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Le numéro 3Mars 2010 Mensuel - Nouvelle Série Année XLV n° 331 (521) ON CACHE LA VRAIE DOCTRINE DE L ’ÉGLISE Mgr Gianfranco Ravasi, bibliste renommé, considéré par la presse laïque comme le « ministre de la Culture du Vatican », a publié dans le supplément littéraire de Il Sole 24 ore (17 janvier 2010, p. 39), un court article inti- tulé « Prier avec méthode », dans lequel il rappelle aux lecteurs de ce journal politique- ment ultra-correct le centenaire (symbolique) de la naissance du mouvement œcuménique, qui vit le jour au milieu du dix-neuvième siècle à l’initiative des protestants (et avec une large participation, rappelons-le, des cercles théosophiques) pour l’unification de toutes les « dénominations chrétiennes ». Mgr Ravasi rappelle synthétiquement les principales institutions de ce mouvement, qui connut un développement décisif avec la constitution en 1948 à Amsterdam du « Conseil Œcuménique des Églises », auquel « sont actuellement associées 249 Églises protestantes, anglicanes et orthodoxes. L’É- glise catholique – qui au commencement sui- vit le Conseil avec beaucoup de réserve, d’hésitations et de perplexité – commença après Vatican II à y participer activement, et depuis, le dialogue œcuménique a connu une impulsion très intense… » Les lecteurs, qui ne connaissent pas la réa- lité des faits, sont poussés par Mgr Ravasi à croire que la position initiale de l’Église catholique à l’égard du mouvement œcumé- nique a été simplement une position de « réserve » marquée, conjuguée aux « hésita- tions et à la perplexité ». Mais il s’est agi de bien autre chose ! Le Pape condamna ferme- ment et publiquement tout l’œcuménisme du mouvement œcuménique, œcuménisme qui était alors appelé « panchristianisme ». Il le condamna pour ce qu’il est : une grave erreur doctrinale qui attente directement au dépôt de la foi. Et il maintint l’interdiction faite aux catholiques d’y participer, interdiction déjà imposée sous Pie IX par une lettre du Saint- Office aux évêques anglais, le 16 septembre 1864 1 . Cette condamnation, qui englobe les précédentes, est contenue dans la Lettre ency- clique Mortalium Animos, publiée par Pie XI LES AMNÉSIES DE MGR GIANFRANCO RAVASI ET LA VRAIE DOCTRINE ŒCUMÉNIQUE DE L’ÉGLISE le 6 janvier 1926, la sixième année de son pontificat. La suprême Autorité ne perdit pas de temps pour mettre en garde les catholiques contre le grave danger que représentaient pour leurs âmes les fausses doctrines « œcuméniques ». Les représentants de l’Église « conciliaire » d’aujourd’hui, contaminés par les erreurs néo- modernistes que nous connaissons, parmi les- quelles ce que l’on appelle l’« œcuménisme » est peut-être la plus scandaleuse, se gardent bien de rappeler au public en général et aux fidèles en particulier l’enseignement du Magistère préconciliaire, car les fausses doc- trines qu’ils propagent seraient alors impi- toyablement mises à nu. Nous chercherons donc à combler cette lacune, rappelant aux lecteurs la vraie doctrine de la sainte Église sur l’œcuménisme. LA CONDAMNATION DU FAUX ŒCUMÉNISME, SOURCE DE NATURALISME ET DATHÉISME Le sujet de l’Encyclique est « l’unité de la véritable Église », dont la notion doit être dis- tinguée de celle de la fausse unité religieuse, défendue par les membres de sectes protes- tantes. Nous citerons le texte de l’Encyclique à partir de la version française disponible sur le site internet du Vatican (www.vatican.va) 2 . Le Pape commence par rappeler comment se répandaient à cette époque, marquée par de graves conflits, le sentiment de « fraternité universelle » et l’idée de l’« unité » du genre humain. On cherchait donc à appliquer aussi ces idées à la religion, y compris la religion catholique, pour arriver à la profession d’un certain nombre de doctrines capables de constituer un « fondement commun » pour la vie spirituelle des peuples. « C’est pourquoi, ils se mettent à tenir des congrès, des réu- nions, des conférences, fréquentés par un nombre appréciable d’auditeurs, et, à leurs discussions, ils invitent tous les hommes indistinctement […] De telles entreprises ne peuvent, en aucune manière, être approuvées par les catholiques, puisqu’elles s’appuient sur la théorie erronée que les religions sont toutes plus ou moins bonnes et louables, en ce sens que toutes également, bien que de manières différentes, manifestent et signifient le sentiment naturel et inné qui nous porte vers Dieu et nous pousse à reconnaître avec respect sa puissance » (MA). C’est précisément une doctrine de ce genre qui semble se trouver à la base de l’œcumé- nisme professé aujourd’hui par la Hiérarchie catholique, avec, en tête, des ecclésiastiques du type de Mgr Ravasi. Mais pourquoi ces « entreprises » des œcuménistes doivent-elles être repoussées ? Pour la simple raison que leur « théorie », poursuit le Pape, selon laquelle toutes les religions seraient bonnes en tant qu’expressions d’un sentiment de foi naturelle en Dieu, et complètement fausse. « En vérité, les partisans de cette théorie s’é- garent en pleine erreur, mais de plus, en per- vertissant la notion de la vraie religion ils la répudient, et ils versent par étapes dans le naturalisme et l’athéisme. La conclusion est claire : se solidariser des partisans et des pro- pagateurs de pareilles doctrines, c’est s’éloi- gner complètement de la religion divinement révélée » (MA). En mettant toutes les religions sur le même plan, toutes « bonnes » parce qu’elles aspire- 1. DZ/SM, 1685-1686/2885-2888. Le catéchisme romain et universel qui a été diffusé par saint Pie X en 1912 sera disponible au Courrier de Rome et à la librairie France Livres, 21 rue Monge, à partir du 18 avril (voir p. 3) 2. Lettre Encyclique Mortalium Animos de SA SAINTETÉ PIE XI, sur la vraie unité religieuse, 1928. Le Denzinger, dans la dernière édition revue et augmentée de Schönmetzer s.j., postérieure à Vatican II, rapporte seulement de cette encyclique un important passage de vingt- trois lignes, étranger toutefois à la problématique œcuménique au sens strict (DZ/SM, 2200/3683).

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Page 1: LES AMNÉSIES DE MGR GIANFRANCO RAVASI ET LA VRAIE … · Le numéro 3€ Année XLV n° 331 (521) Mensuel - Nouvelle Série Mars 2010 ON CACHE LA VRAIE DOCTRINE DE L’ÉGLISE Mgr

Le numéro 3€

Mars 2010Mensuel - Nouvelle SérieAnnée XLV n° 331 (521)

ON CACHE LA VRAIE DOCTRINE DE L’ÉGLISE

Mgr Gianfranco Ravasi, bibliste renommé,considéré par la presse laïque comme le« ministre de la Culture du Vatican », a publiédans le supplément littéraire de Il Sole 24 ore(17 janvier 2010, p. 39), un court article inti-tulé « Prier avec méthode », dans lequel ilrappelle aux lecteurs de ce journal politique-ment ultra-correct le centenaire (symbolique)de la naissance du mouvement œcuménique,qui vit le jour au milieu du dix-neuvièmesiècle à l’initiative des protestants (et avecune large participation, rappelons-le, descercles théosophiques) pour l’unification detoutes les « dénominations chrétiennes ».Mgr Ravasi rappelle synthétiquement lesprincipales institutions de ce mouvement, quiconnut un développement décisif avec laconstitution en 1948 à Amsterdam du« Conseil Œcuménique des Églises », auquel« sont actuellement associées 249 Églisesprotestantes, anglicanes et orthodoxes. L’É-glise catholique – qui au commencement sui-vit le Conseil avec beaucoup de réserve,d’hésitations et de perplexité – commençaaprès Vatican II à y participer activement, etdepuis, le dialogue œcuménique a connu uneimpulsion très intense… »

