le mésentère dans tous ses replis – l’épiploon dans toutes ... · le mésosigmoïde...
TRANSCRIPT
7
Le mésentère dans tous ses replis – L’épiploon dans toutes ses franges: Quelles pathologies en pédiatrie ?
Fred AVNI, Elisa AMZALLAG-BELLENGER, Rony SFEIR
Services d’imagerie et de chirurgie pédiatriques
Hôpital Jeanne de Flandre – CHRU – Lille
1. Définition et anatomie
Le péritoine est une fine membrane séreuse qui recouvre la face
postérieure de la paroi abdominale (= péritoine pariétal) et la face antérieure des
organes abdominaux (= péritoine viscéral). Il est constitué d’une couche simple
d’épithélium cuboïdal dénommé mésothélium. De nombreuses villosités et des
vésicules couvrent sa surface; ils produisent de 50 à 150 cc de liquide séreux par
jour; ce liquide sépare les deux feuillets et crée une cavité potentielle/virtuelle :
la cavité péritonéale. Cette cavité est fermée chez l’homme mais communique
avec les espaces extrapéritonéaux chez la femme via l’utérus et les trompes.
Divers replis péritonéaux se forment durant le développement
embryologique; ils vont progressivement constituer des ligaments qui vont
servir de supports aux organes abdominaux.
Un mésentère est un ligament composé d’une double couche de péritoine
qui couvre l’intestin grêle et certaines parties du colon et les connecte à la paroi
abdominale postérieure. Le mésentère grélique enveloppe et soutient le jéjunum,
8
l’iléon, le colon transverse (= méso-colon transverse) ainsi que le sigmoïde (=
mésocolon sigmoïde). Le mésentère contient l’artère et la veine mésentériques
supérieures ainsi que leurs branches, des ganglions, des canaux lymphatiques de
même que de la graisse. La racine du mésentère s’étend de la jonction duodéno-
jéjunale située dans l’hypochondre gauche jusqu’ au carrefour iléo-caecal dans
la FID.
Le mésocolon transverse relie la deuxième partie du duodénum et la tête
du pancréas au colon transverse. Le mésosigmoïde s’étend du colon descendant
vers la cavité pelvienne ; il contient les vaisseaux sigmoïdiens et hémorroïdaires.
De manière corollaire, un épiploon est un ligament composé également de
plusieurs couches de péritoine (4 couches) qui relie la petite courbure de
l’estomac au foie (petit épiploon) ou la grande courbure de l’estomac au colon
(grand épiploon).
Ces différents ligaments péritonéaux divisent le péritoine tout d’abord en
deux compartiments principaux : la cavité principale et l’arrière cavité (ou
poche de Morrison) (les deux communiquant par l’hiatus de Winslow). Par
ailleurs, le méso-colon transverse divise la cavité péritonéale principale en deux
espaces supplémentaires: les compartiments sus- et sous mésocoliques (chacun
divisé en espaces sus- et sous-mésocolique gauche et droit) (1-3).
2. Imagerie
Les pathologies du péritoine, du mésentère et de l’épiploon sont très
variées (certaines relativement rares). Elles comportent (entre autres) les
épanchements et abcès, les conséquences des malrotations intestinales et les
tumeurs. Nombre parmi ces pathologies seront découvertes à l’ occasion de
symptomatologies abdominales aiguës. L’échographie (US) sera le plus souvent
9
la première technique d’imagerie utilisée pour évaluer la cavité abdominale.
L’examen sera performant en termes de dépistage de collections ou de tumeurs;
cependant, elle n’est pas suffisante pour une évaluation globale de collections
multiples ou d’invasion tumorale massive et diffuse ; des examens
complémentaires d’imagerie en coupes seront indispensables pour compléter
cette première évaluation.
Le CT scanner permet une bien meilleure évaluation de la cavité
péritonéale et facilite la différentiation entre des pathologies intra-, rétro- ou
extra-péritonéales. Parmi les autres avantages du scanner, il faut citer la rapidité
de l’examen et son accessibilité en situation d’urgence. Les désavantages de la
technique sont l’irradiation et la nécessité d’injection de contraste. De ce fait, les
examens doivent être « customisés » autant que possible au patient et à
l’indication clinique. Il faut surtout éviter de multiplier les acquisitions et utiliser
des modes de reconstruction permettant de réduire les doses.
