les colosses de nemrud dagh: les fils de l'orient et de...

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: 10 Fr. - SUISSE : 0,80 Fr. Fils de l'Orient et de LOSSES NEMRUD DAG

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: 10 Fr. - SUISSE : 0,80 Fr.

Fils de

l'Orient

et de

LOSSES

NEMRUD DAG

UN eIL GEANT

OBSERVE LE COSMOS

Ce télescope géant, qui fonctionne depuisoctobre dernier dans le sud-est de l'Australie

est le plus puissant du monde et seulcelui de Jodrell Bank, 'près de Manchester,Angleterre, est plus grand. Il peut capterdes signaux qui échappent aux instrumentsd'optique ou de radio actuellement existants.Voir page 26. Photo Bureau australien d'information

Le CourrierFEVRIER 1962

XVe ANNÉE

NUMERO 2

Publié en

8 fiditic

FRANÇAISEANGLAISE

ESPAGNOLE

RUSSE

ALLEMANDE

ARABE

AMÉRICAINE

JAPONAISE

NOTRE COUVERTURE

Cette tête colossale d'An-tlochos Ier, roi de Coma-gène, gtt dans les ruines dutumulus érigé il y a 2000 ansau sommet de Nemrud Dagh,dans la Turquie actuelle.Par sa mère, une Grecque,Antiochos I" descendait

d'Alexandre le Grand, et ceprodigieux portrait de pierreatteste sa ressemblance avecson fameux ancêtre.

Photo © Ara Güler, Istanbul

Pages

4 NEMRUD DAGH, SANCTUAIRE D'ANTIOCHOS I"

Les gardiens géants d'un secret millénaire

par Pauline Bentley

12 FREDERICK DOUGLASS ET LES DROITS DE L'HOMME

La lutte exemplaire d'un esclave noir

par Benjamin Quartes

15 INCAS D'AUJOURD'HUI

Quand un passé glorieux inspire l'avenir

par Alfred Métraux,

22 LES POUPÉES VONT A L'ÉCOLE

Une attrayante méthode pédagogique

par M. M. Rabecq-Maillard

26 A L'ÉCOUTE DU COSMOS

Le radiotélescope de l'hémisphère austral

par Selwyn Speight

29 CHEFS-D'FUVRE DE L'ART MÉDIÉVAL BULGARE

par Assène Vassilev

33 NOS LECTEURS NOUS ÉCRIVENT

34 LATITUDES ET LONGITUDES

Mensuel publié par :L'Organisation des Nations Unies pour l'Education,la Science et la Culture

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Maquettiste :Robert Jacquemln

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Unesco, place de Fontenoy, Paris-7*.Belgique : Louis de Lannoy, 22, Place de Brouckère, Bruxelles.

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NEMRUD DAGH

Les gardiens géants

d'un secret millénaire

par Pauline Bentley

UN TEMPLE MONTAGNE A LA GLOIRE

D'UN ROI. Il y a deux mille ans, Antiochos I",roi de Comagène fit édifier ce formidable monu¬ment à sa gloire et à ses dieux, au sommet deNemrud Dagh qui fait partie de la chaîne del'Antl-Taurus dans la Turquie actuelle. La têted'Héraclès (à gauche) et celle de Zeus (à droi¬te) sont tombées sur le sol. Elles ont l'une etl'autre le double de la hauteur d'un homme.

N EMRUD Dagh, le mont de Nemrod, 6e dresse àplus de deux mille trois cents mètres, dans la

chaîne de l'Antl-Taurus, en Turquie. Sur ce sommet arideet rocailleux s'élève depuis deux mille ans l'un des grandsmonuments de l'antiquité, un sanctuaire dont la beautéoffre un exemple remarquable de la fusion qui s'est opéréeentre l'Orient et l'Occident, entre les cultures perse, grec¬que et anatollenne. Il a été édifié, au premier siècle denotre ère, par Antiochos I", roi de Comagène, qui en fità la fols « le siège sacré de l'assemblée de tous les dieux »et un Heu de pèlerinage pour son peuple. Taillé dans leroc, le sanctuaire comprend trois terrasses aménagées ausommet du mont et décorées de puissantes statues du roiet de ses dieux, aussi hautes, sur leur socle, qu'un bâti¬ment de cinq étages. Des bas-reliefs représentant « l'héroï¬que cohorte des ancêtres du roi » ornent les murs de laterrasse ; au-dessus de ces murs et des statues, Antio¬chos I" a fait élever un tumulus à l'aide des morceaux depierre résultant de la taille de gros blocs, extraordinairepic artificiel de cinquante mètres construit de la main del'homme, en une parfaite symétrie, au sommet de la mon¬tagne. Est-ce la chambre funéraire du roi ? C'est ce quepensent les archéologues mais, jusqu'à présent, le tumulusest demeuré inviolé.

Aujourd'hui, Nemrud Dagh domine une région arided'où le ferment de la civilisation a depuis longtemps dis¬paru mais, il y a deux mille ans, le petit royaume de Co¬magène s'étendait, riche et fertile, au pied de l'Anti-Tau-rus, de la Clllcie à l'Euphrate. Il constituait, entre lesgrandes puissances de son univers, un minuscule Etattampon, très tentant pour ses voisins. Au sud et à l'ests'étendait l'empire parthe, au nord les royaumes de Cap-padoce et d'Arménie, sous protectorat romain, et, sur lacôte de la mer Egée, les provinces romaines. Il est à penserque Rome et la Perse ont jeté des regards de convoitisesur ce royaume, que le consul romain Strabon décrivit unjour comme « petit mais extrêmement fertile ». Son his¬toire est relativement peu connue, mais on sait qu'Antio-chos I" conclut, en 64 av. J.-C, avec le général romainPompée, un traité qui sauvegarda les frontières duroyaume jusqu'en l'an 72 de notre ère, où l'Empireromain, sous Vespasien, réussit à l'annexer.

Dans le royaume de Comagène, les civilisations de laGrèce et de la Perse venaient fondre leurs apports si diversavec les riches traditions de l'AnatoUe. Samisat aujour¬d'hui Samosate sa capitale, défendait l'un des lieuxde passage légendaires de l'Euphrate ; le royaume, tra¬versé par les routes commerciales de l'Orient et de l'Occi¬dent, était compris dans une région où se trouvaient deuxdes sept merveilles du monde : le temple de Diane, àEphèse, et le tombeau élevé à Halicarnasse, en mémoired'un souverain de l'Anatolie, Mausolus d'où vient leterme mausolée. C'est dans cette région que Xénophonmena contre les Perses sa fameuse autant que malheureuseexpédition des « dix mille » ; c'est là aussi que passasaint Paul, venu de Tarse à travers les grandes étendues

SUITE PAGE 6

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Photo © Ara GOler, Istanbul

LA CHAMBRE DU TRONE DES DIEUX. Antiochos

I" fit rassembler ces colosses de .9 mètres de haut,

sur la plus haute crête de son royaume, « la chambredu trône des dieux ». Parmi ces divinités dont les

noms multiples révèlent tour à tour les culturesgrecque ou perse dont elles sont issues, on compteun dieu du soleil (Apollon - Mithra - Helios - Hermès),la déesse de la fécondité (Fortuna), le dieu-héros de laforce (Héraclès), enfin Antiochos I*' lui-même. A l'excep¬tion de la déesse Fortuna, elles n'ont plus de- tête.

kir^Èi«*

Est-ce le tombeau d'Antiochos Ier?

poussiéreuses. Près d'Edesse, à quelque quatre-vingts kUo-mètres de Nemrud Dagh, on rencontre encore parfois deshommes blonds aux yeux bleus, descendant peut-être deschevaliers francs, qui traversèrent ce pays lors de la pre¬mière croisade.

Le bouUlonnement de l'histoire s'est apaisé, le temps etl'érosion ont fait leur Le gouvernement turc aappliqué un programme de mise en valeur des terresgrâce auquel la région commence à retrouver un peu deson ancienne fertUlté mais, avec les siècles, eUe était deve¬nue si solitaire et si désolée que c'est seulement en 1882

et en 1883 que Nemrud Dagh fut livré aux archéologues.Des rapports sur le sanctuaire, étabUs par des archéolo- 'gués turcs, puis par des archéologues allemands, suscitè¬rent l'enthousiasme d'une géologue américaine, TheresaGcell (1). Après quatorze années de recherches et deuxvisites préliminaires, elle prit la tête d'une première expé¬dition, en 1953.

Aujourd'hui encore, le chemin d'accès au sanctuaire estloin d'être facile, mais, alors, U n'y avait que des pistesmuletières, étroites et sinueuses. L'ancien chemin, suivipar les processions du temps d'Antiochos I", vient du loin-

Ci) Theresa Goell a publié un compte rendu de ses recherches àNemrud Dagh, dans National Geographic Magazine (mars 1961).

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AU CARREFOUR DE L'ORIENT

ET DE L'OCCIDENT Comagène futabsorbé dans l'Empire romain en 72après J.-C. Le pont romain de SeptimeSévère, (à gauche) conduit aux monu¬ments sacrés d'Antiochos I" par lechemin traditionnel des processions.

LE LION RUGISSANT (à droite) sculpté dansle grès garde sur la terrasse de l'ouest, une Imaged'Antiochos I" et du dieu du soleil (Apollon-Mithra). Comagène fut un royaume fertile dontles siècles ont fait un désert.

NEMRUD DAGH (suite)

UNE MONTAGNE SUR UNE MON¬TAGNE. Couronnant le Mont Nemrod

(i droite) un tumulus géant de cin¬quante mètres a été édifié sur l'ordre

d'Antiochos. Il contient peut-être lachambre funéraire du roi, mais leséboulements ont interdit Jusqu'à pré¬sent de procéder aux excavations.

Photos © Ara Güler

tain viUage d'Esikartha et franchit le fleuve par le pontromain de Septime Sévère, vestige d'une grande beauté,magnifiquement conservé. Au sud se trouve Karakus, lieude sépulture des dames de la famiUe royale de la dynastied'Antiochos. Leur tumulus est gardé par un aigle de grès,symbole de Zeus, dressé sur une colonne néo-dorique. Latombe semble avoir été pillée, mais on voit encore les ves¬tiges des dix-huit colonnes qui supportaient autrefois desstatues, dont deux seulement subsistent aujourd'hui.

A l'arrière-plan s'étend la chaîne de l'Antl-Taurus,dominée par Nemrud Dagh, avec son pic artificiel auxlignes symétriques, qui se détache, pointu et net, sur leciel, mais, durant tout le trajet, le sanctuaire mêmedemeure entièrement, caché aux yeux du voyageur venud'Esikartha. Parti de l'ancien vUlage anatolien, il lui fautgravir péniblement la montagne pendant des heures, sansque jamais il n'aperçoive rien de ce qu'U cherche, jusqu'aumoment où, soudain, ce monument surgit, très haut, dansune splendeur qui vous coupe le souffle. Les ravages dus àla vétusté, à l'altération des roches et, parfois, au vanda¬lisme, ne réussissent pas à gâter l'impression que produit,en se révélant brusquement à la vue, ce cône blanc depierres, étincelant dans la lumière ardente et paisible, quegardent sUencieusement les immenses statues, sentinellesmutilées et disloquées...

L'expédition GeU s'installa sur ce terrain rocaUleux,qui rendait le campement aussi pénible que pérlUeux et semit au travail dans des conditions.qui exigeaient de cha

cun la plus grande ingéniosité. Par une température quioscillait entre 55 °C le jour et 0 "C la nuit, sans ombre nieau à proximité, dans la poussière, sous la grêle et lespluies d'orage torrentleUes imprévisibles, à la merci d'unours en maraude, les membres de l'équipe explorèrent lesanctuaire, le déblayant avec peine des débris rocheuxqu'Us ne pouvaient déverser nulle part sur ce sommet etdevaient descendre laborieusement dans des litièresde bois.

Il devint bientôt évident qu'une exploration approfondiede Nemrud Dagh exigerait plus d'une saison. Et, en effet,Theresa G et son équipe, pendant cinq ans, se consa¬crèrent à ce travaU, avec l'aide de l'American School forOriental Research, de la Fondation Bollinger et de l'Ame¬rican Philosophical Society. Loin d'être l' grossièred'un monarque semi-barbare, comme on avait pu le don¬ner à penser, le sanctuaire se révéla d'une beauté qui enfaisait l'une des gloires du monde hellénistique.

Non seulement les statues d'Antiochos et de ses dieux,avec leurs aigles et leurs lions tulélaires, mais aussi leursportraits gravés en bas-relief dans le grès des murs,autour des terrasses est et ouest, ont toute la pureté desformes et des lignes de la grande tradition classique.

