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^s.

f^^^'^

il

i

LA

PASTORALE DRAMATIQUEEN FRANCEA LA FIN DU XYI ET AU COMMENCEMENT DU XVII^ SIECLE

XjA

PASTORALE DRAMATIQUEEN FRANGEA LA FIN DU XVt ET AU COMMENCEMENT DU XVII" SIECLE

JULES MARSANANCIEN KLVE DE L'COLE NORMALE SrKIEURE

MAITRE DE CONFRENCES A LA KACULT DES LETTRES DE TOULOUSE

PARISLIBRAIRIE HACHETTE ET79,

C*

BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 79

1905

V'

*

A LA MEMOIRE DE MON PERE

Mon premier

Matre.

J.

M.

INTRODUCTION

Il

est ais

de prouver, par raison dmonstrative, quele thtre,le le

la

pastorale est, sur

plus

artificiel et le

plus monotone des genres,

plus incapable, en

consquence, de s'imposer au public.

Nous devons

la

pastorale aux anciens, crit Godard de

Beauchamps,

par scnes, nous y avons joint une action thtrale et nous en avons faitg-log-ue

nous avons divis leur

une comdie quion ne

n'a

jamais russi. Avant M. Durf,

leslui

berg-ers toient trop grossiersles

pour plaire;;

et

aprs

trouva plus assez galansle

on aima mieux

les

chercher danssurle le

roman de VAstre queil

venir les voir

thtre

, et

conclut que l'on ne peut Jouer ni

Pastor,

ni la P/iilis

de Scire,est

ni les

Bergeries de

Racan.

et

Le Pastor Jidoest rest

une production inimi-

table, ajoute Schlegel,intrt,

un phnomne du plus hautsans influence surl'art

mais

il

drama-

tique,dre...

l'on

devait en quelque manire s'y atten:

Et Alfieri, son tour

Intermdiaire entre

la tragdie et le

drame,

la pastorale est

un genre ind-

VIII

INTRODUCTION.

fini

qui, ncessairement, devait paratre insipide sur la.

scne*

Condamnation premptoire.les ar/^-uments les plus solides

Par malheur,

ne vatrois

lent rien contre les faits. Or, c'est

un

fait

que desl'art

g"enres auxquels se

ramne, d'aprs Vitruve,

drala

matique, celui-ci n'est, durant un demi-sicle, surscne franaise, nile

moins

riche, ni le

moins vivant.causes

Lede

catalog-ue dress

par Beauchamps donne un dles

menti son Discours. Je voudrais cherchercette

faveur du g^enre pastoral, indiquer ses oridivers

g"ines, les

moments de son

histoire, la nature,

enfin, de son influence.

On

a sig"nal dj quels thmes et quels pisodes nos

potes ont emprunts VArcac/ia,

VAminta ou au

Pastor,

quelle est, d'autre part, l'influence de lala

Diane dansuvresrieure,

formation d'H. d'Urf. Peut-tre, cepen-

dant, s'en est-on tenu trop exclusivement ces quelquesessentielles.Il

en est d'autres, de valeur infne fut pas moindre. Moins

mais dont

l'action

connues, elles tentent davantag^e parfois les imitateurs.Elles permettent des

emprunts que

l'on n'est pas oblig-

d'avouer, et c'est un moyen,

comme

dira Vion Dali-

bray, de g^ag-ner peu de frais la bienveillance du

public

))^.

Traduit par Rolland Brisset en

1691,

le

Pentimento Amoroso inspire jusqu'en i65o toute unesrie de pices et souvent,

nous

le

verrons, c'est l'in-

fluence de Luig'i Grotto que l'on doit reporter ce queBeauchamps, Discours surp. 365).

1.

la

comdie franaise {Recherches...,litter.

t

I,

Schlegel, Cours de

dratnat ., neuvime leon).

Alfieri, indit, cit2.

par G. Carducci, Storia

deW Aminta,

p. 112.

Prface de la

Pompe funbre,

i634.

INTRODUCTION.l'on attribue d'ordinaire celleni /etilla

IX

de Guarini. Ni VAlceo,ni la

Pompe fanehri

e Gesare Gremonino,le

Mir~

que recommanderait

nom

seul de son auteur,et

la

comdienne Isabella Andreini,

qui fournit uneni V Amorosocii

variante ingnieuse la scne

du Satyre,

Sdegno deuvresde

Bracciolini, ni surtout la Filli

Sciro,

avec toutes les polmiques qui l'ont suivie, ne sont desng-lig-eables,

ou que

l'on ait ng-liges. Etle

mme

encore,la

si

Franois de Belleforest,

premierles

adaptateur detraces de

pastorale espag-nole,il

marche sur

Montemayor,

ne faut pas oublier qu'il a

connu de prsSurtout,il

les g'log'ues

de Garcilasso.

importe d'indiquer aussi exactement que

possible l'ordre de ces imitations et de suivre, avantles

chefs-d'uvre du g"enre, les elorts

et les

ttonne-

ments des prcurseurs. Faute de quoi, certaines erreurspeuvent seg-lisser

mme

dans

les tudes les plus s-

rieuses, et l'on risque de considrerdirecte,

comme

imitation

presque originale, il

chez d'Urf ou chezet

Racan, ce qui n'est que reprise de thmes connus

de

dveloppements traditionnels.

Mais

y a autre chose. L'Italiela

et

l'Espag-ne n'ont

pas seulement donn

France quelques sujets,lui

quelques manies intellectuelles. Ellesl'amour;petitet ceci

ont rvl

est bien plus considrable.la

Dans

le

drame du Tasse, dansc'est toujours,le

trag-i-comdie dele

Guaet

rini et

de ses successeurs, dans

roman de Montedes g-enres:

mayor,

sous

la diffrence

des tempraments,il

mme

culte de l'amour

partout,la

apparat

le

grand mobile des actions humaines,

seule raison de la vie. Fadeurs de la posie bucolique,

X

INTRODUCTION.

thories

amoureuses des no-platoniciens, exaltations

des romans chevaleresques, ferveur mystique des(/is,

Ama:

la

pastorale s'empare de tout cela.

En

elle,

s'unis-

sent

la

g-alanterie italienne et la g-ravit espag-nole

toutes les sortes de pdantisme, mais toutes les sortes

de posie;

si

bien que sa pauvret apparente est faite de

richesses accumules...ait t blouie.

On comprend que

la

France

C'est pourquoi peut-tre elle n'y voit pas trs clair

tout d'abord.set

A

la suite

des traducteurs Rolland Briset

ou Gabriel Chappuys

du prolixe romancier desaccepte, peu prs

Bergeries de Julliette,

elle

au

hasard, tout ce qui s'offre elle, au del des Alpes

comme aulit,

del des Pyrnes.

Aucun

souci d'orig-ina-

ou de vraisemblance, ou de bon sens. Elle se

proccupe peine de comprendre.tout,

Le

dsir,

avant

de ne rien oublier. Et danset diffuses, et

le fatras

des uvres

complexes

faites

de morceaux disparates

accumuls sans ordre

sans lien, quel(|ues traces seuet sincre.

lement de posie frache

Cette confusion, cependant, s'claircit.

Des hommes

vont venir qui, sans cesser d'tre des potes, serontdes dramaturig-es rompus au mtier ou des observateurs plus pntrants de l'me humaine. Aussitt aprsles

premiers livres de VAstre,

le prog-rs est

sensible;

la pastorale,

qui durant une dizaine d'annes semblait

avoir perdu de son prestig-e, retrouve unvig"ueur:

regain defin

et ce n'est

dj plus la pastorale de la

du

seizime sicle.rejet

De marche

tranante toujours, elle a

au moins une partie de ses surcharges. L'in-

fluence de Guarini n'est plus aussi tyrannique.

Ouant

IN'TRODUCTIOX.

XI

celle

de Monlemayor,le

il

siiFlil

que d'UrF

ait

pris

maintenanttreux...

rle

rserv jadis Nicolas denette,cette

Mon-

De plus en plusqueet la

double ide se

dg-ag-e et s'impose,

peinture de l'amour n'a dela clart est la

valeur que sj-nrale

que

premire

loi

du

thtre. Gnralit ei clart^ la pastorale, vraiment,

A^V\^\vi

franaise

et elle

devient dramatique.qu'elleest,

Onl'tude

pourrait

mme

dire

un moment,

l'unique g-enre qui^ sur la scne franaise, se propose

du cur humain,

le seul,

par consquent, qui,

malg-r ses conventions et par la vertu de ses sujets,

puisse prtendre quelque vrit.tance,tions.

De

l

son impor-

indpendante deil

la

valeur de ses producla

De 1620 i63o, l'antique, monotone ettoutesla

semble que

tragdie la

fige,

que

la

comdie de

Renaissance, rduite ses intrig-ues italiennes, soient

deux bout de course. Seule, nous

le

verrons,

pastorale,

participant de l'une et de l'autre, peut

leur rvler une matire nouvelle qui ne s'puise pas,

prendre en

mains, contre

la

tragi-comdie aventu-

reuse, le parti des rg-les et de la raison, ouvrir toutes

larges les voies de notre thtre classique.

Tel est

le service qu'elle a

rendu

;

et c'est

aussi la

cause de sa dcadence rapide. Ce qui faisait son intrt, ce qu'elle

avait de plus profond, des g-enres rivauxle

peuvent, mieux qu'elle,il

mettre en valeur. Ds lors,artifices et ses

ne

lui reste

que ses conventions, ses

navets; elle n'arg-al

plus de raison d'tre., et les

Elle fut

le

de

doctes

doctes la mprisent. Aprs

avoir rsist la trag-i-comdie, elle se confond avecelle,

en attendant de se perdre dans l'opra.

11

tait

XII

INTRODUCTION.

dans sa destine d'aider

l'closion

de toutes

les forlui

mes de

notre thtre, et de s'effacer ensuite.

Nous

devons, au moins, un peu de reconnaissance.Je n'ai pu indiquerceici

que

la direction g-nrale

de

mouvement,bon priori.

11

ce qui, parfois, est dang-ereux.

On

se dfie, faits

droit,

de ces arrang-ements qui semblent

suffit

cependant de parcourir

la liste

des pastorales imprimes de i58o i63o pour reconnatre,

bien distinctes, coupes par des priodes de

strilit, ces

quelques priodes de production

active, etclart,

pour que se dtachent d'elles-mmes, en pleinetoutes les

uvres

directrices avec leurs cortg'es d'imi-

tations... Puis-je ajouter

qu'en tout celafaits

j'ai

cherch

seulementnerien

la

vrit

des

et

me

suis efforc de

sacrifier

aux exig-ences

d'une construction

log-ique?

.

CHAPITRE PREiMIER.QUELQUES ELEMENTS CONSTITUTIFS DE LA PASTORALE ITALIENNE.

1.

Les origines de

la

pastorale draniati([ne.

II.

Les

et les g'logues reprsentes.

