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Posture et équilibration humaines COLLECTION POSTURE, ÉQUILIBRE & MOUVEMENT Sous la direction de Thierry Paillard

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Posture et équilibration humaines

collection Posture, équilibre & mouvement

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Rester en équilibre et marcher en appui bipodal sont deux facultés qui paraissent anodines alors qu’elles nécessitent non seulement des mécanismes de contrôle élaborés, mais aussi une coordination entre la posture, l’équilibre et la locomotion.

Équilibration normale et pathologique

Afin de mieux comprendre ces rouages, les auteurs de cet ouvrage rappellent le fonctionnement et le développement de l’équilibration humaine (à la fois chez les sujets sains et pathologiques, jeunes et âgés, sportifs et sédentaires) et abordent la posture et l’équilibration humaines de façon multidisciplinaire (biomécanique, anatomique, neurophysiologique, neurobiologique, psychologique).

Évaluation et rééducation

Ils expliquent en détail non seulement les techniques et méthodes d’évalua-tion de l’équilibration et du contrôle postural, mais aussi les aspects théoriques et pratiques de la rééducation, sans oublier de livrer les récents résultats issus de la recherche.

PublicsÉtudiants et enseignants (master et recherche) en sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS), kinésithérapie, sciences du mouvement humain, médecine physique et réadaptation, médecine du sport, neurologie, podologie.

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ISBN : 978-2-35327-314-0EQUIMO

www.deboecksuperieur.com

Sous la direction de Thierry Paillard

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Posture et équilibration humaines

Sous la direction de Thierry Paillard

Posture, équilibre et mouvement

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© De Boeck Supérieur SA, 2016 Fond Jean-Pâques 4, B1348 Louvain-la-Neuve

Tous droits réservés pour tous pays. Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent ouvrage, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public, sous quelque forme ou de quelque manière que ce soit.

Imprimé en Belgique

Dépôt légal : Bibliothèque royale de Belgique, Bruxelles : 2016/13647/096 Bibliothèque nationale, Paris : mai 2016 ISBN : 978-2-35327-314-0

Pour toute information sur notre fonds et les nouveautés dans votre domaine de spécialisation, consultez notre site web :

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De Boeck Supérieur

04, rue de la Michodière

75002 Paris

Tél. : 01.72.36.41.60

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à propos des auteurs

Alescio-lAutier B. : Aix-Marseille Université, CNRS, NIA UMR 7260, 13331, Marseille, France.

AssAiAnte c. : CNRS, Aix-Marseille Université, Laboratoire de Neurosciences cognitives, UMR 7291, Marseille, France. CNRS, Aix-Marseille Université, Fédération de Recherche 3C, FR 3512, Marseille, France.

Bonnet c. : Laboratoire de Sciences cognitives et de Sciences affectives (SCA LAB), UMR CNRS 9193, Lille, France.

Borel l. : Aix-Marseille Université, CNRS, NIA UMR 7260, 13331, Marseille, France.

BoyAs s. : Université du Maine, Faculté des Sciences et Techniques, Département STAPS. Laboratoire Motricité, Interactions, Performance, EA 4334.

Bredin J. : Laboratoire Motricité Humaine Éducation Sport Santé EA6312, Faculté des Sciences du Sport, Université Nice-Sophia Antipolis, 261, Boulevard du Mercantour, 06205 Nice Cedex 03. Centre de Santé – Institut Rossetti-PEP06, Unité clinique d’Analyse du Mouvement, 400, Boulevard de la Madeleine, 06000 Nice, France.

BredinA J.  : Laboratoire Motricité Humaine Éducation Sport Santé  EA6312, Faculté des Sciences du Sport, Université Nice-Sophia Antipolis, 261, Boulevard du Mercantour, 06205 Nice Cedex 03, France. Centre de Santé – Institut Rossetti-PEP06, Unité clinique d’Analyse du Mouvement, 400, Boulevard de la Madeleine, 06000 Nice, France.

dietrich G.  : Laboratoire  Éducation Discours Apprentissages  EA4071, Centre Universitaire des Saints-Pères, 45 rue des Saints-Pères, 75270 Paris Cedex 06, France.

dupui p. : Maître de Conférences des Universités de Physiologie, Praticien Hospitalier, Neurologue. Laboratoire de Physiologie, Faculté de Médecine de Rangueil, 133, route de Narbonne, 31062 Toulouse cedex, France.

Forestier n. : Laboratoire de Physiologie de l’Exercice (E.A. 4338), UFR-CISM dpt STAPS, Université de Savoie Mont-Blanc, France.

GAuchArd G. : Université de Lorraine, EA 3450 DevAH « Développement, Adaptation, Handicap » & UFR STAPS – Faculté des Sciences du Sport, 30 rue du Jardin Botanique, CS 30156, 54603 Villers-lès-Nancy, France.

Gokeler A. : Center for Human Movement Sciences, University of Groningen, Antonius Deusinglaan 1, 9713 AV Groningen, The Netherlands.

hAmAoui A. : Laboratoire de Physiologie de la Posture et du Mouvement, Université Champollion, Albi, France.

isABleu B. : Université Paris Sud. UR CIAMS, équipe MHAPS, EA 4532. Orsay, France.

JAnin m. : Laboratoire de Physiologie, Faculté de Médecine de Rangueil, 133, route de Narbonne, 31062 Toulouse cedex, France.

kerlirzin y.  : Laboratoire  Éducation Discours Apprentissages  EA4071, Centre Universitaire des Saints-Pères, 45 rue des Saints-Pères, 75270 Paris Cedex 06, France.

le Bozec s. : Laboratoire CIAMS, Université Paris-Sud, 91405 Orsay, France.

lion A. : Sports Medicine Research Laboratory, Luxembourg Institute of Health, L-1460 Luxembourg, Luxembourg.

monJo F. : Laboratoire de Physiologie de l’Exercice (E.A. 4338), UFR-CISM dpt STAPS, Université de Savoie Mont-Blanc, France.

mouchnino l. : Aix-Marseille Université, CNRS, Laboratoire de Neurosciences cognitives, FR 3C, Marseille, France.

noé F. : Laboratoire « Mouvement, Équilibre, Performance, Santé » (UPRES EA 4445), Université de Pau & Pays de l’Adour, Département STAPS de Tarbes, ZA Bastillac Sud, 65000 Tarbes, France.

v à propos des auteurs

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vi à propos des auteurs

pAillArd t. : Laboratoire « Mouvement, Équilibre, Performance, Santé » (UPRES EA 4445), Université de Pau & Pays de l’Adour, Département STAPS de Tarbes, ZA Bastillac Sud, 65000 Tarbes, France.

pérennou d. : Clinique MPR, CHU de Grenoble, 38041 Grenoble, France. Laboratoire de Psychologie et Neurocognition CNRS UMR 5105, Grenoble Université, France.

perrin p. : EA 3450 DevAH - Développement, Adaptation et Handicap, Université de Lorraine, Faculté de Médecine et UFR STAPS de Nancy. Laboratoire d’Analyse de la Posture, de l’Équilibration et de la Motricité (LAPEM), CHRU de Nancy, France.

piscicelli c. : Clinique MPR, CHU de Grenoble, 38041 Grenoble, France. Laboratoire de Psychologie et Neurocognition CNRS UMR 5105, Grenoble Université, France.

rouGier p.  : Laboratoire de Physiologie de l’Exercice, EA 4338, UFR CISM, Université de Savoie, Campus scientifique de Savoie-Technolac, F 73376 Le Bourget du Lac, France.

schieppAti m. : University of Pavia & Fondazione Salvatore Maugeri (IRCCS), Pavia, Italie.

ViBert  d. : Clinique Universitaire d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale, Hôpital de l’Ile, 3010 Berne, Suisse.

Vuillerme n. : Université de Grenoble Alpes. AGEIS - Faculté de Médecine Grenoble & Institut Universitaire de France, France.

WAllArd l.  : Laboratoire Motricité Humaine Éducation Sport Santé  EA6312, Faculté des Sciences du Sport, Université Nice-Sophia Antipolis, 261, Boulevard du Mercantour, 06205 Nice Cedex 03, France.

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Sommaire

vii sommaire

Introduction : approche de l’équilibration humaine ............................................................................................. 1

Partie 1 Les bases mécaniques de l’équilibration humaine

1 Bases biomécaniques du contrôle postural ..................................................................................................... 5

2 Approche biomécanique des mécanismes du contrôle postural .........................................................11

Partie 2 Les bases neurophysiologiques et intégratives du contrôle postural

1 Bases neurophysiologiques du contrôle postural .......................................................................................23

2 La perception de la verticale .................................................................................................................................31

3 Interactions équilibration et cognition ............................................................................................................39

Partie 3 La fonction sensorielle

1 Contrôle visuel de l’orientation et de l’équilibre postural ........................................................................55

2 Système vestibulaire et contrôle postural ......................................................................................................73

3 Proprioception et contrôle postural ..................................................................................................................81

4 Sensibilité cutanée plantaire et contrôle postural ......................................................................................95

Partie 4 Posture, équilibre et mouvement

1 Effets de la cinématique respiratoire sur l’équilibre postural .............................................................. 107

2 Les ajustements posturaux anticipés ............................................................................................................. 113

3 Mobilité articulaire, ajustements posturaux et mouvement volontaire ......................................... 119

4 Coordination entre la posture et le mouvement. Le cas de la marche en courbe ...................... 131

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Partie 5 Morphologie et contrôle postural

1 Influence des facteurs anthropométriques sur le contrôle postural ................................................ 143

2 Influence du pied et de sa morphologie sur contrôle postural .......................................................... 151

Partie 6 Âge et contrôle postural

1 Développement perceptivo-moteur de l’enfant et de l’adolescent et contrôle postural ........ 159

2 Effets du vieillissement sur la fonction d’équilibration .......................................................................... 167

Partie 7 Activité physique et contrôle postural

1 Apprentissage moteur et contrôle postural chez l’enfant .................................................................... 183

2 Activité physique et contrôle postural chez la personne vieillissante ............................................ 191

3 Sport et contrôle postural chez l’adulte ........................................................................................................ 201

4 Les effets immédiats de l’exercice physique fatigant sur le contrôle postural ............................. 213

Partie 8 Les facteurs matériels et environnementaux

1 Analyse instrumentale du contrôle postural et de la posture ............................................................. 223

2 La rééducation de la marche assistée par robotique .............................................................................. 235

3 Micropesanteur et mécanismes de contrôle de l’équilibre et de la posture ................................ 243

Conclusion. L’évolution des connaissances sur l’équilibration humaine .......................................... 251

viii sommaire

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Introduction : approche de la posture et de l’équilibration humainesThierry Paillard

Laboratoire « Mouvement, Équilibre, Performance, Santé » (UPRES EA 4445), Université de Pau & Pays de l’Adour, Département STAPS de Tarbes, ZA Bastillac Sud, 65000 Tarbes, France.

La marche initialement quadrupédique est devenue bipè-dique chez l’homme. Cette nouvelle posture (à l’échelle de l’évolution de l’espèce) modifie l’organisation de l’équilibre

puisque la structure squelettique est soumise au même champ gravitationnel. Le fait de rester en équilibre paraît anodin, parti-culièrement en appui bipodal, alors que cela nécessite des méca-nismes de contrôle particulièrement élaborés.

Le corps en mouvement est soumis à quatre forces distinctes (la force de gravité du corps, la force de réaction du sol sur le corps, la force de friction entre le pied et le sol et la force de résistance de l’air), qui perturbent son équilibre. En effet, tout mouvement ou tout déplacement représente un état de déséquilibre transitoire qu’il faut rétablir en permanence. La condition bipodale néces-site de maintenir un équilibre en condition statique ou dynamique lors de situations d’appuis très variables. En posturologie, le terme d’équilibre « statique » est souvent utilisé malgré l’inexactitude du terme du point de vue mécanique. Cette terminologie d’équi-libre statique pour un corps sans mouvement est souvent utilisée dans la littérature afin de se différencier des situations où le corps est soit en mouvement volontaire, soit soumis à une perturbation externe. Lorsqu’un corps est en mouvement, il est alors dans un état de déséquilibre transitoire. On dit qu’il est en équilibre dyna-mique. De manière plus exacte, un équilibre statique correspond à une situation posturale où la surface d’appui du corps en contact avec le sol (surface définie par la position des pieds sur le sol en général) ne se déforme et ne se déplace pas, tandis qu’un équilibre dynamique s’assimile à une situation posturale où la surface d’ap-pui se déforme et/ou se déplace constamment.

Le contrôle postural implique une coordination entre la posture, l’équilibre et la locomotion. Ceci exige des capacités d’adaptation à tout moment en fonction des contraintes de l’en-vironnement. En effet, le mouvement est source de déséquilibre (géométrie du corps change) car le déplacement d’un seul seg-ment corporel induit le déplacement des autres segments corpo-rels. Le centre de gravité d’un seul segment (même petit) engendre un changement de la position du centre de gravité du corps entier. Le mouvement du membre inférieur est d’autant plus perturbant qu’il a une fonction de support du corps sur le sol. Pour tenir en équilibre, il convient donc d’adopter des attitudes posturales

particulières selon les situations rencontrées. La posture n’est autre que la position des divers segments corporels à un moment donné.

Théoriquement, l’équilibre d’un corps humain est possible. Or, une position « physiologique » n’est jamais acquise durable-ment à cause des mouvements liquidiens et des contractions mus-culaires cardiaques et respiratoires (les fonctions vitales). Ces ac-tivités physiologiques induisent des oscillations permanentes. En effet, le corps subit des déformations (aussi petites soient-elles) permanentes. Ceci modifie son état de repos et ne lui permet pas d’assurer un état d’équilibre. Les perturbations dues à la respi-ration notamment seraient de faible importance et ne peuvent expliquer à elles seules les oscillations posturales du sujet. Le système neuromusculaire est incapable de maintenir une tension constante, ce qui représente la cause essentielle des oscillations du corps en posture debout. L’équilibration humaine est donc un processus de rétablissement permanent de l’équilibre. Les mé-canismes de l’équilibration consistent à organiser sa posture de sorte que la verticale passant par le centre de gravité ou centre de masse (tous les centres de gravité segmentaires sont situés sur la ligne de gravité) se projette à l’intérieur de la surface d’appui au sol, c’est-à-dire le polygone de sustentation (l’axe corporel oscille à l’intérieur d’un cône de 4 degrés d’ouverture). Deux conditions doivent être réunies pour parvenir à contrôler son équilibre. La résultante (somme) des forces appliquées doit être nulle et le mo-ment des forces appliquées doit également être nul. Comme le centre de masse est situé au-dessus du sol, dès que les forces de réaction au sol et la force gravitationnelle ne sont plus alignées (la position du centre de masse — CM — est différente de celle du centre des pressions — CP —), un moment de force apparaît et tend à précipiter la chute du corps (chute en avant si le CM est placé en avant du CP, vers l’arrière si le CM est placé derrière le CP). L’alignement imparfait de ces 2 forces provoque donc une instabilité. Lorsque le CM s’écarte de la verticale du CP, le seul moyen de ramener le CM vers sa position moyenne consiste à déplacer le CP au-delà de la verticale du CM de telle sorte que soit créé un couple de rappel. La condition debout (bipodale) ou position érigée a 2 fonctions. D’une part, cette position a une fonction antigravitaire, c’est-à-dire que l’agencement des

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2 Introduc tIon  • Approche de l’équilibration humaine

segments corporels permet à l’organisme de rester en équilibre et de se préparer à réagir en fonction des caractéristiques physiques de l’environnement. La posture est à la fois soutien et préparation du mouvement. D’autre part, la position érigée a une fonction d’interface avec le monde extérieur pour la perception et l’action.

Le modèle mécanique en question s’assimile à un pendule in-versé possédant un axe de rotation ou un degré de liberté. En station debout, les oscillations des différentes parties du corps (cheville, genou, hanche et épaule) sont synchronisées ; les mou-vements du corps se font principalement autour de la cheville à la manière d’un pendule inversé selon une position de référence. Le comportement d’un individu en station debout est semblable à celui d’un pendule inversé. Le maintien de l’équilibre orthosta-tique dans le plan sagittal relatif à un individu se fait principale-ment en contrôlant les muscles des chevilles (le tibialis anterior et le triceps surae). Bien entendu, le contrôle (ou maintien) de l’équilibre en station debout ne s’opère pas uniquement à l’aide de ces muscles. D’autres muscles posturaux sont impliqués dans le contrôle des mouvements posturaux dans le plan frontal au ni-veau de la cheville (notamment les éverseurs et les inverseurs). De plus, le maintien de l’alignement vertical des différents segments du corps s’effectue en contrebalançant l’effet de la force gravi-tationnelle et l’effet dynamique (dynamique intersegmentaire). L’implication d’un grand nombre d’articulations (notamment la hanche et le genou et donc les muscles les mobilisant) a également été montrée lorsque le maintien de l’équilibre orthostatique est fortement perturbé ou contraint par un contexte environnemen-tal incertain. Ainsi, l’analogie au système mécanique est parfois mise à l’épreuve, spécialement lors de perturbations importantes.

Chaque posture en tant que position des divers segments cor-porels à un moment donné est singulière puisqu’elle correspond à une organisation segmentaire spécifique. L’homme peut adop-ter une infinité de postures pour obtenir le même résultat, celui du maintien de son équilibre corporel. La qualité de la posture contribue à déterminer la performance motrice d’une manière générale. Elle représente donc une composante essentielle de la motricité humaine. L’étude de la posture détermine également la qualité des ajustements posturaux anticipateurs chez l’homme,

c’est-à-dire les mouvements des segments corporels qui précèdent ceux impliqués dans la réalisation du mouvement volontaire. La stabilité de l’équilibre chez l’homme dépend de nombreux fac-teurs. Ces facteurs peuvent être d’ordre biomécanique, comme la posture adoptée, et/ou les données anthropométriques des sujets, comme la masse corporelle, ou encore la hauteur du centre de gravité.