Dans le sanctuaire, le centre du cérémonial est l'auteld'incinération de la terrasse est. Des expéditions anté¬rieures avaient décrit « ' l'Imposant escalier » qui y menait,mais l'expédition G a révélé qu'il s'agissait d'un doublepodium taillé dans le roc, avec des inscriptions indiquant

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NEMRUD DAGH (suite)

Sur la haute terrasse

le Roi et ses Dieux

LES TÊTES TOMBÉES DES DIVINITÉS jonchent la terrasse ouestde Nemrud Dagh Bien qu'elles aient gravement souffert des tremble¬ments de terre, de l'érosion et du vandalisme, les divinités gigantesquesrestent des merveilles qui témoignent de l'habileté des construc¬teurs de l'époque. Sur leur plate-forme, elle-même haute de 6 mè¬tres, elles atteignaient la hauteur d'un Immeuble de cinq étages.

LE VISAGE DE ZEUS, délité et mutilé par les Intempéries et l'érosion(ci-dessous) contemple l'horizon de ses yeux sans regard sur la terrassede l'ouest. La tête décapitée, à l'arrière-plan, est celle d'Antiochos lar.La coiffure d'Antiochos Indique les liens du souverain avec la Perse.

L'HOROSCOPE DU LION

(ci-dessous), est l'une desplus étonnantes trouvaillesfaites sur la terrasse est.

Les signes gravés sur ce lion,de forme stylisée, permet¬tent de déterminer quel'horoscope correspond aumois de Juillet 61 ou 62avant J.-C., date qui estpeut-être celle de la fonda¬tion du sanctuaire.

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Photos © Ara Güler

SÉPULTURE DES DAMES

ROYALES de la dynastie d'Antiochosà Karakus, au sud du mont Nemrod.

Le tumulus funéraire est gardé par unaigle de grès (à droite), symbole deZeus, dressé sur une colonne néo-

dorique. On voit à Karakus les ves¬tiges de I 8 colonnes qui étaient autre¬fois couronnées de statues.

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NEMRUD DAGH (suite)

Photo © Ara Gúler LES GARDIENS DU MAUSOLÉE. L'aigle et le lion, aujourd'hui décapitésmontent cependant la garde sur les monuments et les statues de NemrudDagh, comme il y a vingt siècles. L'aigle est l'un des motifs artistiques del'Anatolie et de la Mésopotamie antiques.

Héritage de la Perse et de la Grèce

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la présence de bas-reUefs dans ses murs. Devant le tumu¬lus faisant majestueusement face à l'autel, s'élèventencore, en un alignement imposant, 25 statues de près de9 mètres de haut, ébranlées et mutilées par les tremble¬ments de terre, reflet de la civilisation hybride dont ellessont le produit. C'est d'abord le Dieu SoleU, Apollon-Mlthra-Hélios-Hermès ; puis Fortuna, déesse locale de lafécondité ; à côté d'elle, le Père des Dieux, « celui quibrandit la foudre », Ahura Mazda (Zeus). Puis Antio¬chos I", en personne, flanqué du Héros Dieu personnifiantla force, Heraclès-Artagnes (Ares). A l'exception de ladéesse Fortuna, aucune de ces statues n'a de tête. L'impo¬sante tête d'Apollon Mithra fut découverte par l'expéditionG alors que celle-ci déblayait \.a fossé de la terrassepour relever les inscriptions gravées dans le socle des sta¬tues. Ces inscriptions retracent l'histoire du sanctuaire.

« Moi Antiochos », dit l'une d'elles, « j'ai élevé ce monu¬ment à ma gloire et à celle de mes dieux ». Elles indiquentqu'il fit don au sanctuaire de domaines royaux, le pourvutde prêtres et de musiciens et décréta qu' « éternellement »des cérémonies y seraient célébrées le 10e jour de chaquemois, pour commémorer son avènement et, le 16e jour, enl'honneur de l'anniversaire du roi de Comagène.

L'expédition G fit une découverte importante sur laterrasse est : un « horoscope du lion », analogue à celuiqui avait été découvert en 1882 sur la terrasse ouest etauquel le fait d'être le premier horoscope grec connu avaitvalu une grande renommée. Le professeur Otto Neygebauer,de l'Université Brown, de Boston, a identifié les 19 étoUesdont sont parsemés le corps de l'animal et la pierre qui l'en¬toure, ainsi que la conjonction des trois planètes Jupiter,Mercure et Mars, permettant de déterminer que l'horos-

Photo © Ara Güler

HERAKLES A LA BARBE BOUCLÉE (au premier plan) et le bel Apollon.Les deux têtes se sont détachées des énormes statues de Nemrud Dagh. Les dieuxd'Antiochos I" sont tombés en ruines. Dans la cour de la terrasse ouest, les

têtes majestueuses semblent celles de géants ensevelis jusqu'au cou dans la rocaille.

cope correspond au mois de juillet 61 ou 62 av. J.-C. Onpeut considérer que cette date est peut-être celle de lafondation du sanctuaire, et cette découverte a été de laplus haute importance pour la datation d'autres monu¬ments heUénistiques.

Une tête sculptée d'Antiochos compte encore parmi lesprécieuses découvertes que fit l'expédition G'll ; haute de5 mètres, elle gisait parmi les têtes de ses dieux et lesanimaux tutélaires tombés sur la terrasse ouest. D'unebeauté calme et saisissante, elle frappe par sa ressem¬blance avec Alexandre Le Grand, dont Antiochos affirmaitdescendre, par sa mère. Sa coiffure perse nous rappellequ'il prétendait également descendre, par son père, de ladynastie achéménide de Perse. Les bas-reUefs de cette ter¬rasse ouest le montrent paré de l'emblème de la royautéle lion gardé par une statue de lion en grès et, faisant

face, en égal, à Apollon-Mithra ; car Antiochos, s'il reven¬diquait pour ancêtres les souverains de Grèce et de Perse,se considérait, en outre, comme immortel. L'une des ins¬criptions du sanctuaire dit : « La crête la plus haute » duroyaume « est la plus proche du trône céleste de Zeus. »Ce sont cette inscription et la découverte d'une masserocheuse sous le côté est du tumulus qui ont fait naîtrechez Theresa G'll la conviction qu'Antiochos I" étaitenterré sous le monument qu'il avait fait élever. Des fouil¬les ont été entreprises, mais eUes n'ont eu d'autre résultatque de déclencher des avalanches qui ont rendu impossiblela poursuite des travaux. Vingt siècles après sa construc¬tion, nous connaissons le sanctuaire de Nemrud Dagh par

les descriptions, la photographie et le film, mais l'ultime ^énigme demeure entière : le grand édifice de pierres, qui le.couronne, garde son secret.

FREDERICK DOUGLASS

«-..

LE JEUNE FREDERICK DOUGLASS,quand il commença ses campagnes pourl'abolition de l'esclavage, après s'êtreévadé de la plantation de coton duMaryland où II était lui-même un esclave.

par Benjamin Quartes

hes années 1961-1965 marqueront aux Etats-lUnis le centenaire d'une guerre acharnée qui

opposa pendant quatre ans le Nord et le Sud. Pour Abra¬ham Lincoln, président quand cette guerre éclata, elledevait provoquer, en Amérique, « une renaissance de laliberté ». Pour les Noirs des Etats-Unis, ces mots étaientparticulièrement lourds de sens, et pour Frederick Dou¬glass plus que pour quiconque, car Frederick Douglass, leplus eminent des Noirs américains du xix" siècle, s'em¬ploya toute sa vie à faire reculer les limites de la Ubertéaccordée a ses semblables. Il pensait que chacun avaitdroit à la liberté et que « l'homme naît libre ». Pendantun demi-siècle, de 1845 à 1895, Il se fit le porte-parole desopprimés.

Douglass s'était voué à la cause de la liberté, parcequ'ancien esclave, Il savait ce que cela signifiait que d'enêtre privé. Lorsqu'U naquit, en 1817, l'esclavage était uneinstitution bien établie dans le sud des Etats-Unis. Elle

était profondément enracinée en Amérique et remontaitpresque au temps où les Britanniques, en 1607, commen¬çaient, avec la Virginie, à fonder des colonies d'Amérique.En 1783, lorsque les Etats-Unis devinrent une nationindépendante, on aurait pu croire que l'esclavage étaitcondamné enfin à disparaître. Mais, dix ans plus tard,on inventait la machine à égrener le coton qui permettaitde séparer la fibre de la graine. Comme la demande decoton était très importante, en Amérique comme enEurope, il fallut trouver de la main-d'nuvre pour la satis¬faire. L'esclavage des Noirs apportait la solution.

Né esclave, Frederick Douglass allait partager le sort decentaines de miniers d'autres Noirs des Etats-Unis. Mais

nul autre esclave n'était destiné à devenir aussi célèbre

que lui, et bien rares sont les Américains qui, partis de sibas, ont fait une si remarquable carrière. Cette réussite,il la doit à la lutte qu'il a menée en faveur de la liberté,pour lui et pour les autres.

Alors que, jeune esclave, il travaillait dans une planta¬tion du Maryland, Douglass souffrait de son sort. Au coursde conversations imaginaires, il se posait maintes ques-

19 tions : « Pourquoi suis-je esclave ? Pourquoi y a-t-il des'¿ esclaves et des maîtres ? Y a-t-il eu une époque où U n'en

était pas ainsi ? »

Pour se préparer à la Hberté, il voulut apprendrel'alphabet. Son maître essaya de l'empêcher d'apprendre àlire et à écrire, mais Douglass ne se laissait pas facilementdécourager. Les premiers pennies qu'il gagna, il lesdépensa en secret pour acheter des livres de lecture etpayer les jeunes garçons qui l'aidaient à les déchiffrer.

En 1838, après vingt années d'esclavage, Douglass pritla fuite et s'installa dons le Nord, où il n'y avait plusd'esclaves. A New Bedford, dans le Massachusetts, il tra¬vailla trois ans comme man acceptant n'importequelles besognes ; ramonant les cheminées, sciant du bois,conduisant des voitures ou servant à table. Il s'était mariéquelques jours après sa fuite et avait une famille de plusen plus nombreuse à entretenir.

Mais ses responsabilités de mari et de père ne l'empê¬chèrent pas de s'intéresser aux activités des abolitionnistes,groupes d'hommes et de femmes voués à la lutte contrel'esclavage, qu'ils considéraient comme le plus grand detous les maux. Us le combattaient pour deux raisons :d'une part à cause du tort causé à l'esclave lui-même et,d'autre part, au nom des droits civiques, comme la libertéde parole et le droit d'être jugé par un jury. Au Massa¬chusetts, ces réformateurs avaient à leur tête deux hom¬mes de valeur, WUliam Lloyd Garrison, rédacteur en chefdu Liberator et WendeU PhilUps, l'un des plus grandsorateurs du xix" siècle.

En août 1841, les abolitionnistes du Massachusetts seréunirent à New Bedford et, à sa grande surprise, Douglassfut invité à dire quelques mots. Dominant sa timidité, ilsut évoquer avec une profonde émotion les souvenirs deses années d'esclavage. Ce qu'il dit et la façon dont il ledit firent une grande impression sur ses auditeurs, qui lepressèrent de se joindre à eux, comme conférencier etcomme représentant de leur mouvement. Le jeune Noiraccepta et ne regretta jamais sa décision.

A l'école des aboHtionnistes, Douglass devint bientôt unorateur remarqué. Son physique imposant, sa tête fine¬ment modelée, son regard enflammé et le roulement detonnerre de sa voix, tout le destinait à la tribune publique.« A l'écouter, écrivait un contemporain, vous sentiezvotre âme s'embraser. »

DIouglass sut aussi se rendre redoutable par saplume. Après quatre ans de coUaboration avec

les abolitionnistes, U avait acquis un style vigoureux,direct et vivant. Son livre « Narrative of the Life ofFrederick Douglass », pubüé en 1845, connut un grandsuccès en Amérique et en Europe, après avoir été traduiten allemand et en français. (Vie de Frederick Douglass,esclave américain, écrite par lui-même, trad, par S.K.Parker, Paris 1848.)

Condamnation implacable de l'esclavage, cet ouvrage nepouvait manquer de susciter la sympathie pour ceux quivivaient dans cette condition. « Je pourrais presque direque je n'ai pas connu ma mère, confesse-t-il au début decet ouvrage, car je ne l'ai vue que quatre ou cinq foisdans ma vie, chaque fois très peu de temps et nuitam¬ment. »

Après la publication de l'histoire de sa vie, Douglass tra¬versa l'Atlantique pour se rendre dans les îles, britanni¬ques. Là, pendant près de deux ans, U fit le procès del'esclavage américain devant un public attentif. Il eut untrès grand succès. Des admirateurs britanniques recueilli¬rent l'argent nécessaire pour payer à son ancien maîtrele prix de sa liberté et lui permettre de créer un hebdo¬madaire.

