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Année Universitaire 2011-2012 Emmanuelle Durieux Le « fait main » a-t-il sa place dans le prêt-à-porter féminin moyen de gamme ? Peut-il être source de développement ? Comment l’intégrer à une stratégie d’entreprise ? Mémoire de Recherche En vue de l’obtention du Diplôme Universitaire d’Etudes et de Recherches sur la Mode Sous la direction de Caroline Bianzina

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Année Universitaire 2011-2012

Emmanuelle Durieux

Le « fait main » a-t-il sa place dans le prêt-à-porter féminin moyen de gamme ?

Peut-il être source de développement ?

Comment l’intégrer à une stratégie d’entreprise ?

Mémoire de Recherche

En vue de l’obtention du Diplôme Universitaire d’Etudes et de Recherches sur la Mode

Sous la direction de Caroline Bianzina

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AVANT PROPOS

Issue d’une formation artistique spécialisée dans le design de mode et le modélisme industriel, je suis attirée dans la création contemporaine par l’utilisation des savoir-faire traditionnels remis au goût du jour. Travaillant depuis trois ans dans une entreprise de prêt-à-porter féminin moyen haut de gamme, j’ai souhaité trouver des solutions pour intégrer cette particularité de production dans mes créations. Ce choix fut guidé par mes influences culturelles. Depuis quelques saisons, les méthodes artisanales dans la création de mode se sont affirmées comme une véritable tendance, bouleversant l’histoire de l’évolution industrielle.

La question « Comment intégrer du « fait main » dans une production de prêt-à-porter féminin moyen de gamme ? » m’a paru évidente.

Au fil de mes interviews, je me suis aperçue que le sujet dépassait le cadre de l’entreprise et se trouvait au point d’intersection d’une pluralité de problématiques techniques, sociales, politiques et économiques mondiales. L’objet de ce mémoire n’est pas d’approfondir une piste en particulier. Il a pour but de développer un guide d’utilisation à la disposition des entreprises, qui permettrait de valoriser les savoir-faire liés au « fait main », à travers des pistes de stratégie de développement, de production, de commercialisation et de communication de ce type de produit.

La mode présente la particularité d’être à la fois une industrie et un art. J’ai souhaité, avec ce travail, rendre hommage à la communauté des artisans, qui recherche l’unicité, le « fait main », la virtuosité.

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REMERCIEMENTS

Je souhaite remercier tout d’abord mon maître de mémoire Madame Caroline Bianzina qui m’a accompagnée avec enthousiasme tout au long de la réalisation de ce mémoire.

Mes remerciements s’adressent également à Madame Evelyne Amanieu et Monsieur Hervé Barge pour l’intérêt qu’ils ont accordé à mon sujet en acceptant d’être membre de mon jury de soutenance.

Et je souhaite aussi particulièrement remercier Monsieur Hubert Barrère, directeur artistique des Ateliers Lesage, créateur, corsetier et brodeur, Monsieur Pascal Gautrand, designer, consultant et professeur à l’IFM ; et Monsieur Frédéric Godart, éminent spécialiste en sociologie de la mode, pour leurs conseils toujours pertinents, pour le temps qu’ils ont consacré à répondre à mes questions et pour m’avoir permis de mener à bien mon projet.

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INTRODUCTION

Certains secteurs tels que le design d’objet, la maroquinerie, l’horlogerie, la chaussure ont conservé une forte propension de confection « fait main », symbole de qualité, d’éthique ou encore de crédibilité, s’appuyant sur des savoir-faire ancestraux. Cependant, nous nous apercevons en observant les moyens de productions actuels de l’habillement, que même la mode de luxe s’est automatisée. Les pièces sont pour la quasi-totalité réalisées par des processus industriels. Seule l’ornementation de la pièce d’habillement conserve une partie réalisée à la main. L’utilisation de la main dans l’habillement tend vers le luxe, au profit d’une clientèle d’initiés. Pourtant, nous observons aujourd’hui que la pratique du « fait main » revient en force chez les marques-enseignes haut de gamme.

Ce mémoire a pour objectif de cerner si cette pratique constitue une menace ou une opportunité pour les marques-enseignes moyen de gamme et de voir quelles solutions peuvent être mises en œuvre pour remédier aux écueils éventuels. Il s’agit dès lors de mettre en avant les facteurs clés de succès pour une bonne pratique du « fait main ».

Le « fait main » a-t-il sa place dans le prêt-à-porter féminin moyen de gamme ?

Quelles sont ses limites ? Quelle valeur peut-il apporter ?

Comment l’intégrer à une stratégie d’entreprise ?

Telles sont les questions que nous aborderons dans ce mémoire.

Cette étude met en évidence le « fait main » florissant dans le secteur de l’habillement industriel et le patrimoine artisanal, souligne l’éthique de ses méthodes de production, privilégie une sensibilité d’avant-garde et s’inscrit dans une dynamique de réussite.

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Sommaire AVANT PROPOS ...................................................................................................... 1

REMERCIEMENTS ................................................................................................... 2

INTRODUCTION ...................................................................................................... 3

I. Etat des lieux : le « fait main » dans le prêt-à-porter ........................................ 6

A. Définition du sujet .......................................................................................................... 6 1. Le contexte ............................................................................................................................... 6 2. Le « fait main » ......................................................................................................................... 6 3. Le prêt-à-porter féminin .......................................................................................................... 7 4. Le prêt-à-porter moyen de gamme .......................................................................................... 9

B. L’historique de la confection ........................................................................................ 10 1. La confection .......................................................................................................................... 10 2. Le prêt-à-porter ...................................................................................................................... 13 3. Les nouveaux défis et les nouvelles créativités ...................................................................... 17

C. Un nouvel essor ............................................................................................................ 19 1. Une valeur symbolique .......................................................................................................... 19 2. Des tendances ........................................................................................................................ 21

D. Les différentes applications du « fait main » dans le prêt-à-porter ............................. 25 1. Le « fait main » incontournable en production ..................................................................... 25 2. Le façonnage matière première ............................................................................................. 26 3. La confection .......................................................................................................................... 27 4. Les traitements et ennoblissements ...................................................................................... 27 5. L’ornementation .................................................................................................................... 28 6. Une cartographie des savoir-faire .......................................................................................... 29

II. Entre contraintes et valeurs ajoutées ............................................................. 30

A. Economiques ................................................................................................................ 30 1. Le coût d’une singularité ........................................................................................................ 30 2. Le niveau de gamme .............................................................................................................. 31 3. Un dilemme stratégique ........................................................................................................ 33

B. Techniques .................................................................................................................... 34 1. Une qualité ............................................................................................................................. 34 2. Des savoir-faire et techniques qui se perdent ....................................................................... 35 3. Ouverture du marché ............................................................................................................. 37

C. Juridiques ...................................................................................................................... 39 1. Les problématiques géopolitiques ......................................................................................... 39 2. Le protectionnisme ................................................................................................................ 41

D. Ethiques ........................................................................................................................ 45 1. La dimension social du « fait main » ...................................................................................... 45 2. Des responsabilités environnementales ................................................................................ 49

E. Récapitulatif des opportunités et menaces .................................................................. 52

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III. Vers la construction d’un modèle idéal ....................................................... 54

A. Le marché ..................................................................................................................... 54 1. Un marché de niche ............................................................................................................... 54 2. Le consommateur .................................................................................................................. 55 3. Le prix et le niveau de gamme .............................................................................................. 61 4. Analyse de l’intensité concurrentielle .................................................................................... 66

B. L’offre ............................................................................................................................ 69 1. Le produit ............................................................................................................................... 69 2. Un double rythme de collection ............................................................................................. 72 3. Une hybridation de la production .......................................................................................... 74 4. Une déstandardisation du produit ......................................................................................... 78

C. La visibilité .................................................................................................................... 82 1. Une réelle stratégie d’identité et de marque ........................................................................ 82 2. Les circuits de distribution ..................................................................................................... 84 3. La communication .................................................................................................................. 90

D. Le bilan de la stratégie .................................................................................................. 97 1. La base de marketing mix....................................................................................................... 97 2. A long terme ........................................................................................................................... 98 3. L’analyse SWOT ...................................................................................................................... 99

Conclusion .......................................................................................................... 103

Glossaire ............................................................................................................ 104

Annexes ............................................................................................................. 106

ANNEXE 1 _ INTERVIEWS DE PROFESSIONNELS DE LA MODE............................................ 106

ANNEXE 2 _ DIFFERENTES APPLICATIONS .......................................................................... 143

ANNEXE 3 _ CORRESPONDANCE ENTRE HAUSSE DES EXPORTATIONS ET BAISSE DES EMPLOIS LOCAUX ............................................................................................................... 149

ANNEXE 4 _ ETUDE DES CONSOMMATRICES ..................................................................... 150

ANNEXE 5 _ LES AVIS DE CONSOMMATRICES. ................................................................... 152

ANNEXE 6 _ ETUDE DU MARCHE DES ENSEIGNES .............................................................. 176

ANNEXE 7 _ QUELQUES ENSEIGNES DE PRET-A-PORTER FEMININ .................................... 177

Bibliographie...................................................................................................... 188

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I. Etat des lieux : le « fait main » dans le prêt-à-porter

A. Définition du sujet

1. Le contexte

Au XXIème siècle, les produits textiles sont pour l'essentiel des biens de consommation. Les vêtements de prêt-à-porter représentent une partie importante et connue de ce secteur. Nous nous centrerons sur l’insertion d’un savoir-faire main dans la stratégie d’une entreprise française de prêt-à-porter féminin moyen de gamme, en prenant en considération la conjoncture économique et la structure du marché du prêt-à-porter féminin 2011/2012.

Nous nous appuierons tout au long de ce travail sur les statistiques et études de la Fédération Française de Prêt-à-Porter et de l’Institut Français de la Mode de 2005 à 2012.

2. Le « fait main »

Deux approches du statut de l’artisan et du « fait main » se distinguent.

D’un côté, l’approche archaïque, appliquée notamment par les artisans de la haute couture et développée dans le livre d’Amandine Maziers Johanna De Tessières, L’œil et la main1, met en évidence que le « fait main » correspond à des « gestes empruntés à l’histoire et remaniés avec le présent ». Les méthodes de production de la haute couture ont très peu évolué depuis ses premiers jours. Elles restent essentiellement manuelles et requièrent une grande expertise technique, ce qui explique le prix final des pièces de haute couture. La main est le seul outil, ou presque autorisé. Le reste, pinceau ou aiguille, n’en est que le pendant.

1 Amandine MAZIERS, Johanna DE TESSIERES, Christian LACROIX, L’ŒIL ET LA MAIN les artisans de la haute couture, Editions du collectionneur.

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D’un autre côté, une nouvelle génération met en pratique la citation de Kant « La main est la fenêtre ouverte sur l’esprit »2. Il en est fini de la scission entre la tête et les mains. Le sociologue américain Richard Sennett appuie cette pensée et réhabilite l’idée d’artisanat en mettant en évidence que « toutes les compétences, même les plus abstraites, sont au départ, des pratiques physiques »3.

Pascal Gautrand étend la réflexion jusqu’à l’acte de personnalisation d’une pièce d’habillement industrielle. Cette approche est développée dans la partie Une dé-standardisation du produit.

3. Le prêt-à-porter féminin

La Fédération Française du Prêt-à-porter rassemble tous les acteurs de la mode, du textile et de l’habillement. En effet, le textile et l’habillement sont souvent assimilés à un seul et même pôle d’activité. Nous nous concentrerons pour cette étude essentiellement sur l’industrie de l’habillement.

Selon la définition du Petit Larousse, le prêt-à-porter correspond à l’« ensemble des vêtements de série conçus par un styliste de mode et qui font l'objet de présentations saisonnières ». Il correspond également au processus de fabrication de ces vêtements.

Pour Mower et Martinez4, le terme « styliste » est réservé plus particulièrement aux individus « interprétant » les évolutions des goûts et des modes. Fréderic Godart, quand à lui, préfère le terme « créateur de mode »5, qu’il considère « plus large et qui renvoie aux différentes facettes de la profession qui ne se limite pas à réaliser des croquis ou à transformer des tendances culturelles en vêtements ». Dans le cadre de ce mémoire, nous distinguerons les stylistes qui travaillent au service d’une marque, des créateurs qui travaillent dans le cadre de leur propre marque. Le terme « couturier » ou « couturière » peut alors être réservé aux professionnels de la haute couture.

2 Xavier DE JARCY, Dossier « Les nouveaux artisans », Télérama 3261, 11/07/12, pp. 17-23 3 Richard SENNETT, CE QUE SAIT LA MAIN La culture de l’artisanat, Edition Albin Michel, Paris, 2009. 4 Mower et Martinez, 2007, cité p. 68 in Sociologie de la mode, Frédéric GODART, Editions Découverte, Collection Repères, Mayenne, 2009. 5 P. 68, Frédéric GODART, Sociologie de la mode, Editions Découverte, Collection Repères, Mayenne, 2009.

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Dans un schéma archaïque, le prêt-à-porter est soumis à un rythme saisonné régulier. Pourtant depuis quelques années nous observons l’émergence d’un autre système au rythme plus soutenu. Ainsi, abordés dans la partie Un double rythme de collection, « Slow Wear » et « Fast Fashion » sont désormais les rythmes auxquels la mode est soumise, indépendamment des saisons.

Ainsi, dans le cadre de ce travail, nous définirons le prêt-à-porter féminin comme désignant l’ensemble des vêtements pour femme, conçus par un styliste, fabriqués en série selon des mesures normalisées et faisant l’objet de présentations en générale saisonnières. Par extension, il regroupe également les accessoires pour femme : sacs, chaussures, chapeaux, écharpes, bijoux, etc.

Le prêt-à-porter féminin désigne également un secteur économique lié à ces vêtements (le marché du prêt-à-porter féminin) où se côtoient des entreprises industrielles dont le poids de fabrication comme de diffusion diffère. La diversité des composantes du prêt-à-porter en fait un marché complexe, dont certaines branches peuvent être en pleine croissance tandis que d’autres sont fortement affectées par la crise ou/et les importations des pays à bas coût.

Annie et Loïc Troadec donnent une définition intéressante de ce qu’est une enseigne aujourd’hui : « l’enseigne, c’est d’abord un concept de vente dynamique, une « promesse » claire en termes de choix, de prix et de services adaptés aux consommateurs. C’est aussi un ensemble de normes, de règles et de pratiques commerciales cohérentes conçues pour optimiser les résultats des points de ventes. L’enseigne, c’est une véritable bannière pour le point de vente, soutenue par de nombreuses campagnes publicitaires, locales ou nationales. Cette notoriété et son contenu rassurent et fidélisent les consommateurs en quête de repères. L’enseigne, enfin, c’est une aventure humaine où réussite individuelle et réussite collective sont étroitement associées, où les grandes décisions stratégiques sont arrêtées en commun, bref c’est le meilleur moyen de concilier indépendance et dynamique de groupe. »6

Tous les éléments que soulignent les deux auteurs trouvent un écho intéressant dans le développement d’une stratégie d’entreprise appliquant le « fait main » dans le prêt-à-porter ci-après.

6 p.90, A. et L. TROADEC, Gérer et animer un réseau de points de vente, Editions Organisation, juin 1999.

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4. Le prêt-à-porter moyen de gamme

Il existe différents niveaux de prêt-à-porter. Le dictionnaire Larousse n’en distingue que deux, le haut et le bas de gamme, Il s’agit des « articles qui se situent au niveau supérieur, ou inférieur, du point de vue du prix, de la qualité, du perfectionnement ». Cependant, il existe un niveau intermédiaire : le moyen de gamme.

Le produit ou service bas de gamme c'est avant tout une qualité basse et un prix faible.

Le moyen de gamme est un produit de qualité moyenne, qui va se démoder très vite, soumis à une forte concurrence, nécessitant une promotion régulière massive. C’est un ensemble de vêtements fabriqués en série, de prix et de perfectionnement moyen, sujet à une communication soutenue, destiné aux femmes. Le prêt-à-porter moyen de gamme ne prend pas en considération les créateurs de mode et les couturiers.

Le haut de gamme, lui, se caractérise par des prix supérieurs et par de la qualité. Il s'appuie sur un avantage concurrentiel fort : une innovation significative, un degré d'exigence élevé dans le service, un produit plus solide, mieux fini, mieux pensé, plus sain.

Dans le cadre ce mémoire, nous nous concentrerons sur le prêt-à-porter moyen de gamme avec une possibilité d’évolution vers le haut de gamme.

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B. L’historique de la confection

Avant d’approfondir la question de la place du « fait main » dans le prêt-à-porter, il est bon de rappeler certains points de l’histoire, et de la relation entre le « fait main » et l’habillement de masse.

1. La confection

a) La naissance de la confection

Selon les écrits du préhistorien et ethnologue André Leroi-Gourhan, dès la préhistoire, les premières confections de vêtement sont constituées d’écorce, de peau et de fils avant l’apparition des premiers tissus7. L’outillage n’ayant pas la même influence sur les solides souples que sur les autres solides, « tous ont pour outil principal la main nue ».

b) Le textile à l’origine de la révolution industrielle

L’art du tissage est l’un des artisanats les plus anciens de l’histoire de l’humanité. C’est en 1733 qu’un tisserand britannique John Kay met au point un système mécanique pour simplifier l'opération de tissage avec la navette volante. Cette invention a permis de passer une première étape de l'artisanat vers l'industrie.

Inspecteur des manufactures de soie, le mécanicien français Jacques de Vaucanson imagine le premier métier à tisser entièrement automatique vers 1745. Pour la construction de ses machines, il crée un outillage perfectionné dont les composants deviendront les organes essentiels des machines-outils modernes.

En 1769, Richard Arkwright invente la première machine à tisser mécanique. Il faut désormais employer du personnel en usine, pour faire tourner les machines. C’est la fin du tissage à domicile. Dès 1786, les machines à vapeur permettent la mise en place de métiers mécaniques rapides. Joseph-Marie Jacquard améliora le métier mécanique. Commandé par un système de cartes munies de rangées de trous

7 P. 234, Andre LEROI-GOURHAN, L’homme et la matière : évolution et techniques, Editions Albin Michel, Paris, 2004.

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perforés correspondant aux rangées du motif, le métier à tisser dit métier Jacquard fait basculer le tissage de l’artisanat à l’industrie.

c) La confection standardisée

Sous le Second Empire, les couturiers et tailleurs innovent pour les classes aisées8. Mme Roger d’abord, puis l’Anglais Charles Frederick Worth à une plus grande échelle, sauront répondre aux besoins de luxe et de sur mesure d’une clientèle aisée et internationale. De là naîtra la haute couture. De fait, la confection se met en place afin de répondre aux besoins vestimentaires croissants de la majeure partie de la population. Les fabricants, que l’on nommait à l’époque les premiers « industriels » standardisent peu à peu les méthodes de travail et les productions.

Malgré l’essor du machinisme et de l’utilisation de la machine à coudre, la structure des entreprises reste familiale et les méthodes de travail, reposant sur la division des tâches et sur le travail à domicile, demeurent encore artisanales. A l’instar de la Belle Jardinière, des magasins de nouveautés dès 1850, proposent des gammes de vêtements finis pour les femmes, qui ne nécessitent pas de retouches.

Les grands magasins, vitrines de la modernité sous le Second empire, traduisent l’importance prise désormais par la confection. Le développement des chemins de fer permet enfin de dissocier les lieux de production des lieux de vente. Les processus d’imitation s’accélèrent et pour se distinguer, l’élite qui s’habille en haute couture, ne cesse d’inventer de nouvelles modes qui seront, elles aussi, quasiment immédiatement imitées. De là, proviennent les incessantes variations des modes et de silhouettes qui apparaissent à cette époque…

A l’aube du XXème siècle, les métiers qui font le renom de la mode sont d’une grande variété. Le luxe et la haute couture ont les leurs, auxquels s’ajoutent ceux de la confection. La confection produit des vêtements « riches », « mi-riches » ou « bon marché » d’une qualité égale ou supérieure à ceux des tailleurs et couturières mais plus abordables. La conception, la coupe et le repassage s’effectuent dans l’entreprise, la couture, quant à elle, est réalisée soit au sein d’ateliers intégrés, soit sous-traitée à des entrepreneurs qui répartissent le travail auprès d’ouvrières à domicile.

8 Catherine ORMEN, Histoire(s) du prêt-à-porter, 1929-2009, Fédération Française du Prêt-A-Porter Féminin, juillet 2009.

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La haute couture et la confection ont des intérêts divergents, la scission s’opère donc entre les deux secteurs. Ainsi, en 1910, la Chambre Syndicale de la Couture, des Confectionneurs et des Tailleurs pour dames, fondée en 1868, est dissoute.

A l’issue de la Première Guerre Mondiale, la confection poursuit une lente modernisation. Au XIXème siècle, la confection produit encore un nombre très important de modèles différents, avec une grande variété dans les détails et les finitions. C’est une production standardisée, en série, mais les séries sont très limitées en nombre de pièces.

Dans les années 1920, l’arrivée d’une mode simplifiée, libérée du corset, à la garçonne, avec des jupes raccourcies rend le travail de la confection plus facile.

Mais les consommatrices françaises ont la réputation d’être exigeantes. Elles ne se satisfont pas de modèles standardisés, réalisés dans des tissus qu’elles estiment de piètre qualité. C’est ce qui expliquera, en partie, que la confection française, pourtant très appréciée à l’étranger, soit demeurée pendant si longtemps méconnue en France.

d) La fédération du vêtement

Les années 1930 sont marquées par une conception plus traditionnelle de la féminité. Paris dicte sa loi au monde entier et la mode, jusqu’alors réservée à une élite, est désormais accessible à tous.

Quelques mois avant le krach boursier de Wall Street, les syndicats de confectionneurs et ceux de la couture en gros de Paris et de province, fleuron de la profession, se regroupent, pour constituer le 29 juin 1929, la Fédération du Vêtement qui représente les industries de transformation du tissu. Alors que la production est ralentie dans beaucoup de secteurs, de nouvelles stratégies s’élaborent. La confection découvre la nécessité de produire en plus grandes séries, d’accroître la productivité des entreprises. Des magasins populaires voient le jour, mettant l’accent sur le retard accumulé dans les infrastructures. Ils affichent des prix uniques pour une marchandise standardisée. Pour répondre aux besoins de la grande série, les structures de production qui demeurent à un stade très artisanal se modernisent.

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La haute couture quant à elle, cherche à relancer la demande car ses possibilités d’exportations vont se limiter aux toiles et patrons. Elle crée la notion de seconde ligne, mais elle continue de tenir les confectionneurs français à distance.

Dans les années 1940, dans le contexte de la Seconde Guerre Mondiale, l’artisanat reprend de l’importance face à une mode faite de bric et de broc. La pratique est à l’auto-construction.

Sous le gouvernement de Vichy la haute couture bénéficie d’un traitement de faveur. Ce n’est pas le cas de la confection, qui souffre des mesures discriminatoires prises par le régime de Vichy. La production est réduite considérablement dans un contexte de pénurie de matières premières, de manque de liquidités, de crise sociale.

Cependant, sous l’effet des mesures corporatistes de Vichy, le nombre d’adhérents à la Fédération augmente. La profession se tourne vers un marché porteur, la Suisse, qu’elle tente de ravir aux Allemands. Fédération unique d’une France coupée en deux, cette institution poursuit vaillamment ses activités : organiser la répartition du textile, inciter ses adhérents à se regrouper, moraliser la profession tout en tentant obstinément d’orienter la production vers la qualité.

2. Le prêt-à-porter

a) La naissance du prêt-à-porter

Les années 1950 sont déterminantes. Les Etats-Unis se sont libérés de l’exemple français pendant le conflit et ont développé sous l’appellation « ready-to-wear »9 des modes de production inédits adaptés à de nouvelles pratiques vestimentaires très éloignées des traditions françaises. Il s’agit d’une mode simple, pratique, confortable, adapté à la production en série, et qui peut être adoptée par toutes les femmes. Le « ready-to-wear » est à la fois le fruit de l’industrialisation et le résultat d’une remarquable politique d’information, via la presse, et de communication, via la publicité.

En France, inspirée par le succès du « ready-to-wear » américain, la confection change de nom, « confection pour dames » disparaît au profit « d’industrie du 9 Bill Blass, Anne Klein, mais surtout Claire McCardell sont les pionniers du prêt-à-porter américain. Claire McCardell notamment, utilisait des tissus « hors de la mode » comme le jean plus adapté aux besoins de la population.

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vêtement féminin », ainsi que d’image et de méthodes. Collant à son époque, le prêt-à-porter français va séduire les femmes autant que les éduquer à de nouvelles pratiques d'achat et conquérir un nombre toujours plus grand de consommatrices de toutes nationalités pour accroître les exportations. L'expression prêt-à-porter, traduction littérale de l'américain « ready-to-wear » est adoptée. Le prêt-à-porter signifie l’abandon des petites séries, trop diversifiées, au profit de séries plus grandes, avec un plus petit nombre de modèles. Ce changement d’échelle nécessite désormais de construire des usines et de les décentraliser. La notion de style, jusque-là réservée à la couture est introduite dans l’industrie du l’habillement féminin.

En 1955, la Fédération crée le CCIM (Comité de Coordination des Industries de la Mode), un outil qui lui permet de communiquer des informations sur les tendances et les aspirations du marché à tous les niveaux de la filière de production. Le premier Salon national du prêt-à-porter ouvre ses portes en juin 1956, au Théâtre des Ambassadeurs à Paris. En 1958, il s'installe au parc des expositions de la porte de Versailles. Très vite, il s'affirme comme l'entité fédératrice des différents groupes et composantes de la profession.

b) L’essor du prêt-à-porter

Au début des années 1960, la mode subit un bouleversement définitif. Le marché intérieur connaît un essor fulgurant.

De nouvelles habitudes de consommation voient le jour, et ce au profit du prêt-à-porter. Les fabricants font désormais appel à des stylistes pour dessiner leurs collections afin de répondre aux envies de la jeunesse née du baby-boom. La production en série se libère pour la première fois de son histoire de l’influence de la haute couture. De jeunes dessinateurs vont donner au prêt-à-porter de nouveaux styles: Gérard Pipart, chez Germaine et Jeanne, puis chez Chloé, Michèle Rosier chez V de V, Emmanuelle Khahn chez Cacharel, Anne-Marie Beretta pour Ramosport, Elie et Jacqueline Jacobson pour Dorothée Bis, Christiane Bailly, Jacques Delahaye, Jean Bouquin, Chantal Thomass...

Une seconde génération de stylistes apparait, les « Créateurs de mode », parmi lesquels figurent Thierry Mugler, Claude Montana, Jean Paul Gaultier, Sonia Rykiel, Anne-Marie Beretta, Agnès b., Azzedine Alaïa, Elisabeth de Senneville, etc. qui choisissent de travailler pour leur propre compte en créant un univers qui leur ressemble. Tous contribuent à l’atomisation des tendances.

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Structurellement, une mutation profonde s’opère dans le système de production. Avant les délocalisations, la décentralisation est à l’ordre du jour. Grâce à cette dernière, de nombreuses usines voient le jour en province, dotées des derniers perfectionnements technologiques (machines ultramodernes et bientôt, conception et dessin assistés par ordinateur). Ces usines emploient une main d’œuvre plus qualifiée mais moins nombreuse. Dès le début des années 1970, le rythme saisonnier du prêt-à-porter, (deux collections par an), permet d’envisager de nouvelles stratégies, et les entreprises les plus importantes commencent à délocaliser leurs productions. Si le bureau de création demeure à Paris, la fabrication est effectuée à l’étranger, dans des pays où la main d’œuvre est très bon marché.

Le réseau de distribution suit évidemment cette mutation: comme Dorothée Bis, les fabricants ouvrent leurs boutiques, et comme Gudule, Eva, La Gaminerie, Victoire, les premières boutiques multimarques voient le jour à Paris. En 1966, avec l'ouverture de la boutique Saint Laurent Rive Gauche, Yves Saint Laurent met en avant et assoit la gamme prêt-à-porter des couturiers. Stylistes et boutiques passent à l'avant-garde, les lignes de large diffusion des couturiers devanceront désormais la haute couture.

Les années 1960 sont donc marquées par une mode très versatile qui impose des adaptations et des changements brusques. Face au besoin d'anticipation, le Salon se fait éclaireur et conseiller et participe à la création du Bulletin commun des Industries de l’Habillement. Maïmé Arnodin invente le premier bureau de style couplé à une agence de publicité.

Les salons prennent une envergure sans précédent. Londres, New York, Milan se retrouvent au Salon où se concentre la quintessence de cet essor. Après l’Europe, ce sont d’autres marchés plus éloignés que la Fédération entend conquérir comme les Etats-Unis, le Canada ou l’Extrême-Orient, car la préoccupation majeure des années 1970 est la montée en puissance des importations en provenance des pays à bas salaires.

Ainsi, à la fin des années 1960, plus de 80% des Françaises s’habilleront en prêt-à-porter, tandis qu’en moins d’une décennie, les exportations auront été multipliées par cinq.

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c) La Fédération, la création et la mondialisation

Depuis le début des années 1980, la mode est devenue un phénomène culturel. Puis, au cours de la décennie suivante, la mode s’assagit pour prendre un tour plus intellectuel. La Fédération, avec le concours des Syndicats régionaux, continue de bâtir une stratégie professionnelle tout en menant de spectaculaires opérations de communication.

C’est ainsi que la Fédération, sous l’impulsion de son Président, Daniel Hechter10 organise à deux reprises deux manifestations considérables et très médiatisées. Haute couture, prêt-à-porter de luxe, prêt-à-porter des créateurs de mode et prêt-à-porter de grande diffusion, toutes les tendances coexistent pacifiquement.

Face à la mondialisation de l’économie, le prêt-à-porter français doit continuer de s’adapter. Les changements amorcés au cours des années 1970, s’opèrent plus largement lors de la décennie suivante. « circuit long’ et « circuit court » vont coexister : d’un côté, on procède à des délocalisations massives, et de l’autre, on fait appel à une production de proximité, à l’instar du modèle développé par le quartier du Sentier.

Le secteur de la distribution subit de profondes évolutions au cours de ces deux décennies avec le développement rapide des chaînes spécialisées, d’abord nationales puis internationales. A ce phénomène de concentration de la distribution qui se manifeste partout en Europe s’ajoute la montée en puissance des importations en provenance des pays émergents qui ne cesse d’inquiéter. La prospection à l’étranger devient essentielle, La fédération part à la conquête des marchés asiatiques où elle développe une politique d’implantation dans les salons, à Pékin, à Taïpei, à Hong Kong ou à Shanghaï…

Enfin, un besoin urgent de formation voit le jour dans les années 1980 car de nouvelles professions se créent, liées à la logistique (sourcing, dispatching, etc.). C’est ainsi qu’en 1985, l’Institut Français de la Mode (IFM) ouvre ses portes. Poursuivant dans cette voie, la Fédération créera également en 1993 Mod’Spé Paris, avec une vocation essentiellement tournée vers l’enseignement du marketing.

10 Daniel Hechter a été Président de la Fédération de 1984 à 1987.

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3. Les nouveaux défis et les nouvelles créativités

Au-delà des défis de la création, de l’innovation, de l’image et du rêve, le monde de la mode se pose aujourd’hui la question de la mondialisation et de l’éthique. Il faut susciter le désir, surprendre le consommateur et lui donner envie, ce dans un contexte économique nouveau.

Depuis 2000, les priorités de la Fédération du Prêt-à-Porter se resserrent autour de l’international mais aussi de la formation, de la création et de la sauvegarde du savoir-faire français. Sous l’impulsion de Jean-Pierre Mocho, la Fédération construit de nouveaux supports de promotion et de soutien pour les marques en créant le prix Elan de Mode11 qui récompense chaque année plusieurs entreprises françaises s’inscrivant dans une thématique portée par la Fédération Française du Prêt-à-Porter Féminin. La Fédération s’est ainsi ouverte sur l’Euroméditerranée en soutenant dès 2005 la création de la Cité Euroméditerranéenne de la Mode. D’autres actions fortes sont construites : THE TRAIN, salon des marques créatives européennes et américaines à New York dans un lieu d’avant-garde The Terminal Store, LIVINGROOM à Tokyo, des missions pédagogiques ou économiques dans le monde entier, de la Chine à Moscou, en passant par la Corée ou le Brésil. La Fédération crée un nouveau service pour mettre en lien au nom de l’UFIH les donneurs d’ordre et les faiseurs français.

De nouvelles tendances dans la consommation ont été décryptées. Il s’agit, d’une part, du « Slow Wear », autrement dit d’achats de qualité, réfléchis dans une optique citoyenne et d’autre part, de la « Fast Fashion », des achats « coup de cœur », pas forcément raisonnés, considérés comme des accessoires de mode.

A cette mode à plusieurs vitesses s’ajoute désormais le souci de la provenance, le besoin d’avoir, comme dans l’alimentaire, une « traçabilité » des articles de mode. C’est un courant «éthique» qui monte en puissance, qui préfère les matériaux bio ou recyclés et, surtout, qui accorde une importance grandissante au commerce équitable. Il faut désormais penser en termes d’éco-conception. Pour répondre à ce courant récent, la Fédération promeut une nouvelle façon de créer et de produire à

11 Le prix « Elan de Mode » de la Fédération Française du Prêt à Porter Féminin, initié par Jean-Pierre Mocho en 2002 est remis chaque année pour saluer l’enthousiasme et le talent d’hommes et de femmes qui font bouger la mode. La Fédération Française de Prêt-A-Porter Féminin a créé cette année un prix récompensant "les marques de mode éthique et leur démarche altruiste, aussi originales que complémentaires".

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travers les Ateliers Caumartin par exemple et aussi par le lancement de SO ETHIC12 sur Prêt à Porter Paris®.

L’humain, la solidarité, le partage, les actions caritatives sont aussi des préoccupations des femmes. La consommatrice est surinformée. Elle est exigeante. Le vêtement qui la séduira, en plus d’être parfait, devra avoir un sens, une histoire, une valeur ajoutée. Car la consommatrice réclame aussi du rêve. Au prêt-à-porter d’avoir de l’imagination.

12 Depuis février 2006 la FFPAPF au travers de PRÊT À PORTER PARIS® consacre un univers aux marques éthiques.

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C. Un nouvel essor

Même si aujourd’hui nous nous acheminons vers un univers de rêve virtuel fait de haute technologie, la poésie de la main, de ce que l’on peut faire soi-même, demeure… C’est le paradoxe de notre société contemporaine, nous rappelle Frédéric Godart lors de son interview, les Européens souhaitent « relancer l’artisanat après avoir massivement automatisé ».

1. Une valeur symbolique

a) L’artisanat mis à l’honneur par la nouvelle génération de créateurs

Pour Hubert Barrère le « fait main » n’est pas de l’industrie, c’est de l’artisanat. Contrairement à l’industrialisation qui livre un produit uniformisé, c’est un produit singularisé. Il s’agit d’une toute autre démarche, associée à un savoir-faire et à une inspiration créatrice. Chaque produit renvoie à une histoire propre, à des émotions et à des perceptions, ce qui le situe définitivement à part des objets fabriqués en série.

Nous pouvons observer avec la crise économique et environnementale un retour au métier du faire au détriment de l’industrialisation. Depuis quelques années, les loisirs créatifs ont le vent en poupe et signent le retour du « handmade », du « Do it yourself » anglosaxon. L’internet (via ses blogs, sites, forums), les stages, les ateliers, les salons et les émissions de télévision sur ce sujet ne cessent de proliférer, et dressent une vitrine flatteuse et professionnelle aux créateurs novices comme aguerris. Ainsi, www.siandso.com est la première plate-forme professionnelle dédiée à l’achat-vente de produits « faits main ». Il fédère une communauté de professionnels et d’amateurs confirmés dans les domaines de la mode, bijoux, déco, accessoires…

Longtemps considérées comme rébarbatives, des activités telles que la couture ou le tricot, connaissent aujourd’hui un engouement massif auprès de toutes les générations. Terriblement vintage, la création redevient tendance et devient un art de vivre. Aux prémices de cette tendance, les blogs de mode parlaient de « fait à la main » lorsque les designers fabriquaient eux-mêmes leurs créations et qu’aucune production n'était faite en manufacture. Loin d'être une activité réservée aux grands-mères, l’artisanat a pris un nouvel essor. Non dans ses pratiques anciennes, mais par

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l’activité de jeunes designers locaux qui se lancent dans la création artisanale de vêtements, d'accessoires...

Les grands noms du prêt-à-porter se sont également emparés de la tendance « fait main ». « Parce que moi aussi, je pense que l’avenir est dans le tissu et la confection de jolies choses avec nos petites mains… », nous dit la styliste anglaise Vivienne Westwood dans le cadre de sa Collection Ethique Pour l’Afrique13. L’été 2011-2012 signe le grand retour du macramé, visible dans les collections de Roberto Cavalli, Salvatore Ferragamo, Gucci ou encore Dior. Pour l’hiver 2012 le point de croix a le vent en poupe chez Dolce & Gabbana, Valentino, ou encore Balmain. Dans son défilé prêt-à-porter automne hiver 2012-13, Chanel va jusqu’à détourner les broderies des ateliers Lesage en cosmétique avec des sourcils brodés de pierres.

Certaines grandes maisons de mode ont misé dès le départ sur un savoir-faire ancestral artisanal. C’est le cas d’Hermès qui se revendique « craftmanship ». Elles investissent de plus en plus dans les métiers d’art. Ainsi, Chanel compte sept ateliers, tous acteurs de la haute couture, au sein de sa filiale Paraffection dédiée aux métiers d'art14. La marque présente un défilé annuel pour rendre hommage aux métiers d'art de la maison. Sa dernière acquisition est l'atelier de broderie Montex en fin d’année 2011, spécialisé dans la création de broderies "au crochet Lunéville, à l'aiguille et à la Cornely".

b) Ce que recherche le consommateur

La consommatrice n’a souvent pas les capacités ou pas le temps de se faire plaisir en réalisant ses propres pièces. Elle peut alors se rabattre sur les créations faites main des créateurs.

Le « fait main » a un côté très personnel, intime, très exclusif et qualitatif, nous rappelle Hubert Barrère lors de son interview. La consommatrice recherche une personnalisation, une pièce unique ou tout du moins une petite série, les créations faites à la main garantissent l'exclusivité ou presque.... Acheter des pièces faites à la main signifie souvent plus de qualité et une plus grande longévité. Les consommatrices aiment les objets séduisants, originaux et abordables, qui sont le reflet de leur personnalité et qui donnent un air de sur-mesure à leur quotidien. Une certaine clientèle souhaite acquérir des pièces vestimentaires ayant du sens, une singularité et estampillé « fait main », autant d’éléments renvoyant au refus de vivre dans un environnement formaté et standardisé. « Soyons unique » est devenu un 13 Caroline MARIN, « Le chic éthique : La tendance à suivre », Style papers, n°30, Août 2012, pp. 44-47. 14 « Chanel élargit son activité métiers d’art en rachetant un atelier de broderie », Fashion Daily News, 5 décembre 2011, fashion-dailynews.com.

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slogan et une quête qui concerne aussi bien notre aménagement intérieur que nous -mêmes

Ces créations, en dépit de leur caractère artistique, conservent une fonction précise, elles sont conçues pour être vendues au public.

Le marché s’est adapté pour occuper le terrain de cette tendance « fait main » et nous pouvons trouver aujourd’hui des produits aux accents semi-manufacturés en grande distribution. Avec la venue des grandes surfaces comme H&M et GAP, on retrouve souvent les mêmes vêtements en boutique que l'on habite à Paris ou New York. Beaucoup de jeunes adhèrent ainsi au fait à la main pour personnaliser leur look.

Selon Frédéric Godart, les aspects environnementaux, éthiques et économiques dans le cas d’une production locale sont fondamentaux aujourd’hui en Occident et aux Etats Unis. « Tout ce qui peut satisfaire le consommateur autour de ces trois éléments va être gagnant. »

2. Des tendances

Frédéric Godart dans son interview fait observer que le « fait main » est en effet une des grandes tendances de fond de l’économie dans son ensemble, et pas uniquement dans la mode. Mais il s’inscrit dans le cadre de mouvements plus globaux.

FAIT MAIN L’authenticité

Quête de l’intime

Le développement durable

Système de valeur

Le lien passé / futur

Connaissance et expérience personnelle passée

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a) Une quête d’authenticité

Le nouveau credo c’est « l’authenticité »15. Nourriture, mode, habitat… nous voulons de plus en plus que les choses qui nous environnent soient « vraies ». Une tendance dont les entreprises commencent à tenir compte.

