lettre culture science n°13

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une publication de l’Université Nice Sophia Antipolis la lettre Culture Science 13 Juin 2014 unice.fr Martine Regert : « La fouille archéologique, une véritable école scientifique » Un livre, la double-page hebdomadaire d’un magazine, une fiche de pré-rentrée glissée sous les doigts d’une collégienne. Les souvenirs, partiels et incertains, se mêlent. Images de pyramides, récits de fouilles, évocations d’un temps déporté dans les ouvrages spécialisés. Martine Regert a 9 ans, peut-être 12. Elle ressent le besoin impérieux de comprendre « pourquoi, comment, l’humanité a développé des comportements, élaboré des matériaux, évolué en sociétés ». Quand elle doit se prononcer sur un futur métier, elle répond invariablement « archéologue ». Originaire de Bayonne, l’adolescente pragmatique interroge même Haroun Tazieff, de passage à Biarritz. « Je dois avoir un autographe quelque part », se souvient Martine Regert. « Je lui ai demandé s’il me conseillait une formation plutôt de terrain ou théorique ». Elle ne s’imagine pas, alors, aventurière, n’espère pas des découvertes spectaculaires, mais très tôt son intuition la mène sur les chantiers. À quinze ans, elle pose un genou dans la grotte du Phare. À son inscription à l’Université de Bordeaux, elle aura déjà trois ou quatre étés de fouilles derrière elle. « Je me suis formée très tôt à la recherche, entourée de professionnels, d’étudiants, d’amateurs. Grâce à cela, j’ai toujours eu en tête le niveau de la concurrence, la difficulté à trouver un poste », se remémore l’actuelle directrice du laboratoire Cultures et Environnements Préhistoire, Antiquité, Moyen-Âge (CNRS- UNS). Pour cette raison, elle se lance dans une formation universitaire en Physique- Chimie, option géologie, puis passe le CAPES et l’Agrégation de Chimie, en 1991. « Au cas où. Mais je garde un très bon souvenir de mon année d’enseignement en Lycée. Je ne pense pas que j’aurais été malheureuse», remarque la chercheuse. Simple pressentiment. Car Martine Regert demande très vite une mise à disposition, afin de suivre un Diplôme d’Études Approfondies en sciences archéologiques. « Enfin, je mêlais la théorie, avec la chimie, et le terrain », souligne- t-elle. La suite se passe sans heurts. Après un post-doctorat en Angleterre, elle obtient un poste dès son retour en France. Elle pratique « avec ses tripes » et surtout avec « une grande curiosité, un raisonnement scientifique ». « Je suis sans doute très matérialiste », sourit-elle. « Mais soyons honnêtes, sur le terrain nous avons rarement la sensation de croiser l’humanité. Nous analysons des tessons, des cailloux, des céramiques. Il y a peu de moments d’émotion », prévient la chercheuse. Pourtant, évoquer les chantiers suscite en elle beaucoup de plaisir. Martine Regert se remémore des séminaires nocturnes, passés dans la broussaille, à la lumière d’un groupe électrogène. « La fouille constitue une véritable école scientifique, où s’imprégner de toutes les dimensions et où réaliser un véritable travail collaboratif », explique l’archéologue. Elle évoque les conditions de vie difficiles, les moments privilégiés pour s’isoler, la façon dont le téléphone mobile a changé cette paisible ambiance.

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une publication de l'Université Nice Sophia Antipolis

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Page 1: Lettre Culture science N°13

une publication de l’Université Nice Sophia Antipolis

la lettreCulture Science 13

Juin 2014

unice.fr

Martine Regert : « La fouille archéologique, une véritable école scientifi que »

Un livre, la double-page hebdomadaire d’un magazine, une fi che de pré-rentrée glissée sous les doigts d’une collégienne. Les souvenirs, partiels et incertains, se mêlent. Images de pyramides, récits de fouilles, évocations d’un temps déporté dans les ouvrages spécialisés. Martine Regert a 9 ans, peut-être 12. Elle ressent le besoin impérieux de comprendre « pourquoi, comment, l’humanité a développé des comportements, élaboré des matériaux, évolué en sociétés ». Quand elle doit se prononcer sur un futur métier, elle répond invariablement « archéologue ». Originaire de Bayonne, l’adolescente pragmatique interroge même Haroun Tazieff, de passage à Biarritz. « Je dois avoir un autographe quelque part », se souvient Martine Regert. « Je lui ai demandé s’il me conseillait une formation plutôt de terrain ou théorique ». Elle ne s’imagine pas, alors, aventurière, n’espère pas des découvertes spectaculaires, mais très tôt son intuition la mène sur les chantiers. À quinze ans, elle pose un genou dans la grotte du Phare. À son

inscription à l’Université de Bordeaux, elle aura déjà trois ou quatre étés de fouilles derrière elle.

