les grands thèmes de l’exposition€¦ · fossiles vieux de 300 millions d’années....

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Poissons et crocodiles d'Afrique des pharaons à nos jours Les grands thèmes de l’exposition L’Afrique, berceau de l’homme… et des poissons ? Depuis l’aube de l’humanité, l’histoire des hommes et celle des poissons sont liées. Les premières traces d’hominidés * retrouvées sur le continent africain sont associées à des vestiges de poissons très divers et de crocodiles à la taille impressionnante (7 à 8 m de long). Cependant, la présence de l’Homme sur ce continent est beaucoup moins ancienne que celle des poissons dont les premiers représentants ont laissé des fossiles vieux de 300 millions d’années. L’exposition présente les restes fossiles de poissons découverts à Toros-Menalla au Tchad, sur le site de Toumaï, et notamment le moulage d’un polyptère qui existait il y a 7 millions d’années dans une région où l’eau était, alors, présente. Les polyptères font partie des derniers représentants d’espèces présentes dans les cours d’eau africains il y a plusieurs millions d’années. Ces fossiles ont été mis à jour par la Mission paléon- tologique franco-tchadienne (MPFT)/Collection du Centre national d’Appui à la Recherche (Tchad). Le moulage d’une impressionnante machoire d’un crocodile géant, qui devait mesurer près de 15m, datant de 100 millions d’années est aussi exposé. * datant de 7 millions d’années avec la découverte de Toumaï Polypterus faraou Découverte à Toros-Menalla, non loin des ossements de Toumaï, cette espèce de polyptère existait il y a 7 millions d’années dans les eaux du Tchad. © Otero et al, 2006. 1

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Page 1: Les grands thèmes de l’exposition€¦ · fossiles vieux de 300 millions d’années. L’exposition présente les restes fossiles de poissons découverts à Toros-Menalla au Tchad,

Poissons et crocodiles d'Afriquedes pharaons à nos jours

Les grands thèmes de l’exposition

L’Afrique, berceau de l’homme… et des poissons ?

Depuis l’aube de l’humanité, l’histoiredes hommes et celle des poissons sontliées. Les premières traces d’hominidés*

retrouvées sur le continent africain sontassociées à des vestiges de poissonstrès divers et de crocodiles à la tailleimpressionnante (7 à 8 m de long).Cependant, la présence de l’Homme surce continent est beaucoup moinsancienne que celle des poissons dont lespremiers représentants ont laissé desfossiles vieux de 300 millions d’années.L’exposition présente les restes fossilesde poissons découverts à Toros-Menallaau Tchad, sur le site de Toumaï, etnotamment le moulage d’un polyptèrequi existait il y a 7 millions d’annéesdans une région où l’eau était, alors,présente. Les polyptères font partie des derniers représentants d’espèces présentes dans les coursd’eau africains il y a plusieurs millions d’années. Ces fossiles ont été mis à jour par la Mission paléon-tologique franco-tchadienne (MPFT)/Collection du Centre national d’Appui à la Recherche (Tchad). Lemoulage d’une impressionnante machoire d’un crocodile géant, qui devait mesurer près de 15m,datant de 100 millions d’années est aussi exposé.

* datant de 7 millions d’années avec la découverte de Toumaï

Polypterus faraou Découverte à Toros-Menalla, non loin des ossements deToumaï, cette espèce de polyptère existait il y a 7 millions d’années dans les

eaux du Tchad. © Otero et al, 2006.