Le sociologue américain Paul Ray y voit une évolution sociale historique : « Il y a une très forte demande d’authenticité, de nos jours », assure-t-il. Cela correspond à une quête de comment vivre de manière à ce que « l’être intime corresponde à l’être public », explique le sociologue. Cette pensée est également exprimé sur le site internet du bureau de tendance Nelly Rodi16 : « Redevenons acteur de notre propre vie afin d’améliorer notre quotidien. […] Privilégions l’essentiel et le retour à la simplicité afin de persévérer dans notre quête du mieux vivre. »

Le Britannique David Boyle, journaliste et chasseur de tendances, constate lui aussi l’émergence d’une nouvelle sensibilité fondée sur « un rejet prononcé du faux, du virtuel, du fabriqué et de la production de masse ». Ce désir croissant d’authenticité a participé à l’essor récent des produits bio et régionaux, ou le succès des tissus vintage de la styliste Stella McCartney. Dans son dernier ouvrage17, David Boyle recense neuf adjectifs qui portent cette soif d’authentique : éthique, naturel, honnête, simple, non fabriqué, durable, beau, enraciné et humain. « Les gens sont beaucoup plus conscients de leurs contradictions que la génération précédente, fait remarquer David Boyle. Les entreprises le savent, mais il est difficile d’être vraiment authentique quand on est un grand groupe mondial et virtuel. »

Pour Neil Crofts, ancien cadre dans l’édition, spécialiste en stratégie d’entreprise et fondateur du site Authentic Business (www.authenticbusiness.co.uk), les entreprises ont tout à fait conscience de ces nouveaux enjeux et le marché se dirige vers la voie la plus sage et la plus prometteuse. « Le commerce existe pour répondre aux besoins de la société. » dit-il. Il souligne également que cette quête correspond à une nouvelle forme d’expression spirituelle dans une société qui connaît une énorme crise du sens.

b) Le développement durable

15 Jay WALLJASPER, « Développement durable », Courrier international, 5 octobre 2006. 16 NELLYRODI, « Actualités », Trendletter juin 2012. 17 David BOYLE, Authenticity : Brands, Fakes, Spin and the Lust for Real Life [Authenticité : marques, truquages, montages et la soif de vivre vrai], Harper Collins Publishers.

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Sur les défilés de l’été 2012, le développement durable prend les formes d’une mode qui, pour devenir plus responsable, n’en est pas moins attirante, comme par exemple chez Vivienne Westwood et Stella McCartney18. Nous pouvons également noter le succès du salon 1.618 Sustainable Luxury. Ce dernier se veut être une plateforme commerciale dédiée au développement durable et aux entreprises intégrant une charte de valeurs éthiques et environnementales, plateformes où la mode occupe une des premières places. Ces produits « éthico-esthético-chics » nous démontrent que bio et beau sont compatibles, et que consommer mieux en respectant la planète permet également de satisfaire nos critères esthétiques.

Le numéro un mondial du luxe a lancé sa propre semaine de l’environnement. « La protection de l’environnement n’est pas uniquement générosité ou philanthropie », rappelle Bernard Arnault sur le site du groupe LVMH. « Elle est là pour préparer l’avenir à une nécessité, elle est aussi pour les entreprises un facteur nouveau de progrès et de compétitivité ». Le patron du groupe fut l’un des premier à mettre en place le bilan carbone il y a près de dix ans. Même le champion de la mode low cost, H&M adhère à ce mouvement, en proposant des cotons biologiques et des synthétiques issus du recyclage de matières premières. Les plus jeunes marques, comme Ekyog, se rallient aussi au mouvement.

Respecter l’environnement et consommer responsable est aujourd’hui grâce aux efforts de toutes les marques, des plus puissantes au plus petites, un geste que toute les consommatrices, même les plus exigeantes, peuvent accomplir en restant fidèle à leur quête du beau et leurs principes en matière de mode.

c) Un lien passé / futur

Le lien entre passé et futur a été au centre de nombreux débats du colloque de la mode 2012, « Défier le temps, une affaire de mode », qui a eu lieu le 27 et 28 mars à l’Université de la mode. Selon Alessandra Castellani, professeur à l’Académie des Beaux Arts de Frosinone, la mode est le reflet du temps, de la nostalgie. Cette dernière fait naître le désir chez le consommateur. Sous l’effet de la conjoncture économique difficile, les enseignes et le consommateur se tourne vers des éléments connus, valeurs sûres, au lieu de créer un futur. Pour Ulrik Nägele, de l’Académie Mode et Design de Munich, l’artisanat devient la nouvelle modernité. Tandis que, Emmanuelle Lallement, professeur à l’Université Paris-Sorbonne, observe que le « fait main » possède encore une place significative dans le prêt-à-porter, grâce à cette tendance et à la conservation des savoir-faire dans le temps.

18 Caroline MARIN, « Le chic éthique : La tendance à suivre », Style papers, n°30, Août 2012, pp. 44-47.

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Nelly Rodi caractérise le XXème siècle comme marqué par une mode complaisante envers son passé, qui ne cessait de regarder en arrière dans un climat mélancolique19. Le « fait main » continue à jouer le rôle de la madeleine de Proust, nostalgie d’une époque où les choses de tous les jours étaient fabriquées à la main, du temps d’avant l’avènement du jetable, quand les objets se conservaient toute une vie et pouvaient même se bonifier à l’usage. Rien à voir avec le tout-venant actuel produit à la chaîne en usine.

Sur les podiums printemps/été 2012, de nombreuses marques ont fait défiler des silhouettes qui plébiscitaient des motifs tapisseries, des imprimés vichy, des robes en macramé, des guipures et autres voilettes. La tendance vise à faire rimer mode et techniques artisanales par une réactualisation et une réinterprétation contemporaine de savoir-faire passés. « Rarement une saison n'aura eu autant à cœur d'imposer une cure de jouvence drastique aux matières, accessoires et graphismes vieillots », souligne le site internet www.tendances-de-mode.com.

Pour Alexandra Senes, à la tête du Trendswash, espace qui met en lumière les tendances sur PRÊT-À-PORTER PARIS®, le vestiaire du printemps été 2012 s'articule autour du concept de Retour/Aller20. Ce concept est basé sur une volonté d'allier « références rassurantes au passé et nécessaires projections vers le futur ». « Les inspirations vintage n'empêchent pas une réflexion sur les matières, coupes et formes nouvelles mais aussi sur l'utilisation de nouvelles technologies. De quoi trouver l’équilibre en hier et demain », déclare-t-elle.

19 NELLYRODI, « Actualités », Trendletter juin 2012. 20 « Focus sur… Les tendances 2012 », L’actualité de la Fédération Française du Prêt-à-Porter Féminin, E-Prêtnews, octobre 2011.

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D. Les différentes applications du « fait main » dans le prêt-à-porter

Le prêt-à-porter est sujet à une méthode taylorienne d’assemblage progressif par paquets. Mais, la nature peu rigide des matériaux textiles rend difficile l’utilisation de machines-outils et l’automatisation complète des chaînes de production, contrairement à ce que l’on peut trouver dans d’autres industries comme l’industrie automobile. C’est pour cela que la mode reste une industrie riche en main d’œuvre. Comme l’a souligné André Leroi-Gourhan, en confection, la main a conservé au fils des millénaires son statut de moyen élémentaire d’action sur la matière21.

Concrètement, la création d’un vêtement est divisée en un certain nombre d’opérations qui sont réalisées de façon séquentielle. Nous distinguerons ainsi le façonnage, la confection, l’ennoblissement et l’ornementation.

1. Le « fait main » incontournable en production

En production, la particularité ou la fragilité de certaines matières induisent une action humaine. C’est le cas pour des voiles de soie, fragiles et extrêmement glissants. La découpe des matelas (superposition de plusieurs épaisseurs de tissus suivant le nombre de pièces à réaliser) ainsi que le placement du patronnage doivent être ainsi supervisés, réajustés par une action manuelle. Il peut être nécessaire, sur des étoffes de maille, de réaliser un pointage à la main pour éviter de percer le tissu et de sectionner un fil occasionnant un trou. Afin de ne pas sectionner le poil lors de la découpe de pièce, la fourrure peut avoir à être écartée soigneusement à la main. Les techniques de confection de modèles en fourrure ont peu évolué et restent en grande partie manuelle.

21 P. 235, André LEROI-GOURHAN, L’homme et la matière : évolution et techniques, éditeur Albin Michel, Paris, 2004.

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2. Le façonnage matière première

La création de pièces vestimentaires entièrement confectionnées à la main est peu repandue en prêt-à-porter moyen de gamme. Par contre, certains détails peuvent être sujets au façonnage manuel de la matière première. (Annexe 2.1)

Le crochet et le tricot brut font partie des grandes tendances mode de l’automne/hiver 2011-2012. Ces techniques sont utilisées pour fabriquer une étoffe à partir d'un fil. Elle est constituée de boucles, passées l'une dans l'autre à l’aide respectivement d’un crochet ou d’aiguilles à tricoter. STELLA PARDO utilise le savoir-faire des mères tricoteuses de Lima au Pérou pour développer ses modèles tricotés manuellement.

Travaillée au fuseau et à l’aiguille, la dentelle, tissu ajouré formé de fils entrelacés à l'aide de points formant des dessins, peut être utilisée pour une finition particulière ou un détail d’ornementation.

La guipure est mal connue, on la confond souvent avec la dentelle de part ses vides et ses pleins. C’est en réalité une broderie sans support dont les motifs sont espacés et liés entre eux formant une surface plus ou moins épaisse. Elle tient son aura des traditionnelles guipures d’Irlande, de Flandre, du Puy qui n’existent presque plus.

Le macramé, matière ajourée et légère, revient en force et en couleur chez les créateurs de mode et sur les plages cet été. Il s’agit d’une forme de création de tissu basée sur une technique particulière de nœuds, qui peuvent être plats ou en volume. On utilise habituellement de la ficelle ou de la corde mais certains matériaux plus surprenants peuvent être détournés à cet effet comme des fils de scoubidous.

En variant les fils, les couleurs, les textures, le poids ou le serrage, les produits finis obtenus peuvent être bien différents. L'utilisation d'aiguilles de diamètres et de pointes différentes peut ajouter aux effets. Toutes les combinaisons de mailles et de points, éventuellement avec des techniques plus élaborées, engendrent des tissus possédant diverses qualités, de la gaze au très dense, du très élastique au relativement rigide, du plat au fortement roulé, etc.

Les franges, en fils ou en découpe, par exemple au bas d’un poncho en maille, font fréquemment l’objet de nœuds. ET COMPAGNIE pour la saison hiver 2012 détourne l’idée pour l’appliquer au bas d’un jupon de tulle.

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3. La confection

En confection, certaines actions de découpage, d’assemblage ou encore de pose de bouton sont réalisées manuellement. (Annexe 2.2)

Pour l’été 2013, certains modèles STELLA FOREST feront l’objet d’une broderie anglaise, découpée et évidée à la main, pour des détails au niveau de l’encolure et de l’épaule.

La marque brésilienne CECILIA PRADO, dont la production est décrite comme du « fait main contemporain », reprend l’assemblage patchwork des robes de DOLCE & GABBANA à l’aide d’un fils épais22.

Certains boutons ayant une forme non standard, ne peuvent faire l’objet d’une pose à l’aide d’une machine et sont donc cousus à la main.

4. Les traitements et ennoblissements

Certains traitements et ennoblissements peuvent être réalisés manuellement. (Annexe 2.3)

Le Bandhani est un procédé de teinture artisanale, appelé plus communément le « tie and dye ». L’étoffe est nouée à la main avec du fil, avant d’être plongée dans un bain de couleur. La zone imperméable ainsi créée dessine le motif désiré. Cette technique est notamment utilisée par la marque ANTIK BATIK.

Pour les jeans les traces de délavage, d’usure peuvent être réalisées à la main. C’est le cas pour les pantalons de la marque SALSA. Ilan Gutta, directeur de l’enseigne KAPORAL sur son stand au Salon prêt-à-porter Who’s Next, explique que les moustaches de ses pantalons sont réalisées à la main avec du papier de verre, par brossage, pour un effet usé naturel.

Le froissage des modèles finis chez la marque POUSSIERE D’ETOLE se fait à la main par torsion et compression du tissu à l’aide d’un élastique en caoutchouc puis chauffage par pression à l’aide d’une presse.

22 www.ceciliaprado.com

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5. L’ornementation

L’ornementation de pièces de prêt-à-porter peut revêtir de multiples applications. La broderie et l’impression sont les techniques les plus fréquentes. (Annexe 2.4)

L’application de plumes est le plus souvent réalisée à partir de bandes pré-faites que les marques peuvent acheter au Sentier à Paris. Le caractère fragile de ce matériau ne lui laisse que peu de possibilités d’application en prêt-à-porter et le cantonne généralement au statut d’accessoire indépendant de la pièce d’habillement. Il n’en demeure pas moins qu’il est de plus en plus fréquent dans les défilés de créateurs.

Le Batik est une technique d'impression sur tissu artisanale, vieille de plus d’un millier d’années, réalisée à l’aide de cadre en bois ou imprimée à la main à l‘aide de « block print », tampons en bois sculptés. C'est un art de patience et de minutie. Un motif multicolore est composé d’autant d’empreintes que de couleurs. Cette exigence de production aux antipodes des rouleaux industriels permet la visibilité et la pérennité d’un savoir-faire ancestral. Cette technique est notamment utilisée par la marque ANTIK BATIK.

La broderie désigne l'ornement d'un tissu au moyen de motifs cousus avec des fils de couleurs et de textures variées. Utilisée depuis toujours dans l’ornementation des costumes et des vêtements, elle occupe encore une place primordiale dans la fabrication textile. Le motif peut être brodé mécaniquement ou à la main et peut être enrichi de fils d’or, de perles, de paillettes, de sequins ou encore de plumes. Il existe de multiples techniques de broderie à travers le monde, comme par exemple le point de croix et le canevas, ou plus exotique, la broderie Rabari propre aux tribus nomade dans le Nord-Ouest de l’Inde23. A travers sa marque ANTIK BATIK, Gabriella Cortese en expérimente toutes les applications possibles en variant les points, les fils et les ornementations. Avec la technique de « l’appliqué », elle travaille parfois par fragmentation de tissus cousus à la main.24. Les modèles ANTIK BATIK les plus orfévrés, requièrent plusieurs journées de travail. Chaque pièce, faite à la main, est unique.

La sérigraphie est l’une des techniques d’impression textile les plus anciennes puisqu’elle s’inspire du principe du pochoir. Ce procédé consiste à dessiner un motif sur un cadre de soie ou de nylon à l’aide d’une encre que l’on recouvre ensuite d’une solution de bouchage imperméable. Sec, ce dessin est ensuite effacé par un solvant. Les encres d’impression, étalées à la raclette sur l’écran, peuvent alors pénétrer au travers des mailles pour imprimer l’étoffe. Les couleurs peuvent être multipliées à l’infini en variant les cadres. L’utilisation de la sérigraphie sous-entend un réel travail de confrontation entre la forme

23 Gunvanthi BALARA, « Broderie chez les nomades », Courrier international, 4 août 2005.

24 ANTIK BATIK, BE-POLES, Martin BRUNO, Antoine RICARDOU, Journal INSIGHT voyage au cœur d’une marque Antik Batik.

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du vêtement et les motifs qu’on y appose. La marque DERHY est spécialisée dans la broderie à la perle et dans la sérigraphie au cadre.

6. Une cartographie des savoir-faire

On observe un phénomène culturel ethnique des différentes techniques d’artisanat. Elles sont spécifiques à une zone géographique, à une communauté : Chine, Perse et Inde, Afrique du Nord, Europe.

La broderie et la maille en France restent parmi nos grandes richesses culturelles. Depuis le 12ème siècle, la France est le carrefour de nombreuses cultures. Au fil des siècles elle s’est nourrit de toutes ces influences et aujourd’hui regroupe une pluralité de savoirs encore inégalés dans le reste du monde.

A l’origine spécialisée dans la broderie à paillette et de fil d’or, l’Inde est aujourd’hui un pays où toutes les entreprises essayent de faire toutes les applications artisanales existantes sur le marché. Les régions ne sont plus différenciées par un savoir-faire qui leur est propre, et sont toutes en concurrence.

La Chine est spécialisée dans la broderie de soie et se développe en production de dentelle industrielle et semi-industrielle. La Turquie réalise broderies, impressions, tissages mais n'arrive pas encore à la hauteur de l'inde. Le Maroc est plutôt spécialisé en façonnage prêt-à-porter.

Les techniques utilisées aujourd’hui datent du fin 19ème début 20ème siècle. Actuellement, certaines techniques sont assistées par ordinateur mais ne peuvent remplacer complètement la main. Aussi, les différentes techniques peuvent être mélangées.

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II. Entre contraintes et valeurs ajoutées

La mode est simultanément industrie et art et dépend doublement de son contexte. Le « fait main » est une question centrale pour l’industrie dans son ensemble. Elle est au croisement d’une pluralité de questions d’ordre économique, technique, juridique et éthique.

A. Economiques

1. Le coût d’une singularité

La marque de prêt-à-porter féminin moyen de gamme pour femme COLINE, propose des produits d’entrée de gamme, avec un prix moyen de 10 à 12 euros. Sandrine Dancette, responsable commerciale pour la marque, nous a fait observer lors du Salon Who’s Next Hiver, de janvier 2012, qu’elle rencontrait un problème de conscience. En effet, souvent les clients demandent l’enlèvement de tout élément superflu d’ornementation apporté au vêtement, afin d’abaisser les coûts de production.

Dans son expérience du luxe, Hubert Barrère, Directeur des ateliers Lesage, souligne que ses partenaires lui demandent régulièrement de produire moins cher pour que cela se vende mieux. Cependant, pour lui, la question du prix n’est pas centrale. L’intérêt du « fait main », sa qualité première est de singulariser un produit, lui donner une signature, un supplément d’âme. Cette valeur ajoutée du « fait main » fait l’intérêt du produit même si ça fait grimper le prix. Il considère que ce n’est pas la bonne démarche. En effet, un produit manufacturé avec un savoir-faire, une touche de « fait main » se vendra probablement mieux, même s’il est plus cher qu’un produit qui n’a pas de particularisme.

Lors de son interview, Frédéric Godart nous a relaté les débats d’une conférence sur le luxe à laquelle il a assisté à Barcelone. Tous les représentants du luxe dans la mode, tous secteurs confondus, disent que l’industrie s’est largement dirigée vers une mécanisation de tout le processus de production. Y compris pour les grandes marques de luxe, pour lesquelles le « fait main » (et cela vaut aussi pour la maroquinerie), devient de plus en plus limité parce que cela coûte très cher. Cela

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prend du temps et nécessite des gens très qualifiés. Mais lorsque les grandes marques prennent le risque du « fait main » nous avons un produit exceptionnel.

Ce qui est sûr, c’est qu’économiquement le « fait main » représente des coûts supplémentaires, des coûts de formation, des coûts à long terme. Le prix d’un vêtement a toujours été un élément clé de la compétitivité. Il le demeure, surtout en période de crise. Pourtant d’autres éléments s’ajoutent et ont de plus en plus de poids dans la décision d’achat : le respect de l’environnement, l’éthique et le fait qu’il puisse contribuer à une consommation responsable et à un développement durable.

2. Le niveau de gamme

a) Une connotation haut de gamme

Le « fait main » a aujourd’hui une connotation de haut de gamme et reste souvent assimilé au luxe. En effet, il est associé dans la culture Française à l’excellence de la haute couture. Mais en Europe, le « fait main » paraît également condamné à rester dans le haut de gamme pour cause de coût comme vu précédemment.

Cependant, pour une marque communiquer sur le « fait main » et être en mesure de le prouver, c’est une façon d’ajouter une plus value et d’augmenter son prix25.

b) L’inaccessibilité du marché

Le moyen de gamme correspond à un produit de qualité moyenne dans un contexte d’obsolescence programmée, de guerre des prix, de promotions régulières et de communication de masse.

Il correspond à un marché saturé, dans lequel les avantages concurrentiels sont souvent faibles voire inexistants. Les marques se remplacent les unes les autres. La rentabilité est une affaire de volume, et le succès est souvent lié à la performance des opérations de publicité et de marketing.

25 Interview Pascal GAUTRAND, (Annexe 1.3)

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Depuis les trente dernières années, on observe une prise de pouvoir grandissante de la distribution dans tous les secteurs de la consommation, ce qui correspond à un déplacement général des enjeux stratégiques de l’amont vers l’aval. Par ailleurs, nous avons un ancrage des enseignes du fait de la concentration des marques en groupes organisés26. Cela a pour conséquence un ralentissement de la capacité du marché à intégrer de nouveaux entrants, en France tout particulièrement. Le développement de la distribution organisée a considérablement réduit la distribution multimarques indépendante.

Cette mutation a poussé certaines enseignes à changer leur métier et leurs visées stratégiques. Ainsi, au préalable centrées sur une stratégie d’offre en tant que fabricants, les marques NAF NAF et BENETTON, ont opéré une reconversion vers le métier de succursaliste dans les années 90 et sont aujourd’hui assimilées à deux enseignes de distribution.

Les coûts de la main d’œuvre vont continuer à augmenter même si la production est faite à l’étranger, auxquels vont se rajouter des coûts de transports et des coûts d’organisation. L’enseigne va-t-elle dévier vers le haut de gamme par force, ou va-t-elle devoir continuellement déplacer les lieux de production ?

c) La théorie du sablier

Compte-tenu de la situation de la demande et de la concurrence, ainsi que de ses propres capacités et implantations, une entreprise peut être amenée à s'orienter vers une gamme plus chère (luxe) ou moins chère (discount) présentant pour elle un meilleur équilibre entre volumes vendus et marge unitaire. Cette stratégie est dite « up-market » ou « down-market ». Elle correspond à un changement souvent profond du modèle d'affaire et a un impact important sur l’organisation et les compétences de l'entreprise. De plus, elle suppose que les consommateurs accueillent favorablement le changement d'image, qu'elle ne perde pas trop de consommateurs anciens et rallie suffisamment de consommateurs nouveaux.

La marque LACOSTE a fait un mouvement intéressant vers le haut. Le positionnement d'origine, entre sport et style de vie, est peu à peu devenu une référence du sportswear chic27. La collection automne-hiver 2010 illustre parfaitement ce repositionnement haut de gamme.

26 P. 65, INSTITUT FRANÇAIS DE LA MODE, Vingt ans de système de MODE, Editions IFM/Regard, Octobre 2008. 27 Marketing « Ces marques qui se donnent un nouveau visage », Le Journal du Net

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Benetton n’a pas fait le mouvement, « C'est une marque du passé, qui n'a pas évolué », « avec un positionnement confus », commente un analyste milanais28. Face à des difficultés économiques, la marque a récemment mis une nouvelle stratégie en place, avec un produit, qui doit être « de qualité mais à un prix accessible », et l’accent mis sur le magasin, la communication et l'expansion à l'étranger.

Certaines marques comme ZADIG ET VOLTAIRE, THE KOOPLES, etc. peuvent surfer sur une vague stylistique, mais restent positionnées « au milieu ».

« Au milieu c’est vraiment très difficile », explique Frédéric Godart. Cependant, il faut être prudent, la montée en gamme a également ses limites.

3. Un dilemme stratégique

Dans l’économie de marché actuelle du prêt-à-porter féminin, l’intensification de la concurrence et le repli du marché provoquent une détérioration des performances des distributeurs29. La variable prix retrouve une place importante dans le jeu concurrentiel. Les enseignes qui ont fait le pari de poursuivre leur montée en gamme prennent le risque d’être prise à contre-pied. La politique gamme/prix est un choix difficile face à l’apparition des pratiques telles que les sites de déstockage qui ne cessent de s’amplifier. Il s’agit là d’un dilemme stratégique.

28 Dominique MURET, Les entreprises – Textile, habillement, « Benetton tourne la page », Lsa. fr, 03/05/2012. 29 Etude, « Le prêt-à-porter féminin, Quelles stratégies des distributeurs face à un retournement conjoncturel durable », PRECEPTA groupe XERFI, juin 2008, 260 p.

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B. Techniques

1. Une qualité

La qualité peut être définie de manière objective par quatre éléments : fiabilité, respect des normes, performance et durabilité30. Un produit dit de qualité doit répondre aux attentes du client à son égard. La qualité des produits dans le prêt-à-porter est essentiellement définie par la qualité des matériaux, des finitions et des teintures.

Un des principaux avantages de l’utilisation du « fait main » dans la production est le signal « qualité » qu’il génère. La grande distribution envoie un signal positif au client et profite de l’image du secteur artisanal pour défendre un niveau plus élevé de qualité qu’à l’habitude.

Pourtant, le « fait main » n’est pas forcément synonyme de qualité. Hubert Barrère distingue ce qu’il appelle le « Made in industriel » du « Made in artisanal ». Chacun des pays, voire chacune des régions apportent une spécificité dans l’habillement liée à la culture et à la tradition avec une maîtrise du geste qui se transmet. La distinction réside souvent dans la qualité des matières premières et la qualité du point. Par exemple, la paillette cousue sur un vêtement industriel (tels que ceux vendus dans la grande distribution) sera de mauvaise qualité. Elle va rapidement se gondoler, peut-être se casser, se décolorer.

Enfin, l’appréhension subjective du design peut fausser la perception du consommateur. Par exemple, même si la mode est aux bords-francs, il faut s’assurer que le consommateur ciblé soit sensible à cette tendance et qu’il ne le considère pas comme un défaut. Il en va de même avec les teintures tie-and-dye, les effets usés, ou les placements motifs sur tissus qui sont utilisés de manière aléatoire sur le produit fini.

30 « Le concept de satisfaction », Agence A2S Communication, www.satisfactionclient.fr

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2. Des savoir-faire et techniques qui se perdent

« La mode progresse là où les traditions régressent » souligne Frédéric Godart dans son livre, Sociologie de la Mode31.Où trouver la qualité, des savoir-faire traditionnels ? C’est un problème concret de sourcing. Dans le « fait main » en France, il est difficile de trouver des fournisseurs, ou de former des gens et de plus cela coûte cher.

a) L’inaccessibilité

Comme nous l’avons vu précédemment, le « fait main » en France est connoté « luxe ». En France, cela prend des dizaines d’années, pour trouver la bonne personne qui fait la bonne teinture, les bons points, la bonne passementerie. Au-delà de la question du coût, c’est aussi une question de relation sociale. Il faut établir la confiance, faire en sorte que les fournisseurs n’aillent pas travailler avec d’autres entreprises. Des maisons comme Chanel ou Hermès qui investissent beaucoup sur cette notion, tendent à protéger leurs fournisseurs et avoir des relations de long terme avec eux. C’est particulièrement flagrant pour certains secteurs qui sont véritablement tenus par le secret. Ainsi, des entreprises de textiles artisanaux françaises, telles que les Soieries ROGER CHEVAL à St Symphorien d’Ozon dans la région lyonnaise refusent catégoriquement de communiquer sur le nom de leur partenaire teinturier.

En tissage « certaines commandes réalisées à la main peuvent prendre deux, trois ou quatre ans à tisser, au rythme de quelques centimètres par jour », explique Bertrand Desailly, Directeur industriel de la société PROVERBIO, une société d’ennoblissement textile32. Dans le textile artisanal, les temps de fabrication sont très longs et ne peuvent correspondre aux impératifs du rythme en prêt-à-porter. Lorsqu’il s’agit d’ornementation, les délais sont plus courts. Mais, en France, les ateliers utilisant des techniques de « fait main » sont inaccessibles aux entreprises de prêt-à-porter moyen de gamme. Lorsque nous posons la question à Hubert Barrère : Les ateliers Lesage, sont-ils susceptibles de travailler pour le prêt-à-porter moyen de gamme ? Il répond « Non, certainement pas. Chez Lesage nous produisons pour le haut de gamme autrement dit le luxe. Chacun son métier. »

31 P. 24, Frédéric GODART, Sociologie de la mode, Editions Découverte, Collection Repères, Mayenne, 2009. 32 « La soie lyonnaise fait le pari du luxe », AFP, 30/11/2011

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Heureusement, techniquement, ce type de pièces peut être fait en dehors des frontières françaises et européennes.

b) La perte des compétences

Il existe des techniques spéciales propres au savoir-faire français, résultat de la mixité de savoir-faire acquis au cours des siècles. Mais, une grande partie de ces techniques se perd. Il y a beaucoup moins d’artisanat qu’autrefois. Et de moins en moins de gens ont une réelle envie d’aller vers les métiers du faire, parce que la société a un peu tendance à les cataloguer, souligne Pascal Gautrand. Aujourd’hui, ne subsistent en France, que 3 000 couturières chez les façonniers de l’habillement. Jean Normand, PDG de BOCAGE AVENIR COUTURE, a souligné lors du Salon Made in France à la Bourse de Paris les 28 et 29 mars derniers, que le système éducatif actuel pousse vers le stylisme et moins vers les métiers de techniciens33. L’évolution des mentalités va peut-être changer avec l’arrivée de cette nouvelle tendance de quête d’authenticité et du « fait main ».

Le problème de la diffusion des savoirs découle du manque d’apprentis, mais également du temps que représente ce type de formation et de la volonté des détenteurs du savoir de le transmettre. Lors de son intervention au cours du Colloque de la Mode sur « le temps, une affaire de mode », avec l’Université de la Mode, Marie-Hélène Massé-Bersani du Mobilier National de Paris a souligné qu’il fallait de huit à dix ans pour former une ouvrière à la technique du point d’Alençon, une technique très spécifique de dentelle à l’aiguille. Dans le documentaire « Signé Chanel », réalisé par Loïc Prigent et diffusé sur ARTE France en 2005, la marque fait face au refus catégorique de Madame Pouzieux, spécialisée en passementerie, de prendre les apprentis que lui envoie l’entreprise34.

Il ne reste pas beaucoup d’acteurs du « fait main », mais ceux qui ont résisté en général vont bien, protégés par les organisations du luxe ou par les aides de l’Etat. C’est bien l’Etat qui a permis au point d’Alençon de perdurer avec la création en 1976 de l’Atelier National Conservatoire du point d’Alençon. Si Hubert Barrère reste très optimiste quant à l’avenir de ces métiers, il n’en demeure pas moins que les compétences se perdent, cela se vérifie à travers toute l’Europe. Frédéric Godart note cependant que le phénomène est beaucoup plus marqué dans la maroquinerie que dans l’habillement.

On retrouve également cette perte de compétences chez le consommateur. Dans le cadre d’une pièce de prêt-à-porter, il manque de culture sur le « fait main ».

33 « Conserver le « Made in France » grâce à la transmission du savoir-faire », le portail des professionnels du luxe, www.abc-luxe.com, 03/04/2012. 34 Feuilleton documentaire Signé Chanel, Loïc Prigent, ARTE France 2005

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En effet, la prospection au près d’un échantillon de consommatrices met en évidence qu’elles ne sont plus capables de faire la distinction entre un vêtement réalisé avec une technique artisanale ou avec une technique industrielle. « Je ne suis pas capable de le dire. On ne sait pas comment c’est fait », souligne Simone, 74 ans, consommatrice de mode prêt-à-porter. Seule une poignée d’initiés est aujourd’hui capable de repérer ces caractéristiques. (Annexe 5)

3. Ouverture du marché

a) Les accords de production à l’étranger

Hubert Barrère nous explique que, dans la broderie française, la haute couture n’a jamais eu de problème à faire du entièrement Made in France. Et pourtant une broderie cela peut être de 100 à 2000 heures de travail sur un vêtement. A un coût français cela atteint des sommes vertigineuses, que le prêt-à-porter ne peut soutenir. Pour sauver cet artisanat et faire qu’il puisse continuer à exister en prêt-à-porter de luxe, les ateliers Lesage ont pris des accords de production à l’étranger. Il s’agit de joint-ventures ou des achats d’entreprise in situ, qu’ils gèrent avec du personnel français et local, avec des conditions quasi identiques à celle que nous pourrions avoir en France. Le prix de revient est plus bas forcément car le coût du travail est moins élevé dans ces pays. C’est une délocalisation positive, selon Hubert Barrère, car elle a sauvé la broderie française qui n’aurait pas pu se développer comme elle l’a fait ces dernières années dans le prêt-à-porter.

b) Collaboration intersecteurs

Aujourd’hui, le marché a beaucoup évolué. Les ateliers artisanaux, historiquement rattachés à la haute couture, élargissent leur activité à d’autres secteurs. Ils passent de la pièce unique à la fabrication de séries. C’est le cas des établissements LEGERON à Paris, qui réalisent toutes sortes de fleurs artisanales en plumes, en soie, en cuir, en latex. Aujourd’hui, ils ont étendu leur activité au chaussant et au prêt-à-porter, ainsi qu’à l’aménagement et la décoration de vitrines.

c) La transmission aux nouvelles générations

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Depuis un siècle, les initiatives fleurissent et des centres d’enseignement spécialisés dans des techniques à la main voient le jour. C’est le cas du Centre d’Enseignement de la Dentelle au Fuseau du Puy, créé en 1975, qui propose des initiations à la dentelle traditionnelle et contemporaine. Il est également possible d’apprendre les différentes techniques de broderie manuelle au cours de stages et formations proposés par les ateliers Lesage à Paris35.

Avec l’aide du Comité Colbert, le luxe joue un rôle important dans la transmission et la préservation des savoir-faire36. Des collaborations avec l’enseignement ont été mises en place afin de « susciter des vocations ». Et la promotion des métiers de la main et du patrimoine immatériel français est réalisée à travers la nomination par le Comité Colbert d’artisans en tant que Maître d’art ou dans l’ordre des Arts et des Lettres.

d) Le développement de l’offre : Salon Première vision

Pascal Gautrand est membre du conseil du Salon Première Vision, qui organise des salons professionnels de mode et de textile. Il souligne que la rencontre entre tradition et innovation créative permet aux techniques de se renouveler. Via de nouveaux marchés avec de nouvelles marques nous pouvons trouver de nouveaux débouchés pour les artisans précise-t-il.

En septembre 2011, le Salon Première Vision a lancé un nouveau projet « Maison d’exceptions », qui va être reconduit en février 2013. Cet espace « dédié à la haute création », ne s’adresse qu’à une partie restreinte du marché de l’habillement37. Mais cette initiative aura un impact sur tout le secteur, avec de nouveaux savoir-faire qui vont augmenter la créativité. Elle crée une opportunité de marché, met en valeur une quinzaine d’ateliers qui fabriquent des produits à la demande, sur-mesure, souvent à la main, parfois très traditionnels et ne pouvant pas être reproduits en très grande quantité. Ils utilisent des techniques très variées de tissage, de tricotage, de dentelle, de broderie, d’ennoblissement... L’offre est dirigée vers des marques qui jusqu’à présent ne travaillaient qu’avec des industriels.

35 lesage-paris.com 36 www.comitecolbert.com 37 www.premierevision.com, premier salon mondial des tissus d'habillement

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C. Juridiques

Juridiquement, le « fait main » est attaché à des problématiques plus larges, géopolitiques, qui prennent en compte la réciprocité, les problèmes de barrières douanières, le protectionnisme etc.

1. Les problématiques géopolitiques

a) Les normes sociales et environnementales

Tous les confectionneurs français sont obligés de respecter des lois sociales et des normes environnementales. Les degrés de tolérance et de contrôle varient dans les pays du monde. Face à des pays sans règlementation, la concurrence devient déloyale. La course au coût dans le bas et moyen de gamme pousse la grande distribution à importer n’importe quel vêtement dont les procédés de fabrication sont interdits en Europe. Il n’y a pas contrôle, souligne Pascal Gautrand.

Les lois sociales comprennent la règlementation du travail, le contrôle des heures, des salaires et des conditions de travail, le respect du droit civil et collectif des travailleurs.

Les normes environnementales dans l’habillement visent à imposer certaines pratiques aux entreprises dans un souci de protection de l'environnement et de développement durable. Il existe tout un arsenal de normes qui s'imposent aux entreprises comme les normes d'émission, de procédé de traitement, de fabrication, de type de produits utilisés, de gestion des déchets, etc. et qui peuvent aussi s'inscrire dans la même démarche que les normes de qualité à travers un label pour les normes non impératives.

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b) Le commerce extérieur

Le secteur du textile-habillement est le plus emblématique du phénomène de délocalisation de l’industrie manufacturière des biens de consommation (Annexe 3). Depuis vingt ans, les importations de vêtements se sont accélérées avec l’ouverture du commerce extérieur. Les accords de commerce libre posent le problème de réciprocité des barrières douanières.

Depuis cinquante ans, les volumes importés ont fortement augmenté, se substituant essentiellement à la production nationale. En 1960, la valeur de la production française représentait 70 % des ventes totales d’habillement et de cuir, elle n’en représente plus qu’un quart en 2006. Cela s’explique en partie par le recours de plus en plus fréquent des industriels et des entreprises commerciales à la sous-traitance et par l’augmentation des marges commerciales.

Les coûts de production avantageux stimulent le développement des volumes d’importation en provenance des pays émergents (Asie, Maghreb…). Depuis 2000, la Chine est devenue le premier fournisseur d’habillement de la France (en valeur). L’abaissement des droits de douane, son entrée dans l’Organisation mondiale du commerce (OMC) puis la levée progressive des quotas d’importation lui ont permis de bénéficier un peu plus de l’ouverture du commerce à son égard. En 2006, elle est suivie par l’Italie, la Tunisie, le Maroc, la Turquie et l’Inde.

Cet essor a contribué, sur le territoire national, à la diminution continue de l’activité et de l’emploi dans la branche de l’habillement. La baisse du prix des importations a également eu pour conséquence la réduction des prix à la consommation, surtout depuis 2000.

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2. Le protectionnisme

a) Le « Made in »

« « Made in » cela ne veut pas dire grand-chose ! », souligne Pascal Gautrand, « cela dépend d’où l’on se trouve sur la planète ». Le « Made in » est conditionné par l’image renvoyée par le pays. Mais c’est difficile pour le consommateur et même pour nous qui travaillons dans la mode de savoir exactement ce que cela recouvre.

Les conditions légales sur la proportion du vêtement qui doit être réalisé dans le pays indiqué sur l’étiquette varient. Les marques jouent avec cela. Frédéric Godart note que, lors de la conférence sur le luxe à Barcelone, certaines personnes ont avoué qu’une grosse partie de l’industrie de la mode ne produit pas là où elle dit qu’elle produit... Finalement, les grandes marques se protègent toujours légalement. Mais en faisant le minimum si cela les arrange. Après tout, il faut maximiser le profit !

Ainsi, « Made in China » est connoté grande distribution. Pour Hubert Barrère, c’est un label de bas prix, pas un label de qualité. A contrario, le « Made in Italia » est très vendeur. Il permet de protéger l’appellation vis-à-vis du marché et de la clientèle et c‘est aussi un gage de qualité. Les enseignes l’ont bien compris. Ainsi, les vêtements peuvent être fabriqués en Chine mais assemblés en Italie.

Le « made in » peut donc être une valeur ajoutée énorme. Mais ce qui se passe derrière, est souvent peu transparent vis-à-vis du consommateur.

Ainsi qu’il a été noté plus haut, il faut différencier le « Made in industriel » et le « Made in artisanal ». Ainsi, si le « fait main » était reconnu comme une qualité en général quelle que soit l’origine, cela pourrait compenser l’aspect « Made in ». Il y a un travail d’éducation du consommateur à faire.

Des marques comme ZADIG ET VOLTAIRE produisent partout à bas coût, en disant « ce n’est pas parce que c’est « Made in China » que c’est mauvais ». Il faut alors l’expliquer et être en capacité de prouver la dimension qualitative du produit et la production réalisée dans le respect des normes sociales. La position moyen de gamme ne favorise pas le passage du message. Certaines marques de créateur ou haut de gamme ont suffisamment de légitimité pour convaincre les clients. C’est le cas de PRADA qui a réalisé en 2010 une collection « Prada Made In… », en collaboration avec des artisans dans le monde entier38.

38 Claire MABRUT, Le monde selon Miuccia, « Prada Made In…, une collection hommage aux savoir-faire traditionnels », madame.lefigaro.fr, 21/12/2010.

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b) Le « Made in France » et « Made in Europe »

« Il faudrait que l’on fasse plus de d’effort pour encourager la création française à se mettre à la portée des petits budgets cela éviterait d’acheter chinois à bas prix et de mauvaise qualité. », observe Agnès, 51 ans, consommatrice de mode prêt-à-porter (Annexe 5.3). Le made in « local » revient en force, en France, en Allemagne, en Italie. « Au niveau de l’impact écologique, si les créateurs arrivent à faire du local, il n’y a pas mieux ! », a soutenu Isabelle Quéhé, directrice artistique de l’Ethical Fashion Show (EFS)39, à l’occasion du salon de février 2012.

Ces produits portent en eux non seulement un savoir-faire, mais aussi l'histoire de France. Pour Hubert Barrère, la perception de la mode française à l’étranger est associée à une notion de culture et de romantisme. Les prix sont plus élevés par rapport à l’Asie, à l’Afrique, et pourtant, note t-il, nous arrivons à vendre nos produits français.

« Vêtements made in France » fait partie du mouvement associatif « Rendez nous notre industrie »40. Ils soutiennent qu’avant cinq ans, la filière française aura disparu et que pourtant il est tout à fait possible de produire dans notre pays une part importante de nos vêtements. « Une volonté politique plus forte permettrait de sauver nos régimes de protection sociale, de réduire notre déficit public, de nous soustraire de l'emprise des marchés financiers et pourrait enfin redonner espoir à nos nombreux concitoyens sans emploi ».

Actuellement il y a un consensus des politiques de toutes tendances pour favoriser la production en France et la production européenne. Hubert Barrère observe que tout ce que les politiques pourront dire ou faire n’aura aucune incidence tant que les acteurs économiques ne s’investiront pas. Toutes les règles peuvent être mises en place, tant que les plus grands groupes mondiaux, qui sont en France, ne jouent pas le jeu du vrai, rien ne changera. Frédéric Godart quant à lui, parle d’un changement de direction vers une période où il sera plus compliqué de produire à l’étranger, simplement parce que les tarifs douaniers vont sans doute augmenter. La question des coûts va être importante.