Douglass ne se contenta pas d'écrire et de parler, il par¬ticipa également à un autre genre d'activités anti-esclava¬gistes. Ce travail clandestin (connu sous le nom de « che¬min de fer souterrain ») avait pour but d'aider les esclavesfugitifs en chemin pour le Canada, et de leur procurer dela nourriture, un abri et de l'argent. Esclave évadé lui-même, Douglass éprouvait une profonde compassion pour

UN ESCLAVE A LA CONQUÊTEDES DROITS DE L'HOMME

Photos Frederick Douglass Historical Association

DOUGLASS A LA FIN DE SA VIE, orateur et polémiste fameux,il avait eu la joie de voir les Noirs du Sud rendus à la liberté ( I 863). En1877, le président Harrison le nomma ministre des États-Unis à Haïti.

ceux qui suivaient son exemple. Ses honoraires de confé¬rencier servirent souvent à secourir ces fugitifs.

Sa maison de Rochester, dans l'Etat de New York, étaitleur quartier général. Le matin, quand il se rendait àl'imprimerie, U lui arrivait fréquemment de trouver, surles marches, des fugitifs qui l'attendaient. Ceux-ci voya¬geaient de nuit et, pendant la journée, se dérobaient auxregards indiscrets en se réfugiant chez leurs amis aboli¬tionnistes. Douglass savait où les conduire : dans quelquegrenier, dans une grange écartée ou dans la maison tran¬quille d'un sympathisant sûr. La nuit tombée, Douglassleur faisait rapidement reprendre le chemin de la fron¬tière canadienne.

Dans sa lutte pour la liberté, Douglass ne négligea pasles droits de la femme ; et U fut l'un des pionniers dumouvement créé pour les défendre. Dans l'Amérique où Uavait grandi, la femme n'était pas l'égale de l'hommedevant la loi ; on ne lui reconnaissait pas le droit de

signer un contrat, ,de témoigner devant un tribunal ou devoter. Douglass s'éleva contre l'injustice de ces restric¬tions. Le 3 décembre 1847, le premier numéro de son heb¬domadaire The North Star, publiait en article de tête :« Le droit n'a pas de sexe. »

Sept mois plus tard, le mouvement américain des droitsde la femme était officieUement fondé à Seneca Falls (NewYork). Douglass joua un rôle Important à cette réunionhistorique, où il fut le seul participant du sexe masculin.De nombreux délégués hésitaient à revendiquer le droit devote pour les femmes mais, dans une vibrante allocutionqui provoqua des revirements dans l'opinion, Douglass fitvaloir que l'égalité des droits poUtiques était d'une impor¬tance capitale pour la cause des femmes.

Au printemps de 1861, à l'approche de la guerre desécession, Douglass exhorta le président Lincoln à libérer 13les esclaves. Cette guerre étant à ses yeux une croisadepour la Uberté, il s'efforça de faire partager cette convic-

SUITE PAGE 14

FREDERICK DOUGLASS (suite)

UNE VOLONTÉ OPINIATRE

E LUTTE EXEMPLAIRE

*Sa

tlon à Lincoln, lors de ses deux visites à la Maison Blan¬che. Aussi fut-11 au comble de la joie quand celui-ci, leT" janvier 1863, publia la Proclamation d'Emancipationaccordant leur liberté aux esclaves du Sud. « En ce jour,dit Douglass, tout ne fut que chant et poésie. »

Trop vieux pour porter un fusil, Douglass se fit agentde recrutement et, parcourant tout le Nord, pressa lesNoirs de s'engager dans l'armée. Ses deux premièresrecrues furent ses fils, Lewis et Charles. Jusqu'au jourd'avril 1865 où les.Sudistes déposèrent les armes, Douglassservit activement la cause nordiste, tant comme agentrecruteur que comme conférencier.

Après la guerre, il assuma successivement trois chargespubliques : le président Hayes lui confia les fonctions deMarshal du district de Columbia en 1877, le président Gar¬field en fit le Recorder of Deeds du district de Columbiaen 1881 et le président Harrison le nomma ministre desEtats-Unis à Haïti, en 1889.

Avant d'accéder à cette dernière fonction, Douglasspassa une année à voyager en Europe et dans le Proche-Orient. Il voulut tout voir et, lors de son séjour à Paris,tint à se rendre au tombeau de La Fayette, le général quiavait aidé l'Amérique à conquérir son indépendance. « Cepatriote a deux pays, disait-il, et le lieu de sa sépultureest donc doublement sacré. » Douglass fut particulièrementheureux de faire la connaissance du sénateur françaisVictor Schoelcher, alors âgé de quatre-vingt-un ans, qui

avait élaboré en 1848 le texte du décret auquel les esclavesdes colonies françaises durent leur Hberté.

A l'étranger ou dans son pays, que ce fût à titre officielou privé, Douglass porta toujours un profond intérêt à lacause de la liberté humaine. Sans relâche, par la parole etpar la plume, il prit fait et cause pour les opprimés. Tousceux que l'on voulait écarter des urnes ou évincer dumarché du travail pouvaient compter sur lui pour lesdéfendre par un ardent appel à l'opinion pubHque. A sesyeux, le combat Uvré en faveur des Noirs ne se situaitpas sur un plan racial, mais humain. Il espérait qu'un jourviendrait où tous les Américains bénéficieraient de l'éga¬lité des chances, sans distinction d'origine, de sexe, dereligion ou de couleur.

Douglass, qui mourut en 1895, n'a pas vécu assez long¬temps pour voir ce jour. Mais il a donné le meilleur de lui-même pour faire de l'Amérique un pays libre. Un teldévouement à la cause de la Hberté a marqué sa généra¬tion | d'une profonde empreinte et doit demeurer un exem¬ple en notre époque troublée.

Benjamin Quarles, professeur d'histoire au Morgan State Col¬lege Baltimore, Maryland (Etats-Unis), est l'éditeur de l'auto¬biographie de Frederick Douglass (Belknap, Harvard UniversityPress 1960).

POUR SAUVER

LA MAISON

DE DOUGLASS

14

Frederick Douglass passa les dernières années desa vie dans sa maison de briques blanches deCedar Hill, à Anacostia, un quartier de Washing¬ton. Il mourut le 20 février 1895, au milieu de sesmanuscrits, de ses livres, et des exemplaires deson journal abolitionniste, The North Star. En 1961,la maison, autrefois belle, menaçait ruines fautede réparation. L'Association Nationale des Clubsde Femmes de couleur lança une campagne natio¬nale, en février 1961, en vue de recueillir les50 000 dollars que nécessitent la restauration de lamaison de Douglass et sa conservation commemonument historique national. En réponse à cetappel, le président des Etats-Unis a écrit en cestermes à la présidente de l'association, Mme RosaL. Cragg : « Frederick Douglass fait partie de lalégende de l'Amérique. Sa lutte fructueuse pourla liberté, il y a un siècle, peut inspirer tous ceuxqui, dans le monde entier, combattent encore pours'assurer leurs droits essentiels... ». L'AssociationNationale des Clubs de Femmes de couleur compte100 000 membres. Elle a été organisée en 1896, unan après la mort de Douglass. Son siège national,à Washington, ruvre en vue d'améliorer la com¬préhension internationale et les rapports entre lesraces. Elle a contribué à développer dans la plu¬part des Etats du sud l'assistance à la jeunessedélinquante, handicapée ou deshéritée. Pour lamaison de Douglass, et au bénéfice de sa restau¬ration, l'Association Nationale des Femmes decouleur, entreprend en Amérique, une campagned'abonnement au Courrier de l'Unesco.

LES INCAS D'AUJOURD'HUI

par Alfred Métraux

Aucune civilisation ne meurt entièrement.

Même si ceux qui l'ont créée disparaissent, ilspassent à leurs successeurs quelque parcelle de leur expé¬rience. A plus forte raison, aucune pression extérieure nesera assez forte pour éliminer tous les aspects d'une civi¬lisation, si ceux qui se sont Identifiés avec elle continuentà exister. Les Indiens des Andes, dont les ancêtres ont étésujets des Incas, nous en offrent l'exemple le plusfrappant.

Quatre cents ans se sont écoulés depuis ce 16 novem¬bre 1532 où Pizarre et ses 150 compagnons détruisirent, àCajamarca, le plus grand empire du Nouveau Monde, ens'emparant par traîtrise de la personne de son monar¬que, l'Inca Atahuallpa.

Au cours de ces quatre siècles le destin des Indienspéruviens a été dur et Us ont été soumis à de nombreusesvicissitudes. Leur économie a été bouleversée, leur ordresocial transformé, leur religion reléguée au rang de su¬perstition diabolique. Malgré des changements brutaux etla profonde misère dans laquelle ils sont tombés, ils ont

conservé presque intact une partie de leur héritageculturel.

La vieille civUisation Inca n'est pas morte. Ses racinessont encore vigoureuses et il n'est pas impossible qu'ellene produise un jour un nouveau rejet. Sous un verniseuropéen, survivent des institutions, des comportementset des croyances que les Blancs n'ont pu altérer.

Les signes matériels d'une haute civilisation que lesconquistadores admirèrent si fort, lorsqu'ils s'enfoncèrentdans les Andes, disparurent peu d'années après la fin del'Empire Inca.

Les grandes routes bordées de murets, ombragées pardes arbres, furent abandonnées ou défoncées. Les pontssuspendus furent négUgés, les palais et même les villesfurent détruits. La merveilleuse organisation de cet Etatqu'on a qualifié de « socialiste » subit le même sort. Lesgreniers de l'Etat furent pUlés, les relais de poste inter- 15rompus, et les habitants obligés de se regrouper dans desvilles et des bourgs de type européen.

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LES INCAS D'AUJOURD'HUI (Suite)

JOUR DE MARCHÉ, dans un petit village du haut plateau andin; au Pérou. Les Indiens Quechuas des cam¬pagnes voisines y apportent leurs légumes et y mènent leur bétail. Dans les montagnes du Pérou et de la

«g Bolivie, les Indiens ont gardé pour une bonne part l'ancien système d'organisation sociale, y compris leayllu qui unit en son sein, pour le travail de la terre, de petits groupes familiaux originaires du même ter¬roir, ou partageant les mêmes croyances. Mais aujourd'hui, les descendants de l'Empire Inca modernisentpeu à peu leurs méthodes d'agriculture.

Photo © Paul Almaty

RELIQUAT DU PASSÉ, ce « tajlla » est un bâton à pointe de métal utilisé pour gratter le sol. Les Indiensqui vivent sur les pentes montagneuses s'en servent toujours pour cultiver la terre. Mais ceux des valléesutilisent des charrues tirées par des bHufs; les femmes suivent le sillon et brisent les mottes de terre. Agauche, un garçonnet Indien qui porte son petit frère sur son dos se repose contre un mur du village.

Trente ans après la conquête, la population de l'Empireétait réduite de moitié, si ce n'est des deux tiers. Tant demalheurs ne brisèrent pas l'âme indienne.

Alors qu'on aurait pu croire au xix* siècle que les In¬diens andins allaient eux aussi disparaître, il s'est produitdepuis un siècle une forte poussée démographique, si bienqu'aujourd'hui ils sont près de six millions dans les limitesde l'ancien Empire du sud de la Colombie au centre duChili. Dans cette masse indienne en expansion, on per¬çoit les signes avant-coureurs d'un grand renouveau. Lemoment est donc propice pour se demander ce qu'ils ontconservé de la glorieuse civiUsation de leurs ancêtres.

Tout d'abord cet instrument de la culture la langue.Celle des Incas, appelée Quechua, est encore parlée parprès de cinq millions de personnes, bien que certains grou¬pes indiens aient adopté l'espagnol.

En revanche, des Métis et même des Blancs en ont faitleur langue materneUe. Aujourd'hui, le Quechua est plusrépandu en Amérique du Sud qu'il ne l'était à l'apogée del'Empire Inca. Les missionnaires espagnols l'ont imposéeà des tribus qui, bien que soumises aux Incas, avaientconservé leur langue nationale.

Ces mêmes missionnaires l'ont introduite parmi les po¬pulations de l'Amazonie, de sorte que la langue des Incasa conquis des territoires qui n'avaient jamais vu lesarmées impériales. Avec cette langue s'est transmis toutun folklore dont on commence à peine à entrevoir larichesse. Beaucoup de vieux mythes que l'on croyait àjamais oubliés ont survécu dans la mémoire populaire.

De patientes recherches nous feront peut-être retrouverdes vestiges, des cosmogonies et des cycles légendairesque l'on supposait irrémédiablement perdus.

Dans les montagnes du Pérou et de la Bolivie, les Indienssont restés fidèles à leurs anciens cadres sociaux. Les

ayllu, ces petits groupes de familles unies par une mêmeorigine, un sol et un culte commun, et qui formaient lesmultiples ceUules de l'Empire des Incas, ont résisté à tousles efforts tentés pour les dissoudre. Ils sont devenus lesnoyaux des « comunidades » qui ont réussi à regagner unstatut juridique et autour desquelles la vie indienne s'estréorganisée.

