le kempo une philosophie du combat - officiel karate...

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MARS 2011 37 h SERGE CAL L’AVOUE VOLONTIERS, SI LA TERMI- NOLOGIE « KEMPO » renvoie à la tradition d’un karaté ancien et guerrier, il recouvre moins un patrimoine transmis de génération en géné- ration qu’une idée, voire une philosophie du combat. Celle de l’absolu réalisme dans une perspective de combat. « C’était une accentuation progressive d’une recherche qui existe dans tout le karaté, celui de l’effi- cacité en situation réelle dans le quotidien. Nous étions plusieurs professeurs à travailler dans le même esprit et nous avons décidé de nous évaluer les uns les autres.» Le parcours du responsable du kempo au sein de la FFKDA commence par le shotokan au début des an- nées 70. « J’avais envie de me mesurer. Le travail sur soi commence par là ». UNE RECHERCHE À 20 ans, Serge Cal entre dans l’administration péni- tentiaire, ce qui oriente son état d’esprit en fonction de ses besoins. « Avec mon karaté, j’étais en difficulté pour gérer les situations que je rencontrais : il me man- quait des outils pour entrer dans une cellule et contrôler un détenu agité, par exemple ». Après un passage par le kyokushinkai, qui ne comble pas toutes ses interro- gations techniques, il explore le travail des saisies, le combat au sol… En quoi cette recherche est-elle différente du fa- meux « combat libre » ? « Si nous avons des gestuelles proches, notre étude des situations part du karaté. Le MMA, je ne sais pas très bien ce que c’est sur le plan de la recherche technique et de l’état d’esprit. Il y a une forme de fascination pour la violence qui ne nous convient pas. Moi, plus j’approfondis, moins j’ai envie de me bagarrer ». Serge Cal a conscience que sa vie professionnelle et sa vie de pratiquant se sont étroitement mêlées, l’une influençant l’autre et transformant progressivement aussi bien son kara- té que son caractère. « Je suis resté naïf. Je crois à l’éthique du karaté, à ses valeurs. La pratique contri- bue à l’évolution personnelle, à un travail sur soi qu’il faut faire toute sa vie. Beaucoup de gens cherchent à retrouver des valeurs à l’ancienne. Notre perception du karaté s’inscrit dans cette vision, que nous parta- geons avec toute la famille des karatékas. Nous fai- sons du karate-do et le kempo s’adresse à monsieur et madame tout le monde dans ce cadre, dans le cadre symbolique, comme dans le cadre légal et réglemen- taire. Chez moi, de toute façon, c’est une déforma- Sous ce nom générique, c’est « l’autre forme de karaté » qui est défendue par Serge Cal au sein de la FFKDA. Une aspiration au réalisme dans les gestes, le partage d’un idéal, celui de la progression intérieure. EMMANUEL CHARLOT Le kempo une philosophie du combat D.R.

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MARS 2011 37

hSERGE CAL L’AVOUE VOLONTIERS, SI LA TERMI-

NOLOGIE « KEMPO » renvoie à la tradition d’un

karaté ancien et guerrier, il recouvre moins un

patrimoine transmis de génération en géné-

ration qu’une idée, voire une philosophie du combat.

Celle de l’absolu réalisme dans une perspective de

combat. « C’était une accentuation progressive d’une

recherche qui existe dans tout le karaté, celui de l’effi -

cacité en situation réelle dans le quotidien. Nous étions

plusieurs professeurs à travailler dans le même esprit et

nous avons décidé de nous évaluer les uns les autres.»

Le parcours du responsable du kempo au sein de la

FFKDA commence par le shotokan au début des an-

nées 70. « J’avais envie de me mesurer. Le travail sur soi

commence par là ».

