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La Discothèque La discothèque présentée ci-dessous est un très bon article parut dans le Numéro 100 du magazine Jazzman en mars 2004. Abonnez-vous au Magazine Jazzman sur Info-Presse.fr : http://www.info-presse.fr/fiches/jazzman_1958_gp.htm Le top 100 de Jazzman Saxophone.fr.st Vincent Lieubeau

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Page 1: Le top 100 - Saxovincesaxovince.free.fr/imprimer/discotheque.doc · Web viewDjango Reinhardt “Rétrospective” 1934-1953 Saga/Universal Des premières faces du Quintette du Hot

La Discothèque

La discothèque présentée ci-dessous est un très bon article parut dans le Numéro 100 du magazine Jazzman en mars 2004.

Abonnez-vous au Magazine Jazzman sur Info-Presse.fr :http://www.info-presse.fr/fiches/jazzman_1958_gp.htm

Le top 100de Jazzman

Fidèles à notre volonté de vous offrir des “guides pratiques”, nous avons voulu pour ce numéro répondre à votre demande fréquente de “discothèque idéale”. Nous avons effectué un choix “de tous les jazz” en embrassant tout un siècle. Et si, au passage, nous avons laissé de côté des dizaines de disques qui nous tirent les larmes, les 100 que nous avons retenus sont là pour nous donner du bonheur. Par Pascal Anquetil, Franck Bergerot, Vincent Bessières, Alex Dutilh et Arnaud Merlin.

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King Oliver“The Quintessence”1923-1928Frémeaux/Night & Day 1923, c’est Noël et Pâques: on sort de l’Antiquité en entrant dans l’ère du jazz. Joseph Oliver, roi de la collective néo-orléanaise parvenue à son apogée, passe le relais à Louis Armstrong, Messie du jazz moderne. Quand il ne dialogue pas en duo avec Jelly RolI Morton, King Olivier est entouré des meilleurs: Ory, Dodds, Bigard, Noone...

JeIIy Roll Morton“The Quintessence”1923-1940Frémeaux/Night and Day Ce dandy voyou s’est autoproclamé “inventeur du jazz”. La mégalomanie de l’homme au diamant entre les dents n’est sans doute pas aussi infondée qu’on a pu le prétendre. Spontanéité, humour, sens inné des couleurs, tout l’esprit pionnier du jazz chante dans sa musique joyeusement polyphonique. Morton est un passeur essentiel qui a réussi le premier “métissage” musical.

Fletcher Henderson“The Quintessence”1924-1936Frémeau/Night & Day Visitée par Louis Armstrong, une bande de New-Yorkais ringards propulsée dans le jazz moderne. Les ringards deviennent des as, de Coleman Hawkins à Henry Red Allen. Don Redman invente le big hand, relayé par les grandes plumes du swing. Pour l’ivresse d’Henderson Stomp, le délire de Queer Notions, le “flash” de Chinatown.

Louis Armstrong “The Complete Hot Five and Hot Seven Recordings”1925-19294 CD Columbia/Sony Louie en majesté. Dans un format à l’italienne. Quant à la musique, elle s’affirme en 89 plages comme un monument du XXe siècle. Satchmo y déploie ses ailes de géant, invente le soliste et impose le jazz comme une musique universelle.

Coleman Hawkins “The Quintessence”1926-1944Frémeaux/Night and Day Dans ce florilège, ce sculpteur d’arpèges se montre à son apogée et fait majestueusement le pont entre jazz classique et moderne. Hawkins, champion de la progression harmonique, donne ici au saxophone une voix décisive et à l’improvisation toute sa dimension “verticale”. Comme dit Alain Gerber, Hawkins est “l’un des rares musiciens sans lesquels, pour de bon, la face du jazz eut été changée”.

Bix Beideiderbecke“Volume 1, Singin’ the Blues”

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1927Columbia/SonyUn condense de l’art du cornettiste le plus influent du jazz « classique ». Aux côtés du saxophoniste Frankie Trumbauer, et du guitariste Eddie Lang, Bix pose ici les bases d’une nouvelle conception du jazz, faisant une part conséquente à l’arrangement. La West Coast, notamment, saura s’en souvenir.

Duke Ellington« The Okeh Ellington »1927-1930Columbia/SonyCa grogne, ça grince, ça gémit, ça “growle”… L’orchestre comme une seule voix, la joliesse oubliée, c’est la fureur de survivre dans l’âge d’or de Harlem qui transpire de chaque instrument. Un manifeste de l’expressionnisme en musique : le premier chapitre de la plus belle musique du monde est un sommet.

Fats Waller“The Quintesseence”1929-1943Frémeaux/Night & DaySi le jazz était un éclat de rire, il aurait la voix de Fats waller. Dix doigts voletant d’insouciance, une voix de diablotin malicieux… Et le swing, le swing, le swing : en piano solo comme dans un florilège de petites formation où les solistes savent tout dire en 32 mesures. Et le bonheur qui coule à flots de chansons pétillantes.

Art Tatum“Art Tatum“1933-1948Masters of Jazz-Cabu/Next MusicCette anthologie en deux volumes présente toutesles facettes du virtuose : le voici aux côtés de Big Joe Turner, au sein du all stars réuni par Esquire en 1944, à la tête de son trio avec guitare et contrebasse, et bien sûr en solo, de l’historique Tiger Rag aux chef d’œuvre de la fin des années 1940.