Si aujourd'hui les « communautés 3> ne procèdent plusà la distribution annuelle des terres collectives, elles conti¬nuent à exploiter des communaux et s'opposent à toutecession des terres appartenant à la collectivité. Chacundoit collaborer aux travaux d'intérêt général et participeraux cultes rendus aux saints protecteurs ayant remplacéles dieux païens.

LES DANSES DE MASQUES sont très antérieures à laconversion des Indiens au Christianisme. Les nombreuses 17

fêtes liturgiques de l'Eglise catholique se prêtent aux formesriches et variées de l'expression des sentiments religieux.

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LES INCAS D'AUJOURD'HUI (suite)

Sur les hauts plateauxde la Cordillère des Andes

Ils défendent aussi farouchement les frontières de la

communauté que, jadis, lorsque les Incas ne les avalentpas amalgamés dans un seul Etat. Le patriotisme de vil¬lage est encore très vif. Il se manifeste comme jadisdans une émulation dont il faudrait tirer parti. Certaines< comunidades » ont pris l'initiative de se modernisersans renoncer pour cela à leur vieUle organisation.

Beaucoup d'entre elles ont fondé des établissementsagricoles extrêmement prospères et possèdent à la banquedes fonds communaux Importants. C'est sous cet aspecttrès moderne que se manifeste encore le vieil esprit decorps des ayllu d'il y a quatre siècles.

La vie économique, par contre, a beaucoup changédepuis la Conquête. Aux troupeaux de lamas et d'alpacasque les Indiens font paître dans les plaines de la puna, sesont ajoutés les moutons. Rares sont les familles qui nepossèdent un beuf ou une vache et souvent des mules oudes ânes. Le fromage compte parmi les aUments de basede l'Indien moderne, alors que jadis il ignorait les laitages.Le maïs et la pomme de terre constituent encore le fondsde la nourriture, mais l'orge, le blé et les fèves sont culti¬ves partout où le climat le permet.

S UR les pentes des montagnes, on peut voir' comme au temps des Incas, les Indiens remuer

la terre avec la tajlla, bâton à pointe en métal. Cepen¬dant, dans le fond des vallées, les femmes chargéesd'écraser les mottes avec les maillets de pierre suivent levieil araire romain tiré par des b

Si la charrue est espagnole, l'atmosphère de fête quiaccompagne les semailles, les chants et les danses deslaboureurs, est purement indienne.

Les voyageurs s'imaginent volontiers que les Indiensmodernes dans leurs costumes pittoresques ressemblentextérieurement à leurs ancêtres. En fait, il n'en est rien.Le vêtement indigène s'est profondément modifié depuisle xvi" siècle.

La silhouette d'une Indienne moderne ne se distingue¬rait pas de celle d'une paysanne espagnole, si ce n'étaitpour la large ceinture aux couleurs vives dont elle se ceintla taille, et le châle qui couvre ses épaules et qui est retenupar une épingle d'argent sur sa poitrine.

Le costume masculin, pour sa part, est entièrement euro¬péanisé : pantalons, gilet, veston et chapeau de feutre.Le passe-montagne et le poncho généralement tenus pourdes survivances Indiennes étaient inconnus avant la pé¬riode coloniale.

Cependant, comme au temps de l'Inca, les femmes filentsans cesse, qu'elles soient assises ou qu'elles marchent.Leur fuseau est celui d'autrefois : une tige de bois alour¬die d'un disque de terre cuite. Le métier à tisser, lui nonplus, n'a pas varié. Il consiste toujours en deux barres debois, l'une étant reliée à la taiUe de l'ouvrière, entre les¬quelles sont ourdis les fils de la chaîne.

Les motifs qui ornent les tissus modernes rappellentceux qui décorent les étoffes que l'on retire des sépultures.Lorsque j'étais chez les Indiens du vUlage de Chipaya, lesIndiens s'étonnèrent de ce que je collectionne de vieUlesétoffes très sales, ne s'étant pas avisés que les spécimensqu'ils examinaient et qu'ils croyaient achetés à l'un d'en¬tre eux provenaient de tombes préhistoriques.

Cependant, même dans un domaine où les traditionssont tenaces, l'Espagne a laissé sa marque. Un des motifsfavoris dont les Indiens ornent leur tissu ' n'est autre

qu'une stylisation de l'aigle bicéphale des Habsbourgs.

Malgré la chasse impitoyable que les missionnaires espa¬gnols firent aux idoles et aux idolâtres, les Indiens, enapparence bons catholiques, n'en continuent pas moins àinvoquer par des prières et des sacrifices les vieUles divi¬nités andines.

Celles-ci sont encore vénérées sur les cimes des monta¬

is gnes où d'étranges structures suggèrent des, rites nonmoins étranges. Au sommet des cols, les automobiles pas¬sent à côté de monticules de pierre surmontés d'une croix

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4aui Almasy, F»aris.

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Photos © Pierre Verger

CES FORMIDABLES MURAILLES

d'une forteresse près de Cuzco, dansles Andes péruviennes (ci-dessus, àgauche) prouvent le génie architecturalde ces bâtisseurs que furent les anciensIncas. En employant une énorme main-d'Suvre, les Incas construisirent leurs

édifices de blocs de pierre dont chacunpesait plusieurs tonnes. Ils n'utilisaientpas de mortier, ni aucun autre matériaupour lier la pierre, et cependant telleétait leur habileté qu'aujourd'hui encoreon ne peut glisser la pointe d'un canifdans les joints. Ci-dessus à droite, lesruines d'une autre ville inca, Macchu

Picchu, ceinturée de montagnes, incon¬

nue du reste du monde jusqu'en 191 I.

Depuis lors, de fructueuses découvertesarchéologiques ont été faites sur cettecivilisation qui s'étendait à l'ouest del'Amérique du Sud. Nombre desIndiens de Bolivie, d'Equateur et du

Pérou (comme ceux qui, sur la photode gauche, portent le poncho) des¬cendent des Incas. A droite, l'imageémouvante d'un Indien du Pérou

accueillant sa fille. Leurs vêtements

de laine sont ornés des motifs tradi¬

tionnels, mais le chapeau de l'hommeest typiquement espagnol.

LES INCAS D'AUJOURD'HUI (suite)

La permanence du passéinspire l'avenirqui reçoivent en offrande une pierre ou une chique de coca.Par ce rite, les Indiens entendent se libérer de leur fati¬gue et apaiser les génies du lieu.

Parmi les divinités du panthéon Inca, seule la Terre-Mère, la Pacha-Mama.et l'Eclair, ont gardé leur prestigeentier. L'Indien chérit la Pacha-Mama entre tous les êtres

surnaturels et dans les prières qu'il lui adresse l'identifieà la Vierge, sous le nom de Santa-Maria Pacha-Mama.

Il n'est église ou chapelle si pauvre solt-elle qui ne pos¬sède une statuette de Santiago (saint Jacques), le saintguerrier, patron d'Espagne et des conquistadores. Figurésous les traits d'un cavalier du xvii* siècle, cape et cha¬peau à plume, il brandit son épée et écrase le démon sousles sabots de son cheval.

Pour l'Indien, Santiago est le seigneur des éclairs, Apu-lllampu. C'est à lui que l'on sacrifie des lamas sur lesUeux touchés par la foudre. Les foudroyés ayant survécusont d'ailleurs appelés fils de saint Jacques et investis depouvoirs mystérieux qui en font des magiciens et des sor¬ciers.

Acôté de ces grandes divinités, les Indiens per¬sistent à révérer d'innombrables esprits qui

résident dans les montagnes, les rivières, les étangs et leslacs. Les maisons sont gardées par un esprit, lequel, sousforme de chat sauvage ou de faucon, reçoit des libationssanglantes.

La religion des Incas ne se dissimule pas honteusementdans les vallées perdues ou les hameaux des hauts pla¬teaux. Elle s'étale publiquement dans les villes de l'Inté¬rieur.

Ainsi, voit-on sur Jes murs des malsons modernes, dansla capitale de la Bolivie, des taches noirâtres : traces dusacrifice sanglant offert au génie du lieu et à la Pacha-Mama. De même à l'entrée des villes, des chiques de cocasont collées aux murs des premières maisons : autantd'offrandes propitiatoires que les Indiens adressent auxdieux de leurs pères avant de séjourner parmi les Blancs.

Les nombreuses fêtes de la Uturgie catholique ont servide prétexte à une expression reUgieuse riche et variée. Lesdates des fêtes populaires correspondant à celles de gran¬des cérémonies de l'Empire des Incas ont conféré à desfêtes secondaires une importance capitale. Ainsi, CorpusChristi s'est substitué à l'intip-raymi, la grande fête duDieu Soleil. L'Invention de la Sainte-Croix (3 mai), quicoïncide avec les rites agraires célébrés jadis au début dela récolte, est prétexte à des danses et à des réjouissancesque la nature de la fête ne justifie nullement.

Les costumes des confréries religieuses chargées duculte des saints n'est souvent qu'une survivance des mas¬ques ou des vêtements d'apparat portés par les danseursde l'époque païenne.

Les Indiens n'ont pas oubUé leurs anciens souverains.Ils parlent d'un mystérieux personnage appelé Inca-rl, quifonda le Cuzco et qui fut égorgé par un rival. «Sa tête,disent-ils, fut enterrée à Lima. Depuis quelques années,un corps lui pousse et bientôt Inca-rl reviendra pourapporter le bonheur aux Indiens.

C'est sous cette forme naïve et mythologique que s'ex¬prime l'espoir confus des Indiens de connaître des tempsmeilleurs. Alors que partout ailleurs en Amérique du Sudles tribus Indiennes sont vouées à la disparition ou vontse fondre dans le reste de la population, dans ce qui futl'ancien Empire des Incas, en Equateur, au Pérou, enBoUvie, il reste un élément vivant sur lequel il faudracompter. Ne représente-t-il pas dans certains pays plusde la moitié de la population ? A mesure qu'il s'instruit,il puise dans le souvenir de son grand passé des élémentsde confiance pour l'avenir.

Alfred Métraux, anthropologue connu, est chargé des Droitsde l'Homme au Département des Sciences sociales de ¿'Unesco. 21Son dernier ouvrage, « Les Incas » (Editions du Seuil, Pana),paraîtra prochainement.

Les découvertes scientifiques sensationnelles de

siècle, l'accession de peuples nouveaux auconcert politique mondial, l'internationalisation de problè¬mes économiques ou sociaux ont entraîné un accroisse¬ment des programmes scolaires qui deviennent chaquejour plus pesants et plus Indigestes. Pour faire face à lacruelle nécessité de bourrer les jeunes cervelles de notionsde plus en plus étendues, les éducateurs ont multipHé lesméthodes pédagogiques. Si beaucoup d'entre elles remon¬tent, quoi qu'on en pense, à quelques siècles on faisaitimprimer leurs devoirs aux dauphins de France bien avantque Freynet ait découvert l'imprimerie à l'école cellequ'une Française, Mme Poinsart-Chasson, emploie pourfaire acquérir à ses élèves les connaissances les plus diver¬ses, paraît plus originale.

Elève de Trnka et de Mme Tyrlova, artiste et péda¬gogue par vocation, conquise depuis longtemps aux mé¬thodes actives et résolue à donner un enseignement at¬trayant, Mme Poinsart-Chasson a pensé que les poupées,si tendrement aimées par les petites fuies du monde entier,pourraient servir d'aimables truchements entre ses jeunesdisciples d'une part, l'histoire, la géographie, l'hygiène,la morale, etc., d'autre part.

Un beau matin les matins sont toujours radieux dansles contes, et cette histoire relève presque de la féerieavec la complicité de la directrice, elle arriva à l'écolede Sainte-Anne, à MarseiUe. Elle sortit de son sac unepetite balle de ping-pong et, en quelques coups de pinceau,la transforma en un rond petit visage, tout semblable à

22 celui des marionnettes de Trnka. Poursuivant sa démons¬tration, elle prouva aux petites filles émerveiUées que l'onpouvait douer ce même visage de multiples expressions.

QUAND LES'EN VONT

La balle de ping-pong devint tour à tour souriante, triste,étonnée, apeurée, hilare. Quelques fragments de peau delapin collés aux bons endroits donnèrent aux nouvellesfrimousses chevelures rousses ou moustaches noires. Une

éponge, serrée au milieu par un gros fil, figura assez exac¬tement le corps d'une jeune dame à taiUe fine. La mêmeéponge, légèrement pincée dans le dos, se transforma engros bonhomme. Après quoi, un fil de fer réunit têtes etcorps. Bientôt, sous l'impulsion de Mme Poinsart-Chasson,les élèves acquirent suffisamment de maîtrise pour doterles visages des expressions qu'elles souhaitaient leur voiret pour fabriquer des poupées cocasses ou mélancoliques.

Mme Poinsart-Chasson en vint alors au deuxième stade

de son expérience. Elle lut aux enfants un conte chinois,« Le soupir du sage », et leur proposa de le mettre enscène en construisant les décors et les personnages.