Lors d’une intervention en classe de marketing d’Alice Rioux, les fondateurs de la marque DAGOBEAR (caleçons et chaussettes pour homme), Adrien Lemaire et Alexis Huille, nous ont confié qu’il est possible de relocaliser les productions 100% industrielles en France, celles pour lesquelles l’investissement en main d’œuvre est minime. Mais pour tous les produits de leur marque nécessitant l’intervention 39 Guillaume DUHAMEL, Mode & beauté : « Le consommateur est de plus en plus ouvert à la mode éthique », www.zegreenweb.com, 14/02/2012. 40 www.rendez-nous-notre-industrie.com www.vetements-made-in-france.com

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humaine, la production est condamnée à rester étrangère. Christel Boniface créatrice de la marque STELLA FOREST, aurait aimé produire en France « mais la politique industrielle de la France (charges et taxes) a tué les entreprises » 41, livre-t-elle. « Le peu qui reste ne travaille que pour le luxe. »

A l’échelle européenne, le cercle Fortuny, le comité Colbert, Walpole British Luxury se sont réunis dans une association. Leur objectif c’est de promouvoir les industries européennes. Et pas uniquement les industries de la création, cela peut être aussi l’automobile, en fait toutes les industries qui ont un élément de créativité. Et de les promouvoir autour de la notion de qualité.

c) Les labels

Nous avons voulu résumer toute la fabrication à un « made in », mais en fait la chaîne est très complexe. De nombreux acteurs, de nombreux savoir-faire dans la réalisation d’un vêtement peuvent être mis en valeur. Comment recréer du lien entre l’humain qui consomme et l’humain qui fabrique ? Il y a actuellement un certain nombre de labels qui apparaissent, pour tenter d’apporter de la transparence sur la fabrication.

Un label permet de valoriser un savoir-faire auprès du grand public et de donner le plus d’informations précises au consommateur. Ce dernier ne porte pas forcément un grand intérêt à la fabrication du fait de son manque de connaissance, mais il commence à faire les démarches pour s’informer.

Pascal Gautrand nous raconte qu’en 1945, en France, 75% des vêtements étaient faits sur mesure par la mère de famille ou la couturière de quartier. A l’école des filles, la couture faisait partie des programmes. Toutes les femmes cousaient. Des patrons étaient vendus avec le magazine Vogue. Nous étions alors en contact avec toute la chaîne amont, les fournisseurs, etc. Aujourd’hui, nous n’avons plus du tout d’éléments en lien avec la fabrication, nous n’avons que les images des créations des marques. La mode a changé sa façon de communiquer. Elle communique au travers du défilé, de la campagne publicitaire, du mannequin, du styliste, du designer, ou de la personnalité qui va endosser le vêtement. Nous ne savons pas qui est le tisseur, le brodeur, de tel ou tel vêtement. Les fournisseurs et producteurs doivent payer cher la marque qui commercialise le produit pour être cités, c’est pourquoi très peu le font.

Par exemple le label « Vosges Terre Textile » , une AOC industrielle pour les produits textiles du massif vosgien, vise à proposer au consommateur un signe distinctif qui puisse lui garantir que les produits porteurs de ce label ont été fabriqués dans les Vosges dans le respect de la tradition .Il y a toute une histoire du textile dans

41 STELLA FOREST, « Le rêve est possible avec de petits moyens », Art et Culture, www.leprogres.fr, 09/02/2012.

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les Vosges, une histoire de savoir-faire qui se décline selon les différentes étapes de fabrication : la filature, le tissage, tricotage, l’ennoblissement, la confection.

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D. Ethiques

En plus des contraintes légales qui pèsent sur la mode, il existe des contraintes morales. Parmi les évolutions notables de ces derniers mois en matière de consommation, Evelyne Chaballier, Directrice des études économiques et prospectives à L’IFM, note une relation plus investie des consommateurs avec les marques, se traduisant par une prise de parole croissante sur le Net et par l’expression d’exigences en matière de responsabilité sociale et environnementale42. De plus, la raréfaction des ressources, l’accroissement démographique et la perte de vitesse de l’Europe amènent aujourd’hui le secteur à prendre en considération le développement durable.

1. La dimension social du « fait main »

La mode est accusée, d’un point de vue politique, de générer des besoins de consommation artificiels43. Il est pourtant possible de mener des actions éthiques via la confection, à l’aide de programmes humanitaires ou associatifs.

a) Des normes sociales

La question du « fait main » va au-delà du purement économique, c’est également une question sociale. Il faut établir la confiance avec le consommateur et avec les acteurs potentiels de la confection.

Lors de la conférence à Barcelone, le cercle du luxe Fortuny, l’équivalent espagnol du comité Colbert, a estimé à 500 000 le potentiel de création d’emplois en Europe autour de cette notion d’artisanat, dans le « fait main » dans la mode ou dans la maroquinerie.

Les entreprises de textile sont fréquemment montrées du doigt pour leurs recours aux sweatshops (sweat factory) ou ateliers clandestins44. Les artisanats du 42 L’actualité de la Fédération Française du Prêt-à-Porter, « Trois questions à… Evelyne Chaballier », E-Prêt News, octobre 2011. 43 CRANE et BOVONE, 2006, cité p. 57 in Sociologie de la mode, Frédéric GODART, Editions Découverte, Collection Repères, Mayenne, 2009. 44 Novethic.fr, le média expert du développement durable

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monde entier sont tout à fait au même niveau de sensibilité, de respectabilité et de qualité. Comme souligné précédemment, ce qui change se sont les règles du jeu sociales dans chacun des pays et combien coûte l’heure manufacturée.

L’achat socialement responsable (ASR) correspond à la part d’investissements financiers des organismes publics et privés pour acquérir des produits, travaux et services présentant un impact social positif45. Ainsi l’entreprise prend en considération les impacts sociaux lors de la décision d’achat des produits ou travaux au long de leur cycle d’utilisation. En appliquant l’ASR, les acheteurs peuvent avoir une influence sur certaines questions telles que la santé et la sécurité sur le lieu de travail, le respect des standards internationaux de droit du travail, la qualité de l’emploi, les politiques d’inclusion dans le marché du travail, la lutte contre le travail des enfants et le travail illégal, ou l’achat éthique des matières premières. Le guide RESPIRO pour l’ASR du textile et habillement fournit des informations précises pour les acheteurs souhaitant acquérir des produits textiles et habillement d’une manière socialement responsable.

Sur le plan des risques liés à la santé, Pascal Gautrand a mis en évidence lors du Colloque de la Mode sur « le temps, une affaire de mode », avec l’Université de la Mode, les risques de la pratique trop longue du point d’Alençon. En effet, les ouvrières ne doivent pas passer plus de trois heures à trois heures et demie par jours sur leur ouvrage, puisque ce travail peut détériorer la vue.

b) Le commerce équitable

Il n'existe pas de définition protégée légale du commerce équitable mais la définition communément admise du commerce équitable se présente comme suit : « Le commerce équitable est un partenariat commercial fondé sur le dialogue, la transparence et le respect, qui vise à plus d'équité dans le commerce international. Il contribue au développement durable en offrant de meilleures conditions commerciales et en garantissant les droits des producteurs et des travailleurs marginalisés - particulièrement dans le Sud. »46

La World Fair Trade Organization (WFTO) a adopté dix principes de commerce équitable, à partir desquels fonctionne le mouvement du commerce équitable. Il

45 Le Guide RESPIRO pour l’achat socialement responsable du textile et de l’habillement, Silke Moschitz et Francesca Crippa (EUROCITIES), Peter Defranceschi et Amalia Vidal (ICLEI – Les Gouvernements Locaux pour le Développement Durable), Edition EUROCITIES asbl, Bruxelle, 2007. 46 fairtrade.be

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s’agit de donner une chance à des producteurs défavorisés, en toute transparence, avec des conditions commerciales équitables, des prix justifiés et des salaires décents, aucun travail des enfants ni de travail forcé, l’égalité des chances, des conditions de travail justes, de renforcer les capacités, dans le respect de l'environnement.

Pour ARTISANS DU MONDE, l’artisanat et un enjeu spécifique. Les partenaires du sud classe les producteurs d’artisanat comme parmi les communautés les plus marginalisées et les plus dépendantes de la filière commerce équitable. Les militants d'ARTISANS DU MONDE associent une action concrète en faveur du développement des communautés des pays pauvres, et la valorisation de la culture et des savoir-faire de ces communautés. Ils justifient leur mode de distribution dans les boutiques en notant que le volume de production des communautés avec lesquelles ils travaillent est inférieur au seuil à partir duquel les grandes et moyennes surfaces acceptent de travailler47.

Isabelle Quéhé est directrice artistique de l’Ethical Fashion Show (EFS), un salon qui est une véritable plate-forme de rencontres avec des fabricants et d’échanges avec d’autres marques, composé de trente à quarante marques européennes exposées, une centaine de tous les continents. Pour elle, la conjoncture économique est certes défavorable mais les consommateurs vont vouloir « de meilleurs produits, qui ont du sens et qui sont accessibles au prix d’une mode « non-responsable » »48. « Globalement, le consommateur final est de plus en plus ouvert à la mode éthique et il peut comprendre qu’elle soit un peu plus chère, parce que les gens sont payés à leur juste prix sur toute la chaîne de fabrication, et le fait que la hausse du prix des matières employées se répercute sur le prix final. »

Certaines marques comme LEVI’S et PROMOD proposent déjà une collection de mode « éthique ». « Les gros savent bien que, grâce ou à cause d’Internet, ils seront vite montrés du doigt s’ils ne jouent pas le jeu », observe Isabelle Quéhé. Ainsi, sous la pression des associations de protection de l’environnement, un nombre croissant de grandes enseignes – ADIDAS, LACOSTE, H&M et PUMA par exemple – se sont engagées à « verdir » leur processus de fabrication. Les consommateurs sont de plus en plus nombreux aujourd’hui à vouloir consommer des produits de meilleure qualité, qui durent plus longtemps. L’aspect éthique s’est corrélé à la perception d’employés mieux formés, mieux payés, protégés.

47 www.artisansdumondelyon.org 48 Guillaume DUHAMEL, Mode & beauté : « Le consommateur est de plus en plus ouvert à la mode éthique », www.zegreenweb.com, 14/02/2012.

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Enfin, il est plus facile de se lancer dans la mode éthique aujourd’hui qu’il y a huit ans. Le sourcing est plus facile, il y a plus de matières et plus de regroupements et de communication autour des fournisseurs.

c) Les limites du commerce équitable

Le commerce équitable a tout de même ses détracteurs. « C’est difficile à vérifier, donc je n’en tiens pas compte », souligne Simone, consommatrice de mode de 74 ans (Annexe 5.1). L’auteur Christian Jacquiau dans son livre Les Coulisses du commerce équitable49, doute, comme une partie sensible des consommatrices, de la bonne foi de certains « labels » du « commerce équitable ». Il invoque la réalité des prix, bien en deçà de l'équivalence escomptée, laissant supposer que ces nouveaux intermédiaires prélèvent autant que les autres qu'ils décrient et qu'ils cherchent à concurrencer. Il déclare également que le « commerce équitable n'est devenu dans bien des cas qu'un argument de vente comme un autre » et qu'il constitue pour un certain nombre d'acteurs économiques une « niche » commerciale supplémentaire qui permet de différencier un produit d'un autre aux yeux du consommateur final.

D'autres, comme le Cato Institute, soulignent qu'en augmentant les prix des produits « équitables », le commerce équitable incite de nouveaux producteurs à entrer sur le marché50. Dès lors, cela augmente la production et fera baisser le cours des produits non équitables, au détriment des petits paysans qui ne produisent pas « équitable » et de l'environnement. Pour ces critiques, en ayant le même effet qu'une subvention sur des produits au cours bas, le commerce équitable ne fait qu'exacerber le problème en augmentant la production et en encourageant la poursuite d'activités non viables au détriment de productions réellement utiles51.

Frédéric Godart rappelle qu’il ne faut pas être naïf, parce que nous sommes dans le business et qu’il s’agit avant tout de faire du profit.

Des marques comme AMERICAN APPAREL ou EKYOG ont tout de suite insisté sur les aspects éthiques de leur production. Cependant, le vêtement éthique se vend au travers de beaucoup de marques qui ne marchent pas toujours. La clientèle en grande partie adhère à cette idée de vêtement éthique mais n’achète pas forcément ces produits. S’il peut y avoir une adhésion de principe, le porte-monnaie ne suivra pas forcément. 49 Christian JACQUIAU, Les coulisses du commerce équitable : Mensonges et vérités sur un petit business qui monte, édition Mille et Une Nuits, 2006. 50 BRINK Lindsey, CATO Institute, Individual Liberty, Free Markets, and Peace: « Grounds for Complaint: Understanding the “Coffee Crisis” », mai 2003. 51 www.citizenshipfoundation.org.uk

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De plus, pour beaucoup de consommatrices, les valeurs morales en tant que telles ne vont pas forcement déclencher un acte d’achat (Annexe 5). Ce qui va déclencher l’acte d’achat pour Frédéric Godart, c’est, « si à prix égal, je peux faire un geste éthique je le ferai ». Aujourd’hui le consommateur occidental n’est plus prêt à faire cet investissement pour soutenir des communautés dans un pays émergeant. Ce n’est plus un argument de vente. En effet pour bien des consommateurs l’idée de défendre l’emploi local est plus importante aujourd’hui, dans nos pays occidentaux qui traversent de graves crises et ont un taux de chômage important.

2. Des responsabilités environnementales

a) La « Corporate Social Responsibility »

Un des mots-clés important de toutes les conférences auxquelles a participé Frédéric Godart ces dernier temps, c’est CSR : Corporate Social Responsibility. Cela englobe tous les aspects éthiques et humanistes des entreprises à travers principalement le prisme de l’environnement. Cette approche traite entre autre de la protection des rivières puisque l’industrie du textile est très polluante, ou encore de la question du sourcing avec la préservation des sources d’approvisionnement. Certaines grandes marques l’ont compris et protègent des zones, pour les peaux de serpent, le cachemire, etc.

b) La perception écologique du « fait main »

La première réaction de Frédéric Godart lors de la confrontation environnement/ « fait main » a été de parler d’un impact environnemental moindre que la production industrielle dans le textile. Ce qui permet l’utilisation des écolabels qui se multiplient.

De jeunes marques, plus confidentielles, se rallient au mouvement éthique, solidaire et responsable. La marque franco-péruvienne STELLA PARDO, dont les ateliers sont installés au Pérou, utilise le savoir-faire des mères tricoteuses de Lima52. Coton bio pima et baby alpaga sont ses matières premières de prédilection. La technique de teinture, héritée des Incas, est faite par bain de fleurs. Chaque pièce est réalisée à la main, pour des créations durables et désirables en même temps.

52 Caroline MARIN, « Le chic éthique : La tendance à suivre », Style papers, n°30, Août 2012, pp. 44-47.

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Cependant, nous pouvons observer que les choses sont différentes selon les secteurs. Ainsi, le mode de production de la technique artisanale du batik, vieux de plus de trois cent ans, doit désormais répondre aux exigences environnementales de notre époque. Les matériaux de base et les résidus de leur fabrication sont devenus problématiques, le procédé consomme d’énormes quantités d’eau pour le rinçage des colorants, beaucoup de combustible pour faire fondre la cire, puis la retirer dans des bains bouillants, et d’innombrables produits chimiques pour la teinture et le fixateur53.

De plus, l’empreinte carbone dans l’habillement est énorme. Le coût environnemental du transport pourrait être réduit si les entreprises rapprochaient leur centre de production. Frédéric Godart rappelle qu’ « un geste écologique c’est de consommer local ».

L’impact sanitaire et environnemental du « fait main » est assez ambigu et dépend du segment dans lequel ont se trouve. Il est souvent mis en sourdine par les entreprises et légitime une certaine prudence pour l’image de marque. Pourtant de manière générale, le « fait main » est perçu comme étant écologique, mais le consommateur demande des garanties qui sont souvent incomplètes.

c) Les labels

Les Certifications et Labels sont des documents prouvant la mise en œuvre de politiques de RSE (Responsabilité Sociale des Entreprises) que les entreprises peuvent obtenir en passant des audits indépendants, en rapport soit à des produits spécifiques soit à la gestion d’entreprise dans sa totalité. Les certifications et les labels pertinents dans le secteur de l’habillement comprennent les normes telles qu’OekoTex1000, SA8000, ISO140001 et EMAS.54 En matière de contrôle, les certifications telles que le Label OekoTex ou équivalents peuvent être utilisées pour certifier que les produits sont manufacturés en respectant les standards de santé et de sécurité sur les sites de production de l’entrepreneur (ou de ses sous-traitants), mais également celle des utilisateurs finaux des vêtements55. Le Label SA8000, quant

53 Ninuk MARDIANA PAMBUDY, Développement durable: « En Indonésie, l’artisanat du batik se met au vert », Courrier International, 22/04/2010. 54 Le Guide RESPIRO pour l’achat socialement responsable du textile et de l’habillement, Silke Moschitz et Francesca Crippa (EUROCITIES), Peter Defranceschi et Amalia Vidal (ICLEI – Les Gouvernements Locaux pour le Développement Durable), Edition EUROCITIES asbl, Bruxelle, 2007. 55 www.oeko-tex.com

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à lui, certifie des conditions de travail décentes. Tandis que le Label EMAS évalue les performances environnementales.

La marque STELLA PARDO adopte une démarche responsable et durable concernant l’environnement. Aussi bien les matériaux, que les teintes naturelles des pièces qu’elle utilise répondent aux normes ECOSCALE.

Il existe un certains nombres de labels à la disposition des entreprises qui développent le « fait main » éco responsable. Contrairement aux labels de provenance, il existe peu d’assurance de réelle certification pour le consommateur. En effet, le nombre de labels réellement éco-responsable est limité. Un grand nombre d’entreprise créent leur propre label sans études ni certification stricte, et les apposent sur leur produit. Il n’existe pas de lois actuelles qui protègent le consommateur de cette « contrefaçon » de labels. Ils ne sont que dénoncés lors d’émissions comme Cash Investigation avec la journaliste Elise Lucet56.

56 « Toxiques Fringues », Cash Investigation, magazine d’enquêtes sur le monde des affaires et des grands groupes internationaux, France 2, 18/05/2012.

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E. Récapitulatif des opportunités et menaces

LE « FAIT MAIN » DANS LE PRET-A-PORTER MOYEN DE GAMME POUR FEMME Opportunités Menaces

- Le caractère « fait main » apporte de la singularité et une plus value au produit qui permet, d’augmenter et de justifier son prix.

- La connotation haut de gamme, qualitative, permet une réappréciation du niveau moyen de gamme

- Le produit « fait main » est connoté consommation responsable

- La consommatrice prend de plus en plus conscience des enjeux de son choix vestimentaire, dans la protection sociale et de l’environnement

- La spécificité des savoir-faire permet une relation de long terme avec les fournisseurs

- Les ateliers artisanaux s’ouvrent au prêt-à-porter

- Le made in « local » revient en force, consensus des politiques de toutes tendances pour favoriser la production en France et la production européenne

- L’artisanat est sujet à un fort engouement

- les savoir-faire s’exportent pour un coût de main d’œuvre plus faible

- Les labels apporte de la transparence sur la fabrication, permet de valoriser un savoir-faire auprès du grand public

- En mode éthique, le sourcing est plus facile qu’il y a huit ans

- Les coûts de main d’œuvre sont supérieurs aux coûts de production d’un vêtement classique

- Le temps moyen de fabrication est plus important

- Le type de fabrication demande des gens qualifiés

- Une différenciation existe entre « Made in industriel » et « Made in artisanal »

- Le statut moyen de gamme est difficile à tenir, le marché est saturé avec des avantages concurrentiels souvent faibles voire inexistants

- Le déplacement des enjeux stratégiques de l’amont vers l’aval donne du poids à la distribution.

- Sourcing difficile en France

- Disparition des savoir-faire

- Diminution continue de l’activité et de l’emploi dans la branche de l’habillement sur le territoire national

- Délocalisation nécessaire pour abaisser les coûts en main d’œuvre

- Les réglementations diffèrent suivant les pays de production

- Existence de risques sanitaires et environnementaux pour certaines pratiques

-Problème de la perception du « Made in »

- Les consommatrices ne portent pas forcément un grand intérêt à la fabrication du fait de leur

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manque de connaissance

- Les consommatrices se méfie des certifications, demande de la transparence, des garanties plus complètes

- La clientèle en grande partie adhère à l’idée de vêtement éthique mais n’achète les produits qu’à prix égal

- Soutenir des communautés dans un pays émergeant n’est plus un argument de vente

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III. Vers la construction d’un modèle idéal

Le « fait main » dans le prêt-à-porter moyen de gamme peut être source de développement dans un cadre précis. L’enjeu est de mener une stratégie de rupture en concevant un business modèle original qui permet de descendre à des niveaux de coût d’achat et de marges inaccessibles aux acteurs traditionnels, tout en proposant une offre parfaitement différenciée aux yeux du consommateur.

A. Le marché

Beaucoup d'entreprises et notamment dans le e-commerce, proposent des produits divers, à des prix différents et à la qualité variable. Il est nécessaire de faire des choix, afin de conserver l’image et la notoriété de la marque.

1. Un marché de niche

Face à une consommatrice plurielle et complexe, le marché du prêt-à-porter est devenu un marché de niche. Chaque enseigne doit trouver son originalité, les couleurs qui lui sont propres et un style de magasin bien reconnaissable et identifiable dès l’extérieur.

Ainsi, MARKS & SPENCER a payé aujourd’hui ses erreurs stratégiques. L’enseigne a en effet dû fermer ses 18 magasins en France en 2001. Une journaliste de La Tribune évoque un manque d’adaptation de la part de l’enseigne : « le distributeur britannique est une vieille dame qui n’a pas su s’adapter à temps au bouleversement de la distribution moderne avec l’arrivée des ZARA, NEXT ou MANGO »57. L’erreur de MARKS & SPENCER a été en effet de positionner l’ensemble de son offre de manière uniforme, délaissant l’effet de mode. Sa cible était trop large, l’enseigne négligeait l’individualité féminine. Son offre se voulait extrêmement basique. La cliente ne pouvait que s’en détacher.

57 « Des restructurations différentes selon les entreprises » La Tribune, 02/04/2001, N. T.

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LULU CASTAGNETTE, quant à elle, fournit un bon exemple de niche sur le prêt-à-porter féminin. Avec son ours fétiche, la marque propose un prêt-à-porter très mode pour les jeunes filles de quinze à vingt-cinq ans. Cependant, elle reste consciente du caractère éphémère de son positionnement, et prend soin de faire évoluer sa communication en même temps que ses clientes, tout en assurant vouloir rester élitiste (pas plus de 100 unités en France). Au-delà, le concept perdrait de sa pertinence. En restant fidèle à sa cible-clé, la marque conjugue ainsi l’originalité de son concept et de son style sans difficulté.

Une enseigne de prêt-à-porter féminin ne doit s’adresser qu’à une infime partie des consommatrices et à chaque enseigne, quelle que soit la ou les cibles visées correspond toujours un seul concept. Le parti-pris du « fait main » s’inscrit dans cette dynamique. Le champ d’investigation de la marque est limité, mais cela rend l’approche commerciale plus authentique et mieux perçue.

2. Le consommateur

Il est impossible de pouvoir prétendre connaître la consommatrice de cette niche : autant de femmes, autant de comportements différents face à la mode, face au prêt-à-porter. Ces distinctions s’opèrent essentiellement par âge. Aucune étude sur l’appréhension du « fait main » dans le prêt-à-porter par les consommatrices n’existe à ce jour. Nous ne pouvons que tenter de la cerner, de façon concrète, via des typologies et des analyses statistiques plus générale.

a) De nouveaux comportements d’achat

La conjoncture a permis de mettre en évidence de nouveaux comportements d'achat, une véritable évolution des habitudes de consommation spécifiques au marché du prêt-à-porter.

Depuis les vingt dernières années, la proportion de femmes sur le marché du travail a augmenté d’un quart et de plus en plus qualifiées, elles représentent aujourd'hui 39 % des cadres contre 30 % il y a vingt ans58. La moitié des femmes considèrent la fonction de l'habillement comme purement basique et utilitaire. La

58 Source INSEE

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qualité, les couleurs et le style sont les premiers critères de choix des produits. Les exigences de la consommatrice dans l’habillement peuvent englober de multiples caractères et styles. Elle est devenue « multidimensionnelle » et « plurielle » suivant le moment de la journée. Karl Lagerfeld appelle « troisième voie », une tendance qui consiste à « mélanger des choses chères et pas chères ». Martine Leherpeur parle de « diagonale du fou » avec « un consommateur qui est le matin chez Dior et le soir chez H&M » 59.

La consommatrice se renseigne, lit la presse féminine, elle surfe sur le net, est sans cesse sollicitée pour participer à des ventes privées etc. Mais surtout, elle aime sentir qu’elle fait de bonnes affaires et n’accepte plus que difficilement de payer le prix fort si elle peut trouver ailleurs le même produit à un prix plus intéressant. La relation entre la marque et la consommatrice a aussi évolué. La consommatrice n’est plus fidèle à une seule marque. Elle n’achète pas un produit uniquement parce qu’il est d’une certaine marque, mais c’est la marque qui justifie l’achat et son prix. Elle est le garant de la bonne qualité du produit et rassure le consommateur dans son choix.

L’essor des ventes en ligne d'habillement féminin est dû principalement aux femmes de25 à 44 ans. Ce sont elles qui consacrent le plus de temps et d'argent à leurs achats sur internet. 13,4% des achats sur le web sont effectués par cette catégorie, selon l'Institut Français de la Mode (IFM). En revanche, pour les 45-65 ans, et les femmes de moins de 24 ans, la part retombe à respectivement 8,6% et 8,3%60.

« Les 25-44 ans sont actives professionnellement, elles ont moins de temps à consacrer à l'achat en boutique », a déclaré lors d'une conférence de presse François-Marie Grau, secrétaire général de la Fédération Française de Prêt-à-Porter Féminin (FFPAPF), qui note « l'interconnexion: de plus en plus de femmes se renseignent sur internet avant d'aller en magasin, et vice-versa, voire achètent sur internet depuis un magasin ».

Comme nous l’avons vu précédemment, la sensibilité au prix varie, ainsi que celle vis-à-vis de la qualité des vêtements.

59 Martine Leherpeur, www.lsa.fr, 2004 60 « Revue de presse, Bilan économique 2011 », La Fédération Française de Prêt-à-Porter Féminin (FFPAPF).

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b) Des budgets qui diffèrent

Selon l'Institut Français de la Mode (IFM), le budget moyen consacré aux vêtements a légèrement diminué par rapport à l'an dernier, il a atteint 410 euros en 2011 (contre 421 euros en 2010)61. Les différences de budget sont importantes selon l'âge des consommatrices. Les 13-24 ans restent les plus grandes acheteuses et ont ainsi dépensé en moyenne 599 euros, devant les 50-59 ans avec 485 euros, et les 60-69 ans avec 469 euros. En revanche, les 70 ans et plus semblent renoncer aux futilités de la mode avec 180 euros de budget moyen.

Le prix représente pour le consommateur un élément important dans le processus d’achat. Mais contrairement à ce que l’on peut penser, le facteur prix arrive souvent second dans le processus par rapport à l’image, la qualité du produit et l’attrait de celui-ci. Et le client privilégie parfois d’autres critères62.

Différents facteurs déterminent l’attitude du client par rapport aux prix. Le principal est celui de la catégorie socioprofessionnelle, il y a ensuite la présence ou non d'enfants et à la catégorie socioprofessionnelle du conjoint.

Dans la population française, le Credoc63 a réalisé une étude typologique64 qui détermine six grandes classes du comportement face aux prix.

Les chasseurs de prix (14%) qui privilégient les prix bas, adeptes des magasins hard discount et profitent des offres promotionnelles. Il s’agit principalement de foyer à faible revenu.

Les solos insensibles (10%) sont indifférents au prix, mais ne vont pas pour autant être très exigeants sur la qualité. Ce sont souvent des personnes vivant seule.

Les experts malins (27%) : 18–34 ans et couples actifs avec enfants, ils souhaitent économiser de l’argent, cherchent les bonnes affaires sans pour autant occulter la qualité. « Le prix est un indicateur de la performance à l’achat ».

Les hédonistes (31%) s’intéressent à l’appartenance des marques à des associations et aux garanties écologiques et éthiques des fabricants. « Le prix est un indicateur d’appartenance ».

61 « Les Françaises refrènent leurs envies de mode », Le Monde, Economie, 24/02.2012. 62 www.mercator-publicitor.fr 63 Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie 64 Pascal HEBEL, Nicolas FAUCONNIER et Morgane DAVID, « La nouvelle sensibilité des consommateurs aux prix », Credoc, Cahier de recherche n°125, novembre 2005.

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Les reclus de la conso (6%) correspondent à des individus sans trop d’opinions qui changent peu leurs habitudes d’achat et préfèrent les supermarchés. Il s’agit principalement de personnes âgées

Les bons clients (12%) regardent très peu les prix et ne profitent pas des offres promotionnelles. Ils ne côtoient jamais les hard discounters.

c) Le profil idéal de clientèle cible

Du fait de l’évolution des consommatrices « modernes », il est possible d’établir une classification de celles-ci (Annexe 4), pour une exploitation au plus proche de la cible idéale pour une enseigne de prêt-à-porter féminin moyen haut de gamme basé sur le « fait main ».

La part de population féminine la plus dépensière est le groupe 15-24 ans avec 23,5 % des ventes. Ce phénomène s'explique par l’absence de charges (enfant, loyer, etc.). Ainsi, les articles de prêt-à-porter sont achetés par des femmes dont presque un quart est âgé de moins de 25 ans. Seulement, en ce qui concerne le « fait main », les revenus des consommatrices des 15-30 ans ne sont pas assez importants. Cette tranche d’âge est très ouverte à la fast-fashion et à la publicité. Mais culturellement, elle est moins sensible aux valeurs du « fait main » et de l’artisanat. Ce qui lui importe, c’est le produit fini et le nom de la marque.

La métro-génération est la génération la plus touchée par le life style, en quête permanente de ce qui se distingue de l’ordinaire, de ce qui est inattendu, et qui reflète une certaine représentation de soi qui nous plaît. Elle correspond aux individus âgés entre 25 et 35 ans, vivant en ville et souhaitant être en permanence précurseurs des tendances en matière de mode, de voyages, de sorties, etc. Le life style permet de comprendre les nouvelles tendances qui tendent à attirer de plus en plus de personnes de milieux différents. Ces nouveaux consommateurs s’accordent de temps en temps, et même de façon exceptionnelle, la possibilité de s’offrir des petits plaisirs luxueux.

En plus d’un certain niveau de revenu, il faut viser des classes d’âge moins influencées par la mode. La mode éthique faite main sera plus chère et ne peut suivre le rythme de la Fast fashion. Frédéric Godart nous parle d’une tranche d’âge alors

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plus élevée, entre 30 et 40 ans, voire 50 et 60 ans de catégorie socioprofessionnelle supérieure. En effet, avec ces tranches d’âge, le revenu augmente et les envies des consommatrices se déplacent vers une mode plus réfléchie et inspirationnelle. C’est dans la trentaine en moyenne que les femmes ont des enfants. Elles sont alors plus concentrées sur les besoins du foyer et ont des exigences en matière de mode plus pratiques. Entre 40 et 50 ans, les femmes, par contre, prennent plus soin d’elles et accordent plus de temps pour leurs achats personnels. Elles ont souvent acquis la culture nécessaire pour apprécier le travail artisanal du « fait main ».

Pour Frédéric Godart, le troisième âge reste à fort potentiel. En effet, la durée de vie s’allonge et la femme senior a envie de rester coquette. Elle rejette le vêtement de ville formel pour des tenues plus décontractées, symbole de jeunesse et de santé. A partir de 60 ans, les femmes sont en général déconnectées de l’actualité et plus particulièrement de la mode65. L’habillement, pour elles, est d’abord utilitaire. Ne faisant pas souvent les boutiques, elles sont plus enclines à la vente par correspondance. Elles renouvellent peu leur garde-robe plutôt axée sur des basiques dans lesquels elles se sentent bien, et privilégient les dépenses en accessoirisations. Il est très difficile pour elles de s’habiller. En effet, il existe très peu d’entreprises spécialisées sur ce marché et les enseignes ne prennent pas en considération l’évolution morphologique avec l’âge (Annexe 5.1). Leurs achats sont plus réfléchis qu’impulsifs.

Elles ont un fort potentiel financier, même si les femmes continuent à court terme de partir en retraite avec des pensions inférieures en moyenne à celles des hommes66.

Le « fait main » dans cette tranche d’âge peut apparaître dépassé s’il est axé de manière trop référentielle au passé. La tendance pure et dure répond aux inspirations d’une tranche d’âge plus basse. Il faut être attentif aux tendances générationnelles et adapter les produits.

Dans le cadre des enseignes de prêt-à-porter moyen de gamme pour femme spécialisées dans le « fait main » et/ou l’artisanat, nous observons que la cible de départ est une femme avec un revenu important que les enseignes imaginent entre 20 et 30 ans pour COTELAC, entre 30 et 50 pour COLINE. La rencontre en point de vente avec les vendeuses des différentes enseignes nous révèle qu’il s’agit plus d’un

65 A. LAVAUD « Par leur indifférence, la majorité des femmes taillent une veste à la mode », CB News, 06/03/2000. 66 Valérie ALBOUY, Zohor DJIDER, Alice MAINGUENE, INSEE, La convergence des situations entre hommes et femmes s’opère, mais parfois bien lentement, Regards sur la parité, édition 2012.

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état d’esprit, d’un univers, que d’une tranche d’âge. La clientèle qui fréquente l’enseigne ANTOINE & LILI est « de tous âges », pour COTELAC elle se révèle être de 20 à 90 ans et pour STELLA FOREST de 16 à 80 ans (Annexe 7).

Le Journal du Textile écrit que « désormais la mode vise touts les âges, de 7 à 77 ans »67. Dans cet article Nathalie Friedlander Samson, cofondatrice de BRAND BAZAAR, souligne que les femmes « ne choisissent plus leurs vêtements pour entrer dans une catégorie, mais bel et bien pour se sentir en cohérence avec leur personnalité ». Aujourd’hui « les marques ne segmentent plus leur offre en fonction des critères de l’âge ».

d) Des marchés annexes

Le marché du prêt-à-porter grandes tailles touche potentiellement une grosse partie de la population française. Selon les chiffres de l’Institut Français du Textile et de l’Habillement (IFTH), 33 % des Français, hommes et femmes, souffrent de surpoids ou d’obésité, soit près d’une personne sur trois et cette tendance augmente d’année en année, y compris chez les plus jeunes. « Il y a peu de choix sympa au-delà de la taille 42 » souligne Pascale 54 ans, qui doit faire sa sélection de vêtement en taille 44 (Annexe 5.5).

Ce créneau est de fait aujourd’hui l’un des plus porteurs du prêt-à-porter. Les spécialistes historiques des grandes tailles, magasins multimarques ou catalogues de vente par correspondance voient depuis quelques années leurs ventes s’envoler. Quant aux industriels (grandes marques telles que KIABI, C&A, H&M et GIANFRANCO FERRE), ils sont de plus en plus nombreux à développer des collections spécifiques pour les grandes tailles.

Ce marché, qui propose des produits du 44 au 54 ou plus (jusqu’à 62), laisse de belles opportunités aux jeunes créateurs, d’autant que les personnes corpulentes, « oubliées » de la mode durant de longues années, sont à la recherche constante de vêtements originaux et de qualité.

Le marché de la future maman affiche également une belle santé. Il bénéficie en Europe de taux de natalité record, en particulier en France (Avec 2,01 enfants par femme en 2011, la France est avec l'Irlande, le pays de l'Union européenne où la fécondité est la plus forte.)68. 67 La mode fait tomber la barrière de l’âge, Journal du Textile, n°2069, 18/01/2011. 68 INSEE, Démographie : taux de fécondité, 21 janvier 2012.

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De plus en plus créatif, il propose des collections tendances de tous niveaux de gammes et à tous les prix. De nombreuses marques spécialisées se sont imposées ces dernières années sur le marché, remportant globalement un beau succès. Certaines griffes n’hésitent pas également à dédier quelques modèles de leurs collections aux femmes enceintes, tandis que d’autres telles que ANTIK BATIK ouvrent leurs propres boutiques pour futures mamans. Un marché ouvert, donc, sur lequel les jeunes marques peuvent se positionner à condition d’être suffisamment originales et concurrentielles.

3. Le prix et le niveau de gamme

Bien entendu, la stratégie orientée vers des prix bas est revenue en force dans le jeu concurrentiel. Mais cela ne peut correspondre à un produit entièrement ou partiellement « fait main », ce type de production entraînant forcément un surcoût qui se répercute sur le prix final du produit. Cette stratégie nécessite une organisation irréprochable de la chaîne de valeur, des quantités de production importantes, et ne pourrait que minimiser l’impact du coût de main d’œuvre. Le prix du produit restera indubitablement supérieur ou tentera d’égaliser le prix moyen du marché.

D’autres stratégies peuvent être mises en place afin de faire face aux dilemmes du tissu économique actuel et de dégager le maximum d’avantage concurrentiel.

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a) Le rapport « fait main » et niveau de gamme

Choisir clairement son niveau de gamme est une affaire de cohérence et de performance.

Nous pouvons observer une correspondance entre le pourcentage de « fait main » et le niveau de gamme. Plus la proportion de la production entièrement ou partiellement « faite main » est importante plus l’entreprise se déplace vers le haut de gamme. Plus le niveau de gamme de l’entreprise est bas moins elle peut se permettre d’avoir des pièces représentatives du « fait main » dans ses collections. La marque COLINE s’est donnée au départ une image de « fait main », et finalement ne l’a pas développé avec une application concrète dans ses collections du fait de son choix de placement entrée de gamme.

Découpler le « fait main » du haut de gamme nécessite un travail d’éducation de la société, qui n’est pas forcément utile puisque le but n’est pas de changer les mentalités mais d’augmenter sa marge. Il faudrait peut-être accepter de produire moins de vêtements mais qui seraient mieux fabriqués. Ce serait alors un moyen

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100

Pourcentage de pièces partiellement

ou entièrement « faites à la main »

Niveau de gamme

Marques enseignes de prêt-à-porter féminin dont l’identité est basée sur le « fait main » et/ou l’artisanat

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selon Pascal Gautrand de réévaluer le moyen de gamme sans qu’il ne devienne du luxe.

b) La pérennité d’un placement moyen de gamme

Afin de faire face à une concurrence variée et à tous les niveaux, certaines enseignes ont décliné différentes stratégies de concurrence : l’attractivité par le prix (KIABI), la rareté et l’image du luxe (H&M) ou encore la vente de produit collant parfaitement à la mode à des prix moyens (ZARA).

A la question « une entreprise moyen de gamme avec un concept de valeur ajoutée « fait main » peut-elle être pérenne sur du long terme ou doit-elle évoluer vers du haut de gamme ? » Pascal Gautrand rejoint l’avis de Frédéric Godart. Ils privilégient tous les deux un glissement vers du haut de gamme. Ils l’expliquent par la hausse des coûts de la main d’œuvre même si la production est faite à l’étranger. Pascal Gautrand explique qu’il pourrait en être autrement mais que la mentalité du marché actuel ne le permet pas. Frédéric Godart parle alors de moyen haut de gamme. Un positionnement « premium », qu’il rapproche de la marque DIESEL.

En dépit de la concurrence accrue sur le marché du prêt-à-porter et la crise économique pas totalement résorbée, des marques positionnées sur un segment haut de gamme semblent tenir le coup. Selon une étude PERCEPTA ces enseignes situées entre le moyen de gamme et le très haut de gamme résistent malgré des prix plutôt élevés69.

Afin de corréler ce propos, nous placerons un panel des différentes marques représentatives du « fait main » dans le prêt-à-porter féminin en France, sur une matrice prenant en compte à la fois les prix que celle–ci pratique et à la fois le segment sur lequel elle se situe. Nous rajouterons les leaders du marché de prêt-à-porter moyen de gamme pour femme, H&M et ZARA.

Cette matrice reste néanmoins subjective. Elle permet de situer les différentes marques les unes par rapport aux autres et pour ainsi se rendre compte de la place des enseignes atypiques, moyen - haut de gamme.

69 Etude PERCEPTA, www.abc-luxe.com

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Légende : La taille des cercles de chaque marque est représentative de la taille du chiffre d’affaires qu’elles ont réalisé durant l’année 2010. Plus le cercle est gros plus le chiffre d’affaires est important (Annexe 6).

Nous retrouvons sur cette matrice, un groupement d’enseignes situé sur un segment milieu/haut de gamme avec des chiffres d’affaires plus faibles que les géants comme H&M et CHANEL. Ces marques sont pour la plupart relativement jeunes. Elles ont toutes un univers spécifique marqué, sont construites autour d’un concept innovant et créant une tendance vestimentaire. Ces enseignes sont proches les unes des autres : ANTOINE ET LILI, COTELAC, STELLA FOREST, ANTIK BATIK, STELLA PARDO.

Ces enseignes appliquent une stratégie de sophistication encore appelée stratégie de différenciation par le haut70. Cela consiste à proposer un service, une offre ou un produit dont les caractéristiques sont jugées ou estimées supérieures à celles des offres des concurrents et perçues comme unique par le consommateur.