Jimmie Lunceford“The Perfect Big Band”1934-1941Saga/Universal“Le rythme, c’est notre affaire”, telle était la devise de l’orchestre. En un travelling ailé, on assiste ici à la naissance et l’explosion du style Lunceford : le tuilage harmonieux entre les différentes sections en chant-contrechant, le tout propulsé sur tempo médium par un swing élastique, ce fameux two beat basé sur l’accentuation paresseuse des temps pairs. For dancers only.

Django Reinhardt“Rétrospective”1934-1953Saga/UniversalDes premières faces du Quintette du Hot Club de France, avec Stéphane Grappelli, aux dernières gravures avec les jeunes turcs du bebop, cette impeccable anthologie en trois volumes rend grâce au génie du guitariste manouche, n’oubliant aucun de ses aspects - l’improvisateur, le compositeur, ou l’accompagnateur.

Count Basie“The Quintessence”1937-1941

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Frémeaux/Night & Day Une anthologie centrée sur l’art du grand orchestre. Ou comment, à la fin des années 30, le Count, poussé par sa rythmique, emmène ses solistes (Lester Young, Buck Clayton, Herschel Evans, Harry Edison...) sur des arrangements cousus main ou élaborés sur le tas : la photographie d’une époque où le swing était roi.

Lionel Hampton “Hampton”1937-1947Masters of Jazz-Cabu/ Next Music De 1937 à 1941, Lionel Hampton tient table ouverte chez Victor. Les plus fins gourmets y défilent pour des ripailles en petit comité, à la bonne franquette. Sans jamais faillir à l’élégance du trait, le maître de maison y déploie une énergie qu’il transpose au big band sur la deuxième partie de ce double album.

Benny Goodman“The Famous 1938 Carnegie Hall Jazz Concert (Complete)”1938Columbia/Sony Un panthéon du swing dans un temple de la musique. En janvier 1938, Goodman réunit sur scène son trio (Teddy Wilson et Gene Krupa), son quartette avec Lionel Hampton, un grand orchestre, et des hommes de Basie et d’Ellington pour un “boeuf” du feu de Dieu. Une soirée de légende, minutieuse-ment restaurée.

Sidney Bechet “Sidney Bechet”1938-1952BD Jazz/Nocturne En deux volets (et une bande dessinée de seize pages), la saga de Sidney Bechet. D’abord à New York entre 1938 et 1949, au sommet de son art, au saxophone soprano comme à la clarinette. Puis à Paris entre 1949 et 1952, entouré de jeunes musiciens français qui l’accompagnent dans un formidable engouement populaire.

John Kirby“The Chronological”1939-1941Classics/Mélodie Face aux grosses machines à swing, “le plus grand petit orchestre du pays”. Le preste coup de plumeau de la rythmique Kyle / Kirby / O’Neill fait voltiger des miniatures pour sextette troussées par le trompettiste Charlie Shavers, souvent d’après les grands airs classiques (Chopin, Schubert, Beethoven). Grisant !

Billie Holiday“The Commodore Master Takes”1939-1944Commodore/Universal Ces séances sont au jazz vocal ce que Les Fleurs du mal sont à la poésie. Un sommet. Mut Gabier qui avait en 1939 entendu Billie roder en public Strange Fruit fut autorisé par John Hammond à enre-gistrer ce brûlot antiraciste. Cinq ans plus tard, Lady Day au zénith de son art, retrouvera le label du disquaire new-yorkais pour y graver quatorze chansons. Toutes sublimes.

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Duke Ellington “Ko-Ko”1940Dreyfus/Sony Jack The Bear, Concerto for Cootie, In a Me!Iotone... Plus Chloé qui inspira Bons Vian, Warm VaIIey qui dévoile l’intimité féminine, Ko-Ko qui jaillit comme la révolution en marche... Une année qui fut celle de l’état de grâce pour le Duke. Et entre dix solistes d’exception, Jimmy Blanton y invente la contrebasse !

Lester Young"Blue Lester"1942-1949Dreyfus/SonyLester sentimental, tout en vague à l'âme, qui joue les standards avec une indolence et une profondeur qui ont séduit des générations de saxophonistes. Sans en avoir l'apparence, Lester Young fut un révolutionnaire, introduisant au ténor une sonorité nouvelle mais aussi la douceur au coeur du jazz.

Charlie Parker“Now’s The Time”1945-1948Dreyfus/SonyL’art de Parker conjugue l’audace harmonique à la puissance évocatoire du blues, la vitalité rythmique au sens le plus aigu du phrasé. L’une des plus grandes contributions artistique du XXe siècle, dont cette sélection d’interprétations en studio, à la restitution sonore soignée, est un digne vade-mecum.

Frank Sinatra"Jazz !!!"1946-1 952Saga/UniversalCelui qu'on surnommait "The Voice", loin d'être un simple "chanteur pour dames", était aussi un impeccable swingrnan: en témoignent en particulier ces pièces gravées entre 1946 et 1952, en compagnie de quelques jazzmen de tout premier plan comme Coleman Hawkins, ou de l'orchestre d'Axel Stor-dahl.

