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CM1-CM2

La chèvre de monsieur

Seguin

Un parcours de lecture proposé par Pierre Sémidor,formateur de lettres à l’IUFM d’Aquitaine

2 © Éditions Magnard, 2008

PRÉSENTATION DU LIVRE

■ Un auteur originaire de Provence

• Alphonse Daudet est né à Nîmes le 13 mai 1840. Très jeune, il vient vivre à Paris et en1859, il fait la connaissance du poète Frédéric Mistral. Il collabore à plusieurs journaux,Paris-Journal, L’Universel et au Figaro. Il écrit des contes, des chroniques et recueilleaussi des histoires. • Lors d’un voyage en Provence, il rassemble des notes et impressions : il commence àrédiger les premiers textes des Lettres de mon moulin qui seront publiées dans le journalL’Événement pendant tout l’été 1866, sous le titre de Chroniques provinciales. • Remaniées et regroupées, ces chroniques provençales deviendront Les Lettres de monmoulin. Leur publication en 1869 fait d’Alphonse Daudet un auteur célèbre. Certains des récits de ce recueil sont restés parmi les histoires les plus populaires de notrelittérature et appartiennent donc à notre patrimoine. Parmi elle, La chèvre de monsieurSeguin est accessible en cycle 3.

■ Les lettres de mon moulin

• À l’origine il y a eu 19 récits, mais leur nombre est monté à 24 en 1879. Toutes n’ont pasAlphonse Daudet pour auteur. Ces lettres sont écrites à la première personne et sont précédées par un avant-propos quirelate l’acte de vente par lequel le narrateur achète le moulin (un vieux rêve de l’auteurqu’il n’a jamais réalisé). L’ensemble des Lettres de mon moulin ainsi que l’acte de vente quiles précède sont donc une fiction. Le moulin existe, il a été construit en 1814 et a fonc-tionné jusqu’à 1915 mais il n’a jamais été la propriété d’Alphonse Daudet. • On trouve dans la plupart de ces récits une évocation colorée et odorante de laProvence, des personnages pleins de grandeur, peints avec force. La forme de chaquetexte est très libre et tient du conte (recueilli oralement), de la légende. Les héros de A.Daudet sont souvent des gens ordinaires mais qui vont entrer dans la légende par leur par-cours. C’est le cas la chèvre de Mr Seguin.

■ L’album

• La forme album permettra aux élèves de s’ap-proprier plus aisément les descriptions et doncd’apprécier la dimension pittoresque de l’œuvre(Nous prenons « pittoresque » au sens où le textedonne à voir … et à sentir aussi).• Le récit est inclus dans une lettre que le conteuradresse à un poète parisien. Tout au long du texteon trouve des remarques adressées à cet interlo-cuteur privilégié. Le conteur ne précise pas,comme il peut le faire dans d’autres lettres, com-ment il a eu connaissance de ce récit. • Dans la liste des œuvres pour le cycle 3 publiéeen 2004 et 2007, le texte est considéré comme dedifficulté 1-2. Nous précisons cependant que,comme c’est le cas avec toute la littérature patri-moniale, il n’est pas réellement aisé d’accès parce

que les réalités du monde qu’il décrit sont très différentes du monde d’aujourd’hui. Lalangue elle-même a sensiblement évolué depuis un siècle c’est pourquoi une très grandepartie du texte sera dans un premier temps abordée par une lecture magistrale.

© Éditions Magnard, 20083

■ Le parcours

• Cet accompagnement pédagogique propose des pistes que l’enseignant exploitera libre-ment suivant les particularités de sa classe, le temps qu’il veut consacrer à la lecture etaussi la manière donc il est habitué à mener ses activités. Il n’y a donc pas obligation à mener toutes les activités proposées ; l’enseignant fait seschoix en organisant lui-même la cohérence de la séquence.• Cette lecture accompagnée doit permettre de construire un « savoir-lire » que l’élèvepourra réinvestir en lecture autonome. Le parcours de lecture propose ainsi aux ensei-gnants des choix de modalités de lecture et des activités en fonction des objectifs lit-téraires et des difficultés que présente le texte. Cette rencontre avec l’œuvre passe par deslectures à haute voix (du maître ou des élèves) comme par des lectures silencieuses et l’en-seignant dispose de pistes pour susciter les échanges nécessaires à la compréhension dutexte et guide les élèves dans leur effort de compréhension. Ces échanges et ces débatsdonnent l’occasion d’éprouver les libertés et les contraintes de l’interprétation. • La lecture va de plus permettre de mettre en mémoire un texte qui appartient au patri-moine littéraire et donc de faire entrer l’élève dans une culture commune. Pour cela,la lecture de l’œuvre nécessite une sélection des objectifs de la part de l’enseignant. On necherche pas une lecture exhaustive ; on privilégie au contraire le parcours rapide, quiseul permet une compréhension des enjeux principaux de l’œuvre. • Le parcours de lecture effectue ainsi un travail de hiérarchisation et de structuration quifacilite l’inscription du texte dans la mémoire des élèves en mettant en évidence les diversaspects qui le constituent : les personnages, la trame narrative, des expressions, le texted’un passage fort.• L’enseignant n’hésite pas à recourir à la lecture magistrale pour faciliter l’entrée dansle texte mais l’oralisation par les élèves est aussi une activité de compréhension. Enayant recours à l’expérimentation active de la voix et de ses effets (pauses, rythme,inflexions, intonations, intensité, etc.), on facilite la compréhension ; on suscite de plus unévénement de lecture susceptible de marquer durablement l’élève. • Dans ce parcours de lecture, nous ne proposons pas le lancement de projet d’écriturelong, qui doit à notre sens être initié par le maître et s’inscrire dans la vie de la classe. Nousproposons des activités d’écriture quand elles permettent d’asseoir la compré-hension.