La capacité à contrôler le CM à l’intérieur de la surface d’ap-pui dépend du schéma corporel, c’est-à-dire la représentation du corps dans l’espace. Cette représentation interne est acquise par l’apprentissage, mais dépend aussi des facteurs génétiques. Elle est élaborée à partir d’informations sensorielles visuelles, vestibulaires, musculo-tendineuses, articulaires et cutanées et s’appuie sur la géométrie corporelle (organisation segmentaire), la cinétique (friction entre la surface cutanée plantaire et le sol ; accélération du corps) et l’orientation du corps par rapport à la verticale (connaissance de l’orientation de l’axe corporel et de la verticalité). Le contrôle postural peut également dépendre des facteurs neurophysiologiques et cognitifs ainsi que de la fonction sensorielle et de la représentation corporelle et la perception de la verticalité chez un individu. Le comportement postural peut être caractérisé en termes de performance (c’est-à-dire la capacité à minimiser les oscillations posturales dans des situations pos-turales conventionnelles ou la capacité à résister à la chute dans des conditions posturales particulièrement difficiles/provocantes) et de stratégie (c’est-à-dire la coordination intersegmentaire, la dominance sensorielle et la contribution des différentes boucles neuronales) posturales.

Les performances et stratégies posturales subissent des involu-tions ou sont bonifiées selon l’âge (vieillissement sur la personne adulte, développement chez l’enfant), le statut physiologique ou physique (personnes actives ou inactives), le contexte matériel et environnemental de l’individu. L’analyse de l’évolution du comportement postural implique néanmoins de la part de l’ex-périmentateur de disposer d’un arsenal d’outils de mesure fiable. L’objectif de cet ouvrage tente d’apporter des éclaircissements à l’ensemble des facteurs et conditions qui influent sur le comporte-ment postural ainsi que sur le résultat de son évaluation.

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1PARTIE

Les bases mécaniques de l’équilibration humaine

S O M M A I R E

Chapitre 1. Bases biomécaniques du contrôle postural 5

Chapitre 2. Approche biomécanique des mécanismes du contrôle postural 11

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1CHAPITRE

Bases biomécaniques du contrôle postural

Frédéric Noé

Laboratoire « Mouvement, Équilibre, Performance, Santé » (UPRES EA 4445), Université de Pau & Pays de l’Adour, Département STAPS de Tarbes, ZA Bastillac Sud, 65000 Tarbes, France ; [email protected]

1. introductionL’analyse biomécanique se défi nit comme l’application de la mé-canique à l’étude des organismes vivants, la mécanique étant la branche de la physique qui étudie le mouvement et les forces qui l’initient. C’est un champ d’études pluridisciplinaire qui intègre bien évidemment les principes de la mécanique, mais qui fait éga-lement appel à des notions de mathématiques, d’anatomie, de physiologie ou encore de neurophysiologie. L’étude de l’Homme en mouvement utilise l’analyse biomécanique qui trouve des ap-plications dans des domaines aussi variés que l’ergonomie, l’ani-mation vidéo, la médecine, la rééducation fonctionnelle, le déve-loppement de matériel sportif et médical ou encore l’optimisation de la technique sportive. La biomécanique occupe également une place centrale dans l’étude et l’évaluation du contrôle postural. Le maintien de la station érigée est en effet un phénomène ex-trêmement complexe qui peut être appréhendé grâce aux lois de la physique. Dans le langage couramment employé par les spé-cialistes du contrôle postural, de nombreux termes (équilibre, centre de gravité, stabilité, centre des pressions…) font appel à des notions de biomécanique bien précises qu’il convient de maî-triser. L’objectif de ce chapitre est donc de présenter et préciser les principales notions élémentaires de biomécanique nécessaires à l’étude du contrôle postural.

2. référentiel et formalismeLe mouvement humain est une notion relative, qui dépend no-tamment de la position de l’observateur et plus largement du sys-tème de référence auquel le mouvement se rapporte. La défi nition d’un référentiel (repère d’espace et de temps) est une étape préa-lable à toute analyse biomécanique qui permet d’établir un sys-tème de repérage afi n de décrire avec précision, dans l’espace et le temps, les mouvements segmentaires associés au maintien d’une posture quelconque. Dans le cadre de l’étude du contrôle postu-ral, on utilise généralement un référentiel terrestre (ou référentiel du laboratoire) cartésien orthonormé constitué d’un système de trois coordonnées d’espace (dont l’origine est un point du sol ou de la plate-forme de force) et d’une coordonnée de temps. C’est sur la base de ce référentiel que seront décrits les différents plans (frontal, sagittal, horizontal) et axes (vertical, médio-latéral, antéropostérieur) de l’espace. L’analyse biomécanique requiert parfois l’utilisation de plusieurs outils de mesure et il est plutôt commode et prudent d’associer un référentiel commun à tous les instruments de mesure utilisés, de façon à ce que l’ensemble des données collectées soit exprimé en fonction de ce référentiel.

Si la défi nition du référentiel permet de situer différents phé-nomènes physiques dans l’espace et le temps, l’utilisation du for-malisme mathématique va permettre de caractériser ces phéno-mènes physiques avec un langage commun. Dans ce cadre, l’usage du vecteur est largement répandu. Le vecteur contient en effet beaucoup d’informations et offre la possibilité de rendre compte de l’intégralité des composantes (origine, intensité, direction,

S O M M a i r e

1. introduction 5

2. référentiel et formalisme 5

3. rappels élémentaires de mécanique 6

4. Modélisation biomécanique et contrôle postural 6

5. Biomécanique de la posture érigée 6

6. Conclusion 9

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6 Partie 1  • Les bases mécaniques de l’équilibration humaine

sens) de plusieurs variables biomécaniques (vitesse, force, dé-placement…) avec une grande commodité. Les conventions de notations peuvent différer, mais globalement, le vecteur est re-présenté en gras (a) ou avec une flèche (a). L’utilisation combinée d’un référentiel et de la notation vectorielle facilite en outre les calculs à réaliser sur ces variables. La maîtrise du calcul vectoriel et de certaines notions élémentaires de mathématique peut ainsi s’avérer d’une grande utilité pour tous les étudiants, chercheurs et médecins devant manipuler certaines variables posturales.

3. rappels élémentaires de mécanique Le tableau 1 a pour objectif de présenter les éléments basiques de mécanique généralement utilisés dans le cadre de l’étude du contrôle postural en limitant l’usage du formalisme mathéma-tique courant pour que tous les lecteurs qui n’y sont pas familia-risés puissent s’approprier ces notions avec facilité.

4. Modélisation biomécanique et contrôle posturalLe système musculo-squelettique présente une extrême complexi-té liée à la multitude de structures mobiles qui le composent. La modélisation va ainsi constituer une étape préalable qui permet de faciliter l’application des lois de la mécanique et les analyses qui y sont associées. Le système musculo-squelettique est généra-lement schématisé par un nombre réduit de segments, représentés par des tiges articulées les unes aux autres. Toute modélisation biomécanique repose sur la formulation d’hypothèses simplifica-trices initiales qui vont permettre de définir un certain nombre de constantes liées notamment aux paramètres anthropométriques des sujets. Même si elles ne permettent pas de prendre en compte les différences morphologiques qui existent au sein d’une po-pulation donnée, les tables anthropométriques sont largement utilisées pour déterminer facilement ces paramètres. D’autres méthodes ont été proposées afin de personnaliser les paramètres anthropométriques, par exemple celle de Vaughan et coll. (1982) qui utilise une technique d’optimisation numérique. Ce type d’approche reste cependant moins répandu à cause d’une plus grande complexité de mise en œuvre. Les constantes anthropo-métriques sont associées à des mesures expérimentales intégrées comme variables d’entrées périphériques à des modèles dont la complexité peut évoluer en fonction des objectifs. Le modèle le plus simple associé à l’étude du contrôle postural est celui du CM du sujet, dans lequel le comportement moteur du sujet est réduit aux mouvements d’un seul point. Le CM est une variable globale et résultante qui, en quelque sorte, « résume » la posture, mais il ne permet cependant pas de la connaître. En considérant la posture comme « la position des divers segments corporels à un moment donné » (André-Thomas, 1940), il est possible que différentes postures, caractérisées par différentes organisations segmentaires spécifiques, puissent induire une position identique du CM. Ainsi, même si l’analyse des mouvements du CM permet d’évaluer l’efficacité des mécanismes impliqués dans le contrôle postural, elle n’offre pas la possibilité de caractériser différentes postures et seule la mise en place de modèles plus complexes,

associée à l’utilisation de systèmes d’analyse du mouvement, permet de décrire strictement la posture. Le modèle du simple pendule inversé est sans conteste le plus utilisé dans l’étude du contrôle postural. Il est présenté en détail dans les paragraphes suivants avec une analyse qui porte uniquement sur le plan sa-gittal. Les mécanismes associés au contrôle postural dans le plan frontal sont abordés dans un paragraphe spécifique de cet ou-vrage rédigé par Cédrick Bonnet et Patrice Rougier (« Approche biomécanique des mécanismes du contrôle postural »).

5. Biomécanique de la posture érigée

5.1. La posture vue comme un phénomène statiqueLa posture érigée est caractéristique de l’espèce humaine et c’est à partir de celle-ci que nous réalisons l’essentiel de nos tâches quotidiennes. D’un point de vue mécanique, le maintien de cette posture est soumis à certaines contraintes qui impliquent des mé-canismes de contrôle particulièrement élaborés. Parmi celles-ci, la gravité revêt une importance capitale. Avec les deux tiers de notre masse corporelle qui sont localisés dans les deux tiers su-périeurs de notre corps, la lutte contre la gravité est un corollaire au maintien postural, assuré notamment par le maintien d’un tonus musculaire adéquat permettant de stabiliser l’ensemble de nos articulations. En adoptant une vision volontairement simpli-ficatrice, cette stabilisation des articulations peut être considérée comme totale et l’homme debout peut alors être assimilé à une tige rigide oscillant autour de l’articulation de la cheville, comme illustré sur la figure 1.

Deux forces peuvent alors être identifiées, le poids corporel P, appliqué au CM de l’individu, et la force de réaction au sol R, appliquée au sol au niveau du CP. On peut dès lors considérer un équilibre mécaniquement parfait et appliquer les lois de la statique. Les conditions d’équilibre en translation (∑ Fext = 0) et en rotation (∑ MOFext = 0) doivent être respectées. Sachant que P exerce une action uniquement sur l’axe vertical, l’équilibre de translation est respecté si ∑ FZ = 0 ↔ R – P = 0 et donc si P = R. L’articulation de cheville constituant l’axe de rotation du système, l’équilibre de rotation est respecté si ∑ MC = 0 ↔ R . d – P . l = 0. Sachant que P = R, le moment horaire induit par P est donc contrebalancé par le moment antihoraire engendré par R, à condition que l = d et donc que les lignes d’action de P et de R soient concourantes. R s’appliquant au niveau du CP qui est nécessairement localisé à l’intérieur de la base de sustentation, l’équilibre de rotation ne peut être respecté que si le CM se pro-jette verticalement dans la base de sustentation. Si cela n’est pas le cas, le moment de P ne peut pas être équilibré par le moment de R, le sujet se trouve alors en condition de déséquilibre et peut donc chuter s’il ne modifie pas sa base de sustentation par un pas ou la saisie d’un appui manuel supplémentaire. Même si cette ap-proche « idéaliste », avec des conditions d’équilibre strictement respectées, est intéressante pour poser simplement les bases de l’analyse biomécanique de la posture humaine érigée, elle reste cependant beaucoup trop éloignée de la réalité et des contraintes qui y sont associées. Un homme debout est en effet toujours ani-mé de micromouvements et il ne peut donc pas être considéré comme un système en équilibre. La notion de stabilité posturale

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ChaPitre 1  • Bases biomécaniques du contrôle postural 7

Tableau 1 Notions élémentaires de mécanique

Notion de force La force représente une action mécanique (toute cause capable de déformer un corps ou de modifier son état de mouvement) modélisable par un vecteur (F) dont l’unité est le Newton (un N est la force qui donne à une masse de 1 kg une accélération de 1 m . s–2). Le sujet humain est soumis à des forces externes, qui peuvent s’exercer à distance comme la force de pesanteur ou résulter de l’interaction de contact avec d’autres éléments matériels de son environnement, et à des forces internes, exercées par une partie du corps humain sur une autre de ses parties, par exemple la force musculaire.

Notion de moment de force

Exprimé en Newton mètre, le moment M d’une force F par rapport à un point de rotation O exprime la capacité de cette force à créer une accélération angulaire, c’est-à-dire à faire tourner un corps autour de ce point de rotation. Noté MO(F), il se définit par le produit vectoriel : MO(F) = OA ∧ F) en consi-dérant que la force F s’applique au point M. Exprimé autrement, le moment correspond au produit de la force F par le bras de levier de cette force par rapport à O.

Notion de masse Exprimée en kilogramme, la masse mesure l’inertie d’un corps, c’est-à-dire la tendance qu’a un corps au repos à y rester ou qu’a un corps en mouvement à poursuivre son déplacement sans variation de sa vitesse. L’inertie caractérise la résistance aux accélérations.

Notion de poids À ne pas confondre avec la masse, le poids est une force qui caractérise l’attraction terrestre sur un corps de masse m situé à sa proximité. Le poids est proportionnel à la masse m, comme l’exprime la relation P = mg.

Notion de pression Exprimée en pascal, la pression se définit comme le rapport d’une force sur la surface sur laquelle cette force s’applique.

Notion de moment d’inertie

Exprimé en kg . m2, le moment d’inertie caractérise l’inertie de rotation d’un corps et donc sa résistance aux accélérations angulaires. Il dépend de la répartition de la masse à l’intérieur du corps.

Notion de centre de masse/centre de gravité

Le centre de masse (CM) d’un corps se définit comme le point théorique par rapport auquel la masse de ce corps est uniformément répartie alors que le centre de gravité (CG) est le point d’application de la résultante des forces de gravité (point d’application du poids). En considérant un champ gravi-tationnel uniforme, ces deux points sont confondus et correspondent, pour un corps rigide, au point où la somme des moments des poids élémentaires est nulle. Dans le domaine de l’étude du contrôle postural, certains auteurs considèrent le CG comme étant la projection verticale au sol du CM du corps (Winter, 1995).

Notion de centre des pressions

Le centre des pressions (CP) est le point d’application de la résultante des forces verticales au sol et se détermine facilement par un calcul de barycentre des forces verticales. Chez un homme debout, ce point est totalement différent du CG.

Notion de base de sustentation

La base de sustentation est un polygone obtenu en joignant les points d’appui les plus éloignés. Pour une posture bipodale, elle correspond à la surface de chaque pied plus la zone entre les deux pieds. Pour une posture monopodale, c’est la surface sous le pied d’appui.

Notion d’équilibre La notion d’équilibre renvoie au principe fondamental de la statique en mécanique classique (première loi de Newton), qui stipule qu’un corps est en équilibre si l’effet des efforts extérieurs qui s’exercent sur lui est nul. Sa vitesse vectorielle reste alors inchangée et il conserve son état initial de repos ou de mouvement. Les conditions d’équilibre de translation (la somme des forces externes appliquées au système doit être nulle ; ∑ Fext = 0) et de rotation (la somme des moments extérieurs appliqués au système doit être nulle ; ∑ MOFext = 0) doivent donc être respectées. Même si la notion d’équilibre pos-tural est souvent évoquée pour caractériser la faculté à maintenir une organisation segmentaire bien particulière sans chuter, cette terminologie est abusive d’un strict point de vue mécanique puisqu’un sujet humain est toujours animé de micro mouvements.

Notion de mouvement Le principe fondamental de la dynamique, ou deuxième loi de Newton, qui gouverne le mouvement du corps, précise que l’accélération d’un corps est directement proportionnelle à la force agissant sur ce corps et inversement proportionnelle à sa masse (∑ Fext = ma ). Cette relation s’applique également en rotation et stipule que la somme des moments des forces externes appliquées au centre de rotation du système est égale au produit de l’accélération angulaire par le moment d’inertie (∑ MOFext = Iθ

..). Le

principe fondamental de la dynamique est capital, car il lie le mouvement (accélération) à ses consé-quences (forces et moment de force). C’est l’application de ce principe qui permet entre autres d’ef-fectuer des calculs de dynamique inverse pour estimer les efforts résultants développés autour d’une articulation dans différentes conditions de posture.

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8 Partie 1  • Les bases mécaniques de l’équilibration humaine

est alors largement évoquée pour illustrer notre capacité à revenir au voisinage de cette hypothétique position d’équilibre.

5.2. La notion de stabilité posturaleDans les études sur le contrôle postural, la notion de stabilité peut à la fois être employée pour définir la simple capacité à mainte-nir la posture debout ou pour caractériser différentes conditions de posture. La stabilité renvoie néanmoins à une notion méca-nique bien précise. En effet, un système est dit en équilibre stable lorsque, même écarté sensiblement de cet équilibre suite à une perturbation, il y retourne dès qu’il est laissé à lui-même. L’éner-gie potentielle d’un système en équilibre stable est donc minimale au voisinage de sa position d’équilibre. A contrario, un système instable écarté de sa position d’équilibre n’y retourne pas et pré-sente une énergie potentielle maximum au voisinage de sa posi-tion d’équilibre (Figure 2).

Il est possible de déterminer la nature d’un équilibre en uti-lisant le théorème des travaux virtuels et en calculant la dérivée seconde de l’énergie potentielle totale du système (la somme de l’énergie potentielle de pesanteur, de l’énergie potentielle élas-tique et de l’énergie potentielle centrifuge). Ainsi, suivant le signe positif ou négatif de la dérivée seconde, l’équilibre est res-pectivement stable ou instable. L’application de cette méthode à l’étude de la posture chez l’homme pose un certain nombre de

problèmes. Elle nécessite en effet une estimation des caractéris-tiques de raideur musculaire à chaque articulation pour calculer l’énergie potentielle élastique du système. Même s’il est possible d’estimer des valeurs de raideur musculaire, cette estimation est particulièrement difficile à réaliser puisqu’elle dépend de l’angle d’oscillation du sujet (Morasso et Sanguineti, 2002), ce qui com-plexifie grandement le calcul du bilan des énergies potentielles. La posture humaine bipodale est typiquement de nature instable, mais il est délicat de quantifier différents niveaux de stabilité d’un strict point de vue mécanique.

