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Martin Lepage Ph.D. Professeur James McGill de psychiatrie Chaire de recherche FRQS Université McGill Directeur de la recherche clinique Coordonnateur des services psychologiques Continuum des troubles psychotiques Institut universitaire en santé mentale Douglas La qualité de vie chez la personne présentant un trouble psychotique

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Martin Lepage Ph.D.Professeur James McGill de psychiatrie

Chaire de recherche FRQSUniversité McGill

Directeur de la recherche cliniqueCoordonnateur des services psychologiques

Continuum des troubles psychotiquesInstitut universitaire en santé mentale Douglas

La qualité de vie chez la personne présentant un trouble psychotique

Objectifs

1. Définir la qualité de vie en santé mentale

2. Discuter de l’importance de la qualité de vie et du rétablissement fonctionnel comme objectif de traitement chez les personnes présentant un trouble psychotique

3. Mieux comprendre la perspective des personnes schizophrènes et des familles concernant la qualité de vie

4. Examiner brièvement les interventions et stratégies pouvant améliorer la qualité de vie

1. La qualité de vie en santé mentale:De quoi parle t’on?

Qualité de vie et capacités fonctionnelles

Qualité de vie liée à

la santé

Effet d’une maladie et/ou du traitement instauré en conséquence sur

les capacités fonctionnelles; mesure subjective et

multidimensionnelle englobant les capacités fonctionnelles physiques

et les capacités fonctionnelles au travail, l’état psychologique, les

interactions sociales et les sensations somatiques

Qualité de vie (QdV)

« Perception qu’a un individu de sa place dans l’existence

dans le contexte de la culture et du système de valeurs

dans lesquels il vit en relation avec ses objectifs, ses

attentes, ses normes et ses inquiétudes »

Capacités

fonctionnelles

Capacité à accomplir les activités quotidiennes normales nécessaires pour répondre à ses propres besoins élémentaires, remplir son rôle habituel et maintenir sa santé et son bien-être3

Saxena et al., 1997 Eur Psychiatry 12:263-266, Leidy NK Nurs Res 1994; 43(4): 196-202

International Society for Quality of Life Research (http://www.isoqol.org)

Quelle distance en km êtes-vous

en mesure de courir?

Évaluation subjective versus objective

Quelle distance en km croyez-vousêtre en mesure de courir?

Les deux dimensions de la QdV

Hayhurst et al., (2014) BMC Psychiatry 14:365

Subjective

• Sentiment de bien-être• Satisfaction face à sa vie• Niveau de bonheur

Objective

• Fonctionnement social • Conditions de vie et

niveau d’autonomie• Accès à un emploi• Situation financière• Condition d’hébergement• Accès à des loisirs

Mesures de la QdV chez les personnes schizophrènes

104

91

55

5

23

22

21

20

11

10

9

0 20 40 60 80 100 120

Total des études

Principal paramètre d'évaluation dela QdV

Paramètre secondaire d'évaluationde la QdV

Karow et coll. Dialogues Clinical Neurosc. 2014; 16(2): 185–95.

Mesure objective: Quality of Life Scale (QLS)

Relations interpersonnelles

(fonctionnement social, interactions sociales; capacité d’intimité)

Rôle instrumental

(degré de réalisation dans le domaine

professionnel/au travail)

Fondements intrapsychiques

(symptômes déficitaires : sentiment d’avoir un but dans la vie, anhédonie, motivation, curiosité, inactivité ne menant à

rien, empathie et interactions affectives)

Activités et objets courants

(capacités fonctionnelles :le patient possède-t-il les

items utilisés tous les jours et accomplit-il les

activités de la vie quotidienne?)

Heinrichs DW, et coll. Schizophr Bull. 1984;10:388–98.Falissard et coll., Int J Methods Psychiatr Res 2015.

Consiste en 21 items (évalués sur une échelle allant de 0 à 6) répartis dans 4 dimensions

0 = déclin important des capacités fonctionnelles; 6 = capacités fonctionnelles normales; l’augmentation du score témoigne d’une amélioration

Les variations d’au moins 5 points du score total à l’échelle QLS sont jugées importantes sur le plan clinique.