« Je me suis formée très tôt à la recherche, entourée de professionnels, d’étudiants, d’amateurs. Grâce à cela, j’ai toujours eu en tête le niveau de la concurrence, la diffi culté à trouver un poste », se remémore l’actuelle directrice du laboratoire Cultures et Environnements Préhistoire, Antiquité, Moyen-Âge (CNRS-UNS). Pour cette raison, elle se lance dans une formation universitaire en Physique-Chimie, option géologie, puis passe le CAPES et l’Agrégation de Chimie, en 1991. « Au cas où. Mais je garde un très bon souvenir de mon année d’enseignement en Lycée. Je ne pense pas que j’aurais été malheureuse», remarque la chercheuse. Simple pressentiment. Car Martine Regert demande très vite une mise à disposition, afi n de suivre un Diplôme d’Études Approfondies en sciences archéologiques. « Enfi n, je mêlais la théorie, avec la chimie, et le terrain », souligne-t-elle. La suite se passe sans heurts. Après un

post-doctorat en Angleterre, elle obtient un poste dès son retour en France.

Elle pratique « avec ses tripes » et surtout avec « une grande curiosité, un raisonnement scientifi que ». « Je suis sans doute très matérialiste », sourit-elle. « Mais soyons honnêtes, sur le terrain nous avons rarement la sensation de croiser l’humanité. Nous analysons des tessons, des cailloux, des céramiques. Il y a peu de moments d’émotion », prévient la chercheuse. Pourtant, évoquer les chantiers suscite en elle beaucoup de plaisir. Martine Regert se remémore des séminaires nocturnes, passés dans la broussaille, à la lumière d’un groupe électrogène. « La fouille constitue une véritable école scientifi que, où s’imprégner de toutes les dimensions et où réaliser un véritable travail collaboratif », explique l’archéologue. Elle évoque les conditions de vie diffi ciles, les moments privilégiés pour s’isoler, la façon dont le téléphone mobile a changé cette paisible ambiance.

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Se former à l’UNSLa spécialité Préhistoire, Paléoenvironnement et Archéosciences (PPA) s’inscrit au sein de deux masters : (i) Master Sciences de la Terre et de l’Environnement (UFR Sciences) (ii) Master Histoire (UFR LASH), où elle s’articule avec la spécialité Histoire et Archéologie des Mondes Anciens et Médiévaux HAMAM.Cette formation s’appuie sur les ressources et une partie des équipes du laboratoire Cultures, Environnement, Préhistoire, Antiquité, Moyen-Âge (CEPAM, UMR 7264) et du laboratoire Géoazur (UMR 7329)

en savoir + : http://www-cepam.unice.fr/master_ppa/et http://www-cepam.unice.fr/master_hamam/

Le CEPAM est également engagé dans la formation continue, par exemple en tracéologie et en archéobiologie, mais aussi dans l’utilisation des technologies. Martine Regert a monté un laboratoire de préparation d’échantillons. Les analyses séparatives sont réalisées à l’Institut de Chimie de Nice, à Valrose, ou à Géoazur pour la caractérisation géologique des matériaux et la datation. Des collaborations existent également avec le CEMEF (Centre de Mise en Forme des Matériaux) de MINES Paris Tech, à Sophia Antipolis, et avec d’autres unités de recherche et à l’étranger, en

particulier en Italie, dont les universités sont des partenaires privilégiés. Enfi n, le CEPAM appartient au réseau CAIRN (Compétences

Archéométriques Interdisciplinaires Réseau National) de la Mission à l’Interdisciplinarité du CNRS.

en savoir + : http://archeometrie.cnrs.fr

Les techniques évoluent, la formation aussi

Mais les nouvelles technologies ont commencé à modifi er le métier d’archéologue dès les années 1960. Car Martine Regert pratique des analyses biomoléculaires. Elle analyse les substances naturelles déposées sur les vestiges recueillis, comme les résines et les goudrons végétaux, les produits laitiers, les graisses animales ou encore les produits de la ruche. Or, la spectroscopie infrarouge, dont l’utilisation industrielle remonte à 1962, permet, sans détériorer le matériau, de caractériser ses composants. Le rayonnement énergétique dirigé sur un résidu livre en effet un spectre, sorte d’équivalent à une empreinte digitale. Selon la composition d’une substance et la nature des liaisons chimiques, des bandes d’absorption correspondant aux vibrations moléculaires des constituants du matériau peuvent être enregistrées. En comparant les courbes obtenues après exposition à l’infrarouge à des profi ls « témoins » de résidus connus, éventuellement attendus, les archéologues découvrent ainsi les us et coutumes de nos ancêtres.