Dizzy Gillespie“PIeyel Jazz Concert”1948Vogue/BMGParis assiste bouchebée à deux révolutions en un soir: Things to Corne qui transpose le bebop à l’échelle du grand orchestre dans un déluge sonore; Afro Cuban Drum Suite (Cubana Be, Cubana Bop), manifeste du latin jazz qu’introduit Chano Pozo en maître de cérémonie. Dizzy exulte.

Miles Davis"The Complete Birth of the Cool"1949-1950Capitol/EMILa première vraie rupture dans l'histoire du jazz, avec un nonette qui renonce à l'éclat des big bands, lui estompe la vivacité du swing, qui brouille les structures. Paysages au pastel imaginé par Miles, Gerry Mulligan, Gil Evans... Survolé de solistes à la voilure ample et duveteuse.

Bud Powell

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"The Amazing Bud Powell, Volume 1”1949-1951Blue Note/EMILa quintessence du style Bop au piano, sous tous ses angles : en solo, en trio avec les spécialistes du genre (Tommy Potter / Roy Haynes ou Curly Russell / Max Roach), et en quintette avec Fats Navarro et le tout jeune Sonny Rollins. Le tout sur un répertoire presque entièrement signé par Bud : du grand art.

Stan Getz"Plays"1952Verve/UniversalOn le surnommait "The Sound" et ce disque est en soi une illustration, sans titre véritable, comme si Stan Getz n'était que pur plaisir de jouer, ce qui n'était pas tout à fait faux. Avec une facilité désarmante, un flot d'idées spontané, une fougue voluptueuse qui n'appartenaient qu'à lui.

Gerry Mulligan Chet Baker« The Best of the Gerry Mulligan Quartet with Chet Baker »1952-1957Pacific/EMIUn quartette sans piano pour que les ailes du baryton et du trompettiste se déploient sans entraves. Les entrelacs d’un couple qui danse sur une piste de nuages. Adéquation parfaite et paradoxale d’un son de groupe moelleux et de phrasés individuels incisifs, d’une pulsation rythmique précise et d’un rendu aérien.

Modern Jazz Quartet"Django"1953-1955Prestige/WarnerLe MJQ, modèle de raffinement et d'élégance. Un quatuor de gentlemen pour un jazz de chambre où la retenue le dispute à la délicatesse du swing. Des compositions de maître, une mise en place irréprochable, une juste interaction de talents, ce quartette affirmait avec cet album son art de l’équilibre.

Shelly Manne« The Three & The Two »1954Comtemporary/WarnerFace 1 (sur le microsillon d’origine), The Three : Shorty Rogers (trompette), Jimmy Giuffre (saxophone, clarinette), Shelly Manne (batterie), Russ Freeman (piano). Batterie mélodique, recours au seriel, improvisations libres, contrepoints ad lib. En 1954 et avec le sourire !

Clifford BrownMax Roach“Clifford Brown / Max Roach”1954-1955Emarcy/UniversalC’était il y a cinquante ans. Le Hard Bop donnait au jazz un nouveau printemps et Clifford venait de composer Joy Spring. Sa sonorité était grasse comme une brioche au beurre, mais elle lui donnait une souplesse d’acrobate lorsqu’il se faufilait dans les dédales de Jordu. Max faisait danser les tambours sur des hymnes au renouveau.

Sarah Vaughan

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“Swingin’ Easy”1954-1957Emarcy/UniversalLa voix bebop par excellence. Liberté de ton, étendue des registres : Sarah Vaughan n’a sans doute jamais été plus convaincante qu’en ces années de fantaisie partagée avec les pianistes John Malachi et Jimmy Jones, les bassistes Joe Benjamin et Richard Davis, et le batteur Roy Haynes… La joie faite voix.

Lennie Tristano“Lennie Tristano”1955Atlantic/WarnerUn solo depiano désespéré en requiem à Charlie Parker, un mambo turc aux polymètres prémonitoires, des trios ad lib aux articulations minérales, une poignée de standards confiée à un Lee Konitz plus « lesterien » que jamais. L’édition Rhino propose en bonus le solo de 1962 « The New Tristano ».

Lee Konitz“With Warne Marsh” 1955Atlantic/Warner Haute voltige sur fond tristanien (Sal Mosca au piano, Billy Bauer à la guitare) avec une rythmique de saut à l’élastique (le vertige sans rompre : Oscar Pettiford, Kenny Clarke). Et les volutes de saxo-phones rivalisent de fraîcheur. Sans ego, côte à côte, deux voix égales transgressant le bebop par la tendresse.

Erroll Garner“Concert By the Sea”1955Columbia/SonyL’album qui propulsa ErrolI Garner au sommet de son succès public. Enregistré à Carmel en Californie, dans des conditions parfaites, ce concert en trio avec Eddie Calhoun et Denzil Best présentele pianiste à son meilleur, essentiellement sur des standards totalement revitalisés par le swing garnérien.

Count Basie “April In Paris”1955-1956Verve/Universal L’un des sommets de la deuxième période du Count: arrangeurs inspirés (Wild BilI Davis, Ernie Wilkins, Frank Foster, Neal Hefti) et solistes de luxe (Thad Jones, Benny Powell, Joe Newman, Frank Wess, sans oublier Basie lui-même...) alimentent la machine à swing en savoureuses relances et contrastes dynamiques.

