la rigidité artérielle est corrélée à la gravité des sclérodermies systémiques : données de...

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Tome 30, Cahier 2 du n o 4, 2005 RAPPORTS 3S15 ATTEINTE ARTÉRIELLE AU COURS DU SYNDROME DES ANTIPHOSPHOLIPIDES. D. WAHL Médecine Interne Thrombose et Médecine Vasculaire, CHU de Nancy, Hôpitaux de Brabois, 54511 Vandœuvre Cedex. Le syndrome des antiphospholipides (SAP) est défini depuis 1999 par l’association de manifestations cliniques (thrombose veineuse et/ou artérielle et/ou manifestations obstétricales) avec des anticorps antiphospholipides (APL) persistants (détec- tés par technique de coagulation « anticoagulant circulant de type lupique » selon les recommandations ISTH et/ou par tech- nique ELISA « anticorps anti-cardiolipide — aCL » quantifiés moyens ou élévés). La prévalence du SAP est faible dans la population générale. La prévalence des APL associés ou non au SAP varie selon les groupes de patients : 15 % des patients présentant une artério- pathie des membres inférieurs, 40 % des patients présentant un lupus systémique. La survenue des manifestations cliniques thrombotiques chez les patients qui présentent des APL est en partie conditionnée par les autres facteurs de risque. Cela est particulièrement vrai pour l’athérome précoce décrit chez les patients lupiques où le rôle des antiphospholipides n’est pas seul en cause. La recherche d’anticorps antiphospholipides est conseillée lorsque le tableau clinique ou les investigations complémentai- res orientent vers une maladie systémique, notamment un lupus, ou lorsque d’autres manifestations du SAP sont identi- fiées (manifestations obstétricales, endocardite de Libman- Sachs, livedo racemosa), d’autant plus que le patient est jeune, le tableau clinique insolite. L’absence de facteur de risque tra- ditionnel ou la survenue de thromboses artérielles et veineuses chez le même patient justifient une recherche d’antiphospholi- pides. La présence confirmée d’anticorps antiphospholipides justifie la détection systématique d’une artériopathie asymptomatique par mesure de l’IPS et d’une endocardite de Libman-Sachs par échographie cardiaque. En cas de thrombose symptomatique dans un territoire artériel, il convient de vérifier l’absence d’autre manifestation thrombotique dans d’autres territoires (origine embolique notamment). La prophylaxie primaire des thromboses associées aux APL par antiplaquettaires se justifie principalement pour prévenir les manifestations artérielles. Le traitement du SAP confirmé fait appel à un traitement anticoagulant au long cours. L’inten- sité de L’INR fait l’objet d’un vif débat actuellement. L’asso- ciation AVK + aspirine est souvent prescrite après une thrombose artérielle. Des travaux suggèrent un intérêt de l’hydroxychloroquine (surtout dans le SAP associé au lupus), pour les statines les tra- vaux sont discordants et ne permettent pas de suggérer un in- térêt propre dans le SAP, les nouveaux antithrombotiques (ximélagatran, fondaparinux) n’ont pas encore été évalués dans le cadre d’études spécifiques. QUAND FAUT-IL PENSER À UNE DYSPLASIE ARTÉ- RIELLE ET COMMENT EN POSER LE DIAGNOSTIC ? P. ROSSIGNOL Service de Médecine Vasculaire et Hypertension Artérielle, Hôpital Européen Georges Pompidou, 20, Rue Leblanc, 75908 Paris Cedex 15. Résumé non transmis. LA RIGIDITÉ ARTÉRIELLE EST CORRÉLÉE À LA GRAVITÉ DES SCLÉRODERMIES SYSTÉMIQUES : DONNÉES DE L’ÉTUDE ERAMS À L’INCLUSION. Les investigateurs d’ERAMS : Coordination : J. CONSTANS, P. GOSSE, J. TAILLARD Support méthodologique : C. GERMAIN, M. SAVES, G. CHENE Cliniciens : I. DELEVAUX, O. AUMAITRE, K. TIEV, S. VIGNES, J. CABANE, L. MOUTHON, L. GUILLEVIN, D. BARCAT, C. CONRI, C. SCHMIDT, F. GRANEL, J.L. SCHMUTZ, P. SOIRA, E. VIDAL, K. ZOULIM, P. LETELLIER, F. LIFERMANN, D. FARGE-BANCEL, F. BONNET, J. BEYLOT, X. DELBREL, G. ETIENNE, M. LONGY-BOURSIER, M.S. DOUTRE Enregistrement des QKd : I. MACQUIN-MAVIER, F. ZANNAD, A. AMONCHOT, B. LAHITTON Les grosses artères des sclérodermiques ont une rigidité accrue comme cela a été démontré au cours d’une étude pilote utili- sant le QKd. Il s’agit d’une méthode ambulatoire mesurant pendant 24 heures la tension artérielle et la vélocité de l’onde de pouls simultanément. L’intérêt de ce paramètre, facilement quantifiable, pourrait être grand s’il était montré qu’il peut prédire l’évolution des sclérodermies. C’est pour vérifier cette hypothèse qu’a été conçue l’étude ERAMS, étude multicentri- que française qui a pour objet d’étudier la relation entre la rigidité artérielle mesurée par la méthode du QKd et l’aggra- vation des sclérodermies sur une période de 3 ans. Les inclu- sions dans l’étude ERAMS ont débuté au printemps 1999 pour se terminer au printemps 2002. Un suivi de 3 ans était prévu, les résultats définitifs devraient donc être disponibles pour septembre 2005. Nous décrivons ici les caractéristiques des patients à l’inclu- sion. 105 patients ont été inclus, Il s’agit de 86 femmes et 19 hommes, d’âge moyen 57 13 ans. La sclérodermie était considérée comme limitée dans 70 cas et diffuse dans 35. Le QKd 100-60 était anormal (< 200 msec) chez 49 patients. Il était corrélé négativement à l’âge (r =-0,33, p = 0,0005). Dans le groupe de patients avec QKd 100-60 < 200 msec, l’existen- ce d’au moins une atteinte viscérale (cœur, poumons, reins ou tube digestif) était plus fréquente (80 % vs 54 %, p < 0,01), de même que les œdèmes des membres inférieurs (p = 0,02). La DLCO était plus basse (66 % 21 vs 77 % 20, p = 0,01) ainsi que la capacité vitale (p < 0,01). Dans le groupe avec QKd 100-60 altéré, on notait également une plus grande fréquence de la diarrhée (20 % vs 4 %, p = 0,01), d’une œso- phagite (25 % vs 14 %, ns). Le taux d’hémoglobine était éga- lement plus bas dans ce groupe (p = 12,6 1,5 g/dl vs 13,4 1,3 g/dl). Ces corrélations persistaient après ajustement pour l’âge (atteinte viscérale, p = 0,02 ; œdèmes des membres inférieurs, p = 0,02 ; diarrhée, p = 0,01 ; DLCO, p = 0,02 ; hé- Mots-clés : Artériopathies du sujet jeune. Anticorps antiphospholipides. Syndrome des anticorps antiphospholipides.