Étape 1 Entrer dans le dispositif de lecture Page 3

OBJECTIFS

• Entrer dans le dispositif des Lettres de mon moulin.

• Comprendre que l’on lit un conte d’avertissement.

• On entre dans le texte par la voix de l’enseignant et non par la couverture de l’album(dans le recueil, il n’y a pas de couverture). Cette entrée dans le texte est difficile pour les enfants car ils sont confrontés au disposi-tif des Lettres de mon moulin mais sans entrer en contact avec le système répétitif desadresses à différents lecteurs et sans connaître l’avant propos. Ici le narrateur s’adresse àun poète nommé Gringoire. Ils doivent de plus comprendre l’avertissement qui est adres-sé à ce lecteur fictif. • Gringoire est un poète du XVIe, qui se retrouve dans le roman de Victor Hugo, Notre-Dame de Paris, et dans une comédie d’un acte en prose de Théodore de Banville jouée le23 juin 1866. Mais cette information historique concernant ce personnage est inutilisableavec des élèves de cycle 3 car elle ne leur apporterait rien. Il faudrait de plus comprendreque l’auteur s’adresse à un écrivain mort depuis trois siècles… Il s’agit donc d’aider lesélèves à dépasser cette difficulté ; pour cela, ils doivent comprendre que Gringoire est unpersonnage extérieur à l’histoire à qui le conteur veut donner une leçon.

■ Comprendre qui est Gringoire

• Le début (page 3) est lu à haute voix pour permettre aux élèves de percevoir le ton de« discussion » entre le narrateur et son allocutaire fictif. Les élèves doivent comprendre que Gringoire ne fera pas partie du récit, que c’est à luiqu’est adressée la lettre.

«Qui est Gringoire? »

Les élèves choisissent entre les propositions ci-dessous : • l’auteur • celui qui raconte • un ami de monsieur Seguin • un ami de celui qui écrit la lettre• le propriétaire de la chèvre

➤ Gringoire est un ami de celui qui écrit. Cette information n’est pas tout à fait justevu l’information historique mais elle permet aux élèves de rentrer dans l’histoire de lachèvre et de comprendre ensuite l’avertissement amical qui est donné à ceux quiveulent vivre libres

NB : Le maître peut expliquer que dans le livre d’Alphonse Daudet, on trouve d’autres his-toires que l’auteur des lettres présente en parlant à quelqu’un ou en expliquant commentil a connu cette histoire.

■ Mieux connaître Gringoire pour mieux comprendre l’histoire

Dans un deuxième temps on précise qui est cet « ami » de celui qui écrit la lettre.

«Est-ce que Gringoire est : »

• couturier• journaliste • poète• éleveur• écrivain• riche parisien


➤ Gringoire est un poète mais on peu dire aussi un écrivain (ce qui permet de lerapprocher d’Alphonse Daudet). Il semble refuser d’être journaliste (chroniqueur).

Les échanges permettent donc de dire que l’histoire de la chèvre n’a pas vraiment com-mencé et de préciser ce que l’on apprend à l’avance sur l’histoire qui va suivre et qui estannoncée par le titre.

■ Chercher les adresses à Gringoire dans le texte

«Cherchez dans l’album les passages où l’auteur de la lettre s’adresse à Gringoire ».

Cette recherche permet, d’une part, de voir qu’il s’adresse à lui régulièrement, mais ausside feuilleter le livre et donc, grâce aux illustrations, de prendre des informations sur l’his-toire. Une fois le repérage effectué, on peut élaborer une affiche, donner aux élèves l’ensemblede ces extraits pour qu’ils puissent relire ce que l’auteur de la lettre dit à Gringoire.