Duke Ellington"Such Sweet Thunder"1956-1957Columbia/SonyLa forme de la suite totalement magnifiée. Il fallait la puissance expressive d'Ellington, sa palette de couleurs flamboyantes et l'épaisseur humaine de ses solistes pour évoquer Shakespeare et ses si doux orages. Harry Carney dans un de ses plus grands rôles et dans The Telecaster, une mise en scène du silence proprement stupéfiante.

Sonny Rollins

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"A Night at The Village Vanguard"1957Blue Note/EMI En trio, sans piano, pour mieux arpenter des standards dont il explore les moindres recoins, le saxophoniste se livre à l'art du récit avec une imagination féconde, une sonorité magnifique et une énergie qui font éclater les canons de l'improvisation. Elvin Jones à la batterie n'y est pas pour rien.

Ahmad Jamal“Ahmad's Blues”1958Chess/UniversalInitialement publiée sur deux disques Argo, une soirée au Spotlite Club de Washington. Avec lsrael Crosby à la contrebasse et Verneli Fournier à la batterie, Ahmad Jamal y plante un arbre généalogique du piano contemporain, celui d'Esbjörn Svensson ou de The Bad Plus: l'art de lasuggestion pour un minimaliste explosif.

Art Blakey "Moanin"1958Blue Note/EMI La profession de foi du hard bop: sur des thèmes d'une implacable efficacité signés par le saxophoniste Benny Golson (Blues March, Along Came Betty...) et le pianiste Bobby Timmons (Moanin'), le quintette de Blakey revivifie le jazz moderne aux sources sacrées et profanes du spiritual et du blues.

Art Pepper"+ Eleven, Modem Jazz Classics"1959Contemporary/Warner"Plus onze", car Art Pepper avait à ses côtés autant d'instrumentistes de première classe pour servir les partitions superbement imaginées pour lui par Marty Paich sur de nouveaux classiques du jazz moderne. La fougue de l'artiste éclate sur un disque emblématique de l'apogée de la West Coast.

Miles Davis "Kind of Blue" 1959Columbia/SonyEn deux séances, le 2 mars et le 22 avril 1959, Miles Davis change la face du jazz moderne, Aidé dans son entreprise par les savantes couleurs modales de Bill Evans, l'intuition réfléchie de John Coltrane et la flamme de Cannonball Adderley, le trompettiste s'aventure en terrain vierge, et s'impose en défricheur.

John Coltrane"Giant Steps"1959Atlantic/WarnerVoilà des mois qu'il s'entraînait à faire le tour de la tonalité avec bottes de sept lieues. Il voulait faire le point avec ça avant de passer à autre chose. Ça aurait dû être assommant. Cefut tout le contraire. Fervent, constamment lyrique. Et même si Tommy Flanagan s'y perd un peu, il le fait avec une telle distinction !

Ornette Coleman"The Shape of Jazz to Corne"1959

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Atlantic/WarnerC'est John Lewis qui persuada Nesuhi Ertegun d'enregistrer Ornette et son quartette sur Atlantic. Résultat :en mai 1959 à L.A., ils inventent ensemble "la forme d'un jazz à venir". Ce qui frappe aujourd'hui, c'est la "sagesse" de cette musique aux confins de l'atonalité mais surtout son enchantement mélodique. Ses ritournelles acides si tristement allègres n'ont pas fini de danser dans nos têtes comme des flammes.

Dave Brubeck Quartet"lime Out"1959Columbia/SonyLes audaces métriques appliquées de Blue Rondo a la Turk et de Take Five font sourire de nos jours. Mais ces vieux tubes sont rentrés dans nos coeurs, certains chantés par Nougaro. Et puis, il y avait le merveilleux drumming de Joe Morello et le "souffle au coeur" de Paul Desmond. Nos sourires sont alors de tendresse.

Wes Montgomery Trio“A Dynamic New Sound”1959Riverside/WarnerÀ peine arrivé York pour enregistrer son premier Riverside, Wes y enregistrait une série de chefs-d’œuvre pour guitare, orgue et batterie, une série de miniatures où le drive le dispute à la précision des idées. Comme dans cette version définitive de Round Midnight que tous les guitaristes contemporains connaissent par cœur.

Ella Fitzgerald“The complete Ella in Berlin : Mack the Knife”1960Verve/UniversalSur Scène, avec l’appui d’un quartette parfait (Jim Hall, aussi discret que délicat), la chanteuse fait swinguer les classiques du répertoire américain. Et quand elle oublie les paroles de Mack the Knife, elle en improvise de nouvelles, comme un charme. Dans toute sa splendeur, Ella – sa malice, sa grâce.

Gerry Mulligan and The Concert Jazz Band “At the Village Vanguard”1960Verve/Universal Légèreté de la formule, clarté de l’architecture, solistes de premier plan, le Concert Jazz Band fut un orchestre de rêve éphémère que Mulligan inventa pour son plaisir. Des chases ébouriffants, Clark Terry merveilleux, des arrangements admirables, et le baryton sur un nuage. La perfection en action.

Jimmy Giuffre 3 “1961”1961ECM/UniversalSous cet intitulé se cachent les albums “Fusion” et “Thesis”, réalisés à l’origine pour le label Verve par Jimmy Giuffre, Paul Bley et Steve Swallow. En vingt miniatures presque “zen”, l’acte de naissance d’un jazz de chambre décomplexé vis-à-vis du free comme de la musique “contemporaine”.

