail : - le périmètre géographique au sein duquel la mobilité s’applique : - la zone au-delà de laquelle la mobilité interne ne peut s’appliquer qu’avec l’accord du salarié ou en vertu d’une

clause de mobilité.

Procédure L’employeur souhaitant mettre en œuvre la mobilité d’un ou plusieurs salariés doit en premier lieu tenir compte des contraintes personnelles et familiales ainsi que les éléments de handicap ou de santé affectant les salariés. Il doit ensuite en faire la proposition au salarié par lettre recommandée avec AR. Ce dernier dispose alors d’un mois pour accepter ou refuser la proposition de l’employeur. En cas d’accord, la mise en œuvre de la mobilité interne a pour effet de suspendre les dispositions contractuelles de mobilité. En cas de désaccord, l’employeur peut engager une procédure de licenciement individuel pour motif économique.

2. Les clauses de rémunération

En général, le contrat de travail prévoit par une de ses dispositions les éléments de base de la rémunération du salarié (salaire de base). Peuvent s’y ajouter des clauses relatives à la mensualisation des heures supplémentaires, à une convention de forfait ou encore à la perception de prime sous réserve de respecter le principe « à travail égal, salaire égal ». D’autres clauses peuvent encore prévoir la variabilité de la rémunération du salarié. Dans cette hypothèse la variabilité doit :

- reposer sur des éléments objectifs non soumis à l’arbitraire de l’employeur ; - ne pas avoir pour effet de faire supporter au salarié les risques de l’entreprise ; - ne pas avoir pour conséquence de verser une rémunération en dessous des minima conventionnels et légaux.

À noter par ailleurs qu’un changement de poste peut entraîner une modification de la clause et donc de la rémunération et constituer par-là même une modification du contrat de travail.

III – ÉTUDE DE DOCUMENT

1. Solution de la cour de cassation - Précision apportée en matière de clause de mobilité

Il est acquis que la clause de mobilité s’impose au salarié dès lors que les conditions de validité sont remplies. Précisément, l’une de ces conditions consiste à définir avec précision l’étendue géographique dans laquelle la clause pourra être mise en œuvre. Dans l’affaire soumise à la haute cour, le contrat de travail prévoyait une clause de mobilité portant sur l’ensemble du territoire national, or cette portée est remise en cause par le demandeur au pourvoi sur le fondement de trois arguments :

- d’une part la formulation « territoire national » est insuffisamment précise et autorise l’employeur à modifier unilatéralement, et donc à étendre, le lieu de travail du salarié en tout point du territoire ;

- d’autre part, le refus du salarié d’accepter la mise en œuvre de la clause ne peut justifier son licenciement, dans la mesure où l’une des conditions – la précision géographique – vient à manquer ;

- enfin, cette mobilité s’accompagne de nouvelles tâches, et constitue par-là même une modification du contrat de travail qui ne peut être imposée au salarié.

La cour de cassation, considérant que la clause était claire, licite et précise, et au regard du poste occupé, valide l’arrêt de la cour d’appel. Cet arrêt interroge dans la mesure où il laisse supposer, à priori, que la condition nécessaire d’une zone géographique clairement circonscrite et limitée (Cass. soc., 28 avr. 2011; Cass. soc., 24 janv. 2008) ne serait plus aussi strictement exigée. Le propos doit être nuancé et l’arrêt, s’il n’est de circonstances, entend indiquer sans ombre dans son attendu, que la spécificité du poste et la conscience par l’intéressé de la nature de ses tâches, pouvait le contraindre à une mobilité sur l’ensemble du territoire national.

2. Décision de la cour de cassation et nuance des règles relatives à la mobilité des salariés - Conditions

Les règles précédemment énoncées (cas pratique question 3) supposent que la mobilité du salarié ne puisse s’opérer que dans les conditions suivantes :

- hors du secteur géographique en vertu d’une clause de mobilité ; - hors du secteur géographique avec l’accord du salarié ; - dans le même secteur géographique en vertu du pouvoir de direction de l’employeur.

Cet arrêt admet la possibilité, et sans que le salarié ne puisse s’y opposer (il n’y a pas de modification du contrat de travail), un changement de lieu de travail hors d’une même zone géographique aux conditions suivantes :

- l’affectation doit être temporaire ;

- elle est motivée par l’intérêt de l’entreprise ; - elle est justifiée par des circonstances exceptionnelles ; - le salarié bénéficie d’un délai raisonnable de prévenance ; - la durée prévisible de l’affectation est indiquée.

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L’ÉCOLE DES POMMES

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

CDD : Cas de recours, formalisme, période d’essai, durée, rupture, indemnité de précarité, succession de contrats

I – CAS PRATIQUE

1. Validité des motifs figurant sur les contrats de travail

Erwan Lejard a été recruté en contrat à durée déterminée par la société RAMELLE SERVICES pour répondre aux fluctuations d’activités de l’entreprise. Son contrat ne comporte pas le nom du salarié remplacé et indique deux motifs de recours au contrat précaire. M

me Zéprofit est embauchée pour accroissement d’activité pour une commande

exceptionnelle à l’exportation en Ukraine consistant en l’installation d’un réseau informatique pour plusieurs sociétés. Quels sont les motifs autorisés de recours au contrat à durée déterminée ?

Règles de droit applicables

Les articles L 1242-1 à L 1242-4 du code du travail disposent que le CDD ne peut avoir pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Il ne peut être conclu que pour une tâche précise et temporaire. Ils en limitent les possibilités de recours aux cas suivants :

Le remplacement d’un salarié Toutes les absences du salarié sont concernées (congés de toutes sortes, maladie, passage à temps partiel…). Le remplacement ne peut concerner qu’un seul salarié. La cour de cassation, par un arrêt en date 28 juin 2006 (confirmé dans un arrêt plus récent du 16 décembre 2010), a eu l’occasion de se prononcer à ce sujet. En l’espèce, une personne est embauchée en CDD, en qualité d’employé libre service pour pourvoir au remplacement de trois salariés en congés payés. Les juges sanctionnent la décision de la cour d’appel d’Aix-en-Provence et rappellent qu’en vertu de l’article L 122-1-1-1 du code du travail (nouvel article : L 1242-2) « le contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour le remplacement d’un seul salarié en cas d’absence », quand bien même l’employeur aurait respecté le

formalisme gouvernant à ces contrats. D’autres remplacements autorisent le recours au CDD : le remplacement suite au départ définitif d’un salarié sur un poste devant être supprimé, le remplacement dans l’attente du recrutement d’un salarié en contrat à durée indéterminée, ou encore le remplacement d’un dirigeant d’entreprise ou d’un chef d’exploitation agricole.

L’accroissement temporaire d’activité Celui-ci doit s’entendre comme une augmentation temporaire de l’activité normale de l’entreprise, peu importe qu’elle soit régulière ou cyclique. Par contre, il est nécessaire de pouvoir justifier d’un réel accroissement d’activité (Cass. soc.18 novembre 2015) puisque le recours au contrat à durée déterminée ne peut servir d’outil prévisionnel d’adaptation des effectifs de l’entreprise aux hypothétiques fluctuations de son économie. Sous la même rubrique, le législateur autorise le recours au CDD en cas d’augmentation temporaire de l’activité habituelle de l’entreprise, en cas de commande exceptionnelle à l’exportation ou encore en cas de réalisation de travaux urgents. Lorsque le contrat est exécuté à l’étranger pour une commande exceptionnelle à l’exportation, sa durée, non

renouvelable, est au maximum de 24 mois.

Les travaux temporaires par nature Ces travaux comprennent :

- les contrats saisonniers. Ce sont ceux qui sont normalement appelés à se répéter chaque année, à date à peu près

fixe (circulaire du 30 octobre 1990), en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs, et qui sont effectués pour le compte d’une entreprise exerçant des activités obéissant aux mêmes variations ;

- les contrats d’usage. Ce sont des emplois pour lesquels il est d’usage constant de ne pas conclure de contrats de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité et du caractère temporaire de ces emplois (hôtellerie, restauration, spectacle…). Cette possibilité n’est ouverte que dans les secteurs d’activité visés par décret complété éventuellement par voie d’accord ou de convention de branche étendue.

Les contrats conclus dans le cadre de la politique de l’emploi Sont visés l’ensemble des contrats ayant pour objet de favoriser l’obtention d’un diplôme et l’insertion professionnelle (contrats d’apprentissage, contrat de professionnalisation, contrat d’avenir…).

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Le recrutement d’ingénieurs et de cadres, au sens des conventions collectives, en vue de la réalisation d’un objet défini lorsqu’un accord de branche étendu ou, à défaut, un accord d’entreprise le prévoit. Application des règles de droit aux faits

L’embauche d’Erwan Lejard et de Mme

Zeprofit par la société RAMELLE SERVICE est justifiée par un accroissement d’activité. Celui-ci doit résulter d’un accroissement de l’activité de l’entreprise. C’est précisément ce qu’indique le contrat de travail de M. Lejard. Dans les faits cependant, il est établi que la société a peu de visibilité sur son avenir économique et qu’elle souhaite recourir au contrat à durée déterminée pour faire face aux aléas de la conjoncture, qu’ils soient

favorables ou non. Or le contrat à durée déterminée ne peut servir de variable d’ajustement prévisionnel de la santé économique de l’entreprise. La réalité du motif invoqué justifie la requalification du contrat. En ce qui concerne le contrat de M

me Zéprofit, le motif est valable.

2. Contrat de 20 mois et rupture avant terme

Mlle

Zéprofit a signé un contrat à durée déterminée de 20 mois pour une mission en Ukraine. Celui-ci a été rompu avant son terme en raison d’une insécurité grandissante.

Règle de droit

Si la durée de principe pour un contrat à durée déterminée de date à date est de 18 mois renouvellement inclus, elle peut-être exceptionnellement portée à 24 mois dès lors que la prestation de travail s’effectue à l’étranger (art.1242-8 C. Trav). Si le contrat est à terme imprécis, il doit alors comporter une durée minimale. D’autre part, le contrat ne peut être rompu avant son terme que dans les cas limitativement énumérés à l’article 1243-1 du code du travail. Lorsque la rupture intervient à l’initiative de l’employeur, hors faute grave, force majeure ou inaptitude, le salarié peut prétendre au versement, à titre de dommages et intérêts, de la totalité des rémunérations qu’il

aurait perçues jusqu’au terme de son contrat. Application de la règle aux faits

La durée du contrat est ici licite, ce dernier étant exécuté en Ukraine. Concernant les indemnités, l’employeur peut-il faire valoir un cas de force majeure, à savoir l’instabilité persistante du pays et des risques auxquels les ressortissants sont exposés, pour ne pas verser les rémunérations à titre d’indemnités ? Un cas de force majeure suppose la réunion de trois conditions : l’imprévisibilité, l’irrésistibilité et l’extériorité, or dans le cas présent le caractère persistant de l’insécurité ne permet pas de considérer que le risque était imprévisible. M

lle Zéprofit percevra donc 12 x 3 500 euros

sans préjudice de l’indemnité de fin de contrat. 3. Remise du contrat et existence de plusieurs motifs de recours au CDD

M. LEJARD reçoit son contrat de travail le 25 juillet. Le contrat indique que pour les six premiers mois, son embauche résulte d’un accroissement temporaire d’activité et que pour les six mois suivant il remplace un salarié absent pour congé sabbatique. Peut-on indiquer plusieurs motifs de recours au CDD pour le même salarié ?

Règles de droit applicables

Le contrat doit respecter certaines formes obligatoires. Il doit être : - établi par écrit ; - signé par le salarié ; - remis au plus tard dans les 2 jours suivant l’embauche.

Ces obligations sont impératives. Le contrat doit être écrit et remis au salarié dans les 48 heures de l’embauche, ce qui n’est pas le cas pour le CDI. Il doit en outre comporter la signature du salarié (Cass. soc. 19 février 2003 ; Cass. soc. 31 mai 2006). À noter que l’absence de signature équivaut à l’absence d’écrit, sauf en cas de manœuvres du salarié (Cass. soc. 24 mars 2010).

En cas de méconnaissance de l’une de ces obligations, le contrat est réputé conclu à durée indéterminée (Code. Trav. L 1245-1), sauf le droit pour le salarié d’apporter la preuve qu’il s’agit d’un contrat à durée déterminée s’il souhaite éviter une requalification.

S’agissant du motif, le contrat doit être obligatoirement conclu pour une tache définie et déterminée. L’employeur ne peut ainsi avoir recours au contrat précaire pour le remplacement de plusieurs salariés. Par ailleurs, il n’est possible d’inscrire au contrat qu’un seul motif justifiant le recours au CDD. Cette interprétation résulte

d’un arrêt de la cour de cassation (Cass. soc. 23 janvier 2008) qui procède à la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée dès lors que plusieurs motifs ont justifié sa conclusion. En l’espèce, un comptable avait été recruté pour une première période en remplacement d’une salariée en congé maternité et dans un second temps, mais dans le même contrat, pour un surcroît d’activité.

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Application de la règle aux faits

Le contrat a été remis conformément aux exigences légales, mais l’indication d’un double motif dans le même contrat, à savoir l’accroissement d’activité et le remplacement d’un salarié absent, n’est pas conforme à la loi.

4. Le remplacement de plusieurs salariés

Mme

Labardue remplace trois salariés et leurs noms ne figurent pas au contrat. Règle de droit applicable

Le contrat doit comporter des mentions obligatoires sous peine de requalification Sans être exhaustif, il est indispensable de porter au contrat les indications suivantes :

- le motif justifiant le recours au CDD ;

- le nom, qualification du salarié remplacé (Cass. soc. 16 septembre 2009). Un seul salarié peut être remplacé. Il n’est pas possible d’avoir recours à un seul CDD pour couvrir différents motifs concernant plusieurs salariés ;

- le terme du contrat, à défaut sa durée minimale ; - le poste occupé ; - toutes autres mentions utiles relatives au fonctionnement du contrat (rémunération, période d’essai, convention

collective…). L’absence des ces indications ouvre droit à une demande en requalification du contrat.

Application de la règle aux faits

La solution laisse peu de place aux aléas. En effet, son contrat vise au remplacement de trois salariées en congés maternité. Or la cour de cassation a définitivement tranché en la matière (cass.soc. 23 janv. 2008) et impose qu’un contrat à durée déterminée ne puisse être conclu que pour le remplacement d’un seul salarié. La requalification est là encore encourue.

5. Renouvellement et succession de CDD

Dans la même société, Éric Lapi a conclu un premier contrat du 01 juin N-1 au 01 juin N pour suppléer l’absence de M. Hetigne en congé maladie. Son contrat a été renouvelé du 02 juin N au 01 janvier N+1 puis du 02 janvier au 15 avril N+1 sous le même motif. La terminologie employée est ambiguë à dessein : les contrats ont-ils fait l’objet d’un renouvellement où s’agit-il de contrats successifs et distincts ? Les deux hypothèses seront donc traitées.

Règle de droit applicable

Renouvellement de contrat. Le contrat à terme précis peut être renouvelé deux fois dans la limite de la durée maximale prévue par la loi (18 mois). La durée du renouvellement pouvant être supérieure à la durée initiale.

Succession de contrats sur le même poste. La loi impose le respect d’un délai de carence, c’est-à-dire une durée minimale entre deux contrats à durée déterminée.

Ce délai est égal (C.Trav L 1244-3) : - au tiers de la durée du contrat, renouvellement inclus, si la durée de ce contrat, est au moins égale à quatorze

jours ; - à la moitié de la durée du contrat, renouvellement inclus, si la durée de ce contrat est inférieure à quatorze jours.

Échappent à ce principe les exceptions suivantes (notamment) : - les contrats conclus en cas de nouvelle absence du salarié remplacé ; - les contrats conclus pour réaliser des travaux urgents nécessités par des mesures de sécurité ; - les emplois saisonniers ;

- les contrats d’usage ; - les contrats conclus au titre de la politique de l’emploi.

Succession de contrats avec le même salarié. Il est possible de conclure un nouveau contrat en CDD avec le même salarié sans encourir le risque d’une requalification en CDI en cas :

- de remplacement d’un salarié absent en cas de nouvelle absence du salarié remplacé. Dans cette hypothèse, la cour de cassation a apporté une lecture importante des règles relatives aux contrats successifs (Cass.soc. 8 février 2006). La cour considère ainsi qu’il est possible de conclure plusieurs CDD successifs avec le même

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salarié, quand bien même la durée de 18 mois au total aurait été dépassée sans risquer une requalification du contrat. Autrement dit, il n’existe pas en la matière de délai de carence et la succession de contrats comportant un terme précis ne fait pas obstacle à ce qu’ils soient poursuivis au-delà même de la durée de 18 mois ;

- de travaux saisonniers ; - d’emplois pour lesquels il est d’usage de ne pas recourir à un CDD. En cas de litige, la juridiction saisie vérifie que

le secteur d’activité entre bien dans la liste des activités concernées, mais veille en outre à prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs, que le recours à l’utilisation des dits contrats est

« justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi » (Cass. soc 23 janvier 2008). En l’espèce, un formateur a cumulé 14 années d’enseignement sur un poste de professeur d’éducation artistique. La cour estime que non seulement l’emploi n’avait pas un caractère temporaire, mais que la conclusion de contrats à durée déterminée successifs n’était pas justifiée par des raisons objectives.

En dehors de ces hypothèses, il est nécessaire de respecter le délai de carence s’il s’agit du même poste, ou un délai suffisant (non défini par la loi) pour éviter le risque d’une fraude à la loi. En toute hypothèse, la succession de CDD, bien que respectant le cadre légal, ne doit pas avoir pour effet de pourvoir

durablement à un emploi lié à l’activité permanente de l’entreprise. Lorsque tel est le cas, la requalification est encourue (Cass. soc. 24 juin 2015). Application de la règle aux faits

Hypothèse du renouvellement de contrat Le premier contrat a été renouvelé deux fois, ce qui est licite. En revanche, le cumul des renouvellements excède la durée de 18 mois, ce qui ouvre droit à requalification du contrat dans cette hypothèse.

Hypothèse de la succession de contrats Éric Lapi a conclu trois contrats à durée déterminée, chacun avec un terme précis et ayant pour motif le remplacement d’un salarié absent pour maladie. Cumulée, la durée totale des contrats est de 22 mois. La succession de contrats de date à date excédant 18 mois avec le même salarié encourt normalement la requalification au terme de l’article L1243-11 et L 1242-8 code du travail (à noter que la conclusion de contrat sans terme précis et pour le même motif est tout à fait licite). Or, la cour de cassation a décidé, dans son arrêt du 8 février 2006, que lorsque « le contrat de travail à durée déterminée est conclu pour remplacer un salarié absent, l’article L. 122-3-10 deuxième alinéa du Code du travail (nouvel

article 1244-1) autorise la conclusion de plusieurs contrats à durée déterminée successifs avec le même salarié, peu important qu’ils comportent un terme précis et que leur durée totale excède le délai de 18 mois ». La situation de M. Lapi, en totale adéquation avec cette solution, justifie la succession de contrats par la société RAMELLE SERVICE. Par contre, du point de vue formel, son dernier contrat en date du 2 janvier et remis le 03 janvier N ne comporte pas sa signature. Or en l’absence de la signature du salarié, le contrat à durée déterminée ne peut être considéré comme ayant été établi par écrit et doit être requalifié en contrat à durée indéterminée.

6. La rupture du CDD avant son terme

Le contrat prévoit un terme fixé au 20 juin. Or M. Hetigne est revenu le 20 mai. Le dirigeant de RAMELLE SERVICES a signifié à M. Lapi la fin de son contrat avec préavis de 48 heures. Le contrat peut-il être rompu avant son terme en cas de retour du salarié remplacé ? Règle de droit applicable

La rupture anticipée du contrat ne peut intervenir que dans 5 cas : - l’accord des parties ; - la faute grave de l’une des parties ; - le cas de force majeure ; - l’inaptitude du salarié constatée par le médecin du travail ; - la rupture à l’initiative du salarié en cas de conclusion d’un contrat à durée indéterminée. Il doit dans ce cas

respecter un préavis. La rupture anticipée à l’initiative de l’employeur, en dehors des cas de faute grave ou de force majeure, ouvre droit pour

le salarié à des dommages et intérêts d’un montant au moins égal aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat, sans préjudice de l’indemnité de fin de contrat. De même, si la rupture intervient à l’initiative du salarié en dehors des cas légaux, celle-ci ouvre droit pour l’employeur à des dommages et intérêts correspondant au préjudice subi.

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Application de la règle aux faits

Le retour de M. Hetigne ne peut justifier la rupture anticipée du contrat de M. Lapi. En effet, son contrat de date à date ne peut prendre fin qu’au terme initialement prévu. Elle ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d’un montant au moins égal aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat, sans préjudice de l’indemnité de fin de contrat.

II – QUESTION DE COURS

1. La durée du contrat à durée déterminée

Le contrat avec terme précis En principe, le contrat de date à date ne peut avoir une durée excédant 18 mois. Par exceptions, dans certaines hypothèses la loi fixe une autre durée maximale de 3, 9 ou 24 mois. Le contrat peut être renouvelé deux fois dans la limite de la durée maximale prévue par la loi. Le contrat prend automatiquement fin au terme prévu. Dans le cas contraire il devient à durée indéterminée. Le contrat sans terme précis (dans les cas prévus par la loi) Par définition, ce contrat n’est pas l’objet d’une durée maximale, en contrepartie de quoi il doit comporter une durée minimale en principe librement fixée par les parties. Le principe du renouvellement est inutile dans la mesure où le terme du contrat est fixé au retour du salarié absent ou à la réalisation de l’objet du contrat. En toute hypothèse, la rupture du contrat ne peut intervenir avant le terme de la durée minimale hors les cas prévus aux articles L 1243-1 à L 1243-4. 2. La période d’essai

Le contrat de travail à durée déterminée peut comporter une période d’essai.

Sauf si des usages ou des stipulations conventionnelles prévoient des durées moindres, cette période d’essai ne peut excéder une durée calculée à raison d’un jour par semaine, dans la limite de deux semaines lorsque la durée initialement prévue au contrat est au plus égale à six mois et d’un mois dans les autres cas. Lorsque le contrat ne comporte pas de terme précis, la période d’essai est calculée par rapport à la durée minimale du contrat.

III – ÉTUDE DE DOCUMENT

1. Problème de droit

Quels sont les conditions et effets de la requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée ? 2. Explication de la solution de la cour de cassation sur l’ensemble des points de droit soulevés

Sur la requalification : le contrat de travail à durée déterminée est susceptible d’être requalifié à durée indéterminée lorsque les conditions de forme ne sont pas respectées et/ou quand les cas de recours ne sont pas justifiés. Il ne faut cependant pas

oublier le principe général qui gouverne à la conclusion de tels contrats. En effet, le CDD constitue une exception au contrat de droit commun qu’est le CDI, il ne peut ainsi être conclu pour pourvoir à une tâche liée à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Partant de là, alors même que le motif du recours serait justifié, l’emploi successif de contrats avec le même salarié caractérise un besoin permanent de l’entreprise qui n’autorise pas la conclusion de contrats à durée déterminée. Tel est le cas d’espèce soumis à la cour qui constate que le salarié a été appelé pendant dix années par la même entreprise avec de très courtes périodes d’interruption tout en conservant les mêmes qualifications et rémunérations. Sur les effets : Le salarié sollicite la condamnation de l’entreprise au paiement des salaires pour les périodes

intercalaires (entre les contrats) ainsi que le rappel de congés payés pour les mêmes périodes. Le défendeur fait valoir que le rappel des sommes contestées ne peut être justifié en se fondant sur trois arguments principaux :

- le salarié n’était pas tenu à la disposition permanente de l’employeur ; - l’indication de la durée et de la répartition du travail dans les contrats ne plaçait pas le salarié dans l’impossibilité

de savoir s’il pouvait être inopinément être appelé à travailler ;

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- le salarié a perçu l’assurance chômage pendant les périodes non travaillées. La cour de cassation rejette le pourvoi au motif que le salarié travaillait quasiment à temps plein et qu’il pouvait être appelé par l’entreprise à n’importe quel moment. Dès lors, il se trouvait à la disposition permanente de l’entreprise, ce qui justifie le rappel des sommes demandées, peu importe qu’il ait perçu l’assurance chômage.

3. Rappel des faits

M. X... a été embauché par contrat à durée déterminée le 26 juin 2009 par l’association Poitiers basket 86. Un nouvel engagement est ensuite conclu, auquel un avenant est venu préciser les possibilités de rupture unilatérale du contrat (absences répétées et injustifiées du joueur). Le 28 avril 2011, en application de l’avenant, l’association met fin au contrat. 4. Solution de la cour

Aux termes de l’article L. 1243-1 du Code du travail, sauf accord des parties, le contrat à durée déterminée ne peut être

rompu avant l’échéance du terme qu’en cas de faute grave, de force majeure ou d’inaptitude constatée par le médecin du travail. Ces dispositions sont d’ordre public et leur aménagement conventionnel est par conséquent impossible. Dans cette affaire, la cour de cassation constate que les parties ont inséré au contrat une condition résolutoire consistant en la faculté pour chaque partie de mettre fin au contrat hors les cas prévus par l’article précité. Elle en sanctionne donc la validité,peu importe d’ailleurs que le salarié ait bénéficié de conditions plus favorables.

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SORCELLERIE

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Contrat d’apprentissage, contrat de professionnalisation, contrat unique d’insertion

I – CAS PRATIQUE 1 et 2 – Rupture du contrat d’apprentissage

Sébastien Leberger a conclu successivement deux contrats d’apprentissage, le premier ayant cessé en raison de la

liquidation judiciaire de son entre prise d’accueil, le second en raison d’une faute que l’employeur, M. Pater, lui reproche. Quels sont les modes légaux de rupture anticipée du contrat d’apprentissage et les indemnisations auxquels ils peuvent donner droit ? Règles de droit applicables

Le contrat d’apprentissage est un contrat (visé aux articles L 6211-1 et suivants du code du travail) par lequel l’employeur s’engage à assurer une formation au jeune travailleur qui en contrepartie s’oblige à travailler pour lui jusqu’au terme de son contrat de travail.

Sa conclusion répond à des obligations de fond et de forme précises (conditions tenant à l’apprenti, au maître d’apprentissage ainsi qu’à l’entreprise). Il en est de même pour sa cessation lorsqu’elle est anticipée.

I - Les modes de rupture anticipée du contrat d’apprentissage

Le contrat peut être rompu à l'échéance des quarante-cinq premiers jours, consécutifs ou non, de formation pratique en entreprise effectuée par l'apprenti (C. Trav. L 6222 - 18). (En outre, ladite période est suspendue du temps de la maladie du salarié et donc prolongée d’autant.)

Au-delà, le code du travail prévoit à l’article L 6222-18 et L 6222-19, la liste restrictive des motifs autorisant la rupture anticipée du contrat de travail :

La résiliation d’un commun accord des parties. Les parties au contrat peuvent convenir ensemble, à l’initiative de l’une ou de l’autre, de la cessation du contrat. La rupture doit nécessairement résulter d’un écrit constatant la rupture signé par l’employeur et le salarié (Cass. soc. 1

er févr. 2005).

La résolution judiciaire du contrat. Toute résiliation unilatérale étant proscrite au-delà de la période d’essai, la partie qui entend rompre le contrat doit nécessairement saisir la juridiction prud’homale, seule habilité à prononcer la rupture du contrat. En cette hypothèse deux motifs sont admis :

- la faute grave ou les manquements répétés de l’une des parties à ses obligations. Tel est le cas de l’employeur qui n’assure pas la formation de l’apprenti ou ne le rémunère pas. Tel est le cas lorsque l’apprenti refuse de se

conformer aux directives de l’employeur ou s’il cesse le travail sans motif (Cass. soc. 27 juin 2007), - l’inaptitude de l’apprenti. Lorsqu’il apparaît que l’apprenti est inapte à exercer le métier pour lequel il est

préparé, le contrat peut-être rompu. L’inaptitude est constatée dans les formes que la loi prescrit ; L’obtention du diplôme. En cas d’obtention du diplôme préparé, le contrat peut prendre fin, à l’initiative du salarié,

avant le terme fixé initialement. Il est nécessaire cependant d’en informer l’employeur par écrit au minimum deux mois avant. En outre, la rupture ne peut intervenir avant la publication des résultats par le jury d’examen.

II – L’indemnisation de la rupture anticipée du contrat Lorsque le contrat est rompu dans les cas que la loi autorise, le salarié ne peut prétendre à une indemnisation découlant

de prescriptions légales. De même qu’au terme du contrat, l’apprenti ne saurait bénéficier de l’indemnité de précarité due en cas de contrat à durée déterminée. En cas de rupture abusive, c’est-à-dire une rupture se situant en dehors des cas légaux, la loi est muette puisque l’article L 6222-18 n’envisage aucunement les effets produits par la fin du contrat. La cour de cassation considère que la rupture abusive entraîne nécessairement un préjudice (Cass. so. 30 septembre 2015) qu’il convient de réparer en versant au salarié l’ensemble des rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme de son contrat (Cass. soc. 10 octobre 2002). Inutile, donc, de justifier d’un préjudice pour l’apprenti.

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Lorsque la rupture résulte de la cessation de l’activité de l’entreprise ou lorsque celle-ci est mise en liquidation judiciaire, le motif de la rupture n’en est pas pour autant justifié. Dans cette dernière hypothèse, l’employeur est dispensé de saisir la juridiction prud’homale puisque le liquidateur prononce lui-même, dans le cadre de ses attributions, la résiliation du contrat. Comme le prévoit l’article L 6222-18 du code du travail, l’apprenti a droit à titre de dommages-intérêts au montant des rémunérations qu’il aurait dû percevoir jusqu’au terme de son contrat de travail. Applications des règles de droit aux faits

La rupture du contrat de Sébastien Leberger par la société FIDELIAROMA est la conséquence d’une procédure de liquidation judiciaire. Il peut légitimement solliciter auprès du conseil de prud’hommes le versement d’une indemnité égale au montant de la rémunération qu’il aurait dû percevoir jusqu’au terme de son contrat, et ce, même s’il a retrouvé une entreprise susceptible de l’embaucher dans le cadre d’un nouveau contrat d’apprentissage.

Quant à la rupture judiciaire sollicitée par M. Patter, il fait peu de doute que ce dernier obtiendra gain de cause. En effet, les absences fréquentes de Sébastien, puis la cessation sans motif de son travail, constituent une faute rendant légitime la résiliation anticipée du contrat d’apprentissage.

II – QUESTION DE COURS 1. Le contrat unique d’insertion

Le contrat unique d’insertion est entré en vigueur le 1er

janvier 2010. Il a pour objet de faciliter l’insertion professionnelle des personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles d’accès à l’emploi. Il comprend deux formes principales, l’une destinée au secteur marchand (contrat d’accompagnement dans l’emploi), l’autre au secteur non marchand (contrat initiative-emploi) Il suppose la signature d’une convention préalable entre l’employeur, le bénéficiaire et soit Pôle Emploi, soit un organisme participant au service public de l’emploi, soit encore le président du Conseil Général lorsque le futur salarié

est bénéficiaire du RSA. Puis un autre contrat est conclu en la forme réglementaire entre l’employeur et le bénéficiaire. Le contrat prévoit notamment :

- la désignation d’un référent chargé de suivre son insertion professionnelle ; - la désignation d’un tuteur ; - la nature des actions d’accompagnement, d’orientation, de formation professionnelle ou encore de VAE.

2. Le contrat de professionnalisation

La loi du 4 mai 2004 « relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social » a créé le contrat de professionnalisation. Il remplace les contrats de qualification, d’orientation, et d’adaptation. Le contrat de professionnalisation est un contrat de travail en alternance au même titre que le contrat d’apprentissage. Il a pour objet d’assurer une formation théorique (éventuellement diplômante) et une formation en entreprise au salarié. Par principe, à l’issue du contrat le salarié n’a pas vocation à poursuivre ses études mais à intégrer le monde professionnel. Les conditions de formation du contrat

Les conditions relatives à l’entreprise. Sont admis à conclure un contrat de professionnalisation tous les employeurs qui concourent au financement de la formation professionnelle, quelle que soient l’activité exercée ou la forme juridique adoptée Conditions relatives au demandeur. Les bénéficiaires sont les jeunes âgés de 16 à 25 ans révolus ainsi que les demandeurs d’emploi âgés de 26 ans et plus. Caractéristiques du contrat

Durée. Obligatoirement écrit, le contrat de professionnalisation peut être conclu à durée indéterminée ou à durée déterminé. La durée du contrat joue sur les modalités d’accompagnement de l’action de formation.

Statut du salarié. L’essentiel des dispositions du code du travail sont applicable au salarié (congés, durée du travail…). Par contre, comme pour le contrat d’apprentissage, la rémunération est fonction de l’âge et du niveau de formation. Elle est égale à 55% du Smic pour les jeunes âgés de moins de vingt-et-un ans et à70 %pour les autres. Ces taux sont respectivement portés à 65% et 80% du Smic si le bénéficiaire est titulaire d’un baccalauréat professionnel (ou d’un titre équivalent).

Action de professionnalisation. La durée de l’action est comprise entre 6 et 12 mois. Et peut être étendue jusqu’à 24 mois par convention ou accord collectif de branche. Si le contrat est conclu à duré déterminée, la durée du contrat est celle de l’action de professionnalisation.

Formation. Les actions de formation ont une durée comprise entre 15% et 25% de la durée totale du contrat, sans pouvoir être inférieure à 150 heures dans le cas d’un CDD ou de l’action de professionnalisation s’il s’agit d’un contrat à

durée indéterminée.

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III – ÉTUDE DE DOCUMENTS 1. Rappel des faits

En vue de préparer son baccalauréat professionnel en alternance, M. X a été embauché le 7 septembre 1998 en contrat d’apprentissage par la société EDT Energie Méditerranée, devenue la société RTE EDF transport. Le contrat a pris fin au terme prévu, mais M. X a demandé la requalification de son contrat et le versement de dommages-intérêts. 2. Problème de droit

L’inexécution fautive des obligations de l’employeur dans le cadre d’un contrat d’apprentissage peut-elle justifier la requalification du contrat ?

3. Explication de la solution de la cour de cassation

Le contrat d’apprentissage est une forme particulière de contrat de travail obéissant à un régime particulier. Conjuguant enseignement théorique et pratique, il met à la charge des parties des obligations spécifiques. L’employeur s’engage particulièrement :

- à assurer une formation professionnelle en entreprise et à confier à l’apprenti des tâches en coordination avec la progression pédagogique du CFA ou de l’établissement ;

- à faire suivre par l’apprenti, la formation théorique organisée par le CFA ou l’établissement ;

- à faire participer l’apprenti aux épreuves du diplôme préparé. L’apprenti s’engage en retour :

- à suivre la formation en CFA ou dans l’établissement d’enseignement ; - à travailler pour l’employeur dans la limite des prescriptions contractuelles ; - à se présenter aux épreuves du diplôme.

L’affaire soumise à la cour de cassation permet de préciser les conséquences en cas de manquement de l’employeur à

ses obligations légales. Condamné en appel, ce dernier fait valoir plusieurs arguments au pourvoi :

- le contrat d’apprentissage est exclusif du droit commun et interdit l’application des règles du contrat de travail à durée déterminée ;

- les obligations relatives à la formation ont été respectées ; - les éventuels manquements aux obligations de formation ne peuvent justifier que le versement de dommages-

intérêts, et ne sauraient être cumulées avec celles d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; - aucune indemnité ne peut être allouée au motif de la perte d’une chance de conclure un contrat de travail avec une

autre entreprise. La cour de cassation, pour les questions de fait, s’en remet à l’appréciation souveraine de la cour d’appel qui a constaté que M. X exerçait des fonctions d'agent EDF à part entière, ne permettant pas de le considérer dans une situation d’apprentissage. Il en découle que la nature du contrat dont la finalité et l’objet sont spécifiques ont été détournés. La requalification est donc justifiée et la rupture du contrat doit s’analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. D’autre part, le manquement à l’obligation de formation constitue un préjudice distinct justifiant une indemnisation.

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LA TABLE RONDE

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

La durée du travail : Temps d’habillage, temps de déplacement, heures supplémentaires, cumul d’emploi, aménagement du temps de travail, forfait, travail à temps partiel

1. a) Intégration des temps d’habillage et de déplacement dans le décompte du temps de travail effectif

L’entreprise MERLYN STAPER est spécialisée dans la production de pneus en caoutchouc. Le nombre important de salariés lui impose de tenir une comptabilité précise et efficace de la durée de travail de chacun d’eux. Elle a ainsi

systématisé le recours au badge et demande aux salariés de l’utiliser après avoir revêtu la tenue obligatoire. Les temps d’habillage des salariés et de déplacement dans l’entreprise doivent-ils être intégrés dans le décompte de la durée effective de travail ? Règles de droit applicables

Le calcul de la durée du travail est établi à partir du travail effectif. Le travail effectif est : « le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et doit se conformer à ses

directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ». Trois éléments cumulatifs caractérisent le temps de travail effectif :

- le salarié est à la disposition de l’employeur ; - il doit se conformer aux directives de l’employeur ; - il ne peut vaquer librement à ses occupations.

Si certains temps sont assimilés sans difficulté à du travail effectif (les repos compensateurs, la visite médicale d’embauche et les examens médicaux obligatoires, les temps de formation à l’initiative de l’employeur ou dans le cadre d’un contrat de formation en alternance), d’autres méritent une attention particulière.

L’habillage Lorsque le port d’une tenue de travail est obligatoire et que l’habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l’entreprise ou sur le lieu de travail, le temps passé à ces opérations doit faire l’objet d’une contrepartie sous forme de repos ou de rémunération, sans pour autant qu’il soit assimilé à du travail effectif (Cass. soc. 17 février 2010

dernièrement, Cass. soc. 16 mars 2016). S’il manque une des deux conditions, l’habillage et le déshabillage ne donnent pas lieu à contrepartie. Ce principe tiré de l’article L 3121-3 du code du travail ne s’oppose pas à ce que des dispositions conventionnelles ou contractuelles en décident autrement (Cass. soc. 28 octobre 2009). Un accord collectif peut ainsi

assimiler ce temps à du travail effectif soit prévoir l’octroi de contreparties. Le temps de déplacement dans l’entreprise Le déplacement dans l’entreprise pendant les heures de travail ne pose aucune difficulté. Il s’agit d’un temps de travail effectif. Par contre, qu’en est-il lorsque le salarié n’a pas encore badgé ? Il convient en la matière de vérifier si pendant ce temps le salarié doit répondre aux ordres et directives de l’employeur sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles. Par exemple, un salarié arrivant en avance ne pourrait faire valoir l’existence d’un temps de travail effectif. Par contre, le salarié qui, une fois habillé, doit traverser sans délai le site de l’entreprise, le temps ainsi

passé sans qu’il puisse vaquer librement à ses occupations personnelles doit être considéré du temps de travail effectif (Cass. soc. 31 octobre 2007). b) Intégration du temps de déplacement pour les salariés devant se rendre à Saclay

Le temps de déplacement pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif mais un temps de trajet. Il ne doit donc pas être assimilé à un temps de travail effectif (Cass. 21 mars 2012). Toutefois, s’il dépasse le temps normal entre le domicile et le lieu habituel de travail, il doit faire l’objet d’une contrepartie soit sous

forme de repos, soit financière. Enfin, le temps de déplacement entre deux lieux de travail doit être considéré comme du travail effectif (Cass. soc. 16 juin 2004), il en est de même lorsque les salariés doivent dans un premier temps se rendre au siège de l’entreprise pour être ensuite emmenés sur un chantier (31 janvier 2012).

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Application des règles de droit aux faits

Les salariés sont assujettis à une durée collective du travail. Ils commencent à 8h30, finissent à 12h, puis reprennent à 13h30 pour s’arrêter à 17h. Cela fait 35 heures hebdomadaires. Mais doit-on intégrer, c’est-à-dire ici rajouter, le temps d’habillage, le temps de déplacement dans l’entreprise. L’équipement (une combinaison de protection comprenant une sous-couche athermique et un revêtement antichoc) est obligatoire et revêtu dans l’entreprise. Ce temps doit donc faire l’objet d’une compensation en repos ou sous forme de rémunération, ce qu’il conviendra de vérifier. Néanmoins, sauf dispositions de la convention collective ou du contrat, il n’est pas intégré dans le calcul du travail effectif.

En ce qui concerne le temps de déplacement dans l’entreprise, la Cour de cassation a considéré que le temps de déplacement dans l’entreprise devait être analysé au regard de la définition du travail effectif, à savoir un temps durant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur. Il faut en déduire qui si le temps d’habillage ne permet pas à lui seul de qualifier le temps qui lui suit comme du travail effectif, il en est autrement si les salariés doivent, une fois l’équipement revêtu, rejoindre sans délai leur poste de travail sans pouvoir vaquer librement à leurs occupations. Ce temps de déplacement doit être considéré comme du travail effectif. Dès lors, les salariés de l’entreprise MERLYN STAPER

peuvent être fondés à demander à ce que le temps de déplacement (10 minutes aller et 10 minutes retour), pendant lequel ils ne peuvent vaquer librement à leurs occupations, soit considéré comme du temps de travail effectif. Une solution identique s’impose pour les salariés qui doivent se rendre à Palaiseau pour ensuite rejoindre Saclay. Ce temps est un déplacement professionnel constituant du temps de travail effectif.

2. Heures supplémentaires

a) Rémunération Règle de droit applicable

Le fait de réaliser des heures supplémentaires ouvre droit au salarié à une compensation en temps ou en argent. De

plus, au-delà d’un certain volume d’heures effectuées, le salarié a droit à un repos supplémentaire obligatoire.

Les majorations de salaire Les heures supplémentaires, sont majorées de :

- 25% pour les huit premières heures (soit de la 36e à la 43

e heure incluse) ;

- 50% pour les heures suivantes (à partir de la 44e heure)

Ces taux s’appliquent à défaut de dispositions collectives (branche, entreprise, établissement), qui peuvent prévoir un taux de majoration différent au minimum de 10%.

Le repos compensateur de remplacement Une convention ou un accord collectif étendu, une convention, un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir de remplacer le paiement des heures supplémentaires par l'attribution d'un repos compensateur. Les heures

supplémentaires intégralement compensées par le repos de remplacement ne sont pas comptabilisées dans le contingent annuel. D’autre part, en l’absence de délégué syndical, l’employeur peut instituer un repos compensateur en remplacement du paiement des heures supplémentaires à condition que le comité d’entreprise, ou à défaut les délégués du personnel, ne s’y opposent pas. Application

En l’absence d’indication dans les faits, notamment quant à l’existence ou non de dispositions collectives, il conviendra

de considérer que M. Galad a bénéficié d’une rémunération supplémentaire aux taux indiqués.

b) La contrepartie en repos obligatoire

Règle de droit applicable

Sauf accord collectif contraire (fixant les conditions d’accomplissement des heures hors contingent et les modalités de prise de la contrepartie obligatoire en repos), les majorations prévues en contrepartie des heures supplémentaires hors contingent s’opèrent selon les critères suivants :

- dans les entreprises de 20 salariés et moins, les heures réalisées au-delà du contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire en repos de 50% des heures effectuées au-delà de la durée légale (soit dès la 36

e

heure effectuée hors contingent) ; - dans les entreprises de plus de 20 salariés, les heures supplémentaires hors du contingent annuel ouvrent droit

à un repos obligatoire de 100% des heures effectuées au-delà de la durée légale. L’accord collectif précité ne peut être moins favorable. En l’absence d’accord collectif, les repos obligatoires doivent être pris en principe dans un délai de 2 mois à compter de l’ouverture des droits. Néanmoins, en l’absence de demande de la part du salarié, l’employeur est tenu de lui demander de

prendre ses repos dans le délai maximum d’un an (art. D 3121-8-1 Code Trav., Cass. soc. 9 mai 2007). Les heures devront être payées lorsque le contrat est rompu avant que le salarié ai pu bénéficier de la totalité des repos auxquels il avait droit.

Application de la règle aux faits

En l’absence de dispositions collectives, le salarié bénéficie d’une contrepartie en repos obligatoire. M. Galad doit prendre son repos dans les deux mois de l’ouverture des droits. À défaut, M. Lanquetot a l’obligation de lui signifier qu’il a le devoir

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des les prendre dans le délai d’un an, ce qui ne semble pas avoir été le cas. Dès lors, il pourrait être amené à en supporter les conséquences financières. 3. Le fonctionnement des heures supplémentaires

Le fort développement de MERLYN STAPER l’incite à recourir aux heures supplémentaires. Même si certains salariés ont refusé, comme M. Parcevald, d’autres ont accepté et bénéficient à ce titre d’un repos compensateur de remplacement.

Quelles sont les durées maximales autorisées de temps de travail et le régime juridique des heures supplémentaires ?

Règles de droit applicables

A – Principe La durée légale hebdomadaire est fixée à 35 heures (ou 1 607 heures par an) pour toutes les entreprises assujetties quel que soit leur effectif et tous les salariés sont concernés (certains en sont exclus comme les VRP – voyageurs représentants placiers –, les cadres dirigeants – c’est-à-dire ceux qui assument des responsabilités impliquant une grande indépendance dans l’organisation de leur propre emploi du temps, qui disposent d’un pouvoir décisionnaire largement autonome et enfin qui perçoivent l’une des rémunérations les plus élevées de l’entreprise ou de

l’établissement –, ou encore les travailleurs indépendants). Mais attention, il ne s’agit ni d’une durée minimale, ni d’un maximum. À noter que dans certains secteurs s’applique une durée dite d’équivalence. Une durée de travail supérieure (par exemple : 39 heures) est considérée comme équivalente à la durée légale (35 heures). Dans ce cas, le calcul des heures supplémentaires s’effectue à compter de la 39

e heure de travail et non à partir de la 35

e heure

B – La durée légale maximale de travail La durée maximale hebdomadaire

La durée hebdomadaire moyenne de travail calculée sur une période quelconque de 12 semaines ne peut dépasser 44 heures. Un accord collectif (de banche, d’entreprise, d’établissement) peut fixer cette durée à 46 heures. À défaut d’accord, l’autorité administrative peut accorder à l’entreprise que la durée maximale hebdomadaire soit portée à 46 heures. Et, en toutes hypothèses, la durée maximale hebdomadaire absolue au cours d'une même semaine ne peut dépasser 48

heures, sauf circonstances exceptionnelles après autorisation administrative pouvant porter cette durée à 60 heures. La demande doit être accompagnée de l’avis du CE ou des DP.

La durée maximale quotidienne La durée quotidienne de travail effectif ne peut être supérieure à 10 heures par journée civile, laquelle débute à 0H et

s’achève à 24H (art. L3121-34 C. Trav.) Cependant :

- un accord collectif d’entreprise ou un accord de branche étendu peut aller jusqu’à 12 heures de travail effectif par journée civile ;

- l’inspecteur du travail peut autoriser des dérogations en cas de surcroît temporaire d’activité ; - en cas d’urgence, l’employeur peut déroger, sous sa propre responsabilité, à la durée maximale du travail. Il doit

avertir dès que possible l’inspection du travail pour régulariser sa situation (art. D 3121-17 C. Trav.).

C – Le mécanisme des heures supplémentaires Définition Les heures supplémentaires sont les heures de travail effectif réalisées par le salarié :

- à la demande de l'employeur ou avec son accord, même implicite ; - au-delà de la durée légale de 35 heures par semaine ou de la durée considérée comme équivalente.

Par principe le décompte des heures supplémentaires s’effectue par semaine civile (du lundi à 0 heures au dimanche à 24 heures). Néanmoins, si un accord collectif le prévoit, le décompte peut s’effectuer sur une période de sept jours consécutifs. Enfin, le décompte peut s’effectuer autrement en cas d’aménagement des horaires de travail sur toute ou partie de

l’année (Loi du 21 août 2008).

D – Utilisation par l’employeur

Dans le contingent annuel Le contingent annuel est un volume d’heures supplémentaires par an et par salarié que l’employeur peut utiliser librement. Néanmoins, les heures supplémentaires accomplies dans la limite du contingent doivent donner lieu à une information préalable du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel lorsqu’ils existent. Le contingent annuel est fixé par convention ou accord collectif de branche étendu ou par accord d’entreprise ou d’établissement. À défaut, le contingent réglementaire de 220 heures par an et par salarié s’applique. À noter que le refus du salarié d’effectuer des heures supplémentaires peut être considéré comme une atteinte au pouvoir de direction de l’employeur et qualifié de faute grave motivant son licenciement.

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Hors contingent Lorsqu’il existe un accord collectif, celui-ci doit préciser les règles selon lesquelles les heures supplémentaires seront exécutées ainsi que les modalités des contreparties auxquelles elles donnent lieu. En l’absence d’accord, l’employeur peut dépasser le contingent sans autorisation de l’inspecteur du travail mais après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s’il en existe. Application des règles de droit aux faits

À titre habituel, l’entreprise prévoit une durée hebdomadaire de travail à hauteur de 35 heures. L’accroissement de son activité l’incite à proposer puis à imposer des heures supplémentaires, c’est-à-dire toute heure effectuée au-delà de la

durée légale. Ce pouvoir de l’imposer étant discrétionnaire, M. Parcevald ne peut refuser de les accomplir. S’il s’y oppose, l’employeur est justifié à prononcer à son encontre une sanction disciplinaire. Lorsque l’employeur utilise les heures supplémentaires, cela ne doit pas avoir pour effet de dépasser la durée légale maximale autorisée. Ainsi la proposition faite à M. Parcevald, soit 3 heures supplémentaires par jour sur la semaine, fait passer la durée du travail hebdomadaire de 35 heures à 50 heures. Or le maximum autorisé en valeur absolue est de 48 heures par semaine. En l’absence de circonstances exceptionnelles, cette proposition est donc illégale. Enfin, M. Parcevald entend cumuler son emploi principal avec un poste d’enseignant à raison de 6 heures semaine. Ce cumul est possible puisqu’il respecte la durée maximale du travail (48 heures en valeur absolue et 44 heures par

semaine sur 12 semaines consécutives). Il réaliserait en effet 41 heures de travail hebdomadaire. En outre, il conviendra de vérifier qu’aucune clause d’exclusivité ne s’oppose à sa démarche. 4. Le cumul d’emploi

Règle de droit applicable

Le cumul d’emploi est possible sous respect des conditions suivantes :

- absence de clause contractuelle d’exclusivité interdisant tout autre travail salarié ; - exécution de bonne foi du contrat de travail ; - respect de la durée maximale de travail.

Application de la règle aux faits

Il ne semble pas en l’espèce qu’il existe des restrictions contractuelles au cumul d’emploi. D’autre part, la durée de travail hebdomadaire serait portée à 41 heures, ce qui est tout à fait licite. Le cumul est donc possible.

5. La preuve des heures supplémentaires

Au regard des faits soumis, deux questions se posent. D’une part, l’absence de consentement de l’employeur à la réalisation d’heures supplémentaires est-il de nature à invalider cette qualification ? D’autre part, quelles sont les modalités de preuve qui sont susceptibles d’être retenues ? Sur le premier point, une heure supplémentaire est une heure réalisée :

- au-delà de la durée légale de travail (soit, sur une référence hebdomadaire, la 36e heure) ;

- à la demande de l’employeur. La demande de l’employeur peut ne pas résulter de son consentement express. Ainsi, une approbation tacite peut être retenue. De même, lorsque l’employeur impose au salarié une surcharge de travail, les heures supplémentaires rendues nécessaires pour son accomplissement ne lui permettent pas de se réfugier derrière son absence d’assentiment pour en refuser le paiement (Cass. soc. 6 avril 2011). Sur le second point, et conformément au droit commun, la charge de la preuve d’un droit incombe à celui qui s’en prévaut. Le salarié doit donc établir la réalité des heures effectuées. Néanmoins, les tribunaux admettent, en considérant les difficultés qui peuvent survenir dans l’administration de la preuve, que celle-ci puisse résulter de la production de

simples écrits établis par le salarié (par exemple des tableaux hebdomadaires des horaires établis par le salarié – Cass. soc. 30 septembre 2010 – ou encore un décompte établi au crayon – Cass. soc. 24 novembre 2010). La charge de la preuve s’en trouve alors renversée et il appartient à l’employeur d’en rapporter la preuve contraire. À défaut, les éléments produits par le salarié sont suffisants pour étayer sa demande. Application de la règle

Mlle

GENIEVRE pourra produire son décompte heure par heure au titre de la preuve et l’employeur ne pourra faire valoir

son absence de consentement dans la mesure où il a lui-même confié à cette dernière une surcharge de travail rendant indispensable la réalisation d’heures supplémentaires.