Leur

diffusion.

La posie bucolique ancienne Leur caractre.

acfjuisitions successives.4)

:

Premires influences dramatiques. \JOvfeo et le Cefalo. Le rle de l'amour. Le thtre mythologique et la pastorale. B) L'influence du roman. h'Arcadia de Sannazar. Varit de ses

emprunts, et comment ces emprunts sont autant d'acquisitions pour le genre pastoral. La matire classique et la matire italienne.6') L'influence du milieu. L'idalisme. Les L'uvre du seizime sicle.

comdie

rusticali .

La pastorale dramatique franaise drive delienne;

la

pastorale ita-

chercherle rle

les orioines

de

celle-ci,

c'est

marquer l'imporvogue du genrela

tance et

deest

celle-l.

La question

obscure

et

complexe. Queles

la

nouveau s'explique d'abord parsance pour toutespeine besoin deles

enthousiasmes de

Renaisil

productions du gnie antique,

est

le dire'.

Potes, romanciers, auteurs dramati-

ques apparaissents'achvele

les hritiers

d'une ligne glorieusela

:

avec eux,Il

dveloppement de toute

posie bucolique.les

y

a,

cependant, une autre raison.sont monts sur la scne,tants,et,

Dupar

jour ola

bergers d'gloguerci-

bouche d'acteurs ou de

ont chant leurs peines devant des auditoires de choix,le

une seconde jeunesse a commenc pourposent auxquelles

genre ancien; ses

qualits de jadis ne suffisent plus; des ncessits nouvelles s'imlui,il

doit se plier.

C'en est maintenant

I

.

Cf.

F"r.

Macri-Lcone,

La

biicoUca lutina nella lelleratiii'u ilaliana del

secolo

XV;

Torino, Loescher, 1889.

2

LA PASTORALE DRAMATIQUE FRANAISE.indite,

une formetent

proprement

italienne. Ses dfenseurs le senet

merveille.ils

Tour tour

suivant les besoins

de leurla

cause,

peuvent numrer

les titres

de noblesse de

pastoleurs

raie,

ou, au contraire, clbrer sa nouveaut radieuse.ils

A

dtracteurs,crite,

opposentle

l'g-logue virgilienne, l'idylleet

de Tho-

voire

mmele

drame satyriqueils

l'autorit d'Aristote;a-t-il

Vitruve, dont--justifis

prestige s'impose, tyrannique, ne les

pas

par avance*? Mais

savent rappeler aussi, l'occale

sion^ que,

dans toute

la

posie ou

thtre antiques, on cher-

cherait vainement

une uvre quivalente VAminta ou au Passua primiera origineniente di

" tor.

Laaile

favola pastorale , crit Guarini, avvegna che in

quanto

persone introduite riconosca

la

e dall' ecloga e dalla satira degli antichi,

meno,

in

quanto

alla

forma

e ail' ordine, sisi

pu chiamar poema moderno,

essendo che nonL, alcun

truovi appresso l'aiitichit di cotai favola

esempio greco o latino^.tel

Un

largissement du genre

tait,

en

effet,

une crationde Francescode'

vritable. Guarini veut en rapporter l'honneur au Sacrijcio de

Beccari,

reprsent Ferrare,

dans:

le

palais

~

d'Est, le ii fvrier et le 4

mars i554

H primo

moderni

I.

Gnera aulem sunt scenarunicomicuni, tertium satyricum.disparique ratione:

(ria

terurn

unum qiiod dicitur Horum autem ornatus:

trag'icum, al-

sut inter se

dissiiniliet

sio'nis reliquis([ue

quod tragicae deformautur columnis, et fastiiis re^alibus rbus; coniicae autem aediKciorum privatorum

et

maenianorum

habeiit speciem, prospectusque fenestris dispositos imitatione

communiumluncis,tis

aedificiorum ralionibus; satyricae vero ornantur arboribus, spe-

montibus reliquisque agrestibus rbus in topiorum speciem deforma Le scne, 7). Cette division est devenue article de foi la prima reale, la seconda popolaresca, l'ulcrit G. B. Pigna, son di tre sorti tima seluaggia... (/ Roinanzi. i554). Cf. encore le mme passage de Vitruve cit peu prs textuellement dans lulii Caesaris Bnlengeri luliodiinensis de theatro Indisqiie scenicis libri duo, Tricassibus, Petr. Chevillot, i6o3. Cette influence rciproque de l'architecture et de la littrature(Vitruve, V,::

au seizime sicle est incontestable (voy. Muntz, Histoire de la Renaissance). En France mme, il faut noter que le traducteur de VArcadia de Sannazar, Jean Martin, a traduit aussi .l'Architecture de Serlio (i545 et sq.), le Songe de Poliphile de Culonna (i540), VArchitecture de Vitruve (lO/jy), V Architecture Voy. Un vulgarisateur, Jean Martin, par Pierre Marcel, d'Alberti (i553).

Paris, Garnier; G. Lanson,

Noie sur un passage de Vitruve {Revue de la Re-

naissance, mars-avril 1904). 2. B. Guariui, // Veralo secondo, Firenze, Giunti, iSqS.

ELEMENTS CONSTITUTIFS DE LA l'ASTOHALE ITALIENNE.che felicemente ardisse di farlofii

3

A4>ostino Beccari...;

il

quale...

s'avvis di potere cou molta Iode occapare queslo luog-o

da penna

greca o

latina

non ancor tocco,

e

regolando molti pastorali

ragionamenti sotta una forma di drammatica favola, e distingTiendola inatti

col

suo principio, mezzo

e fine

sufficiente, cole

suo nodo, col suo rivolgimento^ col suo decoronecessarie partie nelefe'

con

l'altre

nascere una cominedia, se non in quanto:

persone introdotte sono pastori

e

per questo

la

chiam

favola pastorale'...

L'auteur du Pastor a des raisons

que

nous verrons de chantern'est plus

la gloire de Beccari. Ceci, pourtant,le

absolument juste. Si Beccari,dmontre,,

premier, a donn une

pastorale dramatique vritablement constitue,loin d'tre

et la

chose esttitre

s'il

a,

peut-tre,

trouv ce

de

Favola pastorale

des uvres nombreuses, naves certes et

mdiocres, mais d'inspiration analogue, prtant des personnages identiquesles

mmes

sentiments, crites, enfin, pourlui

le

mmedj

public et dans des circonstances semblables,

avaient

marqu

la voie.

M. Alessandro d'Ancona,ffines

clans ses belles tudes sur les Orilui,

du thtrele

italien, et, aprs

avec plus d'insistance,

M. Vittorio Rossi, dans sonont sig-nalla

livre sur Giiarini et leg-log-ues

Pastor Fido,de cour, ds

dveloppement rapide dessicle".

fin

du quinzime

Les raisons mmes qui s'opposent

1.

Guarini, // Vercdo seconda.

La plupart des

histoires de la liltcratiire

italienne se contentent de rpter les paroles de Guarini (cf. Tiraboschi, Gin-

guen, etc.). 2. Alessandro d'Ancona, Origini ciel Teatro Italiano, libri tre con due ap^ pendici... Secotida edizione rioista ed accresciata; Torino, E. Loescher, 1891 Vittorio Rossi, Baitista Guarini ed il Pastor Fido, studio (2 vol. in-40).

biografico-critico con document i inediti ; Torino, E. Loescher, 1886, in-80.

M. Giosu Carducci, dans un essai trs fouill sur les prdcesseurs du Tasse {Su l'Aniinta di T. Tasso saggi tre con una pastorale inedita. di G. B. Giraldi Cinthio; Firenze, Sansoni, 1896, in-80), se refuse admettre cette parent. Aprs avoir cit quelques-unes de ces glog'ues, il les enveloppetoutes dans le

mme

mpriset

:

Tre o quattro cose queste, goffe o leggiadrepastorali dcl Tasso e del Guarino'?

:

ma

che hanno a fare conantiqueles

le

(p.

26).

L'imitation

sicle lui paraissent suffisants

italien au seizime soudaine apparition du genre pastoral, peu prs entirement constitu ds ses premires manifestations. La question, assez controverse (voy. encore un article de M. Rossi dans le

progrs gnraux du thtre

pour expliquer

la

^

4

f^A

PASTORALE DRAMATJOUE FRANAISE.dif-

aux progrs du thtre vritable aident, au contraire, leurfusion. Ni la tragdie, en effet, ni la

comdie proprement

ditesftes,

ne s'acclimatent aisment. Habitue aux splendeurs desdes cortg'es, des Reprsentations sacres,l'Italie

ne peut se pasla

sionner sincrement pour un genre de spectacle dontlittraire fait tout le prix'.

valeur

L'glogue dialog-ue

a cet

avantage d'abord d'tre courte

et

de

ne pas s'imposer trop longtemps l'attention. Sa pauvret dra-

Giorn. Star., XXXI,incontestable et

p.

io8), n'est peut-tre

qu'une cpiestion de mots. Que

ces ecloghe rappresentalive n'aient eu aucune valeur littraire, cela sembleil

est incontestable aussi

que nous Irouveroas dans YAminta,

avec des rythmes diffrents, un sentiment plus profond et plus dlicat de la beaut grecque. Il n'en est pas moins vrai que, dans ces uvres mdiocres,l'ancienne gloue apparat capable de monter sur le thtre. Quant la tra-

gdie

et

la comdie,le

seizime sicle

pastorale, en fait,

si leurs progrs contriliuent donner au public du got du mouvement dramatique et le sens du dialogue, la n'a rien de commun ni avec l'une, ni avec l'autre l prci:

sment

est sa seule raison d'tre.

M.

Carducci pourrait

citer,

l'appui de

sa thse, l'autorit de Guarini (voy. plus haut, p. 3), mais voici, par contre,

une phrase de VApologia de Giason de Nores Fin l'altro giorno rappresentavano simili favole nelle feste e ne' banchetti sotto nome di Egloghe, per dar sollazzo forse con un tal trattenimento ne' conviti, mentre si apparecchia:

vano

le tavole.

Ma

ora improvvisarnentee tragdie,

le

hanno

ridotte a

che sonoI.

le

commedie(

con cinque

atti,

maggior grandezza con una gran mollitudine

d'interlocutori...

p. 9).

iv).