➤ p. 9 : Ah Gringoire, qu’elle était jolie, la petite chèvre de monsieur Seguin !• p. 22 : Tu ris, Gringoire ? Parbleu ! je crois bien ; tu es du parti des chèvres, toi, contre ce bonmonsieur Séguin... Nous allons voir si tu riras tout à l’heure.• p. 27 : Tu penses, Gringoire, si notre chèvre était heureuse !• p. 37 : Il paraît même, - ceci doit rester entre nous, Gringoire, – qu’un jeune chamois à pela-ge noir, eut la bonne fortune de plaire à Blanquette.• p. 48 : Plus de dix fois - je ne mens pas, Gringoire – elle força le loup à reculer pour reprendrehaleine.• p. 54 : Plus de dix fois – je ne mens pas – Gringoire, elle força le loup à reculer pour reprendrehaleine….. Tu m’entends bien, Gringoire.

On fait le point sur ce que l’on sait de l’histoire que l’on va lire : • Le narrateur s’adresse régulièrement à Gringoire ; il le prend à témoin, il lui fait laleçon.• Il rapproche Gringoire de la chèvre, il est « comme elle ».• L’histoire racontée est celle d’une chèvre et se passe d’abord près d’une maison (cellede monsieur Seguin vu le titre) puis dans la nature les champs, la montagne. À la fin, onvoit un loup qui doit certainement vouloir manger la chèvre et vu l’avertissement dudébut cela doit mal finir pour la chèvre.

Une affiche peut garder en mémoire ce premier savoir. Comme trace de cette première séance, on peut faire recopier la phrase qui exprimel’avertissement. Elle mérite d’être mémorisée : Écoute un peu l’histoire de la chèvre demonsieur Seguin. Tu verras ce que l’on gagne à vouloir vivre libre.


Étape 2 Une héroïne qui aime la liberté Pages 3 à 43

OBJECTIF

• Comprendre les motivations et les actions des personnages :

monsieur Seguin et Blanchette.

On s’appuie sur une première lecture magistrale du texte jusqu’à la page 43.

■ Inscrire le personnage de la chèvre dans la mémoire

La chèvre de monsieur Seguin est un personnage qui appartient à notre patrimoine litté-raire. Se souvenir de l’œuvre c’est tout d’abord se souvenir de ce personnage. Les élèvesrelisent la description de la chèvre page 9.

«Comment reconnaît-on Blanchette sur l’illustration page 8? »

«Trouve une information dans le texte qu’on ne peut pas voir sur l’illustration. »

➤ Les détails concernant le physique sont généralement repris dans les illustrations ;ici on insiste peu sur les sabots noirs et luisants, les cornes zébrées et les yeux doux ;les indices de reconnaissance sont la barbiche et les longs poils blancs.

On peut consulter d’autres versions illustrées pour confronter les choix des illustrateursqui sont des interprétations du texte. On peut dire quelle représentation de Blanchette onpréfère et pourquoi.

➤ Les informations concernant le caractère sont uniquement dans le texte : Blanchetteest docile et caressante.

■ Connaître monsieur Seguin

Les élèves répondent aux affirmations par vrai ou faux : • C’est la première fois que monsieur Seguin élève une chèvre alors il s’en occupe trèsgentiment• Comme monsieur Seguin a déjà perdu des petites chèvres, il en a choisi une adultepour ne pas avoir à l’éduquer.• Blanchette est la septième chèvre de monsieur Seguin.• Comme monsieur Seguin a peur du loup, il a pris une chèvre très forte.• Monsieur Seguin pense que, comme il a pris une chèvre toute jeune, il va pouvoir luiapprendre à vivre dans son pré. • Monsieur Seguin a besoin d’une chèvre mais il est sûr qu’il va à nouveau perdre Blanchette.

➤ Dans les phrases 1, 2, 4, 6, seule une partie de la phrase est vraie. On ne peut pasles accepter complètes mais on peut dans les échanges remarquer que monsieurSeguin a déjà perdu 6 chèvres, qu’il craint donc pour la suivante, qu’il ne se découragepas, qu’il s’occupe très gentiment de Blanchette.

On pourra garder en trace écrite les phrases 3 et 5 qui sont vraies.

■ Le départ de Blanchette

• Les élèves préparent le dialogue à deux. Pour certains lecteurs, on peut ne faire prépa-rer qu’une partie (le début jusqu’à « autrement encornées que toi »). Si l’on veut éviter lesproblèmes de reconnaissance du dialogue par rapport au récit, on propose aux élèvesl’extrait déjà préparé pour la lecture dialoguée.