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II – QUESTIONS DE COURS 1. L’aménagement du temps de travail

La loi du 20 août 2008 a facilité les possibilités d’aménagement du temps de travail dans un contexte de crise permettant ainsi aux entreprises d’adapter leur fonctionnement à des périodes de haute et basse activité. La loi du 8 août 2016 en a

réaménagé le mécanisme. Les principes de mise en place sont les suivants : Par voie conventionnelle Fonctionnement. Il est possible d’organiser la durée du travail sur des périodes hebdomadaires et au plus à l’année. Cette durée peut être portée à trois ans si un accord de branche l’autorise. L’accord doit mentionner :

- la période de référence. Si celle-ci est supérieure à un an, l’accord doit prévoir une durée hebdomadaire au-delà de laquelle les heures effectuées sont automatiquement des heures supplémentaires et rémunérées au terme du mois

au cours duquel elles ont été accomplies. Ces heures n’entrent alors pas dans le décompte opéré à l’issue de la période de référence ;

- le délai de prévenance concernant les changements de durée ou d’horaire de travail. À défaut d’indication, ce délai est de 7 jours

- les modalités de prise en compte des absences et retards pour la rémunération. Le calcul des heures supplémentaires. Lorsqu’un système d’aménagement du temps de travail est mis en place, le calcul des heures supplémentaires s’effectue à l’issue de la période de référence :

- si la période de référence est l’année, toute heure effectuée au-delà de 1607 heures est une heure

supplémentaire ; - si la période de référence est inférieure ou supérieure à un an, sont considérées comme heures supplémentaires

celles effectuées au-delà d’une durée moyenne hebdomadaire de 35 heures calculée sur la période de référence (3 ans par exemple) ;

- à noter que l’aménagement s’impose au salarié à temps complet et qu’il ne constitue pas une modification du contrat de travail (art. 3122-6 C.trav.).

À défaut d’accord collectif L’aménagement du temps de travail peut être organisé sur des périodes de neuf semaines au plus dans les entreprises de moins de 50 salariés et de quatre semaines dans les entreprises d’au moins cinquante salariés. L’employeur doit communiquer, pour avis, son programme indicatif au comité d’entreprise et à défaut aux délégués du personnel. Le mécanisme permet de ne pas avoir recours systématiquement aux heures supplémentaires et à permettre un lissage de la rémunération. Enfin, il ne constitue pas une modification du contrat de travail (Cass. soc.11 mai 2016). 2. Le forfait jour

Sa mise en place nécessite par principe un accord collectif. Il a pour objet de rémunérer un salarié en fonction d’un

nombre de jours (fixés dans la convention) travaillés sur l’année. Il est ouvert au cadre ainsi qu’aux salariés dont la durée du travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur travail. L’accord doit notamment déterminer les différents salariés admis au dispositif, le nombre de jours maximum travaillés – 218 jours – ainsi que les modalités de fonctionnement et d’organisation du travail. Dans l’hypothèse d’un dépassement du forfait, le salarié peut renoncer à une partie de ses congés et bénéficie d’une majoration de rémunération qui ne peut être inférieure à 10%. Dans l’hypothèse où la rémunération est sans rapport avec les tâches imposées, le salarié peut saisir le juge judiciaire aux fins d’obtenir une indemnité réparant le préjudice subi. À noter par ailleurs que la convention de forfait conclue entre l’employeur et le salarié doit impérativement fixer le

nombre de jours travaillés et non uniquement un maximum, à défaut, celle-ci n’est pas valable (Cass. soc. 16 mars 2016). En toute hypothèse, l’employeur doit veiller et s’assurer que la charge de travail est raisonnable et permet une bonne répartition de celle-ci dans le temps. L’accord l’instituant doit préciser les modalités de cette obligation ainsi que celles relatives au droit à la déconnexion. En l’absence de stipulations conventionnelles, un forfait jours peut être mis en place dans le respect des dispositions de l’article 3121-65 du code du travail.

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III – ÉTUDE DE DOCUMENT 1. Conditions auxquelles le temps de pause peut être considéré comme du travail effectif

Les salariés bénéficient obligatoirement d’un temps de pause de 20 minutes dès que le temps de travail atteint 6 heures. En cas de contestation, il revient à l’employeur de prouver qu’il s’est acquitté de son obligation. Ce temps, sauf accord plus favorable, ne fait pas l’objet d’une rémunération dans la mesure où le salarié peut vaquer librement à ses occupations. Il en va différemment dans certaines situations où la pause peut être considérée comme du travail effectif. Tel est le problème soumis à la cour de cassation concernant des agents de sécurité du Commissariat à l’énergie atomique.

Le temps nécessaire à la restauration ainsi que les temps consacrés aux pauses sont considérés comme du temps de travail effectif lorsque les critères définis à l’article L. 3121-1 sont réunis. C’est-à-dire si sur ce temps de pause le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles. C’est au regard de cette double condition que la pause peut être qualifiée juridiquement de travail effectif et être rémunérée comme tel. Dans les faits de l’espèce, la cour constate que les salariés étaient tenus de rester sur le lieu de travail dans des locaux déterminés imposés par l’employeur, peu important les conditions d’occupation de tels locaux, afin de répondre à toute nécessité d’intervention sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles. Par conséquent, la pause doit être considérée comme du travail effectif et faire l’objet d’une rémunération.

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TOUTE HEURE COMMENCÉE EST DUE

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

La rémunération : Stage, essai professionnel, fixation de la rémunération, égalité de rémunération, prime et usage d’entreprise, bulletin de paie, protection de la rémunération,

modalités de rémunération

I – CAS PRATIQUE 1. La rémunération des stages

Émilie a effectué un stage de 4 mois. Peut-elle exiger une rémunération ?

Règle de droit applicable

La loi du 24 novembre 2009, renforcée par la loi du 10 juillet 2014, prévoit le paiement obligatoire d’une gratification versée mensuellement dès lors que le stage a une durée supérieure à 2 mois. Son montant est déterminé par un accord de branche ou un accord étendu. En l’absence de prescription, son montant horaire est au moins égal (c’est un minimum) à 12,50% (15% à compter du 1

er septembre 2015) du plafond horaire de la sécurité sociale.

Application de la règle aux faits

Émilie doit en effet percevoir une gratification dans la mesure où son stage à une durée de 4 mois. 2. Rémunération de l’essai professionnel

Un employeur demande à Émilie d’effectuer un essai professionnel de 3 jours. Doit-il faire l’objet d’une rémunération ?

Règle de droit applicable

L’essai professionnel n’étant pas réglementé dans son principe, il en est de même pour sa rémunération. Il faudra donc se reporter aux textes collectifs qui peuvent prévoir que les périodes de test professionnel font l’objet d’une rémunération. À défaut, l’employeur peut de sa propre initiative envisager une indemnisation du candidat. Application de la règle aux faits

La convention collective ne prévoyant pas de rémunération pour l’essai professionnel, Émilie ne pourra exiger aucune rétribution.

3. Fixation de la rémunération

L’employeur d’Émilie lui propose une rémunération sur la base du SMIC. Celle-ci fait valoir que la convention collective prévoit une rémunération supérieure. Règle de droit applicable

Le principe de liberté Par principe, la fixation du salaire relève de la liberté contractuelle. Autrement dit, les parties fixent librement les modalités et le montant de la rémunération au moment de la conclusion du contrat de travail.

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Les limites Les minima conventionnels Les employeurs soumis à une convention ou un accord collectifs doivent observer les taux minima de salaires fixés par l’accord en fonction de la classification du salarié dans l’échelle des rémunérations. En outre, la loi impose une négociation annuelle sur les salaires entre les partenaires sociaux. Les minima établis s’imposent à l’employeur sous peine de sanctions pénales.

Le SMIC Le salaire minimum de croissance (SMIC) correspond à la rémunération horaire minimale en dessous de laquelle il est interdit de rémunérer un salarié (sauf exceptions). SMIC assure aux salariés une garantie de leur pouvoir d’achat et une participation au développement économique de la Nation. Il s’applique à l’ensemble des salariés du secteur privé âgés de 18 ans au moins. Sa violation est punie d’une contravention de 5

e classe (amende de 1 500 euros).

Application de la règle aux faits

Si le montant de la rémunération peut être librement débattu entre Émilie et son employeur, elle ne peut être inférieure à

celle prévue par la convention collective. Son employeur devra impérativement l’appliquer. 4. À travail égal, salaire égal

M. Monzac, a été embauché pour un poste identique à celui d’Émilie, mais avec une rémunération bien supérieure. Règle de droit applicable

L’article L. 1132-1 du Code du travail interdit d’établir toute discrimination « notamment salariale » en raison de l’origine,

du sexe, des mœurs, de l’orientation sexuelle, de l’âge, de la situation de famille ou de la grossesse, des caractéristiques génétiques, de l’appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, des opinions politiques, des activités syndicales ou mutualistes, des convictions religieuses, de l’apparence physique, du nom de famille ou en raison de l’état de santé ou du handicap. Partant, la cour de cassation en a étendu l’application pour ériger en principe fondamental autonome l’égalité de rémunération entre salariés effectuant un travail identique et placés dans des conditions professionnelles de même nature. Néanmoins, un traitement différent reste possible à condition d’apporter la preuve d’éléments objectifs pouvant justifier

une différence de rémunération. Dans un arrêt du 17 mars 2010, la cour de cassation a ainsi retenu que « des diplômes utiles à l’exercice des fonctions occupées, sanctionnant des formations professionnelles de niveaux et durées inégales, constituent une raison objective et pertinente justifiant la différence de rémunération ». Dans un arrêt en date 11 janvier 2011, la cour est venue préciser son approche en indiquant qu’une différence de diplôme ne justifie une différence de traitement que s’il est démontré l’utilité particulière des connaissances acquises au regard des fonctions exercées. Par ailleurs, le salarié ne peut invoquer la comparaison de sa situation avec des non salariés (Cass. soc. 16 décembre 2015), mais les salariés qui effectuent un travail identique peuvent être rémunérés différemment lorsqu’ils exercent sur des zones géographiques où le coût de la vie n’est pas le même (Cass. Soc. 8 mars

2017). De même, l’employeur ne peut justifier une différence de rémunération en se fondant sur la seule application de dispositions conventionnelles différentes auxquelles les salariés sont assujettis (Cass. soc. 4 décembre 2013).

Application de la règle aux faits

Les critères de l’ancienneté et des diplômes sont de nature à justifier une différence de rémunération entre M. Monzac et Émilie uniquement si les tâches auxquelles ils sont affectés font ressortir la nécessité de connaissances particulières

sanctionnées par un diplôme différent. L’identité des fonctions ne semble pas pouvoir justifier une différence de rémunération justifiée par les diplômes. La sujétion des deux salariés a des conventions collectives différentes ne sera pas non plus suffisante pour justifier cette disparité de rémunération, sauf si cette différence de traitement repose sur des raisons objectives, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

5. Le versement d’une prime de 13e mois

Mlle

Star apprend en discutant avec ses collègues qu’ils perçoivent tous les ans, et ce depuis leur embauche, une prime d’un montant équivalent à un 13

e mois.

Règle de droit applicable

Les primes ont un caractère obligatoire si elles sont prévues par la convention collective, le contrat de travail ou si elles résultent d’un usage de l’entreprise. Dans ce dernier cas, l’usage a un caractère contraignant dès lors qu’il peut être établit par celui qui l’invoque les caractères suivants :

- caractère de fixité ;

- caractère de constance ;

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- caractère de généralité. La remise en cause d’un usage doit être précédée d'un préavis suffisant pour permettre des négociations et être notifiée aux représentants du personnel et à tous les salariés individuellement s'il s'agit d'une disposition qui leur profite (Cass. soc.28 janvier 2015). Application de la règle aux faits

La prime de 13e mois n’est versée aux salariés ni en vertu de leur contrat, ni en vertu d’un accord ou d’une convention

collective. Elle répond donc à un usage de l’entreprise. La fixité correspond au montant de la prime (elle est toujours égale à un 13

e mois de salaire), la constance est établit par la régularité du versement (tous les ans) et la généralité

suppose, ce qui est le cas, que tous les salariés, ou ceux d’un même service, la perçoivent. Mlle

STAR est donc en droit de la demander. 6. La proratisation de la prime en cas de démission du salarié

Une salariée décide de démissionner six mois après son embauche. Elle demande à ce que son treizième mois soit

proratisé. Règle de droit applicable

Lorsque le contrat de travail prévoit que la rémunération annuelle est égale à 13 fois le salaire mensuel, le salarié dont le contrat est rompu à son initiative ou à celle de l’employeur a droit à une proratisation de son 13

e mois (Cass. soc. 28

octobre 2009).

Application de la règle aux faits

La salariée obtiendra gain de cause puisque sa rémunération annuelle est fixée sur 13 mois.

II – QUESTION DE COURS 1. Le bulletin de paie et la preuve du versement du salaire

Le bulletin de paie est obligatoirement remis par l’employeur lors de la paie. L’inobservation régulière de cette obligation peut entraîner une amende pénale et le versement de dommages intérêts. Le bulletin de paie, si la loi ne prévoit pas de forme particulière, doit néanmoins contenir certaines mentions obligatoires :

- les renseignements relatifs à l’employeur tels que nom, adresse, numéro d’immatriculation, code APE, numéro Siret ;

- les renseignements relatifs au salarié tels que nom, emploi occupé, position dans la classification de la convention collective ;

- la convention collective applicable éventuellement ;

- l’URSSAF auprès de laquelle les cotisations sont versées ; - la rémunération brute et les éléments de calcul de celle-ci (nombre d’heures de travail, heures supplémentaires,

accessoires du salaire soumis à cotisations) ; - les prélèvements sociaux et fiscaux : CRDS, CSG, cotisations salariales ; - les sommes non soumises à cotisations (indemnités professionnelles) ; - le montant de la somme effectivement perçue par le salarié (mention « net à payer ») ; - la date du paiement du net à payer ; - la formule relative à l’obligation de conservation par le salarié, du bulletin de paie sans limitation de durée.

Dans un souci de simplification du bulletin de paie, le législateur autorise désormais l’employeur à regrouper en 6 rubriques les informations relatives aux prélèvements sociaux et fiscaux. De même, L’employeur peut supprimer les lignes relatives aux cotisations patronales de sécurité sociale. Enfin, le bulletin de paie peut être contesté par le salarié pendant une durée de 5 ans. En cas de contestation relative au versement du salaire prévu contractuellement, il appartient à l’employeur de prouver le contraire en produisant des extraits de comptes bancaires de la société et des pièces comptables originales (Cass

soc. 18 juin 2015). Une liste de chèque émis au nom du salarié ne correspondant pas au salaire net de ce dernier est insuffisante pour établir le versement du salaire. De même, la seule remise de chèques à l'ordre du salarié n’est libératoire que sous réserve d'encaissement effectif qu'il appartient à l'employeur d'établir (Cass. soc. 18 juin 2015).

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2. La protection de la rémunération

La protection contre les créanciers de l’entreprise Lorsque l’entreprise est en difficulté et qu’il est nécessaire de procéder à sa liquidation, les salariés bénéficient d’un privilège particulier garantissant le paiement de leurs créances salariales. On distingue ainsi :

- le privilège général : le salarié arrive au 5e rang des créanciers pour le paiement des 6 derniers mois de travail ;

- le superprivilège : Le salarié arrive ici au 1er

rang des créanciers. Il lui garantit le paiement des 60 derniers jours de

travail et des indemnités de congés payés en cas de liquidation ; - le fond de garantie des salaires (Géré par l’AGS) : fond de garantie auquel l’employeur doit cotiser et qui assure le

paiement des salaires (mécanismes de l’assurance) en cas de redressement ou de liquidation judiciaire. La protection contre les créanciers du salarié La saisie sur salaire est une forme de saisie attribution qui relève de la compétence du juge d’instance du lieu de résidence du débiteur. Le créancier doit posséder un titre exécutoire puis saisir le juge par simple lettre ou déclaration au greffe du tribunal. À

l’issue d’une audience de conciliation obligatoire, le juge, en l’absence de solution amiable, peut rendre une ordonnance de saisie sur rémunération. Seule une fraction des sommes qui ont le caractère de salaires est saisissable. Cette fraction est d’autant plus élevée que le salaire est important.

III – ÉTUDE DE DOCUMENT

1. Objet du contentieux

Le contentieux opposant les parties est relatif à la rémunération des salariés. En effet, la rémunération, bien que librement discutée à l’embauche, ne peut se situer en dessous des minima conventionnels ou du SMIC. Or les salariés de Carrefour perçoivent une rémunération globale composée, d’une part, d’une prime relative au temps de pause et, d’autre part, relative à leur temps de travail effectif, l’ensemble permettant d’atteindre le SMIC. Ces derniers en contestent le bien-fondé, estimant que c’est la rémunération du travail effectif qui doit être prise en compte pour en apprécier la licéité.

2. Solution de la cour de cassation

La cour de cassation, dans un premier temps, considère au regard des faits qui lui sont soumis, que durant leur pause les salariés peuvent vaquer librement à leurs occupations personnelles et par conséquent que ce temps ne peut être assimilé à un temps de travail effectif. Elle en déduit logiquement, dans un second temps, que seul le temps de travail effectif et sa rémunération sont susceptibles d’être comparés au SMIC. Dès lors, il convient de constater que la rémunération perçue est inférieure au minimum légal, ce qui constitue une infraction pénale et ouvre la possibilité aux salariés de demander le paiement des sommes manquantes.

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LES SARDINES

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Les congés et repos : Droit aux congés payés, congés payés et maladie, fractionnement et prise des congés payés, repos dominical, congés pour création d’entreprise, congé paternité, PUCE

I – CAS PRATIQUE

1. Détermination des droits à congés payés

Mlle

Stipper, salariée de la SA HERBU, cumule de nombreux jours d’absence pour maladie et formation. Son employeur entend les déduire de ses congés payés. Comment détermine-t-on le nombre de jours de congés payés et la manière dont ils peuvent être pris ?

Règles de droit applicables

Le calcul du droit aux congés payés Tout salarié a droit chaque année à un congé payé à la charge de l’employeur. Le salarié a droit à 2 jours 1/2 de congés par mois de travail effectif, c’est-à-dire 30 jours ouvrables maximum (tous les jours de la semaine à l'exception du jour de repos hebdomadaire légal et des jours reconnus fériés par la loi et habituellement non travaillés dans l'entreprise) de congés payés pour une année complète de travail sur la période de

référence. Cette période est fixée par accord collectif, à défaut, par décret. Le nombre de jours de congés payés peut être majoré par accord collectif en raison de l’âge ou de l’ancienneté. La majoration est de droit pour les salariés de plus ou moins 21 ans (dans le cas général) qui acquièrent 2 jours de congés supplémentaires par enfant à charge dans la limite de 30 jours ouvrables Par principe, le salarié absent n’acquiert pas de droit. Néanmoins, sont prises en compte dans le calcul des droits certaines absences (c’est-à-dire assimilées à du travail effectif), comme les périodes de congés payés, les contreparties obligatoires en repos (prévus par l’article L. 3121-26 du Code du travail), les périodes de congés de maternité et d’adoption, les périodes d’arrêt de travail pour maladie professionnelle ou accident du travail (dans la limite d’une durée ininterrompue d’un an), la journée d’appel de préparation à la défense, les périodes de congé de formation, les périodes

assimilées conventionnellement à ces situations. D’autres absences ne sont pas prises en compte (notamment les congés maladie non rémunérés, le congé paternité, l’absence pour maladie ou accident non professionnels, les jours de grève…). Dès lors le décompte en jours ouvrables des congés sur la période de référence s’effectue suivant la règle la plus favorable au salarié, soit :

- décompte par mois de travail effectif : 2 jours 1/2 de congés ; - décompte en semaines : 4 semaines de travail ouvrent droit à 2 jours 1/2 de congés ;

- décompte en jours : octroi de 2 jours 1/2 de congés pour une période de 24 jours de travail (horaire sur 6 jours) ou 22 jours (horaire sur 5 jours 1/2) ou 20 jours (horaire sur 5 jours).

Application de la règle aux faits

Mme

Stipper cumule 2,5 jours ouvrables de congés payés par mois de travail effectif ou assimilé. Les droits sont donc calculés mois par mois et sont fonction du travail effectif réalisé ou de celui considéré comme tel. La rigueur de cette disposition est atténuée par la règle des équivalences. En effet, le salarié à droit à l’intégralité de ses congés payés s’il justifie avoir travaillé au cours de l’année (par exemple) :

- 48 semaines sur 52 ; - 12 fois 24 jours ouvrables ; - 288 jours ouvrables même s’ils sont discontinus ;

- 12 fois 4 semaines. En l’occurrence, les absences pour maladie non professionnelle de M

lle Stipper ne sont pas considérées comme du

travail effectif et peuvent avoir un effet sur ses droits. Mais les 23 jours considérés n’auront aucune conséquence en matière de calcul des congés payés dans la mesure où la salariée peut justifier d’une durée du travail annuelle de 12 fois 24 jours ouvrables. En ce qui concerne la période de formation, les actions qui sont réalisées conformément aux obligations de l’employeur d’assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail constituent du temps de travail effectif et sont rémunérées comme telles.

Là encore, l’employeur ne peut en tenir compte dans le calcul des congés payés.

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2. Les congés supplémentaires pour fractionnement

Mlle

Stipper demande à bénéficier de jours supplémentaires en raison du fractionnement de son congé principal.

Règle de droit applicable

La répartition des congés Elle doit respecter les règles suivantes :

- un maximum de 24 jours ouvrables peut être pris d’affilée (la 5e semaine doit être donnée à part, sauf dans

certaines hypothèses, par exemple pour les salariés justifiant de contraintes géographiques particulières) ; - un congé de 12 jours ouvrables doit être pris en continu dans la période du 1

er mai au 31 octobre. Un accord

collectif peut prévoir une période différente, mais qui en toute hypothèse doit comprendre la période ci-dessus ; - un congé de 12 jours ouvrables peut être fractionné par l'employeur avec l'accord du salarié (sans son accord s'il

s'agit d'une fermeture de l'entreprise). Dans ce cas, 12 jours de congés doivent être pris en continu entre deux repos hebdomadaires entre le 1

er mai et le 31 octobre, sauf accord collectif permettant la prise de tout ou partie de

ces 12 jours en dehors de cette période. Le fractionnement Le fractionnement consiste à prendre une partie de ses congés (au-delà des 12 jours impératifs) en dehors de la période du 1

er mai au 31 octobre. Il ouvre droit à des jours de congés supplémentaires.

Un accord collectif (établissement, entreprise, branche) peut fixer les modalités de fractionnement, à défaut, lorsqu'une partie du congé (12 jours sur 24) est prise en dehors de la période du 1

er mai-31 octobre de nouveaux droits sont

ouverts : - si le salarié prend, en dehors de cette période, entre 3 et 5 jours de congés, il lui est dû un jour ouvrable

supplémentaire ; - s'il prend 6 jours et plus, il lui est dû 2 jours ouvrables supplémentaires.

Employeurs et salariés peuvent toutefois déroger à cette règle soit après accord individuel du salarié, soit par convention collective ou accord collectif d'entreprise. L'employeur peut alors autoriser le fractionnement des congés en le subordonnant à une renonciation du congé supplémentaire. Il n'y a pas de jour supplémentaire dû pour fractionnement de la 5

e semaine, ni même, bien sûr, lorsque les congés sont

pris en dehors de la période le justifiant (Cass. Soc. 11 juillet 2007).

Par contre le droit à congé supplémentaire est de droit, c’est-à-dire qu’il naît du seul fractionnement du congé principal. Par conséquent, son renoncement ne peut être tacite, il doit résulter d’une manifestation explicite du salarié de renoncer à son droit. De fait, la simple information de l’employeur tendant à considérer que tout congé pris en dehors de la période de référence emporte renonciation au bénéfice des jours supplémentaires de fractionnement, n’a pas de valeur au regard des droits ouverts (Cass. soc. 13 décembre 2006).

Application des règles de droit aux faits

Les droits aux congés supplémentaires naissent du seul fait du fractionnement du congé principal, à condition qu’il soit pris en dehors de la période courant du 1

er mai au 31 octobre. Dès lors le renoncement à un droit acquis ne peut se

présumer et l’employeur ne peut se satisfaire d’un courrier envoyé à Mlle

Stipper. Cette dernière bénéficiera donc des congés supplémentaires acquis pour fractionnement du congé principal.

3. La prise des congés payés

Hubert Legrand a sollicité l’employeur a plusieurs reprises sur la possibilité de prendre ses congés du 17 juillet au 5 août. En l’absence de réponse de l’employeur, Hubert a confié à M

lle Stipper qu’il partirait sur cette période estimant

avoir loyalement agit. Le salarié est-il autorisé à ses substituer à l’employeur pour la fixation des dates de départ en congés en cas de défaillance de ce dernier ?

Règle de droit applicable

En l’absence de dispositions conventionnelles ou d’usage, l’ordre des départs en congé est fixé par l’employeur après avis des représentants du personnel (C. Trav. L3141-14). Il doit être communiqué par l’employeur au personnel deux mois avant l’ouverture de cette période (Code Trav. D3141-5) et communiqué « à chaque ayant droit quinze jours à l’avance ». Une fois posée, la date s’impose et ne peut être modifiée ni par l’employeur ni par le salarié. L’employeur doit prendre en compte la situation de famille des salariés. Ainsi, les conjoints et les personnes liées par un pacte civil de solidarité (PACS) qui travaillent dans la même entreprise ont droit à un congé simultané. À défaut de directive de l’employeur, le salarié n’est pas admis à se substituer à celui-ci et ne peut unilatéralement

disposer des dates de congés le concernant. Un tel comportement peut être qualifié de fautif justifiant un licenciement (Cass. soc.16 juin 2010. Néanmoins, la faute grave ne peut être retenue dès lors que les fautes sont partagées (Cass. soc. 11 juillet 2007).

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Application des règles de droit aux faits

Le planning des congés relève du pouvoir de direction de l’employeur. D’autre part, les salariés ne peuvent s’absenter de leur lieu de travail sans autorisation de l’employeur sous peine de voir leur comportement qualifié d’abandon de poste. Si l’un manque à ses obligations, cela peut-il justifier la faute de l’autre ? Non, bien sûr. Ainsi le comportement d’Hubert Legrand pourrait justifier une sanction disciplinaire, ou constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, mais non une faute grave, les torts étant partagés (Cass. soc. 11 juillet 2007). Il faut donc déconseiller vivement à M.

Legrand de poursuivre dans cette voie. 4. Indemnisation des congés payés non pris

M. Pel n’a pu prendre la totalité des congés auxquels il avait droit en raison du refus de l’employeur de les lui accorder. Il demande soit une indemnisation des congés non pris, soit un report de ces derniers. Règle de droit applicable

Il appartient à l’employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d’exercer effectivement son

droit à congé et, en cas de contestation, de justifier qu’il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement. Il ne peut se soustraire a son obligation par le versement d’une indemnité de congés payés (Cass. soc. 13 juin 2012 ; Cass. soc. 12 février 2014). Les congés payés non pris peuvent cependant être reportés dans les hypothèses suivantes :

Report au titre de dispositions légales Dans le cadre d’un congé pour création d’entreprise, les congés payés acquis et non pris au-delà des 24 jours ouvrables peuvent être reportés dans des conditions fixées par accord collectif.

À défaut, ils peuvent être reportés à la demande du salarié sur six années au maximum selon les modalités suivantes : - en cas de renonciation aux congés, ces derniers sont rajoutés aux congés annuels par fraction de six jours ; - une indemnité est versée au salarié pour l’ensemble des congés non pris à l’occasion de son départ en congés ; - en cas de rupture du contrat de travail, le salarié bénéficie d’une indemnité équivalente aux congés reportés.

Pour les salariés dont le décompte de la durée du travail est effectué à l’année, il est possible, selon les modalités définies par accord collectif, de reporter les congés payés non pris. Enfin, sous certaines conditions, les congés non pris peuvent être portés sur le compte épargne temps.

Report hors dispositions légales En dehors des hypothèses ci-dessus énumérées, le report peut s’effectuer par accord de l’employeur et du salarié. L’employeur n’est ainsi pas tenu de faire droit à la demande du salarié. Par contre, si les congés n’ont pu être pris du fait de l’employeur, le salarié doit être indemnisé. Application de la règle

En l’espèce, il apparaît que M. Pel a formulé à plusieurs reprises une demande de prise de congés payés systématiquement refusée par l’employeur sans que celui-ci ne lui propose de dates ou de périodes pour les poser. Le

report des congés ne peut résulter des dispositions légales, il peut néanmoins le proposer à l’employeur. Par contre, l’impossibilité de prendre les congés payés résulte du fait de l’employeur, ce qui autorise M. Pel à en demander l’indemnisation. 5. La suspension du repos dominical

En raison de travaux urgents relatifs à la sécurité des lieux, la SA HERBU a suspendu le repos dominical de trois salariés.

Règle de droit applicable

Si la durée maximale quotidienne de travail est de 10 heures, les salariés bénéficient d’un repos quotidien d’une durée minimale de onze heures consécutives. Cette durée s’ajoute à un repos hebdomadaire de vingt-quatre heures consécutives minimum, ce qui fait 35 heures de repos ininterrompu. Un employeur ne peut occuper un salarié plus de six jours par semaine. Le Code du travail précise qu’un jour de repos hebdomadaire d’une durée minimale de 24 heures doit être respecté et donné le dimanche dans l’intérêt des salariés. La loi prévoit des exceptions au principe dans des cas limitativement énumérés :

- en cas de travaux urgents dont l’exécution immédiate est nécessaire pour organiser des mesures de sauvetage, pour prévenir des accidents imminents ou réparer des accidents survenus au matériel, aux installations ou aux bâtiments de l’établissement ;

- dans certaines industries traitant des matières périssables ou soumises à certains moments à un surcroît extraordinaire de travail ;

- pour les travaux de chargement et de déchargement dans les ports, débarcadères et stations ; - en cas d’activités saisonnières ;

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- en cas de travaux de nettoyage des locaux industriels et de maintenance qui doivent être réalisés nécessairement le jour de repos collectif et qui sont indispensables pour éviter un retard dans la reprise normale du travail ;

- en cas de travaux intéressant la défense nationale ; - dans les établissements industriels fonctionnant en continu ; - pour les gardiens et concierges des établissements industriels et commerciaux.

Application de la règle aux faits

Le motif de sécurité invoqué par l’employeur est de nature à justifier la suspension du repos hebdomadaire. Néanmoins, cette mesure ne doit pas avoir pour effet de priver le salarié de son repos un autre jour.

II – QUESTIONS DE COURS 1. Congé et période de travail à temps partiel pour la création ou la reprise d’entreprise

Principe Ce congé, ou l’exercice d’un travail à temps partiel, est destiné à tout salarié justifiant d’une ancienneté suffisante dont le projet est de créer ou reprendre une entreprise, individuelle ou en société, qu'elle soit industrielle, commerciale,

artisanale ou agricole. Ces modalités sont aussi ouvertes au salarié occupant des fonctions de direction au sein d’une jeune entreprise innovante. Un accord collectif détermine sa durée et son renouvellement, dans le cas contraire sa durée est de 1 an renouvelable une fois. Procédure Le salarié doit en faire la demande à l'employeur dans des conditions fixées par décret à défaut de dispositions collectives. Elle doit préciser la date de départ prévue, la durée du congé, et l'activité de l'entreprise. L’employeur peut :

- soit refuser le congé ou la mise à temps partiel. Dans les entreprises de moins de 300 salariés, si l'absence du salarié peut avoir des conséquences préjudiciables pour l'entreprise ou s’il a bénéficié du même congé il y a moins de 3 ans, l'employeur, après avis du CE ou des DP, peut rejeter la demande du salarié ;

- soit différer le congé s’il aurait pour effet de porter l’effectif de salariés simultanément absents ou le nombre de jours d’absence au titre de ce congé et au titre du congé sabbatique à un niveau excessif au regard, respectivement, de l’effectif total et du nombre de jours travaillés dans l’entreprise (seuils fixés par décret à défaut de dispositions collectives) ;

- soit différer le début du temps partiel dans les entreprises d’au moins trois cents salariés, lorsque celle-ci aurait

pour effet de porter l’effectif de salariés employés simultanément à temps partiel à un niveau excessif au regard de l’effectif total de l’entreprise (seuils fixés par décret à défaut de dispositions collectives).

Issue du congé Avant le terme de son congé, le salarié doit informer l’employeur de son intention :

- soit de réintégrer l’entreprise, auquel cas il retrouve son emploi ou un emploi identique et sa rémunération ; - soit de quitter l’entreprise, auquel cas le préavis n’est pas à effectuer.

2. Le repos dominical

La loi Macron modifie le champ des dérogations au repos dominical, la durée des autorisations préfectorales et les éventuelles compensations tel que suit : Dérogation de plein droit Comme auparavant, en certaines circonstances, il peut être dérogé de plein droit, c’est-à-dire sans autorisation administrative, au repos dominical (art. 3132-12). Il en est ainsi dans les établissements dont l’activité exclusive ou principale est la vente de denrées alimentaires au détail. La loi nouvelle précise que lorsque ces établissements ont

une surface de vente supérieure à 400 m2, les salariés privés du repos dominical bénéficient d’une rémunération

majorée d’au moins 30% par rapport à la rémunération normalement due pour une durée équivalente. Autres dérogations sur autorisation préfectorale Lorsqu'il est établi que le repos simultané, le dimanche, de tous les salariés d'un établissement serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de cet établissement, le préfet peut autoriser pour une durée de trois ans le repos des salariés selon l’une des modalités prévues à l’article 3132-20 (un autre jour que le dimanche à tous les salariés de l'établissement, du dimanche midi au lundi midi, le dimanche après-midi avec un repos

compensateur d'une journée par roulement et par quinzaine, par roulement à tout ou partie des salariés). La mise en place (autorisation préfectorale accordée au vu d’un accord collectif ou d’une décision unilatérale de l’employeur), les droits des salariés (rémunération supplémentaire, repos compensateur…) et les modalités de son

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application (prise en compte de la situation personnelle du salarié, priorité d’emploi sur des postes ne nécessitant pas un travail le dimanche…) restent inchangés. Autres dérogations sur un fondement géographique

Principe La loi crée une nouvelle rubrique de dérogations sur un fondement géographique pour lesquelles il est possible de donner le repos hebdomadaire par roulement pour tout ou partie du personnel (art 3132-24 à 3132-25-1). Sont

concernés les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services et qui sont situés dans :

- les zones touristiques internationales (ces zones sont délimitées par les ministres chargés du travail, du tourisme et du commerce) ;

- les zones touristiques et certaines gares caractérisées par une affluence particulièrement importante (ces zones intègrent de plein les droit les anciennement « communes d’intérêt touristique ou thermales » et les « zones touristiques d’affluence exceptionnelle »). La liste des gares sera fixée par arrêté ministériel ;

- les zones commerciales caractérisées par une offre commerciale et une demande potentielle particulièrement importantes, le cas échéant en tenant compte de la proximité immédiate d'une zone frontalière. Ces zones

intègrent de plein droit les anciens PUCE.

Délimitation des zones et mise en place du travail le dimanche La délimitation des zones touristiques internationales a été fixée par douze arrêtés du 25 septembre 2015. En ce qui concerne les zones touristiques et commerciales, celles-ci sont fixées par arrêté du préfet de région sur demande du maire concerné ou après consultations des maires concernés. D’autre part, la mise en place du travail le dimanche au sein de ces zones ne peut intervenir que s’il existe un accord de branche, de groupe, d’entreprise ou d’établissement couvrant les entreprises concernées. Ces accords doivent préciser

les contreparties accordées aux salariés, les dispositifs permettant de concilier le travail le dimanche et la vie personnelle ainsi que les conditions dans lesquelles sera pris en compte le changement d’avis du salarié privé du repos dominical. Autres dérogations sur décision du maire La loi étend le nombre de dimanches auxquels il peut être dérogé par décision du maire à compter de 2016 (art. 3132-26). Ainsi, dans les commerces de détail, le repos dominical peut être supprimé dans la limite de douze dimanches par an, par décision du maire prise après avis du conseil municipal. Les salariés concernés perçoivent une

rémunération au moins égale au double de la rémunération normalement due pour une durée équivalente, ainsi qu'un repos compensateur équivalent en temps.

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III – ÉTUDE DE DOCUMENT

1. Résumé des faits et de la procédure

M. X a été engagé en qualité d’ouvrier agricole, le 1er

avril 1982. Victime d’un accident du travail, son contrat est alors suspendu. Il est ensuite licencié pour inaptitude physique sans possibilité de reclassement. Il sollicite auprès du conseil de Prud’hommes le versement d’indemnités, notamment liées aux congés payés.

La juridiction du premier degré ainsi que la cour d’appel accueillent sa demande pour la période de maladie professionnelle et la rejettent pour celle couvrant une période de maladie non professionnelle. M. X. forme un pourvoi en cassation. La haute cour, par un arrêt en date du 13 mars 2013, confirme la décision de la cour d’appel en ce qui concerne la demande relative à la période de maladie non professionnelle. 2. Apport de cet arrêt au regard de la constitution des droits à congés payés

La décision de la cour de cassation se situe dans le prolongement des dispositions du droit européen et de la résistance opérée par les juridictions françaises. En effet, la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 ont érigé en principe du droit social le droit à congés payés. Ce principe a été rappelé à plusieurs reprises (CJUE 22 nov. 2011 ; CJUE 24 janv. 2012) et amené la cour de cassation à infléchir sa position au regard du droit national en ce qui concerne le droit au report des congés payés en cas d’accident ou de maladie professionnels ou non (Cass. 3 février 2010). Qu’en est-il cependant de l’acquisition des droits à congés payés en cas de suspension du contrat de travail pour maladie et accident professionnels ou non ? La directive européenne ne fait pas de distinction en la matière, par contre le code du

travail (art. 3141-5 C. Trav) assimile à du travail effectif les périodes d’accident ou de maladie professionnels, mais non la maladie non professionnelle. De fait, le temps de suspension du contrat lorsque la maladie ne trouve pas son origine dans l’exécution du contrat de travail n’est pas pris en compte pour le calcul des droits à congés payés. Dès lors, la cour de cassation indique que la directive précitée ne permet pas d’écarter les dispositions du droit national et confirme la position de la cour d’appel.

Cette position se trouve donc en contradiction avec le droit de l’union européenne, même si au demeurant une directive n’a pas d’effet direct en droit interne. Il faut en effet que cette dernière fasse l’objet d’une transposition dans le droit national. Néanmoins, c’est sur le terrain de l’absence de transposition qu’un salarié a saisi le tribunal administratif aux fins de faire

condamner l’État français pour le préjudice subi. Le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, par jugement en date du 6 avril 2016, a condamné l’État français à indemniser le salarié à hauteur des quatre semaines visées par la directive, mais non de la totalité des congés qu’il avait acquis. Il faut désormais attendre une transposition en droit interne, sauf à engager de manière récurrente la responsabilité de l’État.

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LES ÉTUDES

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

La formation : Formation et congés payés, plan de formation d’entreprise, VAE, DIF, rémunération et formation, CIF

I – CAS PRATIQUE 1. Formation et congés payés

M. Henri a bénéficié d’un congé individuel de formation assuré par l’université. Licencié l’année suivante, il demande à

l’employeur le paiement des congés payés non pris au cours de sa période de formation. Le temps du congé individuel de formation comprend-t-il les congés payés du salarié ? Règles de droit applicables

Le congé individuel de formation est définit par l’article L 6322-1 al 1 du code du travail, qui dispose « Le congé de formation a pour objet de permettre à tout travailleur, au cours de sa vie professionnelle, de suivre à son initiative, et à titre individuel, des actions de formation, indépendamment de sa participation aux stages compris dans le plan de formation de l’entreprise dans laquelle il exerce son activité ».

La durée de principe du congé est de un an lorsqu’il est à temps plein ou de 1 200 heures s’il est effectué par alternance. Pendant le congé, le salarié continue à bénéficier des droits que son statut lui offre. Ainsi le congé de formation ne peut être imputé sur la durée du congé payé annuel acquis pour la période de référence, de même que la durée du congé formation est assimilée à du temps de travail pour la détermination du droit à congés payés annuels. Application des règles de droit aux faits

La durée du congé étant considérée comme du travail effectif, les droits à congés payés sont ouverts comme si le salarié

avait été à son poste de travail. L’entreprise EXPERT n’est pas donc pas fondée à déduire des congés payés de M. Henri les 9 semaines de vacances universitaires et ce dernier peut légitimement en demander judiciairement le paiement (en ce sens Cass. soc. 7 mars 2007). 2. Actions de formation dans le cadre d’un Plan de Formation d’Entreprise et rémunération

L’entreprise EXPERT a décidé de mettre en place un plan de formation d’entreprise.

Quels types d’actions sont envisageables dans un plan de formation d’entreprise ? Tous les salariés peuvent-ils en bénéficier et seront-ils rémunérés ? Règle de droit applicable

L’employeur a une obligation générale d’adaptation des salariés à leur poste de travail. Il doit s’assurer du maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations.

Par contre, la mise en place d’un plan de formation relève du pouvoir général de direction de l’employeur. Aucune obligation légale n’impose sa mise en place. Il est par principe ouvert à tous les salariés de l’entreprise, mais l’employeur, en vertu de la politique de formation qu’il entend mettre en œuvre, peut choisir librement les salariés qui en bénéficieront sous réserve que son choix ne s’opère pas sur des motifs discriminatoires. Considérant l’obligation générale de l’employeur, le plan peut prévoir tout type d’action telles qu’un bilan de compétences ou une validation des acquis de l’expérience (VAE), ayant pour finalité l’adaptation au poste de travail, le développement des compétences ou encore le maintien dans l’emploi.

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Du type d’action dépend la rémunération du salarié :

- les actions d’adaptation au poste de travail et celles liées à l’évolution des emplois et le maintien dans l’emploi sont obligatoirement réalisées pendant le temps de travail et par conséquent sont considérées comme du temps de travail effectif. Elles donnent lieu au maintien de la rémunération ;

- les actions de développement des compétences peuvent réalisées dans ou hors du temps de travail. Dans le premier cas, elles donnent lieu au maintien de la rémunération ; dans le second cas, elles donnent lieu au versement par l’employeur d’une allocation de formation égale à 50% de la rémunération nette de référence du salarié.

Application de la règle aux faits

L’employeur doit considérer non seulement son obligation légale, mais aussi sa capacité à rester concurrentiel en développant les compétences de ses salariés ou encore les conséquences en l’absence de formation en cas de licenciement économique. 3. La VAE

Deux salariés, entrés il y a 15 ans dans l’entreprise, ont acquis une indéniable maîtrise de leur poste. Ils estiment ainsi qu’ils ont acquis des qualifications qu’ils n’avaient pas auparavant.

Quelles sont les caractéristiques de la validation des acquis de l’expérience ? Règle de droit applicable

La VAE est un droit dont peuvent bénéficier tous les salariés sous condition d’une expérience professionnelle d’un minimum de trois années en rapport avec la certification envisagée. Elle peut viser l’obtention d’un diplôme, d’un titre à vocation professionnelle ou encore d’un certificat de qualification. La VAE peut être organisée dans le cadre du plan de formation de l’entreprise ou faire l’objet d’un congé spécifique. Le salarié constitue un dossier présenté à un jury qui délivre ou non le diplôme ou titre poursuivi.

Application de la règle aux faits

Les deux salariés valident la condition d’expérience et peuvent s’orienter vers une VAE. Celle-ci leur permettra de faire reconnaître leur compétence. 4. L’entretien annuel

Les salariés concernés par la VAE souhaiteraient avoir un entretien avec l’employeur sur leur perspective de carrière.

Règle de droit applicable

La loi du 5 mars 2014 a crée en complément de l’entretien annuel d’évaluation, un entretien professionnel tous les deux ans, consacré aux perspectives d’évolution professionnelle des salariés, notamment en termes de qualifications et d’emploi. Cet entretien ne porte pas sur l’évaluation du travail du salarié. Cet entretien professionnel donne lieu à la rédaction d’un document dont une copie est remise au salarié. D’autre part, tous les six ans, cet entretien professionnel fait un état des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié et permet d’apprécier si le salarié a suivi au moins une action de formation, acquis des éléments de certification par la formation ou encore bénéficié d’une progression salariale ou professionnelle.

Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, le manquement à cette obligation met à la charge de l’employeur l’abondement du compte personnel de formation du salarié. Application de la règle aux faits

En raison du caractère récent de la loi, l’employeur n’est pas tenu dans l’immédiat de faire droit à la demande des salariés. Il devra néanmoins s’en préoccuper pour faire un état des formations réalisées par les salariés. À préciser que l’absence de toute formation peut justifier une demande en dommage et intérêts et constituer un obstacle au licenciement pour motif économique.

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II – QUESTION DE COURS

1. Le compte personnel d’activité

A – Principes et bénéficiaires Dans la perspective de sécuriser les parcours professionnels, La loi Rebsamen et la loi du 8 août 2016 réunissent sous un même compte, dénommé compte personnel d’activité :

- le compte personnel de formation (le bénéficiaire acquiert annuellement un nombre d’heures de formation portées sur ce compte) ;

- le compte personnel de prévention de la pénibilité (ce compte permet de capitaliser des droits à la formation pour occuper un emploi moins pénible ou bénéficier d’un temps de travail réduit en fin de carrière) ;

- le compte d’engagement citoyen (ce compte recense les activités bénévoles ou de volontariat permettant l’acquisition de droits à la formation dans la limite de 60 heures).

Le principe général consiste à acquérir des droits à la formation au titre de l’un de ces comptes. Le mécanisme sera effectif à compter du 1

er janvier 2017 pour les salariés et demandeurs d’emploi, et en 2018 pour les travailleurs

indépendants.

Le dispositif à un caractère universel attaché à la personne. Il est ainsi ouvert à toute personne âgée d'au moins seize ans (sauf exception) en emploi ou à la recherche d'un emploi ou accompagnée dans un projet d'orientation et d’insertion professionnelle. Le compte ne sera clôturé qu’au décès de l’intéressé. Le salarié acquiert au titre de son compte de formation 24 heures de formation par an dans la limite de 120 heures (5 ans), auxquelles se rajoute ensuite 12 heures par an dans un plafond de 150 heures pour un travail à temps complet. Un abondement supplémentaire est prévu dans certaines situations (par exemple pour couvrir la totalité des heures d’une formation qualifiante ou encore pour les personnes sans qualification pour lesquelles le compte est alimenté à raison de

48 heures par an). Le compte personnel de formation peut être notamment mobilisé pour des formations obligatoirement qualifiantes ou pour compléter une formation partiellement réalisée. La liste des formations admissibles sont élaborées soit par les branches professionnelles, soit au niveau interprofessionnel, soit encore par la région. B – Utilisation du CPA Le titulaire du CPA peut accéder à une plateforme en ligne et consulter les droits dont il bénéficie. Les informations

accessibles s’étendent à tous services utiles à la sécurisation des parcours professionnels, notamment l’accès au conseil en évolution professionnelle. Ce dernier constitue un service de conseil permettant au bénéficiaire d’identifier ses compétences, ses besoins de formation afin de construire le cas échéant un parcours professionnel. L’utilisation du compte nécessite obligatoirement l’accord de l’intéressé (art. 6323-17 c.trav.). Pour les salariés, les formations peuvent se dérouler :

- sur le temps de travail ; dans cette hypothèse, et sauf exception, un accord de l’employeur sera nécessaire et la rémunération est maintenue ;

- hors du temps de travail, dans ce cas aucune autorisation de l’entreprise n’est exigée, et le salarié ne perçoit aucune allocation de formation ;

- partiellement sur le temps de travail, l’accord de l’employeur est obligatoire. Les coûts de formation sont pris en charge :

- par l’entreprise, en cas d’accord d’entreprise ou de branche le prévoyant ; - par l’OPCA (Organisme Collecteur Paritaire Agrée) lorsque les formations figurent sur la liste formations

admissibles.

2. Le CIF

Il est définit par l’article L 6322-1 du code du travail, qui dispose « Le congé de formation a pour objet de permettre à tout travailleur, au cours de sa vie professionnelle, de suivre à son initiative, et à titre individuel, des actions de formation, indépendamment de sa participation aux stages compris dans le plan de formation de l’entreprise dans laquelle il exerce son activité ». Le CIF ne se cantonne pas à l’acquisition de compétence en rapport direct avec l’emploi occupé puisqu’il s’ouvre à toute formation permettant d’accéder à un niveau supérieur de qualification, de changer d’activité, de préparer un examen ou d’acquérir des connaissances à caractère culturel.

La durée de principe du congé est de un an lorsqu’il est à temps plein ou de 1 200 heures s’il est effectué par alternance. Tout salarié de l’entreprise (CDI, CDD, CTT) peut bénéficier d’un CIF à la double condition suivante :

- condition d’ancienneté : 24 mois consécutifs ou non en tant que salarié, dont 12 mois dans l’entreprise (principe) ;

- condition de délai : un délai de franchise entre deux CIF est nécessaire (minimum 6 mois).

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Le salarié doit faire connaître son intention à l’employeur (par une demande d’autorisation d’absence précisant les modalités du stage) dans un délai de 120 ou 60 jours précédant le congé, en fonction de la durée de ce dernier. L’employeur, dont la réponse doit être donnée dans les 30 jours à compter de la réception de la demande, peut soit :

- accorder l’absence ; - refuser l’absence si les conditions ne sont pas remplies ; - reporter l’absence pour motif de service ou en cas d’absence simultanée de salariés en CIF trop importante.

Le financement de la formation est assuré par des organismes agréés par l’État : les FONGECIF ou les OPCA auxquels

les employeurs versent une contribution. Une fois la demande acceptée par l’employeur, ils peuvent prendre en charge la rémunération du salarié, le coût de la formation et les frais annexes.

III – ÉTUDE DE DOCUMENT 1. Problème de droit

Quelle est la portée et le périmètre de l’obligation de formation pesant sur l’employeur ? 2. Solution de la cour

Le code du travail prévoit à son article L 6321-1 les obligations générales à la charge de l’employeur en matière de formation professionnelle. Il doit ainsi assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail et veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi. Cette dernière obligation s’inscrit dans l’évolution constante des technologies et outils de travail pour lesquels l’employeur doit assurer l’adaptabilité des salariés. À titre d’exemple, ne remplit pas cette obligation l’employeur qui n’a fait bénéficier le salarié que d’une seule formation en 26 ans de présence dans l’entreprise (Cass. soc. 24 juin 2015). Dans les entreprises et les groupes d’entreprises employant au moins cinquante salariés, il organise pour chacun de ses salariés dans l’année qui suit leur quarante-cinquième anniversaire un entretien professionnel au cours duquel il informe

le salarié notamment sur ses droits en matière d’accès à un bilan d’étape professionnel, à un bilan de compétences ou à une action de professionnalisation. Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, ainsi qu’à la lutte contre l’illettrisme. Les dispositifs de formation professionnels ainsi que les obligations de l’employeur ont été renforcées par la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, l’emploi et la démocratie sociale. Le manquement de l’employeur à ses obligations, dont l’objectif reste d’assurer la performance des salariés mais aussi leur employabilité dans un monde du travail en mouvement constant, a une incidence directe en matière de licenciement pour motif économique. Il appartient ainsi aux juges de vérifier qu’au cours de l’exécution du contrat de travail,

l’employeur a satisfaisant à son obligation d’adaptation du salarié à l’évolution de son emploi (Cass. soc. 23 septembre 2015). Dans l’arrêt du 21 avril 2017, la cour d’appel de Bastia ne condamne pas l’employeur en retenant que les dispositions de la loi n’ont qu’un caractère facultatif pour l’employeur. En effet, l’alinéa 3 de la loi dispose que « l’employeur peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, y compris numériques, ainsi qu’à la lutte contre l’illettrisme… ». Néanmoins, et en toute logique, la cour de cassation censure l’arrêt, dans la mesure où les alinéas 1 et 2 du même article ont un caractère impératif et une portée plus large puisqu’ils assignent à l’employeur l’obligation (de résultat) d’assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail et de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations.