Les lecteurs, qui ne connaissent pas la réa-lité des faits, sont poussés par Mgr Ravasi àcroire que la position initiale de l’Églisecatholique à l’égard du mouvement œcumé-nique a été simplement une position de« réserve » marquée, conjuguée aux « hésita-tions et à la perplexité ». Mais il s’est agi debien autre chose! Le Pape condamna ferme-ment et publiquement tout l’œcuménisme dumouvement œcuménique, œcuménisme quiétait alors appelé « panchristianisme ». Il lecondamna pour ce qu’il est : une grave erreurdoctrinale qui attente directement au dépôt dela foi. Et il maintint l’interdiction faite auxcatholiques d’y participer, interdiction déjàimposée sous Pie IX par une lettre du Saint-Office aux évêques anglais, le 16 septembre1864 1. Cette condamnation, qui englobe lesprécédentes, est contenue dans la Lettre ency-clique Mortalium Animos, publiée par Pie XI

LES AMNÉSIES DE MGR GIANFRANCO RAVASI ET LA VRAIEDOCTRINE ŒCUMÉNIQUE DE L’ÉGLISE

le 6 janvier 1926, la sixième année de sonpontificat. La suprême Autorité ne perdit pasde temps pour mettre en garde les catholiquescontre le grave danger que représentaientpour leurs âmes les fausses doctrines« œcuméniques ».

Les représentants de l’Église « conciliaire »d’aujourd’hui, contaminés par les erreurs néo-modernistes que nous connaissons, parmi les-quelles ce que l’on appelle l’« œcuménisme »est peut-être la plus scandaleuse, se gardentbien de rappeler au public en général et auxfidèles en particulier l’enseignement duMagistère préconciliaire, car les fausses doc-trines qu’ils propagent seraient alors impi-toyablement mises à nu. Nous chercheronsdonc à combler cette lacune, rappelant auxlecteurs la vraie doctrine de la sainte Églisesur l’œcuménisme.

LA CONDAMNATION DU FAUX ŒCUMÉNISME,SOURCE DE NATURALISME ET D’ATHÉISME

Le sujet de l’Encyclique est « l’unité de lavéritable Église », dont la notion doit être dis-tinguée de celle de la fausse unité religieuse,défendue par les membres de sectes protes-tantes. Nous citerons le texte de l’Encycliqueà partir de la version française disponible surle site internet du Vatican (www.vatican.va) 2.

Le Pape commence par rappeler commentse répandaient à cette époque, marquée par degraves conflits, le sentiment de « fraternitéuniverselle » et l’idée de l’« unité » du genrehumain. On cherchait donc à appliquer aussices idées à la religion, y compris la religioncatholique, pour arriver à la profession d’uncertain nombre de doctrines capables deconstituer un « fondement commun » pour lavie spirituelle des peuples. « C’est pourquoi,ils se mettent à tenir des congrès, des réu-nions, des conférences, fréquentés par unnombre appréciable d’auditeurs, et, à leurs

discussions, ils invitent tous les hommesindistinctement […] De telles entreprises nepeuvent, en aucune manière, être approuvéespar les catholiques, puisqu’elles s’appuientsur la théorie erronée que les religions sonttoutes plus ou moins bonnes et louables, ence sens que toutes également, bien que demanières différentes, manifestent et signifientle sentiment naturel et inné qui nous portevers Dieu et nous pousse à reconnaître avecrespect sa puissance » (MA).

C’est précisément une doctrine de ce genrequi semble se trouver à la base de l’œcumé-nisme professé aujourd’hui par la Hiérarchiecatholique, avec, en tête, des ecclésiastiquesdu type de Mgr Ravasi. Mais pourquoi ces« entreprises » des œcuménistes doivent-ellesêtre repoussées ? Pour la simple raison queleur « théorie », poursuit le Pape, selonlaquelle toutes les religions seraient bonnesen tant qu’expressions d’un sentiment de foinaturelle en Dieu, et complètement fausse.« En vérité, les partisans de cette théorie s’é-garent en pleine erreur, mais de plus, en per-vertissant la notion de la vraie religion ils larépudient, et ils versent par étapes dans lenaturalisme et l’athéisme. La conclusion estclaire : se solidariser des partisans et des pro-pagateurs de pareilles doctrines, c’est s’éloi-gner complètement de la religion divinementrévélée » (MA).

En mettant toutes les religions sur le mêmeplan, toutes « bonnes » parce qu’elles aspire-1. DZ/SM, 1685-1686/2885-2888.

Le catéchisme romain etuniversel qui a été diffusépar saint Pie X en 1912sera disponible au Courrierde Rome et à la librairieFrance Livres, 21 rueMonge, à partir du 18 avril

(voir p. 3)

2. Lettre Encyclique Mortalium Animos de SA

SAINTETÉ PIE XI, sur la vraie unité religieuse,1928. Le Denzinger, dans la dernière éditionrevue et augmentée de Schönmetzer s.j.,postérieure à Vatican II, rapporte seulement decette encyclique un important passage de vingt-trois lignes, étranger toutefois à la problématiqueœcuménique au sens strict (DZ/SM, 2200/3683).

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Courrier de Rome2 Mars 2010

raient sincèrement à Dieu, on réactualise laconception déiste et illuministe de la « reli-gion naturelle » : de la religion comme pro-duit spontané de l’esprit humain, qui, pour seréaliser, n’a pas besoin de la Révélation. Etcette religion « naturelle », qui nie tout péchéoriginel, comme l’a montré son développe-ment historique, mène ensuite au « naturalis-me », c’est-à-dire à la justification de la natu-re humaine dans tous ses aspects, même ceuxqui sont liés à l’instinct et aux passions,puisque selon cette « religion » l’éthiquedevient un fait purement subjectif, laissé à lalibre disposition de l’individu, avec pourunique limite (théorique) extérieure de ne pasnuire à autrui. Il est évident que cette concep-tion est un préalable au véritable athéisme,puisqu’elle implique l’indifférence religieuse,qui est la prémisse de l’athéisme.

Mais le caractère erroné de cette concep-tion, poursuit le Pape, apparaît principale-ment dans la notion d’« unité de tous leschrétiens » qu’elle professe.

LA FAUSSE IDÉE D’UNITÉ DES CHRÉTIENSPROFESSÉE PAR LES « PANCHRÉTIENS »

Que soutiennent les hérétiques « panchré-tiens » ? « N’est-il pas juste, répète-t-on,n’est-ce pas même un devoir pour tous ceuxqui invoquent le nom du Christ, de s’abstenird’accusations réciproques et de s’unir enfinun jour par les liens de la charité des unsenvers les autres? Qui donc oserait affirmerqu’il aime le Christ s’il ne cherche de toutesses forces à réaliser le vœu du Christ lui-même demandant à son Père que ses disciplessoient “un” (Jn. XVII, 21) ? Et de plus leChrist n’a-t-il pas voulu que ses disciples fus-sent marqués et distingués des autreshommes par ce signe qu’ils s’aimeraient entreeux : “C’est à ce signe que tous connaîtrontque vous êtes mes disciples : si vous avez del’amour les uns pour les autres” (Joan. XIII,35)? » (MA). On notera : de s’aimer « les unsles autres » dans la fidélité au Christ, et nond’aimer les porteurs de fausses doctrines etsemeurs de zizanie, les « faux frères »,comme les appelle saint Paul (Gal. 2, 4).Comme on peut le voir, cette idée d’uneunion « panchrétienne » excluait a priori toutrepentir des hérétiques et leur retour au seinde l’Église catholique. Une union purementextérieure, donc, à des fins substantiellementterrestres ; une union syncrétiste et donc faus-se et superficielle ; un incroyable mélange,une authentique Babel.