Les techniques séparatives comme la chromatographie suivent ensuite, dans les années 70 à 90, très vite couplées à la spectrométrie de masse. Elles permettent, en laboratoire, de déterminer la nature des assemblages moléculaires conservés dans des résidus sur des outils en silex ou au fond de récipients en céramique, ouvrant l’accès à une gamme variée de substances naturelles, exploitées par les populations du passé. En complément, des approches isotopiques sont également développées de nos jours. « À partir de là, se créent alors de véritables groupes de recherche autour d’un même sujet archéologique », souligne Martine Regert. Ainsi, un chantier convoque désormais tous les champs disciplinaires. Géologues, micromorphologues, archéobotanistes, archéozoologues, paléontologues, spécialistes des céramiques s’y croisent et s’y succèdent au gré des campagnes. « Grâce à l’expertise de chacun, nous sommes en mesure d’étudier les monuments, les images, les textes, le contexte environnemental, de l’ADN végétal aux paysages », développe la directrice de recherche.Toutefois, selon elle, le développement des hyperspécialisations sur le terrain peut également présenter un risque.

«Celui d’assister à une rupture d’échelle entre les personnes focalisées sur l’infi niment petit ou au contraire sur l’infi niment grand. Cela peut mener à des biais interprétatifs

très importants. Il faut savoir distinguer deux plantes sous le microscope, mais aussi lorsqu’on les tient dans une main », prévient Martine Regert. L’avenir est à la combinaison des approches complémentaires : par exemple pour appréhender les productions céramiques, réaliser l’étude typo-technologique et fonctionnelle des poteries conjointement à la recherche d’ADN, la détermination de la composition moléculaire des restes organiques infi mes, la mesure des rapports isotopiques de certains éléments stables et l’identifi cation des micro-restes organiques (phytolithes, etc.). «C’est ainsi que l’on exploitera au mieux la globalité du potentiel informatif de vestiges parfois invisibles à l’œil nu», estime la directrice du CEPAM.

Le laboratoire propose depuis 2 ans, dans cet état d’esprit, un Master Préhistoire, Paléoenvironnement et Archéosciences (PPA), en complément d’un master déjà existant,

HAMAM (Histoire et Archéologie des Mondes anciens et médiévaux). « Il apparaît comme une niche, sur Nice », affi rme la chercheuse. « Nous mettons actuellement à niveau, là où il y a des lacunes, une bonne dizaine d’étudiants par promotion », estime-t-elle. De son côté, Martine Regert a dû renoncer aux fouilles. « Mais je continue d’aller sur le terrain, pour m’imprégner. D’ailleurs je pars en Russie à la fi n du mois », raconte-t-elle. En attendant, elle anime le programme de recherche Exsuarch, fi nancé par l’ANR. Arrivé dans sa phase fi nale, il a d’ores et déjà livré des résultats novateurs et inattendus, sur les savoir-faire et les stratégies d’approvisionnement spécifi ques de matières végétales, exploitées pour leurs propriétés adhésives et imperméabilisantes au Néolithique, en Europe de l’ouest et sur le pourtour du bassin méditerranéen.

Laurie CHIARA

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Oeuvre originale de Pierre Coullet, conçue et réalisée pour la Cité de la Géométrie (2012)

(1) une partie de l’oeuvre d’Edmond Vernassa est exposée au sein de l’Université, sur le site Saint-Jean d’Angély1.