Enthousiasmées, les petites filles se mirent à l'euvre.Mais il leur faUait savoir comment étaient vêtus les Chi¬

nois, quelle était leur nourriture et d'où venait cette nour¬riture, quelle sorte de maisons ils habitaient, comment ilsdécoraient leurs demeures, comment ils vivaient, etc.Une véritable chasse aux livres sur la Chine, aux articlesde journaux, aux revues illustrées s'organisa. On apportaà Mme Poinsart-Chasson les documents les plus divers,les matériaux les plus hétéroclites pour réaUser costumeset décors. Passionnées par leurs recherches, certainesjeunes décoratrices consacrèrent à l'achat de livres d'artl'argent destiné à l'acquisition de sucreries. Quand toutfut prêt, le 19 octobre 1958, les poupées firent leur entréeau Centre Régional de Documentation pédagogique deMarseille. Le succès de cette exposition amena la Télé¬vision française à réaliser un court métrage en demi-ani¬mation qui fut projeté sur les écrans. Est-il nécessairede dire la fierté des auteurs et avec quel enthousiasmerenouvelé, vingt et une bambines de 12 à 14 ans entrepri¬rent l'édition d'un autre film, moralisateur et anti-alcoo¬lique cette fois : « Les poupées vont à l'école en bonnesanté » ?

Une nouvelle méthode était née ; comme beaucoupd'autres, elle se propose d'éveiller tout d'abord l'intérêt,mais elle a ceci de particulier qu'elle fait appel, au départ,à l'imagination toujours en éveil des enfants. Sans doute,bien des éducateurs, en France comme ailleurs, avaientadmis sur les tables jadis noires et rébarbatives, la sou¬riante présence des poupées. C'était donner droit de citéau rêve, admettre officiellement l'existence de ce monde

irrationnel et merveiUeux qui éveille les facultés créatricesde l'enfant à un degré que bien des adultes ne soupçon¬nent pas. A l'Institut Pédagogique National de Paris, lesexpositions où, sur le thème de Noël, les enfants des

S POUPÉES

A L'ÉCOLE

par

M. M. Rabecq-Maillard

écoles matemeUes ont donné Hbre cours à leur fantaisie,ceUe où dis ont reconstitué la rue Mouffetard avec sesvieilles demeures, ses boutiques, son trafic, ses pas¬sants, etc., ont révélé aux grandes personnes des donsartistiques étonnants et suscité l'admiration de poètescomme André Breton. Dans l'un et l'autre cas, on avaitcréé des poupées, exposé des marionnettes. Mais derrièreles initiatives remarquables des tout-petits, on sentaitencore la baguette du chef d'orchestre, son inspiration.Les enfants demeuraient dans leur propre universcombien chatoyant, d'aiHeurs. Mme Poinsart-Chasson a eule mérite de faire participer les enfants à une idée d'adul¬tes, de les élever à un stade supérieur tout en leur per¬mettant de s'exprimer Hbrement.

On n'avait pas songé non plus à aborder chaque discl-pUne par le biais du travail manuel. L'ennuyeuse et théo¬rique morale est devenue vivante. Les élèves de Mme Poin¬sart-Chasson réalisent un court métrage sur l'antl-alcoo-lisme et réussissent à faire réfléchir, peut-être à convain¬cre, les adultes en trouvant des slogans particulièrementpercutants : « Les petits verres de vin font les grandsverres de larmes. » Il faut bien savoir son histoire et sagéographie si l'on veut hahUler des Chinois, reconstituerleur habitat, leurs mdurs, leurs coutumes. La couture, ledessin, le modelage, la broderie, la sculpture, souvent fas-

SUITE PAGE 24

UN ATELIER DE FINISSAGE : Ces quatre fillettes mettent la dernière main aux costumes d'un petit peuplecoloré, qui va illustrer des leçons d'histoire, de géographie ou de morale et donner vie aux pages des manuels.

23

POUPÉES A L'ÉCOLE (suite)

La main

aide l'esprit

tldleux pour ceux qui ne se sentent pas doués, sont deve¬nus passionnants, puisque indispensables à la mise enscène. En outre, les quelques heures consacrées chaquesemaine au travail manuel créateur sont, pour l'enfant,l'occasion d'exprimer sa personnaUté secrète, riche en pos¬sibilités mais souvent étouffée par le milieu ou la timi¬

dité. Le personnage choisi est déjà révélateur. Il estremarquable que le visage donné par le bambin à sa petitepoupée ressemble souvent à son propre visage. Il y a, dansla méthode de Mme Poinsart-Chasson des possibilitésd'extériorisation qui ont permis de déceler de véritablesvocations.

Grâce à elle aussi, l'enfant entre en contact avec destechniques : mise en scène, enregistrement sonore, qui ne« figurent pas au programme » mais qui, par leur carac¬tère « actuel », présentent beaucoup d'intérêt. L'enseigne¬ment perd ainsi son caractère abstrait et livresque. Ilplonge dans une réalité apparemment réservée auxadultes et d'autant plus séduisante pour de jeunes esprits.

En même temps, le travail en équipe développe le senscollectif ; la quête des documents, leur confrontationaiguisent le goût de la recherche et le sens critique : Ilfaut étabUr une vérité aussi rigoureuse que possible. Quedire du développement du goût, de l'ingéniosité, de J'espritd'invention qui demeurent les corollaires évidents de laméthode employée par Mme Poinsart-Chasson ? Sansdoute, d'autres avant elle ont montré l'utilité des centresd'intérêt. Depuis saint Jérôme, on préconise un enseigne¬ment attrayant. Mais si elle a eu le grand mérite defaire entrer les poupées à l'école et, derrière elles, toutune partie du royaume de l'enfance avec ses émerveiUe-ments, ses visions colorées et charmantes, elle a eu surtoutl'originalité de faire participer ses élèves à la conceptionmême de démonstrations trop souvent abstraites jusqu'àprésent.

A quand l'exposition internationale qui unirait les pou¬pées du monde entier dans la ronde de l'amitié ?

Mme M.-M. Rabecq-Maillard est conservateur au Musée d'His¬toire de l'Education, Institut Pédagogique National, Paris.

ÉTUDES D'EXPRESSIONS réalisées par unefillette de 12 ans. Le visage des poupées doitpouvoir refléter tous les sentiments, quel que soitle thème qu'elles vont Illustrer. L'enfant a lesexigences d'un bon metteur en scène.

Calme Rire Sévérité Colère Peine

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TOUT COMMENCE PAR UNE SIMPLE BALLE DE PING-PONG fixée à un fil de fer (ci-dessus,photo de gauche), qui devient visage avec un peu de peinture, de laine ou de peau de lapin (photo de droite).Sur la page de gauche, le matériel indispensable, fil de fer, pinces, ciseaux, colle, et personnages aux diffé¬rents stades de leur « naissance ». En bas, tirant la langue tant il est attentif, un petit garçon commence,sous l'iil émerveillé des adultes, à créer une poupée : la balle va devenir tête, souriante ou attristée.

CES DEUX POUPÉES incarnent les personnages d'un conte chinois, (agauche) Pour les costumes, les coiffures,les attitudes, les enfants ont dû lire, observer, réfléchir. La minutie des détails révèle l'exactitude de leurs recherches.

A droite, les poupées enseignent l'histoire. Les enfants ont reconstitué la hutte de chaume et de torchis des Gaulois.Note amusante : le Gaulois juché sur le toit vérifie sa construction au fil à plomb.

Photos communiquées par Mme P. Potnsart Chasson

Dédain Dégoût Peur Admiration Doute

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L'HÉMISPHÈRE AUSTRAL

A L'ÉCOUTE DU COSMOS

par Selwyn Speight

LES PLUS LÉGÈRES fissures dans la

structure du radio télescope géant, d'Aus¬tralie, structure en forme de soucoupe,sont recouvertes de peinture d'alumi¬nium; la moindre, tache de rouille pourraiten effet brouiller la réception.

LE TÉLESCOPE est aussi

haut qu'un immeuble de18 étages, et son antenneparabolique en forme desoucoupe mesure 64 mètresde diamètre. Ici, dans la

position horizontale, ellesemble déployer un para¬pluie géant au-dessus d'untroupeau de moutons.

U n radio-télescope géant qui doit « voir » dixfois plus loin dans l'univers que tous les appa¬

reils existant à ce jour, a été mis en service en Australie.Doté d'un immense réflecteur mobile, ce télescope seral'instrument le plus efficace et le plus universel de sonespèce.

L'appareil, un géant étincelant sous son revêtement depeinture à l'aluminium, s'élève dans la plaine, non loinde la ville de Parkes, à quelque 320 km à l'ouest de Sydney.L'ensemble de l'ouvrage atteint la hauteur d'un immeublede dix-huit étages ; son système d'antenne mobUe enforme de soucoupe, qui constitue « l'�il » du télescope,mesure 64 mètres de diamètre.

Construit pour l'Organisation de la Recherche scienti¬fique et industrieUe du Commonwealth d'Australie(C.S.I.R.O.), le nouveau télescope aura coûté quelque800 000 livres australiennes, environ 8 500 000 NF, dont lamoitié provient de crédits fournis par la FondationRockefeller, la Fondation Carnegie et des dons de particu¬liers en Australie.

Un seul appareil au monde lui est comparable : le grandradio-télescope de Jodrell Bank, en Angleterre. L'instru¬ment anglais est légèrement plus grand, son réflecteurmesurant 76 mètres de diamètre. Mais le télescope austra¬lien a été conçu pour une plus grande précision et uneplus grande puissance. Bien que sa situation géographiquelui permette d'étudier une partie du ciel septentrional, satâche primordiale est de sonder toute la zone sud. Ensem-

Photos Bureau Australien d'Information

ble, les deux grands radio-télescopes annoncent une èrenouvelle dans l'étude scientifique de la structure del'univers.

Ainsi, l'instrument australien peut jouer un rôle impor¬tant (comme l'a déjà fait l'appareil anglais), dans l'explo¬ration des phénomènes du système solaire. Si l'on envoiesur la lune une fusée-sonde équipée d'instruments scien¬tifiques et si cette fusée renvoie des renseignements parradio, le télescope de Parkes, mieux que tout autre, seraen mesure de capter ces signaux de faible puissance. Ilpourrait rendre les mêmes services si des fusées sembla¬bles étaient envoyées sur Vénus, Mars ou tout autre pla¬nète au cours des années à venir. Mais ce n'est pas là satâche principale. Celle-ci consiste simplement à sonderl'univers avec une précision et une portée plus grandesque jamais.

Le rôle essentiel d'un radio-télescope est de déceler lapuissance et la source des ondes radio provenant de l'es¬pace. Il n'est pas exagéré de l'appeler un « oil radio »puisqu'il perçoit effectivement une bande d'ondes dans lespectre électromagnétique.

Les renseignements suivants fournis par le ProfesseurE. G. Bowen, chef du service de radio-physique à laC.S.I.R.O. et l'un des grands spécialistes mondiaux dansce domaine (il a fait partie de l'équipe britannique qui,pendant la dernière guerre, a mis au point le radar) per¬mettent de se faire une petite idée du rayon dans lequeldevra opérer le nouveau télescope.

Une onde radio, dit le Professeur Bowen, fait sept fols letour de la terre en une seconde. Il lui faudrait huit mi¬nutes pour atteindre le soleil, 100 000 années pour traver¬ser notre propre système galactique, et plus d'un mUliond'années pour atteindre la galaxie extérieure la plus pro¬che. Elle mettrait cinq milliards d'années pour touchercertaines étoiles lointaines que nous pouvons observer.

Pour être efficace, pour que l'image soit bien nette, 11faut non seulement que « l'gil du télescope soit précismais aussi très grand, aussi grand que possible dans cer¬taines limites. De plus, l'instrument doit pouvoir « regar¬der j> dans toutes les directions, exactement comme le faitl' humain.

La construction du télescope a posé ainsi des problèmesmécaniques d'une extrême complexité. L'énorme réflec¬teur mobile qui en constitue l' doit pouvoir observer etsuivre automatiquement une galaxie, le soleil, les planètesou bien un homme évoluant dans l'espace. U doit se mou¬voir doucement avec une précision extrême en se réglantautomatiquement pour compenser la rotation de la terresur son axe et son trajet autour du soleil, et afin de com¬penser aussi les mouvements de l'objet observé. Le téles¬cope doit pouvoir scruter sans arrêt un secteur donnédu ciel en enregistrant n'importe quel phénomène.

Son réflecteur doit être assez solide pour supporter lestempêtes les plus violentes, et assez rigide pour ne pas sedéformer ; il doit pouvoir résister aux intempéries et auxeffets corrosifs des éléments.