Ce travail de préparation du texte peut aussi être mené avec un petit groupe d’élèvesmoins bons lecteurs dans un atelier différenciation. Ainsi ce groupe aura déjà commencéà manier le texte et aura travaillé sur l’articulation entre les dialogues et le récit.Ici, le travail de préparation n’a pas pour but de préparer la lecture à voix haute de tousles groupes, exercice souvent fastidieux, mais de donner aux élèves le temps de prévoircomment ils veulent lire. Lors de la mise en commun, on ne travaille pas obligatoirementsur tout l’extrait, on peut passer du temps sur une réplique parce que l’on confronte leschoix interprétatifs.

➤ Cette confrontation des interprétations orales aide les enfants à mettre en évidence:– que Blanchette s’ennuie et qu’elle est ennuyée de faire de la peine à monsieurSeguin : sa voix est triste ;– qu’elle aime bien monsieur Seguin : sa voix n’est pas agressive ;– que monsieur Seguin aime sa chèvre : il se montre attentionné, sa voix est douce ;– que la décision de Blanchette est inéluctable : sa voix est obstinée, décidée. Ellerépète à chaque fois «monsieur Seguin» pour le convaincre ;– que monsieur Seguin cherche des solutions pour la convaincre de rester : marquerles interrogations, des hésitations ;– qu’à la fin, monsieur Seguin est en colère, triste.

Les élèves se rappellent des œuvres où le loup représente un danger.Dans la littérature patrimoniale, le loup peut sortir vainqueur (Le loup et l’agneau) ou êtrefinalement tué (Pierre et le loup). Cela varie suivant les versions pour Le petit chaperonrouge ou suivant les personnages dans Les trois petits cochons où seul le troisième cochonéchappe au loup. Chacune à leur manière, ces histoires nous donnent des avertissementsqui ne sont pas tous identiques. On va donc pouvoir chercher à comprendre le sens del’avertissement donné par La chèvre de monsieur Seguin.

■ Comprendre le bonheur de Blanchette

Le bonheur de Blanchette est lié à la découverte de la nature provençale ; afin de s’assurerque les élèves comprennent bien que Blanchette est très heureuse on peut leur proposerun rapide relevé lexical :

«Est-ce que Blanchette est heureuse? Cherchez à deux des indices dans les pages 24 à 34.»

➤ L’auteur de la lettre le dit : – Tu penses Gringoire si notre chèvre était heureuse ! (p. 27) ;– En somme, ce fut une bonne journée pour la chèvre de monsieur Seguin. (p. 34).Elle est bien accueillie :– On la reçut comme une petite reine (p. 24) ; Toute la montagne lui fit fête (p. 24).Ses actions le montrent :– Cela la fit rire aux larmes (p. 32) ;– se vautrer, rouler, se redresser d’un bond… (p. 28-29).

Pour ces derniers indices, il faut expliciter le fait que toute cette débauche de mouvementmanifeste la joie de la chèvre ; on aide les élèves à faire le lien avec leur propre expérience.Que fait-on quand on est très content d’être quelque part, d’avoir gagné : courir, crier, sau-ter, battre des mains…

On peut aussi, pour des élèves plus jeunes ou qui ne lisent pas très vite, se contenter d’une recherche dans les illustrations. L’enseignant lit lui-même les premières phrasesproposées ci-dessus qui indiquent clairement son bonheur. Ensuite, on cherche dansl’album l’illustration qui montre le mieux la joie de Blanchette quand elle est partie.Suivant ses propres goûts, ses propres expériences, on préférera les pages 26-27, 28-29 ou30-31. Ces échanges permettent de retrouver le texte lui-même puisque pour justifier leurchoix, les élèves parleront des actions de Blanchette et du décor.

➡ FICHE 1P. 13


Étape 3 Le combat, temps fort du conte Pages 38 à 53

OBJECTIFS

• Comprendre les émotions et les réactions de Blanchette.

• Inscrire le passage dans la mémoire.

■ Rappeler l’épisode précédent et mesurer sa durée

Pour effectuer le rappel de la journée de Blanchette, on utilise les illustrations puis ondemande aux élèves d’expliquer les changements de couleur de l’herbe. On arrive ainsi àla fin de la journée avec la tombée de la nuit qui présage l’arrivée du loup.Le travail sur les pages 38 à 53 est mené en lecture autonome au sein d’ateliers différents.

■ S’approprier la scène du combat

Trois activités sont proposées pour des groupes de 4 à 6 élèves. Elles peuvent toutes êtremenées par deux groupes en parallèle. La confrontation des productions sera éclairantecar elle constitue une interprétation du texte.La diversité des ateliers permet de traiter les différents moments en ayant recours à despratiques artistiques variées (musique, diction, arts visuel). La mise en commun a un réelintérêt puisque les élèves découvrent le travail des autres groupes, la particularité dechaque moment et les éléments que le groupe a voulu mettre en valeur.