Voy. Jacob Burckhardt, La civilisation en Italie au temps de lu Renais-

sance, trad. Schmitt, Paris, Pion, i885, 2 vol. in-8" (part. IV, chap.Cf. ce passage de l'Ingegncri,:

Discorso dlia Poesia rappresentativa, Fer Chiara cosa che, se le Pastorali non fossero, si potr dire poco rara, i568 meno che perduto a fatto l'uso del palco, e'n conseguenza reso disperato il fine dei poeti scenici... Le Commedie imparate, per ridicole ch'elle sappiano essere, non vengono piu apprezzate, se non quando suntuosissimi Intermcdj ed Apparati d'eccessiva spesa le rendono ragguardevoli... Le Tragdie, lasciando da canto che cosi poche se ne leggono, che non abbiano importantissimi inescusabili mancamenti, onde talora divengano anche irrapresentabili sono spettacoli maninconici... Alcuni oltra di cib, le stimano di tristo augurio, c quinci poco volentieri spendono in esse i danari e '1 tempo... Ricercano borsa reale, la quale con sano giudicio i Principi d'oggidi riserbano per la conservazione dcgli Stali loro... Rcstano adunque le Pastorali... che non incapaci di qualche gi'avit quasi tragica... patiscono acconciamente certi ridicoli comici, che ammettcndo le Vergini in palco e le Donne oneste, (piello che aile Commedie non lice, dnno luogo a nobili affetti, non disdicevoli aile Tragdie istesse; e che insomna, come mezzane fra l'una e l'altra sorte di poema diletnon abbiano tano a meraviglia altrui, sieno con i Cori, sieno senza, abbianoIntermedj... ses,

A

cette date,

il

est vrai,

d'autres causes, politiques et religieul'art

concourent entraver

le

dveloppement de

dramatique.

ELEMENTS CONSTITUTIFS DE LA PASTORALE ITALIENNE.

Olit-

matique

est

un mrite de

plus.

Ici,

point d'effort, potique ou

traire, inutile.

Avec

ses intrigues puriles, ses

personnages consuit sans

nus,

la;

banalit de ses lieux

communs, on

la

aucuneles int-

peine

elle entretient les assistants

de ce qui, en somme,

resse le plus; c'estflatterie

un cadre commode o tout peut entrer'. Lal'aise,le

surtout s'y tale

d'autant plus honte qu'elle

semble se dissimuler sous

voile de transparentes allgories.

Facile crire, facile apprendre, facile mettre en scne, peu

de

frais,

elle

s'improvise volont et s'adapte toutes les cir-

constances, simple ou somptueuse. Elle ne prtend pas suffireseule l'agrment d'une fte;

il

y a place auprs

d'elle

pour dessonrle

divertissements d'autre nature

,

mais toujours

elle

a

marqu. Les historiens se perdent vouloir dresserces

la liste

de

uvres qui furent

les

uvres d'un jour.les

Partout on en retrouve des traces dans

vingt dernires

annes du quinzime sicle"

:

la

cour romaine-^; Ferrare, ber-

1. Voy. par ex. l'glogue de Bartolomeo Cavassico reprsente au Carnaval de i5i3, et publie par V. Cian [Le rime di B. Cavassico, Bolosjna, 1894). Analyse par Carducci, p. 3i. 2. M. Rossi (p. i64) cite ces vers de Bernardo Bellincioni:

Altri fa Silve e

son cannucce in hrago,s' gi fatta

Alire eglofrhe vulgari, altri latine,Si

che Eliconaici

un

lago...

Bien entendu, je ne puisrsultats acquis.

que signaler

(juelipies proljlmes et

marquer

les

3. Sur les Egloghe et comdie reprsentes en i493 pour le mariag'e de Lucrce et de Jean Sforza, voy. Burchard, Diariiim, dif. Thuasne, Paris, Leroux, i883. En i5o9 et i5io, les trois glogues latines de Pietro Corsi (Petrus Cursius Carpiuetanus) l'auteur lui-mme attire l'attention sur l'intrt de sa tentative; :

Spectatores, advertite, obsecro,

rem novam.

Heic nunc hodie non Ecloga. non Comoedia.

Non tragaedia

siint et

non tragi-comoedia

Sed eclocomoedia

agitur...

Voy. l'analyse dans unital.,

article

de Vittorio Cian, Giorn. Slorico dlia

lett.

XI, p. 240.le pontificat

Sous

d'Innocent Mil, pro])al)lemen!, une g'log-ue satirique de

Serafino Aquilano.

del secolo

XV,

dans ses Studj snlla1

Voy. Ancona, Del secentismo nella poesia cortigiana letter. ital. de' prinii secoli , Ancona,64-65.

G. Morelli, 1884, p.

dans Luzio, F. Gonzaga ostaggio alla corte di Giiilio II, Roma, Forzani, 1877, p. 34, une citation du Mantouan Picenardi sur un repas offert par Agoslino Chigi Cenato che si fu, il duca volse audare a casa, abench dreto cena si doveva recitare una bella esrloffa.

Voy.

enln,

:

,

6

LA PASTORALE DRAMATIQUE FRANAISE(le l'art

ceau

dramatique

italien,

pays d'lection de

la

pastorale';

Mantoue, passionne pour les divertissementsle

du thtre depuisde got

mariag-e d'Isabelle d'Est et de Franois 11'. Toutes les printoutes les villes rivalisent

cipauts,

de richessele

et

:

Milan, qui a dploy un faste incroyable poivr

Paradiso dele

Bernardo Bellincioni^; Urbin, qui donnera, en i5o6,Baldassare Castiglione''^

Tirsi de

;

Bolog-ne, Venise-, Florence, qui^ sous

l'influence des Mdicis, se dtache de plus en plus de ses ancien-

nes crmonies populaires;

la Sicile,

o

les

farces surtout

1.

Voy. G'mlio Bevion La bibliotheca Estense,

p la coltura

Fevrarese ai

teinpi del diica Ercole I (i47i-i5o5), Torino, Loescher, i()o3.

C'est Her-

cule

I

que Niccolo da Correggio a adress sa Fabula di Cphalo; en prsence

toujours de la famille ducale, seront donns, tour tour, VEgl, le Sacrificio, VAretiisa, le Sfovtunato que suivra de prs le succs triomphal de VAminta.

Mais avant que soit constitu le genre nouveau, les glogues dialogues tiennent dans les ftes leur rle accoutum. Pour le carnaval de i5o8 on en prpare trois, d'Ercole Pio, d'Antonio dall' Organo, de Tebaldeo (voy. Rossip. 172).2.

Voy. Luzio-Renier, La coltura

e

le

velacioui letter. d'isahella

d'Eftfi'

(Gior. Stor.,

XXXIX, XL

i'Orfeo; l'auteur de la princes, et c'est Franois

Mantoue dj a Profjne, Gregorio Cornaro a t unet

XLII).

A

t

reprsent

familier de ses

II

qui accueille Serafino Aquilano aprs sa rupture

avec

le

cardinal Ascanio Sforza (voy.

8 juillet 1493, Niccolo da Corrcggio envoie lsa])elle ove Mopso e Daphni pastori parlano insieme... Le 2l\

un envoi de Galeotto(Rossi, p.belle1

les lettres intressantes de Franois II et d'Isa(D'Ancona, // teatro Mantovano ml secolo XVI, 2e appendice de ses Origini...), et, dans Torraca, // ieatro italiano dei secoli XUI, XIV, XV, Firenze, Sansoni, i885, une Rappresentazione allegnrica di Serajino deir

71-172).

Voy.

del Carretto,

Le D'Ancona, Del seceulismo...). una egloga pastorale novembre 1498, c'est una belzereta inserta in una egloga... w

Aqnila.3.

Bellincioni,,

Rime,

dit.

Fanfani, Bologna, Romagnoli,

1878.

lincioni

galement, une

Egloga pastorale o

devisent et discutent

Be Beld'amour

Silvano, Piride, Alfeo, etc. [id.).Batrice,

femme de Ludovicle

part rpandrecrtaire, di

Ici encore, une fille d'Hercule d'Est, More, semble avoir contribu pour une large got du thtre Era la corte sua, dit Calmela son sele:

ed esercizio copiosa, e soprattutto di musici e poli, da' quali, oltre l'altre composizioni, mai non passava niese che da loro o Egloga, o Tragedia, o Commedia, o altro nuovo speltacolo e rappresentazione non si aspettasse (cit par d'Ancona, Del secentismo..., p. 168). Il

uomini

in qualsivoglia virt

faut remarquer la place

genres antiques,

et

sur

le

que Calmeta rserve l'glogue ct des deux mme plan; on dira plus lard la Tragdie, la Co:

mdie4. 5.

et la Pastorale.

Publi par Torraca, // teatro italiano... (i885).

Voy. Ancona, Origini...,

t.

II, p.

m

et

suiv.

ELEMENTS CONSTITUTIFS DE LA PASTORALE ITALIENNE.

7

sont en honneur, mais qui possde Sannazar'. Auprs des potes

de mtier qui, de cour en cour, ofYrent leurs productions,la

des g-rands seig-neurs ambitionnent

gloire:

de

la

posie;

le

o-enre allgorique leur convient merveille

il

suffit d'avoir

quel-

que lg-anceet

d'esprit, de tourner avec souplesse les vers galantsla banalit.

de ne pas redouter

Csar Gonzague collabore au

Tirsi : Le Tasse clbre en quatre madrigaux enthousiastes une

Enone,

favola pastorale

,

laquelle Ferdinand

II,

premier ducfils,

deGuastalla, travaille encore en iSgS^, et

Csar

II,

son

suivra

son exemple dans sa Piagha felice.

Il

n'est pas jusqu'au

pome

chevaleresque qui atteste cette faveur de l'glogue. Arrivs dans

un chteau bti en pleine montagne,

le

Roland

et la

Bradamantes'em-

de Cassio da Narni assistent avec leurs compagnons une reprsentation dansle

got de

la

cour de Ferrare

:

et l'auteur

presse de nous donner en entier l'uvre qui leur est offerte.matire,

La

comme

toujours, en est assez mince

:

le

berger Linest

cisco, pris

du dsir d'aller vivre auprs des puissants,le

dtourn

de son projet par

berger Scabbia. C'est peu de chose, mais celaet

peut prter des tirades ingnieuses

de riches dveloppe-

ments. Le public

le

plus exigeant n'enni

demande pas davantage 3.la varit

Ce

n'est,

en

effet,

par

la

complexit ni par

que

peuvent se signaler ces petites pices. Elles sont d'un usage tropcourant pourqu'il soit facile

de

les

renouveler;

:

d'ailleurs,

on

sela

plat les retrouver toujours identiques

venant d'ordinaire

suite de

comdies plus touffues, ou faisant partie d'un ensembleelles

de divertissements,la fin

doivent tre un repos pour

l'esprit.

A

du quinzime

sicle surtout,

on y chercherait vainement

1.

Torraca, Il teafro ifaliano... donne une

Farsa

nazar, reprsente en l'honneur de la prise de Grenade.cites par2.

allgorique de San-

Autres

g'lof^'ues

Ancona, Origini...,Poelica,

t.

II,

Il Patrizi,

lib. I,

note de la p. Gg. dice che fa meraviglia a chi l'ascolta;al

ma

da certe lettere indite del Manfreditela

Gonzaga... parrebbe che

la

dispositione,

dair

Enone

fosse appunto del Patrizzi e solo la versificazione del Gon-

zaga.