5.3. La posture vue comme un phénomène dynamiqueComme cela a déjà été souligné, l’homme debout ne peut pas être considéré comme un système en équilibre. Au niveau du CM, les mouvements extrêmement limités sur l’axe vertical peuvent être négligés et les conditions d’équilibre considérées comme étant respectées, ce qui n’est pas le cas de la rotation où le corps oscille en permanence et où la relation fondamentale de la dynamique doit être appliquée (∑ M Fext = Iθ

..). La figure 3-1 illustre un mou-

vement d’oscillation vers l’avant. La position plus antérieure du CM par rapport à celle du CP engendre en effet un bras de levier plus important que d. Sachant que P = R, on a donc Pl > Rd et cette intensité supérieure du moment du poids corporel induit une accélération θ

.. de sens horaire et le mouvement d’oscillation

du corps vers l’avant. Cette oscillation doit être limitée afin de conserver la position du CM dans les limites de stabilité de la base de sustentation et ainsi éviter toute chute en avant. Ceci est réalisé en déplaçant le CP vers l’avant de façon à augmen-ter la longueur de d au-delà de celle de l, comme illustré sur la figure 3-2. On a alors Pl < Rd, le moment de R crée une accélé-ration θ

.. antihoraire qui fait osciller le corps vers l’arrière. Cette

oscillation postérieure est ensuite limitée en déplaçant le CP vers l’arrière de façon à augmenter la longueur de l au-delà de celle de d (figure 2-1). À travers ces illustrations, on voit clairement que l’amplitude des déplacements du CP est supérieure à celles du CM et qu’une relation d’amplitude entre les variations de posi-tion du CP et celles du CM peut facilement être mise en évidence. En développant l’équation du principe fondamental de la dyna-

mique en rotation (∑ M Fext = Iθ..), on a R . d – P . l = – I X

..

h , (avec

h la distance entre l’articulation de cheville et le CM) et R = P, ce

qui donne R(d – l) = – I X..

h et donc d – l = – IX

..

Ph. I, P et h étant des

constantes liées à l’anthropométrie du sujet, on peut les regrou-

per sous le terme K = IPh

. On obtient alors la relation suivante

d – l = – K . X.. qui lie les déplacements du CP à ceux du CM et

montre que la différence de position entre le CP et le CM est pro-portionnelle à l’accélération horizontale du CM. Cette équation peut également s’exprimer dans le domaine fréquentiel et permet entre autres d’estimer les déplacements du CM en enregistrant les déplacements du CP (Caron et coll. 2000).

L’utilisation du modèle du pendule inversé simple dans l’ana-lyse biomécanique de la posture érigée permet de mettre facile-ment en évidence certaines caractéristiques essentielles associées

Figure 1. Schématisation d’un sujet en équilibre sur un support stable. P est le poids corporel s’appliquant au CM du sujet, R la force de réaction au sol s’appliquant au niveau du CP, d la distance entre la ligne d’action de R et C, l la distance entre la ligne d’action de P et C. La distance entre C et le CM est considérée comme constante.

Figure 2. Pendules représentant un système en équilibre instable (à gauche) et stable (à droite).

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ChaPitre 1  • Bases biomécaniques du contrôle postural 9

au contrôle postural, dont l’un des principaux objectifs est de maintenir la projection verticale du CM dans la base de sustenta-tion. Le CM peut ainsi être considéré comme une variable passive contrôlée par le CP, la variable active qui rend compte des actions mises en œuvre par le système de contrôle postural pour main-tenir le CM dans la base de sustentation (Winter, 1995, Caron et coll., 2000). Dans le plan sagittal, ces actions prennent place au niveau de l’articulation de la cheville et plus particulièrement au niveau des fléchisseurs plantaires (Gastrocnemius Medialis et Soleus), dont la gestion du niveau d’activation module le mo-ment musculaire à la cheville (Winter, 1995). Horak et Nashner (1986) ont d’ailleurs évoqué la notion de « stratégie de cheville » pour caractériser cet aspect a priori très localisé des mécanismes de régulation posturale. Le rôle mécanique des fléchisseurs dor-saux est plutôt limité au contrôle médio-latéral de la posture, en particulier lorsque la surface de sustentation est réduite (Le-mos et coll. 2015). Le Tibialis Anterior, dont les changements de longueur des faisceaux musculaires sont étroitement corrélés aux déplacements du CM, représente néanmoins une source d’infor-mation proprioceptive majeure pour le contrôle antéropostérieur de la posture, notamment lorsque la posture n’est pas perturbée (Di Giulio et coll., 2009). Certains auteurs attribuent d’ailleurs un rôle « exploratoire » aux oscillations posturales, qui permet-traient d’optimiser la régulation posturale en assurant une stimu-lation continuelle des différentes entrées sensorielles (Carpenter et coll., 2010).

5.4. Critiques du modèle du pendule inversé simpleIl est largement admis que la stratégie de cheville domine lors du maintien d’une posture bipodale non perturbée sur support rigide et que l’articulation de hanche est intégrée dans une stra-tégie homonyme lors de perturbations mécaniques externes, par exemple des mouvements de la base d’appui (Horak et Nashner, 1986). Plusieurs auteurs considèrent néanmoins que

la modélisation en simple pendule inversé associée à la stratégie de cheville ne permet pas de décrire avec précision l’ensemble des mécanismes impliqués dans le maintien postural, y compris dans le cas de postures bipodales non perturbées (Creath et coll., 2005 ; Günther et coll., 2009 ; Kilby et coll., 2015). Une modé-lisation en double ou triple pendule inversé serait en effet plus appropriée dès lors que l’on considère le maintien d’une posture érigée comme un phénomène dynamique associé à une coordina-tion multisegmentaire complexe impliquant plusieurs articula-tions (Günther et coll., 2009). On observe en effet actuellement une complexification des modèles avec une attention croissante apportée à l’analyse de la coordination multisegmentaire, dans laquelle les stratégies de contrôle postural sont notamment dé-crites en termes de relation de phase entre les différentes arti-culations impliquées pour identifier de potentielles synergies articulaires. Certaines méthodes statistiques (analyse en compo-santes principales, corrélations croisées, analyse canonique des corrélations, analyse de cohérence…) permettent également de quantifier la contribution relative des mouvements articulaires dans le contrôle du CM. Les modèles classiquement utilisés dans l’étude des mouvements pluriarticulaires, représentant le sujet humain sous forme d’une chaîne articulée de plusieurs chaînons corporels, sont maintenant fréquemment utilisés dans l’étude du contrôle postural avec des chaînes de mesure combinant des données de plate-forme de force et des données cinématiques (Günther et coll., 2009, Wang et coll., 2014 ; Kilby et coll., 2015). Outre la possibilité de déterminer des variables qui ne sont pas directement mesurables, comme les efforts interarticu-laires (par des procédures de dynamique inverse), ces modèles permettent de répondre à la problématique de gestion des degrés de liberté dans le processus du contrôle postural d’un système pluriarticulé et de réaliser des simulations numériques. Newell et ses collaborateurs (Wang et coll., 2014 ; Kilby et coll., 2015) ont par exemple développé des modèles spécifiquement dédiés à l’étude du contrôle postural intégrant quatre articulations (cheville, genou, hanche et cou). D’une manière générale, leurs résultats soulignent le haut niveau d’adaptabilité du système de contrôle postural lié à la multitude de degrés de liberté, la contri-bution relative de chaque articulation évoluant en fonction des contraintes posturales avec une implication plus marquée de l’ensemble des articulations dans des tâches posturales contrai-gnantes (postures dynamiques et unipodales).

6. ConclusionLe contrôle postural est un phénomène multifactoriel complexe qui peut être facilement appréhendé sous l’angle de l’analyse biomécanique. Il suscite l’intérêt d’un nombre croissant d’équipes de recherches et notamment de biomécaniciens, dont les moyens d’investigation progressent avec le perfectionnement des outils d’analyse du mouvement. L’évolution des travaux de bioméca-nique dans le domaine du contrôle postural permet de décrire des lois de contrôle de plus en plus fiables et réalistes dans des contextes extrêmement variés. La transversalité de certaines ap-proches, combinant notamment neurophysiologie et bioméca-nique, offre par ailleurs des perspectives extrêmement promet-teuses, qui auront certainement des implications majeures dans la compréhension de certains troubles de l’équilibre.

CM

P

R

1 2

RC

11

Cd d

P

..θ

..θ CM

Figure 3. Modélisation d’un sujet humain oscillant à la manière d’un simple pendule inversé autour de l’articulation de la cheville C. P est le poids corporel s’appliquant au CM du sujet, R la force de réaction au sol s’appliquant au niveau du CP, d la distance entre la ligne d’action de R et C, l la distance entre la ligne d’action de P et C, θ.. l’accélération angulaire du pendule. La distance entre C et le CM est

considérée comme constante. Le sujet oscille vers l’avant en (1) et vers l’arrière en (2).

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10 Partie 1  • Les bases mécaniques de l’équilibration humaine

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2CHAPITRE

Approche biomécanique des mécanismes du contrôle posturalCédrick T. Bonnet 1 et Patrice R. Rougier 2

1 Laboratoire de Sciences Cognitives et de Sciences Affectives (SCALab), UMR CNRS 9193, Lille, France ; 1, place de Verdun, Faculté de médecine, pôle recherche, 5e étage, 59045 Lille cedex, Tel : 03 20 62 68 56, E-mail: [email protected] 2 Laboratoire de Physiologie de l’Exercice, EA 4338, UFR CISM, Université de Savoie, Campus scientifi que de Savoie-Technolac, F 73376 Le Bourget du Lac, France ; [email protected]

1. introduction sur l’équilibre et sur les mécanismes du contrôle postural

1.1. Le poids du corps et la réaction du supportEn station debout, l’être humain oscille continuellement, même lorsqu’il essaie de rester le plus immobile possible (Fig. 1A et B). En effet, il est constitué de tissus vivants exerçant des forces in-ternes qui se modifi ent en fonction du temps : le cœur bat, les poumons se remplissent et se vident, les muscles se contractent et se décontractent, leur tension varie… Toutes ces forces dés-tabilisent le corps, car il est posé sur une petite base de support (la surface entourant les pieds au sol, Fig. 1B) par rapport à la hauteur verticale du corps du sol jusqu’à la tête (Fig. 2A). Cette déstabilisation posturale est amplifi ée si des forces externes s’ajoutent (par exemple, le vent) ou si l’individu debout réalise des mouvements volontaires engageant des segments corporels (par exemple, prendre un objet sur une table). En terme bioméca-nique, tous ces facteurs déstabilisants contribuent à faire bouger le poids du corps qui est un vecteur représentant la moyenne pon-dérée de toutes les forces tirant le corps vers le sol par l’effet de la gravité (Fig. 2A). Cette force poids a son point d’application au niveau du centre de masse (CdM). L’être humain debout ne tra-verse pas la terre, car des forces opposées au poids s’appliquent au niveau des points de contact au sol. La résultante de ces forces est appelée force de réaction du support (Fig. 2A) et s’applique au niveau du centre de pression (CdP).

Au niveau biomécanique, l’équilibre immobile serait possible si le poids du corps et la réaction du support restaient constam-ment alignés et d’intensités égales. La Fig. 2A montre un aligne-ment cassé juste par le fait de bouger la tête vers l’avant. Si nous assimilons le corps à un pendule inversé (Fig. 2B), le pendule est donc sans arrêt déséquilibré dans toutes les directions de l’es-pace autour de son point d’appui au sol (Fig. 2B), créant sans arrêt des couples de rotation (Fig. 2A et 2B). Si rien ne s’opposait à ces couples, le corps tomberait au sol. Pourtant, les êtres hu-mains se maintiennent debout sans problème. Ils réalisent donc un contrôle postural effi cace et permanent. L’objectif de notre discussion porte sur ces mécanismes du contrôle postural en assi-milant le corps à un pendule inversé (Fig 2B).

Prenons l’exemple de Rougier et Garin (2006) pour faire une image du contrôle postural en station debout. Essayez de main-tenir en équilibre une baguette posée verticalement sur l’un de vos doigts (Fig. 2C). Si vous ne bougiez pas le doigt, la baguette tomberait très rapidement. En bougeant le doigt pour contrecar-rer les mouvements de la baguette, vous arriveriez probablement à la maintenir en équilibre après quelques tentatives. Le contrôle postural en station debout est tout aussi continuel que celui de cette baguette à ceci près que le corps possède une inertie bien plus importante que la baguette et que le temps passé à se main-tenir debout dans notre vie surpasse largement celui consacré à la stabilisation d’une baguette sur un doigt. Avec cet exemple, nous mettons en évidence que le contrôle de l’équilibre se passe au niveau de la force de réaction et non pas au niveau du poids du

S O M M A i r e

1. introduction sur l’équilibre et sur les mécanismes du contrôle postural 11

2. Modélisation biomécanique pour étudier les deux mécanismes  13

3. résultats principaux obtenus grâce au modèle  16

4. Limites du modèle 18

5. Perspectives 20

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12 Partie 1  • Les bases mécaniques de l’équilibration humaine

corps. Pour équilibrer la baguette, nous ne bougeons pas le CdM, ici le centre de la baguette, mais notre doigt. En d’autres termes, le CdM ne peut être replacé vers une position plus équilibrée que si le CdP est lui-même déplacé. Pour rester debout, nous essayons en fait d’« aligner » continuellement le vecteur force de réaction verticale sous le vecteur poids même si le terme « aligner » est simplificateur. En effet, pour maintenir le corps en équilibre de-bout, le déplacement du CdP doit être sans cesse supérieur et dans la même direction que le déplacement du CdM. Si nous re-prenons l’image de la baguette, les déplacements du doigt – et donc du CdP – sont toujours supérieurs à ceux du centre de la baguette pour annuler l’inertie de la baguette. Ainsi, le poids du corps est une force passive dont le point d’application bouge à cause des facteurs déstabilisants évoqués au début de ce chapitre, alors que la réaction du support est une force active, dont la po-sition va être modifiée pour contrôler la position du corps. Win-ter (1995) faisait effectivement le distinguo entre le mouvement « contrôleur (de l’équilibre) », le CdP sous les pieds, et le mouve-ment « contrôlé » qu’est le CdM du corps. En d’autres termes, le contrôleur est le vecteur à déplacer activement pour contrôler les déplacements passifs et continuels du vecteur poids.

Dans l’exemple précédent, le doigt bouge sans arrêt pour maintenir l’équilibre de la baguette. En station debout, les pieds peuvent aussi bouger, en faisant un pas par exemple, pour aug-menter de façon conséquente l’amplitude du déplacement du CdP et ainsi décélérer plus amplement le mouvement du CdM. Mais il est possible aussi de ne pas bouger les pieds alors qu’il faut déplacer le CdP. Pour comprendre comment cela est pos-sible, il faut se souvenir que le CdP est la position résultante de toutes les forces de réaction exercées sous les pieds prenant en compte non seulement le point d’application de ces forces, mais également leur intensité. Pour déplacer le CdP sous les pieds qui ne bougent pas, l’intensité des micros vecteurs force peut être modifiée en augmentant la pression du côté du pied où le CdP doit bouger. Par exemple, si nous souhaitons déplacer le CdP vers la gauche, il suffit alors de mettre plus de pression sous le pied gauche. À l’instant où nous réalisons cette action, le CdP se déplacera vers la gauche. Pour mettre plus de pression sur une partie d’un pied, il faut notamment activer les muscles des

jambes. Dans l’exemple d’un mouvement de tête vers l’avant (Fig. 3.1) le vecteur poids est porté vers l’avant (Fig. 3.2) créant un couple de rotation (représenté par l’alignement cassé). Pour ne pas tomber, l’individu doit déplacer le CdP vers l’avant en mettant plus de pression à l’avant des pieds (Figure 3.3, vecteur descendant à l’avant du pied). Pour cela, il doit contracter les muscles postérieurs de ses jambes. Ainsi, la réaction du support résultante sera de nouveau « alignée » avec le poids. Nous le rap-pelons, les termes « alignés » sont simplificateurs, le CdP bouge toujours plus que le CdM.

En résumé, le corps oscille sans arrêt à cause de multiples facteurs déstabilisants. Le CdM est donc en mouvement conti-nuel et son déplacement doit être contrôlé par le déplacement actif du CdP (cf., Winter, 1995 ; Fig. 2C et 2D). Les muscles posturaux servent alors à modifier la position du CdP sous les pieds. En basant le raisonnement sur le modèle du pendule in-versé (Fig 2B), il a longtemps été admis que le contrôle postural opère principalement au niveau des chevilles (McCollum et Leen, 1989). Les oscillations AP semblaient contrôlées par les muscles fléchisseurs plantaires/dorsaux et les oscillations ML semblaient contrôlées par les muscles inverseurs/éverseurs des pieds. Ceci est exact, mais pas tout à fait exhaustif comme nous allons le voir dans le chapitre expliquant les mécanismes posturaux permettant les déplacements du contrôleur, donc du CdP.

1.2. Deux mécanismes distincts en station debout sans mouvement et sans perturbationWinter et coll. (1993) ont suggéré que si l’individu se tient de-bout sur un seul pied, le contrôle postural est réalisé au niveau distal par les muscles des chevilles (Fig. 4A). Mais avec les deux pieds au sol, Winter et coll. (1993) ont suggéré qu’il devait exister un autre mécanisme pour contrôler l’équilibre : charger plus de poids du corps sur un appui (et donc décharger le poids du corps de l’autre appui). Ce contrôle postural s’assimile à un mécanisme de charge/décharge du poids du corps sur les appuis sans fina-lement nécessiter de mouvement rotatoire autour des chevilles. Ainsi ce mécanisme ne prend pas effet au niveau des chevilles. Avec les pieds côte à côte, la charge/décharge du poids du corps peut être appliquée sur chacun des appuis. Comme il n’est pas possible de changer la configuration latérale au niveau des ge-noux, le mécanisme doit opérer au niveau des hanches (Fig. 4B).

1

0.5

–0.5

0

0 0.25–0.25–0.5 0.5

Axe antéro-postérieur (cm)

A B

Axe médio-latéral (cm)

Figure 1. A. Représentation des déplacements du CdP, vus de dessus et centrés autour d’un repère médio-latéral et antéropostérieur ; B. Représentation des déplacements du CdP vus de dessus mis à l’échelle autour de l’empreinte des pieds pour un sujet normal. Le tracé entourant les pieds représente les limites de stabilité.

Figure 2. A. Exemple pour comprendre ce qui peut rompre l’alignement entre les vecteurs poids et réaction du suport. Lorsqu’une personne debout penche la tête vers l’avant, le vecteur poids est alors légèrement en avant du vecteur réaction du support formant ainsi un couple de rotation ; B. Corps humain debout représenté comme un simple pendule inversé. C. Exemple pour montrer qu’une baguette en équilibre sur le doigt est sans arrêt déséquilibrée autour de son point d’appui (ici le doigt).