L’IRM est et devrait plus encore être utilisée en complément de
l’échographie pour étudier les pathologies mésentériques, épiploïques et
péritonéales. Les atouts principaux de la technique sont son caractère non
irradiant et la possibilité d’une approche multiplanaire. Par contre le manque
d’accessibilité en situation d’urgence, l’utilisation plus difficile chez des petits
enfants et la durée de l’examen en sont les désavantages actuels. Des séquences
plus rapides devraient faciliter son utilisation.
Dans certaines circonstances, une radiographie simple de l’abdomen
pourra être utilisée pour rechercher des signes de perforation ou d’abcès.
Enfin, une opacification du tractus digestif supérieur peut dans certaines
conditions se révéler intéressant pour confirmer les complications (obstructives)
des malrotations (1-4).
10
3. Epanchements péritonéaux
De quantités limitées de liquide péritonéal libre peuvent s’observer tant à
l’échographie qu’au scanner dans la cavité pelvienne ou encore entre les anses
gréliques même chez des patients symptomatiques (douleurs abdominales,
traumatismes…) sans que cette constatation ne doive être considérée comme
anormale. Un examen US de contrôle peut éventuellement être réalisé pour
s’assurer que cet épanchement reste limité. L’origine de ce liquide est
multifactorielle. Pour rappel, les vésicules de la surface mésothéliale du
péritoine se rompent et secrètent quotidiennement 50-150 ml d’un liquide
séreux. Par ailleurs, chez les adolescentes, ce liquide peut provenir de la rupture
cyclique de follicules ovariens; enfin, une constipation marquée peut entraîner
un transsudat au travers des parois digestives (5,6).
Par contre, la présence de liquide en grandes quantités est anormale.
Son origine doit être établie à partir des données cliniques, biologiques et
d’imagerie.
3.1 Ascite non compliquée:
L’ascite non compliquée correspond à un épanchement péritonéal
libre en réaction à une série de processus intra-péritonéaux ou en rapport
avec une défaillance d’organes intraabdominaux (Foie) ou plus globale
(Cœur). La découverte survient le plus souvent durant une échographie
abdominale (5-7).
3.2 Formes particulières d’ascite :
3.2.1 Ascite urinaire: C’est une collection intrapéritonéale d’urine en rapport
avec une rupture du tractus urinaire (post-obstructive ou traumatique).
3.2.2 Pseudo-kystes d’inclusion péritonéaux (PIP) : Les PIP correspondent à
une accumulation le liquide dans des espaces fermés mais sans cloison
propre formés par des adhérences intestinales, le plus souvent en
rapport avec des antécédents chirurgicaux. Ils surviennent surtout chez
11
les jeunes adolescentes à la suite d’accumulation de liquide
folliculaire (8).
3.2.3 Pseudo-kystes de dérivations ventriculo-péritonéales: Ces pseudo-
kystes correspondent à l’accumulation de liquide au sein d’adhérences
intestinales agglutinées autour du shunt de dérivation (9).
3.3 Péritonite et ascite compliquée
Une péritonite correspond à une inflammation/infection diffuse de
l’ensemble ou d’une partie du péritoine accompagnant souvent des
épanchements intrabdominaux infectés. La péritonite appendiculaire est la
cause la plus classique de péritonite. Elle sera associée à la formation d’abcès
secondaires à la rupture appendiculaire. Des abcès peuvent aussi se collecter
à la suite d’une diverticulite de Meckel rompue et d’ailleurs à la suite de la
rupture de tout segment digestif. Des collections peuvent aussi se développer
au contact de maladies inflammatoires digestives.
Tout processus inflammatoire ou infectieux entrainera un épaississement
inflammatoire du mésentère adjacent.
Les abcès peuvent être multiples et les collections ne sont pas
nécessairement reliées entre elles. Des fistules peuvent secondairement se
développer entre ces collections et le tractus digestif.