La SF-36, est une échelle multidimensionnelle, générique, c’est-à-dire qui évalue l’état de santé indépendamment de la pathologie causale, du sexe, de l’âge, et du traitement

Mesure subjective: SF-36

https://fr.wikipedia.org/wiki/SF-36

2. Qualité de vie et rétablissement fonctionnel: Des objectifs pour le traitement

35% Épisodes multiples – ≠ symptôme

31% Épisodes multiples – symptômes

16% Un seul épisode

7% Un seul épisode – continu

+

-

+

-

Rosen & Garety (2005) Schi Bull

Étude de suivi (>6 ans) de l’issue clinique auprès de 436 patients présentant un premier épisode de schizophrénie

Définir les différents niveaux de résultats recherchés

Andreasen et al. (2005) Am J Psychiatry;162(3):441–449

SAPS=Scale for the Assessment of Positive Symptoms; SANS=Scale for the Assessment of Negative Symptoms; PANSS=Positive and Negative Syndrome Scale

• Réponse: Diminution du pourcentage de symptômes positifs

• Rémission (consensus APA): SAPS-SANS cote globale ≤2 ou cote sur la PANSS ≤3 durant 6 mois

• Rétablissement: fonctionnement indépendant (travail, école, relations sociales, autonomie), qui nécessite peu ou aucun support (perspective sociétale), et sentiment de bien-être personnel (perspective personnelle)

Rétablissement

Rémission

Réponse

Les objectifs du traitement à long-terme

1. Canadian Clinical Practice Guidelines for the treatment of schizophrenia. Can J Psychiatry. 2005; 50(1): 1S-56S; 2. Correll CU. J Clin Psychiatry. 2011; 72(suppl 1): 9–

13 ; 3. Harvey PD et al. Schizophr Bull 2007; 33(5): 1138–48; Llorca PM et al. Schizophr Res 2009; 113; 218–25

Issue fonctionnelle

Qualité de vie

Bien-être subjectif

Observance

Tolérabilité

Efficacité

Court-terme

Long-terme

Facteurs pouvant négativement influencer la QdV

Dimension psychologique• Symptômes psychiatriques• Faible estime de soi• Stigma• Stratégies négatives coping• Attitude négative envers la

médication• Faibles capacités cognitives

Dimension sociale• Faible support social• Solitude• Peu de contact avec la famille

Dimension physique• Symptôme physiques• Effets secondaires de la

médication

Niveau d’autonomie• Faible niveau d’activité • au quotidien• Hospitalisations

Environnement• Chômage• Travail précaire ou insatisfaisant• Situation financière précaire• Absence de loisirs• Victime de violence

Faible qualité de viesubjective

WHOQOL Group (1993)

EEe

Rémission symptomatique, niveau de fonctionnement et QdV: l’étude SOHO (6576 patients schizophrènes)

EQ-D5

Haro et al 2014 Psychiatry Research 220: 163–169

Rémission symptomatique

Fonctionnement

Qualité de Vie(EQ-D5)

EEe

La QdV dépend de la rémission des symptômes psychotiques ainsi que du fonctionnement

40

45

50

55

60

65

70

75

80

12mo 18mo 24mo 30mo 36mo

Mean EQ-VAS score and symptomatic remission

symptomatic remission no symptomatic remission

40

45

50

55

60

65

70

75

80

12mo 18mo 24mo 30mo 36mo

Mean EQ-VAS score and functional remission

functional remission no functional remission

Haro et al 2014 Psychiatry Research 220: 163–169

Bet

ter

Qo

L

PEPP - Montréal

Programme pour les jeunes présentant un premier épisode de psychose:• Âgés entre 14-35 ans• Souffrant d’un trouble psychotique affectif ou non-affectif• N’ayant jamais été traités ou ayant été traités par antipsychotiques moins de 30 jours• Étant libre d’atteinte neurologique, d’un trouble du développement, d’un retard mental• Vivant dans la zone de desserte de l’Institut Douglas

Durant cette période, l’équipe de PEPP-Montreal offre: Une évaluation rapide (pas de liste d’attente)Un démarrage rapide du traitement par un psychiatre Une gestion de cas dynamique (assertive case management)Des interventions psychosociales multiples (psychoéducation, TCC, IPS, etc…)

Malla et al, 2013

0 3 6 9 12 18 24Mois

Évaluation des symptômes (positifs, négatifs, dépression, anxiété, etc…)

1

Réponse, rémission et issue fonctionnelle chez 207 clients PEP

0 3 6 9 12 15 18 21 24Mois

Évaluation des symptômes (positifs, négatifs, dépression, anxiété, etc…)

Cassidy et al., (2010) Schi Bull

Rémission Symptomatiques

Rémission: positifs & négatifs

56%

En rémission Symptomatiques

Rémission: symptômes positifs

84%

Issue fonctionelle à la fin du proramme clinique (2 ans)

Cassidy et al., (2010) Schi Bull

Patients symptomatiques

SOFAS>60 SOFAS<60

0%

Patients en rémission

SOFAS>60 SOFAS<60

45%

EEe

• Dans cette cohorte de 1024 patients, 53% ont fait au moins un rechute en deux ans

• La QdV tel qu’évalué par le SF-36 représentait le meilleur prédicteur de la rechute

La faible qualité de vie peut prédire le risque de rechute

Hayhurst KP et al. Eur Psychiatry 2014

3. Perspectives des clients et des familles sur la qualité de vie

Perspective des personnes schizophrènes et de leurs familles

Neasa Martin, Janvier 2009

Initiative de la Société Canadienne de Schizophrénie

Sondage national et groupes de discussion

433 participants schizophrènes

• Age moyen 37 ans

• 50% travaille à temps plein ou temps partiel

• 14-19 ans depuis le premier épisode et en moyenne 5 hospit.