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ChaPitre 2  • Approche biomécanique des mécanismes du contrôle postural 13

En utilisant deux plates-formes de force, le déplacement du CdP en fonction du temps (CdP(t)1) se calcule grâce à l’équation suivante :

CdP t CdP tR t

R t R tCdP t

R tR t Rg

vg

vg vdd

vd

vg vd( ) ( )

( )

( ) ( )( )

( )( ) (

=+

++ tt)

(1)

CdPg(t) et CdPd(t) quantifient respectivement le déplacement des CdP sous les pieds droit et gauche en fonction du temps, Rvg(t) et Rvd(t) les modifications des forces verticales droite et gauche en fonction du temps. L’équation (1) peut se comprendre ainsi : le CdP est égal à la somme des CdP sur les deux plates-formes, CdP qui sont pondérés par le poids du corps sur chaque appui. Si par exemple 75 % du poids du corps porte sur le membre inférieur gauche à un instant t, alors le CdPg aura 75 % d’importance pour expliquer le CdP et le CdPd n’en aura alors que 25 %. Si le poids est équiréparti, le CdP sera influencé à parts égales par les deux CdP plantaires.

Pour étudier la contribution de chacun des mécanismes, il faut dissocier la partie du CdP sous-tendue par le mécanisme de charge/décharge et celle sous-tendue par le mécanisme d’inver-sion/éversion. Nous allons mettre en avant la méthode quantifiée développée par Rougier (2007, 2008) :

CdP t CdPR t

R t R tCdP

R tRh g

vg

vg vdd

vd

v( )

( )

( ) ( )( )

=+

+moyenne moyennegg vdt R t( ) ( )+

CdP t CdPR t

R t R tCdP

R tRh g

vg

vg vdd

vd

v( )

( )

( ) ( )( )

=+

+moyenne moyennegg vdt R t( ) ( )+

(2)

CdP t CdP t R CdP t Rc g vg d vd( ) ( ) ( )= × + ×moyenne moyenne (3)

CdPh(t) et CdPc(t) correspondent respectivement aux dépla-cements du centre de pression sous-tendus, comme leur nom

1 Notons que dans la littérature, les chercheurs parlent de CdPnet ou CdPres et pas de CdP. Ces termes CdPnet ou CdPres servent simplement à mettre un indice pour désigner la nature générale ou résultante du CdP (CdP résultant de l’équation). Mais comme ces trois termes sont stricte-ment équivalents, nous garderons la notion simplifiée et commune à la littérature de CdP dans tout le chapitre.

En n’utilisant qu’une seule plate-forme de force, le mécanisme de charge/décharge ne peut pas être mesuré et quantifié (Winter et coll., 1993, 1996) et donc dissocié du mécanisme prenant place au niveau des chevilles, c’est-à-dire le mécanisme d’inversion/éversion pour le contrôle postural ML (Fig. 4A). Il est nécessaire d’utiliser deux plates-formes de force pour réaliser ces calculs. En effet, il faut à la fois mesurer les deux forces de réaction du sup-port (la charge/décharge) et les deux déplacements des centres de pression (sous les pieds droit et gauche). Outre cette avancée mé-thodologique pertinente, Winter et coll. (1993, 1996) ont élaboré les équations biomécaniques pour quantifier la contribution des mécanismes d’inversion/éversion et de charge/décharge (Fig. 4A et 4B). Pour en parler, nous nous placerons exclusivement dans l’axe ML, car la notion de charge/décharge ML prend du sens avec les pieds côte à côte (Fig. 4A et 4B). À la fin de ce chapitre, nous discuterons du mécanisme de charge/décharge AP quand un pied est placé devant l’autre.

2. Modélisation biomécanique pour étudier les deux mécanismes 

2.1. Équations de rougier (2007, 2008) Dans le chapitre précédent, nous avons souligné que le CdP était le contrôleur du déplacement du CdM. Ici, nous allons chercher à comprendre les mécanismes qui sous-tendent les déplacements du CdP. En référence à notre exemple de la baguette, nous cher-chons à comprendre comment le doigt bouge pour maintenir la baguette en équilibre. Il faut déjà mesurer le déplacement du CdP en fonction du temps – lors d’un essai – afin d’obtenir une sé-rie temporelle à décomposer. Il est alors possible de développer des équations relatives pour dissocier les mécanismes posturaux sous-jacents. Voici maintenant comment procéder avec trois équations biomécaniques.

Figure 3. Représentation des déplacements successifs des vecteurs poids et réaction du support lors d’un mouvement de tête vers l’avant. La figure de gauche montre une représentation d’un alignement du poids et de la force de réaction du support. Cette situation est simplificatrice, car elle est l’exception plus que la règle en équilibre debout. En penchant la tête vers l’avant (1), le vecteur poids avance (2) et la personne doit donc exercer plus de pression au sol au niveau de ses orteils (3) pour faire avancer le vecteur force de réaction du support (4) et ainsi retrouver une position d’équilibre entre les deux forces. Comme pour la première figure à gauche, cet alignement est plus l’exception que la règle…

Figure 4. A. Mécanisme d’inversion/éversion au niveau des chevilles pour le contrôle postural médiolatéral (ML) ; B. Mécanisme de charge/décharge au niveau des hanches également pour le contrôle postural ML.

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14 Partie 1  • Les bases mécaniques de l’équilibration humaine

l’indique, par le mécanisme de hanche et de cheville, respecti-vement2. Les équations du CdPh(t) et CdPc(t) sont identiques à l’équation du CdP(t) à une différence près : pour l’équation (2) calculant le CdPh(t), les deux séries temporelles du déplacement du CdP (CdPg et CdPd) sont rendues constantes en ne prenant que la valeur moyenne de ces deux séries temporelles et pour l’équation (3) calculant le CdPc(t), les deux séries temporelles de modification de la force verticale Rv (Rvg et Rvd) sont ren-dues constantes en ne prenant que la valeur moyenne de ces deux autres séries temporelles. Ainsi, CdPh(t) et CdPc(t) sont des constructions théoriques. En effet, pour toute personne oscillant constamment (Fig. 1A et 1B), il est impossible de garder CdPg(t), CdPd(t), Rvg(t) ou Rvd(t) constants pendant toute la durée d’un essai. La modélisation permet donc de neutraliser la contribution d’un mécanisme et donc au final de comprendre la part du CdP qui est contrôlée par l’un ou l’autre des mécanismes.

Avec les trois équations, nous obtenons trois courbes de dé-placement du CdP (Fig. 5). La première représente le déplace-ment du CdP tel qu’il est mesuré (courbe noire) et les deux autres correspondent à la partie du CdP sous-tendue par les mécanismes de hanche (CdPh, courbe grise pointillée) et de cheville (CdPc, courbe grise continue). Une nécessité a été de trouver un moyen de quantifier la contribution – ou puissance – des mécanismes pour expliquer le CdP. Le moyen utilisé a été d’analyser la res-semblance entre les courbes et nous l’évoquons dans le chapitre suivant pour le calcul de la contribution des mécanismes.

2.2. Calcul de la contribution des mécanismes 

2.2.1. Méthode employée avant 2013La contribution des mécanismes se calcule en étudiant la similari-té des courbes (CdPh et CdPc, courbes grises, Fig. 5) par rapport à celle du CdP (courbe noire, Fig. 5). Si les courbes sont com-plètement différentes, le mécanisme n’a aucune puissance pour expliquer le CdP. Si elles sont totalement confondues (l’une sur l’autre), le mécanisme explique le CdP. Dans tous les autres cas, le mécanisme explique une proportion du CdP. Dans l’exemple de la Fig. 5, la courbe grise pointillée est presque confondue avec la courbe noire alors que la courbe grise continue lui ressemble peu. Ainsi, la contribution du mécanisme sous-jacent (ici le mé-canisme de charge/décharge) est plus importante pour expliquer le CdP que ne l’est la contribution de l’autre mécanisme (ici le mécanisme d’inversion/éversion). Une quantification numérique

2 Dans la littérature, les chercheurs parlent systématiquement de CdPc et de CdPv et pas de CdPc et de CdPh. Les indices « c » et « v » renvoient aux notations anglaises de « change » et de « vertical » alors que les nôtres renvoient aux notations françaises de « cheville » et de « hanche ». Cela clarifie le message, car CdPc renvoie à la partie du CdP expliquée par le mécanisme de cheville (aussi appelé mécanisme de changement de localisation du CdP) et CdPv renvoie à la partie du CdP expliquée par le mécanisme de hanche (aussi appelé mécanisme de distribution verticale du poids du corps).Il peut paraître étrange et confus d’utiliser différents noms pour le même mécanisme. Par exemple, les noms mécanisme de hanche, mécanisme de charge/décharge, mécanisme de distribution du poids du corps, et même mécanisme d’adduction/d’abduction des hanches renvoient tous au même mécanisme. Il en est de même pour le nom du mécanisme de cheville qui prend plusieurs terminologies. Il faut comprendre que le nom renvoie à différents aspects du même mécanisme, à sa localisation, ou à l’action mécanique, ou à la coordination posturale sous-jacente, ou aux muscles sollicités…

des contributions de chacun des mécanismes est alors nécessaire pour procéder à des analyses statistiques.

Dans ce but, Rougier (2007, 2008) a analysé l’amplitude (c’est-à-dire, l’écart-type) des séries temporelles de CdPh et de CdPc (Fig. 5). L’analyse portait sur l’amplitude des courbes d’un point de vue spatial. Pour calculer la contribution d’un méca-nisme, Rougier (2007, 2008) a analysé la variabilité du CdP sous-tendue par ce mécanisme par rapport à la variabilité totale du CdP, c’est-à-dire la variabilité sous-tendue par les deux méca-nismes (car seuls ces deux mécanismes expliquent le déplacement du CdP). Il a utilisé les équations suivantes :

Contribution ( )( )

( ) ( )M

ET CdPET CdP ET CdPc

c

c h=

+

Contribution ( )( )

( ) ( )M

ET CdPET CdP ET CdPh

h

c h=

+

Dans ces équations, la somme des deux contributions donne un score de 1. Si un mécanisme explique 70 % du CdP par exemple, l’autre mécanisme en expliquera alors 30 %. Cette méthode de proportionnalité simplifie la compréhension des équations non seulement par le fait que le calcul d’une seule contribution suf-fit, mais en plus parce qu’elle a du sens pour quantifier la force de contribution du mécanisme. Pour quantifier celui-ci, Winter et ses collègues (Lafond et coll., 2004 ; Termoz et coll., 2008 ; Winter et coll., 1993, 1996) avaient analysé les aspects spatiaux des séries temporelles de CdPh, CdPc et CdP. Ils avaient utilisé la racine quadratique des séries temporelles à la place de leur écart-type.

Pour calculer la contribution des mécanismes, tous les cher-cheurs avant 2013 (Lafond et coll., 2004 ; Rougier, 2007, 2008 ; Termoz et coll., 2008 ; Winter et coll., 1993, 1996) ont aussi uti-lisé des analyses de corrélation croisée entre d’un côté CdPc(t) et CdP(t) et de l’autre côté CdPh(t) et CdP(t). Dans ces articles pu-bliés, ces analyses complémentaires quantifiaient la contribution des mécanismes de la même façon que les calculs en amplitude évoqués précédemment.

Figure 5. Représentation de trois séries temporelles selon l’axe médiolatéral (ML) pendant un enregistrement de 30 secondes. Le déplacement du centre de pression (CdP) est dessiné en noir, le déplacement du CdP provoqué par le mécanisme de cheville (CdPc) est dessiné en gris continu et le déplacement du CdP provoqué par le mécanisme de hanche (CdPh) est dessiné en gris pointillé. On voit que le déplacement du CdP est principalement expliqué ici par le mécanisme de hanche.

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ChaPitre 2  • Approche biomécanique des mécanismes du contrôle postural 15

2.2.2. Méthode utilisée depuis Bonnet et coll. (2013)Au même titre que Rougier (2007, 2008), Bonnet et coll. (2014a) ont proposé que les analyses d’amplitude de CdPc et CdPh de-vaient calculer la force des mécanismes, ou « contribution en am-plitude » de ces mécanismes. Par contre, Bonnet et coll. (2014a) ont proposé que les corrélations croisées ne pouvaient pas analy-ser les amplitudes de CdPc et CdPh et qu’elles portaient donc sur des aspects différents. En effet, deux courbes (CdPc et CdP par exemple) peuvent avoir des amplitudes infiniment différentes et pourtant dégager un coefficient de corrélation maximum de 1 (cf. Fig. 6). Et deux courbes avec des amplitudes similaires peuvent avoir un coefficient de corrélation de 0. Ces analyses de corré-lation étaient pourtant pertinentes, car elles s’intéressaient à la similarité en direction et en proportionnalité des deux courbes. Bonnet et coll. (2014a) ont suggéré que les corrélations croisées pouvaient porter sur les aspects non pas spatiaux, mais tempo-rels de la contribution des mécanismes. Pour eux, les analyses de corrélation croisées quantifieraient si les mécanismes sont actifs au bon moment, et par conséquent leur degré d’efficience. C’est pourquoi Bonnet et coll. (2014a) ont suggéré que les calculs de corrélation croisée portaient sur la contribution active des mé-canismes (si les mécanismes sont actifs au bon moment ou pas).

Pour appuyer leur propos, Bonnet et coll. (2014a) ont réali-sé une expérience pour montrer que les deux analyses (analyses d’amplitude et de corrélations croisées) ne portaient pas sur les mêmes aspects de la contribution des mécanismes. Ils ont pos-tulé que la contribution en amplitude et la contribution active devaient être contrastées entre les conditions pieds serrés et pieds écartés par rapport à la condition pieds en position standard. En effet, avec les pieds serrés, la contribution en amplitude devait diminuer alors que la contribution active devait augmenter. D’un côté, la contribution en amplitude devait diminuer, car le bras de levier entre le corps en position verticale et la localisation de la force d’action du pied au sol est diminué par rapport à la posi-tion pieds en position standard (Fig. 7A vs. 7B). Ainsi, une même force – contribution en amplitude – appliquée sur chaque appui devrait être moins efficace et donc moins grande avec les pieds serrés. Pour comprendre cette idée, on peut imaginer l’ouverture d’une porte en la poussant soit à proximité de la charnière, soit au niveau de sa poignée. Une force de même amplitude appli-quée sur la poignée l’ouvrira bien plus facilement. D’un autre côté, comme la condition pieds serrés est beaucoup plus difficile à maintenir que la condition pieds standards, la contribution active devait nécessairement être bien supérieure pour permettre aux

individus le maintien de l’équilibre, sinon ils n’y arriveraient pas. Entre conditions pieds écartés cette fois-ci et pieds standards, les hypothèses étaient diamétralement inversées, car le bras de levier était alors plus grand (Fig. 7C vs 7B). Les résultats ont conforté ces hypothèses montrant que les analyses d’amplitude et de cor-rélations croisées ne pouvaient pas porter sur les mêmes aspects de la contribution des mécanismes. Jusqu’à cette étude, les cher-cheurs avaient suggéré que les résultats des deux analyses allaient dans le même sens (p. ex., Termoz et coll., 2008).

L’intérêt des analyses de corrélation est que les séries tempo-relles des mécanismes (CdPc et CdPh) sont comparées à celle du CdP. Ainsi, ces analyses permettent d’obtenir une contribution relative à ce qui doit être expliqué (le CdP). Le coefficient de cor-rélation de 0.9, par exemple, montre que le CdPc ou CdPh (selon l’analyse) explique 90 % du déplacement du CdP. Pour travailler de manière parallèle, il est préférable de réaliser une comparaison entre l’amplitude (écart-type) des séries temporelles des deux mé-canismes (CdPc et CdPh) par rapport celle du CdP. Pour obtenir une proportionnalité, il est donc nécessaire de calculer la contri-bution en amplitude de la manière suivante :

Contribution Amplitude ( )( )

( )M

ET CdPET CdPc

c

res=

Contribution Amplitude ( )( )( )

MET CdPET CdPh

h

res=

La méthode de calcul de la contribution en amplitude, propo-sée par Rougier (2007, 2008) et décrite précédemment, est certes pertinente, mais elle présente une lacune. En effet, les calculs quantifient seulement la contribution des deux mécanismes l’un par rapport à l’autre et non pas par rapport au signal à expli-quer. Ainsi, nous obtenons deux contributions en amplitude to-talement liées (la somme des deux vaut 1) alors que ce n’est pas le cas pour les deux contributions actives puisque nous obtenons deux proportions dont la somme ne donne pas 1. Ce calcul de Rougier (2007, 2008) fait ainsi perdre de l’information, car il ne peut pas faire apparaître une contribution en amplitude d’un mécanisme supérieur à 100 % du signal CdP à expliquer. Pour-tant, ce résultat est possible comme l’ont montré Bonnet et coll. (2014a). Ainsi, il semble préférable de quantifier la contribution en amplitude des mécanismes non pas l’un par rapport à l’autre, mais par rapport au déplacement du CdP.

Pour résumer ce chapitre, il est pertinent de calculer la contri-bution des mécanismes sur la base des similarités des courbes (CdPc et CdPh) avec celle du CdP. Si une courbe explicative (CdPc ou CdPh) est complètement différente de la courbe à expliquer (CdP), le mécanisme expliquera peu le CdP (ou pas du tout). À l’inverse, si

Figure 6. Deux séries temporelles exactement en phase (r = 1), mais avec des amplitudes complètement différentes. Cette représentation n’a pas d’échelle, car le temps et l’amplitude peuvent être infiniment grands. Figure tirée de l’article Bonnet et coll. (2014a).

Figure 7. Écartement croissant entre les pieds. La ligne pointillée est centrée par rapport aux deux pieds et montre où tombe la projection verticale du vecteur poids (si le corps est centré, ce qui est une approximation). La double flèche représente la longueur du bras de levier entre la projection du vecteur poids et le vecteur réaction du support sous un appui seulement (position au milieu du pied).

B CA

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16 Partie 1  • Les bases mécaniques de l’équilibration humaine

une courbe explicative est totalement confondue avec celle du CdP, alors le mécanisme explique totalement le CdP. Dans tous les cas, le mécanisme est à l’origine d’une modification du déplacement du CdP d’une proportion variable (entre 0 % et 100 %). Les aspects de ressemblance qui nous intéressent entre les courbes sont les as-pects spatiaux, analysant la force du mécanisme, et les aspects tem-porels, analysant le moment d’activation. Ces deux aspects sont tous les deux aussi importants (Bonnet et coll., 2014a). En effet, si la force d’un mécanisme est très grande à un moment inapproprié, ce mécanisme n’aura aucun impact. De même, si le mécanisme est actif au meilleur moment, mais sans force, le mécanisme n’aura aucun impact pour expliquer le déplacement du CdP. Ces deux as-pects constituent le cœur de publications récentes (Bonnet et coll., 2013, 2014a, 2014b, 2014c, 2015).