La cour de cassation réaffirme ici une jurisprudence déjà étoffée en rappelant les obligations de l’employeur auxquelles il ne peut se soustraire.

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LA BOÎTE À BONBONS

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Modification des conditions de travail, modification du contrat de travail, conséquences pour le salarié et obligations de l’employeur, modification de la situation juridique de l’employeur, effets sur

les contrats de travail, suspension du contrat pour maladie non professionnelle, contrôle de l’arrêt maladie

I – CAS PRATIQUE 1. Modification des conditions de travail

Mme

Campagniol a notifié à 3 salariés plusieurs modifications relatives à leur emploi. Mlle

Stern prendra son poste à 8 heures au lieu de 9 heures, M. Henri, chauffeur routier de l’entreprise, voit son circuit totalement réaménagé. Enfin, M

me

Liege sera affectée sur un autre site de l’entreprise distant d’une dizaine de kilomètres. L’employeur peut-il librement modifier les conditions de travail des salariés ? Règle de droit applicable

La question qui se pose est de savoir si l’employeur, du fait de son pouvoir général de direction, peut sans contrainte modifier les éléments de la relation de travail alors que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi aux

parties. Ainsi, ce que les parties ont tissé devrait pouvoir être défait uniquement par leur volonté commune. Les conditions de travail relèvent du pouvoir de direction de l’employeur. Il s’agit de la plupart des décisions qui se rapportent à l’organisation du travail, comme une modification peu importante des horaires collectif, ou une mutation à un poste sensiblement identique n’entraînant pas de modification réelle relative au contrat de travail (rémunération semblable, contraintes identiques, la réalisation d’heures supplémentaires…). Par conséquent, c’est en vertu des pouvoirs que la loi confère à l’employeur que ce dernier peut unilatéralement imposer toute modification relative aux modalités d’exécution du contrat de travail. Application de la règle aux faits

En ce qui concerne Mlle

Stern, le changement mineur de l’horaire de travail constitue une modification des conditions de travail. Il en est de même pour M. Henri. Enfin en ce qui concerne M

me Liege, la cour de cassation attribue au lieu de

travail un caractère indicatif et autorise l’employeur à le modifier unilatéralement dans le même secteur géographique. Au-delà, il s’agit d’une modification du contrat de travail. 2. Le refus de modification des conditions de travail

M. Henri indique qu’il n’acceptera les changements. Mme

Campagniol envisage de procéder à son licenciement pour faute. Quelles sanctions encourt le salarié refusant une modification de ses conditions de travail ? Règle de droit applicable

L’employeur qui modifie les conditions de travail agit en vertu de son pouvoir de direction. De fait, le refus par le salarié des changements relatifs à ses conditions de travail peut être considéré comme un acte d’insubordination. Dès lors, l’employeur peut user de son pouvoir disciplinaire pour sanctionner le salarié. Néanmoins, le refus par un salarié d’un

changement de ses conditions de travail, s’il rend son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, ne constitue pas à lui seul une faute grave (Cass. soc. 28 avril 2011 ; Cass. soc. 12 mai 2015). 3. La modification du contrat de travail

Quatre salariés se voient affecter, sans clause de mobilité, dans un établissement situé à Orléans, en contrepartie de quoi une augmentation de la rémunération suivra.

L’employeur peut-il modifier unilatéralement le contrat de travail ?

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Règle de droit applicable

La modification du contrat de travail porte sur un élément essentiel par nature du contrat de travail, ou sur un élément déterminant pour les parties à la conclusion du contrat. L’intérêt essentiel est que toute modification du contrat suppose l’accord préalable du salarié. Sont considérés comme une modification du contrat de travail, les modifications portant sur : La rémunération (même une augmentation (!) Cass. soc 8 juin 2016), la fonction et la qualification, le changement de la durée du travail, la

modification importante de l’horaire de travail (n’est pas considérée comme tel le passage d’un horaire de 18h à 6h à un horaire de 15h à 1H – Cass. soc. 4 février 2015), ou encore le changement de lieu de travail. La mention du lieu de travail dans le contrat n’a qu’une valeur d’information. Dès lors, l’employeur peut le modifier si le changement s’opère dans le même secteur géographique (cette notion doit être appréciée à travers différents critères : la distance séparant l’ancien et le nouveau lieu de travail, l’existence d’un bassin d’emploi, les facilités d’accès au nouveau lieu de travail Cass. soc. 25 janvier 2006). De même, s’il existe une clause de mobilité, il faut considérer que le salarié s’est engagé par avance à accepter une modification de son contrat de travail. Par contre, en l’absence d’une telle clause et si le lieu de travail apparaît comme ayant été un élément déterminant à la

conclusion du contrat de travail, ou si la modification est en dehors d’un même secteur géographique, il y a modification du contrat de travail. En ce qui concerne la mise en œuvre de la modification du contrat de travail, la procédure à suivre est la suivante en cas de modification pour motif personnel. L’employeur est dispensé de toute procédure spécifique. Il doit donc s’assurer de l’acceptation ou du refus du salarié. Dans ce dernier cas, il peut renoncer à la modification ou mettre en œuvre la procédure de licenciement pour motif personnel. À noter enfin que l’absence de contestation du salarié ne peut faire la preuve de son acceptation (Cass. soc. 6 octobre

2010). Application de la règle aux faits

Le changement de lieu de travail (de Poitiers à Orléans) constitue une modification du contrat de travail. Elle suppose alors une acceptation des salariés. Quel que soit le motif, M

me Campagniol ne peut acter unilatéralement le changement

de lieu de travail. En l’espèce, il ne s’agit pas d’un motif économique. La loi ne prescrit donc aucune procédure, mais M

me Campagniol devra s’assurer que chaque salarié a donné son accord au changement souhaité. À défaut, la

modification est sans effet. 4. Le refus d’une modification du contrat de travail.

Règle de droit applicable

Si la modification trouve son origine dans un motif économique, l’employeur peut soit abandonner son projet, soit mettre en œuvre la procédure de licenciement pour motif économique, à condition qu’il soit fondé sur une cause réelle (cf. Le

licenciement pour motif économique). Si la modification trouve son origine dans un motif personnel, l’employeur peut renoncer à la modification ou mettre en œuvre la procédure de licenciement pour motif personnel. Bien que non fautif, le licenciement devra évidemment reposer sur une cause réelle et sérieuse autre que le refus du salarié. Application de la règle aux faits

Le refus des salariés ne constitue pas une faute et Mme

Campagniol ne pourra les sanctionner sur ce motif.

5. L’affectation temporaire sur une zone géographique différente

Règle de droit applicable

L’affectation occasionnelle d’un salarié en dehors du secteur géographique où il travaille ne constitue pas une modification de son contrat de travail si les trois conditions suivantes sont réunies :

- l’affectation est motivée par l’intérêt de l’entreprise ; - elle est justifiée par des circonstances exceptionnelles ; - le salarié est informé préalablement dans un délai raisonnable du caractère temporaire de l’affectation et de sa

durée prévisible. Application de la règle aux faits

Mme

Campagniol pourrait envisager une affectation temporaire, ce qui ne constituerait pas une modification du contrat de travail si les conditions visées sont réunies.

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6. La modification du contrat pour motif économique

En raison de difficultés économique, Mme

campagniol procède aux modifications suivantes : certains salariés terminant leur travail habituellement à 17 heures commenceront plus tard mais finiront à 22 heures, d’autres devront passer à temps partiel, pour les derniers il s’agit de modifier la partie fixe de leur rémunération tout en augmentant le pourcentage auquel ils ont droit sur la partie variable.

Règle de droit applicable

En cas de modification pour motif économique, l’employeur est tenu de respecter une procédure légale décrite à l’article L 1226-6 du code du travail. Le projet de modification du contrat est notifié au salarié par lettre recommandée avec AR. Le salarié dispose du délai d’un mois pour accepter ou refuser le projet qui lui est soumis. L’absence de réponse vaut acceptation. En cas de refus, l’employeur peut soit abandonner son projet, soit mettre en œuvre la procédure de licenciement pour motif économique à condition qu’il réponde aux critères de la loi. Application de la règle aux faits

Mme

Campagniol devra respecter scrupuleusement la procédure indiquée, mais ne pourra en toute hypothèse l’imposer

aux salariés. 7. Maintien des contrats de travail en cas de modification de la situation juridique de l’employeur

La société GERBILLE a finalement dû céder une partie de son activité à la société RATON. La société RATON doit-elle reprendre tous les contrats de travail ?

Le principe est posé à l’article L 1224-1 du code du travail qui dispose : « S’il survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise ». Cet article appelle deux remarques : d’une part, la liste n’est pas limitative tel que le suggère l’adverbe « notamment », d’autre part le principe a vocation à s’appliquer à toute entité économique transférée dont l’existence est maintenue, c’est-à-dire fonctionnant dans des conditions analogues à la précédente.

En vertu de ce principe, tous les contrats de travail sont maintenus quelle que soit leur nature, à durée déterminée ou indéterminée, contrats d’apprentissage, de professionnalisation… Il y a donc transfert de plein droit de l’ancien employeur vers le nouvel employeur de l’ensemble des contrats antérieurement conclus. Application de la règle aux faits

La société RATON devra poursuivre tous les contrats de travail existants au jour du transfert.

8. Le maintien des dispositions du contrat de travail et de l’ancienneté

Mlle

Kale est une salariée dont le contrat a été transféré. La société RATON l’informe que la reprise ne peut porter que sur la partie fixe de sa rémunération. Règle de droit applicable

L’opération de transfert vaut pour tous les éléments du contrat. Le nouvel employeur doit maintenir les conditions

relatives à la rémunération, l’ancienneté, la classification, ou encore la fonction du salarié. Rien ne l’empêche pour autant de proposer au salarié une modification de son contrat de travail, sous condition qu’il l’accepte. Application de la règle aux faits

À partir du moment où l’intéressement aux ventes de Mlle

Kale est un élément de son contrat de travail, la société RATON n’a d’autres choix que de le poursuivre aux mêmes conditions. De même pour l’ancienneté. Le transfert n’opère pas une novation du contrat et donc de l’ancienneté.

9. Les obligations du salarié en cas de maladie non professionnelle

Mme

Kale est tombée malade et en a informé son employeur. Doit-elle remplir d’autres obligations ?

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Règle de droit applicable

L’absence qui découle de la maladie est régulière à condition d’être justifiée (accord de mensualisation du 10 décembre 1977 ou conventions collectives). Le salarié doit :

- prévenir l’employeur dans les meilleurs délais de son absence. Le délai impératif est prévu par les conventions collectives ou à l’article 7 de l’accord de mensualisation, soit 48 heures ;

- justifier l’impossibilité de satisfaire à son obligation contractuelle. En l’occurrence, dans le même délai, adresser

à son employeur le volet 3 de l’avis d’arrêt de travail. Cette obligation s’impose pour toute prolongation de l’arrêt ; - envoyer sous 48h l’avis d’arrêt de travail à sa CPAM.

Le défaut de respect des délais de transmission expose l’assuré, en cas de nouvel envoi tardif dans les 2 ans, à la réduction de moitié des indemnités journalières (CSS, art. L. 321-2 et R. 321-2). Il peut en outre justifier à son encontre d’une mesure disciplinaire (Cass. soc. 11 janvier 1984) si la faute est caractérisée ou si les circonstances qui entourent la remise de l’arrêt attestent d’un certificat de complaisance (Cass. soc. 17 juillet 1996, en l’espèce un salarié, à l’occasion d’une réunion, fit par de son mécontentement en ajoutant que « tout cela se terminerait par un congé de maladie », ce qui fut fait). Néanmoins, cette sévérité est rare et la cour de cassation veille avec rigueur à l’existence de

faits graves justifiant une mesure disciplinaire. La chambre sociale de la cour de cassation a dernièrement refusé de sanctionner, contre la cour d’appel, un salarié n’ayant pas justifié de la prolongation de son arrêt (Cass. soc., 11 janv. 2006) même dans l’hypothèse ou l’employeur a sollicité sans succès la délivrance de l’arrêt (Cass. soc. 20 juillet 2005). Application de la règle aux faits

L’absence de Mme

Kale ne pourra faire l’objet d’une sanction si elle remplit les obligations visées. Il lui faut donc disposer d’un arrêt de travail qu’elle transmettra sous 48h à l’employeur et à sa CPAM.

10. Le contrôle de la maladie non professionnelle

L’employeur soupçonne Mme

Kale de ne pas être dans l’incapacité de travailler et décide de faire procéder à un contrôle. Il lui indique dans un courrier que ses indemnités journalières pourraient être suspendues. Quelles sont les conditions de ce contrôle et les conséquences qui peuvent en résulter ?

Règle de droit applicable

Le contrôle peut être réalisé à la demande de l’employeur et doit être compris comme la contrepartie des indemnités complémentaires qu’il peut être amené à verser au salarié. Il est prévu à l’article 1 de l’accord de mensualisation de 1978 et à l’article 315-1 (II) du code de la sécurité sociale. Pour le réaliser, l’employeur a toute liberté dans le choix du médecin chargé de contrôler le salarié et ce dernier ne peut exiger la présence de son médecin traitant ou de celui de la sécurité sociale à l’occasion du contrôle. Les conséquences varient selon les constatations du médecin.

Soit l’arrêt est justifié et le salarié continue de percevoir les indemnités de sécurité sociale ainsi que les indemnités complémentaires versées par l’employeur. Soit l’arrêt est justifié, mais le médecin fixe une date de retour au travail anticipée. Dans ce cas, si le salarié s’en tient à la durée initiale, l’employeur est fondé à suspendre les indemnités qu’il verse. Soit l’arrêt ne paraît pas justifié et le médecin contrôleur transmet sa décision au service du contrôle médical près la Caisse primaire qui procède au contrôle de l’assuré.

Application de la règle aux faits

L’employeur a toute latitude pour faire réaliser un contrôle, mais ne peut décider a priori que les indemnités journalières risquent d’être supprimées. En outre, si le médecin prescrit un retour anticipé de M

lle Klae et qu’elle s’en tient à la durée

initiale, seules les indemnités complémentaires pourraient être suspendues.

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II – QUESTION DE COURS 1. Le contrôle de l’arrêt de travail par la CPAM en cas de maladie non professionnelle

La Caisse d’assurance maladie assure le versement des indemnités journalières et le remboursement des prestations en nature. À ce titre ; le législateur lui reconnaît la possibilité de faire contrôler l’exactitude et la réalité de l’arrêt maladie délivré par le médecin traitant. Elle diligente à cet effet un médecin contrôleur chargé de vérifier l’absence d’abus dans la prescription médicale. Le contrôle porte sur l’ensemble des aspects qui conditionnent l’ouverture des droits aux prestations en espèce ou en nature de la sécurité sociale (art. 315-1 C. SS) et s’effectue sur les périodes où le salarié

n’est pas autorisé à sortir. À cet égard, la haute cour a retenu l’absence de faute du salarié sorti à l’occasion d’un contrôle dans la mesure où l’arrêt de travail portait la mention « sorties libres » (Cass. soc. 9 mars 2006). Toute fraude, directe ou indirecte, est sanctionnée pénalement (art. 377-2 à 377-5 C. S.S), par une peine d’amende ou/et d’emprisonnement en fonction de la qualification donnée aux faits. 2. Hypothèses et effets de la suspension du contrat de travail

Les cas principaux de suspension du contrat de travail sont la maternité, la maladie et l’accident non professionnels, la

maladie et l’accident professionnels. La suspension du contrat n’emporte pas rupture du contrat. Le temps considéré opère simplement suspension des obligations respectives des parties. Pour l’employeur, il est dégagé de son obligation de rémunérer le salarié, et ce dernier n’est plus obligé de satisfaire à sa prestation de travail.

III – ÉTUDE DE DOCUMENT

Document 1

1. Problème de droit

La réduction du périmètre des fonctions, à la demande salarié en raison de son état de santé, emporte-t-elle son accord à une baisse de sa rémunération ? 2. Solution de la cour de cassation

Il est de droit constant que la modification des fonctions du salarié constitue une modification de son contrat de travail et suppose son accord. La modification des responsabilités intervenue à la demande du salarié du fait de sa santé peut avoir pour conséquence une diminution de sa rémunération. L’employeur doit-il en cette hypothèse requérir son accord ?

En d’autres termes, l’accord du salarié à une modification de ses fonctions emporte-t-elle tacitement son accord à une baisse de rémunération qui en découle ? En l’espèce, une salariée avait demandé une modification du périmètre de ses fonctions en raison de son état de santé constaté par le médecin du travail. Cette modification a été formalisée par avenant au contrat. La salariée, constatant une baisse de sa rémunération liée à ses nouvelles fonctions, assigne alors l’employeur. La cour d’appel faisant droit à sa demande, l’employeur développe quatre arguments au pourvoi :

- la modification du contrat est intervenue à la demande de la salariée, ce dont il se déduisait nécessairement une acceptation des nouvelles conditions d’emploi, y compris la rémunération ;

- la rémunération constitue la contrepartie d’une prestation de travail. La diminution du périmètre des fonctions,

sollicitée par la salariée, emporte de fait une modification de la rémunération ; - l’employeur reproche à la cour d’appel d’admettre la salariée au bénéfice de sa rémunération antérieure à la

modification, au motif que ladite salariée n’a pas exprimé son refus de reprendre ses fonctions élargies dès l’amélioration de sa santé ;

- la preuve du caractère temporaire de la modification des fonctions, liée à l’état de santé de la salariée, pèse sur cette dernière et non sur l’employeur.

La cour de cassation rejette le pourvoi en rappelant que l'accord du salarié à la modification du contrat de travail doit être

exprès et non équivoque. La modification du périmètre des fonctions n’emporte donc pas accord sur la modification de la rémunération. La solution n’est ici pas nouvelle. En effet, l’acceptation du salarié à une modification de son contrat ne peut résulter ni de son accord tacite, ni de son comportement.

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D’autre part, la modification demandée par la salariée étant uniquement liée à son état de santé, il ne peut s’en déduire qu’elle a accepté être de nouveau soumise à son contrat d’origine. Le motif ayant justifié la demande de la salariée est un élément déterminant. En effet, la dégradation de l’état de santé ne semble pas dans les faits de l’espèce s’inscrire dans la durée, mais au contraire avoir un caractère temporaire. Dès lors, la demande de modification ne pouvait qu’être provisoire et valoir renoncement à réoccuper les fonctions élargies par avenant.

Document 2

1. Problème de droit

La modification d’un élément du contrat de travail à l’occasion d’un changement d’employeur nécessite-t-elle l’accord du salarié ? 2. Solution de la cour

L’article 1224-1 pose un principe d’ordre public, à savoir, lorsqu’intervient un changement d’employeur, les contrats de

travail sont automatiquement transférés et poursuivis avec le nouvel employeur. Aucune disposition conventionnelle ne peut en aménager le mécanisme. Le transfert s’opère de plein droit et les contrats dans toutes leurs dispositions sont automatiquement repris. Le transfert peut résulter de différents évènements tels que la vente, la mise en société ou le transfert d’activité. Dans cette dernière hypothèse, les dispositions du code du travail n’ont vocation à s’appliquer que si le transfert concerne une activité économique autonome et s’il y a poursuite de l’activité économique et maintien de l’identité de l’entreprise. Le changement d’employeur constitue une modification du contrat de travail qui ne requiert pas l’accord du salarié. Cependant, le transfert du contrat peut aussi entraîner d’autres modifications de la relation contractuelle, comme dans le cas soulevé par l’arrêt. L’accord du salarié est-il alors nécessaire ? En l’espèce, une

salariée dont le contrat a été transféré à la société TPA suite à une cession partielle d’activité, en refuse l’application dans la mesure où ledit transfert opère modification de son lieu de travail (Lyon désormais). Licenciée suite à son refus, la salariée fait valoir plusieurs arguments dans son pourvoi. Dans un premier temps, elle conteste la validité du transfert au motif d’une part qu’il n’est pas démontré l’existence d’une entité économique autonome et d’autre part que certains salariés n’ont pas fait l’objet d’un tel transfert, ce qui serait discriminatoire et en violation du caractère d’ordre public de la règle précitée. Dans un second temps, elle conteste le bien-fondé du licenciement en faisant valoir que son refus, justifié par des raisons d’ordre personnel, ne peut à lui seul constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.

La cour de cassation, bien que rejetant le pourvoi, précise deux points substantiels. D’une part, elle confirme le droit pour le salarié dont le contrat est transféré d’en refuser la mise en œuvre lorsque le transfert a pour effet de modifier un élément du contrat de travail autre que l’employeur. D’autre part, elle indique que le cessionnaire dispose alors de la faculté soit de proposer de nouvelles conditions contractuelles s’il ne peut maintenir les anciennes, soit d’engager une procédure de licenciement à raison du refus du salarié. Il faut en conclure que lorsque le transfert d’une entité économique entraîne inévitablement une modification d’un autre élément du contrat de travail, le refus du salarié constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement.

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VINUM DIABOLICUM

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Le licenciement pour motif personnel : Vie privée et licenciement, motif disciplinaire, preuve de la faute, mise à pied conservatoire, motif non disciplinaire, salarié protégé, condamnation pénale,

convocation à l’entretien préalable, déroulement de l’entretien, notification du licenciement

PREMIÈRE PARTIE : LES CONDITIONS DU LICENCIEMENT POUR MOTIF PERSONNEL

I – CAS PRATIQUE

1. Les effets sur le contrat de travail de la suspension du permis de conduire

M. Chenin, pour dissimuler à son employeur la perte de son permis de conduire, demande à un ami de prendre le volant pour chacun de ses déplacements. Règles de droit applicables

I – Principe L’employeur est maître des conditions dans lesquelles un salarié exécute sa prestation de travail et le salarié ne peut lui imposer les siennes. Par conséquent l’employeur est libre d’accepter ou non que le salarié utilise des tiers pour l’exécution de ses déplacements professionnels (Cass. soc. 22 sept.2009). D’autre part, l’employeur ne peut être fondé à sanctionner un salarié pour des faits qui relèvent de sa vie personnelle. En effet, seules les fautes commises dans l’exécution des fonctions ou à l’occasion de celles-ci peuvent justifier l’usage par l’employeur de son pouvoir disciplinaire.

La vie personnelle a une acception plus large que la vie privée dans la mesure où elle englobe cette dernière et comprend l’ensemble des comportements et activités que le salarié peut avoir en dehors de sa vie professionnelle. Il est alors aisé de comprendre que l’employeur, en dehors du temps où le salarié exécute sa prestation de travail, ne puisse avoir un droit de regard sur l’organisation, le fonctionnement ou les pratiques de la vie du salarié et à fortiori en tirer un motif de sanction. La cour de cassation a pu légitimement considérer que l’aide au séjour irrégulier ne peut être sanctionnée par l’employeur (Cass. Soc.16 décembre 1997), ni même l’incarcération du salarié (Cass. Soc. 26 février 2003) ou encore le fait de voler les enjoliveurs de la voiture d’un collègue sur un parking à l’extérieur de l’entreprise (Cass.S oc. 19 septembre 2007).

II – Exception Dans certains cas cependant, les tribunaux ont accepté de retenir des faits relevant de la vie personnelle comme fondement à une procédure de licenciement. La juridiction suprême a retenu dans un premier temps la notion de trouble caractérisé dans l’entreprise pour justifier qu’un fait relevant de la vie personnelle puisse être utilisé pour sanctionner un salarié (par exemple un salarié qui bat son épouse à proximité de l’entreprise (Cass. soc. 1 avril 1992). Plus récemment, la chambre sociale de la cour de cassation a pu décider qu’un salarié tenu par sa fonction à une obligation de probité, peut être valablement sanctionné pour des faits commis en dehors de son travail, en violation de cette obligation, dès lors qu’un trouble caractérisé dans l’entreprise en résulte et rend impossible la poursuite du contrat de travail. La qualification de faute grave n’a au

demeurant pas été remise en cause (Cass. soc. 26 janvier 2006), ce qui peut prêter le flanc à la critique. En effet, il paraît raisonnable que le droit au respect de la vie privé ne puisse justifier une sanction disciplinaire sans pour autant ôter à l’employeur la possibilité de prononcer un licenciement sans faute. La cour de cassation semble d’ailleurs avoir évolué dans ses positions récentes en retenant que pour des faits de la vie privée, le trouble objectif ne peut justifier un licenciement disciplinaire (Cass. soc. 18 mai 2007 et Cass. soc. 9 mars 2011). Ainsi (Cass. soc. 24 janvier 2007, Cass. soc. 19 mars 2008), le retrait de permis de conduire d’un salarié qui l’empêche d’exercer les fonctions pour lesquelles il avait été engagé constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement sans pour autant que la faute ne soit retenue.

Néanmoins, cette solution a été affinée par la haute cour. En effet, si un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, il en est autrement s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail (Cass. soc. 3 mai 2011 ; Cass. soc.15 avril 2016). Si le principe reste intangible, la cour de cassation lui apporte une exception non négligeable. À noter enfin que si le contrat de travail prévoit comme condition essentielle la détention du permis de conduire à défaut duquel le contrat sera rompu, la survenance de l’évènement visé n’autorise pas l’employeur à licencier le salarié sur ce seul fondement. En effet, la préconstitution d’un motif de licenciement est interdite en droit français (cass. soc. 12 fev. 2014).

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Application des règles de droit aux faits

La solution de M. CHENIN est une alternative qu’il ne pourra imposer à l’employeur et qu’il est en droit de lui interdire. D’autre part, la participation à un trafic de véhicule, sanctionné pénalement, relève par principe de la vie privée. Cependant, si l’on suit la jurisprudence en la matière, on peut supposer que les qualités de probité et de confiance espérées chez M

lle COT, à raison de son emploi et de sa fonction, ne se trouvent plus réunies et justifient un

licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Quant à M. CHENIN, son contrat et ses fonctions exigent de lui des déplacements quotidiens rendant nécessaires l’utilisation d’un véhicule. La privation de son permis ne lui permet donc plus d’honorer ses obligations contractuelles et autorise la rupture du contrat de travail sans faute. 2. La preuve de la faute par constat d’huissier

M. Malenpoint a des doutes sur la fidélité de Mlle

J. Mitte à l’égard de la société. Il décide de la faire suivre par Maître Macho, huissier de justice. Celui-ci dresse un constat faisant état de rencontres régulières dans un square, entre M

lle

J. MITTE et le dirigeant d’une banque concurrente.

La preuve ainsi collectée peut-elle être utilisée en justice ?

Règle de droit applicable

En matière civile, le régime de la preuve impose qu’elle ne soit pas obtenue de manière déloyale. C’est-à-dire que toute manœuvre pour l’obtenir risque de ne lui donner aucune force probante. Il en est ainsi des enregistrements audio ou vidéo obtenus à l’insu de l’une ou l’autre partie. Qu’en est-il de la filature ? Doit-on considérer qu’il y a une atteinte à la vie privée ? En pareille hypothèse, la cour de cassation admet la validité d’un constat d’huissier dans la mesure où il se borne à faire état de faits qui ont pu être constatés dans un lieu accessible au public. La solution serait donc différente

s’il s’agissait d’un espace privé auquel l’huissier aurait accédé.

Application de la règle aux faits

Le constat ainsi dressé relate des événements se déroulant dans un parc public. Il pourra donc être valablement utilisé à l’encontre de M

lle Mitte.

3. Pouvoir de contrôle de l’employeur et dossiers personnels

M. Malenpoint procède à l’ouverture de l’ordinateur professionnel de Mlle

Mitte en son absence. Dans un dossier intitulé

« JM », il découvre la preuve irréfutable que Mlle

Mitte livre des documents confidentiels à une banque concurrente (sur la possibilité d’accéder à l’ordinateur du salarié, voir cas VIADUC MARES). Quelle qualification peut-on donner à cette faute ?

Règle de droit applicable

La faute lourde est d’une gravité exceptionnelle. Elle rend non seulement impossible la poursuite de la relation de travail et en justifie la rupture immédiate, mais suppose en plus un caractère distinctif constitué par l’intention de nuire. Ainsi la faute lourde ne peut résulter de la seule commission d'un acte préjudiciable à l'entreprise (Cass. soc. 22 octobre 2015).

Les hypothèses sont diverses telles que les violences physiques à l’encontre de l’employeur, la dégradation volontaire des biens de l’entreprise, les actes de concurrence déloyale, l’espionnage industriel…

Application de la règle aux faits

Les activités de Mlle

Mitte constituent une faute lourde justifiant la rupture immédiate du contrat de travail sans aucune indemnité, si ce n’est celle de congés payés. 4. L’utilisation abusive de la connexion à internet

Règle de droit

Le matériel mis à disposition des salariés par l’employeur constitue un outil professionnel. Sont concernés l’ensemble des moyens dont dispose le salarié pour la réalisation des tâches qui lui sont confiées. De fait, leur utilisation doit être uniquement professionnelle même si une tolérance peut être tacitement ou formellement instituée (Cass. soc. 10 mai 2012 : la consultation de sites pornographiques n’a pu être reprochée au salarié, dès lors qu’elle correspondait à une pratique de l’entreprise tolérée par l’employeur). Dès lors, l’utilisation détournée et abusive d’internet ou de la ligne téléphonique est susceptible d’être sanctionnée par l’employeur. Il faut néanmoins relativiser la rigueur du principe dans la mesure où ne sont sanctionnés que les

comportements manifestement abusifs. Tel est le cas d’un salarié (Cass. soc. 18 mars 2009) licencié pour faute grave qui était resté connecté 41 heures dans le même mois à des fins personnelles, ou encore le fait de s’être connecté 10 000 fois

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en 18 jours à des fins privées (Cass. soc. 26 fevvrier 2013). Il est enfin vivement conseillé en la matière de rédiger une charte informatique adossée au règlement intérieur.

Application de la règle aux faits

L’usage manifestement abusif par M. Mitte de la connexion internet mise à sa disposition est de nature à justifier un licenciement pour faute grave.

5. Le port d’un signe d’appartenance religieuse

Règle de droit

L’affaire, sous une apparente simplicité, reste très complexe dans la mesure où s’articulent différents enjeux et principes tels que la non-discrimination, les libertés individuelles ou encore la disposition du code du travail autorisant l’employeur sous certaines conditions à apporter des restrictions aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives. Cette difficulté n’est autre que celle à laquelle la cour de cassation a dû répondre dans l’affaire de la crèche Baby Loup et

laquelle l’assemblée plénière s’est définitivement prononcée le 25 juin 2014. Notons par ailleurs que la CJUE s’est prononcée à cet égard dans deux arrêts du 14 mars 2017 (un cas Belge et un cas Français) par lesquels l’existence d’un principe de neutralité se trouve juridiquement fondée et constitue un objectif légitime dès lors que son exigence est strictement nécessaire au but poursuivi et proportionnée. Le règlement intérieur à un contenu limitatif et ne peut contenir de stipulations discriminatoires (sanctionnées à l’article 1132-1 du code du travail qui pose le principe de non-discrimination, et fait encourir la nullité à tout licenciement (…) fondé sur un motif de discrimination religieuse…) ou en violation des droits des personnes et des libertés individuelles et

collectives. Néanmoins, le même code admet notamment deux limites : D’une part, les articles 1121-1 et 1321-3 prévoient la possibilité pour l’employeur d’apporter des restrictions aux droits et libertés des salariés sous deux conditions :

- les limites doivent être justifiées par la nature de la tâche ; - elles doivent être proportionnées au but recherché.

D’autre part, la loi du 8 août 2016 nouvellement adoptée autorise le règlement intérieur à insérer dans ses prescriptions un principe de neutralité. Ce dernier peut apporter des restrictions aux convictions des salariés dès lors que cette

limitation se trouve justifiée soit par l’exercice d’autres libertés et droits fondamentaux soit par les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise et qu’elle est proportionnée au but recherché. Jusqu’à présent, seules les entreprises de conviction (notion de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme) pouvaient se doter de statuts imposant une neutralité de ses salariés. Désormais, cette possibilité sera ouverte à toutes les personnes morales de droit privé. Restera sans doute à la cour de cassation de préciser les contours de cette notion, dont le périmètre, plus large que celui en sous teinte de laïcité, pourra donner lieu à contentieux. De même, une telle disposition devra-t-elle concerner certaines catégories de salariés, ou sera-t-elle valable malgré un caractère de généralité qui jusqu’à présent rendait illicite la prohibition des mesures restrictives ?

Application de la règle aux faits

M. Shink est comptable et travail au sein de la banque Credit Malte. L’article 12 du règlement intérieur impose un principe de neutralité qui au terme de la loi nouvelle est licite. Néanmoins, la double condition ne semble pas respectée. En effet, il ne semble pas que la mesure soit justifiée par l’exercice d’autres libertés et droits fondamentaux ou par les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise au regard des fonctions occupées, ni que celle-ci soit proportionnée au but recherché. 6. Qualification de la faute grave

M. Morito traite sa collègue de « Pitbull ». L’employeur convoque le salarié et décide, en suivant la procédure, de prononcer un licenciement pour faute grave. Il accorde cependant au salarié la possibilité d’effectuer son préavis. La faute grave peut-elle être retenue ? Règle de droit applicable

La faute grave justifie le licenciement et implique nécessairement le départ immédiat du salarié en privant ce dernier des indemnités de préavis et de licenciement. Par exemple, les violences, les actes d’insubordination, les comportements injurieux ou encore un état alcoolique répété peuvent recevoir cette qualification. Mais ne constituent pas une telle faute

quelques excès de vitesse (Cass. soc. 16 mars 2011), ni même un vol isolé commis par le salarié en considération de son ancienneté (Cass. soc. 6 avril 2011). Application de la règle aux faits

M. Malenpoint ne peut retenir la faute grave et dans le même temps accepter que le salarié effectue son préavis. En effet, soit la faute apparaît d’une gravité telle que la rupture du contrat est immédiate, soit il accepte que le salarié demeure dans l’entreprise pendant son préavis et la faute ne peut plus être considérée comme grave. M. Morito peut contester son licenciement et obtiendra gain de cause.

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7. Le licenciement pour un motif non disciplinaire

M. Malenpoint prend conscience de l’incompétence de sa nouvelle recrue L’incompétence peut-elle justifier le licenciement ? Règle de droit applicable

Dans l’hypothèse du licenciement non disciplinaire, celui-ci ne repose pas sur une faute du salarié. Il doit cependant se

fonder une cause réelle (c’est-à-dire concrète, objective et exacte) et sérieuse (c’est-à-dire suffisamment grave pour justifier la rupture du contrat de travail). En ce qui concerne l’incompétence professionnelle, elle se manifeste par l’impossibilité pour le salarié d’accomplir les tâches qui lui sont confiées au regard des manquements, erreurs et échecs dans son travail. Il est nécessaire, à l’appui de ce motif, de fournir les éléments précis et objectifs la justifiant. (Néanmoins, Cass.16 septembre 2009, l’employeur doit avoir satisfait à son obligation d’adapter la salariée à l’évolution de son emploi.) Application de la règle aux faits

L’incompétence professionnelle peut justifier la rupture du contrat de travail. Cependant, M. Malenpoint devra, à l’appui de sa décision, fournir les éléments objectifs permettant de la constater.

8. La perte de confiance

Le salarié apprend à M. Malenpoint la relation qu’il entretien depuis quelques mois avec Mme

Malenpoint. La perte de confiance peut-elle justifier un licenciement ?

Règle de droit applicable

La perte de confiance n’est pas en soi un motif légitime de licenciement. Si elle peut être la conséquence de faits

objectifs, précis et imputables au salarié, ce sont sur ces seuls faits qu’il reste possible de s’appuyer. L’employeur doit donc se garder de l’invoquer sèchement.

Application de la règle aux faits

La relation privée avec Mme

Malenpoint ne peut en elle-même constituer un motif justifiant la perte de confiance qui en toute hypothèse ne peut constituer un motif de licenciement.

II – QUESTIONS DE COURS 1. Le licenciement du salarié protégé

Sont protégés contre le licenciement, c’est-à-dire font l’objet d’une procédure dérogatoire en cas de licenciement, les personnes qui d’une manière générale accomplissent ou ont l’intention d’accomplir un mandat de représentation. Sont ainsi visés principalement :

- les candidats et délégués du personnel titulaires et suppléants ; - les candidats et membres élus titulaires et suppléants du CE ; - les délégués syndicaux ;

- les candidats et membres élus du CHSCT.

La protection s’étend, selon le mandat, de l’acte de candidature, à la durée du mandat et s’étend même au-delà pour une durée qui dépend de la fonction exercée. A titre d’exemple :

- pour le délégué du personnel, la protection commence à courir pendant 6 mois à compter de l’envoi des listes de candidatures, elle se poursuit pendant toute la durée du mandat (4 ans) et s’étend jusqu’à 6 mois à compter de l’expiration des fonctions ;

- pour le délégué syndical, la protection cours à compter de la désignation et s’étend jusqu’à 12 mois au-delà de son

expiration à condition d’avoir exercé les fonctions pendant au moins 1 an. La protection s’applique à toutes mesures de licenciement ou d’une manière générale de rupture du contrat du fait de l’employeur. Elle consiste en l’adoption d’une procédure particulière sous peine de nullité. Ainsi, le licenciement d’un membre titulaire ou suppléant du comité d’entreprise ou d’un représentant syndical, d’un délégué du personnel, titulaire ou suppléant est obligatoirement soumis au comité d’entreprise qui donne un avis sur le projet de licenciement. Il ne peut ensuite intervenir que sur autorisation de l’inspecteur du travail dont dépend l’établissement.

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La décision de l’inspecteur du travail, si elle est négative, peut faire l’objet soit d’un recours hiérarchique soit d’un recours contentieux devant le tribunal administratif.

La sanction principale est la nullité de la décision de licenciement et la réintégration du salarié dans l’entreprise si l’employeur n’a pas respecté la procédure légale ou s’il a passé outre la décision négative de l’inspecteur du travail. Le salarié peut en outre solliciter une indemnisation du préjudice qu’il a subi.

Néanmoins, cette protection ne prive pas l’employeur de mettre en œuvre la procédure de licenciement pour faute grave. Elle en réglemente seulement les modalités. À ce titre, en cas de faute grave, le chef d’entreprise a la faculté de prononcer la mise à pied immédiate de l’intéressé en attendant la décision définitive des institutions concernées.

2. Le licenciement pendant le congé maternité

Au terme de L’article L 1225-4, l’employeur ne peut résilier le contrat de travail d’une salariée lorsqu’elle est en état de grossesse pendant l’intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit ainsi que pendant les quatre semaines qui suivent l’expiration de ces périodes. Cette interdiction de principe connaît deux exceptions tel qu’il en relève de l’arrêt de la cour de cassation en date du 1

er

février 2010. L’employeur peut mettre fin au contrat de travail :

- en cas de faute grave de la salariée, non liée à son état de grossesse ; - s’il est dans l’impossibilité de poursuivre le contrat de travail, pour un motif étranger à la grossesse (par exemple

des difficultés économiques).

III – ÉTUDE DE DOCUMENT 1. Les faits

Mme

X... a été engagée par la société Skills, le 1er

septembre 2008. Licenciée le 20 mai 2009 pour motif économique, elle

informe l’employeur par lettre recommandée du 4 juin 2009, de son état de grossesse et sollicite les conditions de sa réintégration. Par courrier du 16 juillet 2009, reçu le 20, l’employeur l’informe de sa réintégration alors que la salariée a saisi le conseil de prud’hommes le 17 juillet. 2. Problème de droit

Quelles sont les obligations de l’employeur et les droits du salarié lorsque ce dernier fait connaître son état de grossesse

après avoir été licencié ? 3. Solution de la cour de cassation

La salariée bénéficie pendant toute la durée de sa grossesse et pendant une partie de la durée du congé d’une protection particulière contre le licenciement. Au terme de L’article L 1225-4 l’employeur ne peut résilier le contrat de travail d'une salariée lorsqu’elle est en état de grossesse pendant l’intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit ainsi que pendant les dix semaines qui suivent l’expiration de ces périodes. La mesure est

frappée de nullité sans exclure des poursuites pénales (3 ans d’emprisonnement et 4 500 euros d’amende). De même, la salariée licenciée bénéficie d’un délai de 15 jours, à compter de la notification du licenciement, pour informer l’employeur de son état de grossesse. La rupture du contrat est alors considérée comme nulle et l’employeur doit procéder à la réintégration de la salariée en versant la rémunération due pendant la période couverte par la nullité. Si l’offre de réintégration intervient tardivement, la salariée n’est pas tenue de réintégrer l’entreprise. En cas de refus elle bénéficie d’une indemnité au moins égale à six mois de salaire. L’arrêt présenté rappelle ainsi les obligations de l’employeur et précise que le caractère tardif de la réintégration, qui relève des juges du fond, s’apprécie au jour de la connaissance par l’employeur de l’état de grossesse de la salariée.

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4. Problème de droit

Un dispositif de contrôle de l’alcoolémie des salariés prévu dans un règlement intérieur non encore entré en vigueur peut-il justifier un licenciement ?

5. Solution de la cour

L’exercice du pouvoir disciplinaire par l’employeur exige que lesdites sanctions soient prévues dans le règlement intérieur (cf. LES ÂMES VIVES, arrêt du 23 mars 2017), hormis pour le licenciement pour lequel l’employeur conserve toute latitude pour sanctionner le salarié par la rupture unilatérale du contrat de travail. Dans cette dernière hypothèse, le licenciement doit nécessairement reposer sur une cause réelle et sérieuse. Celle-ci peut résulter d’une faute professionnelle ou d’une faute disciplinaire, c’est-à-dire d’un manquement aux dispositions du règlement intérieur. Le règlement intérieur peut aussi autoriser, sous conditions, l’employeur à exercer une surveillance de l’activité des salariés ou instituer des modalités de contrôle de son aptitude à exercer ses fonctions, tel un contrôle d’alcoolémie. En cas de contrôle positif à un test d’alcoolémie, cela constituerait une cause réelle et sérieuse de licenciement. Encore faut-il que

le dispositif ait été régulièrement mis en place. C’est précisément la question posée à la cour de cassation dans l’arrêt du 4 novembre 2015. En l’espèce, un conducteur de machine a été mis à pied à titre conservatoire puis licencié pour s’être trouvé en état d'imprégnation alcoolique sur son lieu de travail. Contestant le fondement de son licenciement, il obtient gain de cause devant la cour d’appel. L’employeur forme alors un pourvoi en cassation en développant deux arguments :

- d’une part, l’employeur est tenu d’une obligation de sécurité de résultat envers ses salariés et peut dès lors prendre les mesures propres à protéger la santé et la sécurité de ces derniers, tel un test d’alcoolémie, même si ce dernier n’est pas prévu par le règlement intérieur dès lors qu’il est justifié par des motifs de sécurité et proportionné au but

recherché ; - d’autre part, l’obligation de l’employeur n’est pas exclusive de celle des salariés de veiller à leur santé et leur

sécurité ainsi qu’à celle des autres. Dès lors, commet une faute grave le salarié se trouvant en état d’imprégnation alcoolique au moment de prendre ses fonctions dans la mesure où son état présente un risque certain pour sa sécurité et celle des autres.

La cour de cassation rejette le pourvoi. Elle retient que le règlement intérieur d’une entreprise peut valablement prévoir de soumettre certains salariés à un contrôle d’alcoolémie, encore faut-il que le règlement intérieur ait été régulièrement

mis en place. Son élaboration répond à des exigences spécifiques et notamment des mesures de publicités permettant aux salariés d’en prendre connaissance. En effet, il ne peut entrer en vigueur qu’un mois après avoir été déposé au conseil de Prud’hommes, transmis à l’inspecteur du travail et affiché dans l’entreprise. Or dans cette affaire, il apparaît que ces obligations n’ont pas été respectées. Dès lors, le dispositif de contrôle ayant justifié la faute du salarié ne peut valablement servir à l’appui d’un licenciement.

DEUXIÈME PARTIE : LA PROCÉDURE DE LICENCIEMENT

I - CAS PRATIQUE 1. Qualification de la faute

M. Lenoir commet de nombreuses erreurs dans l’exécution de ses fonctions.

Règle de droit applicable

En l’absence de définition légale, la faute peut être définie comme une violation injustifiée des obligations

professionnelles du salarié. Elle comprend la faute disciplinaire et la faute professionnelle (la faute professionnelle peut résulter de l’incompétence). La faute, à condition qu’elle soit suffisamment sérieuse, constitue un motif de licenciement. Application de la règle aux faits

Les erreurs de M. Lenoir constituent des fautes professionnelles justifiant une sanction telle que le licenciement.

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2. La convocation à l’entretien préalable

Le courrier envoyé par Chronopost indique l’objet de la convocation (procédure en vue d’un éventuel licenciement), le lieu (la société), l’heure (14 heures) et la date (le mardi 27 mars), ainsi que la faculté pour le salarié de se faire assister par la personne de son choix en l’absence de représentant du personnel dans l’entreprise. Quelles sont les obligations légales relatives à la convocation à l’entretien préalable ?

Règle de droit applicable

L’employeur doit convoquer le salarié dont il envisage le licenciement à un entretien préalable, par lettre recommandée ou remise en main en propre contre décharge. La cour de cassation admet aussi l’envoi par Chronopost (Cass. soc. 8 février 2011) ainsi que la convocation par exploit d’huissier (Cass. soc. 30 mars 2011). La convocation doit impérativement comporter les mentions suivantes :

- l’objet de l’entretien. Bien que le motif du licenciement envisagé n’ait pas à être indiqué, l’objet de l’entretien doit être précis et sans équivoque ;

- la date, l’heure et le lieu de l’entretien ; - la possibilité de se faire assister par une personne de l’entreprise ou, à défaut d’institutions représentatives du

personnel, par une personne extérieure à l’entreprise dont la liste peut être consultée en mairie ou auprès des services de l’inspection du travail. Il est tout aussi nécessaire d’indiquer les adresses où ces listes peuvent être consultées. À défaut, la procédure est irrégulière (Cass. soc. 19 septembre 2007).

Application de la règle aux faits

En l’espèce, la convocation est irrégulière s’il n’existe pas dans l’entreprise d’institutions représentatives du personnel. En effet, dans cette hypothèse, M

me Frach aurait dû indiquer les adresses ou les listes peuvent être consultées.

3. L’entretien préalable

Règle de droit applicable

L’employeur doit respecter un délai de 5 jours ouvrables entre la présentation de la lettre recommandée (ou la remise en main propre) et l’entretien préalable. Le décompte des jours se fait à partir du lendemain de la présentation de la lettre et exclu les dimanches, les jours fériés et les jours non ouvrables (Cass. soc. 20 décembre 2006, Cass soc. 3 juin 2015). Le non-respect du délai ne peut être justifié du fait que le salarié avait renoncé à comparaître (Cass soc. 20 janvier

2015).

Il consiste pour les parties à faire valoir leurs prétentions. Ainsi l’employeur indique au salarié les éléments ayant conduit à envisager son licenciement. Il ne doit par ailleurs jamais faire état, dès l’entretien, de sa décision, ni détourner l’entretien de son objet en le transformant en enquête (Cass. soc. 25 mars 2010). Le salarié, quant à lui, exerce ses droits à la défense en présentant ses explications s’il y a lieu. À noter que son absence – quelle qu’en soit la cause - n’interrompt pas la procédure ni ne la prive de régularité. Il en va différemment lorsque cette absence résulte d’un cas de force majeur (Cass. soc. 15 décembre 2010), auquel cas l’entretien doit être reporté. Enfin, à noter que L'absence d'entretien préalable n'a pas pour effet de priver la cause du licenciement de son caractère réel et sérieux (Cass soc. 16 septembre 2015). Application de la règle aux faits

L’objectif est de permettre un débat contradictoire entre l’employeur et le salarié. Il doit être compris comme une garantie pour le salarié de faire valoir ses arguments. Son absence, s’il ne souhaite pas user de ce droit, ne peut avoir de conséquence sur la poursuite de la procédure. 4. Notification du licenciement

Le vendredi 30 mars, Mme

Frach notifie à M. Lenoir son licenciement par lettre recommandée. Ce dernier la retire et

l’ouvre en présence d’un huissier de justice. Le courrier ne comprend qu’une page blanche. Mme

Frach s’en excuse le 4 avril et remet le jour même, en main propre, la notification du licenciement à Firmin. Règle de droit applicable

À la suite de l’entretien, l’employeur doit notifier (c’est-à-dire porter à la connaissance) sa décision au salarié dans les formes requises par la loi.

Le licenciement doit être notifié par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, deux jours ouvrables au minimum après l’entretien préalable. La forme recommandée est impérative et il ne peut lui être substitué un courrier

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remis en main propre sous peine de voir la procédure déclarée irrégulière (Cass. soc. 24 janvier 2007). Ainsi un licenciement verbal ne peut faire l’objet d’une régularisation par écrit (Cass. soc. 9 mars 2011). En revanche, et contrairement à la procédure disciplinaire, la loi ne prévoit pas de délai maximum.

Application de la règle aux faits

La procédure est irrégulière dans la mesure où la notification ne peut s’opérer que par lettre recommandée avec accusé de réception.

5. Le contenu de la notification du licenciement

La lettre évoque la faute de M. Lenoir et l’impérieuse nécessité de procéder à son licenciement économique.

Règle de droit applicable

La lettre prononçant le licenciement doit impérativement contenir les mentions suivantes : - le ou les motifs de licenciement. Il doit être fait mention des griefs retenus à l’encontre du salarié justifiant la

rupture du contrat de travail. Les motifs doivent être précis et exhaustifs, dans la mesure où ils lient le juge et l’employeur en cas de litige. Ainsi, ce dernier ne saurait apporter de nouveaux éléments ou changer de motif à l’occasion d’une procédure contentieuse. De fait, le motif insuffisant ou erroné sera sanctionné par une absence de cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 21 mars 2007) ;

- les droits du salarié licencié en matière de droit individuel à la formation en l’absence de faute grave ou lourde. Droits qui pourront être utilisés pendant la durée du préavis ;

- la date de congé, c’est-à-dire la date à laquelle la rupture du contrat de travail sera consommée, en général à l’expiration du délai du préavis. En cas de dispense d’exécuter le préavis, il doit en être fait mention

impérativement.

Application de la règle aux faits

L’erreur de Mme

Frach ne peut être couverte par une nouvelle notification et les indications portées dans la notification la lieront en cas de contentieux (Cass. soc. 25 novembre 2009), ce qui ne fait aucun doute ici.

II - ÉTUDE DE DOCUMENT

1. Solution de la cour de cassation

Dans l’arrêt du 6 avril 2016, la cour de cassation se prononce sur deux problématiques : la première relative aux mentions devant figurer dans la convocation à l’entretien préalable au licenciement, la seconde relative au respect d’une procédure spécifique d’un salarié protégé. En l’espèce, un salarié, désigné délégué syndical par la CGT Chatou, a été licencié pour faute grave. Il saisit la juridiction prud’homale afin notamment de faire sanctionner par la nullité les mesures dont il a fait l’objet. Débouté par la cour d’appel de Versailles, il forme un pourvoi en cassation en soulevant deux moyens :

- d’une part, il fait valoir que la lettre de convocation à l’entretien préalable au licenciement doit préciser les motifs et

griefs invoqués à l’appui de la mesure. En effet, le salarié, objet d’une procédure de licenciement, doit être convoqué à un entretien préalable lui permettant d’exercer son droit à la défense. Or, si les griefs ne sont pas mentionnés dans la convocation, il ne peut utilement préparer sa défense comme le prévoit l’article 7 de la convention n°158 de l’OIT. Si l’article 1232-2 du code du travail n’exige pas une telle mention, il parait contradictoire de laisser un délai de 5 jours ouvrables au salarié pour préparer sa défense s’il ne connaît pas les éléments reprochés ;

- d’autre part, la qualité de délégué syndical, qui procède d’une désignation à la différence d’un mandat électif, exige le respect d’une procédure spécifique. Or, la cour d’appel s’est appuyée sur le simple fait que le salarié avait déclaré « ne pas avoir de mandat de n'importe quel syndicat que ce soit » pour en déduire que ce dernier avait

démissionné de son mandat, ce qui ne caractérise pas une démission effective. La cour de cassation rejette le premier argument au motif que le salarié dispose non seulement de la faculté de se faire assister à l’occasion de l’entretien préalable, mais aussi que ce dernier peut effectivement exercer son droit à la défense. L’absence d’indication des griefs dans la convocation ne porte donc pas atteinte au devoir de loyauté et au respect des droits du salarié.