A l’échographie, l’ascite accompagnant les péritonites apparaîtra
échogène et sera retrouvée dans tous les espaces de la cavité péritonéale.
L’échographie démontrera les abcès sous la forme de collections
hypoéchogènes sans paroi mais avec un « gâteau » inflammatoire
périphérique hypervasculaire. La présence de foyers hyperéchogènes peut
traduire une surinfection à anaérobies. Les mésentères adjacents aux
collections apparaîtront épaissis, hyperéchogènes et hypervascularisés.
12
L’échographie apparaît toutefois limitée pour démontrer les collections
multiples. De ce fait, en cas de doute diagnostic ou d’évolution clinique
défavorable, un CT scanner pourra être réalisé. En cas de péritonite, le
péritoine se rehaussera de manière intense après injection de contraste. Le
CT permettra de mieux localiser et de mieux dénombrer les collections ; il
pourra (tout comme l’échographie d’ailleurs) guider le drainage des abcès
(10-13).
3.4 Autres atteintes inflammatoires et infectieuses du mésentère
3.4.1 Adénite mésentérique
L’adénite mésentérique constitue un des principaux diagnostics
différentiels de l’appendicite aiguë. C’est le plus souvent un diagnostic
d’exclusion. Il doit être suspecté lorsque des adénopathies (> 10mm) sont
visualisées dans la FID et tout le long de la racine du mésentère. Comme
toute adénopathie, la vascularisation se fait via des vaisseaux hilaires bien
visibles au Doppler couleur. Comme indiqué, c’est un diagnostic d’exclusion
et les autres causes d’adénomégalies abdominales doivent être envisagées:
iléite infectieuse (en particulier yersiniose), maladies inflammatoires
digestives, hémopathies malignes….Des symptômes ORL concomitants
facilitent l’évocation du diagnostic (14,15).
3.4.2 Panniculite mésentérique (PM)
Une PM est caractérisée par une inflammation chronique, une nécrose
graisseuse et une fibrose du mésentère. Son origine est inconnue. Il faudra
l’envisager devant une douleur aiguë très localisée ( lorsque l’ appendicite
est exclue). L’échographie peut démontrer une zone particulièrement
échogène au niveau du site de la douleur. Le CT scanner est plus spécifique
car il peut démontrer une pseudo-capsule séparant la graisse pathologique de
13
la graisse mésentérique normale. En cas de doute, une biopsie sera
nécessaire.
L’évolution est résolutive, en particulier sous corticoïdes (16,17).
3.5 Ischémie et torsion
3.5.1 Ischémie et torsion de l’épiploon
Une torsion de l’épiploon est une cause rare de douleurs abdominales
chez l’enfant. Elle survient lorsque l’épiploon se tord suivant son grand axe
déterminant un œdème et une ischémie. La torsion peut être primitive ou
secondaire à une tumeur ou encore à une hernie interne. L’obésité est un
facteur favorisant. Le diagnostic pourra (rarement) être évoqué à
l’échographie (masse très échogène du flanc droit ou de la FID) ou au CT
scanner sans injection de contraste (zone de graisse hétérogène à l’ endroit
de la douleur). Le traitement est chirurgical (18).
3.5.2 Appendagite
Une appendagite épiploïque correspond à une inflammation de franges ou
appendices épiploïques que l’on peut retrouver tout le long du colon. Ces
franges peuvent se tordre ou se thromboser ce qui conduit à une ischémie et
une inflammation du tissu mésentérique avoisinant. La localisation la plus
fréquente en est le caecum ce qui rend compliqué le diagnostic différentiel
avec une appendicite. Le CT scanner est caractéristique lorsqu’il démontre
une petite masse graisseuse hétérogène sur le bord antimésentérique du
colon. L’évolution est spontanément résolutive (19).