BilI Evans “The Complete Live at the Village Vanguard”1961Riverside/Warner

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Un dimanche au Village Vanguard. L’après-midi et la soirée. Un trio de rêve éveillé, Scott La Faro gambadant, Paul Motian chuintant et Bill Evans lové sur le clavier... Un monument de télépathie, d’empathie, de sensibilité frissonnante. À ce niveau d’intensité émotionnelle, la beauté du jazz vous envoûte pour le reste de votre existence.

Thelonious Monk “Monk’s Dream” 1962Columbia/Sony L’univers du pianiste dans toute son étrangeté (voir ses compositions, et sa manière d’accompagner), mais aussi dans sa pleine intégrité: Monk dirige ici un quartette où la rythmique John Ore / Frankie Dunlop soutient avec intelligence les divagations mûrement réfléchies du saxophoniste Charlie Rouse.

Charles Mingus “Mingus Mingus Mingus Mingus Mingus”1963lmpuIse/UniversalToujours trempé de moiteurs baptistes, mais plus ellingtonien que jamais, avec la reprise de Mood Indigo et un Charlie Mariano très “hodgien” sur Celia et I X Love. On frissonne de tendresse sur Theme for Lester Young (Goodbye Pork Pie Hat). Eric Dolphy nous met en transe sur Better Get Hit in Yo’ Soul.

Gil Evans“The lndividualism”1963-1964Verve/UniversalWayne Shorter, Phil Woods, Elvin Jones : l’orchestre brille de mille feux sur des partitions signées par le chef, ou empruntées à Kurt Weill, notamment. Faisant la part belle aux registres graves et aux ambiguïtés entre majeur et mineur, la musique de Gil Evans porte aux rêveries les plus fécondes.

Horace Silver “Song For My Father”1963-1964Blue Note/EMI Un monument du hard bop, et l’un des joyaux du catalogue Blue Note: Horace Silver sur un répertoire funky à souhait, rythmiquement dense, où affleurent ses racines caraïbes. Des thèmes inoubliables, un swing irrésistible, deux quintettes échevelés. En prime, Joe Henderson tour à tour lyrique et véhément.

Eric Dolphy “Out to Lunch” 1964Blue Note/EMI “Sorti déjeuner”. Avec, sur la pochette, une impossible heure de retour. Ironie du destin ou prémonition d’une fin soudaine ? Cet album est en tout cas le dernier que Dolphy enregistra quelques semaines avant sa mort. Fouettée par Tony Williams, la musique s’offre ici comme un haletant film à suspens avec plein de rebondissements et de surprenants zigzags. De bout en bout, la beauté y est convulsive.

Albert Ayler Trio “Spiritual Unity” 1964ESP/Mélodie

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Sur une rythmique à Giacometti (Gary Peacok / Sunny Murray), le chant du saxophone, rien que le chant, jusqu’à l’extase, jusqu’au cri. Derrière ce qui peut paraître vociférant, une extraordinaire décon-traction, une faculté de faire le vide, de relâcher à l’extrême pour aboutir à une libération maximale d’énergie.

John Coltrane “A Love Supreme”1964lmpulse/Universal L’un des rares chefs-d’œuvre incontestés du jazz, qui s’imposa comme tel dès sa parution. John Coltrane et son quartette célèbrent l’amour divin et leur dévotion passionnée donne toute sa puis-sance à cette suite en quatre parties où le lyrisme se consume en une méditation instrumentale.

Wayne Shorter “Speak No Evil”1964Blue Note/EMI Six compositions toutes devenues des standards du jazz contemporain, par un quintette de feu, réunissant la trompette pyrotechnique de Freddie Hubbard, le velouté du ténor du leader, le piano incisif de Herbie Hancock, la basse ondoyante de Ron Carter et les roulements d’Elvin Jones: un album-manifeste.

Archie Shepp “Fire Music” 1965lmpulse/Universal Une émouvante relecture de Prelude to a Kiss par un saxophoniste imprégné de Ben Webster, le plus enraciné de ces jeunes gens en colère qui firent “la nouvelle chose”. Ses petites formations plaident formidablement pour les aspirations architecturales du free jazz trop souvent ignorées. Bouleversant hommage à Malcolm X.

Herbie Hancock “Maiden Voyage” 1965Blue Note/EMI On peut parler de perfection formelle pour l’architecture des solos et pour la répartition des rôles de chacun des membres du quintette. Freddie Hubbard, George Coleman, Ron Carter, Tony Williams et Hancock à leur sommet. Et cinq compositions qui vont devenir autant de classiques gravés dans le marbre... Évasion collective.

Don Cherry “Complete Communion”1965Blue Note/EMI Deux suites en quatre mouvements. Affranchi d’Ornette Coleman, le trompettiste Don Cherry livre une musique ardente, juvénile, en compagnie de musiciens parmi les plus engagés de la new thing : Gato Barbieri ténor, Ed Blackwell a la batterie. Et Henry Grimes, à la basse, miraculeusement réapparu en 2003.

Cecil Taylor “Conquistador”1966Blue Note/EMI Flux et reflux, le mouvement permanent balance entre chant soliste et fureur collective, entre

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suspensions apaisées et tensions exacerbées. En deux pièces denses et chatoyantes, Cecil Taylor signe là un long poème sonore, plein de fruits et de couleurs. S’y entend le bouillonnement d’une pulsion vitale.