3. résultats principaux obtenus grâce au modèle 

3.1. résultats principaux découverts avec de jeunes adultes Toutes les études publiées avec le modèle biomécanique et avec de jeunes adultes (Bonnet et coll., 2014a, 2014b, 2014c, Rougier, 2007, 2008 ; Winter et coll., 1993, 1996) montrent sans équi-voque que le mécanisme de charge/décharge est primordial au contrôle de l’équilibre ML avec les pieds côte à côte (comme le montre la Figure 5). La grande avancée de Winter et coll. (1993) a donc été non seulement de mettre en évidence un nouveau mé-canisme de contrôle de l’équilibre – celui de charge/décharge –, mais en plus de révéler son caractère fondamental sur l’axe ML (Figure 5). Le mécanisme de charge/décharge a une contribution supérieure au mécanisme d’inversion/d’éversion avec les pieds côte à côte, quelle que soit la distance latérale entre les pieds (Bonnet et coll., 2014a ; Fig. 8A et 8B).

Les études publiées sur de jeunes adultes montrent que le mécanisme d’inversion/éversion n’a qu’un rôle secondaire en position de pied standard. Quand les chercheurs comparent sa contribution active à la valeur 0, parfois le mécanisme n’a aucun rôle significatif (Winter et coll., 1993, 1996) et parfois, il a un rôle significatif (Bonnet et coll., 2013, 2014a). Ce contraste de résultats semble principalement lié à l’écartement entre les pieds. En effet, avec les pieds écartés, la contribution active du CdPc n’est pas significative alors qu’elle le devient largement avec les pieds serrés (Bonnet et coll., 2014a). Le seuil au-delà duquel le résultat est significatif peut se trouver à proximité de la position standard des pieds (17 cm selon McIlroy & Maki, 1997). Winter et coll. (1993, 1996) n’avaient pas précisé la distance entre les pieds de leurs jeunes participants, alors que les distances entre les pieds étaient de 19,09 ± 3,84 cm et de 18,01 ± 3,66 cm dans nos deux études (Bonnet et coll., 2013, 2014a).

3.2. résultats chez les personnes d’âge moyen (50-60 ans), les patients diabétiques et les patients parkinsoniens Lafond et coll. (2004) et Termoz et coll. (2008) ont été les pre-miers à analyser les déficiences des mécanismes de charge/dé-charge et d’inversion/éversion chez des personnes âgées et chez

des patients (atteints de neuropathie diabétique ou de la maladie de Parkinson). Nous ne parlerons là aussi que des résultats selon l’axe ML. Dans leurs études, ces chercheurs n’ont mis en évi-dence que peu de résultats significatifs. Lafond et coll. (2004) n’ont montré qu’une diminution significative de la contribution (que nous avons nommée « active ») des mécanismes d’inversion/éversion par rapport aux personnes témoins (CdPc vs. CdP té-moins = 0,77 ± 0,14 ; patients = 0,53 ± 0,22). Ce résultat était logique puisque la neuropathie périphérique atteint préféren-tiellement les parties distales du corps, en l’occurrence les pieds. Pourtant, le résultat montrant un déficit des mécanismes postu-raux n’était pas très fort sachant que les patients diabétiques at-teints de neuropathie sont reconnus pour être particulièrement instables (cf. Bonnet et coll., 2009).

Comme Lafond et coll. (2004), Termoz et coll. (2008) n’ont mis en évidence que peu d’effets liés à l’âge ou à la pathologie (maladie de Parkinson). Ils n’ont trouvé aucune différence signi-ficative de groupe dans les conditions pieds normalement écartés ou avec un pied placé devant l’autre en gardant l’écartement ML

Figure 8. Contribution des mécanismes dans trois conditions d’écartement de pied. Les variables sont A) l’écart-type de l’amplitude du déplacement du CdP expliqué par le mécanisme de hanche (CdPv) et par le mécanisme de cheville (CdPc) exprimée en proportion (%) de l’écart-type de l’amplitude du déplacement du CdP ; B) Le coefficient de la corrélation croisée entre le CdP vs. CdPh d’une part et entre le CdP vs. CdPc d’autre part. Cette étude montre que le mécanisme de charge/décharge a une contribution supérieure au mécanisme d’inversion/d’éversion avec les pieds côte à côte, quelle que soit la distance latérale entre les pieds. En effet, la contribution en amplitude et active du mécanisme de charge/décharge sont respectivement 3.2 et 4.7 fois supérieures à celles du mécanisme d’inversion/éversion en position debout avec les pieds en position standard. Avec les pieds serrés, les deux contributions du mécanisme de charge/décharge sont respectivement 1.4 et 4.1 fois supérieures à celles du mécanisme d’inversion/éversion et donc diminuent (Bonnet et coll., 2014a ; Fig. 8A et 8B). Enfin, avec les pieds écartés, les deux contributions du mécanisme de charge/décharge sont respectivement 2.8 et 59 fois supérieures à celles du mécanisme d’inversion/éversion (d’après Bonnet et coll., 2014a).

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ChaPitre 2  • Approche biomécanique des mécanismes du contrôle postural 17

classique des pieds. La seule différence significative entre patients et témoins intervenait quand les participants se tenaient dans une position légèrement penchée vers l’avant avec les genoux fléchis (posture naturellement adoptée par les patients parkinsoniens). Dans cette condition, la contribution (que nous avons nommée « en amplitude ») du mécanisme de charge/décharge était signi-ficativement plus grande chez les patients que chez les témoins, ce que Termoz et coll. (2008) ont décrit comme un déficit. Une interprétation inverse aurait toutefois pu être donnée puisque ces patients utilisaient davantage un mécanisme que les témoins et oscillaient significativement moins que les témoins. Ainsi, tout comme dans Lafond et coll. (2004), ces résultats posent question sachant que les personnes âgées sont déjà déstabilisées et que les patients atteints de la maladie de Parkinson le sont encore plus (surtout au stade 2-3 comme ceux de l’étude de Termoz et coll., 2008). Comme l’expliquent clairement Maurer et Peterka (2005), une déficience d’un mécanisme postural doit être à la base de l’instabilité posturale. Les résultats de Lafond et coll. (2004) et Termoz et coll. (2008) ne vont pas dans ce sens de façon claire. Leurs résultats peu concluants ont peut-être fragilisé le modèle initial de Winter et coll. (1993, 1996), ce qui pourrait expliquer le nombre réduit de publications jusqu’en 2013 (Lafond et coll., 2004 ; Rougier, 2007, 2008 ; Termoz et coll., 2008 ; Winter et coll., 1993, 1996).

La méthodologie utilisée par Termoz et coll. (2008) comporte à notre sens deux lacunes. Certes, ces chercheurs ont fait des ana-lyses d’amplitude et de corrélation croisée, mais leurs analyses étaient partielles. D’une part, Termoz et coll. (2008) ne reportent pas tous les résultats (manque d’analyse sur les corrélations croisées) et d’autre part, ils ne reportent que des résultats sur la contribution en amplitude absolue des mécanismes (et pas en proportion du signal à expliquer), alors que ces analyses absolues sont moins pertinentes. Un autre problème est que Termoz et coll. (2008) ainsi que Lafond et coll. (2004) ont demandé à leurs par-ticipants de bouger le moins possible. Cette méthodologie n’est pas idéale pour découvrir des différences de maintien naturel de l’équilibre. Cette méthode permet simplement d’analyser des insuffisances absolues ou maximales de contrôle de l’équilibre. Or, un déficit de mécanisme peut être visible seulement quand les individus se tiennent naturellement debout – situation représen-tative de la vie de tous les jours. Comme le disent très justement Cenciarini, Loughlin, Sparto et Redfern (2010) et Maurer et Pe-terka (2005), le fait de demander aux sujets de limiter au maxi-mum leurs oscillations peut cacher des différences significatives importantes. C’est effectivement ce qu’ont montré Bonnet et coll. (2013, 2014d, 2015) avec des personnes d’un âge moyen et des patients parkinsoniens. Nous allons maintenant résumer ce que ces études récentes ont apporté à la littérature.

Les personnes d’un âge supérieur à 60 ans sont connues pour être moins stables que les jeunes adultes (Vieira et coll., 2008). Bien que leurs mécanismes posturaux devraient être dégradés par l’effet de l’âge, Termoz et coll. (2008) ne l’ont toutefois pas vé-rifié. Avec la nouvelle méthodologie (rester debout de façon na-turelle, calculer les deux contributions des deux mécanismes de façon proportionnelle et non pas absolue), Bonnet et coll. (2013) ont pu montrer des insuffisances des mécanismes posturaux liées à l’âge. Dans leur étude, les analyses statistiques, la déficience du mécanisme de cheville (inversion/éversion) apparaissait comme un effet principal de groupe alors que le groupe était moins âgé (51,13 ± 6,09 années). Dans une autre étude avec des personnes plus âgées (61,61 ± 5,73 années), Bonnet et coll. (2014d) ont

trouvé d’autres différences significatives liées à l’âge. Ils ont mon-tré que le seul fait de préparer une tâche d’extension maximale du corps sur le côté droit ou gauche (Fig. 9A, image de gauche avant l’extension à gauche visible sur l’image de droite) faisait augmenter significativement la contribution en amplitude du mécanisme d’inversion/éversion de ces personnes âgées. Les per-sonnes âgées semblaient se raidir avant même de se lancer dans l’extension maximale de leur corps. Les jeunes adultes, quant à eux, n’ajustaient pas leurs mécanismes avant l’exécution de cette même tâche. Ce phénomène pourrait aussi expliquer pourquoi les personnes âgées réalisaient ce mouvement d’extension moins rapidement que les jeunes adultes (Bonnet et coll., 2014d). Cette étude a aussi montré que lors de la réalisation de tâches dyna-miques d’oscillations du corps de droite à gauche pendant 35 se-condes (Fig. 9B), les personnes âgées montraient un déficit de contribution en amplitude du mécanisme d’inversion/éversion par rapport aux jeunes adultes.

Dans deux études récentes, Bonnet et coll. (2014d, 2015), nous avons révélé des déficiences des mécanismes posturaux liées à la maladie (patients parkinsoniens vs témoins). Dans ces deux études, nous n’avons pas trouvé de déficit des mécanismes pos-turaux en condition debout standard, sauf pendant une période anticipant une extension maximale du corps à droite ou à gauche (comme les personnes âgées, cf. ci-dessus). De plus, dans Bonnet et coll. (2014d), la contribution en amplitude du mécanisme de charge/décharge des patients parkinsoniens était diminuée dans des conditions dynamiques. Par rapport aux personnes témoins, elles l’étaient dans la condition d’oscillations latérales maximales (Fig. 10A). Dans une autre étude (Bonnet et coll., 2015), les par-ticipants devaient soit rester debout dans la condition standard, soit regarder une cible apparaissant à droite et à gauche à 40° d’angle visuel et à des fréquences de 0,125 Hz ou de 0,25 Hz. Dans ce cas, aucun déficit des mécanismes du contrôle postural en condition standard n’a pu être montré (Bonnet et coll., 2015). Par contre, les contributions tant en amplitude qu’active ne chan-geaient presque pas entre les conditions chez les patients alors qu’elles étaient adaptées à l’effort chez les personnes témoins (deux interactions significatives étaient dégagées, avec CdPh vs. CdP et % SD CdPc /CdP ; Fig. 10B et 10C). Cette expérience mettait en lumière que les mécanismes posturaux étaient peut-être adaptés à la station debout basique, mais qu’ils l’étaient de moins en moins en fonction de la difficulté de la tâche (puisque les mécanismes ne s’adaptaient pas aux efforts effectués). Il appa-raissait ainsi que plus la tâche ML est difficile et plus les patients parkinsoniens se mettent en risque d’instabilité posturale ML et en danger de chute.

Figure 9. Illustration de deux tâches. A) la tâche d’extension maximale du corps sur un côté (ici à gauche) ; B) la tâche dynamique d’oscillations du corps de droite à gauche (d’après Bonnet et coll., 2014d).

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18 Partie 1  • Les bases mécaniques de l’équilibration humaine

En conclusion, le modèle biomécanique réadapté par nos soins ces dernières années semble approprié pour mettre en avant des insuffisances de mécanismes posturaux liés à l’âge et à la maladie.

4. Limites du modèle

4.1. Le contrôle postural ML se fait différemment du contrôle postural aPJusqu’à présent, nous n’avons discuté que des mécanismes du contrôle postural intervenant selon l’axe ML. Pourtant, les équa-tions peuvent aussi être utilisées pour calculer la contribution des mécanismes dans l’axe AP. Et c’est d’ailleurs ce qui avait été fait

par les chercheurs avant 2013. L’objectif principal de Winter et coll. (1996) étaient de vérifier la possibilité de calculer les méca-nismes dans les axes AP et ML dans chaque essai enregistré et quelle que soit la condition expérimentale. Pourtant, il ne semble pas que les mécanismes posturaux puissent être calculés de façon pertinente selon les deux axes dans n’importe quelle condition. Nous n’avons, d’ailleurs, calculé la contribution des mécanismes que selon l’axe ML avec les pieds côte à côte, sauf une fois jus-tement pour montrer que ces équations n’avaient pas de sens sur l’axe AP avec les pieds en position standard (Bonnet et coll., 2014b). Nous allons maintenant expliquer pourquoi.

Pour rappel, Winter et coll. (1993, 1996) prétendaient que le mécanisme de charge/décharge est un mécanisme où un pied se charge et l’autre pied se décharge, chacun à des niveaux bien distincts. Pour calculer la contribution du mécanisme de charge/décharge ML, il faut donc avoir le pied droit sur une plate-forme et le pied gauche sur une autre plate-forme (Fig. 11A). Comment, en effet, imaginer une charge complète du pied gauche sur la gauche et une décharge complète du pied droit sur la droite si un pied est exactement devant l’autre comme en position Tan-dem Romberg (Fig. 11B) ? D’ailleurs, Winter et coll. (1996) précisent que pour calculer la contribution du mécanisme de charge/décharge AP (attention, nous parlons de mécanismes AP cette fois-ci), le pied avant doit être sur la plate-forme avant et le pied arrière sur plate-forme arrière (Fig. 11B) et non pas les deux pieds à moitié sur les plates-formes comme sur la Fig. 11D par exemple. Pourquoi alors tous les chercheurs ont-ils calculé la contribution du mécanisme de charge/décharge AP quand les pieds sont côte à côte (Fig. 11A) et la contribution du mécanisme de charge/décharge ML quand un pied est strictement devant l’autre (Fig. 11B) ?

Nous pouvons évoquer d’autres arguments pour prétendre que la contribution des mécanismes posturaux AP ne doit pas être réalisée en Fig. 11A ou même 11D. De même, en position de Tandem Romberg (Fig. 11B), il ne semble pas convenable de cal-culer la charge/décharge ML. Si une plate-forme est placée devant l’autre (Fig. 11B), il existe certes bien deux forces verticales, une sous chaque pied et l’une de ces forces sera effectivement plus à droite (ou à gauche) que l’autre. Mais quel est le « pied gauche » dans ce cas ? Et quel est le signal « gauche » ? Car le pied dit « pied gauche » peut avoir une force verticale plus à droite que le pied dit « pied droit ». Même si physiquement les plates-formes mesurent des forces séparées, nous ne reportons pas réellement 100 % d’une charge à gauche avec un seul pied et 100 % d’une décharge à droite avec l’autre pied, mais x % d’une charge et 100 – x % d’une décharge avec les deux pieds en fonction du recouvrement

Figure 10. A. Écart-type (ET) du CdP sur l’axe ML contrôlé par le mécanisme de hanche (CdPh) chez les patients parkinsoniens et les personnes témoins lors d’une tâche d’oscillations latérales maximales. La différence entre ces participants est significative (p < 0.05) ; B. Coefficients de corrélation croisée du CdPh vs. CdP des patients parkinsoniens et des personnes témoins dans trois conditions. La première condition est le simple fait de regarder un point fixe en face. Les deuxième et troisième conditions consistaient à regarder un point qui apparaissait alternativement à droite et à gauche à 80° d’angle visuel et à 0.125 ou 0.25 Hz, respectivement. La Figure B représente une interaction significative entre les conditions et les groupes ; C. Écart-type (ET) du CdP ML contrôlé par le mécanisme de cheville (CdPc) en proportion (%) de l’ET du CdP chez les patients parkinsoniens et les personnes témoins lors des trois tâches visuelles. La Figure C représente une interaction significative entre conditions et groupes. Figures B et C d’après Bonnet et coll. (2015).

Figure 11. Différentes positions de pied. A. Position standard avec un pied sur chaque plate-forme ; B. Position en Tandem Romberg avec un pied sur chaque plate-forme ; C. Position à 45° avec un pied sur chaque plate-forme et le pied gauche devant ; D. Position standard avec les deux pieds à moitié sur les deux plates-formes. Figures tirées de l’article Bonnet et coll. (2014b).

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ChaPitre 2  • Approche biomécanique des mécanismes du contrôle postural 19

des forces verticales. Si les deux plates-formes étaient placées l’une à côté de l’autre avec les pieds côte à côte, alors les deux pieds seraient chacun sur deux plates-formes de force (Fig. 11D). Dans ce cas, on calculerait un mécanisme de demi-décharge/de-mi-charge, ce qui n’est pas ce que revendiquaient Winter et coll. (1993, 1996). Certes, ces mécanismes de x % décharge/(100 – x % charge) et demi-décharge/demi-charge peuvent exister, mais nous parlons d’un mécanisme de charge et de décharge avec le modèle original de Winter et coll. (1993, 1996).