14
3.6 Le mésentère et les malrotations intestinales (20 -22)
3.6.1 Embryologie normale
Lorsqu’ à la dixième semaine, l’intestin réintègre la cavité abdominale,
l’intestin primitif proximal (= l’intestin grêle proximal) pénètre le premier et
subit une 3ème rotation antihoraire de 90° menant à la configuration en C du
duodénum. La partie plus distale (= iléon terminal, caecum et colon
ascendant) subit une rotation antihoraire supplémentaire de 180°. A ce stade,
la position du caecum est variable (= caecum mobile) et changera encore
durant la période postnatale.
A ce stade :
- Les 2e, 3e et 4e portions du duodénum sont fixés dans le rétropéritoine;
- Le ligament de Treitz fixe la jonction duodéno-jéjunale.
- Les mésentères des colons ascendant et descendant fusionnent avec le
rétropéritoine.
- Le mésocolon transverse fusionne avec le grand épiploon
- Le mésocolon sigmoïde fusionne avec le rétropéritoine.
- L’intestin grêle quant à lui est fixé par toute la longueur du mésentère
dont la racine s’étend depuis la jonction duodéno-jéjunale jusqu’au
carrefour iléo-caecal. C’est cette base du mésentère qui stabilise la
position du grêle et empêche le volvulus.
3.6.2 Embryologie anormale
Un arrêt du développement embryologique peut survenir à tout moment
de la rotation intestinale ; les conséquences en seront variables dépendant du
type de malrotation. Un arrêt précoce se traduira par une non-rotation où
l’intestin grêle sera situé à droite et tout le colon à gauche. Une rotation
incomplète correspond à l’absence de rotation de 180° du grêle ou du colon.
15
Dans ce cadre, le spectre de malrotation est large depuis une quasi non
rotation à une quasi rotation normale. Enfin, une rotation inverse correspond
à la situation où le duodénum présente une rotation horaire au lieu de la
rotation antihoraire normale. Il se situera alors en avant de l’artère
mésentérique et le colon en derrière. Il existera dès lors un risque
d’obstruction et de volvulus ainsi que une association avec des hernies
internes (voir plus loin).
3.6.3 La longueur de la racine du mésentère et le risque de volvulus
Une rotation intestinale complète permet le développement d’une
longueur suffisante de la racine du mésentère et un risque faible de volvulus.
C’est le cas aussi en cas de non rotation; cependant en cas de non-rotation,
des bandes de Ladd peuvent causer une obstruction duodéno-jéjunale. Les
rotations incomplètes où la jonction duodéno-jéjunale se situe à droite de la
colonne et où le caecum se situe en position trop haute sont associés à une
racine du mésentère trop courte et un risque élevé de volvulus
3.6.4 Imagerie des anomalies de rotation
L’imagerie est incapable de déterminer de manière directe la longueur de
la racine du mésentère. Elle peut par contre démontrer des signes indirects
qui permettront d’apprécier l’existence et éventuellement le type de
malrotation.
Ce sont les données cliniques qui détermineront la séquence d’imagerie
réalisée ; la situation est sera différente en cas de symptomatologie aiguë ou
« chronique ».
16
En cas d’obstruction intestinale (en particulier en période néonatale), la
question principale est celle d’un volvulus. L’échographie sera réalisée en
urgence pour vérifier la présence du signe d’enroulement des anses
intestinales et de la veine mésentérique autour de l’axe de l’artère
mésentérique (« whirlpool sign »). Tout doit être mis en œuvre pour obtenir
un diagnostic précis. En cas de doute, une opacification du tractus digestif
supérieur (TOGD) pourra être tentée prudemment pour confirmer les
malpositions du cadre duodénal ainsi que celles du jéjunum proximal.
L’échographie, le TOGD et éventuellement le lavement radio-opaque
pourront être réalisés dans des situations moins aiguës et de symptomatologie
chroniques. L’échographie peut démontrer l’inversion du rapport entre veine
et artère mésentériques. Lorsque la veine se situe à gauche de l’artère, une
malrotation pourra être suspectée. Ce signe comporte un cependant u nombre
significatif de faux négatifs et de faux positifs. Cette réserve concerne aussi
la position de 3e duodénum dont la position en arrière de l’artère
mésentérique a été rapportée comme indicative de malrotation. Le TOGD
reste à ce stade l’examen de référence pour établir l’existence d’une
malrotation en démontrant la position normale ou anormale de la jonction
duodéno-jéjunale. Cependant aucune technique d’imagerie n’est capable
actuellement de déterminer la longueur réelle de la racine du mésentère.