L'Ingegneri...

anch" egli

la

dice meravigliosa. Xouostante tante lodie forse

de' contemporanei,

rimase inedita,II, p. l\io,

non

fu

mai

rappresentata...

(Ancona, Origini...,3.

note).

da Este

del Danese di Cassio da Xarni all Illustro Donno Hercule Signore; Ferrare, i52i (liv. I, ch. ix). Cf., dans le roman espagnol Question de anior, l'glogue imite de l'italien.siio

La morte

8

LA PASTORALE DRAMATIOUR FRANAISE.le

des traces d'un souci dramatique;disparatre, et,

plus grandil

nombre

a

d

parmi

celles qui survivent,

est malaisla

souvent

de dterminer lesquelles eurent l'honneur de

reprsentation.

Pour monter surSannazar,celle

le

thtre, l'ancienne g-log-ue classique, celle deVirg'ile, si

de

Ton

veut, n'a pas. cru ncessaire de

se transformer. Elle est dialog'ue, et cela suffit.

A

ses person-

nages on ne demande pas d'agir, mais de broder sur quelques

thmes ternels des variations prvueset les

:

dbats surla

les

dangers

charmes de l'amour, sur

les

agrments de

vie

paysanne

opposs aux tracas des cours... Deux interlocuteurs, voil pourl'ordinaire, l'un dvor par la passion, l'autre confident attendriet

bon

conseilleret Fileno

:

Silvano et Ircano chez Serafino Aquilano,

Aminta

chez Baldassare Taccone', Alexio et Daphnisi

chez Galeotto del Caretto. Parfois,

le

pote tient conclure,;

un troisime berger prenddonn d'entrevoirla

la

parole son tour'

rarement

il

est

ninfa, cause de tant d'angoisses.se

La forme, mme,tive^,

modifiera plus

vite;

quela

le

fonds. Le

rythme, chez certains, semblera s'assouplir

terzina primila

sous l'influence peut-tre de VOrfeo. cdera

place la

l'ottava;

une canzonetta ou quelqu'une de ces barzellette solliciterles

mode viendravritable.

applaudissements"^; mais, de long-

temps, rien n'apparat qui ressemble l'esquisse d'une action

Les personnages cherchent-ils

mmeetle

se convaincrele

l'un l'autre?Il

Chacun chante pourdite

soi,

pour

public.:

arrive pourtant qu'il faille enrichir

spectacle

l'glogueelle s'ac-

proprement

demeurera toujours aussi simple, maisdistincts, lis tant bien

compagnera d'pisodes

que mal,

et

pro-

pres seulement permettre des effets de mise en scne et des

dveloppements nouveaux;

il

y a juxtaposition, non pas com-

1.

Ecloga pastorale rappvesentata

nel convinio delV Illustr.

pul)lH'-e par Bariola, L'afteoite Adorno... (Rossi, Battista Gnar-ini..., p. lOG, e le rime di B. T., Firenze, i884)2. Autre glogue de Galeotto del Carretto, cite par Bartoli, / mss. Ital. dlia Nationale di Firenze, Firenze, 1884, et analyse par Renier dans le

Sif/n.

lo.

Gioivi. Slor. d. Lelt. liai., VI.3.

4.(lu

Voy. la prface de M. Scherillo son dition de VArcadia, chap. xii. L'ottava est aussi le mtre Chez Bernardo Bellincioni, par exemple.

Tir si.

ELEMENTS CONSTITUTIFS DE LA PASTORALE ITALIENNE.position.

)

Une

lettre

de Floriano Dulfo da Gonzag'a, publie par;

M. d'Ancona', est significative cet gard elle est adresse au marquis de Mantoue et raconte une reprsentation donne, eni/jgG,

Bologne, par

le

protonotaire apostolique Antonio Ga-

leazzo Bentivoglio. Sur la beaut du thtre, Floriano Dulfo netarit pas.

Quant

la

pice elle-mme,

elle

se divise en

cinq

actes.

C'est tout d'abord, aprs,

lo

annuntiatore del festivol'astrologie avec

arg-umento

un mathmaticien qui disserte sur;

un de

ses disciples

et

comme un

frate passe

par

l,

la dis-

cussion s'envenime, les propos deviennent plus aigres, sans cesser d'tre doctes et substantiels . Les devoirs

du berger,

les

ennuis de

la vieillesse, les

inconvnients de

la ccit,

autant dele,

dbats pour remplir

les actes

suivants et faire attendre

cin-

quime,eglogaet:

qui constituera,

enfin,

la

ultima comedia

overo

un gant dontil

l'astrologue avait annonc la naissance

dont, vrai dire,enlve une

avait t, par la suite, quelque

peu ques-

tion,

nymphe

qui chantait en cueillant des fleurs(

avec un berger-citharde

pastore citaredo )le

;

l'amant gmitla belle est

commedlivre

il

convient, ses amis poursuiventhistoire, certes, toute simple,

monstre,

:

quoiquelale

l'on puisse y

noter

le

germe d'un des pisodesla,

favoris de!

pastorale

;

mais que de trouvailles ingnieusessurelle,

Quand

gantsito

s'est jet

jeune

fille,

per

lale

amenitade del

pigliando

reposso

chantait prcisment

rapt de Proserpine;la

on ne

saurait avoir plus d'-propos.

Le berger qui

ramne,

pas-

tore barbato, vestito a la turchesca , n'est pasnaire... Notez, d'ailleurs,

un berger ordi-

que ces merveilles ne sont encore que

l'corce de l'uvre. El nociuolo et lo senso alegorico , ajoute

Floriano Dulfo,effet,

lasso a voi interpretare

.

Les allusions, en

sont continuelles dans les glogues de cour. Je ne parle

pas de celles seulement qui, faites l'occasion d'un mariage, doivent clbrer les vertus ou la noblesse des poux. Mais ce serait

de l'ingratitude, de

la

part du pote-courtisan, ce serait de la

ma-

ladresse surtout d'oublier celui qui son

uvre

doit tout son

I.

cle

Ancona, La vappresentazione drainmatica del cnntado Toscano, du Giorn. Sfor., V, reproduit en appendice dans les Origini...

arti-

10clat.le

LA PASTORALE DRAMATIQUE FRANAISE.

On

a peine le plus souvent saisir, ;

si

grande distance,cette g-log-ueil

sens cach de ces inventions bizarres

pour;

en

particulier, lel'on n'ait

problme parat

insoln])le

'

mais

est rare

que

pas se poser de question de ce genreet

et

que

le

pote

au moins

son Mcne ne figurent pas parmi'les acteurs'. Parde cour se rattache la tradition

l, l'g-logue

de l'g-logue anti-

que, celle de Virgile sinon de Tlicocrite^.

Parquele

l

aussi, elle

annonce

la

pastorale, qui n'en sera gure

dveloppement. Ecrits en vue d'unle

public

de

choix,

VAminfa,

Pastor

et les

imitations innombrables continueront,

en y apportant d'ailleurs bien des grces nouvelles, clbrercette existence dlicieusement artificielle des bergers de cour,

nous montrer l'amant ing-nu perdant

la vie

par mtaphore,

la

nymphefois,

enleve par

le

g-ant

ou

le

satyre cruel, tue quelquefallt-il

mais toujours rendue celui qu'elle aime,

pour son

salut

une intervention divine. Car l'amour enl le

dfinitive doit tre;

vainqueur. Ce serale

thme ternel dephilosophie:

la

pastorale

c'en sera

charme,

et

souvent

la

la

souverainet de l'amour,

ses droits absolus, sa noblesse qui lve toutes les mes,disait dj le vieux BelUncioni:

comme

Amore un cor villan sa far gontile, E chi biasima sempre ai" il cor vile'1

'...

Les premiers essais du thtre profanepirer

italien

ne peuvent inslui

l'glogue

le

dsir d'largir sa

matire, ni surtout

le g-ant reprsenterait le pape essaie de le rsoudre 1. M. d'Ancona Alexandre, ou encore Charles Vlll... Quant au berg-er velu la turque, un:

aeulaller2.

du marquis de Mantouechercher bienJolaloin.

avait

pour surnomlui-mme,et

Il

Turco

...

Peut-tre est-ce

du Tivsi

est Castig'lioue

Danieta, Gonzaguc.etc.

(\.

les

interprtations allgoriques de3.

VAminta, du Pastor,

logue d'Alceste

Selon Hortis, Sliidi nelle opre latine del Boccacio, Trieste, 1879, le diaet d'Achate dans VAmeto reprsenterait allgoriquement unfaite

dbat entre l'glogue virgilienne, touteThocrite, peinture directe de4.la vie

de sous-entendus,

et l'idylle

de

des champs.

Eglogue pour

le

conite de Cajazza. Edit. P'anlani, 11, 220 sq.

ELEMENTS CONSTITUTIFS DE LA PASTORALE ITALIENNE.en donnerles

I I

moyens. Pas plus dans

les

adaptations de

la

co-

mdie

latine

que dans ces tableaux d'histoire dialog-ue deil

Carlo ou Marcellino Verardi,

n'y a, pour

elle,

rien prendre.

Au nombreclaire,

de ces pices pourtant qui, de faon plus ou moinsla

annoncent

rsurrection des formes d'art antiques,

quelques-unes sont d'un caractre plus spontan, on pourrait

presque

dire,

malg-r

le

choix des

sujets,

d'un caractre plus

national, sortant assez librement des cadres de la tragdie pro-

prement

dite, destines

par cela

mme

demeurer pour longindcis,les

temps des

tentalives

isoles.

De genreles dfinir:

auteurs

mmes

sont embarrasss pour

Nonavouele

vi

do qiiesta

g-i

por comedia,

prolog-ue

du Cefalo,nonse

Ch

in tiitto

observa

il

modocoro.

loro

;

Non

vog'lio la crediate tragedia,gli vedreteil

Se ben de Ninfe

Fabula olo ve la

historia quale ellae

si sia,;

dono,

non per precio d'orol'argomentoil

Di quel che

seg-ue,

questo;

Silencio tutti, e intendereti

resto'...

Niccol da Correg-g-io semble s'excuser de son audace. Or,trt

l'in-

de ces drames mytholog-iques n'est pas ailleursils

:

l'an-

tiquit,la

empruntent ceils

qu'il

est essentiel

de

lui

emprunter,

peinture de l'amour;l'ancien

conservent, d'autre part, un peu deset,

liberts de

thtre,

maladroits

encore,

raides

de

construction, emptrs de lyrisme, d'enfantillag-es et de pdanterie,ils

paraissent, malgr tout, sincres et vivants.c'est

Ce sont eux,tique".

VOrfeo,le

le

Cefalo,

la

Danae, quela

l'on a

donns souvent commeIci

point de dpart de

pastorale dramales analog-ies:

encore^

il

ne faut pas s'exagrer

la

article de M. Luzio-Renicr dans le XXII. 2. Il Poliziano fu une di quelli che ardirono portar le Rappresentazioni pastorali fuori dlia liaea ove furon condotte da Greci e Latini... (Gravina, Dlia ragion poetica, 1, II, par. xxii). De mme, Crescimbeni [Istoria dlia1.