Des anticorps à lʼessai pour domestiquer le cancer du rein

Il s’agit d’une grande bâtisse comme tant d’autres. Il faut se tordre le cou, laisser le regard courir le long des murs lisses pour en discerner la toiture. En bas, une cour bétonnée, des eucalyptus, de longs blocs arqués en guise de bancs. Assis sur l’un deux, le physicien Pierre Coullet trace dans l’air des contours à main levée. « Le niveau zéro du bâtiment principal, avec le préau, introduira l’association entre art, géométrie et design », décrit-il. Professeur des Universités, spécialiste des systèmes dynamiques, il a créé l’Institut Non Linéaire de Nice, à Sophia Antipolis et le premier service de culture scientifi que de l’Université. Il avait entamé, dès 2009, la création d’un « conservatoire des idées », devenu plus tard « cité de la géométrie », dans le Grand Château de Valrose. Des objets devaient témoigner de l’histoire des sciences méditerranéennes. « À un moment, je me suis intéressé à l’origine de ma discipline, donc au mouvement, à la physique newtonienne. Or, en lisant, je me suis aperçu que tout cela était décrit déjà dans le langage de la géométrie d’Euclide », raconte Pierre Coullet. Il imagine ainsi un espace à la façon d’un musée, où chacune des oeuvres propose une double lecture. Objets expérimentaux, elles permettent de redécouvrir des phénomènes naturels. Créations de design, elles s’offrent plus simplement au regard. Or, désormais, l’Université a choisi, en partenariat avec le Rectorat, de déplacer la Cité de la Géométrie dans les locaux du Lycée des sciences et des technologies Les Eucalyptus, situé à Nice-Ouest. « À Valrose, nous avions développé un prototype. Ici, nous installons un projet mature », affi rme le physicien. Car au fi l des ans, découvertes et rencontres ont enrichi l’esquisse. Sur le mouvement, Pierre Coullet comprend par exemple que Newton « qui reste, avec Archimède, un des plus grands mathématiciens de tous les temps », s’inspire largement de Robert Hooke, « expérimentateur de génie à la Royal Society de Londres».

Pas de technique sans géométrie« Malheureusement, le révisionnisme est passé par là ! J’ai alors eu comme obsession de reconstituer cette histoire », reconnaît le Professeur

des Universités. Ce à quoi il s’attèle, aujourd’hui encore, avec Roshdi Rashed, mathématicien, philosophe et historien des sciences. Tous deux remontent le temps, à la rencontre de savants arabes, comme Al Farisi, Alhazen, Ibn Sahl, posent un pied en Grèce, s’arrêtent là, « aux fondements », avec Archimède. « Autant, certains des objets exposés ont formellement existé, autant, lorsque nous sommes confrontés à des textes non illustrés, il faut inventer. Mais il n’y a pas de technique sans géométrie », raconte Pierre Coullet. Et depuis sa rencontre avec le plasticien Edmond Vernassa, décédé en 2010, le physicien préfère, pour ses modèles, le plexiglas (autrement appelé altuglas). « Edmond, sans le savoir, avec une intuition exceptionnelle, avait représenté dans ce matériau des phénomènes physiques liés au mouvement, aux déformations, à la lumière. Je pense en particulier à ses caustiques, à ses refl ets (1) », révèle le chercheur. Conquis et en hommage à son ami, il poursuit donc son entreprise. Il reconstitue « un patrimoine des fi gures géométriques » à chacun des étages du Lycée des Eucalyptus. Au premier, les fondamentaux, avec la géométrie d’Euclide. Des cônes noirs où fi gurer le mouvement des planètes, des objets fi laires. Au second, les équilibres d’Archimède, avec les balances, les corps fl ottants. Au-dessus, la lumière. Enfi n, le mouvement, jusqu’à Newton, avec des pendules, des plans inclinés. « Une quinzaine de savants, en utilisant une fi gure géométrique marquante, par exemple le cercle, a ainsi décrit un phénomène naturel. Je veux reconstituer ce patrimoine scientifi que culturel », défend Pierre Coullet. Mais dans les couloirs, il ne place rien d’autre que ses objets. Les explications se trouveront au moyen d’une série de livres numériques, accessibles au moins selon trois niveaux distincts : collège, lycée, enseignement supérieur. « Ils existent, mais je dois maintenant trouver une personne pour les développer sous java script », souligne le physicien. Avant de rendre public l’accès à la cité de la géométrie, il faudra également familiariser de jeunes enseignants en formation à l’ESPE (École Supérieure du Professorat et de l’Éducation) au contenu et à la médiation du site.