Dire et sonoriser un passageLes élèves préparent la sonorisation du passage (Fiche 2) qui sera lu par l’un d’entre euxpendant que les autres réalisent le bruitage. Pour la lecture, ils peuvent se relayer ; pourles bruits, on peut utiliser les voix, on peut avoir recours à des objets courants comme àdes instruments de musique et même à des sons enregistrés. On indique clairement auxélèves quels outils on met à leur disposition et on les incite à en explorer les possibilités.Derrière un paravent : des feuilles de papier agitées ou un manteau créent le bruit du ventdans les feuilles ou le vol du gerfaut ; des bruits de classeurs, de règle, font entendre lescoups de dent qui annoncent le combat. Les silences seront aussi importants que les petitsbruits pour créer l’ambiance.Dans ce silence, on entend les clochettes du troupeau, la corne de monsieur Seguin. Onpeut ne pas être exhaustif, l’important est que cette écoute du texte amène à changer lerythme de lecture, à être attentif à la montée de l’inquiétude.

Lire à plusieurs voix Il s’agit d’engager les enfants dans une lecture collective (Fiche 3) qui construit la dimensionpartagée du récit. Chaque phrase, ou même extrait de phrase, peut être lu seul ou à plusieursavec des effets de voix très différents. On n’ajoute aucun bruit au texte, on explore ses pos-sibilités. Nous donnons quelques exemples des possibilités avec la première phrase pour ungroupe de six. Il n’est bien sûr pas question de donner ces solutions à imiter mais d’aiderchaque groupe à construire sa propre interprétation.

le groupe : Énorme, immobile, une voix tremblante qui montre la peur de la chèvre: assis sur son train de derrière, il était là

une voix ferme qui montre l’assurance du loup et sa voracité : regardant la petite chèvreblanche et la dégustant par avance.

deux voix impressionnées : Énorme,deux voix très articulées : im-mo-bi-le, deux voix fortes : assis sur son train de derrière, (chaque duo plusieurs fois)tout le groupe : il était là

➡ FICHE 2P. 13

➡ FICHE 3P. 14


une voix : regardant la petite chèvre blanche et la dégustant par avance.

le groupe entier : Énorme, immobile, assis sur son train de derrière,

une voix pleine de peur : il était là regardant la petite chèvre blanche

une voix gourmande : et la dégustant par avance.

Élaborer une affiche avec des collages et des dessins Les groupes qui travaillent sur ce passage (fiche 4) travaillent avec un surligneur. Ils re-pèrent dans l’album tous les éléments décrits dans la fiche 3 et représentés dans l’album. Ils font ensuite un relevé de tous les mots qui indiquent une couleur dans le texte. Les éléments repérés dans les illustrations doivent être reproduits selon des moyens déci-dés par le groupe avec l’aide de l’enseignant : photocopie, dessins, découpages dans desmagazines, coloriage, peinture. Chaque élément peut être agrandi ou rétréci suivant leschoix du groupe.Le résultat sera bien sur le fruit de la lecture attentive des élèves, pourtant l’enseignant estlà pour les aider à lire et à organiser la composition. le choix de matériaux qu’il mettra àla disposition des élèves aura son importance. Un choix de format suffisamment impor-tant permettra aux élèves de travailler plus facilement en groupe et l’affiche aura plusd’impact. Elle doit manifester l’ambiance de la scène par ses couleurs et par son mouve-ment. Peu de couleur, plutôt un jeu de noir, blanc et rouge. Le noir de la nuit, celui du loup ; leblanc de Blanchette et le rouge du sang ; des lueurs (aube, étoiles) ; quelques brinsd’herbe et peut-être les plumes du coq dont on entend le cri. Tous ces éléments sont mêlés et le travail de collage doit permettre de jouer sur les tailleset surtout l’agencement de tous ces éléments. On peut extraire les cornes de Blanchette,les dents du loup, les étoiles …. Ces éléments peuvent être multipliés pour créer un effet ;ils sont découpés donc facilement déplaçables avant le collage. Ils peuvent être organisésà la manière d’un tableau cubiste ou d’une scène plus réaliste, on peut travailler avec desprojections de peinture ou des tâches, en repassant des traits saillants. On peut utiliserdes laines ou d’autres matériaux pour les deux fourrures…

■ Construire le sens global du passage du combat

NB : Les éléments de compréhension qui sont ici traités peuvent aussi être intégrés auxéchanges suscités par la présentation du travail des ateliers.

Les émotions de Blanchette On propose aux élèves des pensées en style direct.

«Est-ce que Blanchette peut penser cela à un moment du combat? »

Quand c’est possible, les élèves sont amenés à préciser à quel moment du combat corres-pond cette pensée.