Les discours des « panchrétiens » d’hiersont, à bien y regarder, les mêmes que ceuxdes « œcuménistes » d’aujourd’hui, dans l’es-prit de Vatican II. Et ce sont les mêmes dis-cours que tient Mgr Ravasi dans son article,avec d’inévitables références aux passages del’Évangile de saint Jean (17, 21), associés àun passage de saint Paul (Eph. 4, 3-6). Cesréférences sont hors de propos, car l’unitédont parlent Notre-Seigneur et les Apôtres necomprend évidemment pas les hérétiques,esprits rebelles et infidèles, opposés au dépôtde la foi et destructeurs d’âmes : cette uniténe mélange pas, et ne peut pas mélanger, leDiable (Beliar) et l’eau bénite. Il s’agit doncde l’unité (dans la foi et les mœurs) qui doit

être toujours maintenue (grâce à l’œuvre del’Église) entre ceux qui sont fidèles à l’ensei-gnement du Christ reçu par l’intermédiairedes Apôtres et de l’Église elle-même, jusqu’àla mort (« N’allez pas former avec lesincroyants un attelage disparate […] Ou bien,quelle association entre la lumière et lesténèbres ? Quel accord entre le Christ etBéliar ? » – Cor. 6, 15). En dehors de cetteunité, il n’y en a pas d’autre 3.

Mais les « panchrétiens », poursuit l’Ency-clique, voulaient précisément que tous leschrétiens, tels qu’ils étaient, deviennent« un », pour « repousser – disaient-ils – lapeste de l’impiété » qui se répand dans lemonde moderne. C’étaient des discours de cegenre, avec de continuelles invocations à lacharité chrétienne pour dépasser les divisions,qui « séduisaient même de nombreux catho-liques ». C’est pourquoi le Pape devait inter-venir auprès des fidèles et faire appel « à leurzèle pour prendre garde à un tel malheur »,celui constitué par cette « erreur assurémentfort grave, qui disloque de fond en comble lesfondements de la foi catholique » (MA).

LA SEULE VRAIE RELIGIONEST LA RELIGION RÉVÉLÉE

Ceci posé, le Pontife clarifie la notion selonlaquelle la vraie religion ne peut pas être lareligion naturelle et donc toute religion, entant que « naturelle ». La vraie religion estuniquement la religion révélée. Suivons sonraisonnement. Ce point nous semble particu-lièrement important, étant donné que la pasto-rale de la Hiérarchie actuelle a en substancelaissé cette vérité fondamentale tomber dansl’oubli.

Dieu a créé l’homme « pour le connaître etle servir ». À cette fin, il lui a donné « une loinaturelle qu’il a, en le créant, gravée dans soncœur ». Il aurait pu « dans la suite en dirigerles développements par sa providence ordinai-re ». Mais Dieu tout-puissant préféra « pro-mulguer des préceptes à observer ». Depuisles premiers temps, et jusqu’à la venue et à laprédication de Jésus il enseigna lui-même àl’homme « les obligations dues à lui, Créa-teur, par tout être doué de raison » (MA).Donc : en plus de la loi naturelle (celle, rappe-lons-le, sur la base de laquelle seront jugés lejour du Jugement les païens ayant vécu avantle Christ – Rom 2, 14-16), nos « devoirs »envers Dieu résultent de tout l’enseignementdonné par Dieu, jusqu’à la venue de Jésus.Comment s’est fait cet enseignement, exté-rieur, positif? L’explication nous est donnéepar l’Épître aux Hébreux, citée par le Pape :« Dieu, qui, à diverses reprises et en plusieursmanières, parla jadis à nos pères par les pro-phètes, nous a, une dernière fois, parlé en cesjours-ci par son Fils. » (Hébr. 1, 1 ss)

3. Pour une critique précise et approfondie del’œcuménisme actuel, en particulier sur les« ouvertures » à l’égard du judaïsme, voir lerécent et fondamental ouvrage de MGR BRUNERO

GHERARDINI, Quel accord entre le Christ etBéliar ? Observations théologiques sur lesproblèmes, les équivoques et les compromis dudialogue interreligieux, Fede e Cultura, Vérone,2009 [www.fedecultura.com].

À partir de cette exposition de l’Ency-clique, on comprend parfaitement quelle estla vraie religion. Ce n’est certainement pascelle que se fabrique l’homme, comme « reli-gion naturelle », puisqu’il existe tout unenseignement spécifiquement révélé par Dieudans le temps, des prophètes jusqu’à Notre-Seigneur. La « vraie religion » ne peut doncêtre que celle révélée par Dieu. « Il en résultequ’il ne peut y avoir de vraie religion endehors de celle qui s’appuie sur la parole deDieu révélée : cette révélation, commencée àl’origine et continuée sous la Loi Ancienne,le Christ Jésus lui-même l’a parachevée sousla Loi Nouvelle. Mais, si Dieu a parlé – etl’histoire porte témoignage qu’il a de faitparlé –, il n’est personne qui ne voie que ledevoir de l’homme, c’est de croire sans réser-ve à Dieu qui parle et d’obéir totalement àDieu qui commande. Pour que nous remplis-sions convenablement ce double devoir [croi-re la parole et obéir aux commandements] envue de la gloire de Dieu et de notre salut, leFils unique de Dieu a établi sur terre sonÉglise. Or, ceux qui se déclarent chrétiens nepeuvent pas, pensons-nous, refuser de croireque le Christ a fondé une Église, et une Égli-se unique » (MA).

VRAIE ET FAUSSE CONCEPTION DE L’ÉGLISE

Le devoir de l’Église consiste donc à nousfaire croire « sur parole » en Dieu (et c’est lafoi) et à nous faire obéir à ses commande-ments (et c’est l’éthique, qui est ici l’éthiquechrétienne). Mais les hérétiques sont « endésaccord » avec nous catholiques précisé-ment parce qu’ils n’acceptent pas l’Églisecatholique comme unique et vraie Église ins-tituée par le Christ.

« Un bon nombre d’entre eux nie que l’É-glise doive être visible et décelable extérieu-rement, en ce sens, du moins, qu’elle doive seprésenter comme un seul corps de fidèlesunanimes à professer une seule et même doc-trine sous un seul magistère et un seul gou-vernement ; pour eux, au contraire, l’Églisevisible n’est rien d’autre qu’une fédérationréalisée entre les diverses communautés dechrétiens malgré leurs adhésions à des doc-trines différentes et mêmecontradictoires. (MA) » Ce que rappelle ici lePape est justement la conception protestantede l’Église comme seule Église invisible,dans laquelle tout croyant est considéré ipsofacto comme prêtre, conception inauguréepar Luther et formellement condamnée par leConcile de Trente. C’est la conception qui setrouve logiquement à la base de l’idée protes-tante d’« unité » visible des chrétiens commesimple « fédération réalisée entre les diversescommunautés de chrétiens », qui bien enten-du y maintiennent leurs croyances particu-lières, comme si de rien n’était. Le fait quecette « fédération » héberge inévitablement etnécessairement des « communautés » avecdes doctrines non seulement différentes maisaussi « opposées », semble n’avoir aucuneimportance pour la logique « illogique » desprotestants.

Contre cette conception, contraire non seu-lement aux données historiques (à ce qu’onteffectivement dit et fait Jésus et les Apôtres)

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Courrier de Rome4 Mars 2010

mais aussi à la logique la plus élémentaire,Pie XI réaffirme, comme c’est son devoir, lajuste conception de l’Église, résultat d’envi-ron dix-neuf siècles de Magistère.