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Page 2: Les grands thèmes de l’exposition€¦ · fossiles vieux de 300 millions d’années. L’exposition présente les restes fossiles de poissons découverts à Toros-Menalla au Tchad,

Au temps des pharaons

Animaux totémiques que l’on retrouve dans très nombreux mythes fondateurs, poissons et crocodiles s’inscrivent au cœur même de la civilisation africaine, dès l’Égypte ancienne. Les Egyptiens consommaient en grande quantité les poissons qui abondaient dans le Nil, les lacset les marécages du delta. De nombreux vestiges en témoignent : hameçons et harpons en osou en ivoire, poids de terre cuite pour les filets… Le poisson constituait également un motif déco-ratif sur la vaisselle ou les objets de toilette, notamment les palettes à fard. Dans l’Egypteancienne, certaines espèces de poissons étaient sacrées : le tilapia, le latès vénéré à Esna, citéde la déesse Neith, ou encore l’oxyrhynque (mormyre) lié à la déesse Hathor. Les Egyptiensmomifiaient ces poissons et les recueillaient parfois dans de petits sarcophages en bois peint. Ledieu crocodile Sobek était l’une des divinités les plus importantes de l’ancienne Egypte où il étaitparfois représenté avec le corps d’un homme et la tête d’un crocodile.L’exposition s’arrête sur la place des poissons et crocodiles dans la mythologie à cette époqueavec la présentation d’objets prêtés par le Département des Antiquités égyptiennes du musée duLouvre et le Muséum d’Histoire naturelle de Lyon : momies et sarcophages de poissons et decrocodiles, amulettes et figurines de poissons, représentations du dieu-crocodile Sobek, statue etstèle du dieu Horus sur des crocodiles, mais aussi des palettes à fard élégamment sculptées enforme de poisson. Ces objets ont pour décor la reproduction d’une magnifique scène de pêchequi orne un tombeau de l’Ancienne Egypte (Tombe de Menna, vers 1400 av. J.-C.).

Un laboratoire de l’évolution

Les grands lacs d’Afrique de l’Est, où cohabitent plusieurs centaines d’espèces de cichlidés endé-miques, constituent de véritables laboratoires naturels pour l’étude de l’évolution des espèces.On recense plus de 300 espèces dans le lac Tanganyika, 500 dans le lac Victoria et 800 dans lelac Malawi ! Existe-t-il des liens de parenté entre celles-ci ? Selon les scientifiques, des lignéesprimitives venues de l’ouest auraient tout d’abord colonisé le lac Tanganyika. Certains de cespoissons auraient ensuite emprunté des fleuves pour atteindre finalement les lacs Victoria etMalawi. Ainsi, ces cichlidés dériveraient d’une dizaine d’espèces ancestrales et se seraient diffé-renciés les uns des autres au cours du temps. Dans les aquariums, le visiteur peut s’émerveillerde la diversité et des livrées multicolores des cichlidés d’Afrique, fort prisés par les aquariophiles,en particulier pour leurs comportements parentaux.

Hepsetus odoe, un poisson d’Afriquedans un aquarium du Palais de la PorteDorée ©Aquarium de la Porte Dorée

Julidochromis marlieri, un cichlidéendémique d'un grand lac d'Afrique del'Est. ©F. Libert

Labichromis caerulus, un poissond’Afrique dans un aquarium du Palaisde la Porte Dorée ©Aquarium de la Porte Dorée

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Un inventaire inachevé

Les premières études scientifiques sur les poissons africains ont commencé enEurope au XVIIIe siècle avec les travaux de Michel Adanson (1727-

1806), fondateur de l'ichtyologie africaine moderne. Peu après, lenaturaliste Etienne Geoffroy de Saint-Hilaire entreprit, à l’occasion

de l’expédition de Bonaparte en Egypte, des recherches surles poissons du Nil. Il faut cependant attendre la fin du