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Page 1: La rigidité artérielle est corrélée à la gravité des sclérodermies systémiques : données de l’étude erams à l’inclusion

Tome 30, Cahier 2 du no 4, 2005 RAPPORTS 3S15

ATTEINTE ARTÉRIELLE AU COURS DU SYNDROMEDES ANTIPHOSPHOLIPIDES.

D. WAHL

Médecine Interne Thrombose et Médecine Vasculaire, CHUde Nancy, Hôpitaux de Brabois, 54511 Vandœuvre Cedex.

Le syndrome des antiphospholipides (SAP) est défini depuis1999 par l’association de manifestations cliniques (thromboseveineuse et/ou artérielle et/ou manifestations obstétricales)avec des anticorps antiphospholipides (APL) persistants (détec-tés par technique de coagulation « anticoagulant circulant detype lupique » selon les recommandations ISTH et/ou par tech-nique ELISA « anticorps anti-cardiolipide — aCL » quantifiésmoyens ou élévés).

La prévalence du SAP est faible dans la population générale.La prévalence des APL associés ou non au SAP varie selon lesgroupes de patients : 15 % des patients présentant une artério-pathie des membres inférieurs, 40 % des patients présentant unlupus systémique. La survenue des manifestations cliniquesthrombotiques chez les patients qui présentent des APL est enpartie conditionnée par les autres facteurs de risque. Cela estparticulièrement vrai pour l’athérome précoce décrit chez lespatients lupiques où le rôle des antiphospholipides n’est passeul en cause.

La recherche d’anticorps antiphospholipides est conseilléelorsque le tableau clinique ou les investigations complémentai-res orientent vers une maladie systémique, notamment unlupus, ou lorsque d’autres manifestations du SAP sont identi-fiées (manifestations obstétricales, endocardite de Libman-Sachs, livedo racemosa), d’autant plus que le patient est jeune,le tableau clinique insolite. L’absence de facteur de risque tra-ditionnel ou la survenue de thromboses artérielles et veineuseschez le même patient justifient une recherche d’antiphospholi-pides.

La présence confirmée d’anticorps antiphospholipides justifiela détection systématique d’une artériopathie asymptomatiquepar mesure de l’IPS et d’une endocardite de Libman-Sachs paréchographie cardiaque. En cas de thrombose symptomatiquedans un territoire artériel, il convient de vérifier l’absenced’autre manifestation thrombotique dans d’autres territoires(origine embolique notamment).

La prophylaxie primaire des thromboses associées aux APLpar antiplaquettaires se justifie principalement pour prévenirles manifestations artérielles. Le traitement du SAP confirméfait appel à un traitement anticoagulant au long cours. L’inten-sité de L’INR fait l’objet d’un vif débat actuellement. L’asso-ciation AVK + aspirine est souvent prescrite après unethrombose artérielle.

Des travaux suggèrent un intérêt de l’hydroxychloroquine(surtout dans le SAP associé au lupus), pour les statines les tra-vaux sont discordants et ne permettent pas de suggérer un in-térêt propre dans le SAP, les nouveaux antithrombotiques(ximélagatran, fondaparinux) n’ont pas encore été évaluésdans le cadre d’études spécifiques.