Miles Davis “Miles Smiles” 1966Columbia/SonyLe titre n’est pas une idée de marketing. Miles est à nouveau en pleine forme. Et heureux. Il a les meilleurs musiciens du monde : Shorter, Hancock, Carter, Williams. Ils sont entrés en studio, ont jeté un coup d’œil aux partitions et, sans tour de chauffe, ont arraché la gomme. D’un bout à l’autre, on n’a pas un poil de sec.

Gary Burton “A Genuine Tong Funeral” 1967RCA/BMGDécrite par son auteur comme un “opéra sombre sans parole”, interprétée par le quartette du vibraphoniste Gary Burton élargi à quelques figures de la nouvelle vague, cette pièce révéla la force de l’écriture de CarIa Bley. Dramatique, ironique, surprenante, son oeuvre est une grande réussite du genre.

Chick Corea “Now He Sings, Now He Sobs” 1968Blue Note/EMI Gravé avec Miroslav Vitous et Roy Haynes, ce premier disque en trio du pianiste est un coup de poing à l’estomac : d’emblée, dans le blues réinventé (Matrix) comme dans le reste du répertoire (des ori-ginaux de Corea), s’imposent un toucher, un sens du phrasé chromatique, un drive irrésistibles...

Miles Davis “Bitches Brew”1969-1970Columbia/SonyMiles à la pointe de son époque. La révolution gronde, les instruments se branchent : Miles aussi. Guitare saturée, piano électrisé, batterie rock, groove black, montage et démontage en studio, sa “potion de sorcière” donne la grimace à ses anciens fans mais lui rallie une partie de la jeunesse.

Charlie Haden“Liberation Music Orchestra”1969Impulse/UniversalCarla Bley, pour les arrangements ou Charlie Haden pour le leadership ? Les deux, pour assumer maternité et paternité d’un disque emblématique. La bande-son d’un jazz militant et tiers-mondiste, se posant non pas en témoin, mais en acteur de son temps. Une invitation irrésistible à chanter à tue-tête.

Martial Solal trio“sans tambour ni trompette”1970RCA/BMGSans tambour ni trompette. Rien qu’un piano et deux contrebasses jouées tantôt pizzicato, tantôt à l’archet, par Jean-François Jenny-Clark et Gilbert Rovère. L’heure n’était plus aux standards, mais aux originaux. Quatre suites bourrées d’idées formidablement structurantes pour ce trio très spécial.

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Mahavishnu Orchestra“Birds of Fire“1972Columbia/SonyUn jalon du jazz-rock. John McLaughlin signe là la déclaration d’indépendance en prolongeant ses années Miles par une mise en forme teintée des expériences novatrices du rock progressif. Guitare explosée, violon, claviers et basse électriques, batterie binaire : les règles du jeu ont changé, place au concept de groupe.

Paul BIey"Open to Love"1972ECM/UniversalLa solitude d'un Don Juan? Le pianiste choisit de mêler les compositions de ses deux muses successives, Carla Bley et Annette Peacock. Une méditation amoureuse, des effluves de baisers volés, d'alanguissements torrides, de tendresse émue. Une mise à nu des sentiments. Fragments du solo amoureux...

Herbie Hancock “Sextant”1973Columbia/Sony La front une emmenée par Eddie Henderson n’est plus qu’un lointain souvenir du hard bop, les grooves de la rythmique et le bruitisme des claviers annoncent lendemains qui dansent et surlen-demains électro. Ce futurisme associé à une spontanéité à l’ancienne fait aujourd’hui de “Sextant” un album culte.

Keith Jarrett “Belonging”1974ECM/Universal Jarrett en version européenne, assumant l’héritage du quartette de ses débuts avec Charles Lloyd: des mélodies comme s’il en pleuvait, une invitation à la transe, l’investissement de chacun dans le projet collectif, un son chaleureux, l’effleurement de la beauté sensible, la profondeur des choses simples...

Weather Report"Black Market"1975-1976Columbia/SonyEn 1976, le répertoire du groupe, splendide, respecte encore un savant équilibre entre ses deux principaux fondateurs, le pianiste Joe Zawinul et le saxophoniste Wayne Shorter. L'album voit aussi le passage de relais entre le bassiste Alphonso Johnson et l'étoile montante de l'instrument, Jaco Pastorius.

Anthony Braxton"Dortmund (Quartet)"1976Hatology/Harmonia MundiLes détenteurs des grands quartettes des années 1970 se refusant à les publier sur compact, reste le piratage, et cette formidable captation en public. Auprès de Dave Holland et de Barry Altschul, George Lewis a pris la place de Kenny Wheeler, au service d'une écriture aux angles dingues qui tisse admirablement l'improvisation dans ses trames.

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Michel Portal"Dejarme solo"1979Dreyfus/SonyLe premier disque dont le Bayonnais soit le seul "fautif". Un album pathétiquement joyeux où Portal se joue de la magie du re-recording. Avec toute la famille des anches et des bois, sans oublier son bandonéon, il invente seul son folklore imaginaire et ses rythmes populaires. Au final, cela donne une fabuleuse collection de timbres au service d'une musique turbulente, intemporelle, inclassable. Toujours de grande classe.

Chet Baker"The Touch of Your Lips"1979Sunnyside/AbeilleÀ quarante-neuf ans, neuf ans avant sa disparition, Chet Baker se livre ici d'une même voix, trompette et chant se confondant sur un répertoire de standards. Un bouquet de confidences, recueillies dans l'intimité du trio avec le guitariste Doug Raney et le contrebassiste Niels-Henning Orsted Pedersen.