XIXe siècle pour que l’ichtyologie africaine prenneson envol : à la fin des années 1930, plus de 2 000espèces étaient identifiées. Aujourd’hui, les scien-tifiques recensent près de 3 200 espèces de pois-sons dans les eaux douces et saumâtres africai-nes. Ce nombre reste provisoire car la découverte

et la description de nouvelles espèces restent fréquentesen Afrique. Avec les nouvelles méthodes d’identification fondées

sur la biologie moléculaire, l’inventaire n’est pas près de s’achever...L’exposition retrace l’aventure de ces savants sur les fleuves et lacs d’Afrique et présente les dif-férentes méthodes de conservation utilisées depuis le XVIIIe siècle : poissons séchés en herbiercomme les plantes, conservés dans le formol ou l’alcool, ou encore naturalisés. Ces objets sontissus des collections du Muséum national d’Histoire naturelle, qui dénombrent plus de 55 000spécimens provenant de la seule Afrique de l’Ouest. Quelques gravures – dont celles de E.Geoffroy Saint-Hilaire - attestent que ces scientifiques pouvaient également être de véritablesartistes.

Drôles de mœurs !Comme tous les organismes vivants, les poissons d’eaudouce africains se sont adaptés à leur environnement pourvivre ou survivre. Confrontés à des conditions parfois"extrêmes" - sécheresse prolongée, vie en eaux troubles,températures élevées, etc. –, ils ont développé des comportements parfois étonnants. L’exposition offre l’occasion de mieux connaître les drôles de mœurs despoissons et crocodiles d’Afrique. Le visiteur peut, entreautres, découvrir l’ingénieux cocon fabriqué par unprotoptère pour résister à l’assèchement des mares,"écouter" les décharges électriques utilisées par les mormyres pour communiquer ou encore observer - nonsans frayeur - l’impressionnante mâchoire du poisson-chien. Un court documentaire permet également d’admirer la délicatesse d’une mère crocodile donnant à ses nouveaux-nés leur premier bain…

L’ impressionnante mâchoire de l’hydrocyon justi-fie son surnom de "poisson-chien"

©Aquarium de la Porte Dorée - D. Berl

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Il était une fois trois crocodiles

Dans l’arbre de l’évolution, les crocodiles ont pour plus pro-ches parents les oiseaux. Les crocodiles sont en effet lesreprésentants actuels des archosaures, groupe apparu il y a250 millions d’années, qui comprenait également les dino-

saures disparus depuis 65 millionsd’années. Les crocodiles eux ontsurvécu et se seraient différenciésau Crétacé (135 à 65 millionsd’années avant nos jours).Troisespèces de crocodiles peuplentaujourd’hui les cours d’eaud’Afrique : le crocodile du Nil(Crocodylus niloticus), le faux-gavial (Crocodylus cataphractus)et le crocodile nain (Osteolaemus

tetraspis). L’exposition présente, dans des terrarium, deremarquables spécimens de ces trois espèces, dont certainsproviennent de la Ferme aux crocodiles de Pierrelatte dans laDrôme.

Des poissons et des hommes

Depuis des millénaires, poissons et crocodilesoccupent une place de choix dans les cultures

africaines. Plusieurs espèces de poissonsrestent vénérées en Afrique. La pêche faitencore souvent l’objet de rituels pour seconcilier les génies des eaux et les divini-tés aquatiques et, en certains lieux, il est

interdit de pêcher. Si les rites liés à lapêche tendent aujourd’hui à disparaître, il

n’est pas rare, au Mali, au Burkina Faso ou enCôte d’Ivoire, de trouver des mares aux crocodiles

ou aux poissons sacrés. Cette sacralisation des poissons et des crocodiles en Afrique explique leurs nombreuses représen-tations à la fois sur les objets de la vie quotidienne ou rituels. Des œuvres des collections duMusée du Quai Branly et de l’Africa Museum en Belgique ou issues de collections particulières entémoignent : portes baoulé sculptées, tambours lélé de la République démocratique du Congo,masques initiatiques du Burkina Faso ou de la République démocratique du Congo, marionnettesBozo du Mali, poids à peser l’or, coupes, calebasses et bijoux provenant de diverses régionsd’Afrique… Ces œuvres prennent place aux côtés de la reconstitution d’un campement tradition-nel de pêche où l’on peut voir les instruments utilisés pour la pêche dans les cours d’eau ou lacsd’Afrique, en particulier par les Bozo, une ethnie de pêcheurs maliens du fleuve Niger. Ces objetsproviennent des collections de Africa Museum ou de collections particulières de chercheurs del’IRD.