70 www.definitions-marketing.com

-100 0 100 200 300 400 500 600

Marques enseignes de prêt-à-porter féminin

Linéaire (Marques enseignes de prêt-à-porter féminin)

Niveau de gamme

Prix moyen en euros

Luxe

Haut de gamme

Moyen de gamme

Bas de gamme

Marques enseignes de prêt-à-porter féminin dont l’identité est basée sur le « fait main » et/ou l’artisanat

HERMES

CHANEL

COTELAC

MANOUSH

STELLA FOREST

ZARA

H&M

STELLA PRADO

ANTOINE ET LILI

ANTIK BATIK

COLINE

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Afin que cette stratégie de différenciation soit profitable à l'entreprise, il faut soit réduire le coût, soit augmenter le prix.

La contradiction vient du fait que si une enseigne de prêt-à-porter vend cher, elle vend moins souvent. Alors que si elle veut vendre plus, il faut que les consommatrices aient le désir de changer souvent et d’acheter des pièces vestimentaires à un prix qui leur paraît accessible.

c) La gamme de prix

Exploiter une gamme de prix large permet à l’enseigne d’élargir sa clientèle. Les basics et petites pièces peuvent être à des prix légèrement supérieurs à ceux de la grande distribution. Les pièces phares, en nombre plus restreint et à plus forte valeur ajoutée, correspondent à une gamme de prix plus élevé qui frôle le haut de gamme. Un prix élevé ne suffit pas à conférer au produit une valeur luxueuse, le prix est en général, gage de l’excellente qualité du produit. Au dernier Salon Who’s Next Printemps – été de juillet 2012, Dhalia, représentante commerciale de l’enseigne ANTIK BATIK, nous a dévoilé pour l’ensemble des produits de la marque une gamme de prix très large. L’entrée de prix correspond à un débardeur à partir de 26 euros (65 euros en boutique) et la pièce phare pour l’été 2013 est un poncho péruvien réalisé entièrement à la main à 375 euros (937,5 euros en boutique). Pour l’hiver 2012-2013, les robes s’échelonnent de 110 à 430 euros en magasin. De quoi satisfaire un grand panel de bourses. « Tout est brodé ou imprimé à la main tout en gardant toujours en tête un prix accessible », souligne la créatrice d’ANTIK BATIK Gabriella Cortese71.

71 « Antik Batik : vingt ans de fait main », Fashion Daily News, 30/04/2012, n°659-660.

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4. Analyse de l’intensité concurrentielle

Nous allons utiliser la Matrice de PORTER établi en 1979 par Michael PORTER72 afin de mettre en avant les facteurs clés de succès nécessaires pour les entreprises, spécialisées dans la fabrication de pièces vestimentaires entièrement ou partiellement réalisées à la main, sur le large marché du prêt-à-porter à travers une étude du diagnostic externe.

Intensité de la concurrence : influence très forte

Malgré un nombre limité d’enseignes de prêt-à-porter spécialisées dans le vêtement fait partiellement ou entièrement à la main, le marché du prêt-à-porter en général est constitué d’un nombre très important d’acteurs de toutes tailles et qui tentent par tous les moyens de récupérer des parts de marché, car elles ne peuvent pas compter énormément sur une forte croissance du dit marché. Le marketing publicitaire joue un rôle considérable pour se différencier.

72 Professeur de stratégie et spécialiste de l’économie du développement à l’Université de Harvard, USA.

Concurrence Intra sectorielle

Menace des nouveaux entrants

Pouvoir de négociation des

clients

Produits de substitution

Pouvoir de négociation des

fournisseurs

Matrice de PORTER

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Pouvoir de négociation des fournisseurs : influence moyenne

Il existe un nombre important de fournisseurs de textiles ou de fabricants de vêtements dans l’industrie en générale et ils sont facilement interchangeables. Ces fournisseurs ont peu de pouvoir de négociation. Cependant, les fabricants spécialisés dans un « fait main » artisanal et capable de produire des séries moyennes à importantes sont beaucoup plus rares. Un grand nombre de fournisseurs viennent des pays en développement (Inde, Chine, Bangladesh, Tunisie…). Néanmoins l’augmentation des coûts de matières premières telle que le coton peut entraîner une augmentation des coûts de fabrication.

Pouvoir de négociations des clients : influence forte

Le nombre élevé d’entreprises de prêt-à-porter sur le continent donne un large choix aux consommateurs qui peuvent être très volages. Les clients ne sont pas obligés de se limiter à une seule marque et peuvent facilement s’en écarter.

Menace de nouveaux entrants : influence moyenne

Les tendances sont très variables et certaines « petites marques » peuvent se tailler une place face aux géants du secteur grâce à une forte créativité et des concepts novateurs. Cela reste tout de même d’une grande difficulté à cause des investissements trop lourds pour une création de marque de prêt-à-porter.

Produits de substitution : influence faible

Se vêtir est une nécessité au même titre que manger et boire. Il n’existe pas de produits de substitution aux vêtements. Cependant, plusieurs marques peuvent se substituer les unes aux autres.

Rôle de l’Etat : influence faible

Le rôle de l’Etat peut être défini par le contrôle des importations, par la mise en place de quotas des textiles-habillement pour protéger sa propre industrie. (cf. Partie : Le Protectionnisme, Le « Made in France » et « Made in Europe »)

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Nous pouvons maintenant représenter l’intensité concurrentielle à travers un hexagone sectoriel afin de donner une vision plus claire des facteurs importants vu précédemment.

Par rapport à une marque de prêt-à-porter classique, l’enseigne spécialisée dans le « fait main » sera soumise à un pouvoir de négociation des fournisseurs plus important, mais en contrepartie, elle aura plus de chances d’obtenir des exclusivités sur les pièces produites.

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9

Intensité concurrentielle

Pouvoir de négociations

des fournisseurs

Pouvoir de négociations

des clients

Menace de nouveaux entrants

Produits de substitution

Rôle de l’Etat

Analyse de l’intensité concurrentielle

Pour les entreprises spécialisées dans la fabrication de pièces vestimentaires entièrement ou partiellement réalisées à la main sur le large marché du prêt-à-porter

Pour les entreprises sur le large marché du prêt-à-porter

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B. L’offre

Pour la marque de prêt-à-porter basée sur le « fait main », l’objectif n’est pas seulement de proposer des vêtements, c’est aussi suggérer un art de vivre. C’est pourquoi il faut que les vêtements proposés soient portables et de qualité pour répondre au plus près aux préoccupations des consommateurs.

Des stratégies de l’offre ont été mises en place afin de faire face aux dilemmes du tissu économique actuel et de dégager le maximum d’avantages concurrentiels.

1. Le produit

De plus en plus, une gamme large est une variable importante dans l’agrément d’une marque. La cliente ne veut plus de quelques références déclinées en plusieurs couleurs. Avec l’arrivée des chaînes étrangères, elle a pris goût à mélanger les styles, à trouver de vêtements pour chacun des moments de sa journée.

a) Le souci de la qualité

Pour les enseignes spécialisées dans des pièces vestimentaires entièrement ou partiellement réalisées à la main qui communiquent autour d’un savoir-faire, le souci de la qualité doit être omniprésent dans la stratégie du développement produit.

La recherche du « zéro défaut » est souhaitable face à une clientèle de plus en plus exigeante, car elle légitime le prix plus élevé des produits, soit par la particularité des matières, soit par l’expertise et la minutie du processus d’élaboration, comme dans le cas d’un produit de fabrication artisanale : plus on y passe du temps, mieux le produit est fini.

Ce critère n’est plus exclusif aux marques de luxe, comme le dit très simplement IKEA dans ses campagnes publicitaires : « s'offrir de la qualité n’est plus un luxe! ». Le niveau d’exigence de qualité est désormais très élevé dans toutes les grandes entreprises quel que soit le secteur, que ce soit chez RENAULT, L'OREAL, APPLE ou NESTLE…

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Partant du principe qu’aujourd’hui la qualité d’un vêtement peut donc être irréprochable où qu’il soit fabriqué, c’est sur le patronnage, sur le modélisme et la logistique, qu’il convient de concentrer les efforts.

b) Des concepts innovants

La création est un des axes majeurs, elle doit être émettrice de sens et pour cela, être au cœur des préoccupations. La conception des produits représente le cœur de métier des marques de prêt-à-porter et il est donc primordial de réaliser des produits correspondants aux attentes des clients, mais aussi de lancer de nouvelles tendances ce qui constitue l’identité de la marque. Et c’est ici que repose toute la valeur ajoutée des marques, créer la mode à venir et faire accepter celle-ci par les futurs consommateurs. Faire adopter ses créations et ses concepts par des groupes ou des personnes ayant un style de vie bien déterminé, l’adapter à une catégorie générationnelle tout en identifiant la catégorie socioprofessionnelle ciblée grâce à la cohérence des prix avec les produits. L’équipe créative de la marque joue un rôle fondateur et très important pour la création du concept. Il doit permettre à la marque de se différencier de ses concurrents dans le secteur, parfois en étant en marge des courants actuels de la mode sur le marché.

La marque COTELAC s’appuie sur une caractéristique technique, un savoir-faire proche de l’artisanat et une production française. Elle utilise au cœur de son usine à Ambérieu-en-Bugey de vieilles machines restaurées pour plisser et imprimer les tissus de manière unique. Imaginée par Raphaëlle Cavalli, designer textile, la marque se caractérise par un travail minutieux des matières. Ses modèles répondent à un style chic, urbain, avec des produits intemporels et beaucoup de coordonnés. Les différentes pièces restent dans la tendance sans en être marquées.

c) Une dépendance ou non aux tendances

Est-ce qu’une entreprise de prêt-à-porter moyen de gamme pour femme, se spécialisant dans du « fait main » éthique, peut-être indépendante des tendances et des mouvances de la mode ?

Nous avons vu précédemment que cela dépendait en partie de la cible, plus ou moins sensible aux tendances.

Dans le cas de la mode éthique il s’agit de cycles de mode plus lents et au lieu d’en avoir deux par an, il y aura par exemple des cycles sur cinq ans, notamment sur

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les basiques (chemises, pantalons, ets.). Des marques éthiques ont essayé, avec le mouvement de la slow-fashion, de lutter contre la fast-fashion. L’idée c’était d’avoir des produits et des tendances qui durent. Seulement le mouvement de la fast-fashion ne fait qu’accélérer.

Pour Frédéric Godart, la combinaison gagnante c’est de suivre les modes mais de faire des produits réellement novateurs et créatifs du point de vue design. L’idéal serait d’avoir un double rythme de collection.

d) Des services

Il ne faut pas oublier la mise en place de service en adéquation avec le niveau de gamme du produit.

La variable service doit être rapidement intégrée si l’enseigne ne veut pas voir la clientèle partir vers les concurrents. Rares sont les marques enseignes qui ne proposent pas un service de retouches sur les vêtements. Le service passe aussi par le conseil, l’orientation dans les choix. Tout doit faciliter l’achat de la consommatrice. Les échanges entre boutique, la livraison à domicile sont des plus qui peuvent amener la cliente à préférer telle marque. La marque MANGO possède un système de livraison perfectionné. Si une référence est indisponible dans un magasin, la boutique se fait livrer dans les 24 heures la pièce voulue. Un plus qui a largement permis à la marque de se développer : un vêtement MANGO sera toujours disponible.

L’accueil possède aussi toute son importance. Une équipe souriante et heureuse de renseigner la cliente est évidemment très appréciée. Le consommateur ne se base pas uniquement sur le prix du produit mais sur son ressenti et son sentiment de satisfaction que lui procure l’achat du produit en magasin73.

73 Vincent BASTIEN, Jean noël KAPFERER, Luxe oblige, Eyrolles, Editions d’Organisation, 2009

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2. Un double rythme de collection

Les enseignes renouvellent désormais leurs collections de manière permanente, pour suivre les tendances et inciter les consommateurs à se rendre plus régulièrement dans leurs magasins. Toutefois, il est difficile de fidéliser les consommatrices françaises qui fréquentent généralement plusieurs enseignes.

« Slow-Wear » et « Fast-Fashion » sont désormais les rythmes auxquels la mode est soumise, l’un est fondé sur la durée, l’autre sur la nouveauté. Mais ce sont deux rythmes parfaitement complémentaires, et il importe que le prêt-à-porter avec des composants « fait main » suive le tempo ! Le prêt-à-porter est sujet à un marketing bipolaire. Le vêtement est tour à tour objet basique et fonctionnel, ou objet d’impulsion. L’enseigne utilisant le « fait main », peut utiliser cette bipolarité dans l’organisation de sa production.

a) Des vêtements qui durent

Un coût supplémentaire peut être justifié avec un produit de bonne qualité, qui va durer plus longtemps. Cela implique d’avoir des designs plus basiques, moins mode, des couleurs plus neutres.

Hors de ses achats impulsifs, la consommatrice est de plus en plus exigeante en matière de qualité et n’hésite pas à ramener les pièces qu’elle considère à défaut.

b) Des collections capsules et séries limitées

Les innovations sont essentielles pour satisfaire des consommatrices de plus en plus exigeantes. Elles sont sensibles au signe de qualité que renvoie un vêtement réalisé partiellement ou entièrement à la main, qui permet de donner l’impression aux consommatrices de posséder un produit « rare », même « unique » à un prix raisonnable. La rareté s’organise et se gère, elle permet de justifier le prix élevé des produits.

C’est le principe du Masstige dont la particularité est d’imposer de la rareté dans une logique de masse. . Né de la contraction de "mass market" et "prestige", le mot "masstige" désigne une association commerciale entre une enseigne de grande

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distribution et un nom prestigieux. Appliqué à la mode, ce concept évoque la collaboration d’un créateur avec une marque de prêt-à-porter de grande diffusion. Les enseignes H&M et ZARA, adepte de la Fast-fashion, l’ont bien compris et sont capables, grâce à leur sourcing, de mettre en magasin en quelques semaines, voire en quelques jours (quinze jours pour l’enseigne ZARA), les modèles les plus pointus des tendances de la mode, à des prix accessibles et en série limitée.

Plusieurs lignes se côtoient désormais dans les magasins. Celles-ci sont implantées au fur et à mesure de la saison, et la cliente le sait. Elle achètera d’autant plus un vêtement qui lui plaît qu’il existe en petites quantités dans chacune des tailles et que la semaine suivante, l’article risque d’avoir disparu. Elle sait aussi que si elle revient dans le magasin au cours des semaines qui suivent, il y aura de nombreuses nouveautés. Ce modèle de distribution permet d’accroître la fréquentation et l’acte d’achat…

Il est également utilisé par les maisons de luxe pour démocratiser leur offre. C’est le cas des collections capsules réalisées en partenariats entre des créateurs de mode (Karl Lagerfeld, Max Azria, Ba&sh, etc.) et des distributeurs (H&M, CARREFOUR74, MONOPRIX, etc.). La cible est une clientèle au pouvoir d’achat supérieur à la moyenne. Durant l’opération, une communication agressive et une diffusion sélective va permettre une explosion ponctuelles des ventes et une augmentation du chiffre d’affaires. L’effet de rareté du fait des séries limitées et même parfois très limitées entraîne une forte stimulation des achats de la part des clients.

Sur la base de vêtements qui peuvent durer plus longtemps, il peut-être bien d’insister sur l’aspect accessoirisassions. Pour la marque ANTIK BATIK, les accessoires (sacs, chaussures, bijoux…) représentent plus d’un tiers des ventes75. Avec des accessoires qui ne sont plus des éléments stables de la panoplie mais qui au contraire changent souvent.

Ce double rythme de collection nécessite l’adaptation de la production et de la distribution.

74 Service de presse du Groupe CARREFOUR, Communiqué de presse, 15 mai 2007, Lancement de la première collection de prêt-à-porter féminin « Tex by Max Azria ». 75 « Antik Batik : vingt ans de fait main », Fashion Daily News, 30/04/2012, n°659-660.

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3. Une hybridation de la production

Une enseigne spécialisée dans le « fait main » nécessite des produits exigeant un travail intensif. Mais, le secteur du prêt-à-porter subit une intense compétition. Il faut faire face à cette pression en cherchant à augmenter les marges bénéficiaires au travers des pratiques d’approvisionnement.

a) Une combinaison production locale et délocalisation

L’approvisionnement de produit de l’habillement dans les pays à bas coût semble être la règle incontournable pour le secteur du prêt-à-porter moyen de gamme, et la majorité des sociétés escompte tirer un avantage compétitif important dans ce choix de stratégie.

L’enseigne peut se baser sur un système de délocalisation, sur un système d’aide à des communautés dont les périodes se superposent pour procéder à un « sevrage » une fois que le niveau de revenu a suffisamment augmenté. Il faut alors accompagner la transition, explique Frédéric Godart, parce que cela peut être aussi très destructeur pour une communauté de voir ses activités se déplacer. Pour lui la communauté d’origine devra sûrement progressivement monter vers le haut de gamme. C’est ce qui tend à se mettre en place progressivement en Chine. Le Japon et la Corée y sont arrivés dans d’autres industries, dans le high-tech et l’industrie automobile. Donc nous pouvons imaginer un processus de montée en gamme progressive et un déplacement des lieux de production tous les dix à quinze ans. La clé serait donc de multiplier les centres de production. Pour les collections ANTIK BATIK la fabrication est partagée entre le Pérou (la maille), l’Inde et l’Indonésie (coton, broderies, imprimés…), le Portugal (jersey), ou encore la Slovénie (pièce à manche).

Sachant que toutes ces entreprises ont choisi une stratégie identique, s’approvisionner dans les pays low cost, cet avantage concurrentiel obtenu initialement s’est rapidement affaibli au cours du temps.

Afin d’obtenir un nouvel avantage concurrentiel, certaines firmes ont choisi de changer leur modèle de chaîne d’approvisionnement. Ainsi, certaines enseignes font appel à une production de proximité, à l’instar du modèle développé par le quartier du Sentier. Ce quartier parisien dont la réputation n’est plus à faire depuis le XVIIIème siècle, époque où la Compagnie des Indes s’y était installée, concentre en un même endroit toutes les composantes de la mode : textiles, fournitures, savoir-

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faire, main d’œuvre spécialisée, etc. Le Sentier, comme ses équivalents de Marseille, Lyon, New York ou Milan, est donc susceptible de répondre dans des délais très courts à la demande. En sortant du rôle traditionnel qui lui était imparti, le réassort, et en misant sur la créativité, il va offrir au cours des années 1980 des modèles de réussite tout à fait exemplaires tel que NAF NAF, KOOKAÏ ou MORGAN.

Si l'entreprise souhaite rester dans un territoire français ou européen et éviter une décentralisation dans des pays où la main d’œuvre est moins chère, elle devra opter pour une stratégie de montée de gamme et de qualité de ses produits supérieure, c'est-à-dire passer en prêt-à-porter moyen-haut de gamme.

Sur le plan économique, les produits faits partiellement ou entièrement à la main sont plus chers. Nous pouvons imaginer un mix entre production locale et délocalisation, avec une partie produite dans les communautés étrangères à bas coût. Et sur des éléments spécifiques d’ornementation, il paraît approprié de produire localement. Les produits manufacturés en Europe, en Occident sont par définition plus chers, mais reconnus pour leur qualité et la préservation des emplois locaux. De plus, les minimas en quantité de production dans les pays low cost sont trop importants et ne peuvent correspondre une production en série limitée.

Ce mix entre production locale et délocalisation est un des points forts de l’enseigne ZARA. La production de ses basiques est délocalisée en Chine, au Bangladesh, en Indonésie et au Pakistan, tandis que 50% de sa production est réalisé en Europe, Espagne, Italie et Portugal dans ses vingt-deux usines ou chez des sous-traitants exclusifs pour une grande réactivité76..

L’entreprise NIKE dans le cadre de son programme « chaussure sur mesure », est en train de réfléchir à une implantation de ses chaînes de production aux Etats-Unis77. Parce qu’au vu des conditions de production, le coût de la main d’œuvre ne représente qu’une petite partie du coût final. Les avantages de la relocalisation sont les économies faites sur le transport et le gain en rapidité dans le dialogue avec les clients et en qualité de service.

b) Une combinaison entre automatisation et « fait main »

Nous avons vu précédemment que pour Hubert Barrère le prix du « fait main » n’est pas un point faible majeur. Ainsi, nous pouvons imaginer un produit en prêt-à-porter, donc industrialisé avec quelques touches « fait main » qui vont lui donner une

76 Reportage « Zara l’histoire de la marque », Capital, M6. 77 Interview Frédéric Godart, (Annexe 1.1)

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plus value, le personnaliser et le rendre unique. De fait, ce produit va être identifiable, singulier et est susceptible de se vendre plus facilement qu’un produit pratiquement au même prix sans valeur ajoutée.

Selon Pascal Gautrand, nous entrons dans une période où l’idée de faire une coupure entre une culture artisanale et une culture industrielle, séparées, opposées, qui seraient deux processus différents à choisir dès le départ sans se mélanger, devient complètement démodée. C’est l’ère de l’ « hybridation ». Ainsi, il observe que les artisans, par exemple, bénéficient d’inventions liées à l’industrie. A commencer par Internet qui leur permet de distribuer leurs produits dans le monde entier bien au-delà de leur petit atelier. Il y a des tas de machines qui permettent d’améliorer la performance ou la productivité des artisans. L’industrie, elle de son côté s’approprie des savoir-faire manuels au sein de la chaîne de production industrielle et automatisée.

Ce mélange est utilisé par les maisons de luxe, qui ont d’un côté leur collection atelier, des produits sur mesure, « faits main », et de l’autre une déclinaison d’autres lignes qui vont être industrialisées et s’adressent à un public plus large. Ainsi, dans la demie-couture, nous n’avons pas comme dans la haute couture passée des centaines d’heures sur un vêtement, fabriqué entièrement à la main. Une partie du vêtement est fabriquée de façon industrielle en incluant éventuellement une broderie faite main, puis il est distribué par des marques qui vont faire des toutes petites séries ou des pièces uniques. Il y a donc un savoir-faire manuel qui vient accompagner une production plus industrielle. Une même marque peut proposer à la fois des produits fabriqués industriellement et d’autres qui vont être en partie fabriqués manuellement. Ce sont évidemment des produits plus exclusifs, plus chers aussi. Hubert Barrère appelle cela la « résultante du luxe ». Le marketing utilise l’aura des collections inaccessibles de la haute couture pour vendre et mettre les produits de demie-couture en valeur.

Dans le moyen de gamme, les firmes peuvent s’appuyer sur une production basique locale ou semi-locale et réfléchir à mixer l’artisanat et l’industrie. Pour Frédéric Godart « On prend le meilleur des deux mondes ! ».

La production automatisée n’est pas forcément négative. Il y a des aspects qui ne requièrent pas vraiment de compétences spécifiques, des découpes qui sont même parfois mieux faites par une machine. Cela permet d’automatiser des traitements qui sont nocifs pour la santé des opérateurs lorsqu’ils sont faits manuellement. Enfin, les éléments réalisés à la main peuvent apporter une valeur

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ajoutée à la dernière minute, ajoutés à un vêtement produit en usine, structure de base. C’est le modèle de Chanel.

Pour parvenir à l’intégration du « fait main » dans sa stratégie d’entreprise, la société doit mettre en place une double compétence (compétences de base et connaissances spécifiques). Elle mise alors sur le maintien des savoir-faire et sur le fait de faire reconnaître l'expertise aux clients. L’approfondissement du concept consiste alors en un développement d’ateliers spécialisés dans différentes applications du « fait main » au sein de l’entreprise. L'entreprise passe à une polyvalence des ouvriers, les manières de travailler vont être transformées.

L’augmentation des responsabilités de chacun pousse l’entreprise à suivre une politique de recrutement très minutieuse sur le nouveau marché du travail qu’est l’industrie artisanale, notamment grâce aux nouvelles formations théoriques apparaissant peu à peu. Afin d’assurer le bon fonctionnement de l’entreprise la communication entre les différents acteurs de la chaîne de production devra être vérifiée régulièrement, pour éviter au maximum les tensions et conflits.

La marque de prêt-à-porter ANTIK BATIK correspond à ce type de production semi-industriel. Lors du dernier salon 2012 Who’s Next Printemps – été, Dhalia, représentante commerciale de l’enseigne ANTIK BATIK nous a indiqué que 60% de la collection est réalisée entièrement ou partiellement à la main. Elle repose sur des savoir-faire ancestraux, d’Inde, d’Indonésie, du Pérou, du Portugal, de Slovénie, de Bali, etc. Le secteur du « fait main » et celui de l’industrialisation sont complémentaires.

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4. Une déstandardisation du produit

Dans son journal, Jules Renard a écrit « Ne dites pas à une femme qu’elle est jolie. Dites-lui qu’elle ne ressemble pas aux autres, et toutes ses carrières vous seront ouvertes ».

Le contexte actuel est celui des délocalisations, de la disparition des savoir-faire tant artisanaux qu’industriels. Il y a une perte de richesse de tout ce capital lié aux savoir-faire. Il se met en place une forme de standardisation puisque beaucoup de marques font appel au même producteur. Aujourd’hui, pour Pascal Gautrand, l’enjeu est de faire face à cette forme de standardisation, d’uniformisation, répandue au travers des marques qui font qu’on a le sentiment d’avoir le même produit sur toute la planète. « Le consommateur en a assez de l’uniformité, il veut afficher sa personnalité », observe Isabelle Quéhé, lors d’une interview sur l’Ethical Fashion Show (EFS)78. Cela passe par la personnalisation, par des produits sur-mesure peut-être, par la customisation. Mais tous ces éléments butent sur cette idée d’industrie et de standardisation. Du coup l’artisanat et le « fait main » sont peut-être l’incarnation de ce qui va venir apporter une forme de personnalisation, une désuniformisation dans l’offre.

Cela peut intéresser des marques de prêt-à-porter même industrielles de se réapproprier sur certaines phases des savoir-faire manuels, qui permettent soit d’intégrer un savoir-faire qui va apporter une spécificité au produit, soit en dialogue avec le client, de permettre une forme de personnalisation finale du produit pour le rendre unique.

78 Guillaume DUHAMEL, Mode & beauté : « Le consommateur est de plus en plus ouvert à la mode éthique », www.zegreenweb.com, 14/02/2012.

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a) Pascal Gautrand : Multiple versus unique

La démarche de Pascal Gautrand ne passe pas nécessairement par le travail de la main. Il essaye de donner « une place plus importante qu’elle ne l’est aujourd’hui à la production, à l’idée de la fabrication qui a un peu disparu ces dernières décennies au profit de l’idée de création et de marque ». C’est une problématique qui se retrouve tant dans l’industrie que dans l’artisanat. « C’est un phénomène bien plus général de désindustrialisation ou de perte d’intérêt pour le faire en général ».

En somme, l’idée c’est de « produire en série des pièces uniques ». La marque LABEL XVI en est une application concrète. Il s’agit d’une collection de vêtements et d’accessoires pour homme et femme développée pendant cinq saisons, entre 2001 et 2004, soit plus de 2000 pièces uniques produites et distribuées à Paris (Maria Luisa, Le Bon Marché…) et en Asie (Seibu, D-mop…).

Même dans l’industrie avec une forte automatisation, il y a quand même une part humaine qui subsiste dans les organisations. Pourquoi ne pas en tirer profit pour aller vers une déstandardisation du produit ?

L’objectif des travaux de Pascal Gautrand est la revalorisation de la fabrication, industrielle ou artisanale avec les valeurs qui y sont attachées et que l’on peut se réapproprier. Il note que pour l’instant les marques le font sur un périmètre réduit par rapport aux possibilités que pourrait apporter l’appropriation du territoire de la fabrication. Travailler sur l’axe de l’esthétisme, de la création permet beaucoup de choses mais dans un territoire qui est borné. Alors que si on rajoute à cela une forme d’appropriation des métiers du faire, cela ouvre les perspectives.

Pour se démarquer aujourd’hui une marque peut avoir besoin de cela. C’est ce que l’on voit depuis quatre ans maintenant, surtout dans le secteur du luxe comme chez HERMES PARIS mais pas seulement, avec des marques qui se réapproprient les outils de fabrication, les rendent visibles pour le consommateur, personnalisent les produits. Ainsi, dans son slogan, « Fait main depuis 1992 », ANTIK BATIK revendique ce savoir-faire artisanal. Gabriella Cortese se réapproprie les savoir-faire de tous les continents à travers ses multiples voyages. Elle les rend visible à ses clientes par des carnets de voyage et des expositions photos.

Appliqué au « fait main », le concept de personnalisation, de déstandardisation du produit, permet une démultiplication du marché pour les artisans.

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b) Une intégration symbolique des ouvriers dans la pièce réalisée

Dans une entreprise, le « fait main » c’est aussi une occasion de mettre les équipes en avant. Dans le cadre de la marque HERMES, chaque sac est réalisé par une personne de façon artisanale et chaque artisan a une forme de poinçon en signature. Certes le client ne le sait pas, mais l’artisan, lui, sait que partout où le sac ira sa signature l’accompagnera …

Dans le cadre de sa campagne publicitaire Collection Ethique Pour l’Afrique de l’été 2012, Vivienne Westwood apparaît avec la population locale impliquée dans les réalisations de ses créations79. Elle met ainsi en avant les communautés locales à l’origine de la réalisation de ses pièces de collection. Au-delà de l'avantage de gagner un revenu, toutes les femmes, ayant œuvré sur cette collection, sont fières d'avoir apporté leurs savoir-faire à ce projet et d'avoir pu élargir leurs domaines de compétences. Cette collection a été produite avec le support de l'International Trade Center’s Ethical Fashion Program of the United Nations, qui soutient le travail de plus de sept mille femmes qui vivent dans des conditions de pauvreté extrême. En prêt-à-porter moyen gamme, l’exigence de production de la marque ANTIK BATIK a pour but l’implication et la valorisation de l’homme en tant qu’artisan, artiste80.

Autrefois, tout un chacun savait qui avait brodé telle ou telle étoffe, qui avait passé des heures à confectionner une veste avec un véritable souci de la perfection. Nous pouvons aujourd’hui tenter de réconcilier cette mémoire populaire avec notre vie quotidienne. Ou tout du moins de créer une implication dynamique de l’ouvrier dans la pièce réalisée, positive au développement des ateliers au sein d’une entreprise.

c) Une intégration du consommateur dans le processus de fabrication du produit : « consom’acteur »

Les gens en ont assez d’être spectateur ils veulent aussi être acteur.

Dans son livre Sociologie de la Mode, Frédéric Godart écrit : « Le principe de personnalisation qui met la personne ou l’individu sur le devant de la scène ne signifie pas que les personnes ou les individus soient « réellement » autonomes dans leur choix. Ce principe signifie plutôt l’existence d’une croyance partagée par les

79 Caroline MARIN, « Le chic éthique : La tendance à suivre », Style papers, n°30, Août 2012, pp. 44-47. 80 ANTIK BATIK, BE-POLES, Martin BRUNO, Antoine RICARDOU, Journal INSIGHT voyage au cœur d’une marque Antik Batik.

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différents acteurs sociaux dans l’autonomie des personnes ou de l’individu ; ainsi, le « génie créatif » est souvent mis en avant, oubliant la réalité organisationnelle de la mode. »81

NIKE ID, programme lancé dans les années 1990 par l’enseigne NIKE, permet à chacun de personnaliser sa paire de sneakers selon ses goûts. Evidemment la chaussure n’est pas réalisée sous les yeux du client, elle est réalisée de façon purement industrielle en Chine. Mais ce sont des pièces uniques, fabriquées à la demande, avec quelques semaines de délai. Et au final le client a « SA » chaussure. Il n’assiste pas à la fabrication de la chaussure, ne rencontre pas non plus la personne qui va la fabriquer, mais il interagit avec le processus de fabrication.

C’est pour NIKE un moyen de s’approprier les valeurs liées à la fabrication, avec une chaîne qu’ils ont construit exprès et de donner une image de NIKE à l’opposé de la globalisation, de la standardisation. Le processus reste tout de même industriel avec une interaction de type artisanal puisqu’il y a une personne qui va traiter une commande.

Dans l’enseigne LOUIS VUITTON, les sacs sont fabriqués à la chaîne, en série. A la fin du processus de fabrication, lors de la vente au client, un ouvrier peint à la main les initiales du client et personnalise ainsi le sac.

En 2004, les couturiers Marithé et François Girbaud se lancent dans un projet multiforme et un brin ésotérique, la HELL HEAVEN DIMENSION (H2D), dans laquelle sont illustrés onze héros représentés par onze jeans homme. Les jeans aux couleurs des univers de ces héros ont été vendus lors de corners évènementiels en boutiques. Un service de personnalisation de leur jean était proposé aux clients. Ces derniers sélectionnaient leur personnage avatar et l’un des vendeurs sous les yeux des clients peignait un décor au pochoir à l’aide d’un modèle prédéterminé. L’acte manuel de customisation permettait au client de repartir avec une pièce unique.

Ainsi, proposer l’interaction de la consommatrice de prêt-à-porter dans le processus de fabrication d’une pièce vestimentaire qu’elle a choisi, peut permettre de créer une extension de la notion de « fait main » dans son esprit. Comme l’a signifié Frédéric Godart, le processus industriel s’efface au profit de l’acte de personnalisation du produit.

81 P. 108, Frédéric GODART, Sociologie de la mode, Editions Découverte, Collection Repères, Mayenne, 2009.

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C. La visibilité

Cultiver la rareté dans un produit de prêt-à-porter « fait main » permet d’attiser l’excitation et la rivalité des consommatrices. Mais pour que le message passe et que la consommatrice le comprenne, tous les éléments de communication et composant l’offre doivent converger vers une même identité cohérente.

1. Une réelle stratégie d’identité et de marque

Il existe une réelle nécessité pour les acteurs de ce marché de s’appuyer sur une stratégie d’identité et de marque forte et cohérente, adapté à la cible visée. Le nom, le logo, l’agencement de magasin, le choix des produits doivent particulièrement bien véhiculer l’image de l’enseigne, être cohérent entre eux et s’enrichir mutuellement.

Afin de séduire et fidéliser la consommatrice de plus en plus volage, la marque enseigne doit dépasser la simple vente pour s’orienter vers une communication accrue. Dans le prêt-à-porter, l’originalité et la qualité des matières, le décor des points de vente, la fiabilité des services, la dimension évènementielle du merchandising etc. sont aussi importants que les produits eux-mêmes. Dans les années 2000, à défaut d’un un logo bien visible, les vêtements TOMMY HILFIGER ont perdu leurs clients. Dans le cas de cette marque, l'identité auprès de ses clients réside avant tout dans ce logo qui signe tous ses vêtements82.

Dans le contexte économique difficile, les campagnes publicitaires à fort investissement sont difficiles à maintenir à l’exemple du choix coûteux de faire soutenir l’image de marque par des personnalités médiatiques. L’utilisation de célébrités donne du prestige à la marque. Mais c’est un effet qui s’estompe rapidement, nuance Frédéric Godart. « Il faut renouveler régulièrement les célébrités, et cela oblige à renouveler les produits aussi ». De plus, le matraquage médiatique, la diversification, la standardisation, peuvent entraîner chez le consommateur une certaine déception. La marque MANOUSH située sur un segment haut de gamme a pu développer une relation particulière avec son égérie la

82, « Grandes marques : 10 flops retentissants », Le Journal du Net, Management, Marketing, www.journaldunet.com

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chanteuse Olivia Ruiz. Tandis que la marque ANTIK BATIK, en partenariat avec la chanteuse Inna Modja, a créé l’évènement avec un mini concert privé organisé dans la boutique Antik Batik du Marais. De jeunes stars plébiscitent ouvertement la griffe, sans que Gabriella ait à leur envoyer des vêtements83.

L’enseigne doit être identifiable et différenciée de la concurrence. Elle est associée, dans l’esprit féminin, à un produit « fait main », à un lieu et à une formule de distribution. Elle doit être en permanence fidèle à ses principes. D’ailleurs, une marque est d’autant plus crédible qu’elle est personnalisée, qu’elle s’inscrit dans un vécu, comme par exemple la soif insatiable de voyage de Gabriella Cortese chez ANTIK BATIK dans un style féminin audacieux, bohème chic. Il faut cultiver un marketing de la rareté ciblé, afin d’entretenir l’appétit des consommatrices sur les produits « fait main » développés en série limitée.

L’investissement doit se faire sur un univers cohérent qui entraîne toute l’identité de la marque dans une même direction. Sur le point de vente, il semble important d’investir dans une architecture de magasin, un emplacement adapté, des vendeurs sensibilisés à l’univers de la marque et aux caractéristiques des produits « fait main ». Il est aussi et surtout important de proposer une gamme de produits uniques sur le marché avec une communication adaptée à la fois aux produits proposés, à la cible et à l’image que la marque veut se donner.

De la cohérence de la stratégie d’identité va également dépendre la capacité des enseignes à décliner leur concept, notamment dans la mise en œuvre de leur politique de localisation géographique et de diversification84.

83 COCO, Antik Batik, Tendances de mode, www.tendances-de-mode.com 84 « Le prêt-à-porter féminin, Quelles stratégies des distributeurs face à un retournement conjoncturel durable », PRECEPTA groupe XERFI, juin 2008, 260 p.

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2. Les circuits de distribution

Depuis quelques années nous pouvons observer une modernisation du tissu commercial avec un foisonnement d’initiatives.

a) La structure de la distribution

Il existe plusieurs formes de distribution au sein du secteur du prêt-à-porter.

ZARA fait parties des chaînes intégrées ou succursalistes, comme ETAM, CAMAÏEU ou encore LA HALLE AUX VETEMENTS. Ils dominent le secteur. L’origine de ces chaînes réside souvent dans la multiplication de points de vente, sous forme de succursales, appartenant à un commerçant indépendant et performant. Cette formule est coûteuse en capitaux propres, mais elle permet un contrôle total sur la gestion des magasins et de leur image. C’est la raison pour laquelle de nombreuses marques choisissent cette formule lorsqu’elles lancent leur réseau de distribution.

Les réseaux franchisés, comme BENETTON, KOOKAÏ ou encore PANTASHOP, ont pour objectif de créer un système de collaboration étroite entre deux entreprises financièrement et juridiquement indépendantes : le franchiseur et le franchisé. Ce dernier dispose d’une enseigne, d’un savoir-faire et d’une assistance commerciale de la part du franchiseur, à qui il achète des produits. Le franchisé doit en contrepartie verser des royalties (en fonction de son chiffre d’affaire) et un droit d’entrée. Il gère lui-même ses stocks et ses approvisionnements, et choisit les modèles qu’il souhaite vendre.

Dérivé de la franchise, les magasins affiliés comme CAROLL ou encore RODIER FEMME, fonctionnent encore différemment. La commission-affiliation laisse le franchiseur propriétaire de son stock afin de libérer le commissionnaire affilié des risques liés à la gestion du stock. Outre l’apport d’une certaine sécurité pour l’affilié, ce mode de développement est devenu un moyen pour les enseignes de garantir l’uniformité de leur offre. Elles peuvent ainsi lancer des opérations commerciales portant sur l’ensemble du réseau et faire face à la concurrence des leaders succursalistes. La gestion des stocks par le franchiseur permet également une réactivité plus grande face à l’évolution des tendances du marché.

Toutes ces indications permettent essentiellement d’appréhender le secteur du prêt-à-porter féminin

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b) Les modes de distributions

Il existe différents modes de distribution utilisables pour la commercialisation d’une gamme de vêtements prêt-à-porter féminin, entièrement ou partiellement réalisée à la main :

Les chaînes indépendantes : ce sont des marques enseignes, familiales (petits créateurs) ou cotées (NAF NAF, JENNYFER, PROMOD, etc.) elles s’adaptent facilement aux modèles imposés par les leaders de la mode. Elles ont une bonne notoriété.

Les chaînes spécialisées et magasins populaires : elles se développent principalement en centre-ville et constituent le premier circuit de distribution du secteur. Ces enseignes sont spécialistes du prêt-à-porter et sont présentes à l’international par des volumes considérables de vente (H&M, MANGO, BENETTON). Elles assurent une forte cohérence marketing de leur enseigne tout en optimisant leur chaîne de valeur à l’exemple du groupe espagnol INDITEX (dont la maison mère est ZARA).

Les grands magasins : Sur une même surface on trouve un grand nombre de marques pour améliorer la rentabilité des surfaces de vente. Les marques de moyen-haut de gamme et haut de gamme s’additionnent à leur propre marque. (GALERIE LAFAYETTE, LES PRINTEMPS, BON MARCHE).

Les ventes à distance : Il s’agit de l’e-commerce et des magazines spécialisés dans la vente par correspondance (3 SUISSES, LA REDOUTE).

Les Hyper et Super : Supermarchés et Hypermarchés (MONOPRIX, LECLERC, CARREFOUR).

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Parts de marché des circuits de distributions en France / 2010

Selon l'Institut Français de la Mode (IFM), les magasins indépendants, les chaînes spécialisées et les magasins populaires représentent un tiers de la distribution totale d’habillement en France en 2010.

La grande distribution et les réseaux organisés ont représenté 33,3% (+0,4 point) des sommes dépensées en prêt-à-porter féminin, devant les détaillants avec 19,7% (-0,2 point). Les GSS restent de leur côté stables à 10,7%, devant la vente à distance avec 9,2% (-0,4 point) et l'e-commerce avec 9% (dont 2% par des « pure players » qui concentrent leurs activités sur un seul secteur d'activité). Les grands magasins ont quant à eux pesé 5,9% (+0,2 point) des sommes dépensées.