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FINIS CORONAT OPUS

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Le licenciement pour motif économique : définition, cause, difficultés économiques, réorganisation de l’entreprise, sauvegarde de la compétitivité, reclassement et autres obligations de l’employeur,

procédure de licenciement

I – CAS PRATIQUE

1. Validité du motif du licenciement économique

M. Cordie, gérant de la société METABAR, a procédé à plusieurs licenciements pour motif économique. En premier lieu le licenciement de M

lle Anny, en raison de sa faible productivité dans le cadre d’une réorganisation de

l’entreprise aux fins d’améliorer les marges de la société. Le motif invoqué peut-il justifier un licenciement économique ?

Règle de droit applicable

Au terme de l’article L 1233-3 du code du travail, le licenciement pour motif économique ne peut être prononcé que pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié. Cela exclut tout motif se rapportant à la personne du salarié, tel que l’âge, l’inexpérience, le manque de productivité ou la faute.

Application de la règle aux faits

Selon les faits de l’espèce, la motivation du licenciement de Mlle

Anny résulte de son âge et de son manque de productivité. M

lle Anny aurait sans conteste pu prétendre à faire juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse.

2. Validité du licenciement économique

Au second semestre N, le chiffre d’affaire est quasi inexistant et en l’absence de nouveaux contrats, M. Cordie met en œuvre une procédure de licenciement économique. M

me Jaspe, M

lle Rulle et M. Hernin sont licenciés au regard des

difficultés économiques persistantes de la société. Leurs postes sont supprimés. Les motifs invoqués peuvent-ils justifier un licenciement économique ?

Règle de droit applicable

Le licenciement pour motif économique, pour être prononcé, doit répondre à plusieurs critères : - le ou les motifs doivent être non inhérents à la personne du salarié ; - il doit résulter d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un

élément essentiel du contrat de travail ; - lesdites suppressions, transformations ou modifications doivent être consécutives notamment à des difficultés

économiques, des mutations technologiques, une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ou à la cessation d’activité de l’entreprise.

Les difficultés économiques. Elles doivent être réelles (observables objectivement : bilan, résultat, contrats…) et d’une nature suffisamment sérieuse pour être justifiées. La jurisprudence offre un large panorama d’exemples : baisse persistante du résultat et du chiffre d’affaire (Cass. soc. 7 décembre 1993), perte du client unique (Cass. soc. 19 juillet 2000), perte financière compromettant de manière durable les résultats de l’entreprise (Cass. soc. 26 janvier 2005), baisse du volume d’activité conduisant inexorablement à une baisse des bénéfices (Cass. soc. 19 juin 2007). L’appréciation des difficultés s’effectue dans l’entreprise elle-même, dans le cadre du groupe si l’entreprise appartient à celui-ci, voire au regard du secteur d’activité du groupe auquel appartient l’entreprise (Cass. soc. 13 septembre 2006). Afin de mieux sécuriser le périmètre de cette notion la loi du 8 août 2016 est venue déterminer des indicateurs de

difficultés économiques. Ceux-ci doivent être caractérisées soit par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique tel qu’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation, soit par tout autre élément significatif de nature à justifier de ces difficultés. Le caractère significatif est constituée au regard de l’année précédente si la baisse des commandes ou du chiffres d’affaires est égale au moins à :

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- un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés, - deux trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés, - trois trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ; - quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus.

À noter que la lettre de licenciement doit impérativement indiquer l’incidence des difficultés économiques alléguées sur l’emploi ou le contrat de travail du salarié (Cass. soc. 4 mai 2011). À défaut, le licenciement est dépourvu de cause

réelle et sérieuse.

Application de la règle aux faits

Leur licenciement procède de difficultés économiques dont les indicateurs sont significatifs au regard de la loi. En effet l’entreprise compte 150 salariés, et au regard de l’année précédente le chiffre d’affaires est en baisse depuis plus de trois trimestres. Le licenciement pour motif économique est donc régulier. 3. Sauvegarde de la compétitivité et licenciement économique

Face à une compétitivité mordante, M. Cordie souhaite prévenir les difficultés futures et maintenir la compétitivité de l’entreprise. Il procède sous ce motif à un nouveau licenciement économique de trois salariés, MM. Delpech et Jus ainsi que M

me Fon.

La sauvegarde de la compétitivité peut-elle justifier un licenciement économique ? Règle de droit applicable

La réorganisation de l’entreprise. Le motif, admis par la jurisprudence, l’est désormais par la loi à condition d’être justifié par la nécessité de faire face à la compétitivité économique au regard des difficultés de l’entreprise. Néanmoins

les difficultés économiques ont un caractère accessoire, il suffit en effet que leur aspect prévisible rende nécessaire au nom de la compétitivité une réorganisation de l’entreprise pour justifier le principe du licenciement économique (la réorganisation doit obligatoirement être justifiée par cet impératif : Cass. soc. 31 mars 2010, Cass. soc. 5 mai 2011, à défaut les licenciements économiques sont sans cause réelle et sérieuse). La restructuration préventive est licite mais à la condition qu’il existe une menace sur sa compétitivité (Cass.soc. 5 mai 2011 ; cass.soc.4 mars 2015). Ainsi une réorganisation justifiée par la seule volonté d’améliorer les résultats de l’entreprise ne peut autoriser un licenciement économique (Cass. Soc. 13 septembre 2006).

Application de la règle aux faits

Le motif invoqué par M. Cordie relève d’une simple hypothèse sur l’avenir. En effet, les difficultés supposées ne sont pas avérées au jour du licenciement et la réorganisation de l’entreprise n’est justifiée que par la volonté de les prévenir aux fins de consolider la compétitivité de l’entreprise. Cette situation est validée par la cour de cassation (5 mai 2011 ; cass. Soc 4 mars 2015) qui estime qu’une « réorganisation mise en œuvre pour prévenir des difficultés économiques à venir liées à des évolutions technologiques et leurs conséquences sur l’emploi, est justifiée sans être subordonnée à l’existence de difficultés économiques à la date du licenciement ». MM Delpech, Jus et M

me Fons pourront être licenciés

pour motif économique.

4. L’obligation de reclassement

M. Cordie leur propose une liste de 20 postes disponibles au titre des mesures de reclassement, sans tenir compte des postes précédemment occupés. L’employeur a-t-il satisfait à son obligation de reclassement ?

Application de la règle aux faits

Le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré dans l’entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient. L’existence d’un plan de sauvegarde de l’emploi ne dispense pas l’employeur de rechercher des solutions de reclassement hors le plan (Cass soc. 1er juillet 2015). Il s’agit donc d’une condition substantielle du licenciement économique. Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie assorti d’une rémunération équivalente (C. trav. art. 1233-4), mais l’employeur doit tenir compte des emplois précédemment occupés et des

compétences du salarié sans limiter ses offres en fonction de la volonté présumée du salarié de les refuser (Cass soc. 20 janvier 2015). À défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, le reclassement s’effectue sur un emploi d’une catégorie inférieure. D’autre part, il est nécessaire que les offres de reclassement proposées au salarié soient individualisées, écrites, concrètes et précises (C. trav. art. 1233-4, Cass. soc. 13 octobre 2010 - 30 mars 2011), ce qui exclut par principe une liste d’emplois. À défaut, il faut considérer que les obligations de l’employeur n’ont pas été respectées. En cas de

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contentieux l’employeur doit justifier de ses recherches positives et effectives de reclassement (cass. soc. 13 nov. 2013). Lorsque des établissements appartenant au groupe ou à l’entreprise dans laquelle se trouve le salarié, sont établis à l’étranger, ce dernier peut demander à ce que les emplois disponibles lui soient communiqués. Il incombe au salarié d'en faire la demande et de préciser les contraintes salariales ou de localisation spécifiques. Enfin, le principe de bonne foi impose à l’employeur d’accorder au salarié un délai de réflexion raisonnable afin de lui permettre de se prononcer sur l’offre de reclassement (Soc., 16 mai 2007 ; Soc., 28 oct. 2009). Un délai de quatre jours

étant manifestement insuffisant (cass. soc.19 février 2014). Application de la règle aux faits

La proposition de M. Cordie ne répond pas aux exigences légales et jurisprudentielles, il doit fournir à chaque salarié une offre de reclassement lui correspondant. À défaut, ils pourront contester le caractère réel et sérieux du licenciement économique. La question du délai devient superfétatoire, mais en toute hypothèse il conviendra de laisser un délai de plus de 4 jours au minimum.

5. Le congé de reclassement

Les salariés concernés souhaiteraient bénéficier d’un congé de reclassement. Peuvent-ils en bénéficier ? Règle de droit applicable

Le congé de reclassement n’est accessible qu’aux salariés des entreprises occupant au moins 1 000 salariés et à celles astreintes à la mise en place d’un comité de groupe. Application de la règle aux faits

L’entreprise ne compte que 150 salariés. Le congé de reclassement est donc impossible. 6. Le reclassement dans une société du groupe

Une société tierce mais appartenant au même groupe que la société prononçant un licenciement économique est-elle assujettie à l’obligation de reclassement ? Règle de droit applicable

Au terme de l’article L 1233-4 du code du travail, les mesures de reclassement doivent être recherchées dans l’entreprise elle-même mais aussi dans les sociétés du groupe auquel elle appartient. La notion de groupe retenue est par ailleurs plus économique que juridique (en ce sens Cass. soc. 7 fev. 2007). Néanmoins, une société du groupe ne répond pas en cette seule qualité, à l’égard des salariés licenciés, des conséquences d’une insuffisance des mesures de reclassement prévues dans un plan de sauvegarde de l’emploi (cass. soc. 13 janvier 2010). Application de la règle aux faits

Si une société du groupe n’est pas en tant que telle débitrice d’une obligation de reclassement, l’entreprise procédant au

licenciement doit impérativement en rechercher les possibilités dans les sociétés du même groupe. Si tel n’a pas été le cas, les salariés sont fondés à agir.

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II – QUESTION DE COURS

1. Tableau de la procédure de licenciement pour motif économique de 2 à 9 salariés

Dans le s 8 jours de l'e nv oi des le ttre s de lice nci eme nt

INFORM AT ION DE LA D IRECCT E

RECLAS SEM ENT DES SALARIE S

CONVO CATIO N A L'ENTRETIEN PREALABLE

Délai de 5 jours ouvra ble s

ENTRETIE N P RE ALABLE

Délai de 7 jours ouvra ble s

NOTIFICATION DU LICENCIEM ENT

LICE NCIEM ENT E CO NO MIQ UE DE 2 A 9 SALARIES

ACTIO NS DE FO RM ATION ET D 'ADAPT ATI ON

En cours de v ie sociale

D iff icultés é conomique s

Lice nc iements é conomique s e nv isagé s

INFORMATIO N DU CE OU DPP uis

REUNION DU CE OU DP

2. Le plan de sauvegarde de l’emploi

Le plan de sauvegarde de l’emploi est une obligation légale pour les entreprises de plus de 50 salariés qui procèdent à

un licenciement de 10 salariés au moins sur une période de 30 jours. Il vise à limiter ou atténuer les effets des licenciements économiques en prévoyant toute mesure de formation, de reclassement, d’adaptation, de réduction de la durée du travail.Dans les entreprises de moins de 50 salariés il n’y a pas d’obligation d’établir un PSE. Néanmoins, le directeur régional de la DIRECCTE, s’assure du respect par l’employeur de ses obligations légales, à savoir la consultation des délégués du personnel et la mise en place de mesures destinées à éviter ou limiter les licenciements ou encore de favoriser le reclassement des salariés. Le dispositif a été profondément remanié par la loi du 14 juin 2013 pour les entreprises d’au moins 50 salariés pour lesquelles le législateur a souhaité inciter les entreprises à la mise en place d’un PSE négocié.

La loi prévoit ainsi trois modalités d’élaboration d’un PSE :

- L’accord de méthode (qui ne constitue pas une nouveauté). Un accord d’entreprise de groupe ou de branche

peut fixer les modalités selon lesquelles le CE sera consulté sur le projet de licenciement. Cet accord ne peut déroger aux règles générales de consultation du CE et de communication des représentants du personnel.

- L’accord majoritaire. Un accord collectif majoritaire (c’est-à-dire adopté par une ou plusieurs organisations

syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés aux dernières élections professionnelles) peut déterminer le contenu (nombre de licenciements, calendrier, dispositifs de formation et de reclassement…) du PSE et les conditions et modalités selon lesquelles le CE sera consulté. L’accord doit ensuite être validé par le Direccte.

- L’élaboration unilatérale par l’employeur. A défaut d’accord majoritaire ou si l’employeur n’a pas engagé de

négociations, il est possible à ce dernier d’élaborer unilatéralement le contenu du PSE. Ce dispositif ne dispense pas l’employeur des consultations obligatoires des institutions représentatives du personnel et doit être homologué par le Direccte.

Enfin, la loi associe l’autorité administrative aux différentes étapes du licenciement pour motif économique :

- Le projet de licenciement pour motif économique d’au moins 10 salariés sur une période de 30 jours doit être notifié au Direccte.

- Dans les entreprises de moins de 50 salariés (donc non soumises au PSE), le Direccte vérifie l’observation par l’employeur de ses obligations légales et peut formuler toutes observations utiles sur les mesures envisagées.

- Dans les entreprises d’au moins 50 salariés (donc soumises à un PSE), le Direccte peut intervenir à tout

moment de la procédure et formuler des observations ou préconisations relatives au PSE. Il doit à l’issue de la procédure homologuer (document unilatéral) ou valider (accord négocié) le PSE.

Si le conseil de Prud’hommes reste compétent pour apprécier la validité du motif économique, c’est désormais le tribunal administratif qui sera compétent pour les autres termes du litige.

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III - ÉTUDE DE DOCUMENT

1. Problème de droit

Quelles sont les conditions de mise en œuvre de l’obligation de reclassement ? 2. Solution de la cour

Préalable à tout licenciement pour motif économique, l’employeur doit s’efforcer de réaliser tous les efforts de reclassement du salarié licencié. Cette obligation figurant à l’article 1233-4 a fait l’objet d’une abondante jurisprudence

venue préciser les contours de cette obligation. En effet, si les offres doivent être précises, individualisées, concrètes, la mise en œuvre de l’obligation de reclassement doit être faite loyalement. La portée de cette exigence irrigue tous les aspects du reclassement. Ainsi une transmission tardive des offres n’est pas loyale, de même si la recherche des offres est insuffisante (Cass. soc. 2 juillet 2014), si le liquidateur a prononcé les licenciements sans attendre les offres du groupe (Cass. soc. 28 mai 2015) ou encore l’employeur soutenant qu’il ne disposait d’aucun poste vacant sans justifier d’aucune recherche effective de reclassement (Cass. soc. 28 janvier 2015). L’arrêt du 16 juin 2016 se trouve dans le prolongement de cette exigence. En l’espèce, une salariée a été licenciée pour motif économique suite à la cessation d’activité de son entreprise. Considérant que l’employeur n’avait pas agi loyalement dans la mise en œuvre de son obligation de reclassement, elle estime le licenciement comme sans cause

réelle et sérieuse. L’employeur, condamné en appel, fait valoir plusieurs arguments de nature à mettre en évidence l’accomplissement loyal de toutes les diligences exigées par la loi :

- conformément aux obligations légales, un poste comparable et pour une rémunération identique a été proposé en Allemagne à la salariée ;

- la loi impose de rechercher un poste disponible de même catégorie que le précédent mais non de garantir la proximité des emplois des conjoints licenciés ;

- un emploi de même catégorie a été proposé au conjoint de la salariée, en Allemagne, emploi qui n’a pas été

accepté au profit d’un poste en Belgique ; - L’obligation de résidence imposée au conjoint ne constitue pas une mesure déloyale dès lors que l’entreprise n’a

plus d’activité en France. La cour de cassation rejette les arguments, jugeant qu’une entreprise de dimension internationale ne proposant qu’un poste distant de 800 km de celui de son mari sans justifier de l’impossibilité de proposer des emplois plus proches n’a pas agi loyalement.

3. Exigence de la cour pour que la réorganisation de l’entreprise puisse justifier un licenciement économique

Au terme de l’article L 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement prononcé :

- pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié ; - résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément

essentiel du contrat de travail ; - consécutives notamment :

- à des difficultés économiques, - à des mutations technologiques, - à une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité, - à la cessation d’activité de l’entreprise.

La réorganisation de l’entreprise peut ainsi aboutir à une suppression d’emploi justifiant une procédure de licenciement pour motif économique. Encore faut-il que la réorganisation soit motivée par une nécessaire sauvegarde de la compétitivité. L’employeur doit ainsi apporter « la preuve d’une menace pesant sur la compétitivité de l’entreprise devant entraîner une dégradation de sa position sur le marché, susceptible d’engendrer des difficultés économiques à venir et

de compromettre les emplois s’il n’y est pas porté remède par des mesures d’anticipation (CA Paris 19 mai 2015). Dans l’arrêt du 4 mars 2015, la salariée conteste la validité du motif invoqué par l’employeur dans la mesure où un office notarial, soumis à numerus clausus, n’est pas exposé à la concurrence. De fait, la réorganisation de l’entreprise aux fins de maintenir sa compétitivité se trouve infondée. Si la cour d’appel retient cette argumentation pour juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse, il n’en va pas de même pour la cour de cassation. En premier lieu, elle précise qu’un office notarial constitue une entreprise entrant dans le champ d’application de l’article 1233-3 du code du travail. En second lieu, elle censure l’arrêt dans la mesure où la preuve de la menace sur la compétitivité de l’entreprise n’a pas été recherchée, la simple baisse du chiffre d’affaires étant insuffisante à en rapporter la preuve.

Dans une jurisprudence constante, cet arrêt illustre parfaitement que l’employeur ne peut se satisfaire d’invoquer la sauvegarde de la compétitivité, il doit en effet apporter la preuve de l’existence de menaces sur cette dernière de nature à justifier une réorganisation de l’entreprise.

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L’ARGENT, TOUJOURS L’ARGENT

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Les conséquences de la rupture du contrat de travail : les indemnités en cas de licenciement régulier et irrégulier, l’attestation de travail, le solde de tout compte, l’attestation ASSEDIC

CAS PRATIQUE 1. Indemnités de licenciement

De graves erreurs d’appréciations conduisent la société MERLIN à procéder au licenciement de M. Lafront, licenciement pour faute grave.

Quelles sont les indemnités auxquelles il peut prétendre ? Règles de droit applicables

L’employeur peut être tenu de verser au salarié les indemnités suivantes : L’indemnité compensatrice de préavis Équivalente aux rémunérations que le salarié aurait perçues s’il avait travaillé jusqu’au terme du préavis, l’employeur doit la verser dans les cas suivants :

- l’employeur a lui-même demandé au salarié de ne pas effectuer le préavis ; - l’employeur à licencié le salarié pour faute grave ou lourde, mais le Conseil de Prud’hommes n’a pas retenu cette

qualification. Cette indemnité n’a pas à être versée dans les hypothèses suivantes :

- en cas de licenciement pour faute grave ou lourde ; - si le salarié sollicite la dispense de son préavis ; - si le salarié est dans l’incapacité d’exécuter le préavis ;

- en cas d’inaptitude suite à un accident ou une maladie non professionnelle. L’indemnité compensatrice de congés payés Elle correspond à une indemnisation des jours de congés que le salarié n’a pu prendre du fait de la rupture de son contrat de travail. L’indemnité légale de licenciement Elle est due au salarié qui bénéficie d’une ancienneté de 1 ans au moins dans la même entreprise (L 1234-9 C.Trav.).

Au lieu et place de cette indemnité, le salarié peut demander à bénéficier de l’indemnité de même nature prévue par la convention collective (Cass. soc. 12 janvier 2006). Mais il ne saurait la cumuler avec l’indemnité légale. Elle n’est pas due en cas de faute grave ou lourde. Application de la règle aux faits

M. Lafront, licencié pour faute grave, ne percevra que l’indemnité de congés payés. Si son ancienneté était de moins d’un an cela n’aurait pas d’incidence dans notre cas.

2. Nature des indemnités de licenciement

Le jeudi 01 juin N la société MERLIN convoque le salarié à un entretien préalable à licenciement prévu le mardi 6 juin. L’employeur lui notifie sont licenciement pour faute le jeudi 8 juin, sans pour autant retenir la faute grave. La notification est-elle régulière et quelles sont les indemnités dues au salarié ?

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Règle de droit applicable

D’une part, l’employeur doit respecter un délai de 5 jours ouvrables entre la présentation de la lettre recommandée (ou la remise en main propre) et l’entretien préalable. Le décompte des jours se fait à partir du lendemain de la présentation de la lettre et exclu les dimanches, les jours fériés et les jours non ouvrables. En ce sens, la cour de cassation rappelle les règles de décompte des jours dont la violation justifie le versement de dommages-intérêts –cass.soc. 3 juin 2015-. D’autre part, la notification du licenciement ne peut intervenir que deux jours ouvrables après l’entretien préalable. L’irrégularité est sanctionnée par une indemnité spécifique. Quant aux indemnités de licenciement, elles sont identiques que le licenciement soit prononcé pour un motif personnel ou pour un motif économique. L’indemnité de licenciement ne

peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté, auquel s’ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d’ancienneté. Les conventions ou accords collectifs peuvent prévoir des dispositions plus favorables aux salariés. Il peut alors en bénéficier mais ne peut la cumuler avec l’indemnité légale. Au terme de l’article R 1234-4, « le salaire à prendre en considération pour le calcul de l’indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié : 1° Soit le douzième de la rémunération des douze derniers mois précédant le licenciement ; 2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n’est prise en compte que dans la limite d’un montant calculé à due proportion ».

Application de la règle aux faits

Le licenciement étant irrégulier en la forme, il peut être contesté et donner lieu à indemnité. En ce qui concerne les indemnités de licenciement, leur calcul se fera selon les modalités ci-dessus décrites.

3. L’indemnité contractuelle

À l’issue du préavis, l’employeur refuse de verser au salarié une indemnité de licenciement prévue au contrat dans la mesure où il perçoit déjà l’indemnité conventionnelle. Règle de droit

Lorsque les parties ont prévu au contrat de travail le versement d’une indemnité en cas de rupture du contrat, l’indemnité est due et se cumule avec les autres indemnités, sauf stipulation conventionnelle contraire (Cass. soc. 28 février 2006).

Application de la règle aux faits

M. Lafront peut exiger le versement de l’indemnité contractuelle.

4. La remise des documents

Enfin l’employeur lui remet une attestation de travail et son solde de tout compte, mais ce dernier lui paraît incomplet. Quant à l’attestation pour Pôle Emploi, aux dires de l’employeur, elle n’est pas nécessaire puisque le motif du licenciement n’ouvre pas droit à la perception des allocations chômage.

Règle de droit applicable

Au terme de l’article R 351-5 du code du travail, l’employeur à l’obligation de remettre au salarié, à l’issue de la relation

de travail, une attestation lui permettant de faire valoir ses droits aux prestations d’assurance chômage (il doit effectuer un envoi du même exemplaire à Pôle Emploi). La remise de l’attestation est obligatoire quelle que soit la nature du contrat ou sa durée. L’employeur ne saurait s’ériger en juge des droits du salarié. Il ne peut ainsi en refuser la délivrance au motif que le fondement de la rupture du contrat a pour effet de priver le salarié de ses droits (en cas de démission par exemple). Forme et contenu de l’attestation pour Pôle Emploi L’attestation consiste en un formulaire que l’employeur peut obtenir librement auprès de Pôle Emploi.

Il doit remplir les mentions obligatoires permettant de connaître les droits ouverts au salarié, tels que les dates d’emplois, le motif de la rupture (démission, licenciement pour motif personnel, licenciement pour motif économique, gravité de la faute s’il y a lieu… Cette indication est essentielle car le salarié est justifié à demander réparation en cas d’erreur préjudiciable Cass. soc. 27 septembre 2006), le montant des rémunérations brutes, le nom et la qualité du signataire ainsi que le cachet de l’employeur. Une fois remplie, l’employeur en remet un exemplaire au salarié et concomitamment en transmet un double à Pôle Emploi. Il est dispensé de cette dernière formalité s’il utilise son service en ligne.

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Sanctions

L’employeur qui ne satisfait pas à l’obligation de délivrance de l’attestation ou en cas de remise tardive encourt des sanctions pénales et civiles. Pénale au titre des contraventions de la 5

e classe (peine d’amende jusqu’à 1 500 euros) et

civile par l’octroi de dommages intérêts puisque l’absence de remise crée de fait un préjudice sans qu’il soit nécessaire d’en rapporter les éléments de preuve (Cass. soc. 4 février 2015 ; Cass. soc. 1er avril 2015). Le reçu pour compte de tout solde

Absence d’obligation légale Le reçu pour solde de tout compte ainsi que sa signature par le salarié n’ont qu’un caractère facultatif, au contraire du

certificat de travail et de l’attestation pour Pôle Emploi. Il relève donc de la pratique. Forme et contenu Établi au terme de la relation de travail, le reçu pour solde de tout compte n’est contraint à aucune condition de forme. Établi en double exemplaire, dont un pour le salarié, il peut comporter :

- les noms et prénoms du salarié ; - les sommes qui restaient à devoir et qui ont été effectivement versées (éléments de rémunération et

d’indemnisation) ;

- la date d’établissement du reçu ; - la mention manuscrite du salarié « pour solde de tout compte » suivie de sa signature.

Litige Le salarié dispose d’un délai de 6 mois pour contester le reçu pour solde de tout compte. Au-delà, il produit un effet libératoire pour l’employeur au regard des sommes qui y sont portées.

Application de la règle aux faits

L’employeur à l’obligation de remettre M. Lafront son attestation pour Pôle Emploi. Il ne peut s’instituer en juge de ses droits. D’autre part, le salarié pourra contester le solde de tout compte dans le délai de 6 mois. Au-delà, il produit un effet libératoire pour l’employeur. 5. Les indemnités en cas de licenciement irrégulier

M. Lafront prend la décision de saisir la juridiction prud’homale. Il remet en cause la légitimité de son licenciement et le

considère comme abusif. Quelles sont les indemnités en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ? Règle de droit applicable

La rupture du contrat de travail peut toujours être contestée devant la juridiction prud’homale. Le cas le plus fréquent étant celui où le salarié conteste la légitimité de son licenciement, c’est-à-dire en réfute le caractère réel et sérieux. Lorsqu’il est fait droit aux prétentions du salarié, le conseil de prud’hommes sanctionne l’employeur en l’obligeant au versement d’une indemnité destinée à compenser le préjudice subit par le salarié. Cette indemnité varie dans les cas

suivants : Le salarié a 2 ans d’ancienneté au moins et l’entreprise compte au moins 11 salariés (C. Trav. L1235-2 à 1235-4) Le salarié peut être réintégré de droit dans l’entreprise. En cas de refus, son indemnisation est égale au minimum à six mois de salaire. En outre, l’employeur peut être tenu de rembourser aux ASSEDIC les indemnités chômage perçues par le salarié dans la limite de 6 mois maximum. En cas d’irrégularité dans la procédure et si le licenciement est justifié, l’indemnité est égale au maximum à un mois de salaire.

Enfin, les indemnités versées se cumulent avec celles prévues au titre du licenciement. Le salarié a moins de 2 ans d’ancienneté ou l’entreprise compte moins de 11 salariés (C .Trav. L1235-5) Que le licenciement soit infondé ou que la procédure n’ait pas été respectée, le salarié est indemnisé à hauteur du préjudice subi. C’est donc le tribunal, au vu des éléments qui lui sont soumis, qui évalue le montant de l’indemnité. À noter que la cour de cassation, dans un arrêt en date du 9 janvier 2008, fait application des sanctions prévues à l’article L1235-3 C Trav. pour irrégularité de procédure, lorsqu’en l’absence de représentant du personnel dans l’entreprise, la règle relative à l’assistance du salarié par un conseiller n’a pas été respectée, que le licenciement repose ou non sur une

cause réelle et sérieuse. Le salarié peut au surplus demander réparation du préjudice en résultant. Application de la règle aux faits

M. Lafront est salarié d’une société comprenant 25 salariés et il compte une ancienneté de 4 ans. Par conséquent, s’il obtient gain de cause, son indemnité sera au minimum de 6 mois de salaire sans préjudice des autres indemnités.

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MARQUIS

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

La démission et la prise d’acte : conditions de fond et de forme de la démission, nature de la prise d’acte, conditions, conséquences, pouvoir d’appréciation du juge

I – CAS PRATIQUE 1. Validité de la démission

Mme

Guilleron a décidé de démissionner. Sans laisser de message, elle ne s’est pas présentée à son travail en début de semaine. Après 4 jours elle s’est présentée le vendredi sur son lieu de travail. Sur son bureau une lettre de l’employeur prenait acte de sa démission. Quelles sont les conditions de validité de la démission ?

Règle de droit applicable

La démission doit résulter d’une volonté claire, sérieuse et non équivoque de rompre le contrat de travail (Cass soc. 15 janvier 2015). Cela exclut toute interprétation ou supposition tirée de l’absence d’un salarié (Cass. soc. 30 mai 2000) ou de son comportement en principe (Cass. soc. 13 avril 2005 : un salarié d’une entreprise en liquidation, qui recherche un nouvel emploi ne peut être considéré comme démissionnaire). Ainsi la démission ne se présume pas et doit être l’expression d’une réflexion sérieuse et aboutie du salarié sans qu’il soit nécessaire de la motiver. Ne répondent pas aux critères de la loi : une démission donnée sous l’empire de la colère ou d’un mouvement d’humeur (Cass. soc., 19 oct. 2005), une démission donnée sous la contrainte (Cass. soc. 9 décembre 2009), une démission donnée dans une grande situation

d’énervement (Cass. soc. 1er févr. 2000), une démission donnée dans un état psychologique de nature à altérer le jugement. La cour de cassation, dans un arrêt du 15 janvier 2002, rappelle ce principe et sanctionne à cet effet la décision de la cour d’appel. En l’espèce, une salariée avait refusé la modification apportée à son contrat de travail, les juges du seconde degré en déduisent « qu’il est constant que c’est M

me X... qui a démissionné en refusant d’accepter la

modification de son horaire de travail ». Cette lecture de la loi est immédiatement rejetée par les juges suprêmes au motif que l’on ne peut déduire de la situation une volonté claire et non équivoque de démissionner. En cas d’absence, la cour de cassation sanctionne le fait qu’un salarié puisse être considéré comme démissionnaire s’il abandonne son poste sans explication dans les jours qui ont suivi son embauche (Cass. soc.2 avril 2003). D’une

manière générale, l’abandon de poste ne peut être analysé en une démission (en ce sens Cass. soc. 23 mars 2011). La démission implicite n’est par principe pas recevable, même si la juridiction suprême a pu en certaine occasion l’accepter (Cass. soc. 28 septembre 2004). Notons enfin que l’accord de l’employeur est indifférent quant aux effets de la démission. La loi ne pose aucune condition de forme. La démission peut aussi bien résulter d’un écrit, qu’être formulée oralement (Cass. soc. 13 juin 2001). Bien sûr, cette dernière hypothèse ne permet pas de se réserver la preuve que les conditions de fond sont remplies, c’est la raison pour laquelle il est toujours préférable d’en obtenir la confirmation par lettre.

Les conventions collectives peuvent prévoir des modalités particulières de fond et de forme (délai, forme écrite…), mais leur violation ne vide pas la démission de ses effets. Application de la règle aux faits

L’absence de présentation de Mme

Guilleron, sans qu’elle soit justifiée, ne peut être constitutive d’une volonté claire et sérieuse de démissionner. L’employeur est infondé à prendre acte de sa démission et pourra être condamné pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Quant à la forme de la démission, elle est indifférente.

2. L’usage du pouvoir disciplinaire

En pareille hypothèse, l’employeur aurait du user de son pouvoir disciplinaire et sanctionner la salariée pour abandon de poste.

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3. Validité de la démission

Une autre salariée, Mlle

Jakpotte, a donné sa démission à l’occasion d’un entretien qui s’est déroulé en présence de l’employeur, de son fils et de deux autres salariés. Règle de droit applicable

Comme rappelé dans la question 1, la démission est un acte de volonté unilatéral, qui doit être clair sérieux et non équivoque. En tant qu’expression de la volonté, elle ne doit pas être la conséquence d’une manœuvre ou d’une contrainte.

Application de la règle aux faits

Les conditions dans lesquelles Mlle

Jakpotte a donné sa démission constituent une contrainte de nature à remettre en cause la liberté de sa volonté et encourt la censure. 4. La prise d’acte

Il s’avère en réalité que le fils de l’employeur exerçait sur Mlle JAKPOTTE des pressions constantes afin d’obtenir de sa

part des faveurs libertines auxquelles elle n’a jamais répondu. Règle de droit applicable

Principe L’inobservation par l’employeur de ses obligations légales, conventionnelles, ou contractuelles peut justifier que le salarié prenne l’initiative de la rupture (Cass soc. 18 février 2015). La faute de l’employeur justifie de mettre un terme au contrat de travail, mais c’est au salarié qui l’invoque d’être en mesure de démontrer l’existence d’une faute de l’employeur. C’est donc a lui qu’il incombe d’en apporter la preuve (Cass. Soc. 19 décembre 2007). La prise d’acte

entraîne la rupture immédiate du contrat de travail et ne peut être rétractée (cass.soc.3 nov. 2009). Les fautes sont d’une grande variété et laissées à l’appréciation du juge qui doit vérifier si les manquements reprochés à l’employeur justifient ou non la rupture du contrat (Cass. Soc 26 septembre 2007). Illustrations

- Les actes répétés de harcèlement moral (Cass. Soc. 27 octobre 2004) - Le fait pour l’employeur de ne pas faire cesser des salariés de fumer dans un bureau (Cass. Soc. 29 juin 2005). - Atteinte à l’intégrité physique du salarié (cass. Soc 30 octobre 2007) - Une rémunération non conforme à l’ancienneté et aux responsabilités exercées (cass.soc.21 mars 2012).

- Le non-paiement des heures de délégation (cass.soc.14 oct.2015) Effets Le juge chargé d’apprécier la situation doit vérifier si les manquements invoqués sont justifiés (cass. soc. 18 avril 2008, cass.soc.3 fev.2010). A la lueur de ses observations il peut conclure soit que:

Les faits fautifs évoqués sont insuffisamment prouvés, insuffisamment graves ou ne justifient pas la rupture du contrat de travail. Il doit alors conclure à la démission du salarié. Le salarié peut être condamné à verser à l’employeur une indemnité compensatrice de préavis (Cass. soc. 31 mars 2016).

Les manquements fautifs de l’employeur sont avérés et leur gravité justifie la rupture unilatérale du contrat de travail. La démission produit alors les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Dans cette hypothèse le salarié est admis au bénéfice de l’ensemble des indemnités liées à cette qualification. La prise d’acte emporte la cessation immédiate du contrat de travail et autorise le salarié à quitter immédiatement l’entreprise (Soc. 30 janvier 2008). Application de la règle aux faits

Les agissements du fils de l’employeur sont constitutifs de faits de harcèlement et de faits discriminatoires. À ce double titre

ils pourront être doublement sanctionnés. La responsabilité pourra incomber à l’employeur au regard de son obligation de résultat en la matière. La salariée pouvait ainsi prendre acte de la rupture de son contrat aux torts exclusifs de l’employeur.

II- QUESTION DE COURS 1. La démission et le bénéfice de l’assurance chômage

Le chômage ouvre droit, au salarié qui en remplit les conditions, à la perception d’une allocation chômage qui repose sur un système d’assurance. Le demandeur d’emploi doit procéder à son inscription auprès de Pôle Emploi pour bénéficier des droits que lui confère son statut.

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Le bénéfice de l’allocation d’aide au retour à l’emploi est accordé aux conditions suivantes :

- être inscrit comme demandeur d’emploi ou accomplir une action de formation ; - justifier d’une durée de cotisation suffisante (activité salariée pendant au moins 6 mois au cours des 22 mois

précédant la fin du contrat de travail dans le cas général) ; - être âgé de moins de 60 ans (exception jusqu’à 65 ans si le demandeur d’emploi ne peut bénéficier d’une retraite à

taux plein) ;

- ne pas être en chômage saisonnier (les conditions sont définies par la Convention du 18 janvier 2006) ; - être involontairement privé d’emploi.

Cette dernière exigence suppose une condition extérieure à la volonté du salarié. Sont donc visés en premier lieu les licenciements, mêmes prononcés pour faute, ou encore les fins de CDD. Suivant ce principe, le salarié démissionnaire est donc exclu du bénéficie de l’assurance chômage. Par exception, certaines démissions sont reconnues comme légitimes et ouvrent droit au bénéficie des prestations d’assurance. Sans en dresser la liste intégrale (11 cas), nous pouvons citer les cas suivants :

- la démission à la suite du non paiement des salaires. Cette situation doit être constatée judiciairement ; - démission à la suite d’actes délictueux dont le salarié est victime. Il est nécessaire de produire le récépissé du

dépôt de plainte auprès du procureur de la république ; - démission pour changement de résidence suite à des violences conjugales ; - démission pour création d’entreprise. - enfin, la démission pour changement de résidence. Le changement doit être justifié par l’une des hypothèses

suivantes : - pour suivre son conjoint ou concubin qui change de résidence pour un motif professionnel tels qu’une mutation

au sein d’une entreprise, un changement d’employeur, ou une reprise d’emploi après une période de chômage ; - pour suivre ses parents ou la personne qui exerce l’autorité parentale pour les personnes âgées de moins de

18 ans ; - le mariage ou la conclusion d’un pacte civil de solidarité entraînant un changement de résidence, sous

réserve que le délai entre la fin de l’emploi et le mariage ou la conclusion du pacte civil de solidarité ne soit pas supérieur à deux mois.

III- ÉTUDE DE DOCUMENT 1. Rappelez les faits de l’espèce et posez le problème de droit

M. X..., a été engagé le 1er juillet 2001 par la société Home expertise center en qualité de responsable informatique, et a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 23 août 2006. Il a ensuite saisi le conseil de Prud’hommes aux fins de faire requalifier sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Sa demande ayant été rejetée par la cour d’appel, M. X. forme un pourvoi en cassation. La haute cour doit apprécier si les manquements imputés à l’employeur sont suffisamment graves pour justifier la requalification de sa démission.

2. Expliquez la solution de la cour de cassation

M. X fait valoir trois arguments à l’appui de sa demande : - d’une part il considère que ses congés payés, toujours de courte durée, ne répondent pas à la finalité que la loi leur assigne dans la mesure où à l’occasion de ces derniers il devait être toujours joignable et était systématiquement appelé par l’employeur, - d’autre part, M. X. reproche à l’employeur de l’avoir pas annuellement informé de ses droits en matière de droit

individuel à la formation, - enfin, l’employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat en ne soumettant pas le salarié aux examens médicaux avec la régularité que la loi impose. L’intérêt de cet arrêt porte non pas sur la nature des manquements imputables à l’employeur, que sur les conséquences que le salarié doit tirer de ces mêmes manquements. En effet la rupture du contrat aux torts de l’employeur suppose la violation d’obligation ou des manquements suffisamment graves pour imposer une rupture immédiate du contrat de travail. Or si les faits d’une part sont anciens et d’autre part révèlent que le contrat s’est poursuivi, il convient de

considérer que les manquements imputés à l’employeur n’étaient pas d’une gravité telle qu’ils imposaient la rupture du contrat de travail. Par contre et sans remettre en cause la qualification d’une démission de M.X., la cour censure l’arrêt de la cour d’appel quant aux indemnités de congés payés. En effet, la mention sur le bulletin de paye de congés payés non pris vaut acceptation par l’employeur de leur report sur l’année suivante.

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3. Fondement sur lequel la cour de cassation justifie sa décision - Contours juridiques de cette notion

Le salarié peut ne pas prendre l’initiative de la rupture de son contrat aux torts de l’employeur mais soumettre au juge le soin de trancher le litige. Ce dernier doit en effet apprécier si les manquements reprochés à l’employeur sont suffisamment graves pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail. En l’espèce, une salariée estime que les propos de l’employeur tenus à son endroit constituent un manquement à ses obligations et justifient la résiliation aux

torts de l’employeur. La cour d’appel déboute la salariée de sa demande en estimant que les seuls propos avancés sont insuffisants pour caractériser un manquement fautif. La cour de cassation ne l’entend pas ainsi, et précise que l’atteinte à la dignité du salarié « constitue un manquement grave à ses obligations ». Cette notion dont les contours sont mal définis est contraire à l’exécution de bonne foi du contrat de travail visé à l’article 1222-1 du code du travail. Ainsi, même en l’absence de répétition des faits fautifs ou de manquement à une obligation précise du contrat, les agissements de l’employeur peuvent caractériser une faute justifiant la rupture du contrat. Les propos dégradants sont de cette nature, tout autant, peut-on l’imaginer, que des conditions de travail indignes, ou encore la stigmatisation d’un salarié devant l’ensemble du personnel (Cass. soc. 25 février 2003).

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TU QUOQUE MI FILI

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Mise et départ à la retraite : distinction, conditions, cumul emploi retraite

I - CAS PRATIQUE 1. Mise à la retraite

Paul Casar peut-il mettre librement M. Lebert à la retraite ? Y a t il une procédure particulière à respecter ?

Règle de droit applicable

La mise à la retraite par l’employeur ne peut intervenir unilatéralement avant l’âge de 69 ans compris. Entre 65 et 69, il peut la proposer au salarié, mais elle ne peut intervenir sans l’accord de ce dernier selon la procédure suivante : trois mois avant la date de l’anniversaire du salarié, l’employeur doit l’interroger sur son intention de quitter l’entreprise. En cas de réponse négative, il ne peut procéder à sa mise à la retraite mais peut renouveler sa demande l’année suivante dans les mêmes conditions. À partir de 70 ans, l’employeur peut librement mettre à la retraite le salarié sans qu’il ne puisse s’y opposer. Cela constitue une possibilité et non une obligation (Cass soc. 23 septembre 2015).

Application de la règle aux faits

M. Lebert est né le 1er

janvier 1950. Fin 2017, il aura 67 ans. Par conséquent, M. Casar ne peut mettre d’office le salarié à la retraite. La rupture du contrat s’analyserait en un licenciement sans cause réelle et séreuse.

2. Préavis en cas de mise à la retraite

La convention collective ne prévoyant aucun préavis en la matière, Paul Casar envisage d’appliquer celle habituellement pratiquée pour la démission, soit 1 mois. La durée de préavis est-elle conforme aux prescriptions légales ? Règle de droit applicable

Le préavis est identique à celui prévu en matière de licenciement. Soit 1 mois si le salarié a une ancienneté dans l’entreprise comprise entre 6 mois et moins de 2 ans, et de 2 mois pour une ancienneté plus longue.

Application de la règle aux faits

Le préavis de 1 mois est inapplicable ici. M. Lebert a une ancienneté supérieure à 2 ans. Son préavis ne peut être inférieur à 2 mois. 3. Le départ à la retraite

M. Lebert, un an plus tard, décide de partir à la retraite.

Règle de droit applicable

Le départ à la retraite intervient à l’initiative du salarié et l’âge minimal pour en bénéficier dépend de l’année de naissance. Il est de 60 ans, sauf cas particuliers pour les assurés nés en 1950 (la condition d’âge va augmenter progressivement pour atteindre 62 ans en 2018). C’est l’âge à partir duquel le salarié peut bénéficier de la liquidation de sa pension vieillesse. Le taux de la pension dépendra du nombre de trimestres cotisés. Il doit respecter un préavis dont

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la durée est de 1 mois pour les salariés ayant une ancienneté d’au moins 6 mois et moins de 2 ans dans l’entreprise et de 2 mois pour les salariés ayant une ancienneté d’au moins 2 ans. En outre, il bénéficie d’une indemnité légale spécifique qui correspond à :

- 1/2 mois du salaire de référence après 10 ans d’ancienneté ; - 1 mois après 15 ans ; - 1 mois 1/2 après 20 ans ; - 2 mois après 30 ans d’ancienneté.

Application de la règle aux faits

M. Lebert peut librement décider de partir à la retraite sous conditions de respecter un préavis de 2 mois au regard de son ancienneté. Il percevra en outre une indemnité de départ à la retraite de 2 mois de salaire de référence puisqu’il dispose d’une ancienneté supérieure à 30 ans dans l’entreprise. À noter que des dispositions collectives peuvent prévoir une indemnité plus favorable qu’il conviendra d’appliquer.

4. Le cumul emploi-retraite

M. Lebert compte travailler de nouveaux dans l’entreprise 2 jours par semaine. Quelles sont les conditions de ce cumul ? Règle de droit applicable

Depuis le 1er

janvier 2009, le cumul est possible sans les contraintes qui existaient auparavant. Ainsi à partir de 65 ans, et progressivement de l’âge à partir duquel le taux plein est automatique selon l’année de naissance, la pension vieillesse peut être intégralement ou partiellement cumulée avec les revenus d’un nouvel emploi. À partir de l’âge légal de départ à la retraite, il en est de même si le salarié bénéficie d’une pension à taux plein (50%). Application de la règle aux faits

M. Lebert peut librement cumuler son nouveau contrat de travail et sa pension vieillesse, que ce soit chez le même employeur ou non, sans autres conditions.

II – QUESTION DE COURS La retraite progressive. La loi du 20 janvier 2014 a modifié les conditions d’accès au régime de la retraite progressive. Le mécanisme consiste en la possibilité pour le salarié de bénéficier d’une partie de sa pension retraite tout en ayant une activité à temps partiel. La fraction de la pension versée est fonction de la durée du travail du salarié. Les conditions sont les suivantes :

- avoir au moins atteint l’âge légal de la retraite diminué de deux ans, sans pouvoir être inférieur à 60 ans, - justifier d’une durée d’assurance et de périodes reconnues équivalentes d'au moins 150 trimestres, - exercer une activité salariée à temps partiel qui doit être inférieure à 80% de la durée du travail applicable à

l’entreprise et au minimum à 40%. La retraite progressive ne peut résulter que d’un accord entre le salarié et l’employeur. Elle ne peut donc être imposée ni

par l’un ni par l’autre.

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SE FLUCTUAT ET MERGITUR

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

La transaction : principe, contenu, effet, contestation La rupture conventionnelle

CAS PRATIQUE 1. Chance de réussite

Romain Lapasse travaille depuis plusieurs années au profit de la SARL LA NAVALLE. De nombreuses absences ont conduit l’employeur à procéder à son licenciement. Le jour même de la notification, il est conclu une transaction entre les parties pour mettre fin à un litige futur. Celle-ci prévoit en contrepartie de l’absence d’un licenciement pour faute au versement d’un mois de rémunération supplémentaire en contrepartie de l’absence de toute action judiciaire ultérieure. Peut-il contester la transaction ainsi effectuée ? Règles de droit applicables

Au terme de l’article 2044 du code civil, la transaction est un « contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître ». Absente du code du travail, ce sont les juridictions sociales qui très tôt (Cass. soc.18 mai 1953) lui ont reconnu une place, en considérant qu’il s’agit d’une convention par laquelle « les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître... consécutive à une rupture du contrat de travail par l’une ou l’autre des parties et ayant pour objet de mettre fin par des concessions réciproques, à toutes contestations nées ou à naître résultant de cette rupture ». Reposant sur les règles du droit civil, il conviendra de vérifier l’absence de vices du consentement, la capacité des parties, l’existence d’un objet licite et d’une cause licite et morale.

Pour être valable, la transaction doit répondre à deux conditions essentielles : Elle doit comporter des concessions réciproques Chaque partie, employeur et salarié, doit obligatoirement concéder quelque chose dont le contenu s’apprécie au jour de la transaction. En cas de litige, le juge n’est pas autorisé à trancher le différend que la transaction avait pour but de régler (Cass. soc. 29 novembre 2006), mais il doit pour autant s’assurer que les concessions de l’employeur ne sont pas dérisoires et vérifier ainsi que la lettre de licenciement est motivée conformément aux exigences légales. À défaut, le

licenciement serait considéré sans cause réelle et sérieuse et la transaction nulle. La cour de cassation a pu ainsi retenir que la lettre de licenciement qui mentionne un manque de compétence du salarié, et le qualifie de faute grave, ne fait pas une concession suffisante en accordant à titre transactionnel l’indemnité de préavis. En effet, l’incompétence ne pouvant constituer une faute grave, le salarié aurait en toute hypothèse perçu cette indemnité (Cass. soc. 27 mars 1996). L’examen des faits invoqués permet alors au tribunal d’apprécier la valeur des concessions consenties (Cass. soc. 13 décembre 2007). Elle doit intervenir postérieurement à la rupture du contrat de travail (arrêt de principe Cass. soc. 29 mai 1996 ; Cass. soc. 5 mai 2010) C’est-à-dire en matière de licenciement après la connaissance effective par le salarié de la mesure dont il est l’objet (Cass soc. 21 janvier 2015). Cela signifie que la transaction ne peut être envisagée qu’après le retrait de la lettre recommandée signifiant la rupture du contrat, toute transaction antérieure étant privée d’effet. La haute juridiction rappelle dans un arrêt du 9 février 2011 (déjà : 24 janvier 2007) que la remise en main propre de la notification du licenciement n’est pas conforme à l’article L 1232-6 du code du travail. Dès lors la transaction intervenue en l’absence de notification régulière justifie sa contestation par le salarié.

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Application des règles de droit aux faits

Au regard des faits soumis, il convient de vérifier la régularité de la transaction intervenue entre Romain Lapasse et Jérôme Lamaison. En premier lieu, la transaction doit résulter obligatoirement d’un écrit. Cette condition est remplie puisque les parties ont reçu chacune un original signé de la transaction. En second lieu, la transaction doit contenir des concessions réciproques. À cet égard celle de l’employeur consiste à renoncer au licenciement pour faute sérieuse et à verser l’indemnité de préavis en contrepartie d’une absence de recours judiciaire par Romain. Cette condition ne peut être validée. En effet, la qualification retenue dans la notification de licenciement est une faute sérieuse. Or celle-ci ne prive pas le salarié de son indemnité de préavis. Par conséquent,

la concession prévue n’en est pas une. Enfin la transaction doit intervenir postérieurement à la rupture du contrat, c’est-à-dire sa notification. En l’espèce, la condition de temps n’est pas remplie puisque la convention a été conclue le même jour que l’envoi de la notification du licenciement, elle lui est donc antérieure. En conclusion, Romain Lapasse peut aisément contester la validité de la transaction et demander le versement d’indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

2. La possibilité de conclure une transaction

Romain se demande s’il aurait pu utiliser le mécanisme de la rupture conventionnelle et si une transaction aurait été ensuite possible. Règle de droit applicable

Dans les principes, la rupture conventionnelle s’apparente à la rupture amiable. Le code du travail dispose ainsi : « L’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie ». Mais le législateur ne s’est pas contenté de traduire dans le code du travail un principe de droit civil. Il a en effet, introduit

un véritable régime juridique permettant d’encadrer cette modalité de rupture du contrat de travail. L’une des particularités la plus remarquable est d’assujettir cette forme de rupture au respect d’un formalisme spécifique. De manière synthétique la procédure se décompose comme suit :

- Phase d’entretiens préalables

A l’occasion d’un ou plusieurs entretiens l’employeur et le salarié conviennent ensemble des principes d’une rupture

conventionnelle du contrat de travail. Le salarié dispose de la possibilité de se faire assister par toute personne de l’entreprise.

- Signature de la convention de la rupture conventionnelle

La convention doit impérativement prévoir : - Des indemnités spécifiques de rupture conventionnelle dont le montant ne peut être inférieur aux indemnités légales de licenciement

- La date de rupture du contrat. Elle peut être fixée au minimum le lendemain de l’homologation.

- Délai de rétractation

A compter du lendemain de la signature de la convention, chaque partie dispose d’un délai de 15 jours pendant lequel chacune peut librement se rétracter. La loi n’exige aucune justification à la remise en cause de la convention.

- Homologation de la convention

Une fois le délai de rétractation épuisé, la partie la plus diligente communique au directeur régionale de la DIRECCTE un exemplaire de la convention aux fins de son homologation.