« Or, en vérité, son Église, le Christ Notre-Seigneur l’a établie en société parfaite, exté-rieure par nature et perceptible aux sens, avecla mission de continuer dans l’avenir l’œuvrede salut du genre humain, sous la conduited’un seul chef, par l’enseignement de vivevoix et par l’administration des sacrements,sources de la grâce céleste ; c’est pourquoi,dans les paraboles, il l’a déclarée semblable àun royaume, à une maison, à un bercail et àun troupeau. Sans aucun doute, cette Église,si admirablement établie, ne pouvait finir nis’éteindre à la mort de son Fondateur et desApôtres qui furent les premiers chargés de lapropager, car elle avait reçu l’ordre deconduire, sans distinction de temps et delieux, tous les hommes au salut éternel :“Allez donc et enseignez toutes les nations”(Matth. 28, 19). Dans l’accomplissementininterrompu de cette mission, l’Église pour-ra-t-elle manquer de force et d’efficacité,quand le Christ lui-même lui prête son assis-tance continuelle : “Voici que je suis avecvous, tous les jours, jusqu’à la consommationdes siècles”(Matth. XXVIII, 20) 4 ? (MA) »

L’Église visible n’a pas été instituée par leshommes mais par Dieu, par la deuxième Per-sonne de la très Sainte-Trinité. Ce n’est pasune simple congrégation ou communautéhumaine, régie par un pacte, un accordmutuel, comme dans le cas des « commu-nautés » des protestants hérétiques. L’Église areçu une mission qui est divine et qui consistedans « le salut éternel de tous les hommessans distinction de lieu ni de temps ». Pour laréaliser l’Église doit « enseigner toutes lesnations », c’est-à-dire leur enseigner la bonnedoctrine et les convaincre de sa sainteté par laforce de l’exemple (ce qui a toujours été lameilleure des prédications). Et l’Église réus-sit dans sa mission surnaturelle parce queJésus lui-même a promis d’être avec elle« tous les jours, jusqu’à la consommation dessiècles ». (Elle réussit tant qu’elle demeurefidèle au dépôt de la foi).

Ayant réaffirmé, contre les protestants, lanature visible et de société parfaite de l’Égli-se, son origine divine et sa véritable fin, lePape conclut : « Il est par conséquent impos-sible, non seulement que l’Église ne subsisteaujourd’hui et toujours, mais aussi qu’ellene subsiste pas absolument la même qu’auxtemps apostoliques ; – à moins que nous nevoulions dire – à Dieu ne plaise ! – ou bienque le Christ Notre-Seigneur a failli à sondessein ou bien qu’il s’est trompé quand ilaffirma que les portes de l’enfer ne prévau-draient jamais contre elle (Matth. 16, 18) 5

(MA). »

L’Église du Christ est toujours la même,depuis les premiers temps de son existence, etelle s’identifie exclusivement à l’Église

catholique, parce qu’avec l’aide du Christ,l’Église catholique est toujours demeuréefidèle au dépôt de la foi. Ce sont les autresqui se sont séparés. C’est pourquoi (telle estla conclusion) n’a aucun sens l’idée (des« panchrétiens ») d’une unité de l’Église d’untype nouveau, en une sorte de « fédération »avec les communautés sectaires de toustypes, hérétiques et schismatiques (et tou-jours hostiles à Rome – mais cela, le Pape neveut pas le rappeler). Comme si l’Églisecatholique était elle aussi hors de la véritableunité avec l’Église du Christ. Ce sont lesautres qui sont dehors, et non l’Église. Onvoudrait que l’Église catholique devienneautre chose, qui se fondrait, avec ceux quisont dans l’erreur, dans une unité supérieure,de type « fédératif », ce qui ne s’est jamaisvu!

FAUSSE CONCEPTION « PANCHRÉTIENNE »DE L’UNITÉ DE L’ÉGLISE

Après avoir exposé la vraie nature de l’É-glise catholique, seule vraie Église du Christ,le Pape s’arrête sur l’erreur de fond des non-catholiques œcuménistes. Quelle est cetteerreur? Ils citent toujours Jn 17, 21 et 10, 6(« afin que tous soient un… il y aura un seultroupeau, un seul pasteur ») comme si« l’unité de foi et de gouvernement, caracté-ristique de la véritable et unique Église duChrist, n’avait presque jamais existé jusqu’àprésent et n’existait pas aujourd’hui » (MA).Et telle est l’erreur : croire qu’à cause de ladivision entre catholiques, protestants, gréco-schismatiques, etc., l’unité de l’Église n’ajamais existé sauf, peut-être, « de l’âge apos-tolique jusqu’aux premiers conciles œcumé-niques ». Et c’est pourquoi, afin de réalisercette unité, il faudrait « négliger et écarter lescontroverses même les plus anciennes et lesdivergences de doctrine qui déchirent encoreaujourd’hui le nom chrétien, et, au moyen desautres vérités doctrinales, constituer et propo-ser une certaine règle de foi commune : dansla profession de cette foi, tous sentiront qu’ilssont frères » (MA). On comprend de pluscomment, sur la base de semblables convic-tions, les « panchrétiens » prétendent traiterd’égal à égal avec l’Église catholique, tout encontinuant de ne pas reconnaître la primautéde saint Pierre. Tout au plus certains d’entreeux concéderaient-ils au Pape « soit une pri-mauté honorifique, soit une certaine juridic-tion ou pouvoir, qui, estiment-ils toutefois,découle non du droit divin mais, d’une certai-ne façon, du consentement des fidèles ;d’autres vont jusqu’à désirer que leursfameux congrès, qu’on pourrait qualifier debariolés, soient présidés par le Pontife lui-même! » (MA).

Sauf erreur, ces idées de « proposer unerègle de foi commune » ou de modifier laportée de la primauté pour la rendre« œcuméniquement » acceptable par les non-catholiques ne sont-elles pas actuellementrevenues à la mode, et cette fois grâce à uneimpulsion qui vient de la Hiérarchie catho-lique elle-même? Nous pensons à la tentatived’élaborer avec les luthériens un documentcommun sur la doctrine de la justification !Aux discours visant à noyer la significationde la primauté ! À la reconnaissance de la

validité de l’attente messianique des Juifs,reconnaissance qui rend inutile l’existence del’Église, et fait objectivement de Notre-Sei-gneur un imposteur, si la logique de l’argu-mentation signifie encore quelque chose!

La notion « panchrétienne » d’unité estdonc entachée dès le départ par la fausse idéed’unité des non-catholiques (en plus de leurorgueil). Ils veulent une unité entre égaux,sans hiérarchies, sans magistère, qui laisse àchaque « communauté » sa liberté d’action.Et, remarque amèrement le Pape, « on n’entrouverait pas [un non-catholique] à qui vien-ne la pensée de se soumettre et d’obéir auVicaire de Jésus-Christ quand il enseigne etquand il commande » (MA).

Conclusion : il n’y a pas d’unité nouvelle àcréer ou à rétablir sous une nouvelle forme,qui englobe de façon libre et autonome toutesles « dénominations » chrétiennes! Cette idéeest tout simplement monstrueuse. L’unité del’unique Église du Christ a toujours existédepuis les origines et elle se fonde, comme lesoulignait par exemple saint Cyprien, sur laprimauté de Pierre. Ceux qui s’en sont éloi-gnés, professant toujours des opinionscontraires au dogme, se sont retirés eux-mêmes de l’unité, comme des membres gan-grenés que l’on retire d’un corps sain, leCorps Mystique du Christ, qui est l’Église :« Non enim nobis ab illis, sed illi a nobisrecesserunt » (saint Cyprien).

LA VÉRITÉ RÉVÉLÉE NE TOLÈRE PASDE COMPROMIS

« Dans ces conditions, il va de soi que leSiège Apostolique ne peut, d’aucune manière,participer à leurs congrès [ceux des « pan-chrétiens »] et que, d’aucune manière, lescatholiques ne peuvent apporter leurs suf-frages à de telles entreprises ou y collaborer ;s’ils le faisaient, ils accorderaient une autoritéà une fausse religion chrétienne, entièrementétrangère à l’unique Église du Christ. Pou-vons-nous souffrir – ce serait le comble del’iniquité – que soit mise en accommode-ments la vérité, et la vérité divinementrévélée? Car, en la circonstance, il s’agit derespecter la vérité révélée (MA). »

L’œcuménisme, envisagé de cette façongravement erronée, ne peut aboutir qu’à une« fausse religion chrétienne », à une sorte dechristianisme feint qui n’a rien à voir avec levrai (comme on le voit de nos jours : une reli-gion syncrétiste de l’Humanité qui suscite lesapplaudissements dans les loges de toutes lesobédiences maçonniques). Il y a ici, soulignele Pape, une question de principe. Il ne s’agitpas seulement de la « défense » de la véritérévélée, mais de la notion même de vérité,telle qu’elle doit être correctement comprisepar les catholiques, en relation avec leur foi.