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SUITE PAGE 28

A L'ÉCOUTE DU COSMOS (suite)

Questions et réponsesd'outre-monde

Les Ingénieurs anglais qui ont conçu l'appareil et l'usineallemande qui l'a fabriqué ont dû résoudre un autre pro¬blème délicat : celui du contrôle très précis de la directiondu réflecteur. La solution adoptée consiste à placer unpetit dispositif de commande sur le centre de rotation dutélescope. Cet Instrument peut « viser » n'importe quelpoint du ciel ou suivre à la trace avec un haut degréd'exactitude n'importe quel objet céleste. Il contrôle etdirige les mouvements du réflecteur qui est son « esclave ».

Les signaux radio sont captés par le réflecteur, dirigéssur une petite antenne de réception située en son foyer,puis ampUflés par un procédé électronique qui permet deles examiner. Pour éviter une perte de puissance pendantla transmission de ces signaux extrêmement faibles, unpremier amplificateur a été placé au foyer dans une cabinemaintenue à une grande distance au-dessus du réflecteurpar trois bras en tubes d'acier.

Ceci a posé un nouveau problème : celui de l'accès à lacabine aérienne. La solution : installer dans les bras en

tubes d'acier non seulement des échelles mais égalementun ascenseur assez grand pour contenir un homme. Maisalors que la plupart des ascenseurs se meuvent verticale¬ment, celui-ci doit pouvoir fonctionner dans n'importequelle position.

Le télescope, qui s'élève dans la vallée du Goobang, enNouveUes-Galles-du-Sud, à 25 km. environ de la ville deParkes, n'est qu'un élément d'un vaste ensemble d'instal¬lations prévues pour la région. La CS.I.R.O. compte yétablir le principal centre d'études radio-astronomiques del'hémisphère sud.

L'emplacement choisi offre deux grands avantages : iln'y a pas de parasites (qui sont aussi gênants en radio

astronomie que les lumières d'une ville en astronomieoptique) et le climat y est tempéré (les fortes variationsde température pouvant nuire également aux obser¬vations) .

Toute une gamme d'instruments radio-physiques desti¬nés à l'étude du cosmos, ainsi que des ateHers, des maisonsd'habitation pour le personnel et un petit aérodrome serontinstallés à proximité. Un deuxième radio-télescope, pluspetit puisque son réflecteur ne mesurera que 18 m de dia¬mètre, et qui pourra se déplacer sur plusieurs kilomètresde rails, complétera les Installations.

Si l'Angleterre et l'Australie sont les pays les plus avan¬cés en radio-astronomie, c'est, de l'avis du professeurBowen, le résultat de l'expérience que leurs savants ontacquise pendant la guerre dans le domaine du radar. LesSoviétiques et les Américains, quant à eux, ont porté leursplus grands efforts sur la recherche nucléaire, la construc¬tion et le lancement d'engins spatiaux. Ces deux pays nedisposent pas de l'équipement le plus efficace pour capterles signaux des fusées qu'ils envoient dans l'espace. Lacollaboration des uns et des autres, grâce à ces perfor¬mances complémentaires, restera donc un facteur essen¬tiel du progrès dans la prospection de l'univers.

L'installation de Parkes doit prendre en charge, à elleseule, tout le ciel austral. Dans l'Hémisphère nord, d'au¬tres radio-télescopes vont être mis en service (commecelui de Nançay, France, qui vient d'achever la premièrephase de sa construction). Ces instruments seront doncvoués, chacun, à des tâches plus spécialisées.

Quels sont les problèmes que le radio-télescope deParkes pourra aider à résoudre ? « Nous ne savonspas », dit le professeur Bowen, « si l'univers a des limitesou s'il s'étend à l'infini dans toutes les directions ; s'ila eu un commencement et s'il aura une fin, ou s'il fautle considérer comme éternel ; ni s'il y a sur d'autres pla¬nètes des êtres doués d'Intelligence. On a échafaudé là-dessus des quantités de théories et d'hypothèses, mais ily a très peu de faits pour les étayer. Voilà les grands pro¬blèmes que nous tentons de résoudre... Nous espérons que,grâce aux nouveaux radio-télescopes le nôtre et ceuxdes autres nous parviendrons à apporter un début desolution. »

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L'ÉNORME SOUCOUPE du radio-télescope est capable de capter des ondes radio issues des plus lointainesrégions de l'univers, à une distance de 5 000 millions d'années lumière. Le réflecteur est posé sur une tourelletournante, elle-même soutenue par une solide tour de béton armée, et peut se déplacer dans le plan vertical demanière à viser n'importe quel point du ciel. Le dessin (à droite) Indique les principales parties du télescope.

BH^Bni

La partie intérieure du réflecteurd'un diamètre de 16 m 50 environ

est couverte d'un revêtement

spécial qui permet de capter desondes ultra-courtes

Photos Bureau Australien d'Information

Environ 57 mètres

au-dessus du sol

Crémaillère d'élé¬

vation pour le dé¬placement du té¬lescope dans leplan vertical

CHEFS-D'cUVRE DE L'ART

MÉDIÉVAL BULGARE

par

Assène Vassilev

Des ruvres peu connues jus¬qu'ici offrent cependant un inté¬rêt capital. Ainsi en est-il de lapeinture murale bulgare du XIIeau XVe siècle. Les fresques reli¬gieuses nous sont parvenuespresque intactes ; elles permettentde s'attacher à un art qui, pourrévéler de profondes influencesbyzantines n'exclut point l'ex¬pression du génie national bul¬gare* L'Album de reproductionsen couleurs qui vient d'être publiédans la célèbre « Collection

Unesco de l'Art mondial » per¬met d'apprécier jusque dans ledétail ces rares merveilles créées

au long des siècles.

L'art de la céramique, toujoursvivant en Bulgarie, remonte à unlointain passé. Au IX* et au X* siècle,la bourgade de Patéléina était peu¬plée d'artistes qui faisaient des car¬reaux peints et vernissés pour lesrevêtements muraux, parfois à motifsreligieux, comme cet étonnantSaint-Théodore conservé au musée

de Preslav.

Vers la fin du vir3 siècle, les Protobulgares, ve¬nant de l'Est, pénétrèrent dans la péninsule des

Balkans et fondèrent leur Etat entre le Danube et les

monts Balkans. Le premier empire bulgare englobait tou¬tes les tribus slaves qui peuplaient cette région. Dès lors,une nouvelle culture se superposa aux traditions ancien¬nes, héritées des Thraces, des Grecs et des Romains. LesProtobulgares étaient de remarquables orfèvres et d'ha¬biles sculpteurs ; quant aux Slaves locaux, leur science desmotifs ornementaux tissus, broderies ou sculpture surbois allait exercer une influence déterminante sur l'art

bulgare proprement dit.

Le premier royaume bulgare précède la dynastie desCarolingiens dont l'Empire touchait, plus tard, aux fron¬tières de la Bulgarie.

Les monuments de la culture, créée pendant la périodede 681 à 1018 (date de la conquête de la Bulgarie parByzance), furent détruits au cours des siècles suivants etsurtout durant la domination turque. Pourtant un grandnombre d'objets, mis à jour au cours d'une centaine d'an¬nées, témoignent des grandes réalisations des Bulgaresaussi bien dans le domaine de l'architecture que dans l'artde la céramique. En outre, les descriptions des auteurs

Photo Gouvernement bulgare

contemporains nous donnent une idée de l'aspect de lacapitale bulgare et de son essor culturel pendant le hautMoyen Age.

Des documents nous informent qu'au ix° siècle déjà lespalais de Pliska, la première capitale bulgare, étaient déco¬rés de fresques. Plus tard, la capitale bulgare fut trans¬férée à Preslav. Selon les témoignages des contemporains,la splendeur de cette ville qui exista jusqu'à la fin dux" siècle éblouissait les étrangers. Les bâtiments étaientornés de pierres sculptées et de bois peint, les palais auxmarbres de différentes couleurs, étaient d'une beauté in¬comparable.

Presque rien ne subsiste des oeuvres d'art de l'époque :palais, églises, fresques, icônes sur bois, car Preslav futdétruite et incendiée en 967. Dans le monastère de

Patléina on a trouvé des carreaux peints du x' sièclerecouverts d'émail représentant l'image de saint Théodore.Les nombreux fours à céramiques et les fragments de car¬reaux décoratifs portant des traces de figures humainesautorisent à penser qu'alors le développement de la pein¬ture bulgare était déjà considérable. Cependant il n'estpas possible d'en suivre les étapes sous le premier empire.

Au début du xr siècle, la Bulgarie tomba sous la domi-

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LA NATIVITÉ DE LA VIERGE. Fresque du XV* siècle, monastère de Kremikovsti, exécutée après laconquête de la Bulgarie par les Turcs. La composition est dans la grande tradition bulgare du XIV* siècle, maisla verve populaire s'exprime dans cet épisode familier; coiffures et pendants d'oreilles sont ceux des femmes del'époque. La petite fileuse se sert d'une quenouille qu'utilisaient récemment encore les paysannes bulgares.

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L'ARCHANGE GABRIEL (à gauche) détail del'Annonciation, fresque de Boïana.

DÉTAIL DE LA PASSION, (ci-dessous) fresque du couvent de Zemen(1350). Il s'agit d'une buvre de caractère folklorique qui contraste avecles compositions raffinées des fresques de Boïana peintes au XIII* siècle.

L'art du portrait donne aux fresques de Boïana ( I 259) une place exceptionnelle dans la peinture du XIII* siècle.Ci-dessus, la princesse Dessislava, épouse du prince Kaloïan. Le fresquiste adjoignit leurs portraits à ceux dessaints et aux scènes évangéliques. Ci-dessous, saint Ephrem ascétique et visionnaire.

laissance d'un

style nouveau

nation byzantine. Elle ne recouvra son indépendance qu'en1187. L'influence de l'art byzantin se renforça et pourtantles artistes bulgares continuèrent à suivre la tradition éta-bHe au x' siècle. La libération du joug étranger donna uneforte impulsion à l'art national bulgare. Tirnovo, la capi¬tale du deuxième empire devint, après Constantinople, ledeuxième centre culturel des Balkans. Ses écoles d'artcontribuèrent au développement de l'art national ; grâceà la peinture bulgare de cette époque nous avons unaperçu plus exact de la peinture religieuse en Byzance.Des fresques du xiir et. du xrv siècles dépassent le niveaugénéral de l'art byzantin ; il faut dire aussi qu'elles pré¬sentent des traits caractéristiques purement nationaux.

Malgréles dévastations barbares qui eurent Heu pendantla conquête ottomane, certaines peintures échappèrent àla destruction : ainsi, les fresques de l'église de Boïana,justement célèbres ; celles de la chapeUe de Berendé, deschapelles rupestres d'Ivanovo, de l'église de Zemen. Datanttoutes du deuxième empire bulgare (1187-1396), eUescomptent parmi les chefs-d'Auvre de l'art médiéval dansles Balkans.

Les fresques de Boïana se distinguent par les innova-

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SUITE PAGE 32Photos & Unesco. Album " Bulgarie '

ART MÉDIÉVAL BULGARE (suite)

La découverte

du visage

tions que l'artiste bulgare a apportées dans l'art byzantin.Leur style permet d'affirmer qu'elles sont antérieures auxconceptions nouvelles de la première période de la Renais¬sance italienne. Le maître de Boïana travaillant auxnr siècle a abandonné les schémas de la peinture deson époque et créé des muvres remarquables, d'une exé¬cution technique parfaite. Les différentes images duChrist, l'ange dans 1' « Annonciation », la « Descente auxenfers », la « Cène », la « Crucifixion », le « Christ parmiles docteurs », 1' « Ascension » et plusieurs autres compo¬sitions, ainsi que les images de saint Euples, de saint Eus-trate, de saint Damlen, de saint Euphrème, des saints dia¬cres et des saints guerriers sont peintes d'une manière siréaliste et avec tant de senslbiUté qu'eHes sont sans ana¬logies dans l'époque. Plusieurs sujets religieux sont enri¬chis d'éléments nationaux, empruntés à la vie quotidiennedes Bulgares. On y trouve aussi quatre portraits, le sei¬gneur féodal local, Kaloian, sa femme Desislava, le roiConstantin et la reine Irène. L'artiste anonyme, sorti dequelque atelier de TIrnovo, a réussi à rendre d'une ma¬nière remarquable les traits individuels, aussi bien phy¬siques que spirituels, de ses personnages. Ces portraits sontde véritables chefs-d'ruvre non seulement de l'art dansles Balkans, mais de l'art européen au xiii' siècle.