Toutes ces indications permettent essentiellement d’appréhender le secteur du prêt-à-porter féminin.

Magasins Indépendants - Spécialistes et

populaires 35%

Grandes diffusion et hard discount

15%

Grands magasins 6%

Ventes à distances 9%

Hyper - Super 15%

Autres 12%

Magasins de sports 8%

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c) Un mode de distribution sélectif

Le mode de distribution doit être en accord avec les caractéristiques du produit et de la marque en question85.

Il faut distribuer les produits dans un nombre limité de boutiques en nom propre, dont l’implantation sera étudiée en fonction des lieux de fréquentation de la clientèle ciblée, ainsi que dans un réseau de multimarques sélectionnées suivant leur niveau de gamme. Au niveau géographique, la femme de région parisienne représente 18 % des ventes et elle est majoritairement employée (23 %)86. Dans un premier temps, une boutique implantée dans la capitale est donc indispensable.

Si la marque en a l’opportunité elle peut également être présente sur des corners dans des multimarques comme Les Galeries Lafayette. Il faut également envisager à plus ou moins court terme une ouverture à l’international. La marque STELLA FOREST possède quatre boutiques franchisées en France, une en Belgique, associé à un réseau de plus de 150 multimarques en France et est distribuée dans dix pays du monde. La marque ANTIK BATIK possède trois boutiques en propre en France et un réseau de 800 multimarques en France et est distribuée dans plus de trente pays du monde. Ces deux marques possèdent également un site internet vitrine et de vente en ligne.

La vente de ce type de produit, en boutique ou sur internet, doit être accompagnée d’une équipe connaissant l’univers de la marque, sensibilisé aux produits et à leur mode de production et détenant un argumentaire de vente adapté.

d) Une présence sur Internet

Dans un marché de l’habillement relativement stable, le e-commerce fait figure de segment des plus dynamiques. Selon une étude de la Fédération française de prêt-à-porter féminin (FFPAPF), la part des ventes en ligne d'habillement féminin ont plus que doublé en l’espace de trois ans, passant de 4,2% en 2008 à 9% en 2011, les sites

85 Le prêt-à-porter féminin, Quelles stratégies des distributeurs face à un retournement conjoncturel durable, Etude PRECEPTA groupe Xerfi , juin 2008, 260 p. 86 A. LAVAUD, « Par leur indifférence, la majorité des femmes taillent une veste à la mode », CB News, 06/03/2000.

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uniquement présents sur le Web représentant désormais à eux seuls 2% des ventes totales. Un enthousiasme à nuancer tout de même puisque la majorité des vêtements féminins achetés sur internet le sont à prix réduit, nettement plus que sur l'ensemble du marché.

Avoir une présence sur Internet est impérative. Celle des enseignes en France y est encore très faible87. Ce constat est corrélé par l’étude d’EUROMONITOR INTERNATIONAL sur l’évolution des ventes aux détails en habillement dans l’Europe de l’ouest. Le web est devenu non seulement un média de communication incontournable, mais aussi un canal de vente dont l’efficacité s’affirme. Les marques MANOUSH, ANTOINE ET LILI, ANTIK BATIK et STELLA FOREST ont toutes leur propre site vitrine ainsi que leur interface de vente en ligne. Gabriella Cortese, créatrice de la marque ANTIK BATIK nous révèle que pour sa marque « la vente en ligne fait aujourd’hui le chiffre d’affaire d’une vrai boutique et nous pensons faire le double dans quelques mois » 88.

La marque de prêt-à-porter doit s’inspirer des stratégies d’autres secteurs de consommation, et notamment de certaines marques de luxe qui jouent un rôle d’avant-garde pour évangéliser et fidéliser la clientèle.

Internet est un canal de distribution dont les enseignes spécialisées dans le prêt-à-porter féminin doivent tirer avantage avec une stratégie « Click and Mortar », où l’activité en ligne (click) vient s’ajouter au modèle classique de distribution (mortar), face aux « Pure-players », sites de ventes en ligne uniquement présents sur le web, qui ne sont pas parvenus à faire une véritable percée. Le E-commerce constitue en outre une opportunité de tester des concepts différents et d’envisager une diversification de l’offre. Ce faisant, les enseignes sont dès lors confrontées à l’apprentissage d’une véritable distribution multi canal. L'enseigne MANOUSH a développé son réseau de distribution à travers ses quinze magasins, points de vente à l'étranger, ses sites web et ses catalogues en ligne.

87 Le prêt-à-porter féminin, Quelles stratégies des distributeurs face à un retournement conjoncturel durable, Etude PRECEPTA groupe Xerfi , juin 2008, 260 p. 88 « Antik Batik : vingt ans de fait main », Fashion Daily News, 30/04/2012, n°659-660.

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e) Des exportations

A l'occasion du bilan de l'exercice 2011, la fédération du prêt-à-porter féminin a souligné le rôle salutaire de la créativité et de l'export pour les entreprises dont le marché a plutôt bien résisté à la crise.

La consommation en France ne montre aucun signe de reprise. Les ventes ont perdu 2,6% en 2011, après -0,8% en 2010. Et la vente réalisée à prix cassé, et donc à marge réduite, impose plus que jamais son diktat à toute la chaîne de la mode. L'an dernier, soldes et promotions représentaient 35% du marché. En 2000, ils ne pesaient que 20% de la consommation.

« L’export demeure un levier de croissance pour les fabricants français de prêt -à-porter féminin », a souligné Jean-Pierre Mocho, président de la Fédération Française de Prêt-à-Porter Féminin (FFPF)89. En 2011, pour la deuxième année consécutive, les exportations de mode féminine ont progressé (4,6%), notamment grâce aux performances obtenues en Italie (+2,9%), au Royaume-Uni (+11,5% après +5,3% en 2010) et en Allemagne (+1,1%).

L’Union Européenne demeure le principal débouché à l’étranger des griffes françaises : elle représente 54,2% des montants exportés. Mais les signes avant-coureurs d’un repli se manifestent : le marché espagnol est le reflet de la crise (-0,3%, à 246,5 millions d’euros de marchandises importées de France). « En janvier dernier, les salons professionnels de mode d'Italie et d'Espagne ont été peu concluants. Les prises d’ordre ont été très faibles », rapporte Patricia Brafman, Directrice internationale de la Fédération Française du Prêt-à-Porter Féminin.

Dès lors, les fabricants doivent se tourner vers d’autres débouchés. Parmi eux figurent l’Ukraine et la Russie (+14,5%). Le Japon où les exportations françaises ont reculé de 10,5% en 2011 reprend de la valeur. Et le marché américain dont les ventes ont progressé de 20,5%. Les marques françaises ne peuvent plus négliger le débouché des marchés à fort potentiel de croissance (Inde, Russie, Turquie, Amérique centrale, Corée et Taïwan). D’autant plus que le salon « Mode in France » de Moscou qui a ouvert ses portes cette année fait figure de vitrine importante pour les entreprises françaises. La Chine est considérée comme « guère stratégique en cette phase »90.

89, « Le prêt-à-porter féminin français s'inquiète de l'année 2012 », La Tribune, 24/02/12, latribune.fr 90, Dominique MURET, « Les entreprises – Textile, habillement, « Benetton tourne la page » », Lsa.fr, 03/05/2012.

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3. La communication

La consommatrice est surinformée. Elle est cultivée. Elle est exigeante. Communication et services importent donc au plus haut point. Le vêtement qui la séduira, en plus d’être parfait, devra avoir un sens, une histoire, une valeur ajoutée. Car la consommatrice réclame aussi du rêve91.

a) Un enjeu majeur

La communication représente l’enjeu majeur des marques de prêt-à-porter. Elle doit coller à l’image et à l’identité de la marque.

La communication que les marques peuvent contrôler est très importante et nécessite une cohérence. L’interprétation et la perception du message par les consommateurs sont d’une importance primordiale pour le bien-être des marques de prêt-à-porter92.

Nous voyons aujourd’hui de plus en plus d’actions de communication originales et innovantes. Manoush a envahi les vitrines des Galeries Lafayette pour noël 2009, avec des poupées malicieuses revêtues de robes de la marque93.

Seulement, les consommateurs n’ont pas tendance à s’intéresser aux messages de marques qui ne sont pas connues. Donc une marque peu présente doit frapper fort pour se faire connaître. Des petites entreprises avec de faibles budgets communication doivent prendre des risques et rompre avec les codes de la communication habituelle, innover.

b) L’imaginaire associé à la marque

L’image de marque représente ce que le consommateur perçoit et ce qu’il attribue à la marque et ses produits. Cette image est totalement subjective et peut être perçue de façons différentes (bonne ou mauvaise) en fonction des groupes, des mentalités et de la multitude de variables vues précédemment. La consommatrice

91 Catherine ORMEN, Histoire(s) du prêt-à-porter, 1929-2009, Fédération Française du Prêt-A-Porter Féminin, juillet 2009. 92 Mercator 93 www.manoush.com

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peut se poser la question, « quelle est la légitimité de la marque pour me parler ainsi ? ».

L’objectif de la marques de prêt-à-porter féminin est donc d’essayer d’influencer un maximum le type de cible qu’elle souhaite toucher à travers ses produits pour que l’image perçue par la consommatrice soit l’image voulue par la marque. Voici l’enjeu principal de la politique de communication de l’entreprise94.

L’imaginaire est un critère indispensable et puissant qui permet à une marque d’entrer en résonnance avec l’inconscient collectif. Nous remarquons à travers l’étude des marques utilisant le « fait main », qu’il est un critère des plus importants car le client achète en même temps que le produit l' « univers » qui est associé à la marque. MANOUSH, par exemple, a un univers très fort et structuré, marqué par le voyage, au rythme des roulottes et des gipsys.

c) Promotion

La stratégie de différenciation relève également de la politique de communication car il faut faire connaître la différence par la communication. La promotion de l’offre permet d’améliorer le chiffre d’affaires de l’entreprise. La publicité permet d’entretenir, de susciter, d’alimenter les motivations d’achat95.

La FFPAPF note que « de plus en plus de femmes se renseignent sur Internet avant d'aller en magasin, et vice-versa ». Si leur principale source d'influence reste la presse écrite et les magazines de mode (à 78%), les sites de marques (49%), de vente en ligne (50%), ainsi que les blogs et forums (27%) jouent un rôle croissant.

Il faut faire connaitre la marque et ses particularités grâce à des participations aux salons, et aux différents réseaux sociaux.

Pour lancer la marque et se faire connaître un partenariat avec le concept store MERCI serait approprié à l'univers du produit « fait main ». Dans le cadre d’une vente événementielle, une collection capsule, un partenariat avec la boutique COLLETTE peut être envisagé. La marque ANTIK BATIK a ouvert un corner éphémère chez FRANK & FILS à Paris d’une durée de trois mois jusqu’au 28 juillet 201296. Il a été suivi

94 Michel RATIER, « L’image de marque à la frontière de nombreux concepts », IAE Toulouse, Centre de Recherche en Gestion, juillet 2003, Cahier de recherche no. 2003 – 158. 95 Publicitor 96 « Antik Batik : vingt ans de fait main », Fashion Daily News, 30/04/2012, n°659-660.

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d’une exposition photos « voyage au cœur d’une marque » montrant des images du séjour de Gabriella Cortese en Inde prises par Bruno Martin.

Des partenariats et des jeux concours aident également à promouvoir les marques. ANTIK BATIK lance régulièrement un concours photos intitulé « Carnet de voyage » en partenariat avec le magazine PAULETTE97. Chaque saison, COTELAC propose à de jeunes artistes de donner leur vision de la marque, publiée dans le magazine KIBLIND et faisant l’objet d’expositions en boutique. Une pièce inédite est à venir dessinée par Raphaëlle Cavalli en collaboration avec Brecht Evens, un dessinateur récompensé en 2010 par le Prix de l'Audace au festival de BD d'Angoulême, qui élaborera l’imprimé98. Produite en édition limitée, cette pièce de collection verra le jour au Printemps 2013. Les étapes de travail seront publiées en cinq volets successifs dans le magazine KIBLIND.

Depuis le développement des nouvelles techniques de l’information et de la communication, toute marque voulant se développer se doit de fidéliser ses clients ainsi que de réaliser une prospection intensive : publicité, promotion, carte de fidélité, vente privée…

d) Le « fait main »

Pour compenser la hausse du levier prix, plusieurs leviers, comme celui de la représentation symbolique du « fait main » dans le produit, doivent être vus à la hausse. Bien qu’assez subjectif, ce levier est indispensable au succès de l’opération. Le but est que les produits soient identifiables aux yeux des novices et des plus affirmés.

La part de « fait main » est très peu mise en valeur par les marques de prêt-à-porter. Les marques de maroquinerie, de chaussures et accessoires communiquent beaucoup plus sur la maitrise de leur savoir-faire. Certaines marques, comme les chaussures MANFIELD, mettent ainsi en évidence par une vidéo au sein du point de vente le processus de fabrication artisanal pour sensibiliser le consommateur sur la qualité et le caractère unique de leurs produits. ANTIK BATIK et STELLA PARDO font l’objet d’articles fréquents dans le Journal du Textile, le Fashion Daily News et divers magazines pour mettre en évidence l’origine de leur production, leur univers et

97 www.paulette-magazine.com 98 Journal, www.cotelac.fr

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inspirations. Elles communiquent également sur les savoir-faire et techniques par l’intermédiaire de leur site internet et des réseaux sociaux. Elles rappellent régulièrement aux consommatrices le caractère « fait main », unique des pièces de leurs collections.

e) Le prix

L’objectif des enseignes de prêt-à-porter basé sur une production main est d’obtenir le meilleur rapport qualité-prix, tout en essayant de raconter un art de vivre99.

La notion de « prix juste », ou comment expliquer au consommateur que le prix proposé est calculé de manière juste et équitable, après des années de perte de repères face à des réductions. Autrement dit, « il est essentiel de mener une campagne sur la vérité du prix » affirme Jean-Pierre Mocho100.

Il faut une campagne marketing de fond qui fasse connaître la marque et qui permette de justifier les prix. Cela prend du temps. L’objectif, d’après Frédéric Godart, c’est que les prescripteurs du monde de la mode puissent dire « on aime ».

Puis, il faut convaincre en même temps les consommateurs d’accepter de payer plus cher, en appuyant sur la qualité des vêtements, le « fait main », les designs modes, le côté éthique, sur le fait qu’ils dureront longtemps ou encore qu’ils sont produits localement.

f) Le « made in »

Il faut de la visibilité dans le domaine du « made in », de la transparence et de la communication. Il est important de spécifier aujourd’hui « Made in France » ou « Made in Italie ». Mais lorsque nous parlons de « Made in China » ou « Made in India », il est important de faire la nuance entre de l’industrie et de l’artisanat.

Si on dit made « in Namibia », que tout est « fait main » et que c’est de la très bonne qualité, cela permet de vendre à des prix encore raisonnables, tout en alliant

99 Guillaume DUHAMEL, Mode & beauté : « Le consommateur est de plus en plus ouvert à la mode éthique », www.zegreenweb.com, 14/02/2012. 100 Catherine ORMEN, Histoire(s) du prêt-à-porter, 1929-2009, Fédération Française du Prêt-A-Porter Féminin, juillet 2009.

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une qualité exceptionnelle. Pour Frédéric Godart, cela peut être une combinaison gagnante. Il faut pouvoir communiquer dessus et neutraliser l’aspect négatif du « Made in ailleurs ».

Certaines marques comme PRADA ont suffisamment de légitimité pour convaincre les clients que ce qu’ils disent est vrai. A l’inverse d’autres marques ne seront pas crues. Pour inverser la tendance il faut que les marques fassent un travail pédagogique à travers des photos, des livrets pour les consommateurs, leurs sites internet, en proposant de visiter les centres de production. On voit alors que le « fait main » pourrait être accessible à un coût plus modéré. C’est ce que Gabriella Cortese a réalisé pour ANTIK BATIK. La consommatrice trouve en lecture libre sur le site internet de la marque des carnets de bord, compte-rendu des voyages de la créatrice. Les expositions photos nous livrent les coulisses des ateliers avec lesquels elle travaille. Les articles de magazine sur la marque, très fréquents depuis le début de l’année 2012, nous rappellent systématiquement l’éclectisme de ces centres de production. Et l’amour de Gabriella Cortese pour l’artisanat

La production locale, c’est la préservation des emplois dans le pays, c’est un frein mis au développement d’usines dans les pays émergents où les ouvriers sont traités de façon indigne et c‘est la protection de l’environnement puisque l’empreinte écologique pour transporter ces vêtements depuis les pays de fabrication en Occident est énorme. La marque STELLA FOREST et ANTOINE & LILI mettent en évidence sur leur site internet que la production de leurs collections est majoritairement française.

g) La dimension éthique

Il est important, pour se démarquer des concurrents et pour agir comme une entreprise citoyenne, de s’intéresser à l’écologie et au développement durable. L’impact de la dimension éthique dans la stratégie de communication de l’entreprise nécessite d’une communication « responsable ». Elle doit être expliquée à la consommatrice pour que le message passe.

Comme nous l’avons vu précédemment la responsabilité de l’entreprise se situe non seulement vis à vis de ses consommateurs, mais également de l’emploi dans sa région, du pays dans lequel elle s’est développée, du tissu industriel et économique, de la sécurité et de la santé, de l’environnement de la formation à long terme de ses propres collaborateurs, de l’information de tous ses publics. Il faut que ce soit écrit, que ce soit lisible, pour que la consommatrice s’y retrouve, au travers de

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la communication médias (tv, radio, cinéma, internet, presse, affichage) comme hors médias (salon, marketing direct, évènementiel, etc.).

Sur le plan éthique, la responsabilité des entreprises est « sociale » et « commerciale ». Il faut préciser à ce niveau que la communication responsable est dissociée de la communication de marque dans l’esprit du consommateur. Lorsque l’on évoque la communication responsable, il s’agit avant tout d’une communication plutôt institutionnelle. Elle doit faire réagir la conscience civile de la consommatrice et porte sur des éléments d’information (performances, conduite, stratégie, culture, éthique, valeur). A cela l’enseigne peut compléter en instaurant un véritable « contrat moral » avec les consommatrices, par la communication de marque, aux quelles elle ajoute les notions de valeur ajoutée émotionnelle du « fait main », de statut, d’innovation, etc.

Différents exemples de communication responsable sont possibles et combinables101.

• Communiquer sur la responsabilité immédiate, l’engagement auprès de la consommatrice (la qualité, le côté culturel et éthique de la production, le caractère authentique du « fait main », etc.).

• Soutenir et communiquer sur des actions externes louables et vertueuses en lien avec l’entreprise avec par exemple le Mécénat et le sponsoring incarnant les valeurs de l’entreprise, visibles et appréciables par les cibles choisies (démarche mise en application par les enseignes L’Oréal, Auchan, etc.).

• Récupérer des valeurs éthiques et les promouvoir pour montrer qu’elles s’inscrivent dans sa logique d’entreprise (comme par exemple Carrefour et ses filières qualités avec des informations transparentes et complètes).

Ce qui est une obligation imposée par la loi ne doit pas être utilisé par les enseignes en tant qu’engagement délibéré auprès des consommatrices.

Il ne faut pas oublier la réalité du marché. Il existe des niveaux différents d’implication dans la mode éthique. Pour l’instant, ce caractère du produit n’est pas parmi les facteurs déterminants dans l’acte d’achat de la consommatrice contemporaine (prédominance de la marque, de la visibilité du produit, du style recherché, du goût, du prix…). La communication de l’entreprise doit rester responsable même si elle a affaire à des consommatrices pas toujours responsables surtout s’il y a un prix à payer.

La démarche éthique des marques peut être mise en valeur sur leur site internet. La marque ANTOINE & LILI met ainsi en évidence la fabrication artisanale éthique, en grande majorité Française, de ses vêtements et accessoires pour femmes.

101 ROOZEN N. et VAN DER HOFF F., L’aventure du commerce équitable, Edition Lattès, Paris, 2001.

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Il existe également des plates formes telles qu’Ethicaltradeplace, qui n’est pas uniquement un site de la vente pure et dure de produits, mais une manière de légitimer une approche et de faire de la mode éthique102.

102 www.ethicaltradeplace.com

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D. Le bilan de la stratégie

1. La base de marketing mix

En considérant les quatre leviers du marketing mix (les politiques de Prix, Produit, Promotion et Place/distribution), nous pouvons aisément identifier :

Prix

Une hausse du levier prix, compensée en contrepartie par les autres leviers du marketing mix : produit et distribution.

Produit

Une présence de la représentation symbolique de l’artisanat par le « fait main » dans la majeure partie des produits.

Place / Distribution

Une distribution sélective et des opérations limitées dans le temps pour appuyer l’effet de rareté organisée.

Promotion

Un ciblage important dans le levier promotion du produit dû au marketing de la rareté qu’il nécessite.

Prix

Promotion

Economique

Ethique

Technique

Produit

Place

Distribution

Juridique

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2. A long terme

Malgré une très bonne maîtrise de son mix marketing, l’enseigne doit intégrer et prendre en compte différents facteurs pour garantir la pérennité de son succès. A travers l’étude de la place du « fait main » dans le prêt-à-porter des éléments importants ressortent. Tout d’abord, la marque de prêt-à-porter féminin se doit de réfléchir à une stratégie au long terme afin d’anticiper et de faire face au marché extrêmement concurrentiel à tous les niveaux.

En effet, nous savons que ce qui détermine le propre d’une tendance, ce sont sa temporalité et son instabilité. Des marques comme VON DUTCH qui avait créé le « buzz » ses débuts ont connu après un grand succès, une chute vertigineuse. C’est pour cela qu’une marque de prêt-à-porter qui « surfe » sur une tendance autour du « fait main » doit être tout particulièrement vigilante tout en continuant à se démarquer de la concurrence.

Elle doit d’une part, exercer une veille concurrentielle accrue et d’autre part, anticiper et créer les futures tendances du prêt-à-porter sans pour autant s’éloigner de son concept.

Le but étant pour l’enseigne, de rester positionnée sur le segment de niche sur lequel elle se situe, mais aussi, de relancer l’engouement chez les consommateurs ; en renouvelant plus régulièrement sa collection et ses gammes de produits et en continuant d’en commercialiser en petite quantité. Elle se doit ainsi de disposer d’une force de frappe créative en matière de produits comme de concepts pour s’adapter aux goûts fluctuants de la demande.

Elle doit, dans sa stratégie à long terme, penser à s’exporter au-delà des frontières européennes par exemple aux Etats-Unis, en y apportant une une « french touch » largement appréciée et reconnue à travers le monde. Le choix des lieux d’implantation des boutiques à l’étranger doit se faire comme celui des boutiques de l’hexagone, dans des rues « tendances » et branchées.

Il est important que la marque s’ouvre vers d’autres univers. Il faut se diversifier afin d’exporter sa « touche » sur d’autres segments et d’élargir son cercle de résonnance dans le but de se développer et d’apporter aux produits de la marque une autre envergure103. Les stratégies de diversification sont un impératif à long terme pour une enseigne de prêt-à-porter féminin. Elles doivent prendre en compte l’évolution de la structure de la consommation favorable aux accessoires, à la maroquinerie, aux chaussures, voire aux produits de décoration (DESIGUAL, MANOUSH), plus porteurs. Les accessoires plus abordables permettent de toucher

103 Le prêt-à-porter féminin, Quelles stratégies des distributeurs face à un retournement conjoncturel durable, PRECEPTA groupe XERFI, juin 2008, 260 p.

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une cible plus large. La création de gammes annexes peut ainsi permettre aux marques d’asseoir leur notoriété, leur image et leur présence auprès des consommateurs.

3. L’analyse SWOT

L’analyse SWOT permet de déterminer les forces sur lesquelles la griffe peut s’appuyer et de gommer les faiblesses afin de saisir les opportunités et de faire face aux menaces de l’environnement.

FORCES FAIBLESSES

- Un placement sur un marché de niche.

- Marque avec une identité très prononcée, un univers cohérent.

- Un placement moyen/haut de gamme plus pérenne qu’en moyen de gamme, décalage de l’offre par rapport aux leaders der du marché.

- Ciblage élargi de la clientèle par une gamme large de pièces, traitée par silhouettes.

- Une limitation de l’impact du coût de la main d’œuvre sur le prix avec une production mix entre automatisation et « fait main ».

- Ciblage élargi de la clientèle par une gamme de prix large, des pièces « faites main » plus accessible.

- L’utilisation de matières nobles.

- Une forte créativité.

- Une stratégie de différenciation : caractère unique des produits.

- Des services personnalisés.

- Une bonne connaissance du marché.

- Ciblage de la clientèle par l’univers marqué.

- Ciblage de la clientèle par le type de produits.

- Déplacement vers le haut de gamme.

- Faible choix de produits, petites collections (de 100 à 200 modèles).

- Ciblage de la clientèle par les prix élevés.

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- Une communication innovante.

- Une présence sur internet avec un site vitrine et de vente en ligne et permanence sur les réseaux sociaux.

- Attention portée à l’emplacement des boutiques et design des boutiques propre à la marque.

- Présence ciblée sur le territoire français.

- Le développement de point de vente à l’étranger.

- Double rythme de collection, renouvellement d’une partie de la collection fréquent stimulant l’acte d’achat.

- Meilleure réactivité avec une production locale.

- Baisse des coûts de production avec une production étrangère.

- Une communication autour des savoir-faire liés au « fait-main » pour justifier les lieux de production, faire reconnaître l'expertise aux clientes, communiquer en toute transparence pour rassurer et séduire les consommatrices.

- Une possibilité d’exclusivité auprès des fournisseurs.

- Un sourcing large et/ou une spécialisation.

- Adaptation logistique et division du rythme de production.

- Mauvaise appréciation de la fabrication des pays à bas coût.

- Besoins d’évolution, de déplacement dans les centres de production étrangers tout les 10 à 15 ans.

- Pouvoir de négociation des fournisseurs important.

- Sourcing important, politique de recrutement minutieuse.

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MENACES OPPORTUNITES

- Baisse du budget moyen consacré aux vêtements.

- Le prix d’un vêtement est un élément clé de la compétitivité surtout en période de crise.

- Diminution de l’engouement pour l’artisanat, tendance éphémère.

- Les consommatrices sont de plus en plus exigeantes en matière de qualité et de transparence.

- Les consommateurs n’ont pas tendance à s’intéresser aux messages de marques qui ne sont pas connues.

- Marché fortement concurrentiel.

- Le développement de la distribution organisée a considérablement réduit la distribution multimarque indépendante.

- Principal concurrent : ANTIK BATIK est sur le même segment moyen/haut de gamme avec une diversification de la production, mix entre industrialisation et « fait main » et une gamme de prix large.

- Présence de grands groupes pouvant absorber la marque.

- Contexte économique difficile, implantations et communication à fort investissement difficiles à maintenir.

- Signe de repli du marché en Union Européenne.

- Changement des modes de consommation.

- Augmentation des coûts (matières premières et coûts de production).

- Consommation d’habillement en légère reprise.

- La perception de la mode française à l’étranger est positive.

- L’artisanat et le « fait main » sont de plus en plus à la mode depuis plusieurs années.

- La consommatrice de mode est de plus en plus sensibilisée au caractère éthique des produits.

- La presse reste la principale source d'influence. Internet, avec les sites des marques, de vente en ligne et les blogs deviennent de plus en plus une source d’information et de référence.

- La part des ventes en ligne d'habillement féminin a plus que doublé en l’espace de trois ans.

- L’export demeure un levier de croissance pour les fabricants français de prêt-à-porter féminin. Ouverture de nouvelles boutiques dans des marchés à fort potentiel de croissance (Inde, Russie, Turquie, Amérique centrale, Corée et Taïwan).

- Possibilité d’ouverture sur des marchés annexes à plus forte croissance (accessoires, décoration).

- Fort potentiel du marché de la femme enceinte et grandes tailles.

- Le prêt-à-porter féminin constitue près de la moitié des ventes de vêtements.

- Le marché du prêt-à-porter féminin représenterait près de 6,6 milliards d’euros en France.

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ANALYSE ET PRECONISATIONS pour la stratégie à adopter pour une marque utilisant le « fait main » comme fondement de son identité :

L’enseigne devra faire face aux géants du secteur par une stratégie extrêmement bien maîtrisée.

Elle doit se positionner avec des produits innovants en termes de style vestimentaire sur un segment moyen haut de gamme. L’objectif de la marque est de placer l’artisanat au centre de son concept et d’être le reflet d’un véritable art de vivre. L’idée est que chaque consommatrice s’habille pour elle, pour le caractère unique des pièces vestimentaires, mais aussi pour leur côté éthique socialement et écologiquement.

Les produits sont fabriqués en quantité limitée, utilisent des matières nobles et font partie d’un concept clairement élaboré.

Elle cible une clientèle spécifique et est en rupture avec les codes actuels présents dans la mode et le prêt-à-porter de masse qu’effectue un grand nombre d’enseignes.

Elle doit savoir créer judicieusement le « buzz » et maîtriser parfaitement sa communication qui constitue un facteur majeur pour la création d’entreprise surtout pendant une conjoncture économique difficile et sur un marché extrêmement concurrentiel.

Elle doit mettre en place une forte identité et image de marque grâce à un mix marketing extrêmement maîtrisé, que ce soit au niveau de sa communication, de ses produits et de ses modes de distribution.

La marque doit savoir se faire remarquer alors que la concurrence a tendance à rogner sur les budgets publicitaires et a ralenti l’ouverture de boutiques pendant la crise.

Elle doit jouer parfaitement avec les différents rythmes de la mode et les tendances.

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Conclusion

Cette étude a mis en avant que le « fait main » s’est longtemps développé dans l’ombre des maisons de coutures. Mais le nouveau statut que lui confèrent les blogs et les bureaux de tendances pourrait contribuer à l’installer de manière durable sur le marché du prêt-à-porter.

La création d’une collection de prêt-à-porter féminin sur la base d’une production manuelle artisanale est difficile à mettre en place. Le « fait main » fait l’objet d’un certain nombre de contraintes, dont les trois principales restent le sourcing, le temps et le prix. Il demeure néanmoins incontournable en production vestimentaire et est un terrain d’exploration particulièrement riche. De plus, il apporte une valeur ajoutée au produit final et une singularité.

Les enseignes de prêt-à-porter féminin moyen de gamme, l’ayant comme parti pris, semblent se détacher du marché et créer l’engouement collectif. Nous observons de nouvelles approches stratégiques placées sur un marché de niche et basées sur un retour à une production plus responsable et humanisée.

Face à un marché très concurrentiel, la marque souhaitant développer une gamme de produits « fait main » doit être particulièrement à l’écoute de la consommatrice, attentive à l’évolution du marché et cohérente dans sa stratégie à long terme. Le sourcing, la création, le rythme, la visibilité et la communication sont cinq éléments clés de succès.

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Glossaire

Click and mortar

Appellation anglo-saxonne utilisée pour désigner les entreprises traditionnelles qui ont aussi une activité en ligne.

Low cost

Le low cost est un concept économique et marketing basé sur la pratique de prix plus bas que la moyenne du marché. Le concept du « low cost » est surtout utilisé dans le domaine des services (hôtellerie, transport aérien, location de voiture), il s’agit un peu du hard discount des services. Le prix bas est généralement obtenu par la compression des coûts. Cette réduction des coûts vient généralement d’une suppression des services annexes considérés comme non indispensables et par une gestion rigoureuse et parfois décriée des coûts salariaux. Il est intéressant de souligner que la pratique du low cost permet parfois d’obtenir des marges supérieures à celles obtenues dans un modèle « traditionnel ».

Navette volante

Une navette est un élément de métier à tisser qui est lancé ou glissé entre les fils de chaîne afin d'y passer le fil de trame pour réaliser le tissage.

Pure player

L'expression fut utilisée à l'origine pour désigner une entreprise dont l'activité était exclusivement menée sur l'Internet. Par extension, elle permet de désigner une entreprise qui concentre ses activités sur un seul métier ou en tout cas sur un seul secteur d'activité.

Team buying

Le concept d’achat groupé est souvent utilisé pour désigner l’achat groupé en ligne (en anglais co-buying, group-buying, community shopping, team buying).

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À l’origine, l’achat groupé est une pratique assez répandue originaire de Chine utilisée par des groupes qui pourraient être qualifiés de physiques tels que les Comités d’Entreprise pour les voyages organisés. L’achat groupé permet aux participants de bénéficier de réductions tarifaires parce qu’ils sont nombreux.

Joint-ventures

Filiale commune entre deux ou plusieurs entreprises dans le cadre d'une coopération économique internationale.

Succursalisme

Secteur de la distribution composé d'entreprises de vente au détail, gérant des succursales sous une enseigne commune.

Source : L’Encyclopédie du marketing, Jean Marc Lehu

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Annexes

ANNEXE 1 _ INTERVIEWS DE PROFESSIONNELS DE LA MODE

Les entrevues avec des professionnels de la mode m’ont permis de cerner l’ampleur du sujet et ont servi de fil conducteur à la construction de ma réflexion.

LISTE DES INTERVIEWS

1.1_ Frédéric GODART, sociologue de mode.

1.2_ Hubert BARRERE, directeur artistique des Ateliers Lesage, créateur, corsetier et brodeur.

1.3_ Pascal GAUTRAND, designer, consultant et professeur à l’IFM.

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ANNEXE 1 INTERVIEWS DE PROFESSIONNELS DE LA MODE

1.1 Frédéric GODART, sociologue de mode.

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Entretien avec M. Frédéric Godart, spécialiste en sociologie de la mode, au restaurant Les Grandes Marches, 6 place de la Bastille, Paris 12ème, vendredi 27 avril 2012 à 18h.

PROBLEMATIQUE

Le « fait main » a t-il une place dans le prêt-à-porter moyen de gamme pour femme ? Son utilisation peut-elle être un atout au niveau du produit ou au contraire les points négatifs sont-ils plus importants ?

Quelles sont les différentes natures de contraintes générées par l’utilisation du « fait main » ?

Quels sont les points de valeur ajoutée que cela peut représenter ?

Le « fait main », j’en ai pour preuve ma dernière conférence à Barcelone, c’est une question centrale pour l’industrie dans son ensemble et souvent associé au luxe. C’était une conférence sur le luxe donc il y avait la joaillerie, l’horlogerie, etc. Il faut savoir que tous les représentants du luxe dans la mode disaient que l’industrie maintenant s’est largement dirigée vers une mécanisation de tout le processus de production. Y comprit pour les grandes marques de luxe, où le « fait main », cela vaut aussi pour la maroquinerie, devient de plus en plus limité parce que cela coute très cher, c’est très difficile à mettre en place et un autre point qui est important, c’est parce que les compétences se perdent. C’est beaucoup plus important dans la maroquinerie que dans le vêtement. Mais le fait est que c’est aussi vrai dans le vêtement. Donc un coût important avec une compétition qui est du coup exacerbée, une perte de compétence. Ce sont les deux premières tendances de fond qu’il faut rappeler.

Maintenant le « fait main » est connoté luxe. Donc plus il y a de « fait main » plus c’est luxueux. La connexion est claire. Je pense que pour une marque, pouvoir

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ANNEXE 1 INTERVIEWS DE PROFESSIONNELS DE LA MODE

1.1 Frédéric GODART, sociologue de mode.

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communiquer sur le « fait main » et pouvoir le prouver, c’est une façon d’ajouter une plus value et augmenter son prix.

Maintenant, le problème du « fait main » cela peut être aussi un problème de qualité. Je parle de cela parce que, lors de la conférence, la question a été posée. Voyez, pour la petite anecdote, une marque comme Hermès (il y avait le représentant de la marque Hermès montre en Asie). Hermès est Craftmanship en anglais, donc c’est le « fait main », l’artisan, etc. Lui n’avait pas de présentation power point, il a dit « à Hermès comme tout est artisanal, on ne fait pas de présentation power point ». C’est que la parole ou alors ils écrivent au tableau. Il se moque de Louis Vuitton « oui, eux il font une présentation power point ».

L’artisanat est une valeur centrale du luxe et je dirais dans la mode c’est probablement relié à cela et donc cela permet d’avoir une valeur ajoutée plus importante. Maintenant, où trouver la qualité ? C’est un problème concret de sourcing, donc de fournisseurs. Alors probablement dans la mode c’est plus facile de former des gens, mais c’est vrai que dans l’horlogerie par exemple ou dans la joaillerie, dans la maroquinerie, c’est très difficile à trouver, cela coûte très cher. Et encore une fois les métiers se perdent, c’est vrai à travers l’Europe. Donc cela, c’était en Espagne. Mais l’ensemble des pays européens ont le même problème. Il y avait un représentant du cercle Fortuny, c’est comme le comité Colbert en Espagne, et lui disait qu’il y a quand même un potentiel de création de 500 000 emplois en Europe autour de cette notion d’artisanat. Alors ce sera le « fait main » dans la mode ou dans la maroquinerie ou cela peut être autre chose dans d’autres industries.

Quelles sont les différentes natures de contraintes générées par l’utilisation du « fait main » ?

Vous m’avez répondu sur les aspects économiques, techniques, sur les questions des compétences. Qu’en est-il des contraintes juridiques ?

Alors, sur les contraintes juridiques, est ce que vous avez quelque chose en tête spécifiquement ?

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1.1 Frédéric GODART, sociologue de mode.

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L’ouverture des frontières aux exportations notamment en Chine. Les accords de commerce libre. La délocalisation…

En fait le « fait main », Le cercle Fortuny, le comité Colbert, tous les Walpole en Angleterre, maintenant ils ont une association européenne qui les réunit, leur objectif c’est de promouvoir les industries européennes. Et pas uniquement les industries de la création cela peut être aussi l’automobile, toutes les industries qui ont un élément de créativité en eux, de les promouvoir autour de la notion de qualité. La production Européenne c’est une production de qualité. Et à travers cela, on sentait qu’il y avait tout de même des tensions commerciales qui pointées avec la Chine, avec les pays émergeants, quatre grands pays émergeants, ou 5 ou 6 et les Etats Unis. Les problèmes juridiques, cela va être des problèmes de réciprocité, en termes de barrières douanières, autour etc. Maintenant il faut savoir que la Chine essaie exclusivement de développer le luxe, soit en revenant vers de marques chinoises qui existaient déjà mais qui ont un peu été oubliées, en les ressuscitant, les relançant et en insistant aussi sur la notion de qualité du « fait main ». On va dire plutôt d’artisanat.

D’ailleurs je ne sais pas comment vous articulez artisanat et « fait main ». Car, c’est le paradoxe, les européens se disent on va relancer l’artisanat après avoir massivement automatisé.

Cette tension, les chinois se sont bien rendu compte que le « fait main », l’artisanat c’était important pour la valeur ajoutée, donc eux aussi vont y venir. Juridiquement, je dirais que la question du « fait main » est plutôt attachée à des problématiques plus larges, géopolitiques, qui concernent tout en fait, la réciprocité, les problèmes de barrières douanières, le protectionnisme etc.

Economiquement, le « fait main » c’est des coûts supplémentaires, des coûts de formation, des coûts de long terme. Des maisons comme Chanel ou Hermès qui investissent beaucoup sur cette notion, tendent à protéger leurs fournisseurs et avoir des relations de long terme avec eux. Cela prend des dizaines d’années, d’avoir la bonne personne qui fait la bonne passementerie. Il y a des techniques spéciales et ces techniques se perdent malheureusement. Donc il faut vraiment garder la connexion. C’est très compliqué, et d’ailleurs cela va au delà de la question du coût parce que c’est aussi une question de relations sociales. Donc il faut établir la confiance, il faut faire en sorte qu’ils n’aillent pas travailler avec d’autre entreprise, c’est compliqué. La technique c’est aussi le problème de la diffusion des savoirs, je sais que souvent dans l’artisanat de ce type, on a un problème de diffusion, parce qu’il n’y a pas d’apprentis, personne veut le faire, ou alors cela prend trop de temps

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ANNEXE 1 INTERVIEWS DE PROFESSIONNELS DE LA MODE

1.1 Frédéric GODART, sociologue de mode.

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ou alors même ceux qui ont les compétences ne veulent pas les diffuser. Chez Chanel c’est le cas par exemple, il y a des artisans qui ne veulent pas transmettre leurs savoirs. C’était dans le documentaire signé Chanel, il y a un très beau passage sur la passementerie. Et, comment elle s’appelle… Madame Pouzieux, c’est cela, qui refuse, Chanel a toujours essayé de lui envoyer des apprentis pour apprendre le métier, elle a toujours refusé. Pour les galons c’est cela. Donc voyez, je pense que la partie économique elle va un peu au-delà du purement économique, c’est aussi du social au sens vraiment de connexion, donc établir une confiance, faire en sorte que la compétence se reproduise, c’est compliqué. C’est une grande problématique. Je sais que le comité Colbert y réfléchit. On parle de relever 500 000 emplois en Europe, à l’heure actuelle ce n’est pas quelque chose sur lequel on peut cracher. En Espagne 47% des jeunes sont au chômage. Si l’Europe a une carte à jouer c’est bien là.

Comment les consommateurs interprètent-ils le « fait main » Made in « quelque part » ?

C’est une question majeure. Les marques jouent avec cela. Il y a des conditions, par exemple Swiss made, pour l’horlogerie, c’est un marché un peu connexe, il y a des conditions légales sur la proportion de la montre qui est faite ou assemblée en Suisse. Maintenant on sait très bien qu’une partie est assemblée ailleurs. Mais le Swiss made permet de protéger l’appellation vis-à-vis de la clientèle et c‘est aussi un gage de qualité. Cela permet à un horloger suisse de vraiment protéger son marché par rapport à un autre.