L’avantage pour l’employeur consiste essentiellement en l’absence de motif à invoquer, ce qui n’est pas le cas en matière de licenciement, ainsi qu’en la possibilité de négocier la durée du préavis. De nombreux employeurs sécurisent la rupture conventionnelle par une transaction, mais cette possibilité n’est pas sans condition (cass. soc.26 mars 2014). En effet celle-ci n’est licite que :

- si la transaction intervient après l’homologation de la rupture conventionnelle ou, s’il s’agit d’un salarié protégé

après l’autorisation par l’inspecteur du travail de la rupture conventionnelle,

- si la transaction porte sur des éléments relatifs non à la rupture du contrat de travail mais sur l’exécution de ce dernier et porte sur des éléments non compris dans la transaction.

Application des règles de droit aux faits

Une rupture conventionnelle était tout à fait envisageable entre Romain et son employeur dans le respect des conditions précitées. De même qu’une transaction en cas de litige sur des éléments, notamment de rémunération, non réglés dans la rupture conventionnelle.

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II – ÉTUDE DE DOCUMENTS 1. Explication de la référence par la cour de cassation à l’autorité de la force jugée et justification de sa

décision

La transaction produit deux effets essentiels : - la transaction ne lie les parties qu’au regard des dispositions qui y sont contenues. Il faut donc veiller avec attention

à la rédaction de la transaction (Cass. soc. 13 mai 2003) ; - la transaction a autorité de la chose jugée en dernier ressort (Cass. Soc 29 novembre 2006). Elle s’impose aux

parties définitivement et immédiatement, de même qu’elle emporte par principe renonciation à toute action judicaire ultérieure sur le même contenu.

Par conséquent, la cour de cassation est amenée à casser l’arrêt de la cour d’appel dans la mesure où les juges du fonds ne pouvaient examiner le fond de la transaction puisque celle-ci produit les effets d’un jugement ayant autorité de la chose jugée. 2. Conditions de validité de la rupture conventionnelle et limite qu’y pose la cour de cassation

Le législateur, par la loi portant « modernisation du marché du travail », a introduit dans le code du travail un nouveau mode de rupture aux articles L 1237-11 à 1237-16 : la rupture conventionnelle. Dans les principes, elle s’apparente à la rupture amiable. Le code du travail dispose ainsi : « L’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie ». Mais le législateur ne s’est pas contenté de traduire dans le code du travail un principe de droit civil. Il a en effet introduit un véritable régime juridique permettant d’encadrer cette modalité de rupture du contrat de travail. Ainsi, « la rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties » et résulte d’une convention signée par les parties. La procédure, impérative, qui s’y attache est destinée à garantir la liberté du consentement des parties. C’est précisément

sur ce point que la cour de cassation a eu l’occasion de revenir dans l’arrêt du 23 mai 2013. Particulièrement intéressante, la décision de la haute juridiction vient rappeler le principe qui gouverne à la rupture conventionnelle. En effet, celle-ci repose sur le consentement mutuel et reste par conséquent gouvernée par les principes généraux de la validité des contrats fixés à l’article 1108 du code civil. Elle ne saurait donc être imposée par l’une parties, ce qui trahirait un consentement vicié susceptible d’entraîner la nullité de la convention. Dans le cas d’espèce, la cour constate que la salariée avait subi des pressions de son employeur pour l’inciter à consentir à une rupture conventionnelle. Cette pression doit s’analyser en une violence morale ayant contraint la salariée à accepté la rupture conventionnelle et fait encourir la nullité de cette dernière.

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LES ÂMES VIVES

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Le droit disciplinaire : notion de faute, délai pour agir, sanction, procédure disciplinaire

I - CAS PRATIQUE 1. Les remarques verbales

M. Giard a été l’objet de plusieurs remarques verbales de la part de son employeur.

Les remarques verbales sont-elles constitutives d’une sanction disciplinaire ? Règle de droit applicable

Le pouvoir disciplinaire est une prérogative de l’employeur lui permettant de sanctionner les comportements qu’il juge fautifs des salariés. L’exercice du pouvoir disciplinaire repose sur l’existence d’une faute justifiant l’application d’une sanction selon une procédure strictement définie par la loi.

L’article L 1331-1 C. Trav. dispose : « Constitue une sanction disciplinaire toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par lui comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ». Cette disposition permet de distinguer ce qui relève de la sanction disciplinaire (et qui devra suivre la procédure légale) de ce qui échappe à son champ d’application. Ne constituent pas des sanctions disciplinaires les mesures prises par l’employeur:

- si elles ont un caractère verbal (remarques de l’employeur sur le comportement du salarié) ; - si elles n’ont aucune incidence sur la présence du salarié dans l’entreprise, sa rémunération, sa carrière, sa

fonction (mise au chômage partiel, lettre de mise au point, mise à pied conservatoire… par exemple Cass. soc. 3 février 2010).

Application de la règle aux faits

Les observations de l’employeur n’étant que des remarques verbales, elles ne peuvent en aucun cas constituer une

sanction disciplinaire. 2. Le comportement fautif

M. Giard cumule de nombreux retards et chante des airs d’opéra dans l’entreprise. Règle de droit applicable

En l’absence de définition légale, la faute peut être définie comme une violation injustifiée des obligations

professionnelles du salarié. La faute disciplinaire consiste en une violation délibérée des obligations professionnelle (manquement aux règles de discipline fixées dans le règlement intérieur, insubordination). Cela signifie que les comportements fautifs doivent puiser leur source dans le cadre de l’exécution de la prestation de travail. Ils ne peuvent être excusés par l’ancienneté ni par un caractère fruste ou une absence d’éducation (Cass. soc. 23 mars 2011). Néanmoins, les tribunaux admettent que la faute non professionnelle, c’est-à-dire commise en dehors de la relation de travail, puisse être sanctionnée si elle rend impossible la relation de travail. Cependant, la notion de faute semble devoir être écartée au regard des dernières jurisprudences.

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Enfin, la faute ne doit pas être prescrite. Cette règle résulte de l’article L1332-4 du code du travail. Ainsi la faute ne peut donner lieu à sanction que si les poursuites disciplinaires sont engagées dans le délai de 2 mois à compter du comportement fautif du salarié, ou, dans le même délai, du jour ou l’employeur en a eu connaissance à condition qu’il puisse apporter la preuve de cette appréciation tardive. Tel est le cas lorsque l’employeur prend connaissance de la falsification de bulletin de paye par un salarié à l’occasion d’un contrôle URSSAF. Le délai de 2 mois commençant à courir à cette occasion (Cass. soc. 23 février 2005).

Application de la règle aux faits

Les deux reproches à l’encontre du salarié peuvent être constitutifs d’une faute disciplinaire puisqu’il s’agit d’un manquement aux dispositions du règlement intérieur (les retards). Par contre ; en ce qui concerne les répétitions de chant d’opéra, les faits se sont déroulés il y a 3 mois et par conséquent sont prescrits. Ils ne peuvent donc plus faire l’objet d’une sanction disciplinaire. 3. La faute. Les avertissements

M. Jones a pris l’initiative de modifier son itinéraire de livraison. Mme

Terra lui a notifié un avertissement. La sœur de M. Jones est venue insulter M

me Terra. À l’issue d’un second entretien, M

me Terra lui a notifié un nouvel avertissement.

Quelle violation d’obligation a été sanctionnée ? Les avertissements sont-ils valables ? Les insultes proférées par la sœur de M. Jones peuvent-elles être prises en compte ? Règle de droit applicable

La faute, si elle peut être disciplinaire, peut aussi être professionnelle et dans ce cas doit être envisagée comme une négligence dans l’exécution de la prestation de travail.

La faute relevée doit être imputable au seul salarié mis en cause et ne saurait être le fait d’une autre personne. Ainsi la cour de cassation a pu valablement casser la décision de la cour d’appel de Versailles retenant la qualification de faute grave pour des injures proférées par la sœur de la salariée (Cass. soc. 21 mars 2000). La mise en œuvre de la procédure disciplinaire suppose en premier lieu la convocation à un entretien préalable. Cependant, cette obligation est facultative, sauf dispositions conventionnelles contraires, lorsqu’il s’agit d’une sanction mineure telle que le blâme ou l’avertissement n’ayant pas d’incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l’entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié. Cependant, la cour de cassation a pu valablement décider que lorsque l’avertissement est de nature à avoir une influence sur la présence du salarié dans l’entreprise, il

doit nécessairement être précédé d’un entretien préalable (Cass. soc. 3 mai 2011). Enfin, aucune sanction ne peut être prise à l’encontre du salarié sans que celui-ci soit informé, dans le même temps et par écrit, des griefs retenus contre lui. Application de la règle aux faits

Les initiatives de M. Jones qui ont perturbé les livraisons sont constitutives d’une faute professionnelle susceptible d’être sanctionnée par un avertissement sans avoir à respecter la convocation à un entretien préalable si la sanction n’a aucune incidence sur la carrière du salarié. Le premier avertissement semble donc valable. Pour le second, il conviendra de vérifier que seul le comportement de M. Jones est pris en compte et non les insultes de sa sœur. À défaut, la

sanction sera annulée. 4. Procédure disciplinaire – Mise à pied conservatoire

M. Jones, au gré de son humeur, persiste à modifier ses parcours. Cette fois, Mme

Terra lui a immédiatement notifié une mise à pied disciplinaire dans l’attente de sa convocation à un entretien préalable à licenciement. Son licenciement a été prononcé un mois plus tard.

M. JONES peut-il contester son licenciement disciplinaire ? Règle de droit applicable

Dès la connaissance de la faute et dans l’attente de la sanction, l’employeur peut prononcer une mise à pied à titre conservatoire. Celle-ci se distingue clairement de la mise à pied disciplinaire qui constitue une sanction notifiée au salarié à l’issue de la procédure disciplinaire. La mise à pied conservatoire vise à écarter le salarié de l’entreprise dans l’attente d’une sanction si les faits reprochés le justifient. C’est-à-dire qu’a priori, les faits doivent être constitutifs d’une faute grave ou lourde. Elle n’impose pas cependant à l’employeur de retenir la faute grave ou lourde à l’issue de la procédure de licenciement

(Cass soc. 15 septembre 2015). Par contre, si la faute grave ou lourde ne sont pas retenues à l’issue de la procédure, la période de mise à pied devra être rémunérée. En outre, la faute ne doit pas être déjà sanctionnée. Une faute ne peut donner lieu qu’à une seule sanction. Il s’agit du principe de non cumul des sanctions (« non bis in idem »). Ainsi, le comportement fautif du salarié ayant déjà fait l’objet d’une sanction au sens de l’article L 1331-4 C. Trav. ne peut donner lieu à une nouvelle poursuite sous peine de

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rendre la seconde infondée (Cass. soc. 16 mars 2010 ; Cass. soc. 26 mai 2010). Cette règle n’est pas spécieuse, puisque la cour de cassation a pu décider que « la mise à pied qui n’a pas été suivie immédiatement de l’engagement d’une procédure de licenciement, présente, malgré la qualification que lui a donné l’employeur, le caractère d’une sanction disciplinaire, et l’employeur ne peut ensuite décider à raison des mêmes faits le licenciement de l’intéressé » (Cass. soc. 19 septembre 2007 ; Cass soc. 21 janvier 2015). Application de la règle aux faits

En l’espèce, Mme

Terra a commis une erreur en prononçant une mise à pied disciplinaire (au demeurant irrégulière en la forme) au lieu d’une mise à pied à titre conservatoire. Elle ne pourra donc sanctionner deux fois les mêmes faits en licenciant le salarié. 5. Procédure disciplinaire

Un autre salarié, M. Rions, s’est montré beaucoup plus radical et refuse d’effectuer certaines livraisons. Mme

Terra le convoque à un entretien préalable à sanction disciplinaire. Quel délai doit être respecté entre la convocation et l’entretien préalable ?

La convocation à un entretien préalable à sanction doit être envoyée par lettre recommandée ou remise en main propre contre décharge. La convocation doit préciser son objet, c’est-à-dire le fait d’envisager une sanction, la date, l’heure et le lieu de l’entretien ainsi que la faculté de se faire assister par un salarié de l’entreprise. Le délai entre la réception de la lettre et l’entretien préalable doit être raisonnable, c’est-à-dire de nature à permettre au salarié de se préparer à l’entretien. Application de la règle aux faits

La notion de délai raisonnable suppose de laisser au salarié convoqué un temps suffisant pour préparer sa défense. Il est possible de calquer ce délai sur celui du licenciement à savoir 5 jours ouvrables. 6. Délai de notification de la sanction – Contestation judiciaire

L’entretien s’est tenu le jeudi 20 mai. Le 19 juin, elle lui remet en main propre sa décision qui consiste en une mise à pied disciplinaire de 8 jours. Quelles sont les conditions de fond et de forme de la notification de la sanction ? Quelles peuvent être les conséquences

du contrôle judiciaire de la sanction ? Règle de droit applicable

La notification de la sanction La lettre de notification de la sanction doit contenir les éléments précis relatifs aux fautes reprochées au salarié ainsi que la sanction prononcée à son encontre. Elle doit être adressée à ce dernier par lettre recommandée ou remis en main propre contre décharge (R 1332-2 C. Trav.). La sanction ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables, ni plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien. Elle est motivée et notifiée à l’intéressé (loi du 22 mars 2012). De plus, la sanction ne peut être notifiée plus d’un mois après l’entretien. Néanmoins, si du fait de l’impossibilité du salarié de se présenter à l’entretien préalable, l’employeur a fait le choix de le reporter, le délai de notification court à compter du nouvel entretien (Cass. soc. 7 juin 2006). À noter que, lorsque la sanction emporte une modification du contrat de travail, l’employeur doit informer l’intéressé de sa faculté d’accepter ou de refuser cette modification (Cass. soc. 28 avril 2011).

Le contrôle judicaire de la sanction Le salarié a toujours la faculté de saisir le conseil de prud’hommes s’il conteste la sanction prise à son encontre. Le juge fait porter son contrôle sur les points suivants tel qu’en dispose l’article 1333-2 du code du travail (non applicable en matière de licenciement) :

- la réalité des faits reprochés. Si les faits ne sont pas établis ou s’ils ne présentent aucun caractère fautif, le juge sanctionne la mesure par son annulation et l’employeur ne peut envisager une nouvelle sanction ;

- la régularité de la procédure. Si le juge relève une irrégularité de procédure, il n’est pas tenu d’annuler la sanction ;

- la proportionnalité entre la faute et la sanction. La disproportion est sanctionnée par l’annulation de la sanction et l’employeur est autorisé à infliger une nouvelle sanction, inférieure, sans avoir l’obligation de respecter la procédure.

Application de la règle aux faits

La procédure disciplinaire est régulière en la forme. La contestation, si elle est possible, a peu de chance d’aboutir.

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II – QUESTION DE COURS Schéma disciplinaire

III – ÉTUDE DE DOCUMENT Document 1

1. Solution de la cour de cassation

Le pouvoir réglementaire et le pouvoir disciplinaire de l’employeur constituent l’expression la plus manifeste de son pouvoir de direction. Par le second il dispose ainsi de la faculté de sanctionner les comportements qu’il juge fautif des salariés. Quant aux sanctions elles-mêmes, c’est au règlement intérieur qu’il revient d’en préciser la nature et la hiérarchie en l’absence de précisions légales. À titre indicatif, les principales sanctions classiques sont : l’avertissement, le blâme, la mise à pied disciplinaire dont la durée maximale doit figurer dans le règlement intérieur (Cass. soc. 7 janvier 2015 – à distinguer de la mise à pied conservatoire), la mutation, la rétrogradation, le licenciement. À noter, enfin, que sont

interdites les amendes et autres sanctions pécuniaires (L 1331-2 C. Trav.). Il s’agit d’une interdiction générale privant d’effet toute forme de retenue pécuniaire notamment sur le salaire en raison d’une faute commise par le salarié. Toute disposition contraire est réputée non écrite (Cass. Soc. 15 mai 2014). Cependant, l’usage de ce pouvoir de sanction peut-il être mis en œuvre en l’absence de règlement intérieur alors que l’entreprise y est assujettie ? C’est précisément la question soumise à la cour de cassation dans l’arrêt du 23 mars 2017. En l’espèce, la salariée d’une association a fait l’objet d’un avertissement dont elle conteste la validité devant le juge des référés au motif que l’absence de règlement intérieur venant préciser l’échelle et la nature des sanctions ne permet pas à l’employeur de prononcer une sanction disciplinaire. N’ayant pas eu gain de cause devant la cour d’appel, l’employeur

forme un pourvoi en cassation par lequel il soulève deux arguments : - l’absence de règlement intérieur ne permet pas de priver l’employeur de tout pouvoir disciplinaire hormis la rupture

du contrat de travail ; - l’annulation de la sanction par le juge des référés constitue un dépassement de ses attributions.

La cour de cassation rejette le pourvoi. Sur le premier point, la cour rappelle que l’employeur d’une entreprise qui ne s’est pas dotée d’un règlement intérieur alors qu’elle y est légalement tenue, ne peut invoquer son pouvoir disciplinaire pour sanctionner le salarié autrement que

par un licenciement. Cette solution avait déjà été précisée par un arrêt du 26 octobre 2010 et impose à l’employeur de veiller à la mise en place d’un règlement intérieur et des mesures de publicité qui l’accompagne dès lors qu’il est assujetti à cette obligation. À défaut, son pouvoir disciplinaire se limite au licenciement du salarié. Sur le second point, la haute cour précise que la juridiction de référé a compétence pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Cette dernière n’a ainsi pas prononcé l’annulation de la sanction mais usé de cette prérogative en constatant l’absence de règlement intérieur qui en soit constitue un trouble manifestement illicite.

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Document 2 2. Problème de droit

À quelles conditions les courriels de l’employeur peuvent-ils valoir sanction disciplinaire ?

3. Solution de la cour de cassation

Mme

X a été engagée le 8 janvier 2007 par la société BNP Paribas en qualité d’attachée commerciale, puis licenciée pour faute grave le 19 octobre 2009. Cette dernière conteste la régularité du licenciement en s’appuyant sur la règle non bis in idem, c’est-à-dire l’impossibilité pour l’employeur de sanctionner deux fois les mêmes faits. Encore convient-il de démontrer l’existence d’une double sanction. Tel est ici l’objet de la discussion. En effet, la salariée a reçu un courriel de l’employeur en date du 2 octobre 2009 dans lequel il reprochait à la salariée des manquements aux règles et procédures internes relatives à la sécurité des paiements par carte bleue, et l’invitait de manière impérative à se conformer à ces règles et ne pas poursuivre ce genre de pratique. Pour l’employeur, cette lettre n’avait ni pour intention ni pour objet de sanctionner la salariée mais valait simple rappel à

l’ordre au regard des manquements évoqués. Dès lors, ne valant aucunement sanction, il était fondé à prononcer le licenciement de la salariée pour les mêmes faits. Tel n’est pas l’avis, ni de la cour d’appel, ni de la cour de cassation. En effet, peu importe l’intention de l’employeur, dans la mesure où la nature des propos tenus dans le courriel viennent réprimer un comportement fautif constituant à ce titre un avertissement, autrement dit une sanction disciplinaire. Il conviendra désormais d’être attentif au choix des termes afin qu’un rappel à l’ordre ne puisse être requalifié en avertissement disciplinaire.

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ENTREPRISE VAILLANTE

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Pouvoir réglementaire : contenu, validité des dispositions, élaboration du règlement intérieur, contentieux

I – CAS PRATIQUE

I – Principes d’analyse des clauses du règlement intérieur La régularité des clauses d’un règlement intérieur doit être appréciée à la lumière des principes directeurs suivants (art. 1321-1 C. trav.) : Le contenu limitatif du règlement intérieur Le règlement intérieur ne peut contenir des dispositions étrangères à :

- l’hygiène et la sécurité ; - la discipline ;

- le harcèlement moral et sexuel. Les droits des personnes et les libertés individuelles et collectives Les clauses du règlement intérieur ne doivent pas porter atteinte aux droits des personnes ainsi qu’aux libertés individuelles et collectives des salariés. Par exception, de telles atteintes sont licites si la nature de la tâche le justifie et à condition que les mesures prises soient proportionnées au but recherché (L 1121-2 C. Trav.). La conformité des clauses aux lois et règlement Le pouvoir de direction de l’employeur ne saurait lui permettre d’imposer par la voie du règlement intérieur des clauses contraires aux conventions et accords collectifs ainsi qu’aux lois et règlement en vigueur. Principe de non-discrimination Visé par de nombreux textes, ce principe doit conserver toute son efficacité au regard des dispositions du règlement intérieur. Sont interdites toutes clauses établissant une discrimination entre les salariés en raison de leurs sexe, mœurs, âge, origines, opinions ou religion, situation de famille…

II – Appréciations de la régularité des clauses de l’entreprise VAILLANTE Article 1 Les règles relatives à la mobilité de salariés au sein de l’entreprise n’entrent pas dans le champ des matières relevant du

règlement intérieur. De plus, l’application d’une clause de mobilité suppose le respect de conditions fixées par la jurisprudence (cf. cas MÉTABOURG). Article 2 Cette clause est en violation des libertés individuelles et collectives des salariés et discriminatoire (CE, 10 juin 1982). L’article L. 1132-1 interdit toute disposition lésant un salarié en raison de sa situation de famille et la circulaire du 15 mars 1983 rappelle que les clauses du règlement intérieur interdisant le mariage entre salariés « peuvent être considérées comme portant atteinte aux droits des personnes et aux libertés ». Cette clause est illégale.

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Article 3 Cette clause n’est pas conforme aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des salariés. Son application peut être licite si le salarié est présent ou celui-ci dûment appelé. Hors la présence du salarié, seul un risque ou évènement particulier le justifie (Cass. soc. 17 mai 2005). En l’espèce, la généralité de la clause à examiner en exclut la validité.

Article 4 Le règlement intérieur reprend une disposition légale. Elle n’est qu’une répétition de la loi qui n’a rien d’illicite puisqu’elle n’en modifie pas le texte. La clause est donc valable, mais l’employeur n’est pas tenu de la faire figurer au règlement intérieur. Article 5 Est illicite, comme contraire aux lois et règlement, la clause prévoyant l’automaticité de la rupture du contrat de travail en cas d’absences non justifiées. En effet, la loi impose (L 1232-1 C. Trav.) l’existence d’une cause réelle et sérieuse pour justifier de la rupture régulière du contrat de travail dans le respect des formes qu’elle prescrit (L1232-2 C. Trav.). Article 6 La loi institue un droit de retrait au profit du salarié lorsqu’une situation est de nature à présenter un danger grave et immédiat pour sa vie ou sa santé (C. Trav. L 4131-1). Ce droit, afin de ne pas le vider de son sens, ne peut être subordonné à aucune autorisation préalable de l’employeur. Cette clause est donc contraire à la loi. Article 7 Les règles relatives au préavis, que se soit en cas de démission ou de licenciement, sont étrangères aux matières

pouvant entrer dans le champ d’application du règlement intérieur (Cass. soc. 11 déc. 2002). Article 8 Sont licites les clauses d’un règlement intérieur autorisant le contrôle sur le lieu de travail de l’état d’ébriété d’un salarié à condition d’être justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché. En outre, les formes de ce contrôle doivent en permettre la contestation, et l’état du salarié doit présenter un danger pour les personnes ou les biens, en considération de son activité (Cass. soc. 24 février 2004). Par contre, la clause ici présentée excède, par son manque de précision, les conditions nécessaires à sa validité.

Article 9 Le règlement intérieur peut rendre obligatoire le port d’une tenue de travail à condition que cette mesure soit justifiée par la nature des tâches à accomplir et proportionnée au but recherché (art L 1321-3 C. Trav. ; CE. 16 décembre 1994). Les tribunaux font porter leur attention sur la présence d’éléments objectifs et sanctionnent toute discrimination qui en serait à l’origine (Cass. soc. 11 janvier 2012). Les motifs de sécurité peuvent justifier, si la tâche l’exige, le port d’une tenue spécifique. La clause semble, en l’état, illicite par son étendue.

Article 10 L’exercice du droit de grève est un droit protégé par la loi (L 2511-1 C. Trav.) interdisant à l’employeur de prendre toute mesure de sanction ou discriminatoires à l’encontre des grévistes. Au surplus le code du travail interdit les amendes et sanction pécuniaire à l’encontre des salariés fautifs. Cette disposition est contraire à la loi. Article 11 Cette disposition, par principe attentatoire aux libertés individuelles, peut être justifiée aux conditions suivantes (CE. 26 novembre 1990, Cass. soc. 11 février 2009) :

- elle ne peut être réalisée qu’en cas de nécessité. Les circonstances particulières conduisant au contrôle doivent permettre de justifier sa mise en œuvre ;

- les salariés doivent être informés de leur droit de s’y opposer ainsi que de celui d’exiger la présence d’un témoin. À défaut d’acceptation, l’employeur peut faire appel à un officier de police judicaire ;

- le contrôle doit être effectué dans des conditions préservant la dignité et l’intimité de la personne. En l’espèce, la clause est valide si les conditions sont remplies.

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II – QUESTIONS DE COURS

1. Schéma de la procédure d’élaboration du règlement intérieur

Ins pe ctionDu

T rav ail

Publ icité dansL'e ntre prise

Gre ffe duConse il de

Prud'hommes

ENTREE EN VIGUEUR

Dé lai minimum de 1 mois

EM PLOYEUR

Ré dige le rè gle me nt intéri eur

Tra nsm ission pour avis

CEOuDP

CHSCT

Ap rès avis, l'em ployeur

m odifie le texte ou n on

Transmis sion dans le m ême temps

2. Juridictions susceptibles de connaître d’un contentieux relatif au règlement intérieur

Le contentieux peut être porté, selon le cas devant les juridictions suivantes :

Le Conseil de Prud’hommes (recours indirect)

Saisi à l’occasion d’un contentieux sur l’application d’une disposition du règlement intérieur, le conseil de prud’hommes, s’il l’estime illégale, peut écarter la mesure du règlement litigieuse mais il ne saurait l’annuler.

Le TGI (RECOURS direct)

En l’absence de contentieux et de contrôle de l’inspecteur du travail, toute personne justifiant d’un intérêt (salarié, CE, syndicat) a la faculté de saisir le tribunal de grande instance en appréciation de la légalité des dispositions du règlement intérieur. La juridiction peut annuler les dispositions litigieuses.

Le tribunal administratif

Un recours de plein contentieux (recours pour excès de pouvoir) peut être exercé à l’encontre des décisions administratives (inspecteur du travail, directeur régional du travail et de l’emploi, ministre chargé de l’emploi). Pour illustration, l’arrêt du Conseil d’État en date du 21 septembre 1990.

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III – ÉTUDE DE DOCUMENT

1. Présentez les faits

M. X..., a été embauché en 2003 par la société Tourres et cie en qualité de conducteur de machine. A la suite d’un contrôle d’alcoolémie réalisé dans l’entreprise et se révélant positif, il est mis à pied à titre conservatoire puis licencié pour faute grave.

2. Expliquez la solution de la cour de cassation

Contestant le bien-fondé de son licenciement, le salarié obtient gain de cause devant la cour d’appel. L’employeur forme alors un pourvoi en cassation mettant en avant deux arguments. D’une part, l’employeur est débiteur d’une obligation de sécurité de résultat. Il lui appartenait d’accomplir toute diligence pour faire cesser le risque causé par l’état d’ébriété du salarié. D’autre part, le salarié, en raison de son imprégnation alcoolique, qui expose sa personne et les tiers à un risque évident au regard de ses fonctions, commet une faute grave justifiant son licenciement. La cour de cassation ne retient pas les arguments développés et rappelle que le licenciement disciplinaire doit reposer sur un manquement du salarié aux dispositions du règlement intérieur. Encore faut-il que le règlement intérieur soit

opposable au salarié, c’est-à-dire applicable dans l’entreprise. Pour ce faire, le règlement intérieur doit suivre une procédure d’élaboration, dont la dernière étape est constituée de mesures de publicité, permettant notamment aux salariés d’en connaître le contenu. Or dans les faits de l’espèce, la faute relevée, consécutives à l’application d’une stipulation du règlement intérieur (autorisation du contrôle d’alcoolémie) ne peut servir de fondement à une sanction disciplinaire dans la mesure où celui-ci n’a pas fait l’objet des mesures de publicité que la loi impose.

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LES ESPRITS SAINTS

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Hygiène et sécurité dans l’entreprise : obligations de l’employeur, obligations des salariés, droit de retrait

I – CAS PRATIQUE

1. Obligation générale de sécurité

Le délégué du personnel a rappelé à l’employeur, lors de la réunion mensuelle, son obligation générale en matière de santé et de sécurité. En quoi consiste l’obligation générale de sécurité ?

Règle de droit applicable

L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Les mesures peuvent comprendre des actions de prévention des risques professionnels, d’information et de

formation ou encore consister en la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés. En matière d’hygiène, la réglementation, aussi vaste que détaillée (installation sanitaire, luminosité, température, aération, restauration et hébergement) figure aux articles L 4221-1 al2 et suivants du Code du travail ainsi que dans la partie réglementaire du même code. L’obligation est générale puisque « les locaux doivent être tenus dans un état constant de propreté et présenter les conditions d’hygiène et de salubrité nécessaire à la santé du personnel ».

En matière de sécurité, le même article du code du travail pose un principe général : « Les établissements et locaux… doivent être aménagés de manière à garantir la sécurité des travailleurs ». Celle-ci s’entend aussi bien de la sécurité elle-même que de la santé physique et mentale des travailleurs (L 4121-1 C. Trav). Tous moyens de prévention, individuels et collectifs (prévention des accidents, des incendies, formation à la sécurité, prévention des risques à la source, adaptation des techniques à l’homme), doivent concourir à cet impératif légal. En outre, l’employeur est chargé d’établir un plan d’évaluation des risques professionnels et de prévention ayant vocation à améliorer la lutte contre les accidents et maladies professionnels.

L’obligation de sécurité est une obligation de résultat. La cour de cassation a eu l’occasion de le rappeler à plusieurs reprises et le manquement de l’employeur à cet impératif justifie la prise d’acte de rupture par le salarié. Tel est le cas lorsque l’employeur, malgré un rappel à l’ordre par voie de circulaire d’affichage ou verbalement, ne fait pas respecter l’interdiction de fumer à l’intérieur des locaux de l’entreprise (Cass. soc. 29 juin 2005). Ou encore, Cass. 3 février 2010, à propos d’un salarié victime de violences physiques et morales.

Application de la règle aux faits

L’obligation de sécurité est une obligation de résultat dont l’employeur est redevable. Le manquement peut justifier des sanctions civiles et pénales à son endroit.

2. Évaluation des risques professionnels

Le directeur général, M. Belami, souhaite mettre en place une procédure d’évaluation des risques professionnels. Quel doit être son contenu et la régularité avec laquelle il doit la renouveler ? Dans quel document devront être portés les résultats ?

Règle de droit applicable

L’évaluation des risques consiste à recenser l’ensemble des dangers auxquels les salariés peuvent être confrontés et qui sont de nature à affecter leur santé et leur sécurité. C’est une opération minutieuse qui vise à cataloguer et donc repérer dans tous les secteurs de l’entreprise les dangers et risques potentiels. L’évaluation doit être effectuée régulièrement et au moins une fois par an. Les résultats sont portés obligatoirement dans un document unique, librement organisé, sous réserve qu’il soit clair, complet et lisible.

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Application de la règle aux faits

M. Belami, considérant son obligation générale de sécurité, doit mettre en œuvre une procédure d’évaluation des risques qu’il renouvellera annuellement et dont les résultats seront portés dans un document unique. 3. Les mesures de prévention des risques professionnels

De nombreuses défaillances ont été révélées à l’occasion de cette évaluation. M. Belami a engagé des actions de prévention des risques professionnels. Y est-il obligé ?

Obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés, les actions de préventions sont établies au regard des conclusions de l’évaluation des risques. Le plan de prévention détaille le programme des actions poursuivies en matière de formation, d’organisation du travail ou en encore en matière d’équipement. 4. Personnel concerné par ce programme – Régularité avec laquelle doit-il être établi

Les actions doivent suivre un rythme annuel permettant de réviser les résultats des nouvelles évaluations et ainsi d’anticiper plus efficacement les dispositions à prendre. Le programme est à destination de tous les acteurs internes de l’entreprise et plus directement des salariés. Par ailleurs, l’employeur a l’obligation d’informer les salariés sur les risques spécifiques attachés à leurs conditions de travail et aux mesures de prévention qu’il met en œuvre. 5. Personnes et institutions devant y être associées

La prévention, si elle s’organise sous l’égide de l’employeur, suppose la participation d’autres institutions. Sont ainsi associés à la prévention les travailleurs eux-mêmes les membres du CHSCT lorsqu’il existe, les délégués du personnel, le médecin du travail, les agents de l’inspection du travail, les agents des services de prévention des organismes de sécurité sociale, ou encore les agents des organismes professionnels de santé, de sécurité et des conditions de travail constitués dans les branches d’activités présentant des risques particuliers. 6. Droit de retrait

M. Lequel a quitté son poste de travail précipitamment, sans en avertir l’employeur, craignant des émanations d’ammoniaque. M. Belami lui fait remarquer que tout salarié, s’il doit quitter son poste de travail, doit au préalable avertir l’employeur. L’usage du droit de retrait peut-il être conditionné ? Règle de droit applicable

Le salarié dispose d’un droit de retrait. L’article L 4131-1 du Code du travail autorise le salarié à se retirer de sa situation de travail s’il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé. Ce

droit ne peut être subordonné à aucune autorisation préalable de l’employeur et résulte d’une appréciation subjective du salarié. Il suffit en effet qu’il ait pu croire raisonnablement à un risque imminent pour sa vie ou sa santé pour que le droit de retrait puisse s’exercer. Application de la règle aux faits

M. Belami ne peut subordonner le droit de retrait à une autorisation préalable et ne pourra sanctionner M. Lequel pour en avoir fait usage.

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II – QUESTIONS DE COURS

1. Le compte pénibilité

Initié par la loi du 20 janvier 2014, précisée par décret et par la loi du 8 août 2016, le compte pénibilité, impose à l’employeur de négocier ou de mettre en place un plan d’action relative à la pénibilité des emplois dans l’entreprise. Le salarié concerné, dans le cadre de ce compte, peut capitaliser des points lui ouvrant droit à des heures de formation. L’obligation de négocier un accord collectif ou de mettre en place un plan d’action s’impose aux entreprises d’au moins 50 salariés dont la moitié de l’effectif est exposé à un ou plusieurs facteurs de pénibilité au-delà des seuils prévus.

Les entreprises dont les salariés sont exposés à l’un des risques visés dans le décret du 10 octobre 2014 complété par le décret du 30 décembre 2015 et dépassant les seuils prévus par le même texte, doivent en faire la déclaration auprès de l’organisme gestionnaire du compte de prévention de la pénibilité. L’employeur assujetti doit évaluer annuellement l'exposition à la pénibilité de chaque travailleur en fonction de ses conditions de travail et en consigner les résultats dans une annexe du document unique d'évaluation des risques professionnels. 2. Le droit à la déconnexion

Dans le cadre de la prise en compte des outils numériques par le droit du travail, la loi du 8 août 2016 met en place un droit à la déconnexion. Le dispositif est institué soit par accord collectif, soit, à défaut par l’employeur qui doit établir une

charte d’entreprise visant à réguler l’usage des outils numériques. L’exercice de ce droit doit assurer au salarié le respect des temps de repos et de congé ainsi que de la vie personnelle et familiale. 3. Notion de faute inexcusable de l’employeur – Conséquences

En l’absence de définition légale, la cour de cassation est venue préciser les critères de sa qualification, permettant une indemnisation simplifiée des victimes d’accidents ou de maladies professionnelles. Tel qu’il en ressort d’un arrêt de la cour de cassation du 22 février 2007 et de la cour d’appel de Versailles du 19 mai

2011 (statuant sur demande des ayants droits à la reconnaissance d’une faute inexcusable de l’employeur suite au suicide d’un salarié), les critères de la faute inexcusable sont les suivants :

- la conscience du danger : l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel le salarié a été exposé. En l’espèce, l’employeur aurait dû avoir conscience des manifestations d’un stress évident que présentait le salarié. Or la société Renault n’a pas pris conscience de la gravité de la situation ;

- l’absence de mesures nécessaires pour protéger le salarié : l’employeur s’est abstenu de toutes actions de prévention ou de protection à l’égard du salarié. Seule la faute inexcusable du salarié est susceptible de l’exonérer de sa responsabilité. En l’espèce, la société Renault n’a pas mis en place dans l’entreprise un système d’évaluation

des risques psyscho-sociaux que la loi impose, ni même un dispositif permettant d’évaluer la surcharge de travail. De surcroît, dans les circonstances de l’espèce, la cour précise que :

- l’employeur en matière de sécurité est tenu d’une obligation de résultat. Que le manquement à cette obligation suffit à caractériser la faute inexcusable ;

- il importe peu que d’autres fautes aient concouru au dommage. En effet, il suffit que celle de l’employeur ait été une cause déterminante dans la réalisation du dommage.

Les conséquences de la faute inexcusable

L’article L 452-1 du code de la sécurité sociale dispose que la faute inexcusable ouvre droit à une indemnisation complémentaire de la victime. Cette indemnisation doit être fixée au maximum dès lors que la qualification des faits répond aux critères de la faute inexcusable. Le montant de la rente ne peut être diminué qu’en cas de faute inexcusable de la victime (Cass. soc. 19 décembre 2002), celle d’un tiers étant inopérante (Cass. Civ 2

e, 2 novembre 2004).

À noter que le versement de la rente ne fait pas obstacle à des poursuites complémentaires devant la juridiction de la sécurité sociale pour indemniser le salarié victime des autres préjudices dont il est l’objet (L 452-3 C. Séc.).

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III – ÉTUDE DE DOCUMENT

1. Apport de l’arrêt quant à l’obligation de l’employeur en matière de harcèlement

En matière de santé et de sécurité, l’employeur est tenu d’une obligation de résultat envers les salariés. C’est dire qu’il ne peut s’exonérer de sa responsabilité en apportant la preuve que tous les moyens ont été mis en œuvre afin d’éviter la survenance du risque. Ainsi, l’absence de faute ne constitue pas une cause d’exonération de la responsabilité (Cass. soc. 3 février 2010). Un tel manquement justifie par ailleurs que le salarié prenne l’initiative de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur. Cependant, la chambre sociale de la cour de cassation a récemment amorcé une évolution dans un arrêt du 25

novembre 2015 en décidant que l’employeur ne méconnaît pas son obligation légale de sécurité lorsqu’il justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail. Cet arrêt, qui ne précisait pas s’il en était de même en matière de harcèlement moral, a été complété par l’arrêt du 1

er juin 2016.

En l’espèce, un salarié victime de harcèlement moral auquel il avait mis fin par l’employeur, a saisi le conseil de Prud’hommes aux fins de voir prononcer la résiliation judicaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur. La cour de cassation précise alors que l’employeur ne méconnaît pas son obligation légale de sécurité (c’est-à-dire qu’il ne peut être tenu responsable) si les conditions suivantes sont remplies :

- il a pris toutes les mesures immédiates propres à faire cesser le harcèlement moral ;

- il a fait cesser effectivement les faits de harcèlement ; - il a pris toutes les mesures de prévention qui s’imposent, notamment la mise en œuvre d’actions d’information et de

formation propres à prévenir la survenance de faits de harcèlement moral. 2. Expliquez la solution de la cour de cassation

Une salariée, Mme

X, a été engagée le 22 janvier 2007 puis licenciée le 23 novembre 2007 pour absences prolongées et

répétées perturbant l’organisation et le bon fonctionnement de l’entreprise. S’il est constant que la maladie du salarié ne peut être un motif licite de licenciement, la rupture du contrat est par exception envisageable à la double condition suivante :

- les absences répétées et prolongées du salarié résultant de la maladie non professionnelle ont pour effet de perturber le fonctionnement de l’entreprise ;

- l’employeur doit justifier de la nécessité de pourvoir au remplacement définitif du salarié.

Cependant, et c’est l’apport de cet arrêt, il convient d’être vigilant quant à l’origine des absences et donc de la maladie du salarié. En effet, lorsqu’il peut être apporté la preuve que la maladie résulte d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat, il ne peut être invoqué le motif de la désorganisation de l’entreprise. Dans le cas d’espèce, il est patent que la surcharge de travail conduisant à l’épuisement du salarié (le burn-out) constitue un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité. Les absences en découlant ne peuvent justifier le licenciement du salarié en invoquant la perturbation du fonctionnement de l’entreprise.

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VIADUC MARES

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Le contrôle de l’activité des salariés : principe, vidéosurveillance, contrôle de l’ordinateur, des appels téléphoniques, des mails et des courriers, géolocalisation

I – CAS PRATIQUE

1. Utilisation des images issues d’un système de vidéosurveillance

M. Lequantique, directeur général de la société VIADUC MARES, spécialisée dans le cryptage d’informations, vient d’installer un système de vidéosurveillance dans l’entreprise et procède régulièrement à l’inspection des postes informatiques. Il surprend, grâce à son installation, M. Bernard en train de voler du matériel dans des locaux où il n’a pas accès habituellement. Le lendemain, l’autocommutateur de l’entreprise lui apprend que M

lle Alice entretient des

communications téléphoniques courantes avec une entreprise concurrente. Quelle est la licéité des moyens permettant à l’employeur de contrôler l’activité des salariés ?

Règles de droit applicables

Dans le cadre de son pouvoir général de direction, l’employeur est amené à contrôler l’activité des salariés. Si le développement des nouvelles technologies a décuplé les possibilités d’effectuer de tels contrôles, il a aussi multiplié les occasions de porter atteinte à l’intimité des salariés ainsi qu’à leur vie privée, dont on ne peut considérer qu’il s’agit d’une peau dont on se dévêt à l’entrée de l’entreprise. Le législateur encadre l’utilisation de ces nouveaux procédés.

A – Les principes gouvernant à la mise en place d’un système de contrôle de l’activité des salariés

Les moyens de contrôles mis en place doivent être justifiés par la nature de la tâche à accomplir et proportionnés au but recherché. Ce principe codifié sous l’article L 1121-2 du code du travail vise à protéger toute dérive dans l’usage de

procédés de contrôle susceptibles de porter atteinte aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives.

Tout dispositif ou technique de nature à contrôler l’activité des salariés doit faire l’objet d’une consultation préalable du comité d’entreprise et à défaut des délégués du personnel. Cette règle visée à l’article L 2323-32 du code du travail impose l’information et la consultation des institutions représentative du personnel préalablement à toute mesure, technique ou méthode de contrôle de l’activité des salariés.

La même obligation d’information pèse sur l’employeur à l’égard des salariés. En effet aucun dispositif permettant de recueillir des informations sur les salariés ne peut être mis en place dans l’entreprise sans que ces derniers n’aient été

mis en mesure d’en prendre connaissance.

Enfin, si les procédés utilisés sont de nature à permettre la collecte de données nominatives dans le cadre d’un traitement automatisé, l’employeur a l’obligation non seulement d’en informer le comité d’entreprise, mais aussi de respecter les dispositions de l’article 22 de la loi Informatique et liberté du 06 janvier 1978. B – Application à la vidéosurveillance

Il est impératif pour l’employeur de se plier à l’accomplissement des formalités légales susvisées. Ainsi, la cour de cassation a pu décider à bon droit qu’un tel système ne pouvait être justifié et a fortiori fonder une sanction, en l’absence d’information des institutions représentatives du personnel (Cass. soc. 7 juin 2006). A contrario, lorsque la procédure est respectée, de tels enregistrements constituent un moyen de preuve licite (Cass. soc.2 février 2011). En l’espèce, un système de vidéosurveillance avait été installé pour surveiller la clientèle. Or la bande vidéo révéla un salarié de l’entreprise occupé à commettre un vol. Licencié pour faute grave, la cour suprême rappelle les règles de droit et que

quand bien même le salarié ne pouvait ignorer la présence des caméras, l’irrégularité de leur mise en place justifie l’annulation de la mesure. Par contre, dans une situation identique, le salarié filmé dans des locaux auxquels il n’avait pas accès peut être sanctionné sur la base de l’enregistrement vidéo, sans qu’il puisse être excipé une irrégularité quant à sa mise en place (Cass. soc. 31 janvier 2001).

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C – Application au contrôle des appels téléphoniques Pour des raisons évidentes liées aux libertés et à la vie privée des salariés, l’écoute et l’enregistrement des conversations téléphoniques sont par principe interdits. La violation de cette règle est sanctionnée par les articles 226-15 et 432-9 du code pénal. Par exception, un tel système peut être mis en œuvre sous condition de respecter les règles énoncées mais au surplus

de pouvoir justifier des conditions imposées par l’article L1121-1 du code du travail qui dispose que « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ». De plus, si le dispositif implique des moyens numériques, une déclaration préalable auprès de la CNIL est impérative. En revanche, ces dispositions ne s’appliquent pas lorsqu’il s’agit pour l’employeur de contrôler les appels téléphoniques par le biais des factures détaillées de l’opérateur téléphonique (Cass. soc. 15 mai 2001). Il en est de même si le contrôle procède de la simple vérification de la durée, du coût et des numéros des appels téléphoniques passés à partir de chaque poste au moyen des relevés fournis par l’autocommutateur téléphonique de l’entreprise (Cass. soc. 29 janvier 2008). En l’espèce, un salarié faisait usage de son téléphone professionnel pour accéder à des numéros de messagerie de rencontre. L’employeur, à l’appui de sa sanction, a pu valablement fournir les preuves obtenues par le relevé de l’autocommutateur de l’entreprise. Application des règles de droit aux faits

M. Bernard M. Bernard peut être sanctionné pour la tentative de vol commise dans les entrepôts auxquels il n’avait pas accès. En

effet, la production des images vidéo sera recevable en justice dans la mesure où l’installation du système de surveillance n’avait pas à être portée à la connaissance du salarié. Mlle Alice Les informations fournies par l’autocommutateur de l’entreprise ont permis de révéler que la salariée entretenait des relations avec une entreprise concurrente. La preuve est recevable puisque le système d’enregistrement est celui de l’entreprise et qu’il n’a pour effet que de permettre l’analyse des appels entrant et sortants ainsi que leur durée. Le comportement de M

lle Alice laisse présumer un comportement déloyal qu’il conviendra d’étayer.

2. Accès de l’employeur au contenu de l’ordinateur professionnel des salariés

Le poste informatique de M. Vigenere est inaccessible, celui-ci l’ayant crypté, et celui de M. Cesar dévoile une utilisation de sa messagerie à des fins étrangères à son travail. L’employeur peut-il librement procéder au contrôle du poste informatique d’un salarié et le sanctionner au regard de son contenu ?

Règles de droit applicables

Le poste informatique tout autant que la connexion Internet sont des outils mis à la disposition du salarié par l’employeur. Dès lors, les fichiers créés par ces outils sont eux-mêmes présumés à caractère professionnel, sauf si le salarié, par une mention particulière, permet de les identifier comme personnels (Cass. soc. 18 octobre 2006). Il en est de même pour les courriers électroniques envoyés à partir de la messagerie de l’entreprise ou encore les SMS reçus ou envoyés avec le téléphone professionnel (cass.soc 10 fev. 2015). Cependant, l’identification comme « strictement personnel » du

disque dur lui-même de l’ordinateur ne peut conférer un caractère personnel à l’intégralité des données qu’il contient, ce qui reviendrait à privatiser l’outil de travail (cass.soc. 4 juill. 2012). Cette analyse vaut pour les autres documents se trouvant dans le bureau du salarié (Cass. soc. 16 mai 2007). Le cryptage du poste informatique faisant obstacle à ce contrôle constitue de fait une faute justifiant la rupture du contrat de travail lorsque le salarié a déjà fait l’objet de mise en garde à ce sujet (Cass. soc. 18 octobre 2006). Dès lors l’employeur peut y avoir librement accès hors la présence du salarié et tirer toute conclusion utile et disciplinaire des éléments trouvés à cette occasion. Par ailleurs, l’utilisation dévoyée de la connexion Internet peut justifier des poursuites pénales sous le chef d’abus de confiance (Cass. soc. 19 mai 2004).

En revanche, les documents, textes ou fichiers informatiques classés personnels ne peuvent être consultés qu’en présence du salarié dûment appelé ou en cas de risques ou évènement particulier le justifiant (Cass. soc. 15 mai 2005). En ce qui concerne les mails, ils sont par principe couverts par le secret de la correspondance. Néanmoins, dans l’arrêt du 2 février 2011, la cour de cassation opère une distinction entre les mails professionnels et par déduction les mails non professionnels. Pour les premiers, dès lors qu’il est établi que le courriel est en rapport avec l’activité professionnelle du salarié (son contenu et sa nature le déterminent), il ne relève plus de la vie privée et peut être retenu dans le cadre d’une procédure disciplinaire.

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Application de la règle aux faits

M. Vignere M. Vignere a crypté son poste informatique et le rend donc inaccessible à son employeur, ce qui constitue un obstacle à son pouvoir de direction. Ce comportement ayant déjà fait l’objet de remarques pourra être sanctionné. Dans un cas similaire, le salarié a fait l’objet d’un licenciement pour faute grave (Cass. soc. 18 octobre 2006).

M. Cesar Les documents figurant sur l’ordinateur mis à sa disposition peuvent être librement consultés par M. Lequantique, sauf s’ils portent la mention « personnel », ou toute autre indication permettant de les identifier comme tels. À défaut de telles mentions, les éléments trouvés peuvent servir de fondement à une sanction disciplinaire. Il en est ainsi des documents trouvés dans le dossier « messages », comprenant des photos à caractère érotique et de nombreuses correspondances du même ton.

3. La correspondance privée sur le lieu de travail

M. Cesar vient de recevoir sur le site de l’entreprise une revue échangiste, le secrétariat ayant ouvert le courrier à son arrivée. M. Lequantique entend sanctionner le salarié à raison de son contenu. L’employeur dispose-t-il du pouvoir de prendre connaissance de la correspondance reçue par un salarié sur le site de l’entreprise et de le sanctionner pour son contenu ? Règles de droit applicables

Le salarié peut librement recevoir de la correspondance privée sur son lieu de travail. Mais l’employeur est fondé à procéder à son ouverture dès lors que le courrier ne porte pas de mention relative à son caractère personnel. L’atteinte à la vie privée ainsi que le délit de violation du secret des correspondances ne peuvent être retenus. Néanmoins, si l’ouverture de la correspondance est autorisée sans encourir les griefs énoncés, l’employeur ne saurait prendre des sanctions au regard du contenu même du courrier, quand bien même celui-ci provoquerait un trouble objectif dans l’entreprise (Cass. soc. 18 mai 2007). Application des règles de droit aux faits

Les documents figurant sur l’ordinateur mis à sa disposition peuvent être librement consultés, de même que la correspondance à défaut d’indication permettant de l’identifier comme personnelle. En revanche, les reproches tirés du contenu du courrier reçu par M. Cesar ne seront pas recevables puisqu’ils sont couverts par le droit au respect de la vie privée.

II – QUESTION DE COURS 1. Limite de l’utilisation des outils professionnels pour des besoins privés

Il n’existe pas de dispositif légal en la matière. Tout est donc affaire de mesure. S’il est admis que le salarié puisse utiliser les outils professionnels pur un usage privé (téléphone, ordinateur…), son utilisation ne doit pas dériver en abus, qui, lui, pourra faire l’objet d’une sanction disciplinaire.

2. La géolocalisation des salariés

La CNIL a adopté une recommandation en date du 16 mars 2006. Elle pose une première série de limites au regard des objectifs poursuivis. Ces objectifs peuvent être :

- l’amélioration du processus de production (meilleure allocation des moyens disponibles, analyse à posteriori des déplacements effectués) ;

- la contribution à la sécurité des personnes ou des marchandises transportées ; - le suivi de certaines marchandises (matières dangereuses, produits alimentaires…) ;

- le suivi des temps de travail des salariés.

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D’autre part, leur mise en place doit être justifiée par certaines finalités :

- un impératif de sécurité du salarié lui-même ou des marchandises ou véhicules dont il a la charge ; - une meilleure allocation des moyens pour des prestations à accomplir en des lieux dispersés ; - le suivi et la facturation d’une prestation ; - ou encore le suivi du temps de travail.