Après les fresques de Boïana (1259), la pein¬ture bulgare continue à se développer pendant

un siècle et demi, jusqu'à la conquête de la Bulgarie par lesTurcs (1396). Des fresques très intéressantes datant duXlir et du XIV siècle sont conservées dans plusieurs cha¬pelles taillées dans les rocs près d'Ivanovo, le long deRoussenski-Lom, l'un des affluents du Danube dans l'estdu pays. La composition des scènes est remarquable et lecoloris où prédomine l'ocre doré a un charme particulier.Bien que l'artiste suive le style byzantin, son talent origi¬nal et ses conceptions nouvelles de la peinture se révèlentdans le traitement de la forme et dans sa représentationtridimensionnelle, au moyen d'une dégradation des teintes,ainsi que dans la récréation originale de la nuance psycho¬logique. Parmi les différentes compositions, dont les sujetsempruntés à la vie du Christ, il convient de mentionner :« Judas jette les trente deniers d'argent », « Des comé¬diens raillent le Christ » sujet très rare dans l'icono¬graphie religieuse le « Baiser de Judas », « Le Christdevant Anne et Caïphe ». Notons aussi deux scènes de lavie de saint Jean-Baptiste : le jugement et la décollation.

De la même époque, xrv siècle, datent aussi les fresquesdu monastère de Zemen, dans la vallée de la Strouma, cartous les murs de l'égUse sont décorés de fresques. La formedes corps et des visages est rendue par des contours, sansque l'artiste ait cherché à souligner le volume. Le colorisclair et agréable, et les détails bien exécutés donnent unattrait particulier à ce style. Certaines scènes sont incon¬nues dans l'iconographie, ainsi, le forgement des clous dela crucifixion. Les portraits des donateurs : le seigneurDeian et sa femme Dola qui ne sont pas stylisés commeles compositions et dont le coloris est plus foncé sontsaisissants.

Avec la Renaissance, le déclin de l'idéal religieux et mys¬tique du Moyen Age devient sensible, mais rien ne va alté¬rer les caractères essentiels de la peinture bulgare alorsque l'architecture évoluera considérablement pendant ladomination turque. Jusqu'au xvni* siècle, le très curieuxéquilibre entre composition savante et détail réaliste at¬teint par les peintres du second empire va continuer àguider les artistes.

Photo © Unesco, Album " Bulgarie

Dans la chapelle de Boïana, une rangée de saintsest peinte au bas des murs, sous les scènes de la viedu Christ. Ici, saint Laurent.

32 ALBUM D'ART DE L'UNESCO : " BULGARIE. PEINTURES MURALES DU MOYEN AGE " ( NEW YORK GRA¬

PHIC SOCIETY, 93, EAST PUTNAM AVENUE, GREENWICH, CONNECTICUT, ETATS UNIS) PRIX, 18 DOLLARS

Nos lecteurs nous écriventLA CHIRURGIE

PARACHÈVE L'

DE LA MÉDECINE

J'ai pris beaucoup d'intérêt à lalecture de votre article sur « La

Journée mondiale des lépreux », parRaoul Follereau (janvier 1961). Jesuis moi-même intéressé par la réhabi¬litation des malades lépreux, et j'ai¬merais signaler qu'une remarque faitedans le dernier paragraphe de cetarticle est regrettable. « Restent ceuxqui sont infirmes, mutilés, ou dontles faces ravagées les dénoncent àjamais... Pour eux, la création s'im¬pose d'hospices, sous forme de petitsvillages où ils vivront entre eux etoù tout sera fait pour adoucir leursort et leur faire oublier. Irrécupé¬rables, ils n'en sont pas moins deshommes, la société venue trop tard àleur secours leur doit ses soins, sonrespect et son amitié. »

Je voudrais souligner que leDr Paul Brand de Vellore a refait

une main déformée par la lèpre depuisquinze ans, et que j'ai moi-même faitune opération esthétique de la faceà la suite d'une lèpre de trois ans.Il est presque toujours possible deremodeler complètement un visage,même terriblement déformé si le ma¬lade le veut.

N. H. Antia

Bombay, Inde

A UN EXPLOIT NORVÉGIEN

UNE PHILOSOPHIE ÉCOSSAISE

Votre article sur Fridtjof Nansen(novembre 1961) commence par cettecitation de Thomas Carlyle : « Unhomme doit être courageux, il doitaller de l'avant et se conduire en

homme. » Or, Thomas Carlyle est nédans un village appelé Ecclefecham,près de Dumfries, en Ecosse. Il étaitdonc Ecossais et non pas Anglaiscomme on le déclare dans cet article.

Après tout, Nansen a fièrement rap¬pelé et honoré sa nationalité dans lessolitudes de l'Arctique.

Gordon Murray

Glasgow, Ecosse

ABOU SIMBEL,

VICTOIRE DE L'ESPRIT

Je tiens à vous dire tout l'intérêtque j'ai pris à la lecture de votrenuméro d'octobre consacré à la sau¬vegarde des monuments de Nubie.Il est évident que si notre générationpeut encore léguer aux siècles àvenir ce prestigieux héritage, ce seragrâce à l'intervention de l'Unesco et

aux efforts de ceux qui ont réponduà son pressant appel. Qu'en notresiècle de matérialisme l'Unesco soitarrivé à faire admettre .aux plus

grands comme aux plus humblesd'entre nous la nécessité d'un sacrifice

pour une chose dont l'essentiel ne sevoit point, n'est-ce pas là une suvreplus audacieuse et aussi gigantesqueque celle entreprise par les grandspharaons bâtisseurs.

Lucienne Belvaux

Semur-en-Auxois, France

RÉALISATIONS SUD-AFRICAINES

J'ai vu beaucoup d'articles relatifsà l'éducation dans les Etats Noirs du

Nord de l'Afrique, mais j'ai cherchéen vain un article ou des photogra¬phies consacrés à ce qui est fait dansla République Sud-Africaine pourl'indigène Bantou. Le développementisolé est condamné dans presque tousles pays d'Europe, et naturellementdans le bloc afro-asiatique, sans tou¬tefois qu'aucun pays n'ait cure du réelétat de choses ici. N'est-ce pas votretâche de les éclairer, et par là-mêmed'établir de meilleurs contacts entre laRépublique Sud-Africaine et le restedu monde ?

C'est avec l'argent des contribuablesBlancs de la République que l'on aconstruit, et que l'on construit deshôpitaux, des églises, des écoles, desuniversités, des logements, et descentres récréatifs pour la populationbantoue. Il y a un afflux constantd'indigènes des pays voisins dans laRépublique, parce que les conditionsd'existence y sont meilleures que dansleurs pays d'origine.

D. A. Jooste

Potchefstroom

République Sud-Africaine

Le nombre de lettres adressées chaqueJour au Courrier de l'Unesco (sur notrephoto l'une des quatre livraisons posta¬les quotidiennes à nos éditions parisien¬nes) accroît sans cesse la difficulté derépondre à heure et à temps à noscorrespondants. Continuez à nous écrire,nous vous en prions, mais. essayez defaire de courtes lettres.

UNE RÉUSSITE

On doit attribuer pour une bonnepart le succès de la conférenced'Arusha à la nouvelle attitude que

les participants africains eux-mêmesont manifestée à l'égard des ressources,uniques en leur genre, constituées parla grande faune. Les états modernesde l'Afrique désirent sérieusementpoursuivre et accroître leurs effortspour la protection de la grande fauneet la compréhension et l'appui desorganisations internationales les yencouragent vivement. Votre numérod'août, consacré à ce patrimoine mon¬dial que constitue la grande faune,prouve l'intérêt que l'Unesco porte àce problème et, de plus, le choixexcellent des photographies de cou¬verture montre assez que l'Organisa¬tion a compris le problème « ducommencement de la fin ». Ainsi,vous ne pouviez être plus heureuxqu'en choisissant l'éléphant, le plusétonnant certes, mais aussi, de tous lesanimaux, le plus apte à s'adapteraprès l'homme.

Général G. Watterson

Secrétaire général de l'IUCNMorges, Suisse

UNE REGRETTABLE ERREUR

On m'avait présenté votre journalcomme étant d'un intérêt « culturel »

en général, et traitant des sciences,de peinture, de musique, etc.

Depuis que je suis abonnée, je n'airetenu qu'un article sur les poissons,ce qui est mince, vous l'avouerez 1

Etant donné que je ne suis ni Juiveni Arabe ni étrangère de couleur ni...institutrice, ce qui doit constituer vosseuls lecteurs satisfaits, je peux vousassurer que je regrette fort cet abon¬nement, dont la lecture ne m'a réservéjusqu'à présent aucune satisfaction.

M. Petit,Paris

France

ÉCLAIREZ NOTRE LANTERNE

Dans votre « Courrier » (mai 1961),André Maurois s'exprime ainsi :

« Notre civilisation est une sommede connaissances et de souvenirs accu¬

mulés par les générations qui nous ontprécédés. Nous ne pouvons y partici¬per qu'en prenant contact avec lapensée de ces générations. Le seulmoyen de le faire et de devenir ainsiun homme « cultivé », c'est la lec¬ture. »

Je suis complètement d'accord,mais on peut se demander : « Quefaut-il lire? » En marge des goûtspersonnels, toujours discutables, ilexiste sans doute une série de livres-clé, également profitables à tous. Ilserait donc utile que vous nous orien¬tiez sur cette question. Du point devue de l'Unesco, quels sont donc les10, 25, 50 ou 100 ouvrages qui nedoivent manquer dans aucune biblio¬thèque ?

Leopoldo Busfillo Sanchez,La Felguera, Espagne

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Latitudes et Longit

SURSIS POUR ABOU SIMBEL

L'accord relatif aux travaux de surélévation qui mettront les temples d'Abou Simbel,en Nubie égyptienne, hors d'atteinte des eaux du Nil, lorsque le nouveau barraged'Assouan fera monter les eaux du fleuve, devra être conclu le 1*r novembre 1962

et non le 1" janvier, comme il avait été préalablement indiqué. Par conséquent, l'Unescodispose encore de neuf mois pour donner à la R.A.U. une garantie quant à la partici¬pation internationale au coût de ces travaux. Cependant, un certain nombre de travauxpréliminaires devront être effectués avant cette date.

Cette décision a été annoncée à la fin de novembre au Conseil exécutif de l'Unesco

qui vient de terminer à Paris sa 60° session. Déjà 18 pays ont donné une réponse orien¬tée dans un sens positif, sous des formes et à des degrés divers, à l'appel du Directeurgénéral de l'Unesco, qui leur demandait d'envisager leurs contributions d'après lebarème de leur participation au budget ordinaire de l'Organisation. Ce sont : l'ArabieSaoudite, Chypre, l'Equateur, la France, la Grèce, l'Irak, l'Iran, Koweit, le Liban, leLuxembourg, la Libye, Monaco, les Pays-Bas, les Philippines, la Pologne, la Tunisie,le Venezuela et la Yougoslavie. En outre, Qatar et le Saint-Siège, qui ne sont pasmembres de l'Unesco, ont offert leur participation.

Au cours des débats du Conseil, la participation du Maroc et de l'Italie a égalementété annoncée. La contribution de l'Italie dépassera nettement la somme de1 450 000 dollars qu'on lui avait proposé de verser. Par ailleurs, les Etats-Unis, dont leCongrès a déjà voté une somme de 4 000 000 de dollars, ont fait savoir que la propositiondu président Kennedy d'affecter six millions de dollars à la conservation de l'ensemblemonumental de Philae serait prise en considération par le Congrès au moment où devrontcommencer les travaux.

Les contributions individuelles pour la sauvegarde des monuments de Nubie peuventêtre adressées à l'Unesco, place de Fontenoy, Paris (7e), ou, dans votre pays, à unebanque dont le nom peut vous être indiqué par votre Commission nationale. Les chèques,mandats, etc., doivent être établis à l'ordre de l'Unesco (Compte Nubie). Les dons sontrecevables en toutes monnaies.

U]

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N EXPORTATEUR DE BETES

SAUVAGES, le Danemark. En général, onignore que le Danemark exporte, outre lebeurre, les et les fromages... des ourspolaires, des hippopotames, des lions et destigres. Le zoo de Copenhague vend depuiscinquante ans aux zoos du monde entierdes bêtes « sauvages » nées et élevées encaptivité, loin de leur terre d'origine. Unedame hippopotame, âgée de 36 ans, mèrede 15 petits hippopotames, a aujourd'huitoute une descendance qui fait carrièredans les jardins zoologiques d'Argentine,du Brésil, de France, d'Allemagne, desPays-Bas, d'URSS et des Etats-Unis. Desours polaires, nés à Copenhague, jouissentd'une excellente réputation. L'once, ouléopard des neiges de l'Himalaya, mit aumonde une nichée dans ce même zoo. Et

quand les organisateurs du festival Ander¬sen eurent besoin d'une cigogne à Tokio,elle arriva de Copenhague par avion !

UN TRAITE DE PAIX VIEUXDE 4 500 ANS. Le plus ancien destraités de paix connu vient de figurerdans une exposition de* la collectionbabylonienne de l'Université de Yaleà New Haven, Etats-Unis. Il mit finaux luttes qui opposèrent, pendant cinqcents ans, les états sumériens de Lagash

et d'Umma, et il est gravé en caractèrescunéiformes sur un bloc d'argile enforme de ballon ovale.