QUAND FAUT-IL PENSER À UNE DYSPLASIE ARTÉ-RIELLE ET COMMENT EN POSER LE DIAGNOSTIC ?

P. ROSSIGNOL

Service de Médecine Vasculaire et Hypertension Artérielle,Hôpital Européen Georges Pompidou, 20, Rue Leblanc,75908 Paris Cedex 15.

Résumé non transmis.

LA RIGIDITÉ ARTÉRIELLE EST CORRÉLÉE À LAGRAVITÉ DES SCLÉRODERMIES SYSTÉMIQUES :DONNÉES DE L’ÉTUDE ERAMS À L’INCLUSION.

Les investigateurs d’ERAMS : Coordination : J. CONSTANS, P. GOSSE, J. TAILLARD Support méthodologique : C. GERMAIN, M. SAVES, G. CHENE Cliniciens : I. DELEVAUX, O. AUMAITRE, K. TIEV, S. VIGNES, J. CABANE, L. MOUTHON, L. GUILLEVIN, D. BARCAT, C. CONRI, C. SCHMIDT, F. GRANEL, J.L. SCHMUTZ, P. SOIRA, E. VIDAL, K. ZOULIM, P. LETELLIER, F. LIFERMANN, D. FARGE-BANCEL, F. BONNET, J. BEYLOT, X. DELBREL, G. ETIENNE, M. LONGY-BOURSIER, M.S. DOUTRE Enregistrement des QKd : I. MACQUIN-MAVIER, F. ZANNAD, A. AMONCHOT, B. LAHITTON

Les grosses artères des sclérodermiques ont une rigidité accruecomme cela a été démontré au cours d’une étude pilote utili-sant le QKd. Il s’agit d’une méthode ambulatoire mesurantpendant 24 heures la tension artérielle et la vélocité de l’ondede pouls simultanément. L’intérêt de ce paramètre, facilementquantifiable, pourrait être grand s’il était montré qu’il peutprédire l’évolution des sclérodermies. C’est pour vérifier cettehypothèse qu’a été conçue l’étude ERAMS, étude multicentri-que française qui a pour objet d’étudier la relation entre larigidité artérielle mesurée par la méthode du QKd et l’aggra-vation des sclérodermies sur une période de 3 ans. Les inclu-sions dans l’étude ERAMS ont débuté au printemps 1999 pourse terminer au printemps 2002. Un suivi de 3 ans était prévu,les résultats définitifs devraient donc être disponibles pourseptembre 2005.

Nous décrivons ici les caractéristiques des patients à l’inclu-sion. 105 patients ont été inclus, Il s’agit de 86 femmes et19 hommes, d’âge moyen 57 13 ans. La sclérodermie étaitconsidérée comme limitée dans 70 cas et diffuse dans 35. LeQKd 100-60 était anormal (< 200 msec) chez 49 patients. Ilétait corrélé négativement à l’âge (r =-0,33, p = 0,0005). Dansle groupe de patients avec QKd 100-60 < 200 msec, l’existen-ce d’au moins une atteinte viscérale (cœur, poumons, reins outube digestif) était plus fréquente (80 % vs 54 %, p < 0,01), demême que les œdèmes des membres inférieurs (p = 0,02). LaDLCO était plus basse (66 % 21 vs 77 % 20, p = 0,01)ainsi que la capacité vitale (p < 0,01). Dans le groupe avecQKd 100-60 altéré, on notait également une plus grandefréquence de la diarrhée (20 % vs 4 %, p = 0,01), d’une œso-phagite (25 % vs 14 %, ns). Le taux d’hémoglobine était éga-lement plus bas dans ce groupe (p = 12,6 1,5 g/dl vs13,4 1,3 g/dl). Ces corrélations persistaient après ajustementpour l’âge (atteinte viscérale, p = 0,02 ; œdèmes des membresinférieurs, p = 0,02 ; diarrhée, p = 0,01 ; DLCO, p = 0,02 ; hé-

Mots-clés : Artériopathies du sujet jeune. Anticorpsantiphospholipides. Syndrome des anticorps antiphospholipides.

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3S16 RAPPORTS Journal des Maladies Vasculaires

moglobine, p = 0,02). Pour la capacité vitale, la tendancen’était plus significative (p = 0,0519).

Ainsi, près de la moitié des sclérodermiques ont un QKd 100-60 < 200 msec, et ces patients ont une sclérodermie plus graveque les autres. Ces résultats vont dans le sens de l’hypothèsede l’étude ERAMS. Les résultats à 3 ans, présentés lors ducongrès, devraient nous permettre de répondre clairement à la

question de l’intérêt de la mesure de distensibilité artérielle parle QKd pour prédire le pronostic des sclérodermies.

Avec le soutien du Programme Hospitalier de Recherche Clini-que et de l’Association des Sclérodermiques de France.

Mots-clés : Sclérodermie systémique. Rigidité artérielle.