De ce fait, le dépistage et la chirurgie systématique des malrotations fait
toujours l’objet de nombreuses controverses.
3.7 Les hernies internes
Une hernie interne se définit comme une protrusion de structures
digestives au travers d’orifices mésentériques congénitaux ou acquis. Les
hernies internes sont classées en fonction de leur localisation: para-
17
duodénale, péri-caecale, transmésenterique ou intersigmoidienne. Les hernies
paraduodénales et transmésentériques sont les plus fréquentes chez l’enfant.
Les hernies transmésentériques prédominent en période néonatale et peuvent
être associées aux malrotations ainsi qu’à des atrésies; les hernies chez les
grands enfants sont plus souvent para-duodénales. Elles peuvent se
compliquer d’obstructions intestinales et se présenteront sous la forme d’un
abdomen aigu.
Les cas moins aigus de hernie para-duodénale pourront être suspectés lors
d’un transit baryté du grêle ; les anses intestinales apparaitront peu mobiles et
s’aspect « aggloméré » à gauche ou à droite de la ligne médiane ; l’anse
intestinale afférente et efférente pourront être visualisées. Le diagnostic des
hernies transmésenteriques est plus complexe par imagerie (23, 24).
3.8 Les tumeurs du mésentère et de l’épiploon
Les mésentères et les épiploons ont par définition la même origine
embryologique que le péritoine puisqu’ils correspondent à la fusion de
plusieurs replis péritonéaux (2 à 4) ; ils contiennent du tissu conjonctif, des
vaisseaux sanguins, des canaux lymphatiques, des nerfs et de la graisse. De
ce fait, des tumeurs pourront se développer à partir de tout tissu. On peut
noter que les tumeurs péritonéales sont le plus souvent très volumineuses au
moment de leur diagnostic.
Certaines parmi ces tumeurs seront détectées déjà in utéro. Pour d’autres,
leur découverte se fera par imagerie (le plus souvent l’US) à l’occasion de
mises au point de symptomatologies digestives, le plus souvent des douleurs
(80% des cas) ou la palpation d’une masse (30-50% des cas). Des
complications peuvent aussi survenir au niveau des différentes tumeurs
(hémorragie, surinfection, torsion, volvulus…) ce qui modifiera l’aspect des
tumeurs à l’ imagerie et risque de compliquer leur diagnostic.
18
Du fait de leur volume, il sera parfois difficile de déterminer l’origine et la
nature des tumeurs en pré-opératoire. Dans ces cas, le rôle de l’imagerie sera
surtout de définir autant que possible le contenu tumoral et la relation des
tumeurs avec les organes et les vaisseaux de voisinage. L’imagerie permettra
dans certains cas localiser les tumeurs au niveau péritonéal ou rétropéritonéal
Les tumeurs primitives d’origine mésentériques ou épiploiques devront aussi
être différentiées des tumeurs d’origine pelvienne (tumeurs ovariennes par
exemple).
Comme déjà indiqué, l’échographie sera habituellement le premier
examen réalisé. Elle permettra de différentier les tumeurs purement kystiques
des tumeurs solides ou mixtes. L’échographie permettra également de
définir le degré de vascularisation de la tumeur et de démontrer des signes
suggérant son caractère néoplasique.