Le développement aux paragraphes précédents donne certes des arguments théoriques, mais manque de vérification expéri-mentale. C’est pourquoi, Bonnet et coll. (2014b) ont réalisé une étude pour confirmer leur point de vue. Pour eux, avec les pieds côte à côte (Fig. 11A), le calcul de la contribution du mécanisme de charge/décharge AP devait être insensible à tout changement de condition expérimentale puisque, par le raisonnement théo-rique, aucune charge/décharge n’est mesurée avec cette position de pied. Quand un individu se penche vers l’avant par exemple, il n’y a qu’une demi-décharge sur l’avant des deux pieds, pas la charge d’un pied hypothétiquement avant et la décharge de l’autre pied hypothétiquement arrière. Dans leur étude, Bonnet et coll. (2014b) ont voulu non seulement montrer qu’il n’y aurait aucune variation du mécanisme de charge/décharge AP, mais également qu’il n’y aurait aucune variation du mécanisme de flexion plan-taire/flexion dorsale AP. Si en effet la contribution du mécanisme de charge/décharge n’est pas mesurée (comme cela est supposé être le cas dans cette expérience), alors le mécanisme de flexion plantaire/flexion dorsale ne devrait pas non plus changer, quelle que soit la condition expérimentale. Bonnet et coll. (2014b) ont fait réaliser à leurs participants des conditions debout très diffé-rentes où les mécanismes sont censés plus ou moins contribuer. Les quatre conditions étaient : debout de façon standard (quiet stance) et osciller d’avant en arrière 1) exclusivement autour des chevilles, 2) exclusivement autour des hanches, 3) autour des che-villes et des hanches en alternance. Les résultats ont conforté les hypothèses de Bonnet et coll. ; (2014b) qu’il n’y avait aucune va-riation de la charge/décharge AP dans les quatre conditions. Les deux conditions avec mouvements autour des chevilles (condi-tions cheville et alternée) montraient, certes, une contribution ac-tive du mécanisme de flexion plantaire/flexion dorsale significa-tivement plus grande qu’en condition standard (Fig. 12), mais le résultat avait peu de portée pratique. En effet, la différence entre les conditions était inférieure à 0,5 % (Fig. 12) alors qu’on aurait pu s’attendre à une contribution du mécanisme de hanche bien supérieure à celle de cheville. En effet, le ratio entre mouvements aux hanches et aux chevilles pour des oscillations de même ordre est de 4/1 (Alexandrov, Frolov & Massion, 2001).

Bonnet et coll. (2014b) ont conclu que pour pouvoir utili-ser les équations et calculer de façon cohérente la contribution des mécanismes ML et AP de façon appropriée sur chaque essai réalisé, il fallait nécessairement que les pieds soient en position distincte, à la fois latéralement et antéropostérieurement, c’est-à-dire un pied strictement à gauche de l’autre et un pied strictement devant l’autre, quelle que soit la position des deux plates-formes. Cela n’est possible que dans le cas de la figure 11C. S’il existe un chevauchement des deux pieds sur une ligne AP ou ML, on ne peut pas savoir de quel pied vient la charge. Et dans ce cas-là on ne peut plus parler de charge (sur un pied) et de décharge (sur l’autre pied). Nous évoquons ici une limite de l’utilisation du modèle. Selon Bonnet et coll. (2014b), le modèle bioméca-nique AP ne devrait être utilisé que dans la condition avec un pied

devant l’autre, en Tandem Romberg ou dans la situation de la figure 11C. C’est pourquoi nous n’avons pas évoqué les résultats AP publiés dans la littérature dans nos chapitres antérieurs.

4.2. Le modèle biomécanique ne peut pas reporter la coordination posturale Nous avons signalé tout au long de ce chapitre que le modèle biomécanique des deux mécanismes posturaux expliquait des ré-sultats de conditions où le corps se comporte en pendule inversé. Il est exact que le modèle ne peut pas reporter la coordination posturale des participants. En effet, il retranscrit simplement les modifications de position et d’amplitude des forces verticales et des CdP sous chaque appui, peu importe les mouvements des segments du corps pour parvenir à l’obtention de ces différentes séries temporelles. La seule façon de rendre compte de la coordi-nation posturale est de mesurer les mouvements des différents seg-ments du corps avec des marqueurs ou des électrogoniométriques.

4.3. Le modèle biomécanique ne permet pas de connaître ce qui détermine la contribution des mécanismesUne autre limite du modèle biomécanique est qu’il n’est pas pos-sible de savoir pourquoi et surtout comment la contribution des mécanismes évolue en fonction du temps. Avec seulement les mesures des deux plates-formes de force, nous ne connaissons que le résultat – ou conséquence – de l’action des muscles et des mouvements du corps. Certes, les équations traduisent avec exac-titude la modification des contributions en amplitude et active des mécanismes, mais l’origine de ces modifications est inconnue. Sans les mesurer avec des EMG, nous ne pouvons pas connaître les muscles engagés dans l’action pour modifier la contribution des deux mécanismes. Une autre limite du modèle est l’impossi-bilité de connaître les processus engagés par le système nerveux central : est-ce un processus de type réaction ou anticipation ?

Figure 12. Coefficients de corrélation croisée du déplacement du CdP vs. déplacement du CdP contrôlé par le mécanisme de hanche (CdP vs. CdPh), du CdP vs. déplacement CdP contrôlé par le mécanisme de cheville (CdP vs. CdPc) et du CdPc vs. CdP CdPh de jeunes adultes sains participant à quatre conditions. Dans les première et deuxième conditions, les participants devaient osciller d’avant en arrière simplement autour des hanches et autour des chevilles, respectivement. Dans la troisième condition, ils devaient osciller d’avant en arrière en alternance autour des chevilles et des hanches. Dans la quatrième condition (standard), ils devaient regarder un point fixe en face d’eux sans rien faire. L’astérisque représente une valeur de coefficient plus grande significativement dans les conditions hanche et alternée que dans les deux autres conditions. (D’après Bonnet et coll., 2014b).

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20 Partie 1  • Les bases mécaniques de l’équilibration humaine

5. PerspectivesCe modèle biomécanique du contrôle postural semble au-jourd’hui adapté pour permettre de faire des découvertes mar-quantes. Plusieurs aspects méthodologiques ont été apportés par les études de Bonnet et coll. (2013, 2014a, 2014b) : 1) il ne faut calculer les mécanismes posturaux ML qu’avec les pieds côte à côte ou les mécanismes AP qu’avec un pied strictement devant l’autre ; 2) il est préférable de demander aux participants de se tenir debout de façon naturelle et donc de ne pas se contraindre à bouger le moins possible ; 3) il est bon d’exploiter les ressources du modèle et de calculer à la fois la contribution en amplitude et la contribution active des mécanismes ; 4) ces calculs doivent porter plus particulièrement sur la contribution du mécanisme par rapport au signal à expliquer (le CdP) avec à la fois les cor-rélations croisées (CdPc vs. CdP et CdPh vs. CdP) et les analyses en amplitudes (% SD CdPc /SD CdP et % SD CdPh / SD CdP). Les analyses sans aucun rapport avec le CdP (p. ex. SD CdPc et SD CdPh) sont, certes, intéressantes, mais seulement pour étu-dier les changements d’amplitude des mécanismes d’une condi-tion à l’autre indépendamment du signal à expliquer (le CdP). Avec ces contraintes méthodologiques, le modèle peut beaucoup nous apporter. Quand les expérimentateurs utilisent une seule plate-forme de force, ils s’exposent à reporter des aberrations concernant l’action du contrôleur (CdP). En effet, avec une seule plate-forme de force le CdPh ne peut pas être dissocié du CdPc alors qu’il a un rôle primordial à l’équilibre ML quand les pieds sont côte à côte (Fig. 5). Or, cette position de pied est standard dans la vie de tous les jours. Une fois que ces signaux CdP, CdPh, CdPc sont extraits, d’autres modèles peuvent être appliqués pour aller plus loin dans la compréhension du fonctionnement des mé-canismes. Il peut alors être adéquat d’utiliser des analyses non linéaires des séries temporelles comme les analyses de quantifica-tion de la récurrence des signaux (Riley et coll., 1999) ou les ana-lyses fractionnaires de mouvement Brownien (Rougier, 2008).

De futures expériences pourraient étudier plus profondément les relations entre oscillations, coordination posturale et contri-bution des mécanismes posturaux dans des conditions dyna-miques (soit avec des participants réalisant des gestes de façon autoguidée soit avec perturbations de l’environnement comme dans une pièce mobile par exemple). Il serait intéressant d’étudier l’évolution des mécanismes dans des conditions où les individus agissent sur leur environnement (p. ex., pour prendre un objet sur une table), où les individus réalisent une tâche purement co-gnitive (p. ex., compter dans la tête) ou d’autres tâches cognitives avec interaction sensorielle (visuelles et/ou auditives) avec l’envi-ronnement que celles réalisées par Bonnet et coll. (Bonnet et coll., 2014c ; 2015) avec un point apparaissant à droite et à gauche à 40° d’angle visuel et à 0,125 et 0,25 Hz.

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2PARTIE

Les bases neurophysiologiques et intégratives du contrôle postural

S O M M A I R E

Chapitre 1. Bases neurophysiologiques du contrôle postural 23

Chapitre 2. La perception de la verticale 31

Chapitre 3. Interactions équilibration et cognition 39

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1CHAPITRE

Bases neurophysiologiques du contrôle postural

Philippe Dupui

Maître de Conférences des Universités de Physiologie ; praticien hospitalier, neurologue. Laboratoire de Physiologie, Faculté de Médecine de Rangueil, 133, route de Narbonne, 31062 Toulouse cedex ; [email protected]

La posture peut se définir comme étant l’agencement des seg-ments corporels les uns par rapport aux autres et par rap-port à la verticale à un moment donné. Cette définition fait

appel à un référentiel égocentré (le schéma corporel) et exocen-tré (la verticale de la force gravitationnelle). L’équilibre est la fonction qui permet de maintenir une posture stable en dépit des circonstances (externes : forces appliquées sur le corps ou sur la base de sustentation, ou internes : mouvements intentionnels ou réflexes) qui tendent à la perturber. La posture de référence de l’espèce humaine est la posture orthostatique. Il s’agit de la posture érigée du sujet éveillé actif, reposant sur les 2 pieds au sol, proche de la position dite du repos militaire. Cette posture est celle qui est la moins coûteuse en énergie. Le dictionnaire Larousse donne comme synonyme de la posture le terme attitude qui exprime le fait qu’un individu puisse éprouver plus ou moins de difficulté pour contrôler efficacement sa posture et donc l’exprimer dans sa physionomie corporelle. La posture orthos-tatique est rarement maintenue en tant que telle dans la vie cou-rante puisqu’en permanence le sujet évolue dans son environne-ment au gré de son activité : il adopte différentes postures, il se déplace et fait des mouvements qui concernent plus ou moins de segments corporels. Lorsqu’on s’intéresse à la physiologie de la posture, on s’intéresse en fait au contrôle moteur somatique dans toutes ses composantes, c’est-à-dire au contrôle du tonus musculaire qui assure la cohésion des segments corporels et le maintien de la posture statique (lorsque la base de sustentation n’est ni déplacée ni déformée) et au contrôle des réactions mo-trices tonico-phasiques nécessaires à la réalisation d’adaptations

posturales lorsque la base de sustentation se déplace ou se dé-forme et lorsque le sujet réalise des mouvements.

La connaissance de la physiologie du contrôle moteur per-mettant d’avoir des activités posturo-cinétiques (posture, équi-libre, mouvement, locomotion) parfaitement adaptées est abso-lument nécessaire si l’on désire exploiter de manière raisonnée les résultats des examens cliniques et instrumentaux de ces fonctions que l’on trouve actuellement sur le marché.

Le maintien d’une posture érigée stable nécessite une activi-té musculaire de base afi n d’assurer l’agencement des segments corporels pour « lutter » contre la force de gravité. Cette der-nière tend, en permanence, à nous plaquer au sol ; les humains sont les êtres vivants qui subissent le plus le vecteur gravitation-nel puisqu’il s’applique dans le grand axe du corps lorsque nous sommes debout et actifs.

Certains muscles striés squelettiques ont donc une activité de base que l’on peut appeler tonus musculaire. Ce tonus est pré-sent dans les muscles que l’on peut qualifi er d’anti-gravitaires qui sont en fait des muscles extenseurs. En physiologie une extension permet de lutter encore plus contre le vecteur gravitationnel en éloignant davantage le centre de gravité de la base de sustentation (par exemple en se mettant sur la pointe des pieds en contractant les muscles soléaires) alors qu’une fl exion permet d’abaisser le centre de gravité et de la rapprocher de la base de sustentation. Selon les modifi cations environnementales, le système nerveux devra contrôler cette activité musculaire tonique de base et dé-clencher d’éventuelles réactions d’équilibration phasiques dans le but de maintenir en permanence la projection du centre de

S O M M A i r e

1. effecteur concerné : le muscle strié squelettique 24

2. La commande de l’effecteur : unité motrice loi de Henneman 24

3. Contrôle des activités posturo-cinetiques 24

4. Conclusion 28

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24 Partie 2  • Les bases neurophysiologiques et intégratives du contrôle postural

gravité à l’intérieur de polygone de sustentation, afin que le vec-teur masse corporelle (orienté du centre de gravité vers le sol), soit le plus aligné possible avec le vecteur force de réaction du support (orienté vers le haut à partir du point de projection au sol du centre de gravité).

Ce chapitre expose donc la physiologie du contrôle des acti-vités posturo-cinétiques.

1. effecteur concerné : le muscle strié squelettiqueL’effecteur contrôlé par le système nerveux est le muscle strié squelettique. C’est un organe complexe constitué de plusieurs types de fibres recevant chacune une innervation propre par les motoneurones alpha. Burke a défini les différentes fibres consti-tutives d’un muscle strié squelettique. Il distingue :

• les fibres de type I à vitesse de contraction lente, fatigue résis-tante, riches en myoglobine et fonctionnant en métabolisme aé-robie ; elles prédominent dans les muscles rouges impliqués dans le maintien de la posture ;

• les fibres de type II prédominant dans les muscles pâles im-pliqués dans les activités phasiques, peu résistantes à la fatigue, car pauvres en myoglobines et fonctionnant en métabolisme anaérobie. Burke (1981) différencie le sous-groupe IIA dont les fibres développent une force de contraction intermédiaire pen-dant une durée assez courte et un sous groupe IIB dont les fibres peuvent développer une force très importante pendant un temps très court ; ce sont elles qui sont les moins fatigue-résistantes…

Un muscle n’est jamais constitué de seulement un des 2 groupes de fibres : les muscles rouges sont préférentiellement constitués de fibres de type I alors que les muscles pâles contiennent principale-ment des fibres de type II. Selon les types d’entraînement sportif, les alitements prolongés ou les immobilisations, voire les séjours en microgravité, les fibres musculaires peuvent se différencier : des fibres lentes peuvent devenir rapides et vice versa.

2. La commande de l’effecteur : unité motrice loi de HennemanLe muscle strié squelettique est piloté par les motoneurones alpha. Sherrington (1857-1952, Prix Nobel de Médecine et de Physiolo-gie en 1932) a défini l’unité motrice comme étant l’ensemble des fibres striées squelettiques innervées par l’axone d’un même mo-toneurone. Les fibres striées d’une même unité motrice ne sont pas regroupées entre elles. Il est classique de dire que 2 fibres striées squelettiques voisines n’appartiennent jamais à la même unité mo-trice. Les fibres d’une unité motrice sont de même type ; il existe donc des unités motrices toniques : motoneurone alpha innervant des fibres de type I et des unités motrices phasiques. Les unités mo-trices toniques sont constituées de motoneurones alpha dits « pe-tits » ; leur corps cellulaire est petit et le diamètre de leur axone est dans la partie basse de la fourchette du diamètre des axones des motoneurones alpha (entre 18 et 12 micromètres). Les motoneu-rones des unités motrices phasiques ont un diamètre axonal situé

dans la partie haute de la fourchette et leur corps cellulaire est plus grand que celui des précédents. Toutefois, la densité synap-tique sur les dendrites et les corps cellulaires des motoneurones est nettement plus importante sur les petits motoneurones que sur les grands, ce qui fait que, lors d’arrivée d’informations excitatrices sur des connexions synaptiques, les petits motoneurones intègrent plus rapidement les potentiels post-synaptiques excitateurs que les plus grands. Ce sont donc les unités motrices toniques qui sont mises en jeu avant les phasiques, cette constatation a été faite par Henneman et Mendele (1981) et est valable pour n’importe quel acte moteur qu’il soit volontaire ou réflexe.

3. Contrôle des activités posturo-cinetiquesLe schéma de base qui permet d’illustrer les différents systèmes impliqués dans le contrôle moteur se trouve représenté à la Fi-gure 1. Ce schéma permet de montrer la hiérarchisation des sys-tèmes de contrôle de la motricité somatique. Il ne montre pas, par contre, les différentes entrées sensorielles impliquées dans ce contrôle ; c’est pour cela que nous allons brièvement les rappeler.

3.1. Les systèmes sensoriels impliqués dans le contrôle des activités posturo-cinétiquesPlusieurs systèmes afférents essentiels amènent au système ner-veux central les informations nécessaires au maintien de l’équi-libre dans des conditions statiques et dynamiques.

3.1.1. La visionLes photorécepteurs de la rétine (les cônes et les bâtonnets) captent les informations visuelles qui passent ensuite par les voies optiques et se projettent en fin de course sur le cortex cérébral occipital où elles sont décodées. Ces informations permettent l’orientation dans l’espace en donnant des repères visuels de ver-ticalité. Grâce au flux visuel (déplacement de la scène visuelle sur la rétine), la rétine périphérique permet la perception du mou-vement de l’Homme dans l’espace tridimensionnel. Toutefois, ce flux visuel peut être dû à un déplacement de l’individu dans l’environnement (sensation égocentrique de déplacement) ou à un déplacement de l’environnement autour d’un individu immobile

Figure 1. Les différents systèmes sensoriels impliqués dans le contrôle des activités posturo-cinétiques.

Labyrinthe

Pressocepteurscutanée plantaires

Appareilstomato gnathique

Œil

Rachis cervical

Musclesantigravitaires

Articulations

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CHaPitre 1  • Bases neurophysiologiques du contrôle postural 25

(sensation exocentrique de déplacement). La vision seule n’est pas capable de distinguer les deux sources de déplacement, cette inca-pacité peut être à l’origine de conflit sensoriel et donc de malaise.

3.1.2. Les propriocepteurs céphaliques de l’appareil vestibulaireLe système labyrinthique constitue le propriocepteur céphalique sensible aux accélérations linéaires et angulaires de la tête dans l’espace ; il constitue un référentiel extrêmement précis de l’orien-tation spatiale par rapport au vecteur gravitationnel.

Les organes otolithiques (utricule et saccule) sont capables de coder les changements d’inclinaison de la tête (seuil : 1,5°) et les accélérations linéaires (seuil 0,06 m/s–2 ou 0,06G). Ces seuils varient avec le temps d’application du stimulus. Ce sont des indi-cateurs de verticalité et des accéléromètres linéaires pour les mou-vements de translation rapide. Le vecteur gravitationnel (qui est une accélération linéaire s’exerçant dans le grand axe du corps, provoque, en permanence, une activation de ces récepteurs.