Une nouvelle recommandation en date du 8 avril 2010 précise les règles en ce qui concerne les systèmes de géolocalisation intégrés aux véhicules (Payd). Le système ne doit pas aboutir à la constitution de fichiers interdits ni avoir pour effet de permettre la traçabilité des déplacements des conducteurs.

III – ÉTUDE DE DOCUMENTS 1. Apport des mails du salarié en qualité de preuve à l’appui de son licenciement

La preuve en matière civile obéit à un régime strict. Elle ne peut notamment être obtenue de manière déloyale (par exemple la production d’images provenant de caméra de vidéosurveillance n’ayant pas fait l’objet d’une procédure régulière de mis en place). S’il est aujourd’hui constant que les moyens mis à la disposition des salariés constituent des outils professionnels permettant un contrôle de l’employeur sans autorisation du salarié, l’arrêt présenté ici constitue un revirement de jurisprudence en ce qui concerne la production de mails à l’occasion d’un contentieux. En l’espèce, un salarié exerçant les fonctions de Directeur Administratif et Financier a été licencié pour insuffisance professionnelle. Contestant son licenciement, il saisit la juridiction prud’homale et son employeur produit à l’appui de sa défense des courriers électroniques provenant de la messagerie professionnelle du salarié.

Le salarié fait valoir que la loi Informatique et Liberté du 6 janvier 1978 oblige l’utilisateur de traitements automatisés de données à caractère personnel, comme le sont les messageries électroniques professionnelles, à procéder à leur déclaration auprès de la CNIL. Or tel n’a pas été le cas par son entreprise. Dès lors, la production des courriels est irrégulière et ne peut être retenue par le tribunal. La Cour d’appel de Paris les écarte en effet sous ce motif dans son arrêt du 24 juin 2015, conformément à la jurisprudence de la cour de cassation (Cass. soc. 8 octobre 2014). Or le système de messagerie ne comportait pas de mécanisme de contrôle individuel des salariés et partant, ne constituait pas une atteinte aux droits et libertés individuelles, de même que le salarié ne pouvait ignorer la fixation et conservation des messages envoyés.

La cour de cassation en valide ainsi la production dans le cadre d’une instance et distingue par là même les systèmes de messagerie comportant un système de contrôle de l’activité des salariés pour lesquels une déclaration simplifiée à la CNIL est nécessaire, des autres systèmes. 2. Précisions apportées par la cour de cassation sur les pouvoirs de contrôle de l’employeur

Ces deux arrêts apportent des précisions supplémentaires quant à la nature des supports et informations relatives aux

salariés auxquelles l’employeur peut avoir accès aux fins de contrôler leur activité sans enfreindre le secret des correspondances et plus largement le droit au respect de la vie privée. Comme précisé dans le cas pratique, le droit au respect de la vie privé ne s’arrête pas à la porte de l’entreprise et interdit à l’employeur d’accéder à des informations relatives aux salariés dès lors qu’elles peuvent être identifiées comme personnelles. A contrario, les outils professionnels ainsi que les correspondances ou documents non identifiés comme personnels sont présumés professionnels et laissent à l’employeur toute liberté pour prendre connaissance de leur contenu. Le premier arrêt (16 mai 2013) vient préciser que l’utilisation de la messagerie d’entreprise laisse présumer le caractère professionnel des mails et autorise l’employeur à faire dresser un constat d’huissier de leur contenu. Les salariés

désirant garantir le caractère privé de leur correspondance avec leurs courriels professionnels devront les identifier comme strictement personnels. Le second arrêt (12 février 2013) porte quant à lui sur le contenu d’une clé USB appartenant au salarié mais raccordée à l’ordinateur professionnel. La haute cour va ici plus loin, puisqu’il était loisible de considérer que le caractère personnel de son contenu se déduisait de la propriété de ladite clé USB. Or il n’en va pas ainsi pour la cour de cassation. En effet, dès lors que la clé est connectée à l’ordinateur professionnel, son usage, et donc son contenu, sont présumés professionnels et autorise l’employeur à prendre connaissance de son contenu.

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SINDEGAT

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Les délégués du personnel et le comité d’entreprise : désignation, durée du mandat, contestation, nullité des élections, contrôle des heures de délégation, compétence, entrave, DUE, les différents comités d’entreprise

I – CAS PRATIQUE 1. Justification des heures de délégation

L’employeur demande à Mlle

Michel de justifier de ses heures de délégation. Le délégué syndical est-il tenu de justifier de ses heures de délégation auprès de l’employeur ?

Règle de droit applicable Aux fins de permettre aux délégués syndicaux d’accomplir les missions pour lesquelles ils ont été désignés, le législateur accorde à ces derniers les moyens nécessaires.

Ces moyens comprennent notamment un droit d’affichage leur permettant d’informer les salariés, une liberté de déplacement dans et hors de l’entreprise et des heures de délégation. Il s’agit d’un volume d’heures mensuelles alloué aux délégués pour remplir leurs attributions. Le nombre d’heures varie en fonction de la taille de l’entreprise. À titre d’exemple, il est de 12 heures par mois pour les entreprises d’au moins 50 salariés. Elles constituent un temps de travail effectif, payées à l’échéance normale par l’employeur et s’imputent sur le décompte du temps de travail des salariés concernés (art. 2143-17 al. 1 C. Trav.) Elles sont librement utilisées par le salarié sans qu’il ait à recourir à une autorisation préalable de l’employeur, si ce n’est l’indication de l’heure de départ et de retour prévue. Par contre, l’usage qui en est fait doit être conforme au mandat les

justifiant. Ainsi, l’utilisation du temps est présumé judicieuse, et l’employeur qui souhaite demander toute justification relative au temps passé doit saisir le juge judiciaire (L 2143-17 al 2). Il ne peut ainsi tirer argument du refus de réponse du salarié à sa requête pour sanctionner ce dernier en l’absence de saisine de la juridiction concernée. Application de la règle aux faits L’employeur ne peut prononcer aucune sanction sur ce motif. Il doit saisir le juge judiciaire.

2. Utilisation de la messagerie de l’entreprise

Mlle

Michel a utilisé la messagerie interne de l’entreprise pour la diffusion d’informations syndicales à destination des responsables d’établissements. La loi du 4 mai 2004 a instauré la possibilité pour les syndicats de diffuser leur communication par intranet, soit sur un

« site syndical mis en place sur l’intranet de l’entreprise, soit par diffusion sur la messagerie électronique de l’entreprise » (L 2142-6 C. trav.) Cette potentialité est subordonnée à la conclusion d’un accord d’entreprise qui doit en préciser les modalités, notamment quant au contenu des informations diffusées. En ce sens, la cour de cassation a validé dans un arrêt du 22 janvier 2008 la sanction prononcée à l’encontre d’un délégué syndical pour avoir diffusé une information sans rapport avec la situation sociale de l’entreprise, condition visée par l’accord collectif autorisant l’usage de l’intranet pour l’information syndicale. Néanmoins, la cour de cassation, par un arrêt du 10 janvier 2012, a considéré qu’il n’y avait pas diffusion au sens de la loi lorsque les documents sont envoyés uniquement à la hiérarchie. L’article 2142-6 du code du travail n’étant dès lors pas applicable. En l’absence d’accord, la loi du 8 août 2016 autorise les organisations syndicales dans l’entreprise (qui satisfont aux

critères de respect des valeurs républicaines, d’indépendance, et qui sont légalement constituées depuis au moins deux ans) à mettre à dispositions des salariés des informations syndicales sur l’intranet de l’entreprise. Cette possibilité est sous condition :

- d’être compatible avec le bon fonctionnement et la sécurité du réseau informatique de l’entreprise ; - de ne pas avoir des conséquences préjudiciables à la bonne marche de l’entreprise ; - de permettre aux salariés d’accepter ou de refuser les messages.

En l’espèce, la communication aux responsables d’établissements par la messagerie de l’entreprise n’est pas

conditionnée à l’existence d’un accord d’entreprise l’autorisant dans la mesure où elle ne constitue pas une diffusion.

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3. Les nouveaux critères de représentativité syndicale

La loi du 20 août 2008 a modifié certains aspects de la législation en matière de représentativité syndicale, les délégués se demandent s’ils pourront conserver leur mandat si leur syndicat ne devait plus être considéré comme représentatif. Précisez aux délégués syndicaux les nouvelles règles en matière de représentativité.

La représentativité générale des organisations syndicales est déterminée d’après les critères cumulatifs suivants : - le respect des valeurs républicaines ; - l’indépendance ; - la transparence financière ; - une ancienneté minimale de deux ans dans le champ professionnel et géographique couvrant le niveau de

négociation. Cette ancienneté s’apprécie à compter de la date de dépôt légal des statuts ; - l’audience établie selon les niveaux de négociation ; - l’influence, prioritairement caractérisée par l’activité et l’expérience ;

- les effectifs d’adhérents et les cotisations. Au niveau de l’entreprise ou de l’établissement, sont représentatives les organisations syndicales qui satisfont aux critères précédents et qui ont recueilli au moins 10% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants (art. 2122-1. C.Trav.). 4. La conservation des mandats

Règle de droit applicable La loi ne prévoit pas de dispositions spécifiques en la matière. Leur mandat peut donc prendre fin puisque les conditions de sa désignation ne sont plus réunies. 5. Maintien de la section syndicale

Les élections ont clairement montré que deux syndicats affiliés aux grandes centrales n’avaient plus la même force qu’auparavant et leur présence est menacée. Jean Maison est concerné. Règle de droit applicable Dès lors qu’ils ont plusieurs adhérents dans l’entreprise ou dans l’établissement, chaque syndicat qui y est représentatif, chaque syndicat affilié à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel ou chaque organisation syndicale qui satisfait aux critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance et est légalement constituée depuis au moins deux ans et dont le champ professionnel et géographique couvre l’entreprise concernée peut constituer au sein de l’entreprise ou de l’établissement une section syndicale qui assure la représentation des intérêts matériels et moraux de ses membres. Application de la règle aux faits Les syndicats sont affiliés à une organisation représentative au niveau national (grandes centrales), et l’entreprise compte 52 salariés. La section syndicale pourra être maintenue.

6. Désignation du RSS

À quel titre Jean Maison pourra-t-il être désigné ? Règle de droit applicable Innovation de la loi du 20 août 2008, chaque syndicat qui constitue une section syndicale au sein de l’entreprise ou de l’établissement comprenant au moins 50 salariés peut, s’il n’est pas représentatif dans l’entreprise ou l’établissement, désigner un représentant de la section pour le représenter au sein de l’entreprise ou de l’établissement. Application de la règle aux faits Leur syndicat n’étant pas représentatif mais l’entreprise étant dotée d’une section syndicale, Jean pourra être désigné comme représentant de la section syndicale. 7. Détermination de la représentativité syndicale pour participer aux négociations d’un accord collectif

Règle de droit applicable Au niveau de l’entreprise et de l’établissement la loi prévoit que sont représentatives les organisations syndicales qui satisfont aux critères de l’article L. 2121-1 et qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants.

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Lorsque l’entreprise comprend plusieurs établissements, il convient alors d’additionner les résultats obtenus par les organisations syndicales dans l’ensemble des établissements de l’entreprise. Ainsi, un syndicat peut être représentatif au niveau d’un établissement sans l’être pour autant au niveau de l’entreprise, et inversement. L’établissement ne constitue pas une structure indépendante juridiquement. Il est la plupart du temps un lieu d’activité constituant une communauté de travailleurs ayant des intérêts propres et travaillant sous la direction d’un représentant de l’employeur. Application de la règle aux faits

L’entreprise VICI comprend deux établissements : Greenbook et Velin. C’set donc au niveau de ces trois entités qu’il convient d’apprécier la représentativité de la CFDT. Le syndicat obtient 8% des voix sur dans la SAS, soit 2,4 salariés ont voté pour la CFDT. Le syndicat obtient 30% des voix sur 110 salariés dans l’établissement Greenbook, soit 33 salariés ont voté pour la CFDT. Le syndicat obtient 9% des voix sur 40 salariés dans l’établissement Velin, soit 3,6 salariés. L’ensemble de l’entreprise comprend 170 salariés dont 39 ont voté pour la CFDT. Par conséquent le syndicat obtient 22,9% des voix. Dès lors elle doit être considérée comme représentative et pourra s’assoir à la table des négociations.

8 Détermination de la représentativité au niveau d’un ensemble d’entreprise

M. Filigranne souhaiterait négocier le même accord avec la SARL VENI et la SAS VEDI uniquement. M. GOULAMASSE, délégué du personnel de l’établissement VELIN, estime que la participation de la CGT est de droit au sein du groupe. M. Filigranne lui répond qu’il n’y a pas de groupe Règle de droit applicable Le cas suppose d’aborder deux notions, la première, celle de groupe, la seconde, celle de l’unité économique et sociale. Sans aller trop avant dans la notion de groupe il convient tout d’abord d’indiquer que le législateur ne l’a pas défini. Il en reconnait seulement des conséquences juridiques. Tel est le cas par exemple en droit du travail pour déterminer la représentativité syndicale au niveau du groupe, ou encore les conditions de conclusion d’un accord de groupe.

Le code du travail (art. 2331-1 C.Trav) renvoie pour la détermination du groupe au code de commerce (art. L233-1 c.com) qui apprécie cette notion au regard de celle de contrôle. Schématiquement, un groupe suppose une société dominante, appelée société mère, qui détermine par les droits de vote dont elle dispose les décisions collectives – a minima ordinaires – d’autres sociétés appelées filiales. On dit alors que la société mère contrôle les filiales car elle peut seule imposer ses décisions dans les assemblées générales de ses filiales. Le calcul de la représentativité, au minimum 10% des voix, se fait en additionnant les résultats obtenus par chaque syndicat au sein de chacune des entités du groupe. Est également considérée comme entreprise dominante, pour la constitution d’un comité de groupe, une entreprise

exerçant une influence dominante sur une autre entreprise dont elle détient au moins 10% du capital, lorsque la permanence et l’importance des relations de ces entreprises établissent l’appartenance de l’une et de l’autre à un même ensemble économique. Le calcul de la représentativité, au minimum 10% des voix, se fait en additionnant les résultats obtenus par chaque syndicat au sein de chacune des entités du groupe. D’autre part, plusieurs entités juridiques peuvent aussi former un ensemble cohérent, doté d’une stratégie commune sans pour autant former un groupe juridiquement. Elles peuvent alors, si les conditions sont réunies, constituer une unité

économique et sociale. Cette notion jurisprudentielle permet à des entreprises juridiquement distinctes de constituer un ensemble homogène dont l’effectif sera cumulé afin d’atteindre des seuils déclenchant des obligations sociales. L’UES peut faire l’objet d’une reconnaissance par accord collectif ou par voie judiciaire. La représentativité des syndicats est déterminée par les scores obtenus par chacun d’eux aux dernières élections professionnelles au sein de chaque entreprise constituant l’UES. Le seuil de représentativité est fixé à 10% des voix. Application de la règle aux faits

La société LE REBOUR contrôle la SAS VEDI (80%° du capital) mai non la SAS VICI (25% du capital) et rien ne nous

est indiqué concernant l’actionnariat possédant le reste du capital de cette dernière société. Il n’est donc pas possible d’en déduire une situation de contrôle et l’existence d’un groupe sans autre indication. Par contre ces 5 sociétés forment une unité économique (mêmes dirigeants, activités complémentaires). Restera a déterminer l’existence de l’unité sociale qui pourra se déduire d’une gestion des ressources humaines communes, d’une mutualisation de la paye, d’une convention collective commune, de l’interchangeabilité du personnel…). Si ce deuxième critère est établi, il faudra apprécier la représentativité de la CGT au niveau de l’UES, c’est-à-dire dans l’ensemble des entités la composant. Ainsi, la CGT obtient 32,4 voix sur 352 (total des voix exprimées dans l’UES). Elle représente donc 9,2% des voix. Elle

n’est pas représentative au sein de l’UES.

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II – QUESTION DE COURS 1. La protection des délégués syndicaux contre le licenciement

Sont protégés contre le licenciement, c’est-à-dire font l’objet d’une procédure dérogatoire en cas de licenciement, les personnes qui d’une manière générale accomplissent ou ont l’intention d’accomplir un mandat de représentation. Sont ainsi visés principalement :

- les candidats et délégués du personnel titulaires et suppléants ; - les candidats et membres élus titulaires et suppléants du CE ;

- les délégués syndicaux ; - les candidats et membres élus du CHSCT.

La protection s’étend, selon le mandat, de l’acte de candidature, à la durée du mandat et s’étend même au-delà pour une durée qui dépend de la fonction exercé. A titre d’exemple : pour le délégué syndical, la protection cours à compter de la désignation et s’étend jusqu’à 12 mois au-delà de son expiration à condition d’avoir exercé les fonctions pendant au moins 1 an. La protection s’applique à toutes mesures de licenciement ou d’une manière générale de rupture du contrat du fait de l’employeur. Elle consiste en l’adoption d’une procédure particulière sous peine de nullité.

Ainsi, le licenciement d’un membre titulaire ou suppléant du comité d’entreprise ou d’un représentant syndical, d’un délégué du personnel, titulaire ou suppléant est obligatoirement soumis au comité d’entreprise qui donne un avis sur le projet de licenciement. Il ne peut ensuite intervenir que sur autorisation de l’inspecteur du travail dont dépend l’établissement. La décision de l’inspecteur du travail, si elle est négative, peut faire l’objet soit d’un recours hiérarchique soit d’un recours contentieux devant le tribunal administratif.

La sanction principale est la nullité de la décision de licenciement et la réintégration du salarié dans l’entreprise si l’employeur n’a pas respecté la procédure légale ou s’il a passé outre la décision négative de l’inspecteur du travail Le salarié peut en outre solliciter une indemnisation du préjudice qu’il a subi. Néanmoins, cette protection ne prive pas l’employeur de mettre en œuvre la procédure de licenciement pour faute grave. Elle en règle seulement les modalités. À ce titre, en cas de faute grave, le chef d’entreprise a la faculté de prononcer la mise à pied immédiate de l’intéressé en attendant la décision définitive des institutions.

2. Les missions des délégués syndicaux

Pour l’essentiel, le délégué syndical remplit trois missions : - une mission de direction et d’animation de la section syndicale dans l’entreprise ; - une mission de représentation du syndicat dans toutes les négociations collectives ; - une mission de défense des adhérents et de représentation du syndicat vis-à-vis de l’employeur.

3. Le délit d’entrave

Le délit d’entrave est un délit éclaté dans la mesure où de nombreuses dispositions légales en prévoient la sanction. L’infraction consiste pour l’essentiel en tout acte, comportement, ou parole de nature à porter atteinte au libre exercice des attributions conférées aux institutions collectives (délégué syndical, délégués du personnel, CE, CHSCT). Les sanctions ont été modifiées par la loi Macron du 6 août 2015. Désormais le fait de porter ou tenter de porter atteinte au fonctionnement et à l’exercice régulier des fonctions des IRP est puni d’une peine d’amende de 7500 euros. Pour être valablement constitué, l’infraction doit réunir :

- un élément légal (un dispositif légal réprimant l’infraction) - un élément matériel (la matérialité du comportement réprimé)

- un élément intentionnel (avoir agi sciemment, c’est-à-dire en ayant connaissance du caractère délictueux de son comportement).

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III – ÉTUDE DOCUMENT Document 1 1. Problème de droit

Sur le pourvoi principal (employeur) : quelles sont les conditions de désignation du représentant de la section syndicale ? Sur le pourvoi incident (syndicat): à quelles conditions une organisation syndicale représentative peut-elle désigner une personne autre que celle figurant parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli à titre personnel

et dans leur collège au moins 10% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou des délégués du personnel ? 2. Solution de la cour

Sur le pourvoi principal La désignation d’un représentant de la section syndicale n’est possible que pour les syndicats non représentatifs dans les entreprises d’au moins 50 salariés. En dessous de ce seuil, ces mêmes syndicats peuvent désigner un délégué du

personnel comme représentant de la section syndicale. Dans l’arrêt commenté, l’entreprise compte plusieurs établissements et l’employeur estime que la représentativité du syndicat FO doit s’apprécier au niveau de l’entreprise à l’occasion des élections au comité unique de l’entreprise. Dès lors que l’audience requise a été obtenue (10%) à ces mêmes élections, son caractère représentatif lui interdit par conséquent de désigner un représentant de la section syndicale au niveau d’un établissement de l’entreprise, en l’occurrence celui de Rouen. Il demande donc l’annulation de la désignation du représentant de la section syndicale par le syndicat FO représentatif au niveau de l’entreprise. Or la cour de cassation constate que l’établissement de Rouen a été reconnu conventionnellement distinct pour les

délégués du personnel et l’établissement de la représentativité syndicale. C’est donc au niveau des élections des délégués du personnel de cet établissement qu’il conviendra d’apprécier la représentativité du syndicat FO. Or ce dernier n’ayant présenté aucun candidat aux dernières élections, il ne peut par conséquent y être représentatif. Il peut dès lors y désigner un représentant de la section syndicale. Sur le pourvoi incident Par principe, la désignation d’un délégué syndical obéit aux dispositions de l’article 2143-3 du code du travail, à savoir que le choix du délégué syndical doit s’effectuer parmi les candidats ayant obtenu au moins 10% des suffrages exprimés

aux dernières élections professionnelles. Si aucun des candidats présentés ne satisfait à cette obligation, le délégué syndical peut être choisi parmi les autres candidats ou, à défaut, parmi ses adhérents au sein de l’entreprise ou de l’établissement. C’est précisément sur le fondement de cette exception que le syndicat estime régulière la désignation de M

me X en qualité de déléguée syndical.

Or la cour de cassation constate que le syndicat n’a présenté aucun candidat dans le périmètre des élections professionnelles de l’établissement de Rouen, ni établit une situation particulière justifiant cette absence de candidat. Le syndicat FO ne peut ainsi se prévaloir de l’exception sans avoir au préalable respecté le principe.

Document 2 3. Problème droit

Un syndicat représentatif dans l’entreprise peut-il désigner un représentant de la section syndicale dans un établissement où il n’est pas représentatif ?

4. Solution de la cour de cassation quant à la désignation d’un représentant de la section syndicale

Innovation de la loi du 20 août 2008, chaque syndicat qui constitue une section syndicale au sein de l’entreprise ou de l’établissement de 50 salariés ou plus peut, s’il n’est pas représentatif dans l’entreprise ou l’établissement, désigner un représentant de la section pour le représenter au sein de l’entreprise ou de l’établissement.

Dans les entreprises qui emploient moins de cinquante salariés, les syndicats non représentatifs dans l’entreprise qui constituent une section syndicale peuvent désigner, pour la durée de son mandat, un délégué du personnel comme représentant de la section syndicale (art. 2142-1-4 C trav.).

La possibilité de désigner un représentant de la section est-elle cependant ouverte dans les établissements où le syndicat n’est pas représentatif alors qu’il l’est au niveau de l’entreprise ? Par un arrêt du 10 mai 2012, la haute cour

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avait répondu par la négative considérant que l’audience électorale dans les établissements devait atteindre 10% pour qu’un syndicat puisse y désigner un représentant de la section syndicale. L’arrêt du 13 février constitue un revirement de jurisprudence important puisque la Cour de assation affirme, en validant le jugement du tribunal d’instance, que si le syndicat est représentatif au niveau de l’entreprise sans l’être au niveau de l’établissement, il peut y désigner un représentant de la section syndicale.

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LE CAVALIER

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Les délégués du personnel et le comité d’entreprise : désignation, durée du mandat, contestation, nullité des élections, contrôle des heures de délégation, compétence, entrave, DUE, les différents comités d’entreprise

I – CAS PRATIQUE En N-4, l’effectif de l’entreprise passe de 8 à 11 salariés. En N, la société HERMUL et COLBERT fait de nouveau

procéder à l’élection des délégués du personnel, dont le mandat est prévu pour une durée de 2 ans conformément à la convention collective. La régularité des élections ainsi que la durée du mandat étant contestées ; les contradicteurs souhaitent saisir le tribunal d’instance par télécopie. L’employeur y voyant une atteinte personnelle, il demande au délégué du personnel, M. Ribin de justifier l’utilisation des heures de délégation dont il bénéficie. Ce dernier refuse et relève pour sa part des irrégularités relatives au droit du travail dans l’entreprise. La première concerne l’absence régulière des réunions mensuelles des délégués du personnel. La seconde consiste à n’avoir pas sollicité l’avis des délégués du personnel à l’occasion du licenciement pour inaptitude

de M. Prihl.

Les faits soumis permettent de distinguer différentes problématiques auxquelles il conviendra de répondre séparément. 1. Dans quels cas l’employeur est-il tenu de faire procéder aux élections des délégués du personnel ? 2. Quelle est la durée du mandat des délégués du personnel ? 3. L’employeur peut-il décider seul de la fréquence, des modalités et de l’objet des réunions ? 4. L’employeur peut-il demander au salarié, délégué du personnel, de justifier de l’usage des heures de délégation ?

5. L’inobservation délibérée des règles relatives à la réunion mensuelle des délégués du personnel est-elle sanctionnable ?

6. L’avis des délégués du personnel, dans la situation visée à l’article L 1226-10 du code du travail, doit-il être recueilli collectivement à l’occasion de la réunion mensuelle ?

7. La mise en place d’un comité de groupe 8. La mise en place d’un CE au niveau de l’UES

Règles de droit applicables

1. Mise en place des délégués du personnel

Les dispositions légales relatives aux délégués du personnel s’appliquent sans distinction à toutes les entreprises et tous les établissements, indifféremment de leur forme ou de leur objet (association, sociétés civiles ou commerciales, professions libérales…ayant une activité agricole, industrielle ou commerciale). Au niveau de l’établissement, leur mise en place est obligatoire dès lors que l’entreprise comprend un effectif d’au moins

11 salariés, atteint pendant 12 mois consécutifs ou non, au cours des trois années précédentes. Par exception, si des entreprises juridiquement distinctes sont en dessous du seuil légal, elles peuvent être regroupées pour constituer une unité économique et sociale atteignant au moins 11 salariés. 2. Durée du mandat des délégués du personnel

L’obligation d’organiser les élections pèse sur l’employeur qui doit en assurer le déroulement tous les quatre ans (en l’absence de représentants du personnel, un salarié ou une organisation syndicale représentative peut inviter l’employeur à organiser les élections). Il en informe le personnel par voie d’affichage et invite les syndicats à établir le

protocole d’accord préélectoral (accord qui fixe les modalités du scrutin, la répartition du personnel et des sièges dans les collèges électoraux) ainsi que la liste des candidats.

L’élection est organisée en principe par collèges électoraux :

- le premier regroupe les ouvriers et les employés ;

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- le second regroupe les agents de maîtrise et les cadres.

Toutefois, dans les établissements dont l’effectif ne dépasse pas 25 salariés, il peut être procédé aux élections dans le cadre d’un collège unique. Les délégués élus jouissent d’un mandat d’une durée de 4 ans tel qu’en dispose l’article L2314-26 du code du travail. Cette durée est issue des dispositions nouvelles de la loi du 2 août 2005. En effet, antérieurement, le mandat des délégués du personnel s’exerçait pour une durée initiale de 2 ans (loi du 20 décembre 1993). La loi nouvelle,

d’application immédiate, a donc pour effet de porter à 4 ans tous les nouveaux mandats postérieurs à sa promulgation (les mandats en cours n’ont pas été affectés). Néanmoins, cette règle est susceptible d’aménagements conventionnels prévus à l’article L 2314-27 du même code. En effet, un accord de branche, de groupe ou d’entreprise, peut prévoir une durée différente comprise entre deux et quatre ans. Mais ils doivent être postérieurs à la loi. Dès lors les conventions ou accords antérieurs au 2 août 2005 traitant de la durée du mandat des délégués du personnel ne peuvent être considérés comme entrant dans le champ des dérogations prévues par la loi.

3. Fréquence, modalités et objet des réunions avec les DP

Fréquence. Les délégués du personnel doivent être réunis collectivement par l’employeur au moins une fois par mois.

Le manquement à cette obligation est de nature à caractériser un délit d’entrave. Néanmoins et en dehors de cette régularité obligatoire, les délégués du personnel peuvent demander à être reçus par l’employeur en cas d’urgence. Celle-ci doit être caractérisée pour que l’employeur soit contraint de faire droit à leur demande. Ce peut être l’imminence d’un conflit collectif ou encore des risques particuliers tenant à la santé et à la sécurité des salariés. Ils sont également reçus sur leur demande, soit individuellement soit par catégorie, atelier, service ou spécialité professionnelle selon les questions qu’ils ont à traiter.

Modalités. A l’occasion de la réunion mensuelle les DP, titulaires et suppléants, doivent être tous convoqués, même ceux dont le contrat est suspendu, car il y a lieu de distinguer entre le contrat de travail et l’exercice de leur mandat électif. La loi ne fixe pas de forme particulière à leur convocation mais il conviendra de se réserver la preuve du bon accomplissement de cette obligation dans un délai suffisant pour permettre aux délégués du personnel de présenter leurs demandes. Objet. Précisément, les DP doivent exposer dans une note écrite l’objet des demandes présentées, 2 jours ouvrables avant la date à laquelle ils doivent être reçus. L’employeur est tenu d’y répondre par écrit au plus tard dans les 6 jours

ouvrables suivant la réunion. Demandes et réponses sont ensuite transcrites sur un registre spécial ou annexées à celui-ci. 4. Justification de l’usage des heures de délégation au titre de délégué du personnel

Aux fins de permettre aux délégués du personnel d’accomplir les missions pour lesquelles ils ont reçu mandat, le législateur accorde à ces derniers les moyens nécessaires. Ces moyens comprennent notamment un droit d’affichage leur permettant d’informer les salariés, une liberté de déplacement dans et hors de l’entreprise et des heures de délégation. Il s’agit d’un volume d’heures mensuelles alloué

aux délégués pour remplir leurs attributions. Le nombre d’heures varie en fonction de la taille de l’entreprise. À titre d’exemple, il est de 10 heures par mois pour les entreprises de moins de 50 salariés. Ces heures payées à l’échéance normale constituent un temps de travail effectif et s’imputent sur le décompte du temps de travail des salariés concernés (L. 2315-3 al. 1 C. Trav.). Elles sont librement utilisées par le salarié, sans qu’il ait à recourir à une autorisation préalable de l’employeur, si ce n’est l’indication de l’heure de départ et de retour prévue. Par contre, l’usage qui en est fait doit être conforme au mandat les justifiant. Ainsi, l’utilisation du temps est présumée judicieuse, et l’employeur qui souhaite demander toute justification relative au

temps passé doit saisir le juge judiciaire (L 2315-3 al 2). Il ne peut tirer argument du refus de réponse du salarié à sa requête pour sanctionner ce dernier en l’absence de saisine de la juridiction concernée. 5. Le manquement délibéré à l’obligation de réunion mensuelle des délégués du personnel

La loi fait obligation à l’employeur de réunir une fois par mois les délégués du personnel. Il ne peut être dérogé à cette obligation qu’en cas de force majeure, de refus des délégués d’y participer ou de défection de ces derniers le jour de la réunion.

En dehors de ces hypothèses, il faut considérer que l’employeur ne satisfait aux obligations de la loi relatives au fonctionnement des institutions représentatives du personnel et commet le délit d’entrave (L 2316-1 C. Trav.). Le délit d’entrave est un délit éclaté dans la mesure où de nombreuses dispositions légales en prévoient la répression. L’infraction consiste pour l’essentiel en tout acte, comportement, ou parole de nature à porter atteinte au libre exercice des attributions conférées aux institutions collectives (délégué syndical, délégués du personnel, CE, CHSCT). Il convient de vérifier l’existence des éléments constitutifs de l’infraction, à savoir :

- l’élément légal (principe de légalité) ; - l’élément matériel (les faits constitutifs de l’infraction) ;

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- l’élément moral (l’intention délictuelle). La cour de cassation a pu décider que l’absence de réunions périodiques conformes à la loi ainsi que le défaut de mise à disposition d’un local et la tenue des réunions en présence de tiers supérieurs à celle des délégués du personnel caractérisaient matériellement et intentionnellement le délit d’entrave (Cass. soc. 25 septembre 2007). La peine encourue est une amende de 7500 euros.

6. L’intervention des délégués du personnel en cas d’inaptitude suite à une maladie ou un accident professionnel

À titre principal, les délégués du personnel constituent une « interface » entre les salariés et l’employeur et veillent au respect de la législation du travail dans l’entreprise. À ce double titre, ils ont pour tâche de présenter à l’employeur les revendications individuelles et collectives des salariés et peuvent aussi saisir l’inspection du travail ou le Conseil de Prud’hommes en référé en cas de violation des dispositions relatives au droit du travail. À titre accessoire, ils endossent les fonctions réservées à d’autres organes lorsque ces derniers sont absents. Les délégués du personnel exercent ainsi les attributions économiques du comité d’entreprise dans les entreprises de moins de 50 salariés et remplissent les missions du CHSCT si l’entreprise en est dépourvue.

Ils sont enfin consultés obligatoirement ou facultativement. Obligatoirement (notamment) en cas de licenciement économique dans une entreprise de moins de 50 salariés, pour la détermination des périodes de congés payés en l’absence de disposition de la convention collective ou encore en cas de reclassement (cass.soc. 25 mars 2015) à la suite de l’inaptitude constatée d’un salarié (cass. soc. 15 avr. 2015). Dans cette dernière hypothèse, l’employeur doit proposer au salarié dont l’inaptitude a été constatée médicalement un nouvel emploi compatible avec ses aptitudes, après avis des délégués du personnel (L 1226-10 C. Trav.). Cet avis doit être recueilli préalablement à toute procédure de licenciement, mais la loi n’impose pas une consultation collective des délégués du personnel à l’occasion de la réunion mensuelle (Cass. soc 29 avril 2003). Dès lors, l’examen individuel des opinions en dehors d’une réunion

collective ne porte pas atteinte à l’article L 2315-8 du code du travail. 7. Un comité de groupe doit-il être mis en place ?

Un comité de groupe doit être institué lorsque plusieurs entreprises en constituent l’architecture. Tel est le cas, lorsqu’au sein de cet ensemble de structures juridiques indépendantes, une entreprise appelée entreprise dominante, et dont le siège social est situé sur le territoire français, contrôle les autres entreprises dans les conditions définies au code commerce. À savoir notamment, que les droits de vote qu’elle possède permettent d’imposer ses décisions en

assemblée générale ordinaire au minimum. De même, est considérée comme entreprise dominante, celle exerçant une influence dominante sur une autre entreprise dont elle détient au moins 10 % du capital, « lorsque la permanence et l’importance des relations de ces entreprises établissent l’appartenance de l’une et de l’autre à un même ensemble économique » (art. 2331-1 C. trav.). 8. Si cela n’est pas envisageable, une autre solution est-elle possible ? Sur quel fondement juridique ?

À défaut, un comité peut être constitué au niveau d’une unité économique et sociale (Cf. Fiche 21 question 7). L’UES

doit être reconnue par voie négociée ou décision judiciaire. En toute hypothèse, il n’est pas possible d’avoir un comité de groupe et un comité d’UES si les structures juridiques couvrent le même périmètre. Application des règles de droit aux faits

1. Sur l’obligation de procéder à l’élection des délégués du personnel. En N-4, l’employeur n’a pas d’obligation immédiate particulière puisque la condition de durée n’est pas remplie. Néanmoins, s’il le souhaite, il peut en organiser les élections.

2. Sur la durée du mandat des délégués du personnel En l’absence d’accord de branche, de groupe ou d’entreprise postérieur à la loi du 2 août 2005 le mandat des délégués du personnel est fixé à 4 ans et non à 2 ans. 3. Sur les réunions des DP Si M

me Krhuel ne satisfait pas à ses obligations de réunion mensuelle, ce qui sera sanctionné comme tel, la demande

des DP ne semble pas être caractérisée par l’urgence et autorise, l’employeur a ne pas y faire droit. Elle devra convoquer tous les DP, y compris M. Kelsen, en leur laissant un délai suffisant pour pouvoir déposer leur note écrite 2 jours ouvrables avant la réunion.

4. Sur la justification des heures de délégation La demande de M

me Khruel à l’égard de M. Ribin est tout à fait licite. Néanmoins, en cas de refus de ce dernier de

justifier de l’usage des heures de délégation, comme il en est en l’espèce, l’employeur devra saisir le tribunal compétent pour obtenir satisfaction, puisqu’une présomption de bon usage des heures considérées est accordée au délégué du personnel.

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5. Sur l’inobservation des réunions mensuelles Le fait de s’abstenir volontairement (en dehors d’un cas de force majeur notamment) de réunir, conformément à la loi, les délégués du personnel mensuellement est constitutif du délit d’entrave. Les conditions de l’infraction étant réunies :

- élément légal : article L 2316 -1 du code du travail ; - élément matériel : 4 réunions sur 8 seulement ; - élément intentionnel : il n’est pas fait état d’un cas de force majeure ou de circonstance particulière justifiant le

report des réunions par Mme

Khruel. M. Ribin est fondé à en poursuivre la répression pénale. 6. Sur la consultation des délégués en matière d’inaptitude consécutive à un accident ou maladie

professionnelle M. Phril a été licencié suite à l’impossibilité de son reclassement rendu nécessaire du fait de sa maladie professionnelle. La loi oblige M

me Khruel à recueillir l’avis des délégués du personnel préalablement à l’engagement d’une procédure de

licenciement pour inaptitude, mais elle n’impose pas qu’ils le soient collectivement à l’occasion d’une réunion, ce qui

serait rajouter une condition à la loi (Cass. soc. 29 avril 2003). Par conséquent, l’avis recueilli en dehors de la réunion mensuelle est conforme aux dispositions légales. 7. Concernant la constitution d’un comité de groupe.

Il semble que les sociétés nouvellement créées par Mme

Kruel, ne soient pas reliées entre elles par des liens capitalistiques et donc par principe des droits de vote, le seul point de rattachement étant celui d’avoir un dirigeant commun en la personne de M

me Kruel. L’existence d’un groupe n’étant pas déterminée, un comité ne pourra être institué

à ce niveau. 8. Le comité d’UES

En l’espèce, il semble que l’ensemble des structures juridiques répondent aux critères de l’UES puisque les sociétés ont une complémentarité économique (deux sociétés seront chargées de la distribution, deux autres de la production et la société initiale concentrera son activité sur la conception des jouets) et sociale (la SARL assurera la mutualisation des principaux services des ressources humaines). Un comité pourra donc être institué à ce niveau rassemblant 58 salariés par voie judiciaire ou négociée.

II – QUESTION DE COURS 1. Cas dans lequel les délégués du personnel exercent les missions économiques du CE

En l’absence de comité d’entreprise, par suite d’une carence constatée aux élections professionnelles, les attributions

économiques de celui-ci sont exercées temporairement par les délégués du personnel. Un procès-verbal concernant les questions économiques examinées doit être établi. Il peut ensuite être affiché après accord entre les délégués du personnel et l’employeur. 2. La protection contre le licenciement des délégués du personnel

Les délégués du personnel sont l’objet d’une protection contre le licenciement au même titre que les délégués syndicaux ou les représentants du personnel.

Ainsi, leur licenciement, qu’ils soient titulaires ou suppléants, ne peut intervenir qu’après autorisation de l’inspecteur du travail. Cette protection couvre les six mois de la candidature, la durée du mandat lui-même et les 6 mois postérieurs à la cessation des fonctions.

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3. La DUP

Dans les entreprises de moins de 300 salariés le chef d'entreprise, après consultation des délégués du personnel (DP) et du comité d'entreprise (CE) et du CHSCT –s’ils existent-, peut mettre en place une délégation unique de représentation du personnel. Dans les entreprises de 300 salariés et plus, ou celles constituant une UES (sans condition d’effectif pour l’entreprise, à

condition que l’UES comprenne au moins 300 salariés) il sera désormais possible par accord majoritaire, de regrouper dans une instance commune les DP, le CE et le CHSCT ou seulement deux d’entre elles. L’instance est dotée de la personnalité morale et gère à cet effet son patrimoine. Les modalités de fonctionnement sont déterminées par l’accord l’instituant sous réserve de dispositions impératives (C.trav. art. 2391-1) ou supplétives qui ont été précisées par décret du 23 mars 2016. Les personnes mandatées disposent d’un crédit d’heures pour exercer leurs attributions en tant que délégué du personnel et de membre du comité d'entreprise et du CHSCT. Il est fixé à 20 heures par mois au maximum. Le mécanisme opère une fusion entre les trois institutions et confère à la délégation unique les attributions des délégués

du personnel, et du comité d'entreprise et du CHSCT au sein d'une même entité. La délégation doit être réunie au moins une fois tous les deux mois par l'employeur et 4 des réunions annuelles doivent nécessairement porter sur des questions relevant des attributions du CHSCT. La réforme prévoit une période transitoire de deux cycles électoraux soit jusqu’en 2027. 4. Les différents comités d’entreprise

Mis en place au niveau de l’entreprise, quelle qu’en soit sa forme et son objet, cette institution est obligatoire dans toute entreprise occupant au moins 50 salariés pendant 12 mois, consécutifs ou non, au cours des trois années précédentes. En outre, répondent à la même obligation les entreprises, bien que juridiquement distinctes, constituant une unité économique et sociale. Enfin, il peut être institué un comité d’entreprise :

- au niveau du groupe lorsque des sociétés en ont l’architecture ; - au niveau européen lorsque l’entreprise comprend un effectif de 1 000 salariés au moins dans les États membres

de l’union européenne et que 150 salariés au moins sont ventilés dans 2 États au minimum de la communauté.

III – ÉTUDE DE DOCUMENT

1. Problème de droit

Le comité d’entreprise peut-il agir en justice pour demander l’application d’une convention collective ? 2. Solution de la cour de cassation sur ce point de droit

Le comité d’entreprise est doté d’une autonomie juridique et dispose à ce titre de divers droits, tels que celui de disposer de son propre patrimoine, d’avoir ses propres salariés ou encore d’agir en justice. Sur ce dernier point, les conditions de droit commun s’imposent, à savoir que le demandeur d’une action en justice doit justifier d’un intérêt à agir et avoir

qualité à agir. L’intérêt s’analyse au regard du préjudice dont le comité d’entreprise pourrait souffrir et la qualité au regard des missions qui lui sont confiées par la loi. Elles sont énumérées par le code du travail (cf. fiche de cours 24) qui ne lui confie ni la présentation de réclamations à l’employeur (prérogatives des délégués du personnel) ni celle de porter des revendications (prérogatives des délégués syndicaux). Or dans la présente affaire le comité d’entreprise demandait l'application des dispositions de la convention Syntec au bénéfice des salariés de la société. La cour de cassation, dans une jurisprudence constante, estime que seuls les organisations ou groupements ayant la capacité de conclure une convention ou un accord collectif peuvent agir en justice.

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3. Solution de la cour quant à l’utilisation du droit d’alerte par les délégués du personnel

Le délégué du personnel dispose de plusieurs prérogatives nécessaires à l’accomplissement des attributions que la loi lui confère. Il bénéficie à ce titre d’un droit d’affichage, d’une liberté de déplacement dans et hors de l’entreprise, d’heures de délégation ou encore d’un droit d’alerte. Ce dernier, codifié à l’article L 2313-2 du Code du travail, l’autorise à saisir immédiatement l’employeur lorsqu’il constate des faits ou une situation de nature à porter atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l'entreprise qui ne serait pas justifiée par

la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché. Une fois saisi, l'employeur doit sans délai procéder à une enquête avec le délégué du personnel et prendre toute mesure de nature à faire cesser la situation litigieuse. En cas d’inaction de l’employeur ou de désaccord sur la situation relevée, le salarié, ou le délégué, peut saisir le bureau de jugement du conseil de prud'hommes statuant sous la forme des référés. Dans l’arrêt commenté, la salariée en qualité de délégué personnel a informé l’employeur de la mise en œuvre du droit d’alerte puis saisi la juridiction prud’homale en raison de son inaction. Déboutée de ses demandes en appel, elle forme un pourvoi en cassation aux fins d’annuler la sanction prononcée à l’encontre d’une salariée et d’enjoindre l’employeur de procéder à l’enquête requise. Deux arguments sont ainsi soulevés :

- d’une part, elle fait valoir que l’employeur ne peut être juge du bien ou mal fondé de la mise en œuvre du droit d’alerte. Seule l’enquête prescrite par la loi en cas de désaccord permet dans un premier temps d’en acter la différence d’appréciation. Le juge ne peut ainsi refuser d’obliger l’employeur à satisfaire aux exigences de la loi ;

- d’autre part, la demande en nullité de la sanction prononcée contre une salariée ne vient pas s’opposer ou se superposer aux droits de la salariée, mais vise uniquement, comme la loi l’y autorise, à demander la suppression de l’acte attentatoire.

La cour de cassation rejette le pourvoi en considérant d’une part que le droit d’alerte n’a pas pour finalité ni pour objet de faire annuler une sanction disciplinaire et d’autre part que la cour d’appel n’ayant constaté aucune mesure attentatoire,

elle n’est pas tenue d’exiger la mise en œuvre d’une enquête.

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L’ARBRE À PALABRES

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Conventions et accords collectifs : distinction, application matérielle et géographique, volontaire et obligatoire

I – CAS PRATIQUE

1. Détermination de la convention collective applicable

La SOURDE OREILLE est une société nouvellement constituée située à la Rochelle. Elle a une triple activité : l’imprimerie, l’édition et la vente de livres. À ce jour, son chiffre d’affaire le plus important est réalisé dans la branche imprimerie. Elle compte 15 salariés affectés à des postes très divers, techniciens, vente, comptabilité, commerciaux, relations publiques… Quelle est la convention collective applicable ?

Règle de droit applicable ?

Le critère de l’activité économique de l’entreprise et du champ professionnel Par principe, la convention collective applicable est déterminée par l’activité exercée par l’entreprise et non par l’activité du salarié. Cette recherche est facilitée par le code APE (Activités principalement exercées) de l’entreprise. Attribué par

l’INSEE en fonction de l’activité de rattachement de l’entreprise, ce code n’a cependant qu’une valeur indicative. C’est en effet l’activité effectivement exercée qui est déterminante (L 2261-2 C. Trav.) et autorise celui qui s’en prévaut d’en rapporter la preuve (Cass. soc. 22 février 1995). À noter que la nomenclature des activités françaises (NAF) entée en vigueur au 1

er janvier 2003 et révisée au 1

er janvier

2008 opère une modification du code APE de toutes les personnes inscrites au répertoire Sirene à compter du 8 janvier. En cas de pluralité d’activités, le rattachement de l’entreprise à une convention collective s’analyse au regard de son activité principale dont l’appréciation dépend du nombre de salarié si l’entreprise est industrielle ou du montant du chiffre d’affaire si l’entreprise est commerciale (Art. L 2261-2. C. Trav.). À cet égard et pour éviter des chevauchements de

normes, les entreprises pouvant en être l’objet peuvent librement instituer des clauses de départage réciproques facilitant la détermination de la convention applicable. En toute hypothèse, il ne peut être appliqué qu’une seule convention collective dans les relations collectives de travail (Cass. soc. 15 novembre 2007). Le critère territorial Sur ce point, les principes sont simples puisque territorialement, les conventions et accords peuvent avoir un domaine d’application national, régional, départemental ou local, c’est-à-dire dans le dernier cas, au niveau de l’établissement, de l’entreprise ou du groupe.

C’est le texte lui-même qui détermine la portée géographique de son contenu. Application de la règle aux faits

L’activité principale de l’entreprise est l’imprimerie. La convention collective nationale de travail du personnel des imprimeries de labeur et des industries graphiques du 29 mai 1956 a vocation à s’appliquer.

2. Critère d’application de la convention collective

Mlle

Alire n’est affiliée à aucune organisation syndicale. Certes, vous lui avez été d’un grand secours en lui indiquant la convention dont l’entreprise relève, mais elle ne sait si elle doit obligatoirement l’appliquer. À quelles conditions une convention collective doit impérativement être appliquée ?

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Règle de droit applicable

L’appartenance de l’employeur à l’organisme signataire L’employeur est contraint d’appliquer les dispositions d’une convention collective dès lors qu’il en est le signataire ou qu’il fait partie d’une organisation patronale signataire. La convention est alors applicable aux entreprises qui entrent dans son champ d’application territoriale et professionnel. Cet engagement automatique vaut pour l’acte en cause mais aussi pour les textes futurs, tels qu’avenants ou annexes à compter de leur entrée en vigueur. Les salariés de

l’entreprise, bien que non signataires sont aussi soumis à l’acte négocié qu’ils soient ou non syndiqués. Cependant, les clauses particulières d’un accord collectif par lesquelles les parties renoncent à des réclamations sur la période antérieure à l’accord ne s’appliquent qu’aux parties signataires. En effet, il ne saurait être interdit « aux salariés de faire valoir en justice les droits qu’ils ont acquis par application de la loi » (Cass. soc.12 septembre 2007). Les procédures d’extension et d’élargissement Dans deux hypothèses, la convention collective a vocation à s’appliquer en l’absence même d’adhésion de l’employeur au groupement patronal signataire ou de participation personnelle à la conclusion de la convention. En effet, le Ministre du travail peut, par voie d’arrêté, étendre ou élargir le champ d’application d’un texte existant.

L’extension : elle consiste, par voie ministérielle, à étendre l’application d’une convention collective à toutes les entreprises qui entrent dans son champ professionnel (Art. L 2261-15 ; L 2261-16 C. Trav.), que l’employeur soit ou non membre d’une organisation signataire (Cass. soc. 16 mars 2005) ; L’élargissement : il s’agit, par voie ministérielle, d’élargir le champ d’application d’une convention collective existante à une branche d’activité ou à un nouveau secteur territorial qui en est dépourvue (Art. L 2261-17 C. trav.). Il suppose la réunion des conditions suivantes

- absence ou carence « des organisations de salariés ou d’employeurs se traduisant par une impossibilité persistante de conclure une convention ou un accord dans une branche d’activité ou un secteur territorial

déterminé » ; - le secteur territorial, objet de l’élargissement, doit présenter des conditions économiques (en cas d’élargissement à

un nouveau secteur territorial) ou d’emplois (en cas d’élargissement à un autre secteur professionnel) analogues à celles « du secteur dans lequel l’extension est déjà intervenue » ;

- la convention ou l’accord objet de l’élargissement doit avoir été préalablement étendu. Son application est d’effet immédiat et impératif dès son entrée en vigueur.

Application de la règle aux faits

Mlle

Alire n’est adhérente à aucun syndicat, par contre la convention collective a fait l’objet d’un arrêté d’extension le 22 novembre 1956. Elle devra donc l’appliquer obligatoirement à ses salariés. 3. Application facultative d’une convention collective

En cas de non-assujettissement obligatoire de l’employeur, celui-ci peut-il librement appliquer la convention collective

idoine ou celle de son choix ? Règle de droit applicable

Lorsque l’employeur décide d’appliquer volontairement les dispositions d’un texte collectif auquel il n’est par définition pas soumis, il peut soit adhérer au syndicat signataire pour se voir appliquer la convention collective dont il relève en raison de son activité, soit, de sa propre initiative, en faire bénéficier ses salariés.

L’application volontaire Dans les relations individuelles de travail, l’employeur peut librement décider d’appliquer les dispositions d’une convention collective à laquelle il n’est pas soumis (par exemple en matière de rémunération, congés, primes…). Cette application a la valeur d’un usage et en produit les effets juridiques. L’intention de l’employeur peut être déterminée par l’indication sur le bulletin de paye de la convention collective. Elle vaut alors présomption d’applicabilité du texte, mais l’employeur est fondé à en apporter la preuve contraire (Cass. soc. 15 novembre 2007).

En cette dernière hypothèse, la mesure à valeur d’usage et devient contraignante pour l’employeur. Il ne peut y mettre fin par le simple fait de ne plus en respecter les dispositions. La dénonciation de l’usage (c’est-à-dire la volonté de ne plus en appliquer les règles) doit être portée à la connaissance des représentants du personnel et de chaque salarié. En outre, il est nécessaire de prévoir un délai de prévenance susceptible de permettre l’ouverture de négociations, non obligatoires, à ce propos. À défaut de dénonciation régulière, l’usage continue de produire ses effets et les salariés sont admis à en demander le bénéfice. L’arrêt du 16 mai 2007 illustre parfaitement ce propos. En l’occurrence, le fait de cesser de mentionner dans les bulletins de paye la convention collective applicable ne peut valoir dénonciation régulière de l’usage et l’employeur ne peut se satisfaire de cette démarche pour conclure à une information individuelle des

salariés.

