les jeunes et le suicide (partie 1)

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  • 7/29/2019 Les jeunes et le suicide (partie 1)

    1/1

    Socit

    12

    No 116 21 AVRIL 2012

    QUAND UN jeune enarrive au suicide, cest quilnarrive plus grer , observeMala Bonomally, prsidente de

    Befrienders. En se suicidant, ilne veut pas se tuer, il veut tuerson problme .

    Avec un quatrime suicide,cette semaine depuis le dbut delanne celui dun mineuron est en droit de se demander sile recul de lge du suicide est unphnomne nouveau, si lasouffrance frappe ce point la

    jeunesse mauricienne ou silsagit dun effet de mode, voireune turpitude.

    Les spcialistes saccordent dire que les rcents cas de suicidechez les jeunes interpellent .

    Nicolas Soopramanien,psychologue clinicien, estimeque cest un signal d'alerteinquitant pour la socit au senslarge. Corinne Faustin, psycho-criminologue, rappelle toutefoisque le suicide chez les jeunesnest pas un phnomne rcent,mais quil est rest longtempstabou. Le suicide chezladolescent provoquegnralement des ractions derefus et dincrdulit chezladulte, pour qui il peut paratreimpensable quun jeune - celuiqui symbolise lespoir, lavenir -

    puisse faire le choix conscient demettre fin ses jours. Le neuropsychiatre franais

    Boris Cyrulnik, dans un rapportofficiel en date du 29 septembre2003 (Quand un enfant sedonne la mort , observait que lerecul de lge du suicide esttroitement li la maturationde plus en plus prcoce desenfants.

    Le jeune a un rapportspcifique avec la mort, souligneCorinne Faustin, un rapportqui sera diffrent de celui deladulte ou de lenfant . Elle

    souligne dailleurs limportancedes suicides dadolescents, de la contagion du passage lacte . Le suicide chez certains jeunesest un moyen de faire part deleur souffrance, dattirerl'attention sur leur manqued'affection , explique NicolasSoopramanien, Certains vontmme utiliser les mdias pourfaire parler d'eux afin de mourirdans la dignit. Ils se donnent la

    mort par des moyens qu'ilsconsidrent hroques.

    Cest justement pour cela queMala Bonomally, prsidente deBefrienders, attire lattention sur

    les dangers dune trop grandemdiatisation : Quand la presseest en train de publier ces cas desuicides, avec force dtails, il y ades jeunes qui suivent cela et quiont tendance sidentifier cescas. Cela leur donne des idessur la faon de procder, surtoutque les jeunes ont souvent lesmmes types de problmes .

    Do galement la fascinationpour des thmes gothiques ou

    des personnages comme MarylinManson: Les jeunes onttendance penser quils sontimmortels. Mais vu quils sontdans une phase de vulnrabilit

    ils sont trs influenables ,explique Vijay Ramanjooloo,psychologue clinicien, sils ontun sentiment de mal-tre et silsvivent dans un environnementmalsain, ils auront tendance sidentifier des thmesmorbides qui parlent desouffrance ou dagressivit et vouloir repousser les limites .Quant aux pratiques commelautomutilation ou le jeu du

    foulard, Vijay Ramanjoolooestime que ce ne sont pas desphnomnes nouveaux, ce sontseulement les formes qui ont

    chang .Ladolescence est dj en soi,une priode de crise , rappelleCorinne Faustin, ce terme tant comprendre comme unprocessus qui stend sur unepriode plus ou moins longue etqui comporte des changementsparfois trs difficiles vivre parladolescent : celui-ci est face linconnu, limprvu. Il a du mal bouger de sa place denfantpour rejoindre lunivers desadultes .

    Cest une priode de remiseen question, notamment de

    l'identit sexuelle, de l'imagecorporelle, etc., ajoute NicolasSoopramanien, qui souligne quecertains auront beaucoup de mal surmonter cette priode et cesinterrogations, surtout silssubissent la pression des parentsou des pairs. Cela peut tre unegrande souffrance d'tre traitd'obse ou homosexuel par sesamis , souligne le psychologue.

    Quant aux parents quipoussent leur enfant toujourstre meilleur que les autres,Nicolas Soopramanien est davisque cela ne vhicule pas

    forcment les bonnes valeurs.C'est dgradant pour un jeunede lui dire qu'il n'est pas commeles autres ou qu'il ne russit pascomme les autres.

    Dautant que les pressions nesont pas vcues de la mmefaon chez les jeunes que chez lesadultes : Les adolescents viventdes pressions ou des conflitsdont on ne souponne pasl'impact dans leur viequotidienne, explique lepsychologue clinicien.

    Nicolas Soopramanien estformel ce sujet : Quand on se

    met l'preuve, c'est dj unetentative de suicide. Faire leschoses l'extrme c'est unsuicide cach.

    Tous les spcialistes insistentdonc sur limportance dtreattentif aux signes avant-coureurs du suicide. Un actesuicidaire est gnralementprcd dun changementd'attitude ou de comportementqui devrait alerter lentourage

    immdiat du candidat ausuicide. Il faut savoir dcoder cessignes , explique NicolasSoopramanien.

    Mala Bonomally rapporteainsi le cas dun adolescent quisest suicid : Ce jeune hommeadorait sa musique et ses CD.Mais un jour, il a commenc les distribuer ses copains.Personne na compris que ctaitun signe. Ils taient tous tropcontents de recevoir des CD encadeau .

    La prsidente de Befrienderssouligne que lide de se suicider

    ne vient pas du jour aulendemain.Le rapport du MIH souligne

    galement, quunenvironnement social marqupar la violence et la dlinquanceest un facteur dcisif de la haussedes cas de suicide. Ce rapportidentifiait dj, en 2003, lesuicide comme un problme desant publique . Il est doncessentiel de mettre en place desmcanismes de prvention auniveau des familles et de lasocit. Tout le monde devraittre form. Dans les

    tablissements scolaires, ce typede formation devrait tredispens tout le personnel,enseignant et non-enseignant ,martle Nicolas Soupramanien.

    Il souligne notammentlimportance davoir unprotocole pour rassurer lesparents quand une situation dedpression est repre . Il estimeaussi quil faut revoir les valeursfamiliales et crer de lespaceau dialogue et la bonneentente, car il est primordialdtre lcoute et de faire sentir la personne quelle retient

    lattention, est aime etaccepte .Pas si facile, car comme

    lexplique Vijay Ramanjooloo,mme si les parents pensent tre lcoute des jeunes, limplication affective agitcomme une barrire. Cest--dire quon ncoute pas vraimentle problme de lenfant, on estplutt press de le saturer de nosconseils. Les parents onttendance couter avec labouche et pas avec les oreilles, cequi est tout fait normaldailleurs. Cest pourquoi il est

    utile de demander une aideexterne .Do limportance de mettre

    en place des structures au niveaudes diffrentes instances quitraitent avec les jeunes. Un pointdj soulign par le rapport duMIH en 2003. Et nosdiffrents intervenantssaccordent dire quil y adsormais urgence

    Les jeunes et

    Depuis dbut 2012, quatre cas de suicide impliquantdes mineurs ont t enregistrs. Ladolescence serait-

    elle devenue un cap aussi difficile passer ? Deux je-unes filles tmoignent de leur vie tumultueuse

    pendant leur adolescence et leur entre dans lemonde adulte. Le suicide a souvent t au centre deleurs proccupations, mme, si elles nont pas t

    jusquau bout. Des psychologues nous en parlent

    le suicide

    V.B./ C.B.