Je voudrais tenir jusqu’à l’aube.Je voudrais tenir aussi longtemps que la RenaudeJe n’aurais jamais du quitter mon pré.Ce n’est pas grave de mourir car j’ai eu une belle journée.Je vais m’enfuir et rentrer chez monsieur Seguin.Je suis bien plus forte que la Renaude.Monsieur Seguin sera bien triste. Si je m’y prends bien, je vais tuer ce loup.Oh ! je n’y arriverai pas.

➡ FICHE 4P. 14

a

bc

de

fg

hi


➤ Les pensées a, b, c, d, g, i sont possibles à certains moments du passage. La discus-sion permet de préciser des aspects essentiels : – Est-ce que la chèvre a peur? Non, après les premiers frissons, elle est totalementabsorbée par son combat et par son désir de faire aussi bien que la Renaude ;– Est-ce qu’elle croit qu’elle va vaincre le loup? Non, elle espère combattre jusqu’aumatin ;– Est-ce que la chèvre regrette d’être venue dans la montagne? Non, elle sait qu’elle nepourrait plus supporter l’enclos, elle élimine l’idée de rentrer.

On peut ainsi interpréter le combat de Blanchette en élaborant une réponse à la question :

«Pourquoi se bat-elle puisqu’elle sait qu’elle ne peut pas gagner? »

Cette question peut être posée dès le début ou amené par l’enseignant au cours deséchanges concernant les différentes pensées. Il aide ainsi les élèves à saisir le sens de l’ac-tivité. En réfléchissant à telle ou telle pensée, ce qui est en jeu c’est de comprendreBlanchette.

La dimension symbolique du loupLe loup apparaît dans le texte comme un adversaire que Blanchette ne peut pas vaincre,aussi bien dans la manière dont il a été annoncé (combat avec les autres chèvres dont laRenaude) que par son entrée en scène et l’assurance qu’il manifeste. Dès le début, les deuxcombattants connaissent l’issue du combat… et le lecteur aussi. Blanchette a connu l’ivres-se de la liberté mais cela a un prix.

«À deux, inventez une pensée que peut avoir le loup. »

➤ Cette pensée peut être inventée :– «Cette petite chèvre va être bien délicieuse» ;– «C’est une chance que les chèvres de M. Seguin trouvent toujours un moyen de luiéchapper» ;– «Voilà une petite chevrette qui se bat bien».Mais elle peut aussi être «extraite » du texte (p. 45) et reformulée : – « Inutile de se presser, elle ne peut pas m’échapper» ;– « Je l’aurai quand je voudrais » ;– « Je la mange quand je veux».

Les pensées extraites du texte montrent bien que du point de vue du loup,l’issue du combat est acquise.


Étape 4 Retour sur le texte completOBJECTIF

Construire le sens global de l’œuvre.

■ S’approprier la trame narrative

Pour travailler sur l’ordre des éléments essentiels et repérer les articulations logiques etchronologiques, on propose aux élèves un résumé sous forme de puzzle. Pour des enfantsde fin de cycle 3, ce travail peut n’être mené qu’avec un groupe de besoin.

« Mets les phrases suivantes dans le bon ordre ».

➤ Lors de la validation du résumé, on insiste sur l’enchaînement chronologique desévénements et on précise les liens logiques qui les marquent. Les élèves peuvent aussis’appuyer sur les reprises qui ne sont pas toujours pronominales : Blanchette i lajeune chèvre – décide de se battre i ce combat. L’ordre est d – f – b – a – e – c.

■ Comprendre la logique du personnage de Blanchette

« Relie les débuts et les fins de phrases. »

Avec des enfants de début de cycle 3, on proposera les morceaux de phrases en deuxcolonnes avec consigne de les relier. Avec des élèves plus grands, on peut ne donnerqu’une partie des phrases avec consigne aux élèves de les compléter. Cette courte activi-té permet de vérifier que les élèves ont compris les motivations de Blanchette tout au longdu récit.

Blanchette est triste • • pour faire aussi bien que la Renaude.

Blanchette est heureuse • • parce qu’elle voit le loup.

Blanchette frissonne • • parce qu’elle se sent libre dans la nature.

Blanchette a peur •• parce qu’elle pense que les chèvres doiventvivre libres dans la montagne.

Blanchette veut se battre jusqu’au matin • • parce que le soir approche.

Blanchette veut partirde chez monsieur Seguin •

• parce qu’elle se sent enfermée.

a- Comme il y a une fenêtre ouverte, Blanchette peut s’enfuir dans la montagne. Ellepasse une très bonne journée à profiter de sa liberté.

b- Peu à peu elle devient triste et, un matin, monsieur Seguin lui demande ce qu’elle a.Elle explique qu’elle veut aller dans la montagne. Alors monsieur Seguin l’enferme dansl’étable.

c- Ce combat dure toute la nuit et à l’aube, le loup la dévore.

d- Monsieur Seguin a déjà perdu six chèvres dévorées par le loup mais il ne se découra-ge pas et il en installe une nouvelle très jolie qu’il appelle Blanchette.

e- Le soir, elle entend arriver le loup mais elle décide de ne pas rentrer et de se battre.

f- À son arrivée chez monsieur Seguin, la jeune chèvre est très heureuse mais un jour elleaperçoit la montagne.