Un principe inhérent à la notion même devérité est le principe de l’absence de toutcompromis avec l’erreur, par le principe denon-contradiction, fondé sur le bon sens etsur la recta ratio, et sur la base duquel A nepeut pas être à la fois A et non-A. Cela signi-fie que les vérités enseignées par le Magistèrede l’Église ne peuvent pas cohabiter avecl’erreur : elles ne peuvent donc pas « tolérerdes opinions contradictoires » (MA), comme

4. Nous avons supprimé les nombreusesréférences au Nouveau Testament mentionnéesdans ce passage de l’Encyclique.5. Le passage en italique est souligné par nous.

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ce serait le cas si l’on arrivait à la néfaste« union » défendue par les « panchrétiens »,dans laquelle toutes les erreurs des hérétiqueset des schismatiques cohabiteraient avec labonne doctrine catholique.

Si la notion de vrai doit être maintenuedans sa valeur absolue, cela est principale-ment dû au fait que la vérité catholique estd’origine divine, elle est vérité révélée(notion qui, nous le savons, semble avoiraujourd’hui perdu toute consistance). La« vérité révélée » – nous rappelle le Pape –fut enseignée par le Christ en personne auxApôtres. Avant de les envoyer en mission partoute la terre, « pour les garder de touteerreur, il voulut qu’ils fussent auparavant ins-truits de toute vérité par l’Esprit-Saint » (Jn,16, 13). Que signifie « pour les garder detoute erreur » ? Cela nous semble évident :afin qu’ils ne se fabriquent pas leur propredoctrine, non conforme aux enseignementsreçus du Maître. La doctrine enseignée parl’Église catholique, reçue par celle-ci desApôtres, a par conséquent toujours étéassistée par l’Esprit-Saint. Devons-nous peut-être considérer que ce n’est plus le casaujourd’hui? « Est-il vrai que, dans l’Égliseque Dieu lui-même assiste comme chef etgardien, cette doctrine des Apôtres a complè-tement disparu ou a été jamais falsifiée ? »(MA). Cela reviendrait à considérer qu’avecle temps, « l’objet de la foi » a pu « devenir siobscur et si incertain qu’il faudrait aujour-d’hui tolérer même les opinions contradic-toires » (MA) !

Mais cela, poursuit le Pape, on ne peut pasl’admettre, car alors ce serait la fin de lanotion de vérité de foi, révélée, inspirée etsoutenue par le Saint-Esprit. C’en serait la finparce que cette « tolérance » montrerait quel’Église n’a plus l’assistance du Saint-Esprit,que sa « présence perpétuelle dans l’Église etla prédication elle-même de Jésus-Christ ontperdu, depuis plusieurs siècles, toute leurefficacité et toute leur utilité : affirmation évi-demment blasphématoire » (MA).

Mais n’est-ce pas ce qui semble précisé-ment se produire aujourd’hui dans l’Église,avec le triomphe de l’œcuménisme bâtard etla diffusion dans la Hiérarchie de toutessortes d’erreurs ? Cela semble bien être lecas, et néanmoins il n’est pas pensable queNotre-Seigneur n’intervienne pas un jour enenvoyant le Saint-Esprit pour remettre sasainte Église debout, en un temps et d’unefaçon que seuls Lui et le Père connaissent.Exactement comme ce qui est arrivé il y ades siècles avec l’hérésie arienne – le prêtreoriental Arius, mort en 336, niait la consub-stantialité du Fils au Père et donc sa naturedivine – qui se répandit dans l’Église, parphases successives, pendant soixante-dixans, et qui pendant une certaine périodesemblait avoir pris le dessus de façon défini-tive (comme aujourd’hui les néo-moder-nistes).

L’enseignement du Pape sur la façon exac-te, pour les catholiques, de comprendre lavérité (en soi révélée) est donc toujours d’ac-tualité.

L’APPEL À LA CHARITÉ NE VAUT PAS

S’IL N’Y A PAS L’UNITÉ DE FOI

Ceci clarifié, le Pape démontre le caractèreindéfendable de l’appel continuel à la « cha-rité » par les « panchrétiens ».

« Il est vrai, ces panchrétiens qui cherchentà fédérer les églises, semblent poursuivre letrès noble dessein de promouvoir la charitéentre tous les chrétiens ; mais comment lacharité pourrait-elle tourner au détriment dela foi? (MA) » La charité peut-elle entrer encontradiction avec la foi et même lui nuire,en ouvrant la voie aux fausses doctrines ?Non. Si elle le fait, c’est une fausse charité.Et en effet le Pontife rappelle les sévèresmises en garde de saint Jean, qui a pourtantété considéré comme « l’Apôtre de lacharité », car il insistait toujours « sur le pré-cepte nouveau de l’amour mutuel ». Com-ment nous met-il en garde? Par les fameusesparoles : « Si quelqu’un vient à vous et n’ap-porte pas cette doctrine, ne le recevez pasdans votre maison et ne le saluez mêmepas (2 Jn 10). » L’unité entre les chrétiensne peut pas se faire au détriment de la foi, enla faisant cohabiter avec l’erreur. La charité,du reste, comme l’a longuement enseignésaint Jean lui-même, se fonde sur la foi etdonc sur la bonne doctrine.

« Puisque la charité a pour fondement unefoi intègre et sincère, c’est l’unité de foi quidoit être le lien principal unissant les dis-ciples du Christ. Comment, dès lors, conce-voir la légitimité d’une sorte de pacte chré-tien, dont les adhérents, même dans les ques-tions de foi, garderaient chacun leur manièreparticulière de penser et de juger, alors mêmequ’elle serait en contradiction avec celles desautres ? Et par quelle formule, Nous ledemandons, pourraient-ils constituer uneseule et même société de fidèles, des hommesqui divergent en opinions contradictoires ?Par exemple, au sujet de la sainte Tradition,ceux qui affirment qu’elle est une sourceauthentique de la Révélation et ceux qui lenient? De même, pour la hiérarchie ecclésias-tique, composée d’évêques, de prêtres et deministres, ceux qui pensent qu’elle est d’ins-titution divine et ceux qui déclarent qu’elle aété introduite peu à peu selon les temps et lescirconstances ? (MA) » Ceux, continue lePape, qui adorent le Christ réellement présentdans la sainte Eucharistie grâce à la transsub-stantiation, et ceux qui considèrent que lasainte Eucharistie n’est qu’un « mémorial, unsouvenir de la Cène du Seigneur »? Ceux qui« croient qu’il est bon et utile » d’invoquer

Dans ce livre Mgr. Gherardini étudie laquestion de la valeur du magistère duConcile et de son interprétation. Noslecteurs y verront sans doute unemanière différente d’aborder les pro-blèmes doctrinaux, mais pour arriverpratiquement aux mêmes conclusionsque bien de nos publications. Ce nou-vel ouvrage a l’avantage d’ouvrir undébat au cœur de la Rome éternelle etdonc de l’Église.

Brunero Gherardini, prêtre de Prato (Italie) est au service du Saint-Siège depuis1960, notamment comme professeur d’ecclésiologie et d’œcuménisme à l’Univer-sité pontificale de Latran jusqu’en 1995. Il est l’auteur d’une centaine d’ouvrageset de plusieurs centaines d’articles de revues, sur trois cercles de rechercheconcentriques : la Réforme du XVIe siècle, l’ecclésiologie, la mariologie. BruneroGherardini est actuellement chanoine de l’Archibasilique Vaticane et directeur dela revue internationale de théologie « Divinitas ».