Un patrimoine des fi gures géométriques au Lycée des Eucalyptus

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La lettre Culture Science

Sciences publiques

L’AGENDA

Les conférences du Centre d’Analyse Zététique (CAZ)Espace Associations Garibaldi, par le Pr. Henri BrochLe vendredi 20 juin, 18h30, : « Les manifestations surnaturelles et

miraculeuses »https://www.facebook.com/pages/Centre-dAnalyse-Zététique/189664414417284

Ma thèse en 180 secondesUn chronomètre virtuel affi che, sur grand écran, 180 secondes. Pour la première fois sur la Côte d’Azur, les étudiants en thèse de l’Université Nice Sophia Antipolis concourent pour présenter leur sujet de recherche de la façon la plus séduisante et intelligible possible. Après 18 heures de formation, il leur reste à affronter la salle du grand château de Valrose, et à convaincre en trois minutes, avec un seul visuel en soutien, un jury assis en première ligne. Pour les mettre à l’aise, le responsable de communication de la délégation du CNRS s’improvise volontiers chauffeur de salle. 17 candidats se succèdent ainsi sur la scène du théâtre. Le trac garde parfois les mots captifs, gestes et petits pas délient les langues.

À l’issue de leur préparation, la plupart ont choisi de « raconter une histoire » à l’auditoire, à renfort de comparaisons « parlantes ». Les prestations prennent une tournure composée. Les concurrents hésitent à s’adresser directement au public ou à parler vraiment de leur sujet. À une époque où tout un chacun accède à l’information depuis un simple téléphone portable, comment trouver la juste mesure entre expliciter un intitulé de thèse et amener un auditoire à suivre, même 180 secondes, une démarche scientifi que? L’exercice mérite d’y réfl échir. Mais pour ce premier tour, les trois lauréats sont Matthias Mimault (OPALE - INRIA), Stéphanie Giraud (LAPCOS) et Eloïse Grasset (IRCAN). Cette dernière remporte la première place du concours azuréen et représentera également la région PACA lors de la fi nale nationale à Lyon, le 10 juin.

Lors de son intervention, les cellules se transforment en citoyens, le cancer en un gropuscule hors-la-loi.Cantonnés en zone rebelle, les indésirables cherchent à s’étendre et à contaminer d’autres territoires pour former des métastases. « À votre avis, que ferait un hors-la-loi pour s’évader de prison ? Il ferait appel à des complices ! », explique Eloïse Grasset,

manifestement une des candidates les plus à l’aise dans l’exercice.

Les cellules cancéreuses envoient ainsi des signaux à leur entourage, afi n d’en faire leurs associés. « Et quels meilleurs candidats que les fi broblastes, qui ne sont autres que les architectes de cette prison ? », poursuit l’étudiante en biologie. Ces nouveaux alliés creusent alors des tunnels permettant aux cellules cancéreuses de s’échapper... « Et l’objectif de mes 3 ans de thèse est de bloquer cette évasion ! », affi rme Eloïse Grasset.

La seconde partie de sa présentation consiste alors à raconter comment. « Concrètement, je fabrique un gel contenant les complices de l’évasion. Puis je dépose sur ce gel les cellules cancéreuses. En absence de complices, ces dernières restent bloquées à la surface du gel, mais en leur présence elles pénètrent à l’intérieur grâce aux tunnels. Pour empêcher leur évasion, je dispose de 400 molécules, que je mets directement, une par une sur mes cellules, on appelle cela un criblage ».Ce système de culture, susceptible de mimer

ce qui se passe dans notre corps, est dit « organotypique en 3D ».

Stéphanie Giraud, elle, travaille sur l’accessibilité des interfaces informatiques riches pour les défi cients visuels. Elle a donc choisi de mimer une voix d’ordinateur mise en jeu dans le guidage des personnes handicapées. Une façon explicite d’illustrer les problèmes rencontrés et les solutions envisagées. « J’analyse les raisons de la fatigue mentale des utilisateurs non-voyants lors de leur navigation web avec un lecteur d’écran. Je propose alors une nouvelle façon de concevoir les sites Internet, diminuant cette fatigue cognitive grâce à une solution technique qui permet d’atteindre directement l’information recherchée pour une navigation plus rapide », résume-t-elle.

Matthias Mimault, enfi n, synthétise ainsi son travail : « Partant du même principe de conservation de la masse, la mécanique des fl uides peut expliquer l’apparition de bouchons dans une foule en déplacement. Il s’agit d’étudier les grands mouvements complexes générés par des comportements individuels simples ».

Exposition Science-Fictionl’artiste Didier Cottier expose ses oeuvres dans le Fond-de-Scène du Grand Château, à Valrose.L’exposition se tiendra du 11 au 25 juin 2014, du lundi au vendredi de 13h à 18h en présence de l’artiste.