Art Ensemble of Chicago"Full Force"1980ECM/UniversalOn cria à l'hérésie (les rebelles au salon de thé...) avant de s'apercevoir que les albums du quintette de Chicago sur le label ECM sont ceux qui rendent le mieux justice à leur souci des timbres, à leur écho des bruissements de la planète. Celui-ci offre en prime un éblouissant hommage posthume à Mingus (Charlie M).

Pat Metheny"Off ramp"1981ECM/UniversalLe lyrisme exacerbé par un sens des couleurs rythmiques relevant plus du flux sanguin que de la pulsation métronomique. Pat Metheny et son complice Lyle Mays ont fait appel au percussionniste Nana Vasconcelos pour conférer un supplément d'âme à une section rythmique idéale. Et des compositions belles comme le jour qui se lève (Au lait...).

Dave Holland"Seeds of Time"1984ECM/UniversalDe l'art de se dresser sur les fondations : le trombone de Julian Priester et la trompette de Kenny Wheeler en écho d'hier, le saxophone de Steve Coleman et la batterie de Marvin "Smitty" Smith pour le futur en filigrane. La basse du leader en visionnaire du centre, déjà. La photographie d'un "passage" fascinant.

Keith Jarrett"Standards Live"1985ECM/UniversalLa délicieuse sensation de l'écoulement du temps, du work in progress sous nos oreilles. Par-dessus tout le plaisir charnel de l'improvisation. À corps perdu. Symbiose parfaite du trio, en public à Paris, deux ans après ses débuts. Les doigts dansent, les phrases dansent, l'imagination danse: une sarabande.

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Louis Sclavis"Chine / Chamber Music"1987-1989Label bleu/Harmonia MundiRéédités en un seul album, deux étapes du parcours de Louis Sciavis. Avec "Chine", l'instrumentiste s'impose au sein d'un quartette élargi à Dominique Pifarély, et signe son premier "tube", Duguesclin. Deux ans plus tard, le septette de "Chamber Music" témoigne des ambitieuses préoccupations du compositeur.

Paul Motian"Monk in Motian"1988Winter & Winter/Harmonia MundiPour partie redécouvert avec ce disque, le répertoire de Monk va comme un gant à l’ancien batteur de Bill Evans et Keith Jarett, tant il sait en souligner l'aridité des angles, le surréalisme ou les aspects dansants. A ses côtés, Joe Lovano et Bill Friseli imposent alors une alternative à Brecker et Metheny.

Wynton Marsalis“City Movement”1992Columbia/SonyPlus qu’une musique de ballet, le surdoué du jazz compose une fresque musicale évoquant les mouvements d’une métropole contemporaine. De la Louisiane ancestrale au jazz moderne, son écriture montre l’histoire du jazz en mouvement, servie par un septette expert capable de sonner comme un orchestre entier.

Bill Frisell “This Land” 1992Elektra Nonesuch/WarnerUn parti pris d’orchestration magnifiquement assumé: un sextette à trois vents, guitare en apesanteur, basse économe et batterie-scalpel. La couleur globale triture la matière sonore, hypertrophie les harmoniques, mais ne quitte jamais la lisibilité de la splendeur mélodique. L’Amérique, version mémoire du futur.

Steve Coleman"The Tao of Mad Phat"1993Novus/BMGAugmentés de quelques invités (dont Roy Hargrove) et enregistrés en studio devant un public réduit, les Five Elements vibrent d'une convivialité qui leur fait parfois défaut. La ballade sublime de Bunky Green, Little Girl l'll Miss You, leitmotiv fugitif de l’œuvre de Steve Coleman, n'aura jamais été aussi longuement visitée.

John Zorn Masada“Alef”1994Tzadik/Orkhêstra Le groupe emblématique du renouveau de la scène downtown new-yorkaise explosant ses racines klezmer dans une version éblouissante de virtuosité (John Zorn, Dave Douglas, Greg Cohen et Joey Baron). Incandescentes, les compositions de Zorn prolongent Mingus, Ornette et Dolphy dans une spiritualité enfiévrée.

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Paolo Fresu"Night on the City"1994Owl/UniversalRéalisé presque par hasard, comme un défi, à la fin d'une autre séance milanaise, cet album au climat contemplatif trahit une complicité télépathique entre les membres du quintette du trompettiste sarde. Une tenta-tive pertinente, loin des enjeux circonstanciels, pour jouer au plus près de l'émotion.

Cassandra Wilson “New Moon Daughter”1995Blue Note/EMI L’album du basculement de Cassandra Wilson dans son esthétique actuelle : le blues qui lui colle à la peau, l’épaisseur émotionnelle de son interprétation de chansons dont on croyait avoir fait le tour (Strange Fruit), des arrangements dépouillés, guitare et percussions, et une gravité granuleuse qui vous prend aux tripes.

Jan Garbarek"Visible World"1995ECM/UniversalSur le tranchant de la lame, le passage du visible (la mélopée ample, le rythme fluide) à l'invisible (le son pur, l'abstraction du temps). Un tissu rythmique somptueusement léger, voile de tulle dansant dans le vent. Jan Garbarek joue dans les interstices de l'attente. Sous la séduction de l'écume, le vertige de la vague.