Sur Niccolo da Correg'io, voyez unt.

Giorn. Stor.,

XXI

et

12

LA PASTORALE DRAMATIQUE FRANAISE.

pastorale vritable sera beaucoup plus simple de contours, plus

humaine en son fonds;encombrante,etil

la

mythologie, surtout, y sera moins

serait trange enfin de voir

une formenouveau.

d'art

demeurer engourdie pendant une cinquantaine d'annes pourrveiller

se

ensuite

brusquement sous:

un

aspect

La

parent cependant est vidente

ces pices mythologiques, aussi,

sont des pices de circonstance; elles s'adressent au public que

charmenten 1471jouis,il

les

glogues et partagent avec

elles ses

applaudisse-

ments. \JOrfeo, vrai dire, est un peu plus ancien, mais, critet,s'il

faut en croire le pote, dans l'espace dela

deux

reparatra rajeuni sur

scne de Ferrare

'

;

(juant auet l'on

Cefalo, c'est une des pices favorites d'Isabelle d'Est

y

peut admirer toutes

les

lgances chres

la

cour d'Hercule

P"".

Les unes

et les

autres, d'ailleurs,

doivent peu de chose aucelle

thtre antique.

La

facture;

estelles

reste

peu prs deles

la

sacra rappresentazione

en ont conserv

habitudes,

et certaines transpositions

sont curieuses. Mercure, dans la prel'ordi-

mire version de VOrfeo, tient l'emploi de l'ange charg naire de V Annunziazione ;le

dcor multiple prsente ,

la fois le

sjour de Pluton et de

Proserpine

la

plaine

et

le

ruisseau

auprs duquel Eurydice doit perdresans doute,la

la vie^ et,le

au fond du thtre

montagne o apparatra

chanteur divin, clla fte".

brant

le

cardinal de

Mantoue organisateur de 'D'

Dans

ce

imlcjav poesia),

Gin2;'uen, Mazzoleni

Italia,

Berg-amo,

Bolis,

1888).

par ex.) insistent surtout sur les

{La poesia drammatica pasiorale in Les historiens plus rcents (Carducci, diffrences qui loignent la pastorale duditions

drame mythologique. 1. Cf. les deux versions dansFirenze, i863; dit.la

les

du Poliziano

:

dit.

Carducci,

On sait que actus primus pastoricus, actus secunseconde version est en cinq actes dus nymphas habet, actus tertius heroicus, actus quartus necromanticus, actus ultimus bacchanalisTommasoCasini, Firenze, Sansoni, i885.().il

2.

Orfeo, cantando sopra

monte

in

su

la

lira e'

scguenti versi latini

(li

(piali

a proposito di messer Baccio Ugolino, attore di detta persona d' Orleo,in

sonociel

dlia

onore del cardinale Mantuano), fu interrotto da un Pastore nunciatore morte di Euridice [Lafavola di Orfeo). Cette montagne remplace le dont la reprsentation tait inutile avec ce sujet, mais que l'on verra s'en-

tr'ouvrir dans le

Timone du Fioyardo,

et se dployer, resplendissant d'toiles,

dans

la

Danae de Baldassare Taccone

(voy.

Ancona, Origini,

II,

p. 3 et

suiv.).

LMENTS CONSTITUTIFS DE LA PASTORALE ITALIENNE.dcor,l'intrigue se

l3

droule,

toute simple, sans

apprts,

sans

mme un soupon d'habile( dramatique; mais au moins y a-t-il une fable. Les personnages se contentent de chanter devant lepublic, mais ce sont des personnages qui vivent, qui sentent et

qui souffrent,

et

dont chacun, en somme, peut comprendre

les

douleurs. L'amour n'est plus seulement un prtexte dvelop-

pements harmonieux, sems de froides lgancesqu'il

:

on pressentbeaucoup.

pourra devenir un ressort dramatique;le

et cela est

Avec

Cefalo^ la

fable,

toujours encombre d'intermdesElle a

lyriques', s'humanise encore.la jalousie, c'esl--dire la

pour objet

la

peinture dela

peinture de l'amour sous sa forme

plus scniqueet

:

et cette jalousie n'est

pas une jalousie tragiquela

forcene, hors

de

la

nature

commune. Les hros dela lgretle

lgende se rapprochent de nous; quelques nuances permettraient

presque de parler de psychologiele

:

de Cefalo qui eut

tort

de douter dele

celle

qu'il

aime,

dpit

amoureux dontl'action,

Procri est sur

point d'tre victime. Et surtout, ce sont lesles

sentiments qui dterminent

pripties

de

Diane

n'intervenant vraiment qu'au dernier acte,tion est indispensable

quand son intervenla

pour rendrevenu de

la vie

jeune femme,:

et

quand

le

moment

est

tirer la

morale de l'aventure

Tu, Procri, non sarai mai pi gelosa.

N

Cefal

fia

mai

d'allra iniiamorato.

Voil de bons conseils de sagesse pratique, l'usage des hros seulement.

et

qui ne sont pas

Cette importance donne l'amour, cette faon dela

le

porter

scne, plus simple et plus gnral, cette responsabilit des

acteurs, cette sincrit nave,

mmeici

inconscientes ou invo-

lontaires encore, les qualits qui sont

en germe ne seront pas

perdues. Le thtre rgulier ne

sait pas,

ou ne peut pas en

faire

son

profit.

De

plus en plus, la tragdie se cantonne en une sche

1

.

L'glogue de Coridone Tirsi termine second. Au troisime, Au quatrime, danse des Faunes, cum strani disusati istrumenti. lamentation des muses, danse des Nymphes au cinquime.et(jui

Le chur des nymphes en prsence de l'Aurore, le et

la fin

du premier

acte.la

la

et la

l4imilatioii

LA PASTORALE DRAMATIQUE FRANAISE.

de

l'art

antique.

En

attendant

la

tyrannie d'Aristote,

Snque

rg-ne en matre.

Avec son souci du thtre moralisa-

teur, Giraldi Cinzio n'hsite pas placer le pote latin au-dessus

d'Euripide',

et

quand

il

s'abandonne son gnie personnel, ceet

sont les horreurs brutales de VOrbecchetout cela,il

de

la

Selene

:

dans

n'y a place pour rien d'humain.

L'amour

n'est digne

de

la

scne tragique que lorsque les amants s'appellent Ene etet

Didon, Antoine

Cloptre,

ou encore Canaceil il

et

Macare'.

Chez descaractre

tres de

moindre envergure,qu'elle doit viter;et

pourrait prsenter unlui arriverait

commun

mme

de

toucher au comique,est

chacun

sait

que

la

sparation des genres

une

loi

fondamentale.les

La pastorale n'aura paschane

mmesou,

soucis; elle n'est pas enc'estl

par une

tradition,

plutt,

sa

traditions'enri-

mme. L'glogue auHquequ'elle lui rendra, le

restera fidle elle-mme, en

chissant de cette matire dont la tragdie ne veut pas encore et

moment

venu.

Du

jour o

elle

songe

se dvelopper, c'est ces vieilles pices qu'elle revient tout natu-

rellement-.favoris;

Elle leur

emprunte quelques-uns dedcoupe en actes leur cole,,et

ses

pisodeset

comme

elles, elle se

en scnes,

s'entoure du prestige du dcor;voir dans l'amour

elle

apprend

un principe

d'action, le principe de toutes les

actions humaines. Elle s'exercera dmler les finesses de la

passion

et,

parfois, n'en redouteraelle se glorifiera

mme

pas

les vulgarits.

Unet

jour viendra o

d'avoir fondu en elle le tragi-

que

et le''^.

comique, d'tre par

l

mme un

genre tout original

vivant

1

.

gdie.

Discorso ovvero letlera Intorno al comporre dlie coinmedie e dlie traCf. P. Bilancini, G. B. Giraldi e la trag. ital. nel secolo XVI,

Aquila, 1890.2.

La Cance de Sperone Speroni. Voy.

la pice et les

polmiques qu'elle aest,

souleves, dans l'dition de Venise, 1740, t. IV. 3. Il ne faut pas oublier, d'ailleurs, que la pastorale dramaticpetout,

avant

une production ferraraise. Or, c'est pour la cour de Ferrare qu'a t compos le Cefalo et que VOrfeo a t mis en tragdie. \JEgl de G. B. Giraldi, enfin, qui prcde de neuf ans le Sacrijicio de Beccari marque assez nettement le passag-e de l'un l'autre genre. En France surtout nous verrons les deux formes dramatiques se pntrer intimement. 4. E notevole la corrispondenza Ira il principio ed il fine di ([uesto primo

ELEMENTS CONSTITUTIFS DE LA PASTORALE ITALIENNE.Il

10

s'coulera toutefois plus d'un demi-sicle avant que la pas-

torale

dramatique commence prendre conscience de son but,et

de ses moyens

de sa

dig-nit.

Vainement:

la

Danae de Baldaslui-mme, quandle

sare Taccone succde au Cefaloelle est loinil

comme

qualits dramatiques,

de marquer un prog-rs,

et l'auteur

crit une glog-ne de cour, ne cherche pas larg-ir

cadre

traditionnel.

En i5o6 encore,la

il

semble quesoit

la seule

proccupa-

tion de Castig-lione,

dans son Tirsi

de n'oublier aucun des

grands personnag-es de

cour des Montefellro. Quant song-er11

simplement animer

le

dialogue...

est

peu de rpliques qui

ne soient de vritables discours. Jola et Tirsi s'coutent l'unl'autre avec

une patience admirable

;

ils

ne prennent gure;

la

parole pour dbiter moins de cinquante vers

la

premire tirade modeste,l'g-lo-

de Jola en compte cent trente-six'. Timide

et

y

g-ue hsite

adopter

la structure

du thtrede

rgulier.

Une

des

premires sans doute,

VAmaranta de G.il

B. Casalio, sera divila faire

se en cinq actes, mais

est difficile

remonter au

del de i520^.

Il

semble d'ailleurs que l'influence de VArcadia doive s'exercerle

en une direction oppose. Avec Sannazar,

genre pastoral,

avant de devenir un genre vraiment dramatique, s'affirme une

corso dlia rinnovata arle scenica

:

Ira

VOrfeo da un pastorale

lato,

che ha

la

formache,

esterna di sacra rappresenta: ioiie,

ma

insieme cd eroico, popolared'ail' altra,

ed aulioo ed abbracciaallarg-andoi

la terra e l'iuferno,i>-r

ed

il

Pastor Jido

il

cjuadro e

intcnti dell'

A milita,

ne' pastori

caratteri

ciato

come

umani pi generali c costanti^ e nelle selve le a Egloga od al pi come Favola pastorale,felice

Arcadi simbolcg-ia corti; e che, cominsi

Hnisce

coll'i

essere

una

Tragi-commedia, nella qualecon

ardimento,

confodono

generi

pi in teorica disparali,vita, si

ma

pi nella realt accosti fra loro, ed ove,

latrecciano insieme lutte le varie passioni del cuore

del

i[\-ji

del secolop. 57G).