Pareil pour le made in Italie, vous savez que maintenant il y a des sweat shops, des chinois qui sont là on ne sait pas si c’est légalement ou pas. Dit légalement on veut bien le croire, à des coûts dérisoire, ils fabriquent géographiquement en Italie, mais on sait très bien qu’ils emportent une partie du vêtement qui est faite en Chine, elle est seulement assemblée sur place. Mais cela a quand même le logo, le label Made in Italie, qui vend très bien. Donc la perception est très importante, cela a une valeur ajoutée énorme. C’est surtout dans le contexte actuel, maintenant le problème c’est que, ce qui se passe derrière n’est vraiment pas clair.

Lors de la conférence, certaines personnes ont lâché le morceau. En disant qu’une grosse partie de l’industrie ne produit pas là où elle dit qu’elle produit. Ou alors elle se protège légalement avec des petits éléments juridiques qui leur permettent de dire c’est à tel pourcentage et qui s’arrête au pourcentage minimal.

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Les grandes marques se protègent légalement toujours. Mais elles vont faire le minimum si cela les arrange. Après tous c’est une question de maximiser le profit.

En Europe le « fait main » est condamné à rester dans le haut de gamme. C’est juste une question de coût. On pourrait avoir, si le « fait main » était reconnu comme une qualité en général quelque soit l’origine, cela pourrait compenser l’aspect Made in. Parce que lorsque l’on dit Made in China, tout le monde pense mauvaise qualité et ce qui est vrai dans l’ensemble. Mais il n’y a aucune raison pour que ce soit encore le cas à l’avenir. Si on dit Made in Namibia, que tout est « fait main » et que c’est de la très bonne qualité, cela permet de vendre à des prix encore raisonnables, tout en ayant une qualité exceptionnelle. Donc cela franchement, cela peut être une combinaison gagnante. Il faut pouvoir neutraliser l’aspect négatif du Made in ailleurs, en fait. En disant, voilà c’est « fait main » et il y a aussi l’aspect éthique, fair trade, etc. Un des mots-clés importants de la conférence et c’est vrai pour toutes les conférences où je suis allé récemment. C’est CSA, Corporate Social Responsibility. Cela englobe tous les aspects éthiques et humanistes des entreprises, donc principalement vu à travers le prisme de l’environnement, pour l’instant. C’est comment protéger les rivières par exemple puisque l’industrie du textile est très polluante. Le sourcing pour le luxe aussi, il ne faut pas détruire les sources d’approvisionnement pour des produits de haute qualité. De grandes marques l’ont compris et vont donc protéger des zones, pour les peaux de serpent, le cachemire, ... Donc l’avantage du « fait main » c’est que cela, à mon avis, a un impact environnemental moindre que les aspects industriels, que la production industrielle dans le textile. Donc cela est à explorer, parce que cela permet d’avoir des écolabels maintenant qui se multiplient. Cela permet aussi aux communautés de survivre et de ne pas partir en morceau, parce qu’on voit bien que les problèmes dans ces pays avec l’urbanisation, les communautés rurales s’effondrent complètement. Soit en Inde, soit en Afrique, cela a été vrai en Europe. Potentiellement il y a un aspect éthique à mon avis qui peut être … Mais il ne faut pas être naïf quand même, parce qu’on est quand même dans le business. Il s’agit de survivre aussi financièrement, de faire un profit. Mais, je crois que c’est pas mal de mettre en avant les aspects éthiques du « fait main », aussi la façon dont les employés sont traités. Prenons par exemple, on pense que dans le « fait main » les ouvriers sont mieux traités. Cela c’est à voir aussi. Je ne sais pas parce que lorsque l’on voit comment est fait le travail en usine, les gens sont traités comme des machines. Maintenant si sur le « fait main » on considère qu’il faut faire de la qualité et qu’on est sur des prix plus élevés on peut imaginer des cadences moins soutenues, un focus sur la qualité, des employés plus heureux, des communautés qui survivent. Il faut voir, il y a peut-être un aspect éthique. Parce que c’est vrai que le « fait main » cela peut être encore pire, c'est-à-dire que cela peut être des sweat shops. Cela

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dépend, le « fait main » ce n’est pas forcément synonyme de qualité mais je dirais qu’il y a un potentiel qui est là, qualité, authenticité, etc. Peut-être à exploiter. C’est peut-être naïf mais le potentiel est là en tout cas pour pousser cette dimension.

Les choses sont sans doute différentes selon les secteurs. Je pense notamment au « fait main » dans le secteur du jean, par exemple chez Marithé et François Girbaud. Même si cela a été automatisé maintenant avec les procédés laser, au départ les traitements utilisés étaient très nocifs pour la santé des ouvriers.

C’est intéressant ce que vous dites parce que, c’est vrai que cela dépend vraiment du segment, par exemple le « fait main » de la maroquinerie, c’est Hermès qui met cela en avant, cela prend du temps, c’est des gens très qualifiés, que l’on paye assez cher. A la fin on a un très beau produit. Le « fait main » dans le textile on a peut être pas la même chose et probablement que les aspects santé sont assez négatifs. A voir en fonction du segment.

Mais vous j’ai l’impression que c’est plutôt le vêtement qui vous intéresse. Il faut voir s’il n’y a pas de techniques ou des aspects de la maroquinerie, ou de la joaillerie ou l’horlogerie.

Maintenant le textile, c’est vrai que c’est un peu différent. Ou alors, sauf si on est dans le cas comme Madame Pouzieux sur des éléments qui sont ajoutés à une base du vêtement qui serait peut-être produit en masse. Pour vous, ce serait ajouter à un vêtement qui pourrait être produit en usine, la structure de base et ensuite on y ajoute des éléments « fait main ». Cela me paraît être un bon compromis parce que la production automatisée n’est pas forcément négative. Parce qu’il y a des aspects qui ne requièrent pas vraiment de compétences spécifiques qui est lié à l’artisanat. Même qui peut être négative comme vous l’avez dit tout à l’heure pour certains traitements nocifs ou des découpes qui sont même parfois mieux faites par une machine. Mais il y a des éléments qui peuvent apporter une valeur ajoutée à la dernière minute. Cela je pense que c’est un bon modèle. C’est le modèle de Chanel, Hermès et il semblerait que Louis Vuitton suive progressivement le mouvement. Il y a une partie qui est produite en masse et l’autre assemblée à la main. On prend le meilleur des deux mondes !

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1.1 Frédéric GODART, sociologue de mode.

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Comment expliquer vous cet engouement pour le « fait main » aujourd’hui ?

Comment séduire le consommateur sur ce type de produit ?

Le « fait main », il y a des grosses tendances de fond que l’on voit à travers l’économie dans son ensemble, pas uniquement dans la mode. Il y a tous les aspects environnementaux qui sont fondamentaux, il y a tous les aspects, alors je n’ai pas envie de dire protectionnisme, plutôt rapatriement des aspects économiques en occidents. Je parle du consommateur occidental. En occident, aux Etats Unis et quelques pays ici ou là, les aspects environnementaux, éthiques et économiques avec une production locale, sont fondamentaux aujourd’hui. Tout ce qui peut satisfaire le consommateur autour de ces trois éléments va être gagnant. Le Vintage par exemple, c’est écologique parce que l’on reprend des vêtements que l’on aurait autrement détruit, c’est recyclé sur place donc économiquement cela permet à des cycles économiques de se mettre en place localement, l’aspect éthique est moins éthique dans ce cas là.

Maintenant sur le « fait main », l’aspect environnemental et assez ambigu parce qu’effectivement comme vous l’avez dit, parfois ce n’est pas complètement non polluant, mais je pense que le « fait main » est perçu comme étant vert, écologique. Je pense que si l’on faisait une enquête la perception serait celle la. Alors est-ce que c’est vrai ou pas. Je pense que c’est en partie vrai. En tout cas dans certains segments sans doute, peut être pas dans tous. Ethique, c’est perçu comme tel parce que c’est lié à une perception de haute qualité, des employés mieux formés. Par exemples les employés de Chanel qui restent là longtemps, qui sont bien payés, qui sont protégés, etc. Et aspect économique puisque comme on est sur des produits qui sont plus chers, cela fait sens de les produire localement puisque les produits qui sont manufacturés en Europe, en Occident sont par définition plus cher. La seule solution pour le maintenir et faire en sorte qu’ils existent c’est de monter vers le haut de gamme. Le « fait main » a cette connotation de haut de gamme. Ce serait intéressant si vous arrivez à découpler le « fait main » du haut de gamme. Il y a tout un travail à faire je pense là.

Il y a tout un travail d’éducation à faire, alors je sais que des marques comme Zadig et Voltaire produisent partout à bas coût. Eux ils ont commencé à dire « ce n’est pas parce que c’est Made in China que c’est mauvais ». C’est vrai, mais alors le problème c’est qu’il faut expliquer vraiment et prouver que c’est fait dans certaines conditions et à un certain niveau de qualité. Maintenant Prada a, je pense, une légitimité

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importante pour pouvoir convaincre les clients que ce qu’ils disent est vrai. Je suis désolé mais d’autres marques je ne les croirais pas forcément. Donc c’est cela le problème. Mais s’ils expliquent, s’ils montrent des photos, s’ils donnent un petit livret au consommateur, si les sites internet sont bien faits, bon ils peuvent aussi proposer aux gens d’aller visiter les centres de production. Ça c’est pas mal. Là il y a un potentiel à faire. Cela permettrait d’avoir du « fait main « à coûts moins importants.

Maintenant la question c’est combien de temps cela peu durer, parce que les prix augmentent, les coûts de production augmentent. Maintenant, la Chine est devenue trop chère par exemple pour l’industrie textile. Quatre – cinq dollars de l’heure, on est quand même en dessous de ce que l’on paye en Europe, mais on est quand même dix fois plus cher que ce que demandent les indonésiens. Donc, le problème c’est combien de temps peut durer ce type de modèle, sans que automatiquement on dévie vers le haut de gamme. Comme les coûts vont augmenter on va dévier vers le haut de gamme par force. Cela veut dire quoi, qu’il faudrait continuer à se déplacer de lieux de production, tout cet aspect dynamique en fait. Il y a peut être une fenêtre de dix ans pas plus et là on revient vers le haut de gamme.

Et si l’on met un système de marge en place que l’on réduirait au fur et à mesure de la hausse des salaires ?

On ne peut pas réduire la marge. Il ne faut pas réduire la marge. C’est anti économique. Il faut augmenter la marge mais c’est une question importante. C’est simplement la question de l’évolution des coûts, de la dynamique économique. En même temps cette dynamique économique, elle est là depuis toujours. Ce phénomène d’adaptation, il faut les prendre en compte quelque soit l’activité économique. S’il y a dix ans pour un modèle, cela va dix ans c’est pas mal. Personnellement je ne pense pas que cela puisse durer plus de dix ans. Parce que les coûts augmentent vite, on voit que la Chine a pris dix – quinze ans pour rejoindre ces niveaux de prix. Cela leur pose de vrais problèmes par contre.

Et si l’on se base sur un système de délocalisation, sur un système d’aide à des communautés dont les périodes se superposent pour procéder à un « sevrage » une fois que le niveau de revenu a suffisamment augmenté ?

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Il faut aussi accompagner la transition, parce que cela peut être aussi très destructeur pour une communauté de voir ses activités se déplacer. C'est-à-dire que peut-être la communauté d’origine devrait, elle, monter vers le haut de gamme. Donc on peu imaginer comme cela un processus, une monté en gamme progressive et un déplacement. C’est ce qui se met potentiellement en place avec la Chine. Après est-ce qu’ils vont arriver à le mettre en place, c’est une autre question. Le Japon et la Corée y sont arrivés dans d’autres industries, dans le high-tech, l’industrie automobile. La Corée était nulle il y a dix ans, maintenant ils ont Samsung, c’est quand même incroyable que le seul concurrent mondial par rapport à Apple ce soit une marque coréenne qui, il y a dix ans, était considérée comme bas de gamme. Il y a LG, c’est encore plus incroyable. LG il, y a deux ans, était vraiment nulle part. Je ne voix pas pourquoi il y aurait une différence dans l’industrie du textile, de la mode ou du luxe, des industries connexes. Une montée en gamme progressive, tous les pays n’ont pas réussit la transition et certains pays qui ont réussit la transition pendant un moment, maintenant ont des problèmes, le japon par exemple, très spécifiquement. Le Japon a beaucoup de problèmes économiques, c’est toujours massif, mais où va le Japon ce n’est pas très clair.

La montée en gamme a ses limites aussi. Est-ce qu’on peut encore monter en gamme ? Il y a 65 million de français, 35-40 million de personne sur le marché de l’emploi. Est-ce qu’on va tous les faire travailler pour Hermès ? L’industrie automobile se pose la question. Le moyen de gamme par exemple dans l’automobile française n’est pas quelque chose qui peut durer parce que c’est trop cher pour des voitures qui ne se vendent pas assez chères. Renault par exemple a racheté Dacia, ils font du moyen bas de gamme à des prix déraisonnables et produit ailleurs, cela marche parce que c’est produit ailleurs. Citroën essaie de monter en gamme avec la ligne DS mais je pense que c’est leur seule porte de sortie. Sinon l’ensemble de l’industrie automobile française va disparaître.

Est-ce qu’une entreprise de prêt-à-porter moyen de gamme pour femme, se spécialisant dans du « fait main » éthique, peut-être indépendante des tendances et des mouvances de la mode ?

La réponse c’est non. Mais c’est une très bonne question. C’est toute la question de la mode éthique. En fait, dans ces cas là, on ne va plus parler de mode, on va parler

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de vêtement. Parce que si par définition cela ne bouge pas… Alors, c’est un débat sémantique. On peut dire que ce sont des cycles de mode qui sont plus lents et au lieu d’avoir deux fois par ans, ou maintenant six fois par ans, ou même toutes les deux semaines d’ailleurs, on va avoir, je ne sais pas, tous les cinq ans. Est-ce que cela sera sur les basics, par exemples des chemises, des pantalons. Tous les basics durent. Un jean cela peut durer des années, une chemise, à part certains éléments de coupe on sait qu’une chemise on peut la porter un moment. Après sur d’autres éléments comme les manteaux, les pulls, les trucs comme cela, cela dure moins longtemps. A voir, il y a peut-être des sous-segments du vêtement qui peuvent être « targeter ». Je sais qu’il y a beaucoup de marques éthiques qui avaient essayé, avec le mouvement de la slow fashion, c’était vraiment lutter contre la fast fashion. C’était avoir des produits qui durent, des tendances qui durent. Donc les problèmes des tendances c’est qu’elles sont plus lentes.

Maintenant, je ne sais pas où on en est là-dessus, parce que cela fait quinze ans que l’on prédit la mort de la fast fashion, elle ne fait qu’accélérer. Prenez l’exemple de American Apparel, que je mets moi dans le fast fashion, encore qu’en France, il peut être positionné en milieu de gamme. Eux, ils ont des produits éthiques, ils ont tout de suite insisté sur les aspects éthiques de leur production. Maintenant est-ce que cela marche ou pas, je ne sais pas. American Apparel ne va pas très bien, mais peut être pour d’autres raisons. Ils ont ouvert trop de boutiques, je ne sais pas qu’elles sont les raisons. Donc est-ce que cela marche ou pas ce n’est pas clair. Est-ce que c’est possible ? C’est aussi un espace qui commence à être très peuplé. Le vêtement éthique a beaucoup de petites marques qui vont essayer et pour lesquelles cela n’a pas marché. Le gros de la clientèle même si, on va dire oui c’est vrai on aime bien cette idée de mode éthique, on ne va quand même pas acheter les produits. S’il peut y avoir une adhésion de principe, le porte-monnaie ne suivra pas forcément.

La combinaison gagnante c’est de suivre les modes, mais de faire des produits réellement novateurs et créatifs du point de vue design avec une dimension éthique qui doit être expliquée au consommateur pour que le message passe. Et pour être honnête, je pense qu’il faut plus se positionner vers du haut de gamme, pas forcément luxe mais moyen haut de gamme, premium, un positionnement pris par Diesel par exemple. Il faut aussi une campagne marketing de fond pour pouvoir faire connaitre la marque et justifier les prix. Cela prend du temps. L’objectif c’est que les prescripteurs du monde de la mode puissent dire « on aime ».

Et en même temps il faut convaincre les consommateurs de faire un effort. Je crois qu’il y a un élément qui a été sous-exploré et qui a un potentiel. C’est en appeler au porte-monnaie des consommateurs. C’est leur dire : bon vous achetez chez nous, déjà c’est des vêtements de bonne qualité, des designs modes, éthiques, mais

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surtout vous les garderez plus longtemps. Il y a moyen de le garder plus longtemps et de faire des économies sur le long terme. C’est un peu paradoxal de développer ce type d’argumentation dans le milieu de la mode, mais pourquoi pas ?

On peut peut-être aussi jouer sur le côté unique de la pièce ?

Peut être l’aspect artistique, oui.

A mon avis il y a quand même tout un espace à explorer côté durée pour le vêtement. En tout cas cela marche pour les accessoires. Parce qu’on le veuille ou non un Birkin il dure ! Après je veux bien croire qu’il y a des mouvements de mode sur les accessoires aussi. Mais il y a quand même des éléments qui restent. La petite robe noire de Chanel, elle va durer un moment. C’est marrant parce que ce n’est pas quelque chose qui a été vraiment exploré. Dans le domaine des accessoires, à mon avis c’est quelque chose qui serait facile à défendre, dans le domaine de la maroquinerie, de l’accessoire, de la joaillerie, de l’horlogerie. L’horlogerie mise à fond là-dessus. On n’est pas propriétaire d’une Patek Philippe, on est juste là pour en prendre soin pour la génération suivante, c’est quand même incroyable. A voir si on peu faire la même chose dans le vêtement, cela serait vraiment aller à l’encontre de tendances historiques. Peut-être que l’on peut voir qui va soutenir ce type de niche.

L’utilisation de célébrités donne du prestige à la marque, maintenant comme vous le savez, cela va durer quelques semaines, quelques mois maximum. Cela oblige aussi à renouveler les produits. Donc là il y a une tension fondamentale, je crois.

Auprès de qui trouver la crédibilité ? Est-ce que c’est auprès d’une niche ? Est-ce que c’est auprès du consommateur en général ? Parce que pour être parfaitement honnête, l’argument éthique fonctionne mais pour beaucoup de consommateurs, les valeurs morales en tant que telles ne vont pas forcement déclencher un acte d’achat. Ce qui va déclencher l’acte d’achat c’est, à prix égal, si je peux faire un geste éthique je le ferai. Ou si cela ne me coute vraiment pas grand-chose. Si je dois payer deux fois le prix pour protéger une communauté… Maintenant, je ne pense pas que les consommateurs occidentaux soient prêts à faire vraiment cet investissement. Il y a cette idée qui circule et on voit bien en ce moment dans les débats politiques, qu’on a trop payé. C’est très intéressant ce qui c’est passé en Angleterre récemment, bon vous savez que les indiens ont promis d’acheter des avions français, des rafales. La presse et le gouvernement anglais se sont déchainés, parce que les anglais étaient

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aussi sur les starting block pour vendre leur avions. Et ils ont dit : oui on a une relation historique avec l’Inde, comment cela ce fait qu’ils nous aient trahis. Ils ont dit : bon et bien de toute façon maintenant ils n’ont plus besoin de notre aide parce qu’ils sont déjà développés, c’est nos concurrents et on a nos problèmes chez nous. On va arrêter de leur donner de l’argent.

Donc tout ce qui est aide au développement, développer les communautés dans d’autres pays, beaucoup de gens vont dire, et bien non c’est ici qu’on a des problèmes. Donc il y a cette dimension aussi, c’est pour cela que j’avais insisté sur l’aspect développement local. Parce que si vous dites : on défend l’emploi, on défend l’environnement ici, cela portera peut-être plus que dire on défend l’environnement en Afrique, on va défendre les communautés locales. Cela, c’est le mouvement qui avait été fait par le fair trade, Max Havelaar, etc. De mon point de vue je trouve cela très bien. Mais du point de vue du consommateur, maintenant je pense que l’on change de période. Parce que 47% de chômage en Espagne, des problèmes économiques en Grèce, on est au bord de la guerre civile. Je veux dire, ce n’est pas la Chine qui est au bord de la guerre civile, ce n’est pas l’Inde. C’est cela le problème.

Il faut être raisonnable sur les coûts. Mais vous pouvez justifier d’un coût supplémentaire si le produit est de bonne qualité et qu’il va durer plus longtemps. Maintenant cela implique d’avoir des designs plus basics, moins mode, des couleurs plus neutres. Surtout en France, il faut éviter de sortir du gris, noir, bleu foncé, rouge, pourpre, violet un petit peu et encore. Par exemple il ne faut pas investir sur le jaune.

C’est cela en fait la tension. Pour pouvoir justifier ce prix et à mon avis, une qualité production locale. Là je pense que les gens en Europe seraient prêts à rajouter un petit peu pour protéger les emplois localement, parce que c’est une défense communautaire. Donc on se défend nous même en défendant les emplois, on défend les enfants, notre future. Donc cela je pense qu’ils le feraient. Mais défendre le future des indiens ou des chinois ...

Il y a aussi des gens qui vont vous dire que la production locale, elle a aussi une dimension éthique. Parce que cela évite le développement des sweat shops en Asie. Parce qu’il faut voir comment les gens sont traités en Chine dans les usines. Et il y a également les aspects environnementaux parce que, le coût environnemental de transports pour les vêtements est énorme. Il y a l’empreinte carbone de l’industrie textile, parce qu’on transporte des produits qui pourrait parfaitement être produit ici. Dans l’alimentation c’est pareil. Un geste écologique c’est de consommer local.

Maintenant on peut aussi imaginer un mix des deux. C’est une bonne partie qui est produite sur les communautés étrangères à coût très bas, vous défendez les communautés locales. Vous rajoutez une couche ici avec protection des emplois

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locaux peut-être sur des éléments comme la passementerie, des détails supplémentaires. Là on peut combiner les deux. Mais je dirais à l’heure actuelle, je me demande pour quelles mesures l’argument éthique dans la production, bien traiter les communautés locales, défendre l’emploi dans les pays étrangers. Je ne crois pas que cela porte vraiment maintenant. Mais cela c’est un changement qui a eu lieu dans les semaines qui viennent de se finir là. Il y a eu un changement de politique, en Europe, majeur. En tout cas en France, mais j’étais en Espagne et on est autour des mêmes problématiques. Donc à voir parce que c’est peut-être un changement de fond. Ethique cela marche si c’est de meilleure qualité, si le consommateur peut y trouver une sorte d’intérêt personnel, même indirect, au sens du développement de la communauté par exemple, mais aussi au sens de son porte-monnaie.

Le problème avec cette question, c’est que vous êtes vraiment au point d’intersection de beaucoup de problématiques politiques, économiques mondiales.

Je n’ai pas les capacités, ni les connaissances d’en approfondir une en particulier. Cela serait trop difficile, je ne suis pas sociologue ou historienne. Donc je cherche vraiment à établir un guide d’utilisation pour les entreprises et leur donner les pistes en leur disant : ce schéma là peut marcher.

Je me demande dans quelles mesures le gouvernement, sorti des élections, ne va pas protéger la production française. Parce que je regardais hier Hollande et Sarkozy, le seul point sur lequel ils étaient d’accord, le point fondamental, c’était l’aspect production française. Donc pour cela il y a maintenant un consensus politique, je dirais à 100% de la production locale, européenne en fait. Quand ils disent communautaire, c’est européen. Probablement ils vont favoriser ce qui est français. Mais c’est vraiment ce qui est européen, donc production en Europe et réciprocité des autres pays. Donc là, à mon avis, on se dirige vers une période où il sera même plus compliqué de produire à l’étranger, simplement parce que les tarifs douaniers vont peut-être augmenter. Donc je pense que même vous, vous avez intérêt à miser sur la production européenne. Sans forcément céder à l’hystérie actuelle « tout ce qui est étranger est mauvais ». Mais il faut peut être mettre cela en avant d’abord et ensuite dire par ailleurs on ne participe pas à l’exploitation des communautés locales, on a une dimension écologique en protégeant l’environnement en Chine, l’environnement en Afrique. En ne favorisant pas le développement d’usines qui

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détruisent les communautés, c’est très important. Mais mettre en avant quand même l’aspect éthique local, à mon avis, européen. Le gouvernement mettra des aides en place pour cela, je pense. Oui parce que là, on arrive à un niveau en Espagne de 47% de chômage des jeunes, 25% de chômage globale, on arrive à un point où on n’est pas loin potentiellement de troubles sociaux importants. Le gouvernement n’y a pas intérêt, cela voudrait dire qu’ils tomberont et ils tombent déjà comme des mouches. La seule solution c’est de produire ici. Maintenant, la question des coûts va être importante, à quel niveau de coût, à quel niveau de prix, à quel niveau de gamme va-t-on produire ?

Il y a eu aussi une grosse inflation dans les matières premières.

Oui et on va sûrement arriver dans une période d’inflation. L’inflation a été maitrisée depuis les années 80, en Europe en tout cas. Les prix des matières premières augmentent.

Sinon au niveau de la cible, si vous aviez un profil de consommatrice idéale pour ce type de produit ?

C’est difficile, déjà c’est une femme qui a un revenu important. L’industrie de la mode aime bien les consommatrices à revenu important ! Avec des vêtements qui peuvent durer plus longtemps. Peut-être insister sur l’aspect accessoirisation. Avec des accessoires qui ne sont plus des éléments stables de la panoplie, mais qui au contraire changent souvent. La contradiction vient du fait que si on vend cher, on vend moins souvent. Alors que si on veut vendre plus, il faut que les consommateurs changent souvent et donc vendre moins cher.

Certainement je ne viserai pas les 20 – 30 ans si les revenus ne sont pas assez importants, je pense que de toute façon les consommatrices sont plus dans la mode. Consommatrices ou consommateurs d’ailleurs, il faut savoir que la mode masculine est le segment qui augmente le plus vite. C’est important aussi, par ailleurs il faut

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investir dans la mode masculine, parce que cela augmente beaucoup plus vite que la mode féminine en terme de croissance, le potentiel est plus important.

Donc il faut le revenu et peut être aussi être dans des classes d’âge et de population qui sont moins influencées par la mode. Parce que si vous faites une mode éthique faite main, elle sera plus chère et donc il faut aussi viser la durée plus longue des tendances, plus dans les basics. Et donc là je dirais, une tranche d’âge plus élevée en fait 30 – 40 ans, voire 50 – 60. Mais le troisième âge, on le sous-estime mais reste à fort potentiel. Dans les maisons de retraite, il y a encore plein de femmes qui veulent être coquètes et qui aimeraient bien qu’on les habille. Et elles ont les moyens. Donc cela serait peut être bien aussi de penser à cette population. Là pour le coût ce serait vraiment éthique, cela serait les rendre plus heureux, prendre soin d’eux, etc. Je pense qu’il y a un filon à explorer. Parce que les jeunes à 20 – 30 ans, consommatrices, consommateurs, connaissent déjà et sont tellement imbriqués dans la fast fashion. Ils sont très sensibles à la publicité. Ou alors si l’on décale un peu en âge et que les gens ont un revenu plus élevé et qu’ils vont commencer à aller vers la mode inspirationnelle ou le luxe même. Ce n’est peut-être pas le créneau que vous recherchez. Sauf si vous prenez l’angle luxe, mais en même temps une marque de luxe cela prend tellement de temps à créer.

Mais ce qui est étrange c’est que sur des éléments en tricot ou en crochet, ils vont trouver cela ringard alors que cela correspond à la mode des jeunes, la tendance répond plutôt à une demande des jeunes !

Il y a des tendances générationnelles. Parce que pour eux c’est ce qui renvoie à leur passé, cela ne peut pas être tendance.

Connaissez-vous la théorie du sablier ?

Quand on est une marque de mode, on se positionne soit au sommet dans le luxe, soit on est en bas dans la fast fashion. Mais au milieu c’est vraiment très difficile. Lacoste a fait un mouvement intéressant vers le haut, Benetton n’a pas fait le mouvement donc ils ont des problèmes. Toutes les marques comme Zadig et Voltaire, The Kooples, etc. peuvent surfer sur une vague stylistique, mais la question c’est en étant positionné au milieu, combien de temps cela va-t-il durer ? Cela peut marcher 10 ans, 15 ans pas plus. C’est très important pour vous de comprendre cela.

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1.1 Frédéric GODART, sociologue de mode.

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Le positionnement au milieu, cela peut durer un moment, mais ce n’est pas durable. Lacoste a fait le mouvement vers le haut et ils continuent de plus en plus luxe. C’est une façon pour eux de survivre. Le milieu est un créneau facile à occuper, mais il y a beaucoup de concurrence. Au milieu, les marques se remplacent les unes les autres. Quel est l’espace disponible pour des marques comme Maje, Sandro, The Kooples, Comptoir des Cotonniers, Zadig et Voltaire ? C’est saturé.

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1.2 Hubert BARRERE, directeur artistique des Ateliers Lesage, créateur, corsetier et brodeur

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Entretien avec M. Hubert Barrère, directeur artistique des Ateliers Lesage, créateur, corsetier et brodeur, au restaurant le Progrès, 1 rue de Bretagne, Paris 3ème, 27 avril 2012 à 15h.

PROBLEMATIQUE

Le « fait main » a t-il une place dans le prêt-à-porter moyen de gamme pour femme ? Son utilisation peut-elle être un atout au niveau du produit ou au contraire les points négatifs sont-ils plus importants ?

Que représente le « fait main » dans la mode aujourd’hui ? Que recherche le consommateur dans l’achat de ce type de pièce ?

Une qualité avant tout, une personnalisation, une pièce unique ou tout du moins une petite série.

Quelle est la valeur symbolique du « fait main » ?

Ce n’est pas de l’industrie c’est de l’artisanat, fait pour soi ou pour vous. Ça a un côté très personnel, intime, très exclusif et qualitatif.

Contrairement à l’industrialisation qui livre un produit uniformisé, c’est un produit singularisé. C’est une toute autre démarche.

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1.2 Hubert BARRERE, directeur artistique des Ateliers Lesage, créateur, corsetier et brodeur

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Pensez-vous que ces deux secteurs, celui du « fait main » et celui de l’industrialisation soient incompatibles ?

Non, ils peuvent tout à fait être complémentaires. Ils peuvent se réunir et d’ailleurs souvent les maisons de luxe ont schématiquement dans leur process, quand on parle de sur-mesure, de capsule, de collection atelier. Cela s’adresse soit à de l’image, soit à une personne, un produit très limité qui est une plus value fabuleuse parce que c’est fait à la main. Puis après ils déclinent d’autres lignes qui sont industrielles, qui sont moins chères évidemment parce qu’industrielles. Et qui s’adresse à un plus large public mais qui sans doute l’achète parce qu’il y a aussi la petite collection capsule qui est avant et qui fait rêver tout le monde.

Il y a deux choses à mon avis qui font rêver quand on parle de luxe ou quand on parle de maison de luxe, c’est d’un côté l’image plus value de ce luxe qui est quand même exceptionnel. Alors cela me fait rigoler quand on dit le masstige ou le luxe de masse, c’est absolument incompatible pour moi. Le luxe de masse existe parce qu’il y a un vrai luxe au dessus, qui fait rêver. Le rêve est symbolisé par des produits sur-mesure ou alors carrément au bout de la chaîne, le rouge à lèvre que l’on peut s’offrir facilement, parce que l’on a une signature Dior, Chanel… C’est la résultante du luxe. Si elles n’avaient que la haute couture, elles n’arriveraient pas à être si puissantes. La haute couture permet de communiquer sur un savoir-faire, une richesse patrimoniale, une âme. Le marketing ensuite voit comment faire pour que ces choses, pondues par les créatifs des maisons de luxe puissent être vraiment bien mise en valeur pour être vendues. Le marketing va avec la création, mais dans le domaine du luxe, elle intervient après.

Quelles sont les différentes natures de contraintes générées par l’utilisation du « fait main » ?

Là aussi c’est un process un peu complexe, parce qu’effectivement on pourrait imaginer que le point faible, ce serait le prix. Parce que le « fait main », cela veut dire du temps, le temps manufacturé. Mais c’est un faux problème, vous savez, parce que des produits en prêt-à-porter qui sont industrialisés avec quelques touches faites main qui vont donner une plus value, une identification, une personnalisation, une richesse aussi, vont faire qu’ils seront beaucoup plus identifiables auprès d’un public

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qui a de l’argent quand même. Le produit va être identifiable, singulier et va d’avantage plaire et est susceptible de se vendre plus facilement qu’un produit pratiquement au même prix mais qui n’a pas un je ne sais trop quoi qui fait rêver.

Une valeur ajoutée qui fait grimper le prix, mais c’est tout l’intérêt du sac en fait. C’est pour cela qu’il va s’acheter.

Donc l’intérêt du « fait main », la qualité première c’est de singulariser un produit, lui donner une signature, lui donner une plus value, ce supplément d’âme. Bon c’est peut être un peu fort de dire cela pour un produit industriel. Et la faiblesse ce serait à priori le prix mais c’est une fausse question.

Par rapport à l’expérience que je peux avoir. Parfois on nous demande aussi de faire beaucoup moins cher parce que cela ne va jamais se vendre. Et bien franchement ce n’est pas le propos. Quand on est dans du luxe, du vrai luxe avec une marque forte, la vrai marque qui est très installée, qui fait à priori rêver les gens, ou tout du moins qui donne envie aux gens d’en acheter. Le produit qui va être manufacturé particulièrement avec un savoir-faire, a beaucoup plus de chance d’être vendu même s’il est un peu plus cher, que le produit qui est joli mais qui n’a pas un particularisme fort.

Il faut être sûr de son histoire. Quand on est dans le métier il faut y aller. A 100 euros ou 1000 euros prêt, ce n’est pas cela le sujet. Pour d’autres choses, les choses vitales, la qualité certainement mais il ne faut pas que ce soit des prix déments.

C’est sûr que par rapport à l’Asie, à l’Afrique ou ce que vous voulez, on est très cher. Mais si on part du principe que l’on est trop cher, et cela n’est pas prêt de se réduire de si tôt, tout le monde serait au chômage alors. Et pourtant non, on arrive à vendre des produit français et heureusement.

A vos yeux quelle est la valeur du Made In ? Comment le consommateur interprète-t-il l’étiquette ?

Je ne sais pas comment réagit le consommateur, mais moi je sais comment je réagis. Pour moi, lorsque l’on dit Made in China c’est de la très grande distribution. Ce n’est pas forcément de la mauvaise qualité. C’est un segment de marché qui correspond au supermarché / hypermarché, les choses électroniques qui ne peuvent pas coûter

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cher, etc. Ce n’est pas un label de qualité pour moi. Ce n’est pas un label mauvaise qualité mais pour moi ce n’est pas un label de qualité. C’est un label de bas prix.

Là on ne parle pas de la même chose. Je vous ai parlé de l’industrie et là vous me parlez des artisans. On ne peut pas mélanger le Made in industriel et le Made in artisanal, quelque soit le pays. Je pense que l’artisanat devrait sortir du champ du Made in quelque chose. Le Made in India en broderie est très spécifique sur un type de broderie, la broderie paillettes ou la broderie de fil d’or. Ne demandez pas à des indiens de faire de la soie, parce que c’est typiquement de la broderie de Chine. Dans chacun de ces pays, il y a une spécificité due à leur culture, à leurs traditions, en fait ils ont certains gestes qu’ils maîtrisent parfaitement, qu’ils savent répéter et ils savent créer. Cependant, et ce n’est pas le cas dans les autres pays parce qu’il y a une réglementation très stricte, il y a des gens qui d’abord utilisent des matières qui peuvent être absolument innommables. La paillette que vous voyez vendu chez H&M par exemple, elle est dégueulasse. Elle est de mauvaise qualité, elle va se gondoler immédiatement, elle va peut être se casser, elle va se décolorer. C’est cheap à mort ! Le geste même du brodeur qui a brodé reste le même, mais la qualité de la matière est mauvaise. Deuxièmement, la qualité du point est certainement moins bonne qu’une qualité de point faite en Inde pour un créateur indien qui fait du sari tout brodé. Ce n’est pas le même niveau. Comme chez nous, du reste il n’y a pas le même niveau de qualité. Et en plus, la protection sociale, les acquis, tout ce que vous voulez qu’il y ait en Asie n’ont rien à voir avec ceux de nos pays. Donc il y a un coup en plus qui va être très différent.

Dans la broderie française, la haute couture n’a jamais eu de problème à faire du entièrement Made in France. Quand on sait qu’une broderie cela peut être 100 à 2000 heures de travail sur un vêtement. C’est absolument colossal. Donc quand on est en haute couture et que l’on a une veste par exemple à 600 heures de travail de broderie, à un coût français cela atteint des sommes vertigineuses. Pour sauver cet artisanat et le faire continuer et qu’il puisse exister en prêt-à-porter de luxe, nous avons pris des accords et la maison Lesage et d’autres maisons de luxe, ne sont pas les seules à pouvoir faire des accords de production à l’étranger. Mais pas avec un artisan qui ne respecte pas les règles minimales d’hygiène et d’humanité. Ce sont des joint-ventures ou carrément des achats d’entreprise in situ, que l’on gère avec du personnel français et local, avec des conditions quasi identiques à celle que nous pourrions avoir en France, suivant les conditions climatiques et les traditions de gens. Et faire un travail qualitatif, humainement absolument respectable et qui fait que le prix est beaucoup moins cher, parce que forcement le coût du temps de travail là bas est moins cher. C’est une délocalisation plus que positive car à mon sens, elle a

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même sauvé l’artisanat français, en tout les cas l’artisanat du type broderie. Sans cela la broderie française n’aurait pas pu se développer comme elle l’a fait ces dernières années dans le prêt-à-porter. Donc autant vous dire que dans la couture pour son aspect expérimental, il ne reste pas grand-chose. Donc c’est une relation et une expérience heureuse. Elles ne sont pas toutes de cet ordre malheureusement. Mais pour vous dire que oui, les artisanats du monde entier sont tout à fait au même niveau de sensibilité, de respectabilité et de qualité. Encore faut-il que ces artisanats soient faits dans les mêmes sortes de conditions si vous voulez, le même esprit. Ce qui change ce sont les règles du jeu dans chacun des pays et combien coûte l’heure manufacturée. Maintenant le marché est mondial alors il faut jouer avec.

Pour revenir à votre Made In. C’est très important de dire aujourd’hui Made in France ou Made in Italie. Mais quand on dit Made in China ou Made in India, cela dépend si l’on parle de l’industrie ou de l’artisanat et de quelle protection on parle des gens aussi, les conditions dans lesquelles ils travaillent.

Donc il faut de la visibilité dans ce domaine, de la transparence et de la communication.

Oui, le Made In tout seul ne veut pas dire grand-chose.

Quel est l’impact de la crise sur votre secteur ?

Cela dépend du secteur. Pour la Haute couture, elle a quasiment été inexistante. Pour le prêt-à-porter de luxe elle a été assez violente. Pour tout ce qui est accessoires, il n’y a pas d’effet, quasiment pas. Mais pour des marques bien installées, de luxe, de vrai luxe. Les autres je ne sais pas. Je suis ravi de dire que la crise n’a pas était trop douloureuse pour tous ces métiers. Ci elle l’avait été les premiers qui en auraient souffert ce sont les artisans, ce n’est pas le beau monde.

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La crise c’est quoi ? La hausse des prix des matières premières, la baisse du pouvoir d’achat…

Ça a été aussi un changement de mentalité. Particulièrement aux Etats-Unis, parce que l’on a des difficultés, il n’est pas forcément de bon ton de montrer que l’on a plein de trucs, le fameux « Bling Bling ». C’est la caricature, mais d’en faire de trop ce n’est pas forcement bien vu, donc cela fait changer les comportements. En Asie, ils n’en ont rien à faire.

C’est un peu une réflexion sur les marques qui n’étaient pas complètement luxe. Le vrai luxe a de vraies valeurs fortes, qui ne sont pas que la beauté d’un sac, sa création. C’est ce que je vous ai dit tout à l’heure, c’est un savoir-faire, une éthique, une règlementation, une cohérence dans la marque et dans le produit, comment on le vend, à qui on l’adresse. C’est global. Il y a des marques qui veulent faire croire qu’elles sont du luxe et qui ne le sont pas. Ceux là ont vraiment souffert avec la crise parce qu’ils ne font pas partie, selon moi, de ce que l’on appelle les valeurs refuges. Donc moi je considère que par cette crise même si elle est très douloureuse pour certains, concernant le luxe, plus particulièrement le faux luxe, cela a fait changer les choses. Et dans le bon sens.

Les prochaines élections en France vont-elles avoir un impact sur le marché du luxe ?

La France, vous savez c’est 0,…% de notre marché mondial. Alors est-ce que cela va vraiment avoir une incidence sur le luxe ? En termes de marché, cela n’aura aucune sorte d’incidence. Parce que la France n’est plus le centre du monde, elle l’a été pendant 400 ans, elle ne l’est plus. Elle n’a pas d’influence sur le marché du luxe.

Des coopératives de femmes existent dans les pays émergents. En tant que créateur seriez-vous susceptible de faire appel à ce type de structures ?