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L’adhésion de l’employeur L’employeur, pris individuellement, ou collectivement dans le cadre d’un groupement, peut librement décider d’adhérer à une convention ou un accord (Art L. 2261-3 C.trav.). Cet acte de volonté unilatéral n’a pas à recevoir l’assentiment des signataires. Les seules obligations de forme consistent en une notification de l’adhésion aux signataires et d’un dépôt conformément aux dispositions des articles D 2231-1 et suivants du code du travail. Par contre, si l’adhésion a pour effet de rendre applicable une convention de branche ou un accord professionnel

n’entrant pas dans son champ d’application, elle nécessite la conclusion d’un accord collectif entre les parties. Il peut s’agir d’un agrément des organisations syndicales représentatives lorsque l’entreprise n’entre pas dans le champ d’application de la convention ou de l’accord professionnel. Application de la règle aux faits

Par pure hypothèse (puisque Mlle

Alire est assujettie à la convention collective nationale de l’imprimerie), plusieurs situations peuvent se présenter :

- l’employeur choisit d’adhérer à une convention collective et l’entreprise entre dans son champ d’application mais

n’y est pas obligatoirement assujettie. Mlle

Alire peut librement y adhérer en notifiant son intention aux signataires ; - l’employeur choisit d’adhérer à une convention collective et l’entreprise n’entre pas dans son champ d’application.

Mlle

Alire devra conclure un accord collectif en ce sens ; - l’employeur, sans y adhérer, choisit d’appliquer les dispositions d’une convention collective. Dans ce cas, celle-ci

n’aura que la valeur d’un usage.

II – QUESTIONS DE COURS

1. Distinguez convention et accord collectif

La convention collective porte sur l’ensemble des conditions de travail et de protection sociale (durée du travail, rémunération, congés, licenciement, démission…). Le texte initial est ensuite complété progressivement par des avenants et des annexes. L’accord collectif ne concerne que certains thèmes. Sa portée est donc limitée à un ou plusieurs aspects déterminés (accord sur les salaires, accord sur l’égalité professionnelle…).

2. Précisez les niveaux de négociation de ces textes et les participants

On distingue ainsi : - les conventions et accords dont le champ territorial est national, régional, départemental ou local (au niveau de

l’établissement, de l’entreprise ou du groupe) ; - les accords interprofessionnels. Ils couvrent l’ensemble des branches d’activités et sont la plupart du temps conclu

au niveau national (Accord national interprofessionnel ANI). Par exemple, l’accord national interprofessionnel du 9

mars 2006 relatif à l’emploi des seniors, ou l’accord interprofessionnel du 19 juillet 2005 sur le télétravail ; - les conventions collectives de branche et les accords professionnels. Ils sont conclus au niveau d’une branche

d’activité déterminée, c’est-à-dire d’un champ professionnel défini. Par exemple la chimie, la métallurgie, l’hôtellerie…

La convention ou l’accord est conclu entre :

- d’une part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d’application de la convention ou de l’accord ;

- d’autre part, une ou plusieurs organisations syndicales d’employeurs, ou toute autre association d’employeurs, ou

un ou plusieurs employeurs pris individuellement.

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III – ÉTUDE DE DOCUMENT 1. Résumé des faits et fondement de la demande de la salariée

Mme

X... a été engagée le 6 mars 1996 par la Mutualité du Haut-Rhin en qualité de chirurgien-dentiste. Son contrat de travail prévoit une rémunération brute proportionnelle, avec des pourcentages et des références différents suivant les actes réalisés et fait mention de la convention collective des organismes de mutualité. Devenant la Mutualité française Alsace, l’employeur a cessé de faire apparaître la convention collective sur le bulletin de paye. M

me X…a demandé à bénéficier des dispositions de la convention dans la mesure où elle apparaît sur son bulletin de

paye et que l’employeur ne peut dès lors renoncer à son application. 2. Valeur juridique de l’application de la convention collective et le moyen de preuve invoqué

L’application volontaire d’une convention collective a la valeur d’un usage. Y mettre fin suppose que l’employeur en informe individuellement chaque salarié, les institutions représentatives du personnel et qu’il laisse un délai de prévenance suffisant pour ouvrir de nouvelles négociations. Or tel n’est pas le cas puisque le fait de ne plus la mentionner sur les bulletins de paye n’a pas la valeur de cette information.

3. Problème de droit et solution donnée par la cour de cassation

Un salarié revendique l’application d’une convention collective qu’il estime lui être applicable. La cour d’appel le déboute au motif qu’il lui appartient de démontrer, en cas de pluralité d’activité, que l’activité principale de l’entreprise est couverte par une convention collective à laquelle elle est soumise. La cour de cassation censure l’arrêt de la cour d’appel, reprochant aux juges du second degré de ne pas avoir recherché

si l’activité revendiquée était bien l’activité principale de l’entreprise et de ne pas avoir vérifier, une fois la première recherche effectuée, si l’entreprise entrait dans son champ d’application.

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LA GABELLE

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Hiérarchie des normes et accords d’entreprise : principe et dérogation à la hiérarchie des normes, négociation avec et sans délégués syndicaux, adoption des accords,

critères de représentativité, négociations obligatoires

CAS PRATIQUE 1. Dispositions du projet pouvant faire l’objet d’un accord d’entreprise

La société Les Salines SA souhaite conclure un accord d’entreprise sur les points suivants : - réduction de 25% à 15% des heures supplémentaires ; - négociation sur la durée de travail ; - augmentation de la durée nécessaire pour ouvrir droit à la prime d’ancienneté ; - réduction du montant des indemnités complémentaires de l’employeur en cas de maladie ;

- bénéfice d’un jour de congé supplémentaire en cas d’évènement familial ; - ajustement du salaire minimum conventionnel sur le SMIC.

Dans quelle mesure un accord d’entreprise peut-il prévoir des dispositions dérogatoires à des normes supérieures et sous quelles conditions d’adoption est-il susceptible d’entrer en vigueur? Règles de droit applicables

I – Le principe de la hiérarchie des normes conventionnelles La problématique présentée est extrêmement importante dans la pratique. En effet, dans l’entreprise, il peut arriver que des textes de différents niveaux traitent d’un même sujet. Il est alors nécessaire de savoir lequel est applicable au détriment des autres. La pluralité des sources du droit, qu’elles soient d’origine étatique ou négociées, nécessite l’existence d’une hiérarchie des normes afin d’éviter les litiges que leur confrontation pourrait faire naître. Fondée sur le droit commun, la règle veut

que la norme supérieure s’impose à la norme de niveau inférieure. Ainsi la loi doit respecter la constitution, la convention collective la loi, les accords locaux les accords régionaux, et ce jusqu’au contrat de travail. II – Les dérogations au principe A – Les dérogations en application du principe de faveur (art. L 2251-1 C. Trav.) Traditionnellement, en tout cas depuis 1982, les dérogations au principe s’organisaient autour du principe de faveur, à savoir que l’on ne peut déroger à un texte supérieur que si les dispositions en jeu sont plus favorables au salarié. Ainsi la

convention collective peut déroger à la loi si elle accorde davantage de droits aux salariés, de même pour l’accord d’entreprise s’il est plus favorable à l’accord de branche. Cette règle, toujours applicable, ne connaît que de rares exceptions, notamment lorsque la loi autorise des accords de branches étendus à déroger dans un sens défavorable à la loi. B – Les dérogations issues de la loi 2004, 2008 et de la loi du 8 août 2016 Les dérogations conventionnelles à la loi Le législateur peut prévoir dans la loi, les conditions dans lesquelles une convention de branche est susceptible de déroger à la loi elle-même (La loi doit prévoir une autorisation expresse). Le principe existait déjà mais les domaines dans lesquelles il est possible de déroger, bien que limités, ont été étendus. Par exemple, la majoration des heures supplémentaires, le contingent d’heures supplémentaires, le repos quotidien de 10 heures minimum…

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Le rapport entre accords de branche ou professionnels et accords couvrant un champ territorial ou professionnel plus large (Art. L 2252-1 C. Trav.) Un accord interprofessionnel ou une convention de branche sont autorisés à déroger dans un sens moins favorable aux salariés, aux stipulations dispositions d’un accord plus étendu, sauf si ce dernier l’interdit expressément. Rapports entre les accords de groupe, les accords interentreprises, accords d’entreprise et les accords d’établissement. Les accords conclus au niveau d’un groupe se substituent aux stipulations d’un accord d’entreprise si, d’une part, l’accord de groupe le prévoit expressément et si d’autre part il porte sur le même objet. De même, les accords d’entreprise se substituent aux mêmes conditions aux accords d’établissement. La dérogation des accords d'entreprise aux accords couvrant un champ territorial ou professionnel plus large (Art. L2253-3 C. trav.) Il est possible, par un accord d’entreprise, de déroger à une convention de branche ou un accord professionnel ou interprofessionnel sauf si ces derniers en disposent autrement. Il conviendra donc aux branches de préciser par la voie de la négociation collective les thèmes sur lesquels les conventions et accords d’entreprise ne peuvent être moins

favorables. Cette limitation n’est pas applicable aux thèmes pour lesquels la loi prévoit la primauté de la convention ou de l’accord d’entreprise (durée du travail, congés, repos, heures supplémentaires…). Néanmoins la loi interdit toute dérogation dans les domaines suivants : en matière de salaires minima, de classifications, de garanties collectives mentionnées à l'article L. 912-1 du code de la sécurité sociale et de mutualisation des fonds recueillis au titre de la formation professionnelle. Enfin, les organisations syndicales représentatives au niveau de la branche ont un délai de deux ans à compter de la promulgation de la loi 8 août 2016 pour établir un ordre public conventionnel.

Application des règles de droit aux faits

En l’absence d’accord de branche : Diminution de la rémunération des heures supplémentaires La loi autorise désormais la possibilité aux accords d’entreprise de modifier le taux de rémunération des heures supplémentaires dans la limite d’une majoration au minimale de 10%. Ce n’est qu’à défaut de dispositions conventionnelles que les taux légaux s’appliquent. L’accord peut donc couvrir ce thème.

Négociation sur la durée du travail. Un accord d’entreprise peut valablement couvrir ce thème.

L’augmentation de la durée nécessaire pour ouvrir droit à la prime d’ancienneté L’accord d’entreprise peut sans restrictions couvrir ce sujet.

La réduction du montant des indemnités complémentaires de l’employeur en cas de maladie Même raisonnement que précédemment. L’accord local peut librement convenir d’une diminution des indemnités.

Le bénéfice d’un jour de congé supplémentaire en cas d’évènement familial Il ne s’agit pas à proprement parler d’une disposition dérogatoire (en pratique moins favorable), mais d’une mesure au bénéficie du salarié. Dès lors, le principe de faveur s’applique sans restriction.

Ajustement du salaire minimum conventionnel sur le SMIC L’article L 2253-3 al. 1 dispose expressément qu’en matière de salaires minima, il est impossible de déroger aux

dispositions des conventions de branche, accords professionnels ou interprofessionnels. Dès lors, cette mesure est impossible. Quant à la prime d’assiduité, elle constitue un élément d’individualisation de la rémunération et peut à ce titre être supprimée. 2. Solution en cas d’accord de branche conclu avant ou après mai 2004

Jusqu’à présent, en matière d’accords d’entreprise, les dérogations prévues par la loi de 2004 n’étaient envisageables

que si les accords de branches ne l’interdisaient pas. C’est-à-dire que si le texte était muet au niveau de la branche, les dérogations dans un sens moins favorables aux salariés pouvaient être négociées au niveau de l’entreprise, hors les hypothèses prohibées. Or, avant la loi de 2004, les accords de branche n’envisageaient pas de telles prohibitions puisque seul le principe de faveur avait vocation à s’appliquer. Par conséquent, les accords d’entreprise ne pouvaient déroger défavorablement à des accords de branche que si ces derniers avaient été conclus après la loi. La loi relatif au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels du 8 août 2016 institue un nouveau rapport entre accord collectif d’entreprise ou d’établissement et accord de branche. En effet, même si les branches auront toujours pour missions de préciser les thèmes sur lesquels un accord d’entreprise ne

pourra être moins favorable, dans certains domaines un accord local (entreprise) primera sur l’accord de branche. C’est-à-dire qu’il pourra prévoir des dispositions différentes de celles de la branche, plus ou moins favorables au salarié. En l’espèce, la solution serait donc différente s’il existait un accord de branche à raison de la date à laquelle il a été conclu.

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3. Condition d’adoption de l’accord d’entreprise

La CFDT, qui a obtenu 35% des voix (44 voix) aux dernières élections professionnelles, entend seule voter le texte proposé, sous réserve que ses dispositions soient conformes à la loi. Les autres syndicats ne s’opposeront pas au texte. Quelles sont les conditions d’adoption d’un accord d’entreprise ? Règles de droit applicables

La validité d'un accord d'entreprise ou d'établissement conclut avec une organisation syndicale est subordonnée à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation

unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants. Si cette majorité n’est pas atteinte, et que l’accord, signé par l’employeur et par des organisations syndicales représentatives ayant obtenu 30% des suffrages aux mêmes élections, l’une de ces organisations peut dans le délai d’un mois, indiquer qu’elle souhaite soumettre l’accord à référendum. À compter de la demande, un délai de 8 jours est accordé pour permettre aux organisations syndicales d’atteindre la majorité initiale requise. À défaut, le texte doit être soumis à référendum dans un délai de 2 mois. L’accord est adopté à la majorité des suffrages exprimés.

Ces nouvelles dispositions s’appliquent à compter du 1er

janvier 2017, en matière de congés, de repos et de durée du travail. Son application sera ensuite élargie à d’autres domaines au 1

er septembre 2019.

Dans cet intervalle, ce sont les anciennes dispositions qui ont vocation à s’appliquer pour les matières autres que celles susvisées. À savoir, la validité d’un accord d’entreprise ou d’établissement est subordonnée :

- à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli au moins 30% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants ;

- et à l'absence d'opposition d’une ou de plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant

recueilli la majorité des suffrages exprimés à ces mêmes élections, quel que soit le nombre de votants.

Application des règles de droit aux faits

La CFDT a obtenu plus de 30% (35%) des suffrages exprimés aux dernières élections professionnelles, l’accord ne peut donc être adopté par sa seule signature pour l’ensemble des thèmes, objets de la négociation et susceptibles de figurer dans l’accord. Néanmoins, concernant la rémunération des heures supplémentaires et la durée du travail, son score (35%) l’autorise à demander l’adoption du texte par voie référendaire dans un délai d’un mois.

4. Conclusion d’un accord d’entreprise en l’absence de délégués syndicaux

Une société proche des SALINES SA connaît des difficultés identiques. Son dirigeant, M. Lesalee, souhaiterait procéder à l’adoption d’un accord identique. La société ne dispose pas cependant de délégués syndicaux car son effectif est de 29 salariés. La conclusion d’un accord d’entreprise est-elle possible ?

Règle de droit applicable

En l’absence de délégués syndicaux, la loi autorise la conclusion d’accords collectifs d’entreprise aux conditions

suivantes : Accord conclut avec un élu mandaté L’accord signé par un élu mandaté doit faire l’objet d’un référendum dans l’entreprise. L’accord est adopté à la majorité des suffrages exprimés par les salariés. Accord conclut avec un élu non mandaté La validité de l’accord est subordonnée à sa signature par les élus visés ayant recueilli la majorité des suffrages

exprimés aux dernières élections professionnelles. Si cette condition n’est pas remplie, l’accord est réputé non écrit. Une fois conclu, l’accord est transmis pour information à la commission paritaire de branche. Accord conclu avec un salarié mandaté L’accord, une fois signé, doit être approuvé impérativement par les salariés (référendum) à la majorité des suffrages exprimés et dans le respect des principes généraux du droit électoral.

Application de la règle aux faits

La société comprend un effectif de 29 salariés. Elle dispose donc normalement de délégués du personnel qui peuvent

être habilités à négocier. En leur absence et à condition qu’un procès verbal de carence ait été établi, un accord pourra être conclu avec un salarié mandaté.

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5. RSS et interlocuteur habilité

Une entreprise dont l’effectif est de 250 salariés se trouve dépourvue de délégué syndical faute de représentativité. Avec qui des négociations pourraient-elles être engagées ? Le RSS pourrait-il être un interlocuteur régulier ? Chaque syndicat qui constitue une section syndicale au sein de l’entreprise ou de l’établissement de cinquante salariés ou plus peut, s’il n’est pas représentatif dans l’entreprise ou l’établissement, désigner un représentant de la section pour

le représenter au sein de l’entreprise ou de l’établissement. Néanmoins, dans les entreprises qui emploient moins de cinquante salariés, les syndicats non représentatifs dans l’entreprise qui constituent une section syndicale peuvent désigner, pour la durée de son mandat, un délégué du personnel comme représentant de la section syndicale.

Autrement dit, les syndicats représentatifs dans l’entreprise ne peuvent désigner un représentant de la section syndicale.

Le RSS ne peut négocier des accords collectifs à depuis le 1er

janvier 2010 que dans un cas précis. En effet, un représentant de la section syndicale, désigné par une organisation syndicale de salariés affiliée à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel peut disposer, sur mandatement par son organisation syndicale, du pouvoir de négocier et conclure un accord d'entreprise ou d'établissement. Il faut de surcroît :

- que l’entreprise ait un effectif de plus de 200 salariés ; - qu’elle soit dépourvue de délégué syndical (carence) ; - qu’il n’y ait pas de possibilité de négocier avec des élus ou un salarié mandaté - qu’elle ne soit pas couverte par un accord de branche spécifique.

Application de la règle aux faits

La société comprend un effectif de 250 salariés. Il n’y a pas de délégué syndical mais des élus. Si un représentant de la section syndicale peut être désigné, il ne peut être habilité à négocier des accords collectifs dans les conditions précitées.

II – QUESTION DE COURS

1. Établissez les critères de représentativité syndicale pour négocier un accord d’entreprise

Dans l’entreprise ou l’établissement, sont représentatives les organisations syndicales qui satisfont aux critères de l’article L. 2121-1 (respect des valeurs républicaines, transparence, adhésion…) et qui ont recueilli au moins 10% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants. 2. La négociation collective obligatoire

Dans certaines limites (notamment à raison des thèmes), un accord collectif peut prévoir une périodicité des négociations obligatoires, différente de celle prévue par loi. D’autre part, la loi du 8 août 2016 incite à la conclusion d’accords de méthode destinés à simplifier le modus operandi des négociations (délais, partage des informations, moyens, recours à une expertise...) et à inscrire le principe de loyauté comme pierre angulaire de la négociation. Ces accords de méthode peuvent être conclus au niveau de la branche ou de l’entreprise. L’accord de branche s’impose aux entreprises dépourvues d’un tel accord. À l’inverse, lorsqu’il existe, celui de l’entreprise prime sur celui de la branche La négociation annuelle obligatoire Il est fait obligation à l’employeur de convoquer annuellement les délégués syndicaux pour négocier sur les salaires, la durée et l’organisation du temps de travail, l’épargne salariale, l’égalité professionnelle, la prévoyance et l’égalité hommes/femmes. Sur ce dernier point, les négociations doivent permettre de supprimer, au 31 décembre 2010, les écarts de rémunérations entre les sexes. Si l’employeur ne satisfait pas à son obligation, la négociation peut s’engager à la simple demande d’un syndicat de l’entreprise. La négociation triennale obligatoire Dans les entreprises et les groupes dont l’effectif est d’au moins 300 salariés, l’employeur est tenu d’engager une négociation sur les modalités de consultation et d’information du CE sur la stratégie de l’entreprise et ses effets sur l’emploi et les salaires, sur la mise en place d’un dispositif de gestion prévisionnel des emplois et des compétences, et toute mesure d’accompagnement. La négociation libre L’employeur et les syndicats disposent, en dehors de leurs obligations légales, de toute latitude pour ouvrir des négociations supplémentaires, quels que soient les thèmes sur lesquels elles puissent porter.

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III – ETUDE DE DOCUMENT 1. Liberté est laissée à l’accord d’entreprise pour fixer le contingent d’heures supplémentaires

Le contingent annuel d’heures supplémentaires est un volume d’heures par an et par salarié que l’employeur peut utiliser librement. Le contingent annuel est fixé par convention ou accord collectif de branche étendu ou par accord d’entreprise ou d’établissement. L’accord doit préciser l’ensemble des modalités selon lesquelles les heures supplémentaires seront réalisées et notamment l’information préalable du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel lorsqu'ils existent. À défaut d’accord, le contingent réglementaire de 220 heures par an et par salarié s’applique et donne lieu à

consultation du CE ou des DP au moins une fois par an. Ces dispositions, prévues par la loi du 20 août 2008, peuvent-elles s’exercer dans des conditions de non-rétroactivité, comme cela avait été le cas pour la loi du 4 mai 2004, qui prévoyait l’impossibilité de déroger par des clauses moins favorables à une convention collective de niveau supérieur conclue antérieurement à cette date ? Le conseil constitutionnel par décision du 7 août 2008 a indiqué « qu’un contingent annuel défini par une convention ou un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche s’applique immédiatement et permet la négociation d’accords d’entreprise nonobstant l’existence éventuelle de clauses contraires dans des accords de branche ». Un accord d’entreprise peut donc modifier le contingent d’heures supplémentaires, même s’il existe un accord de branche antérieur à ladite loi.

On notera enfin que, selon la loi du 8 août 2016, les règles de fixation du contingent d’heures supplémentaires relèvent du champ de la négociation collective et que le nouvel article L. 3121-33 du code du travail maintient le principe de la subsidiarité de l’accord de branche par rapport à l’accord d’entreprise ou d’établissement. 2. Précision apportée par la cour de cassation quant au problème de l’articulation des normes juridiques en

droit du travail

Un salarié engagé par la Société de distribution d’eaux intercommunales, puis par la SEREPI, a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de rappel de salaires, notamment au titre d’une prime d’ancienneté, sur le fondement de l’article 28 de la convention collective des distributeurs d’eau du 6 juillet 1972. Il fait valoir que les accords collectifs intervenus ultérieurement et ayant modifié le calcul de la prime ne peuvent lui être opposables dans la mesure où ils dérogeaient dans un sens moins favorable à un accord de niveau supérieur. La cour d’appel fait droit à sa demande et rappelle qu’avant 2004, toute dérogation, dans un accord d’entreprise, à un accord territorial ou professionnel plus large, n’est possible qu’en application du principe de faveur, c’est-à-dire que si les

dispositions sont plus favorables aux salariés. La cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel, en retenant que l’application de la convention collective de 1972 par la SEREPI résultait d’une application volontaire de la société et avait donc la valeur juridique d’un usage. Or, la conclusion d’un accord collectif ayant le même objet met automatiquement fin à cet usage. Dès lors, il importe peu de rechercher si les dispositions sont ou non moins favorables.

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LA MODERNE BALEINE

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

La grève : définition, formes, préavis, information de l’employeur, faute lourde, maintien de l’activité, lock out.

II – CAS PRATIQUE 1. Définition de la grève

Les entrepôts de la SAS LA MODERNE BALEINE sont en pleine ébullition. Tous les salariés de l’entreprise ont été

réunis à l’occasion d’une réunion à l’initiative des syndicats en vue de les informer sur de possibles licenciements économiques et les nouvelles conditions de travail. À l’issue de ce rendez-vous, une action de grève est décidée. Le mouvement correspond-t-il à la définition de la grève ? Règle de droit applicable

Le droit de grève est un droit protégé par la constitution qui dispose : « le droit de grève s’exerce dans le cadre des lois qui le réglementent » (Art. 7 préambule de la constitution de 1946). Cependant, la loi n’est pas venue la définir, elle s’est contentée d’en prévoir les principales conséquences. Ce sont donc les tribunaux qui en ont posé les conditions

d’exercice. La grève peut être définie comme une cessation collective et concertée du travail en vue d’appuyer des revendications à caractères professionnelles (Cass. soc. 15-05-98). Quatre critères cumulatifs en forme le contenu :

- une cessation du travail : la grève est en principe caractérisée par une cessation complète du travail suite à l’abandon de leur poste par les salariés. Le ralentissement de l’activité (cass. soc. 12 avril 1995), l’exécution défectueuse (grève perlée) ou stricte des consignes (grève du zèle) ne constituent pas une grève (Cass. soc. 5 mars 1953) ;

- une cessation collective : une partie ou la totalité du personnel doit cesser le travail. Une seule exception : lorsque l’entreprise ne compte qu’un seul salarié (dans cette circonstance ce caractère n’est plus exigé et le droit de grève assuré: en ce sens (cass. soc. 13 novembre 1996). Il n’est ainsi par nécessaire que la totalité de l’entreprise soit concernée par la grève, une partie suffit pour valider ce critère (Cass. soc. 30 juin 1993) ;

- une cessation concertée : cela suppose la manifestation d’une volonté commune des salariés d’interrompre le travail dans le but de faire grève ;

- des revendications d’ordre professionnelles : seules sont protégées par le droit de grève les revendications ayant pour objet de protéger ou de défendre des intérêts professionnels (la grève politique est illicite).

Application de la règle aux faits

Tous les critères sont remplis : cessation du travail envisagée, mouvement concerté (réunion), mouvement collectifs (tous les salariés), des revendications professionnelles (les licenciements économiques). 2. Le préavis de grève

Règle de droit applicable

Dans les services et entreprises publics ainsi que dans les organismes privés assurant la gestion d’un service public, l’exercice du droit de grève est conditionné au dépôt d’un préavis motivé, au moins 5 jours francs avant le début de la grève (néanmoins certains services de l’État ont interdiction de faire grève). En outre, le préavis doit indiquer le champ géographique ainsi que l’heure de début et la durée de la grève envisagée. Dans le secteur privé, l’exercice du droit de grève n’est subordonné à aucun préavis. Les salariés peuvent à tout moment déclencher une action de grève s’ils ont informé l’employeur de leurs revendications. Lorsqu’elle fait l’objet d’un préavis, obligatoirement ou accessoirement chaque syndicat peut librement poser la date de cessation de travail de son choix (Cass. soc. 4 février 2004).

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Application de la règle aux faits

La MODERNE BALEINE est une entreprise privée. Les salariés ne sont donc soumis à aucun préavis. 3. l’information de l’employeur des revendications professionnelles

Les syndicats décident d’informer l’inspection du travail des actions de grève prévues et des revendications professionnelles les justifiant. Dans un souci de prévention des conflits, l’inspecteur avise lui-même l’employeur des doléances de l’ensemble des salariés. Quelles sont les modalités d’information de l’employeur des revendications professionnelles ? Règle de droit applicable

Que la grève s’exerce dans le secteur public ou privé, il est nécessaire d’informer l’employeur des revendications

justifiant l’exercice de ce droit, préalablement à sa mise en œuvre. Il peut l’être par les salariés eux-mêmes, un syndicat, ou par l’inspecteur du travail. Dans un arrêt en date du 28 février 2007, la cour de cassation a pu juger que si l’information de l’employeur est un préalable nécessaire à la régularité du droit de grève, peu importe la manière dont il en a eu connaissance. Par contre, la grève n’est pas conditionnée au refus par l’employeur d’accéder aux doléances salariales (Cass. soc. 20 mai 1992).

Application de la règle aux faits

L’obligation d’information a été remplie par l’inspecteur du travail. L’employeur ne peut être fondé à estimer que le mouvement ne constitue pas une grève. 4. La grève du salarié détaché

Règle de droit applicable

Les salariés, mêmes détachés, peuvent suivre régulièrement un mouvement de grève si l’objet des revendications professionnelles est de nature à intéresser sa situation de travail.

Application de la règle aux faits

Les licenciements économiques et les nouvelles conditions de travail peuvent affecter directement sa situation de travail. M. Fanons peut utiliser son droit de grève.

5. Sanctions des salariés grévistes

Plusieurs salariés envisagent de procéder à des actions de blocage du système informatique et à des opérations de détournement du matériel pour protester. Peuvent-ils être sanctionnés pour leur comportement ? Règle de droit applicable

La grève emporte suspension du contrat de travail. Les parties sont dégagées de leurs obligations respectives le temps de la grève : le salarié ne travaille pas, l’employeur n’a pas à le rémunérer. Par conséquent, le salarié est justifié à retrouver son emploi à l’issue de la grève sans pouvoir être sanctionné (Art. L 2511-1 al 3 C. trav. ; Cass. soc. 8 juillet 2009). Cependant, la faute lourde du salarié lors de la grève peut justifier son licenciement (Art. L 2511-1 al 1 C. trav.). Il en est ainsi en cas d’actes de violence, de saccage des locaux, de séquestration des dirigeants, ou encore d’entrave à la liberté du travail. Tel est le cas lorsque le salarié a bloqué l’entrée et la sortie de l’entreprise empêchant par-là même la sortie des véhicules (Cass. soc. 24 avril 2003).

Application de la règle aux faits

Les actions de blocage du système informatique et de détournement du matériel, sans être directement animées par l’intention de nuire, peuvent avoir des conséquences en matière de sécurité et de liberté de travail. Ils pourront être qualifiés de faute lourde.

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6. Le maintien de l’activité en situation de grève

L’employeur n’avait pas envisagé un mouvement si réactif. Très inquiet pour l’image de l’entreprise, il souhaiterait, autant que faire se peut, respecter les délais de livraison vis-à-vis de ses clients. Quels sont les moyens dont dispose l’employeur pour maintenir l’activité de l’entreprise ? Règle de droit applicable

L’employeur, s’il ne peut recourir aux contrats précaires pour remplacer les grévistes, a toute latitude pour organiser l’entreprise de manière à assurer la continuité de son activité. L’employeur peut ainsi procéder à une réaffectation temporaire des personnels non grévistes, recourir à la sous-traitance ou procéder à des embauches sous contrat à durée indéterminé. Notons à cet égard qu’il doit rémunérer les salariés non grévistes, sauf en cas de force majeure. Application de la règle aux faits

L’employeur peut envisager une réorganisation temporaire ou recourir à la sous-traitance, ce qui suppose un coût financier à prendre en compte.

II – QUESTION DE COURS 1. Les différentes formes de grève

La manière dont la grève se manifeste est variable. Selon les moyens ou les méthodes utilisées par les grévistes, la grève peut être licite ou illicite.

- La grève de solidarité : elle est licite à condition d’avoir pour objet la défense des intérêts professionnels du personnel ;

- La grève avec occupation des locaux : elle est illicite dans la mesure où elle porte atteinte à la liberté de travailler. L’employeur peut saisir la juridiction de référé pour ordonner l’expulsion de grévistes ;

- la grève tournante : sans désorganiser l’entreprise, elle a vocation à toucher successivement ses différents secteurs. Licite dans le secteur privé, elle est illicite dans le secteur public ;

- la grève perlée ou grève du zèle : elle consiste en une exécution défectueuse de la prestation de travail soit en ralentissant son travail à l’excès, soit en appliquant strictement la totalité de la réglementation. La désorganisation qu’elle provoque justifie son illicéité.

2. L’exercice du droit de grève dans les services publics

Des dispositions particulières sont à destination des personnels de l’État, des régions, des départements et des communes comptant plus de 10 000 habitants, ainsi qu’aux personnels des entreprises, des organismes et des établissements publics ou privés lorsque ces entreprises, organismes et établissements sont chargés de la gestion d’un service public. Cette réglementation est essentiellement caractérisée par l’existence d’un préavis de grève de 5 jours francs, précisant

les motifs de la grève et émanant d’une organisation syndicale représentative au niveau national, dans la catégorie professionnelle ou dans l’entreprise, l’organisme ou le service intéressé. En outre, certains agents sont privés du droit de grève (magistrats judicaires, militaires…) et certains établissements doivent assurer un service minimum (agents hospitaliers, navigation aérienne…). 3. Le lock out

L’employeur peut aussi procéder à la fermeture temporaire de l’entreprise (le lock out). Cette mesure n’est licite que si

l’employeur est dans l’impossibilité absolue de fournir du travail, c’est-à-dire s’il se trouve libéré de son obligation du fait d’un cas de force majeure ou d’une situation contraignante en ayant les caractères.

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III – ÉTUDE DE DOCUMENT Document 1 1. Problème de droit

Un employeur peut-il moduler la retenue de salaire selon le degré de mobilisation des salariés grévistes sans que ce traitement soit constitutif d’une discrimination indirecte ? 2. Expliquez la solution de la cour de cassation

L’exercice du droit de grève, protégé constitutionnellement (cf. partie I – CAS PRATIQUES, question 1 de ce même cas), ne fait que suspendre le contrat de travail. L’exercice d’un droit (droit syndical, droit de retrait, droit à l’expression directe et collective ou droit de grève en l’occurrence) ne permet pas à l’employeur d’imputer au salarié qui en fait usage une faute quelconque de nature à avoir une incidence sur sa rémunération ou sa présence dans l’entreprise, sauf dans des

cas spécifiques (par exemple la faute lourde du salarié gréviste). Chaque partie est ainsi libérée de son obligation principale, pour l’une réaliser sa prestation de travail, pour l’autre verser une rémunération comme contrepartie du travail fourni. Pour autant, l’employeur peut-il moduler la rémunération des salariés grévistes selon leur degré de mobilisation au mouvement de grève ? C’est précisément la question principale posée à la cour de cassation dans l’arrêt du 9 juillet 2015. Dans les faits de l’espèce, la société Mondadori Magazines France a effectué une retenue de salaire différente parmi les salariés grévistes selon qu’ils avaient ou non terminé à temps leur travail : une retenue de salaire de 50% pour ceux qui avaient terminé le travail et 100% pour les autres. Les salariés grévistes (qui n’ont pas terminé leur travail) ayant subi

une retenue intégrale de leur salaire ont décidé de saisir le conseil de prud’hommes. La cour d’appel de Versailles ayant fait droit à leur demande, l’employeur a formé un pourvoi en cassation et soulevé deux moyens :

- le fait d’effectuer une retenue sur salaire selon le degré de mobilisation des salariés grévistes n’est pas constitutif d’une discrimination indirecte (entre les grévistes) dans la mesure où n’a pas été prise en compte l’appartenance ou non des salarié au mouvement de grève ;

- d’autre part, la distinction de rémunération entre les salariés grévistes repose sur un critère objectif indépendant de sa volonté (ceux ayant finalisé les publications parues à temps et les autres en retard…).

La cour de cassation rejette le pourvoi de la société. Elle retient en premier lieu que tous les salariés grévistes doivent faire l’objet d’un traitement identique et que la prise en compte du degré de mobilisation des salariés et ses conséquences sur le fonctionnement de l’entreprise constitue une discrimination indirecte. En second lieu, ne constitue pas un élément objectif étranger à toute discrimination la parution en retard des magazines qui n’est que la conséquence de la cessation collective du travail. Elle ne retient pas pour autant, et à la différence de la cour d’appel, le versement de dommages intérêts supplémentaires

dans la mesure où la preuve d’un préjudice indépendant du retard de paiement n’est pas rapportée. Document 2 3. Quel est l’objet du contentieux soumis à la cour de cassation et quelle solution y apporte-t-elle ?

L’employeur, s’il ne peut recourir aux contrats précaires pour remplacer les salariés grévistes en vertu de l’article L 1251-

10 du code du travail, a toute latitude pour organiser l’entreprise de manière à assurer la continuité de son activité. L'employeur peut ainsi précéder à une réaffectation temporaire des personnels non-grévistes, recourir à la sous-traitance ou procéder à des embauches sous contrat à durée indéterminé. Néanmoins, l’employeur ayant fait appel à des contrats de travail temporaire avant la grève peut-il augmenter leur charge de travail et leur amplitude horaire pendant la grève ? La cour de cassation répond par la négative si la modification de leur volume horaire de travail et des tâches auxquelles ils étaient affectés avait pour finalité le remplacement des salariés grévistes.

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LE LINGOT DE PLOMB

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Intéressement, participation et plans d’épargne

I – CAS PRATIQUE 1

1. La participation

Des salariés de la société REAFRAIS souhaitent un déblocage anticipé de leur participation. Les motifs présentés sont le surendettement de M

lle Lumiel, la démission de M. Ferdinan, un réaménagement des combles de la maison de M

me

Pic et le décès de la concubine de M. Tracas. Quelles sont les conditions d’un déblocage anticipé des sommes apportées au titre de la participation ?

Règles de droit applicables

Dès que le salarié est informé des sommes qui lui ont été attribuées au titre de la participation, il peut, sous 15 jours (sauf accord différent), en demander le versement immédiat. Les sommes sont alors imposables à l’impôt sur le revenu, ce qui n’est pas le cas en cas de blocage des fonds. À défaut, les sommes déposées sont indisponibles pendant une durée de 5 ans ou 8 ans en l’absence d’accord collectif dans les délais requis. Au terme de l’échéance, le salarié peut choisir :

- de retirer les droits acquis ; - de verser les sommes sur un compte épargne temps ;

- de maintenir la situation en l’état pour bénéficier des exonérations dont la participation fait l’objet. Dans certaines hypothèses cependant, la loi prévoit par exception la possibilité d’un retrait anticipé des fonds affectés à la participation.

Le déblocage anticipé des fonds À titre dérogatoire, il est possible de demander le déblocage anticipé dans le cas d’évènements définis à l’article R 3324-22 du code du travail. Ces exceptions, qui peuvent s’exercer de manière permanente, ont été précisées par la circulaire interministérielle relative à l’épargne salariale en date du 14 septembre 2005. Les différents cas sont les suivants : 1° Le mariage ou la conclusion d’un pacte civil de solidarité par l’intéressé. En sont exclus les concubins. 2° La naissance ou l’arrivée au foyer d’un enfant en vue de son adoption, dès lors que le foyer compte déjà au moins deux enfants à sa charge. 3° Le divorce, la séparation ou la dissolution d’un pacte civil de solidarité lorsqu’ils sont assortis d’un jugement prévoyant

la résidence habituelle unique ou partagée d’au moins un enfant au domicile de l’intéressé. 4° L’invalidité de l’intéressé, de ses enfants, de son conjoint ou de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité. 5° Le décès de l’intéressé, de son conjoint ou de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité. 6° La rupture du contrat de travail. 7° L’affectation des sommes épargnées à la création ou reprise d’une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou agricole. 8° L’affectation des sommes épargnées à l’acquisition ou agrandissement de la résidence principale emportant création de surface habitable nouvelle telle que définie à l’article R111-2 du code de la construction et de l’habitation, sous réserve de l’existence d’un permis de construire ou d’une déclaration préalable de travaux, ou à la remise en état de la

résidence principale endommagée à la suite d’une catastrophe naturelle reconnue par arrêté ministériel. 9° La situation de surendettement de l’intéressé définie à l’article L 331-2 du code de la consommation, sur demande adressée à l’organisme gestionnaire des fonds ou à l’employeur, soit par le président de la commission de surendettement des particuliers, soit par le juge lorsque le déblocage des droits paraît nécessaire à l’apurement du passif de l’intéressé.

Mise en œuvre du déblocage des fonds Les droits ouverts correspondent à ceux acquis par les salariés au titre de la participation pour les exercices clos au moment de l’évènement justifiant le règlement anticipé, sauf en cas de décès ou de cessation du contrat. Le déblocage n’est cependant pas automatique. En effet, il appartient au salarié d’en faire la demande auprès de l’employeur dans les six mois du fait générateur, hormis le cas du décès du conjoint marié ou pacsé, de la cessation du contrat, de l’invalidité ou de surendettement. Le déblocage souhaité peut porter sur la totalité ou une partie seulement des fonds.

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Application des règles de droit aux faits

L’entreprise REAFRAIS Il convient de vérifier si les demandes des salariés entrent dans le cadre des dispositions de la loi. M

lle Lumiel évoque une situation de surendettement. Ce motif est recevable, mais la demande doit être formulée par le

président de la commission de surendettement ou le juge si le déblocage lui paraît utile à l’apurement du passif.

M. Ferdinan justifie d’une démission. La loi ne distingue pas selon les causes ayant donné lieu à la rupture du contrat de travail. Par conséquent ce motif autorise le déblocage anticipé des fonds. Le délai de six mois pour formuler sa demande n’est pas requis. M

me Pic souhaite utiliser les sommes de la participation pour un aménagement des combles de sa maison. Il s’agit bien

de la création d’une surface habitable nouvelle telle qu’entendue par le code la construction et de l’urbanisme ouvrant droit à sa demande. Elle devra en outre produire une déclaration de travaux dans son cas. M

me Pic devra présenter sa

demande dans les six mois précédents. Enfin, le décès de la concubine de M. Tracas n’entre pas dans le dispositif légal. En effet, seul le décès du conjoint marié ou pacsé est pris en compte.

2. Conditions de mise en place de la participation dans la société LEMARRON

Josette Lamer, gérante des sociétés LEMARRON et ISOTEC, souhaiterait instituer le même système de participation

dans son entreprise. Quelles sont les règles de mise en place de la participation dans l’entreprise ?

Règles de droit applicables

Champ d’application de la participation Doivent obligatoirement conclure un accord de participation les entreprises de droit privé dont l’effectif est habituellement au moins égal à 50 salariés (art. L 3322-2 C. Trav.). Cette disposition peut être étendue aux unités économiques et sociales dont l’effectif atteint le même nombre de salariés. Le critère de l’unité économique est constitué lorsqu’il y a unité de direction et identité ou complémentarité d’activité. Le critère de l’unité sociale relève d’indices variés, tels qu’une gestion commune du personnel, un statut juridique commun, une convention collective identique…

Plusieurs entreprises juridiquement distinctes peuvent donc constituer une unité économique et sociale, mais pour en produire les effets elle doit être reconnue par convention collective ou décision de justice. La participation peut aussi résulter d’une démarche volontaire dans les cas où le seuil d’effectif n’est pas atteint. Il est néanmoins nécessaire de conclure un accord de participation aux mêmes conditions que s’il était obligatoire. L’accord de participation La participation suppose un accord de participation (art. L 3322-6 C. Trav.). Il peut être conclu soit :

- dans le cadre d’une convention ou d’un accord : de branche, professionnel ou d’entreprise ; - au sein du comité d’entreprise ; - entre l’employeur et ses représentants syndicaux ; - à la suite d’une consultation du personnel ayant validé le projet à la majorité des 2/3.

Une fois adopté, l’accord de participation doit être déposé auprès de la DIRECCTE qui vérifie la régularité de ses dispositions.

En l’absence d’accord dans l’année qui suit la naissance des droits des salariés, un régime de substitution est automatiquement mis en place. Application des règles de droit aux faits

Deux situations peuvent se présenter : - les sociétés LEMARRON et ISOTEC forment une unité économique et sociale. Le critère de l’unité économique est

validé par l’existence d’une direction commune en la personne de Mme

Lamer et par la complémentarité des activités

des deux sociétés. Le critère de l’unité sociale l’est aussi a priori puisque les salariés bénéficient d’une gestion commune du personnel et d’une convention collective identique. Reste à savoir si le seuil d’effectif est atteint puisque l’on ignore celui de la société ISOTEC. S’il l’est, son existence devra faire l’objet d’une reconnaissance par voie conventionnelle et judiciaire. En cette hypothèse, l’instauration de la participation est obligatoire ;

- le seuil d’effectif n’est pas atteint ou la notion d’unité économique et sociale n’est pas retenue. En ce cas rien n’empêche M

me Lamer de mettre volontairement en place un système de participation.

Dans les deux cas cependant, son institution devra faire l’objet d’un accord de participation.

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II – CAS PRATIQUE 2

1. Mise en place de l’intéressement

Fort d’une croissance importante, M. Nicolas, souhaite mettre en place le mécanisme de l’intéressement dans l’entreprise FLAMEL, en y intégrant la performance des salariés et leur fidélité, mais un projet de fusion avec la société LECREUSET lui fait douter de son idée. Quelles sont les conditions de mise en place de l’intéressement et son mode de calcul ainsi que les conséquences dont il pourrait être affecté en cas de fusion ?

Règles de droit applicables

Conditions de mise en place de l’intéressement Toute entreprise est justifiée à conclure un accord d’intéressement, quelles que soient son activité, sa forme juridique ou sa taille, à la différence de la participation. L’accord, facultatif, est conclu au profit de toute personne ayant un contrat de travail avec l’entreprise. Ce caractère collectif peut néanmoins être subordonné à une condition d’ancienneté. En outre les chefs d’entreprise dont la structure compte au moins 1 salarié et au plus 100 salariés sont eux-mêmes admis au bénéfice de l’intéressement.

L’accord l’instituant peut être conclu aux mêmes conditions que l’accord de participation mais pour une durée de 3 ans (dans le cadre d’une convention ou d’un accord de branche, professionnel ou d’entreprise, au sein du comité d’entreprise, entre l’employeur et ses représentants syndicaux, à la suite d’une consultation du personnel ayant validé le projet à la majorité des 2/3). Préalablement à sa conclusion, il doit être transmis pour avis au CE et à défaut aux délégués du personnel sur requête des parties. Une fois établi, il est déposé dans les 15 jours de sa conclusion aux services de la DIRECCTE et fait l’objet d’un contrôle par les administrations concernées (inspection du travail, URSSAF, services fiscaux).

Modalité de calcul L’intéressement prévu par l’accord doit impérativement intégrer dans sa formule de calcul les caractères suivants :

- être collectif. Ce principe exclut par nature tout critère lié aux résultats individuels, au motif de rupture du contrat ou aux sanctions dont le salarié a pu être l’objet (Cass. soc. 11 juillet 1996). Le non-respect du caractère collectif entraîne la requalification en salaire des sommes versées au titre de l’intéressement et leur réintégration dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale ;

- présenter un caractère aléatoire lié aux résultats ou performances de l’entreprise. L’intéressement doit être impérativement lié à l’aléa économique de l’entreprise. Il peut ainsi être déterminé en fonction du chiffre d’affaires et de son augmentation (Cass. soc. 25 mars 1999), mais ne saurait être forfaitaire. En cas de contestation, les juges du fond apprécient en toute souveraineté le caractère aléatoire de l’intéressement (Cass. soc 29 octobre 2003). La sanction, comme précédemment, consiste à reporter les sommes distribuées dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale.

Les sommes découlant de cette formule de calcul sont ensuite réparties entre les bénéficiaires soit de manière uniforme,

soit proportionnellement à la durée de présence dans l’entreprise au cours de l’exercice ou encore proportionnellement aux salaires. La combinaison des trois critères est possible (art. L 3314-5 C. Trav.).

Le sort de l’intéressement en cas de modification dans la situation juridique de l’employeur La loi dispose, spécialement en son article L 3313-4 du code du travail, qu’en cas de modification dans la situation juridique de l’employeur, l’accord d’intéressement cesse de produire ses effets dès lors que ladite modification rend impossible le maintien des obligations découlant de l’accord. Ce peut être le cas dans l’hypothèse d’une fusion, d’une

cession ou scission. Par contre la loi fait obligation, en l’absence d’accord dans la nouvelle entreprise, de procéder dans les six mois à de nouvelles négociations de nature à permettre la conclusion d’un nouvel accord.

Application des règles de droit aux faits

Concernant l’intéressement M. Nicolas peut librement mettre en place dans l’entreprise le mécanisme de l’intéressement puisqu’il est facultatif. Il devra par contre conclure un accord d’entreprise ou solliciter par référendum les salariés à défaut d’une convention ou d’un accord l’ayant déjà institué.

Il souhaite en outre intégrer la performance individuelle des salariés ainsi que leur ancienneté dans la formule de calcul. Ce souhait ne peut pris en compte puisqu’il va à l’encontre du caractère collectif de l’intéressement. Le risque est la réintégration des sommes dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale. Enfin, si la fusion s’opère avec la société LECREUSET, les droits des salariés ne seront pas maintenus si leur continuation est impossible, par exemple en cas d’inexistence d’un tel mécanisme chez l’absorbante. 2. Les différents Placements possibles des fonds d’un PEE

M. Nicolas se demande si un Plan d’Épargne Entreprise ne serait pas plus intéressant. Il souhaite pour ce dernier comprendre les différents placements pouvant être effectués de manière à en expliquer clairement l’intérêt pour les salariés. Quel est l’objet d’un Plan d’Épargne Entreprise et quels sont les placements auxquels il peut donner lieu ?

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Règles de droit applicables

Mise en place et objet du PEE Le PEE permet aux salariés de se constituer une épargne sous forme de valeurs mobilières avec l’aide de l’entreprise. Toute entreprise sans condition d’activité, de forme juridique ou d’effectif peut instituer un plan d’épargne. Facultatif, il peut résulter soit d’une décision de l’employeur (PEE octroyé, c’est-à-dire unilatéralement décidé par l’employeur), soit d’un accord conclu avec le personnel, soit encore d’une négociation collective (convention ou accord de branche, professionnel ou d’entreprise). Il bénéficie à l’ensemble des salariés dont la condition d’ancienneté, si elle existe, ne peut être supérieure à 3 mois. Une fois constitué, le règlement du plan d’épargne est déposé à la DIRECCTE qui opère un contrôle formel. Les

services administratifs concernés exercent pour leur part un contrôle sur le fond (inspection du travail, URSSAF, services fiscaux). Les placements accueillis au titre du PEE Le compte est alimenté à la fois par les salariés et par l’entreprise.

Les salariés peuvent librement effectuer des versements sur le compte dans la limité du quart de leur rémunération annuelle. Les sommes perçues au titre de la participation ou de l’intéressement peuvent aussi alimenter le plan. L’entreprise peut participer à la constitution de l’épargne par le versement d’un abondement 3 138,24 euros (2017) par salarié et par an. Il peut être dérogé à ce plafond si le plan sert au développement de l’actionnariat salarié.

Les sommes qui y sont ainsi affectées peuvent faire l’objet des placements suivants : - acquisition de valeurs mobilières émises par l’entreprise ou par une entreprise du même groupe. Dans ce cas, la

création d’un fond commun de placement pour la gestion de l’investissement n’est pas obligatoire, même s’il est plus protecteur (présence d’un conseil de surveillance et d’un commissaire aux comptes) ;

- acquisition de parts des organismes de placement collectifs en valeurs mobilières (OPCVM) soit : - des SICAV (société d’investissement à capital variable). Ce sont des sociétés anonymes, donc des personnes

morales, qui ont pour fonction de gérer un portefeuille de valeurs mobilières. Ces sociétés sont soit à vocation générale et leurs investissements sont très divers, soit ce sont des sociétés d’actionnariat salarié et leur objet

consiste exclusivement à gérer les titres de l’entreprise ou du groupe (L 214-15 C. mon.), - des FCPE (fond commun de placement d’entreprise). Un FCPE est une copropriété de valeurs mobilières

émettant des parts sans être dotée de la personnalité morale (L 214-20 C. mon.).

Le règlement du PEE doit préciser les différents placements proposés et les notices relatives aux SICAV et FCPE le

constituant. Application des règles de droit aux faits

Le PEE peut être mis en place à la seule initiative de l’employeur, ce qui peut intéresser M. Nicolas puisqu’il souhaite conserver sa liberté de choix quant au mécanisme à mettre en place. En outre l’abondement de l’employeur peut marquer sa volonté de faire bénéficier les salariés de l’évolution de la société. Par ailleurs, le règlement du plan peut prévoir la constitution d’un portefeuille composé de titres de la société elle-même, ce qui est de nature à associer les salariés à l’avenir de l’entreprise.

Enfin, en cas de fusion, les sommes et placements effectués dans le cadre d’un PEE peuvent être transférés en totalité vers celui de la nouvelle entité, sachant au surplus que la durée d’indisponibilité écoulée se déduit de celle prévue dans le plan de l’absorbante.

II – QUESTION DE COURS 1. Le PERCO

Le PERCO permet au salarié de se constituer une épargne en vue de la retraite, qu’il pourra percevoir sous forme de capital ou de rente.

Mise en place du plan Il peut être mis en place dans toute entreprise sans conditions d’effectif, d’activité ou de forme juridique. Néanmoins, il suppose l’existence préalable d’un PEE ou d’un PEI, puis doit être suivit d’un accord collectif. À noter que si l’entreprise dispose déjà d’un PEE depuis plus de 5 ans, elle a obligation d’ouvrir des négociations relative à l’ouverture d’un PERCO. Les bénéficiaires sont identiques à ceux du PEE.