Ce livre peut être commandé au prix de 15 e + 3 e de port à l’adresse: Courrier de Rome, B.P. 156, 78001 Versailles Cedex

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Table des matières

Préface, PrologueCh. I – Le concile œcuménique Vatican IICh. II – Valeur et limites du concile Vatican IICh.III – Pour une herméneutique de VaticanIICh.IV – Évaluation globaleCh.V – La Tradition dans Vatican IICh VI – Vatican II et la liturgieCh. VII – Le grand problème de la libertéreligieuseCh. VIII – Œcuménisme ou syncrétisme?Ch. IX – L’Église de la Constitutiondogmatique Lumen GentiumÉpilogueSupplique au Saint-Père

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Courrier de Rome6 Mars 2010

les saints et la très sainte Vierge Marie, etceux qui haïssent ce culte parce que – disent-ils – il léserait l’honneur de Jésus-Christ?

L’absurdité d’invoquer la charité chrétiennepour arriver à cette inadmissible et fausse« union » ne peut que sauter aux yeux. Lavraie unité de l’Église « ne peut naître qued’un magistère unique, d’une règle unique defoi et d’une même croyance des chrétiens »,et tout cela se trouve déjà dans l’unité main-tenue au cours des siècles par l’Église catho-lique. La fausse unité proposée par les « pan-chrétiens » ne peut produire que de gravesdommages : d’un côté l’indifférentisme à l’é-gard de la religion catholique, de l’autre leretour du modernisme, de son hérésie caracté-ristique, selon laquelle « la vérité des dogmesn’est pas absolue, mais relative, c’est-à-direqu’elle s’adapte aux besoins changeants desépoques et des lieux et aux diverses ten-dances des esprits, puisqu’elle n’est pascontenue dans une révélation immuable, maisqu’elle est de nature à s’accommoder à la viedes hommes » (MA).

L’indifférence religieuse, et la convictionque les vérités de foi ne seraient pas absoluesmais relatives aux époques et aux lieux, etdonc adaptables : ces fausses idées à proposde la religion ne sont-elles pas aujourd’huitrès répandues chez les catholiques, prêtrescompris, après presque cinquante ans de« dialogue œcuménique », c’est-à-dire derecherche de la fausse unité, non seulementavec des hérétiques et des schismatiques,mais aussi avec toutes les autres religions? Etcombien de foi avons-nous entendu répéterque nous devons nous attacher à ce qui nousunit aux non-catholiques, et non à ce qui nousdivise, en oubliant les conflits doctrinaux dupassé, de façon à trouver une plateformecommune de principes et de valeurs? Et dansla recherche de cette plateforme commune,est-ce que ce sont les non-catholiques qui ontadopté des articles de notre foi, ou bien est-ceque ce ne sont pas plutôt les catholiques quiont adopté les croyances des autres, prenantde tous côtés, en fonction des préférences eten bradant leur propre foi? Le diagnostic dePie XI sur les grands maux qui allaient

découler pour l’Église du faux œcuménismes’est révélé d’une précision chirurgicale.

IL N’EXISTE PAS DE HIÉRARCHIEDANS LES VÉRITÉS DE FOI

C’est à ce moment de l’Encyclique que PieXI précise une notion très importante denotre foi, la notion selon laquelle il n’existepas de hiérarchie des vérités au sein du dépôtde la foi, comme si certaines étaient plusimportantes que d’autres, et donc certaines(les moins importantes) négociables avec lesnon-catholiques, d’autres non.

« De plus, quant aux vérités à croire, il estabsolument illicite d’user de la distinctionqu’il leur plaît d’introduire dans les dogmesde foi, entre ceux qui seraient fondamentauxet ceux qui seraient non fondamentaux,comme si les premiers devaient être reçus partous tandis que les seconds pourraient êtrelaissés comme matières libres à l’assentimentdes fidèles » (MA), c’est-à-dire laissant lesfidèles libres d’y croire ou non. Contre cettepernicieuse erreur, il faut réaffirmer que tousles dogmes de la foi doivent être crus, que lecatholique n’est pas libre, comme les protes-tants, de se fabriquer un christianisme à usagepersonnel, supprimant tel ou tel article de foi,selon son goût (ou pour trouver une ententedoctrinale avec les hérétiques).

« La vertu surnaturelle de foi a en effetpour objet formel l’autorité de Dieu révélant,autorité qui ne souffre aucune distinction dece genre. C’est pourquoi tous les vrais dis-ciples du Christ accordent au dogme de l’Im-maculée Conception de la Mère de Dieu lamême foi que, par exemple, au mystère del’Auguste Trinité, et de même ils ne croientpas à l’Incarnation de Notre-Seigneur autre-ment qu’au magistère infaillible du PontifeRomain dans le sens, bien entendu, qu’il a étédéfini par le [premier] Concile œcuméniquedu Vatican (MA). » « De la diversité et mêmedu caractère récent des époques où, par undécret solennel, l’Église a sanctionné et définices vérités, il ne s’ensuit pas qu’elles n’ontpas la même certitude », précise le Pape. Nesont-elles pas toutes des vérités révélées parDieu? Parmi les devoirs du magistère de l’É-

glise, il y a aussi celui de procéder de façonsolennelle à des définitions doctrinales pour« résister plus efficacement aux erreurs et auxattaques des hérétiques », ou « imprimer dansl’esprit des fidèles des vérités expliquéesavec plus de clarté et de précision ». Mais cet« usage extraordinaire du Magistère »,conclut le Pontife, « n’invente rien ». Il« n’introduit aucune nouveauté à la sommedes vérités qui sont contenues, au moinsimplicitement, dans le dépôt de la Révélationconfié par Dieu à l’Église ; mais ou bien ilrend manifeste ce qui jusque-là pouvait peut-être paraître obscur à plusieurs, ou bien ilprescrit de regarder comme de foi ce que,auparavant, certains mettaient en discus-sion (MA) 6. »

Toutes les vérités de foi viennent de Dieu,mais toujours par l’intermédiaire de la sainteÉglise. Les Apôtres constituent l’Église etc’est par leur intermédiaire que nous connais-sons les paroles et les faits de la vie de Notre-Seigneur, la doctrine que nous devons croire,la morale à laquelle nous devons obéir. Parleur intermédiaire, c’est-à-dire par l’intermé-diaire de l’Église des premiers temps. Il estvrai (c’est de foi) que le dépôt de la foi estclos à la mort du dernier Apôtre. Mais on nepeut aucunement accuser le Pape d’inventerquelque chose lorsqu’il définit de façonsolennelle un certain point de doctrine, oumême lorsqu’il proclame pour la premièrefois un dogme, comme cela a été le cas pourl’Immaculée Conception. Parmi les pouvoirsdu Pontife Romain, qui a été institué parNotre-Seigneur pour « affermir ses frèresdans la foi » (Lc 22, 32), il y a sans aucundoute celui de définir de façon absolue, avecles formules d’usage, des aspects restés for-mellement non définis, comme l’était la ques-tion de l’Immaculée Conception. La procla-mation du dogme de l’Immaculée complètele cadre dogmatique, si l’on peut dire, maisen même temps elle n’y ajoute rien de nou-veau, en ce sens qu’elle n’ajoute rien qui nesoit déjà compris dans le cadre de la foi,puisque la foi en l’Immaculée avait toujoursété professée au cours des siècles, même si cen’est pas par tous les croyants. Et si un jour –jour souhaité par beaucoup en ces temps demalheur – le Pape déclarait formellementdogme de foi ce que l’Église a toujours faitdepuis les premiers temps, imitant Notre-Sei-gneur en parfaite connaissance de cause, àsavoir exclure les femmes du sacerdoce, fau-drait-il considérer cela comme une nou-veauté? Une invention du Pape? On ne feraitque sanctionner dogmatiquement, mettant finà de pernicieuses discussions, ce qui a tou-jours été fait et cru dans l’Église sur la basede la Tradition et du Dogme.