570 membres de la famille et aidants naturels

• Age moyen 56 ans

• 50% mère d’une personne schizophrène

EEe

Qu’est-ce que la QdV? La perspective des patients

Perspective des patients – ce qui contribue à la QdV

1. Avoir des amis

2. Sentir le support de la famille

3. Espoir et optimisme

4. Être perçu comme une personne compétente et pouvoir travailler

5. Vivre de façon indépendante

EEe

Perspective des patients – ce qui nuit à la QdV

Perspective des patients et familles – ce qui nuit à la QdV

Neasa Martin Janvier 2009

Ce qui peut améliorer la QdV selon les patients?

1. Plus d’optimisme de la part de la famille et des équipes cliniques

2. Se sentir écouté et faire partie des décisions

3. Avoir de l’espoir concernant l’avenir

4. Avoir des outils pour faire face à l’adversité

5. Moins d’emphase sur l’observance et plus sur la QdV et le rétablissement

4. Peut-on améliorer la qualité de vie chez les personnes schizophrènes?

Facteurs pouvant négativement influencer la QdV

Dimension psychologique• Symptômes psychiatriques• Faible estime de soi• Stigma• Stratégies négatives coping• Attitude négative envers la

médication• Faibles capacités cognitives

Dimension sociale• Faible support social• Solitude• Peu de contact avec la famille

Dimension physique• Symptôme physiques• Effets secondaires de la

médication

Niveau d’autonomie• Faible niveau d’activité • au quotidien• Hospitalisations

Environnement• Chômage• Travail précaire ou insatisfaisant• Situation financière précaire• Absence de loisirs• Victime de violence

Faible qualité de viesubjective

WHOQOL Group (1993)

Les antipsychotiques typiques versus atypiques et QdV

SGA (atypiques) = aripiprazole, olanzapine, ou quetiapineFGA (typiques)= haloperidol, flupentixol

Gründer et al., (2016) Lancet Psychiatry S2215-0366

Étude QUALIFY: Devis de l’étude

PP PP

Primary outcome: QLS score total

Aripiprazole LAI (n=136)

PP (n=132)∆ 7.5

∆ 2.8

Mean difference at Week 28: 4.67 (95% CI: 0.32,9.02), p=0.036

*p<0.05 aripriprazole LAI 400 vs PP

Mean baseline QLS score: aripiprazole LAI 66.1

paliperidone palmitate 62.5

EEe EEe

Les interventions psychosociales et la qualité de vie

Vilhauer et al., Innov Clin Neurosci (2013) 10:12-22 Pitkänen et al., (2011) Perspectives in Psychiatric Care 47:167-175

Les interventions psychologiques

EEe

Activation du comportement & planification d’activités

Identifier et remettre en question les croyances dysfonctionnelles (par exemple croyances défaitistes

ou asociales)

Développer des objectifs et attentes (réalistes) concernant l’avenir

Identifier et traiter les causes silencieuses des difficultés de QdV (anxiété sociale, dépression, etc..)

EEe

EEe

Les interventions en unité d’hospitalisation

Les différents thèmes des interventions

possibles

Sentiment d’importance(empowering)

Support social

Activation du comportement

Santé physique

Pitkänen et al., (2011) Perspectives in Psychiatric Care 47:167-175

En conclusions

1. La qualité de vie et l’issue fonctionnelle représentent une cible importante des interventions pharmacologiques et psychosociales chez les personnes schizophrènes

2. Il est essentiel de s’intéresser à la perspective de la personne concernée afin de comprendre ce qui peut améliorer sa qualité de vie et ultimement son fonctionnement.

3. Il est possible d’améliorer la qualité de vie par des interventions pharmacologiques et psychosociales et d’adapter celles-ci au contexte de la personne.

Merci

Institut Douglas

Ridha Joober

Jai Shah

Jens Pruessner

Mathieu Brodeur

Mallar Chakravarti

Srividya Iyer

Institut Neurologique de Montréal

Alan Evans

Subventions: CIHR, NSERC, FRSQ, NARSAD, Sackler Foundation

Bristol-Myers Squibb, Hoffman la Roche, Otsuka/Lundbeck Alliance

Karine Anselmo

Vickie Auclair

Sophie Béland

Audrey Benoît

Michael Bodnar

Synthia Guimond

Susanna Konstowicz

Carolina Makowski

Laura Moro

PEPP-Montréal

Membres de l’équipe clinique et de

recherche

Catherine Otis

Danielle Penney

Lucile Rapin

Rachel Rosengard

Casandra Roy Gelenscer

Geneviève Sauvé

Jake Shenker

Ana Sousa

Zoey Walden

Membres du labo: