le facteur humain dans l'environnement durable

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A travers l’étude de l’évolution de la perception de la question environnementale dans la société française, ce document expose comment s’est initiée la prise de conscience d’une nécessité de changement comportementale. Le changement viendra de l’individu et de sa conscience collective.Cette nécessité avérée, il restait à comprendre ce qui motive le comportement des individus, et le moyen de pouvoir influer sur celui-ci. Et ce, en particulier, dans ce royaume de jeux et de pouvoirs, qu’est l’entreprise. Ce document propose de remettre l’humain au cœur du système. De redonner la place et la fonction, de la composante clé de réussite, qu’est « le facteur humain ».

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  • Le facteur humain dans lenvironnement durable CESI Grenoble MS QSE 2011/ 2012

    VINCENT Damien, Soutenue lEI CESI Grenoble, le 22/03/2012

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 2

    La fte industrielle est finie

    Hans JONAS

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 3

    Remerciements

    Jexprime mes remerciements ma tutrice de mission, Mme Caroline GOMMY, pour

    sa gentillesse, son soutien et sa disponibilit.

    Je tiens galement remercier mon tuteur CESI, M. Michael GUICHARD pour ses

    conseils aviss.

    Je tiens remercier ma famille, et mes amis, et mes collgues pour leurs soutiens.

    Et en particulier, Sebastien, Mam, Audrey, Blandine et Thibault.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 4

    SOMMAIRE

    Remerciements _____________________________________________________________ 3

    SOMMAIRE ________________________________________________________________ 4

    Introduction _______________________________________________________________ 5

    Lvolution de la perception de lenvironnement au cours du temps __________________ 7

    Les quatre tapes cls ______________________________________________________________________ 8 1. Linsouciance : ____________________________________________________________________ 8 2. La prise de conscience (1ere partie) __________________________________________________ 11 3. La prise de conscience (2eme partie) _________________________________________________ 13 4. La prise de responsabilits. _________________________________________________________ 15 Le changement ________________________________________________________________________ 18

    Et les Franais dans tout a ? __________________________________________________________ 21

    Le facteur humain __________________________________________________________ 27

    Lacteur et le milieu _______________________________________________________________________ 28

    Lacteur et lorganisation __________________________________________________________________ 40

    Les outils existants _________________________________________________________ 51

    RSE ____________________________________________________________________________________ 51

    Le systme de management environnemental _________________________________________________ 56

    L'co-conception _________________________________________________________________________ 60 Ecologie industrielle ____________________________________________________________________ 63

    Loutil ____________________________________________________________________ 65

    Les 5 VALEURS pour un environnement durable _____________________________________________ 96

    Dfinitions ________________________________________________________________ 97

    Bibliographie ______________________________________________________________ 99

    Conclusion _______________________________________________________________ 100

    Rsum _________________________________________________________________ 103

    Abstract _________________________________________________________________ 103

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 5

    Introduction

    Comment initier une action collective de prservation de lenvironnement ? Avec ce document je vais tenter de rpondre cette question avec une approche classique

    mais une vision originale. Jentends par classique la ncessit dexposer lvolution de la

    perception de lenvironnement dans la socit, comme on pourrait le faire en histoire, pour

    dmontrer la naissance dune conscience collective de prservation et de changement.

    Exposer comment, cette valeur qui ntait la base quune ressource est devenue un enjeu,

    une stratgie, entrainant dans sa course une panoplie de mtiers (et de formations) de

    marchs, de modes.

    Ma vision a ceci doriginale, dans le sens o je propose de remettre lhumain au cur du

    systme. De redonner la place et la fonction, de la composante cl de russite quest le

    facteur humain .Par la suite donc, jexposerai de manire synthtique les modles et thories

    de la sociologie des organisations. Cette synthse a pour objectif dexpliquer les

    comportements, les relations et les interactions des acteurs dune organisation, dans le but

    dinciter une action collective de prservation.

    Ces dernires annes, les systmes - dans la globalit du terme, dans lintgralit du sens -

    sont devenus au quotidien incontournables, omniprsents voire omnipotents. La socit

    actuelle et donc lentreprise qui en est une facette, utilise toutes sortes de ramifications

    systmiques pour grer ses activits. Des rseaux informatiques aux systmes de management

    certifiables, des systmes de consommation aux rseaux dinformations ; tout est imbriqu,

    superposable - tantt mlangs, incomprhensible, tantt implacable, perfectible

    Pour moi, encore contestable il y a quelques annes, dsormais cette ide simpose delle-

    mme : le changement viendra de lindividu et de sa conscience collective. Cette ide,

    alimente par la mondialisation des changes (et prcisment celui des informations), est que,

    chacun individuellement peut comprendre son impact et surtout son influence sur le systme,

    donc le monde.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 6

    Aprs la toute puissance de la science et les promesses du progrs, aprs le management des

    personnes comme ressources (au mme niveau que celles financires ou matrielles), je pense

    que ltape suivante consistera, en utilisant les fondations passes, de nouveaux humaniser

    les systmes. Cependant il faut garder lesprit que la finalit premire de l'entreprise est de

    produire, et bien sr de produire entre autres de la richesse. Cette humanisation a donc un but

    lucratif, pour les hommes et pour lenvironnement.

    Dfinition du contexte :

    En ce qui concerne mon tude, elle se porte exclusivement sur les entreprises franaises. Sont

    hors du contexte les pays du tiers-monde, mergeants, asiatiques ou anglo-saxons. Cette

    dfinition du domaine dtude est ncessaire car chaque pays (et donc ses habitants), chaque

    entreprise (et donc ses employs) ont des conceptions propres de leurs environnements

    suivant leurs propres critres (prioriss, hirarchiss).

    Mon souhait est de mettre en lien des faits, des modles, des outils pour quapparaisse la

    ncessit du changement. Le mot environnement et ses associs sont, et je men excuse par

    avance, omniprsents dans ce document.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 7

    Lvolution de la perception de lenvironnement au cours du temps

    Dans cette premire partie nous tudierons lvolution de la perception de la question

    environnementale dans la socit franaise, afin de comprendre comment sest initie la prise

    de conscience de la ncessit dun changement de comportement. De nos jours, et malgr

    quelques opinions divergentes ou rfractaires, la ncessit de changement semble tre une

    vidence pour chacun. Cette prise de conscience socitale peut se traduire dans lentreprise.

    En effet lentreprise est un reflet, une image de la socit car ce sont les mmes personnes qui

    composent ces deux entits. Socit et entreprise se suivent et se rpondent, parfois

    convergent et se contrarient. Observer, comme nous allons le faire dans cette partie,

    lvolution de la socit dans ses proccupations et ses attentes, permet dvaluer celle des

    valeurs et de la culture de lentreprise.

    Lhistoire de lenvironnement industriel et son volution est lie lorigine la rvolution du

    mme nom. Longtemps l'environnement tait pour lindustrie plus une ressource, un moyen

    de produire qu'un bien protger. Ce nest que rcemment que l'entreprise a intgr la

    dimension environnementale dans son fonctionnement et parfois dans sa stratgie.

    Lintgration de la proccupation environnementale dans la socit et donc dans le

    fonctionnement de lentreprise sest faite en quatre tapes. Le parallle la croissance dun

    tre humain est volontaire, car le facteur humain est llment cl de ce document. Et si ltre

    humain construit et affine sa vision du monde au cours de sa vie, il semble en tre de mme

    pour la conscience collective. En effet la globalisation des changes et de la communication

    modifie la dimension de cette conscience. Chaque socit est connue ; chaque endroit au

    monde parat accessible. La conscience collective est ne locale ( limage dun village, dun

    canton, dune valle), et au del de lidentit nationale se dcouvrira globale, mondiale.

    Dans chaque priode le contexte social est dfini et illustr par des comportements, des faits

    dactualits, un type dexpression d'opinion publique ; ainsi que le contexte rglementaire et

    historique, jalonn par les grandes tapes industrielles.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 8

    Les quatre tapes cls

    1. Linsouciance :

    Adam Smith (1723-1790) crit en 1767, dans La richesse des nations :

    Les trois facteurs de production sont : le travail, le capital et la terre. C'est de leur

    utilisation combine que les richesses peuvent tre produites.

    La premire priode considre dbute en 1780, et correspond la naissance de la rvolution

    industrielle, elle va durer prs de deux sicles. Dabord en Angleterre, puis en France vers

    1820. Cette priode a permis le dveloppement de la machine vapeur, des premiers chemins

    de fer, des premiers fours industriels. Elle concide avec l'apoge des ides dmocratiques de

    la philosophie des Lumires, qui place la science et le progrs social au centre de lvolution

    de la socit.

    La protection de lenvironnement (dans son aspect de prservation des ressources naturelles)

    est totalement absente l'poque. Lide cependant d'une limite naturelle la croissance due

    un stock limit de ressources merge chez certains. Ide dveloppe entre autres par

    Thomas Malthus (1766-1834) puis par Karl Marx (1818-1883) sous des formes diffrentes

    mais associables. Ces auteurs remarquent que la croissance dmographique est lie aux

    limites des ressources, et de la relation asservissante pour lhumain, production/ distribution/

    consommation.

    Quelques autres personnalits sillustrent en tant que pionnier comme Joseph Fourier (1768-

    1830) qui est probablement l'un des premiers avoir propos, en 1824, une premire bauche

    de l'effet de serre. Ou comme en 1896, Svante August Arrhnius (1859-1927) qui met en

    corrlation la teneur atmosphrique en dioxyde de carbone et les priodes glaciaires. Il prdit

    que lutilisation intense des combustibles fossiles pourrait engendrer un rchauffement

    atmosphrique.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 9

    Au dbut du XIXme sicle, deux courants sopposent, le premier celui de John Muir et les

    membres fondateurs du Sierra Club exprimant leur idal : la prservation de la nature,

    pargne par une quelconque activit humaine. Et le second, m par un environnementaliste

    Gifford Pinchot (qui cra le mot conservation), prenait position contre la prservation totale

    de la nature telle que l'entendait Muir, introduisait plutt la notion de gestion scientifique pour

    le plus grand bien de l'humanit. Ces courants dopinions antinomiques perdurent aujourdhui

    sous bien des noms mais leurs vellits restent les mmes.

    Durant toute cette priode, qui s'tend jusque vers la fin des annes 1960, l'opinion publique

    ne se soucie gure de l'environnement. Dans la France d'aprs guerre par exemple il y a

    dautres priorits : l'autosuffisance alimentaire (en s'engageant dans l'agriculture intensive, la

    mcanisation et le recours aux produits phytosanitaires), la croissance budgtaire, puis le

    logement, la fin de lespace colonial franais ; sur un fond de proccupations socitales

    dgalits, de changements. Et puis cest surtout la priode de plein emploi, dmergence

    dune classe moyenne qui se dcouvre un pourvoir dachat, et enfin lapparition des

    automatismes et des ordinateurs.

    Lindustrie Franaise connut durant les trente glorieuses (1945-1973) une priode de

    croissance forte de la production industrielle (un accroissement annuel moyen de la

    production d'environ 5 %) associe une expansion dmographique importante (le fameux

    baby boom). Cette puissance industrielle et ces innovations technologiques furent des enjeux

    minemment stratgiques : elles permirent la France de rayonner sur l'ensemble du globe.

    Paralllement, les rglementations et lgislations cette poque sont peu nombreuses et peu

    contraignantes. Ce qui mamne faire un rapide historique en matire de rglementation

    environnementale. Une des premires lois fut lordonnance de 1516 (Franois Ier) sur les

    eaux et forts renouvele en 1669. Puis en 1794, lexplosion de la fabrique de poudre

    (entranant la mort de prs de 1000 personnes) de Grenelle, prs de Paris ; initie la prise de

    conscience sur les risques et les nuisances pouvant tre gnrs par lactivit industrielle.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 10

    Un dcret imprial de 1810 sur les tablissements dangereux, insalubres et incommodes,

    oblige les entreprises dclarer leurs activits. Ce dcret est lorigine de la rglementation

    franaise sur les installations classes. En 1917 le dispositif samliore en intgrant la notion

    de pollution.

    Hormis les lois relatives la lutte contre les pollutions atmosphriques (1961) et contre la

    pollution des eaux (1964) deux lois sont particulirement significatives. Celle sur la

    Protection de la Nature (10 juillet 1976) et celle relative aux installations classes pour la

    protection de l'environnement (19 juillet 1976). Cette loi appele ICPE soumet toute

    nouvelle implantation dune industrie une autorisation pralable. Cette autorisation, est

    accorde sous couvert de lacceptation dun dossier contenant entre autres une tude d'impact

    sur l'environnement et les ventuels risques prsents par l'exploitation. Cette loi ICPE

    devient la base juridique de lenvironnement industriel en France. Une seule autorisation est

    dlivre et rglemente lensemble des aspects comme le risque accidentel, la fabrication/ le

    stockage de marchandises ou de substances dangereuses, les dchets, les rejets dans leau,

    lair, les sols... Une seule autorit est galement comptente pour lapplication de cette

    lgislation, linspection des installations classes.

    1Relevant du Ministre de lEcologie, du Dveloppement durable, des Transports et du

    Logement (MEDDTL) la lutte contre les pollutions industrielles et le respect de la lgislation

    des installations classes sont assurs par la Direction Gnrale de la Prvention des Risques

    (DGPR) et plus prcisment par le Service des Risques Technologiques (SRT). Au sein du

    MEDDTL, et sous lautorit du prfet, linspection est assure principalement par les DREAL

    (Directions rgionales de lenvironnement, de lamnagement et du Logement).

    Historiquement ses services rgionaux et interdpartementaux remplacent depuis 2009 les

    Directions Rgionales de lIndustrie, de la Recherche et de lEnvironnement (DRIRE) cres

    en 1983.

    1 Source : http://installationsclassees.ecologie.gouv.fr/www.installationsclassees.ecologie.gouv.fr

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 11

    Les missions et les actions des DREAL en charge dlaborer et de mettre en uvre les

    politiques de ltat en matire denvironnement et Dveloppement Durable (DD) :

    2. La prise de conscience (1ere partie)

    La seconde poque se divise en deux parties. La premire qui s'chelonne entre les

    annes 1967 et 1974, reprsente la venue de l'environnement sur la scne politique, sociale et

    industrielle. Cette mergence sexplique de plusieurs faons, et notamment par laccessibilit

    accrue de linformation par le biais de la tlvision.

    Le 18 mars 1967, le Torrey-Canyon2 schoue au large des ctes Britanniques, 119 000 t de

    ptrole brut sont dverss. On compta 35 000 tonnes d'animaux tus (ce chiffre dsastreux est

    amplement imput au dispersant utilis par larme britannique).

    2 Photo NB, 1976, source : www.courierinternational.com

    o Gestion des ressources, du patrimoine naturel, o Gestion des sites et des paysages, de la biodiversit, o Amnagement des territoires, urbanisme, logement, o Gestion des dplacements, des infrastructures et transport, o Prvention des pollutions (eau, air, bruit), o Contrle et scurit des activits industrielles, o Prvention des risques naturels et technologiques, o Gestion des dchets, matrise de l'nergie, o Protection du littoral et des milieux marins,

    o Soutien au dveloppement des cotechnologies.

    Figure 2: Le naufrage du Torrey-Canyon Figure 1: Le naufrage du Torrey-Canyon

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 12

    Cette malheureuse fortune de mer eut un impact important dans l'opinion publique. En effet il

    s'agit de la premire pollution industrielle de ce type et de cette gravit, et surtout, elle est

    visible par un grand nombre de personnes via le nouveau mdia qu'est la tlvision. Des

    images danimaux enduits de ptrole, de bancs de poissons dcims, atteignent l'motionnel

    collectif. Cet accident fait prendre conscience aux pays europens du risque industriel

    inhrent au systme conomique et productiviste en place ; et bien videmment de la

    probabilit de mares noires souillant les ctes, qui avait t jusque-l nglige. Les premiers

    lments de prvention et de lutte contre ces catastrophes suivirent logiquement.

    Egalement cette poque, apparaissent les premires grandes associations de protection de la

    nature. Pour exemple le World Wildlife Fund (fond mondial pour la plante) fut cr en 1961

    avec pour objectif principal : la prservation de la diversit biologique. Ou encore

    Vancouver, en 1971 fut ne, lorganisation non gouvernementale de protection de

    l'environnement la plus mdiatique, Greenpeace.

    Remarque : De nombreux accidents ornrent le XXme sicle, jai choisi seulement les

    photos du ptrolier Torrey-Canyon et de lusine AZF, car les deux vnements, largement

    mdiatiss (le premier par son caractre indit et le dernier par des moyens actuels) trouvrent

    un trs fort cho dans l'opinion publique. Le terme mdiatis nest pour moi pas valable

    pour le naufrage du ptrolier, ce terme napparait que plus tard dans la culture tlvisuelle. En

    effet la mdiatisation qui par dfinition inscrit un intermdiaire dans linformation, est

    synonyme dinterprtation. cette poque il semble que le devoir de tmoignage, et le

    reportage impartial tait de mise.

    On parle, au cours des annes 1960-1970, dune nouvelle conception de l'espace public, et de

    linfluence du nouveau mdia sur l'opinion publique. La tlvision revait une importance

    croissante, dpassant grce son principe de fonctionnement visuel linfluence des mdias

    plus classiques (journaux, radios). Ajoutons que, l'mergence puis la gnralisation

    progressive de nouveaux outils tels que les sondages et les enqutes d'opinion pour mesurer

    les effets d'un discours, d'une image, d'une dcision permet de redfinir le rapport entre

    politique et public .3

    3 Tir du mmoire de D. Cardon : Evolution et incidence de la communication politique en France des annes

    1960 nos jours.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 13

    Il fallut attendre 1972 pour que paraisse le rapport du Club de Rome, plus connu sous le nom

    du rapport Meadows. Ce travail dveloppe l'incompatibilit entre une croissance conomique

    et dmographique illimite et des ressources naturelles qui elles le sont. Cest dans ce

    contexte que la mme anne, se droule sous l'gide des Nations-Unies la premire

    confrence internationale sur l'environnement Stockholm4. Elle marque pour la premire

    fois la prise de conscience des problmes d'environnement, et souligne surtout que ceux-ci

    sont plantaires. Suivra la cration du PNUE5 (Programme des Nations Unies pour

    l'Environnement) en 1973.

    Figure 5: Confrence de Stockholm

    3. La prise de conscience (2eme partie)

    La priode suivante, que l'on peut situer entre 1974 et 1985, voit se succder deux

    chocs ptroliers, le prix du baril de ptrole explose et modifie la scne conomique et le

    modle nergtique mondial. Cette crise a eu des effets dcisifs sur la prise en compte de

    lenvironnement dans le monde industriel. Elle limita la croissance, mit le chmage au centre

    des proccupations, et entrana l'entreprise dans une dynamique de profit tout prix, la

    lgitimant comme moteur conomique essentiel de la socit.

    La prise de conscience se poursuivit au travers de nombreuses catastrophes technologiques

    et cologiques. Toutes ces catastrophes eurent des incidences notables sur le dveloppement

    du mouvement cologique et sur la rglementation des activits industrielles.

    4 Photo NB, 1972, source : www.hardrainproject.com 5 Logo PNUE, source : www.unep.org

    Figure 4: Le logo du PNUE Figure 3: Le logo du PNUE

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 14

    Le code de lenvironnement la partie lgislative (entre 2000 et 2003) et la partie rglementaire

    (2005-2007) constitue la base du droit de lenvironnement en France, il regroupe aujourdhui

    les dispositions de 39 lois prcdemment disperses et celles des textes vots depuis 2000.

    6La directive 82/501/CEE dite SEVESO (juin 1982) demande aux Etats et aux entreprises

    didentifier les risques associs certaines activits industrielles dangereuses et de prendre les

    mesures ncessaires pour y faire face. Cette directive a t modifie diverses reprises

    (96/82/CE dite directive SEVESO II ) et son champ a t progressivement tendu la mise

    en uvre dun systme de gestion et dune organisation (ou

    systme de gestion de la scurit) proportionns aux risques

    inhrents aux installations, en prvention des accidents

    majeurs. Cest dans cette continuit que sinscrit la loi du 30

    juillet 2003, suite la dramatique explosion de lusine AZF7

    Toulouse en 2001.

    On peut citer galement La directive 2008/1/CE relative la prvention et la rduction

    intgres de la pollution (directive dite IPPC pour Integrated Pollution Prevention and

    Control) qui impose une approche globale aux installations industrielles les plus polluantes.

    Lapproche intgre de la rduction de la pollution consiste prvenir les missions dans

    lair, leau, le sol, la gestion des dchets, et lorsque cela savre impossible, de les rduire

    un minimum afin datteindre un haut niveau de protection de lenvironnement dans son

    ensemble par la mise en uvre des meilleures technologies disponibles.

    On dnombre environ 1200 tablissements classs SEVESO et environ 7 000

    installations IPPC en France.

    6 Source : www.installationsclassees.ecologie.gouv.fr 7 Photo couleur, 2001, source : www.ladepeche.fr

    Quelques catastrophes marquantes :

    10 juillet 1976 : accident chimique Seveso

    1976 et 1978: naufrage de l'Olympic Bravey, du Boehlen et de l'Amoco Cadiz (220 000t de ptrole brut) au large des ctes bretonnes.

    28 mars 1979 : accident nuclaire Three Mile Island en Pennsylvanie

    3 dcembre 1984 : catastrophe chimique Bhopal en Inde

    Figure 6: Les dcombres de l'usine AZF

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 15

    4. La prise de responsabilits.

    La troisime priode dbute en 1986. Elle se traduit par un remodelage de "l'ide cologique"

    d diffrents catalyseurs comme la publicit environnementale, ou de nouvelles catastrophes

    cologiques, ou encore lapparition de problmes lchelle mondiale.

    Cette publicit verte (la couleur verte symbolisant l'cologie) na cess de croitre ds lors

    pour atteindre ces dernires annes des paroxysmes dhypocrisie. Le fait de donner une image

    verte dentreprises ou de produits (qui ne le sont pas) valorise le consommateur, exprime

    la demande sociale et politique de prservation d'une nature perue comme de plus en plus

    fragile, mais discrdite totalement le discours du dveloppement durable.

    Pourtant cette utilisation frauduleuse nest pas foncirement ngative. Le fait notamment que

    la grande distribution sapproprie le concept de dveloppement durable permet une large

    diffusion de celui-ci, et dfaut dtre compris ou intgr le terme (et la notion) est entr dans

    linconscient collectif.

    Lautre catalyseur de la prise de conscience fut loccurrence de catastrophes cologiques et

    sanitaires de dimension internationale. Le fait dun impact sensible sur lenvironnement

    proche, par une ngligence lointaine, dveloppe un sentiment dinquitude gnralis. La

    prise de conscience collective augmente encore dun cran et commence sassocier la

    responsabilit.

    Quelques catastrophes marquantes (suite)

    accident nuclaire de Tchernobyl (Ukraine, Avril 1986)

    pollution du Rhin par 30 t de pesticides mercuriels suite lincendie dun entrept Ble (Suisse, Octobre 1986)

    pollution du Danube par des cyanures, (Roumanie, Janvier 2000)

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 16

    La dforestation, les pluies acides, ces problmatiques bien connues du grand public

    instaurent lide que la prservation de lenvironnement est une donne essentielle dans la

    continuit de nos socits. Les pressions sur lquilibre naturel sont croissantes et dans le cas

    de pollutions chroniques, elles engendrent des effets quasi irrversibles sans modifications

    durables de notre mode de vie. Lapparition de problmes plantaires comme les gaz C.F.C.

    (ChloroFluoroCarbures) impactant durablement la couche d'ozone, ou le CO2 (Dioxyde de

    carbone) augmentant leffet de serre, instaure une prise en compte dcisive au niveau

    gouvernemental (donc rglementaire) du danger de la situation.

    Cest dans ce contexte quest publi un rapport cl, le rapport Brundtland (1987). Ce rapport

    dfinit le concept fondateur du dveloppement durable (DD) un dveloppement qui rpond

    aux besoins prsents sans compromettre la capacit des gnrations futures de rpondre aux

    leurs . Deux notions principales enveloppent ce concept. La notion du besoin , en eau et

    alimentation, sant et ducation, emploi et nergie, en priorisant les plus dmunis. Et la notion

    de limitations , que ltat de nos techniques et de notre organisation sociale, impose sur la

    capacit de lenvironnement rpondre aux besoins actuels et venir. En dautres termes

    nous devons continuer nous dvelopper, mais de manire assurer la prennit de

    lutilisation des ressources pour les gnrations futures. Au del du devoir, cest une

    ncessit. Cette runion des trois proccupations essentielles est lchelle plantaire, mais

    peut tout aussi bien se projeter celle dune entreprise, on parlera alors de responsabilit

    socitale des entreprises (RSE). Une partie de ce document laborde plus tard.

    8Figure 7: le triptyque du dveloppement durable

    8 Source : www.acce-conseil.com

    Efficacit conomique

    Equit et cohsion sociale

    Prservation de lenvironnement

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 17

    La mme anne en Septembre a eu lieu llaboration du Protocole de Montral relatif aux

    substances appauvrissant la couche dozone. On note la fin de production des gaz CFC et

    halons, pour les principaux pays producteurs. Un an plus tard le PNUE et lOrganisation

    Mtorologique Mondiale (OMM) conviennent de la cration de lInternational Panel on

    Climate Change (IPCC). Sen suit la cration de l'agence europenne de l'environnement, puis

    le sommet international de La Haye sur l'environnement (1989).

    En Juin 1992 a lieu Rio de Janeiro (Brsil) le sommet de la Terre. Runissant prs de 110

    chefs dEtat et de gouvernements, cette confrence est le fondement des actions de

    dveloppement durable. Elle fut illustre par la Dclaration de Rio (et ses 27 principes), qui

    place au centre des proccupations les tres humains, insistant sur une action commune et

    solidaire de tous les pays et toutes les gnrations, les groupes ethniques et sociaux ; pour la

    prise en compte des aspects environnementaux. Sont dicts dans cette dclaration les

    principes fondateurs comme :

    Le second acte fondateur, du nom dAgenda 21, est un programme daction pour le XXIme

    sicle. Il est dapplication concrte dans la mise en uvre dun mode de dveloppement

    reposant sur la protection de la biosphre et de la biodiversit, sur la prservation des

    ressources et la rduction des ingalits.

    Dans ce principe il y a ladoption, lors du sommet, de la Convention Cadre des Nations Unies

    sur les Changements Climatiques (CCNUCC), qui a pour principal objectif de stabiliser les

    o Le principe de prcaution qui prvoit quen labsence de certitudes scientifiquement tablies sur un risque et ses consquences, il est ncessaire de

    prendre des mesures de prvention protgeant lenvironnement ou les personnes

    o Le principe de prvention qui consiste minimiser et viter si possible les rejets de substances nocives, et de rechercher, ds la conception des procds moins

    polluants.

    o Le principe de Pollueur / payeur stipule que le producteur de la pollution doit en assumer le cout.

    o Le principe de participation citoyenne.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 18

    missions de gaz effet de serre (GES) dans latmosphre. Dans ce cadre fut sign en 1997 le

    protocole de Kyoto, qui exhorte jusqu cette anne les 38 pays les plus industrialiss

    prendre des mesures pour agir contre le changement climatique.

    En France, cest le comit 21 (cre en 1995) ou de son vrai nom le comit franais pour

    lenvironnement et le dveloppement durable qui est charg de mettre en place lAgenda 21

    au niveau des collectivits. En 1995 toujours, la loi n95-101 dite la loi Barnier inscrit dans le

    droit franais la dfinition et les grands principes du dveloppement durable. Deux autres lois

    y font rfrence en 1999 en termes de coopration et damnagement du territoire (les lois

    Voynet et Chevnement). Initi par Jacques Chirac, le projet de charte de lenvironnent

    comprenant dix articles est ajout la constitution en 2005. Base sur la dualit de droit et de

    devoir cette chartre reprend les principes de prcaution, de prvention, de rparation et de

    participation citoyenne (annexe 4). La suite du dploiement de cette dmarche est le Grenelle

    de lenvironnement.

    Le changement

    La dernire priode (de 2007 nos jours) commence quelques jours aprs l'investiture de

    Nicolas Sarkozy la prsidence de la Rpublique, lorsque le Grenelle de l'Environnement fut

    annonc. Dans la continuit du pacte cologique soutenu par Nicolas Hulot et sign par les

    candidats principaux au cours de la campagne lectorale, il est lanc le 6 juillet 2007.

    Plusieurs groupes de travail reprsentant les parties intresses (l'tat, les collectivits locales,

    les Organisations Non Gouvernementales (ONG), les employeurs et les salaris) sont chargs

    d'aborder six thmes principaux et de dfinir des plans dactions9 :

    Lutter contre les changements climatiques et matriser la

    demande d'nergie

    Prserver la biodiversit et les ressources naturelles

    Instaurer un environnement respectueux de la sant

    Adopter des modes de production et de consommation durables

    Construire une dmocratie cologique

    Promouvoir des modes de dveloppement cologiques.

    9 Source : www.developpement-durable.gouv.fr

    Figure 8: Le logo du grenelle de

    l'environnement

    Figure 9: Le logo du grenelle de

    l'environnement

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 19

    Le 25 octobre 2007, Nicolas Sarkozy conclut triomphalement le Grenelle de l'Environnement

    l'Elyse en prsence dAl Gore et de Jos Manuel Barroso (alors prsident de la

    Commission Europenne) en ces termes :

    Il faut avoir le courage de reconnatre que nous ne pouvons plus dfinir des politiques en ignorant

    le dfi climatique, en ignorant que nous dtruisons les conditions de notre survie. []Ce nest pas la

    technologie qui est condamnable. Ce sont les intentions des hommes qui peuvent ltre. Jai

    confiance dans lhumanit et dans sa capacit relever le dfi de sa propre survie. []La pollution

    est un cot pour la socit. La pollution est une dette que nous lguons nos enfants [] La fiscalit

    cologique na de sens que si elle permet de modifier les comportements. Elle na de sens que si elle favorise de nouveaux modes de production, de nouvelles innovations.

    N. SARKOSY, Paris le 25 octobre 200710

    Les principaux objectifs qui ressortent du grenelle sont entrins par la loi de programme, dite

    "Grenelle 1", promulgue le 3 aot 2009. Entre autres, le gouvernement s'engage diminuer

    les missions de gaz effet de serre (notamment le CO2) dans le secteur des transports en

    dveloppant le rseau ferroviaire et maritime et en rduisant les impacts des transports

    ariens, metteur considrable. La France espre ainsi diviser par 4 ses missions de gaz

    effet de serre d'ici 2050.

    Paralllement, le gouvernement s'engage pour la prservation de la biodiversit en constituant

    une "trame verte" et une "trame bleue", en facilitant la circulation des espces dans les

    milieux naturels et aquatiques et en crant de nouvelles aires protges. Le gouvernement

    encourage galement la progression de l'agriculture biologique. Enfin, la politique de

    rduction des dchets est renforce et le taux de recyclage devra atteindre 75% ds 2012 pour

    les dchets d'emballages des mnages et les dchets banals des entreprises (hors btiment et

    travaux publics, agriculture, industries agro-alimentaires et activits spcifiques)11.

    Les modalits techniques de mise en uvre de ces engagements, dveloppes dans le projet

    de loi dit "Grenelle 2" sont promulgus en Juillet 2010. Quel en est le constat aujourdhui ?

    10 Source : www.elysee.fr 11 Source : Article 46, chapitre II, titre III de la loi Grenelle 1

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 20

    Selon le ministre sur les 268 engagements initiaux : 77 % de ces engagements sont raliss

    ou en cours de ralisation la fin 2010 (rapport dErnst & Young novembre 2010).

    Pourtant le bilan est mitig car le retard est consquent dans lapplication des mesures prises

    (souvent le cas dans lapplication des lgislations), mais plus proccupant, sur tous les

    engagements du Grenelle seulement 48 ont t atteints (soit seulement 18%) tandis que 157

    ''sont en cours d'excution'' (prs de 60%). Pour une grande partie de ces engagements, la

    mise en uvre est prvue l'horizon 2020 voire d'ici 40 ans12.

    Ces dernires annes le monde environnemental a connu une srie dimpasses. Attendue

    depuis de longs mois et prcde par de nombreuses rencontres entre scientifiques et

    responsables politiques, la confrence sur le changement climatique de Copenhague en 2009

    devait pour beaucoup constituer l'aboutissement d'un long processus ayant commenc Rio

    de Janeiro en 1992 et dont le tournant avait t le protocole de Kyoto de 1997. Les

    engagements du protocole de Kyoto s'arrtent en 2012. Les Etats devaient donc trouver un

    nouvel accord. Or l'accord tant attendu, un accord comportant des objectifs quantitatifs visant

    tant les pays occidentaux mais aussi les nouvelles puissances industrielles (Chine, Brsil,

    Inde) na pas abouti. Du moins, il est jug insuffisant. Si il affirme bien la ncessit de

    contenir le rchauffement + 2 C par rapport au dbut de l're pr-industrielle, le texte final

    ne comporte aucun engagement chiffr ou d'objectif quantitatif de rduction des missions de

    gaz effet de serre, ni aucune obligation sur l'aide l'adaptation pour les pays les plus pauvres

    et donc les plus exposs.

    13

    12 Source : www.actu-environnement.fr 13 Source : www.unep.org/climatechange/

    Figure 11: Le logo du COP 3 Figure 10: Le logo du COP 17

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 21

    Le constat mitig vaut aussi pour Durban en 2011. Certes ce colloque a permit de prolonger le

    protocole de Kyoto et le texte doit obliger les plus gros pollueurs (Chine, Inde, Etats-Unis)

    prendre des mesures pour rduire leurs missions de gaz effet de serre ; mais en labsence de

    nouveaux engagements concrets (juste la cration dun groupe de travail) et sans le Canada, le

    Japon et la Russie, cet accord nest quune prparation un futur trait global de rduction

    lhorizon 2020.

    Et les Franais dans tout a 14?

    En 2011, Les franais se sentent concerns et mme proccups par les questions

    environnementales (un peu plus de la moiti dentre eux se dclarent trs sensibles

    lenvironnement, alors quen 1995 et 2002, ils ntaient quun tiers). Et mme sils prouvent

    quelques difficults cerner les enjeux et la ralit de ces problmes d'environnement

    (par exemple ils sont 58,5% avoir dj entendu parler de Dveloppement Durable (DD)

    mais seulement 16% d'entre eux savent rellement ce qu'il signifie15) ; les franais modifient

    leurs pratiques quotidiennes et prennent en compte lenvironnement.

    Ladoption des pratiques environnementales varie suivant quelles sappliquent aux

    dplacements, aux logements ou aux achats. Certains critres environnementaux (labels

    cologiques) sont pris en compte dans les intentions dachat mais la dpendance

    lautomobile demeure forte pour les dplacements quotidiens (travail, tudes, courses).

    Nanmoins comme le montre ce tableau, le chmage reste leur proccupation majeure. En

    cause notamment, la situation conomique incertaine de ces dernires annes.

    14 Source : Collection La Revue du Service de lobservation et des statistiques (SOeS) du Commissariat gnral au dveloppement durable (CGDD) Octobre 2011. 15 Source : sondage Louis Harris, juin 2005

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 22

    Tableau 1: Classement des proccupations des Franais

    Dans la problmatique de dgradation de lenvironnement, fin 2010, le rchauffement de la

    plante ntait plus la proccupation majeure mais cde sa place aux proccupations lies la

    pollution de lair ou celle de leau mais aussi aux catastrophes naturelles. On remarque que la

    variation de lopinion exprime est lie lactualit.

    Figure 12: Evolution des proccupations ces trois dernires annes

    Dans ces deux derniers graphiques, la diffrenciation des classes dopinions est intressante

    dans le sens o elle fait apparatre un critre socio-dmographique (tableau 2).

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 23

    Ce sont aussi videmment les caractristiques socio-conomiques qui influencent le plus,

    ladoption des bonnes pratiques, mais galement des facteurs lie lhabitat : type

    dagglomration, type de logement, statut doccupation du logement. Le niveau dtudes

    ninflue pas directement sur les pratiques mais se manifeste par une sensibilit accrue aux

    proccupations environnementales. Ces pratiques sont prsentes en annexes.

    Figure 13: Les classes d'opinions des Franais

    Tableau 2: Les pratiques environnementales selon les classes d'opinion

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 24

    Ce qui dnote du pouvoir dune thorie ou idologie cest sa capacit se dfinir dans un

    dbat dmocratique ; Ce dbat enfante donc les adeptes mais aussi les dtracteurs. Je cite deux

    exemples, qui sont pour moi significatifs.

    Je conviens que la place accorde aux contestataires du dveloppement durable est minime.

    Le premier exemple est un homme politique de premier rang, ancien membre du

    gouvernement de Lionel Jospin en 1997, il devint ministre de l'ducation nationale, de la

    Recherche et de la Technologie. Scientifique reconnu, Claude Allgre est le plus mdiatique

    des climato-sceptique.

    Dans son ouvrage Limposture climatique (Plon, 2010), il nonce que selon lui, la

    responsabilit de lhomme dans le changement climatique nest pas fonde, cest dire que, la

    part anthropique dans le rchauffement climatique a t survalue. Sa thse rfute en

    octobre 2010 par l'Acadmie des Sciences (dont il est membre) servira dassise scientifique

    pour un certain nombre de personnes rtorquant que les hivers sont toujours rigoureux, que les

    scheresses existent depuis la nuit des temps ou pire que quelques degrs de plus seraient bien

    apprciables. Pour eux le climat suit son cycle naturel et de toute faon lchelle dune vie

    on ne verra pas la diffrence.

    Le deuxime exemple est Pascal Bruckner, philosophe et sociologue reconnu il publie

    lautomne 2011 un livre intitul : Le fanatisme de lapocalypse (Grasset, 2011) dans lequel il

    sattaque un suppos fanatisme cologique, devenu selon lui majoritaire, anti-humaniste,

    prnant la disparition de l'homme pour le bien-tre de la nature.

    Il expose que lcologie est lidologie dominante de nos socits occidentales devant

    laquelle on sagenouille sous peine dtre tax dadversaire. Les mdias nous culpabilisent sur

    un futur effrayant, les gnrations futures sont prises en otages, si nous ne mettons pas

    lhumanit au rgime sec . Il est vrai que, comme pour toute idologie, il y a des

    fanatiques, des extrmes. Seulement prner ce mode de vie goste et hdoniste destructeur de

    la plante, nest-il pas devenu de nos jours irresponsable ?

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 25

    Avec un recul de tant annes, nous avons toujours l'illusion que nous sommes capables de

    formuler une politique de l'environnement quilibre et comprhensive sans un consensus

    global. D'un ct nous sommes persuads que nous devons prserver la nature. Mais dun

    autre nous ne sommes pas prts sacrifier notre mode de vie et minimiser nos impacts sur

    lenvironnement.

    Cest le syndrome du NIMBY [not in my backyard]. On peut tre militant pro-

    environnementaliste convaincu si et seulement si, les mesures adoptes ne nous pnalisent pas

    directement, pas chez nous. Lexemple connu est celui de limplantation dun quipement

    bnfique la communaut (comme une station dpuration) qui entraine souvent de fortes

    oppositions des riverains, mme des plus colos.

    Les pressions environnementales sont croissantes et les phnomnes divers. La ncessit de

    changement des comportements individuels semble vidente mais doit se faire sur lensemble

    des activits humaines, les changes commerciaux et les activits industrielles. Les actions

    impliquant la collectivit doivent tre menes lchelle nationale, europenne et mondiale.

    Mais les valeurs, les idologies, les attitudes ne sont pas les mmes dune rgion lautre.

    Tout dpend de la perception de ces problmes qui elle dpend des contextes gographiques

    et climatiques, du contexte politique et institutionnel qui dtermine laccs aux ressources, et

    enfin du contexte conomique. Ce qui mamne la question :

    Doit-on se proccuper de lenvironnement que les jours o tout va bien?

    Mme si la ralit tend prouver le contraire (les crises conomiques successives et les

    tensions sociales sous-jacentes ne sont pas une excuse suffisante), jespre sincrement que

    non. Des lments de rponse seront apports dans la partie suivante, en termes de motivation

    et de psychologie, l'chelle de lindividu. Mais pour une socit le doute reste entier. Et dans

    lhypothse dun dsengagement progressif des politiques publiques, lentreprise doit

    apparaitre comme un soutien dynamique, une continuit motrice dans la mise en place dun

    dveloppement durable.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 26

    Lors de la dfinition de la problmatique de cette thse, une chose mest apparue vidente, ma

    volont de parler denvironnement. Cest un sujet qui me tient cur et dont, je lespre, la

    partie que vous venez de lire vous a dmontr lurgente ralit dune prise de conscience

    collective, dune approche raisonne et fonctionnelle de la question dactualit

    environnementale collective. Dans mon travail de recherche je me suis aperu du lien, fort et

    rciproque, entre lenvironnement et le dveloppement durable. Lun nexiste pas sans lautre

    et rciproquement. Ce lien cest lhumain.

    Des notions de sociologie ou de psychologie ne sont, mon sens, pas assez rpandues et

    pratiques par les responsables actuels. La partie suivante comblera ce fait. Cette partie est

    surtout loccasion de prsenter des pistes de travail sur les facteurs cls du changement de

    comportement (reprsentations, implications, responsabilits, motivations, gains).

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 27

    Le facteur humain

    La prennit et la performance dune entreprise passe par la mise en uvre dun

    dveloppement durable. La mise en uvre de celui-ci dpend du dveloppement dune forme

    de conscience collective rassemblant lensemble de ses membres autour dune culture

    partage. Cette culture donne du sens laction de chacun. Construite avec limplication du

    plus grand nombre elle permet de faciliter la phase cl de la mise en uvre oprationnelle du

    dveloppement durable. Pour impliquer les acteurs il faut comprendre dune part ce qui

    motive leurs actions et dautre part ce qui influence celles-ci.

    Dans cette partie, il sagit donc dtudier ce qui est pour moi la cl du systme, lhumain. Et

    en particulier, parce que cest une thmatique vaste et sans fin, son comportement. Le

    comportement est la manire dont quelque chose fonctionne, marche, volue dans certaines

    circonstances. En sachant que tout comportement est actif, par dfinition mme un

    comportement passif.

    Lacteur nexiste pas en soi, mais il est construit et dfini comme tel par son action . 16

    Ces actions dpendent dun choix, parfois non dtermin, mais toujours dpendant dun

    contexte, des opportunits et des contraintes. Il sagit donc de dfinir lacteur dans son

    contexte. Lacteur nexiste pas en dehors du systme qui dfinit sa libert et son champ

    dactions possibles. Mais le systme nexiste que parce que lacteur existe ; que lui seul peut

    le faire naitre, le porter, le modeler et que lui seul peut le changer. Il faut savoir que si les

    acteurs agissent cest seulement pour augmenter leur champ daction, modifier leur marge de

    manuvre (donc de libert daction).

    La conduite humaine ne saurait tre assimile en aucun cas au produit mcanique de

    lobissance ou de la pression de donnes structurelles. Elle est toujours lexpression et la

    mise en uvre dune libert, si minime soit-elle. 17

    16Source : P.Bernoux, les nouvelles approches sociologiques des organisations 17 Source : M.Crozier, E. Friedberg, Lacteur et le systme

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 28

    Je vais mefforcer de comprendre et dexpliquer comment lenvironnement influence le

    comportement dun tre humain. Comment, en dfinissant lenvironnement, on dfinit le

    contexte, et comment en exposant le contexte, on dcrit les relations et ainsi on dcrypte les

    comportements. Cette partie se dcompose en deux thmes. La premire sintresse la

    relation de lindividu avec son environnement. La deuxime est focalise sur sa relation

    lorganisation, et dans sa projection lentreprise.

    Lacteur et le milieu

    La vie est la scne, le dcor est lentreprise, les acteurs sont les salaris et leurs jeux

    dfinissent leurs rles et leurs relations.

    Le bien-tre de lindividu est rig comme principe du dveloppement durable. Mais

    comment les dfinir ? La qualit de vie est une notion relative souvent le fruit de

    comparaison (de la sienne future ou avec celle des autres). Il y a bien des critres de

    conditions de vie, de travail, de loisirs, de relations familiales et amicales mais ils sont tous

    soumis lapprciation personnelle. Il y a bien un indice de dveloppement humain (IDH)

    mais de l mesurer une satisfaction des conditions de vie, il y a du chemin. On ne peut pas

    mesurer le bien tre sur sa seule dimension conomique (PIB ou niveau de vie).

    Cest en partie grce son comportement que lindividu exprime son bien tre (ou le

    contraire). Dans loptique dune dmarche de dveloppement durable il est ncessaire

    dtudier les comportements et les mcanismes associs. Pour tudier lenvironnement de

    lindividu, il faut au pralable, laide de la sociologie environnementale (ou plus

    prcisment dcologie humaine), le caractriser. Lcologie (humaine) tudie le systme, les

    rapports des tres vivants entre eux, avec leur milieu et surtout de leurs quilibres. Mais si on

    veut aller plus loin et tudier la relation de lindividu lenvironnement dans ses dimensions

    physiques et sociales il faut faire appel la psychologie environnementale.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 29

    Dans cette dmarche danalyse llment constituant dune socit est le groupe et celui du

    groupe est lindividu, venons-en lui. Il y deux manires dexpliquer la relation basique

    individu-environnement. La premire, dterministe, est de considrer que cest

    lenvironnement qui faonne lindividu, cest dire quil conditionne son comportement et sa

    reprsentation. La deuxime, plus complexe, est de dire que les deux sinfluencent,

    interagissent. Cette vision est systmique et considre que lindividu et lenvironnement

    forment un tout.

    Jai choisi dillustrer mon propos par des schmas tirs du livre VERS UNE COLOGIE

    HUMAINE (McGraw-Hill, 1990) de Robert Tremblay.

    Figure 14: Le milieu

    Ce schma est utile pour distinguer les grands ensembles qui rentrent en compte dans la

    relation entre lindividu et son milieu. Remarquons que chaque composante interagit avec

    lindividu qui est plac au centre, et chacune entre-elles. Dans chaque action, chaque situation

    ou vnement ces dimensions sont prsentes.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 30

    La premire image qui apparait lorsquon parle denvironnement est le milieu naturel.

    Ensemble des cosystmes qui forme la biosphre comprend leau, lair, la terre, les plantes,

    les animaux. Lquilibre dun cosystme est dfini par la justesse des changes (chimiques et

    biologiques) lintrieur de celui-ci. Lensemble forme un systme complexe o mme des

    lments minimes jouent un rle essentiel dans lquilibre (la chaine alimentaire est un

    exemple). Les rapports avec les composantes du systme vont de la symbiose la destruction

    complte. Ltre humain, par le biais de techniques, doutils et de machines ; exploite,

    transforme, modifie son environnement naturel (de plus en plus efficacement). Lensemble est

    schmatis comme ceci :

    Figure 15: Le contexte naturel

    Maintenant considrons que lindividu est conditionn par le contexte culturel et social dans

    lequel il volue. Il y a plusieurs paramtres constitutifs dfinissant lenvironnement social et

    culturel dun individu. Ceux-ci sont rsums dans cette figure :

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 31

    Lidentit sociale, la reprsentation de soi et des autres est un lment dterminant du

    comportement. Lidentit sociale est fonde sur la rfrence aux statuts sociaux communs

    (sexe, gnrations, professions,). Cette identit est btie sur une histoire personnelle (une

    somme dexpriences) et sur lvolution des statuts ou catgories socioculturelles, induite

    directement de lhistoire collective (lhistoire dun peuple, dun pays ou dune civilisation).

    Cette volution conditionne les perceptions et influence des aspirations particulires. Le

    printemps de 1968 ou le printemps arabe de 2011 sont des exemples notables de nouvelles

    aspirations libertaires. Lvolution des salaires et donc du pouvoir dachat est un autre

    exemple des changements de ncessits matrielles. Ces volutions intgrent lhistoire,

    fondation de la culture. Lhistoire cest la construction mthodologique dune image dun

    pass commun, transmettant par un recueil de faits, un ensemble de valeurs. Ces valeurs

    intgrent la culture dune communaut.

    Le dveloppement durable implique une solidarit, une coopration intra et inter

    gnrationnelle. La diffusion dune thique de bien commun. Il ncessite une identit sociale

    et spatiale des communauts, forte et tablie. En opposition la mondialisation des changes

    et la tendance associe duniformisation culturelle.

    Contexte

    Culturel et

    Socital

    Aspirations

    et Ncessit

    Projections

    dans le futur

    Histoire

    individuelle

    et collective

    INDIVIDU ENVIRONNEMENT

    Figure 16: Le contexte culturel et social (source : psychologie environnementale, Moser, 2009)

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 32

    Dans la reprsentation graphique suivante est dtaill le contexte culturel de lhumain.

    Chaque composante dfinit la culture. La culture est le systme des reprsentations

    symboliques associes aux pratiques sociales propres une certaine collectivit (mode de

    vie) dans un espace dfini (physique et imaginaire). Elle existe et se dveloppe grce

    lactivit de fonction symbolique humaine.

    La fonction symbolique est la fonction

    de signifier, de donner du sens. Cette

    fonction seffectue grce diverses

    formes symboliques. Un livre, une

    publicit, une sculpture, un concert sont

    des formes symboliques. Diffuses par

    divers moyens comme les mdias

    (tlvision, presse), ou le systme

    scolaire ou encore les arts de la scne.

    Selon Guy Rocher18, l'idologie se

    dfinit comme :

    Un systme d'ides et de jugements,

    explicite et gnralement organis, qui

    sert dcrire, expliquer, interprter ou

    justifier la situation d'un groupe ou

    d'une collectivit qui, s'inspirant

    largement de valeurs, propose une

    orientation prcise l'action historique

    de ce groupe ou de cette collectivit .

    18Source : Guy Rocher tome 3, Montral, HMH, 1969, p. 393.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 33

    En dautres termes l'idologie (systme universel de reprsentation du monde) organise et

    symbolise des valeurs, elle cre des points de repre concrets dans le monde vcu et donne un

    sens l'exprience collective des socits.

    Mais alors comment se construisent les idologies ?

    La pense sociale, est une architecture (Rouquette, 1998) qui va du comportement individuel

    la base, jusquau sommet de la chaine hirarchique, qui sont des lments de connaissances

    collectifs et partags, les idologies. Les idologies construisent des reprsentations sociales

    (on parle de systme de valeur), qui induisent des attitudes et opinions qui ces dernires

    influencent les comportements.

    La diffrence entre savoir et connaissance est que le savoir est la reprsentation

    (individuelle ou collective) de la ralit (il est bas sur lopinion).

    Alors que la connaissance (qui est base sur la raison, une forme distincte de processus

    pour tablir ses opinions) est plus restrictive. Elle couvre l'ensemble des techniques et des

    sciences qui ont fait leurs preuves dans la pratique.

    Enfin la science (qui est base sur la preuve, une forme rigoureuse de processus rationnel)

    quant elle ne regroupe que les thories logiques et empiriques. Donc la science est une

    forme particulire de connaissance qui elle-mme est une forme particulire de savoir.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 34

    Remarque : Notre foi infinie en la science et le progrs nous dculpabilisent dune

    responsabilit personnelle pesante, vidente. La science cologique est la rponse nos

    maux. Nous sommes devenus si convaincus, du bien fond des principes scientifiques de

    l'cologie que nous en sommes arrivs employer de faon courante l'adjectif cologique

    pour dfinir tout ce qui a trait de l'environnement.

    Pour nuancer il est indispensable dindiquer quil existe un savoir qui nest pas fond sur la

    raison (mythes et superstitions), comme il existe des connaissances utiles (connaissance

    pratiques) mais non scientifiques.

    Peut-on utiliser la culture, lidologie du dveloppement durable pour initier une action

    collective, une dynamique commune de prservation de lenvironnement dans lentreprise ?

    Pour rpondre cette question, il sagit dtudier les aspects dterminants des comportements

    de lindividu. Dans cette partie, il ne sagit en aucun cas de propagande managriale mais

    dun recueil de pistes dincitation au changement. Au sein dune quipe de travail ou dun

    groupe, dune entreprise ou dune socit, une srie de paramtres influence notre

    comportement. Les connatre, cest pouvoir les utiliser pour initier un comportement altruiste

    et durable.

    Il est hypothtique de prdire un comportement daprs une attitude observe. On saperoit

    que les comportements sont imprvisibles et ne rpondent aucune logique dterministe. On

    peut tout de mme tenter dapprhender le comportement ventuel suivant la norme

    comportementale (ce qui est souhaitable), lintention de comportement (qui se rapproche de la

    norme) et le comportement attribu autrui (qui se rapproche souvent du comportement

    effectif). Voici pour illustrer lexemple des papiers19.

    19 Exemple tir du livre : psychologie environnementale, De Boeck, 2009

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 35

    Exemple des papiers : (Bickmanal,1972 ; Geller ,1982)

    Nous adaptons notre comportement celui des autres. La prsence de dchets incite se

    dbarrasser de dchets. Lexprience, mene dans une rue, mesure le pourcentage de gens jetant leurs papiers par terre. Elle claire sur la norme comportementale, lintention et le comportement effectif du groupe en termes de propret:

    Pour 1 papier au sol le taux est de 10% (contre 18% sil ny en avait pas) Pour 2 papiers au sol le taux est de 20% ; pour 8 il est de 41% et pour 16 il est de 40%.

    Pourtant 95% des sujets se sentent concerns et responsables des papiers jets par terre.

    Mais seulement 2% ramassent effectivement ces papiers.

    Pour initier un comportement responsable et durable il faut une prise de conscience des

    consquences dun comportement et une attribution de la responsabilit. La responsabilit

    vient de lappropriation, de lattachement (affectif). La communication et le fait dattribuer

    (dans la mesure du possible) des responsabilits aux individus dans la gestion dune partie des

    ressources favorisent les comportements communautaires.

    Voici trois exemples de comportements qui diffrent en termes de gains. La coopration (ces

    sont des gains partags), lindividualisme (gain personnel) et la comptition (gain personnel

    relatif au gain dautrui). Il apparait que dans un groupe le choix goste est le plus attractif

    (gains directs) mais infrieur en bnfices ceux que chacun percevrait si tout le monde

    agissait dans lintrt commun.

    Les conditions dengagement dun individu pour le bien commun sont de deux sortes :

    Une condition li aux ressources (renouvelables, accessibles, importantes).

    Une condition des caractristiques des participants, du groupe (nombre,

    caractristiques, communications, rgles).

    Le nombre du groupe est important, car on remarque un phnomne de dilution de

    responsabilit, de non participation dun des participants sous couvert danonymat. La

    valorisation des comportements altruistes est plus efficace en termes de coopration que la

    punition des comportements opposs.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 36

    Les ressources environnementales sont mal rparties, pour certains elles sont indisponibles,

    pour dautres en excs, cest un tat de fait. Ce qui implique que certains acceptent dtre

    excdentaires par rapport la communaut. Ceux-l sont face au dilemme social.

    Le dilemme social, qui explique en partie pourquoi les individus ont du mal adopter des

    comportements favorables tous, se dfinit comme un choix alternatif entre laction dans un

    intrt individuel et celle dans lintrt commun, si, bien entendu ces actions sont

    contradictoires. Le conflit dintrt entre lindividu et la collectivit est comprhensible

    surtout sur le long terme, en effet il est difficile de se comporter de manire altruiste face un

    problme qui se ressentira que plusieurs gnrations aprs.

    Cependant un des leviers dadoption dun comportement durable est la capacit se projeter

    dans le futur. Un des moyens efficaces pour se projeter dans le futur est dinclure les intrts

    de ses enfants dans celui des gnrations futures.

    Comment faire passer le message ?

    En gnral on utilise trois moyens de faire passer un message. Le premier est la peur. Le

    deuxime est la menace ou la punition et le troisime est lobligation. Les mesures

    gouvernementales et hirarchiques, quelles soient incitatives ou contraignantes, nimpliquent

    pas dengagement individuel profond et donc de modification notable, et ne peuvent tre

    efficaces que si elles sont comprises et acceptes. Elles sont pourtant valables, si on part du

    principe que lhumain est irrmdiablement goste. Mais si on arrive responsabiliser,

    sensibiliser par des moyens appropris (diffusion des connaissances, transmission de valeurs)

    les individus on peut esprer dvelopper des comportements responsables et durables.

    Comment le faire passer efficacement ?

    De nos jours trop dinformations nous parviennent, dpassant souvent la capacit de

    traitement de lindividu. Et dans ce sens lanalogie avec llastique20 est explicite. Comme

    llastique on peut distinguer chez lindividu trois tats.

    20 Exemple tir du livre : psychologie environnementale, De Boeck, 2009

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 37

    Le premier est, quen labsence de contraintes, il y a un retour ltat initial (comportement

    de base). Ladoption dun nouveau comportement nest durable que sil est incit de manire

    rgulire. Et notamment en termes de comportements pro-environnementaux (conomie

    dnergie, tri des dchets). En labsence de contraintes rptes il est facile de revenir aux

    habitudes comportementales antrieures.

    Ce qui amne ladaptation (second tat), qui correspond la capacit supporter un tat

    contraint. Lexemple de la diffrence des comportements entre citadins (ragissant aux

    contraintes extrieures comme le stress, ou le bruit) et les ruraux. Ce qui induit le

    troisime tat, la limite de flexibilit. En effet, il existe un point de rupture, quand les

    contraintes exerces sur lindividu sont trop importantes. Dans un autre cas, quand celles-ci

    sont chroniques on remarque une perte dlasticit, en fonction de la persistance de

    lexposition. Pour exemple des individus exposs couramment une pollution qui restreint la

    visibilit shabitue cette visibilit, il en va de mme pour une pollution sonore citadine.

    Il faut donc, avec la lgitimit ncessaire, rpter et suivre encore et encore, un message

    cibl, grce un vecteur adapt, sur un public adquat.

    Nous savons que des filtres de perception sinstallent entre lmission et la transmission dun

    message, et entre la rception et linterprtation de celui-ci. Il faut considrer la

    communication comme un phnomne de construction, lobjectif dun change est de

    permettre une comprhension entre les individus. Lutilisation des valeurs personnelles

    permet de saccorder sur la perception de lenvironnement et de rendre cohrent la logique

    daction de prservation puisquelle peut tre assimile personnellement. Selon Mehrebian et

    Ferris limpact de communication de 7% verbal, 38% para-verbal et 55% non verbal. Cest

    pourquoi dans la dfinition de mon outil je me suis concentr sur la ncessit de communiquer

    un groupe choisi pour ses caractristiques de rfrent par rapport au groupe (sur un domaine

    dlimit) de manire directe, visuelle, auditive. Trop souvent, selon mon observation, les

    informations se transmettent par des moyens numriques ou procduriers. Il suffit de constater

    les informations capitales qui schangent de manire informelles lors de repas ou de pauses.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 38

    Dans la continuit de la dfinition des contextes, nous trouvons lespace interpersonnel.

    L'environnement interpersonnel est le lieu des apprentissages lmentaires et le tissu des

    ractions psychologiques.

    Remarque : La famille proche constitue le

    premier contact avec la collectivit, et le premier

    lieu d'apprentissage. La famille largie en est

    l'extension (dans la culture occidentale : grands-

    parents, tantes, oncles, cousins, cousines, etc.).

    La communaut immdiate na pas de liens de

    parent, mais ce ne sont pas des trangers.

    Parfois dune grande importance (ami ou

    ennemi), parfois plus distants, nous entretenons

    avec eux des rapports dterminants (partage des

    doutes, des peurs, des espoirs, des valeurs, des

    croyances) pour dfinir notre personnalit et nos

    relations avec les autres.

    La dernire composante est l'environnement social, qui est indispensable chaque tre

    humain, il se compose de quatre sous-systmes en corrlation. Lensemble des systmes

    dtermine le champ des possibilits de vie qui soffre nous.

    Remarque : Dans ce schma linteraction double des

    institutions avec le systme choisi et directement sur son auteur

    place lhumain au centre du systme. Il la cre, agit sur celui-ci

    par le biais des institutions et rciproquement les institutions

    agissent sur lui en inscrivant ses rapports sociaux dans des

    schmas prtablis. Lauteur dcrit les processus institutionnels

    comme porteur de la socialisation qui est le mcanisme

    fondamental de tout systme social. Je peux ajouter que les

    systmes sociaux prsents dans la socit se retrouvent dans

    lentreprise.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 39

    Perspectives

    Pour un dveloppement durable, lindividu doit de penser global, lchelle de la plante, car

    les changements environnementaux eux, le sont et lient tous les individus travers les

    continents. Pourtant il est impossible de percevoir ltat de lenvironnement un niveau

    global. Des problmatiques de rchauffement climatique ou de pnuries deau font partie dun

    savoir commun, mais sont-elles vraiment comprises ? A-t-on conscience du danger potentiel ?

    Parfois je dois lavouer ces questions me dcouragent. Pas que je me sente investi dune

    mission militante, ou dun quelconque rle important jouer sur la scne publique ; mais le

    simple fait de me demander si le groupe est capable de sentendre, si les individus peuvent

    uvrer pour le bien commun me questionne. Il y a des jours o je rpondrai laffirmative

    sans hsiter. Mais dautres o il ny a pas lombre dune chance. Les jours sombres de ma foi

    en lhumanit, je nous vois dans un bateau la drive se rapprochant des rochers. Faut-il

    attendre le premier craquement de la coque en bois pour ragir ? Trop tard peut tre.

    Comment inciter les acteurs au changement ?

    Il y a trois techniques dincitation au changement. Lducation environnementale (elle na

    aucune influence sur les attitudes), la communication (renforce la norme comportementale) et

    les techniques de renforcement (positives ou ngatives), elles agissent sur les consquences

    dun comportement, comme une rcompense immdiate. Lincitation est plus efficace que

    linformation mais moins quune rcompense financire associe.

    Parfois la modification consciente des comportements est impossible ou trop couteuse en

    motivation personnelle, il faut mieux agir alors sur les habitudes et les modifier de manire

    inconsciente. Cest l toute la force silencieuse dune organisation.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 40

    Lacteur et lorganisation

    Les restructurations des organisations utilisant des systmes de management depuis plusieurs

    dcades maintenant (et notamment les services publics avec la cl quelques scandales de

    management), et le contexte de concurrence exacerbe (qui oblige les entreprises toujours

    plus de comptitivit) ; nous dmontre quil faut manager le facteur humain. De nos jours le

    management est un savant mlange de sociologie (avec une longue liste de facteurs psycho-

    sociaux), danalyse organisationnelle (avec les relations de pouvoir et de jeu), et dobligations

    conomiques.

    Il est ncessaire daborder les nombreux aspects en gardant lesprit que le facteur humain et

    relationnel dans une recherche de productivit est essentiel. Lindividu fait partie dun groupe,

    groupe faisant partie dune entreprise. Nous savons tous que le moral dun groupe est

    dterminant sur la productivit de celui-ci ou par exemple celui de leffet de groupe sur

    lindividu. Mais comment aller plus loin ? Nous allons voir comment le systmisme peut nous

    aider comprendre les relations de lacteur avec lorganisation.

    Dans cette partie, il sagit dobserver la relation de lindividu avec lorganisation, et de voir

    comment cette relation a volu. Du taylorisme (qui rvolutionna durablement les

    organisations), lcole sociotechnique (qui partait du constat que les changements

    technologiques et techniques ont eu un impact dterminant sur le fonctionnement des groupes

    et donc des individus) ; de lcole systmique (qui explique comment se construisent les

    actions collectives partir de comportements et d'intrts individuels), la responsabilit

    sociale des entreprises (RSE) (qui est en ces temps de difficults montaires et de chmage

    grandissant o les entreprises sont au centre des attentions conomiques, sociales et

    environnementales, confre lorganisation une dimension thique et responsable) ;

    le facteur humain reste au centre des proccupations.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 41

    Le Taylorisme du nom de son crateur, est la base de lorganisation scientifique du travail.

    Cest une analyse dtaille et un squenage des techniques de production et des tches dans

    le but daugmenter la productivit et donc la production. Le travail ouvrier a suivi lvolution

    des techniques et des sciences, la machine-outil cda sa place la production en srie, puis

    la recomposition du travail suite lautomatisation ; modifiant chaque fois la place de

    lhumain dans lorganisation.

    Karl Marx (1818, 1883), qui dj parlait de valeur dchange dans le travail, avait trs bien

    anticip le dveloppement et les excs du taylorisme ce sujet. La division du travail est en

    effet un mouvement constant du capitalisme. Elle est due l'amlioration des techniques et

    notamment des machines, qui ont fait apparatre les ouvriers spcialiss. Elle est galement la

    consquence d'une recherche de rentabilit accrue. Chaque salari du systme capitaliste ne

    devient capable que d'assurer une infime partie de la production. Son travail n'a pas de sens en

    lui-mme. Il n'est qu'un rouage d'un immense mcanisme. Il ne peut plus, selon lui, avoir de

    dveloppement personnel.

    Depuis lorganisation des entreprises a bien volu, elle utilisa notamment le Fordisme et sa

    standardisation des produits, les chaines de production et une augmentation des salaires, mais

    aussi les cercles vertueux de la qualit (du 5S au LEAN) ou encore le modle Japonais de

    Toyota. Certains mme thorisent cette volution de manire Darwinienne (Guilhon, 2007) en

    rappelant que le principe manichen de changements rsulte, soit de la volont des acteurs,

    soit de contraintes environnementales (la mondialisation en est un exemple).

    Mais ce qui est intressant cest que depuis les annes 1930 et les travaux dElton Mayo

    (1880, 1949), on cherche comprendre le facteur humain travers notamment le climat

    psychologique qui affecte sa performance.

    Il existe 3 approches dites classiques de la sociologie des organisations. Ces modles, axs

    sur les stratgies, sont les phnomnes de pouvoir, les phnomnes de rgulation et les

    phnomnes identitaires. Ils permettent dclaircir le fonctionnement des entreprises.

    Lintrt dnumrer ces approches, est que les nouveaux modles ne se justifient que sur la

    base des anciens toujours dactualit. Ces sociologies dactions suivent un cheminement

    logique et chacune peut trouver des applications pertinentes dans lvolution des ensembles.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 42

    La premire est lapproche de la contingence (Mintzberg, 1981). Ce courant, qui fit cole,

    dcrit le fonctionnement interne de lorganisation suivant des schmas de dpendances

    cohrents, et les ajustements ncessaires de celle-ci en fonction des variables externes, c'est--

    dire son environnement. En dautres termes, la construction des organisations rpond des

    contraintes de contexte, et notamment son ajustement celles-ci.

    D'aprs Mintzberg, les facteurs de contingence qui ont une influence sur les caractristiques

    d'une organisation sont:

    - l'ge et la taille de l'organisation

    - la technique (automatisation)

    - l'environnement (dynamique, complexit)

    - les relations de pouvoir (centralis/dcentralis)

    Ces lments sont le minimum pour dfinir le fonctionnement de lentreprise, mais il est

    ncessaire si lon veut augmenter notre acuit de comprhension, de regarder plus en dtail le

    fonctionnement. Ce travail est propos dans loutil.

    Mintzberg dfinit galement le management comme une pratique contingente aux acteurs, aux

    cultures et aux situations concrtes. Cette ouverture sur le management me fut trs utile pour

    concevoir mon outil. Selon lui un manager a dix rles regroups en trois catgories. La

    premire trait aux relations interpersonnelles et notamment aux rles de symboles, de leader

    et dagent de liaison. La deuxime est le domaine informationnel et notamment son rle

    dobservateur actif, de diffuseur et de porte parole. Dans cette catgorie llment central est

    linformation. La dernire est sa dimension dcisionnelle, et ses rles dentrepreneur, de

    rgulateur (conflit) de rpartiteur (des ressources) et de ngociateur en tant que porte-parole et

    de symbole.

    Une organisation ne peut tre analyse comme lensemble transparent que beaucoup de

    dirigeants voudraient quelle soit. Elle est le royaume des relations de pouvoir, de linfluence,

    de ngociations et du calcul. Mais elle nest pas davantage linstrument doppression quelle

    apparat ses dtracteurs car ces relations conflictuelles ne sordonnent pas selon un schma

    logique intgr. Elles constituent le moyen pour dinnombrables acteurs de se manifester et de

    peser sur le systme et ses partenaires, mme si cest de faon trs ingale.

    Lacteur et le systme (Editions du seuil, 1980)

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 43

    En ce qui concerne lacteur et lanalyse de son potentiel de choix et dactions, un des

    documents cls de ma recherche a t Lacteur et le systme de Michel Crozier et Erhard

    Friedberg. La thorie de lacteur stratgique cherche en priorit comprendre comment se

    construisent les actions collectives. Actions fondes partir de comportements, et d'intrts

    individuels, parfois contradictoires entre eux. Loriginalit de cette dmarche, situe les actions

    comme allant principalement de l'individu vers la structure (l'individualisme mthodologique

    ou la stratgie) et non de la structure vers l'individu (structuralisme ou systmique). Ce qui

    recentre la question non plus sur le systme mais sur lacteur. En effet les hommes doivent

    sadapter aux rles que dfinit une structure qui est dfinie par dautres hommes.

    Quest qui permet laction collective, laction organise ?

    Parce que ce nest pas un phnomne naturel, ce nest pas le rsultat automatique du

    dveloppement des interactions humaines. Cest une coalition dhommes, en vue de rsoudre

    des problmes matriels. Cest un ensemble dindividus, aux objectifs souvent diffrents de

    ceux de lorganisation. Une multitude de choix individuels autonomes, pourtant chacun son

    niveau et dans son cadre rationnel, induisent parfois des effets inattendus, non voulus voire

    aberrants sur le plan collectif. Ne sont en causes ni les objectifs ni les intentions des acteurs

    mais bien un effet dorganisation de systme. Ils sont prisonniers des moyens quils ont

    utiliss pour rgler leur coopration. Ainsi pour quil y ait change, coordination entre les

    acteurs il faut quil y ait des conventions (crites ou non). Une convention nest quune forme

    particulire de rgles. Cette convention est le langage, la culture dune entreprise.

    Une des techniques dchange et collaboration dans le but dorganiser

    laction est la runion. Cette commune et pourtant trange habitude, avec

    sa panoplie symbolique de rgles et de coutumes, a la fcheuse tendance

    se multiplier. Pourtant lide de se runir pour dfinir une action

    collective semble logique. Mais si la runion nest pas rflchie et

    prpare, elle peut se rvler strile et inutile. Entrainant parfois de la

    frustration. Frustration qui, si elle est rpte, jette le discrdit et la

    dmotivation dans lorganisation.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 44

    Quest-ce qui motivent les acteurs ?

    Le besoin engendre des motivations. Les aspirations et besoins particuliers de lindividu

    peuvent tre dfinis de manire simple par la pyramide hirarchique bien connue dAbraham

    Maslow21 (1908, 1970) qui correspond, une srie de besoins psychologiques hirarchiss,

    que lacteur cherche satisfaire par sa participation lorganisation. Ces aspirations sont

    associes la motivation qui est oriente vers un objectif, un but qui lui-mme est la

    recherche dun rsultat. Selon lui, il faut satisfaire chaque besoin dun niveau donn avant de

    passer ceux dun niveau suprieur. Notons que la critique qui lui fut adresse, est quun

    besoin ne disparait pas toujours et quil peut changer de forme lorsquil a t satisfait.

    Figure 17: la pyramide des besoins de Maslow

    Dautres thories comme le gain potentiel ou celle bi-factoriel de Herzberg o le premier

    facteur est lenvironnement de travail (par exemple: le salaire, la scurit demploi) et le

    deuxime est le contenu du travail ( travers la reconnaissance, la responsabilit),

    permettent de dfinir les besoins, les dsirs et donc les motivations, mais je pense quil faut

    aller plus loin et dpasser le rapport individuel lorganisation pour celui de laction

    collective.

    21 Figure Source : www.planete-pour-tous.net

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 45

    Laction collective de premier niveau est celle de la coopration ; obtenue soit par la

    contrainte (par exemple une manipulation affective ou idologique) soit par le contrat (c'est--

    dire la ngociation et le marchandage).

    Remarque : Bien que des analogies soient possibles, il est trompeur de penser que les

    modles de hirarchie militaire ou dorganisation de ltat permettent ddicter une loi lgitime de construction dune organisation. Les relations des individus relativement libres et unis dans un but collectif procurent chaque structure une autonomie organisationnelle. La

    mise en place du dveloppement durable est une opportunit de repenser la construction

    organisationnelle de lentreprise en fonction des attentes des acteurs. Cette restructuration peut se faire, en impliquant les acteurs, dans une dynamique collective, source de motivation

    et lit de bnfices.

    Le pouvoir est le fondement de laction organise. Selon Crozier & Friedberg, le pouvoir est

    une relation et non pas un attribut des acteurs (souvent leurs point de vue). Cest une relation

    dchange et de ngociation non transitive. Il y a systme sil y a relations de pouvoirs, et

    celui-ci possde un minimum de structuration, ce qui le distingue du simple amas

    dinteractions et de relations. Il dispose de mcanismes de rgulations. Ils conseillent donc

    d'analyser une organisation en se penchant sur les jeux de pouvoir qui la structurent et rendent

    les comportements des acteurs intelligibles. Mais il faut toujours sinterroger sur les

    contraintes structurelles qui caractrisent une situation de ngociation donne, dlimitant le

    champ dexercice des relations de pouvoir.

    La premire grande source de pouvoir est lexpertise. La possession dune comptence (savoir

    faire, connaissance, exprience) ou dune spcialisation fonctionnelle difficilement

    remplaable et cruciale pour lorganisation. Cet acteur dispose dailleurs dune bien meilleure

    position dans la ngociation avec lorganisation et ses collgues. Cependant lexpertise

    proprement dite est relativement limite, peu de personnes, dans une socit complexe comme

    la ntre sont vraiment irremplaables, cest dire les seules capables de rsoudre un problme

    dans un ensemble donn. Mais normment de personnes ont un monopole du fait quil est

    trop difficile ou trop couteux de les remplacer. Dailleurs chacun possde un minimum

    dexpertise dont il se sert pour ngocier. Malheureusement il semble que dans lorganisation

    contemporaine lexpertise ne soit pas toujours reconnue. La reconnaissance (notamment

    hirarchique) passe par la visibilit, la mise en avant, la forme et pas le fond.

  • Le facteur humain dans lenvironnement durable

    VINCENT Damien MS QSE 2011-2012 46

    Le jeu est linstrument que les hommes ont labor pour rgler leur coopration. Cest

    linstrument essentiel de laction organise. Le joueur reste libre mais il doit, sil veut gagner,

    adopter une stratgie rationnelle en fonction de la nature du jeu et respecter les rgles de

    celui-ci. Ce ne sont pas les hommes qui sont rguls et structurs, mais les jeux qui leurs sont

    offerts. Attention, il ne sagit pas de jeux darcades ou de rles, ludiques et distrayants. Ces

    jeux sont la ralit, implacable et immuable. Mais si le terme peut aider ddramatiser un peu

    la situation, procurer la distanciation indispensable lanalyse, je lutilise volontiers.

    Par exemple un mme acteur, peut mettre en uvre des stratgies contradictoires et

    complmentaires. Une offensive , qui cherche contraindre les autres pour satisfaire ses

    propres exigences et lautre dfensive , qui vise se soustraire leurs contraintes par la

    protection systmatique de sa propre marge de libert et de manuvre. Celui-ci garde toujours

    une marge de libert (qui signifie source dincertitude pour ses partenaires). Chaque acteur

    dispose ainsi de pouvoir sur les autres acteurs. Dailleurs il tentera souvent de mettre profit

    sa marge de libert en ngociant sa participation de telle sorte quelle soit payante pour

    lui .

    Remarque : Nous avons gnralement une fausse image de laction organise. Nous survaluons beaucoup trop la rationalit et lefficacit des organisations. Les images qui viennent lesprit sont des engrenages mcaniques, des structures architecturales mais cest sans compter sur la complexit des comportements humains et leurs aptitudes influencer le

    modle prescrit, officiel. Les comportements sont parfois incohrents ou peu lisibles, mais ils

    ont toujours un sens, parfois cach pour lacteur lui-mme.

    Etudions prsent lenvironnement de lorganisation. Il sagit maintenant de regarder le

    contexte technique, conomique et social dans lequel se trouve lorganisation. Pourtant il ny

    a en la matire aucun dterminisme (technologique) aucune automaticit (adaptation aux

    exigences de la situation) qui permet daffirmer que le contexte est dterminant pour les

    structures.

    Tout comme le fonctionnement interne dune organisation, les

    solutions apportes aux problmes poss par son environnement

    au sens large consti