Toutes les vérités que nous devons croirede foi divine et catholique viennent de lamême source : de Dieu. Et elles nous par-viennent à travers le même moyen, instituépar Notre-Seigneur : la sainte Église catho-

6. Cette partie de l’Encyclique, qui concerne lemagistère de l’Église, est, comme nous l’avonsdit note 2, la seule section qui en soit rapportéepar la dernière édition du Denzinger, l’éditionpost-conciliaire.

Entre les débuts de l’Œcuménisme lancé par Jean XXIII etle Jubilé de l’an 2000 envisagé par Jean-Paul II, plusd’une génération se sera écoulée ; une génération de la viede l’Église de Jésus-Christ consacrée au rapprochementavec les doctrines les plus disparates : bouddhisme, islam,judaïsme, protestantisme, Nouvel-Âge, franc-maçonnerie,mondialisme… Mais d’où vient ce courant œcuménique ?Quelles en sont les sources, si peu connues du grandpublic ? Quels en sont les buts, avoués ou cachés ?Comment l’Église vit-elle cette rencontre avec ceux quetout sépare de Celui qui est la Voie, la Vérité et la Vie ?Qu’a-t-elle fait de son être propre, de, sa prudenteconduite des âmes, de son infaillible doctrine ? Qu’a-t-ellegagné à ce dialogue tous azimuts?À la veille d’un Troisième millénaire tant médiatisé, c’està un bilan lucide que nous invitent les Actes du IIIe

Congrès théologique de Sì Sì No No. Le constat estdouloureux : confusion intellectuelle, désordre doctrinal

et ruine spirituelle semblent être les seuls fruits de l’Œcuménisme. Mais la Tradition, excluede ce dialogue et persécutée pour sa fidélité, a foi dans les paroles du Seigneur : Nonprævalebunt.Prix : 20 euros + 3 euros de port

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lique. De même – rappelons-le – que nousdevons observer tous les Commandements,sans exception, si nous voulons parvenir à lavie éternelle (Jacq. 2, 10 ss), de même nousdevons croire et observer tous les dogmes denotre sainte religion, si nous voulons plaire àDieu et obtenir le salut. Ce point est réaffirméavec une clarté limpide par Pie XI : il n’y apas de hiérarchie dans les vérités que nousdevons croire. Et il devait le réaffirmer parceque le piège que représentait le « panchristia-nisme », avec son incroyable proposition defaire une sélection parmi les vérités de foi defaçon à en choisir certaines capables deconstituer une plateforme commune entretoutes les « dénominations » chrétiennes, cepiège frappait le Magistère de l’Église en unpoint vital.

LE DÉCRET UNITATIS REDINTEGRATIOCONTREDIT MORTALIUM ANIMOS

DANS SON ARTICLE 11Nous ne pouvons donc qu’être remplis de

consternation par ce qui est imprudemmentaffirmé par Vatican II dans l’art. 11 du décretUnitatis Redintegratio sur l’œcuménisme.L’article s’intitule « La manière d’exprimeret d’exposer la doctrine de la foi ». Cette« manière » concerne la bonne façon d’orga-niser le « dialogue » avec les frères dits« séparés ». Le point qui nous intéresse est lesuivant : « Dans le dialogue œcuménique, lesthéologiens catholiques, fidèles à la doctrinede l’Église, en conduisant ensemble avec lesfrères séparés leurs recherches sur les divinsmystères [sic], doivent procéder avec amourde la vérité, charité et humilité. En compa-rant les doctrines entre elles [sic], ils se rap-pelleront qu’il y a un ordre ou une “hiérar-chie” des vérités de la doctrine catholique,en raison de leur rapport différent avec lefondement de la foi chrétienne. Ainsi seratracée la voie qui les incitera tous, dans cetteémulation fraternelle [avec les hérétiques etles schismatiques !], à une connaissance plusprofonde et une manifestation plus évidente[sic, c’est exactement le contraire qui estarrivé !] des insondables richesses du Christ7. »

Mais nous ne sommes surpris que jusqu’àun certain point. Ce Concile « pastoral » etnon dogmatique fut convoqué par Jean XXIIIqui, par sa célèbre Allocution d’ouverture (ettoute l’action qui suivit) l’orienta dans le sensdu « dialogue » avec les valeurs de la moder-nité. Or, lorsqu’il était Nonce Apostolique enBulgarie, Angelo Roncalli, dans une lettreécrite le 27 juillet 1926, déconseilla à unjeune bulgare, qui avait manifesté ce désir, de

chercher à entrer au séminaire à Rome pourdevenir prêtre catholique. Ce faisant, leNonce, alors évêque, en incitant le jeune à sefaire prêtre orthodoxe, écrivit que Catho-liques et Orthodoxes (alias gréco-schisma-tiques) n’étaient séparés que par « certainsmalentendus au sujet de la constitution divinede l’Église de Jésus-Christ. Ceux qui furent lacause de ces malentendus sont morts depuisdes siècles. Oublions les anciennes disputeset, chacun dans son camp, travaillons àrendre bons nos frères, en leur offrant nosbons exemples […] Plus tard, bien que partispar des chemins différents, nous nous rencon-trerons dans l’union des Églises pour formertous ensemble la vraie et unique église de N-S Jésus-Christ 8. »

La notion de religion qui apparaît ici a uneteinte illuministe : la religion doit mettre decôté les dogmes, qui sont source de discorde,et collaborer au bien de l’humanité. Plus endétail, le passage souligné montre que le futurpontife était alors très influencé par le « pan-christianisme » condamné un an et demi plustard par Pie XI comme erreur néfaste etmême fatale. Le futur Pape souhaitait,comme s’il s’agissait d’une chose évidente,une « union des églises », qui aurait constitué« la vraie et unique Église du Christ »! Maisl’Église catholique dont il faisait partie, quiplus est comme évêque, n’était-elle pas déjàpour lui « l’unique et vraie Église duChrist »? Manifestement non. Défendait-il decette façon le dépôt de la foi, et cherchait-il àramener au bercail les brebis égarées ? Le« panchristianisme » du Nonce a réapparudans l’aggiornamento « roncallien », qui amarqué le Concile et est en train de dévorerl’Église, comme une lèpre que l’on ne peutpas arrêter !

LE VRAI ŒCUMÉNISME CATHOLIQUE :RÉALISER LE RETOUR AU BERCAIL

DES BREBIS ÉGARÉES

Mais revenons à l’Encyclique Mortaliumanimos, pour conclure notre discours. Ayantclarifié tous les points de doctrine impliquésdans la question, Pie XI expose aux fidèles lavraie notion de l’œcuménisme catholique.

On ne favorise pas l’union des chrétiens enparticipant aux manifestations inconsidéréesdes « panchrétiens ». Du reste, il est interditaux catholiques d’y participer. Ensuite, il n’ya pas d’unité à instaurer ni à restaurer parceque, comme nous l’avons vu, cette unité exis-te depuis toujours dans l’Église catholique,seule vraie Église du Christ. L’œcuménismedans le sens authentiquement catholique nepeut se réaliser qu’avec « le retour des dissi-dents à la seule véritable Église du Christ,puisqu’ils ont eu jadis le malheur de s’enséparer. Le retour à l’unique véritable Église,disons-Nous, bien visible à tous les regards,et qui, par la volonté de son Fondateur, doitrester perpétuellement telle qu’il l’a instituéelui-même pour le salut de tous. Car jamais aucours des siècles, l’Épouse mystique duChrist n’a été souillée, et elle ne pourrajamais l’être […]. Le corps mystique duChrist, c’est-à-dire l’Église, étant un (1 Cor.,12, 12), formé de parties liées et coordonnées(Eph. 4, 16) à l’instar d’un corps physique, ilest absurde et ridicule de dire qu’il peut secomposer de membres épars et disjoints ; parsuite, quiconque ne lui est pas uni n’est pasun de ses membres et n’est pas attaché à satête qui est le Christ (Eph. 5, 30 ; 1,22) »(MA).