XVI

r alba ancora un po' nebulosa ed incerta..., il il meriggio caldo e luminoso... (Ancona, Origini...,

come nella umano. Ma VOrfeo Pastor Jldo dlia finet.

II,

1 Il y a bien un semblant d'action dans les deux Comdie d'Alessandro Caperano, dont M. Carducci {Predecenti del/' Aminta, p. 40 cite une dition de i5o8; mais elles ne prsentent pas la coupe en actes et en scnes. 2. L'dition de Venise est de i538. Sur la date, tout fait incertaine, de la.

reprsentation, voyez Rossi,

liv. cit.,

p. 174.

l6fois et

LA PASTORALE DRAMATIQUE FRANAISE.

de plus

tel

que Boccaceici,

l'avait

compris

:

roman ml de prose

de vers. Et

les

pisodes demeurent plus cpie jamais dis-

tinclSj

sans autre unit qu'une certaine harmonie de teintes. Lesla fle

confidences d'Ergasto, les cliants de Montano,les joutes

de Paies,

potiques des bergers, les regrets de Sincero, les jeuxla

en l'honneur de Massilia,

mort de

Phvlli, autant d'gloguesles

simplement juxtaposes que joig^nonl tant bien que malintermdiaires. D'un bout l'autre de l'uvre, Sincero

proses

demeure

avec sa mlancolie gmissante, sorte de chef de chur qui encourag"e ses

compagnons

se lamenter

;

et c'est le contraire exacte-

ment d'une composition dramatique. On ne peut dire non plus que la peinture de l'amourbeaucoup ensincrit.

ait

gag-n

L'originalit,

ou du moins l'invention,

chez Sannazar, se rduit peu de chose.

Au

premier aspect, son;

uvre

italienne et latine risque de faire illusion

on y gote uneil

certaine langueur, coupe par des clats de violence. Tantt

apparat une

me

rude^ et tantt sa posie s'adoucit en des fadeurs

courtisanesques ( Sed

me formosae dterrent jussales

puellae...

^

),

ou se teinte d'une mlancolie quela terre

l'on croirait personnelle.

Sur

de Naples, surl'exil

pays o s'coulrent ses jeunes anneslui ail

et

que

courageusement acceptsurtout,;

rendus plus chers, sur

sa

campagne de Mergellinafaite

a des vers dont la grce

semble

de franchise ingnue

et l'on revoit, les lire, cette

mer

scintillant

aux rayons de lune, ces chemins envahis d'herbe

feutre, ces coteaux brls de soleil, ces tranesvallons...

d'ombre dans

les

Sa vie

mme

est artistement

compose: une jeunesseson amour pourdontil

d'enthousiasme guerrier, puis sa

fidlit simple,

une mre

si

tt disparue, et cette figure potique

a dit

un

mot seulement... La tentation est grande de dcouvrir en lui un moderne du mot". Ce serait pourtant une illusion. Dans son Arcadia, comme dans ses posies latines, Sannazar demeure toujours Actiuslyrique, au sens

Sincerus, de l'Acadmie du Pontano,

le lettr

dont

l'esprit est

1.

Elgies,

II,

i.:

Voy. la biographie romanesque de Trverret Paris, HacheUe, 1877, t. I, p. 33o.2.

l'Italie

au seizime

sicle,

ELEMENTS CONSTITUTIFS DE LAavant tout

l'ASTI'.ALE

ITALIENNE.

I7

un

ricco

emporio

di frasi, di sentenze, di eleg-anze....

forme vuote^'lorifieut

e staccate

da ogni contenuto'les

Les humanistes se

de ressemblerdesimag-es

uns aux autres, de reproduire ter-

nellement

analogues des

transmettent des formules, des lieuxvellent pas l'usage,

mmes modles. Ils se communs qui ne se renouTout plein duSannazar deprennent

mais qui s'amplifient".il

souvenir de ses lectures rcentes,

est impossible

s'en dg-ag-er. Qu'il n'y ait pas dans son

uvre un sentiment

sincre, ce serait trop dire; mais ces sentiments sincres

eux-mmes une expression convenue. Spontanment ils se travestissent, pour s'ennoblir. Son patriotisme est fait de rminiscenceslatines;il

s'enthousiasme pouril

la

grandeur la

italienne, la faon

de Tite-Live;

demande pardonla

Rome

d'Auguste de sa:

haine vigoureuse pour

Rome

d'Alexandre VI

Parce tamen, veneranda parens,

si

justa seciitus

Signa sub Alfonso; rex erat

ille

meus

'.

Il

ne peut

s'affliger sur les

malheurs du temps, sans se voir sous

l'aspect de Mlibe fuyant le

champ dela

ses anctres.

Il

exprime

sa foi en des termes qui ne surprendraient pas

un contemporain

de VirgileClaudien;

;

il

comprend

la

nature

faon de Thocrite et deCatulle,

il

aime tour

tour

comme

comme Ovidele

et

comme On ala

Roccace.

dploy beaucoup d'ingniosit pour dcouvrirfanciulla de alto

nom

de

[)icciola

sangue discesa

.

dont lui-mme

nous

dit,

sans prciser davantage, avoir t amoureux. Le

roman

mis en circulation

par son premier biographe^ a

fait

fortune;

1.

DeINI.

Sanclis, Lett. ital.,

I,

368.

2.

Scherillo (Introduction son dition de

1888, p. cxxxvi et suiv.) cite

YArcadia, Torino, Locscher, un exemple curieux de ce procd. \h\ simple

vers de Virg-ile

(

Nuper me

in littore vidi,

Clum placidum ventis staret marc,II,

Egl.,

II, 2,")),

repris par Calpurnius

{EgL,

88) et par Ovide {Melam.,

III,

200) devient avec Boccaceet fournit touttille3.

un

rcit

une sorte de lieu commun {Ninf. Jiesolano, III, 28) Sannazar (8" prose) et Marguerite de Navarre {Gen-

invention d'an gentilhomme

4.

pour manifester ses amours une reine...), Epigr., I, 4. Vita di m. J. S. descritia da G. B. Crispa da Gallipoli. Voy. l'dit.

de 1723.

2

lO

LA PASTORALE DRAMAQUE FRANAISE.est

Carmosina Bonifacio

devenue

la

Batrice du jeune pote;

sans prendre garde aux confusions singulires qui pourraientfaire

rvoquer en doute

les

paroles de Crispo, on a bti, d'aprs

quelques pices latines o personne n'est nomm', une potiquehistoire

d'amour repouss,le

presque trag-ique,

et

l'on a

voulu

retrouver dans VArcadia

souvenir de la vierge aime.soit

Mmede

en admettant que tout neCrispo,il

pas lgende dans

le

rcit

est difficile

de dcouvrir des allusions prcises, une

motion vritable. Quelques tableaux, sans doute, sont d'un potedlicat:

Moy

qui ne dsiroye moins cong-noistre cette Amartliala

que i'auoye est curieux d'escouter

chson amoureuse, tenoye

songneusementgires..;

les

yeux

fichez sus les visages de ces ieunes ber-

en

les

contplant toutes l'une aprs l'autre, i'en aduisaybelle et

une merueilleusemt

de bne grce, qui porloit sus ses

bldz cheueux un beau coeuure-chief d'un crespe dly soubzlequel

deux yeux estincellans respldissoyt aussipar nuyt qudle ciel

fort

que

claires

estoilles

est

pur

et serain

Le uisage delonguet que

ceste berg-ire estoit de

forme perfaicte, un

petit plus

rond, entremesl d'une blancheur n fade ou malsante, mais

modre

et

dclinante sus

le

brun, accpagne d'une gracieuseles

rougeur, qui rplissoit d'extrme conuoytise

affections des

regardans. Ses leures estoyenf plus fraches et uermeilles queroses espanyes de la matine; et chascune fois qu'elle parloit ousoubzrioit, se descouuroit portion de ses dentz tant blanches et

polyes qu'elles sembloyent perles orientales.riche taille et de unrable maintien, se

. .

Ceste pastourelle, dela

promenoit du long deles fleurs

prarie et cueilloit de safaisoyent ses yeux:

main blanche

qui plus satis-

et desia

en auoit plein son giron. Mais

aussitost que par le ieune pasteur elle entendit

nommer Ama-

rantha, son deuantier luy eschappay a bien l'pigrammeDprit:

des mains et son esprit (1,

I.

11

De Harmosyneociilos Aclius

5o)

:

Harmosynen quisquis seuauneet

vir seu faeniinn

vidit

unus

habet...

d'Harmosync Carmosina... Voy. La Relazione pel concorsu la discussion de M. Scherillo (Introd., chap. v). (il premio Tenore lelta nlV Accademia Pontaniana de B. Croce(Napoli, 1894) repousse, il est vrai, ses conclusions; de mme M. E. Bellon, De SannacariiElle n'est pas trs dcisive;d'ailleurs,

vif a et operibus, Paris, J.

Mersch, iSgS.

ELEMENTS (JONSTITUIFS DE LA PASTORALE MALIENNE.s'esmeut de sorte qu'elle perdeit presque toute contenance:

ly

dont

sans

le

sentir toutes les

Heurs luy tumbrent

et

en fut

la terre

seme d'une vingtaine de couleurs

diffrenles... Elle

se meslala

parmy

ses

compaig-nes

:

lesquelles

ayant

aussi leurs

despouill

prarie de sa dignit et icelle

applique

usages

,

s'en

alloyent marchant en grauil connue Naiades ou Xapes... Les

unes portoyent des couronnes de troesne, entrelasses de fleursiaunes et rouges:

les autres

des

liz

blancz

et

bleus attachs

quelques brchettes d'orengier. L'une blchissoit entiremt de

gensemispure

et l'autre

sembloit estelle de roses...'.fois,

Cette grce

et sensuelle

la

cette thorie

de vierges aux gestesle

lents, ces attitudes

harmonieuses, ces fleurs profusion, sur

soL sur

les

robes,

dans

les coiff"ures

arlistement tresses, onet

songe l'admirable Triomphe du Printemps,

sans doute;

il

manque peu de choseapprt et plus naf,il

cet pisode

pour

tre exquis

moins

ne

lui

manquerait

rien.

De mme encore,si

l'allgorie clbre de l'oianger devient

presque poignante:

l'on

y trouve

le

symbole de son amour

bris

Me

sembla ueoir unlequel estoit toutses fleurs et ses

bel orengier cultiu par

moy songneusement,ses feuilles,la terre.le

bris depuis la racine en amont,fruitz

malheureusement dispersez sus

Lors demandant

qui l'auoit ainsi acoustr... disoye sus

tron tant aym, ou

me

reposeray

ie

dcques?...".