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Cela dépend comment on le fait. Si c’est pour faire de la récupération pour se donner bonne conscience en faisant travailler des gens qui pourraient mourir de faim ou qui vivent mal dans d’autres pays. Parce que H&M et d’autres font un peu cela vous savez. On traite des gens de manière absolument insensé pour deux galettes de riz.

En France on est gâté quand même, on a une protection sociale, des salaires même si on ne les considère pas assez élevés. Il n’en demeure pas moins que l’on a un des salaires moyens les plus élevés au monde.

Pensez-vous que l’élection présidentielle en France soit susceptible d’inverser le processus de délocalisation ?

Tout ce que les politiques pourront dire ou faire n’aura aucune incidence tant que les acteurs économiques ne s’investiront pas dans cette histoire. Vous pouvez faire toutes les règles que vous voulez, quand les plus grands groupes de luxe mondiaux, qui sont en France, il y en a deux au moins, mais un surtout qui est très gros, ne jouent pas le jeu du vrai Made in France, on peut faire pipi dans un violon, cela aura exactement le même effet. Vous voyez ? Alors comment les contraindre, je ne sais pas si on doit les contraindre, c’est juste une prise de conscience. Qu’est ce que la qualité aujourd’hui, qu’est ce que le luxe aujourd’hui ?

Quid des petits créateurs ?

Les petits créateurs ils n’ont pas d’argent. Qu’est ce que vous voulez qu’ils fassent ? Les petits créateurs c’est un vrai sujet, c’est le serpent qui se mange la queue. On est le pays le plus en vue pour les créateurs. Les créateurs vont dire « on ne nous aide pas », mais est-ce-que l’on a la vocation d’aider tout le monde ? Quand il y a trop de monde on ne peut pas aider tout le monde. C’est du Made in je me débrouille. Que le meilleur gagne, c’est une compétition ! Et qu’on ne vienne pas me dire qu’aujourd’hui c’est plus difficile qu’hier parce que hier c’était encore plus difficile qu’avant-hier.

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Aider quelqu'un c’est déjà croire en lui, on ne peut pas croire en tout le monde.

Au niveau des ateliers Lesage, êtes-vous susceptibles de travailler pour le prêt-à-porter moyen de gamme ?

Non, le prêt-à-porter moyen de gamme, c’est tout fait à l’extérieur avec des conditions d’hygiène et d’éthique qui ne sont certainement pas celles que l’on devrait avoir. En revanche chez Lesage ou d’autres, nous avons beaucoup de production pour le haut de gamme autrement dit luxe. Chacun son métier vous savez. On ne peu pas comparer l’épicier du coin avec le supermarché.

Et même si une entreprise moyen de gamme venait vous voir avec un concept très spécifique sur la mise en valeur du « fait main » français ?

Et bien si ils ont les moyens de se l’offrir et de la vendre, je suis d’accord. Je n’ai rien contre mais il y a des règles à suivre. Sinon c’est super sympas déjà que dans le haut de gamme, il y a des gens qui ne veulent pas jouer le jeu du « fait main » qualitatif français. Comment voulez-vous que ceux qui sont moyen de gamme aient envie ? Je voudrais bien.

Il faut avoir la foi dans ce que l’on fait. Cela fait bouger des montagnes. En plus il faut avoir une singularité, si vous faites la même chose que le copain par ce que lui a réussi ou qu’il a l’air de bien marcher, vous avez déjà tout faux. Soyez-vous-même, même si c’est en réaction avec les autres. Il faut qu’on vous distingue par ce que vous avez une vraie personnalité, un vrai plus, dans l’artisanat comme dans la création, et faire du qualitatif. Vous avez déjà dans la poche trois arguments extrêmement forts. Après il faut être au bon moment, avec les bonnes personnes, savoir s’entourer, avoir les bons créneaux de distribution éventuellement si l’on veut être un peu plus large. Il faut avoir l’argent pour cristalliser votre idée, votre envie. Vous portez vos valeurs, c’est difficile mais un jour cela arrive. J’y crois profondément.

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Il y a deux catégories de gens, du moins deux émotions différentes. On achète le prestige du produit d’une marque, Chanel, Hermès, ou alors vous achetez le produit qu’aura personne, ou quasiment personne, d’un créateur pas trop connu. D’abord cela vous met en valeur parce que cela aura été fait par lui pour vous, et dans une qualité exceptionnelle. Faire un petit marché, d’un produit merveilleux qui va toucher et qui s’adresse à très peu de clients certes.

Qui sait broder des serviettes ou des nappes aujourd’hui ? Personne, il y a beaucoup moins d’artisanat qu’autrefois, c’est évident. L’artisanat qui continuera d’exister c’est un artisanat d’excellence, qui s’adressera à une clientèle très pointue, certainement avec des moyens financiers importants parce que cela coûte de l’argent. Ne serait-ce que par le temps de travail et la spécificité de ce temps. Je suis très optimiste qu’en à l’avenir de ces métier, dans un cadre particulier.

Aujourd’hui, on a plus de rêves virtuels, des rêves liés à la haute technologie. Mais la poésie de la main, de ce que l’on peut faire soi-même, cela me touche énormément.

Comment voyez-vous les consommateurs du monde aujourd’hui ?

Le consommateur russe d’aujourd’hui est plutôt vulgaire. Le consommateur indien est timide, il a sa propre conception du luxe, mais il a un vrai désir de devenir citoyen du monde. Côté accessoires et chaussures, ça marche très bien sur le marché indien. La cliente chinoise, c’est une cliente qui cherche à comprendre, découvre la culture, la mode. Ce qui est sûr c’est que la perception de la mode française à l’étranger est associée à une notion de culture et de romantisme.

Comment définiriez-vous le luxe aujourd’hui ?

Le luxe aujourd’hui est dévoyé. Si l’on prend la définition du dictionnaire, le luxe c’est souvent rareté. Regarder les maisons de luxe ce qu’ils font n’est pas rare. La preuve en est qu’ils sont obligés de le faire industriellement. Si on oppose la rareté avec l’industrialisation du luxe on est déjà dans le faux. Le luxe pour moi c’est le temps,

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avoir le temps. Cela n’a plus rien à voir, je suis dans le concept du coup. Aujourd’hui il ne faut pas alourdir le propos, « c’est parce que cela met une heure que c’est super », non je ne crois pas. Quelque chose faite en 5 min peut être sublime, comme cela peut être immonde. La différence entre les deux, c’est la créativité. Le vrai cœur de l’histoire, c’est la créativité.

Et puis le temps passé fait quelque fois oublier la créativité. On ne voit plus que les 1000 heures de travail, le côté laborieux et non plus la beauté de la création. A la fin il faut que cela s’oubli. Mais on est d’accord que derrière il y a une maîtrise et une qualité, éventuellement une innovation.

Pourriez-vous rapidement brosser une histoire de la broderie ?

La broderie a commencé avec le fil dans tous les pays. On appelle cela la broderie blanche car elle était blanche à l’origine puis au fil du temps de couleur, sur les draps, les trousseaux, les serviettes. La broderie c’était aussi tout ce qui était ornement ecclésiastique en Europe vers le 10ème siècle.

Il y a une autre broderie qui est la broderie de soie qui vient de Chine avec les échanges commerciaux à l’époque de Marco Polo.

La broderie d’or arrive en France au 12ème siècle par les caravanes venant de Perse. Cette broderie de Perse et d’Inde était composée de fil d’or et de sequins d’or martelés, l’ancêtre de la paillette que l’on appelait paillon d’or. Toutes ces nouvelles broderies vont être mélangées à la broderie blanche.

Au 15ème siècle les rois de la renaissance, particulièrement François 1er, font venir des artisans d’Italie, qui connaissaient tous les systèmes de tannage de cuir, d’étoffe, de tissage et notamment le point d’Egypte qui est une autre sorte de broderie de fils et de mélange d’or. Il y a le désir à la cour de France de s’entourer d’art, de choses d’exception.

Au 18ème siècle on brode de tout, des perles, des paillons, des cristaux. Les broderies ethniques arriveront plus tard. Du fait du commerce avec l’Inde et les comptoirs en Afrique, beaucoup de choses vont s’associer à la broderie dite classique, l’ivoire, l’ébène et qui vont la diversifier.

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Le grand changement va arriver fin 19ème avec la révolution industrielle en Europe. Cette révolution industrielle permet la mécanisation et répond à une demande de rapidité. Des techniques nouvelles vont être inventées dans la broderie, comme la broderie CORNELY ou broderie machine guidée main. Cette broderie porte le nom de la machine qui l’exécute. Créée au XIXe siècle pour imiter le point de Beauvais, elle a été utilisée au XXe siècle pour le linge de maison et la mode.

Puis les plastiques vont faire leur apparition, notamment avec l’utilisation de la bakélite. Une école va être fondée à Lunéville en France où va être mis au point un crochet de brodeuse qui permet d’aller plus vite. Là on est entre le « fait main » et l’industrialisation !

Les techniques utilisées aujourd’hui datent du fin 19ème - début 20ème siècle. Aujourd’hui, il y a des broderies assistées par ordinateur qui ne remplaceront pas la broderie faite à la main, mais l’on peut mélanger les deux techniques. L’autre phénomène actuel, c’est que la broderie aujourd’hui s’est beaucoup « ethnicisée » : Chine, Perse et Inde, Afrique du Nord, Europe. Mais ce qui est sûr, c’est que la broderie en France reste une de nos grandes richesses culturelles !

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Entretien avec M. Pascal Gautrand, designer, consultant et professeur à l’IFM, au Delaville Café, 34 boulevard Bonne Nouvelle, Paris 10ème, vendredi 11 mai 2012 à 12 h.

PROBLEMATIQUE

Le « fait main » a t-il une place dans le prêt-à-porter moyen de gamme pour femme ? Son utilisation peut-elle être un atout au niveau du produit ou au contraire les points négatifs sont-ils plus importants ?

Je cherche à développer un guide d’utilisation à la disposition des entreprises qui permettrait de valoriser les savoir-faire liés au « fait main ».

Multiple versus unique ! Dans ma démarche ne passe pas nécessairement par le travail de la main. Mon idée c’est d’apporter de l’unicité, d’essayer de donner au travers de cette réflexion une place plus importante qu’elle ne l’est aujourd’hui à la production, à l’idée de la fabrication qui a un peu disparu ces dernières décennies au profit de l’idée de création et de marque, qui prend le dessus, sur une forme de qualité, une forme de savoir-faire. Mais cette problématique est autant valable pour l’industrie que pour l’artisanat. C’est un phénomène bien plus général de désindustrialisation ou de perte d’intérêt pour le faire en général. La marque est une application concrète de cette réflexion qui se fait à cheval entre industrie et artisanat. L’idée c’est de produire en série des pièces uniques. Il y a de toute façon dans l’industrie une application manuelle permanente. Même dans l’industrie la plus lourde où il y a une forte automatisation, il y a quand même une part humaine qui subsiste dans les organisations. Pourquoi ne pas en tirer profit pour aller vers une déstandardisation du produit ?

Le contexte actuel est celui des délocalisations, de la disparition des savoir-faire tant artisanaux qu’industriels. Il y a une perte de richesse de tout ce capital lié aux savoir-faire, qu’ils soient industriels ou artisanaux. Aujourd’hui l’enjeu pour faire face à

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cette forme de standardisation, d’uniformisation, qui du coup c’est répandu au travers de marques, qui sont souvent globales avec une présence mondiale. On a le sentiment d’avoir le même produit disponible partout sur la planète. Donc pour combler ces deux aspects d’uniformisation et de globalisation, je pense que le consommateur est plus enclin aujourd’hui à essayer de retrouver une diversité. Donc cela passe par la personnalisation, par des produits sur-mesure peut-être, customisation, qui sont des éléments qui butent sur cette idée d’industrie et de standardisation. Et du coup l’artisanat, le « fait main », l’incarnation qui va venir apporter une forme de personnalisation va aussi permettre d’apporter de l’unicité, une forme de dés-uniformisation dans l’offre. Donc là il y a peut être un intérêt par rapport au sujet de votre mémoire.

Il y a peut être un intérêt pour des marques de prêt-à-porter même industrielles. De se réapproprier sur certaines phases seulement des savoir-faire manuels, qui permettent soit d’intégrer un savoir-faire qui va apporter une spécificité au produit, soit en dialogue avec le client, de permettre une forme de personnalisation finale du produit pour le rendre unique, en tout cas aux yeux du consommateur. Mais attention à la notion d’ « authentique », tout est authentique !

La part humaine reste importante quand même dans l’industrie ! Il y a travail à la chaîne et travail à la chaîne. L’industrie ne peu pas être cataloguée comme la mauvaise façon. Participer à l’élaboration d’un produit même dans une chaîne industrielle, cela reste valorisant.

Rare sont les gens qui ont une réelle envie d’aller vers les métiers du faire, parce que justement la société à un peu tendance à les cataloguer. Mais je pense que ce n’est qu’un point de vue, que ce n’est que passager, que particulier à l’époque que l’on vit. Je pense que cela n’est pas du tout irréversible.

Je travaille sur des projets qui visent à la revalorisation de la fabrication, industrielle ou artisanale. Et de se dire que ce n’est pas un truc sale à cacher dans un coin ou à délocaliser. Il y a aussi des valeurs attachées à cela et on peut se les approprier, on peut en faire quelque chose. Et pour l’instant ce que font les marques, cela se fait sur un territoire assez réduit par rapport à la grandeur des possibilités que pourrait apporter l’appropriation de ce territoire de la fabrication. Si on ne travaille que sur l’axe de l’esthétisme, de la création, cela permet des tas de choses mais dans un territoire qui est borné. Si on rajoute à cela une forme d’appropriation des métiers du faire, cela ouvre encore plus le territoire.

Pour se démarquer aujourd’hui une marque peut avoir besoin de cela. C’est ce que l’on voit depuis quatre ans maintenant, surtout dans le secteur du luxe mais pas

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seulement, avec des marques qui se réapproprient les outils de fabrication, les rendent visibles pour le consommateur, personnalisent les produits.

Par l’exemple de Nike avec le projet Nike iD qui a débuté il y a plus de dix ans. Evidemment la chaussure n’est pas réalisée sous les yeux du client, elle est réalisée de façon purement industrielle en Chine. Mais ce sont des pièces uniques, personnalisées, fabriquées à la demande, avec trois semaines de délais, je crois. Et le client a sa chaussure. Donc quelque part, il n’assiste pas à la fabrication de la chaussure, il ne rencontre pas non plus la personne qui va la fabriquer, mais il interagit avec le processus de fabrication.

C’est pour Nike un moyen de s’approprier les valeurs liées à la fabrication, avec une chaîne qu’ils ont construite exprès bien sûr, et de donner une image de Nike à l’opposé de la globalisation, de la standardisation. Donc cela c’est assez malin, même si l’on reste dans un processus industriel et nécessairement artisanal puisqu’il y a quand même une personne qui va traiter une commande. Une par une, ce n’est pas par centaines ou par milliers. Forcément il y a une forme d’unicité, même si elle se fait dans un environnement plus ou moins industriel. C’est une hybridation en fait.

Je pense que de toute façon on entre dans un période où l’idée de faire une scission entre une culture artisanale et une culture industrielle qui seraient séparées, opposées et qui seraient deux processus différents à choisir dès le départ et qui ne se mélangent pas, c’est complètement démodé.

Aujourd’hui tout passe par l’hybridation. Et dans les deux secteurs, c'est-à-dire qu’autant les artisans bénéficient d’inventions liées à l’industrie, ne serait-ce qu’internet qui permet aux artisans de distribuer dans le monde entier au-delà de leur petit atelier leur produit. Donc déjà cela donne accès à la globalisation, à des savoir-faire et des pratiques artisanales extrêmement localisés. Il y a des tas de machines qui permettent d’améliorer la performance ou la productivité des artisans. Et de l’autre côté, l’industrie s’approprie sur des actions ponctuelles au sein de la chaîne industrielle, automatisée des savoir-faire manuels, etc.

Autre exemple, celui de Louis Vuitton avec la personnalisation des sacs. Les sacs sont purement fabriqués à la chaîne, en série, pas à la main. Et à la fin on vient peindre à la main les initiales du client.

C’est deux exemples, Nike et Louis Vuitton, mélange ces deux aspects. Et vous avez aussi tout un phénomène que l’on appelle la demi-couture, qui n’est pas de la haute couture, c'est-à-dire que l’on n’a pas fabriqué à la main entièrement en plusieurs centaines d’heures un vêtement. Mais on va fabriquer une partie du vêtement de façon industrielle en incluant peut-être une broderie faite main. Alors cela peut bien

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évidemment être « fait main » délocalisé en Chine ou en Inde, ou bien à Paris si l’on veut chez Lesage. Donc cela, c’est distribué par des marques qui vont faire des toutes petites séries ou des pièces uniques. Peut-être que c’est seulement pour communiquer, seulement pour habiller des acteurs ou des actrices sur le tapis rouge, ou bien pour faire vitrine. Et donc là il y a un savoir-faire manuel qui vient accompagner une production plus industrielle. Dans leurs boutiques, certaines marques proposent à la fois des choses qui sont faites purement industriellement et d’autres produits plus exclusifs qui seront évidement plus chers, qui eux vont être au moins partiellement fait manuellement. Mais vous pourriez être étonné si vous allez en Chine, même dans les usines de 500 personnes qui fabriquent des produits complètement standardisés dans un milieu industriel par le nombre d’opérations qui sont faites manuellement.

Quelles sont les différentes natures de contraintes générées par l’utilisation du « fait main » ?

Quels sont les points de valeur ajoutée que cela peut représenter ?

Il me semble que c’est une vision purement théorique !

Comme points positifs, une application qui va vers la personnalisation, la fin de la déstandardisation du produit. En théorie ce que je trouve intéressant c’est que du coup cela démultiplie les marchés pour les artisans.

Je fais du conseil pour Première Vision, qui organise des salons professionnels de mode et de textile. Première Vision a lancé en septembre 2011 un nouveau projet au sein du salon, qui s’appelle maison d’exception, qui va être reconduit en février 2013. Première Vision jusqu’à maintenant ce n’était que des tisseurs, tricoteurs industriels. Maison d’exception présente une quinzaine d’ateliers qui fabriquent des produits à la demande, sur-mesure, souvent manuellement et qui ne peuvent pas être reproduit en très grande quantité. Cela peut être des techniques de tissage, de tricotage, de dentelle, de broderie, d’ennoblissement quels qu’ils soient. Donc c’est très vaste et on essaie d’avoir une approche très transversale par rapport aux techniques. L’idée c’est de mettre en avant des savoir-faire. Et les clients sont des marques qui viennent par ailleurs acheter des tissus qui eux sont fait de manière totalement standardisée à la machine. Il y a du coup un intérêt supplémentaire pour ces fabricants, ces ateliers de pouvoir collaborer avec des marques qui jusqu’à présent ne travaillaient qu’avec des industriels, même sur de très courtes séries parce qu’ils n’ont pas des capacités

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de production énormes. Pour les ateliers c’est une opportunité supplémentaire de marché.

A l’inverse pour les marques c’est une façon de mettre en avant des savoir faire que l’on n’a pas l’habitude de voir, qui peuvent être très traditionnels. On avait la dentelle au point d’Alençon par exemple, le tissage japonais à base de glycine qui est une technique millénaire. Et tout à coup cela vient dans un sac développé par Chanel ou Hermès qui eux sont au cœur d’un design contemporain. La rencontre entre une forme de tradition et une forme d’innovation créative permet aux techniques de se renouveler, de rester dans un environnement contemporain. Via de nouveaux marchés avec de nouvelles marques on trouve de nouveaux débouchés pour les artisans.

Legeron Parurier Parisien : plus que 3 maisons qui font cela. Plumes et fleurs, en cuir, en tissu, latex… Il travaille pour la couture historiquement et aujourd’hui ils font aussi des pièces destinées à décorer les vitrines pour des tas de marques. Le marché a beaucoup évolué en fait, on est sorti de la pièce unique couture, pour aller vers des séries. Parfois ils font 4000 fois la même fleur qui va être utilisé chez un chausseur ou chez une marque de prêt-à-porter.

Le social est très important. Rien que sur le plan de la motivation des équipes puisque vous les mettez en avant. Chez Hermès par exemple, chaque sac est réalisé par une personne de façon artisanale en opposition à des marques qui elles travaillent à la chaîne, même si ce sont encore une fois des petites chaînes. Chaque artisan a une forme de poinçon en signature. Même si le client ne sait pas, l’artisan lui sait qu’il a réalisé ce sac là. Et quelque part il sait que symboliquement sa signature accompagne le sac où qu’il aille. Cela crée un lien, une motivation par rapport au travail, à l’objet qui est complètement différente. Socialement on peut aussi créer une sorte d’implication vertueuse au sein de l’entreprise, si l’on associe les équipes qui font, au succès, au produit, à l’image, à une forme de visibilité.

Vous avez en Italie une marque qui s’appelle Brunello Cucinelli. Ils sont installés dans un village en Toscane. L’entreprise a créé leur théâtre, a créé une bibliothèque. Il y a des heures de sieste dans la journée. Il y a une vision complètement humanisé de la production et qui crée une forme de fierté liée à l’appartenance à cette entreprise, au travaille à la chaîne ou pas d’ailleurs. Ils ont 80-90 % de la production de la marque qui se fait dans ses ateliers sur place en Italie. C’est une forme aussi de défense du territoire.

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Sur le plan culturel et social, quelle est représentation du consommateur sur le Made in « quelque part » ?

« Made in » cela ne veut pas dire grand-chose ! Et pourtant il y a des productions chinoises qui ont des savoir-faire extraordinaires. Je pense que l’image du Made in, d’abord cela dépend d’où l’on se trouve sur la planète, elle est surtout conditionnée par l’image du pays. Après on sait très bien qu’il y a une forme de tricherie qui est mise en place. Je pense que pour le consommateur, même nous qui travaillons dans la mode on est un peu pommé par rapport à la réalité derrière le Made in. Vous avez aujourd’hui tout un tas de label qui apparaissent et qui essayent de donner plus de transparence, ou des mesures plus concrètes en tout cas de ce qui est fabriqué ici ou là.

Par exemple le label « Vosges Terre Textile » qui met en avant toute la filière amont qui peut aller du produit de la filature jusqu’au tricotage, au tissage en passant par les apprêts. Ce sont des formes très différentes de savoir-faire industriels, lié aux Vosges qui est une terre historiquement liée au développement du linge de maison pour des raisons de qualité d’eau qui était particulière là-bas. Lié au fait aussi qu’il existait, avant qu’une industrie s’y implante, une pratique artisanale du tissage. Tout cela concourt historiquement, culturellement à créer un territoire qui est proche d’un certain type de production. Et ils vont vouloir revaloriser cela comme une valeur supplémentaire.

Mais comment le faire du coup de façon transparente et jusqu’au grand public, c’est toute la problématique des labels. Comment donner le plus d’informations possibles, le plus précisément possible sans pour autant endormir le consommateur qui n’a pas toujours un intérêt pour savoir où sont fabriqué les choses. Puisque comme je vous le disais au départ, on a perdu cette culture là, de l’idée de la qualité, puisqu’on ne sait plus faire soi-même.

C’est bien simple si vous remontez en 1945 et encore, vous aviez en France 75% de la consommation de vêtement qui était faite sur-mesure. Sur-mesure ne veut pas forcément dire haute couture, c’est la couturière de quartier ou bien la mère de famille qui va fabriquer des choses pour toute la famille. Pour les jeunes filles à l’école la couture faisait partie du programme de base. Tout le monde savait faire des travaux d’aiguille ou de la couture. Vous aviez dans le Vogue des patronnages qui étaient distribués avec. Aujourd’hui vous n’avez que les images des créations de marques, vous n’avez plus du tout d’éléments en lien avec la fabrication. Donc tout cela petit à petit cela s’estompe, cela disparaît, et vous n’avez pas d’intérêt particulier. La mode a changé sa façon de communiquer et communique plus au

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travers du défilé, de la campagne publicitaire, au travers du mannequin, du styliste, du designer, ou de la personnalité qui va endosser le vêtement, plutôt qu’au travers du patronnage, ou de qui le fabrique, ou qui est le tisseur qui est derrière ou le brodeur qui est derrière. Tout cela ce sont des noms qui disparaissent. On connait peut-être encore Lesage. Mais le grand public il ne connait plus le nombre d’heures, de nom de tisseurs alors qu’il y a 50 ans, Bucol, des tas de gens étaient extrêmement connus du grand public, puisqu’on allait acheter du tissu dans les magasins pour se faire réaliser des vêtements en permanence.

On était en contact avec toute la chaîne amont aussi, les fournisseurs, etc. donc il y avait une forme de visibilité pour ces fournisseurs. Comment fait-on pour réintroduire tout cela lorsqu’on l’a perdu ? Je pense que c’est toute la problématique des années qui viennent, c’est déjà une problématique très actuelle. Le Made in peut-être que cela ne suffit pas en fait. On a voulu résumer toute l’idée de la fabrication à un Made in, mais en fait la chaîne est extrêmement complexe. Il y a des tas de gens, des tas d’acteurs, des tas de savoir-faire pour faire un vêtement, une chaussure, n’importe quoi. Il faut maîtriser des tas de techniques en fait, manuelles ou industrielles. Et c’est ce mélange là qui est intéressant, qui est fascinant en fait. Et vous y rencontrer des tas de gens qui sont passionnés par leur métier et peut-être que par l’humain on peut arriver à recréer un lien entre l’humain qui consomme et l’humain qui fabrique.

Pour vous, une entreprise moyen de gamme avec ce concept de valeur ajoutée « fait main » peut- elle être pérenne sur du long terme ou doit- elle évoluer vers du haut de gamme ?

Actuellement, je pense que oui en raison des coûts de la main d’œuvre qui vont continuer à augmenter même si vous faites fabriquer à l’étranger. En 10 ans je crois que cela a plus que doubler, il faudrait regarder les chiffres, si vous observez la main d’œuvre en Chine, ce qu’elle coûtait il y a 10 ans et ce qu’elle coûte aujourd’hui vous êtes déjà sur une courbe de tendance qui n’est pas du tout … Alors on va arriver jusqu’à un certain point des pays qui vont accepter d’être corvéable pour rien, mais pas à très long terme. En plus il y a des questions de transport, d’organisation, des tas de trucs qui complexifient les choses.

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Déjà si vous avez relocalisation de production pas nécessairement en France mais au moins aux portes de l’Europe. Là vous avez déjà la limite de cela. Et même le moyen de gamme, si l’on veut consommer avec sens, on n’est pas toujours obligé de consommer du luxe. Le luxe n’est pas toujours le modèle le plus vertueux en termes de fabrication. Il y a aussi beaucoup de chose qui sont faites de manière complètement délocalisée. Au contraire il faut essayer même pour du moyen de gamme, et que le mix artisanat et industrie pourrait permettre de revenir à une sorte de production même très basique en fait. Pourquoi est-ce que lorsque c’est basique cela devrait être fait avec une main d’œuvre bon marché. Cela peut être en grande partie automatisé par exemple et que cela reste une production locale ou semi-locale qui pourrait exister. Avec l’innovation on a quand même des moyens qui nous permettent d’aller plus vite.

Chez Nike par exemple, avec leur chaussure sur-mesure, ils sont en train de réfléchir à comment implanter aux Etats Unis les chaînes de production. Qui n’y ont souvent jamais été d’ailleurs puisqu’elles étaient généralement directement en Chine. Le coût de la main d’œuvre, c’est tellement bien géré, tellement bien automatisé et tellement bien organisé, qu’à la fin la part du coût lié à la main d’œuvre, c’est très peu dans le coût de fabrication. Et du coup, même si on déplaçait cela dans un pays où la main d’œuvre serait 5x ou 10x plus élevée, en fait cela n’influe que sur une toute petite partie. Tout le reste c’est la même machine, il y a des tas de choses sur lesquelles vous ne faites pas d’économie comme l’électricité… et au contraire, vous faites des économies sur le transport, sur la rapidité de dialogue avec le client et donc du coup il se ferait même un meilleur service en fait. Est-ce que Nike c’est du luxe ? Je ne pense pas. Donc moi je ne suis pas d’accord. Alors peut-être que le luxe c’est valable pour des gens qui ont un savoir-faire où la part manuelle est importante, là c’est évident qu’essayer de produire des pièces à bas coût cela ne marchera jamais. Il faut expliquer aussi ce qu’il y a derrière un produit, si vous n’expliquez pas au client que derrière ce produit il y a des gens qui crèvent la faim et que derrière ce produit il y a des gens qui sont obligés de se plier aux normes sociales, aux normes environnementales européennes.

Le problème aujourd’hui c’est la concurrence déloyale. Tous les confectionneurs français sont obligés de respecter toutes les lois sociales, toutes les normes environnementales, d’utilisation des colorants, des matières, etc. Alors que H&M peut importer n’importe quel vêtement coloré sur la base de colorants qui sont interdit en Europe. Il n’y a pas contrôle là-dessus, donc la concurrence est complètement déloyale. D’un côté vous interdisez aux fabricants locaux d’utiliser certains colorants qui ne coûtent pas chers mais qui sont très polluants pour l’environnement et de l’autre côté vous acceptez que l’on puisse importer des

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vêtements qui sont fabriqués selon ces mêmes colorants. Cette dérive là, elle a des limites. Je pense que l’on a voulu aller très loin dans le bas de gamme, le moyen de gamme, peut être qu’il faudrait juste se dire, consommer moins de vêtements qui seraient mieux fabriqués. C’est peut-être aussi un moyen de réévaluer ce que l’on appelle le moyen de gamme, sans nécessairement l’appeler luxe, ce qui n’a pas de sens. Tout ne va pas devenir du luxe aussi.

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ANNEXE 2 _ DIFFERENTES APPLICATIONS

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ANNEXE 2

DIFFERENTES APPLICATION DU FAIT MAIN DANS LE PRET-A-PORTER 2.1

Le façonnage matière première

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Détail du pull Genova, STELLA PRADO, hiver 2012, con4150.wix.com/stellapardo#!collections

Tee-shirts perlé et jupon romantique, ET COMPAGNIE, Catalogue Automne/Hiver 2012-2013.

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ANNEXE 2

DIFFERENTES APPLICATION DU FAIT MAIN DANS LE PRET-A-PORTER 2.2

La confection

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Robe en vinyle à broderies crochetées, DOLCE&GABBANA, Numéro, n°134.

PAUSE CAFE, Catalogue Automne/Hiver 2011-2012

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ANNEXE 2

DIFFERENTES APPLICATION DU FAIT MAIN DANS LE PRET-A-PORTER 2.3

Les traitements et ennoblissements

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Jean SALSA, Catalogue Printemps/Eté 2012.

Etiquette de conditionnement produit, POUSSIERE D’ETOLE.

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ANNEXE 2

DIFFERENTES APPLICATION DU FAIT MAIN DANS LE PRET-A-PORTER 2.4

L’ornementation

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Blouse en soie ANTIK BATIK imprimée ethnique été 2012, www.antikbatik.fr

Pull DERHY sérigraphié et brodé de perle de rocaille, catalogue Automne/Hiver 2012-13

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ANNEXE 2

DIFFERENTES APPLICATION DU FAIT MAIN DANS LE PRET-A-PORTER 2.4

L’ornementation

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Débardeur GAUDI, catalogue Printemps/Eté 2012

Col bijoux STELLA FOREST, collection Printemps/Eté 2012,

www.stellaforest.fr

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ANNEXE 3 _ CORRESPONDANCE ENTRE HAUSSE DES

EXPORTATIONS ET BAISSE DES EMPLOIS LOCAUX

Graphique 1 - Structure des ventes totales d'articles d'habillement et de cuir

Source : Insee, comptes nationaux, base 2000.

Graphique 2 - L'emploi de la branche « Habillement et cuir » diminue quasi constamment entre 1960 et 2006

L'axe des ordonnées de gauche est relatif à la consommation et à la production par habitant d'articles d'habillement et de cuir en volume (en euros de 2000). L'axe des ordonnées de droite est relatif à l'emploi de la branche « Habillement et cuir » (en milliers de personnes).

Source : Insee, comptes nationaux, base 2000.

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ANNEXE 4 _ ETUDE DES CONSOMMATRICES

Structure de la population féminine au 1er janvier 2012, en France.

Classes d'âges Effectifs par tranche d'âge en millions

Part de la population féminine par tranche d’âge

en % - de 13 ans 5,139 15,25 % 13-18 ans 2,298 6,82 % 19-24 ans 2,421 7,18 % 25-29 ans 2,011 5,97 % 30-34 ans 2,054 6,09 % 35-39 ans 2,151 6,38 % 40-44 ans 2,278 6,76 % 45-49 ans 2,311 6,86 % 50-54 ans 2,222 6,59 % 55-59 ans 2,157 6,40 % 60-69 ans 3,69 10,95 %

70 ans & plus 4,979 14,77 % Totale population féminine 33,71 100 % Tableau réalisé selon les résultats de l’INSEE Bilan démographique 2011, évolution établie sur la base du dernier recensement de la population.

Attitudes générales des femmes vis-à-vis de l'habillement et de la mode

Source : SIMM 00 - Base femme - Cumul des barreaux "totalement d'accord" et "plutôt d'accord"

50,3

51,9

57,3

61,1

62,7

63,8

79,7

80,1

0 20 40 60 80 100

Est fidèle aux marques qui lui plaisent

Ne suis pas la mode, a style intemporel

Aime renouveler en partie sa garde robe

Achète surtout des vêtements pendant les soldes

Préfère qq beaux vêtement que bcp de fantaisies

Choisis des matières naturelles authentiques

Préfère choisir ses vêtements sans aide du vendeur

S'habille différemment selon l'âge

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Répartition des femmes actives en pourcentage selon la catégorie socioprofessionnelle en 2011

Femmes Agriculteurs exploitants 1,2 Artisans, commerçants, chefs d'entreprises 3,7 Cadres et professions intellectuelles supérieures 13,0

Professions intermédiaires 25,2 Employés 47,4 Ouvriers 9,4 Total 100 INSEE Bilan démographique 2011, évolution établie sur la base du dernier recensement de la population.

Population active féminine occupée selon le statut des emplois en 2011

Femmes (en milliers)

Proportion de femmes (en %)

Non salariés 927 32,5 Salariés 11 267 49,3 Total 12 194 47,5 INSEE Bilan démographique 2011, évolution établie sur la base du dernier recensement de la population.

Note : Résultats en moyenne annuelle

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ANNEXE 5 _ LES AVIS DE CONSOMMATRICES.

Ces entretiens, moins spécifiques que ceux réalisés auprès d’acteurs du milieu de la mode, m’ont permis de recueillir des informations concernant les comportements féminins de consommation.

LISTE DES INTERVIEWS

5.1_ Simone 76 ans, retraitée

5.2_ Laurence 43 ans, enseignante

5.3_ Agnès 51 ans, Adjointe administrative

5.4_ Coraline 23 ans, Assistante de collection

5.5_ Pascale 54 ans, Retraitée Education Nationale

5.6_ Marion 19 ans, étudiante

5.7_ Elyane 48 ans, couturière

5.8_ Françoise 51 ans, Secrétaire commerciale

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.1 Simone 76 ans, retraitée

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TYPOLOGIE CONSOMMATRICE Prénom Simone AGE : 76 EMPLOIS :

retraitée

NOMBRE D’ENFANTS : 2 (plus de 50 ans)

1. Où achetez-vous vos vêtements ? (friperie, internet, magasin spécialisé, grande chaîne, magasin multimarques, magasin de marque, boutique de créateur…)

Grande chaîne, Galerie Lafayette, petite boutique multimarques

2. Quelles marques achetez-vous le plus souvent ?

-LEWINGER, SYM, GEVANA, TELMAIL, CHRISTINE LAURE, RODIER…vêtements de style et qualité marins : GUY COTTEN, LE MINOR, SAINT JAMES…..

3. Quel est votre budget vêtement approximatif, pour vous, par an ?

J’ai dépensé environ 300 euros au printemps, mes placards sont déjà pleins !

Donc environ 600 euros par an, je n’ai pas beaucoup d’occasion de m’habiller, j’ai plutôt des vêtements classiques et j’achète plutôt de quoi accessoiriser mes tenues, broches, écharpes, colliers, sacs, gants…

4. En magasin, quels sont les caractères déterminants dans votre choix d’un vêtement ?

Je préfère le jersey, plus souple, plus confortable. Je recherche plutôt la sobriété dans les formes et les couleurs.

Est-ce un choix raisonné, impulsif ou les deux ?

Globalement, plutôt raisonné, en adéquation avec ce que j’ai déjà.

5. Lorsque vous achetez un vêtement, regardez-vous l’origine de fabrication de ce dernier ? Cela peut-il influencer votre acte d’achat ? Si oui, en quoi ?

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.1 Simone 76 ans, retraitée

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Oui, j’aimerais mieux que cela soit fait en France, j’évite la Chine.

Les Lacoste qui sont fait dans les pays du Maghreb sont mal taillés, le devant et dos ne sont pas coupés de manière identique et vrillent au repassage, alors que les prix sont assez élevés.

6. Le côté éthique ou écologique d’une marque de prêt-à-porter peut-il motiver votre acte d’achat ou n’est-il pas un facteur déterminant ? Pourquoi ?

Je prends ce qui me plaît, si c’est éthique et écologique c’est encore mieux, mais ce n’est pas un facteur déterminant.

7. Seriez-vous prête à payer une pièce plus chère si elle a un caractère éthique ou écologique ?

Oui, si cela a un côté écologique, la matière sera logiquement plus saine mais il faut que ça supporte bien le lavage. J’évite les vêtements qui vont seulement au pressing, par contre, laver à la main ne me gêne pas.

Pour le côté éthique par contre c’est difficile à vérifier, donc je n’en tiens pas compte.

8. Que signifie pour vous le « fait main » dans le secteur de l’habillement?

Pour moi, cela signifie la haute couture, les pièces uniques et plus généralement de la recherche dans les détails décoratifs du vêtement.

9. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter moyen gamme qui commercialisent des vêtements « fait main » ou avec des détails « fait main » ?

Non… Je ne suis pas capable de le dire, on ne sait pas comment c’est fait.

10. Sur une échelle de 0 à 600, quel prix maximum seriez-vous susceptible de mettre pour une pièce vestimentaire, hors manteau, réalisée entièrement ou partiellement à la main ?

Si cela me plaît et que j’ai vraiment un coup de foudre et que ce soit un vêtement facile à porter : 300 euros.

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.1 Simone 76 ans, retraitée

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11. Qu'est ce qui vous manque ou vous déplaît dans les systèmes de vente actuels ? Quels sont vos souhaits?

Je commande de moins en moins par correspondance. Il n’y a généralement pas les stocks, on ne peut pas se fier aux tailles, qui correspondent de moins en moins à la réalité. Les délais sont trop longs et les couleurs ou les formes décevantes.

L’enseigne de vente par correspondance ATELIER GS propose de modèles adaptés à la taille de la personne, (trois possibilités de longueurs), plus adapté à la morphologie.

Il y a des magasins où les tailles ne correspondent à rien, par exemple ARMAND THIERRY. Le système de taille unique non plus ! Il faut essayer.

En vieillissant même si l’on ne prend pas de poids le corps se déforme. Trop peu de marques le prennent en considération.

12. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter qui proposent un service de personnalisation des vêtements qu’elles commercialisent ? Quelles sont-elles ?

Non.

Avez-vous déjà acheté ce type de vêtement ?

Non.

Autre observation : Je ne pense pas que le « fait main » ait beaucoup de place dans le prêt à porter.

Peut-être sur de petits éléments que l’on ferait venir d’Inde par exemple mais le problème du prix sera de plus en plus un handicap. Même dans ces pays les gens ne veulent plus travailler pour rien…..et les intermédiaires veulent gagner beaucoup !

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.2 Laurence 43 ans, enseignante

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TYPOLOGIE CONSOMMATRICE Prénom Laurence AGE : 43 EMPLOIS :

enseignante

NOMBRE D’ENFANTS : 1 (8 ans)

1. Où achetez-vous vos vêtements ? (friperie, internet, magasin spécialisé, grande chaîne, magasin multimarques, magasin de marque, boutique de créateur…)

Internet, magasin spécialisé, magasin multimarques, grande surface

2. Quelles marques achetez-vous le plus souvent ?

- Leclerc

3. Quel est votre budget vêtement approximatif, pour vous, par an ?

Environ 300 euros

4. En magasin, quels sont les caractères déterminants dans votre choix d’un vêtement ?

Je fais attention au rapport qualité prix, à la praticité du vêtement et à son originalité

Est-ce un choix raisonné, impulsif ou les deux ?

Cela peut être les deux.

5. Lorsque vous achetez un vêtement, regardez-vous l’origine de fabrication de ce dernier ? Cela peut-il influencer votre acte d’achat ? Si oui, en quoi ?

Oui, je privilégie les marques européennes.

6. Le côté éthique ou écologique d’une marque de prêt-à-porter peut-il motiver votre acte d’achat ou n’est-il pas un facteur déterminant ? Pourquoi ?

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.2 Laurence 43 ans, enseignante

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Oui car je suis sensible à ces deux facteurs, ils peuvent déterminer mon choix.

7. Seriez-vous prêt à payer une pièce plus chère si elle a un caractère éthique ou écologique ?

Oui

8. Que signifie pour vous le « fait main » dans le secteur de l’habillement?

Ce qui relève de l’artisanat pur et qui n’est pas manufacturé.

9. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter moyen gamme qui commercialisent des vêtements « fait main » ou avec des détails « fait main » ?

-ANTIK BATIK

10. Sur une échelle de 0 à 600, quel prix maximum seriez-vous susceptible de mettre pour une pièce vestimentaire, hors manteau, réalisée entièrement ou partiellement à la main ?

2oo euros

11. Qu'est ce qui vous manque ou vous déplaît dans les systèmes de vente actuels ? Quels sont vos souhaits?

Trop d’uniformité dans les grandes chaînes, peu de qualité.

De moins en moins par correspondance : il n’y a pas de stock, on ne peut pas se fier aux tailles, les délais sont trop longs, les couleurs ou formes décevantes.

12. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter qui proposent un service de personnalisation des vêtements qu’elles commercialisent ? Quelles sont-elles ? Avez-vous déjà acheté ce type de vêtement ?

Non

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.3 Agnès 51 ans, Adjointe administrative

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TYPOLOGIE CONSOMMATRICE Prénom Agnès AGE : 51 EMPLOIS :

Adjoint administratif

NOMBRE D’ENFANTS : 2

1. Où achetez-vous vos vêtements ? (friperie, internet, magasin spécialisé, grande chaîne, magasin multimarques, magasin de marque, boutique de créateur…)

Magasin multimarques, magasin de marque, boutique de créateur et internet

2. Quelles marques achetez-vous le plus souvent ?

- ESPRIT

- CAMAIEU

- ETAM

- PROMOD

- dans les magasins de stylistes

3. Quel est votre budget vêtement approximatif, pour vous, par an ?

De 500 à 1000 €

4. En magasin, quels sont les caractères déterminants dans votre choix d’un vêtement ?

Je regarde la coupe, le style la couleur et le prix

Est-ce un choix raisonné, impulsif ou les deux ?

Les deux

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.3 Agnès 51 ans, Adjointe administrative

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5. Lorsque vous achetez un vêtement, regardez-vous l’origine de fabrication de ce dernier ? Cela peut-il influencer votre acte d’achat ? Si oui, en quoi ?

OUI J’essaie le plus possible d’acheter français

6. Le côté éthique ou écologique d’une marque de prêt-à-porter peut-il motiver votre acte d’achat ou n’est-il pas un facteur déterminant ? Pourquoi ?

Oui pour le côté éthique et écologie dans la mesure où l’on trouve dans notre ville ce type de magasins.

7. Seriez-vous prêt à payer une pièce plus chère si elle a un caractère éthique ou écologique ?

Oui

8. Que signifie pour vous le « fait main » dans le secteur de l’habillement?

Pour moi, cela correspond à un modèle conçu et réalisé entièrement à la main par la même personne sans passer par les machines industrielles.

9. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter moyen gamme qui commercialisent des vêtements « fait main » ou avec des détails « fait main » ?

NON

10. Sur une échelle de 0 à 600, quel prix maximum seriez-vous susceptible de mettre pour une pièce vestimentaire, hors manteau, réalisée entièrement ou partiellement à la main ?

50 à 300 €

11. Qu'est ce qui vous manque ou vous déplaît dans les systèmes actuels ? Quels sont vos souhaits?

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Ce qui me déplaît actuellement c’est que le choix reste restreint en matière de vêtement purement français, que l’on trouve le même article en divers couleur et matière ce qui fait que l’on se trouve formatées et habillées toutes de la même façon.

Pour moi un vêtement doit rester unique et correspondre à notre tempérament, être plus personnel.

12. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter qui proposent un service de personnalisation des vêtements qu’elles commercialisent ? Quelles sont-elles ?

Avez-vous déjà acheté ce type de vêtement ?

Oui, sur Toulouse il y a une jeune créatrice qui se déplace à domicile et fait des vêtements personnalisés et sur mesure.

Autre observation :

Il faudrait que l’on fasse plus de d’effort pour encourager la création française à se mettre à la portée des petits budgets cela éviterait d’acheter chinois à bas prix et de mauvaise qualité.

J’encourage les jeunes artistes et je fais selon mes moyens. Chaque fois que l’occasion se présente j’achète volontiers leurs modèles.

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.4 Coraline 23 ans, Assistante de collection

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TYPOLOGIE CONSOMMATRICE Prénom Coraline AGE : 23 ans EMPLOIS :

Assistante de collection / modéliste

NOMBRE D’ENFANTS : 0

1. Où achetez-vous vos vêtements ? (friperie, internet, magasin spécialisé, grande chaîne, magasin multimarques, magasin de marque, boutique de créateur…)

Magasins de marque et magasins multimarques.

2. Quelles marques achetez-vous le plus souvent ?

- KOOKAI

- NAF-NAF

- PROMOD

- COMPTOIR DES COTONNIERS

- COP.COPINE

3. Quel est votre budget vêtement approximatif, pour vous, par an ?

Entre 500 € et 1 000 € par an.

4. En magasin, quels sont les caractères déterminants dans votre choix d’un vêtement ? Est-ce un choix raisonné, impulsif ou les deux ?

Je fais attention à la qualité des finitions et des matières, l’originalité du modèle et sa portabilité.

Mon choix est à la fois impulsif et raisonné.

5. Lorsque vous achetez un vêtement, regardez-vous l’origine de fabrication de ce dernier ? Cela peut-il influencer votre acte d’achat ? Si oui, en quoi ?

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.4 Coraline 23 ans, Assistante de collection

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Parfois, mais ce n’est pas un facteur déterminant.

6. Le côté éthique ou écologique d’une marque de prêt-à-porter peut-il motiver votre acte d’achat ou n’est-il pas un facteur déterminant ? Pourquoi ?

Oui mais uniquement si c’est un véritable engagement de la marque et non un coup de marketing pour créer du buzz autour d’elle sur une durée limité.

7. Seriez-vous prêt à payer une pièce plus chère si elle a un caractère éthique ou écologique ?

Oui si son prix reste dans la limite du raisonnable par rapport au même type de pièce en version « normale ».

8. Que signifie pour vous le « fait main » dans le secteur de l’habillement?

C’est une pièce réalisée en partie ou en totalité à la main : assemblage/montage, embellissement (broderies, motifs imprimés placés, …), fabrication des tissus et/ou de leurs imprimés, …

9. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter moyen gamme qui commercialisent des vêtements « fait main » ou avec des détails « fait main » ?

-ANTIK BATIK

- COMPTOIR DES COTONNIERS

- KOOKAI

10. Sur une échelle de 0 à 600, quel prix maximum seriez-vous susceptible de mettre pour une pièce vestimentaire, hors manteau, réalisée entièrement ou partiellement à la main ?

Jusqu’à 150€.

11. Qu'est ce qui vous manque ou vous déplaît dans les systèmes actuels ? Quels sont vos souhaits?

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.4 Coraline 23 ans, Assistante de collection

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Le système actuel me convient, il est assez développé pour proposer des modèles pour tous les goûts et toutes les bourses.

12. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter qui proposent un service de personnalisation des vêtements qu’elles commercialisent ? Quelles sont-elles ?

3 SUISSES et ATELIER MOODBYME

Avez-vous déjà acheté ce type de vêtement ?

Non.

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.5 Pascale 54 ans, Retraitée Education Nationale

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1. Où achetez-vous vos vêtements ? (friperie, internet, magasin spécialisé, grande chaîne, magasin multimarques, magasin de marque, boutique de créateur…)

En magasin de chaîne et quelquefois sur internet

2. Quelles marques achetez-vous le plus souvent ?

-CAMAIEU

-DEPECHE MODE

-ETAM

-ESPRIT

3. Quel est votre budget vêtement approximatif, pour vous, par an ?

500€

4. En magasin, quels sont les caractères déterminants dans votre choix d’un vêtement ?

Je regarde la couleur, le style et l’effet sur moi…

Est-ce un choix raisonné, impulsif ou les deux ?

Selon le vêtement…raisonné si c’est pour une occasion ou pour « durer » (manteau par exemple) et impulsif s’il s’agit d’un tee-shirt, d’une petite robe d’été etc…

5. Lorsque vous achetez un vêtement, regardez-vous l’origine de fabrication de ce dernier ? Cela peut-il influencer votre acte d’achat ?

TYPOLOGIE CONSOMMATRICE Prénom Pascale AGE : 54 ans EMPLOIS :

Retraitée Education Nationale

NOMBRE D’ENFANTS : 3

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.5 Pascale 54 ans, Retraitée Education Nationale

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Non…

6. Le côté éthique ou écologique d’une marque de prêt-à-porter peut-il motiver votre acte d’achat ou n’est-il pas un facteur déterminant ? Pourquoi ?

Non ce n’est pas déterminant

7. Seriez-vous prêt à payer une pièce plus chère si elle a un caractère éthique ou écologique ?

Non…pas bien…

8. Que signifie pour vous le « fait main » dans le secteur de l’habillement?

Une pièce faite de manière artisanale, de qualité supérieure, avec plus d’originalité

9. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter moyen gamme qui commercialisent des vêtements « fait main » ou avec des détails « fait main » ?

Non.

10. Sur une échelle de 0 à 600, quel prix maximum seriez-vous susceptible de mettre pour une pièce vestimentaire, hors manteau, réalisée entièrement ou partiellement à la main ?

Tout dépend de la pièce…pour une robe 100€.

11. Qu'est ce qui vous manque ou vous déplaît dans les systèmes actuels ?

La qualité est souvent médiocre, manque d’originalité, il y a peu de choix sympa au-delà de la taille 42 et peu de conseils de la part des vendeuses.

Quels sont vos souhaits?

Des vêtements plus originaux, de meilleure qualité, bien pensé pour les femmes de 50 ans (coupe, style, couleurs)

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.5 Pascale 54 ans, Retraitée Education Nationale

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12. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter qui proposent un service de personnalisation des vêtements qu’elles commercialisent ? Quelles sont-elles ?

Non.

Avez-vous déjà acheté ce type de vêtement ?

Non.

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.6 Marion 19 ans, étudiante

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TYPOLOGIE CONSOMMATRICE Prénom Marion AGE : 19 EMPLOIS :

étudiante

NOMBRE D’ENFANTS : 0

1. Où achetez-vous vos vêtements ? (friperie, internet, magasin spécialisé, grande chaîne, magasin multimarques, magasin de marque, boutique de créateur…)

Internet, magasin de marque, grande chaîne.

2. Quelles marques achetez-vous le plus souvent ?

- PEPE JEANS

- GUESS

- KAPORAL

- CHATAWAK

3. Quel est votre budget vêtement approximatif, pour vous, par an ?

Environ 1000 euros par ans.

4. En magasin, quels sont les caractères déterminants dans votre choix d’un vêtement ?

Je choisis mes vêtements en fonction de la couleur, de la forme et des motifs.

Est-ce un choix raisonné, impulsif ou les deux ?

Assez impulsif…

5. Lorsque vous achetez un vêtement, regardez-vous l’origine de fabrication de ce dernier ? Cela peut-il influencer votre acte d’achat ? Si oui, en quoi ?

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.6 Marion 19 ans, étudiante

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Non.

6. Le côté éthique ou écologique d’une marque de prêt-à-porter peut-il motiver votre acte d’achat ou n’est-il pas un facteur déterminant ? Pourquoi ?

Non, je prends ce qui me plaît, ce n’est pas un facteur déterminant.

7. Seriez-vous prêt à payer une pièce plus chère si elle a un caractère éthique ou écologique ?

Non.

8. Que signifie pour vous le « fait main » dans le secteur de l’habillement?

Des habits entièrement réalisés à la main par un couturier.

9. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter moyen gamme qui commercialisent des vêtements « fait main » ou avec des détails « fait main » ?

Non.

10. Sur une échelle de 0 à 600, quel prix maximum seriez-vous susceptible de mettre pour une pièce vestimentaire, hors manteau, réalisée entièrement ou partiellement à la main ?

100 euros.

11. Qu'est ce qui vous manque ou vous déplaît dans les systèmes de vente actuels ? Quels sont vos souhaits?

Je ne sais pas.

12. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter qui proposent un service de personnalisation des vêtements qu’elles commercialisent ? Quelles sont-elles ?

Non.

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.6 Marion 19 ans, étudiante

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Avez-vous déjà acheté ce type de vêtement ? Non.

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.7 Elyane 48 ans, couturière

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TYPOLOGIE CONSOMMATRICE Prénom Elyane AGE : 48 EMPLOIS :

couturière

NOMBRE D’ENFANTS : 2 (19 et 23 ans)

1. Où achetez-vous vos vêtements ? (friperie, internet, magasin spécialisé, grande chaîne, magasin multimarques, magasin de marque, boutique de créateur…)

Essentiellement en grande chaîne.

2. Quelles marques achetez-vous le plus souvent ?

-PROMOD

- CAMAÏEU

- ETAM

3. Quel est votre budget vêtement approximatif, pour vous, par an ?

De 800 à 1000 euros environ.

4. En magasin, quels sont les caractères déterminants dans votre choix d’un vêtement ?

Le look et la qualité.

Est-ce un choix raisonné, impulsif ou les deux ?

Plutôt impulsif, je marche au coup de cœur.

5. Lorsque vous achetez un vêtement, regardez-vous l’origine de fabrication de ce dernier ? Cela peut-il influencer votre acte d’achat ? Si oui, en quoi ?

Je regarde toujours la fabrication, j’aime les produits français. Si le produit me plaît et qu’il n’est pas français je ne l’achète pas.

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.7 Elyane 48 ans, couturière

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6. Le côté éthique ou écologique d’une marque de prêt-à-porter peut-il motiver votre acte d’achat ou n’est-il pas un facteur déterminant ? Pourquoi ?

C’est pour moi un facteur détermiant.

7. Seriez-vous prêt à payer une pièce plus chère si elle a un caractère éthique ou écologique ?

Oui, sans problème.

8. Que signifie pour vous le « fait main » dans le secteur de l’habillement?

C’est un produit qui a fait l’objet de beaucoup d’heures de travail et qui incarne l’amour du métier.

9. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter moyen gamme qui commercialisent des vêtements « fait main » ou avec des détails « fait main » ?

Non.

10. Sur une échelle de 0 à 600, quel prix maximum seriez-vous susceptible de mettre pour une pièce vestimentaire, hors manteau, réalisée entièrement ou partiellement à la main ?

Suivant mes moyens, mais je pourrais craquer pour beaucoup.

11. Qu'est ce qui vous manque ou vous déplaît dans les systèmes de vente actuels ? Quels sont vos souhaits?

Je ne sais pas.

12. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter qui proposent un service de personnalisation des vêtements qu’elles commercialisent ? Quelles sont-elles ?

Non.

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.7 Elyane 48 ans, couturière

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Avez-vous déjà acheté ce type de vêtement ?

Non.

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.8 Françoise 51 ans, Secrétaire commerciale

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TYPOLOGIE CONSOMMATRICE Prénom Françoise AGE : 51 EMPLOIS :

Secrétaire commerciale

NOMBRE D’ENFANTS : 1

1. Où achetez-vous vos vêtements ? (friperie, internet, magasin spécialisé, grande chaîne, magasin multimarques, magasin de marque, boutique de créateur…)

Grande chaîne, petite boutique multimarques, magasin de marque

2. Quelles marques achetez-vous le plus souvent ?

-PETIT BATEAU

- IKKS

- PROMOD

- GIRBAUD

3. Quel est votre budget vêtement approximatif, pour vous, par an ?

Environ 1 500 euros.

4. En magasin, quels sont les caractères déterminants dans votre choix d’un vêtement ?

J’aime les matières confortables, les modèles jolis sans trop de chichi non plus, plutôt dans un style classique.

Est-ce un choix raisonné, impulsif ou les deux ?

Les deux.

5. Lorsque vous achetez un vêtement, regardez-vous l’origine de fabrication de ce dernier ? Cela peut-il influencer votre acte d’achat ? Si oui, en quoi ?

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.8 Françoise 51 ans, Secrétaire commerciale

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Oui, si le produit est cher

6. Le côté éthique ou écologique d’une marque de prêt-à-porter peut-il motiver votre acte d’achat ou n’est-il pas un facteur déterminant ? Pourquoi ?

Non.

7. Seriez-vous prêt à payer une pièce plus chère si elle a un caractère éthique ou écologique ?

Si cela me plaît oui.

8. Que signifie pour vous le « fait main » dans le secteur de l’habillement?

Je ne sais pas. Du tricot main, de la pose d’accessoires sur le vêtement, des perles… de l’artisanat.

9. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter moyen gamme qui commercialisent des vêtements « fait main » ou avec des détails « fait main » ?

PHILDAR.

10. Sur une échelle de 0 à 600, quel prix maximum seriez-vous susceptible de mettre pour une pièce vestimentaire, hors manteau, réalisée entièrement ou partiellement à la main ?

300 euros.

11. Qu'est ce qui vous manque ou vous déplaît dans les systèmes de vente actuels ? Quels sont vos souhaits?

Les articles devraient faire l’objet de plus d’attention sur la confection, avec un choix de matières plus fiables.

12. Connaissez-vous des marques de prêt-à-porter qui proposent un service de personnalisation des vêtements qu’elles commercialisent ? Quelles sont-elles ?

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ANNEXE 5 LES AVIS DE CONSOMMATRICES. 5.8 Françoise 51 ans, Secrétaire commerciale

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Non.

Avez-vous déjà acheté ce type de vêtement ?

Non.

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ANNEXE 6 _ ETUDE DU MARCHE DES ENSEIGNES

Marques enseignes de prêt-à-porter féminin dont l’identité est basée sur le « fait main » et/ou l’artisanat

Marques enseignes de prêt-à-porter féminin dont l’identité est basée sur le « fait main » et/ou l’artisanat

Prix moyen collection prêt-à-porter

hiver 2012-13

Chiffre d’affaire 2010 en millions

d’euros

Evaluation du niveau de

gamme

Part de « fait main » dans la collection

Coline 15,5 9 25 15

Antoine et Lili 140

(moyenne collection été 2012) 6,355 60 50 Cotélac 166 26,338 62 30 Stella Forest 188 8 65 40 Stella Prado 220 0,166 75 85 Antik Batik 240 13,15 75 60 Manoush 374 17,563 85 90 Chanel (estimation) 500 584,318 95 95 Hermès (estimation) 600 107,811 100 100 Marques enseignes de prêt-à-porter féminin leaders sur le marché moyen de gamme

H&M 18 7000 40 5 Zara 44 16700 45 5

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ANNEXE 7 _ QUELQUES ENSEIGNES DE PRET-A-PORTER FEMININ

Ces fiches point de vente, à la découverte des marques et de leur identité, ont été réalisées à partir d’une prospection effectuée à Lyon sur la fin d’année 2011 et première moitié de l’année 2012. Les données recueillies ont été complétée lors d’entrevues réalisées pendant le salon Who’s Next Automne - Hiver qui s’est déroulé du 21 au 24 janvier 2012 et le salon Who’s Next Printemps – été qui s’est déroulé du 30 juin au 32 juillet 2012.

LISTE DES ENSEIGNES

7.1_ ANTOINE & LILI

7.2_ COTELAC

7.3_ STELLA FOREST

7.4_ ANTIK BATIK

7.5_ MANOUSH

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ANNEXE 7

QUELQUES ENSEIGNES DE PRET-A-PORTER FEMININ MOYEN HAUT DE GAMME UTILISANT LE « FAIT MAIN »

ET/OU L’ARTISANAT COMME FONDEMENT 7.1 ANTOINE & LILI

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FICHE POINT DE VENTE

Nom du point de vente : ANTOINE & LILI

Adresse : 2 rue de Fargues, 69002 LYON

A-MODE DE DISTRIBUTION : La marque possède seize boutiques en France, une boutique dédiée à la décoration et une autre aux enfants. 80 % de la fabrication se fait en France.

B-UNIVERS DE MARQUE

1. Identité : Depuis 1997, la styliste d’ANTOINE & LILI crée ses collections sur la base de ses nombreux voyages autour du monde. La fabrication, vêtements et accessoires pour femmes, est faite artisanalement. Ses valeurs sont celles de la marque : éthique, partage, voyages, découvertes, respect de la clientèle, originalité, superposition de motifs ethniques et japonisants dans un esprit moderne vintage.

2. Positionnement

- Tranche d’âge : clientèle féminine de tous âges. Enfants de 6 mois à 10 ans.

- Niveau de revenus : très variables, il s’agit de la même clientèle que les boutiques Kenzo ou une clientèle mois aisée qui veut se faire plaisir.

- Style : mix urbain, ethnique, coloré, acidulé = Coloré, décontracté, chic ; ou noir, basique mais avec une touche de couleur vive.

- Niveau de gamme : Moyen / haut de gamme = robe de 95 à 225 euros, pantalon environ à 110 euros.

3. Communication sur le point de vente

- Merchandising : Toutes les boutiques sont élaborées sur le même schéma (couleurs, décoration, esprit voyage, cintres, murs, devantures roses…) elles reçoivent régulièrement

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ANNEXE 7

QUELQUES ENSEIGNES DE PRET-A-PORTER FEMININ MOYEN HAUT DE GAMME UTILISANT LE « FAIT MAIN »

ET/OU L’ARTISANAT COMME FONDEMENT 7.1 ANTOINE & LILI

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des directrices (de Paris) pour les vitrines qui doivent évoquer au premier regard le voyage, le métissage culturel, vestimentaire…

- vitrine : silhouettes mise en place suivant les règles.

- PLV : absente du lieu de vente.

- Documentation : Par saison, cartes format cartes postales présentes sur le comptoir.

- Site internet : vitrine et vente en ligne : www.antoineetlili.com

4. Produits

- Quels sont le ou les produits phares de la marque : un gilet 80 % laine, 20 % acrylique en différents coloris.

- Quelle famille de produits : beaucoup de robes et de hauts, en quantités limitées, collections éphémères.

- Matières : laines, cachemires, cotons, soies, mélanges

- Les couleurs : très vives et présentes, avec un motif récurrent chaque année et pour chaque collection (recoloré)

- Les formes : originales, inspirées des traditions vestimentaires orientales, japonaises, chinoises…

- Gamme de tailles : De O à 4 (34 au 46) et de 6 mois à 10 ans.

- Accessoires : Foulards (Inde), bijoux (Mali, Colombie, artisanat mexicain), poupées du Ghana, malles (Inde).

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ANNEXE 7

QUELQUES ENSEIGNES DE PRET-A-PORTER FEMININ MOYEN HAUT DE GAMME UTILISANT LE « FAIT MAIN »

ET/OU L’ARTISANAT COMME FONDEMENT 7.2 COTELAC

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FICHE POINT DE VENTE

Nom du point de vente : COTELAC / ACOTE

Adresse : 9 place Bellecour, 69002 LYON

A-MODE DE DISTRIBUTION : La marque possède soixante dix boutiques franchisées en France, trente six dans le reste du monde. La fabrication se fait en France.

B-UNIVERS DE MARQUE

1. Identité : COTELAC est une marque de prêt-à-porter homme et femme avec un savoir-faire proche de l’artisanat. Elle utilise au cœur de son usine à Ambérieu-en-Bugey de vielles machines restaurées pour plisser et imprimer les tissus. Imaginée par Raphaëlle Cavalli, designer textile, COTELAC se caractérise par un travail minutieux de matière. Le nom de la marque, COTELAC, fait référence au lac Nantua où est né le projet. ACOTE se veut une ligne plus accessible et pratique. COTELAC collabore avec des artistes pour une ligne artistique.

2. Positionnement

- Tranche d’âge : souhaité de 20 à 30 ans, mais en réalité de 20 à 90 ans.

- Niveau de revenus : revenu important, femme active.

- Style : chic, urbain, produits intemporels avec beaucoup de coordonnées, dans la tendance sans être marqué.

- Niveau de gamme : Moyen / haut de gamme = gilet à 165 euros, marcel à 35 euros, pull à 195 euros, pantalon à 185 euros, robe à 235 euros, écharpe à 105 euros.

3. Communication sur le point de vente

- Merchandising : Aucune boutique ne se ressemble. Il y a des vêtements suspendus par endroit, un miroir, une vespa rose, un podium et du parquet au sol.

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ANNEXE 7

QUELQUES ENSEIGNES DE PRET-A-PORTER FEMININ MOYEN HAUT DE GAMME UTILISANT LE « FAIT MAIN »

ET/OU L’ARTISANAT COMME FONDEMENT 7.2 COTELAC

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- vitrine : Changée tous les 15 jours, avec des spots au sol, une couleur bordeaux laqué, des vêtements sur mannequins identiques pour chaque ville.

- PLV : absente du lieu de vente.

- Documentation : communication visuelle : parution dans le magazine KIBLIND, un carnet de collection par saison, cartes postales envoyés aux clientes et disponibles en point de vente. Magazine féminin, publication en collaboration avec d’autres stylistes.

- Site internet : vitrine et vente en ligne : www.cotelac.fr

4. Produits

- Quels sont le ou les produits phares de la marque : produits avec des plissés uniques, réalisés sur des machines restaurées.

- Quelle famille de produits :

- Matières : polyester, coton, soie, alpaga, mohair, laine mérinos

- Les couleurs : neutres avec touches colorés, avec toujours quatre déclinaisons par produit.

- Les formes : basiques, avec des détails forts (imprimés et plissé exclusif), marqué d’un R brodé (nom de la créatrice)

- Gamme de tailles : Femme 34 au 46, homme S au XXL

- Accessoires : sacs, chaussures, ceintures, foulards, écharpes, porte-monnaie.

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ANNEXE 7

QUELQUES ENSEIGNES DE PRET-A-PORTER FEMININ MOYEN HAUT DE GAMME UTILISANT LE « FAIT MAIN »

ET/OU L’ARTISANAT COMME FONDEMENT 7.3 STELLA FOREST

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FICHE POINT DE VENTE

Nom du point de vente : STELLA FOREST

Adresse : 21 rue de Brest, 69002 Lyon.

A-MODE DE DISTRIBUTION : La marque possède quatre boutiques franchisées en France, une en Belgique, associées à un réseau de plus de 150 multimarques en France et est distribuée dans dix pays du monde. La production est indienne et chinoise.

B-UNIVERS DE MARQUE

1. Identité : STELLA FOREST veut dire étoile qui brille et arbre qui protège. Son logo est sur fond écru avec un arbre stylisé noir et une écriture simple noire en minuscules. La marque affirme une féminité élégante par des coupes cintrés et naturelles. L’identité de la marque se caractérise par ses couleurs, imprimés et l’utilisation de techniques artisanales, telles que batik, broderie, dentelle à l’anglaise ajourée (collection été 2013), etc.

2. Positionnement

- Tranche d’âge : De 16 à 80 ans, très large.

- Niveau de revenus : revenu important.

- Style : un style ethnique-chic, à la fois citadine et bohème, classique, moderne et vintage, d’inspirations worldwild dans un mix de pièces décontractées et plus habillées, une invitation au voyage dans laquelle chaque femme peut se retrouver.

- Niveau de gamme : Moyen / haut de gamme = manteau à 300 euros, pantalon basique à 160 euros, t-shirt col roulé à 55 euros, ceinture à 95 euros.

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ANNEXE 7

QUELQUES ENSEIGNES DE PRET-A-PORTER FEMININ MOYEN HAUT DE GAMME UTILISANT LE « FAIT MAIN »

ET/OU L’ARTISANAT COMME FONDEMENT 7.3 STELLA FOREST

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3. Communication sur le point de vente

- Merchandising : Parquet en bois au sol, mur écru, cabine avec miroir géant, les vêtements sont présentés sur des portants. La boutique revêt une décoration zen et minimaliste.

- vitrine : Les vêtements sont présentés sur mannequin sobre, nous pouvons apercevoir les portants à travers la vitrine de la boutique.

- PLV : reprise de photos des catalogues.

- Documentation : catalogues par saison disponibles en point de vente, publication dans la presse féminine.

- Site internet : vitrine et vente en ligne : www.stellaforest.fr

4. Produits

- Quels sont le ou les produits phares de la marque : la chemise tunique, la robe en soie imprimée.

- Quelle famille de produits : Silhouettes variées, produits associables.

- Matières : fourrure, soie, cachemire, renard, acrylique, nylon, cuir.

- Les couleurs : basiques, neutres avec des couleurs fortes : orange, or, rouge, violet, vert, etc. Avec beaucoup de motifs.

- Les formes : basiques, flou, avec des détails (volants, broderies, imprimés, nœuds, fourrure teintée, etc.), marqué d’un R brodé (initiale du nom de la créatrice)

- Gamme de tailles : Femme 34 au 42

- Accessoires : sacs, chaussures, ceintures, foulards, collier.

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ANNEXE 7

QUELQUES ENSEIGNES DE PRET-A-PORTER FEMININ MOYEN HAUT DE GAMME UTILISANT LE « FAIT MAIN »

ET/OU L’ARTISANAT COMME FONDEMENT 7.4 ANTIK BATIK

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FICHE POINT DE VENTE

Nom du point de vente : ANTIK BATIK Marais

Adresse : 18, rue de Turenne, 75004 Paris.

A-MODE DE DISTRIBUTION : La marque possède trois boutiques en propre en France et un réseau de 800 multimarques en France et est distribuée dans plus de trente pays du monde. La production est indienne, indonésienne, péruvienne, portugaise, slovène, balinaise, etc.

B-UNIVERS DE MARQUE

1. Identité : L’identité de la marque peut se résumer en trois mots : couleur, authenticité, artisanat. La créatrice Gabriella Cortese s’appuie sur un concept de « fait main durable » basé sur une éthique sociale et environnementale, tout en développant une déclinaison de modèles mode. Les pièces de la collection sont réalisées par production semi industrielle, ainsi 60% de la collection sont des pièces partiellement ou entièrement « faites main ». La collection est marquée par des couleurs fortes, des imprimés et l’utilisation de techniques artisanales, tel que batik, le bandhani, la broderie, etc. Elle possède une ligne enfant qui correspond à 10% du chiffre d’affaire.

2. Positionnement

- Tranche d’âge : Ciblé de 25 à 45 ans, clientèle réelle plus large.

- Niveau de revenus : revenu important.

- Style : un style féminin mais audacieux, bobo ou bohème chic, pour une femme voyageuse, nostalgique, qui aime à redécouvrir des trésors, qui ose les mélanges et affiche sa personnalité à travers le vêtement.

- Niveau de gamme : Moyen / haut de gamme, gamme de prix large, de 110 à 310 euros la tunique, de 110 à 430 euros pour la robe, 220 euros le pantalon, de 490 à 750 le manteau (collection automne-hiver 2012).

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ANNEXE 7

QUELQUES ENSEIGNES DE PRET-A-PORTER FEMININ MOYEN HAUT DE GAMME UTILISANT LE « FAIT MAIN »

ET/OU L’ARTISANAT COMME FONDEMENT 7.4 ANTIK BATIK

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3. Communication sur le point de vente

- Merchandising : Les vêtements sont rangés par couleur et par thème sur portants et cintres. La décoration est parsemée de quelques tableaux chinés.

- vitrine : Les silhouettes sont travaillées.

- PLV : reprise de photos des catalogues.

- Documentation : catalogues par saison disponibles en point de vente, de nombreuses publications dans la presse féminine, publication d’un journal « INSIGHT voyage au cœur d’une marque Antik Batik ».

- Site internet : vitrine et vente en ligne : www.antikbatik.fr

4. Produits

- Quels sont le ou les produits phares de la marque : le paréo, les babouches, la chemise empruntée à la Kurta indienne, la robe fluide imprimée.

- Quelle famille de produits : Silhouettes variées, produits associables.

- Matières : naturelles végétales ou animales, soie, laine, coton, lin.

- Les couleurs : couleurs chaleureuses à base de teintures végétales : orange, or, rouge, violet, vert, etc. avec beaucoup de motifs.

- Les formes : basiques, flou, entièrement retravaillées de broderies, de paillettes, de miroirs, d’imprimés, etc.

- Gamme de tailles : Femme 34 au 42

- Accessoires : sacs, chaussures, ceintures, foulards, collier (représente un bon tiers des ventes)

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ANNEXE 7

QUELQUES ENSEIGNES DE PRET-A-PORTER FEMININ MOYEN HAUT DE GAMME UTILISANT LE « FAIT MAIN »

ET/OU L’ARTISANAT COMME FONDEMENT 7.5 MANOUSH

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FICHE POINT DE VENTE

Nom du point de vente : MANOUSH

Adresse : 75 rue Vielle du Temple, 75003 Paris.

A-MODE DE DISTRIBUTION : La marque possède dix boutiques en propre en France, elle possède des corners aux Galeries Lafayette et au Printemps et un réseau multimarques en France et 18 pays du monde. L'enseigne développe un mode de distribution multi canal à travers ses 15 magasins, points de vente à l'étranger, ses sites web et ses catalogues en ligne.

B-UNIVERS DE MARQUE

1. Identité : La créatrice Frédérique Trou-Roy a bâtie sa marque autour du voyage. La culture gipsy est omniprésente dans toutes les collections, avec des pièces aux multiples origines

2. Positionnement

- Tranche d’âge : De 30 à 50 ans

- Niveau de revenus : revenu important.

- Style : un style féminin bohème, clinquant et décalé dans un univers « gipsy chic », pour une femme voyageuse qui ose les mélanges et affiche sa personnalité à travers le vêtement. Le kitch et l’exotisme se côtoient à la pointe de la mode, pour une mode qui ne se prend pas au sérieux.

- Niveau de gamme : Moyen / haut de gamme = robe de 250 à 500 euros, le haut de 95 à 400 euros, la veste de 350 à 1700 euros.

3. Communication sur le point de vente

- Merchandising : Les vêtements sont rangés par couleur et par thème sur portants ou sur cintre. La boutique est parsemée d’objets chinés par Frédérique Trou-Roy, rappelant

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ANNEXE 7

QUELQUES ENSEIGNES DE PRET-A-PORTER FEMININ MOYEN HAUT DE GAMME UTILISANT LE « FAIT MAIN »

ET/OU L’ARTISANAT COMME FONDEMENT 7.5 MANOUSH

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l’univers du voyage, inspirés par l’Europe de l’Est et les intérieurs de roulotte. Ainsi chaque boutique a un caractère unique.

- vitrine : Les silhouettes sont travaillées et la vitrine fait l’objet d’une décoration d’ambiance.

- PLV : il y a des posters de décoration et photos de mannequin sélectionnées dans les catalogues.

- Documentation : catalogues et cartes par saison disponibles en point de vente, publication dans la presse féminine.

- Site internet : vitrine et vente en ligne :www.manoush.com

4. Produits

- Quels sont le ou les produits phares de la marque : le sac Sahara, la robe Chou d’inspiration brésilienne

- Quelle famille de produits : les jupes traditionnelles gipsy côtoient les robes extra-courtes, les modèles classiques permettent de mettre en évidence les petits détails de la collection.

.- Matières : cuir, sequin, broderie, dentelle, tulle, soie, maille,

- Les couleurs : vives, clinquantes avec des imprimés forts

- Les formes : le long, flou et ample côtoie des modèles plus courts et ajustés, avec des détails (volants, broderies, imprimés, nœuds, etc.), Les tenues sont travaillées jusqu’au moindre détail.

- Gamme de tailles : Femme 34 au 42

- Accessoires : sacs, chaussures, ceintures, foulards, bijoux.

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Bibliographie

LIVRES

Valérie ALBOUY, Zohor DJIDER, Alice MAINGUENE, INSEE, La convergence des situations entre hommes et femmes s’opère, mais parfois bien lentement, Regards sur la parité, édition 2012.

Vincent BASTIEN, Jean noël KAPFERER, Luxe oblige, Eyrolles, Editions d’Organisation, 2009

David BOYLE, Authenticity : Brands, Fakes, Spin and the Lust for Real Life [Authenticité : marques, truquages, montages et la soif de vivre vrai], Harper Collins Publishers.

Frédéric GODART, Sociologie de la mode, Editions Découverte, Collection Repères, Mayenne, 2009.

INSTITUT FRANÇAIS DE LA MODE, Vingt ans de système de MODE, Editions IFM/Regard, Octobre 2008.

Christian JACQUIAU, Les coulisses du commerce équitable : Mensonges et vérités sur un petit business qui monte, édition Mille et Une Nuits, 2006.

Andre LEROI-GOURHAN, L’homme et la matière : évolution et techniques, Editions Albin Michel, Paris, 2004.

Amandine MAZIERS, Johanna DE TESSIERES, Christian LACROIX, L’ŒIL ET LA MAIN les artisans de la haute couture, Editions du collectionneur.

Catherine ORMEN, Histoire(s) du prêt-à-porter, 1929-2009, Fédération Française du Prêt-A-Porter Féminin, juillet 2009.

ROOZEN N. et VAN DER HOFF F., L’aventure du commerce équitable, Edition Lattès, Paris, 2001.

Richard SENNETT, CE QUE SAIT LA MAIN La culture de l’artisanat, Edition Albin Michel, Paris, 2009.

A. et L. TROADEC, Gérer et animer un réseau de points de vente, Editions Organisation, juin 1999.

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ARTICLES

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Isabelle BRIONE, « Stella Forest, « Le rêve est possible avec de petits moyens » », Art et Culture, www.leprogres.fr, 09/02/2012.

Service de presse du Groupe CARREFOUR, Communiqué de presse, 15 mai 2007, Lancement de la première collection de prêt-à-porter féminin « Tex by Max Azria ».

COCO, « Antik Batik », Tendances de mode, www.tendances-de-mode.com

Xavier DE JARCY, Dossier « Les nouveaux artisans », Télérama 3261, 11/07/12, pp. 17-23

Guillaume DUHAMEL, Mode & beauté : « Le consommateur est de plus en plus ouvert à la mode éthique », www.zegreenweb.com, 14/02/2012.

« Martine Leherpeur , MLC (Fondatrice et présidente) : « Les femmes à l'avant-garde des marchés russe et chinois » », LSA, 2004, www.lsa.fr.

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« Chanel élargit son activité métiers d’art en rachetant un atelier de broderie », Fashion Daily News, 5 décembre 2011, fashion-dailynews.com.

L’actualité de la Fédération Française du Prêt-à-Porter, « Trois questions à… Evelyne Chaballier », E-Prêt News, octobre 2011.

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« Focus sur… Les tendances 2012 », L’actualité de la Fédération Française du Prêt à Porter Féminin, E-Prêtnews, octobre 2011.

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« Le prêt-à-porter féminin français s'inquiète de l'année 2012 », La Tribune, 24/02/12, latribune.fr

A. LAVAUD « Par leur indifférence, la majorité des femmes taillent une veste à la mode », CB News, 06/03/2000.

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« Grandes marques : 10 flops retentissants », Le Journal du Net, Management, Marketing, www.journaldunet.com

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« Conserver le « Made in France » grâce à la transmission du savoir-faire », le portail des professionnels du luxe, www.abc-luxe.com, 03/04/2012.

Ninuk MA« Des restructurations différentes selon les entreprises » La Tribune, 02/04/2001, N. T.RDIANA PAMBUDY, Développement durable: « En Indonésie, l’artisanat du batik se met au vert », Courrier International, 22/04/2010.

Claire MABRUT, Le monde selon Miuccia, « Prada Made In…, une collection hommage aux savoir-faire traditionnels », madame.lefigaro.fr, 21/12/2010.

Caroline MARIN, « Le chic éthique : La tendance à suivre », Style papers, n°30, Août 2012, pp. 44-47.

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Jay WALLJASPER, « Développement durable », Courrier international, 5 octobre 2006.

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MERCATOR PUBLICITOR, www.mercator-publicitor.fr

www.nellyrodi.com

www.oeko-tex.com

www.novethic.fr, le média expert du développement durable

www.paulette-magazine.com

Etude PERCEPTA, www.abc-luxe.com

www.premierevision.com, premier salon mondial des tissus d'habillement

www.pretaporter.com

www.rendez-nous-notre-industrie.com

www.stellaforest.fr

www.vetements-made-in-france.com

ETUDES

« La soie lyonnaise fait le pari du luxe », AFP, 30/11/2011

« Le concept de satisfaction », Agence A2S Communication, www.satisfactionclient.fr

BRINK Lindsey, CATO Institute, Individual Liberty, Free Markets, and Peace: « Grounds for Complaint: Understanding the “Coffee Crisis” », mai 2003.

Pascal HEBEL, Nicolas FAUCONNIER et Morgane DAVID, « La nouvelle sensibilité des consommateurs aux prix », Credoc, Cahier de recherche n°125, novembre 2005.

« Le prêt-à-porter féminin, Quelles stratégies des distributeurs face à un retournement conjoncturel durable », PRECEPTA groupe XERFI, juin 2008, 260 p.

Michel RATIER, « L’image de marque à la frontière de nombreux concepts », IAE Toulouse, Centre de Recherche en Gestion, juillet 2003, Cahier de recherche no. 2003 – 158.

Le Guide RESPIRO pour l’achat socialement responsable du textile et de l’habillement, Silke Moschitz et Francesca Crippa (EUROCITIES), Peter Defranceschi et Amalia Vidal (ICLEI – Les Gouvernements Locaux pour le Développement Durable), Edition EUROCITIES asbl, Bruxelle, 2007.

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DOCUMENTAIRE

Reportage « Zara l’histoire de la marque », Capital, M6.

« Toxiques Fringues », Cash Investigation, magazine d’enquêtes sur le monde des affaires et des grands groupes internationaux, France 2, 18/05/2012.

Feuilleton documentaire Signé Chanel, Loïc PRIGENT, ARTE France 2005