T,ELEPHONE SPATIAL. Les ser¬

vices de recherches interplanétaires améri¬cains mettent au point un système qui per¬mettrait de relayer des messages télépho¬niques et télégraphiques depuis un satel¬lite évoluant à quelque 35 000 kilomètresde la terre. Un engin expérimental pesant25 kg sera lancé l'année prochaine sur uneorbite synchronisée avec la rotation de laterre. Son équipement ne sera plus com¬posé de simples réflecteurs, mais d'appa¬reils « actifs » permettant de retransmettredes messages.

DES RATS DE BIBLIOTHEQUE.En Birmanie, ce sont les filles. Une en¬quête vient de montrer qu'elles lisentbeaucoup plus que les garçons. La So¬ciété de Traduction de Birmanie a faitcette enquête en liaison avec le pro¬gramme de l'Unesco pour la productiondu matériel de lecture en Birmanie, àCeylan, au Pakistan et en Iran.

ce qui a trait à cet aliment fondamental,depuis les civilisations antiques jusqu'à nosjours, Le musée effectue des recherchessur l'histoire du pain et collectionne lesouvrages qui s'y rapportent. Ses salles d'ex¬position présentent une vaste collection dematériel de boulangerie utilisé à traversles âges, ainsi que des duvres d'art qui ontpour thème le pain.

METRO AUTOMATIQUE. Le pre¬mier train automatique des Etats-Unisroulera bientôt sous les rues de New

York. Une rame de métro reliera, en

effet, Grand Central Station à TimesSquare, distant d'environ 800 mètres.Le départ et l'arrêt du train, de mêmeque l'ouverture et la fermeture desportes s'effectueront sans l'interventiond'un conducteur ni d'un contrôleur. Les

man du train seront télécomman¬

dées par les impulsions électriques trans¬mises le long des rails.

Stations marémotricesDANS LE GRAND NORD. L'URSS vient

de décider la construction d'une centrale

marémotrice sans la baie de Motovo, surla mer de Barents. Cette station, qui serainstallée à Kislogouba, au nord-ouest deMourmansk, aura une puissance de l'ordrede 1 200 kilowatts, et produira de l'éner¬gie indépendamment de l'inégalité desmarées. Des plans sont actuellement àl'étude pour la construction d'une centralemarémotrice géante sur la mer Blanche.

JEUX ET JOUETS D'AUTREFOIS.On pourra voir jusqu'au 10 mars pro¬chain, à l'Institut Pédagogique National,à Paris, une remarquable exposition quisouligne le rôle éducatif des jeux et desjouets à travers les âges, <t Jeux etjouets d'autrefois ». Elle a été organiséepar le conservateur du Musée d'Histoirede l'Education, Mme M.-M. Rabecq-Maillard (l'auteur de l'article publié enpage 22). Citons au nombre des piècesrares et curieuses prêtées par divers

d'Allemagne, des Pays-Bas, deGrande-Bretagne et de France, un jeud'échecs qui appartint à Charlemagne,l'éléphant de Louis XV et des jeux decartes de Louis XVI.

S

ILN MUSEE DU PAIN : Il a été

créé à Ulm en Allemagne. On y a réuni tout

HAKESPEARE A NEW YORK :

Le théâtre de Shakespeare a attiré ces der¬niers temps une foule de spectateurs auWollman Memorial Theatre, situé dansCentral Park, à New York. L'entrée étaitlibre et les représentations avaient lieu enplein air. C'est le Sixième Festival Sha¬kespeare aux Etats-Unis, réalisé grâce àplus de 5 000 donateurs, syndicats, firmescommerciales, fondations, étudiants et au¬tres participants volontaires, outre les cré¬dits alloués par la municipalité de NewYork.

Study AbroadÉtudes à l'étranger

Estudios

en el extranjeroVient de paraître :

Nouvelle édition 1962

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L'année dernière, plus de 200 000 étudiants environétaient inscrits dans des établissements d'enseigne¬

ment supérieur de pays autres que le leur. Cela sulfità montrer l'utilité de ce manuel, publié par l'Unesco,

et à expliquer son grand succès. Le volume XIII, qui vient

de paraître, apporte les plus récentes informations sur115 000 bourses de types divers, offertes par des gouver¬nements, des universités, des fondations et autres ins¬

titutions, dans plus de 100 pays et territoires. Un nouveausystème de classement aide à trouver rapidement laréponse à toutes les questions : qui peut être candidat?

quelles matières peut-on choisir? où peut-on les étu¬dier? où faut-il s'adresser et quelles formalités doit-on

remplir? Ce manuel est d'une valeur inestimable pour

quiconque envisage d'aller étudier à l'étranger; c'estun ouvrage de référence Indispensable à tous les centresd'information, bibliothèques et universités; il constitue

un instrument efficace pour le développement des rela¬tions internationales dans le domaine de l'éducation.

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Agents de vente des publications de l'UNESCOVoui pouvez commander les publications de

l'Unesco chez tous les libraires ou en vous adressant

directement à l'agent général (voir liste ci-dessous),Vous pouvez vous procurer, sur simple demande,les noms des agents généraux non inclus dans laliste. Les paiements peuvent être effectués dansla monnaie du pays. Les prix de l'abonnementannuel au «COURRIER DE L'UNESCO» sont

mentionnés entre parenthèses, après les adressesdes agents.

ALBANIE. N. Sh. Botimeve, Nairn Frasheri, Tirana.ALLEMAGNE. Unesco Kurier; Vertrieb, Bahrenfelder-Chaussee 160, Hamburg-Bahrenfeld, CCP 276650.(DM 8). Unesco-Publikationen : R. Oldenbourg Verlag,Unesco-Vertrieb für Deutschland, Rosenheimerstrasse145, Munich 8. AUTRICHE. Verlag Georg Frommeet C°, Spengergasse 39, Vienne V. (Seh. 50.-). BEL¬GIQUE. Office de Publicité S.A., I 6, rue Marcq, Bruxelles,C.C.P. 285,98. N.V. Standaard-Boekhandel, Belgiëlei 151,Anvers. Seulement pour le «Courrier» (100 FB et lesdiapositives (488 FB) : Louis de Lannoy ,22, Place deBrouckère, Bruxelles. C. C. P. 338.000. BRɬSIL. Libraire de la Fundaçao Getulio Vargas, 186,Praia de Botafogo. Caixa Postal 4081, Rio de Janeiro.BULGARIE. Raznoïznos, I, Tzar Assen, Sofia.CAMBODGE. Librairie Albert Portail, 14, avenueBoulloche, Phnom-Penh. CANADA. Imprimeurde la Reine, Ottawa, Ont. ($ 3.00). CHILI« Le Courrier » seulement : Comisión Nacional

de la Unesco en Chile, Calle San Antonio, 255-7a Piso,Santiago. Editorial Universitaria, S. A., Avenida B.O'Higgins 1058, casilla 10220, Santiago. (1.75 E°).

DANEMARK. Ejnar Munksgaard A/S, Tidsskriftafde-lingen 6, Nörregade, Copenhague K. (Kr. 12). ES¬PAGNE. Pour le « Courrier de l'Unesco » : Ediciones

Iberoamericanas, S.A., calle de Oñate I 5 Madrid. (Pts 90).Autres publications : Libreria Cientifica Medinaceli,

Duque de Medinaceli. 4, Madrid, 14. - ÉTATS-UNIS.Unesco Publications Center, 801, Third Avenue, NewYork 22, N.Y. (S 5). et, sauf pour les périodiques :Columbia University Press, 2960 Broadway, New York27, N.Y. FINLANDE. Akateeminen Kirjakauppa,2, Keskuskatu, Helsinki, (mk. 540). FRANCE. Li¬brairie Unesco, Place de Fontenoy, Paris, C.C.P. 12.598-48. (NF. 7.00). GRÈCE. Librairie H. Kauffmann, 28,rue du Stade, Athènes. HAITI. Librairie «A la Cara¬velle », 36, rue Roux, B.P. I I I, Port-au-Prince.HONGRIE. Kultura, P. O. Box 149, Budapest, 62.ILE MAURICE. Nalanda Co. Ltd., 30 Bourbon Str.,Port-Louis. INDE. Orient Longmans Private Ltd. :17 Chittaranjan Avenue, Calcutta 13. Indian MercantileChamber, Nicol Rd., Bombay I; 3 6a. Mount Road,Madras 2. Gunfoundry Road, Hyderabad I; KansonHouse, 24/1 Asaf Ali Road, P. O. Box 386, Nouvelle-Delhi. IRAN. Commission nationale iranienne pourl'Unesco, avenue du Musée, Téhéran. IRLANDE.The National Press, 2 Wellington Road, Ballsbridge,Dublin (10/-). ISRAEL. Blumstein's Bookstores,Ltd., 35, Allenby Road and 48, Nahlat Benjamin Street,Tel-Aviv. ( l£ 4.-). ITALIE. Libreria CommissionariaSansoni, via Gino Capponi 26, Casella Postale 552,Florence, (lire 1.200), et, sauf pour les périodiques :Bologne : Libreria Zanichelli, Portici del Pavaglione,Mi\an : Hoepli, via Ulrico Hoepli, 5. Rome : LibreríaInternazionale Ulrico Hoepli, Largo Chigi & LibreríaInternazionale Modernissima, via délia Merced e 43,45.Turin ; Libreria Paravia, via Garibaldi, 23. JAPON.Maruzen Co Ltd, 6, Tori-Nichome, Nihonbashi, P.O.Box 605 Tokyo Central, Tokyo (Yen 670). LIBAN.Librairie Antoine A. Naufal et Frères B. P. 656, Bey¬routh. LUXEMBOURG. Librairie Paul Brück,

22, Grand'Rue, Luxembourg. MAROC. Centre dediffusion documentaire du. BE.P.L, 8, rue Michaux-Bellaire, Boîte postale 211, Rabat. (DH : 7, 17). MAR

TINIQUE. Librairie J. Bocage. Rue Lavoir B.P. 208,Fort-de-France. (N.F. 7,00). MEXIQUE. Editorial.Hermes, Ignacio Mariscal 41, Mexico D. F., Mexique,($18 M. mex.). MONACO. British Library, 30. Biddes Moulins, Monte-Carlo (NF. 7.00). NORVÈGE.A.S. Bokhjornet, Lille Grensen, 7, Oslo. Pour le « Cour¬rier » seulement : A.S. Narvesens, Stortingsgt. 4, Oslo.(Kr. 13,20). NOUVELLE-CALÉDONIE. Reprex,Av. de la Victoire, Immeuble Paimbouc, Nouméa ( I 30 fr.CFP). NOUVELLE-ZÉLANDE. Unesco PublicationsCentre, 100, Hackthorne Road-Christchurch. (10/).PAYS-BAS. N.V. Martinus Nijhoff Lange Voorhout 9,La Haye (fl. 6). POLOGNE. « RUCH » Ul. Wiloza Nr.46. Varsovie 10 (zl. 50). PORTUGAL. Dias & An-drada Lda, Livraria Portugal, Rua do Carmo, 70, Lisbonne.

ROUMANIE. Cartimex, Str. Aristide-Briand 14-18,P.O.B- 134-135, Bucarest. ROYAUME-UNI. H. M.SÉNÉGAL. La Maison du livre, 13, av. Roune Dakar,Stationery Office, P.O. Box 569, Londres S.E.I. (10/-).

SUÈDE. A/B CE. Fritzes, Kungl. Hovbokhandel,Fredsgatan 2, Stockholm, 1 6. Pour « Le Courrier »seulement : Svenska Unescoradet, Vasagatan 15-17,Stockholm, C. (Kr. 7.50). SUISSE. Europa Verlag, 5,Rïmistrasse, Zürich. C.C.P. Zürich VIIJ 23383. Payot,40, rue du Marché, Genève. C.C.P. 1-236. Pour « LeCourrier » seulement : Georges Losmaz, I, rue des Vieux-Grenadiers, Genève, CCP 1-481 I (Fr. S 8). TCHɬCOSLOVAQUIE. Artia Ltd. 30, Ve Smeckách. Prague2. TURQUIE. Librairie Hachette, 469, Istiktal Caddesi,Beyoglu, Istanbul. U.R.S.S. Mezhdunarodnaja Kniga,Moscou, G-200. URUGUAY. Unesco Centro deCooperación Científica para América Latina, BulevarArtigas 1320-24, Casilla de Correo 859, Montevideo(20 Pesos). VIET-NAM. Librairie PapeterieXuanThu, 185-193, rue Tu-Do, B.P. 283, Saigon.YOUGOSLAVIE, jugoslovenska Knjiga, Terazije 27/1 I,Belgrade.

LES DESCENDANTS DES INCASBien des siècles ont passé depuis qu'a disparu lepuissant empire Inca, mais les Indiens des Hauts

ont gardé les caractéristiques physiques, la langue,les coutumes et les croyances de leurs ancêtres.Exemple qui prouve assez qu'une civilisation nemeurt pas tout à fait tant qu'un peuple garde sestraditions (voir article page 15). photo © Almaty