■ Interpréter le parcours de Blanchette

On propose quatre résumés aux élèves :

« Choisis le résumé qui te semble le plus juste. »

➤ Les résumés 1 et 3 contiennent des informations fausses.Les résumé 2 et 4 sont justes mais ils mettent l’accent sur des motivations différentes.ils peuvent être recopiés ou collés dans le cahier de littérature au choix des élèves.

■ Interpréter l’avertissement du conte

NB : Le sens de ce récit est complexe. Il y a certes à la fin une morale mais elle ne résumepas le sens du récit. En effet, le narrateur semble condamner ceux qui sont du « parti deschèvres », pourtant Blanchette est la vraie héroïne de ce récit ; elle a choisi de vivre plei-nement sa vie. On respecte son goût de la liberté, on admire son courage. Et au fond lerécit nous dit aussi que, décidément, on n’enferme pas les chèvres. L’auteur « avertit » Gringoire mais par un récit où la beauté, l’enthousiasme, la curiositédu monde sont du côté de la chèvre. De plus, il est lui-même un écrivain, c’est-à-dire qu’ilchoisira de vivre en poète et pas en journaliste. Cette réflexion ne peut être menée ainsi en classe mais l’enseignant l’aura en tête.Avec les élèves, la question à laquelle on essaie de répondre est la suivante : «Que pensez-vous de ce qu’a fait Blanchette? » On peut même partir d’une question plus concrète pourles enfants : «Est-ce que tu aimes bien Blanchette? » «et monsieur Seguin?»Pour alimenter le débat, on peut proposer les avis suivants à discuter : • C’est bien fait pour elle, elle n’avait qu’à ne pas s’éloigner de chez elle.• Je l’admire parce qu’elle a fait ce qu’elle trouvait le plus important.• Je la plains parce qu’à la fin c’est terrible quand le loup la mange.• Je suis triste pour monsieur Seguin qui a encore perdu une chèvre.• Elle est égoïste cette chèvre, car elle fait de la peine à monsieur Seguin qui ne lui veutque du bien.• À la fin, elle est vraiment courageuse de lutter si longtemps contre le loup.

➤ Pour conclure le débat, on peut élaborer une phrase qui résume ce que l’on pense de Blanchette: elle est courageuse, têtue, intrépide, énervante, jolie, douce, stupide, etc.On se gardera de demander aux élèves comment ils agiraient dans la vie ; il suffitqu’en se projetant dans le personnage, ils puissent être du parti de Blanchette ou non.

Après son départ de chez monsieur Seguin, Blanchette découvre la montagne. Elle passeune journée merveilleuse. Quand vient la nuit, elle sent le danger et pense un peu à ren-trer chez monsieur Seguin mais elle ne veut plus vivre attachée et préfère affronter le loup.Elle se bat jusqu’au matin parce qu’elle est têtue et croit qu’elle va échapper au loup.

Après son départ de chez monsieur Seguin, Blanchette découvre la montagne. Elle passeune journée merveilleuse. Quand vient la nuit, elle sent le danger mais elle ne veut pasrentrer chez monsieur Seguin pour vivre attachée. Elle préfère affronter le loup et se batjusqu’au matin parce qu’elle est courageuse et veut profiter jusqu’au bout de la liberté.

Après son départ de chez monsieur Seguin, Blanchette découvre la montagne. Elle passeune journée merveilleuse. Quand vient la nuit, elle regrette de s’être autant éloignée dechez monsieur Seguin. Elle décide alors de rentrer mais le loup la surprend et la mangeaprès un long combat.

Après son départ de chez monsieur Seguin, Blanchette découvre la montagne. Elle passeune journée merveilleuse. Quand vient la nuit, elle sent le danger et pense un peu à ren-trer chez monsieur Seguin mais elle ne veut plus vivre attachée et préfère affronter leloup. Elle se bat jusqu’au matin pour faire aussi bien que la Renaude.


FICHE 1 (dialogue de l’album, p. 16 à 20)

– Écoutez, monsieur Séguin, je me languis chez vous, laissez-moi aller dans la montagne.

– Ah ! mon Dieu !… Elle aussi !

– Comment, Blanquette, tu veux me quitter !

– Oui, monsieur Séguin.

– Est-ce que l’herbe te manque ici ?

– Oh ! non ! monsieur Séguin.

– Tu es peut-être attachée de trop court, veux-tu que j’allonge la corde ?