« Dans cette unique Église du Christ, per-sonne ne se trouve, personne ne demeure, si,par son obéissance, il ne reconnaît et n’ac-cepte l’autorité et le pouvoir de Pierre et deses légitimes successeurs (MA). » Que doi-vent alors faire les « dissidents », s’ils sontde bonne foi ? Obéir à l’impératif de la vraiecharité chrétienne : se repentir de leurserreurs et revenir à l’Église, qui à son tourcharitablement les accueillera. « Qu’ilsreviennent donc au Père commun, quioubliera les insultes proférées jadis contre leSiège Apostolique et les recevra avec la plus

7. Le passage en italique est souligné par nous.L’explication de la supposée « hiérarchie » (enraison de leur rapport différent avec le fondementde la foi chrétienne) ne se trouve pas dans le textelatin. Elle a été ajoutée dans la traductionfrançaise officielle, ainsi que dans la traductionitalienne. Ce paragraphe d’UR, 11 nous semblecontenir pas un bel exemple d’« herméneutiquede la rupture » avec la doctrine toujours professéepar le Magistère de l’Église, en particulier cellequi est contenue dans Mortalium animos, et qui larésume de façon splendide.

8. La lettre, jusqu’alors inconnue, fut publiée par le quotidien La Repubblica le 27 oct. 1996,auquel l’avait fait parvenir le secrétaireparticulier du défunt Jean XXIII, MGR LORIS

CAPOVILLA.

Actes du VIIIe Congrès du Courrier de Rome

( janvier 2009)

Le discours du Pape Benoît XVI, du 22 décembre 2005 à laCurie Romaine, a suscité de nombreuses réactions au sujet del’interprétation des textes de Vatican II. Un des points les plusretenus est la question de l’herméneutique de la discontinuitéet de la rupture d’une part, et celle de l’herméneutique de lacontinuité et de la réforme d’autre part. Les intervenants dece VIIIe congrès théologique ont voulu proposer uneréflexion sur le concept d’herméneutique. Faut-il prendre ceconcept comme un synonyme d’interpré- tation - comme unesimple explication de texte -, ou dans le sens de la penséecontem- poraine, c’est-à-dire dans une acception plus largequi conduit à une notion subjective de la vérité et de lacompréhension qu’on peut en avoir?

D’autres interventions portent sur certains textes du Concile Vatican II et s’interrogent surla possibilité d’adopter une herméneutique de continuité, lorsque la doctrine exposée estdifficilement conciliable avec la ligne du magistère antérieur ou n’a pas de fondementévident dans la Tradition. Prix 20 e + 3 e de port.

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Courrier de Rome8 Mars 2010

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grande affection (MA). » Telle est la vraieunion œcuménique, ou plutôt la vraie réu-nion œcuménique : le retour de ceux qui sontdans l’erreur à l’unité (qui s’est toujoursmaintenue) de la vraie Église du Christ, l’É-glise catholique. En effet, En effet, « s’ilsdésirent se joindre à nous et aux nôtres,pourquoi ne se hâteraient-ils pas d'aller versl'Eglise, “mère et maîtresse de tous lesfidèles du Christ” ? » (Conc. Latran IV, c. 5)(ibid.). Le retour du pécheur, c’est-à-dire saconversion.

L’Encyclique se conclut précisément par unappel au retour. « Que les fils dissidentsreviennent donc au Siège Apostolique, établien cette ville que les princes des Apôtres,Pierre et Paul, ont consacrée de leur sang, auSiège “racine et mère de l’Église catholique”(St Cypr., Ep. 48 ad Cornelium, 3). Qu’ils yreviennent, non certes avec l’idée et l’espoirque “l’Église du Dieu vivant, colonne et fon-dement de la vérité” (1 Tim. 3, 15) renonceraà l’intégrité de la foi et tolérera leurs erreurs,mais, au contraire, pour se confier à sonmagistère et à son gouvernement. Plaise àDieu que cet heureux événement, que tant denos prédécesseurs n’ont pas connu, Nousayons le bonheur de le voir, que nous puis-sions embrasser avec un cœur de père les filsdont nous déplorons la funeste séparation(MA)… »

Tout au contraire, c’est la Hiérarchiecatholique post-conciliaire (nous ne voulonspas dire l’Église, épouse immaculée duChrist) qui est allée à leur rencontre, nonplus pour les convertir et les pousser auretour, mais pour construire avec eux l’illé-gitime « union des Églises » souhaitée parles « panchrétiens ». Les fauteurs du dia-logue semblent ne s’être jamais aperçus quecette œuvre entreprise en commun avecBeliar a conduit l’Église catholique au borddu précipice. L’article de Mgr Ravasi, quinous a servi de point de départ, transpirel’optimisme de toutes ses lignes. Il admetseulement que, malgré les progrès, il reste« un nœud difficile à démêler », celui del’« ecclésiologie ». Il s’agit en réalité dunœud central, que constitue la notion d’Égli-se (l’idée nouvelle d’une nébuleuse Église-

communion) que l’on devrait pouvoir réussirà élaborer en commun, avec les hérétiques etles schismatiques ! Le dialogue et l’aggior-namento, ces deux monstres nés du sein duConcile pastoral Vatican II, avancent tou-jours, nous dit-on ; les progrès sont conti-nuels, nous répète-t-on sans cesse. Dansquelle direction, exactement, personne n’ar-rive à le comprendre… L’important est de seréunir continuellement pour professer sa foien l’esprit de dialogue qui sera immanqua-blement renforcé par la prochaine réunion,par le prochain travail en commission, par leprochain congrès…Pendant ce temps lesvrais catholiques, dans l’écroulement géné-ral, continuent de prier Dieu pour que les« dissidents », comme les appelait charita-blement Pie XI, reviennent un jour au ber-cail, et pour que vienne l’heure de la divineJustice.

Rorarius

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Cette étude, intitulée 1962-Révolution dans l’Église etréalisée avant 2002, fut publiée de janvier 2007 à avril2008 dans la revue Courrier de Rome. La clarté du texte, accompagné d’un très grand nombre decitations et de faits, donne à cette étude toute sa valeur etmet le lecteur devant la situation actuelle de l’Églised’une manière impressionnante et tout à fait objective.Don Andrea Mancinella, prêtre du diocèse d’AlbanoLaziale (Roma), ordonné en 1983, en est l’auteur. Ceprêtre conscient que quelque chose n’allait pas dansl’Église a eu pour la première fois entre les mains la revueSì Sì No No, cela l’a incité à faire des recherches et desétudes personnelles pour mieux comprendre la crise quetraversait l’Église. Ensuite ayant constaté ladésinformation générale du clergé pour ce qui concerne lacrise actuelle et la position de Mgr. Lefebvre, il décida de

publier la synthèse de son étude et de la distribuer à tous les prêtres de son diocèse pourmieux leur montrer sa position de fidélité à la Rome éternelle. Prix 14 e + 2 e de port

Paolo Pasqualucci, professeur honoraire dePhilosophie du Droit à l’Université dePérouse, a jusqu’ici développé son œuvresurtout sur des thèmes concernant laphilosophie du droit et la métaphysique. Nousrappellerons son ouvrage sur Rousseau e Kant(en deux volumes, chez Giuffré, Milan, 1974et 1976), ses études sur Hobbes (surtout sonCommento al Leviathan. La filosofia deldiritto e dello Stato di Thomas Hobbes, chezMarziacchi, Pérouse, 1994) et sonIntroduzione alla metafisica dell’uno, AntonioPellicani, Roma, 1996, avec préface deAntimo Negri. Dans la présente étude l’auteuraborde un thème d’une brûlante actualité, lerapport entre politique et religion, enl’interprétant du point de vue d’une théologiede l’histoire conforme aux normes de lapensée catholique la plus orthodoxe et la plustraditionnelle, aujourd’hui non observée

précisément par la hiérarchie et par la théologie officielles, qui semblent êtreimprégnées de l’esprit du monde, ennemi du Christ. Prix : 10 euros + 2 euros de port

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