Il

est

fcheux seulement que l'on en

puisse donner au moins deux interprtations diffrentes^.

En

vrit,

l'amour qui tient tant de place dans l'uvre devie.

Sannazar semble en avoir tenu beaucoup moins dans saC'est pourquoi,

peut-tre, ses peintures

manquent dese marieet

varit.

Blondes ou brunes, toutes ces hrones se ressemblentdes surs. Visages dlicats o le lys

comme,

aux roses

cheveux

en aurole

,

grands yeux ingnus

profonds, lvres

1. Trad. lehan Martin, Paris, Michel de Vascosan, i544> ? 21 et suiv. Voy., dans l'dition Scherillo, des descriptions analogues de Boccace, Filocolo, III, p. 188, Amefo, p. 28, et, dans le Ninfale Fiesolano, la premire apparition des nymphes de Diane et de Mensola aux yeux du berger Affrico.

2. Id., p. 95.3.

Crispo voit

ici

une allusion

la

pote songe aux malheurs de la maison d'Aragon,villa

mort de Carmosine; il est possible que le ou plus simplement sa

de Mergellina qu'il a d laisser l'abandon.

20

LA PASTORALE DRAMATIQUE FRANAISE.sur des dents((

carlates

de perle

)>,

el

ce sourire toujours,

sourire de candeur,

de malice ou de mlancolie; visions qui:

apparaissent dans un songe

Venuta era Madonna

al

mio

lang-uire,

et s'vanouissent

quand on tend

les

bras

:

MaChesi

dalla bianca niano

stretta teuea, sentii lasciarmi'...

C'est l'ternelle jeune

fille

des Canzonieri deles

la

Renaissancela

que chante Sannazar. Parfoiss'entr'ouvre plus sensuelle, le

cheveux sont bruns,

bouche

mme charme

imprcis demeure,:

mais

la

description s'attarde certains dtails

c'est qu'il se

sou-

vient alors de Boccace^.

Dans sonrillo

intelligente dition critique de

VArcadia^, M. Sche-

note soigneusement, avec les variantes des manuscrits et;

des ditions, les passages divers que Sannazar a pu imiters'en faut

peu

que ces notes ne tiennent autant de place quedoute,il

le

texte

mme. Sansratrait plus

y a

l

un peu d'excs. UArcadia n'appaSannazar, certes, ne trouveraitlittrale a

qu'une succession de pices rapportes, un travail:

de mosaque ou de marqueterie

pas

la

mtaphore dsobligeante. L'imitation presqueelle

grand prix pour un humaniste,meubl. Encorefaut-il

tmoigne d'un esprit bien

avouer que certaines rencontres ne prou

vent pas forcment un emprunt. Pour parler deges((

frais

ombra

,

d'((

herbes paisses

,

de

ruisseaux murmurants

ou dese

gracieuses

jeunes

filles,

Sannazar n'avait pas besoin de

reporter Boccace. Ce sont dj des lgances trop coutumires

pour1.

qu'il soit utile

de faire honneur l'un ou l'autre de420.

telle

Pices cites en appendice par Trverret,Cf. Renier, // tipo estetico dlia

liv. cit., t. I, p.

2.

i885. 11 est remarquer que, dans ses posies latines, son idal de la beaut change avec ses modles. Il faut aux latins des charmes plus matriels. Cf. Scherillo, Introd., p. lxxv, et l'pigramme Ad Ninam (I, 6). 11 serait vain

donna

nel medioevo,

Ancona, Moreili,

de chercher en cela de3.

la sincrit.i

Arcadia di Jacobo Sannazaro secondadi

manosci-itli e le

prime slainpe

cou note ed introduzione

Michle Scherillo, Torino, Loescher, 1888.

ELEMENTS CONSTITUTIFS DE LA PASTORALE ITALIENNE.pithte traditionnelle.

2

1

Tous deux puisent au trsor commun des

banalits

'.

Avec

cette rserve^ le tableau qu'a dresset

M.

Scherillo ne laisseles

pas d'tre curieux. Anciensde Tglogueet

modernes, tous

grands noms

rapprochements sont

du roman chevaleresque y figurent, et certains sing-uliers. Bien que l'honneur revienne les

Polybe d'avoir inspir toutes ces descriptions arcadiennes^,Grecs n'y tiennent pasla

premire place

:

les difficults

de leur

langue ne permettent pas encore un commerce assez familier.

Pour Thocrite, cependant, Sannazar professerite l'anctre

le

culte

que m-

du

g-enre pastoral

;

il

le

clbre plusieurs repriseset

et

admire sous son

nom

les idylles

de Bion

de Moschus-\ Avec

cela,

quelques souvenirs des romans grecs qui circulent encoreil

manuscrits^. Quant Homre,

ne

le

connat probablement5.

qu'un peu tard,en revanche, est

etle

travers des traductions latines

Virgile,

matre des matres, toujours tudi,

avec

quelles subtilits ridicules parfois*^! L'dition princeps a paru

Rome

en 1469; en 147I)le

les

Bucoliques ont t imprimes spa-

rment par

Florentin Bernardo Cennini, et Bernardo Pulci

vient de le traduire per fare experientia se l'artificiosa elegantla del

rusticano mtro in materno idioma per

modole

alcuno

si

potessi exprimerez...

A

la suite

de Virgile, c'est

chur des

le sentiment de M. Scherillo A ogni pagina Sannazaro lavorare tenendo innanzi vari modelli. Mais il prouve le besoin d'apporter un correctif, ncessaire en effet Il Sannazaro non fu imitatore volgare; scelse, addatt, mut, combina tenendo sempre alla mente il disegno del libro, il fine che s'era proposto... il disegno dell' Arcadia tutto suo . Torraca, La maferia dell' Arcadia del Sannazaro ;1.

M. Torraca partageil

:

deir Arcadia, vedremo

:

Citta di Castella, 1888.2. Liv. IV.

pape Nicolas

V

Niccol Perotti, professeur Bologne, a t charg par le de mettre en latin l'historien grec. En i452 et i453, il envoie

Rome3.

les trois

premiers livres de sa traduction;i,1.

les

deux autres suivent deMilanaise de i493,

prs. (Tiraboschi, Left. ifal., T. VI, p.

III.)

La

mme

confusion dans lesetc.

ditions

du temps

:

Aldine de i495,4.5.

Xenophon d'Ephse, Jamblique,

Achilles Tatius, etc.,s'crie-t-il

Ecce potest civem dicere(II,

Roma suum

dans une pi-

gramme6.7.

53).

Voy. Comparetti, Virgilio nel medioevo, Livorno, 1872. Prohemio a Laurentio de Medici... Edit. de 1481 et i494'

22

LA PASTORALE DRAMATIOUr; FRANAISE.

lo-iaques et des potes latins, Tibulle, Calpiirnius,

Nemesianus,

Ovide, qui Boccace dj devait tant de choses, Claudien avec

VEnlcvempnt de Prosevpine.qui fournit

Il

n'est pas jusqu' Pline l'Ancien

un prcieux contingent de superstitions populaires.modernes, l'imitationest

Pour

les

plus dir'ecte et plus conti-

nue. L'influence de Boccace est sensible chaque page. San-

nazar est pntr de ses romans

et

de ses pomes chevaleresle

ques ou pastoraux encoreC'est

si

vivants dansil

pays de Naples.de son bien.et sa

peu de dire

qu'il les imite;

en use

commeet

h'Ameto donneprose.

le cadre de YAjxvidia, sa

marche gnrale

forme, cette succession d'glogues en vers

de morceaux de

Des passagescondenss

entiers de

la

Fiammetta, du Filocolo, dulutte des

Corbaccio, du Ninfnle Fiesolano se retrouvent, allgs seule-

ments'y

et

:

la

chasse,

la

bergers beaux parSincero rappelle le

leurs, les

enchantements,Florio, ou.

les visions surtout.

mprendre;

quand

il

est

mlancolique,

languis-

sant Fileno

et parfois,

derrire ceux-ci, on entrevoit la figure

puissante de l'auteur de la Vita Niiova. Des dialogues entiers nesont qu'une transposition. Peu importe, d'ailleurs, que les per-

sonnages soient de conditiondes gaux,

diff'rente;

en amour,

il

n'est

que

et le jeune berger qui dit Charino sa douleur se

souvient, avec

un -propos merveilleux, des paroles du prince

Florio, faisant part au duc de ses tourments'. Et, den'est pas

mme,dans

il

un terme

pittoresque,

un mot

faisant

image dans

la

description arcadienne de Sannazar, qui ne

soit dj

les

premires pages de YAmeto^'.

Passe encore pour

les

paysages de convention. Que

le

Parlheil

nio lui apparaisse sous l'aspect des

montagnes d'Etrurie,

n'y a

pas grand mal. Mais pour peindreles

mme

les

rgions qu'il a sous

yeux, oil

s'est coule sa

jeunesse et qu'il aime d'un

profond,

ne peut pas se dgager de ses matres 3,

amour De son pays,admi-

Sannazar n'admire gure que cerer:

qu'il est traditionnel d'en;

de cela, en revanche,

il

n'oublie rien

il

a la sret et la

1.

2. 3.

Filocolo, 1. III. Arcadia, rcit de Sincero, septime prose. Anieto, ilescription de l'Etrurie. Arcadia, premire prose. Anieto. Stace, Silo., III, .. Arcadia, onzime prose.

Fiam-

mclfri, IV.

F/l'tcolo,

V

et

VII.

LMENTS CONSTITUTIFS DE LA PASTOUALE ITALIENNE.banalit d'un g-uide officiel.Il

23la

clbre,

aprs Boccace, avec

conviction d'un disciple fidle, la situationl'ancienne

merveilleuse

de

Parthnope,

la

plaine o

le

plaisant Sebetho en

diners canaulx discourrant travers la campaig'ne herbue, puisrunis tout ensemblepetitet

passe doulcement soubz les arches d'unla

pont

et,

sans murmure, s'en va ioindre la

mer

,

Baies

son luxe,

caverne du Pausilippe,

doulcement batue des

undes marines

la

montane de

soufre, le

grand

circuit des,le

belles murailles , les rues

pleines de belles,

dames

port

refuge uniuersel de toutes les nations

les

palais, les tem-

ples, et les tours

de

la ville

o

les

jeux

et les

tournois se succ-

dent, tandis que chantent les potes et que l'on se presse dansles coles d'loquence.

Sans doute, chez

lui,

quelque amertume

se

mle au tableau de ces splendeurs. Pour;

l'trang-er,

Sannazar

a une haine implacable

mais ses haines ne peuvent s'exprimer

que surIl

le

mode

classique.est fait

est certain

que ce procd constant

pour rduire

la

valeur littraire de VArcadia: son importance historique,

duil

moins, demeure entire. Sannazar n'est pas un pote lyrique,n'est peut-tre pas

un pote,

au

sens tymologique dul'essentiel.

mot

;

mais son >

,

comme on

a dit. Trad. franc;,

ct, avait eu l'intention, entre

i58oet i582, d'crire une favola maritima ou pescatoria . Voy. les deux sonnets cits dans la prface de l'dition Solerti, 1901, p. i35. Voy. aussi Mario Manani, Origine e svolgiinento delV egloga pescalorin ildliana,:

Nicastro, Bevilacqua, 1902.2.