L’imagerie en coupes (de préférence l’IRM, mais parfois le CT scanner)
sera ensuite nécessaire pour confirmer la nature de la tumeur et son extension
(25, 26)
3.8.1 Les tumeurs kystiques
Une classification des masses péritonéales et rétro-péritonéales kystiques
basées sur leur étiologie et les données histologiques a été proposée par de
Perrot & al. Elle comprend :
• Les kystes d’origine lymphatique (lymphangiome et kyste lymphatique)
• Les kystes d’origine mésothéliale (kyste mésothélial simple, mésothéliomes kystiques bénins et malins)
19
• Les kystes d’origine entérique (kystes entériques et duplications intestinales)
• (Les kystes d’origine uro-génitale)
• Les tératomes kystiques
• Les pseudo-kystes
Les kystes mésentériques et les malformations lymphatiques sont les
principales tumeurs kystiques à prendre en considération en cas de tumeurs
de grande taille découvertes au niveau de la cavité péritonéale. Le contenu
des kystes mésentériques peut être chyleux, séreux ou hémorragique. La
plupart des kystes mésentériques sont situés dans le mésentère de l’intestin
grêle. Leur contenu peut apparaître échogène du fait de complications
hémorragiques ou infectieuses. Environ 3% des kystes mésentériques
présentent des signes de malignité à l’examen histologique.
Les malformations lymphatiques mésentériques peuvent se présenter sous
la forme d’une masse isolée (éventuellement septée) ; d’autres peuvent
infiltrer les parois intestinales et se situer très (trop) près des vaisseaux
mésentériques, d’autres enfin peuvent se développer de manière
multicentrique et infiltrer le mésentère de manière diffuse.
Le rôle de l’imagerie sera essentiel pour démontrer la tumeur et ses rapports
avec les intestins et les structures vasculaires (27-32).
3.8.2 Les tumeurs solides et mixtes
La découverte d’une tumeur abdominale solide ou mixte chez l’enfant,
fait rechercher dans un premier temps une origine rénale (Wilms) ou
surrénalienne (neuroblastome). Dans un deuxième temps, il s’agira d’exclure
une infiltration tumorale métastatique du péritoine. La tumeur primitive en
sera le plus souvent un sarcome.
20
Les tumeurs péritonéales primitives sont rares; elles sont le plus souvent
d’origine mésenchymateuse (Tableau I). Elles peuvent grandir et devenir très
volumineuses avant que des symptômes n’aparaissent. Elles peuvent se
présenter sous une forme isolée ou diffuse. Elles devront être différentiées
des tumeurs d’origine pelviennes s’étendant vers l abdomen (tumeurs
ovariennes ou rhabdo-myosarcomes pelviens). Malheureusement, il est
souvent difficile de différentier toutes les tumeurs entre elles (25).
Les particularités de certaines tumeurs primitives péritonéales peuvent
cependant être soulignées :
• Tumeur inflammatoire myofibroblastique : Cette tumeur peut se
développer partout mais plus particulièrement dans le poumon, le
mésentère et l’épiploon. Elle est considérée comme une tumeur
néoplasique de bas grade ; ses aspects à l’imagerie sont peu spécifiques et
variables (25)
• Le sarcome d'Ewing extraosseux est une tumeur des tissus mous qui fait
partie de la famille des sarcomes d'Ewing, tumeurs présentant de petites
cellules rondes bleues caractéristiques. Lorsque ces tumeurs se
développent dans le péritoine et le mésentère, elles tendent à être
volumineuses et à envahir les structures adjacentes digestives ou
urinaires. Leur pronostic est sombre (25, 33).
• Le rhabdomyosarcome (RMS) de l'épiploon ou du mésentère ne
représente qu'un faible pourcentage des RMS de l'enfant (la majorité étant
des RMS des tissus mous). La tumeur, de grande taille peut apparaître
lobulée et peut se répandre à l'ensemble de la cavité péritonéale
déterminant en aspect en "cake" épiploïque bien démontré au CT scanner
ou à l'IRM. Les RMS péritonéaux devront être différentiés des RMS
pelviens envahissant secondairement le pelvis (25, 35).
21
• Le sarcome de Burkitt est la forme la plus fréquente des lymphomes non-
hodgkiniens et la tumeur maligne la plus fréquente du mésentère et de
l'épiploon. Une ou des masses polylobées sont retrouvées dans 31-64%
des cas. L'envahissement des parois intestinales est fréquent et les
tumeurs pariétales constituent une cause d'invagination intestinale aiguë
secondaire. A l'imagerie, outre la masse, il existe typiquement une
nécrose centrale. Le réseau vasculaire mésentérique est habituellement
englobé dans la masse. L'essaimage tumoral se fait le long des replis du
mésentère; de l'ascite peut rarement survenie. Des lésions à distance dans
les reins, les ovaires et les seins peuvent se développer (25).