Alimentation du PERCO Le plan est alimenté par les versements :

- du salarié, par son épargne personnelle, par les sommes issues de l’intéressement ou de la participation ou par le contenu d’un PEE ou PEI dans le cas d’un déblocage anticipé. Les versements ne peuvent excéder le de sa

rémunération annuelle ; - de l’entreprise. Elle peut verser un abondement dans la limite de 6 276,48 euros (2017) et du triple du versement

effectué par le salarié.

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MES VERTES ANNÉES

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Assurance vieillesse : calcul de la pension ; assurance maladie : arrêt de travail, prestations en espèces et en nature, ticket modérateur, médecin conventionné, maladie professionnelle ;

prestations familiales, notions sur les autres régimes

I – CAS PRATIQUE 1. Retraite de Marc Lepas

Marc Lepas, né le 1er

janvier 1948, souhaiterait prendre sa retraite à compter du 1er

août 2017. Il cumulera 140 trimestres à cette date et son salaire mensuel brut moyen s’élève à 2 000 euros pour les 25 dernières années.

2. Retraite de Jean Babine

Jean Babine entend prendre sa retraite en décembre 2017. Né en 1950, il peut prétende à 162 trimestres au titre du régime général. Il évalue sa rémunération moyenne à 3 000 euros brut mensuel pour les 25 années passées. Problème de droit

Quelles sont les modalités de calcul de la pension vieillesse au titre du régime général de la sécurité sociale ?

Règles de droit applicables

La pension vieillesse est calculée à partir de la formule suivante :

P = SR T (D : d)

P = Pension vieillesse T = Taux de la pension SR = Salaire de référence D = Durée réelle d’assurance dans le régime général d = Durée maximale prise en compte dans le régime général

A – La pension vieillesse (P) Versée au titre de l’assurance vieillesse. L’assuré doit remplir les conditions d’âge, de durée de cotisation (au moins un trimestre), de cessation d’activité (sauf exceptions) et doit demander la liquidation de sa pension. B – Le salaire de référence (SR) Le salaire de référence servant de base au calcul de la pension correspond au salaire annuel moyen brut perçu au cours des 25 années civiles d’assurance (c’est-à-dire toute année au cours de laquelle l’assuré a cotisé) pour les assurés nés

à partir de 1948, dans la limite du plafond annuel de la sécurité sociale. En effet, la loi du 21 août 2003 porte les durées à 25 années pour les pensions prenant effet postérieurement au 31 décembre 2007 selon l’année de naissance. Les cotisations et salaires servant de base au calcul de la pension sont revalorisés chaque année conformément à l’article L. 161-23-1 du Code de la sécurité sociale par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale.

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C – Le taux de la pension (T) Le taux de la pension est dit plein lorsqu’il atteint 50%. Il suppose d’avoir cotisé un nombre de trimestres suffisant qui dépend de la date de naissance de l’assuré. Le nombre de trimestres cotisés pour bénéficier d’une retraite à taux plein a été rallongé d’un trimestre par an à partir de 2009 pour atteindre exemple 165 trimestres pour les assurés nés en 1953, soit 41 ans et trois mois de cotisation. Par exception, ces conditions ne sont pas exigées pour les salariés ayant atteint l’âge de 65 ans s’ils sont nés avant le

1er

juillet 1951 (sachant là aussi que l’âge requis va augmenter progressivement pour atteindre 67 ans pour les assurés nés à partir de 1955), pour les assurés reconnus inaptes au travail ou encore pour les mères de famille salariées ayant élevé 3 enfants au moins et justifiant de 30 années d’assurance. Le salarié souhaitant partir à la retraite sans avoir cotisé le nombre de trimestres nécessaires lui permettant de bénéficier du taux plein a droit à une pension à un taux minoré. Celui-ci est calculé à partir du taux plein auquel on applique un coefficient de minoration qui dépend soit du nombre de trimestres manquants pour arriver au 65

e anniversaire, soit du

nombre de trimestres supplémentaires pour obtenir une retraite à taux plein au jour du départ. Ainsi pour un assuré né en 1948

Trimestres manquants Taux Trimestres

manquants Taux

1 49,0625% 11 39,6875%

2 48,125% 12 38,75%

3 47,1875% 13 37,8125%

4 46,25% 14 36,875%

5 45,3125% 15 35,9375%

6 44,375% 16 35%

7 43,4375% 17 34,0625%

8 42,50% 18 33,125%

9 41,5625% 19 32,1875%

10 40,625% 20 31,25%

D – La durée réelle d’assurance dans le régime général (D) La durée d’assurance, calculée en trimestre, est constituée des périodes cotisées et de celles retenues à différents titres et servant de base au calcul du taux et du montant de la pension.

Sont prise en compte pour le calcul de la durée réelle d’assurance : - les périodes ayant donné lieu à cotisations ; - les périodes assimilées (congé maternité, arrêt maladie et accident du travail, période de chômage ayant donnée

lieu à la perception d’une allocation…) ; - les périodes de rachat de cotisations et de validation gratuite. Sous certaines conditions peuvent donner lieu à

rachat de cotisations les années d’études qui n’ont pas donné lieu à l’affiliation à un régime d’assurance vieillesse, les années d’activités n’ayant pas permis de valider 4 trimestres d’assurance… (à noter : le compte épargne temps peut être utilisé aux fins de rachat de cotisations) ;

- les majorations. Par exemple, la mère de famille ayant élevé son enfant bénéficie d’un trimestre supplémentaire par année passée jusqu’à sa 16

e année, dans la limite de 8 trimestres. Les parents ayant élevé un enfant handicapé

bénéficient d’une majoration d’un trimestre par période de 30 mois d’éducation dans la limite de 8 trimestres ; - les périodes reconnues équivalentes (elles ne sont pas prises en compte pour le calcul du montant de la pension).

Par exemple les périodes d’activité agricole non salariée avant 1976. E – La durée maximale prise en compte dans le régime général (d) Il s’agit du nombre maximum de trimestres pris en compte pour le calcul de la pension. La durée d’assurance maximale est de :

- 160 trimestre pour 2008 (assuré né en 1948) ; - 161 trimestres pour 2009 (assuré né en 1949) ; - 162 trimestres pour 2010 (assuré né en 1950) ; - 163 trimestres pour 2011 (assuré né en 1951) ; - 164 trimestres pour 2012 (assuré né en 1952).

Voir tableau de l’énoncé pour les années suivantes.

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En tout état de cause, la pension ne peut être d’un montant supérieure à 50% du plafond de la sécurité sociale, ni inférieure à un minimum qualifié de minimum contributif (688,00 par mois au 1

er janvier 2017) pour un retraité

bénéficiant du taux plein. Application des règles de droit aux faits

1. Cas de Marc Lepas

Pour répondre à la question de M. Lepas, il nous faut reconstituer les éléments de la formule de la pension vieillesse. Soit : SR Son salaire annuel brut moyen, selon les indications fournies, est de 24 000 euros. Le calcul doit être établi sur les 25 meilleures années puisque Marc est né en 1948. T Le taux de la pension. Il est nécessaire en principe de valider 160 trimestres au regard de son année de naissance pour

bénéficier d’une pension à taux plein, soit 50%. Par exception, ce taux s’applique si l’assuré a plus de 65 ans même s’il ne réunit pas le nombre de trimestres nécessaires. Au 1

er août 2017, Marc aura 69 ans. Il bénéficiera donc du taux plein

même s’il ne peut justifier du nombre de trimestres suffisant. D La durée d’assurance. Elle est de 140 trimestres cotisés. d La durée maximale d’assurance prise en compte dans le régime d’assurance. Elle est fonction de l’année de naissance de l’assuré, soit 160 pour Marc né en 1948. La formule s’établit comme suit : P = 24 000 x 50% x (140 / 160) = 10 500 euros bruts annuels. La pension annuelle de Marc Lepas peut être évaluée à 10 500 euros annuellement, hors retraite complémentaire et assurances particulières.

2. Cas de Jean Babine

Le raisonnement à suivre est identique à celui de M. Lepas. SR Jean étant né en 1950, le salaire annuel moyen est à établir sur les 25 meilleures années.

T Le taux de 50% s’applique lorsque l’assuré atteint l’âge minimum requis, soit 60 ans pour les assurés nés avant le 1

er

juillet 1951, et justifie de 162 trimestres. D La durée d’assurance retenue est de 162 trimestres.

d La durée maximale d’assurance prise en compte est de 162 trimestres. La formule s’établit comme suit : P = 36 000 x 50% x (162/162) = 18 000 euros bruts annuels.

3. Les heures de sorties en cas d’arrêt maladie – Pluralité d’employeur et arrêt maladie

M. JACK souffre régulièrement de problèmes au bras droit entraînant de nombreux arrêts de travail. Doit-il respecter les heures de sorties indiquées sur l’arrêt ? Quelles seraient les conséquences dans le cas inverse ? Peut-il travailler pour un autre employeur avec qui il a déjà un contrat et pour lequel il fournit des prestations de conseil ?

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Règle de droit applicable

Le médecin doit indiquer sur l’arrêt de travail : - soit que les sorties ne sont pas autorisées ; - soit qu’elles le sont. Dans ce cas, l’assuré doit rester présent à son domicile de 9 h à 11 h et de 14 h à 16 h, sauf

en cas de soins ou d’examens médicaux. Toutefois, le praticien peut, par dérogation à cette disposition, autoriser les sorties libres. Dans ce cas, il porte sur l’arrêt de travail les éléments d’ordre médical le justifiant.

Si les sorties sont libres, elles ne doivent pas avoir pour effet d’empêcher l’employeur d’effectuer un contrôle. À défaut il est fondé à suspendre le versement des indemnités complémentaires. Si les sorties ne sont pas libres, et que le salarié n’observe pas les restrictions qui lui sont imposées, la CPAM peut

suspendre le versement de ses indemnités journalières. Enfin, l’arrêt de travail vaut pour tous les employeurs du salarié. Application de la règle au cas

M. Jack ne peut travailler pour son second employeur étant en arrêt maladie. En outre, s’il est indiqué des heures de sorties, cela veut dire que les sorties ne sont pas libres. Il devra donc être à son domicile sur les tranches horaires indiquées.

4. Prestations en nature

Les prestations en nature couvrent les frais engagés par l’assuré y compris ses ayant droits au titre des dépenses médicales, para médicales et d’hospitalisation (art. 160-8 C. Sec.) 5. Ticket modérateur

Lorsque la sécurité sociale ne prend pas en charge la totalité des dépenses dans le plafond qu’elle fixe, la somme restante (donc à la charge de l’assuré) est appelée ticket modérateur. Cette somme varie à raison des soins prodigués. Le ticket modérateur peut être majoré d’une pénalité lorsque les actes médicaux ont été réalisés en dehors du parcours coordonné. 6. Médecin non conventionné : conséquences

Les médecins conventionnés sont ceux qui appliquent les conventions signées entre les syndicats médicaux et l’assurance maladie. Ils s’engagent à respecter une grille tarifaire qui permet à l’assuré d’être remboursé quasi

intégralement de sa consultation. Les médecins non conventionnés pratiques des honoraires libres. L’assuré n’est remboursé qu’à hauteur du tarif de la sécurité sociale. 7 La maladie professionnelle

M. Jack souhaiterait faire reconnaître sa maladie comme étant professionnelle sachant, qu’elle ne figure pas au tableau correspondant. Le peut-il ?

Règle de droit applicable

La maladie doit être la conséquence directe de l’exposition d’un travailleur à un risque physique, chimique, biologique, ou résulter des conditions dans lesquelles il exerce son activité professionnelle. Cette formule suppose une action lente et continue d’agents toxiques ou microbiens sur la santé du salarié. Elle inclut tout autant les conséquences d’une posture ou d’une ambiance au travail ayant produit des effets sur la santé mentale et ou physique du salarié.

Pour être reconnue professionnelle, la maladie doit : - soit appartenir au tableau des maladies professionnelles prévu à l’article R. 461-3 du Code de la sécurité sociale. À

noter : le fait de développer une pathologie inscrite au tableau fait présumer le caractère professionnel de la maladie ;

- soit, si la maladie est hors tableau, être essentiellement et directement causée par le travail habituel du salarié, et avoir entraîné le décès de la victime ou une incapacité permanente partielle d’un taux au moins égal à 25%. La demande fait l’objet d’un dossier déposé au Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles qui apprécie l’existence d’un lien direct entre l’activité professionnelle et la maladie.

Application de la règle de droit

M. Jack étant a priori hors tableau, il devra formuler sa demande auprès du CRRMP.

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II – QUESTIONS DE COURS

1. La prime d’activité

Depuis le 1er

janvier 2016, et conformément à la loi Rebsamen, le RSA activité et la prime pour l’emploi ont fusionné au sein de la prime d’activité. Sa vocation est d’assurer une aide financière aux plus modestes et un maintien dans l’emploi. Conditions L’âge : le demandeur doit être âgé d’au moins 18 ans. L’activité : seuls les actifs ayant une activité peuvent en bénéficier.

Les ressources : un plafond de ressources est imposé pour percevoir la prime d’activité. Il est de 1 500 euros net par mois. Montant Le montant de la prime d’activité – hors cas de majoration – se décompose selon la formule suivante :

(Forfait de base – 524,68 euros – + 62% des revenus d’activité professionnelle) – (montant des revenus du foyer) 2. La PUMa

La protection universelle maladie (PUMa) Depuis le 1

er janvier 2016, la protection maladie universelle (qui se substitue et rend sans objet la couverture maladie

universelle de base) est ouverte à toute personne sur un critère de résidence, à savoir résider sur le territoire national de manière ininterrompue depuis 3 mois et pour les ressortissants étrangers hors union européenne être en situation régulière. Elle permet aux bénéficiaires une prise en charge des prestations en nature en cas de maladie ou de maternité.

La couverture maladie universelle complémentaire La couverture complémentaire est accessible aux bénéficiaires de la PUMa sous condition :

- de résider en France depuis au moins 3 mois de manière stable ; - de justifier de ressources inférieures à un plafond fixé par décret.

Les bénéficiaires jouissent du tiers payant et leurs dépenses sont prises en charge à 100% du tarif de la sécurité sociale sous condition de respecter le parcours de soins coordonnés. Ils ne sont pas assujettis à la participation forfaitaire de 1 euro ni à la franchise médicale.

III – ÉTUDE DE DOCUMENT 1. Précisez les frais couverts par l’assurance maladie

Ils sont déterminés à l’article L160-8 du code de la sécurité sociale. Ils comprennent les prestations en nature (frais de médecine générale et spéciale, frais de transport de l’assuré, frais d’hébergement et de traitement des enfants ou adolescents, frais de soins et d’hospitalisation) et les prestations en espèces (d’indemnités journalières).

2. Conditions d’octroi des indemnités journalières

Les conditions sont visées à l’article L 323-6 (observer les prescriptions du praticien ; se soumettre aux contrôles organisés par le service du contrôle médical, respecter les heures de sorties autorisées par le praticien, s’abstenir de toute activité non autorisée. En cas d’inobservation volontaire des obligations ci-dessus indiquées, la caisse peut retenir, à titre de pénalité, tout ou partie des indemnités journalières dues.

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En outre les conditions pour percevoir les indemnités supposent une condition préalable : - soit l’arrêt de travail est inférieur à six mois, dans ce cas l’assuré doit justifier d’une durée de cotisation de 6

mois civils précédant l’arrêt de travail (sur la base d’une rémunération au moins égale à 1 015 fois le SMIC horaire), soit justifier d’au moins 150 heures de travail au cours des trois mois civils ou des 90 jours précédant l’arrêt ;

- soit l’arrêt de travail est supérieur à six mois, dans ce cas l’assuré doit justifier de son immatriculation depuis douze mois à compter de l’arrêt, mais en plus, avoir cotisé au cours des douze mois civils précédant l’arrêt de

travail (sur la base 2 030 fois le SMIC horaire dont 1 015 fois le SMIC horaire au cours des six premiers mois) ou avoir travaillé au moins 600 heures au cours des douze mois civils ou des 365 jours précédant l’arrêt.

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KAUMA

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Le chômage : ARE, conditions de perception, durée, protection sociale, auto-entrepreneur et chômage, obligations du demandeur d’emploi, chômage partiel,

chômage partiel total, indemnisation

I – CAS PRATIQUE 1. Les droits à l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE)

Émile Kauma souhaite démissionner de l’entreprise CAUMANERIE pour suivre sa compagne avec laquelle il est pacsé suite à une mutation professionnelle. Âgé de 51 ans, il s’inquiète de son indemnisation possible au titre du chômage, du montant et de la durée d’indemnisation envisageable. En outre, si la période non travaillée devait perdurer, il s’interroge sur les revenus et la protection sociale dont il pourrait bénéficier. Règles de droit applicables

Le chômage ouvre droit au salarié qui en remplit les conditions à la perception d’une allocation chômage qui repose sur un système d’assurance. Le demandeur d’emploi doit procéder à son inscription auprès des Assedic pour bénéficier des droits que lui confère son statut. Le bénéfice de l’allocation d’aide au retour à l’emploi est accordé aux conditions suivantes :

- être inscrit comme demandeur d’emploi ou accomplir une action de formation ; - justifier d’une durée de cotisation suffisante (pour les personnes de moins de 50 ans la période d’affiliation doit être

au moins égale à 122 jours (4 mois) ou 610 heures, au cours des 28 derniers mois) ; - ne pas avoir atteint l’âge de la retraite ;

- être physiquement apte à occuper un emploi ; - être involontairement privé d’emploi.

Cette dernière exigence suppose une condition extérieure à la volonté du salarié. Sont donc visés en premier lieu les licenciements, même prononcés pour faute, la rupture du CNE à l’initiative de l’employeur, ou encore les fins de CDD. Suivant ce principe, le salarié démissionnaire est donc exclu du bénéficie de l’assurance chômage. Par exception, la convention UNEDIC du 18 janvier 2006 valable jusqu’au 31 décembre 2008 (accord d’application n° 15) admet que certaines démissions puissent être reconnues comme légitimes par la commission paritaire de l’ASSEDIC et ouvrir droit au bénéficie des prestations d’assurance. Sans en dresser la liste intégrale (11 cas) nous pouvons citer les cas suivants :

- la démission à la suite du non-paiement des salaires. Cette situation doit être constatée judiciairement ; - démission à la suite d’actes délictueux dont le salarié est victime. Il est nécessaire de produire le récépissé du

dépôt de plainte auprès du procureur de la république ; - démission pour changement de résidence suite à des violences conjugales ; - démission pour création d’entreprise ; - la démission pour changement de résidence. Le changement doit être justifié par l’une des hypothèses suivantes :

- pour suivre son conjoint ou concubin qui change de résidence pour un motif professionnel tels qu’une mutation au sein d’une entreprise, un changement d’employeur, ou une reprise d’emploi après une période de chômage,

- pour suivre ses parents ou la personne qui exerce l’autorité parentale pour les personnes âgées de moins de 18 ans,

- le mariage ou la conclusion d’un pacte civil de solidarité entraînant un changement de résidence, sous réserve que le délai entre la fin de l’emploi et le mariage ou la conclusion du pacte civil de solidarité ne soit pas supérieur à deux mois.

Application de la règle aux faits

Émile Kauma peut démissionner tout en bénéficiant des prestations de l’assurance chômage puisqu’elle en remplit les conditions, à savoir :

- être à la recherche d’un emploi. Elle devra en l’occurrence faire toute diligence à cet effet auprès de Pôle Emploi dont elle dépend ;

- une durée d’affiliation suffisante. Elle travaille depuis le 15 avril 1995 et valide la condition minimale d’affiliation ; - être involontairement privé d’emploi. Le motif invoqué, à savoir le changement de domicile pour suivre le conjoint

pacsé, justifie l’ouverture des droits.

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2. Durée de perception de l’ARE

Pendant combien de temps pourra-t-il percevoir l’assurance chômage ? Règle de droit applicable

La durée d’indemnisation est égale à la durée d’emploi (durée d’affiliation retenue pour l’ouverture des droits) au cours

des 28 mois précédant la rupture du contrat (pour les moins de 50 ans) ou des 36 mois antérieurs (pour les plus de 50 ans). La durée d’indemnisation minimale dans le cas général ne peut être inférieure à 122 jours ni supérieure à 730 jours. Elle est portée à 3 ans si le salarié privé d’emploi est âgé de 50 ans au moins. À compter du 1

er novembre 2017, la

durée d’indemnisation maximale sera de 24 mois jusqu’à 52 ans, puis de 30 mois entre 53 et 54 ans et de 36 mois à partir de 55 ans. La duré d’indemnisation dépend donc de deux critères :

- l’âge du bénéficiaire ; - la durée d’affiliation, c’est-à-dire le nombre de mois, jours ou heures travaillés.

La durée d’indemnisation minimale dans le cas général ne peut être inférieure à 122 jours ni supérieure à 730 jours.

Règle de droit applicable

La durée d’indemnisation sera de 36 mois puisqu’il est âgé de 51 ans et travaille dans l’entreprise depuis 1995. 3. Montant de l’indemnisation

Règle de droit applicable

Le montant de l’allocation, revalorisé au 1er

juillet, est égal : - soit à 40,4% du salaire journalier de référence plus une partie fixe de 11,84 (valeur au 1

er juillet 2017) ;

- soit à 57% minimum du salaire journalier de référence. En toute hypothèse, le montant journalier de l’ARE ne peut être inférieur à 28,86 (valeur au 1

er juillet 2017) ni supérieur

à 75% du salaire journalier de référence. Le salaire journalier de référence est établit à partir des rémunérations (sont comprises celles ayant donné lieu à contribution) perçues au cours des 12 derniers mois civils précédents la perte d’emploi.

Application de la règle aux faits

Quant au montant de son indemnisation, nous ne pouvons que renvoyer aux principes applicables puisque le montant de sa rémunération nous est inconnue.

4. Allocation particulière à l’issue de ses droits

Règle de droit applicable

Dans le cadre de la solidarité, la loi prévoit deux types d’allocations destinées aux personnes dont les droits au régime d’assurance chômage sont épuisés ou lorsqu’ils sont dans des situations particulières ne leur permettant pas de bénéficier de l’ARE. Seule l’allocation de solidarité spécifique retiendra notre attention. En effet, la seconde, l’allocation temporaire d’attente, correspond à des situations très spécifiques n’entrant pas dans le cadre de notre étude. L’allocation de solidarité spécifique est destinée principalement aux travailleurs privés d’emploi ayant épuisé leurs droits

à l’ARE. Elle peut être allouée aux conditions suivantes : - être à la recherche d’un emploi ; - ne pas avoir atteint l’âge légal requis pour partir à la retraite ; - justifier de cinq années d’activité salariée au cours des dix ans précédant la fin du contrat de travail ayant donné

lieu aux prestations de l’assurance chômage ; - disposer de ressources inférieures à 1 142,41 pour un célibataire (1

er juillet 2017) et 1 795,20 pour un couple

(1er

juillet 2017). Application de la règle aux faits

Enfin, s’il ne retrouve pas d’emploi au terme de cette période, il pourra toujours solliciter l’allocation de solidarité spécifique, mais la condition de revenue fera peut être défaut puisque sa concubine pacsée semble bénéficier d’un emploi dont la rémunération est à priori confortable.

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5. Protection sociale pendant ces périodes

Règle de droit applicable

Toute personne justifiant de l’allocation d’aide retour à l’emploi ainsi que de l’allocation de solidarité spécifique bénéficie du maintien de ses droits aux prestations d’assurance maladie, maternité, invalidité et décès entrant dans le cadre du régime obligatoire dont elle relevait antérieurement (L 311-5 C. SS). La durée des prestations est équivalente à celle des allocations. Au-delà, seules les prestations en nature des assurances maladie et maternité sont servies. Application de la règle aux faits

Au cours de ces périodes il aura droit au maintien des prestations sociales du régime dont il relevait.

II – CAS PRATIQUE 2 1. Les conditions de la mise en activité partielle sont-elles réunies ?

Règles de droit applicables

L’employeur peut décider de la mise en activité des salariés dans les cas limitativement énumérés par la loi àl’article R 5122-1 du code du travail, à savoir :

- la conjoncture économique, - des difficultés d'approvisionnement en matières premières ou en énergie ; - un sinistre ou des intempéries de caractère exceptionnel ; - la transformation, restructuration ou modernisation de l'entreprise ; - toute autre circonstance de caractère exceptionnel.

À noter que la fermeture doit être temporaire et collective. Le caractère collectif peut ne concerner qu’un atelier ou un service.

Application de la règle aux faits

Les inondations dont est victime la Pepefiguière présente un caractère exceptionnel et justifie la fermeture temporaire de l’entreprise. Par contre Mme Fontaine n’est pas fondée à placer seul M. Phlipot en activité partielle s’ils sont plusieurs dans le même service ou atelier.

2. Quelle forme peut prendre l’activité partielle

Règle de droit

L’activité partielle peut prendre la forme : - soit d’une inactivité totale en cas de fermeture temporaire de l’établissement ou d’une partie de l’établissement ; - soit d’une réduction de l'horaire de travail pratiqué dans l'établissement ou partie d'établissement en deçà de la

durée légale de travail. En cas de réduction collective de l'horaire de travail, les salariés peuvent être placés en position d'activité partielle individuellement et alternativement.

Application de la règle aux faits

Mme Fontaine devra opter pour l’une des deux possibilités. Cependant sachant qu’elle a maintenu l’activité de trois salariés la réduction de l’horaire semble devoir être préconisé, ce qui permettra de mettre M Phlipot individuellement en activité partielle.

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3 Mme Fontaine a-t-elle des obligations particulières ?

Règle de droit

L’employeur doit préalablement consulter le CE ou à défaut les DP, lorsque ces institutions sont présentes dans l’entreprise. Il doit ensuite faire une demande préalable au préfet du département dans lequel se trouve l’entreprise (ou l’établissement) concernée, en précisant le motif, le nombre de salariés placés en activité partielle ainsi que la durée

prévisible. L’autorité administrative dispose alors d’un délai de 15 jours pour notifier sa décision. En cas d’acceptation le placement en activité partielle est autorisé pour une durée de 6 mois, renouvelable sous certaines conditions. Application de la règle aux faits

En l’absence d’institutions représentatives du personnel, Mme Fontaine devra seulement effectuer sa demande préalable auprès du préfet.

4. M. Phlipot sera-t-il rémunéré ?

Règle de droit

Chaque salarié, dans la limite de 1000 heures par année civile, perçoit une indemnité d’activité partielle à hauteur de 70% de sa rémunération brute. Sa rémunération est portée à 100% lorsqu’au cours de cette période d’activité partielle, le salarié suit une activité de formation. L’indemnité est versée par l’employeur, qui, en contrepartie, perçoit une allocation horaire financée par l’Etat et l’Unedic. Elle est de 7,74 euros par heure dans les entreprises de 250 salariés et plus et de 7,23 euros dans les entreprises occupant moins de 250 salariés.

Application de la règle aux faits

M. Phlipot percevra 70% de sa rémunération.

II – QUESTIONS DE COURS

1. La protection sociale des demandeurs d’emploi

Les demandeurs d’emplois bénéficient pendant toute la durée de leur indemnisation des prestations sociales liées à leur dernière activité sous condition d’être assuré social au moment de leur inscription. À défaut, ils ne bénéficient que des prestations en nature et de l’assurance maternité.

2. Les obligations du demandeur d’emploi

Le demandeur d’emploi doit être immédiatement disponible pour occuper un emploi. Il est tenu de participer à la définition et à l’évolution du projet personnalisé d’accès à l’emploi. Il doit accomplir des actes positifs de recherche d’emploi Enfin, il doit accepter les offres raisonnables d’emploi

III – ÉTUDE DE DOCUMENT

1. L’obligation qui pèse sur Pôle Emploi et conséquence qu’en tire la cour de cassation

Mme

X, travailleur sans emploi, a perçu jusqu’au 4 mars 2003 une allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE). Elle a

ensuite sollicité le bénéfice d’une allocation de solidarité spécifique (ASS) versée à partir de 2004 et jusqu’au 8 mars 2005, puis elle a obtenu une allocation équivalent retraite (AER). M

me X estime avoir été mal informée de son droit à

l’ARE qui pouvait être perçue plus tôt et dont le montant était supérieur à l’ASS. Elle a alors mis en cause la responsabilité de l’ASSEDIC. La cour de cassation fait peser sur Pôle emploi une obligation d’information complète des droits dont peuvent bénéficier les demandeurs d’emploi. Le manquement à cette obligation est de nature à engager la responsabilité civile de Pôle Emploi, qui en l’espèce, est condamnée au paiement de dommages-intérêts à hauteur des sommes qu’aurait pu percevoir la salariée au titre de l’AER.

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LES GRACQUES

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Le conseil de Prud’hommes : organisation, compétence territoriale et géographique, bureaux de conciliation et de jugement, juge départiteur.

Document 1 1. Justification de l’organisation en section du conseil de prud’hommes

Les litiges du travail étant d’une grande diversité et leur champ d’application particulièrement vaste, les conseils de prud’hommes sont organisés en sections autonomes correspondant à différents secteurs d’activité (L 1423-1 C. trav.). On décompte les sections suivantes dont la compétence est déterminée par l’activité principale de l’entreprise :

- l’encadrement, créée en 1979 s’adresse aux cadres et salariés assimilés ;

- l’industrie ; - les Commerce et services commerciaux ; - agriculture ; - les activités diverses. Cette section est compétente pour toutes les activités qui n’entrent pas dans les autres

sections comme les activités artistiques, libérales, concierges et gardiens d’immeubles… Les sections peuvent être elles-mêmes divisées en chambres si l’importance du contentieux l’exige par décision du premier président de la cour d’appel, sur proposition de l’assemblée générale du conseil de prud’hommes (R 1423-10 C.

Trav.). 2. Formation de référé

Chaque conseil de prud’hommes comprend une formation de référé commune aux différentes sections et composée d’un nombre de conseillers fixé par le règlement intérieur de la juridiction (L 1423-1 C. Trav.). La formation de référé qui statue dans les cas d’urgence peut ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse, prescrire des mesures conservatoires ou de remise en état dans le cas de dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite, ou encore accorder une provision au créancier dans le cas où son

droit n’est pas sérieusement contestable. Document 2 1. Compétence exclusive du conseil de Prud’hommes – Sa compétence matérielle – Identification des articles

correspondants

Le conseil est compétent pour connaître des litiges individuels du travail entre salariés et employeurs ou entre les salariés eux-mêmes (L 1411-1, 1411-3 C. Trav.). Sa compétence étant d’ordre public, il ne peut y être dérogé par une clause compromissoire ou une disposition du contrat de travail (L 1411-4 C. Trav.). Le litige doit être né à l’occasion de la relation de travail et avoir un caractère individuel. Cela comprend les licenciements, les sanctions disciplinaires, les salaires ou tous autres domaines se rapportant à l’exécution de la relation de travail. Si l’existence même d’un contrat de travail donne lieu à contestation, le conseil veillera à examiner la présence ou non

des éléments caractéristiques de la relation de travail. Ainsi la juridiction prud’homale n’est pas tenue par la qualification que les parties ont donné au contrat et peut, au regard de l’intention de celles-ci et des dispositions contractuelles, requalifier la nature de leur relation (Cass.soc. 19 décembre 2000). À ce titre, et bien que le contrat de travail ne soit pas formé, la compétence du conseil de prud’hommes est élargie aux contestations relatives aux discriminations prévues à l’article L1132-1 du code du travail. La cour de cassation a pu valablement sanctionner une cour d’appel rejetant la compétence de la juridiction prud’homale en matière de discrimination à l’embauche sous le seul motif que le contrat de travail n’était pas formé (Cass. soc. 20 décembre 2006). Sa compétence sera toujours exclusive en matière de promesse d’embauche (Cass. soc. 19 janvier 2005. Voir

sur ce point les éléments relatifs à la valeur et la portée juridique de la promesse d’embauche).

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2. Compétence territoriale du Conseil de Prud’hommes – Identification de l’article correspondant

Par principe, le conseil territorialement compétent est celui dans le ressort duquel est situé l’établissement où est effectué le travail Par exception, cette compétence peut être écartée pour certaines catégories de salariés dont l’exécution du travail est réalisée à leur domicile ou en dehors de tout établissement (L 1422-1 et R 1412-1 C. trav.). Enfin, le salarié dispose également de la faculté de saisir les conseils de prud’hommes du lieu de formation du contrat ou celui du lieu où l’employeur est établi. 3. Conseil de prud’hommes : juridiction élective ? - Principe paritaire et composition des bureaux de

conciliation et de jugement et leur fonction

La singularité du conseil de prud’hommes tient à sa composition en tant que juridiction élective et paritaire (L 1421-1 C. Trav.). Le tribunal de commerce est aussi une juridiction élective mais non paritaire. En effet, il se compose de juges élus pour une durée de 5 ans appelés les conseillers prud’homaux. Ils représentent de manière paritaire les salariés et les employeurs. Leur élection est établie à partir d’un collège d’électeur employeur et d’un collège d’électeurs salariés répondant aux critères prévus à l’article L 1441-16 du code du travail. Le conseiller salarié bénéficie d’un statut lui conférant des droits et des obligations. Des droits en matière d’absence pour l’exercice de ses fonctions (sans perte de rémunération) et de sa formation ainsi qu’une protection particulière contre le licenciement. Des devoirs aussi, puisqu’il peut être sanctionné pour les manquements fautifs dans l’exercice de

son mandat. 4. Le règlement d’un litige devant le conseil de prud’hommes est-il toujours contentieux ? Si non, quelles

possibilités sont offertes au justiciable

La loi du 6 août 2015 institue deux procédures amiables de règlement des litiges applicables aux conflits du travail. La convention de procédure participative Issue du droit civil, cette procédure est étendue aux litiges du travail. Elle consiste en une convention entre les parties

par laquelle ces dernières s’engagent à œuvrer conjointement et de bonne foi à la résolution amiable de leur différend. Nécessairement à durée déterminée, cette convention n’est possible que si aucune autre voie de droit –juge ou arbitre- n’a été engagée. La médiation conventionnelle Autre mode alternatif de règlement des litiges, la médiation conventionnelle résulte d’un accord des parties à rechercher une solution amiable à leur différend en ayant recours à un tiers –le médiateur- désigné par elles-mêmes ou le juge. 5. Le juge départiteur

En cas d’égalité de voix devant le bureau de jugement, un juge professionnel du tribunal de grande instance (juge départiteur) préside l’audience et les départage. L’affaire est alors renvoyée à une audience ultérieure qui doit, sous la présidence de ce juge, se tenir dans le mois du renvoi. 6. Délais de prescription des actions devant le conseil de prud’hommes ?

La loi de sécurisation de l’emploi a modifié les délais en matière d’action contentieuse devant le conseil de prud’hommes. Certains restent inchangés, comme le délai de 12 mois pour dénoncer une rupture conventionnelle ou celui de 6 mois

pour contester un solde de tout compte. Par contre, les actions portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrivent désormais par deux ans au lieu de cinq. La prescription commence à courir à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant d’exercer son droit. D’autre part, les actions portant sur le paiement ou la répétition du salaire se prescrivent par trois ans (5 auparavant). Document 3

1. Résumé des faits et de la procédure

M X... a été embauché par la société Nouvelle république du Centre Ouest le 1er

septembre 1989. Il s’est ensuite vu refuser un emploi de journaliste au service des sports. La société a finalement mis fin à leur relation contractuelle. M. X a saisi la juridiction prud’homale de Tours aux fins notamment d’indemnisation pour discrimination raciale. La cour d’appel d’Orléans, par arrêt du 8 décembre 2005, reconnaît la compétence de la juridiction prud’homale. La société a formé un pourvoi en cassation, rejeté par arrêt en date du 20 décembre 2006. 2. Problème de droit et solution de la cour de cassation

Le demandeur soutient l’incompétence du Conseil de prud’hommes en la matière puisqu’aucun contrat de travail n’a été formé. La cour de cassation rejette le pourvoi, considérant que sa compétence est élargie aux situations préalables à l’embauche, précisément en matière de discrimination.

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LES NOCES AQUATIQUES

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

L’inspection du travail : La mission de contrôle : procédure, prérogatives ; contestation, autres fonctions et obligations statutaires de l’inspecteur du travail

1. Droit d’entrée de l’inspecteur du travail

Le 20 mai N, M. Noces, inspecteur du travail, se rend au siège de la société. Peut-il librement pénétrer dans les locaux de la société Point Fort Règle de droit applicable

Les inspecteurs ont d’un droit d’entrée (Art L 8113-1 C. Trav.) dans toute entreprise et établissement dans lesquels sont

employés des personnes soumises à la législation du travail. La mise en œuvre de ce droit ne nécessite aucun avertissement préalable. Application de la règle aux faits

M. Noces peut librement et à tout moment se rendre dans l’entreprise. ?

2. Documents devant être tenus à sa disposition

À l’occasion d’un contrôle, l’inspecteur du travail dispose d’un droit de communication sur l’ensemble des livres, registres et documents obligatoires (le registre du personnel, les contrats de travail…). Ce droit s’étend à tout document de nature à caractériser une discrimination ou à établir l’existence de travail dissimulé (Art. l 8113-4 C. Trav.) et aux domaines du harcèlement moral et sexuel, de la santé et de la sécurité au travail.

3. Droit de visite

Souhaitant en savoir davantage sur la gestion des emplois précaires, M. Noces prévoit de rencontrer les délégués du personnel et les délégués syndicaux en se rendant dans les bureaux et les ateliers. Peut-il, sans autorisation du dirigeant, visiter les locaux et poser des questions aux salariés ? Règle de droit applicable

Le droit de visite consiste en la possibilité pour l’inspecteur de visiter l’intérieur des locaux dans lesquels les salariés travaillent ou ont accès. Une limite est fixée cependant à l’alinéa 3 de l’article 8113-1. En effet, lorsque les locaux de travail servent aussi à l’habitation, l’inspection des locaux ne peut se faire qu’avec l’assentiment des personnes concernées. Il peut aussi s’entretenir avec les élus du personnel ou tout salarié. La visite peut s’effectuer hors ou en présence des délégués du personnel. Application de la règle aux faits

M. Noces peut librement visiter l’ensemble des locaux de l’entreprise affectés à son activité.

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4- La lettre d’observation

N’ayant rien remarqué d’anormal, l’inspecteur du travail prévoit cependant de se rendre prochainement sur le chantier de démolition. Quel document M. Noces peut-il envoyer à l’entreprise ?

Règle de droit applicable

Prévue par aucun texte (sauf exception) la lettre d’observation est un écrit récapitulant les différents constats et relevés d’irrégularités enregistrés au cours du contrôle, un rappel de la loi, voire une simple opinion. En ce sens elle ne constitue pas un acte administratif susceptible d’un recours en justice. Fréquente dès lors que les textes n’imposent pas une mise en demeure, elle exige de l’employeur la régularisation des éventuelles anomalies constatées. Application de la règle de droit

M. Noces n’ayant constaté aucune irrégularité, il n’est pas tenu d’envoyer une lettre d’observation.

5. Les décisions de l’inspecteur du travail

Le 15 juin, il se rend sur le chantier de Mèze où les travaux ont commencé. Il s’agit de détruire un bâtiment des années 60 particulièrement important. M. Noces constate les situations suivantes :

- certains ouvriers ne portent pas de casque ; - plusieurs ouvriers n’ont aucun contrat de travail et sont en situation irrégulière ;

- l’époque de construction du bâtiment laisse présumer que certaines parties peuvent être en amiante ; - les revêtements de toiture sont amiante et aucun ouvrier ne dispose de protection adaptée.

Que peut faire l’inspecteur du travail face aux irrégularités constatées ? Règle de droit applicable

L’amende administrative (art. 8115-1 C.trav.) Depuis le 1

er juillet 2016, il est possible pour l’autorité administrative, sur rapport de l’inspecteur du travail, de prononcer

des amendes administratives à l’encontre de l’employeur lorsque des manquements sont constatés dans les domaines suivants :

- Les durées maximales de travail - Les repos - L’établissement d’un décompte de la durée du travail - Le SMIC et le minimum conventionnel - Les obligations de l'employeur relatives aux installations sanitaires, à la restauration et à l'hébergement - Les mesures relatives aux prescriptions techniques de protection durant l'exécution des travaux

Les amendes susceptibles d’être encourues vont de 2000,00 à 10000,00 euros par salarié concerné (le double en cas de récidive). Préalablement, l’employeur doit être informé et dispose du délai d’un mois pour contester la mesure. Une fois le délai purgé, l’autorité administrative peut prononcer l’amende. La Mise en demeure (Art. 4721-4; 4721-6 al 1 C. Trav.) Elle enjoint l’employeur de faire cesser les infractions constatées au cours du contrôle dans un délai qui ne peut être inférieur à 4 jours. Son caractère impératif ouvre un droit de recours au profit de l’employeur soit par la voie hiérarchique (auprès du directeur régional du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle), soit par la voie judiciaire lorsqu’il remet en cause la réalité d’un danger à l’occasion de la mise en demeure préalable à l’arrêt temporaire d’activité (Art. L 4723-1 C. Trav.). Elle peut être délivrée à titre d’injonction ou préalablement à procès verbal. Droit de prélèvement (Art. L 8113-3 C. Trav.) Complémentaire des autres prérogatives, le droit de prélèvement permet techniquement de réaliser toute analyse utile à l’accomplissement de son contrôle. Par exemple s’il s’agit de vérifier que les salariés ne sont pas en contact avec des

produits de nature à mettre leur santé en danger (amiante, mercure…).

Le procès-verbal (Art. L 4721-4, 4721-5 al 1 et 8113-7 C. Trav.) D’une particulière gravité, le procès verbal constate une infraction susceptible de recevoir une qualification pénale. Il est transmis au procureur de la république qui, en application du principe d’opportunité des poursuites, peut décider de poursuivre l’employeur ou de classer l’affaire sans suite. La DIRECCTE peut aussi proposer une transaction pénale

lorsque l’infraction retenue est une contravention ou un délit passible d’une peine d’emprisonnement de moins d’un an.

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La transaction n’est possible que pour les infractions entrant dans le champ d’application de la loi (art. 8114-4), elle doit être acceptée par l’employeur puis faire l’objet d’une homologation par le procureur de la République. Arrêt temporaire de travaux ou d’activité (Art. L 4721-8 al 1, 4731-1 C.trav.) Dans certains cas précis, lorsqu’il s’agit par exemple de soustraire les salariés à une situation dangereuse sur les chantiers du bâtiment et des travaux publics (risque de chute ou risque d’ensevelissement sur un chantier par exemple) ou d’une situation dangereuse résultant d’une exposition à une substance chimique cancérigène, mutagène ou toxique,

l’inspecteur du travail peut, sous son autorité, prescrire l’arrêt immédiat des travaux ou de l’activité. Celui-ci n’entraîne ni rupture ni suspension des contrats de travail, l’employeur devant maintenir la rémunération des salariés. La décision de l’inspecteur du travail peut faire l’objet d’un recours en référé devant la juridiction administrative. Règle de droit applicable

Certains ouvriers ne portent pas de casque. L’inspecteur du travail peut soit solliciter de l’autorité compétente une amende administrative, soit délivrer une mise en demeure, soit selon la dangerosité de la situation arrêter les travaux. Plusieurs ouvriers n’ont aucun contrat de travail et sont en situation irrégulière. L’inspecteur du travail peut dresser un

PV. L’époque de construction du bâtiment laisse présumer que certaines parties peuvent être en amiante. L’inspecteur du travail peut réaliser des prélèvements aux fins d’examen. Les revêtements de toiture sont en amiante et aucun ouvrier ne dispose de protection adaptée. L’inspecteur du travail doit arrêter le chantier.

II – QUESTION DE COURS 1. Autres fonctions de l’inspecteur du travail

1- Mission de contrôle De sa propre initiative ou à la suite d’une plainte de salariés, l’inspecteur du travail peut être amené à contrôler une entreprise sur tous sujets relatifs à l’application de la législation du travail, aux lois et règlements non codifiés ainsi qu’aux conventions et accords collectifs (Art. L. 8112-1 C. Trav ; Art 3 et 23 Conv. OIT. 81). À titre d’exemple il peut porter sur le fonctionnement des institutions représentatives du personnel, sur le respect de la réglementation relative à l’hygiène et la sécurité, sur le respect des dispositions de la convention collective ou encore sur

l’observation des prescriptions légales relatives aux salariés précaires. Cette mission première s’est étoffée d’un rôle de conciliation et de médiateur qui s’exerce au coté des attributions générales que la loi lui confère. 2- Les autres compétences de l’inspecteur du travail (Décret 20 août 2003, Art 3 II) a- Rôle de conseil L’inspecteur du travail peut conseiller l’employeur ou le salarié dans l’interprétation de la législation, et sur toute mesure envisagée par l’employeur.

b- Rôle de médiateur L’inspecteur du travail peut être appelé préventivement en tant que médiateur à l’occasion d’un conflit collectif. Il peut à cet effet œuvrer pour toute conciliation des parties. 2. Les obligations de l’inspecteur du travail dans l’exercice de ses fonctions

L’inspecteur du travail doit, dans l’exécution de sa mission, faire preuve d’impartialité, de confidentialité des plaintes, de discrétion vis-à-vis des acteurs de l’entreprise, et de respect du secret professionnel (interdiction de révéler des secrets de fabrication). Ses missions s’effectuent dans le respect du code de déontologie nouvellement fixé par décret du 12 avril 2017. 3. Contestation des décisions de l’inspecteur du travail

Les mesures de l’employeur, si elles ont la qualité de décision, peuvent être contestées par la voie hiérarchique ou devant les juridictions administratives.

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LE DOUBLE REGISTRE

CONNAISSANCES ASSOCIÉES

Le contrôle URSSAF : Le rescrit social : objet, garantie et limite ; la charte du cotisant contrôlé, la procédure et l’issue du contrôle

1. Le rescrit social

Institué par la loi du 9 décembre 2004, le rescrit social permet à un cotisant, en qualité d’employeur, de solliciter l’URSSAF afin qu’elle prenne position sur sa situation à l’égard :

- des avantages en nature et des frais professionnels ; - des contributions patronales dues en matière de retraite supplémentaire et de prévoyance complémentaire ; - des exonérations attachées aux zones franches urbaines, aux zones de revitalisation rurale, et zone de

revitalisation urbaine.

2. Garanties accordées au cotisant et leurs limites

La demande est formulée par le cotisant ou le futur cotisant auprès de l’URSSAF compétente. Elle précise l’identité de l’employeur (nom et numéro d’immatriculation) et comporte un descriptif de l’organisation et du fonctionnement de l’entreprise (activité, localisation, nombre d’établissement) ainsi qu’une présentation exhaustive de la situation « de fait et des pratiques sur lesquelles la décision est demandée ». Tous documents nécessaires à l’étude de

la recevabilité de la demande et à l’examen du dossier doivent être joints aux prétentions de l’employeur. Si dans le délai de 30 jours l’organisme de recouvrement n’a pas sollicité de pièces complémentaires au cotisant, le dossier est considéré comme complet et doit être instruit dans le délai de 4 mois à compter de la remise du dossier ou de la date à laquelle il peut être considéré complet. À défaut de réponse dans les délais prescrits, l’organisme de recouvrement ne pourra effectuer de redressement sur les aspects visés dans le rescrit.

La réponse donnée lie l’institution qui l’a délivrée. C’est-à-dire qu’elle est injustifiée à prononcer un redressement de cotisations et contributions sociales fondé sur une analyse des textes différente de celle fournie dans le rescrit. Néanmoins, cela ne vaut que pour l’organisme ayant donné son interprétation et pour le seul employeur l’ayant sollicité. 3. Remise de la charte au cotisant

Prévue à l’article R 243- 59 du code la sécurité sociale (par décret du 11 avril 2007), « la charte du cotisant contrôlé » doit être remise obligatoirement dès le début du contrôle. En effet, l’avis de passage signifiant l’engagement de la procédure informe le cotisant que ladite charte lui sera remise dès le commencement du contrôle. La charte l’informe de manière didactique du déroulement des opérations, de ses modalités (sur pièce ou dans les locaux de l’entreprise), des personnes chargées de l’effectuer, ainsi que de son issue et des voies de recours ouvertes au cotisant. Bien que prévue par les textes, l’absence de remise de la charte n’est pas sanctionnée, mais on peut penser que son absence constitue une violation des droits du cotisant (défaut d’information) susceptible de remettre en cause le contrôle.

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4. Contrôles dont il est fait état

Le contrôle sur place qui se déroule dans les locaux de l’entreprise La procédure débute par un avis de contrôle délivré par lettre recommandée avec avis de réception (Art R 243-59 C.SS). Il indique la date de la vérification, la liste des documents et supports qu’il conviendra de tenir à disposition de l’inspecteur et la période sur laquelle va porter la vérification.

Les informations contenues dans le courrier lient l’administration qui ne peut étendre ses investigations à des domaines étrangers à ceux visés dans l’avis de passage. Le contrôle peut ensuite commencer après expiration d’un délai de 15 jours. Le contrôle se poursuit par l’examen sur place des documents, sociaux, juridiques comptables et fiscaux. Il appartient à l’employeur, tenu de recevoir l’inspecteur du recouvrement, de fournir les documents nécessaires à la réalisation des investigations au regard des éléments fournis dans l’avis. Peu importe que les documents soient détenus par le comité d’entreprise dans la mesure où le contrôle porte sur les rémunérations des salariés, y compris celles versées par l’intermédiaire du comité. Dès lors l’avis adressé au seul cotisant est suffisant pour procéder au contrôle et justifie la

production des pièces détenues par le tiers (par exemple le CE comme personne morale, Cass. soc. 20 juin 2007). L’inspecteur peut recourir à l’audition des personnes rémunérées par l’entreprise, ce qui comprend non seulement l’employeur, mais aussi les salariés qu’ils soient en activité ou non. Durant toute la procédure, l’employeur est en droit de se faire assister par le conseil de son choix. Le contrôle sur pièces qui se déroule dans les locaux de l’organisme de recouvrement Le contrôle ne nécessite pas la présence de l’employeur. Le contrôle est effectué à partir des pièces dont l’administration dispose. Le contrôle sur pièces offre la particularité de se dérouler non dans les locaux de l’entreprise, mais dans ceux

de l’URSSAF. Il concerne les employeurs et travailleurs indépendants occupant onze salariés au plus au 31 décembre de l’année qui précède le contrôle. Le contrôle doit être précédé d’un avis informant le cotisant de ses droits et lui enjoignant de fournir les informations et documents nécessaires au contrôle. Il doit garantir les mêmes droits que le contrôle sur place.

5. Procédure et issue du contrôle opéré par l’URSSAF

L’issue du contrôle donne lieu à la procédure suivante : 1- La lettre d’observation (R 243- 59 III) Quelle que soit l’issue du contrôle (redressement ou non), la clôture des opérations est constatée par l’envoi d’une lettre d’observation à l’intention de l’employeur. Elle récapitule les éléments du contrôle et dresse un bilan de la vérification effectuée. Elle peut le cas échéant faire état du redressement envisagé.

2- Réponse de l’employeur (R 243- 59 III) Le cotisant dispose d’un délai de 30 jours pour répondre aux décisions et observations de l’inspecteur du recouvrement. Il peut accepter ou rejeter partiellement ou en totalité le redressement envisagé si tel est le cas. Dans cette hypothèse, il doit fournir toutes pièces susceptibles d’étayer son argumentation. À noter qu’aucune obligation de réponse ne pèse sur l’employeur et son absence ne vaut pas acceptation par celui-ci des dispositions figurant dans la lettre d’observation.

3- Information de l’autorité hiérarchique (R 243- 59 IV) Au terme du délai de 30 jours, l’inspecteur du recouvrement transmet à l’URSSAF dont il dépend le procès verbal de contrôle accompagné des observations de l’employeur s’il y a lieu. 4- Mise en recouvrement et voies de recours L’URSSAF peut mettre en recouvrement les sommes faisant l’objet du redressement si elle l’estime justifié (l’absence d’observations de sa part vaut acceptation tacite des pratiques contrôlées). Elle l’employeur de payer les sommes dues par lettre recommandée avec avis de réception et à défaut de réponse, procède au recouvrement forcé (contrainte).

Le cotisant peut s’opposer aux décisions de l’URSSAF et saisir le Tribunal des affaires de la sécurité sociale (TASS).

ISBN : 978-2-35765-694-9

Imprimé en France en août 2017 par Impremium, Marseille

Dépôt légal : août 2017