Les canaux semi-circulaires (horizontal, vertical antérieur et vertical postérieur) sont branchés sur l’utricule et occupent les 3 plans de notre référentiel galiléen (oxyz). Chaque canal contient du liquide endolymphatique et présente un arc et une ampoule qui contient le récepteur sensoriel ou crête ampullaire. La crête est formée d’une assise de cellules ciliées dont les cils sont empri-sonnés dans un volet mobile, la cupule, qui obture complètement la lumière du canal. Les mouvements de l’endolymphe, provo-qués par des accélérations (ou décélérations) rotatoires, modifient la position de la cupule dans l’ampoule et modifient la fréquence de décharge des afférences reliées aux cellules ciliées. Ces accé-lérations ou décélérations rotatoires peuvent être consécutives à des rotations du tronc ou de l’extrémité céphalique déclenchées par le sujet lui-même en bougeant ou lorsqu’elles sont subies par exemple lorsqu’un sujet se trouve à l’intérieur d’un véhicule : ces accélérations créent des forces inertielles qui mobilisent l’en-dolymphe en sens inverse de l’accélération ou dans le même sens de la décélération. Ces récepteurs sont sensibles aux accélérations angulaires dans le plan de 2 canaux, les canaux horizontaux sont les plus sensibles (seuil : 0,14°.s–2), les autres ont un seuil moyen de 0,5°.s–2. En phase d’accélération, le sujet perçoit une sensation de rotation dans le sens de l’accélération, alors qu’en phase de décélération, il ressent une sensation de rotation en sens inverse. Il faut noter que ces récepteurs ne fournissent aucune indication lors des rotations à vitesse constante et sont incapables de faire la différence entre une accélération dans un sens de rotation donnée et une décélération dans le sens de rotation contraire.

3.1.3. Les récepteurs somesthésiques cutanésLes récepteurs cutanés sont plus ou moins profonds dans l’épi-derme et le derme. Leur densité dépend du territoire considéré. Les récepteurs cutanés (à l’exception des terminaisons libres qui sont impliquées dans la douleur, la thermoréception et la sensi-bilité grossière) sont en relation avec de grosses fibres afférentes myéliniques (Aa) qui remontent par le cordon postérieur homo-latéral de la moelle jusqu’au bulbe (noyaux de Goll et Burdach). Les axones des neurones bulbaires croisent la ligne médiane et remontent, par le lemnisque médian, jusqu’au thalamus. De ce-lui-ci, un troisième neurone se projette sur les aires du cortex so-mesthésique. Certaines fibres de la sensibilité lemniscale émettent des collatérales vers la substance grise de la moelle, sur la forma-tion réticulée ou dans des noyaux du tronc cérébral (y compris

les noyaux vestibulaire). Lorsque le sujet est debout, la force de pesanteur fait naître des sensations de pression et de contact sur les soles plantaires. Les pressocepteurs cutanés plantaires (no-tamment les récepteurs de Pacini) donnent des renseignements sur la position du corps par rapport à son support et donc par rapport au champ de pesanteur ; ils permettent aussi de percevoir les irrégularités du sol et d’adapter les réflexes d’équilibration en conséquence.

3.1.4. Les propriocepteurs myoarticulairesCes récepteurs sont en relation avec des afférences de gros ca-libre qui rejoignent aussi les cordons postérieurs de la moelle. Les informations sont véhiculées, après relais synaptiques, jusqu’au cortex somesthésique qui est ainsi renseigné sur la position des différents segments corporels les uns par rapport aux autres. Ces neurones afférents envoient des collatérales qui se terminent à l’étage, au niveau du tronc cérébral et au cervelet. Ces récepteurs sont à l’origine de boucles réflexes qui jouent un rôle prépondé-rant dans l’entretien et la régulation du tonus musculaire. Parmi les récepteurs concernés, on trouve :

• les fuseaux neuromusculaires sensibles à l’allongement des muscles qui sont à l’origine du réflexe myotatique, dont le rôle est déterminant dans l’apparition et le maintien du tonus des muscles posturaux. Ces récepteurs sont surtout présents dans les mus-cles rouges antigravitaires et sont en permanence stimulés par la présence de la gravité lorsque la station orthostatique doit être maintenue. Le vecteur gravitationnel s’exerçant dans le grand axe du corps tend à mettre en jeu les muscles fléchisseurs et donc à allonger en permanence les muscles extenseurs. Cette tendance à l’allongement des muscles extenseurs s’accompagne d’une ten-dance à l’allongement des fuseaux neuromusculaires et donc à la stimulation des afférences sensorielles des fuseaux ;

• les organes tendineux de Golgi, sensibles à la traction exercée sur le tendon par le muscle qui se contracte ou qui est étiré, qui sont à l’origine du réflexe myotatique inverse, réflexe inhibiteur des motoneurones.

3.1.5. Les récepteurs articulaires situés dans les capsules et les ligaments sont sensibles à la position, à la vitesse, à la direction et aux accélérations des mouvements des articulationsIl existe d’importants propriocepteurs myoarticulaires au niveau du rachis cervical (notamment de C0 à C4). Les informations pro-venant de ces récepteurs jouent un rôle important dans la mise en jeu des réflexes régulant la motilité conjuguée yeux-tête-cou et le tonus musculaire du tronc et des membres lors des changements d’inclinaison du cou. Les muscles oculaires contiennent aussi des récepteurs musculaires et tendineux dont les fibres afférentes se projettent sur des aires corticales somatosensorielles afin d’infor-mer le cortex sur la direction du regard. Des collatérales des affé-rences projetteraient aussi sur les noyaux vestibulaires et le cerve-let. Ainsi, ces récepteurs jouent eux aussi un rôle important dans la motilité conjuguée yeux-tête-cou et participent à la régulation du tonus musculaire du cou, des membres et du tronc. On a pu montrer que dans des cas de strabisme ou d’exo ou d’ésophorie, il pouvait exister de véritables troubles de la posture.

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26 Partie 2  • Les bases neurophysiologiques et intégratives du contrôle postural

3.2. intégration et contrôle centrauxLes informations sensorielles reçues par les différentes entrées décrites ci-dessus vont être intégrées à différents niveaux du sys-tème nerveux central. Ce dernier va donc exercer un contrôle hiérarchisé de la contraction des muscles striés. Par leur activité tonique, les muscles contribuent au maintien d’une posture choi-sie et à la consolidation de la position des différents segments ar-ticulaires. Ceci est un préalable absolument nécessaire pour que, grâce à l’activité phasique des muscles, la réalisation de mouve-ments soit correctement réalisée. Le tonus musculaire est le résul-tat d’une contraction permanente du muscle due à son excitation par les motoneurones a. Le réflexe myotatique constitue le mail-lon déterminant de la genèse de ce tonus ; le tonus musculaire disparaît après section du nerf moteur ou des racines postérieures correspondantes. Le maintien du tonus postural et la réalisation de tout mouvement doivent nécessairement être contrôlés en re-tour par le système nerveux central lui-même afin d’en assurer à tout moment la correction et l’ajustement. Ce feedback est fondé sur des informations proprioceptives (articulaires, tendineuses, vestibulaires...), extéroceptives (cutanées, visuelles...) et sur des informations du programme moteur tel qu’il vient d’être établi par le cortex (copie d’efférence). Le rôle du cervelet serait d’ef-fectuer la comparaison entre la commande initialement créée et l’acte moteur effectivement réalisé.

3.2.1 Intégration et contrôles segmentaires (réflexes à boucle courte)À chaque étage médullaire, le corps cellulaire des motoneurones destinés aux muscles posturaux peuvent être influencés plus ou moins directement (par l’intermédiaire d’interneurones) par des collatérales de neurones afférents primaires. Il existe plusieurs types de boucles réflexes courtes, segmentaires, qui sont capables très rapidement d’influencer l’activation des motoneurones des muscles posturaux et donc de faire varier, afin de l’adapter, le tonus musculaire.

La boucle myotatiqueIl s’agit du réflexe fondamental permettant la conservation de la posture érigée en maintenant le tonus des muscles antigravi-taires (muscles extenseurs). La force de gravité tend en perma-nence à allonger les muscles extenseurs de l’organisme et donc à activer les fuseaux neuromusculaires de ces muscles. Ces fuseaux vont exercer une décharge permanente de leurs afférences (Ia et II) ; ces dernières, grâce à des collatérales d’étage, vont activer les corps cellulaires des motoneurones des muscles extenseurs. Grâce à l’innervation fusimotrice g, le système nerveux central peut adapter la sensibilité statique et dynamique des fuseaux neu-romusculaires et l’adapter aux besoins de la posture ou du mou-vement. La boucle g agit donc comme un modulateur du réflexe myotatique sous l’influence d’actions supra-spinales (figure 2).

Le réflexe myotatique inverse Lors de la mise en jeu des organes tendineux de Golgi, des col-latérales d’étage de leurs afférences (Ib) vont, par l’intermédiaire d’un interneurone inhibiteur, provoquer une diminution de la dé-charge des motoneurones a et donc une tendance au relâchement musculaire. Il s’agit en fait d’un réflexe qui n’agit que dans des conditions extrêmes et qui aurait pour but de protéger le muscle contre une éventuelle désinsertion.

Les réflexes segmentaires d’origine cutanée L’excitation des mécanorécepteurs cutanés entraîne, suivant les cas, un réflexe ipsilatéral de flexion (cas d’un stimulus nocicep-tif), mais surtout le plus souvent des réflexes d’extension ipsi et controlatéraux lors de stimulations des soles plantaires. Il s’agit de réflexes plurisegmentaires faisant intervenir les collatérales de neurones afférents primaires de petit calibre (fibres de la douleur ou de la sensibilité protopathique) qui vont activer à différents étages de la moelle des trains d’interneurones excitateurs et/ou inhibiteurs. La présence, au niveau de la sole plantaire, d’une « épine irritative » qui ne provoque pas forcément une sensation douloureuse, peut malgré tout mettre en jeu les afférences de petit calibre. Ces dernières, en renseignant des interneurones, provo-queront l’inhibition de motoneurones alpha des muscles exten-seurs et la facilitation des motoneurones des muscles fléchisseurs du même côté du corps (le patient soulagera les appuis sur le pied où se trouve l’épine irritative). En même temps, ces mêmes affé-rences de petit calibre, par d’autres interneurones dont l’axone du premier traversera la ligne médiane, faciliteront les motoneu-rones alpha des extenseurs et inhiberont les motoneurones alpha des muscles fléchisseurs de l’hémicorps opposé (réflexe d’adap-tation posturale). Ce réflexe a été dénommé réflexe ipsilatéral de flexion controlatérale d’extension (figure 4). La présence d’une asymétrie posturale devra amener le clinicien a inspecter l’état des appuis podaux !

3.2.2. Intégration et contrôles supra-segmentaires (réflexes à boucle longue)Des collatérales des afférences primaires, en relation avec les ré-cepteurs sensoriels impliqués dans le contrôle des activités pos-turo-cinétiques, peuvent se projeter sur des structures du tronc cérébral qui elles-mêmes sont capables, par l’intermédiaire de faisceaux descendants, de contrôler l’activité des motoneurones des muscles striés. Parmi ces structures, le complexe nucléaire

Figure 2. Organisation du réflexe myotatique et rôle de la boucle gamma.

Figure 3. Le réflexe myotatique inverse.

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CHaPitre 1  • Bases neurophysiologiques du contrôle postural 27

vestibulaire joue un rôle particulier ; la formation réticulée peut elle aussi, mais de manière nettement moins spécifique que les noyaux vestibulaires, influencer la motricité somatique.

Rôle intégratif des noyaux vestibulaires et contrôle vestibulo-spinal de la motricité Les noyaux vestibulaires sont une formation paire du tronc cé-rébral ; de chaque côté, un complexe nucléaire vestibulaire est formé de 4 noyaux principaux (supérieur, médian, latéral et des-cendant ou noyau de Deiters) et de groupes cellulaires adjacents. Chaque groupe a une fonction plus ou moins spécialisée selon l’origine de leurs afférences respectives. Les afférences labyrin-thiques projettent sur tous les noyaux de manière strictement ipsilatérale. Les noyaux vestibulaires sont aussi informés par les stimulations visuelles rétiniennes via le système optique ac-cessoire et les noyaux du tractus optique. Les noyaux latéral, médian et descendant reçoivent aussi des projections spinovesti-bulaires directes ou indirectes par l’intermédiaire de collatérales des voies spino-cérébelleuses. Ces informations proviennent de propriocepteurs myoarticulaires des régions cervicales dorsales et lombaires et même des propriocepteurs des muscles extraocu-laires homolatéraux. Des informations provenant de collatérales des branches inférieures du V (V2 et V3) se projettent aussi sur le groupe vestibulaire descendant. Cette dernière constatation

connue depuis les travaux de l’école Espagnole de Llorente de No et de Ramon y Cajal dans les années 1930 (cités par Brodal en 1971 dans le Hand Book of Sensory Physiology) est le fondement physiologique des troubles posturaux que l’on peut rencontrer lorsqu’un patient présente des anomalies de l’occlusion dentaire avec une réafférentation asymétrique par les trijumeaux droit et gauche des noyaux vestibulaires droit et gauche.

Les efférences des noyaux vestibulaires à destinée spinale (La-cour et Borel, 1993) se projettent sur les motoneurones a et g des muscles paravertébraux et antigravitaires des membres inférieurs au niveau de la corne antérieure de la moelle en empruntant 2 voies différentes.

Le faisceau vestibulo-spinal latéral, principalement originaire du noyau vestibulaire latéral et à un degré moindre du noyau descendant, se distribue de manière homolatérale aux étages mé-dullaires thoraco-lombaires ; les fibres de cette voie se terminent directement sur les motoneurones a des extenseurs ou le plus souvent sur des interneurones excitateurs pour les motoneu-rones a et g des muscles extenseurs et sur des interneurones inhi-biteurs pour les motoneurones a et g des muscles fléchisseurs. La boucle g des extenseurs ainsi mise en jeu fonctionne comme un dispositif sensibilisant assurant un contrôle continu et doux, tan-dis que le système a produit une contraction rapide et puissante. Ce contrôle supraspinal vestibulaire de la boucle g joue un rôle très important dans la régulation de la posture et de l’équilibre somatique.

Le faisceau vestibulo-spinal médian naît des noyaux vestibu-laires médians et descendants et se distribue bilatéralement aux motoneurones et interneurones de la moelle cervicale. Il joue un rôle important dans les interactions cervico-vestibulo-oculaires.

Si les troubles du tonus des muscles posturaux sont parfaite-ment connus lorsqu’un sujet présente un syndrome labyrinthique central ou périphérique (test de Romberg et test de Fukuda per-turbés, déviation des index, marche non rectiligne, etc.), il est classique d’en rencontrer lorsque les autres afférences des noyaux vestibulaires sont altérées. Par exemple, une pathologie cervicale et un trouble de l’occlusion dentaire peuvent induire des asymé-tries de répartition du tonus musculaire sur les muscles posturaux entre les 2 hémicorps et engendrer des manifestations cliniques à type de raideurs rachidiennes, instabilité posturale, fatigabilité, troubles du sommeil… Il conviendra donc de vérifier que ce type

Figure 4. Les réflexes de flexion ipsilatéral et d’extension controlatérale.

Figure 5. Contrôle vestibulo-spinal du tonus musculaire et rôle intégratif des noyaux vestibulaires (seul le noyau droit est représenté). Le sujet est de face, la ligne en pointillés représente l’axe de symétrie entre côté droit et gauche du tronc cérébral et de la moelle épinière (d’après Lacour et Borel, 1993).

CerveletLabyrinthe

V2 et V3Afférences des muscles para-vertébraux et des

muscles du cou

Noyaux VestibulairesS : Supérieur L : Latéral M : Médian D : Dieters

SL

MD

Étage thoracique

Étage lombaire

F. V

est-S

pina

l Lat

.

FLECH. EXT.

++- -g +

a ga+

Étage cervical

F. V

-Sp.

Méd

.