UNE RECHERCHEÀ 20 ans, Serge Cal entre dans l’administration péni-

tentiaire, ce qui oriente son état d’esprit en fonction

de ses besoins. « Avec mon karaté, j’étais en diffi culté

pour gérer les situations que je rencontrais : il me man-

quait des outils pour entrer dans une cellule et contrôler

un détenu agité, par exemple ». Après un passage par

le kyokushinkai, qui ne comble pas toutes ses interro-

gations techniques, il explore le travail des saisies,

le combat au sol…

En quoi cette recherche est-elle différente du fa-

meux « combat libre » ? « Si nous avons des gestuelles

proches, notre étude des situations part du karaté.

Le MMA, je ne sais pas très bien ce que c’est sur le

plan de la recherche technique et de l’état d’esprit.

Il y a une forme de fascination pour la violence qui

ne nous convient pas. Moi, plus j’approfondis, moins

j’ai envie de me bagarrer ». Serge Cal a conscience

que sa vie professionnelle et sa vie de pratiquant se

sont étroitement mêlées, l’une infl uençant l’autre et

transformant progressivement aussi bien son kara-

té que son caractère. « Je suis resté naïf. Je crois à

l’éthique du karaté, à ses valeurs. La pratique contri-

bue à l’évolution personnelle, à un travail sur soi qu’il

faut faire toute sa vie. Beaucoup de gens cherchent à

retrouver des valeurs à l’ancienne. Notre perception

du karaté s’inscrit dans cette vision, que nous parta-

geons avec toute la famille des karatékas. Nous fai-

sons du karate-do et le kempo s’adresse à monsieur

et madame tout le monde dans ce cadre, dans le cadre

symbolique, comme dans le cadre légal et réglemen-

taire. Chez moi, de toute façon, c’est une déforma-

Sous ce nom générique, c’est « l’autre forme de karaté » qui est défendue par Serge Cal au sein de la FFKDA. Une aspiration au réalisme dans les gestes, le partage d’un idéal, celui de la progression intérieure. EMMANUEL CHARLOT

Le kempoune philosophie du combat

D.R

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KEMPO

38 MARS 2011

tion professionnelle ! C’est dur et exigeant, mais tout le

monde peut s’y essayer ».

POUR LES ENFANTS AUSSIUne méthode est proposée pour les enfants. Choquant ?

« Ma pratique était un puzzle. Maintenant

tout se rassemble dans une forme qui rejoint

un karaté original. J’ai mis vingt ans à par-

venir à ça, je peux leur faire gagner un peu

de temps ! Bien sûr, tout se fait dans la pro-

gressivité et le dialogue, c’est une question

d’expérience ». Quant aux jeunes adultes,

ils peuvent participer aux compétitions

inter-styles organisées par la FFKDA dont

ils sont déjà friands et ils sont les premiers

inscrits au « profi ght karaté » porté sur les

fonds baptismaux par Alain Setrouk et Guy

Sauvin en 2010.

30 CLUBS EN FRANCEEntré à la fédération en 1990, le kempo

karaté compte aujourd’hui une trentaine de clubs en

France, dont un groupe important dans le Sud avec

Jean-Yves Bideau, par ailleurs secrétaire général de la

ligue Côte d’Azur.

« Le kempo m’a transformé, assure Serge Cal. Il a chan-

gé ma perception des choses, ma gestion du stress, m’a

donné beaucoup de recul et de calme, même dans les

situations diffi ciles. Maintenant que je suis jeune retraité,

j’adore faire ce travail d’unifi cation, en harmonie avec les

responsables fédéraux, pour les grades, les règlements,

la formation. C’est très enrichissant de croiser les gens

de la grande famille du karaté, mais aussi du Yoseikan

Budo, du Penchak Silat, du Krav Maga… Au-delà des dif-

férences, c’est la communauté d’esprit que je ressens

profondément ».E

EN BREF

Serge Cal – 50 ans– Responsable de

l’Ecole Régionale de Formation de la Ligue Flandre-Artois

– Jury Dan Interrégions– Responsable

Technique national Kempo FFKaraté et Disciplines Associés

– Intervenant dans le DVD « karaté défense » de la FFKaraté en cours de préparation.