• Les hémangiome infantiles sont des tumeurs vasculaires qui peuvent se
développer dans tout espace du corps y compris le mésentère. Au niveau
du mésentère, ils sont rarement congénitaux et la plupart se développent
après la naissance. A l’échographie, l’ hémangiome apparait comme une
masse d’échogénicité variable particulièrement hypervascularisée et
contenant de nombreux vaisseaux très larges, correspondant à des
branches des artères et veines mésentériques. Le spectre artériel au
Doppler apparaît de basse résistance.
Au CT scanner, on observe également un rehaussement massif
après injection de contraste. A l’IRM, les masses peuvent apparaître
partiellement kystiques; l’injection de contraste permet à la fois d’établir
une cartographie vasculaire mais aussi de démontrer l’ hypersignal du
tissu hémangiomateux (25, 35, 36).
• Les lipomes peuvent se développer dans les mésentères (ou les épiploons).
Des lésions de plus de 2 cm peuvent induire des douleurs abdominales,
des saignements, être la cause d’invaginations et d’obstruction intestinale.
Des lésions plus larges peuvent se tordre sur leur pédicule vasculaire et
22
subir une ischémie. A l’imagerie, on pourra observer une zone
hémorragique entourée par des remaniements inflammatoires (37).
4. Conclusions
Les pathologies du mésentère et de l’épiploon, bien que relativement rare
doivent être envisagés en cas de pathologie infectieuse, tumorale ou
malformative de la cavité abdominale.
L’imagerie, tant l’échographie que l’imagerie en coupes contribueront de
manière significative au diagnostic
23
Table I : Tumeurs péritonéales de type solide ou mixte
Masses focales
- Tumeur inflammatoire myoblastique - Maladie de Castleman - Fibromatose mésentérique - Neurofibrome plexiforme - Lipome - Neurofibrome - Hémangiome mésentérique -
Masses diffuses
- Tumeur desmoplastique à petites cellules rondes - Lymphome de Burkitt - Rhabdomyosarcom - Hémangiomatosis - Lymphangiomatose microcytaire diffuse
24
References
1. Meyers AM Clinical anatomy of the abdomen In Meyers MA Charnsang C Oliphant M Meyer’s dynamic radiology of the abdomen 6th edition Springer Publisher 2011 pp 23-40
2. Tirkes T Sandrasegaran K Patel AA Peritoneal and retroperitoneal anatomy and its relevance for cross sectional imaging RadioGraphics 2012; 32: 437-451
3. Siegel MJ Spleen and peritoneal cavity in Pediatric Sonography; M Siegel Ed Wolters Kluwer Publisher 4th Edition 2011 pp 305- 338
4. Tompane T Leong CW Bush R & al Appropriateness of radiology procedures performed in children with GI symptoms and conditions Clin Gastroenterol Hepatol 2014 ; 12 : 970-977
5. Jecquier S Jecquier JC Hanquinet S Intraperitoneal fluid in children: normal US findings depend on which scan head you use Pediatr Radiol 2003; 33:86-91
6. Beierle EA Chen MK Whalen TV and al Free fluid on abdominal CT scan after blunt trauma does not mandate exploratory laparotomy in children J Pediatr Surg 2000; 35: 990-992
7. Sivit CJ Significance of peritoneal fluid identified by US examination in children with acute abdominal pain J Ultrasound Med 1993; 12: 743-746
8. Vallerie AM Lerner JP Wright JD & al Peritoneal inclusion cysts: a review Obstet Gynecol survey 2009; 63: 321-324
9. Kariyattil R Steinbock P Shingal A Cochrane DD Ascitis and abdominal pseudocysts following ventriculo-peritoneal shunt surgery: variations of the same theme J Neurosurgery 2007; 106: 350-353
10. Roach JP Partrick DA Bruny JL & al Complicated appendicitis in children: a clear role for drainage and delayed appendicectomy Am J Surg 2007; 194: 769-772