Annotazioni del quarto Coro;

d. de

Vrone. lySy,

t.

I,

p.

i3S.

00

LA PASTORALE DRAMATIOUE FRANAISE.

porte Guarini que, sans aucun rapport avec son sujet, ce dbataitle

grave dfaut d'engager une action secondaire

et

surtoutinutile.

de mettre au premier plan un personnage qui demeure

On

le luiil

reprochera peut-tre, car

il

prvoit toutes les critiques,':

mais

a,

pour

se justifier,

l'exemple de Trencesi

dfaut

d'autre, cette autorit lui suffit. Et

on

leil

blmait encore d'avoirrpondrait que de lal,

suivi trop docilement son prdcesseur,

nymphevel,'

Silvia,effet,

il

a fait

le

berger Silvio. Par

tout est renou-

en

puisqu'en changeant de sexe l'hrone profondest

ment humaine du Tassede toute vrit.C'est,

devenue un personnag-e en dehors

en somme, ce qui

le

proccupe

le

moins. Silvio^ aprs

tout, n'est

pas plus

artificiel

que

le fidle Mirtillo

ou que

cette

Amarilli, trange crature incapable d'un

mot ou d'un

geste

spontans, dsireuse seulement de

ressembler aux solennelles

princesses tragiques, de vertu stoque, d'esprit docte et denul.

curde

La

pastorale a renonc ce qui faisait tout son prix. LeIl

pdantisme amoureux a repris sa place.

n'est plus question

dresser devant nous des tres construits notre image, de nous

mouvoir par leurs angoisses, de nousblesses,

faire sourire

de leurs

fai-

mais de piquer notre curiosit par des aventures tran-

ges, et d'exciter notre admiration par l'abondance des lieux

com-

muns.

Onle

s'est

exagr, parfois, l'intrt

commeles

la

porte des ides

de Guarini. Elles affectent souvent, danstexte de la pice, une rigueur

notes plus que dansfaire illu-

dogmatique qui peut

sion. Aussi fier

de son renom de philosophe que de sa gloire dede

pote,

il

aimeet la

citer les pythagoriciens et Aristote, les ptres

Snquecrce;

Somme

de saint

Thomas

;

il

se souvient de

Luloi

il

pose, plus nettement que d'autres, l'antinomie de la

naturelle et

des conventions humaines^,

et

Bayle

lui

rservera

1.

Ne mi par

di tacere, ch.e nel |)riino alto

sempre

si nolifica

1'

arjai'omento,

cio la parte, ch' necessaria.parla.

Ma

qualche volta, nella prima scena non se ne

Cosi fece Terenzio e

nell'

Eanuco,

e nell'

Ecira, pelle quali riserva

r argomento2.

nella seconda scena del1

primo Atto.et

Annofazioni dlia primaetc.

scena, ibid., p.

1.

Voy.

les notes la

scne

I,

au troisime

au quatrime chur,

LES TRANSFORMATIONS DE

L.V

PASTORALE ITALIENNE.II

5l

une place dans son Dictionnairetant,

'.

n'y a l autre chose, pour-

qu'un jeules

d'esprit.

A

vrai dire, les ides philosophiques,lui

comme

simples descriptions, ne sont pour

qu'une matireil

tirades brillantes.

D'une verve lyrique inpuisable,facilit:

est

la

premire dupe de sa

il

se laisse entranerles ides.

par

elle

sans

chercher au del. Les mots emportent

Ce qui constitueune succession

une scne, ce

n'est plus

une progression de sentiments; ce n'estc'est

pas davantage une dmonstration logique,

de morceaux distincts, pour lesquels, indiffremment, tout estbon. Lincosurla

et Silvio dissertent,

au premier acte, sur

la

chasse,

jeunesse, sur l'universalit de l'amour, sur les faiblesseset

d'Hercule; Amarilliture et de laloi,

Gorisca parleront, au second, de la nale

en attendant que Mirtillo ouvre

troisime paret le

un hymne au printemps. Les monologues ont tout envahi,dialogue estfait

de monologuesles plus

alterns. Pasil

une minute,nesait

mme

dans

les

situations

imprvues,

tre vivant.

Jets dans les bras l'un de l'autre, les

amants ne songent qu'

reprendre unechers:

fois

de plus

les

dveloppements qui leur sont

quatre-vingts vers de l'un rpondent quatre-vingts verset la

de l'autre,nieuses:

scne s'achve par une srie d'antithses ing-

Arm

de

la vertu,

on peut tout entreprendre.

La

vertu ne peut vaincre o l'amour est vainqueur...

Ncessit

d'amour ne connat pas depeut dtruire l'amour'...

loi...

Le temps qui dtruit tout:

J'en passe

comme

sincrit, la pas-

1.

De mme

Canello, historien systmatique et philosoplie, dsireux de ra-

menercheil

toute la littrature

du seizime

sicle italien :

quelques ides matresil

ses, est

heureux de

les signaler

chez Guarini

E

quai

concetto spciale

~]

Guarini ha voluto incarnare in questo elaboratissimo dramma? Noi crediamo che in esso meglio che in nessun' altra opra teatrale, si rispecchinochiarele

condizione e li ideali dlia vita privata Italiana versoIl

la fine del cin-

quecento...

g-ran merito di questoe

drammail

consisteil

nell'

avre coragiosadlia lotta tra la

mente affrontatolegge eAmarillitillo...

con serena sapienza risoltoil

problema

la,

natura, tra

gius positivo esec.

naturale, che appunto

tormenta-i

designata in isposa per legge a Silvio e per affetto di natura a Mir-

(Storia dliala lettre.

lett. Ital. nel.

XVI,

\).

224-45). C'est prendre les

choses bien

Le chur de:

l'ge d'or deviendrait alors le centre et

comme

l'me de l'uvre Canello n'hsite pas le proclamer; mais les aveux de Guarini lui-mme ne nous permettent gure d'y chercher l'expression de convictions profondes et mries.2.III,

3.

Trad. de Torches.

52

LA PASTORALE DRAMATIQUE FRANAISE.

torale n'a plus rien envierclassique.

aux premiers

essais de la tiag-die

Naturellement aussi,

elle

imite ses complications d'intrigue.il

Vide de sa substance propre,trangers.

lui faut

emprunter des lmentssuffirait plus:

La matire

toute simple de

VAminta ne

sans profondeur, l'uvre doit s'tendre en surface; aprs

les huit

personnages du Tasse, on en compte dix-huit danstreize

le

Pastorde

et

dans

la Filli.

Le mouvement donnera

l'illusion

la vie,

l'action, tout

en demeurant action pastorale, deviendra une action

tragique.

Guarini n'a pas vu

le

danger de ce progrs,

et qu'il tait

plutt un recul. Les hros den'tre

VAminta

avaient cet avantage dela plus large

que des cratures humaines dans l'acception

du mot, dpouilles de tout ce qui

est individuel et particulier,

des tres hbres de toute attache, de toute obligation, de toutprjug, chez lesquels rien ne mettait obstacle au jeu desion,la

pas-

parlui^

consquent d'admirables sujets d'tudes. Guarini

se proccupe de prciser et d'lever leur condition.

Tous

sont,

avecles

de

nobles bergers

,

issus de race divine, ayant entre

mains

les destines

d'un peuple, avec des devoirs remplir,

une dignit conserver'.L'Arcadie

elle-mme n'est plus cel'aise.

monde chimrique olointaine,

la

posie se jouait la religion

C'est

une terre

mais

relle;les

s'y fait

tyrannique; l'amour doit y plier devant;

convenances sociales

des ennemis menacent ses frontii'es

:

c'est

un de

ces

royaumes ole

se droulent les aventures de la tragdie.

Guarini est biena raison dele

crateur de lail

tragi-comdie pastoralefier.

,

il

proclamer,et

a tort

seulement d'en treil

A

un

monde monde

potiquefaux.

vrai sous ses conventions,

a substitu unet les

Le romanesque dpossd retrouve son empire

plus adroites complications ne feront pas oublier la vrit perdue.

I

.

Le dcor aussi

doit

associer la richesse et la simplicit.i

A

scena train tutti

gico pastorale non disconvengono ni

marmi n

le

colonne,

ma non

luoghi. Le case de' pastori quantunque grandi

non soni

alte a ricevere archi-

tettura, n prospettiva, o ordine citladino.e di colonne, e di

Ma

tenipli

saranno ben capaci,270.

marmi,

di scullure e di altri

grandi e ragguardevoli adorIII,

namenti...

Replica

deW

Alticzato..., dit. Vron,

LES TRANSFORMATIONS DE LA PASTORALE ITALIENNE.

53

Tout

est fait

cependant pour retenir

l'attention. Simultanes,

plusieurs actions s'enchevtrent, et l'argument, en tte de l'uvre, n'est pas inutile. Rduits sacrifierfille

chaque anne une jeune

Diane, les habitants de l'Arcadie ne seront libressatisfait

du

tribut

que lorsque sera

un oracle, obscur comme

il

convient:

Vous ne verrez jamais la fin de vos malheurs, Que l'amour n'ait uni deux curs Qui descendent tous deux d'une race immortelle.Et qu'un bergerfidle et

gnreux

N'ait rpar l'honneur d'une

femme

infidle

Par

la

noble ardeur de ses feux'...

La

belle et noble Amarilli,

souponne

tort d'avoir viol sa foi,

est la victime dsigne;

l'humble berger Mirtillo, qui l'aime sanselle,

espoir,

s'offrele

mourir pourfait

quand une reconnaissanceissu de raceil

opportune

dcouvrir

fils

du grand-prtre;

immortelle, amant dont la

fidlit a

donn

ses

preuves,

peut

pouser

la

nymphe

:

les

dieux n'en demandent pas davantage;voici

et voil dj

une premire aventure. Enet

une seconde, o serepousse

combinent des souvenirs du Cefaloavances

de VAminta: Silvio, destinil

jadis pouser Amarilli, a horreur de l'amour;les plus

les

nettes de Dorinda, jusqu'au jour o,

l'ayant

comme Mirtillo, de son ct, est aim de la jalouse Corisca, nymphe aux charmes trop mrs et la beaut frelate, et comme Corisca, enfin, estblesse la chasse, ses

yeux s'ouvrent

enfin. Et

poursuivie par un satyre et paret

le

berger Coridone, une troisimecelles-ci, se

une quatrime intrigues, comiques

juxtaposent auxlier les parties

deux premires. L'auteur a bien quelque peine d'une ac