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© Cl. Dejoux

Pendentif baoulé avec têtes decrocodiles (Côte d’Ivoire 20ème siècle) © Musée du Quai Branly- photo J.-G. Berizzi

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Quel avenir pour la pêche et la pisciculture ?

En Afrique, la pêche en eau douce produit environdeux millions de tonnes par an. Mais il faut préleverde plus en plus de poissons pour nourrir une population en forte croissance et les ressources sontproches de la surexploitation. Quand le poisson seraréfie, les pêcheurs utilisent des filets à petitesmailles capturant surtout les juvéniles qui ne se sontpas encore reproduits. À cela s’ajoute une réductiondes zones inondables, lieux de reproduction des poissons. Cette situation est la conséquence d’unediminution des débits des fleuves due à la constructionde barrages et à la sécheresse… La pisciculture peut-elle être une solution ? De nombreuses recherches sont menées, notamment par l’IRD poursélectionner les espèces de poissons africains les plusadaptées à l’élevage et les moins chères à l’achat. Letilapia et le poisson-chat sont les espèces les plus utilisées. L’aquaculture reste cependant marginale car,contrairement à l’Asie, l’Afrique n’a pas de traditiondans ce domaine. La situation semble néanmoins s’améliorer et les initiatives se multiplient. On ne peutque souhaiter une meilleure intégration de la pisciculture au développement du continent africain. Trois diaporamas réalisés par l’IRD permettent d’approfondir ces questions : Scènes de pêche traditionnelle de décrue à Logone-Gana (Cameroun),La perche du Nil dans le lac Victoria : la biodiversitéest-elle menacée ? Quel avenir pour la pisciculture ?

Pêcheur sur le fleuve Leraba (Côte d’Ivoire)©IRD-Claude Dejoux

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Un programme de conférences

A l’automne 2006, un programme de conférences et de débats permettra d’approfondir de nomb-reux sujets abordés dans l’exposition et de rencontrer des spécialistes des poissons et crocodilesd’Afrique. Les dates et horaires des conférences seront précisés ultérieurement :

- La lente asphyxie du lac Victoria, débat avec François Garçon, maître de confé-rence à l'Université Paris I-Panthéon-Sorbonne, Didier Paugy et Christian Lévêque,directeurs de recherche à l'IRD.

- Les représentations de poissons et crocodiles chez les Dogons et les Bozos,conférence-débat de Bernard Surugue, directeur de recherche à l'IRD, autour du film"Paroles de fleuve", réalisé à l'occasion de l'exposition.

- L'avenir de l'aquaculture en Afrique , débat avec Jérôme Lazard, chercheur auCirad (sous réserve) et Marc Legendre, directeur de recherche à l'IRD.

- Quel devenir pour l'Afrique des lacs ? conférence de Christian Lévêque, direc-teur de recherche à l'IRD.

- Poissons et crocodiles dans la civilisation égyptienne, visites commentées parManoëlle Adaire, Réunion des Musées nationaux.

- Les grands lacs d'Afrique de l'Est : le viviers de Darwin, par Jos Snoeks,Africa Museum (Tervuren, Belgique).

- Crocodiles d'Afrique par le Dr. Martin, vétérinaire, directeur scientifique et tech-nique de la Ferme aux crocodiles de Pierrelatte.

- La pêche dans le fleuves et lacs d'Afrique, débat avec Raymond Laë, directeurde recherche à l'IRD.

- Y a-t-il un marché aquariophile pour l'Afrique ? conférence de Michel Hignette,directeur de l'Aquarium du Palais de la Porte Dorée.

- L'importance de la faune dans les masques et les marionnettes de la valléedu Niger, conférence par Xavier Van der Stappen, président de l'association Cultureset Communication (Belgique).

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