11. Dinler G Sensoy G Helek D & al Tuberculous in children: report of nine patients and review of the literature World J Gastroenterol 2008; 14: 7235-7239
12. Tan FL Loh D Prabjakaran K Sclerosing encapsulating peritonitis in a child secondary to peritoneal dyalisis J pediatr surg 2005; 40: e21-e23
13. Nam SH Kim SC Kim DY & al Experience with meconium peritonitis J Pediatr Surg 2007; 42; 1822- 1825
14. Toorenvliet & al Clinical differentiation between acute appendicitis and acute mesenteric lymphadenitis in children Eur J Pediatr Surg 2011; 21: 120-123
15. Kamarzyn B & al Mesenteric lymph nodes in children: what is normal and what is abnormal Pediatr Radiol 2005; 35: 774-777
25
16. Bae SH Park SJ Kim WS & al mesenteric panniculitis in a thirteen old Korean boy treated with prednisolone: a case report Pediatr Gastroenterol hepatol nutr 2016; 19: 143-146
17. Mavridis G Livatidi E Niklaos B & al Primary omental torsion in children: ten year experienxe Pediatr Surg 2007; 23: 879-882
18. Redmond P Sawaya DE Miller KH & al Epiploic appendagitis: a rare case of acute abdominal pain in children. Report of a case and review of the pediatric literature Pediatr Emerg care 2015; 31: 717-719
19. Savin Th Kurpios NA Shyer AE & al On the growth and form of the gut Nature 2011; 476: 57- 62
20. Strouse PJ Disorders of intestinal rotation and fixation (malrotation) Pediatr Radiol 2004; 34: 837-851
21. Marine MB Karmazyn B Imaging of malrotation in the neonate Semin ultrasound CT MRI 2014; 35: 555-570
22. Graziano K Islam S Dasgupta R & al Asymptomatic malrotation: diagnosis and surgical management: an APSA outcomes and evidence based practice committee systematic review J Pediatr Surg 2015; 50: 1783-1790
23. Tang V Daneman A Navarro OM & al Internal hernia in children: spectrum of clinical and imaging findings Pediatr Radiol 2011; 41: 1559-1568
24. Villalona GA Diefenbach KA Touloukian RJ Congenital and acquired mesocolic hernias presenting with small bowel obstruction in childhood and adolescence J Pediatr Surg 2010; 45: 438- 442
25. Chung EM Biko DM Arzamendi AM & al Solid tumors of the peritoneum, omentum and mesentery in children: radiologic- pathologic correlation RadioGraphics 2015; 35: 521-546
26. Chang TS Ricketts R Abramowsky CR & al Mesenteric cystic masses: a series of 21 pediatric cases and review of the literature Fetal and pediatr pathol 2011; 30: 40-44
27. de Perrot M Bründler M Tösch M & al Mesenteric cysts ; Towards less confusion ? Dig Surg 2000; 17:323-328
28. Tan JJ Tan KK Chew S Mesenteric cysts: an institution experience over 14 years and review of the literature World J Surg 2009; 33: 1961-1965
29. Heaton TE Liechtey K Postnatal management of prenatally diagnosed abdominal masses and anomalies Prenat Diagn 2008; 28: 656-666
30. Oliveira C Sacher P Meuli M Management of prenatally diagnosed abdominal lymphatic malformations Eur J pediatr surg 2010; 20: 302-306
31. Kim S Kim H Lee C & al Clinical features of mesenteric lymphatic malformation in children J Pediatr Surgery 2016; 51: 582-587
26
32. Tuncer AA Narci A Dilek FH & al Benign cystic mesothelioma in a child: case report and review of the literature Balkan Med J 2016; 33: 232-234
33. Shibuya S, Takamizawa S Hatata T & al Extraosseous Ewing sarcoma in the mesentery: the first report of cases in children Pediatr surg Int 2015; 31: 995-999
34. Lang RS Calder A Roebuck D Embryonal rhabdomyosarcoma of the omentum Pediatr radiol 2009; 39:865-868
35. Yang G Li J Jin Hua Giant mesenteric hemangioma of cavernous and venous mixed type: a rare case report BMC surgery 2013; 13:50