– Ce n’est pas la peine, monsieur Séguin.

– Alors, qu’est-ce qu’il te faut ? Qu’est-ce que tu veux ?

– Je veux aller dans la montagne, monsieur Séguin.

– Mais, malheureuse, tu ne sais pas qu’il y a le loup dans la montagne… Que feras-tu quand ilviendra ?…

– Je lui donnerai des coups de cornes, monsieur Séguin.

– Le loup se moque bien de tes cornes. Il m’a mangé des biques autrement encornées quetoi...

Tu sais bien, la pauvre vieille Renaude qui était ici l’an dernier ? une maîtresse chèvre, forte etméchante comme un bouc. Elle s’est battue avec le loup toute la nuit… puis, le matin, le loup l’amangée.

– Pécaïre ! Pauvre Renaude !… Ça ne fait rien, monsieur Séguin, laissez-moi aller dans la mon-tagne.

– Bonté divine !.. dit monsieur Séguin ; mais qu’est-ce qu’on leur fait donc à mes chèvres ? Encoreune que le loup va me manger… Eh bien, non… je te sauverai malgré toi, coquine ! et de peur quetu ne rompes ta corde, je vais t’enfermer dans l’étable et tu y resteras toujours.

FICHE 2 (texte de l’album, pages 38 à 43)

Tout à coup le vent fraîchit. La montagne devint violette ; c’était le soir.

– Déjà ! dit la petite chèvre ; et elle s’arrêta fort étonnée.

En bas, les champs étaient noyés de brume. Le clos de monsieur Séguin disparaissait dans lebrouillard, et de la maisonnette on ne voyait plus que le toit avec un peu de fumée. Elle écoutales clochettes d’un troupeau qu’on ramenait, et se sentit l’âme toute triste… Un gerfaut, qui ren-trait, la frôla de ses ailes en passant. Elle tressaillit...

Puis ce fut un hurlement dans la montagne :

– Hou ! hou !

Elle pensa au loup ; de tout le jour la folle n’y avait pas pensé... Au même moment une trompesonna bien loin dans la vallée. C’était ce bon monsieur Séguin qui tentait un dernier effort.

– Hou ! hou !... faisait le loup.

– Reviens ! reviens !... criait la trompe.

Blanquette eut envie de revenir ; mais en se rappelant le pieu, la corde, la haie du clos, elle pensaque maintenant elle ne pouvait plus se faire à cette vie, et qu’il valait mieux rester.

La trompe ne sonnait plus...

La chèvre entendit derrière elle un bruit de feuilles.

Elle se retourna et vit dans l’ombre deux oreilles courtes, toutes droites, avec deux yeux quireluisaient...

C’était le loup.



Énorme, immobile, assis sur son train de derrière, il était là regardant la petite chèvre blancheet la dégustant par avance. Comme il savait bien qu’il la mangerait, le loup ne se pressait pas ;seulement, quand elle se retourna, il se mit à rire méchamment.

– Ah ! ha ! la petite chèvre de monsieur Séguin ! et il passa sa grosse langue rouge sur ses babinesd’amadou.

Blanquette se sentit perdue... Un moment, en se rappelant l’histoire de la vieille Renaude, quis’était battue toute la nuit pour être mangée le matin, elle se dit qu’il vaudrait peut-être mieuxse laisser manger tout de suite ; puis, s’étant ravisée, elle tomba en garde, la tête basse et la corneen avant, comme une brave chèvre de monsieur Séguin qu’elle était... Non pas qu’elle eût l’es-poir de tuer le loup, les chèvres ne tuent pas le loup, – mais seulement pour voir si elle pourraittenir aussi longtemps que la Renaude...

Alors le monstre s’avança, et les petites cornes entrèrent en danse.


Ah ! la brave chevrette, comme elle y allait de bon cœur ! Plus de dix fois, je ne mens pas,Gringoire, elle força le loup à reculer pour reprendre haleine. Pendant ces trêves d’une minute,la gourmande cueillait en hâte encore un brin de sa chère herbe ; puis elle retournait au com-bat, la bouche pleine... Cela dura toute la nuit. De temps en temps la chèvre de M. Séguin regar-dait les étoiles danser dans le ciel clair et elle se disait :

– Oh ! pourvu que je tienne jusqu’à l’aube...

L’une après l’autre, les étoiles s’éteignirent. Blanquette redoubla de coups de cornes, le loup decoups de dents...

Une lueur pâle parut dans l’horizon... Le chant du coq enroué monta d’une métairie.

– Enfin ! dit la pauvre bête, qui n’attendait plus que le jour pour mourir ; et elle s’allongea parterre dans sa belle fourrure blanche toute tachée de sang...

Alors le loup se jeta sur la petite chèvre et la mangea.

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