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Table des maTières

253 Table des maTières

introduction : approche de la posture et de l’équilibration humaines 1

Partie 1 les bases mécaniques de l’équilibration humaine

1 Bases biomécaniques du contrôle postural 5

1. Introduction 5

2. Référentiel et formalisme 5

3. Rappels élémentaires de mécanique 6

4. Modélisation biomécanique et contrôle postural 6

5. Biomécanique de la posture érigée 65.1. La posture vue comme un phénomène statique 6

5.2. La notion de stabilité posturale 8

5.3. La posture vue comme un phénomène dynamique 8

5.4. Critiques du modèle du pendule inversé simple 9

6. Conclusion 9

2 Approche biomécanique des mécanismes du contrôle postural 11

1. Introduction sur l’équilibre et sur les mécanismes du contrôle postural 11

1.1. Le poids du corps et la réaction du support 11

1.2. Deux mécanismes distincts en station debout sans mouvement et sans perturbation 12

2. Modélisation biomécanique pour étudier les deux mécanismes 13

2.1. Équations de Rougier 13

2.2. Calcul de la contribution des mécanismes  14

2.2.1. Méthode employée avant 2013 14

2.2.2. Méthode utilisée depuis Bonnet et coll. 15

3. Résultats principaux obtenus grâce au modèle 16

3.1. Résultats principaux découverts avec de jeunes adultes 16

3.2. Résultats chez les personnes d’âge moyen (50-60 ans), les patients diabétiques et les patients parkinsoniens 16

4. Limites du modèle 184.1. Le contrôle postural ML se fait différemment du contrôle

postural AP 18

4.2. Le modèle biomécanique ne peut pas reporter la coordination posturale 19

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254 Table des maTières

4.3. Le modèle biomécanique ne permet pas de connaître ce qui détermine la contribution des mécanismes 19

5. Perspectives 20

Partie 2 les bases neurophysiologiques et intégratives du contrôle postural

1 Bases neurophysiologiques du contrôle postural 23

1. Effecteur concerné : le muscle strié squelettique 24

2. La commande de l’effecteur : unité motrice loi de Henneman 24

3. Contrôle des activités posturo-cinetiques 24

3.1. Les systèmes sensoriels impliqués dans le contrôle des activités posturo-cinétiques 24

3.1.1. La vision 24

3.1.2. Les propriocepteurs céphaliques de l’appareil vestibulaire 25

3.1.3. Les récepteurs somesthésiques cutanés 25

3.1.4. Les propriocepteurs myoarticulaires 25

3.1.5. Les récepteurs articulaires situés dans les capsules et les ligaments sont sensibles à la position, à la vitesse, à la direction et aux accélérations des mouvements des articulations 25

3.2. Intégration et contrôle centraux 26

3.2.1 Intégration et contrôles segmentaires (réflexes à boucle courte) 26

3.2.2. Intégration et contrôles supra-segmentaires (réflexes à boucle longue) 26

4. Conclusion 28

2 La perception de la verticale 31

1. La mesure du sens de verticalité 32

2. La verticale visuelle 33

3. La verticale posturale 34

4. La verticale haptique 35

5. Conclusion 36

3 Interactions équilibration et cognition 39

1. Introduction 39

2. Fonctions cognitives impliquées dans la posture 40

2.1. L’attention 40

2.1.1. L’attention sélective 41

2.1.2. L’attention divisée 41

2.2. La mémoire de travail 41

3. Interaction posture-cognition 42

4. Contribution des mécanismes cognitifs au contrôle de l’équilibre et de la marche 44

4.1. Chez l’adulte jeune ou d’âge moyen 44

4.2. Chez l’adulte âgé 44

4.3. Chez le sujet chuteur ou présentant une atteinte de l’équilibre 46

4.4. Chez le sujet présentant une atteinte cognitive 47

5. Renforcer la cognition pour améliorer l’équilibre et la marche 48

6. Conclusions et perspectives 49

Partie 3 la fonction sensorielle

1 Contrôle visuel de l’orientation et de l’équilibre postural 55

1. Posture, orientation spatiale et référentiels spatiaux 56

2. Contrôle postural : aspects généraux 572.1. La posture : une superposition de modules articulés 58

2.2. La posture orientée 59

2.3. Les deux fonctions du contrôle postural : orientation et stabilisation 59

2.4. Schéma corporel postural 60

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3. Contribution de la vision au contrôle postural 60

3.1. Stabilisation et vision 61

3.1.1. Aspects généraux 61

3.1.2. Vision du mouvement versus position 62

3.1.3. Aspects comparés 62

3.1.4. Aspects différentiels 62

3.2. Orientation posturale et vision 63

3.2.1. Cinématique 63

3.2.2. Statique 65

4. Contrôle multisensoriel de l’équilibre postural 65

4.1. Intégration multisensorielle et principe de repondération sensorielle 65

4.2. Principe d’estimation optimale, théorie bayésienne et du maximum de vraisemblance 66

5. Conclusion 67

2 Système vestibulaire et contrôle postural 73

1. Anatomie 731.1. Labyrinthe vestibulaire osseux 74

1.2. Labyrinthe vestibulaire membraneux 74

1.3. Deux organes otolithiques se situent dans le vestibule : l’utricule et le saccule 75

1.4. Afférences vestibulaires 75

1.5. Noyaux vestibulaires 75

2. Physiologie 752.1. Réflexe vestibulo-oculaire 75

2.2. Réflexe sacculo-collique 76

2.3. Réflexes vestibulo-spinaux 76

3. Spécialisation des capteurs 76

4. Performance de la fonction d’équilibration 76

4.1. Fonction d’équilibration et disciplines acrobatiques 76

4.2. Pertes d’équilibre ou de figure dans la pratique des disciplines acrobatiques 77

4.3. Conflit sensoriel, mal des transports et sport 77

5. Exploration fonctionnelle 775.1. À la recherche d’une atteinte labyrinthique 77

5.2. À la recherche d’une pathologie de l’angle pontocérébelleux 77

5.3. À la recherche d’une pathologie autre qu’otoneurologique 77

5.4. Place de la posturographie 78

6. Rééducation 79

3 Proprioception et contrôle postural 81

1. Introduction 81

2. Définitions 81

3. Les propriocepteurs 833.1. Les fuseaux neuromusculaires 83

3.2. Les organes tendineux de Golgi 84

3.3. Les corpuscules de Ruffini 85

3.4. Les corpuscules de Pacini 85

3.5. Les corpuscules de Golgi-Mazzoni 85

3.6. Les récepteurs cutanés 85

3.6.1. Les disques de Merkel 85

3.6.2. Les corpuscules de Meissner 85

3.6.3. Les corpuscules de Ruffini 85

3.6.4. Les corpuscules de Pacini 85

4. Intégration sensorielle 85

5. Évaluation 865.1. Sens de la position (des articulations) 86

5.2. Kinesthésie (sens du mouvement) 87

5.3. Sens de la production de force 87

5.4. Tests d’équilibre 87

6. Facteurs pouvant influencer la proprioception 87

6.1. Fatigue 87

6.2. Vieillissement 88

6.3. Arthrite 89

6.4. Instabilité et contention 89

6.5. Réhabilitation, réentraînement 90

255 Table des maTières

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4 Sensibilité cutanée plantaire et contrôle postural 95

1. Stimulations du système podal 951.1. Présentation, anatomie, physiologie 95

1.2. Les récepteurs : mécanorécepteurs et nocicepteurs 96

1.2.1. Mécanorécepteurs 96

1.2.2. Nocicepteurs 97

1.2.3. Terminaisons libres 97

1.3. Conduction de l’afférence sensorielle 97

1.4. Innervation de la sole plantaire 97

1.5. Perception et transmission de l’information 98

2. Les différences régionales et la fonction 98

3. Modulation de l’information sensorielle du système podal 100

3.1. Modulation inhibitrice 100

3.2. Modulation facilitatrice 100

4. Stimulations du système podal 1004.1. Stimulations proprioceptives 100

4.2. Intégrations plantaires suite à des stimulations spécifiques 100

4.3. Co-stimulation et modulation de l’afférence plantaire 101

4.3.1. Stimulation par BRC sur différents supports : plat et thermoformé 101

4.3.2. Multistimulations sur différents supports : plat et thermoformé 101

4.4. Stimulation et pratique physique réelle et imaginée 101

4.5. Stimulation spécifique coin calcanéen interne et cognition 101

5. Conclusion 101

Partie 4 Posture, équilibre et mouvement

1 Effets de la cinématique respiratoire sur l’équilibre postural 107

1. Introduction 107

2. Effet de la posture adoptée par le sujet sur la perturbation respiratoire 107

3. Effet de la cinématique thoraco-abdominale sur la perturbation respiratoire 108

4. Effet spécifique de la contraction diaphragmatique sur la posture 109

5. Variation de la perturbation respiratoire chez le patient lombalgique et chez le senior 110

6. Conclusion 111

2 Les ajustements posturaux anticipés 113

1. Introduction 113

2. Méthodes d’évaluation des ajustements posturaux anticipés 114

2.1. Caractéristiques temporelles des APA 114

2.2. Caractéristiques d’intensité des APA 114

3. Fonctionnalité des APA 1153.1. APA et mouvements avec base de support fixe 115

3.2. APA et mouvements avec modification de la base de support 117

4. Conclusion : les APA, un rôle postural ou focal ? 117

3 Mobilité articulaire, ajustements posturaux et mouvement volontaire 119

1. Introduction 119

2. Phénomènes posturaux et mouvement 120

3. Analyse de la dynamique posturale lors de montées de force maximales en posture assise et ajustements posturaux dynamiques associés 120

4. Réduction du contact ischio-fémoral et performance 121

5. Effets du contact ischio-fémoral sur le recrutement des muscles posturaux et focaux lors de montées de force isométriques 124

256 Table des maTières

Page 41: le fonctionnement et le développement de l’équilibration ... · tion de l’équilibration et du contrôle postural, mais aussi les aspects théoriques et pratiques de la rééducation,

6. Pattern musculaire et dynamique posturale 124

7. Effets du contact ischio-fémoral sur le recrutement musculaire 125

8. Génération de la force et programmation de la tâche 125

9. Influence de la fatigue musculaire sur l’organisation des ajustements posturaux associés aux montées et aux maintiens de forces isométriques exécutées en posture assise 126

10. Modification du plan de coordination musculaire avec la fatigue dans la chaîne focale et posturale 126

11. Effets des caractéristiques de glissance des surfaces d’appui et de l’aire de contact avec l’assise sur la performance et la dynamique posturale 127

12. Conclusion 128

4 Coordination entre la posture et le mouvement. Le cas de la marche en courbe 131

1. Introduction 131

2. La capacité posturo-cinétique : les ajustements posturaux anticipés 131

2.1. Exemples de mouvements coordonnés 132

2.2. Les ajustements posturaux consécutifs 132

2.3. L’exemple de la fatigue 132

3. La capacité posturo-cinétique : la coordination entre posture et mouvement en conditions dynamiques 133

4. La marche humaine 1334.1. L’initiation de la marche 134

4.2. La coordination entre posture et mouvement pendant la marche 134

4.3. La marche en courbe 134

4.3.1. Les forces générées par l’action des pieds 136

4.3.2. Le placement des pieds et la création des couples de déséquilibration 136

4.4. La proprioception des muscles de l’axe corporel et ses effets sur la direction de marche 137

4.5. La marche en courbe chez les patients 138

Partie 5 morphologie et contrôle postural

1 Influence des facteurs anthropométriques sur le contrôle postural 143

1. Introduction 143

2. Modalités d’évaluation des caractéristiques anthropométriques 144

3. Effets de la taille 145

4. Effets de la masse corporelle 1454.1. Maigreur et contrôle postural 145

4.2. Surpoids et contrôle postural 146

5. Effets d’une asymétrie des membres inférieurs 147

6. Effets d’une déformation structurelle du rachis 147

7. Conclusion 148

2 Influence du pied et de sa morphologie sur le contrôle postural 151

1. Rappels anatomophysiologiques 1511.1. Ostéologie 151

1.2. Arthropologie 151

1.2.1. L’arrière-pied 151

1.2.2. L’avant-pied 152

1.3. Myologie 152

1.3.1. Myologie extrinsèque 152

1.3.2. Myologie intrinsèque 152

1.4. Neurologie/innervation 152

257 Table des maTières

Page 42: le fonctionnement et le développement de l’équilibration ... · tion de l’équilibration et du contrôle postural, mais aussi les aspects théoriques et pratiques de la rééducation,

2. Pied, système podal et fonction d’équilibration 153

2.1. Contraintes mécaniques 153

2.2. Limites de stabilité et verticalité 153

2.3. Ajustements posturaux anticipateurs et compensateurs 153

2.4. Posture et réponses posturales 154

2.5. Orientation et intégration sensorielles 154

2.6. Stabilité lors de la marche et du mouvement 154

3. Système podal, fonction d’équilibration et cognition 154

Partie 6 Âge et contrôle postural

1 Développement perceptivo-moteur de l’enfant et de l’adolescent et contrôle postural 159

1. Introduction  159

2. Importance de la perception du mouvement humain (MH) 159

3. Stratégies d’équilibre et développement sensori-moteur 160

4. Nécessité d’un contrôle prédictif et représentations internes de l’action 162

5. Contrôle postural et repondération sensorielle au cours de l’ontogenèse 163

6. Schéma corporel : une approche neurosensorielle 163

7. L’intégration proprioceptive mature tardivement au cours de l’ontogenèse 164

8. Conclusion 165

2 Effets du vieillissement sur la fonction d’équilibration 167

1. Introduction 167

2. La chute de la personne âgée : un fait de société 167

3. Le profil du chuteur 168

4. Le processus inducteur de la chute 1684.1. Le vieillissement 168

4.2. L’inactivité physique 168

5. Le risque de chute 1685.1. Les causes de la chute 168

5.2. Relation entre la chute et les capacités d’équilibration 168

5.3. Évaluation du risque de chute : un test simple 168

5.4. Altération des capacités d’équilibration 169

6. La fonction d’équilibration 1696.1. Les organes de la vision 169

6.2. Le système vestibulaire 169

6.3. La proprioception 170

6.4. La sensibilité cutanée plantaire 170

6.5. L’organe support : le pied 170

6.6. Les structures centrales 171

6.7. Les effecteurs 172

6.7.1. Aspects structurels 172

6.7.2. Aspects fonctionnels 174

6.7.3. Influence des capacités de force sur les capacités d’équilibration 174

6.8. Conclusion 175

7. Les capacités d’équilibration 1757.1. Les performances posturales 175

7.2. Les stratégies posturales 176

8. Relation entre les capacités d’équilibration et la locomotion 177

9. Conclusion 177

Partie 7 activité physique et contrôle postural

1 Apprentissage moteur et contrôle postural chez l’enfant 183

1. La posture : généralités 183

258 Table des maTières

Page 43: le fonctionnement et le développement de l’équilibration ... · tion de l’équilibration et du contrôle postural, mais aussi les aspects théoriques et pratiques de la rééducation,

2. La posture de l’enfant 185

3. Qu’en est-il pour l’enfant ? 186

2 Activité physique et contrôle postural chez la personne vieillissante 191

1. Introduction 191

2. Les risques d’accident au cours de l’activité physique chez les personnes âgées 191

3. Activité physique et motricité de la personne âgée 192

4. Effets préventifs de l’activité physique sur la fonction d’équilibration 193

4.1. Le choix de la pratique physique 193

4.2. Les effets de différentes activités pratiquées isolément 193

4.3. Une forme d’activité particulièrement efficace : la double tâche 193

4.4. La pratique d’activités physiques combinées  194

5. Adaptations fonctionnelles sur les fonctions sensorielles et motrices 194

6. Durabilité des adaptations fonctionnelles 195

7. Exemple de programme visant spécifiquement le développement et/ou l’entretien de la fonction d’équilibration 195

7.1. Développement des qualités de force et d’équilibration 196

7.1.1. Mode d’exercice  196

7.1.2. Intensité 196

7.1.3. Durée 196

7.1.4. Fréquence 196

7.1.5. Contexte de mise en œuvre 196

7.2. Les activités cognitives 197

8. Conclusion 197

3 Sport et contrôle postural chez l’adulte 201

1. Introduction 201

2. Effet des spécificités des différents sports 201

2.1. Sports artistiques 202

2.2. Arts martiaux et sports de combat 202

2.3. Autres sports individuels 203

2.4. Sports collectifs 203

3. Effet de l’expertise sportive 2033.1. Effet du niveau de pratique 203

3.2. Effet de l’entraînement 204

4. Effet de l’intensité de l’activité physique 2044.1. Influence de la fatigue induite par l’activité physique 204

4.2. Influence de la déshydratation induite par l’activité physique 205

5. Effet des blessures dues au sport 2055.1. Lésions de l’appareil musculo-squelettique :

exemple de la lésion du LCA 205

5.2. Évaluation clinique et rééducation : exemple de la lésion du LCA 205

6. Influence de la pratique physique sur les accidents, dont les chutes, chez l’homme au travail 206

7. Influence de l’activité physique sur le contrôle postural selon l’âge 206

8. Conclusion 207

4 Les effets immédiats de l’exercice physique fatigant sur le contrôle postural 213

1. Introduction (déstabiliser pour comprendre…) 213

2. La fatigue musculaire 213

3. Effet direct de la fatigue musculaire sur l’équilibre postural (orthostatique) 214

4. Effet indirect de la fatigue sur la posture : modulation de la coordination posture-mouvement 215

259 Table des maTières

Page 44: le fonctionnement et le développement de l’équilibration ... · tion de l’équilibration et du contrôle postural, mais aussi les aspects théoriques et pratiques de la rééducation,

5. Spécificités de la fatigue musculaire électro-induite 217

Partie 8 les facteurs matériels et environnementaux

1 Analyse instrumentale du contrôle postural et de la posture 223

1. Les systèmes d’analyse de la posture statique 223

1.1. Les plates-formes de forces à 3 capteurs 223

1.1.1. Principe et caractéristiques 223

1.1.2. Déroulement d’un examen 224

1.1.3. Résultats 224

1.2. Évolutions technologiques 226

1.2.1. Analyse du signal par ondelettes 226

1.2.2. Le système Fusyo de la société Médicapteur 229

2. Les systèmes d’analyse de la posture dynamique 229

2.1.1. Les plates-formes servocommandées 230

2.1.2. La plate-forme mobile à bascule 230

3. Conclusion  231

2 La rééducation de la marche assistée par robotique 235

1. Bref historique 236

2. Le Lokomat®, un système robotisé pour la rééducation de la marche 237

2.1. Description de l’outil 237

2.2. La rééducation robotisée chez des enfants IMC 238

3 Micropesanteur et mécanismes de contrôle de l’équilibre et de la posture 243

1. Référentiel géocentrique gravitaire et représentation du corps dans l’espace 243

2. Quand le référentiel gravitaire est absent 244

3. Référentiel égocentrique et pondération des afférences sensorielles 245

4. Pondération des afférences sensorielles en micropesanteur 247

5. Référentiel allocentrique et représentation du corps dans l’espace en micropesanteur 248

6. Conclusion 248

Conclusion l’évolution des connaissances sur la posture et l’équilibration humaines 251

260 Table des maTières

Page 45: le fonctionnement et le développement de l’équilibration ... · tion de l’équilibration et du contrôle postural, mais aussi les aspects théoriques et pratiques de la rééducation,
Page 46: le fonctionnement et le développement de l’équilibration ... · tion de l’équilibration et du contrôle postural, mais aussi les aspects théoriques et pratiques de la rééducation,

Posture et équilibration humaines

collection Posture, équilibre & mouvement

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Rester en équilibre et marcher en appui bipodal sont deux facultés qui paraissent anodines alors qu’elles nécessitent non seulement des mécanismes de contrôle élaborés, mais aussi une coordination entre la posture, l’équilibre et la locomotion.

Équilibration normale et pathologique

Afin de mieux comprendre ces rouages, les auteurs de cet ouvrage rappellent le fonctionnement et le développement de l’équilibration humaine (à la fois chez les sujets sains et pathologiques, jeunes et âgés, sportifs et sédentaires) et abordent la posture et l’équilibration humaines de façon multidisciplinaire (biomécanique, anatomique, neurophysiologique, neurobiologique, psychologique).

Évaluation et rééducation

Ils expliquent en détail non seulement les techniques et méthodes d’évalua-tion de l’équilibration et du contrôle postural, mais aussi les aspects théoriques et pratiques de la rééducation, sans oublier de livrer les récents résultats issus de la recherche.

PublicsÉtudiants et enseignants (master et recherche) en sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS), kinésithérapie, sciences du mouvement humain, médecine physique et réadaptation, médecine du sport, neurologie, podologie.

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ISBN : 978-2-35327-314-0EQUIMO

www.deboecksuperieur.com

Sous la direction de Thierry Paillard

http://deboecksuperieur.com : la version numérique de votre ouvrage

• 24h/24, 7 jours/7

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• Sur PC et tablette