Tim BerneMarc DucretTom Rainey“Big Satan”1996Winter & Winter/ Harmonia Mundi Tim Berne est devenu un maître à penser l’interaction entre écriture et improvisation, entraînant dans son projet un batteur et un guitariste renversants d’intelligence musicale et technique. Tous trois multiplient les mètres, renversent les rôles, redistribuent paramètres et espaces d’initiative sur la partition. Prodigieux !

Nils Petter Molvaer"Khmer"1996-1997ECM/UniversalDisque fondateur d'un rapport à l'électronique qui préserve absolument une conception acoustique des timbres y compris pour la pulsation rythmique. C'est du coup un univers très sensuel, poétique, que nous ouvre le trompettiste norvégien, Il nous baigne dans des sensations très physiques. Celles du plaisir intra utérin envolé.

Brad Mehldau “Songs”1998Warner/Warner Standards, compositions originales ou emprunts à d’autres répertoires (notamment celui de Radiohead) concourent ici à égalité au projet du pianiste, sans cesse remis sur le métier avec ses

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partenaires de trio: viser à l’épure du sentiment amoureux avec tous les moyens permis par le langage du piano moderne.

Henry Texier Azur Quintet"Mozaïc Man"1998Label bleu/Harmonia MundiHenri Texier pour la générosité du timbre, du drive, du chant. Sébastien, le fils, pour la limpidité du trait. Glenn Ferris pour l’animalité grandiose dont il fait vivre le tuyau-trombone. Bojan Zulfikarpasic pour le sens des volumes. Tony Rabeson, pour la vivacité, la souplesse, l’élégance.

Charles Lloyd"The Water is Wide" 1999ECM/UniversalSe jouent là quelques-uns des mystères du jazz. Le bonheur de plonger dans la musique de l’autre, qui est un soi-même insoupçonné. Billy Higgins, Larry Grenadier, John Abercrombie, Brad Mehldau et Charles Lloyd ont evacuee toute nécessité demonstrative. Charles Lloyd, lui, ne joue pas de saxophone. Il le fait chanter.

Barry Guy New Orchestra"Inscape-Tableaux"2000Intakt/OrkhêstraS'il en est un qui vainc nos résistances à l'aridité des improvisations extrêmes, c'est le contrebassiste et compositeur Bary Guy. Comme personne, il sait sculpter par anticipation la masse de l'improvisation collective. La pianiste Marilyn Crispell est mise en valeur dans une suite orchestrale d'une force esthétique à couper le souffle.

Shirley Horn"You’re My Thrill"2000ECM/UniversalShirley Horn au rang des grandes dames du jazz, celles qu’on désigne seulement par leur prénom. Simplicité, dénuement même, d’une voie sans artifice à laquelle les cordes de Johnnt Mandel servent d’idéal écrin. La plus que lente, dans le jazz, c’est elle, pour mieux faire frissonner l’émotion.

Peter ErskineNguyên LêMichel Benita“ELB” 2000ACT/Night & DayL’horlogerie tendre qui fit le bonheur de Weather Report, un guitariste jouant sur des couleurs et des matières improbables, un contrebassiste qui fait passer avant tout la musicalité. Qu’ils jouent ou qu’ils composent, ces trois-là ont en commun la beauté du geste, une oreille de songwriter, des qualités de danseur.

Jean-Paul CeleaDave LiebmanWolfgang Reisinger« Ghosts »2001Night Bird/Night & DayColtrane, Monk, Ornette, Ayler et quelques autres jouent ici les fantômes pour une jubilatoire revitalisation du jazz contemporain. Au tournant du nouveau siècle, tout est permis, même la "table

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rase", à condition de tout connaître du passé. Trois experts en musicalité pour une prise de risques maximale

Wayne Shorter“Footprints Live !”2001Verve/Universal C’est clair et net : tout ce que l’on peut attendre encore de bonheurs inédits, de vertige d’invention, d’écoute réciproque et d’interactivité, de jaillissements de plaisir, est dans ce quartette. Le plus bel orchestre de jazz en activité, tous formats confondus, de ces trois dernières années. Live ? Hors de toute raison !

Vienna Art Orchestra“Art & Fun”2001Verve/UniversalPour fêter les vingt-cinq ans du Vienna ,Mathias Rüegg, son directeur musical, imagine ici une sorte de rétrospective, revisitant ses répertoires en les intégrant à de nouvelles partitions. Un deuxième disque actualise encore la démarche en en confiant des remixes au guitariste Martin Koller.

Daniel Humair“Baby Boom”2003 Sketch/Harmonia Mundi Rencontrés au Conservatoire où Daniel Humair enseigna jusqu’à l’an passé, les saxophonistes Matthieu Donarier et Christophe Monniot, le guitariste Manu Codjia et le contrebassiste Sébastien Boisseau dynamisent aujourd’hui le propos du batteur, en un subtil équilibre entre rigueur du geste et liberté de l’instant.

Michael Brecker"Wide Angles"2003Verve/UniversalUn véritable concerto pour le saxophoniste le plus influent de ces vingt dernières années. Aisance technique éblouissante, nervosité de l'écriture, originalité de l'orchestration, Brecker l'insurpassable déploie grand ses ailes et plane au-dessus de la mêlée des ténors anonymes. La leçon est magistrale.

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